XVIIe législature
Session ordinaire de 2024-2025

Première séance du lundi 02 décembre 2024

Sommaire détaillé
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Première séance du lundi 02 décembre 2024

Présidence de Mme Yaël Braun-Pivet

Mme la présidente

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    La séance est ouverte.

    M. Hadrien Clouet

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    Pas pour longtemps !

    Mme la présidente

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    Vous imaginez toute sorte de choses quand je préside une séance dans ce genre de contexte ! (Sourires.)

    (La séance est ouverte à quinze heures.)

    1. Démission d’un député

    Mme la présidente

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    J’ai reçu de M. Stéphane Séjourné, député de la neuvième circonscription des Hauts-de-Seine, une lettre m’informant qu’il se démettait de son mandat de député. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Louis Boyard

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    Bonne nouvelle !

    Un député du groupe LFI-NFP

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    Vous devriez en faire autant !

    Mme la présidente

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    Acte est pris de sa démission au Journal officiel du dimanche 1er décembre 2024.

    2. Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025

    Commission mixte paritaire

    Mme la présidente

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    L’ordre du jour appelle la discussion, sur le rapport de la commission mixte paritaire, du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 (no 638).
    La parole est à M. Yannick Neuder, rapporteur de la commission mixte paritaire.

    M. Hadrien Clouet

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    Le rapporteur de la censure !

    M. Jérôme Guedj

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    Tout cela n’aura servi à rien, monsieur le rapporteur !

    M. Yannick Neuder, rapporteur de la commission mixte paritaire

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    Nous sommes à la croisée des chemins. Nous parvenons à la fin de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), qui s’est frayé une voie parlementaire malgré un contexte difficile.
    Notre système social était menacé de délitement. Je me réjouis donc que les travaux de la commission mixte paritaire (CMP) qui s’est réunie il y a quelques jours aient donné lieu à un accord ; ce n’était pas arrivé depuis 2010. C’est la conséquence de l’esprit de responsabilité et de la volonté constante de dialogue qui ont caractérisé nos débats. Le Parlement a mené jusqu’à leur terme les discussions nécessaires pour construire ce texte.
    Nous avons rectifié un budget qui, au départ, était sans doute déséquilibré et rigide de manière à en faire un budget de consensus, plus protecteur. Le texte n’est pas optimal – il l’était encore moins avant nos débats. La voie du compromis a permis d’obtenir des garanties et des équilibres justes pour les Français.
    Mais une alliance des extrêmes, à l’idéologie faite de bric et de broc (« Ah ! sur les bancs du groupe RN), s’est constituée pour faire voler en éclat l’édifice du Parlement. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR ainsi que sur quelques bancs des groupes EPR et Dem.) C’est cette même alliance qui a fait adopter des dizaines de milliards d’impôts et de taxes supplémentaires il y a quelques jours. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR.) Il faut dire la vérité aux Français sur le projet de chaos et de discorde du Rassemblement national, poussé par les Insoumis. (Mêmes mouvements.) Priver les Français d’un budget de la sécurité sociale, c’est ne laisser à l’Urssaf que quelques semaines de trésorerie pour payer les retraites, rembourser les soins et financer les hôpitaux. Qui veut que les cartes Vitale cessent de fonctionner en mars ? (Applaudissements sur les bancs du groupe DR ainsi que sur quelques bancs des groupes EPR et Dem. – Très vives protestations sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    Mme la présidente

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    Je vous en prie, un peu de silence !

    Un député du groupe RN

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    Mais c’est Pinocchio !

    M. Yannick Neuder, rapporteur

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    Priver les Français d’un budget de la sécurité sociale, c’est ne faire que reporter le problème. (Exclamations continues sur les bancs des groupes RN et UDR.) Rien ne serait pire que l’instabilité politique – un chaos synonyme de statu quo, alors que les déficits du pays se creusent. (Mêmes mouvements.)

    M. Laurent Jacobelli et M. Emeric Salmon

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    Mais si : avec vous, c’est déjà pire !

    Mme la présidente

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    Je vous en prie, écoutons le rapporteur de la commission mixte paritaire ; vous aurez le temps de vous exprimer par la suite.

    M. Yannick Neuder, rapporteur

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    Priver les Français d’un budget de la sécurité sociale, c’est les priver de mesures pour lutter contre la désertification médicale, de mesures en faveur des agriculteurs et des personnes en situation de handicap. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR ainsi que sur quelques bancs des groupes EPR, Dem et HOR.)

    M. Thibault Bazin

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    Il a raison !

    M. Jérôme Guedj

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    Non, il n’y a rien pour lutter contre les déserts médicaux !

    M. Yannick Neuder, rapporteur

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    Priver les Français d’un budget de la sécurité sociale, c’est revenir sur les retraites des Français.

    Plusieurs députés du groupe RN

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    Mais non !

    M. Hadrien Clouet

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    N’importe quoi !

    M. Yannick Neuder, rapporteur

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    Nous avons modifié le PLFSS pour que toutes les pensions soient revalorisées non pas en juillet mais dès janvier. Un bouclier anti-inflation permettra de revaloriser davantage les pensions les plus faibles en juillet. Il n’y a donc aucun perdant. (Vives protestations sur les bancs du groupe RN.)

    M. Jérôme Guedj

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    Ce n’est pas vrai !

    M. Emeric Salmon

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    Il ment ! Ramenez vite Barnier !

    M. Yannick Neuder, rapporteur

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    Priver les Français d’un budget de la sécurité sociale, c’est revenir sur les mesures de protection des agriculteurs, notamment sur le calcul plus favorable des retraites agricoles.
    C’est aussi oublier que nous avons considérablement réduit la pression sur les entreprises en trouvant un point d’équilibre s’agissant de la réduction des allégements généraux de cotisations. (« C’est faux ! » sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Je me réjouis d’avoir défendu la préservation de certains aménagements, comme ceux prévus par la loi de 2009 pour le développement économique des outre-mer (Lodeom), chers à nos territoires d’outre-mer.
    Priver les Français d’un budget de la sécurité sociale, c’est revenir sur les mesures de lutte contre la désertification médicale,…

    M. Jérôme Guedj

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    Mais il n’y a rien contre les déserts médicaux !

    M. Yannick Neuder, rapporteur

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    …qui favorisent le cumul emploi-retraite des médecins et le retour à l’exercice de nombreux praticiens sur nos territoires.
    C’est aussi faire fi de la généralisation du dispositif Handigynéco, qui améliore le suivi gynécologique des femmes en situation de handicap (Protestations sur les bancs du groupe RN), mais également des campagnes de vaccination contre le méningocoque et le papillomavirus et de l’accès direct aux séances de suivi psychologique.

    M. Jérôme Guedj

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    C’était déjà dans le PLFSS de l’année dernière !

    M. Yannick Neuder, rapporteur

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    Priver les Français d’un budget de la sécurité sociale, c’est mettre à la poubelle l’enveloppe exceptionnelle de soutien aux établissements médicaux et aux Ehpad – 100 millions d’euros.

    M. Jérôme Guedj

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    C’est insuffisant, il en faudrait 500 !

    M. Yannick Neuder, rapporteur

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    C’est enfin revenir sur les mesures de lutte contre la fraude : la fraude sociale engendre un manque à gagner de 13 milliards. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR.) Pas moins de 2,1 milliards de fraudes sont constatés, mais seuls 600 millions sont recouvrés. On peut donc oublier le déploiement de la carte Vitale sécurisée et dématérialisée, mais aussi le contrôle des retraites versées à l’étranger, un dispositif défendu depuis longtemps par notre collègue Pierre Cordier.
    Priver les Français d’un budget de la sécurité sociale, c’est donc institutionnaliser le chaos. C’est avoir une vision à court terme alors que la France plonge dans les déficits. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
    En tant que rapporteur général, je sais que ce PLFSS manque de vision et de moyens pour les acteurs du soin, de la dépendance et du handicap, mais aussi que le Parlement doit prendre ses responsabilités pour donner un budget à la sécurité sociale de notre pays, en dépit des vents contraires.

    M. Emeric Salmon

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    Oui, nous les prendrons, n’ayez crainte !

    M. Yannick Neuder, rapporteur

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    J’en appelle donc à la responsabilité du Parlement, en particulier à celle de la coalition entre LFI et le RN. Cette alliance contre-nature est en réalité une alliance contre les Français ! (Applaudissements sur les bancs du groupe DR ainsi que sur quelques bancs des groupes EPR et Dem.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Frédéric Valletoux, président de la commission mixte paritaire.

    M. Frédéric Valletoux, président de la commission mixte paritaire

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    Je tiens à remercier les commissaires, issus tant de l’Assemblée que du Sénat, d’autant qu’après sept heures et demie de débat nous sommes parvenus à un accord : c’est la première fois depuis quatorze ans qu’une CMP examinant un projet de loi de financement de la sécurité sociale est conclusive.
    Nous devons en grande partie ce succès à l’implication des rapporteurs généraux du budget de la sécurité sociale, à commencer par le nôtre, Yannick Neuder. Ils ont affronté la masse des 130 articles qui restaient en discussion avec une grande détermination, un sens élevé du dialogue et un souci constant de pédagogie. Le résultat de cette CMP conclusive est aussi dû à l’excellent climat qui a prévalu tout au long des travaux qui se sont déroulés mercredi dernier à l’Assemblée. J’en suis reconnaissant à tous les commissaires, titulaires comme suppléants : cela montre que, loin des caméras, le Parlement sait travailler non seulement de manière courtoise, mais aussi efficacement et utilement – c’est un message important et encourageant dans la période que nous traversons.
    Alors que l’Assemblée est la plus fracturée de la Ve République,…

    M. Sébastien Peytavie

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    La faute à Macron !

    M. Frédéric Valletoux, président de la commission mixte paritaire

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    …nous sommes parvenus à trouver un accord sur ce texte avec les sénateurs. On est bien loin des images caricaturales que certains se plaisent à diffuser, faisant du chaos leur fonds de commerce.
    Des désaccords ont été exprimés, cela va de soi – c’est même souhaitable. Chose tout aussi souhaitable, des compromis ont été trouvés. Certes, personne n’a gagné sur tous les plans, mais personne n’a pas tout perdu non plus.

    M. Emeric Salmon

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    Donc tout le monde a perdu, puisque deux négations s’annulent !

    M. Frédéric Valletoux, président de la commission mixte paritaire

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    Nous sommes donc fiers de vous présenter le texte dont sont à présent saisies les deux assemblées. Ne vous y trompez pas : comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire à plusieurs reprises, le texte en question n’est pas parfait. J’ai cependant conscience des délais restreints qu’a dû respecter le gouvernement lors de la rédaction de ce projet de loi.
    Le texte proposé initialement avait pour ambition de freiner les dépenses. Étant donné l’état de nos finances publiques et de la sécurité sociale, c’était déjà une grande vertu. La logique du rabot a naturellement créé des insatisfactions, d’autant que les deux mois de discussions parlementaires n’ont pas permis de le compléter par des mesures structurelles, dont notre système de santé et de protection sociale a pourtant besoin. La méthode de construction du texte avec les parlementaires doit être améliorée.

    M. Jérôme Guedj

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    C’est le moins que l’on puisse dire !

    M. Frédéric Valletoux, président de la commission mixte paritaire

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    Une collaboration plus étroite, dès les premiers jours de nos travaux, aurait permis d’éviter certains blocages – je pense à l’article 6, relatif aux allégements de cotisations sociales patronales, très tardivement ajusté, mais aussi à l’article 23, portant sur le report d’indexation des retraites. Les députés de plusieurs groupes ont très vite alerté en vain le gouvernement sur ces deux sujets majeurs. Ils ont eu le sentiment de n’être ni écoutés, ni entendus, et ce pendant de nombreuses semaines. Je ne peux que déplorer cette situation.
    Les discussions à l’Assemblée nationale ont néanmoins permis plusieurs vraies avancées, qui ont été reprises dans le texte soumis à notre vote : la taxe sur les boissons sucrées, la pérennisation de l’autorisation faite aux infirmiers de délivrer des certificats de décès, l’accès direct aux psychologues, notamment dans le cadre du dispositif Mon soutien psy, ou encore l’obligation de mener une réflexion sur la pertinence des dépenses de santé. Ce sont autant de victoires issues de nos rangs.
    Pour autant, chacun des groupes qui composent notre hémicycle est-il pleinement satisfait ?

    M. Sébastien Peytavie

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    Absolument pas !

    M. Frédéric Valletoux, président de la commission mixte paritaire

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    Bien sûr que non. Mais ce texte a au moins le mérite d’exister et d’offrir une réponse satisfaisante à des questions importantes pour nos compatriotes et notre pays. Permet-il de continuer à assurer aux Français un niveau élevé de protection sociale ?

    M. Antoine Léaument

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    Non !

    M. Frédéric Valletoux, président de la commission mixte paritaire

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    La réponse est incontestablement positive. Constitue-t-il une première étape de la trajectoire de diminution des déficits sociaux, voie qu’il nous faut impérativement emprunter ? C’est également le cas.
    Je sais la tentation pour le Nouveau Front populaire et le Rassemblement national de s’unir, de mêler leurs voix pour adopter une motion de censure et renverser le gouvernement.

    Plusieurs députés du groupe RN

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    Ah !

    M. Frédéric Valletoux, président de la commission mixte paritaire

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    Pour les extrêmes de droite et de gauche,…

    M. Sébastien Peytavie

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    Et pour l’extrême centre !

    M. Frédéric Valletoux, président de la commission mixte paritaire

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    …l’heure est à la distraction et à la complaisance – nous l’avons bien compris. Mais la démocratie exige des compromis et le mandat qui est le vôtre impose un texte de responsabilité. C’est le service de la protection sociale, qui protège tous les Français, qui est en jeu.
    J’ai aussi bien conscience des enjeux de politique calendaire qui sont les vôtres. Mais, avant de penser à 2027 et à la prochaine élection présidentielle (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP), il faut penser au présent en assurant la stabilité fiscale, économique et institutionnelle de notre pays, et en garantissant aux Français le niveau de protection sociale qui leur est dû. Aussi, je vous invite à adopter les conclusions de la CMP sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, DR, Dem et HOR. – Mme Constance de Pélichy applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre du budget et des comptes publics.

    M. Hadrien Clouet

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    C’est son dernier discours !

    M. Damien Maudet

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    Où est la ministre de la santé ?

    M. Hadrien Clouet

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    Libérez Darrieussecq !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre du budget et des comptes publics

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    Nous vivons un moment singulier par sa rareté : il est peu courant que les représentants des deux chambres du Parlement réunis en commission mixte paritaire tombent d’accord sur un texte financier. C’est en général le signe de circonstances exceptionnelles, qui exigent d’agir dans l’urgence, et qui en appellent à la responsabilité de chacune et de chacun.
    La dernière fois qu’une CMP aboutissait à un tel résultat pour un texte financier, j’en faisais partie en tant que rapporteur général du budget. C’était en 2020, face à la crise sanitaire. Faisant preuve de responsabilité, députés et sénateurs de tous bords s’étaient, à l’époque, entendus pour faire adopter au plus vite les budgets d’urgence qui nous ont permis de protéger efficacement nos concitoyens, notre économie et nos emplois. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, Dem et DR.)
    Les circonstances qui nous réunissent aujourd’hui ne sont pas moins graves ; elles appellent des réponses qui ne sont pas moins urgentes, et qui ne sauraient être moins courageuses. La crise à laquelle nous sommes confrontés n’est pas sanitaire. La crise que nous devons éviter est financière. Vous connaissez la gravité de la situation de nos finances publiques. La semaine dernière, le taux d’intérêt des emprunts français a ponctuellement dépassé celui de la Grèce. Notre dette dépasse les 3 230 milliards d’euros (« C’est de votre faute ! » sur les bancs du groupe LFI-NFP), et nous nous apprêtons à consacrer l’an prochain près de 55 milliards d’euros à la seule charge de la dette. Si les taux d’intérêt augmentaient ne serait-ce que de 1 %, il faudrait y ajouter 20 milliards de plus d’ici à cinq ans.
    Sans le projet de loi de financement de la sécurité sociale que nous examinons aujourd’hui, le déficit des comptes sociaux attendrait près de 30 milliards d’euros l’an prochain !

    Mme Bénédicte Auzanot

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    La faute à qui ?

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Ce n’est pas un simple enjeu comptable. C’est notre capacité à garantir les droits acquis et à en ouvrir de nouveaux qui est en question. C’est la pérennité de l’ensemble de notre modèle de protection sociale qui est en jeu. Ce défi, députés et sénateurs l’ont relevé la semaine dernière en trouvant un accord sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025.
    Le moment est singulier par sa rareté, je l’ai dit. Il l’est également par sa portée. Cela signifie concrètement que, oui, contrairement à ce que certains voudraient faire croire, il y a une majorité au Parlement pour faire le choix de la responsabilité. Il faut que ce soit dit, il faut que ce soit su.

    M. Damien Maudet

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    C’est pour cela qu’il y aura un 49.3 ?

    Plusieurs députés du groupe LFI-NFP

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    Allez donc jusqu’au vote !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Il y a une majorité au Parlement pour faire le choix de rééquilibrer les comptes et de redresser nos finances.
    Il y a une majorité au Parlement pour restaurer les marges de manœuvre qui nous permettront de continuer à investir, de continuer à financer nos services publics, de continuer à protéger les Français.
    Il y a une majorité au Parlement pour faire, aujourd’hui, les choix courageux qui nous épargneront des décisions encore plus douloureuses demain.

    M. Hadrien Clouet

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    Ce n’est pas un ministre, c’est un numéro vert !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Le Premier ministre a assumé d’entrée de jeu que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 était perfectible, pourvu que le cadre de responsabilité soit respecté. Ce cadre, vous le connaissez ; nous en avons longuement débattu, comme nous en avons débattu avec vos collègues du Sénat. Le gouvernement n’a qu’un seul objectif : contenir le déficit autour 5 % du PIB dès l’an prochain, afin d’être en mesure de le ramener sous la barre des 3 % à l’horizon 2029. C’est tout simplement le niveau qui nous permettra de stabiliser, puis de réduire notre endettement.

    M. Hadrien Clouet

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    Ça va, Angela Merkel !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Le gouvernement a proposé un effort inédit de 60 milliards d’euros, mais c’est un effort équilibré, qui porte aux deux tiers sur la baisse des dépenses, et c’est un effort partagé, équitablement réparti entre toutes les administrations publiques, à commencer par l’État.
    Tout au long des débats, à l’Assemblée nationale comme au Sénat, je n’ai jamais dévié de ce cap. Je n’ai jamais dévié non plus des engagements que j’ai pris devant vous dès la présentation du texte. J’ai toujours veillé au respect de vos prérogatives. Je vous ai toujours transmis sans délai les informations nouvelles susceptibles d’éclairer nos échanges dès lors qu’elles étaient portées à ma connaissance.
    Surtout, le gouvernement n’a jamais refusé le débat. (« C’est faux ! » sur les bancs du groupe SOC.) Il a toujours considéré toutes les propositions, issues de tous les bancs, sans distinction, dès lors que nous étions d’accord, à la fin, pour rééquilibrer progressivement les comptes. Nous avons été à l’écoute de vos alertes, de vos remontées, de vos observations.
    Du fait de l’application des délais constitutionnels, les débats, en première lecture, n’ont pas pu aller à leur terme à l’Assemblée nationale. Cela ne signifie pas pour autant qu’ils n’ont pas été pris en compte. Comme vous l’aurez remarqué, le gouvernement a fait le choix de ne pas repartir de la version initiale du texte lors de son examen au Sénat, ainsi que l’y autorise pourtant la Constitution, mais de reprendre plus d’une trentaine d’amendements issus de toutes les sensibilités politiques.
    Le texte qui vous est soumis aujourd’hui est donc un texte complété, amélioré, enrichi par les compromis trouvés en commission mixte paritaire. Le gouvernement a entendu les parlementaires de tous les groupes, qui ont appelé à modérer l’effort demandé aux entreprises, au titre de la réforme des allégements généraux de cotisation : la cible d’économies, qui était fixée à 4 milliards d’euros dans le texte initial, est ramenée à 1,6 milliard. En outre, le dispositif d’exonération spécifique aux outre-mer sera préservé.
    Nous protégeons le pouvoir d’achat des retraités. Toutes les retraites seront bien revalorisées dès le 1er janvier, et nous ferons un effort complémentaire à l’été pour les petites retraites, dont le niveau sera bel et bien indexé sur l’inflation.
    Nous préservons l’apprentissage, en limitant aux seuls nouveaux contrats l’assujettissement partiel des apprentis à la contribution sociale généralisée (CSG), sans rétroactivité.
    Nous modérons l’effort demandé aux employeurs territoriaux et hospitaliers au titre du relèvement du taux de cotisation à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, la CNRACL. Le rehaussement de 12 points du taux de cotisation sera étalé sur quatre ans, au lieu des trois initialement prévus, sans baisse de l’Ondam, l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, à due concurrence. Nous avons entendu les observations que les élus locaux et leurs représentants nous ont adressées sur ce point.
    Nous améliorons par ailleurs la situation financière des hôpitaux et des établissements médico-sociaux, avec un effort complémentaire de 700 millions d’euros. Cet effort est financé par les marges de manœuvre que nous dégageons, dans le cadre des mesures relatives à la CNRACL et à la lutte contre l’absentéisme.
    Comme l’a annoncé le premier ministre, nous rehaussons à hauteur de 200 millions d’euros les moyens nouveaux affectés aux départements par la branche autonomie, tout en simplifiant considérablement l’architecture de ces concours. Au total, les financements de la branche autonomie aux départements et aux maisons départementales des personnes handicapées auront ainsi pratiquement doublé par rapport à 2019 ; ils atteindront, à périmètre constant, près de 6 milliards d’euros en 2025. Les départements jouent un rôle essentiel dans la prise en charge de nos aînés ; l’État sera plus que jamais à leurs côtés.
    Enfin, le gouvernement a annoncé ce matin son engagement d’abandonner le déremboursement des médicaments par voie réglementaire.
    À l’issue de l’examen parlementaire, le déficit des régimes obligatoires de base et du fonds de solidarité vieillesse (FSV) s’établirait à 18,3 milliards d’euros en 2025, contre 16 milliards dans la copie initiale du gouvernement et 15 milliards à l’issue de l’examen au Sénat – nous aurons l’occasion d’y revenir lors de la présentation des amendements à l’article d’équilibre. C’est un bon compromis, un compromis responsable, qui représente un effort de freinage réel de la dépense sociale, mais un effort de freinage proportionné, qui préserve notre capacité à protéger les Français.
    Au total, et par rapport au texte initial du gouvernement, les dépenses des régimes obligatoires de base et du FSV progresseront de 2,7 %, contre 2,8 %. Cela représente un freinage de 0,6 milliard d’euros supplémentaires, reflétant principalement l’effort demandé par la CMP sur l’Ondam et la gestion des caisses de sécurité sociale.
    Ainsi, les dépenses de la branche maladie progresseront de 2,2 %. Celles de la branche vieillesse et de la branche autonomie seront plus dynamiques. Les dépenses des branches famille et accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) maintiendront, comme dans le texte initial, une progression de 3,1 % et de 6,3 % en 2025.
    Les recettes de la sécurité sociale s’établiront, quant à elles, 2,8 milliards en deçà de l’équilibre du texte initial et progresseront, elles aussi, de 2,7 % en 2025. Ces moindres recettes résultent en partie de la moindre dynamique des remises sur les médicaments, à hauteur de 1,2 milliard d’euros, en partie contrebalancée par les recettes attendues au titre de la clause de sauvegarde sur les dispositifs médicaux.
    Les travaux parlementaires ont, en contrepartie, permis de dégager 1,1 milliard de recettes supplémentaires, grâce au relèvement du taux de contribution sur les attributions gratuites d’actions, aux mesures de fiscalité comportementale portant sur les sodas et les jeux d’argent, mais aussi grâce aux économies supplémentaires introduites par la CMP sur les niches sociales.
    Le texte issu de la CMP est un texte de compromis qui permet des avancées significatives, au bénéfice de l’ensemble des Français, et que je veux ici rappeler.
    Il s’agit des mesures en faveur des agriculteurs auxquelles le gouvernement s’est engagé à la suite de la crise de l’an dernier. Avec ce PLFSS, nous renforçons et nous pérennisons les dispositifs d’exonération de cotisations sociales dont bénéficient les agriculteurs, en particulier au titre de l’emploi de travailleurs saisonniers. Nous avançons également au 1er janvier 2026 l’entrée en vigueur du nouveau mode de calcul des retraites agricoles. C’est un gain pour l’ensemble du monde agricole et, à ce titre, nous avons besoin de ce texte.
    Il s’agit de la revalorisation des personnels soignants : 1,6 milliard d’euros seront ainsi consacrés aux revalorisations conventionnelles en ville en 2025, dont 1 milliard pour les médecins.

    M. Sébastien Peytavie

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    Ce n’est pas assez !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Pour permettre ces avancées, nous avons besoin de ce texte.
    Il s’agit du fonctionnement de nos hôpitaux, qui recevront, au sein de l’Ondam, plus de 3 milliards de financements supplémentaires en 2025 mais, pour cela, nous avons besoin de ce texte.
    Il s’agit des hausses d’effectifs dans les Ehpad et des mesures en faveur de la prise en charge de l’autonomie. Au total, les dépenses de la branche autonomie progresseront de 2,7 milliards en 2025,…

    M. Jérôme Guedj

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    C’est faux !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    …soit une hausse de près de 6,8 %,…

    M. Jean-Paul Lecoq

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    Mais combien faudrait-il ?

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    …mais seulement si le texte est voté. Ces moyens vont permettre, très concrètement, d’accélérer les recrutements en Ehpad – plus de 6 000 équivalents temps plein (ETP) supplémentaires chaque année –, de continuer à déployer la stratégie des « 50 000 solutions » dans le champ du handicap, de soutenir davantage les départements dans le virage domiciliaire ou encore de solvabiliser la progression des dépenses au titre de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé (AEEH).
    Il s’agit des mesures de lutte contre la fraude sociale et les abus, véritable fléau qu’il nous faut éliminer. Le débat parlementaire a permis l’adoption d’amendements portant sur l’extension du droit de communication, sur les échanges de données entre assurance maladie obligatoire et complémentaires ou encore sur la réforme de l’organisation du service du contrôle médical de l’assurance maladie.
    Il s’agit de l’amélioration de l’indemnisation des victimes d’accident du travail ou de maladie professionnelle.
    Il s’agit de lutter contre les déserts médicaux, notamment en facilitant dès 2025 le cumul emploi-retraite des médecins grâce à une exonération des cotisations vieillesse dans les zones sous-denses, puis, à terme, par la consolidation du régime simplifié des professions médicales, dont le seuil d’éligibilité devrait être rehaussé.
    Mesdames et messieurs les députés, voilà ce que prévoit ce texte. Ce sont autant de droits, pour certains nouveaux, dont les Français seraient privés si ce texte n’était pas adopté. Nous avons préparé le projet de loi dans des circonstances exceptionnelles. Nous avons travaillé dans l’urgence, mais nous avons travaillé avec sérieux. Nous avons refusé, avec vous, le matraquage, nous avons refusé la casse sociale.
    Nous avons eu des débats approfondis, constructifs, qui nous ont permis de proposer une copie équilibrée,…

    Mme Marie Pochon

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    Ce n’est pas vrai !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    …de tracer un chemin de crête entre l’ouverture de droits nouveaux et le nécessaire rééquilibrage progressif des comptes sociaux. Sans l’adoption de ce texte, tout cela serait réduit à néant. (Les députés des groupes EPR, DR, Dem et HOR se lèvent et applaudissent.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des relations avec le Parlement.

    Mme Nathalie Delattre, ministre déléguée chargée des relations avec le Parlement

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    Madame la présidente, je souhaiterais une suspension de dix minutes. (Vives exclamations sur les bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.)

    Suspension et reprise de la séance

    Mme la présidente

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    La séance est suspendue.

    (La séance, suspendue à quinze heures vingt-cinq, est reprise à quinze heures trente-cinq.)

    Mme la présidente

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    La séance est reprise.

    Application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le premier ministre. (Les députés des groupes EPR, DR, Dem et HOR ainsi que plusieurs députés du groupe LIOT se lèvent et applaudissent longuement.)

    M. Sébastien Peytavie

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    Madame Le Pen, vous avez oublié de vous lever !

    M. Hadrien Clouet

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    Profitez-en, monsieur le premier ministre, c’est votre dernier discours ! Pesez vos mots !

    M. Michel Barnier, premier ministre

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    Dans ma déclaration de politique générale, il y a tout juste deux mois, je vous ai exposé ma méthode,…

    M. Sébastien Peytavie

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    Elle est efficace !

    M. Michel Barnier, premier ministre

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    …faite d’écoute, de respect et de dialogue,…

    Mme Ayda Hadizadeh

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    Avec qui ?

    M. Michel Barnier, premier ministre

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    …en premier lieu vis-à-vis du Parlement et de tous les groupes politiques qui le constituent.

    M. Alexis Corbière

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    À d’autres !

    M. Sébastien Peytavie

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    On ne se sent pas très respecté, à gauche !

    M. Michel Barnier, premier ministre

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    Je vous ai également répété que je tiendrais un langage de vérité sur les très nombreuses contraintes qui pèsent sur notre pays et sur les efforts qu’elles nous imposent.
    Nous sommes là aujourd’hui parce qu’il est nécessaire que la France se dote d’un projet de loi de financement de la sécurité sociale et d’un budget pour 2025 – M. le ministre des comptes publics vous l’a rappelé à l’instant. Pour cela, j’ai été au bout du dialogue avec l’ensemble des groupes politiques, en restant toujours ouvert et à l’écoute.

    Mme Ayda Hadizadeh, M. Inaki Echaniz et M. Olivier Faure

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    Vous avez uniquement parlé à l’extrême droite !

    M. Michel Barnier, premier ministre

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    Depuis le premier jour de mon engagement politique, je respecte profondément le débat et la culture du compromis ;…

    Mme Florence Herouin-Léautey

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    De la compromission !

    M. Michel Barnier, premier ministre

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    …je les crois indispensables.
    Le projet de loi de financement de la sécurité sociale en a d’ailleurs prouvé l’utilité. Les très nombreuses heures de travail parlementaire ont permis d’enrichir le texte du gouvernement…

    M. Sébastien Peytavie

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    Vous avez pourtant refusé d’aller au bout du débat !

    M. Michel Barnier, premier ministre

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    …et ont conduit à un accord en CMP, pour la première fois depuis quatorze ans.

    M. Olivier Faure

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    Un accord entre vous !

    M. Jérôme Guedj

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    Au sein du socle commun !

    M. Michel Barnier, premier ministre

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    Permettez-moi d’en remercier les membres, en particulier Frédéric Valletoux, son président, et Yannick Neuder, son rapporteur pour l’Assemblée nationale, ainsi que les sénateurs Philippe Mouiller, son vice-président, et Élisabeth Doineau, sa rapporteure pour le Sénat. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, DR, Dem et HOR. – Mme Stella Dupont applaudit également.)
    Ce texte a fait l’objet de multiples évolutions.

    M. Boris Vallaud

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    À la demande de Mme Le Pen !

    M. Michel Barnier, premier ministre

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    Ce matin encore, nous précisions la portée exacte de la trajectoire financière prévue en indiquant l’engagement du gouvernement à ce qu’il n’y ait pas de déremboursement des médicaments en 2025.

    M. Hadrien Clouet

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    Ce n’est pas du ressort du PLFSS !

    M. Antoine Léaument

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    Comme vous !

    M. Michel Barnier, premier ministre

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    Ce texte enrichi, que nous défendons avec conviction, n’est pas anecdotique : il est une réponse importante aux attentes des Français.
    Il permet d’améliorer l’accès à la santé des patients de l’Hexagone et d’outre-mer, de mieux financer l’autonomie, de rendre plus attractifs les métiers de l’hôpital, d’améliorer les retraites des agriculteurs et de renforcer les dispositifs d’exonération des cotisations sociales dont ils bénéficient, de mieux prévenir les comportements à risque et de lutter contre la fraude, ainsi que de protéger la sécurité sociale en évitant un accroissement de son déficit.
    Ce texte est là et il est maintenant temps d’agir pour l’appliquer. Je crois que nous sommes parvenus à un moment de vérité, (« Ah oui ! » sur quelques bancs des groupes LFI-NFP, SOC, EcoS et GDR) qui met chacun face à ses responsabilités.

    M. Loïc Prud’homme

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    Cinq pour cent !

    M. Michel Barnier, premier ministre

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    C’est maintenant à vous de décider si notre pays se dote de textes financiers responsables, indispensables et utiles à nos concitoyens, ou si nous entrons en territoire inconnu.

    Mme Sophia Chikirou

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    Nous n’avons pas le choix, vous avez décidé pour nous !

    Mme Florence Herouin-Léautey

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    Front républicain !

    M. Michel Barnier, premier ministre

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    Je m’adresse à vous avec respect, mais aussi avec une certitude : les Français ne nous pardonneraient pas de préférer les intérêts particuliers à l’avenir de la nation. Je le pense sincèrement. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, DR, Dem et HOR. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Vincent Rolland

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    Très juste !

    M. Nicolas Sansu

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    Regardez ce que vous avez fait !

    M. Michel Barnier, premier ministre

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    Vous l’entendez dans chacune de vos circonscriptions (« Non ! sur les bancs des groupes LFI-NFP et SOC) : les Français attendent de la stabilité et de la visibilité, pour leur vie quotidienne et les entreprises, alors que notre pays a tant à faire pour défendre ses intérêts et son influence en Europe et dans le monde. Je sais de quoi je parle.

    Mme Danièle Obono

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    Non, ils attendent le départ de Macron !

    Mme Nathalie Oziol

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    Vous allez partir, et Emmanuel Macron aussi !

    M. Michel Barnier, premier ministre

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    C’est pourquoi, sur le fondement de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, j’engage la responsabilité de mon gouvernement (De nombreux députés du groupe LFI-NFP ainsi que M. Paul Molac se lèvent et quittent progressivement l’hémicycle)

    M. Sylvain Berrios

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    Quel irrespect !

    M. Michel Barnier, premier ministre

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    …sur l’ensemble du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025, dans sa version résultant des travaux de la commission mixte paritaire et modifié par les amendements rédactionnels et de coordination déposés.

    M. François Cormier-Bouligeon

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    Au revoir, LFI ! Ce sont les rats qui quittent le navire ! Casseurs de la République !

    M. Michel Barnier, premier ministre

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    Je le fais en appelant à la responsabilité de chacun des représentants de la nation que vous êtes – quand bien même certains d’entre vous quittent l’hémicycle –,…

    M. Alexis Corbière

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    Vous le méprisez, l’Hémicycle !

    M. Michel Barnier, premier ministre

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    …persuadé que notre mission commune, au-delà de nos divergences, est de servir la France et les Français.
    Désormais, chacun doit prendre ses responsabilités. J’ai pris les miennes. (Les députés des groupes EPR, DR, Dem et HOR ainsi que plusieurs députés du groupe LIOT se lèvent et applaudissent longuement.)

    Mme la présidente

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    L’Assemblée nationale prend acte de l’engagement de la responsabilité du gouvernement, conformément aux dispositions de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution. Le texte sur lequel le premier ministre engage la responsabilité du gouvernement sera inséré en annexe au compte rendu de la présente séance.
    En application de l’article 155, alinéa 1er, du règlement, le débat sur ce texte est immédiatement suspendu. Le texte sera considéré comme adopté, sauf si une motion de censure déposée avant demain, quinze heures quarante-deux, est votée dans les conditions prévues à l’article 49 de la Constitution.
    Dans l’hypothèse où une motion de censure serait déposée,…

    M. Sébastien Peytavie

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    Elle arrive !

    M. Alexis Corbière et Mme Sabrina Sebaihi

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    Ce sera le cas !

    Mme la présidente

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    …la conférence des présidents fixera la date et les modalités de sa discussion.

    Suspension et reprise de la séance

    Mme la présidente

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    La séance est suspendue.

    (La séance, suspendue à quinze heures quarante-trois, est reprise à quinze heures cinquante-cinq, sous la présidence de Mme Nadège Abomangoli.)

    Présidence de Mme Nadège Abomangoli
    vice-présidente

    Mme la présidente

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    La séance est reprise.

    3. Améliorer le traitement des maladies affectant les cultures végétales à l’aide d’aéronefs télépilotés

    Mme la présidente

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    L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi visant à améliorer le traitement des maladies affectant les cultures végétales à l’aide d’aéronefs télépilotés (no 380, 637).

    Présentation

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Luc Fugit, rapporteur de la commission des affaires économiques.

    M. Jean-Luc Fugit, rapporteur de la commission des affaires économiques

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    La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui s’inspire de celle que nous avions défendue lors de la précédente législature, avec l’ancien député de la Gironde Pascal Lavergne. Celui-ci est présent en tribune et je le salue.
    En outre, cette proposition de loi, qui aurait dû être examinée en juin dernier, est le fruit de plusieurs années de travail et d’écoute du monde agricole, en métropole et dans les territoires ultramarins. En 2018, un amendement à la loi Egalim a permis l’expérimentation, sur les cultures en forte pente et pendant trois ans, de l’épandage par drone de produits phytopharmaceutiques autorisés en agriculture biologique ou ayant reçu la certification du plus haut niveau d’exigence environnementale.
    Cette mesure avait été préparée avec les agriculteurs et les viticulteurs des départements du Rhône et de l’Ardèche, dont vous connaissez les conditions de travail difficiles sur les coteaux.
    La proposition de loi que je vous présente vise à offrir aux agriculteurs et aux salariés agricoles la possibilité de recourir à une technologie qui permettra, tout en préservant leur santé et en améliorant leur sécurité au travail, de protéger leurs cultures plus efficacement, à l’aide des produits phytopharmaceutiques les moins risqués.
    Elle tend donc à fixer les conditions d’autorisation de programmes d’application de certains produits phytopharmaceutiques par aéronef circulant sans personne à bord, c’est-à-dire les drones.
    Avant toute chose, il me semble indispensable de décrire le cadre juridique dans lequel s’inscrit cette proposition. Actuellement, le droit français interdit l’épandage par drone de manière quasi absolue, alors que le droit européen offre des marges de manœuvre. Nous sommes donc dans une situation de surtransposition, mais involontaire en quelque sorte : lorsque le législateur français s’est prononcé en faveur d’une interdiction stricte de l’épandage aérien, celui réalisé par drone n’aurait pas pu être envisagé.
    L’interdiction actuelle est regrettable : elle prive l’agriculture, les agriculteurs et les salariés agricoles d’un outil vertueux. Comment en est-on arrivé là ? La directive européenne 2009/128/CE, dite directive SUD (usage durable des pesticides), interdit par principe la pulvérisation aérienne de produits pharmaceutiques, dans le double souci d’éviter les risques, pour la santé humaine et l’environnement, pouvant résulter de leur dérive et de réduire globalement l’application de tels traitements.
    L’article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime, que la présente proposition de loi tend à modifier, transpose cette interdiction de principe dans le droit français, depuis 2011. Or l’interdiction posée par la directive de 2009 concernait l’épandage aérien par avion ou par hélicoptère, qui induit une forte dérive des produits utilisés, et connaissait deux régimes dérogatoires : l’un applicable en l’absence de toute autre solution viable, l’autre applicable si la pulvérisation aérienne présente des avantages manifestes, du point de vue des incidences sur la santé humaine et l’environnement. Ces deux conditions sont alternatives.
    En 2011, ces deux dérogations ont été reprises par le droit français, mais en 2015, le gouvernement en place a fait adopter un amendement à la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte supprimant la possibilité d’autoriser la pulvérisation aérienne lorsque ce type d’épandage se révèle plus avantageux pour la santé et l’environnement qu’une application terrestre.
    L’objectif affiché était de mettre un terme à l’épandage aérien de produits phytopharmaceutiques et, naturellement, l’épandage par drone n’avait alors pas été discuté.
    Depuis, cette technologie s’est développée et certains de nos voisins – les Allemands, les Autrichiens –, dont le droit national avait conservé les dérogations offertes par le droit européen, s’en sont saisis pour autoriser l’utilisation de drones d’épandage. Celle-ci n’est toujours pas possible en France, conséquence d’une forme de surtransposition du droit européen.
    Le législateur français n’est toutefois pas resté inactif depuis 2015. J’ai proposé en 2018 d’introduire dans la loi Egalim une expérimentation de trois ans visant à déterminer les bénéfices liés à l’utilisation de drones pour le traitement phytosanitaire des parcelles agricoles présentant une pente supérieure ou égale à 30 %. Forts de cette expérimentation et des retours des acteurs des différentes filières qui perçoivent les potentialités offertes par cet outil, il nous revient aujourd’hui d’offrir une solution pérenne et équilibrée, s’agissant de l’utilisation des drones pour l’épandage de produits phytopharmaceutiques.
    Deux dispositifs articulés entre eux sont donc proposés dans le texte que je vous présente : définir un régime d’autorisation de programmes d’épandage par drone pour les parcelles agricoles comportant des pentes égales ou supérieures à 20 %, pour les bananeraies et pour les vignes mères de porte-greffes conduites au sol ; définir un régime d’essai de l’épandage par drone pour d’autres cultures ou d’autres contextes parcellaires, qui pourrait déboucher, après une évaluation scientifique de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail – Anses – et sous le regard de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques – Opecst –, donc du Parlement, sur l’application du régime d’autorisation de programmes d’épandage par drone. Pour ces deux dispositifs, seule pourra être autorisée la pulvérisation de produits relevant de l’une des catégories suivantes : les produits de biocontrôle, les produits autorisés en agriculture biologique et les produits à faible risque au sens du droit européen.
    Nous entrerons dans le détail de la proposition de loi à l’occasion de l’examen des articles, mais je veux d’ores et déjà vous en démontrer le caractère équilibré. Il faut d’abord être conscient des limites de l’utilisation des drones pour l’épandage de produits. L’étude de l’Anses montre que le drone n’est pas l’outil le plus adapté dans certains contextes, par exemple lorsqu’il faut atteindre des zones sous un couvert végétal déjà dense. Il faut prêter une attention particulière à la question de la dérive des produits : sur ce point, l’Anses montre que la concentration en produit peut être plus importante à proximité immédiate des parcelles traitées – dans un rayon de dix mètres – mais pas au-delà, notamment près des habitations. Il existe toutefois en la matière des possibilités d’optimisation.
    La proposition de loi prend en compte ces limites en prévoyant des usages pour des cultures ou des contextes dans lesquels il est avéré que le drone présente un intérêt en termes d’efficacité et en limitant les produits utilisés aux produits les moins risqués. Si les risques sont très limités dans le cadre envisagé par la proposition de loi, les avantages du recours à l’épandage par drone de produits phytopharmaceutiques sont, quant à eux, nombreux et manifestes.
    Le drone permettra une utilisation plus efficace dans certaines hypothèses, lorsque les maladies sont peu installées, lorsque le volume foliaire est encore limité ou lorsqu’il est nécessaire d’atteindre le dessus d’un couvert végétal dense. Par exemple, pour lutter contre la cercosporiose noire, qui fait des ravages dans les bananeraies de nos territoires ultramarins, l’utilisation de drones pour réaliser un traitement efficace de la partie supérieure des feuilles s’avère indispensable et permettra d’éviter l’utilisation de canons de pulvérisation, dont l’efficacité est limitée et pour lesquels la dérive est forte et met aussi en danger la santé des applicateurs et des riverains.
    L’utilisation de drones garantira une meilleure réactivité et un meilleur ciblage des traitements pour agir de manière plus préventive et limiter, au bout du compte, la quantité de produit utilisée. Elle permettra aussi d’éviter le tassement des sols provoqué par le passage des engins agricoles. L’utilisation de drones à la place des systèmes d’application traditionnels offrira par ailleurs une solution très concrète pour défossiliser nos exploitations agricoles dans le cadre de la stratégie nationale bas-carbone. Cela fait déjà beaucoup d’avantages manifestes. Je ne reviens pas sur la liste des produits pour lesquels l’épandage par drone serait autorisé et qui représenterait pour les filières concernées une véritable incitation à utiliser des produits à faible risque, voire à se convertir progressivement en agriculture biologique, comme me l’ont indiqué par exemple plusieurs viticulteurs.
    Mais surtout, l’utilisation du drone présente un avantage incontestable et inestimable : c’est un moyen de réduire la pénibilité du travail de nos agriculteurs et de nos salariés agricoles,…

    Un député du groupe LFI-NFP

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    Ah !

    M. Jean-Luc Fugit, rapporteur

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    …de limiter les risques d’accidents du travail sur les fortes pentes et de réduire très substantiellement leur exposition aux produits. L’étude de l’Anses met en évidence un rapport de 1 à 200 sur ce dernier point.
    Nous avons adopté en commission, parfois de manière consensuelle, certains amendements qui améliorent la rédaction du texte. Mais la commission a également adopté, contre mon avis, trois amendements problématiques sur lesquels il nous faudra revenir.
    Gardons à l’esprit, lors des débats qui vont suivre, que la proposition de loi veut mettre à disposition des agriculteurs et des salariés agricoles un outil qui diminuera la dangerosité et la pénibilité de leur travail. Elle offre en outre une solution concrète pour contribuer à la transition agroécologique des exploitations agricoles et à l’usage raisonné des produits phytopharmaceutiques, et elle sera tout particulièrement utile pour l’agriculture biologique.
    Pour toutes ces raisons, je vous invite à adopter cette proposition de loi, qui est attendue par le monde agricole. (Applaudissements et « Bravo ! » sur les bancs du groupe EPR.)

    M. Paul Midy

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    Vous avez raison !

    M. François Cormier-Bouligeon

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    Un vrai député de terrain !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre de l’agriculture, de la souveraineté alimentaire et de la forêt.

    Mme Annie Genevard, ministre de l’agriculture, de la souveraineté alimentaire et de la forêt

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    Avant de détailler la position du gouvernement sur la proposition de loi qui vous est soumise, je tiens à en remercier l’auteur et rapporteur, M. Jean-Luc Fugit, non seulement pour son travail de grande qualité, mais aussi pour l’occasion qu’il nous donne de remettre un peu de raison au milieu d’un débat trop souvent miné par les passions. J’ai la conviction que, pour relever les défis de l’agriculture de demain, il faut toujours se placer du côté du progrès, de la science et des solutions concrètes, plutôt que du côté de la décroissance et des interdictions sans solution.
    La position du gouvernement en matière de protection des plantes contre les ravageurs et les maladies végétales est claire : c’est la réduction des risques et la réduction des usages. Et je sais qu’elle est partagée par tous les agriculteurs de notre pays. La nature est leur outil de travail, ils n’ont aucun intérêt à l’abîmer, et ils sont préoccupés de leur santé et de celle des autres.
    Par ailleurs, les produits phytopharmaceutiques sont une charge financière importante. Il faut donc en finir avec le procès en irresponsabilité des agriculteurs, bien souvent diligenté par des personnes qui n’ont jamais enfilé de bottes.

    M. Antoine Léaument

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    Si !

    Mme Annie Genevard, ministre

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    Il est clair que l’on ne reviendra pas en arrière : la trajectoire est d’aller vers moins de phytos, en portant une attention particulière aux filières qui sont en danger parce qu’elles ont des difficultés à protéger leurs cultures.
    Cette position est claire, parce qu’elle propose une méthode, qui est guidée par le principe de réalité, et lui seul. Vous ne me verrez jamais m’opposer au retrait européen de produits phytosanitaires en cas d’urgence pour la santé et l’environnement. (Mme Justine Gruet applaudit.) Le principe de réalité veut aussi, et je le regrette, qu’en l’absence de solutions alternatives suffisamment efficaces, l’interdiction brutale des produits phytosanitaires mette en péril nombre de productions et de filières, au détriment de notre souveraineté alimentaire.
    Pour sortir de cette difficulté, il faut établir une méthode et un calendrier. Le mien se décline en trois temps.
    Le premier temps, c’est celui de la réponse aux situations d’urgence, avec des itinéraires techniques adaptés et, le cas échéant, des dérogations de 120 jours qui peuvent être accordées pour aider à passer une campagne, le temps de sécuriser des réponses plus pérennes. C’est essentiel, car les exploitations qui disparaîtront demain ne se relèveront pas lorsque, dans plusieurs mois, nous aurons trouvé des alternatives. C’est ce que j’ai fait pour nos producteurs d’endives : il y va de la protection de nos petites filières.
    Le deuxième temps, c’est celui de la lutte contre les distorsions de concurrence au sein de l’Europe, car je suis absolument convaincue que cette politique doit être menée au niveau européen. Il est impératif que nos producteurs aient, autant que possible, accès aux produits dont disposent nos voisins européens. Cela suppose de recenser les écarts constatés par les différentes filières entre les produits autorisés en France et ceux autorisés dans d’autres États membres pour le même usage. Il faut lever les obstacles qui empêchent que ce qui a été autorisé par des agences sanitaires européennes ne le soit pas en France. C’est tout l’objet des travaux du comité des solutions, lancé par Agnès Pannier-Runacher au sein du précédent gouvernement et relancé dès mon arrivée.
    Ce conseil a très bien fonctionné ces derniers mois et je propose qu’il soit consacré dans nos textes, afin qu’il puisse assister les ministres concernés dans leur mission. Il s’agit de prioriser l’instruction, par l’Anses, des demandes d’autorisation des intrants en fonction des situations d’urgence constatées sur le terrain. Cela a déjà été le cas ces derniers mois et cela ne remet nullement en cause l’indépendance et l’expertise de l’Anses, qui agit dans un cadre européen strictement défini. C’est une mesure de bon sens : agissons rapidement pour des filières qui sont menacées d’effondrement, en regardant ce qui est autorisé par des agences voisines chargées de faire respecter le même règlement européen.
    Le troisième temps, c’est celui de la recherche et de l’innovation qui, à moyen et long terme, doit permettre de faire émerger des alternatives, face à la réduction de l’arsenal chimique disponible. L’objectif est de mobiliser tous les leviers – et pas seulement les leviers chimiques – en misant sur l’innovation dans les pratiques culturales, l’évolution des systèmes de production, les avancées en matière d’agroéquipements, les progrès génétiques des semences et l’intégration de technologies telles que l’agriculture de précision et l’intelligence artificielle.
    Dès lors, la règle que je me fixe est simple : je veux l’application immédiate de toutes les solutions possibles. Et c’est exactement ce que permet cette proposition de loi. Grâce à elle, s’agissant de certaines productions, dans toute surface en pente et dans laquelle il est pénible ou dangereux d’intervenir, nous pulvériserons mieux et nous pulvériserons moins.
    C’est en effet le constat scientifique que dresse l’Anses à l’issue d’une expérimentation de trois ans sur laquelle s’appuie votre proposition de loi. Cette expérimentation, conduite entre 2019 et 2021 dans le cadre de la loi Egalim, dans des exploitations présentant une pente égale ou supérieure à 30 %, a en effet conduit l’Anses, dans son avis technique final, à énoncer que « le recours à des drones de pulvérisation est envisagé comme une alternative pouvant présenter de multiples avantages ». Ces avantages, mesdames et messieurs les députés, sont de trois ordres.
    En premier lieu, l’épandage par drone permet de diminuer les risques d’accident du travail. Pensez en effet à ce qu’implique de traiter des vignes en forte pente, avec par exemple le risque de retournement des machines. L’utilisation de drones permettra demain de répondre à cette problématique. Le premier objet de cette loi, c’est de protéger nos producteurs.
    En second lieu, l’épandage par drone, s’il est bien encadré, permet de minimiser les risques sur la santé humaine, d’abord parce que cette technique éloigne naturellement la personne chargée de la pulvérisation de la zone d’épandage, ensuite parce qu’elle permet une pulvérisation de plus en plus précise, ce qui réduit le nombre d’applications, donc le volume d’utilisation de produits phytopharmaceutiques. L’Anses estime ainsi que le facteur de réduction des risques pour l’utilisateur est de 200 sur un terrain en pente, entre l’utilisation d’un drone et celle d’un chenillard.
    En troisième lieu, l’épandage par drone, bien encadré, permet de minimiser les risques sur l’environnement : parce qu’il permet un épandage de plus en plus précis, il réduit le recours aux produits pulvérisés et donc leur volume.
    Par ailleurs, cette technique a démontré scientifiquement son efficacité. L’Anses, pour ne citer qu’elle, énonce dans son avis technique final que « le recours à des traitements par drone apparaît comme une solution intéressante pour protéger les cultures des bioagresseurs problématiques dans certaines conditions biologiques, végétatives, climatiques ou topographiques ». Dans ces conditions, cette technique remplace avantageusement un pulvérisateur terrestre. Ces drones, je le répète, sont également utiles quand le sol, détrempé, n’offre plus une portance suffisante, parce qu’ils permettent de ne pas attendre que le sol en question soit suffisamment praticable pour lui appliquer des traitements urgents.
    Bref, nous disposons d’une solution concrète permettant de réduire les quantités épandues et les risques induits, tant pour l’opérateur que pour l’environnement : il faut donc y aller ! Aussi m’apparaît-il impératif de pérenniser l’utilisation des drones au bénéfice de nos agriculteurs, et d’encadrer de façon bien définie le recours à ces engins afin d’éviter tout débordement.
    D’abord, leur champ d’application est strictement délimité, puisque la technique d’épandage sera autorisée dans les parcelles se trouvant sur des terrains à forte pente, dans les bananeraies et les vignes mères de porte-greffes conduites au sol.

    M. Jean-François Coulomme

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    Ce sont encore les outre-mer qui vont trinquer !

    Mme Annie Genevard, ministre

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    Les drones ne survoleront donc pas toutes les exploitations de France. Si ce périmètre doit être étendu, il fera l’objet d’une expérimentation préalable et d’une évaluation par l’Anses. Ainsi, toutes les précautions sont prises.
    Ensuite, seuls les produits à faible risque, les produits autorisés en agriculture biologique et les produits de biocontrôle pourront être pulvérisés : parce qu’il privilégie des substances aux caractéristiques toxicologiques ou écotoxicologiques plus favorables, ce dispositif est de nature à rassurer nos concitoyens, ce qui nous incite à en favoriser largement l’utilisation.
    Enfin, les autorisations de mise sur le marché ou, le cas échéant, les prescriptions réglementaires, devront assortir aux conditions strictes d’utilisation des mesures particulières de gestion des risques destinées à garantir la sécurité des personnes et la préservation de l’environnement : seront notamment établies des distances de sécurité vis-à-vis des zones sensibles – les points d’eau, les habitations et les lieux accueillant des personnes vulnérables.

    M. Loïc Prud’homme

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    Cinquante centimètres !

    Mme Annie Genevard, ministre

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    La proposition de loi conçoit une méthode d’avenir, robuste et fondée sur la science, pour autoriser l’épandage par drone, créant les conditions d’un développement progressif du recours à celui-ci. Elle rend possibles des expérimentations à durée limitée sur d’autres types de parcelles ou de cultures, visant à démontrer les bénéfices pour la santé humaine ou l’environnement de la pulvérisation par aéronef par rapport à l’épandage terrestre. À chaque fois que l’Anses aura évalué et validé ces bénéfices, il sera possible d’autoriser de manière pérenne, par arrêté, le recours aux drones. Cette méthode est la bonne, j’en ai la conviction. Elle répond exactement à la vision que je défends, consistant à accompagner la réduction des traitements phytosanitaires par la science et l’innovation. Elle permet en outre de dépassionner les débats en offrant une assise scientifique aux décisions qui seront prises en la matière.
    Parce qu’elle se fonde sur un constat scientifique, parce qu’elle permet de réduire les dommages que l’épandage par voie terrestre peut causer à l’environnement et à la santé humaine, et parce qu’elle est strictement encadrée, la présente proposition de loi est, fondamentalement, un progrès. Elle s’inscrit résolument dans une vision d’avenir de l’agriculture et encourage la réduction de l’emploi de produits phytosanitaires, chaque fois que cela est utile. Aussi le gouvernement lui apporte-t-il son plein soutien, en espérant que la représentation nationale fera de même. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR, DR, Dem et HOR.)

    Discussion générale

    Mme la présidente

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    Nous abordons la discussion générale.
    La parole est à M. Alexandre Allegret-Pilot.

    M. Alexandre Allegret-Pilot

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    Les controverses soulevées par cette proposition de loi ont leur origine dans l’opposition, chère aux romantiques, entre le mythe du bon sauvage et la réalité cent fois millénaire de la relation qu’entretiennent l’homme et la nature, a fortiori depuis l’invention de l’agriculture il y a maintenant 10 000 ans.
    D’aucuns voudraient nous faire croire que la symbiose de l’être humain avec la nature ne se réalise que dans une forme d’indigence, propre aux chasseurs-cueilleurs des temps modernes – désormais réduits à la seule activité de cueillette – et tributaire des bonnes grâces d’une nature par ailleurs divinisée. (Sourires sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    Comme toujours, les instigateurs de cette mythologie sans fondement sont ceux qui, comme le rappelait Olivier de Kersauson, ne savent pas discerner une feuille de chêne d’une feuille de hêtre,…

    M. Antoine Léaument

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    Organisons un concours ! On verra bien.

    M. Alexandre Allegret-Pilot

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    …ceux-là mêmes qui bénéficient de millénaires de progrès technique, de sélection et de modification des espèces, des races et des variétés ; ceux-là mêmes qui jouissent quotidiennement de l’âpre et éternelle lutte à laquelle se livrent l’homme et la nature. Du haut de leur confort civilisationnel et intermédié, ils donnent des leçons de retour aux sources primitives, rustiques et imaginaires, forçant le trait de l’image d’Épinal de l’agriculture vivrière dans un pays où il ne reste que 2 % de paysans et d’agriculteurs.
    Chers amis, rien, absolument rien de ce qui se trouve dans votre assiette ou dans votre jardin n’est « naturel », si vous entendez par là ce qui n’aurait jamais subi d’intervention humaine déterminante. L’homme est partout. Chers réactionnaires verts, vous n’avez pas le monopole de la nature. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP. – Sourires.)
    En réalité, nature et culture sont inextricables, et le mythe du bon sauvage ne peut occulter les bénéfices des progrès réalisés ces soixante-dix dernières années, en France et dans le monde entier, dont témoigne…

    M. Jean-François Coulomme

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    La dérive des pesticides !

    M. Alexandre Allegret-Pilot

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    …l’amélioration généralisée du niveau de vie, avec – je vous l’accorde – son lot de dérives graves, contre lesquelles il faut lutter. Faut-il cependant rappeler les famines, les disettes, les ravages de cultures sous l’effet des parasites et du changement climatique, qui mettaient en danger jusqu’à la survie même de la population française aux siècles précédents ? En 1947, se déroulaient encore des émeutes de la faim dans le pays.

    M. Loïc Prud’homme

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    C’est une discussion générale, pas un Scrabble !

    M. Alexandre Allegret-Pilot

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    Non, chers amis, vous ne pouvez vous prétendre les thuriféraires du progrès social et refuser en même temps le progrès technique. En cinquante ans, la part de l’alimentaire dans les dépenses des Français a diminué de 43 %, et ce n’est pas grâce à des techniques d’ensemencement chamanique au clair de lune. Le prétendu droit à la paresse que vous réclamez si souvent repose en réalité sur un mécanisme de croissance et de progrès technique assumé, faute de quoi nos très chers acquis sociaux ne seront pas financés.
    Il y va de notre souveraineté. Le progrès technique, qui ne saurait, certes, être sans borne, demeure la condition de la compétitivité, du progrès social et du temps libre, surtout dans une économie mondialisée où nous nous sommes jetés à corps perdu afin d’augmenter le pouvoir d’achat des consommateurs, souvent au détriment du contribuable ou du travailleur.
    Dans la relation entre la culture et la nature, tout est affaire d’équilibre. Par cette proposition de loi, vous souhaitez diminuer la pénibilité du travail des agriculteurs, mais sans ajouter d’autres substances actives que celles déjà autorisées, et selon une démarche scientifique extrêmement encadrée.
    Vous avez beau jeu d’évoquer la pénibilité lors des débats sur les retraites alors que vous refusez les outils permettant de la réduire.

    M. Loïc Prud’homme

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    Avec des drones chinois !

    M. Alexandre Allegret-Pilot

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    La meilleure des pénibilités n’est pas celle qu’on indemnise, c’est celle que l’on évite. Vous avez également beau jeu de vous plaindre de la baisse des revenus des agriculteurs et de leur détresse, de l’accroissement des importations et de la dégradation de la qualité des produits alimentaires des Français, alors que vous refusez à nos agriculteurs les outils dont jouissent leurs concurrents. Vous avez enfin beau jeu de dénoncer l’accord avec le Mercosur alors que vous encouragez l’inégalité des armes productives entre agriculteurs au sein du marché commun européen.

    M. Jean-François Coulomme

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    Ce sont les salaires qui font la différence !

    M. Alexandre Allegret-Pilot

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    Il y a un an sortait en salle La Ferme des Bertrand, documentaire retraçant la vie d’une exploitation agricole sur trois générations. Outre l’engagement passionné des agriculteurs et l’importance de la transmission du fruit de leur travail, je n’en retiens, pour seule ligne directrice, que l’importance du progrès technique qui libère l’homme de la pénibilité d’un travail physique dans des configurations territoriales difficiles, comme sur les pentes des montagnes haut-savoyardes.

    M. Jean-François Coulomme

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    Laissez la Savoie tranquille !

    M. Alexandre Allegret-Pilot

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    Parce que les hôtes de la ferme des Bertrand, partout en France, nous le demandent, et parce que nous leur devons, le groupe UDR votera dans son intégralité, et avec conviction, en faveur de ce texte. Nous irons même plus loin, puisque nous avons déposé un amendement visant à permettre l’utilisation des drones d’épandage sur les cultures en terrasses. Cela permettrait à la fois de réduire la charge de travail des agriculteurs et de préserver ces magnifiques paysages que sont, par exemple, les faïsses cévenoles, donc de valoriser la nature qui nous est chère. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDR et RN.)

    Mme Hanane Mansouri

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    Bravo !

    M. Maxime Laisney

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    Ce sera sympa, les paysages, avec des drones partout !

    Mme la présidente

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    S’il vous plaît, pas d’invectives entre vous !
    La parole est à M. David Magnier.

    M. David Magnier

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    Chaque jour, nos agriculteurs voient leur horizon s’assombrir sous le poids des normes, des interdictions et de l’indifférence. Pourtant, ce sont eux qui nourrissent la France, préservent nos paysages et incarnent notre souveraineté alimentaire. Que faisons-nous pour eux ?
    Cette proposition de loi prolonge les expérimentations de la loi Egalim de 2018 qui vise notamment à réduire l’usage des pesticides, tout en prévoyant des dérogations pour tester des outils innovants comme les drones.
    Je salue le travail rigoureux de mon excellent collègue Hervé de Lépinau, qui a su mettre en lumière les enjeux essentiels de ce texte en commission.
    Soyons honnêtes : au lieu de marquer un tournant, ce texte s’apparente davantage à timide un coup de pédale dans une montée abrupte. Pendant ce temps, nos voisins avancent à grandes enjambées. Tandis que nous en sommes encore à débattre des pentes admissibles et des produits autorisés, l’Allemagne et l’Espagne utilisent déjà des drones pour pulvériser leurs vignobles et leurs oliveraies. Limiter l’épandage par drone aux seules pentes supérieures à 30 % revient à exclure des milliers de parcelles, notamment dans les Cévennes ou le Massif central, et donc à refuser aux agriculteurs une technologie qui pourrait les soulager. Ces restrictions, au fond, traduisent une méfiance injustifiée à leur égard. Ces hommes et ces femmes ne sont pas irresponsables ; ce sont des experts de leurs terres.
    Pourquoi refuser aux agriculteurs une technologie qui protège leur santé et limite les conséquences néfastes sur l’environnement ? Pourquoi restreindre l’autorisation aux seuls produits autorisés en agriculture ou aux produits à faible risque, alors que Bruxelles en valide d’autres, tout aussi sûrs et efficaces ? L’Union européenne impose des règles mais montre son incapacité chronique à soutenir concrètement l’agriculture française. En théorie, elle prétend ouvrir des voies d’innovation, en pratique, elle étouffe nos exploitants avec des normes kafkaïennes.
    L’épandage par drone n’est pas une utopie futuriste mais une solution bien réelle et éprouvée. Savez-vous qu’en Martinique, les drones ont démontré leur capacité à atteindre les feuilles les plus hautes des bananeraies, avec une précision inégalée ? Qu’ils permettent de réduire jusqu’à 200 fois l’exposition des opérateurs aux produits phytosanitaires et qu’ils limitent les pertes par dérive, réduisant ainsi les conséquences sur l’environnement tout en augmentant l’efficacité des traitements ?
    Pendant que nous tergiversons, la concurrence avance, et pas seulement en Europe : le Mercosur nous rappelle chaque jour l’hypocrisie de nos politiques commerciales. Nous imposons à nos agriculteurs des normes draconiennes, tout en acceptant sur nos marchés des produits sud-américains cultivés sans respect pour ces dernières : des produits subventionnés, qui seront importés à bas coût et écraseront nos filières locales. C’est un sabordage de notre souveraineté alimentaire et une insulte à ceux qui travaillent nos terres. Pourquoi imposer à nos agriculteurs des règles que l’Union européenne elle-même ne nous demande pas d’appliquer ? Champion de la surenchère réglementaire, l’État français ajoute des contraintes là où il devrait libérer l’innovation.
    Que dire du rôle de l’Anses dans cette équation ? Désormais arbitre de l’avenir de notre agriculture, cette agence est allée jusqu’à interdire des produits pourtant validés par Bruxelles, fragilisant les agriculteurs français face à leurs concurrents européens, puisque ceux-ci peuvent continuer à les utiliser. C’est un déséquilibre inacceptable !

    M. Loïc Prud’homme

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    Supprimons tout !

    M. David Magnier

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    La gestion des autorisations phytosanitaires doit revenir au ministère de l’agriculture, qui saura mieux défendre les intérêts de nos territoires. Le Rassemblement national soutient cette proposition de loi parce qu’elle va dans la bonne direction, mais notre groupe exige plus d’audace. Nous sommes la seule force politique à défendre fermement ceux qui nourrissent la France et à exiger la fin de cette double peine : des normes étouffantes et une concurrence internationale déloyale. Ce texte doit être un bouclier et une arme pour nos agriculteurs, pas un canon sans poudre qui les laisse abandonnés sur le champ de bataille.
    Nos agriculteurs ne demandent pas des miracles, ils demandent qu’on cesse de leur mettre des bâtons dans les roues. Ils demandent des outils modernes, comme les drones, pour répondre aux défis du quotidien. Ils demandent simplement qu’on leur permette de travailler, d’innover et de nourrir la France. Nous avons l’occasion de leur montrer que nous les soutenons, que nous croyons en eux.
    Dans sa version actuelle, ce texte reste toutefois insuffisant : étendons l’usage des drones à toutes les parcelles agricoles, autorisons l’utilisation de tous les produits validés par l’Union européenne, et simplifions enfin les démarches administratives qui paralysent les exploitants. Arrêtons de freiner ceux qui travaillent la terre, soutenons leur travail, leur engagement. L’agriculture française mérite mieux qu’un texte timide, elle mérite un véritable élan, une véritable ambition. Défendons nos terres et nos agriculteurs avant qu’il ne soit trop tard. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Sandra Marsaud.

    Mme Sandra Marsaud

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    Cette proposition de loi de Jean-Luc Fugit, que nous examinons après un passage remarqué en commission, avait été défendue sous la précédente législature par un agriculteur passionné, Pascal Lavergne, présent en tribune et que je salue. La démarche qui l’inspire est décisive pour l’avenir de l’agriculture, puisqu’il s’agit d’allier innovation, protection de l’environnement et amélioration des conditions de travail des agriculteurs. Au vu des débats animés en commission, cela n’est pas aussi simple qu’il n’y paraît !
    Ce texte vise à élargir et à encadrer l’utilisation de drones pour pulvériser des produits biologiques et de biocontrôle. Il prolonge et amplifie la dynamique lancée par la loi Egalim du 30 octobre 2018 – une autre avancée législative dont nous sommes fiers –, qui a autorisé l’expérimentation, durant trois ans à partir de 2019, de la pulvérisation par drone dans les zones agricoles particulièrement contraignantes telles que les vignobles à forte pente, les bananeraies ou encore les vergers difficiles d’accès. Les conclusions du rapport de l’Anses publié en 2022 sont claires : cette méthode présente, dans des contextes bien spécifiques, des avantages concrets et mesurables.
    En effet, les drones permettent d’appliquer les produits phytosanitaires de façon plus précise et maîtrisée, ce qui limite leur dispersion sur les sols et les écosystèmes environnants. Sur le plan environnemental, ils favorisent donc une agriculture plus respectueuse et durable. Les drones fournissent également une solution aux problèmes majeurs auxquels sont confrontés les agriculteurs. D’abord, ils réduisent l’exposition aux produits phytosanitaires – jusqu’à 200 fois par rapport aux méthodes traditionnelles –, ce qui constitue un progrès considérable pour la santé des travailleurs agricoles ; ensuite, ils améliorent les conditions de travail, en supprimant des tâches physiques éprouvantes ; enfin, ils permettent d’éviter des accidents graves ou mortels.
    Ces avancées, auxquelles s’ajoute un gain de temps important, font des drones un moyen inédit pour moderniser et sécuriser le travail agricole. Comme cela a été évoqué en commission, un drone peut traiter un hectare de vignoble en forte pente et difficile d’accès en seulement quarante-cinq minutes, quand dix heures éprouvantes sont nécessaires à un opérateur à pied. Il ne s’agit pas d’un simple progrès technique, mais d’un outil qui renforce la compétitivité et la dignité du travail agricole. D’autre part, des études récentes, comme celle conduite en 2020 par l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae) sur les bananeraies martiniquaises, ont confirmé la performance supérieure des drones pulvérisateurs dans la lutte contre des maladies comme la cercosporiose noire. Ces données justifient d’étendre l’emploi des drones à d’autres contextes spécifiques, tout en maintenant leur encadrement rigoureux afin d’éviter les dérives.
    À cet égard, la proposition de loi apporte une réponse équilibrée et ambitieuse : elle vise à pérenniser l’utilisation de drones dans des situations ciblées, tout en ouvrant la voie à l’expérimentation sur d’autres types de cultures. Il s’agit d’une démarche pragmatique, fondée sur des résultats scientifiques et des retours de terrain concrets. Pour le groupe EPR, ce texte incarne une agriculture tournée vers l’avenir, qui protège l’environnement en limitant les quantités d’intrants et en réduisant leur impact sur les écosystèmes, qui améliore les conditions de vie et de travail de celles et de ceux qui nous nourrissent, et qui encourage l’innovation et les technologies de pointe pour relever les défis d’aujourd’hui et de demain.
    Nous voterons donc avec conviction en faveur de ce texte, comme nous l’avons fait en commission des affaires économiques la semaine passée. Nous défendrons également des amendements visant à supprimer des dispositions introduites en commission contre l’avis du rapporteur, notamment celle tendant à interdire l’utilisation de drones près des zones habitées. En soutenant cette proposition de loi, nous affirmons une fois de plus que l’innovation agricole ne constitue pas une menace, mais une chance, pour les agriculteurs, l’environnement et l’avenir des territoires agricoles, que nous aimons passionnément. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe EPR et sur quelques bancs du groupe Dem.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Loïc Prud’homme.

    M. Loïc Prud’homme

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    Revoilà les promoteurs de l’épandage aérien par drone, cinq ans après les amendements qu’ils avaient introduits dans la loi Egalim et qu’ils avaient copiés-collés – à la faute d’orthographe près ! – sur l’agrochimie. Vous voici donc visant le même objectif, en vous cachant cette fois derrière la santé des agriculteurs et des ouvriers agricoles, dont vous semblez découvrir – ô miracle ! – la pénibilité du travail. Quel dommage que la lumière ne vous ait pas frappés jeudi dernier, quand vous leur imposiez deux ans de travail supplémentaires ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP. – Mme Dominique Voynet applaudit également.) Pourtant, nombreux sont les ouvriers et les ouvrières agricoles parmi les 15 000 travailleurs qui passent de vie à trépas entre 62 et 64 ans.

    M. Maxime Laisney

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    Exactement !

    M. Loïc Prud’homme

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    Votre soudaine conversion à la réduction de la pénibilité des travaux agricoles ne berne personne. J’ai moi aussi, monsieur le rapporteur, rencontré il y a quelques mois un vigneron de Savoie. Établi en agriculture biologique, son souci n’est pas de savoir comment remplacer, dans ses parcelles, la présence humaine qualifiée par des drones ; son souci majeur, c’est le réchauffement climatique, qui le contraint à s’adapter à des cycles biologiques inédits ; c’est la dérive des pesticides interdits en agriculture biologique, qui atterrissent sur les bordures des parcelles mitoyennes avec celles de ses collègues en agriculture conventionnelle – phénomène de dérive que ce texte ne fera qu’aggraver.
    Je discute aussi avec les viticulteurs et les ouvriers viticoles de ma région, la Gironde, où l’on arrache des milliers d’hectares de vigne faute de débouchés commerciaux et de revenus. Ces ouvriers qualifiés se fichent bien des drones – chinois ! –, eux qui demeurent attachés à un métier qui souvent les passionne, malgré sa pénibilité et les maladies professionnelles qui en découlent – cancers, lymphomes et troubles musculo-squelettiques. Ils se trouvent aussi prisonniers de l’endroit où ils vivent et dépendants d’un travail avec lequel ils survivent, si bien que ce n’est pas un drône qu’ils réclament, qui viendrait les remplacer par paquets de dix, mais de meilleures conditions de travail, davantage de respect, moins de pesticides et des salaires enfin à la hauteur de leur tâche. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP et sur plusieurs bancs des groupes EcoS et GDR.)
    Toute honte bue, vous défendez cette proposition de loi en vous prévalant également de la science. Position cocasse, alors que vous ignorez depuis sept ans les rapports successifs de l’Inserm – Institut national de la santé et de la recherche médicale –, de l’Inrae et de l’Ifremer – Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer –, (Applaudissements, sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP) qui documentent tous le lien délétère entre l’usage des pesticides et la santé des hommes et des femmes qui s’y trouvent exposés – agriculteurs, riverains. Ces rapports soulignent également l’impact direct des pesticides sur les écosystèmes et la biodiversité, dans un pays qui demeure le champion d’Europe, tant en quantité de pesticides épandus qu’en nombre de molécules autorisées ! Cocasse encore, puisque depuis sept ans vous n’avez jamais levé le petit doigt pour infléchir cette trajectoire désastreuse (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP), sauf une fois, lorsque vous avez levé l’index pour voter la réautorisation des néonicotinoïdes, ces pesticides dévastateurs, en particulier pour les abeilles !

    M. Jean-François Coulomme

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    Quelle indignité !

    Mme Anne Stambach-Terrenoir

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    Honteux.

    M. Loïc Prud’homme

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    La ficelle est donc un peu grosse quand vous utilisez les conclusions de l’Anses dans le sens contraire de ce qu’elles décrivent ! Cette agence sanitaire, pourtant connue pour ses avis mesurés – pour ne pas dire timides – tire la sonnette d’alarme, en précisant qu’on ne peut garantir l’innocuité de cette pratique et que la dérive des produits est importante. En clair, vous jouez à pile ou face avec la santé des citoyens, en cherchant à autoriser des épandages incontrôlés qui pourraient contaminer l’air, les sols, les nappes phréatiques et, bien sûr, menacer la biodiversité. Pour ma part, je ne suis pas joueur.
    Monsieur le rapporteur, vous qui vous gargarisez de science et de raison, où étiez-vous quand l’Inrae et l’Anses ont été prises pour cibles par la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA) et les Jeunes Agriculteurs (JA) la semaine passée ? (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP, EcoS et GDR.) Contre ces attaques d’une violence symbolique rare, désignant à la vindicte des scientifiques, je n’ai trouvé aucune prise de parole de votre part, qui viendrait soutenir la recherche française…

    Mme Delphine Batho

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    Au contraire !

    M. Loïc Prud’homme

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    …face à cette dérive obscurantiste à la Trump ou, devrais-je traduire en bon français, à la Kasbarian. (Mêmes mouvements.)
    La Macronie, lorsqu’elle se pose dans ce texte en défenseure de la science et des salariés, joue une farce. Monsieur le rapporteur, madame la ministre, à moins que vous n’espériez demeurer dans les petits papiers de la FNSEA, renoncez à ce texte, renoncez à perpétuer un modèle agrochimique qui détruit l’environnement et la biodiversité, et empoisonne les agriculteurs et les agricultrices. (Les députés du groupe LFI-NFP ainsi que M. Benoît Biteau se lèvent et applaudissent. – Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS et GDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Mélanie Thomin.

    Mme Mélanie Thomin

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    Cette proposition de loi, déposée sous la XVIe législature, aurait dû être examinée la semaine suivant les élections européennes, si le président de la République n’avait pas décidé de dissoudre l’Assemblée nationale. Alors que le monde agricole s’est mobilisé et que le projet de loi d’orientation pour la souveraineté en matière agricole, particulièrement décevant, ne réglera aucun des problèmes que les agriculteurs rencontrent face à la concurrence déloyale et à l’insuffisance des revenus, nous voici de nouveau devant un texte gadget, loin de pouvoir rassurer ces derniers.
    En 2018, dans le cadre de l’examen du texte qui allait devenir la loi Egalim, un amendement de la majorité défendu par Thierry Benoit et Antoine Herth avait autorisé à titre expérimental – pour une durée maximale de trois ans – l’usage de drones pour pulvériser des produits phytopharmaceutiques sur des vignes présentant une pente supérieure ou égale à 30 %. Cette expérimentation a fait l’objet d’une évaluation par l’Anses – que je salue à mon tour – en juillet 2022, afin de déterminer ses bénéfices éventuels pour la santé et l’environnement. Or cette évaluation ne conclut pas, c’est le moins que l’on puisse dire, à une efficacité systématique de l’usage de drones pour répandre certains produits phytopharmaceutiques.
    Le comité d’experts spécialisés (CES) qui l’a réalisée dresse plusieurs constats. Tout d’abord, s’agissant de l’efficacité, le CES juge les performances des drones de pulvérisation limitées, que ce soit pour traiter des stades végétatifs avancés ou des feuillages peu étalés. Concernant les arbres, le traitement fongicide par drone ne couvre que faiblement les faces inférieures des feuilles, ce qui rend leur efficacité douteuse face à certains agents pathogènes qui, comme le mildiou, colonisent les faces foliaires abaxiales. Dans l’ensemble, le CES estime que l’application demeure moins performante et plus variable par drone qu’avec un matériel terrestre. Pour un même programme de traitements, les applications par drone se révèlent globalement moins efficaces que celles par pulvérisateur classique – pulvérisateur à dos, voûte pneumatique ou canon fixe –, notamment en cas de forte présence de mildiou ou d’oïdium. Pour les applications sur les pommiers, les valeurs de dérive aérienne par drone, équipé de buses à granulométrie forte, sont trois à quatre fois plus faibles que celles mesurées avec le matériel de référence, équipé de buses à granulométrie fine, sauf aux hauteurs inférieures à 1,5 mètre.
    Certes, le CES note que l’exposition de l’opérateur recourant à un drone est environ 200 fois plus faible que celle d’un opérateur utilisant un chenillard. Cependant, lors de la phase de chargement, la contamination est plus élevée dans le cas d’un drone, qui nécessite d’être rempli plusieurs fois – onze opérations de chargement, contre trois pour un chenillard, à quantité pulvérisée quasiment identique.

    Mme Delphine Batho

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    C’est précis !

    Mme Mélanie Thomin

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    Toute la prudence de l’Anses se mesure dans ses conclusions : « Au regard de l’interdiction des applications de produits phytopharmaceutiques par hélicoptère et des limites associées au passage de pulvérisateurs terrestres dans les parcelles à fortes pentes […], le recours à des drones de pulvérisation est envisagé comme une alternative pouvant présenter de multiples avantages. » Il s’agit notamment, pour les travailleurs agricoles, de se libérer d’un équipement particulièrement lourd pour traiter des cultures de vigne sur des terrains accidentés. Néanmoins, « plusieurs études montrent que les dépôts sur les cultures présentent une variabilité supérieure après utilisation de drones en comparaison avec les matériels d’application classiques. Ainsi, la question de l’impact de la quantité des dépôts sur les cultures sur l’exposition des travailleurs se pose. » Enfin, l’Anses conclut qu’« une généralisation de l’impact des drones […] reste assez difficile à quantifier avec précision dans la mesure où les études montrent des résultats pouvant présenter une forte variabilité et reposent sur un nombre de répétitions limitées. Les conditions d’utilisation ont un impact très important sur le niveau de la dérive. »
    Comme socialistes, nous considérons que deux principes doivent guider la prise de décision concernant les évolutions technologiques dans l’agriculture : d’abord, elles doivent améliorer les conditions de travail des agriculteurs ; ensuite, la meilleure efficacité des traitements ne doit pas porter atteinte à la santé humaine et environnementale.
    Si les conditions semblent réunies pour l’utilisation de drones sur les parcelles accidentées ou difficiles d’accès, aucune garantie ni aucune certitude scientifique ne permettent de généraliser les essais sur tous les types de cultures.
    Pour toutes ces raisons, nous voterons contre cette proposition en l’état. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS. – MM. André Chassaigne et Jean-François Coulomme applaudissent également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jérôme Nury.

    M. Jérôme Nury

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    L’agriculture française est soumise, depuis plusieurs mois, à des pressions grandissantes. Elles se manifestent, dans nos campagnes, par des opérations coup de poing et des rassemblements devant les administrations ou sur les ronds-points. Avec l’augmentation des charges, du coût de l’énergie, des matériels et des engrais, nos agriculteurs ne peuvent plus supporter les hausses des coûts de production, qu’ils sont dans l’impossibilité de répercuter sur les prix de vente. Ils n’en peuvent plus non plus d’être montrés du doigt par certains donneurs de leçons, des talibans de l’écologie extrême ou des associations aux financements nébuleux, qui les stigmatisent et les insultent.
    À tout cela s’ajoute une avalanche permanente de normes et de contraintes administratives, souvent venues de Bruxelles et retranscrites – ou plutôt surtranscrites – avec zèle et entrain.
    Dans ce contexte, la proposition de loi que nous examinons ne peut qu’améliorer la situation des agriculteurs, car l’utilisation de drones, possible hier et devenue impossible aujourd’hui, ne peut qu’offrir aux agriculteurs, si nous la permettons à nouveau, un outil moderne et efficace.
    Ce progrès technologique répond à des problèmes concrets et bien identifiés. Soit les vignobles escarpés de la vallée du Rhône, de l’Ardèche ou du mont de Cerisy : le traitement de ces parcelles est un défi majeur, tant la sécurisation de ces chantiers particulièrement dangereux coûte d’efforts. Chaque année, des vignerons perdent tragiquement la vie à cause du retournement d’engins agricoles.
    Sur le plan environnemental, les études menées par l’Anses et l’Inrae montrent que la pulvérisation par drone réduit les risques et améliore la précision des traitements, tout en diminuant l’utilisation des produits et les rejets : cette méthode est ainsi plus sûre et plus durable.
    Cette technologie offre également d’autres avantages. Contrairement aux engins traditionnels qui, du fait du tassement qu’ils occasionnent, peuvent fragiliser la structure et la fertilité des sols, elle préserve la terre. Or il est essentiel, afin de conserver une terre généreuse et nourricière, de préserver ce que, dans son livre Humus, l’Ornais Gaspard Koenig appelle « l’infiniment petit des sols ».
    Il est donc incompréhensible que la gauche, lors de l’examen du texte en commission, ait restreint l’usage des drones : il y va de la sécurité des agriculteurs et de leurs salariés, comme de la pénibilité de leurs tâches ; il y va de la préservation de l’environnement, comme de la santé des Français.
    Le cadre que vise à instaurer cette proposition de loi n’est en rien révolutionnaire. Il ne s’agit que de pérenniser une expérimentation qui aurait déjà dû l’être depuis la loi Egalim de 2018, comme nous l’avions demandé à l’époque. Que de temps perdu pour les agriculteurs, les vignerons et, aujourd’hui, pour le législateur, parce que le Parlement s’est montré frileux et a campé sur le « en même temps » !
    Oublions les erreurs du passé et entérinons définitivement cette utilisation, en allant plus loin, et en revenant sur certaines contraintes imposées par la gauche lors de l’examen du texte en commission.
    Nous avons, à ce titre, déposé plusieurs amendements.
    Nous souhaitons, premièrement, supprimer l’interdiction de se servir d’un drone à une distance de moins de 250 mètres des zones habitées. Une telle mesure pénaliserait les petites exploitations et n’a pas de sens : la précision des pulvérisations élimine le risque de propagation.

    Mme Delphine Batho

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    C’est faux !

    M. Jérôme Nury

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    Nous souhaitons, deuxièmement, élargir la possibilité d’utiliser les drones à d’autres types de parcelles agricoles, comme aux rizières, dont la surface a diminué de 25 % en trois ans, en raison des difficultés à gérer les plantes adventices.
    Autant d’avantages permettant de préserver les surfaces cultivées : pour toutes ces raisons, le groupe de la Droite républicaine votera pour cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR. – M. Henri Alfandari applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Delphine Batho.

    Mme Delphine Batho

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    C’est ce qui s’appelle avoir le sens des priorités !
    Dans la situation actuelle de la France et du monde, marquée par tant d’événements et de bouleversements historiques de premier plan, que doit nous inspirer le fait que le principal groupe soutenant le gouvernement inscrive, comme premier texte à l’ordre du jour de sa première journée d’initiative parlementaire de la législature, l’autorisation de l’épandage aérien de pesticides par drone ?
    Citoyennes, citoyens, vous croyez peut-être que le groupe lié au président de la République s’occupe avec gravité du budget de la sécurité sociale et de l’État ou de la crise politique, après qu’il a choisi de tourner le dos au barrage républicain contre l’extrême droite, vous croyez peut-être qu’il se soucie de ce que Trump vient d’être élu aux États-Unis, de ce que la Corée du Nord s’engage auprès de la Russie dans la guerre en Ukraine et de ce que Poutine agite la menace nucléaire. Vous croyez peut-être qu’il se préoccupe d’agir pour la paix au Proche-Orient ou qu’il tâche de répondre aux urgences du quotidien – contre la vie chère, contre les plans de licenciement, contre les déserts médicaux, pour le revenu des agricultrices et des agriculteurs. Non : la priorité du groupe présidé par Gabriel Attal, c’est le backlash contre la nature, la beauté de la France et la santé de ses habitants. (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS, GDR et sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)
    Vous êtes devenus les grands spécialistes du démantèlement des lois de protection de l’environnement. Il en va aujourd’hui de celle qui interdisait l’épandage aérien des pesticides, issue, en 2007, du Grenelle de l’environnement, avant d’être renforcée en 2015 : vous voulez la défaire comme vous en avez défait tant d’autres, texte après texte, étape par étape.
    Cette proposition de loi est le symbole de l’effondrement politique, intellectuel, et même moral, de ceux qui se prétendaient « en marche » et auxquels il ne reste plus que la servilité à l’égard des intérêts économiques – ceux qui veulent toujours plus de pesticides, plus d’empoisonnement de l’eau et de l’alimentation, plus de destruction de la nature, plus de lâcheté face au chantage d’une poignée d’industriels. (Mêmes mouvements).
    Quelle semaine ! Le lundi – après le déclenchement du 49.3 –, fin de l’interdiction de l’épandage aérien des pesticides ; le mercredi, à l’ordre du jour du Sénat, fin de l’interdiction de tous les néonicotinoïdes. Madame la ministre, vous nous avez dit, lors du débat sur le projet d’accord avec le Mercosur, que la France devait fièrement faire prévaloir une exception agricole dans les échanges mondiaux et qu’elle devait « défendre son modèle agricole, vertueux et respectueux de l’environnement et des consommateurs ». Tout se passe comme si elle devait, au contraire, liquider son modèle, se standardiser, s’aligner sur le productivisme le plus vil.

    Mme Marie Pochon

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    Eh oui !

    Mme Delphine Batho

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    Comme si l’urgence, dans la situation du pays, était de détruire la beauté de ses paysages de plaines, de bocages, de montagnes, de vallées, que survoleront désormais des drones, d’empoisonner toujours plus, en aggravant l’exposition aux produits chimiques qui tuent, causent des cancers et tant d’autres maladies, qui brisent des vies. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS.)
    Comme si l’urgence était d’aggraver l’effondrement de la biodiversité, la destruction des populations d’insectes, d’oiseaux, de vers de terre, sans lesquels il n’y a pourtant ni souveraineté ni sécurité alimentaire.
    Vous racontez une fable aux agriculteurs et aux agricultrices : la fable d’une France où les travailleuses et les travailleurs de la terre pourraient être remplacés par des machines.

    Mme Sandra Regol

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    Eh oui !

    Mme Delphine Batho

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    Loin de répondre à la colère du monde agricole, cette vision techniciste est une nouvelle étape de la destruction du monde paysan.
    Il faut dire un mot de l’hypocrisie qui caractérise cette proposition de loi. Lorsque vous prétendez nous rassurer en affirmant que les drones n’épandront que certains produits biologiques ou de biocontrôle, et sur certaines cultures seulement,…

    M. Jean-Luc Fugit, rapporteur

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    C’est pourtant vrai !

    Mme Delphine Batho

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    …personne n’est dupe. C’est la tactique de la fable de La Fontaine : montrer patte blanche, pour ouvrir grand la porte à la fin de l’interdiction de l’épandage aérien. (Mêmes mouvements).
    La logique de généralisation de l’épandage par drone à toutes les cultures est inscrite dans l’ADN de ce texte. Pour le justifier, vous cédez aux sirènes de la post-vérité, en faisant dire à une agence de l’État, l’Anses, tout l’inverse de ce à quoi elle conclut dans son rapport sur les quelques expérimentations – non probantes – qui ont été conduites. L’Anses vous dérange tant qu’on a appris, ce week-end, la création d’une sorte de Politburo, avec les firmes de l’agrochimie, auquel l’expertise scientifique devra rendre des comptes.

    Mme Marie-Charlotte Garin

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    La honte !

    Mme Delphine Batho

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    En cette période, le pays est saisi par la peur de son déclin. En vous plaçant à l’avant-garde du sabordage des lois de protection de la santé et de l’environnement, en offrant à l’extrême droite, pour répondre à la pression qu’elle exerce sur vous, le scalpel de l’épandage par drone, vous faites le pire de choix. Vous n’en tirerez aucun bénéfice : il y aura toujours plus violemment antiécologique que vous. L’extrême droite ne se satisfera d’aucun compromis ou d’aucune concession. Le groupe écologiste votera résolument contre cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS. – Mme Anne Stambach-Terrenoir applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Hubert Ott.

    M. Hubert Ott

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    Je salue tout d’abord le travail remarquable de Pascal Lavergne, à l’origine de ce texte, poursuivi avec rigueur par le rapporteur Jean-Luc Fugit : ils ont toute notre reconnaissance.
    Face à la nécessité de mieux combattre les dérèglements climatiques comme face à celle de mieux protéger le vivant et son environnement – une de mes priorités – il peut s’avérer utile de recourir à l’innovation, plus encore quand elle peut aider le travail des agriculteurs et faciliter ainsi le maintien en culture de paysages exceptionnels.
    Depuis l’interdiction de la pulvérisation aérienne, en 2015, les agriculteurs confrontés à des terrains difficiles, comme les vignobles escarpés d’Alsace, sont souvent démunis. Ces pentes abruptes, atteignant parfois les 60 %, rendent trop dangereuses les solutions terrestres. J’ai pu le constater dans ma circonscription : pour le grand cru Kitterlé du domaine Schlumberger, à Guebwiller, par exemple, l’absence de solutions techniques adaptées menace d’abandon l’identité paysagère de l’entrée de la vallée du Florival. On pourrait également citer, parmi bien d’autres, le Sommerberg à Niedermorschwihr, le Brand à Turckheim, le Schlossberg à Kientzheim.
    Ne nous trompons pas de débat. Il ne s’agit pas de ramener la discussion à cette question récurrente : l’innovation technologique est-elle compatible avec l’écologie ? Il m’arrive, à titre personnel, d’admettre qu’il puisse y avoir entre elles une incompatibilité. Mais l’innovation proposée aujourd’hui peut être sincèrement considérée comme une nouvelle solution sécurisée pour des agriculteurs pionniers en matière de durabilité.

    M. Éric Martineau

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    Eh oui !

    M. Hubert Ott

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    En Alsace, pas moins de 35 % des surfaces viticoles sont exploitées en agriculture biologique, un record national qui témoigne d’un authentique engagement pour le respect de l’environnement. Les viticulteurs alsaciens, par leur approche sensible du milieu naturel, montrent la voie essentielle : celle de la résilience. Ils méritent les outils adaptés aux défis quotidiens de leur pratique.

    M. Éric Martineau

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    Tout à fait !

    M. Hubert Ott

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    Dans nos vignobles et nos cultures en terrain accidenté, les drones ne seront pas un gadget. Leur capacité à survoler les pentes au ras des cultures et à cibler avec précision les zones à traiter en font l’outil le mieux adapté. Le drone sera un allié utile lorsqu’il faudra sauver ces cultures touchées par la multiplication des intempéries.
    Ce texte n’a rien d’un recul écologique. Il garantit, au contraire, un usage sécurisé et contrôlé de certains produits à faible risque et de ceux autorisés en agriculture biologique. En réduisant les quantités de produits épandus, ils réduiront d’autant leur impact sur les écosystèmes.
    L’autre sujet essentiel est la sécurité. Les équipements terrestres – tracteurs à chenilles ou pulvérisateurs à main –, dans des conditions aussi exigeantes que celles des vignobles à forte pente, font courir aux agriculteurs des risques inacceptables : chute, effort physique démesuré, exposition accrue aux produits. Le constat est sans appel, nous ne pouvons pas demander aux viticulteurs et aux agriculteurs de sacrifier leur santé pour répondre à des contraintes réglementaires.
    Ce texte repose sur des expérimentations encadrées, et des études ont confirmé les avantages de cette méthode.

    Mme Marie Pochon

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    C’est faux !

    M. Hubert Ott

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    Le rapport de l’Anses a également souligné que cette méthode permettait de réduire efficacement le tassement des sols. Drone ou pas, le sol cultivé est un enjeu écologique fondamental. Les viticulteurs et les cultivateurs, en agriculture biologique ou conventionnelle, abordent le sol comme une composante essentielle de leur travail. Le sol cultivé, en restant vivant et aéré, nourrit les plantes et maintient mieux l’humidité vitale à leur système racinaire. En évitant, grâce aux drones, les ravinements et l’écrasement du sol cultivé sous le poids des engins, ils feront un bond en avant pour en préserver la vitalité.
    Cette technologie n’est pas un saut dans l’inconnu, et s’inscrit dans une dynamique européenne : l’Allemagne, la Suisse, la Belgique et le Luxembourg ont déjà, avec des résultats probants, intégré cette méthode.
    Ce débat ne doit pas nous diviser. Nous parlons de la sécurité des agriculteurs, de leur capacité à protéger leurs cultures, et de la nécessité de préserver nos paysages culturaux emblématiques. En votant en faveur de cette proposition de loi, nous envoyons un signal fort : celui d’une agriculture résiliente. Nous affirmons qu’innovation et écologie ne sont pas toujours incompatibles : les drones et l’innovation nous offrent la réponse aux défis climatiques et environnementaux d’aujourd’hui.
    Le Groupe Les Démocrates votera ce texte avec conviction car, plus que jamais, il faut soutenir nos agriculteurs dans leur engagement quotidien pour allier sécurité, productivité et respect de la nature. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem. – M. Stéphane Travert applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Henri Alfandari.

    M. Henri Alfandari

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    Ce texte vise à pérenniser l’expérimentation, votée en 2018, qui autorise l’épandage par drone de produits de biocontrôle, lorsque cette pulvérisation présente des avantages manifestes pour la santé humaine et l’environnement par rapport aux applications terrestres.
    La mesure est circonscrite puisqu’elle ne vise que l’épandage de certains produits à faible risque ou autorisés en agriculture biologique. Son champ d’application est également limité puisque, dans un premier temps, seules les surfaces agricoles présentant une pente supérieure ou égale à 30 % sont visées, ce qui concerne essentiellement des vignobles d’Alsace ou de la vallée du Rhône, des bananeraies et certains vergers, accueillant principalement des pommiers.
    Dans un second temps, la mesure pourrait concerner d’autres types de parcelles et de cultures : d’abord dans le cadre d’essais d’une durée maximale de trois ans puis, après évaluation des résultats de ces essais par l’Anses, de manière permanente si c’est pertinent.
    Le groupe Horizons & indépendants considère qu’il ne faut pas interdire, par principe, un épandage aérien des produits phytopharmaceutiques et de biocontrôle. Au vu de la précision de certains drones, équipés de buses limitant la dérive des pulvérisations, cette technologie innovante peut être une piste intéressante pour la décarbonation de l’agriculture française.
    Elle pourrait faciliter le travail agricole, mais également limiter l’exposition des opérateurs aux produits.
    Pour assurer de meilleures conditions d’utilisation de cette technologie et maximiser ainsi les gains en termes d’efficacité des traitements – notamment en réduisant et en maîtrisant les quantités de produits utilisés –, il faudra établir une méthodologie et un guide des bonnes pratiques.
    C’est la position que défendra le groupe Horizons & indépendants, qui votera en faveur de ce texte.

    Mme Marie Pochon

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    Pas d’applaudissement, aucun soutien : il a plié le débat !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. David Taupiac.

    M. David Taupiac

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    Faut-il autoriser à tout jamais l’épandage de pesticides par drone ? Telle est la question que nous devons trancher. Certains répondront qu’ils sont favorables par principe à l’épandage de pesticides par drone – parce que leur croyance dans l’agriculture intensive ne souffre aucune réserve. D’autres, par principe également, y sont radicalement opposés car il s’agit d’intrants.
    Mais éloignons-nous des principes et adoptons une approche scientifique : sans se priver de l’innovation technologique, il faut examiner avec prudence les incidences de cette nouvelle technologie d’épandage sur l’environnement et, tout particulièrement, son impact sur les ressources hydriques.
    Les études scientifiques sur l’impact des pesticides sur la santé et l’environnement – et notamment sur la qualité de l’eau – continuent de s’accumuler. Dans un rapport demeuré confidentiel et dévoilé le 15 novembre, trois inspections générales constatent « l’échec global de la préservation de la qualité des ressources en eau pour ce qui concerne les pesticides ».
    Les bases scientifiques solides, sur lesquelles nous devrions nous appuyer avant de prendre une décision, font défaut. En effet, à l’issue de l’expérimentation d’épandage de pesticides par voie aérienne autorisée en 2018 par la loi Egalim pour certaines cultures faisant face à des contraintes d’accès, l’Anses a dressé un bilan. Elle conclut que les données sont insuffisantes pour trancher si l’expérimentation était, ou non, bien fondée.
    En scientifique, je plaide donc pour une prolongation de l’expérimentation, le temps de récolter de nouvelles données, qui – qui sait ? – permettraient peut-être de la pérenniser.
    Comment pourrions-nous dédaigner les conclusions de l’Anses et autoriser sans limite une méthode d’épandage potentiellement risquée pour notre santé et pour notre environnement ? Car les risques existent. Les premières conclusions de l’Anses les ont d’ailleurs pointés : avec ces nouvelles techniques, les niveaux d’exposition à la dérive de pulvérisation sont supérieurs pour les riverains. Quant aux performances agrologiques – efficacité des traitements et impact environnemental –, elles apparaissent inférieures à celles de pulvérisateurs terrestres.
    Bref, rien n’atteste qu’il s’agit d’une solution miracle, et sans risque. Au contraire, tout laisse à penser qu’il faut limiter l’épandage aérien aux cas où il est strictement nécessaire, et qu’il doit répondre à des protocoles stricts.
    C’est pourquoi nous plaidons pour une prolongation de l’expérimentation. Dans l’hypothèse où nous ne ferions pas ce choix, nous défendons une limitation du champ d’application de la loi.
    L’examen en commission a permis de faire un premier pas en ce sens, grâce à l’adoption de certains de nos amendements. Nous avons restreint le champ d’application de la proposition de loi, en conformité avec l’expérimentation prévue par la loi Egalim. Les épandages de ce type ne concerneront plus que les cultures situées sur des pentes égales ou supérieures à 30 %, et non plus à 20 % comme initialement prévu.
    Autre avancée, nous avons pris en compte la santé humaine de manière générale, et non plus exclusivement celle des travailleurs traitant les parcelles. Cela permettra de tenir compte des externalités négatives pour les riverains et les personnes travaillant dans les parcelles après traitement.
    Le texte ouvrant la possibilité d’élargir la pratique à d’autres cultures et à d’autres parcelles après une phase d’essai, nous avons précisé que les programmes ne seront autorisés que pour trois ans.
    Il reste désormais à limiter la liste des cultures pouvant y prétendre. Nous proposerons que seules celles présentant des difficultés d’accès par voie terrestre soient concernées.
    Le 10 mars 2024, le conseil scientifique de l’Anses a préconisé la plus grande rigueur dans la protection de la santé publique et des écosystèmes. Vous l’aurez compris, le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires partage son analyse. Nous appelons à prolonger l’expérimentation afin de consolider l’expertise scientifique. La décision politique ne devrait intervenir que plus tard, en fonction des résultats.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. André Chassaigne.

    M. André Chassaigne

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    Alors que le monde agricole traverse une crise sans précédent, faute d’une politique agricole garantissant à nos paysans la juste rémunération de leur travail, nos collègues de la majorité minoritaire ne trouvent rien de mieux à nous proposer qu’un texte visant à autoriser l’usage des drones en agriculture.

    Mme Marie Pochon

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    Eh oui !

    M. André Chassaigne

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    Vous ne voulez pas vous battre pour mettre en place des prix rémunérateurs garantis pour nos paysans, pour protéger notre agriculture de la concurrence mortifère des pays champions du dumping social et environnemental. Vous nous proposez donc d’organiser la fuite en avant dans l’usage des pesticides.
    Ce texte et ceux qui suivront défendent tous de fausses solutions : autoriser l’épandage par drone, assouplir les conditions d’utilisation des pesticides, affaiblir le champ de compétence de l’Anses, autoriser l’utilisation de pesticides à base de substances néonicotinoïdes, permettre à nouveau des remises commerciales sur la vente de pesticides.
    Ces propositions de loi ne nous privent pas seulement d’études d’impact et d’avis du Conseil d’État, elles se substituent au débat que nous devions avoir sur la stratégie Écophyto 2030 dans le cadre d’un projet de loi sur les phytosanitaires ! Ce texte devait être présenté début juillet : les élections en ont décidé autrement, mais nous l’attendons toujours !

    Mme Mélanie Thomin

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    Très bien !

    M. André Chassaigne

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    Venons-en au fond : que nous proposez-vous ? D’autoriser les programmes d’application par drone de certains produits phytopharmaceutiques sur les parcelles agricoles en pente, les bananeraies et les vignes mères de porte-greffes conduites au sol. Certes, vous vous limitez à autoriser les produits phytopharmaceutiques de biocontrôle et les produits autorisés en agriculture biologique, mais ce n’est qu’un cheval de Troie – d’autres l’ont souligné en commission. L’important pour vous est d’enterrer définitivement le principe d’interdiction des pulvérisations aériennes. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS.)

    Mme Delphine Batho

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    Exactement !

    M. André Chassaigne

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    Vous nous proposez ensuite d’autoriser, à titre d’essai, la pulvérisation par drone de ces mêmes produits sur d’autres types de parcelles et de cultures – des essais qui donneront lieu, le cas échéant, à des décisions réglementaires d’autorisation, sans passer par le Parlement !

    M. Gérald Darmanin

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    Pas de caricature !

    M. André Chassaigne

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