Deuxième séance du lundi 27 janvier 2025
- Présidence de M. Xavier Breton
- 1. Fraudes aux aides publiques
- Discussion des articles (suite)
- Article 3 (suite)
- Après l’article 3
- Article 3 bis
- Amendement no 87 deuxième rectification
- Article 3 ter
- Après l’article 3 ter
- Article 4
- Après l’article 4
- Amendements nos 7, 8, 1, 12
- Sous-amendement nos 99, 98 rectifié
- Amendement no 23
- Explications de vote
- Vote sur l’ensemble
- Discussion des articles (suite)
- 2. Ordre du jour de la prochaine séance
Présidence de M. Xavier Breton
vice-président
M. le président
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)
1. Fraudes aux aides publiques
Suite de la discussion d’une proposition de loi
M. le président
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la proposition de loi contre toutes les fraudes aux aides publiques (nos 447, 633).
Discussion des articles (suite)
M. le président
Cet après-midi, l’Assemblée a commencé la discussion des articles, s’arrêtant à l’amendement no 25 à l’article 3.
Article 3 (suite)
M. le président
La parole est à Mme Delphine Batho, pour soutenir l’amendement no 25.
Mme Delphine Batho
Précédemment évoqué dans la discussion, cet amendement élaboré avec le concours de l’UFC-Que choisir vise à ce qu’en cas de récidive, l’amende administrative soit portée à 10 % du chiffre d’affaires moyen des trois dernières années d’activité de la personne morale concernée.
Dans sa rédaction actuelle, la proposition de loi prévoit en cas de manquement le prononcé d’une amende administrative de 15 000 euros pour une personne physique et de 75 000 euros pour une personne morale. Or si nous voulons que la sanction soit vraiment dissuasive, il faut que l’amende consiste en un pourcentage du chiffre d’affaires, du moins en cas de récidive.
M. le président
La parole est à M. Thomas Cazenave, rapporteur de la commission des affaires économiques, pour donner l’avis de la commission.
M. Thomas Cazenave, rapporteur de la commission des affaires économiques
Dans le texte, nous nous sommes référés aux sanctions administratives qui existent déjà, notamment en matière de manquements précontractuels ; nous avons repris le dispositif existant, soit 15 000 et 75 000 euros d’amende, conservant ainsi une certaine cohérence entre les sanctions administratives. Il me semble préférable d’en rester à ce barème plutôt que de fixer l’amende à 10 % du chiffre d’affaires, ce qui représente un montant considérable, que j’estime disproportionné et de nature à déséquilibrer le régime des sanctions administratives applicables aux entreprises. Avis défavorable.
M. le président
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire, pour donner l’avis du gouvernement.
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire
Vous proposez, madame Batho, d’augmenter les sanctions en cas de récidive, lorsqu’un professionnel n’informe pas les consommateurs de l’intervention de sous-traitants dans la réalisation du chantier. En cas de manquement, la proposition de loi prévoit déjà une amende administrative de 15 000 euros pour une personne physique et 75 000 euros pour une personne morale. Le montant que vous proposez – un pourcentage du chiffre d’affaires moyen – apparaît comme manifestement disproportionné au regard du manquement sanctionné, dont la gravité justifie plutôt le quantum prévu par le texte. Pour cette raison, j’émets un avis défavorable.
M. le président
La parole est à Mme Delphine Batho.
Mme Delphine Batho
Voulons-nous lutter contre la fraude ou non ? Pour des entreprises ayant une attitude malveillante, payer une amende forfaitaire de l’ordre du montant proposé ne présentera pas une difficulté majeure.
Le droit à l’information des citoyennes et des citoyens constitue, à nos yeux, un élément fondamental de la lutte contre la fraude, dont le non-respect doit, à ce titre, être sanctionné. Nous maintenons donc l’amendement.
(L’amendement no 25 n’est pas adopté.)
M. le président
Sur l’amendement no 66 et sur l’article 3, je suis saisi par le groupe Ensemble pour la République de demandes de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Delphine Batho, pour soutenir les amendements nos 26 et 27, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
Mme Delphine Batho
Ces amendements comportent trois points. Le premier vise à introduire la notion de qualification dans le texte afin de préciser le périmètre juridique des certifications – c’est un élément de clarification sur lequel le rapporteur pourra sans doute nous répondre.
Le deuxième point vise à garantir la bonne transmission aux personnes censées bénéficier de MaPrimeRénov’ de l’information relative à la suspension du label RGE – reconnu garant de l’environnement. En effet, pour en bénéficier, il est exigé de faire appel à une entreprise jouissant de cette reconnaissance au moment de la signature du devis et de la réalisation des travaux, de sorte qu’une perte du label intervenant dans l’intervalle peut faire perdre le bénéfice des aides. Il est donc indispensable que les consommateurs en soient informés.
Le troisième point vise à contraindre tout professionnel qui aurait perdu le label à la suite d’une fraude à indemniser les particuliers auxquels il aurait ainsi fait perdre le bénéfice de MaPrimeRénov’.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thomas Cazenave, rapporteur
Vous souhaitez durcir la sanction par la DGCCRF – direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes –, en ajoutant la perte de la qualification à la perte de la certification. Le texte prévoit qu’un professionnel qui aurait contrevenu aux obligations afférentes perde, à titre temporaire ou définitif, la certification RGE. Vous proposez que l’entreprise ou l’artisan concerné perde aussi sa qualification – par exemple, le titre professionnel permettant d’exercer le métier de plombier ou d’électricien. Cela me semble disproportionné. Que l’on perde le label RGE faute d’en avoir respecté les attendus me semble normal et constitue d’ailleurs le cœur de la proposition de loi. En revanche, empêcher un artisan de continuer à travailler comme électricien ou plombier pour cette seule raison me semblerait excessif. C’est ainsi que je comprends votre amendement no 27, sur lequel j’émets donc un avis défavorable.
Je partage la préoccupation dont procède l’amendement no 26 : il faut protéger ceux qui risqueraient de perdre le bénéfice de MaPrimeRénov’ à cause d’un professionnel ayant perdu le label RGE. Cette difficulté a toutefois été traitée en commission grâce à un amendement de Mme Battistel, que vous aviez d’ailleurs soutenu : un bénéficiaire de MaPrimeRénov’ en conserverait le bénéfice quand bien même on aurait découvert au cours d’investigations ultérieures que le professionnel à qui il a fait appel n’est plus RGE. Une telle disposition ayant été intégrée au texte adopté en commission, il n’y a plus lieu d’instaurer une indemnisation quelconque du bénéficiaire par le professionnel. Pour cette raison, j’émets également un avis défavorable sur l’amendement no 26.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée
L’amendement no 26 vise à éviter que le client ne soit privé des aides en cas de perte du label RGE par le professionnel. Or, comme M. le rapporteur l’a indiqué, ce point a déjà été traité par un amendement adopté en commission des affaires économiques, de sorte qu’en l’état du texte, la perte du label RGE par une entreprise n’entraîne pas de préjudice financier pour son client. Il n’y a donc pas lieu de le modifier. Du reste, il vaut mieux maintenir le versement de l’aide par le gestionnaire plutôt que d’imposer à l’entreprise la responsabilité d’effectuer un versement équivalent au client, ce qui entraînerait des risques et des délais.
Vous souhaitez également introduire la mention de la qualification du professionnel, ce qui ne changerait pas le déroulement des travaux. Par ailleurs – et ce sera aussi ma réponse à propos de l’amendement no 27 – nous ne disposons pas d’une définition précise de ce qu’est une qualification. Y faire référence me paraît donc difficile. Pour toutes ces raisons, j’émets un avis défavorable sur les deux amendements.
M. le président
La parole est à Mme Delphine Batho.
Mme Delphine Batho
Évitons les faux débats au sujet du mot « qualification ». Son introduction visait à pallier l’apparente ambiguïté des termes « label » ou « signe de qualité », mais nous parlons bien de la certification RGE et uniquement de cela.
Je prends acte de la mesure de maintien de la prime. Si je le comprends bien, votre raisonnement est le suivant : puisque le bénéfice de la prime est maintenu pour le particulier, il n’est pas nécessaire de l’informer immédiatement d’une éventuelle perte du label RGE. Ces deux points étant clarifiés, je retire les deux amendements.
(Les amendements nos 26 et 27 sont retirés.)
M. le président
La parole est à M. Lionel Tivoli, pour soutenir l’amendement no 14.
M. Lionel Tivoli
Cela fait des années qu’on culpabilise les Français, qu’on leur demande de réduire leur empreinte carbone, de payer plus cher, de changer leurs habitudes au profit d’énergies dites renouvelables.
Soyons clairs : ces énergies n’ont souvent de renouvelable que le nom. Par exemple, les panneaux solaires viennent de Chine, sont produits avec des énergies polluantes et, une fois hors service, deviennent des déchets que l’on ne sait pas traiter. Est-ce cela, la transition écologique ? Cependant, on oublie une énergie bien plus fiable, issue de nos centrales nucléaires, qui produisent bien peu de CO2.
En vérité, les prétendues énergies renouvelables sont surtout intermittentes, terme qui reflète leur réalité : elles fonctionnent quand le vent souffle ou que le soleil brille. L’amendement vise donc à appeler un chat un chat, en remplaçant « énergies renouvelables » par « énergies intermittentes ». (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thomas Cazenave, rapporteur
L’amendement n’ayant pas de lien évident avec l’objet de la proposition de loi contre toutes les fraudes aux aides publiques, j’émets un avis défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée
Vous ouvrez un débat qui ne porte pas sur les fraudes aux aides publiques, en proposant de remplacer « énergies renouvelables » par « énergies intermittentes » dans l’alinéa qui donne à la DGCCRF le pouvoir de suspendre le label RGE. Avis défavorable.
(L’amendement no 14 n’est pas adopté.)
M. le président
L’amendement no 66 de M. le rapporteur est rédactionnel.
Je mets aux voix l’amendement no 66, accepté par le gouvernement.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 78
Nombre de suffrages exprimés 70
Majorité absolue 36
Pour l’adoption 69
Contre 1
(L’amendement no 66 est adopté.)
M. le président
L’amendement no 28 de Mme Delphine Batho est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thomas Cazenave, rapporteur
Avis défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée
Vous proposez d’informer les consommateurs de la perte du label RGE par les professionnels réalisant des travaux chez eux. La perte du label constitue en elle-même une sanction suffisante et n’a pas besoin d’être connue des uns et des autres. La moindre utilisation de la possibilité de suspension permet déjà de lutter contre la fraude. Avis défavorable.
(L’amendement no 28 n’est pas adopté.)
M. le président
La parole est à Mme Delphine Batho, pour soutenir l’amendement no 29.
Mme Delphine Batho
Je le retire.
(L’amendement no 29 est retiré.)
M. le président
Sur les amendements nos 91, 64 et 33, je suis saisi par le groupe Ensemble pour la République de demandes de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Claire Lejeune, pour soutenir l’amendement no 18.
Mme Claire Lejeune
Il vise à élargir la possibilité de suspendre l’agrément délivré par l’État aux entreprises de conseil en énergie qui se trouvent en situation de conflit d’intérêts avec des entreprises de construction. Nous accusons un énorme retard en matière de rénovation des bâtiments ; ce retard est imputable au manque de financements publics, mais aussi à l’absence d’une vraie logique de service public, qui nécessiterait un vrai maillage territorial des personnes susceptibles d’accompagner les rénovations.
Le dispositif des accompagnateurs France Rénov’ va dans le bon sens, mais il reste un problème : selon l’étude d’une association, 15 % de ces accompagnateurs sont en situation de conflit d’intérêts avec le secteur de la construction et du bâtiment. Pour lever ces potentiels conflits d’intérêts et garantir une confiance dans le dispositif, il nous semble essentiel de voter le présent amendement. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thomas Cazenave, rapporteur
Avis défavorable, parce que c’est le rôle de l’Agence nationale de l’habitat (Anah) que de sanctionner les accompagnateurs France Rénov’ qui ne seraient pas vertueux. Cela relève déjà de sa responsabilité, de son pouvoir, et je crois qu’elle n’hésite pas à sanctionner celles et ceux qui ne respectent pas les règles. Votre amendement est donc d’une certaine manière satisfait, même si c’est l’Anah, et non la DGCCRF, qui joue ce rôle.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée
Votre amendement vise à permettre aux agents de la DGCCRF de suspendre l’agrément des accompagnateurs France Rénov’. Je rappelle juste que l’Anah peut d’ores et déjà le faire : cela paraît suffisant et il n’est nul besoin d’ajouter de la complexité et une autre procédure.
M. le président
La parole est à Mme Claire Lejeune.
Mme Claire Lejeune
Une étude de l’UFC-Que choisir nous apprend pourtant, je l’ai dit, que 15 % de ces accompagnateurs sont suspectés d’être en situation de conflit d’intérêts. Ce n’est pas négligeable ! Si nous voulons que l’esprit de votre proposition de loi soit respecté, il me semble important d’en tenir compte.
M. Thomas Cazenave, rapporteur
Vous ne voulez pas la voter !
Mme Claire Lejeune
En outre, l’Anah ne dispose pas des moyens suffisants pour réaliser une analyse solide sur laquelle pourrait se fonder la confiance publique vis-à-vis de ces accompagnateurs France Rénov’. Je maintiens l’amendement, car je pense qu’il est utile dans le cadre de notre débat. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 18.
(Le vote à main levée n’étant pas concluant, il est procédé à un scrutin public.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 94
Nombre de suffrages exprimés 93
Majorité absolue 47
Pour l’adoption 56
Contre 37
(L’amendement no 18 est adopté.)
M. le président
Je mets aux voix l’article 3, tel qu’il a été amendé.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 92
Nombre de suffrages exprimés 91
Majorité absolue 46
Pour l’adoption 91
Contre 0
(L’article 3, amendé, est adopté.)
Après l’article 3
M. le président
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 91 portant article additionnel après l’article 3.
M. Thomas Cazenave, rapporteur
Il vise à permettre l’accès à l’observatoire des diagnostics de performance énergétique (DPE), qui est géré par l’Agence de la transition écologique (Ademe), aux organismes chargés de la certification des compétences des diagnostiqueurs immobiliers ainsi qu’aux services chargés de la répression des fraudes.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée
L’amendement vise à permettre aux organismes de certification et à la DGCCRF d’accéder à l’observatoire des DPE ; il s’agit donc d’améliorer l’information des organismes de certification des diagnostiqueurs immobiliers et des différents services de contrôle de la répression des fraudes.
Avis favorable, car l’adoption de cet amendement permettrait de mieux analyser l’activité des diagnostiqueurs et de mieux cibler leur contrôle.
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 91.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 91
Nombre de suffrages exprimés 91
Majorité absolue 46
Pour l’adoption 90
Contre 1
(L’amendement no 91 est adopté.)
M. le président
Je suis saisi de quatre amendements, nos 64, 33, 20 et 21, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 64.
M. Thomas Cazenave, rapporteur
Il vise à mieux encadrer l’activité des mandataires et notamment à autoriser la publication des noms de ceux qui n’auraient pas respecté les règles et qui auraient été sanctionnés, afin de fiabiliser leur action. Il est très proche de celui de Mme Batho, dont je dois dire qu’il est mieux rédigé que le mien ; je propose donc de retirer le mien au profit du sien.
M. Sylvain Maillard
Quelle humilité !
M. Romain Daubié
C’est quasiment une demande en mariage ! (Sourires.)
(L’amendement no 64 est retiré.)
M. le président
La parole est à Mme Delphine Batho, pour soutenir l’amendement no 33, qui fait l’objet d’un sous-amendement.
Mme Delphine Batho
Nous l’avons travaillé conjointement, M. le rapporteur et moi-même, à la suite de nos débats en commission, qui ont permis d’identifier l’importance de ce sujet. J’imagine que tout le monde connaît la logique qui préside à l’action des mandataires : l’Anah peut habiliter des entreprises à être mandataires, c’est-à-dire qu’elles percevront les aides publiques pour le compte des bénéficiaires.
L’amendement tend à résoudre certaines difficultés du texte, notamment sur trois points : d’abord, il étend le mécanisme d’habilitation que prévoit le texte aux aides à la pierre ; ensuite, il crée un régime de publicité des sanctions prononcées à l’égard des mandataires financiers ; enfin, il instaure un même régime de publicité s’agissant des sanctions prononcées à l’encontre des assistances à maîtrise d’ouvrage que sont les accompagnateurs France Rénov’, précédemment évoqués.
M. le président
La parole est à Mme la ministre déléguée, pour soutenir le sous-amendement no 82.
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée
Il a deux objectifs. Il vise d’abord à corriger une coquille rédactionnelle, s’agissant des sanctions administratives prononcées par l’Anah : un contradictoire doit être organisé avec l’opérateur agréé. Ensuite, il s’agit de sécuriser plusieurs dispositions relatives à l’encadrement des mandataires, en prévoyant explicitement que tout mandataire ne respectant pas les engagements et garanties fixés par décret ne pourra se voir désigné en cette qualité auprès de l’Anah pour le compte d’un usager bénéficiaire de MaPrimeRénov’.
M. le président
Les amendements nos 20 et 21 de Mme Delphine Batho sont défendus.
Quel est l’avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?
M. Thomas Cazenave, rapporteur
Je suis favorable à l’amendement no 33 et au sous-amendement no 82, et je demande le retrait des amendements nos 20 et 21.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée
Favorable à l’amendement no 33, sous-amendé ; demande de retrait pour les autres. L’amendement nous paraît intéressant en ce qu’il vise à créer un régime de sanctions dans le dispositif d’assistance à maîtrise d’ouvrage, à mieux encadrer l’activité de mandataire et à autoriser la publication des sanctions prises par l’Anah en lien avec les aides qu’elle distribue et avec l’agrément des accompagnateurs France Rénov’ qu’elle délivre.
(Les amendements nos 20 et 21 sont retirés.)
(Le sous-amendement no 82 est adopté.)
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 33, tel qu’il a été sous-amendé.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 99
Nombre de suffrages exprimés 96
Majorité absolue 49
Pour l’adoption 96
Contre 0
(L’amendement no 33, sous-amendé, est adopté.)
M. le président
La parole est à Mme Claire Lejeune, pour soutenir l’amendement no 19.
Mme Claire Lejeune
La logique que nous défendons, en matière de rénovation thermique, est bien une logique de service public ; cela inclut notamment un reste à charge zéro, pour que les ménages les plus modestes puissent y accéder. En effet, nous considérons qu’il est d’intérêt général de pouvoir se loger dignement tout en participant à l’effort national de bifurcation écologique.
Néanmoins, en attendant que cette logique soit bien installée, nous proposons de mettre à disposition des ménages un registre des actes de rénovation les plus courants ainsi qu’un référentiel de prix, pour qu’ils puissent se référer à une échelle raisonnable et se prémunir contre des tarifications excessives en matière de travaux de rénovation. Notre amendement vise donc à contrer la logique d’un marché imposant des tarifs excessifs. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thomas Cazenave, rapporteur
C’est précisément le rôle des accompagnateurs France Rénov’ que d’accompagner les ménages dans leurs travaux de rénovation énergétique et de les conseiller sur les prix pratiqués. Eux-mêmes peuvent s’appuyer sur les données dont dispose l’Anah : tout est déjà en place pour protéger les usagers et tous ceux qui voudront, à l’avenir, faire rénover leur logement. Avis défavorable, parce que le dispositif actuel me semble déjà satisfaire l’objectif que vous visez.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée
Nous approuvons votre volonté de mieux informer et de mieux conseiller, dans un souci de transparence. Vous proposez la création d’un registre des actes de rénovation « les plus courants » – ce qui est déjà assez subjectif –, comportant une information sur les prix. Or la publication d’un tel registre serait complexe ; par ailleurs, elle pourrait favoriser des ententes sur les prix qui se feraient au détriment des consommateurs. Il existe à ce jour suffisamment d’éléments transparents en matière d’information et de conseil, et votre demande est satisfaite. Avis défavorable.
(L’amendement no 19 n’est pas adopté.)
M. le président
La parole est à Mme la ministre déléguée, pour soutenir l’amendement no 63.
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée
Il vise à favoriser l’échange de données, notamment entre les services fiscaux et les Urssaf. Beaucoup souhaitent le développement de tels échanges, qui permettraient de mieux coordonner les actions de recouvrement. Nous proposons donc d’autoriser les services concernés à s’échanger spontanément des informations, afin de permettre un accueil conjoint des usagers par les services fiscaux et les organismes sociaux.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thomas Cazenave, rapporteur
Favorable.
M. le président
La parole est à Mme Delphine Batho.
Mme Delphine Batho
L’amendement no 63 du gouvernement vise à compléter l’article L. 152 du livre des procédures fiscales et concerne toute une série d’organismes mentionnés dans cet article, entre autres les caisses de retraite et les mutuelles. Il me semble que cette disposition n’a strictement rien à voir avec l’objet de la proposition de loi.
M. le président
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée
L’amendement a été jugé recevable. Il vise à lutter contre la fraude, objectif que nous partageons tous ici et objet principal de la proposition de loi. De ce point de vue, toutes les dispositions qui favorisent les échanges de données entre services, fiscaux ou autres, vont dans le bon sens.
Mme Delphine Batho
L’amendement a trait au recouvrement de l’impôt, pas à la fraude !
(L’amendement no 63 est adopté.)
M. le président
La parole est à M. Jean-Pierre Vigier, pour soutenir l’amendement no 40.
M. Jean-Pierre Vigier
Il vise à ce que l’Anah crée une plateforme numérique commune non publique permettant l’échange d’informations, en temps réel, entre les organismes chargés de l’octroi de l’aide MaPrimeRénov’ et des certificats d’économie d’énergie (CEE), les organismes de qualification RGE, les professionnels du bâtiment et les organismes chargés des contrôles.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thomas Cazenave, rapporteur
Depuis le début de l’examen de la proposition de loi, nous avons veillé très attentivement à ne jamais créer de nouveaux fichiers mais à favoriser l’échange d’informations. En effet, la création d’un fichier pose certaines difficultés eu égard au règlement général sur la protection des données (RGPD) et au contrôle exercé par la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil).
D’autre part, vous proposez que l’Anah soit l’organisme collecteur. Or elle ne possède pas toute l’information. Par exemple, les informations relatives aux CEE transitent par le pôle national des certificats d’économie d’énergie (PNCEE). La plateforme que vous appelez de vos vœux serait très lourde à installer et ne procurerait pas de gain immédiat.
L’article 2, que nous venons de voter, crée un cadre qui permettra aux administrations d’échanger massivement des informations afin de mieux lutter contre la fraude. Il permettra selon moi d’atteindre l’objectif que vous visez, et que je partage. J’émets donc un avis défavorable.
M. le président
Sur l’amendement no 87 deuxième rectification, sur l’amendement no 48 rectifié et sur l’article 3 bis, je suis saisi par le groupe Ensemble pour la République de demandes de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée
Je partage votre objectif et comprends l’intérêt d’une coordination étroite entre les différents acteurs pour mieux lutter contre la fraude. Il y a effectivement des difficultés en la matière, d’où la présente proposition de loi.
Je rappelle que l’Anah et le PNCEE partagent déjà un certain nombre d’informations. À ce stade, il ne nous paraît pas opportun de créer une nouvelle base de données, confiée à l’Anah, dans la mesure où plusieurs dispositions du texte répondent déjà à votre préoccupation. L’article 1er, que vous avez adopté, permettra le rejet de la demande de certaines aides publiques ou la suspension de leur versement. L’article 2 favorisera précisément les échanges d’informations. L’amendement no 63, que vous venez d’adopter, permettra un échange de données entre les administrations fiscales et les autres organismes. Mon avis est donc défavorable.
M. le président
La parole est à Mme Delphine Batho.
Mme Delphine Batho
Nous sommes nous aussi défavorables à cet amendement. Quant à l’amendement no 63, il s’apparente vraiment à un cavalier législatif : il porte sur l’assiette et le recouvrement des impôts et cotisations, alors que le texte a trait, d’après son titre, aux fraudes aux aides publiques. La disposition est donc hors sujet. Elle relève d’un projet de loi de finances, non d’une proposition de loi de cette nature.
Un député du groupe RN
Il fallait le dire avant !
(L’amendement no 40 n’est pas adopté.)
Article 3 bis
M. le président
La parole est à Mme la ministre déléguée, pour soutenir l’amendement no 87 deuxième rectification.
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée
La liste de tous les diagnostiqueurs certifiés a été rendue publique par un arrêté du 31 juillet 2024. Je rappelle qu’elle comprend plusieurs informations : les coordonnées professionnelles du diagnostiqueur ; la nature, le numéro et la période de validité de son certificat ; le cas échéant, le nom et l’adresse de la société pour laquelle il exerce son activité.
L’article 3 bis prévoit d’ajouter à cette liste les diagnostiqueurs suspendus ou radiés. Par cet amendement, le gouvernement propose de revenir sur cet ajout. D’une part, il ne nous paraît pas pertinent que la liste comporte un trop grand nombre d’éléments ; il vaut mieux une liste très claire recensant uniquement les diagnostiqueurs certifiés à un instant T. D’autre part, la radiation ou la suspension des diagnostiqueurs est déjà un élément de sanction.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thomas Cazenave, rapporteur
Favorable.
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 87 deuxième rectification.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 113
Nombre de suffrages exprimés 109
Majorité absolue 55
Pour l’adoption 69
Contre 40
(L’amendement no 87 deuxième rectification est adopté ; en conséquence, l’amendement no 48 rectifié tombe.)
M. le président
Je mets aux voix l’article 3 bis, tel qu’il a été amendé.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 113
Nombre de suffrages exprimés 112
Majorité absolue 57
Pour l’adoption 110
Contre 2
(L’article 3 bis, amendé, est adopté.)
Article 3 ter
M. le président
Sur l’amendement no 74, je suis saisi par le groupe Droite républicaine d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Danielle Brulebois.
Mme Danielle Brulebois
L’article 3 ter, adopté en commission des affaires économiques, prévoit de limiter la sous-traitance à deux rangs. C’est une très bonne mesure, car la sous-traitance en cascade est source de fraudes.
Cependant, de nombreux autres problèmes, très graves, persistent. On déplore par exemple l’intervention de sociétés commerciales n’ayant aucune qualification en matière de rénovation énergétique, dont la seule activité est le démarchage agressif de clients et qui font appel ensuite à la sous-traitance. Cela donne lieu non seulement à d’importantes fraudes, mais aussi au recours à du travail dissimulé ou à bas prix. En conséquence, les travaux sont mal exécutés ou les matériaux utilisés sont de mauvaise qualité. Parfois, les travaux ne sont tout simplement pas finis.
Monsieur le rapporteur, je suis opposée à votre amendement no 74. (« Ah ! ») Puisque nous voulons lutter contre les fraudes, n’ouvrons pas la porte aux dérives ! L’obtention du label RGE doit être exigée pour tout le monde : pour les entreprises commerciales comme pour les petits artisans.
M. Nicolas Ray
Elle a raison !
M. Jean-Pierre Vigier
C’est du bon sens !
Un député du groupe RN
Exactement !
Mme Danielle Brulebois
Le label RGE, que nous imposons à nos artisans, est utile. Seulement, la procédure est compliquée et leur coûte cher. Nous leur avions promis une simplification et la possibilité de valider leurs acquis, mais nous n’avons jamais pris de mesures en ce sens. Loin de là, vous venez de compliquer encore les règles en faisant adopter l’amendement no 85.
Or si nous adoptions l’amendement no 74, nous n’exigerions, à l’inverse, aucune certification pour les sociétés commerciales. Je ne comprends pas pourquoi et je voterai donc contre cet amendement.
M. Jean-Pierre Vigier
Très bien !
M. le président
La parole est à Mme Chantal Jourdan.
Mme Chantal Jourdan
L’article 3 ter vise à limiter la sous-traitance à deux rangs et à imposer aux sous-traitants l’obtention du label RGE. C’est une très bonne chose.
En revanche, si nous adoptions votre amendement no 74, monsieur le rapporteur, l’entreprise signataire ne serait pas tenue d’obtenir le label RGE, ce qui est problématique et aurait d’importantes répercussions dans les territoires ruraux. Dans mon département, l’Orne – que Mme la ministre connaît bien –, les artisans et les très petites entreprises (TPE) sont concurrencés par de grandes sociétés commerciales disposant de leur propre réseau d’entreprises qui assèchent les possibilités de travail. C’est pourquoi nous voterons contre l’amendement. Nous souhaitons conserver la rédaction actuelle de l’article 3 ter, qui nous convient.
M. le président
Sur l’article 3 ter, je suis saisi par le groupe Ensemble pour la République d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Jean-Pierre Vigier.
M. Jean-Pierre Vigier
Nous demandons que seules les entreprises certifiées RGE puissent accéder directement aux marchés aidés RGE. Ce principe, qui relève du bon sens, avait fait l’objet d’une discussion avec les organisations professionnelles du bâtiment. Il avait été validé par les ministres Christophe Béchu et Guillaume Kasbarian et, surtout, adopté en commission des affaires économiques.
M. Nicolas Meizonnet
C’est vrai !
M. Jean-Pierre Vigier
Il s’agit d’une demande forte du secteur du bâtiment, qui compte 620 000 entreprises, représentant 97 % du marché.
On demande aux entreprises artisanales du bâtiment d’obtenir le label RGE, de se conformer à des normes strictes et de former leurs salariés pour accéder à ces marchés. Il n’est donc pas acceptable que des sociétés non RGE puissent capter les aides en sous-traitant le travail à des entreprises certifiées.
M. Nicolas Meizonnet
Exactement !
M. Jean-Pierre Vigier
Les sociétés commerciales frauduleuses se construisent et entrent sur le marché parce qu’elles peuvent sous-traiter à des entreprises RGE. Les sociétés non RGE ne doivent pas pouvoir contourner les règles en recourant à la sous-traitance.
Nous avons proposé au rapporteur des mesures qui permettraient aux acteurs vertueux non RGE de participer à l’effort de rénovation énergétique : d’une part, la possibilité de créer des filiales spécialisées RGE ; d’autre part, le développement d’une cotraitance vertueuse avec les entreprises qualifiées RGE.
C’est pourquoi nous nous opposerons à l’amendement no 74. Les règles doivent être les mêmes pour tous. Je le répète, seules les entreprises RGE devraient pouvoir accéder directement aux marchés RGE. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN. – MM. Nicolas Ray et Bartolomé Lenoir applaudissent également.)
M. le président
La parole est à M. Christophe Naegelen.
M. Christophe Naegelen
L’amendement no 74 suscite des interrogations. Plusieurs collègues reprennent des arguments, tout à fait recevables, de la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb) – j’essaie moi aussi de les défendre régulièrement. En revanche, je m’inscris en faux contre l’idée que toutes les entreprises commerciales seraient frauduleuses. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.) Certaines entreprises commerciales ne le sont nullement ; elles distribuent des matériaux et contribuent de manière indirecte à faire travailler des artisans RGE.
Monsieur le rapporteur, je suggère que nous nous laissions un peu de temps, à la faveur de la navette parlementaire, pour travailler à une certification destinée aux entreprises commerciales. Nous pourrions ainsi distinguer les entreprises commerciales vertueuses de celles qui ne le sont pas. Il ne faut pas opposer artisanat et entreprises commerciales, bien au contraire. Il faut avant tout lutter contre la fraude, objectif du présent texte. Cela ne peut se faire qu’en mettant autour de la table tous les acteurs vertueux, commerçants ou artisans.
M. le président
La parole est à M. Jean-Paul Lecoq.
M. Jean-Paul Lecoq
Je partage l’idée qu’il faut revoir ce point. Je suis député de la moitié de la ville du Havre et de sa périphérie…
Un député du groupe RN
Ils n’ont pas de chance !
M. Hervé de Lépinau
Élu grâce à Édouard Philippe !
M. Pierre-Yves Cadalen
Quel mépris !
M. le président
Continuez, monsieur Lecoq.
M. Jean-Paul Lecoq
Je veux bien continuer, mais à condition de ne pas recevoir de remarques désobligeantes. (Protestations sur les bancs du groupe RN.)
M. le président
Laissez parler l’orateur, s’il vous plaît !
M. Jean-Paul Lecoq
Dans ces territoires, mes administrés ont du mal à se retrouver parmi le grand nombre d’entreprises qui les démarchent et ils se tournent donc vers les enseignes de bricolage. Selon mon évaluation, plus de 500 chantiers ont été menés par l’intermédiaire de ces enseignes qui sous-traitent ensuite à des entreprises RGE du territoire.
En l’état du texte, cela ne sera plus possible alors même que les gens ne se tournent pas naturellement vers les entreprises RGE – par crainte de la fraude ou du fait de bouche-à-oreille défavorable. À l’inverse, une grande enseigne ayant pignon sur rue depuis longtemps sur le territoire bénéficie de leur confiance.
M. Sylvain Maillard
Il a raison !
M. Jean-Paul Lecoq
Comment répondre à la préoccupation légitime de notre collègue Vigier d’éviter les sous-traitances en cascade sans écarter la possibilité de passer par de grandes enseignes connues ? Il convient peut-être de réécrire le texte dans le cadre de la navette. En attendant, nous soutiendrons l’amendement du rapporteur.
M. le président
La parole est à M. Hervé de Lépinau.
M. Hervé de Lépinau
Si l’article 3 ter permet de clarifier la question de la sous-traitance, ce qui fait l’unanimité sur nos bancs, l’amendement de M. le rapporteur soulève un problème qui relève moins de nos débats que de la commission d’examen des pratiques commerciales.
En réalité, monsieur le rapporteur, avec votre amendement, les enseignes ayant pignon sur rue, qui disposent d’une force commerciale et publicitaire très importante, pourront appliquer la loi du plus fort et mettre sous leur coupe un certain nombre d’artisans en leur imposant des bordereaux de prix. (M. le rapporteur fait un signe de dénégation.) Mais si, monsieur le rapporteur ! Dans la vraie vie (Protestations sur les bancs du groupe EPR), un certain nombre d’artisans accepteront la logique de contractualisation ; l’enseigne accaparera des artisans qui se trouveront dans un état de sujétion et qui se verront donc imposer des prix.
Que les choses soient claires : votre amendement ne réglera pas le problème de la fraude.
M. Thomas Cazenave, rapporteur
C’est ce que je dis !
M. Hervé de Lépinau
Vous proposez que les grandes enseignes participent à l’offre de travaux de rénovation aux particuliers, mais en réalité, elles le font déjà – on le sait bien ! Quand vous voulez installer une pompe à chaleur ou un cumulus thermodynamique, Leroy Merlin, qui vend l’appareil, propose un artisan pour le poser. Cela existe, mais ce n’est pas contractualisé.
M. Jean-Paul Lecoq
Justement !
M. Hervé de Lépinau
Le contractualiser pourrait présenter un avantage pour le client, qui bénéficierait à la fois de la garantie de l’enseigne sur le produit et des garanties légales de l’artisan qui va l’installer.
En réalité, vous n’allez rien résoudre avec cet amendement. Travaillons plutôt sur la problématique des relations commerciales entre grandes enseignes et artisans. Une majorité d’entre nous votera contre votre amendement. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
M. le président
La parole est à M. François Gernigon.
M. François Gernigon
Sans avoir d’avis tranché, je me pose deux questions. L’article 3 ter a-t-il sa place dans ce texte ? Ne faut-il pas l’examiner dans un autre cadre ?
Le label RGE s’adresse aux professionnels du bâtiment spécialisés dans les travaux de rénovation énergétique : des enseignes comme Leroy Merlin ou Point P ou d’autres fournisseurs de matériaux répondent-ils à cette définition ? Je me pose la question et je souhaiterais qu’on y apporte une réponse.
M. le président
La parole est à M. Mickaël Cosson.
M. Mickaël Cosson
Comme beaucoup d’entre vous, je m’interroge : cherchons-nous à lutter contre la fraude ou à encourager l’activité de rénovation énergétique ?
Puisque nous parlons de la vraie vie, reconnaissons que de nombreuses personnes, lorsqu’elles ont un chantier de rénovation à mener, se rendent dans des enseignes de bricolage telles que celles qui ont été citées. Dans mon département des Côtes d’Armor, 750 chantiers ont été menés à bien en 2024 par leur intermédiaire. Ils ont permis à de petits artisans de travailler. Un artisan qui ne dispose ni d’une secrétaire ni d’un commercial n’a pas le temps de démarcher pour trouver des chantiers supplémentaires et est généralement très heureux que de grandes enseignes lui envoient des clients.
Toujours dans la vraie vie, regardez les cuisinistes ! Ils travaillent avec des artisans. Les petits artisans cuisinistes ne poseraient pas de cuisines s’ils ne travaillaient pas avec de grandes enseignes. C’est une réalité. La Capeb est là pour défendre tous les artisans – pas uniquement ceux qui sont suffisamment structurés pour disposer d’un secrétariat et d’un agent commercial, mais aussi les petits artisans qui n’ont pas le temps de prospecter s’ils veulent faire vivre leur famille. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)
M. Jean-Pierre Vigier
Chacun son métier !
M. Mickaël Cosson
L’article 3 ter est-il suffisamment abouti ? Il pourrait avoir rapidement des conséquences néfastes sur l’activité de rénovation thermique, bien loin de son objectif de lutter contre la fraude. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)
M. le président
La parole est à M. Daniel Grenon.
M. Daniel Grenon
De nombreux professionnels du secteur alertent sur les conséquences néfastes que pourrait entraîner l’adoption de l’amendement no 74. Amoindrir l’interdiction pour une entreprise non qualifiée RGE de sous-traiter des travaux aidés de rénovation énergétique, c’est permettre la sous-traitance en cascade, source de fraude, ainsi que la multiplication de sociétés sans qualifications adaptées. L’article 3 ter est bénéfique, car il vient mettre un terme à ces pratiques ; il ne doit donc pas être assoupli.
M. le président
La parole est à Mme Delphine Batho.
Mme Delphine Batho
En commission, nous avons soutenu et voté les dispositions de l’article 3 ter. Nous considérons qu’elles s’inscrivent dans une logique de limitation de la sous-traitance et qu’il y a bien un lien entre le respect du label RGE et la lutte contre la fraude.
Nous avons tous, chers collègues, été contactés par Leroy Merlin et par la Capeb, qui ont fait valoir leurs points de vue. Il est frappant de constater que lorsqu’on pose des questions sur les volumes concernés, ceux-ci ne semblent pas très importants. Par ailleurs, de nombreuses données sont manquantes.
Nous écrivons la loi et nous devons nous interroger sur les conséquences juridiques du texte que nous allons voter. Or, au-delà des grandes enseignes dont nous avons donné les noms, le cadre que nous fixons est susceptible de concerner d’autres acteurs qui, sans avoir eux-mêmes le label RGE, feraient appel à la sous-traitance.
En l’état de nos informations et de nos réflexions, nous pensons qu’il vaut mieux conserver le texte tel qu’il est. Si nous ne sommes pas opposés à la massification des travaux de rénovation énergétique, nous estimons qu’il est important de préserver la qualité du travail des artisans pour obtenir des rénovations globales performantes, adaptées à chaque logement et non standardisées. La proposition de notre collègue de voter le texte en l’état et de l’approfondir dans le cadre de la navette semble raisonnable. (M. Jérémie Iordanoff applaudit.)
M. le président
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 74.
M. Thomas Cazenave, rapporteur
Pourquoi cet amendement ? Il ne vise ni à répondre à un problème ni à en créer un. Il cherche simplement à corriger le dispositif issu d’un amendement de M. Jean-Pierre Vigier, adopté par la commission des affaires économiques, ayant pour objet d’exclure toutes les entreprises de distribution, qui ne peuvent être RGE – le label étant réservé aux artisans de la construction et de la rénovation –, du marché de la rénovation énergétique. Or, parmi elles, de grandes enseignes qui ont été citées amènent aujourd’hui des marchés de rénovation à des artisans jusqu’au dernier kilomètre.
Je le dis ici : je ne défends rien en matière de lutte contre la fraude aux aides publiques, car il n’y a pas de fraude !
Mme Delphine Batho
C’est vrai !
M. Thomas Cazenave, rapporteur
Quand vous interrogez les services de l’État, il n’y a pas de dossier avec les grands distributeurs connus. Le sujet lancé en commission des affaires économiques n’a donc rien à voir avec la fraude : il concerne les relations commerciales entre des distributeurs et des sous-traitants.
M. Hervé de Lépinau
Nous sommes d’accord !
M. Thomas Cazenave, rapporteur
Le seul objet de mon amendement est d’affirmer que la question de la relation commerciale ne relève pas de la proposition de loi dont nous débattons.
Ainsi que cela a été dit, y compris par Mme Batho, il n’y a pas d’évaluation de l’impact de l’amendement Vigier, qui va pourtant toucher toutes les enseignes connues – Leroy Merlin, Bricorama, Castorama, Point P, Saint-Gobain – qui maillent notre territoire, font vivre des milliers d’artisans et réalisent des milliers de chantiers.
Alors que nous nous sommes interrogés durant les débats budgétaires sur les raisons pour lesquelles nous ne sommes pas parvenus à massifier la rénovation énergétique, puisque tous les crédits de MaPrimeRénov’ n’ont pas été consommés, il serait paradoxal de chercher à régler dans cette proposition de loi un conflit de répartition de la valeur entre artisans et distributeurs.
Monsieur de Lépinau, il faut donc aller au bout du geste et voter mon amendement de suppression ! Nous sommes en train de légiférer sans aucune étude d’impact. Si demain, dans nos territoires, les grandes enseignes ne sont plus autorisées à envoyer des marchés aux artisans, combien d’artisans qui s’appuient sur elles et ne veulent pas investir la relation commerciale seront-ils touchés ?
Je sais que les bancs de cette assemblée sont divisés : certains députés sont contactés par la Capeb, d’autres par de grandes enseignes. Ma conviction est que ce sujet, bien que légitime, ne relève pas de la proposition de loi.
Certains se scandalisent que des entreprises qui ne sont pas labellisées RGE interviennent sur ce marché. Il convient de se souvenir que les grandes enseignes ne peuvent recevoir ce label : elles ne sont ni des artisans, ni des poseurs, ni des électriciens, mais des distributeurs qui s’appuient sur ces corps de métier.
Je cherche juste à réparer l’impact non anticipé du dispositif issu de l’amendement Vigier sur le marché essentiel de la rénovation énergétique. Ce n’est pas un problème de fraude aux aides publiques. C’est la raison pour laquelle j’ai défendu – et persiste à défendre – cet amendement de suppression.
M. Thomas Cazenave, rapporteur
En revanche, je ne propose pas de revenir sur l’autre disposition de l’article, également adoptée en commission à l’initiative de M. Vigier, qui prévoit de limiter à deux rangs le niveau de sous-traitance. Je souhaite que cette mesure soit conservée.
Si l’article est voté en l’état, je maintiens que nous serons confrontés à un problème de maillage territorial qui rendra plus difficile de réussir le pari de la rénovation énergétique.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée
Avec cet amendement, et plus généralement avec l’article 3 ter, se pose la question suivante : imposer à une entreprise qui délègue la réalisation de travaux à une entreprise certifiée RGE d’être elle-même certifiée RGE a-t-il un quelconque rapport avec la lutte contre la fraude – puisque tel est le sujet de ce texte ? J’ai tendance à répondre par la négative. D’ailleurs, les interventions des différents orateurs inscrits sur l’article en témoignent : elles n’ont pas porté sur la fraude.
Cet article s’intéresse en fait davantage aux modalités d’organisation du marché. Est-on certain que le modèle actuel ne répond pas aux attentes des consommateurs qui souhaitent bénéficier d’un service, d’une prestation, puisque grâce à l’intervention d’artisans, les travaux qu’ils souhaitent engager pourront être réalisés ? Il y a là un enjeu commercial.
Je crains que l’article 3 ter entraîne des changements importants dans l’organisation du marché. En effet, plusieurs artisans risquent de ne plus pouvoir intervenir en soutien auprès de grandes enseignes comme ils le font actuellement, ce qui aboutirait à une désorganisation du marché sur l’ensemble du territoire – y compris, comme cela a été dit, dans les territoires ruraux.
La discussion sur cette question peut être légitime, mais pas dans le cadre de cette proposition de loi. C’est la raison pour laquelle je donne un avis favorable à cet amendement. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe EPR.)
M. le président
J’ai plusieurs demandes de parole. Je propose qu’un seul orateur par groupe s’exprime, et pour une durée limitée à une minute, les différents arguments ayant déjà été exposés.
La parole est à Mme Sandra Marsaud.
Mme Sandra Marsaud
J’irai dans le sens de M. le rapporteur et de nos collègues Cosson et Naegelen. L’offre de ces fameuses enseignes de bricolage – aussi bien celles qui sont très connues que celles, moins connues, installées dans nos petits villages – qui subirait l’impact d’une telle mesure est destinée à des clients qui ne font pas habituellement appel à des artisans. C’est en tout cas ce que j’observe chez moi – puisque nous parlons depuis tout à l’heure de la « vraie vie », chacun partage forcément son expérience.
J’ai de nombreux amis qui effectuent eux-mêmes leurs travaux. Cependant, lorsqu’ils se rendent dans un magasin pour acheter des matériaux et qu’ils demandent conseil à un vendeur, ils s’aperçoivent que les travaux ne seront pas si faciles à réaliser. Les commerçants leur proposent alors d’être aidés par des professionnels, moyennant quelques centaines d’euros supplémentaires. Si l’on interdisait à ces entreprises de faire ainsi appel à des tiers, c’est tout un marché qui serait bridé et de nombreux chantiers qui ne seraient pas lancés. Cela ne va pas du tout dans le sens de l’histoire. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe EPR.)
M. le président
La parole est à M. Hervé de Lépinau.
M. Hervé de Lépinau
Monsieur le rapporteur, nous avons fait, vous et moi, la même analyse juridique de votre amendement. Cependant, d’un point de vue très pragmatique et très politique, je vous ferai remarquer que le secteur du bâtiment traverse une crise très profonde – et j’ai le regret de dire que ce texte a mis le feu. Il s’agit à présent de le contenir.
Une fois que nous aurons voté – quel que soit le résultat –, nous retournerons dans nos circonscriptions pour expliquer que la disposition que vous contestez aujourd’hui devra faire l’objet d’un autre véhicule législatif que cette proposition de loi. Le Sénat s’intéressera d’ailleurs également à ce point. Nous y voyons en tout cas plus clair s’agissant non seulement de l’article 3 ter, qui représente une avancée sur la question de la sous-traitance, mais aussi de votre amendement. Celui-ci soulève en effet un problème sur lequel nous ne pouvons faire l’impasse.
Il apparaît nécessaire – je le dis à l’intention de la Capeb – que les artisans se restructurent, par exemple sur un mode coopératif, afin d’accéder à l’achat de matériel à des prix intéressants qui puissent être répercutés sur les clients. Car nous sommes soucieux du sort des artisans, mais aussi de celui de nos concitoyens, qui sont confrontés à des difficultés de pouvoir d’achat. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
M. le président
La parole est à M. Jean-Pierre Vigier.
M. Jean-Pierre Vigier
Monsieur le rapporteur, vous avez parlé du maillage territorial des enseignes. Or ce sont bel et bien les artisans qui assurent ce maillage. Dans les territoires, notamment ruraux, vous trouverez davantage d’artisans à proximité que d’enseignes.
En outre, tout intermédiaire entraîne un coût supplémentaire. Vous prétendez que des marchés de travaux seront perdus. Ce ne sera pas le cas, puisque les chantiers seront gérés directement par les artisans.
Les enseignes sont là pour vendre des matériaux, les artisans pour faire les travaux, en contact direct avec les particuliers. Comme le disait ma grand-mère, chacun à sa place et les vaches seront bien gardées ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
M. le président
La parole est à M. David Taupiac.
M. David Taupiac
Le groupe LIOT votera contre cet amendement. Certes, il faudra trouver des dispositifs à l’intention des grandes enseignes – par exemple un système de cotraitance, comme l’a suggéré M. Vigier, ou la création de filiales afin d’obtenir le label. En tout cas, les dispositions prévues par l’article ne leur bloquent pas l’accès à ce marché.
Je tiens cependant à rappeler que nos artisans, eux, ont fait des efforts considérables, notamment financiers, pour obtenir le label RGE. En outre, ils rencontrent actuellement quelques difficultés.
Par ailleurs, avec cet amendement, on fait passer une nouvelle fois les grandes enseignes avant les artisans. Or qui capte la valeur lorsqu’un sous-traitant intervient ?
M. Jean-Pierre Vigier
Exactement !
M. David Taupiac
Veut-on que les grandes enseignes captent encore plus de valeur sur le marché de la rénovation, ou souhaite-t-on favoriser les artisans qui font vivre nos territoires ? (M. Bernard Chaix applaudit.) Je rappelle que les artisans sont aussi installés dans les plus petites communes de nos territoires ruraux, alors que les grandes enseignes se cantonnent aux bourgs-centres et aux métropoles. (M. Christophe Barthès applaudit.) Aménageons notre territoire et préservons notre artisanat ! (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LIOT et RN. – M. Jean-Pierre Vigier applaudit également.)
M. le président
Sur le sous-amendement n° 80, je suis saisi par le groupe Ensemble pour la République d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Chantal Jourdan.
Mme Chantal Jourdan
Comme cela a été dit, l’article comporte une avancée : la limitation à deux rangs du niveau de sous-traitance.
En revanche, il n’est pas tout à fait juste d’affirmer, comme l’a fait M. le rapporteur, que le réseau des grandes enseignes permet de mettre en contact particuliers et artisans jusqu’au dernier kilomètre. Ce n’est en tout cas pas ce que me disent les artisans et TPE de mon territoire. Ils sont confrontés à une concurrence sévère qui les met en difficulté et souhaiteraient donc plutôt inverser la logique actuelle. L’idée est que les particuliers désireux d’engager des travaux s’adressent aux artisans RGE qu’ils connaissent bien, ce qui ne les empêche bien sûr pas ensuite de se tourner vers l’entreprise de leur choix, y compris une enseigne commerciale, pour acheter les matériaux.
M. le président
La parole est à M. Jean-Paul Lecoq.
M. Jean-Paul Lecoq
Dans la vraie vie, on ne connaît pas toujours bien les artisans. Le citoyen qui habite dans un village connaît peut-être les artisans en activité autour de chez lui ; je ne suis pas sûr que l’on puisse en dire autant de celui qui vit dans une grande ville de 300 000 habitants.
Il existe aujourd’hui un dispositif, avec un marché structuré qui laisse le choix entre différentes possibilités. L’article 3 ter, tel qu’il est rédigé, tend à supprimer purement et simplement certaines de ces possibilités.
Mme Sandra Marsaud
Eh oui !
M. Jean-Paul Lecoq
Nous devons être conscients que les particuliers pourraient ne plus faire appel à des artisan. Ils font en effet plus facilement confiance à une marque connue de la grande distribution qu’à un artisan qui, par exemple, peut faire une chute à tout moment. En outre, l’avance financière demandée au client est moins élevée chez un grand distributeur – or, depuis tout à l’heure, nous discutons de la capacité du client à payer une avance.
En résumé, nous devons certes lutter contre la fraude, mais il serait dommage de faire disparaître un marché.
M. le président
La parole est à Mme Claire Lejeune.
Mme Claire Lejeune
Il est temps de souligner que les fraudes aux aides publiques naissent dans un contexte de défaillance et d’abandon des priorités d’investissement par l’État.
Si la rénovation thermique des bâtiments était une priorité nationale, nous ne poserions pas ces questions dans les mêmes termes. Premièrement, le point d’entrée que constitue France Rénov’ disposerait réellement d’un maillage territorial, dans une logique de service public ; deuxièmement, un zéro reste à charge serait instauré pour permettre aux ménages précaires de financer ces travaux. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.) Ensuite, M. Barnier n’aurait pas prévu, dans son budget pour 2025, de réduire de 1,7 milliard l’enveloppe de MaPrimeRénov’ et le gouvernement n’aurait pas proposé au Sénat, il y a quelques jours, une baisse supplémentaire de 534 millions de ces crédits.
En introduisant un intermédiaire, en l’espèce les grandes enseignes, on crée un problème de captation de la valeur. Or il est avant tout nécessaire de donner la priorité à l’investissement public et au service public de la rénovation des bâtiments. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
M. le président
La parole est à M. le rapporteur.
M. Thomas Cazenave, rapporteur
J’aimerais donner un dernier argument pour dire quelle est ma conviction. On a souvent donné une vision binaire de la réalité : les artisans seraient sous la coupe des distributeurs et, en adoptant cet article, nous les libérerions.
Or les artisans ont le choix. Si 1 500 d’entre eux travaillent avec une grande plateforme, c’est peut-être parce qu’ils y trouvent des avantages, comme le fait de ne pas avoir besoin de recruter des commerciaux. D’un autre côté, de nombreux artisans choisissent de ne pas travailler avec ce type d’intermédiaire.
L’article 3 ter, introduit par l’amendement adopté en commission, risque d’entraîner tout simplement un rétrécissement de la taille du marché.
Mme Sandra Marsaud
C’est très grave !
M. Thomas Cazenave, rapporteur
Dans le dispositif actuel, un artisan est parfaitement libre de mener un chantier de rénovation – c’est d’ailleurs la décision que prennent nombre d’entre eux –, mais il peut aussi le refuser. Les deux possibilités existent, il n’est pas question de se priver de l’une d’entre elles.
Adopter cet article en l’état, c’est fermer un pan entier du marché, celui qui permet de capter les consommateurs qui, après avoir passé la porte d’un grand distributeur, décident d’engager des travaux de rénovation. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)
M. le président
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée
Tous les orateurs ont exprimé dans leur intervention leur volonté de protéger les artisans. Reste à savoir si l’article 3 ter, tel qu’il est rédigé, y contribue, s’il leur permettra de conserver les marchés qu’ils obtiennent actuellement.
J’aurais tendance à répondre par la négative, car avec le dispositif prévu, il n’y aura plus de ruissellement vers les artisans. À cet égard, l’amendement no 74 apporte une réponse.
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 74.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 120
Nombre de suffrages exprimés 114
Majorité absolue 58
Pour l’adoption 53
Contre 61
(L’amendement no 74 n’est pas adopté.)
M. le président
Je mets aux voix l’article 3 ter.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 121
Nombre de suffrages exprimés 120
Majorité absolue 61
Pour l’adoption 79
Contre 41
(L’article 3 ter, amendé, est adopté.)
Après l’article 3 ter
M. le président
La parole est à M.Nicolas Ray, pour soutenir l’amendement no 39, qui fait l’objet d’un sous-amendement du rapporteur.
M. Nicolas Ray
Il vise à assurer une cohérence avec les dispositions de l’article 3 ter en interdisant la sous-traitance en cascade pour les travaux aidés dans le cadre de MaPrimeAdapt’ et des CEE.
On sait que la sous-traitance en cascade peut accroître les risques de fraudes aux aides publiques et occasionne surtout une dilution des responsabilités. Cela entraîne des difficultés en cas de défaillance des équipements installés, donc de mise en cause de ces responsabilités.
L’amendement vise donc à limiter la sous-traitance à deux rangs. Nous sommes favorables au sous-amendement no 80, qui corrige sa forme.
M. le président
Le sous-amendement no 80 de M. le rapporteur est rédactionnel.
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée
L’amendement vise à limiter la sous-traitance à deux rangs pour tous les travaux qui font l’objet d’un financement dans le cadre du dispositif MaPrimeAdapt’ ou de celui des certificats d’économie d’énergie.
Au premier abord, il me semblait raisonnable de limiter la sous-traitance à deux rangs. Je vous donnerai cependant deux exemples illustrant la nécessité de recourir parfois à une sous-traitance de deuxième rang, que ce soit pour mener des travaux dans des maisons individuelles ou dans des copropriétés. S’agissant des maisons individuelles, il peut arriver qu’un plombier chauffagiste ait besoin de faire appel à un électricien, qui lui-même devra demander à un peintre de repeindre un mur. De même, dans une copropriété, certaines réhabilitations lourdes, telle la création d’une charpente métallique, peuvent requérir le travail de professionnels aux métiers très spécifiques. Sans sous-traitance de deuxième rang, on ne pourra pas forcément satisfaire tous les besoins identifiés sur un chantier.
Sur l’amendement no 39, mon avis est donc défavorable.
M. le président
La parole est à M. Mickaël Cosson.
M. Mickaël Cosson
Je résume ce que nous venons de vivre en dix minutes. Lors de la discussion du précédent amendement, nous avons entendu des interventions qui défendaient nos petits artisans. À présent, on voudrait leur ôter tout espoir d’intervenir sur un chantier global – des interventions auxquelles on s’efforce pourtant d’inciter – en leur demandant d’être tout à la fois chauffagistes, menuisiers et spécialistes de l’isolation s’ils ne veulent pas se voir empêcher par cet amendement de réaliser une rénovation globale pour un particulier.
Permettez-moi de penser que certains devraient retourner sur le terrain !
M. Jean-Paul Lecoq
Oui !
M. le président
Je mets aux voix le sous-amendement no 80.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 111
Nombre de suffrages exprimés 104
Majorité absolue 53
Pour l’adoption 103
Contre 1
(Le sous-amendement no 80 est adopté.)
(L’amendement no 39, sous-amendé, est adopté.)
Article 4
M. le président
La parole est à Mme Danielle Brulebois, pour soutenir l’amendement no 55 rectifié.
Mme Danielle Brulebois
Il tend à rappeler que les contrôles commandés par le demandeur conformément à la réglementation applicable aux CEE sont effectués par des organismes accrédités par l’État, suivant l’article 1er de l’arrêté du 28 septembre 2021 relatif aux contrôles dans le cadre du dispositif des certificats d’économies d’énergie. Ces contrôles ont pour fonction d’attester la conformité des opérations.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Thomas Cazenave, rapporteur
Je demande le retrait de cet amendement, faute de quoi mon avis sera défavorable.
En effet, suivant la logique propre aux CEE, leurs demandeurs, que l’on dit obligés, sont toujours responsables des contrôles en dernière analyse. Cet amendement créerait une autre chaîne de responsabilité et déséquilibrerait ainsi tout le système en vigueur, qui fait reposer sur les demandeurs la lourde exigence de s’assurer que les contrôles sont bien effectués.
En outre, l’amendement présente un problème de forme, puisqu’il vise à insérer dans la loi une disposition de nature réglementaire.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée
Vous proposez d’étendre aux organismes d’inspection l’engagement relatif à la conformité des opérations faisant l’objet d’une demande de CEE. Je rappelle simplement que l’attestation de cette conformité par les organismes en question relève de la relation contractuelle entre le demandeur de CEE, qui organise le contrôle, et l’organisme lui-même. Il ne pèse donc sur ce dernier aucune obligation vis-à-vis du ministre chargé de l’énergie.
Pour cette raison, j’émets un avis défavorable.
(L’amendement no 55 rectifié est retiré.)
M. le président
Sur les amendements nos 88, 50 et 89, je suis saisi par le groupe Ensemble pour la République de demandes de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 77.
M. Thomas Cazenave, rapporteur
Il vise à obliger les demandeurs de CEE à signaler au PNCEE les entreprises qui ne respectent pas la réglementation, toujours afin de resserrer les mailles de notre filet.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée
Cet amendement est de nature à renforcer la capacité d’information de l’administration, donc son action contre la fraude. Avis favorable.
(L’amendement no 77 est adopté.)
M. le président
Sur l’article 4, je suis saisi par le groupe Ensemble pour la République d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Paul Midy, pour soutenir l’amendement no 51.
M. Paul Midy
Soyons clairs : nous parlons de fraude, donc de fraudeurs. Or les fraudeurs sont des délinquants qui volent l’argent public, l’argent des Françaises et des Français. Ils ne doivent bénéficier d’aucune impunité.
C’est pourquoi cet amendement prévoit de rehausser le plafond des sanctions pécuniaires applicables aux demandeurs de CEE afin d’en renforcer l’effet dissuasif. Le montant de cette sanction pourra ainsi s’élever jusqu’à 10 % du chiffre d’affaires hors taxes, contre 4 % aujourd’hui, et jusqu’à 12 % du chiffre d’affaires en cas de nouveau manquement, contre 6 % aujourd’hui.
Par cohérence, ce rehaussement du plafond s’applique également aux sanctions pécuniaires affectant les acquéreurs de CEE n’ayant pas fait procéder aux vérifications imposées lors de l’acquisition des certificats, ou l’ayant fait de façon incomplète.
(L’amendement no 51, accepté par la commission et le gouvernement, est adopté.)
M. le président
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 88 de la commission des affaires économiques.
M. Thomas Cazenave, rapporteur
Il s’agit encore de renforcer le dispositif de sanction qui s’applique aux fraudeurs. Si quelqu’un demande des CEE pour une surface de 200 mètres carrés alors que les mesures d’économie d’énergie qu’il entend prendre ne concernent qu’une surface de 100 mètres carrés, l’État ne peut récupérer que les certificats attribués pour les 100 mètres carrés de trop. Nous souhaitons récupérer l’ensemble des certificats accordés : aucune raison ne justifie qu’un fraudeur bénéficie d’un soutien public.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée
Favorable.
M. le président
La parole est à M. Charles Sitzenstuhl.
M. Charles Sitzenstuhl
Ce débat relatif aux CEE me donne l’occasion de poser une question au gouvernement. Madame Louwagie, vous siégiez à la commission des finances et vous rappelez donc peut-être qu’il y a quelques mois, les membres de cette commission, dont je fais partie, ont assisté à une audition très intéressante de représentants de la Cour des comptes. Cette audition avait trait au dispositif des CEE, au sujet duquel la Cour a rendu un rapport en septembre 2024.
Ce rapport, plutôt critique, pointait la complexité du dispositif et le caractère parfois discutable des gains énergétiques réalisés grâce à lui. La Cour recommandait assez vivement que le gouvernement lance un plan d’ampleur visant notamment à automatiser les contrôles. Des travaux ont-ils été engagés à Bercy et, plus largement, dans les différentes administrations afin d’appliquer les recommandations de la Cour ?
M. le président
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée
Vous avez tout à fait raison. Tous les membres de la commission des finances ont apprécié les travaux de la Cour des comptes, qui ont mis en exergue un certain nombre de manques dans le dispositif ainsi que des pistes d’amélioration.
Comme nous aurons l’occasion de l’évoquer lors de l’examen des amendements déposés par M. Causse, nous travaillons à un règlement destiné à adapter plusieurs dispositifs et à corriger certaines imperfections soulignées par la Cour.
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 88.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 106
Nombre de suffrages exprimés 102
Majorité absolue 52
Pour l’adoption 102
Contre 0
(L’amendement no 88 est adopté.)
M. le président
L’amendement no 50 de M. le rapporteur est rédactionnel.
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée
Favorable.
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 50.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 101
Nombre de suffrages exprimés 91
Majorité absolue 46
Pour l’adoption 89
Contre 2
(L’amendement no 50 est adopté.)
M. le président
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 89 de la commission des affaires économiques.
M. Thomas Cazenave, rapporteur
Une partie des CEE sert à financer l’acquisition de véhicules électriques. Cet amendement vise à ouvrir au PNCEE l’accès au système d’immatriculation des véhicules. Cela peut paraître idiot, mais mieux vaut s’assurer que les CEE financent l’achat de véhicules qui existent réellement.
M. le président