XVIIe législature
Session ordinaire de 2024-2025

Deuxième séance du lundi 19 mai 2025

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Deuxième séance du lundi 19 mai 2025
Avertissement: version provisoire établie à 12:05

Présidence de Mme Yaël Braun-Pivet

Mme la présidente

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    La séance est ouverte.

    (La séance est ouverte à quinze heures.)

    1. Droit à l’aide à mourir

    Suite de la discussion d’une proposition de loi

    Mme la présidente

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    L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la proposition de loi relative au droit à l’aide à mourir (nos 1100, 1364).

    Discussion des articles (suite)

    Mme la présidente

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    Ce matin, l’Assemblée a poursuivi la discussion des articles de la proposition de loi, s’arrêtant à l’amendement no 1365 à l’article 4.

    Article 4 (suite)

    Mme la présidente

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    L’amendement no 1365 n’est pas défendu.
    Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 131, 392, 1282, 2616, 21, 132, 293, 391, 1264, 1320, 1368 et 2369, pouvant être soumis à une discussion commune.
    Les amendements nos 131, 392, 1282 et 2616 sont identiques, de même que les amendements nos 21, 132, 293, 391, 1264, 1320, 1368 et 2369.
    L’amendement no 131 de M. Corentin Le Fur est défendu.
    La parole est à Mme Justine Gruet, pour soutenir l’amendement no 392.

    Mme Justine Gruet

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    J’ai été troublée quand vous avez indiqué, monsieur le rapporteur général –⁠ c’était lors de votre dernière prise de parole ce matin –, que nous devrions veiller, dans notre discussion des conditions d’accès à l’aide à mourir, à ne pas nuire à « l’équilibre » du texte. J’espère que cette recherche d’équilibre n’a pas pour seul but de trouver une majorité : s’agissant d’un texte qui engagera notre société pour des décennies, seules des considérations éthiques doivent nous guider.
    Or je ne crois pas acceptable, de ce point de vue, que les personnes qui auront à mettre en œuvre les dispositions prévues par ce texte aient également à en apprécier les critères. L’esprit du texte, dans ces conditions, ne pourra pas être respecté.
    Notre divergence éthique est ici : je crois que seules les personnes qui vont mourir doivent pouvoir recourir à l’aide active à mourir –⁠ pas les personnes qui veulent mourir.

    Mme la présidente

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    Je vous informe que sur les amendements no 131 et identiques, je suis saisie par les groupes Droite républicaine et Rassemblement national d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Hervé de Lépinau, pour soutenir l’amendement no 1282.

    M. Hervé de Lépinau

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    Il est nécessaire de rendre plus restrictives les conditions d’accès au suicide assisté et à l’euthanasie. Nous voyons comment, dans les pays européens qui les pratiquent depuis de nombreuses années, elles deviennent de plus en plus souples. Les statistiques parlent d’elles-mêmes : au Québec, l’euthanasie et le suicide assisté représentent, chaque année, près de 8 % des décès.
    La notion de douleur réfractaire a par ailleurs totalement disparu de l’article 4 à l’issue des travaux de la commission. Les promoteurs de ce texte n’ont eu de cesse de nous rappeler que cette douleur réfractaire –⁠ une douleur que la pharmacopée n’est plus en mesure d’atténuer – est le principal critère ouvrant droit à l’aide active à mourir. Pourtant, s’il est question d’affection grave et incurable, la référence à la douleur a disparu.

    Mme Brigitte Liso, rapporteure de la commission des affaires sociales et M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    Mais non : c’est à l’alinéa 8 !

    M. Hervé de Lépinau

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    Peut-être, mais c’est de l’objet de l’amendement que je parle ! Nous voyons bien comment une volonté d’élargissement des critères est à l’œuvre, élargissement auquel tendront sans aucun doute encore les textes à venir.
    Il nous semble donc nécessaire de remplacer « en phase avancée ou terminale » par « à court terme », écartant ainsi toute ambiguïté : ce sera bien la fin de vie dont il sera question. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Juvin, pour soutenir l’amendement no 2616.

    M. Philippe Juvin

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    Parmi les conditions que devra remplir une personne pour pouvoir accéder l’aide à mourir, le texte prévoit, dans sa rédaction actuelle, qu’elle devra être atteinte d’une maladie « en phase avancée ou terminale ».
    Je voudrais montrer, de nouveau, pourquoi ces termes ne sont pas adaptés à ce dont nous souhaitons réellement parler, à savoir de maladies en ultime recours –⁠ de la fin de la vie.
    On nous a expliqué qu’« avancée » signifiait « irréversible ». Toutefois, « irréversible » étant un synonyme d’« incurable », cela ne nous avance pas beaucoup par rapport à la condition, précédemment énoncée à l’alinéa 7 de l’article, que la personne doit être « atteinte d’une affection grave et incurable ».
    Je voudrais insister sur ce que signifie « phase terminale ». C’est d’une affection que nous parlons. Une personne atteinte d’une affection en phase terminale peut pourtant avoir encore plusieurs années à vivre. Je prends souvent l’exemple de l’insuffisance rénale terminale, qui peut vous laisser encore vingt ans.
    Si l’adjectif « terminale », dans le texte, s’appliquait à la vie, il ferait en effet référence à la fin de la vie et à une situation d’ultime recours. Mais il s’applique à une affection, et on peut vivre un certain temps –⁠ plusieurs dizaines d’années éventuellement – quand on est atteint d’une affection en phase terminale.
    C’est pourquoi mon amendement tend à remplacer « en phase avancée ou terminale » par « à court terme ». Cette expression a le mérite de renvoyer à une durée, pour imprécise qu’elle soit.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement no 21 sur lequel, ainsi que sur les amendements identiques, je suis saisie par les groupes Droite républicaine et Rassemblement national d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

    M. Patrick Hetzel

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    Il tend à supprimer du texte de l’article 4 la référence à la « phase avancée » de la maladie. La Haute Autorité de santé (HAS), saisie par Mme la ministre de la santé, éclaire dans son avis du 6 mai 2025 les notions de pronostic vital engagé « à moyen terme » et de « phase avancée » de la maladie. Elle affirme que la notion de phase avancée ne peut pas être réduite à « une donnée purement temporelle » et ne « renvoie pas à l’échéance du décès » mais à une évolution progressive de la maladie affectant la qualité de vie.
    L’objectif de tout législateur est de s’assurer de la clarté de la loi et de la sécurité juridique. Je vous propose donc, par cet amendement, de ne retenir que la notion de « phase terminale », afin que nous en restions à des critères suffisamment bien définis, évitant par là que les professionnels de santé ne rencontrent des difficultés dans l’application de la loi.

    Mme la présidente

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    L’amendement no 132 de M. Corentin Le Fur est défendu.
    La parole est à Mme Marine Hamelet, pour soutenir l’amendement no 293.

    Mme Marine Hamelet

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    Je pense, comme mes collègues, que la notion de « phase avancée » est bien trop subjective et bien trop floue. Elle risquerait de mettre nos soignants, une fois de plus, dans l’embarras. Nous n’avons pas assez parlé des soignants.

    Mme Marie-Noëlle Battistel

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    Ce sont les patients qui sont au centre de ce débat !

    Mme Marine Hamelet

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    Quand, dans quinze jours, nos travaux prendront fin avec le vote de la loi, ce sont les soignants qui se retrouveront face aux malades et qui auront à assumer le fruit de notre décision. Si nous les chargeons de responsabilités trop lourdes à porter, nous risquons de dégoûter beaucoup de médecins de leur pratique –⁠ quand nous savons déjà qu’environ 34 % des soignants déclarent vouloir arrêter d’exercer si cette loi était votée.

    Mme Marie-Noëlle Battistel

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    Ils pourront invoquer la clause de conscience !

    Mme Marine Hamelet

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    On a en outre pu constater, dans les pays qui nous ont précédés dans cette voie comme la Suisse et la Belgique, que les conditions d’accès à l’aide à mourir se sont automatiquement allégées avec le temps. Il serait donc très grave que nous votions un texte dans lequel ces conditions seraient, dès le départ, excessivement souples.
    Cet amendement vise donc à durcir les conditions d’accès à l’aide à mourir. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Justine Gruet, pour soutenir l’amendement no 391.

    Mme Justine Gruet

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    Je propose également de supprimer « avancée » de la caractérisation de la phase de la maladie, la notion de « phase terminale » me semblant déjà plus acceptable, d’un point de vue éthique –⁠ on peut penser qu’elle renvoie à une période de quelques jours ou de quelques semaines. Elle tendra aussi à mettre moins en difficulté le soignant, le patient et l’alliance thérapeutique qui les lie. Vous la trouverez également peut-être moins réductrice que la notion de « court terme » que j’avais proposée dans mon amendement précédent.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Christophe Bentz, pour soutenir l’amendement no 1264.

    M. Christophe Bentz

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    De tous les critères conditionnant l’accès à l’aide à mourir, celui dont nous débattons en ce moment est le plus important et le plus grave –⁠ c’est également le plus dangereux.
    Loin d’être un garde-fou, ce critère est plutôt un anti-garde-fou ! La notion de « phase avancée » est des plus larges et des plus floues. Les soignants ne sont eux-mêmes pas capables de décider à quoi elle correspond. Nous devons donc supprimer du texte la notion de « phase avancée », pour en rester à celle de « phase terminale », laquelle correspond, peu ou prou, à l’idée de court terme.
    Si nous maintenons les termes « phase avancée », le texte sera très permissif.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Gérault Verny, pour soutenir l’amendement no 1320.

    M. Gérault Verny

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    Lorsqu’une loi touche à la vie ou à la mort, elle doit être d’une clarté absolue. Or la notion de « phase avancée » d’une maladie grave et incurable est trop floue, et trop soumise à l’interprétation clinique, pour encadrer un dispositif aussi radical que l’aide à mourir.
    En pratique, quelle différence fait-on entre une phase avancée et une phase terminale ? En réalité, cette distinction est médicalement incertaine et juridiquement dangereuse : elle élargit considérablement le champ des personnes potentiellement éligibles, y compris celles atteintes de maladies chroniques évolutives, mais ayant parfois encore plusieurs années d’espérance de vie.
    Ce n’est pas l’intention du législateur, et ce n’est pas ce que le débat public attend. L’objectif du texte est de répondre aux souffrances réfractaires, en toute fin de vie, lorsque la mort est imminente, inéluctable et que la médecine ne peut plus rien soulager.
    En supprimant cette notion imprécise, nous pouvons éviter un glissement vers une logique de facilité ou de résignation face à des maladies lourdes mais stabilisées. L’aide à mourir ne doit jamais devenir une solution anticipée à la fragilité humaine. C’est une ligne de prudence que nous devons affirmer, et c’est précisément ce que vise cet amendement.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Alexandre Allegret-Pilot, pour soutenir l’amendement no 1368.

    M. Alexandre Allegret-Pilot

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    La définition de cette phase avancée constitue un enjeu puisque la Haute Autorité de santé elle-même a été contrainte de créer des groupes de travail afin de préciser cette notion.

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    C’est sa méthode de travail !

    M. Alexandre Allegret-Pilot

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    Il est donc préférable de s’en tenir à la notion de « phase terminale » ou de revenir à la proposition de M. Juvin, qui a le mérite de fixer un cadre temporel clair.
    Évoquer la phase avancée rend le texte très permissif et ouvre donc très largement les portes à l’euthanasie et au suicide assisté. Assumez-le !

    Mme la présidente

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    L’amendement no 2369 de M. François Gernigon est défendu.
    La parole est à Mme Brigitte Liso, rapporteure de la commission des affaires sociales, pour donner l’avis de la commission.

    Mme Brigitte Liso, rapporteure de la commission des affaires sociales

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    Dans cette longue discussion commune, on voit revenir deux propositions –⁠ restreindre le dispositif aux patients dont le pronostic vital est engagé à court terme ou supprimer la notion de phase avancée.
    La première option –⁠ le court terme – n’a jamais été envisagée dans le projet de loi de l’année dernière ni dans la proposition de loi dont nous débattons.
    S’agissant de la suppression de la notion de phase avancée, seconde option, la ministre va nous présenter un amendement de précision –⁠ auquel nous sommes favorables. C’est pourquoi j’émets un avis défavorable sur tous les amendements.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles, pour donner l’avis du gouvernement.

    Mme Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles

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    Mme Hamelet a souligné l’importance du rôle des soignants : tout le monde ici reconnaît évidemment leur rôle, et ce texte ne le remet en aucun cas en cause. Il prend simplement en compte une réalité : malgré leur expertise et leur expérience, les soignants se retrouvent parfois dans une situation où ils ne peuvent plus répondre aux besoins des patients atteints de certaines pathologies.
    Par ailleurs, permettez-moi de préciser aux personnes qui nous écoutent –⁠ certaines avec beaucoup d’attentes, d’autres avec la volonté que ce texte ne soit pas adopté – que, quelle que soit l’issue de cette première lecture, les débats sont loin d’être terminés puisqu’entre le Sénat et l’Assemblée nationale, il y aura quatre lectures au total.
    Enfin, sur le fond des amendements, l’article 4 présente une série de critères cumulatifs et qui, surtout, s’articulent entre eux. L’alinéa 7 doit donc être lu à la lumière des alinéas 5 à 9. Le collège, qui décidera de l’éligibilité ou non du patient, l’analysera en tenant compte de l’ensemble de ces alinéas. Enfin, l’alinéa 9 est très clair : le patient est au cœur du dispositif, puisqu’il formule la demande et prend donc la décision.
    Pour finir, monsieur de Lépinau, la notion de souffrance réfractaire est toujours présente à l’alinéa 8, comme c’était le cas dans le projet de loi présenté par le gouvernement l’année dernière.
    C’est pourquoi je suis défavorable à l’ensemble de ces amendements, d’autant que, dans quelques instants, j’aurais l’honneur de vous proposer une nouvelle rédaction de l’alinéa 7.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Stéphane Delautrette, rapporteur de la commission des affaires sociales.

    M. Stéphane Delautrette, rapporteur de la commission des affaires sociales

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    Nous avons entendu plusieurs arguments. Certains d’entre vous évoquent l’éthique : mais en quoi serait-il contraire à l’éthique de permettre à des patients accablés par la souffrance de recourir à l’aide à mourir ? J’aimerais qu’on me l’explique.
    D’autres craignent un élargissement du dispositif avec le temps, comme cela s’est produit dans d’autres pays. Bien sûr, ce que la loi construit, une autre loi peut le déconstruire. Il est impossible de garantir qu’à l’avenir, d’autres collègues n’auront pas une approche différente sur cette question. C’est le principe même de la démocratie.
    D’autres, enfin, affirment que les souffrances réfractaires auraient disparu des critères. Or l’alinéa 8 dispose toujours que le patient doit présenter une souffrance physique ou psychologique liée à cette affection, qui est soit réfractaire aux traitements, soit insupportable pour lui. (M. Charles Sitzenstuhl s’exclame.)
    La Haute Autorité de santé elle-même précise que seul le patient est capable de dire ce qui lui est insupportable. (M. Alexandre Allegret-Pilot s’exclame.)

    Mme Marie-Noëlle Battistel

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    Voilà !

    M. Stéphane Delautrette, rapporteur

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    Enfin, j’ai entendu qu’il s’agirait d’un dispositif permissif. Mais ses limites sont pourtant claires : le patient doit être atteint d’une affection qui engage le pronostic vital, en phase avancée. Il s’agit donc d’un processus irréversible. Aucun des pays européens ayant légalisé l’aide à mourir n’a adopté des critères aussi stricts. Tous ces éléments me semblent suffisants pour repousser tous les amendements en discussion commune. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. –⁠ Mme Eva Sas applaudit aussi.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Charles Sitzenstuhl.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Je suis désolé de le dire aussi brutalement, mais ce que vient de dire notre collègue n’est pas vrai : ce texte n’est pas le plus restrictif en Europe. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN, DR et UDR et sur quelques bancs du groupe EPR. –⁠ M. Yannick Monnet applaudit également. –⁠ Mme Marie-Noëlle Battistel s’exclame.)

    M. Stéphane Delautrette

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    Mais si !

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Samedi, lors d’un échange avec la ministre, je me suis appuyé sur des documents publics montrant que, par exemple, la législation en Autriche est nettement plus stricte que celle qui résulterait de ce texte. Il faut donc cesser de répéter des contre-vérités et appuyer vos argumentations sur des faits solides.
    Je soutiens pleinement ces amendements car je considère que la notion de « phase avancée » est extrêmement floue, ouvrant la porte à des interprétations subjectives qui pourraient entraîner des dérives et des abus.
    La formulation de l’alinéa 7 trouve son origine dans la loi Claeys-Leonetti de 2016. Mais cette loi est très peu appliquée, et méconnue ! (Mme Marie-Noëlle Battistel et M. Stéphane Delautrette s’exclament.)
    Alors pourquoi une nouvelle loi ? C’est la question, d’autant que les médecins spécialistes des soins palliatifs affirment que la grande majorité des cas peuvent être pris en charge avec la législation actuelle.

    Mme Marie-Noëlle Battistel

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    Et les autres ?

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Le problème, je le répète, c’est que la loi n’est ni appliquée, ni suffisamment connue.
    Enfin, monsieur Delautrette, vous affirmez que la notion de souffrance réfractaire est toujours présente. Certes, mais elle devient alternative –⁠ et cela, vous ne le précisez pas !

    M. Stéphane Delautrette

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    Oui.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    La loi Claeys-Leonetti dispose que le médecin met en place l’ensemble des traitements analgésiques et sédatifs pour répondre à la souffrance réfractaire du malade en phase avancée ou terminale, même s’ils peuvent avoir comme effet d’abréger la vie. Les conditions sont donc strictes.
    Or, à l’alinéa 8, votre texte introduit une alternative : soit la souffrance est réfractaire au traitement, soit elle est jugée insupportable par le malade. C’est donc plus souple, et plus large, que les dispositions de la loi Claeys-Leonetti. (Applaudissements sur les bancs des groupes DR et UDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Sandrine Rousseau.

    Mme Sandrine Rousseau

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    Parmi les raisons qui nous ont conduits à nous réunir aujourd’hui, parmi les sources d’inspiration de cette proposition de loi se trouvent les témoignages poignants et puissants des personnes atteintes de la maladie de Charcot.

    M. Patrick Hetzel

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    Arrêtez d’essentialiser !

    Mme Sandrine Rousseau

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    Lorsqu’ils ont eu accès aux médias ou à des tribunes publiques, nombreux sont ceux qui ont exprimé la souffrance qu’ils enduraient bien avant la phase terminale.
    Qu’ils s’appellent Résibois, Bert, Bouchet ou Muller, beaucoup nous ont confié leur choix de se rendre en Belgique ou en Suisse, faute de solution en France pour soulager leur souffrance. Supprimer le mot « avancée » reviendrait à priver ces malades de l’accès à l’aide à mourir, alors qu’ils ne supportent plus leurs souffrances. À quoi servons-nous si nous excluons du droit que nous voulons créer les personnes les plus exposées, celles qui en auront peut-être le plus besoin ?
    Nous avons longuement débattu en commission des affaires sociales des termes « phase avancée » et « phase terminale ». Tous deux ont leur importance et permettent de couvrir un nombre de cas certes plus large, mais correspondant à de réels besoins. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe EcoS et sur les bancs du groupe SOC.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Joëlle Mélin.

    Mme Joëlle Mélin

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    Une fois de plus, il faut recentrer le débat : comment une commission collégiale ad hoc peut-elle autoriser une dérogation au code pénal lorsqu’on ne se situe pas dans le cadre strict de la loi Claeys-Leonetti –⁠ la vie s’échappe à court terme, voire très court terme, ce que tous les soignants et toutes les familles ont vécu ?
    Lorsqu’il s’agit d’une pathologie très sévère, désocialisante et très douloureuse, mais dont le pronostic vital reste indéterminé parce que la vie résiste, le cas de conscience est alors particulièrement délicat : dans ce cas, abréger la vie implique un acte létal prémédité, réalisé avec l’intervention d’un tiers –⁠ soignant – pour la délivrance ou l’administration du produit.
    Le mot « avancée » n’a pas sa place dans ce texte. Bien sûr, les douleurs peuvent parfois être insoutenables et il y a une urgence à progresser dans les solutions thérapeutiques. Nous devons envisager sérieusement, pourquoi pas, l’usage du cannabis médical, qui semble efficace dans de nombreux cas. De même, les sédations profondes et temporaires ont déjà prouvé leur efficacité.
    En outre, ces mesures doivent être réservées aux cas réfractaires au plan neurophysiologique, et non psychologique, afin de ne pas fragiliser l’ensemble des dispositifs de prévention du suicide. Il est donc essentiel de mener une réflexion approfondie et de supprimer la notion de phase avancée. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RN et UDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Juvin.

    M. Philippe Juvin

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    Madame la rapporteure, vous indiquez que nous répétons toujours les mêmes arguments. Eh bien, je vais encore les répéter, car je n’ai pas l’impression d’avoir obtenu une réponse. Je vais me focaliser sur l’alinéa 7, puisque c’est l’objet de nos discussions. En outre, quand le patient remplit les critères exposés aux autres alinéas, l’alinéa 7 devient déterminant.
    Prenons trois exemples : un malade souffrant d’un cancer avec métastases –⁠ c’est une maladie grave, incurable, qui engage le pronostic vital et c’est un stade avancé de la maladie ; une infection au HIV avec des infections opportunistes –⁠ c’est grave, incurable, cela engage le pronostic vital et c’est un stade avancé de la maladie ; une insuffisance rénale dialysée –⁠ c’est grave, c’est incurable, cela engage le pronostic vital et c’est une phase terminale de la maladie. (M. Michel Lauzzana s’exclame.)

    Mme Nicole Dubré-Chirat

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    Mais il y a des traitements !

    M. Philippe Juvin

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    Ces trois nouveaux exemples montrent que nous allons inclure dans ce dispositif –⁠ et je le regrette – des patients qui ont encore plusieurs années à vivre. Je vous demande de l’entendre : on parle, j’y insiste, de plusieurs années restant à vivre.
    Ce peut être une volonté –⁠ je l’entends – mais, dans ce cas, il ne faut pas dire que c’est l’ultime recours, et chacun doit en avoir conscience. (Applaudissements sur les bancs des groupes DR, RN et UDR ainsi que sur quelques bancs du groupe EPR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Vigier.

    M. Philippe Vigier

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    Nous avons déjà débattu des notions de court et de moyen termes. Rappelons que Mme la ministre a saisi la Haute Autorité de santé pour nous éclairer et que celle-ci a estimé que les temporalités différaient selon les patients. C’est ainsi en médecine : des patients qui souffrent de la même pathologie peuvent mourir à des moments très différents, l’un en quelques jours, un autre au bout de deux mois, un autre au bout de six mois. Voilà la raison pour laquelle les notions de court et de moyen termes ont été supprimées au profit d’une « affection grave et incurable […] en phase avancée ou terminale ».
    S’agissant de la définition de la phase avancée, les médecins s’accordent sur le fait qu’elle marque l’entrée dans un processus devenu irréversible. Il peut rester encore quelques mois d’espérance de vie au patient, ou même un peu plus, mais c’est une phase d’accélération de la maladie qui représente une rupture dans son évolution.
    Quelqu’un a dit tout à l’heure qu’on ne parlait plus de douleur dans le texte : non, en effet, on parle de souffrance, mais ces mots ont la même définition. Quel que soit le terme utilisé, le sens est identique.
    Enfin, monsieur Sitzenstuhl, il ne faut pas confondre la loi Claeys-Leonetti et cette proposition de loi sur l’aide à mourir. Dans la première, les patients sont-ils conscients quand on déclenche la sédation profonde et continue ? La réponse est non. Ils n’ont pas manifesté de consentement libre et éclairé car ils sont semi-comateux. (Mme Karen Erodi et M. René Pilato applaudissent.)
    Si seulement 50 % de patients bénéficient de la loi Claeys-Leonetti, nous ne devons nous en prendre qu’à nous-mêmes. Qu’avons-nous fait pendant toutes ces années ? Il fallait plus de moyens pour appliquer la loi.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Camille Galliard-Minier.

    Mme Camille Galliard-Minier

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    Beaucoup de choses ont été dites sur les critères de l’aide à mourir, et beaucoup de choses fausses. Ainsi, il n’est pas vrai que la proposition de loi ne prend pas en considération la souffrance des malades. D’autres l’ont rappelé avant moi, cette notion est évidemment présente dans le texte, mais certains ont tendance à oublier tous les autres critères lorsqu’ils en évoquent un en particulier.
    Certains ont dit aussi que ces critères étaient subjectifs et soumis à l’appréciation du médecin. Évidemment ! Faisons confiance aux médecins pour décider, à l’issue de leurs échanges avec les patients, si toutes les conditions sont réunies pour qu’ils puissent accéder à l’aide à mourir. Le patient conserve de toute façon la décision finale puisqu’il doit être en pleine capacité de discernement.
    S’agissant du caractère plus ou moins restrictif du texte, je veux dire que nous ne sommes pas en compétition avec les autres pays. Nous cherchons tous ensemble à établir des critères d’accès à un droit qui soient les plus justes et les plus clairs possible et que le texte s’applique demain dans les meilleures conditions.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. René Pilato.

    M. René Pilato

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    Dans la continuité de ce qui vient d’être dit et pour répondre à M. Sitzenstuhl, je voudrais vous citer les critères d’éligibilité appliqués en Autriche : « être atteint d’une maladie incurable entraînant la mort ou souffrir d’une maladie grave et de longue durée avec des symptômes persistants, être affecté durablement par les conséquences de la maladie dans l’ensemble de son mode de vie, être dans un état de souffrance inapaisable du fait de la maladie ». Je suis désolé, cher collègue, mais nos critères sont bien plus restrictifs. (M. Charles Sitzenstuhl s’exclame.)
    Quant aux personnes qui parlent d’éthique, je veux leur dire que cela n’a aucun sens car chacun d’entre nous a une éthique différente. (« Non ! » sur les bancs des groupes RN et UDR.) Mais si ! Apprenez à lire ! (Protestations sur les bancs des groupes RN et UDR.) Pour certains d’entre nous, l’éthique émane d’un manuel religieux ; pour d’autres, de la loi laïque. Nous n’avons pas la même éthique : utiliser ce terme n’a donc aucun sens. (Exclamations sur les bancs des groupes RN et UDR. –⁠ Mme Annie Vidal s’exclame également.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 131, 392, 1282 et 2616.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        155
            Nombre de suffrages exprimés                153
            Majorité absolue                        77
                    Pour l’adoption                67
                    Contre                86

    (Les amendements identiques nos 131, 392, 1282 et 2616 ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 21, 132, 293, 391, 1264, 1320, 1368 et 2369.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        156
            Nombre de suffrages exprimés                154
            Majorité absolue                        78
                    Pour l’adoption                67
                    Contre                87

    (Les amendements identiques nos 21, 132, 293, 391, 1264, 1320, 1368 et 2369 ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 2676 et 2691, qui font l’objet de quatre sous-amendements.
    La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement no 2676 du gouvernement.

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Les travaux de la Haute Autorité de santé ont été mentionnés il y a quelques instants. Je rappelle qu’ils s’appuient sur la méthode « Recommandations pour la pratique clinique » et que pour chacune de ses recommandations, la Haute Autorité constitue un groupe de travail composé d’experts, de professionnels de santé et de représentants d’associations d’usagers. La HAS réunit des groupes capables d’apporter des éclairages sur les thèmes sur lesquels elle est appelée à se prononcer. Après les débats de l’année dernière, le gouvernement l’a saisie sur les notions de court et moyen termes, dont nous discutons depuis ce matin. Nous avions des difficultés, en particulier, à définir le moyen terme.
    Avec cet amendement, nous vous proposons d’ajouter à l’article 4 une définition de la phase avancée émanant de la Haute Autorité de santé. Celle-ci a souligné l’impossibilité de borner le pronostic vital dans le temps et nous a invités à nous appuyer sur les repères cliniques qu’elle propose pour identifier les caractéristiques d’une maladie grave et incurable à un stade avancé. Ces repères constituent un socle objectif à partir duquel il est possible d’encadrer la notion de phase avancée. Le collège médical pourra évaluer la situation de santé du patient sur ce fondement.

    Mme la présidente

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    L’amendement no 2691 de Mme Agnès Firmin Le Bodo est défendu.
    La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille, pour soutenir le sous-amendement no 2696.

    M. Cyrille Isaac-Sibille

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    Je remercie le gouvernement de cet amendement de précision. Depuis ce matin, nous le voyons bien, nous n’arrivons pas à définir les termes et à établir à quelles personnes l’aide à mourir est réellement destinée. Ce sous-amendement vise à préciser le texte en indiquant que le « processus irréversible » dans lequel la personne malade est entrée est un « processus irréversible de fin de vie ».

    M. Patrick Hetzel

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    Très bien !

    M. Cyrille Isaac-Sibille

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    Il est intéressant et surprenant de noter que, dans ce texte sur la fin de vie, les mots « fin de vie » n’apparaissent jamais ! Je suis d’accord avec vous, madame la ministre, il convient de préciser l’alinéa 7, mais en faisant également apparaître les mots « fin de vie ».

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Charles Sitzenstuhl, pour soutenir le sous-amendement no 2678.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Toujours dans la même logique, il vise à mieux encadrer le droit à l’aide à mourir. Je considère l’amendement du gouvernement comme un amendement de mise en scène. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDR.) D’après la HAS, c’est la notion de phase avancée qui est problématique. Vous avez certes lu ce matin la définition qu’elle en a donnée, madame la ministre, ce dont je vous sais gré, mais c’est la notion elle-même qu’elle considère problématique, pas la définition. Je ne suis donc pas très à l’aise avec l’amendement du gouvernement.
    Je veux également répondre à M. Vigier sur la loi Claeys-Leonetti, dont l’article 3 commence par ces mots : « À la demande du patient d’éviter toute souffrance et de ne pas subir d’obstination déraisonnable, une sédation profonde et continue provoquant une altération de la conscience maintenue jusqu’au décès […]. » Vous avez parlé d’un état semi-comateux, mais, sauf erreur de ma part, la demande de sédation est faite en conscience par le patient.
    Enfin, monsieur Pilato, vous n’êtes pas complet quand vous citez la loi autrichienne. Elle ne concerne que le suicide assisté, et pas l’euthanasie. Deux médecins, dont un en soins palliatifs, sont présents tout au long du processus, ce qui n’est pas le cas chez nous. Par ailleurs, la loi prévoit l’intervention d’un notaire. Elle est donc nettement plus restrictive que cette proposition de loi. Soyez complet dans les informations que vous nous transmettez, cher collègue !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Justine Gruet, pour soutenir le sous-amendement no 2694.

    Mme Justine Gruet

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    L’éthique relève de la morale républicaine que nous voulons faire prévaloir dans notre société. Nous n’avons pas à nous interdire de parler d’éthique dans cet hémicycle.

    M. Hadrien Clouet

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    On n’a pas dit le contraire !

    Mme Justine Gruet

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    D’ailleurs, nous avons légiféré sur des lois de bioéthique qui traitaient de l’éthique du corps.
    La HAS a souligné que l’expression « phase avancée » n’avait aucune signification si elle n’était accompagnée d’aucun qualificatif précis et ne permettait pas de définir qui pourra bénéficier du droit à l’aide à mourir. Le gouvernement tente de préciser la notion avec son amendement et nous l’en remercions, mais l’amendement ne sécurise pas contre d’éventuelles dérives. C’est pourquoi nous proposons d’ajouter le mot « gravement » pour insister sur la situation de fin de vie du patient.
    La HAS a également indiqué qu’il n’existait pas de critère médical universellement applicable pour définir l’irréversibilité.
    Quant à l’altération de la qualité de vie, elle peut résulter des pressions de l’entourage. La solitude et un accompagnement défaillant pourraient affecter la qualité de vie. Au-delà de la définition que vous nous proposez, il est important de reconnaître que le texte ne définit pas plus clairement les critères parce qu’ils ne sont pas objectivables.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir le sous-amendement no 2695.

    M. Patrick Hetzel

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    Il va dans le même sens que celui de M. Isaac-Sibille. Comme Charles Sitzenstuhl, nous sommes quelques-uns à ne pas être l’aise avec cet amendement du gouvernement, qui reste très flou. En réalité, nous avons déjà débattu de la question de l’irréversibilité : dès lors qu’une maladie est considérée comme incurable, elle est irréversible. Introduire la notion d’irréversibilité serait donc pertinent si le terme « incurable » n’apparaissait pas déjà à l’alinéa 7. Pour compléter utilement le texte, notamment en tenant compte de l’avis de la Haute Autorité de santé, il conviendrait en revanche d’introduire la notion de réduction de l’espérance de vie. Sans cela, l’article concernera des patients qui ne sont pas en fin de vie. Nous souhaitons que les choses soient claires : l’aide à mourir doit bénéficier à des patients en fin de vie et non à des patients qui souhaitent mettre fin à leur vie.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Olivier Falorni, rapporteur général, pour la commission des affaires sociales, de la proposition de loi relative au droit à l’aide à mourir, afin de donner l’avis de la commission sur ces amendements et sous-amendements.

    M. Olivier Falorni, rapporteur général, pour la commission des affaires sociales, de la proposition de loi relative au droit à l’aide à mourir

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    Nous discutons d’un point important : la notion de phase avancée. Nous en avons déjà discuté l’année dernière et le législateur avait retenu, sur ma proposition, l’expression « phase avancée ou terminale ».
    Je vous avoue ma surprise en entendant certains critiquer cette notion au motif qu’elle nous ferait entrer dans un grand flou, un grand n’importe quoi, qu’elle ne serait pas assez précisément définie. Avant-hier soir, pourtant, des collègues –⁠ parfois les mêmes ! – célébraient la cathédrale législative, le monument humaniste que représentaient les lois Leonetti et Claeys-Leonetti. Il se trouve que la notion de « phase avancée ou terminale » est issue de ce trésor national évoqué par certains : elle figure dans le code de la santé publique depuis la loi Leonetti de 2005, avant même la loi Claeys-Leonetti de 2016 !

    M. Patrick Hetzel

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    La seconde a le mérite de préciser que le pronostic vital doit être engagé « à court terme » !

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    Cette notion ne vient donc pas de nulle part ! Entendre dire, vingt ans après son adoption par l’Assemblée nationale, et alors qu’elle a été saluée par tous, qu’elle serait désormais dépourvue de sens, cela me semble tout de même un peu fort de café !
    L’année dernière, Mme la ministre avait saisi la Haute Autorité de santé pour l’interroger sur la notion de phase avancée et sur celle de pronostic vital engagé « à moyen terme ». En ce qui concerne cette dernière, la HAS a été très claire…

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Ah non !

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    …et j’ai d’ailleurs constaté avec une certaine satisfaction qu’aucun député n’avait proposé de rétablir cette condition de temporalité à moyen terme.
    Monsieur Sitzenstuhl, je regrette que vous ayez été absent –⁠ l’un des rares moments où vous n’étiez pas là ! – quand nous étions justement d’accord…

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Je vous ai entendu grâce à la vidéo !

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    Tant mieux, car ne sera pas le cas cette fois-ci ! Vous semblez soutenir que nous devrions nous en tenir à la loi Claeys-Leonetti. Je vous invite simplement à lire l’avis 139 du CCNE. Il se trouve que ses rapporteurs sont deux personnalités qui ne font pas particulièrement la promotion de l’aide à mourir –⁠ l’avis n’a pas été rédigé par l’Association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD) mais par M. Alain Claeys, coauteur de la loi de 2016, et par M. Régis Aubry, médecin spécialisé en soins palliatifs et en éthique médicale. Or cet avis dit bien que la loi Claeys-Leonetti ne répond pas à toutes les situations, loin de là…

    M. Philippe Juvin

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    Aucune loi ne répond à tout !

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    …et qu’il faut avancer vers une aide à mourir, laquelle peut trouver une application éthique. Nous parlons tout de même de l’avis de l’un des coauteurs de la loi Claeys-Leonetti et de l’une des grandes personnalités du monde des soins palliatifs ! Je me réjouis que la Haute Autorité de santé ait considéré que la condition d’engagement du pronostic vital à moyen terme, qui prétendait transformer les médecins en devins –⁠ ce dont ils sont bien incapables – devait être écartée. Vous avez raison, monsieur Juvin, les médecins ne savent pas rien, mais ils ne savent pas tout non plus !

    M. Philippe Juvin

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    Comme les hommes politiques !

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    C’est vrai ! La même leçon vaut pour eux…

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Alors imaginez un peu quand ils sont les deux à la fois ! (Sourires.)

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    J’ai d’ailleurs toujours affirmé que si j’avais des convictions, je n’avais pas de certitudes… Cependant, vous conviendrez qu’un médecin n’est pas capable de déterminer la temporalité exacte d’un pronostic vital.
    La HAS a proposé une définition très précise de la phase avancée, et je me réjouis que le gouvernement propose à présent de l’inscrire dans la proposition de loi. En plus de correspondre parfaitement à notre vote de l’an dernier, elle le conforte et le renforce. Je suis donc favorable à l’amendement de Mme la ministre, et défavorable à tous les sous-amendements, qui vont à l’encontre de la logique consistant à reprendre la définition de la HAS.

    M. Sébastien Peytavie

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    Tout à fait d’accord !

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement sur les sous-amendements ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    La HAS souligne en effet qu’il est très difficile de définir la temporalité du pronostic vital. Elle apporte néanmoins deux éléments permettant de caractériser la phase avancée : le caractère irréversible du processus dans lequel entre le patient et l’effet de l’aggravation de son état de santé sur sa qualité de vie.
    Ajouter les mots : « de fin de vie » après les mots : « processus irréversible » comme vous le proposez, monsieur Isaac-Sibille, n’apporterait malheureusement pas d’information supplémentaire. Quant à l’ajout de « gravement », monsieur Juvin, si je comprends votre intention, nous aurions alors, dans la même phrase, « un processus irréversible marqué par l’aggravation de l’état de santé de la personne malade qui affecte gravement sa qualité de vie », soit deux fois la même notion de gravité –⁠ connaissant votre esprit synthétique, je ne doute pas que cela vous aura interpellé à la relecture. Enfin, je comprends également l’ajout des mots : « et réduit l’espérance de vie », monsieur Juvin, mais dès lors que la Haute Autorité de santé explique qu’il est compliqué de déterminer la temporalité du diagnostic vital, cette précision m’apparaît inutile.
    Les uns et les autres n’ont cependant pas relevé que la HAS nous invitait à rester vigilants quant à l’importance du processus d’accompagnement de la personne malade et quant à la délibération collective qui doit entourer le recours à l’aide à mourir. Nous aurons, pour en tenir compte, à travailler sur un amendement à l’article 6 visant à renforcer la dimension collégiale de la décision.
    À ce stade, je suis donc défavorable aux quatre sous-amendements.

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux demandes de scrutin public : sur les amendements nos 2676 et 2691 par le groupe Horizons & indépendants et sur le sous-amendement n° 2696 par le groupe UDR.
    Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à Mme Claire Marais-Beuil.

    Mme Claire Marais-Beuil

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    La Haute Autorité de santé a effectivement réuni un groupe d’experts et d’usagers afin de définir la temporalité du pronostic vital, ce qu’il n’a pas réussi à faire –⁠ prouvant que qu’elle est très difficile à estimer individuellement. De nombreux paramètres, souvent évolutifs, entrent en effet en considération, tels que l’évolution de la maladie et la présence de symptômes physiques ou psychiques. Actuellement, les professionnels de santé évaluent le pronostic vital avec des outils dont la fiabilité est insuffisante, présentant un degré d’incertitude important. Si ce groupe d’experts n’y est pas parvenu, comment les médecins réunis autour du patient réussiraient-ils ?
    La définition que vous proposez, madame la ministre, va entraîner des complications. Vous souhaitez ajouter la notion de « processus irréversible », mais il me semble qu’entre une affection « incurable » et un processus « irréversible », il n’y a que l’épaisseur d’une feuille de papier journal –⁠ c’est à peu près la même chose. Vous proposez également de préciser que ce processus est « marqué par l’aggravation de l’état de santé de la personne malade qui affecte sa qualité de vie ». Or si l’on se réfère là encore à la Haute Autorité de santé, celle-ci souligne combien les biais subjectifs de la personne malade sont difficilement analysables.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Hadrien Clouet.

    M. Hadrien Clouet

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    Depuis maintenant de nombreux jours, des collègues expliquent qu’il faut définir et préciser la phase avancée.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Non, on veut supprimer cette notion !

    M. Hadrien Clouet

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    Je ne pensais pas à vous, monsieur Sitzenstuhl, mais aux personnes constructives qui siègent sur certains bancs.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Il y en a plein !

    M. Hadrien Clouet

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    Définir et préciser, c’est tout l’objet de l’amendement de la ministre. Vous ne m’avez pas souvent entendu défendre un amendement du gouvernement ! Je vous prie de mesurer combien cela me coûte. Si je le dis, c’est donc que ça doit être vrai : cet amendement est intéressant et il faut le voter. (Sourires et applaudissement sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Sébastien Peytavie

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    Cela te fait chaud au cœur, n’est-ce pas, Catherine ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Comme quoi tout arrive !

    M. Hadrien Clouet

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    Plusieurs collègues, sur différents bancs, ont demandé de définir la phase avancée, et le gouvernement répond à cette demande. En l’espèce, il précise que pour ouvrir le droit à une demande d’aide à mourir –⁠ laquelle, faut-il le préciser, doit encore être validée ensuite par des soignantes ou des soignants –, le patient doit être entré dans un processus irréversible. Premièrement, il est bien question d’une « entrée » dans un processus, donc d’une dynamique plutôt que de cette espèce de calendrier universel des douleurs que certains, à droite, voudraient nous vendre. Deuxièmement, ce processus doit présenter un caractère « irréversible », ce qui est une manière d’insister sur ce qui fait consensus entre nous, à savoir que nous parlons bien du chemin vers les derniers moments de la vie. Troisièmement, tout au long de ce chemin, l’état de santé de la personne malade doit être « marqué par une aggravation » : le processus irréversible dont nous parlons va donc bien vers le pire, ce qui nécessite que le patient soit soulagé. Quatrièmement, il est précisé que ce processus marqué par une aggravation n’est pas uniquement biologique –⁠ il ne se mesure pas uniquement par une prise de sang et des analyses – mais qu’il dégrade la qualité de vie de la personne, qu’il lui fait violence parce qu’il s’attaque à sa dignité et à son bien-être. Tous ces arguments plaident en faveur de l’amendement du gouvernement visant à encadrer plus étroitement le processus et, en conséquence, contre les sous-amendements.
    Dans le détail, monsieur Isaac-Sibille, vous proposez de parler d’un processus irréversible « de fin de vie ». Je ne sais pas ce que cela signifie, honnêtement ! Un pronostic de fin de vie, je vois, mais un processus de fin de vie, non… Monsieur Sitzenstuhl, votre sous-amendement no 2678 vise quant à lui à ajouter le mot « fatale » après le mot « aggravation ». Le code de la santé publique se réfère bien au « pronostic fatal », mais une « aggravation fatale », cela ne veut rien dire : une aggravation ne peut pas être fatale ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel.

    Mme Marie-Noëlle Battistel

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    Je remercie Mme la ministre d’avoir déposé cet amendement, autour duquel nous pouvons nous retrouver puisqu’il reprend l’avis de la HAS et remet au cœur du débat l’idée d’un ultime recours face à des souffrances inapaisables plutôt que face à une fin de vie imminente. En tant que tel, il reflète la position équilibrée à laquelle nous sommes parvenus. Les sous-amendements visant à en restreindre la portée –⁠ car c’est bien de cela qu’il s’agit, n’est-ce pas ? – doivent en revanche susciter toujours la même question de notre part : qui mieux que le malade peut évaluer la soutenabilité de sa souffrance ?
    Ceux qui prétendent que les amendements proposés ne seraient pas en phase avec l’avis de la HAS, comme je l’ai entendu dire sur plusieurs bancs, sont de mauvaise foi ! La Haute Autorité indique bien qu’il faut considérer le processus de déclin comme altérant la qualité, et non la quantité, de la vie : il faut vraiment inscrire cela dans nos esprits, comme nous ne cessons de le rappeler. Or c’est bien ce que vise la rédaction du gouvernement, que vous souhaitez restreindre ; aussi le groupe Socialistes et apparentés votera-t-il en faveur des amendements et contre tous les sous-amendements.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Thibault Bazin.

    M. Thibault Bazin

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    Madame la ministre, la HAS s’est contentée de répondre à la commande du gouvernement…

    M. Hadrien Clouet

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    La HAS est indépendante !

    M. Thibault Bazin

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    …sur le « moyen terme » et la « phase avancée ou terminale » en soulignant qu’elle ne savait pas définir ce qui ne relève pas du « court terme ». Votre amendement m’apparaît donc un peu rédactionnel –⁠ à la mode Bazin, d’une certaine manière –, au sens où il ne modifie pas la portée de l’article et ne résout pas la difficulté initiale. Il n’existe en effet aucun critère médical universellement applicable pour définir l’irréversibilité d’une trajectoire clinique, surtout pour les pathologies qui nous intéressent –⁠ les pathologies chroniques, évolutives, neurologiques, métaboliques. En ajoutant le critère de l’altération de la qualité de vie ou de l’aggravation irréversible, le législateur laisse la voie ouverte à des interprétations subjectives –⁠ potentiellement influencées par la pression de l’entourage ou par une évaluation médico-sociale biaisée –, autrement dit à une incertitude qui crée un risque de contentieux autour des cas limites. Les précisions proposées n’apparaissent pas opérantes : « une affection grave et incurable » constitue en tant que telle un « processus irréversible marqué par l’aggravation de la santé de la personne » –⁠ altérant donc, d’une certaine manière, sa qualité de vie.
    La question fondamentale n’est-elle pas cependant de savoir qui sera concerné par ce texte ? Au départ, certains prétendaient qu’il ne devait concerner que les personnes n’ayant plus que quelques heures ou quelques jours à vivre –⁠ soit la définition du pronostic vital engagé à court terme. On voit que ce n’est plus du tout le cas ! Vous allez bien plus loin, et l’on s’éloigne du court terme. Vous semblez le masquer derrière l’expression de « processus irréversible », alors que celui-ci est incertain, quels que soient les traitements ou les possibilités d’accéder à des soins, d’ailleurs. Vous répétez sans cesse vouloir trouver un équilibre et prévoir des garde-fous, cependant vous multipliez les faux-semblants. Ainsi, le « pronostic vital engagé à court terme », qui était pourtant un critère majeur, a disparu, et nous entrons à présent dans une zone d’incertitude pour les médecins –⁠ donc d’interprétations. Doit-on proposer la mort provoquée dans une situation d’incertitude ? A fortiori dans une situation d’incertitude liée à des souffrances réfractaires d’ordre psychologique, et pas du tout à des souffrances physiques ? Ne pensez-vous pas que l’on va trop loin ? (Mme Justine Gruet applaudit.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Danielle Simonnet.

    Mme Danielle Simonnet

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    Le groupe écologiste et social votera pour l’amendement du gouvernement et contre les sous-amendements. Notre débat montre que nous avons deux conceptions différentes de la fin de vie. Pour nous, le patient prime, et cette loi garantit son ultime liberté ; vous refusez au contraire –⁠ et c’est une opinion légitime – qu’un patient puisse avoir recours à l’aide à mourir, parce que, selon vous, en aucun cas la loi ne doit permettre à nos concitoyens de faire le choix de ne plus vivre.
    À nos yeux, l’amendement du gouvernement a le mérite de proposer une définition de la phase avancée, fondée sur l’état de santé du malade, « qui affecte sa qualité de vie », et non plus sur le temps qu’il lui reste à vivre, sachant que les médecins ne sont pas devins et que, selon les personnes et les pathologies, il n’y a jamais de réponse unique. D’où l’importance de se recentrer plutôt sur la qualité de vie, l’aggravation de l’état de santé, la souffrance ressentie par le patient pour valider son choix d’avoir recours à l’aide à mourir.
    La mention d’une maladie incurable signifiait déjà que le patient était engagé dans un processus irréversible ; les précisions apportées par l’amendement confirment la gravité de la situation, sans pour autant obliger le corps médical à préciser à quel terme le pronostic vital est engagé, ce qu’il peut d’autant moins faire que l’état du patient évolue en permanence.
    Dans ces conditions, il faut s’en remettre à la volonté du patient et à la façon dont il juge si son état est supportable ou non.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Éric Woerth.

    M. Éric Woerth

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    L’article 4 est central dans la loi, puisqu’il définit les conditions à satisfaire pour pouvoir accéder à l’aide à mourir. Il est le fruit d’un énorme travail et n’a pas été rédigé à la légère. Les critères retenus sont cumulatifs et ils sont aussi précis qu’ils peuvent l’être, s’agissant d’une situation où il existe autant de cas particuliers que de personnes concernées.
    Je me félicite donc que l’on ait pu définir des critères et sortir de l’ambiguïté qui pouvait caractériser la loi Claeys-Leonetti et qui explique sans doute en partie pourquoi celle-ci est si peu appliquée. Outre qu’elle continue de faire dépendre pour une large part la décision à prendre des médecins et des familles, elle maintient l’ambiguïté en autorisant la sédation profonde : à la sédation profonde peuvent s’ajouter la fin de l’alimentation et de l’hydratation, ce qui conduit évidemment à l’issue fatale.
    J’approuve tout autant le fait que les directives anticipées ne soient pas incluses dans les critères, car prendre la décision de recourir à l’aide à mourir demande toute sa tête et la faculté de pouvoir exprimer ce que l’on souhaite.
    Enfin, je pose une question : le non-geste consistant à ne plus soigner est-il plus moral que le geste positif consistant à aider à mourir ? Pour ma part, je ne le pense pas.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille.

    M. Cyrille Isaac-Sibille

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    La loi Claeys-Leonetti concernait les malades dont le pronostic vital était engagé à court terme. La référence à la phase avancée ou terminale de la maladie ne concernait que les traitements à administrer.
    Alors que le texte qui nous occupe est consacré à la fin de vie, à aucun moment dans cet article ne figurent ces termes. Il me semble pourtant indispensable de dire les choses : quand on parle de processus irréversible, on sous-entend qu’il conduit à la fin de vie. C’était d’ailleurs, à l’origine, le titre même de la proposition de loi.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre.

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Je voudrais revenir sur les propos de M. Bazin, qui a dit que la HAS avait répondu à une commande du gouvernement. En tant que rapporteur général de la commission des affaires sociales, vous connaissez, monsieur, le rôle de la Haute Autorité de santé, celui de valider les dispositifs médicaux et les médicaments. C’est une autorité indépendante (M. Arnaud Simion applaudit), et j’espère me tromper en ayant entendu dans vos propos une remise en cause de cette indépendance.

    M. Thibault Bazin

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    Pas du tout, madame la ministre !

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    J’espérais bien me tromper car l’avis de la Haute Autorité confirme la difficulté de s’en tenir à une approche temporelle du pronostic vital. D’où cet amendement proposé par le gouvernement et approuvé par le rapporteur Falorni, qui introduit le critère absolu d’irréversibilité. Cela me semble une précision qui va dans le sens des travaux de la Haute Autorité, puisque cela explicite la notion d’aggravation de l’état de santé.
    Je rappelle enfin, une fois encore, que c’est l’ensemble des critères de l’article 4 qui seront pris en compte par le collège médical pour décider de l’éligibilité ou non du patient qui demandera l’aide à mourir. (Mme Nicole Dubré-Chirat applaudit.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix le sous-amendement no 2696.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        171
            Nombre de suffrages exprimés                171
            Majorité absolue                        86
                    Pour l’adoption                71
                    Contre                100

    (Le sous-amendement no 2696 n’est pas adopté.)

    (Les sous-amendements nos 2678, 2694 et 2695, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 2676 et 2691.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        172
            Nombre de suffrages exprimés                169
            Majorité absolue                        85
                    Pour l’adoption                144
                    Contre                25

    (Les amendements identiques nos 2676 et 2691 sont adoptés.)

    Mme la présidente

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    Nous en venons à trois amendements identiques, nos 1606, 1800 et 2133, sur lesquels je suis saisie par le groupe Rassemblement national d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l’amendement no 1606.

    M. Thibault Bazin

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    Madame la ministre, si cela peut vous rassurer, je suis le référent de la commission des affaires sociales pour la HAS…

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Vous m’inquiétez ! (Sourires.)

    M. Thibault Bazin

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    …et j’ai donc échangé avec son président à plusieurs reprises sur cette proposition de loi. Je voulais simplement dire que le gouvernement avait demandé à la HAS un avis sur ce qui posait problème, à savoir les notions de moyen terme, de phase avancée ou de phase terminale.
    C’est d’ailleurs sur ce dernier point que porte mon amendement. L’emploi de la conjonction « ou » élargit le spectre des personnes éligibles au-delà des personnes en fin de vie, dans un état agonique. Il faut d’ailleurs déduire de l’avis de la HAS que « l’entrée dans un processus irréversible, marqué par l’aggravation de l’état de santé de la personne malade qui affecte sa qualité de vie » ne dit pas que celle-ci n’a plus que quelques jours ou quelques heures à vivre ; elle n’a peut-être même pas encore reçu de traitement.
    J’ai été très sensible à la distinction faite par Éric Woerth entre le geste de soigner et le non-geste consistant à ne plus soigner, qui ne serait pas moins noble. Mais, en l’occurrence, il ne s’agit pas seulement de ne plus soigner mais d’administrer une substance létale en vue de provoquer ou d’accélérer la mort de personnes qui ne sont pas nécessairement en fin de vie, même si elles sont en phase avancée.
    C’est un problème car, alors, la lettre de la loi ne correspond pas à son esprit, ainsi que l’entendent ses défenseurs. Tel qu’il est rédigé, l’article 4 ne concerne pas seulement les personnes qui vivent leurs derniers jours ou leurs dernières heures, sont en phase avancée ou terminale. Car même le critère qualitatif ajouté par le gouvernement est sujet à interprétation.
    Il faut donc clarifier les choses précisément ; après on assumera. La représentation nationale souhaite-t-elle que cette aide à mourir s’adresse à des personnes qui ont une affection grave et incurable mais ne souffrent pas nécessairement physiquement au moment où elles en font la demande ? Parle-t-on de personnes qui souffrent seulement psychologiquement à cause de leur affection, de personnes tombées en dépression après l’annonce de leur maladie, par exemple ?

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Annie Vidal, pour soutenir l’amendement no 1800.

    Mme Annie Vidal

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    Cet amendement cosigné avec ma collègue Colin-Oesterlé a été rédigé avec l’appui de l’Ordre des médecins, qui considère que la rédaction proposée ne permet pas de déterminer le stade à partir duquel le patient va pouvoir formuler cette demande d’aide à mourir, et juge donc les critères d’éligibilité difficiles à apprécier. En d’autres termes, nous leur demandons de statuer sur une demande de mort sans leur permettre d’asseoir leur réponse sur des critères assez solides. C’est pourquoi nous proposons de parler de stade avancé et terminal.
    Concernant l’aspect restrictif de la loi, nous avons parlé de l’Autriche, mais je voudrais préciser qu’en Belgique, la demande d’aide à mourir doit être écrite, car passer par l’écriture équivaut à une vraie prise de conscience ; le patient doit également être obligatoirement vu par deux médecins, alors que, chez nous, cette visite obligatoire ne concernerait qu’un seul médecin ; enfin, si, en Belgique, l’un des médecins considère que la mort n’est pas vouée à survenir à brève échéance, c’est-à-dire dans un délai de six mois, le patient doit alors être vu par un troisième médecin.
    Nous ne sommes donc pas du tout dans la même optique et assez loin de l’avis 139 du Comité consultatif national d’éthique, qui indique bien qu’il doit être possible de trouver « une voie pour une application éthique de l’aide active à mourir ».

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Stéphane Peu, pour soutenir l’amendement no 2133.

    M. Stéphane Peu

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    Il relaie l’inquiétude d’une partie de la communauté médicale causée par l’imprécision des termes. Lorsqu’il y a imprécision, il peut y avoir ambiguïté, et quand il y a ambiguïté sur un sujet comme celui-là, on peut en faire une application à géométrie variable. Or la géométrie variable pénalise souvent les plus isolés, les plus modestes, les moins instruits, ceux qui sont le moins capables de s’exprimer et qui, face à l’ambiguïté, sont plus vulnérables que d’autres.
    C’est la raison pour laquelle je souhaite préciser le texte en accolant vulnérabilité, phase avancée et phase terminale, de manière à éviter tout traitement différencié.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Brigitte Liso, rapporteure

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    Avis défavorable. Ces amendements apportent plus de confusion…

    M. Thibault Bazin

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    Au point où nous en sommes dans la confusion…

    Mme Brigitte Liso, rapporteure

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    …qu’ils ne clarifient le texte car, du point de vue médical comme syntaxique, une phase ne peut être à la fois avancée et terminale.
    Je voudrais par ailleurs répondre à notre collègue Juvin qui, tout à l’heure, pensait que mes réponses étaient un peu brèves. D’abord, nous en avons décidé ainsi avec le rapporteur général, pour permettre à chacun de pouvoir s’exprimer plus longuement. Ensuite, je ne voudrais pas que vous pensiez que je suis lasse de nos débats. J’attends ce moment depuis très longtemps…

    M. Philippe Juvin

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    Et nous vous remercions de votre patience !

    Mme Brigitte Liso, rapporteure

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    Oui, vous pouvez la souligner ! (Sourires.)
    Je suis ravie de participer à ces débats, et je pense que cette loi, si elle est votée, sera certainement la plus importante de notre mandat.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Patrick Hetzel.

    M. Patrick Hetzel

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    Ces amendements me semblent au contraire de nature à bien préciser les choses.
    D’ailleurs, comme l’a dit notre collègue Annie Vidal, c’est une demande aussi du Conseil national de l’Ordre des médecins. Nous devons nous mettre dans la situation des médecins chargés de se prononcer au vu des critères inscrits à l’article 4. Les choses doivent donc être aussi claires que possible.
    Monsieur le rapporteur général, vous insistez souvent sur le fait que ces critères sont cumulatifs. Or c’est bien cet effet cumulatif qu’aurait le choix de la conjonction « et » plutôt que « ou ». Vous devriez donc, en tout état de cause, être favorable à ces amendements.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille.

    M. Cyrille Isaac-Sibille

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    On a demandé à la Haute Autorité de santé (HAS) de définir ce qu’était un moyen terme, une phase avancée et une phase terminale. Les experts qui la composent n’ont pas été capables de le faire.

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    Elle le fait, elle les définit.

    M. Cyrille Isaac-Sibille

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    Alors, comment un médecin ou même un collège de médecins pourrait-il être amené à déterminer le stade atteint par la maladie ? C’est pourquoi je pense que la conjonction de coordination « et » est importante.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Nicole Dubré-Chirat.

    Mme Nicole Dubré-Chirat

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    Depuis le début de la discussion sur l’article 4, on nous dit qu’on n’est pas assez précis, ou trop, alors que celui-ci propose des critères objectivables et utilisables par les équipes médicales.

    M. Patrick Hetzel

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    Non !

    Mme Nicole Dubré-Chirat

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    Je voudrais revenir sur certains d’entre eux. Le court terme, c’est quelques jours. Comment voulez-vous permettre à des patients d’entrer dans une procédure d’aide à mourir en quelques jours ? Donc, on n’en veut pas. (Mme Marie-Noëlle Battistel et Mme Sandrine Rousseau applaudissent.)
    En ce qui concerne les maladies cancéreuses, il existe bien différents stades : selon le type de cancer, il est possible de dire qu’un patient est arrivé au stade terminal, parce qu’on ne peut plus lui proposer de traitement, en dehors des fameuses chimiothérapies de confort qu’il est d’ailleurs susceptible de refuser.
    Les médecins savent donc définir le moment où l’affection atteint un stade avancé ou terminal. Arrêtez de considérer les critères isolément quand cela sert votre raisonnement ! Les dispositions de l’article 4 sont nécessaires pour aider les équipes médicales à prendre leur décision. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR, SOC, EcoS et LFI-NFP.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Stéphane Delautrette.

    M. Stéphane Delautrette, rapporteur

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    Mme Liso a jugé que ces amendements étaient source de confusion. Il me semble au contraire qu’ils tendent à clarifier les choses : leurs auteurs souhaitent réserver l’aide à mourir aux personnes en phase agonique, autrement dit à celles qui ne sont qu’à quelques heures de leur mort. Depuis le début de nos discussions, c’est leur seul objectif. Ils ne cherchent pas à préciser les critères, mais à faire en sorte que les personnes en souffrance n’aient pas accès à l’aide à mourir.
    Certains appelaient à plus de clarté dans la définition des critères d’accès à l’aide à mourir et attendaient de la HAS qu’elle définisse mieux la notion de phase avancée : c’est ce que nous venons de faire en adoptant l’amendement proposé par le gouvernement. Que faudrait-il écrire pour que les critères soient plus clairs ?
    L’avis de la HAS dit que la personne souffrante est « seule légitime pour dire ce qui relève pour elle de l’insupportable ». Personne d’autre ne peut le dire à la place du patient.
    Madame Vidal, ne confondez pas ce qui relève de la procédure et ce qui relève des conditions d’accès à l’aide à mourir. Ce sont deux choses distinctes. La collégialité, que vous avez évoquée, relève de la procédure. Nous aurons ce débat. Des amendements ont été rédigés, notamment avec le président Valletoux, pour clarifier cette question. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOC.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 1606, 1800 et 2133.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        162
            Nombre de suffrages exprimés                160
            Majorité absolue                        81
                    Pour l’adoption                76
                    Contre                84

    (Les amendements identiques nos 1606, 1800 et 2133 ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Marie-Ange Rousselot, pour soutenir l’amendement no 2291.

    Mme Marie-Ange Rousselot

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    Par cet amendement d’appel, je souhaite attirer votre attention sur les souffrances des personnes atteintes, en raison de leur âge avancé, de multimorbidités invalidantes qui, sans engager leur pronostic vital, peuvent justifier l’expression d’une demande d’aide à mourir tant elles peuvent devenir intolérables.
    Ce sont des patients cumulant plusieurs maladies chroniques, à des degrés plus ou moins sévères, qui dégradent considérablement leur état de santé, notamment sur le plan fonctionnel et ce, de manière irréversible. Ces patients, dont les conditions de vie leur sont parfois devenues insupportables, peuvent vivre une perte de sens de l’existence et n’ont d’autre choix, aujourd’hui, que d’attendre la mort dans une souffrance prolongée.
    L’expérience suisse montre qu’une approche encadrée permet de répondre avec humanité à de telles situations de détresse, dans le respect de la volonté et de la dignité de ces personnes. Cet amendement entend donc inclure les personnes atteintes de multimorbidités invalidantes liées à l’âge parmi les personnes éligibles à l’aide à mourir, sans en faire une condition cumulative dans les cas prévus au troisième alinéa du présent article.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Brigitte Liso, rapporteure

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    Nous évoquerons le sujet à propos du cinquième critère. Je demande le retrait de l’amendement, faute de quoi l’avis sera défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Même avis. Je comprends ce que vous souhaitez mettre en avant, madame la députée, mais le fait important, c’est la pathologie, pas l’âge.

    Mme la présidente

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    L’amendement est-il maintenu ?

    Mme Marie-Ange Rousselot

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    Non, je le retire.

    (L’amendement no 2291 est retiré.)

    Mme la présidente

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    Nous en venons à cinq amendements, nos 133, 2623, 22, 134 et 2617, pouvant faire l’objet d’une discussion commune. Les amendements nos 133 et 2623 sont identiques, de même que les amendements nos 22, 134 et 2617.
    Sur la première série, je suis saisie par les groupes Droite républicaine et Rassemblement national d’une demande de scrutin public, et sur la deuxième, d’une même demande par le groupe Rassemblement national.
    Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à Mme Élisabeth de Maistre, pour soutenir l’amendement no 133.

    Mme Élisabeth de Maistre

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    Il vise à préciser les conditions d’accès de l’aide à mourir et tend, à l’alinéa 8, à substituer aux mots : « ou psychologique liée à cette affection, qui est soit réfractaire aux traitements, soit insupportable selon la personne lorsque celle-ci a choisi de ne pas recevoir ou d’arrêter de recevoir un traitement », les mots : « insupportable, liée à cette affection et réfractaire aux traitements ; ».

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Juvin, pour soutenir l’amendement no 2623.

    M. Philippe Juvin

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    Depuis le début du débat, à chaque fois que l’on aborde l’un des critères, on nous renvoie à celui des douleurs réfractaires. Nous y sommes. Mais ce critère n’est que partiel.
    Un patient peut éprouver des souffrances physiques ou psychologiques réfractaires à tout traitement, et je suis d’accord pour en faire un des critères d’accès à l’aide active à mourir. Mais je souhaite supprimer les mots permettant d’étendre ce critère aux souffrances découlant du refus ou de l’arrêt d’un traitement.
    Je suis d’accord avec le fait qu’un patient puisse refuser un traitement, et cela arrive. Mais si une douleur réfractaire aux traitements peut peut-être justifier un geste, il n’en est pas de même d’une douleur que l’on pourrait soulager si le patient ne refusait pas tout traitement ! C’est ce refus qui cause la souffrance au nom de laquelle il réclame l’aide à mourir. Or s’il prend le traitement, il n’a plus mal. C’est un élément fondamental : les douleurs réfractaires aux traitements ne sont qu’une des hypothèses prises en considération par la rédaction actuelle.

    Mme la présidente

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    Les amendements identiques nos 22 de M. Patrick Hetzel, 134 de M. Corentin Le Fur et 2617 de M. Philippe Juvin sont défendus.
    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    Ces amendements tendent à durcir les conditions d’accès à l’aide à mourir en limitant celui-ci aux souffrances physiques et en excluant du dispositif les personnes qui ont choisi de ne pas recevoir ou d’arrêter un traitement.
    Je commencerai par rappeler une nouvelle fois que le texte n’ouvre pas l’accès à l’aide à mourir à toute personne présentant des souffrances psychologiques. Dois-je énumérer à nouveau ici les cinq critères –⁠ en réalité, ils sont plus nombreux – qui s’appliquent de façon cumulative ? Je ne le ferai pas pour ne pas allonger le débat.
    Vous voulez donc restreindre le champ du texte aux seules souffrances physiques. Je me refuse absolument à hiérarchiser les souffrances. Je ne vois pas en quoi une souffrance psychologique serait moins aiguë qu’une souffrance physique.
    De même, il faut maintenir l’accès à l’aide à mourir dans le cas où le patient a choisi de ne pas recevoir ou d’arrêter de recevoir un traitement. Le lui refuser serait porter gravement atteinte à sa liberté, celle de choisir son destin et de dire non parce qu’il n’en peut plus.
    Pour toutes ces raisons, je suis défavorable à l’ensemble de ces amendements.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Même avis.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. René Pilato.

    M. René Pilato

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    Lorsqu’un patient arrête par lui-même le traitement qui aurait pu soulager ses douleurs, dit notre collègue Juvin, tant pis pour lui.

    M. Philippe Juvin

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    Je n’ai pas exactement dit cela. C’est un peu rapide !

    M. René Pilato

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    Qu’en est-il si les effets secondaires de ces traitements sont terribles pour la personne malade ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Il a raison.

    M. René Pilato

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    Sans les décrire ici, on peut imaginer que ces effets l’amènent à considérer que sa vie n’est plus digne et qu’elle préfère arrêter les traitements. C’est un dilemme. Accordez-lui le droit de mourir tranquillement : c’est un devoir d’humanité.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Patrick Hetzel.

    M. Patrick Hetzel

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    Vous avez raison, monsieur Pilato, mais ce n’est pas ce qui est écrit dans le texte.
    Je voudrais aussi rappeler que l’Académie nationale de médecine s’est très clairement prononcée sur ces questions. Elle indique qu’il conviendrait d’« exclure du champ de l’indication d’une assistance au suicide les troubles psychologiques, l’état dépressif, le grand âge avec troubles cognitifs avérés, les maladies et handicaps avec altération de la capacité de jugement ».
    Enfin, un certain nombre d’associations de psychiatres nous alertent sur le fait que, dans la plupart des cas, les souffrances psychologiques peuvent être traitées, et donc supprimées.

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Oui, nous sommes d’accord.

    M. Patrick Hetzel

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    Nous devons certes écouter les souhaits des patients, mais aussi celles et ceux qui sont chargés de s’en occuper. C’est une sorte de contrat qui lie les patients et les professionnels de santé. N’ayons pas une vision unilatérale, c’est un travail d’interaction qu’il faut concevoir.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Vigier.

    M. Philippe Vigier

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    D’après M. Bazin, nous discuterions seulement d’aspects rédactionnels. Par respect pour le travail que nous faisons sur les conditions d’accès à l’aide à mourir, on ne peut pas laisser entendre que cela relève du rédactionnel ! Nous précisons les critères autant que possible –⁠ qui peut prétendre quantifier exactement le nombre de jours qu’il reste à vivre à un patient dont le pronostic vital est engagé ?

    M. Stéphane Rambaud

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    C’est bien le problème !

    M. Philippe Vigier

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    Quand M. Juvin propose, avec l’amendement no 2623, de supprimer les trois dernières lignes de l’alinéa 8, il oublie que les douleurs physiques s’accompagnent très souvent de douleurs psychologiques. Il est pourtant médecin !
    Dans ces lignes, il est aussi écrit que la personne a pu renoncer à terme à un traitement. Je ne connais pas de patient qui refuse d’entrée de jeu d’être traité. Aucun !

    M. Philippe Juvin

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    Il y en a !

    M. Philippe Vigier

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    En revanche, il est des personnes dont le pronostic vital est engagé, qui sentent qu’elles sont au bout du chemin et choisissent de ne pas, ou de ne plus recevoir un traitement. En ne prévoyant pas ces cas extrêmes, la rédaction proposée par ces amendements déséquilibrerait complètement l’accès à l’aide à mourir.
    Monsieur Sitzenstuhl, les directives anticipées introduites par la loi Claeys-Leonetti ne s’appliqueront pas à l’aide à mourir, cela ne vous aura pas échappé –⁠ c’est un verrou supplémentaire. Par ailleurs, la demande de l’aide à mourir doit être réitérée, confirmée par le patient. Allez donc voir dans les services si on demande aux patients entrés dans le processus de confirmer à nouveau leur volonté de bénéficier de la sédation profonde et continue… jamais ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Dem.)

    Mme Élise Leboucher,, rapporteure de la commission des affaires sociales

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    C’est la même chose à domicile !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre.

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Nous avons déjà évoqué ici le courrier que le Conseil national professionnel de psychiatrie nous a adressé le 12 mai. Il y formule deux demandes auxquelles le gouvernement entend répondre, monsieur Hetzel.
    D’abord, que nous instaurions « une évaluation psychiatrique indépendante chaque fois que jugée nécessaire par les équipes soignantes ou les proches lors d’une demande d’aide à mourir, afin d’apprécier la capacité de discernement, de repérer les éventuels troubles psychiatriques caractérisés et dans tous les cas d’être en mesure de proposer des soins susceptibles d’infléchir la demande de mort ». Par l’amendement no 2657 à l’article 6, le gouvernement vous proposera de prévoir la consultation d’un psychiatre ou d’un neurologue.
    Ensuite, il demande l’instauration d’un « délai minimal de réflexion, permettant d’évaluer la stabilité et la cohérence de la demande dans le temps ». Par l’amendement no 2649 à l’article 6, il vous sera proposé de supprimer la possibilité de réduire le délai de réflexion, qui est de deux jours, avant de confirmer la demande d’aide à mourir.

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 133 et 2623.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        164
            Nombre de suffrages exprimés                164
            Majorité absolue                        83
                    Pour l’adoption                70
                    Contre                94

    (Les amendements identiques nos 133 et 2623 ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 22, 134 et 2617.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        162
            Nombre de suffrages exprimés                160
            Majorité absolue                        81
                    Pour l’adoption                66
                    Contre                94

    (Les amendements identiques nos 22, 134 et 2617 ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de trois demandes de scrutin public : sur les amendements no 96 et identiques, par les groupes Rassemblement national, Droite républicaine, Horizons & indépendants et UDR ; sur les amendements no 137 et identiques, par les groupes Rassemblement national et Droite républicaine ; sur l’amendement no 1052, par le groupe Rassemblement national.
    Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    Je suis saisie de nombreux amendements pouvant faire l’objet d’une discussion commune. Nous commençons par onze amendements identiques, no 96 et suivants.
    La parole est à Mme Josiane Corneloup, pour soutenir l’amendement no 96.

    Mme Josiane Corneloup

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    Il n’y a pas de hiérarchie entre les types de souffrance, mais ouvrir l’accès à l’euthanasie ou au suicide assisté à des personnes dont les souffrances psychologiques seraient insupportables risque de donner lieu à de nombreuses dérives. Lors des auditions, des experts ont relevé que ce point introduisait un fort risque de confusion entre une volonté de mettre fin à des souffrances et des pulsions suicidaires. De plus, il est particulièrement difficile d’évaluer l’intensité de la souffrance psychologique.
    Madame la ministre, je me réjouis que le texte prévoie à l’article 6 une évaluation psychiatrique. Sans elle, nous courrions le risque d’euthanasier des personnes qui souffrent de dépression, par exemple, et qui auraient besoin plutôt d’une prise en charge adaptée.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Élisabeth de Maistre, pour soutenir l’amendement no 135.

    Mme Élisabeth de Maistre

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    La notion de souffrance psychologique est inadaptée, car elle est propre à chacun et souvent liée à des facteurs multiples. Donner accès à l’aide à mourir aux personnes qui présentent des souffrances psychologiques ouvre la voie à de potentiels abus de faiblesse. Pour toutes ces raisons, nous proposons de supprimer cette mention.

    Mme la présidente

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    L’amendement no 1051 de M. Thomas Ménagé est défendu.
    La parole est à M. Christophe Bentz, pour soutenir l’amendement no 1266.

    M. Christophe Bentz

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    Madame la rapporteure, vous nous disiez que nos amendements tendant à substituer le mot « et » au mot « ou » étaient de nature à créer de la confusion. Au contraire ! Nous essayons, ligne par ligne, de clarifier les conditions d’accès à l’aide à mourir, tout en le restreignant. Vous affirmiez que laisser, à l’alinéa 7, le choix entre « phase terminale » et « phase avancée » changerait tout –⁠ la phase terminale est pourtant bien une phase avancée. Le « ou »  a été maintenu, le texte est donc permissif, ce qui rend secondaires les autres garde-fous.
    « Et », « ou », deux lettres qui changent tout un texte. Et dans tous les cas, il s’agit d’un changement majeur : l’interruption de la vie  en fin de vie.
    Nous proposons de supprimer « ou psychologiques » pour éviter un assouplissement supplémentaire des critères d’accès à l’aide à mourir. Je ne connais pas de maladie incurable qui, par les graves souffrances physiques qu’elle cause, n’entraînerait pas de souffrances psychologiques. Elles en sont la conséquence naturelle, logique, mécanique, si ce n’est automatique.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Gérault Verny, pour soutenir l’amendement no 1322.

    M. Gérault Verny

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    Si nous choisissons d’inclure les souffrances psychologiques dans les critères d’accès à l’aide à mourir, nous risquons de franchir une ligne rouge. Ce serait ouvrir la porte à une subjectivité dangereuse, à des situations difficilement évaluables, à des décisions dont le fondement médical serait instable.
    La souffrance psychique est bien réelle, mais elle est par nature évolutive, souvent réversible, et dépendante de l’environnement social, du vécu et de la solitude. Son traitement relève d’un accompagnement psychothérapeutique, psychiatrique et humain, pas d’un geste létal. Dans bien des cas, ce n’est pas la maladie qui pousse à demander la mort, mais le désespoir. A ce désespoir, nous pouvons, et nous devons répondre autrement.
    Une telle rédaction donnerait lieu aux dérives qu’on a constatées ailleurs : des personnes atteintes de dépression, de troubles anxieux, ou fatiguées de vivre, se sont vu accorder l’euthanasie. Ce n’est pas ce que les Français attendent ; ce n’est pas ce que la médecine peut cautionner.
    L’aide à mourir, si elle doit exister, ne peut que répondre à des situations médicales extrêmes, objectivables, sans alternative. La souffrance psychique, aussi profonde soit-elle, relève d’un autre devoir : celui de la présence, du soin et de l’attention. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l’amendement no 1607.

    M. Thibault Bazin

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    Il y a un an, le texte issu de la commission formulait la condition d’accès ainsi : « Présenter une souffrance physique, accompagnée éventuellement d’une souffrance psychologique […] ». Deux jours avant la dissolution funeste du 9 juin, un amendement a substitué au cumul éventuel de ces souffrances une alternative. Désormais, la souffrance psychologique seule suffit.
    Certes, elle doit être liée à l’affection grave et incurable –⁠ c’est ce que vous aviez répondu l’an dernier, madame la ministre. Mais on peut tout à fait tomber en dépression, ressentir un mal-être profond à l’annonce d’une affection grave et incurable, qui affectera la qualité de sa vie, et ce, sans subir encore des souffrances physiques réfractaires au traitement. Que fera-t-on de ces malades ? Seront-ils éligibles à l’aide à mourir ?
    Vous avez prévu un amendement à l’article 6 pour prévenir ces situations, mais rien ne garantit qu’il sera adopté. Prévoit-il que la consultation d’un psychiatre sera obligatoire pour celui qui souhaite accéder à l’euthanasie ou au suicide assisté –⁠ en somme, à la mort provoquée ? Et la décision du médecin devra-t-elle être conforme ?

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Bartolomé Lenoir, pour soutenir l’amendement no 2004.

    M. Bartolomé Lenoir

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    La souffrance physique, en raison de sa nature intime et plurielle, échappe à une appréciation uniforme ; face à une même plainte intérieure, deux médecins peuvent tirer des conclusions radicalement différentes.
    Par ailleurs, dans un contexte où la pression familiale, sociale ou économique peut peser lourdement sur des individus fragiles, il existe un risque supplémentaire que la demande d’aide à mourir soit provoquée non par une souffrance physique incontestable, mais par des influences externes qui capitaliseraient sur la détresse psychologique.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Alexandre Allegret-Pilot, pour soutenir l’amendement no 2208.

    M. Alexandre Allegret-Pilot

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    La demande de mort doit résulter du cumul de la douleur physique et de la souffrance psychologique. Si on se fonde uniquement sur l’existence d’une souffrance psychologique, on peut douter très logiquement de la qualité du consentement –⁠ puisqu’elle altère le discernement. Mais peut-être souhaite-t-on une société qui pousse les dépressifs, les bipolaires ou les schizophrènes au suicide ? Dans ce cas, il faudra assumer d’ouvrir l’euthanasie à tout un chacun, sans condition. C’est ce vers quoi on se dirige. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes UDR et RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. François Gernigon, pour soutenir l’amendement no 2370.

    M. François Gernigon

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    L’amendement vise à supprimer toute référence aux souffrances psychologiques dans les critères d’accès à l’aide à mourir. Si ces souffrances sont bien réelles, elles sont souvent réversibles, évolutives et dépendent de la qualité de l’accompagnement proposé. Les soins palliatifs sont une réponse, puisqu’ils intègrent la prise en charge de la détresse psychologique.
    La souffrance psychologique, à la différence de la souffrance physique réfractaire, n’est pas objectivable. Elle ne peut donc pas servir de critère clair, ni pour le patient ni pour le médecin. Nous parlons ici d’un geste irréversible. La souffrance psychologique ne peut paver la voie à l’aide à mourir.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Éric Michoux, pour soutenir l’amendement no 2441.

    M. Éric Michoux

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    Les professionnels de santé alertent eux-mêmes sur le caractère subjectif, évolutif, parfois réversible de la souffrance psychologique. On sait tous qu’avoir le moral permet de se sortir d’une situation difficile.
    Quand la souffrance physique devient à ce point insupportable, elle provoque de la souffrance psychologique. Elle peut conduire à la dépression. Jusqu’à quel point traiter la dépression permettrait de soulager la souffrance physique ?
    La souffrance psychologique dépend aussi des difficultés d’accès aux soins et de notre capacité à aider ceux de nos concitoyens qui rencontrent ces difficultés. Dans les territoires ruraux, elles sont telles que la souffrance psychologique du malade est difficile à soulager. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Juvin, pour soutenir l’amendement no 2499.

    M. Philippe Juvin

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    Nous discutons maintenant de la distinction entre douleur réfractaire et douleur insupportable. Nous sommes réservés, pour ne pas dire inquiets, quant à l’inclusion des douleurs psychologiques parmi les conditions d’accès à l’aide à mourir.
    La précédente proposition de loi retenait la présence de douleurs physiques « et » psychologiques comme condition d’accès à l’aide à mourir, tandis que celle dont nous discutons le conditionne à la présence d’une souffrance physique « ou » psychologique. Dans la lettre que nous avons tous reçue, le CNPP nous avertit que « nombre de patients atteints de pathologies psychiatriques graves et persistantes –⁠ dépression sévère, schizophrénie, troubles de la personnalité – parfois soignés sans leur consentement, pourraient revendiquer remplir les critères fixés par le texte » parce qu’ils souffrent psychologiquement, parfois de façon insupportable.
    Nous craignons qu’en acceptant la prise en compte de ces souffrances psychologiques au caractère subjectif, l’aide à mourir puisse être autorisée pour un patient atteint d’une pathologie psychiatrique, qui aurait refusé son traitement, pourtant possible. Ce refus est documenté et justifie que les psychiatres contraignent leurs patients à une partie de leur traitement.

    Mme la présidente

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    Nous poursuivons la discussion commune avec les amendements identiques nos 251 et 640.
    L’amendement no 251 de Mme Josiane Corneloup est défendu.
    La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement no 640.

    M. Patrick Hetzel

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    Les auteurs de « L’appel des psys » ont choisi des mots précis : « Chaque jour, nous recevons des patients persuadés que leur souffrance est sans issue. Notre mission est de leur montrer qu’il existe des moyens de l’apaiser, de redonner du sens à leur existence. Si la mort provoquée devient une option légale, elle enverra un message contradictoire : alors que nous luttons pour détourner nos patients du suicide, la société leur dira que, dans certains cas, leur disparition est acceptable. Ce paradoxe fragilise notre travail et érode la confiance de ceux qui cherchent une issue à leur détresse. Nous le savons : le désespoir est un état temporaire, parfois long, mais jamais une fatalité. »
    Ils nous alertent, en rappelant que l’orientation que nous donnerons à la loi pourrait fragiliser leur travail et compromettre l’issue du colloque singulier qu’ils mènent avec leur patient en vue de l’amélioration de son état. Nous ne pouvons pas balayer cette alerte d’un revers demain.

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Nous ne l’avons pas fait.

    Mme la présidente

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    Nous poursuivons la discussion commune avec les amendements identiques nos 137, 396, 1909, 2481 et 1608.
    L’amendement no 137 de M. Corentin Le Fur est défendu.
    La parole est à Mme Justine Gruet, pour soutenir l’amendement no 396.

    Mme Justine Gruet

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    Comme Thibault Bazin, je considère que nous sommes loin du texte équilibré que vous défendiez l’année dernière, madame la ministre. La définition des souffrances le prouve : certes, nous avons repris l’examen du texte là où il avait été arrêté, mais j’ai le sentiment que vous n’auriez pas souhaité défendre cette disposition à l’époque.
    L’amendement no 396 tend à substituer à la première occurrence du mot « ou » le mot « et » à l’alinéa 8 de l’article 4. La souffrance psychologique peut être définie comme une détresse intérieure, qu’elle soit ponctuelle ou chronique, légère ou intense –⁠ elle peut même être aussi intense et invalidante que la souffrance physique, je le conçois bien.
    Néanmoins, s’il est de notre devoir d’entendre cette détresse, nous manquerions de discernement si nous permettions l’aide active à mourir avant que le soulagement des souffrances psychologiques ait été tenté.
    Après l’admission en soins palliatifs, la prise en charge psychologique de patients ayant d’abord refusé un accompagnement et celle de leur entourage peuvent parfois faire diminuer la demande de mort. La volonté de mourir, lorsqu’elle est encore exprimée après un rendez-vous avec un psychiatre, peut être entendue ; en tant que législateurs, nous manquerions de discernement si nous n’insistions pas sur l’analyse, l’écouter et l’accompagnement par un psychologue ou un psychiatre.

    Mme la présidente

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    L’amendement no 1909 de M. Alexandre Allegret-Pilot est défendu.
    La parole est à M. Julien Odoul, pour soutenir l’amendement no 2481.

    M. Julien Odoul

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    L’amendement, de repli, vise à exclure du droit à l’euthanasie des personnes ne présentant que des souffrances psychologiques et c’est très important.
    Nous sommes à un point de bascule. Aussi, le principe de précaution et le principe de prudence vis-à-vis des dérives constatées ou potentielles –⁠ pressions, abus de faiblesse – devraient nous engager à ne pas accepter que les souffrances psychologiques justifient l’aide à mourir. Il y va de l’équilibre du texte.
    On nous accuse d’être restrictifs,…

    Mme Danielle Simonnet

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    Oui !

    M. Julien Odoul

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    …mais nous sommes à un point de bascule. Nous allons vers la création d’un droit inédit dans notre pays et la moindre des choses devrait être de garantir la protection de ceux qui pourraient subir pressions ou dérives : le principe de précaution et de prudence doit nous conduire à exclure les personnes ne présentant que des souffrances psychologiques de l’exercice de ce droit. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l’amendement no 1608.

    M. Thibault Bazin

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    Par cet amendement, je vous propose de revenir à la rédaction que nous avions adoptée l’an dernier en commission. L’alinéa 8 de l’article 4 débuterait donc ainsi : « Présenter une souffrance physique et éventuellement psychologique. »
    L’idée est de ne pas nier l’existence de souffrances psychologiques très importantes, car de nombreuses personnes atteintes d’une maladie incurable ou qui découvrent cette condition peuvent souffrir d’une dépression, bien souvent masquée par cette première affection.
    Le professeur Bringer, président du comité d’éthique de l’Académie nationale de médecine, nous l’avait dit lors de son audition en avril dernier. Il nous a rappelé qu’il convenait « d’éviter les dérives observées dans certains pays où des jeunes de 20 ans, atteints d’anorexie mentale, ont reçu une aide à mourir », mais également que « de nombreuses personnes atteintes d’une maladie chronique en phase terminale souffrent d’un état dépressif masqué, et sont susceptibles de formuler des demandes influencées par cette dépression non diagnostiquée ».
    Prenons garde à ne pas abandonner des personnes qui auraient besoin d’aide. Les professionnels de santé doivent tout faire pour diminuer la détresse psychologique d’un malade, ce que nous devons impérativement prendre en compte.
    Qu’on soit pour ou contre la légalisation de la mort provoquée, faisons en sorte que des personnes qui ne présentent que des souffrances psychologiques, par exemple liées à l’annonce d’une affection grave et incurable ne s’engagent pas dans ce processus irréversible, quand bien même elles en rempliraient les conditions. S’en tenir à la rédaction actuelle de la proposition de loi, ce serait aller trop loin.

    Mme la présidente

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    Nous poursuivons la discussion commune avec les amendements identiques, nos 87, 985 et 1812, qui font l’objet d’une demande de scrutin public par le groupe Droite républicaine.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille, pour soutenir l’amendement no 87.

    M. Cyrille Isaac-Sibille

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    Beaucoup d’entre nous sont perturbés par l’emploi de la conjonction « ou » dans l’énoncé de la condition d’accès à l’aide à mourir. Qui d’entre nous accueillerait l’annonce de sa maladie grave, à un stade avancé, sans trouble psychique ? Il faut être très fort pour rester de marbre face pareille annonce !
    L’annonce d’une affection par une maladie grave et incurable fait toujours apparaître des troubles psychiques et, si la proposition de loi est votée, elle rendra aussi le patient éligible à l’aide à mourir. Bien évidemment, il n’y a pas de hiérarchie entre douleurs physiques et psychologiques, mais il y a un déséquilibre : si la douleur physique génère toujours des troubles psychologiques, l’inverse n’est pas vraie et une personne atteinte par ces troubles ne présente pas nécessairement de troubles physiques. Pour cette raison, les douleurs physiques et psychologiques ne peuvent pas être traitées de la même manière.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Agnès Firmin Le Bodo, pour soutenir l’amendement no 985.

    Mme Agnès Firmin Le Bodo

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    Je propose de reformuler ainsi le début du quatrième critère : « Présenter une souffrance physique accompagnée éventuellement d’une souffrance psychologique. » Au point 24 de son avis du 10 avril 2024, le Conseil d’État observe que l’annonce d’une maladie peut entraîner une souffrance psychologique avant d’entraîner les conséquences physiques liées à la maladie elle-même.
    Nous pourrions conserver la formulation actuelle de la proposition de loi, mais il serait alors difficile d’admettre que seules les conséquences de l’annonce la maladie pourraient, dans certains cas, donner lieu à une demande d’aide à mourir. L’adoption de mon amendement pourrait offrir une solution à ce problème.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Annie Vidal, pour soutenir l’amendement no 1812.

    Mme Annie Vidal

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    Identique à l’amendement no 985, il vise à revenir à la version du projet de loi de 2024, qui retenait la présence de douleurs psychologique en tant que critère cumulatif au critère de douleurs physiques. Le texte que nous discutons utilise également des critères cumulatifs, mais les décline en alternatives, qui complexifient l’appréciation de l’état du patient.
    Par ailleurs, les psychologues, les psychiatres et les psychanalystes nous ont alertés. Ils reçoivent chaque jour des patients en souffrance psychologique et qui déclarent que celle-ci est sans issue. Leur rôle est de convaincre ces patients qu’une douleur psychologique, bien qu’elle semble insurmontable à certains moments, peut trouver une issue.
    En conservant l’article en l’état, nous enverrions un mauvais message aux patients. Pour cette raison, je vous invite à soutenir mon amendement.

    Mme la présidente

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    L’amendement no 1052 de M. Thomas Ménagé est défendu.
    La parole est à M. René Pilato, pour soutenir l’amendement no 2116.

    M. René Pilato

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    Nous défendons la suppression de la caractérisation des souffrances –⁠ physiques ou psychologiques – du patient. L’alinéa 8 de l’article 4 serait ainsi rédigé : « Présenter une souffrance liée à cette affection, qui est soit réfractaire aux traitements, soit insupportable selon la personne lorsque celle-ci a choisi de ne pas recevoir ou d’arrêter de recevoir un traitement. »
    Cette condition resterait associée à d’autres critères, notamment l’engagement du pronostic vital et l’atteinte par une maladie incurable.
    L’Organisation mondiale de la santé définit la souffrance comme l’expérience douloureuse, qu’elle soit physique ou mentale. Or nous sommes toutes et tous ici en difficulté face à cette définition, car les souffrances physiques et psychologiques se nourrissent l’une de l’autre. Certains l’ont fort bien dit, notamment le rapporteur général qui a rappelé plus tôt que ces deux types de souffrances étaient souvent mêlés, au point qu’il est délicat de les distinguer.
    Je vous propose donc de retirer la caractérisation « physique ou psychologique » dans la mesure où les autres critères sont suffisants : il faut que le patient en phase avancée ou terminale de sa maladie éprouve une souffrance insupportable et réfractaire au traitement et que son pronostic vital soit engagé.
    Cet amendement résume l’esprit de l’ensemble de cette longue discussion commune. Je vous invite à le voter car il est excellent. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    Même si ces nombreux amendements n’ont pas tous le même objectif, la majeure partie d’entre eux tendent à supprimer le critère psychologique ou à en atténuer la portée.
    Je ne veux pas établir de hiérarchie entre souffrance physique et psychologique. Je ne le peux d’ailleurs pas : ce ne serait pas respectueux pour ceux qui éprouvent une souffrance psychologique à laquelle nous devons être tout aussi attentifs.
    Monsieur Isaac-Sibille, vous avez souligné que les deux types de souffrance étaient intimement liés –⁠ c’est vrai. Pour autant, il ne faut ni les hiérarchiser, ni les considérer séparément. Je suis donc très attaché à cette double mention de la douleur physique et psychologique.
    Je rappelle que cette condition fait partie d’un ensemble de critères qui sont cumulatifs –⁠ c’est un point important. Une souffrance strictement psychologique n’ouvrira absolument pas un droit à l’aide à mourir.
    Enfin, la souffrance psychologique en question doit être liée à une affection grave et incurable.
    Je suis donc défavorable aux amendements qui tendent à supprimer la mention de la souffrance psychologique.
    L’amendement de M. Pilato complique les choses. Vous n’êtes pas sans savoir combien le débat d’aujourd’hui est difficile, combien certains cherchent à hiérarchiser et à supprimer. Dans ce contexte, il me semble plus judicieux de nous en tenir à la rédaction actuelle, qui est simple et permet de conserver l’absence de hiérarchisation.

    Mme Danielle Simonnet

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    Oui !

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    Nous devons considérer de la même manière les souffrances psychologiques et les souffrances physiques –⁠ elles sont d’égale dignité.
    Avis défavorable sur l’ensemble des amendements. (Mme Danielle Simonnet applaudit.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Je suis très attachée à ce que le texte mentionne l’ensemble des éléments qui seront pris en compte par le collège qui examinera le patient. Nous ne devons pas uniquement prendre en compte les douleurs physiques ou psychologiques. Nous parlons d’un patient engagé dans un parcours de soins, atteint d’une affection grave et incurable qui engage son pronostic vital. Il ne faut surtout pas que nous laissions penser que seule la douleur psychologique sera prise en compte. On tiendra compte de la situation globale du patient, à l’aide de critères cumulatifs. Je dis cela avec toute la considération que je porte à aux douleurs psychologiques, qui peuvent être causées par l’état de santé du patient.
    Pour toutes ces raisons, je suis défavorable à ces amendements.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Michel Lauzzana.

    M. Michel Lauzzana

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    Il est question de souffrances psychiques, mais entendons-nous bien : nous parlons d’une souffrance profonde, pas d’une petite dépression !

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Bien sûr !

    M. Michel Lauzzana

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    Certains en arrivent à se jeter par la fenêtre. Ces affections peuvent être si réfractaires aux traitements qu’on en vient à recourir à la sismothérapie pour traiter certaines dépressions très sévères –⁠ c’est ce qu’on appelait autrefois les électrochocs. Cette souffrance psychique peut être très profonde, parfois plus que la souffrance physique.
    Ce texte prévoit que le médecin peut solliciter l’avis de spécialistes et agit dans un cadre collégial. Pour qui prenez-vous les médecins ? Ils exercent par vocation. Tout leur travail repose sur la volonté de soulager et d’accompagner le patient. Croyez-vous que s’il existe le moindre doute, la moindre possibilité de soulager la souffrance psychique, les médecins ne prendront pas toutes les dispositions pour que le patient consulte un psychologue ou un psychiatre, afin d’aller au fond des choses ? Je ne le conçois pas.
    Nous mettons au point toute une série de procédures, par exemple à l’article 5 –⁠ le médecin peut orienter le patient vers un psychologue ou un psychiatre. Ce texte responsabilise les médecins, qui ne prendront pas de décisions à la légère.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Joëlle Mélin.

    Mme Joëlle Mélin

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    Monsieur Lauzzana, j’ai entendu la question que vous nous avez posée. Sachez qu’en Belgique, il y a deux ans, une jeune fille de 23 ans qui avait développé un syndrome post-traumatique à la suite des attentats de Bruxelles, a demandé que l’on mette fin à sa vie : sa demande a été approuvée. Ce genre de choses peut donc arriver.
    Certes, la Belgique est en avance sur nous, mais comme nous le disions, il y a des fils conducteurs et des portes ouvertes. Au Canada, les 6 % de décès correspondant à un processus artificiel de fin de vie comprennent des cas de patients éprouvant de la souffrance psychique et psychologique, qui peut être très profonde.
    En revanche, le syndrome post-traumatique est une affection curable.

    M. Yannick Monnet

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    C’est pour cela que l’on a précisé que l’affection doit être incurable !

    Mme Joëlle Mélin

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    Si nous laissons une porte s’entrouvrir, elle finira par être ouverte ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Julie Laernoes.

    Mme Julie Laernoes

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    À l’évidence, ces amendements ne portent pas vraiment sur le fond, mais relèvent de l’obstruction. (Protestations sur les bancs des groupes RN, DR et UDR.)

    M. Patrick Hetzel

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    Elle ose !

    Mme Julie Laernoes

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    Dans leurs argumentaires, les orateurs laissent entendre qu’on ouvrirait l’aide active à mourir aux affections strictement psychologiques. C’est faux, et chacun le sait !

    M. Julien Odoul

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    C’est ce qui arrivera, c’est la prochaine étape !

    M. Sébastien Peytavie

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    On parle de ce texte, pas de la Belgique !

    Mme Julie Laernoes

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    Il est ici question de souffrances physiques ou psychologiques. Comme l’a dit le rapporteur général, il ne faut pas hiérarchiser ces deux types de souffrances, comme vous tendez à le faire par certains amendements. Ne prétendons pas qu’il s’agit d’une dérive, ou que nous sommes en train d’ouvrir l’aide active à mourir aux patients uniquement atteints d’une maladie psychologique. (Exclamations sur quelques bancs des groupes RN et DR.)
    Ce n’est pas l’objet du texte que nous discutons aujourd’hui. Ce droit est en effet ouvert dans d’autres pays, qui ont procédé à une dépénalisation. En France, nous nous orientons vers la légalisation et la création d’un droit à l’aide active à mourir, ce qui est fondamentalement différent.

    M. Patrick Hetzel

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    Ce que vous dites est faux !

    Mme Julie Laernoes

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    Concentrons-nous sur le débat. N’essayez pas de faire peur en prétendant que la mention de souffrances physiques ou psychologiques entraîne l’ouverture de ce droit aux malades atteints d’une pathologique strictement psychologique. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe EcoS.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Juvin.

    M. Philippe Juvin

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    Ce que vous venez de dire n’est pas vrai.
    Je reprends mon exemple : un schizophrène qui fait de multiples tentatives de suicide…

    Mme Danielle Simonnet

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    La schizophrénie n’est pas incurable !

    Mme Élise Leboucher

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    On peut stabiliser les patients !

    M. Philippe Juvin

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    La schizophrénie est une maladie grave et incurable.

    Mme Danielle Simonnet

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    Un cas sur trois !

    M. Philippe Juvin

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    Madame, si vous avez trouvé le traitement pour guérir la schizophrénie, publiez vos découvertes ! (Applaudissements sur les bancs des groupes DR, RN et UDR.) Vous confondez incurable et intraitable. Il existe des traitements en cas de schizophrénie, c’est vrai. Mais c’est malheureusement une maladie incurable : on n’en guérit pas.

    M. Philippe Vigier

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    Oui, mais le pronostic vital n’est pas engagé !

    M. Philippe Juvin

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    Si le patient fait de multiples tentatives de suicide, on peut dire que son pronostic vital est engagé.

    M. Sébastien Peytavie

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    C’est faux !

    M. Philippe Juvin

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    Malheureusement, cela arrive. Il est aussi assez fréquent qu’il ressente des souffrances insupportables, qui sont uniquement psychologiques. Certains patients schizophrènes pourraient donc être considérés comme satisfaisant à tous les critères. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes DR et RN.)

    M. Bartolomé Lenoir

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    C’est la réalité !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre.

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Jusqu’à présent, nous avons pu travailler sur le fond.

    M. Sébastien Peytavie

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    Maintenant on touche le fond !

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Ce sujet est extrêmement lourd, comme chacun peut le mesurer dans cet hémicycle.
    Pour accéder à l’aide à mourir, le patient doit être atteint d’une maladie grave et incurable, son pronostic vital doit être engagé et il doit être capable de discernement –⁠ cet élément est fondamental.

    M. Philippe Vigier et Mme Nicole Dubré-Chirat

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    Oui !

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Arrêtons d’alimenter les peurs en parlant d’affections qui sont certes sévères mais qui ne correspondent à aucun dossier existant. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SOC et EcoS. –⁠ Mme Nicole Dubré-Chirat et M. Philippe Vigier applaudissent également.)
    Nous ne sommes d’ailleurs pas là pour examiner les dossiers des patients, mais pour écrire un texte de loi qui doit fixer des critères indissociables les uns des autres.
    Par ailleurs, le patient doit formuler une demande. Ne laissons pas entendre que nous pourrions proposer cette possibilité à un patient qui n’aurait pas fait de demande. La demande du patient est au cœur de ce texte. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et EcoS ainsi que sur quelques bancs des groupes LFI-NFP et Dem. –⁠ Mme Sophie Errante applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Olivier Falorni, rapporteur général.

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    Monsieur Juvin, vous nous aviez habitués à autre chose –⁠ solidité et cohérence. (M. Philippe Juvin s’exclame.)
    Je vais vous répondre sérieusement. Vous nous parlez de la schizophrénie : cette maladie n’engage pas le pronostic vital. (M. Aurélien Saintoul applaudit.)

    M. Philippe Juvin

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    S’il y a tentative de suicide, si !

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    Vous persistez ? (« Oui ! » sur plusieurs bancs des groupes RN et DR.)
    Vous rendez-vous compte de ce que vous dites ? Nous parlons d’une affection engageant le pronostic vital. Depuis quand une tentative de suicide est-elle une affection ? Êtes-vous sérieux ? (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR, LFI-NFP, SOC, EcoS et Dem.)
    Il est peut-être temps de faire une pause ! (Exclamations sur les bancs des groupes RN, DR et UDR.)

    Mme la présidente

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    Monsieur le rapporteur général, je vous en prie !

    M. Philippe Juvin

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    Une tentative de suicide engage le pronostic vital !

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    Vous nous aviez habitués à des arguments qui tenaient la route ! Laisser entendre que la schizophrénie est une affection qui engage le pronostic vital car les patients peuvent faire des tentatives de suicide, cela n’a aucun sens, aucun !

    M. Gérault Verny

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    C’est quoi, cette moraline ?

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 96, 135, 1051, 1266, 1322, 1607, 2004, 2208, 2370, 2441 et 2499.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        169
            Nombre de suffrages exprimés                167
            Majorité absolue                        84
                    Pour l’adoption                77
                    Contre                90

    (Les amendements identiques nos 96, 135, 1051, 1266, 1322, 1607, 2004, 2208, 2370, 2441 et 2499 ne sont pas adoptés.)

    (Les amendements identiques nos 251 et 640 ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 137, 396, 1909 et 2481.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        167
            Nombre de suffrages exprimés                163
            Majorité absolue                        82
                    Pour l’adoption                73
                    Contre                90

    (Les amendements identiques nos 137, 396, 1909 et 2481 ne sont pas adoptés.)

    (L’amendement no 1608 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 87, 985 et 1812.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        168
            Nombre de suffrages exprimés                165
            Majorité absolue                        83
                    Pour l’adoption                80
                    Contre                85

    (Les amendements identiques nos 87, 985 et 1812 ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 1052.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        168
            Nombre de suffrages exprimés                165
            Majorité absolue                        83
                    Pour l’adoption                70
                    Contre                95

    (L’amendement no 1052 n’est pas adopté.)

    (L’amendement no 2116 n’est pas adopté.)

    ------------------Cette partie de la séance est en cours de finalisation---------------------------------------------

    M. Thibault Bazin

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    Le texte initial du projet de loi déposé le 10 avril 2024 parlait d’une souffrance « qui est soit réfractaire aux traitements, soit insupportable lorsque la personne ne reçoit pas ou a choisi d’arrêter de recevoir des traitements ». Il ne contenait pas les mots « selon la personne », qui ont été ajoutés au cours de l’examen du projet de loi en séance publique.
    Mme Simonnet nous disait qu’il fallait que les médecins lâchent prise –⁠ mais ce sont bien les médecins qui vont évaluer la situation, et non le patient lui-même. L’idée n’est bien sûr pas de ne pas respecter les souffrances, y compris psychologiques –⁠ qu’il faut au contraire mieux prendre en considération, et c’est pourquoi je prévois ici l’intervention d’un spécialiste de la douleur.
    Je propose de remplacer les mots « selon la personne » par « d’après le diagnostic écrit d’un algologue ». En effet, ce spécialiste n’apparaît nulle part dans le texte alors que la question de la douleur est centrale. Soulager des souffrances, surtout celles qui n’ont pas encore été traitées, serait à l’honneur de notre société.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Christine Loir, pour soutenir l’amendement no 2269.

    Mme Christine Loir

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    Cet amendement traduit notre volonté, que je crois partagée, de continuer envers et contre tout à développer les soins palliatifs et à offrir un accompagnement digne à chaque patient en fin de vie. L’unanimité qui s’est faite sur ce point est un engagement qui doit guider notre action. Nous devons garantir à chaque personne en souffrance l’accès à des soins adaptés.
    Ce n’est qu’après avoir pleinement exploré et exposé des solutions que nous pouvons envisager d’autres voies. C’est là une exigence éthique, humaine et médicale. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    L’amendement no 1938 de Mme Lisette Pollet est défendu.
    Quel est l’avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?

    Mme Brigitte Liso, rapporteure

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    Nous avons déjà répondu sur le fond aux amendements nos 2269 et 1938.
    Monsieur Bazin, l’article 6, qui traite de la procédure, prévoit que le médecin peut recueillir l’avis d’un spécialiste de la pathologie ainsi que celui d’autres professionnels de santé. Votre amendement est donc satisfait.
    S’ils ne sont pas retirés, je serai défavorable à ces trois amendements.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Même avis.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Vigier.

    M. Philippe Vigier

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    Monsieur Bazin, vous nous disiez en commission qu’il ne fallait pas emmêler les débats en parlant de l’article 6 quand nous débattions de l’article 4, et inversement –⁠ et là, vous proposez de demander l’avis d’un algologue ?
    Nous débattons ici des conditions d’accès à l’aide à mourir. Restons sur ce sujet. La décision collégiale est prévue à l’article 6, et nul n’empêche de demander l’avis d’un algologue ; mais cette disposition n’a pas sa place ici. Vous qui aimez la clarté et la transparence, vous créez de la confusion ! Vous ne voulez pas que cette loi soit confuse : conservons sa rédaction.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Yannick Monnet.

    M. Yannick Monnet

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    L’amendement de M. Bazin n’est pas satisfait, et heureusement ! Si vous aviez proposé d’ajouter l’avis de l’algologue, nous aurions pu en discuter : c’était rajouter un critère. Mais cet amendement est terrible : en supprimant les mots « selon la personne », il supprime la parole du patient. Vous n’en avez que faire, et vous préférez faire appel à des médecins ! Ce n’est pas possible. (M. Sébastien Peytavie, M. René Pilato et Mme Danielle Simonnet applaudissent.)

    Mme Danielle Simonnet

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    Oui ! On voit bien quelle est leur philosophie !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Thibault Bazin.

    M. Thibault Bazin

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    Je ne veux pas du tout supprimer l’avis de la personne, rassurez-vous. J’adopte plutôt le point de vue du médecin : n’est-ce pas aussi à lui d’évaluer ce critère ? Il me semble qu’il doit y avoir un dialogue singulier entre le médecin spécialiste de la souffrance –⁠ souffrance peut-être psychologique – et le patient, qui est bien sûr au cœur de la relation, ladite relation pouvant d’ailleurs être biaisée, des deux côtés. La suppression de cette formule n’annule pas le recueil de la parole du patient !
    Ce qui m’inquiète, madame la ministre, c’est le cas des personnes dont les souffrances sont non pas physiques, mais uniquement psychologiques. On nous dit que ce sera pris en considération dans la procédure, mais celle-ci est liée aux critères d’accès, comme ceux-ci sont liés à la définition. Si l’on ne prévoit pas l’intervention d’un algologue parmi les critères, pourquoi le ferions-nous intervenir dans la procédure ? Celle-ci sert à vérifier les critères.
    Le médecin qui va instruire la demande pourra solliciter l’avis d’autres médecins, dites-vous, madame la rapporteure. La consultation d’un spécialiste n’est donc pas obligatoire. Dans le cas de souffrances seulement psychologiques, prévoyez-vous la consultation obligatoire par exemple d’un psychiatre ? Et son avis sera-t-il conforme ?

    Mme Brigitte Liso, rapporteure

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    Nous faisons confiance !

    M. Thibault Bazin

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    La vulnérabilité des personnes doit être prise en considération au même titre que leur autonomie.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre.

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Monsieur Bazin, vous connaissez chaque mot de ce texte. Vous savez parfaitement qu’il y a un enchaînement d’éléments. Le fait générateur, c’est la pathologie du patient, l’affection grave et incurable, comme le prévoit l’alinéa 7. Ensuite, l’alinéa 8 parle de la souffrance, physique ou psychologique. Cela a déjà été dit de nombreuses fois, notamment par le rapporteur général de la proposition de loi : la souffrance psychologique seule ne suffit pas. Dès lors que le pronostic vital du patient n’est pas engagé par une affection grave et durable, le texte ne peut pas s’appliquer.
    S’agissant de l’algologue, il pourra intervenir au sein du collège médical. C’est une décision qui sera prise par des professionnels de santé en fonction de la situation du patient.
    En écrivant « selon la personne », nous montrons bien, et c’est heureux, que chaque cas est unique. La procédure que nous cherchons à écrire doit être adaptée à la spécificité de chaque patient concerné.

    Mme Marie-Noëlle Battistel

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    Toute est dit !

    (L’amendement no 1610 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 2269.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        156
            Nombre de suffrages exprimés                153
            Majorité absolue                        77
                    Pour l’adoption                63
                    Contre                90

    (L’amendement no 2269 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 1938.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        156
            Nombre de suffrages exprimés                153
            Majorité absolue                        77
                    Pour l’adoption                60
                    Contre                93

    (L’amendement no 1938 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 24, 397, 1427, 210, 448, 211 et 492, pouvant être soumis à une discussion commune.
    Les amendements nos 24, 397 et 1427 sont identiques, de même que les amendements nos 211 et 492.
    Les amendements no 24 et identiques font l’objet d’une demande de scrutin public par le groupe Droite républicaine ; les amendements nos 210 et 211, d’une demande similaire par le groupe Rassemblement national.
    Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement no 24.

    M. Patrick Hetzel

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    Ces amendements posent la question de la place du patient. La loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, dite loi Kouchner, a mis le patient au centre de toutes les préoccupations. Toutefois, un équilibre doit être trouvé entre le consentement du malade et le devoir des professionnels de santé, et plus particulièrement des médecins, de tout tenter pour assurer sa survie.
    Avec ce texte, on va demander à des médecins de se prononcer alors que le patient demande un arrêt du traitement. Si le fait générateur est l’arrêt du traitement, alors cela pose un problème éthique : qu’autorise la société ? Qu’admet-elle et que n’admet-elle pas ?
    Nous aimerions qu’il n’y ait pas la moindre ambiguïté sur le fait que le refus de traitement ne peut pas être le fait générateur.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Justine Gruet, pour soutenir l’amendement no 397.

    Mme Justine Gruet

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    Vous parlez beaucoup de l’un des termes de notre devise : la liberté, en l’occurrence celle du patient ; mais qu’en est-il de la fraternité, et du devoir de fraternité de notre société ?
    Cet amendement tend à supprimer la fin de l’alinéa 8 : « lorsque celle-ci a choisi de ne pas recevoir ou d’arrêter de recevoir un traitement ». J’aimerais revenir sur cette notion de choix. Je l’avais évoqué la semaine dernière : il y aura une différence de temporalité entre les soins palliatifs et l’aide à mourir. Dans une vingtaine de départements, il n’y aura pas d’unité de soins palliatifs, alors que l’aide active à mourir sera effective sur l’ensemble du territoire dès que la loi sera promulguée. (M. Charles Sitzenstuhl applaudit.) On sait aussi qu’il faut parfois des semaines pour avoir accès aux soins palliatifs, tandis que l’aide à mourir pourrait être accordée dans les quinze jours, mais éventuellement plus tôt, et mise en œuvre dans les quarante-huit heures, mais éventuellement plus tôt.
    Le patient aura-t-il alors réellement le choix ? En théorie, oui, car on lui proposera un accès aux soins palliatifs, mais rendons-nous compte des difficultés d’application de cette disposition. N’aura-t-il pas recours à l’aide active à mourir par manque d’accès aux soins, notamment aux soins palliatifs ?

    Mme Anaïs Belouassa-Cherifi

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    Oh là là !

    Mme la présidente

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    L’amendement no 1427 de M. Alexandre Allegret-Pilot est défendu.
    La parole est à Mme Marie-France Lorho, pour soutenir l’amendement no 210.

    Mme Marie-France Lorho

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    Aux termes du serment d’Hippocrate, le premier souci du médecin est « de rétablir, de préserver ou de promouvoir la santé dans tous ses éléments, physiques et mentaux, individuels et sociaux ».
    Cet amendement de repli vise à rappeler cette évidence de la mission du médecin en intégrant aux critères d’admission au suicide assisté ou délégué le fait d’avoir reçu tous les soins possibles dont le patient peut bénéficier.
    Alors que l’hôpital fait face à des difficultés structurelles, dues au manque de moyens comme de personnel, il apparaît prudent de s’assurer que tous les soins possibles ont été prodigués. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Laurent Panifous, pour soutenir l’amendement no 448.

    M. Laurent Panifous

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    Cet amendement, déposé à l’initiative de M. Paul-André Colombani, tend à clarifier le critère relatif à la souffrance insupportable en l’absence de refus de traitement. Écrire « en cas de refus, de limitation ou d’arrêt de » permet d’englober les différents cas d’absence de traitement. Cette formulation s’appuie sur des dispositions déjà présentes dans le code de la santé publique.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Pierre Meurin, pour soutenir l’amendement no 211.

    M. Pierre Meurin

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    Afin de garantir que tous les efforts de soin ont été réalisés avant l’ultime recours que doit être l’euthanasie, cet amendement vise à subordonner l’acte de mort –⁠ j’ai peine à prononcer cette formule – au moins à la réalisation antérieure d’un acte médical de soin. Il s’agit donc d’un amendement de repli extrême par rapport à mes convictions personnelles, qui me font m’opposer totalement à ce texte.
    Si cet amendement n’était pas adopté, un conflit moral voire juridique pourrait survenir entre l’accès à l’euthanasie et la non-assistance à personne en danger. Les soignants ont vocation à soigner et non à abdiquer l’effort de soin. En outre, l’accoutumance à l’euthanasie (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP) pourrait conduire des personnes à s’interroger sur leur propre droit à la vie, ce qui du point de vue sociétal présente un risque et me semble vertigineux et catastrophique. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN. –⁠ M. Bartolomé Lenoir applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille, pour soutenir l’amendement no 492.

    M. Cyrille Isaac-Sibille

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    Il est légitime qu’un patient souhaite arrêter un traitement symptomatique de la douleur, qu’elle soit physique ou psychologique, parce que celui-ci ne fonctionne pas ou qu’il provoque des effets secondaires –⁠ il a le droit de refuser l’obstination thérapeutique et de choisir d’interrompre un traitement. Toutefois, pour parler d’obstination thérapeutique, encore faut-il que le soin ait commencé : si le patient refuse par principe tout traitement symptomatique, il s’agit d’autre chose. Le professionnel de santé doit pouvoir proposer un traitement. C’est la raison pour laquelle je propose d’inscrire dans la loi que l’accès à l’aide à mourir est subordonné à la réalisation d’au moins un premier traitement ; le patient a le choix d’interrompre celui-ci, mais encore faut-il qu’il ait pu en bénéficier.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?

    Mme Brigitte Liso, rapporteure

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    La loi Kouchner de 2002 dispose que le patient a le droit de refuser un traitement.

    M. Philippe Vigier

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    Eh oui !

    Mme Brigitte Liso, rapporteure

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    Doit-on punir une personne qui prendrait une telle décision en rejetant sa demande d’aide à mourir ?
    Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Olivier Falorni, rapporteur général.

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    Puisque l’on vient d’évoquer le travail formidable réalisé par Bernard Kouchner, j’en profite pour rappeler que la cathédrale législative que nous avons évoquée –⁠ ce « monument humaniste » cher à notre collègue Potier – repose sur les lois Kouchner, Leonetti et Claeys-Leonetti. Alors que les positions de Jean Leonetti et d’Alain Claeys sont bien connues –⁠ elles divergent, mais Alain Claeys a dit à plusieurs reprises qu’il soutenait cette proposition de loi –, M. Kouchner n’avait pas encore pris position. Je viens de prendre connaissance d’une magnifique tribune qu’il a rédigée dans Le Monde.
    Alors que nous évoquons la loi qui porte son nom, il m’est impossible de ne pas citer cet écrit : « Il y a cinquante ans entrait en vigueur la loi Veil sur l’avortement, et l’union, même partielle, avait, une nouvelle fois, fait la force, transcendant les clivages politiques. Pareille mobilisation transpartisane est à nouveau possible. […] À son tour, 2025 saura intégrer dans le droit la demande ultime de certaines personnes malades […]. Il est temps que ce siècle, si économe en bonnes surprises, livre enfin une grande loi de liberté, digne du pays qui a rédigé la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. »
    Je crois qu’il faut que nous soyons dignes de ce message –⁠ c’est tout ce qui doit nous guider aujourd’hui dans le pays de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR, SOC et Dem.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Océane Godard.

    Mme Océane Godard

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    Je lis l’exposé sommaire de l’amendement no 211 : « une personne qui fait ce choix ne peut engager la société sur sa décision. En refusant de se voir prodiguer des soins […], la personne encourage tacitement la société à accepter la mort de personnes […] »
    Quelle culpabilisation ! Nous parlons de femmes et d’hommes en fin de vie, ayant reçu un diagnostic terrifiant –⁠ une affection grave et incurable – et qui remplissent les cinq critères cumulatifs. Pardonnez-moi, mais il est absolument inhumain de faire peser une telle culpabilité sur les patients. Imaginez ce que vont penser les personnes malades de ces présentations d’amendements ! Ce n’est pas acceptable. Évidemment, nous voterons contre.
    En outre, cela vient d’être dit : ces amendements remettent en cause la loi Kouchner. Nous refusons une telle remise en cause.
    Enfin, dans une interview sur Radio France, une femme, Sandra, atteinte de la maladie de Charcot, s’est adressée à nous : « Messieurs les députés, s’il vous plaît, sortez de vos postures, sortez de votre idéologie et pensez aux patients. Le patient doit être au cœur de vos préoccupations. Aujourd’hui, je n’ai qu’envie de vivre » –⁠ car elle a envie de vivre – « mais ça me rassurerait de savoir que, si demain l’existence devient insupportable, la société m’aidera à mettre fin à mes souffrances. » Chers collègues qui êtes opposés à la proposition de loi, que lui répondez-vous ? (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SOC et LFI-NFP. –⁠ Mme Lisa Belluco applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Camille Galliard-Minier.

    Mme Camille Galliard-Minier

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    Certains de nos collègues entretiennent une ambiguïté : selon eux, on pourrait imposer l’aide à mourir à des personnes qui n’auraient pas reçu un traitement. Il ne s’agit pas de cela.

    Mme Danielle Simonnet

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    On ne leur impose pas !

    Mme Camille Galliard-Minier

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    Il s’agit de personnes qui ont la possibilité de refuser un traitement, conformément à la loi Kouchner. Rappelons en effet que l’article L. 1111-4 du code de la santé publique dispose qu’« aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne et ce consentement peut être retiré à tout moment ». Ce n’est que l’application d’un principe de liberté. Nous offrons, au nom du principe de fraternité évoqué par certains collègues, une autre liberté : celle de recourir à l’aide à mourir si le traitement a été arrêté et si –⁠ condition supplémentaire – les souffrances sont insupportables. (M. Stéphane Delautrette applaudit.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 24, 397 et 1427.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        182
            Nombre de suffrages exprimés                179
            Majorité absolue                        90
                    Pour l’adoption                72
                    Contre                107

    (Les amendements identiques nos 24, 397 et 1427 ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 210.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        175
            Nombre de suffrages exprimés                172
            Majorité absolue                        87
                    Pour l’adoption                70
                    Contre                102

    (L’amendement no 210 n’est pas adopté.)

    (L’amendement no 448 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 211 et 492.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        180
            Nombre de suffrages exprimés                177
            Majorité absolue                        89
                    Pour l’adoption                73
                    Contre                104

    (Les amendements identiques nos 211 et 492 ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de plusieurs demandes de scrutins publics : sur l’amendement no 1034, par le groupe UDR ; sur l’amendement n° 1453, par le groupe Horizons & indépendants ; sur l’amendement no 1714, par les groupes Rassemblement national et UDR.
    Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Gérault Verny, pour soutenir l’amendement no 1034.

    M. Gérault Verny

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    Il vise à compléter l’alinéa 8 par la phrase suivante : « Le médecin s’assure que cette souffrance ne résulte pas d’un isolement social, d’un état dépressif, d’une précarité psychologique ou d’un défaut de prise en charge adaptée. »
    Vous le savez, la demande de mort peut en réalité être une demande d’aide, d’écoute et de soutien. La souffrance qui pousse à souhaiter la mort n’est pas toujours physique ni irréversible ; elle peut naître de la solitude, d’un abandon, d’une détresse psychique ou encore d’un système de soins qui a manqué à ses devoirs.
    Si nous ne posons pas une telle exigence, nous courrons le risque de légitimer, au nom de ce que vous jugez être une liberté, des demandes qui sont en fait dictées par un désespoir que nous aurions pu éviter. L’aide à mourir ne peut pas devenir la réponse par défaut à un isolement que notre société aurait pu et aurait dû prévenir.
    L’amendement impose aux médecins un devoir de discernement élargi. Il ne suffit pas de constater une souffrance ; il convient d’en comprendre les racines et, surtout, de vérifier si elle ne peut pas être soulagée autrement, par une présence humaine, un accompagnement psychologique ou la reconstruction du lien social.
    Ce que je propose ici est un acte profondément humain : c’est refuser que l’on meure d’abandon ou de solitude, simplement parce qu’on en a fait la demande. En adoptant cet amendement, nous protégerions les plus vulnérables et affirmerions que la médecine n’est pas un instrument de renoncement. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Brigitte Liso, rapporteure

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    Dans notre texte, chaque mot compte. L’amendement est satisfait puisque la condition fixée à l’alinéa 8 prévoit que la souffrance est liée à l’affection.
    Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Danielle Simonnet.

    Mme Danielle Simonnet

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    À l’origine, il n’y avait qu’un seul texte, puis il a été divisé en deux, ce que le groupe Écologiste et social a déploré.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Il y a eu une seule DG !

    Mme Danielle Simonnet

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    Il y a eu une discussion générale commune parce qu’il y a quand même un lien entre les deux textes. L’enjeu d’octroyer davantage de moyens aux soins palliatifs et d’accompagnement est essentiel à nos yeux.
    Chers collègues, puisque vous êtes très préoccupés par la prise en charge des souffrances psychologiques dans notre société, je vous invite à participer aux prochaines manifestations des psychologues et à vous mobiliser lorsqu’ils alertent l’opinion sur l’insuffisance des moyens dont ils disposent. Venez aussi aux mobilisations pour l’hôpital psychiatrique, où la situation est encore pire qu’au sein de l’hôpital public en général. (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS et LFI-NFP. –⁠ Mme Ayda Hadizadeh applaudit également.)

    Mme Ayda Hadizadeh

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    Tout à fait !

    Mme Danielle Simonnet

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    Je ne vous y ai jamais vus !

    M. Sébastien Peytavie

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    Eh oui ! Vous avez même voté contre le dispositif Mon°soutien°psy !

    Mme Danielle Simonnet

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    Mobilisez-vous enfin au moment de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) !

    Mme la présidente

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    Merci, madame la députée.

    Mme Danielle Simonnet

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    Une dernière chose. Ici, nous sommes tous des députés. Nous ne sommes pas là en fonction de notre métier.

    Un député du groupe RN

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    C’est bien de le dire !

    Mme Danielle Simonnet

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    Pourtant, certains se présentent souvent comme médecins ; et comme ils sont médecins, ils auraient un poids et une autorité supérieure à celle des autres. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.) Vous savez quoi ? Je vais me la raconter moi aussi. Je suis psychologue. Eh bien, en tant que psychologue, la « précarité psychologique », je ne sais pas ce que cela signifie. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EcoS, LFI-NFP et SOC.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Pierre Meurin.

    M. Pierre Meurin

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    Certaines interventions sont assez douloureuses à entendre.

    M. Hadrien Clouet

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    Ah ça ! Nous sommes d’accord !

    Mme Karen Erodi

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    Les tiennes, par exemple !

    M. Pierre Meurin

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    J’essaierai néanmoins de m’exprimer le plus posément possible.
    Tout à l’heure, une collègue socialiste nous a placés hors du champ de la défense des droits de l’individu. Nous sommes tous en train de légiférer pour défendre ces droits, avec des convictions différentes. Certains tons utilisés dans ce débat ne me paraissent pas adaptés. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    Mme Simonnet vient de dire qu’un médecin n’avait pas nécessairement de poids. Nous avons tous des spécialités en tant que parlementaires, du fait de nos parcours. Souffrez qu’on puisse penser qu’un médecin, qui est au contact du terrain, dispose d’un tout petit peu plus de légitimité et de maîtrise sur ce sujet ! (Mêmes mouvements.)

    Mme Danielle Simonnet

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    Dans ce cas, faisons un conseil d’experts !

    Mme Élise Leboucher, rapporteure

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    Écoutez les médecins qui sont favorables au texte !

    M. Pierre Meurin

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    Je vous dénie le droit de nous faire des leçons de morale concernant l’intérêt des personnes en fin de vie. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR. –⁠ Mme Justine Gruet applaudit également.)
    Ce que nous voulons, c’est instaurer des garde-fous. L’extorsion de consentement, vous savez, ça existe. (« Oh ! » sur certains bancs.) Dans tous les domaines, il peut y avoir des manœuvres dolosives pour extorquer un consentement. L’accoutumance à l’aide à mourir en fin de vie pourrait pousser certaines personnes à se dire que leur heure est venue parce que c’est comme cela que les choses se passent, alors qu’elles n’en ont pas forcément envie d’elles-mêmes. (Exclamations et rires sur divers bancs.)

    M. Emmanuel Grégoire

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    On n’est qu’une fois en fin de vie !

    M. Pierre Meurin

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    Le sujet est grave, cela ne devrait pas vous faire rire !

    M. Hadrien Clouet

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    Nous ne rions pas, nous sommes effarés !

    M. Pierre Meurin

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    Ces garde-fous sont parfaitement indispensables. Il ne s’agit pas d’infantiliser les gens ; il s’agit de protéger les personnes en fin de vie d’une potentielle extorsion de consentement. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 1034.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        180
            Nombre de suffrages exprimés                177
            Majorité absolue                        89
                    Pour l’adoption                73
                    Contre                104

    (L’amendement no 1034 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Agnès Firmin Le Bodo, pour soutenir l’amendement no 1453.

    Mme Agnès Firmin Le Bodo

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    Cet amendement, déposé à l’initiative de ma collègue Nathalie Colin-Oesterlé, tend à préciser que la souffrance psychologique ne peut à elle seule ouvrir droit à l’aide à mourir.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Brigitte Liso, rapporteure

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    Nous en avons déjà très longuement débattu tout à l’heure : avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Même avis.

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 1453.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        181
            Nombre de suffrages exprimés                176
            Majorité absolue                        89
                    Pour l’adoption                90
                    Contre                86

    (L’amendement no 1453 est adopté.)
    (Applaudissements sur certains bancs des groupes RN, DR, HOR et UDR. –⁠ MM. Philippe
    Fait et Charles Sitzenstuhl applaudissent également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Bartolomé Lenoir, pour soutenir l’amendement no 1714.

    M. Bartolomé Lenoir

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    Il convient de garantir que la demande d’aide à mourir ne soit pas la conséquence d’une défaillance de soins. Nous proposons donc d’ajouter à l’alinéa 8 que les souffrances ne doivent pas résulter d’un manquement aux obligations du code de la santé publique relatives au droit fondamental à la protection de la santé.
    Je suis le député d’un département, la Creuse, où l’accès aux soins est beaucoup plus difficile que dans les zones urbaines. À Guéret, il n’y a même plus de service de radiothérapie pour soigner le cancer. Que l’on soit pour ou contre le texte, cet amendement vise au fond à protéger nos campagnes. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes UDR et RN.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Brigitte Liso, rapporteure

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    Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Christophe Bentz.

    M. Christophe Bentz

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    Cet amendement de notre collègue Bartolomé Lenoir n’est ni bon ni même très bon, il est excellent. Je suis très sérieux. Certains départements français vivent une véritable injustice. C’est le cas de la Creuse, mais aussi de mon département, la Haute-Marne. On ne peut pas proposer l’aide à mourir dans des départements qui souffrent de graves défaillances en matière d’accès aux soins et qui, en particulier, ne disposent pas d’unité de soins palliatifs.
    Je le répète, on ne peut pas imposer aux Français un choix cornélien : souffrir ou mourir. Ce n’est pas possible. C’est pourquoi je vous incite vivement à voter pour cet amendement, afin de rétablir une véritable justice sociale, médicale et territoriale. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre.

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    La semaine dernière, nous avons débattu des soins palliatifs et réaffirmé l’objectif que chaque département soit doté le plus rapidement possible d’au moins une unité de soins palliatifs.

    M. Emeric Salmon

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    Dans dix ans !

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Non, pas dans dix ans !
    Néanmoins, dès aujourd’hui, dans chaque département dépourvu d’unité de soins palliatifs, les services hospitaliers sont dotés de lits identifiés de soins palliatifs et d’équipes mobiles de soins palliatifs.
    Enfin, le texte prévoit qu’au moment où le patient demande le recours à l’aide à mourir, le médecin lui propose de bénéficier de soins palliatifs.

    Un député du groupe RN

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    Et quand il n’y en a pas ?

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Bartolomé Lenoir.

    M. Bartolomé Lenoir

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    Je parlais non seulement de l’accès aux soins palliatifs, mais de l’accès à tous les soins. Il n’y a plus de radiothérapie à Guéret ! Un patient atteint d’un cancer doit se rendre à Limoges, à deux heures et demie de route ; il lui sera beaucoup plus rapide de demander l’accès à l’aide à mourir. Il faut garantir l’accès aux soins, quelle que soit notre position sur le texte ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UDR et RN.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 1714.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        182
            Nombre de suffrages exprimés                174
            Majorité absolue                        88
                    Pour l’adoption                79
                    Contre                95

    (L’amendement no 1714 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Sur l’amendement no 395, je suis saisie d’une demande de scrutin public par le groupe Droite républicaine.
    La parole est à Mme Justine Gruet, pour le soutenir.

    Mme Justine Gruet

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    Afin de sécuriser le consentement libre et éclairé du patient, nous proposons de modifier légèrement l’alinéa 9, en précisant que le patient exprime « son consentement libre et éclairé devant le président du tribunal judiciaire ou le magistrat désigné par lui ». La même formule est utilisée en cas de don d’organe, dans la procédure prévue par l’article L. 1231-1 du code de la santé publique.
    Le législateur, en s’assurant que le consentement de la personne est recueilli par le président du tribunal judiciaire ou le magistrat qu’il désigne, évite de faire reposer cette responsabilité sur les médecins ; il charge de cette tâche des professionnels qui ont l’habitude de contrôler la légalité des critères. Il y va de la protection des plus vulnérables et des plus fragiles : l’abus de faiblesse, que vous le vouliez ou non, est en effet une réalité quotidienne dans les tribunaux.
    Le cinquième critère, relatif à la manifestation de la volonté du patient, ne relève pas d’un avis médical et ne peut donc être expertisé par le médecin. Il touche à la potentielle pression sociale, sociétale, familiale ou financière. Il en va de même, d’ailleurs, pour l’expertise du deuxième critère : il n’incombe pas au médecin de déterminer si la personne est en situation régulière ou irrégulière ni depuis combien de temps il réside dans le pays. (« Oh là ! » sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    À mon sens, deux des cinq critères ne relèvent donc pas de l’avis du médecin. En plus de faire peser sur eux une responsabilité qui n’est pas partagée, on leur délègue des prérogatives qui ne sont pas les leurs. (M. Gérault Verny applaudit.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Brigitte Liso, rapporteure

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    Les dispositions prévues par le texte sont suffisantes pour garantir le bon déroulement de la procédure. Le caractère libre et éclairé de la manifestation de la demande est strictement encadré par la rédaction, insérée lors des débats de l’an dernier, de l’alinéa 3 de l’article 6 : « La personne dont le discernement est gravement altéré par une maladie lors de la démarche de demande d’aide à mourir ne peut pas être regardée comme manifestant une volonté libre et éclairée. »
    En outre, le texte prévoit une réitération de la demande après la communication au malade de l’accord du médecin, puis une nouvelle confirmation de la volonté du patient le jour de l’administration de la substance létale.
    Votre demande est donc satisfaite : avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Je comprends votre préoccupation, madame la députée Gruet. L’une des lignes directrices qui ont présidé à l’élaboration des critères d’éligibilité à l’aide à mourir est d’ailleurs que le patient soit apte à manifester sa volonté de façon libre et éclairée, non seulement au moment où il fait la demande, mais aussi après que le médecin a déclaré son éligibilité, au moment que la personne choisira.

    M. Philippe Vigier

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    Absolument !

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Peut-être le patient ne confirmera-t-il jamais sa demande. Si toutefois il la réitère, la question lui sera de nouveau posée le jour de l’administration du produit létal, pour être tout à fait certain de sa volonté.
    Vous posez une question très importante. Depuis le début de nos discussions, nous avons fait à maintes reprises le parallèle avec la sédation profonde et continue, dont vous avez dit vous-même, madame Gruet, qu’il s’agissait d’un trésor national. Pourtant, ce trésor n’avait pas prévu les conditions du recueil du consentement.

    M. Philippe Vigier

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    Eh oui !

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Avec ce texte, nous faisons donc un net progrès dans le respect de la volonté du patient. C’est la raison pour laquelle je suis défavorable à votre amendement. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR, SOC et Dem.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Patrick Hetzel.

    M. Patrick Hetzel

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    Cet amendement vise à s’assurer que le patient ne soit pas l’objet de pressions extérieures. Une nouvelle fois, la comparaison est très intéressante puisque le code de la santé publique prévoit la procédure d’un cas très spécifique, le don d’organes intrafamilial, pour lequel s’applique la disposition que vient de proposer Mme Gruet.
    Cette proposition a tout son sens parce qu’il convient de protéger le patient contre un risque bien réel : nos tribunaux ont à connaître chaque année un millier de contentieux relatifs à l’abus de faiblesse. Même si vos propos, madame la ministre, sont pertinents, il existe donc une situation dans le secteur de santé, où il incombe à un professionnel autre qu’un médecin de se prononcer sur un critère d’éligibilité : c’est le cas du don d’organes, parce que le risque de pression y est élevé. Cet amendement se justifie donc pleinement.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Vigier.

    M. Philippe Vigier

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    Madame Gruet, nous avons eu ce débat pendant de longues heures en commission. Vous plaidez pour une judiciarisation complète de la procédure. Vous souhaitez que la volonté de la personne qui demande l’aide à mourir soit recueillie par un magistrat. Quelques jours après l’acceptation de sa demande, elle doit confirmer sa volonté. Il faudrait alors faire revenir le magistrat. Imaginez-vous une telle procédure ?
    De plus, réalisez-vous le message de défiance que vous envoyez au corps médical ? Après la demande effectuée par le patient, une décision médicale collégiale est prise au vu de son dossier.
    Je vous demande votre attention, car ce que je dis est important et au lieu de m’écouter, vous parlez à M. Hetzel, qui défend désormais la loi Claeys-Leonetti après avoir voté contre en 2015 –⁠ sur ce sujet, il faudrait pourtant être cohérent.
    Les médecins qui contribueront à la décision collégiale auront les moyens de déterminer si le consentement exprimé par le patient est libre et éclairé ou non. En tout cas, remettre en cause la légitimité des médecins, dont on sait le travail qu’ils réalisent chaque jour pour accompagner les malades, n’est vraiment pas un signe de confiance à l’égard du corps médical. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes Dem et EPR.)

    M. Patrick Hetzel

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    Pourtant, certains d’entre eux demandent cette disposition !

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 395.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        184
            Nombre de suffrages exprimés                180
            Majorité absolue                        91
                    Pour l’adoption                76
                    Contre                104

    (L’amendement no 395 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Élise Leboucher, rapporteure.

    Mme Élise Leboucher, rapporteure

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    Je demande une suspension de séance.

    Suspension et reprise de la séance

    Mme la présidente

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    La séance est suspendue.

    (La séance, suspendue à dix-huit heures cinquante-cinq, est reprise à dix-neuf heures.)

    Mme la présidente

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    La séance est reprise.
    Je suis saisie de six amendements, nos 1939, 1268, 1269, 1270, 1271 et 398, pouvant être soumis à une discussion commune.
    La parole est à Mme Lisette Pollet, pour soutenir l’amendement no 1939.

    Mme Lisette Pollet

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    Il vise à renforcer les exigences du texte en matière de consentement de la personne ayant recours à l’euthanasie. Les termes dans l’article sont vagues, puisqu’il suffit que la personne soit « apte à manifester sa volonté de façon libre et éclairée ». Or il convient d’être très précis en la matière. On ne le rappellera jamais assez, il s’agit d’une personne qui, sous le coup de la souffrance, demande à des soignants de l’aider à se suicider.
    Il faut que la volonté exprimée soit effectivement libre et éclairée. Il faut aussi que la personne n’ait pas été sujette à provocation au suicide par un tiers ; c’est cela qui est important. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RN et UDR.)

    Mme la présidente

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    Sur l’amendement no 1268, je suis saisie par le groupe Rassemblement national d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Christophe Bentz, pour soutenir les amendements nos 1268 à 1271, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

    M. Christophe Bentz

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    J’avais présenté en commission des amendements similaires qui n’avaient pas été adoptés –⁠ peut-être, sait-on jamais, en ira-t-il différemment en séance ? Ils visent à sécuriser l’expression de la volonté de la personne afin qu’elle se fasse sans pression ni contrainte. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes RN et UDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Justine Gruet, pour soutenir l’amendement no 398.

    Mme Justine Gruet

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    Il s’agit de remplacer les mots « apte à » par les mots « en capacité de ». En effet, la notion d’aptitude me semble trop floue pour mesurer l’expression d’une volonté libre et éclairée.
    La loi Claeys-Leonetti est souvent citée dans ce débat, mais le législateur, par les alinéas 7 et 8 de l’article 4, se propose de mettre le médecin face à des patients dont le pronostic vital n’est pas engagé de la même manière qu’il l’est dans le cadre de la loi Claeys-Leonetti. Ne dites pas l’inverse ; s’il l’était, à quoi servirait-il de proposer un nouveau texte ? Dans la proposition de loi, non seulement l’intention qui préside à la décision du médecin mais aussi la manière dont le pronostic vital du patient demandant l’aide à mourir est engagé diffèrent de celles visées dans la loi Claeys-Leonetti. Faire peser cette responsabilité sur le médecin qui, malgré lui, devra respecter le choix du patient risque de déstabiliser l’équilibre et la confiance sur lesquels repose la relation thérapeutique.
    Je suis fière de la loi Claeys-Leonetti, qui, dans les unités de soins palliatifs, accompagne au quotidien les professionnels, les bénévoles et les familles, mais le parallèle avec le présent texte ne me semble pas justifié car ils visent des situations différentes. La finalité médicale des soins palliatifs et de la sédation profonde et continue n’est pas la même que celle de l’aide à mourir, et le pronostic vital n’est pas le même. Je trouve gênant du point de vue éthique –⁠ pardon d’employer ce mot, monsieur Pilato –, ou en tout cas difficilement acceptable étant donné mes convictions, de mettre sur le même plan les deux dispositifs dès lors qu’ils ne sont pas soumis aux mêmes critères d’accès.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Absolument !

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?

    Mme Brigitte Liso, rapporteure

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    Vous souhaitez, madame Pollet, monsieur Bentz, préciser que la personne doit manifester sa volonté sans équivoque et sans être influencée par autrui. Je vous rassure, cette demande est satisfaite par les mots « libre et éclairée » qui impliquent que la personne demandant l’aide à mourir prend sa décision sans pression extérieure et en toute connaissance de cause. Il reviendra bien sûr au médecin de s’assurer que cette condition est bien remplie.
    L’amendement no 398 tend à remplacer la notion d’aptitude par celle de capacité. Si le mot d’aptitude est employé, c’est pour éviter toute confusion avec les dispositions de la législation civile sur les majeurs protégés : la notion de capacité désigne le libre usage des droits associés à la majorité –⁠ droit de vote et droit de gestion du patrimoine.
    Je suis défavorable à tous les amendements.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Je souscris aux arguments de Mme la rapporteure. Concernant le recueil du consentement du patient, l’alinéa 9 précise que la personne doit être « apte à manifester sa volonté de façon libre et éclairée ». L’expression de cette volonté a lieu lors du colloque singulier entre le médecin et le patient. Il est important de rappeler que c’est d’abord le patient qui, en vertu des caractéristiques de sa pathologie, demande à être reconnu éligible à l’aide à mourir. S’il l’est, il peut effectuer une deuxième demande, celle d’y recourir. Dans ces deux occasions, l’initiative de la demande revient au patient. Enfin, il est amené à exprimer sa volonté une troisième fois juste avant l’administration du produit létal ; dans cette troisième occasion, la question lui est posée par le soignant.
    Je partage également l’avis de Mme la rapporteure s’agissant de la notion de capacité, qui recouvre d’autres réalités juridiques.
    C’est pourquoi je suis défavorable à l’ensemble des amendements.

    (L’amendement no 398 est retiré.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Sandrine Dogor-Such.

    Mme Sandrine Dogor-Such

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    La plupart des amendements en discussion visent à compléter le texte par des expressions telles que « sans avoir fait l’objet d’aucune pression » ou encore « sans avoir subi aucune contrainte ». Je trouve ces précisions très importantes pour sécuriser tant le patient que le médecin. En effet, il existe une incohérence juridique entre ces dispositions visant à légaliser l’euthanasie à la suite d’un refus de traitement et celles de la loi du 10 mai 2024 visant à renforcer la lutte contre les dérives sectaires et à améliorer l’accompagnement des victimes, lesquelles punissent « d’un an d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende la provocation, au moyen de pressions ou de manœuvres réitérées, de toute personne atteinte d’une pathologie à abandonner ou à s’abstenir de suivre un traitement médical thérapeutique ou prophylactique ».
    D’autre part, le Conseil d’État, dans sa décision 463713 du 20 mai 2022, considère qu’un médecin ne commet aucune faute à transgresser la volonté du malade pour réaliser une transfusion sanguine si cette transfusion est nécessaire à sa survie. En cela, il concilie le principe de la sauvegarde de la vie, premier devoir du médecin, avec le principe du consentement du malade. Qu’en sera-t-il demain ? Faudra-t-il refuser toute transfusion de sang ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.)

    (L’amendement no 1939 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 1268.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        179
            Nombre de suffrages exprimés                174
            Majorité absolue                        88
                    Pour l’adoption                68
                    Contre                106

    (L’amendement no 1268 n’est pas adopté.)

    (Les amendements nos 1269, 1270 et 1271, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux amendements, nos 1272 et 840, pouvant être soumis à une discussion commune.
    L’amendement no 1272 de M. Christophe Bentz est défendu.
    La parole est à M. Charles Sitzenstuhl, pour soutenir l’amendement no 840.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Il vise à ajouter le mot « définitive » à la fin de l’alinéa 9, de manière introduire dans les critères d’accès la notion de certitude. On me rétorquera peut-être qu’il n’est pas parfait sur le plan légistique, mais il s’agit pour moi d’une façon supplémentaire de manifester mon opposition au texte et d’interpeller mes collègues au sujet de la boîte de Pandore que nous ouvrons, des dérives qui surgiront nécessairement si la proposition de loi est adoptée.
    J’en veux pour preuve la tribune de Theo Boer –⁠ professeur d’éthique néerlandais et ancien membre d’un comité de contrôle de l’euthanasie aux Pays-Bas – publiée dans Le Monde en avril 2025. Il y est écrit que le nombre d’euthanasies et de suicides assistés aux Pays-Bas augmente très rapidement, que cela inquiète de plus en plus le corps médical, que la loi qui était perçue il y a vingt ans comme très stricte ne l’est pas tant en réalité et que « l’euthanasie n’est plus exceptionnelle : elle devient, dans bien des cas, une fin de vie parmi d’autres ». Theo Boer ajoute que le personnel soignant s’interroge de plus en plus : « Jusqu’où irons-nous ? À quel moment cela cessera-t-il d’être un acte de compassion pour devenir une réponse automatique aux patients qui refusent d’accepter un refus ? » Il poursuit : « En tant qu’ancien membre d’un comité d’examen de l’euthanasie, j’ai cru, à l’époque, qu’un cadre rigoureux pouvait prévenir les dérives : je n’en suis plus si sûr. Ce que je constate, c’est que chaque ouverture du champ de l’euthanasie crée de nouvelles attentes, de nouvelles demandes, une nouvelle normalité. La logique interne du système pousse toujours à élargir. […] Mais je suis convaincu que sa légalisation n’apaise pas la société : elle l’inquiète, la transforme, la fragilise. Elle modifie notre rapport à la vulnérabilité, à la vieillesse, à la dépendance. Elle introduit l’idée que certaines vies, dans certaines conditions, ne valent plus la peine d’être vécues –⁠ ni même d’être soignées. » (Mme Blandine Brocard et M. Gérault Verny applaudissent.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements en discussion commune ?

    Mme Brigitte Liso, rapporteure

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    Avis défavorable sur l’amendement no 1272 de M. Bentz.
    Quant à l’amendement no 840 de M. Sitzenstuhl, j’ai déjà répondu défavorablement à un amendement similaire déposé à l’alinéa 4 de l’article 4, j’en demande donc le retrait ; à défaut, avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Je suis défavorable à ces amendements.
    Monsieur Sitzenstuhl, l’adoption de votre amendement aurait des conséquences extrêmement graves car la notion de volonté définitive interdirait au patient de revenir sur sa décision.

    M. Philippe Vigier

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    Eh oui !

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Le principe du dispositif consiste au contraire à permettre au patient de revenir sur sa décision à n’importe quel moment. Pour cette raison, je suis fermement opposée à l’amendement no 840. (M. Philippe Vigier applaudit.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Julie Laernoes.

    Mme Julie Laernoes

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    Je voudrais souligner l’absurdité de l’amendement de M. Sitzenstuhl :…

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Merci ! C’est gentil !

    Mme Julie Laernoes

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    …il aurait pour effet de rendre la décision du patient définitive, comme l’a très bien dit Mme la ministre.
    Vous avez cité la tribune de Theo Boer dénonçant de supposées dérives de la loi ; je témoignerai, pour ma part, de mon expérience en tant que binationale et ressortissante des Pays-Bas. Je précise d’ailleurs que ce professeur d’éthique a une religion et qu’elle guide sa pensée en la matière. (Exclamations sur certains bancs des groupes RN, DR et UDR.)

    M. Dominique Potier

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    Et alors ?

    M. Thibault Bazin

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    Il a le droit d’avoir une religion !

    Mme Julie Laernoes

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    Bien sûr, il en a le droit, mais nous avons le droit, nous, de garder cette information à l’esprit lorsque nous apprécions son évaluation de la loi.
    Les Pays-Bas ont été le premier pays d’Europe à dépénaliser l’aide active à mourir. Quant aux supposées dérives, il y a une augmentation du nombre de recours à l’aide à mourir due au vieillissement de la population et au fait que les patients sont de plus en plus affectés par des maladies graves et incurables et que nombre d’entre elles atteignent la phase terminale. L’ancien premier ministre des Pays-Bas, qui lui aussi était religieux,…

    Plusieurs députés du groupe RN

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    Ça veut dire quoi, religieux ?

    M. Thibault Bazin

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    Ce n’était pas un laïc ?

    Mme Julie Laernoes

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    …en 2001, quand la loi a été débattue, ne l’aurait pas votée, mais il en a bénéficié l’an dernier avec sa femme parce qu’il était atteint d’une maladie grave et incurable en phase terminale. Comme quoi, quand on est confronté à la réalité de la fin de vie, parfois on peut avoir besoin d’un droit contre lequel on se serait insurgé en tant qu’homme ou femme politique. C’est pourquoi je pense qu’il faut manier avec précaution les enseignements qu’il est possible de tirer des législations d’autres pays.
    Ainsi, le droit néerlandais dépénalise l’acte du médecin qui repose sur le consentement libre et éclairé du patient, tandis que le texte que nous examinons reconnaît un droit à l’aide à mourir. Le droit français tend donc à reconnaître un droit à la personne elle-même, ce qui n’est pas le cas au Pays-Bas. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe EcoS.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Nicolas Turquois.

    M. Nicolas Turquois

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    Je voudrais revenir sur la défense de l’amendement no 840 par M. Sitzenstuhl. C’est une manœuvre dilatoire : sa défense n’avait rien à voir avec l’amendement. Mme la ministre a pris le temps de répondre au contenu de l’amendement qui est, à la limite, opposé à ce qu’il a défendu ces derniers jours. Ces méthodes me paraissent assez insupportables. Il faut qu’on argumente sur le fond. M. Sitzenstuhl a tout à fait le droit d’être opposé à la proposition de loi ; c’est parfaitement respectable. Mais n’utilisons pas de tels moyens pour ralentir le débat. Nous devons débattre de dispositions importantes dans la suite de la discussion des articles. (Mme Ayda Hadizadeh applaudit.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Charles Sitzenstuhl.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Je veux remercier Mme Laernoes pour l’adjectif très sympa qu’elle a balancé dans l’hémicycle.

    M. Gérault Verny

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    C’est ahurissant !

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Je ne suis pas sûr que cela corresponde à la tenue des débats depuis le début de l’examen de ce texte. Je ne ferai pas un rappel au règlement, cependant je précise à M. Turquois que le règlement de l’Assemblée nationale prévoit qu’il ne faut pas s’éloigner de la question, or je ne juge pas l’avoir fait.
    Je considère Le Monde, que je lis tous les jours, comme un journal très sérieux et je ne pense pas qu’il relève de la droite la plus conservatrice qui existe en Europe. Quand une tribune y est publiée, je lui accorde du crédit. Dès lors, quand Theo Boer y a publié une tribune en avril 2025, je considère qu’il y a des choses intéressantes et que la publication d’une telle tribune dans Le Monde dit beaucoup de choses. Enfin, sur le fond de l’amendement, pour revenir aux arguments des collègues et de la ministre, je ne suis pas d’accord avec votre interprétation du terme « définitive » à l’alinéa 9, où est exposé le critère selon lequel la personne doit « être apte à manifester sa volonté de façon libre et éclairée ». Je propose d’ajouter « et définitive ». J’admets que ce n’est peut-être pas très joli légistiquement, mais il s’agit ici de qualifier la volonté. Avec l’article 10 qui expose les moyens de mettre fin à la procédure d’aide à mourir, vous avez déjà prévu dans le texte initial qu’il puisse y avoir une certitude sur la volonté manifestée de recevoir l’aide à mourir et que pourtant, par la suite, le malade y renonce. Par conséquent, si cet amendement était adopté, cela ne poserait aucune question : un malade aurait toujours en capacité de renoncer au dernier moment.

    Mme Danielle Simonnet

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    Il ne sert à rien, votre amendement !

    (Les amendements nos 1272 et 840, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 1452 et 1456.
    La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l’amendement no 1452.

    M. Dominique Potier

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    Je fais confiance à Mme Firmin Le Bodo pour défendre l’amendement identique no 1456.

    Mme la présidente

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    Sur les amendements identiques nos 1442 et 1456, je suis saisie par le groupe Horizons & indépendants d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à Mme Agnès Firmin Le Bodo, pour soutenir l’amendement no 1456.

    Mme Agnès Firmin Le Bodo

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    Je ferai remarquer que, pour une fois sur cette proposition de loi, M. Potier compte sur moi –⁠ je pense que cela emportera la décision de chacun d’entre vous. (Sourires.) L’amendement tend à ajouter au critère 5 « au moment de la demande » pour obtenir la rédaction suivante : « être apte à manifester sa volonté de façon libre et éclairée au moment de la demande ». Cela permettrait d’écarter de façon assez explicite la possibilité de recourir aux directives anticipées pour solliciter l’aide à mourir.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Brigitte Liso, rapporteure

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    Je suppose que vous pensez aux personnes qui souffrent de la maladie de Charcot. Toutefois, votre proposition me paraît fragiliser le dispositif car elle entre en contradiction avec d’autres dispositions aux articles relatifs à la procédure. À l’article 6, le respect des conditions prévues à l’article 4 est apprécié lors de la procédure collégiale. À l’article 10, il est prévu que « Si le médecin […] prend connaissance, après sa décision sur la demande d’aide à mourir, d’éléments d’information le conduisant à considérer que les conditions mentionnées à l’article L. 1111-12-2 n’étaient pas remplies ou cessent de l’être [, il] notifie alors sa décision motivée par écrit à la personne ».
    L’avis de la commission est donc défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Dominique Potier.

    M. Dominique Potier

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    Je ne lui en tiens pas rigueur, mais j’étais en train de parler de la laïcité avec ma collègue écologiste Julie Laernoes pour clarifier la référence à la religion, et en fait nous étions d’accord –⁠ je m’en réjouis.

    M. Alexis Corbière

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    Dieu merci ! (Sourires.)

    M. Dominique Potier

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    Par ailleurs, je suis heureux qu’Agnès Firmin Le Bodo soit d’accord sur ce point. Pour moi, les personnes les plus vulnérables doivent être au cœur de nos préoccupations. L’éloge de la liberté, qui domine largement nos débats, doit faire place à la prise en considération de la vulnérabilité. Je défendrai plusieurs amendements et j’aimerais avoir ultérieurement l’avis du rapporteur et de Mme la ministre sur la prise en compte des personnes qui, privées de leur discernement, sont sous protection et qui en aucun cas ne doivent pouvoir être l’objet d’une euthanasie ou d’une mort provoquée. Nous devons au moins aborder ce sujet. C’est une demande très forte d’un mouvement anti-validiste qui croît afin de prendre en compte les plus fragiles. Nous y reviendrons à plusieurs reprises, mais cette clarification est essentielle. Notre assemblée doit être prudente au moins sur cette question.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Annie Vidal.

    Mme Annie Vidal

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    Je soutiens l’amendement car je considère qu’il ne fragilise pas le dispositif mais qu’au contraire il le renforce. Je rejoins également M. Potier au sujet de la protection des plus fragiles. Le but de ces amendements est d’exclure les directives anticipées dans ce dispositif.

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Mais leur effet est inverse !

    Mme Annie Vidal

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    Si toutefois elles étaient incluses dans ce texte, tous les critères s’écrouleraient, puisque le cinquième critère, qui est très important, cesserait d’être opérant. Je pense qu’il faut le renforcer. C’est pourquoi j’apporte mon soutien à cet amendement.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Justine Gruet.

    Mme Justine Gruet

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    J’ai peur qu’on vienne restreigne l’intérêt, pourtant majeur, d’être informé sur le caractère « libre et éclairé » de la volonté si on cantonne ce critère au moment de la demande. Nous sommes d’accord sur ce point avec M. Philippe Vigier, une fois n’est pas coutume.

    M. Philippe Vigier

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    Eh oui !

    Mme Justine Gruet

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    Ce qui me chagrine, madame Laernoes, c’est qu’il faut souligner en prenant l’exemple des Pays-Bas que l’aide à mourir peut y être sollicitée quand la maladie a atteint la phase terminale, tandis que nous envisageons d’accorder le droit de recourir à l’aide à mourir quand la maladie est en phase avancée ou terminale. Je souligne de nouveau que l’accorder en phase terminale pose moins de problèmes éthiques que l’accorder en phase avancée ou terminale.
    Je me suis éloignée de la défense de l’amendement, mais j’y reviens pour soutenir qu’ajouter « au moment de la demande » prive de la possibilité de réitérer la demande au cours de la procédure.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Vigier.

    M. Philippe Vigier

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    Justine Gruet a très bien dit les choses. D’abord, lorsque le patient a fait la demande –⁠ une fois de plus, pardonnez-moi, mais je suis là aussi pour parler du corps médical –, les médecins constateront si cette personne est libre et éclairée. Le critère selon lequel la personne doit « être apte à manifester sa volonté de façon libre et éclairée » suppose implicitement qu’elle s’exprime comme elle le souhaite. Comme l’a dit Justine Gruet, si on ajoute la précision « au moment de la demande », au moment où, par la suite, elle doit la confirmer, même si elle n’est plus libre et éclairée, cela entraînerait que l’on peut lui accorder l’aide à mourir.

    Mme Annie Vidal

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    Non !

    M. Philippe Vigier

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    C’est très dangereux. Il ne faut donc surtout pas voter ces amendements, qui sont totalement contre-productifs.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre.

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Je fais exactement la même lecture que Mme Gruet et M. Vigier : ces amendements identiques auraient pour effet de recueillir une seule fois l’expression de la volonté du patient.

    Mme Ayda Hadizadeh

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    Exactement !

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    J’y insiste auprès de Mme Vidal, qui a dit vouloir sécuriser la procédure : en adoptant cette rédaction, nous nous priverions de recueillir l’expression de la volonté du patient à plusieurs étapes de la procédure.
    C’est la raison pour laquelle je suis défavorable à ces amendements.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Agnès Firmin Le Bodo.

    Mme Agnès Firmin Le Bodo

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    Je suis désolée de m’inscrire en faux contre cet argument. Nous débattons à cet article des critères d’éligibilité et non de la procédure. Précédemment, on a reproché à certains collègues d’anticiper la procédure au moment d’énoncer les critères d’éligibilité, mais nous nous plaçons bien ici au moment de la demande, qui sert de référence pour évaluer les critères d’éligibilité. Il faut vérifier qu’« au moment de la demande », comme nous le précisons ici, la volonté du malade est bien libre et éclairée. Cela n’a rien à voir avec le reste de la procédure où, au contraire de ce que vous soutenez au sujet de l’effet de ces amendements, nous défendons aussi l’idée qu’il faille réitérer la demande et vérifier si la volonté est toujours libre et éclairée.

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 1452 et 1456.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        178
            Nombre de suffrages exprimés                117
            Majorité absolue                        59
                    Pour l’adoption                29
                    Contre                88

    (Les amendements identiques nos 1452 et 1456 ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 1918, 2147, 136 rectifié, 1386, 596, 597, 2393, 1366, 2108, 1385, 595 et 461, pouvant être soumis à une discussion commune.
    Les amendements nos 597 et 2393 sont identiques.
    La parole est à Mme Danielle Simonnet, pour soutenir l’amendement no 1918.

    Mme Danielle Simonnet

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    La loi Claeys-Leonetti a été présentée par de nombreux collègues comme une cathédrale –⁠ je ne sais plus quels termes glorifiants vous avez employés. Personnellement, je n’ai pas la même appréciation, puisque je considère que cette loi ne permet que de laisser mourir. Cependant elle prenait en considération les directives anticipées. Celles-ci permettent à une personne de décider, quand elle n’est pas immédiatement confrontée à la fin de sa vie mais qu’elle est en pleine conscience, de quelle fin de vie elle souhaite. Ainsi, dans le cadre de la loi Claeys-Leonetti, les personnes peuvent décider en pleine conscience, si elles sont dans telle situation, si elles souhaitent recourir à la sédation profonde et continue jusqu’au décès. Il me semble important de dresser ce parallèle. Il faut que la personne en pleine conscience puisse anticiper que si elle demande l’aide à mourir, qu’elle est dans la situation qu’établit l’ensemble des critères cumulatifs et qu’elle perd la pleine conscience ou la capacité de discernement pendant la procédure, les vœux qu’elle a inscrit dans ses directives anticipées soient entendus et la personne de confiance qu’elle a nommée puisse exprimer tout au long de ce parcours son ultime volonté.
    Je peux vous dire que, pour de nombreuses personnes qui nous regardent, ces questions de directives anticipées sont très importantes. Si au sortir de nos travaux, on ne peut pas tenir compte des directives anticipées, si on ne peut pas anticiper le moment où, si par malheur on n’est plus en pleine conscience, on ne peut pas exaucer ce que l’on souhaitait et que l’on a écrit, alors à quoi servent-elles ? Ainsi, il me semble important de prendre en compte les directives anticipées.

    ------------------Cette partie de la séance est en cours de finalisation---------------------------------------------