XVIIe législature
Session ordinaire de 2024-2025

Première séance du mardi 01 avril 2025

Sommaire détaillé
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Première séance du mardi 01 avril 2025

Présidence de M. Roland Lescure
vice-président

M. le président

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    La séance est ouverte.

    (La séance est ouverte à neuf heures.)

    1. Démission et remplacement d’un député

    M. le président

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    Mme la présidente de l’Assemblée nationale a reçu de M. André Chassaigne, député de la cinquième circonscription du Puy-de-Dôme, une lettre l’informant qu’il se démettait de son mandat de député à compter du lundi 31 mars 2025.
    Par une communication du 24 mars 2025, le ministre de l’intérieur l’a informée que M. André Chassaigne était remplacé jusqu’au renouvellement de l’Assemblée nationale par M. Julien Brugerolles, élu en même temps que lui à cet effet.
    J’en profite pour saluer le président Chassaigne qui nous a rarement ménagés mais toujours éblouis par la force de son verbe.

    2. Questions orales sans débat

    M. le président

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    L’ordre du jour appelle les questions orales sans débat.

    Fonds national de garantie individuelle des ressources

    M. le président

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    La parole est à M. Sylvain Berrios, pour exposer sa question, no 291, relative au fonds national de garantie individuelle des ressources.

    M. Sylvain Berrios

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    La ville de Saint-Maur-des-Fossés, située dans le Val-de-Marne, voit, tous les ans depuis 2010, son budget ponctionné de près de 15 millions d’euros au titre du fonds national de garantie individuelle des ressources (FNGIR).
    Créé pour compenser la réforme de la taxe professionnelle et pour garantir aux communes le maintien de leurs recettes de fonctionnement, le FNGIR n’est plus adapté aux récentes évolutions de la fiscalité locale. Ainsi, les changements institutionnels en Île-de-France ont conduit au transfert de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) vers la métropole du Grand Paris (MGP) et à celui de la cotisation foncière des entreprises (CFE) vers les établissements publics territoriaux (EPT), au détriment des communes.
    À ces 15 millions d’euros de prélèvements dus au FNGIR s’ajoute la perte de près de 16 millions de dotation globale de fonctionnement (DGF), de 6 millions de taxe SRU, de 1,8 million versé au fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (Fpic) et de 2 millions pour financer la brigade des sapeurs-pompiers installée sur un terrain communal. Si on tient compte de la perte de la compensation de la taxe d’habitation, exclue de toute mesure d’indexation, l’ensemble de ces prélèvements obligatoires représente plus de 40 millions d’euros annuels, soit 25 % des recettes réelles de fonctionnement de la commune.
    À titre de comparaison, cette somme serait suffisante pour financer la rénovation de 250 kilomètres de trottoirs sur les 360 kilomètres que comporte la ville et dépasse le budget total de ses crèches et de ses écoles.
    Saint-Maur est une des contributrices les plus importantes au dispositif du FNGIR, mais les communes, particulièrement en Île-de-France, n’ont aucune garantie concernant la redistribution de la fiscalité économique. De plus, l’environnement économique de la commune a changé : des entreprises importantes, ne pouvant étendre leur activité eu égard au prix élevé du foncier en zone dite tendue et de l’obligation faite par la loi SRU de consacrer les réserves foncières disponibles à la production de logements, ont dû quitter la commune.
    La contribution de certaines collectivités au FNGIR est déséquilibrée. Aucune mesure corrective n’est possible, car le mécanisme de calcul prend pour référence figée la situation de 2011. Dans ces conditions, monsieur le ministre de l’aménagement du territoire, envisagez-vous de faire évoluer le mécanisme obsolète du FNGIR ? À défaut, êtes-vous prêt à remettre en question, à l’occasion d’une rencontre ad hoc, le mécanisme de calcul du FNGIR pour le cas spécifique de la ville de Saint-Maur-des-Fossés, qui subit un prélèvement qu’on peut qualifier d’inéquitable ?

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation.

    M. François Rebsamen, ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation

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    Vous connaissez aussi bien que moi tous les mécanismes en jeu. La loi de finances pour 2010 a supprimé la taxe professionnelle et a prévu, en contrepartie, deux dispositifs de compensation : la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (DCRTP) et le FNGIR. Ce dernier mécanisme d’équilibrage, je tiens à le rappeler, permet normalement de maintenir les recettes fiscales de chaque collectivité au niveau qu’elles avaient avant la suppression de la taxe professionnelle. À vous entendre, ce n’est pas le cas de la commune de Saint-Maur-des-Fossés.
    Cette ville est par ailleurs affectée par la modification des équilibres financiers consécutive à la création de la métropole du Grand Paris et au remplacement des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) par des établissements publics territoriaux. Les communes de grande taille faisant partie d’un EPT sont particulièrement pénalisées.
    Je m’abstiendrai de développer tout ce que vous savez déjà au sujet du FNGIR et vous ferai plutôt une réponse simple : je suis prêt à examiner avec vous, au ministère, la situation particulière de cette commune et à rechercher des solutions.

    M. le président

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    La parole est à M. Sylvain Berrios.

    M. Sylvain Berrios

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    Je vous remercie de votre réponse et de votre ouverture. Effectivement, la situation des communes faisant partie de la métropole du Grand Paris est d’une rare complexité. Il convient de prendre les mesures correctrices nécessaires.

    Action de l’État dans les Ardennes

    M. le président

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    La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, pour exposer sa question, no 296, relative à l’action de l’État dans les Ardennes.

    M. Jean-Luc Warsmann

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    Il y a sept ans, dans ce même hémicycle, j’ai exposé au gouvernement de l’époque la situation des Ardennes. C’est un département volontaire, les Ardennais sont des bosseurs, mais ils font face à de graves difficultés économiques et sociales. C’est à cette occasion qu’est né un plan de redynamisation du département, dénommé le pacte Ardennes.
    Nous y avons travaillé de toutes nos forces et nous avons obtenu des résultats. Les Ardennes sont le territoire de France où les programmes de rénovation du patrimoine bâti sont les plus dynamiques. Nous produisions 0 % du gaz que nous consommions ; nous en produisons désormais 25 %. Si tous les départements faisaient comme nous, nous n’aurions plus besoin du gaz de M. Poutine ! Malgré cela, les vents contraires soufflent toujours.
    Je souhaite commencer par vous dire merci ; ce mot est rarement prononcé dans cette enceinte et dans le monde politique, mais ma relation avec les Ardennais est humaine plutôt que politique. Merci de ce que le gouvernement a déjà fait.
    Le 18 octobre 2023, Mme la première ministre Élisabeth Borne a annoncé la deuxième étape du pacte Ardennes. Aujourd’hui, celle-ci ne s’est pas encore concrétisée. Je demande donc au gouvernement de transformer l’essai et de définir cette deuxième étape pour donner au département des Ardennes une nouvelle dynamique de développement.

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation.

    M. François Rebsamen, ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation

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    Je vous remercie à mon tour d’avoir posé cette question. Elle me permet de rappeler l’attention particulière que l’État porte au département des Ardennes et qui se traduit par plusieurs dispositifs. Dans le cadre du plan France ruralités, notre feuille de route en faveur des territoires ruraux, 20 communes des Ardennes ont reçu le label Villages d’avenir pour leur soutien en ingénierie, 115 communes ont bénéficié en 2024 de la dotation biodiversité et aménités rurales, pour un total d’environ 1 million d’euros, et 378 communes –⁠ soit 84 % du département – ont été placées en zone France ruralités revitalisation.
    Le département des Ardennes bénéficie également du zonage spécifique des bassins d’emploi à redynamiser : 346 communes, soit 77 % du territoire, sont situées dans cette zone, ce qui leur ouvre le droit à des exonérations fiscales et sociales.
    Enfin, 180 communes, soit 40 % du département, font partie du zonage européen des aides à finalité régionale pour la période 2022-2027, qui permet aux collectivités et à l’État d’octroyer des aides aux entreprises.
    L’ensemble des communes du département sont ainsi couvertes par au moins un de ces trois dispositifs de zonage, ce qui fait figure d’exception dans le pays. C’est aussi le résultat du travail que vous avez, les uns et les autres, accompli en faveur de ce département très fragile.
    Enfin, vous le savez, le pacte Ardennes signé en mars 2019 avec les acteurs du territoire a été particulièrement réussi. Il a permis l’ouverture d’une licence de sciences de l’éducation à Charleville-Mézières, le développement de la plateforme Platinium 3D, l’expérimentation du service national universel (SNU) et la création d’une société d’économie mixte (SEM) destinée au développement des énergies renouvelables, dont vous avez d’ailleurs rappelé les résultats exceptionnels.
    Le préfet des Ardennes a été missionné pour l’élaboration d’un second pacte reposant sur une stratégie de transition écologique au bénéfice des Ardennais, des collectivités et du monde économique. Les orientations de ce pacte ont encore besoin d’être affinées en concertation avec les élus locaux et avec vous.
    Je vous remercie de votre action et vous assure solennellement que l’État continue d’être présent et impliqué sur le territoire des Ardennes. Je suis évidemment avec attention les travaux du préfet pour finaliser le plus rapidement possible, en tout cas d’ici à l’été, le processus de contractualisation du deuxième pacte annoncé à l’époque par Mme Borne, appelé Nouvelle Ambition pour les Ardennes.

    M. le président

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    La parole est à M. Jean-Luc Warsmann.

    M. Jean-Luc Warsmann

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    Je vous remercie de votre réponse et de la volonté du gouvernement d’aboutir rapidement. Moi qui suis un peu le papa du dispositif des bassins d’emplois à redynamiser, je rends hommage à Jacques Chirac qui a approuvé cette mesure. C’est grâce à lui que le dispositif a pu voir le jour et que de nombreux emplois ont été sauvés.

    Loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains

    M. le président

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    La parole est à M. Thibaut Monnier, pour exposer sa question, no 303, relative à la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains.

    M. Thibaut Monnier

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    Ma question concerne les conséquences délétères de la loi SRU et de l’objectif zéro artificialisation nette (ZAN) sur le développement des petites communes rurales.
    Il y a deux mois, le maire de Châteauneuf-sur-Isère, petite commune située dans ma circonscription de la Drôme, démissionnait de ses fonctions pour dénoncer les injonctions contradictoires de votre gouvernement en matière de politique du logement, plus particulièrement de logement social.
    Laissez-moi vous résumer cette situation digne de Kafka, où les acronymes d’État sont rois. À Châteauneuf-sur-Isère, la commune doit doubler son volume de logements sociaux pour respecter le quota des 25 % imposé par la loi SRU depuis qu’elle a intégré la communauté d’agglomération de Valence. Cependant, le ZAN lui interdit de réaliser une extension urbaine pour construire les logements demandés : près de la moitié du territoire communal est classée en ZAP –⁠ zone agricole protégée – et n’est pas considérée comme constructible. Enfin, et c’est le comble de l’absurde, le PLH, le programme local de l’habitat, interdit de construire plus de vingt-trois logements par an, ce qui empêche d’accélérer les programmes de construction pour se conformer à la loi SRU.
    Résultat, l’État impose au maire de Châteauneuf-sur-Isère de construire plus de 250 logements sociaux supplémentaires pour transférer des populations issues des quartiers difficiles de Valence et les concentrer dans le bourg, alors que celui-ci compte déjà plus de 30 % de logements sociaux ! Autrement dit, la loi impose au maire de transformer son centre-village en véritable cité HLM, ce qui est parfaitement délirant.
    Monsieur le ministre de l’aménagement du territoire, le maire de Châteauneuf-sur-Isère vous appelle à l’aide et vous demande une audience ; mais depuis un an, il n’entend que le silence de votre gouvernement. Ses courriers d’alerte n’ont même pas fait l’objet d’un accusé de réception de votre ministère. Je n’ai moi-même toujours pas reçu de réponse au courrier que je vous ai adressé à ce sujet le 11 février. La situation de la commune est tellement inextricable que même le préfet de la Drôme vous a alerté et a demandé qu’une solution pragmatique soit envisagée, sans succès.
    Pour 70 % des maires, la loi SRU est un véritable enfer administratif. Je vous demande d’agir pour le maire de Châteauneuf-sur-Isère et pour les maires de France qui n’en peuvent plus d’être les variables d’ajustement de cette bureaucratie d’État. Je n’ai que deux demandes à formuler. Premièrement, venez constater sur place la réalité ubuesque que je viens de décrire et prenez le temps de recevoir le maire de Châteauneuf-sur-Isère ; je me permettrai de vous donner le dossier en main propre. Deuxièmement, faites en sorte que l’obligation des 25 % ne soit pas opposable lorsque la collectivité connaît des obstacles légitimes à son application et confiez au préfet le soin de juger de l’opportunité d’une telle application au plus près des réalités du territoire.

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation.

    M. François Rebsamen, ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation

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    La situation que vous décrivez me touche particulièrement. J’ai été maire durant plus de vingt ans, et je veux dire dans cet hémicycle que c’est le plus beau de tous les mandats. Je connais l’engagement sincère des maires qui s’investissent, très souvent au détriment de leur vie privée –⁠ nous le constatons tous les jours –, dans leur commune. Je connais la situation des communes contraintes de respecter la loi SRU.
    Visiblement, celle-ci est respectée à Châteauneuf-sur-Isère. Je salue cette commune qui a réalisé entre 2020 et 2022 –⁠ j’ai vérifié tout cela – 185 % de l’objectif fixé d’offrir cinquante-neuf logements sociaux supplémentaires. Malgré les difficultés à l’échelle d’une petite commune, le maire a atteint un résultat remarquable. Je tiens à le souligner, d’autant plus que, personnellement –⁠ même si j’ai entendu ce que vous disiez – je suis un fervent défenseur de la loi SRU, et je voudrais saluer les maires qui la respectent ou même qui vont légèrement plus loin. Par ailleurs, je prône l’assouplissement de l’objectif ZAN et cependant le respect, à terme, de la sobriété foncière, bien évidemment. J’ai demandé à mon cabinet de vérifier avec le préfet que les cinquante logements sociaux ainsi réalisés en plus de l’objectif sont comptabilisés dans la réalisation des objectifs de production pour la période de 2023 à 2025. C’est bien le cas, de sorte que je vous annonce que l’objectif fixé à cinquante-neuf logements est ramené à neuf logements supplémentaires à produire par la commune dans les trois ans qui viennent.
    Je pense que cette réponse est de nature à vous satisfaire. En outre, les investissements importants de la commune dans le logement social ont conduit le préfet à ne pas prélever le montant annuel lié au déficit de logements sociaux en 2024. Les dépenses reportables, très supérieures au prélèvement théorique, conduiront également à une absence de prélèvement en 2025, 2026 et 2027, et ce, avant même de prendre en considération les investissements réalisés par la commune. Mon cabinet est en lien avec l’ancien maire qui demeure, je crois, conseiller municipal de Châteauneuf-sur-Isère, et avec la nouvelle maire. Vous trouverez toujours en moi un défenseur des élus locaux qui agissent dans le respect de la loi.

    M. le président

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    La parole est à M. Thibaut Monnier.

    M. Thibaut Monnier

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    Je suis heureux d’entendre les efforts que vous annoncez et je vous remercie pour la commune de Châteauneuf-sur-Isère. Néanmoins, je vous demande solennellement d’arrêter l’application insensée de cette loi inique, qui provoque l’incompréhension, la désolation, puis la démission de dizaines de maires qui ne sont ni écoutés ni accompagnés par votre ministère. Merci de prendre cette demande en compte.

    Accès au logement dans le Calvados

    M. le président

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    La parole est à M. Arthur Delaporte, pour exposer sa question, no 306, relative à l’accès au logement dans le Calvados.

    M. Arthur Delaporte

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    Il y a dix-neuf à vingt-deux mois d’attente pour un logement social à Caen ou Hérouville-Saint-Clair ; l’augmentation du prix du mètre carré y est affolante, rendant de fait l’accès à la propriété très compliqué voire impossible. Nous constatons donc l’existence d’un véritable goulot d’étranglement.
    Se loger est un droit fondamental, mais ce droit est menacé et très difficile à exercer, y compris dans des agglomérations de taille intermédiaire telle que Caen –⁠ sans doute la situation est-elle similaire à Dijon. Caen est la huitième ville de France où le marché est le plus tendu pour les étudiants : la ville accueille 35 000 étudiants alors que le centre régional des œuvres universitaires et scolaires (Crous) ne peut couvrir que 15 % des besoins. Une grande précarité se développe, en particulier chez les jeunes. Des jeunes apprentis, par exemple, se retrouvent à la rue.
    La tension pour accéder à un logement d’urgence grâce au numéro 115 m’inquiète. Le plafond de nuitées limite la mise à l’abri, y compris pour les femmes victimes de violences. Comment pouvons-nous tolérer cela ? J’ai déjà eu l’occasion d’interpeller vos prédécesseurs à plusieurs reprises à ce sujet. L’an dernier, un grand plan pour le logement d’urgence a été annoncé, mais nous attendons toujours des éléments concrets.
    Dans le Calvados, il y a un problème très particulier, car la création de 500 places a été financée à l’issue d’un marché public national ouvert par l’État, mais l’argent a été versé à un entrepreneur véreux, qui est en faillite complète. Sur ces 500 places manquantes, seulement 130 ont été reconstituées. Il y a donc environ 350 places de moins par rapport à ce qui était annoncé l’an dernier, alors qu’il en faudrait bien davantage.
    Monsieur le ministre, que compte faire le gouvernement pour améliorer la situation critique du logement et de l’hébergement d’urgence à Caen et dans son agglomération ?

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation.

    M. François Rebsamen, ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation

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    Il est vrai que les attributions de logements sociaux ont fortement augmenté dans votre département –⁠ je le souligne, car c’est notamment le produit de l’action des élus locaux. Face à cette tension et pour redonner le choix aux territoires dans leur politique de peuplement, le gouvernement n’est évidemment pas resté inactif. Nous avons permis aux intercommunalités de se doter d’outils de régulation. Ainsi la gestion en flux et la cotation de la demande de logement social ont-elles été instaurées dans l’intercommunalité de Caen la mer. Comme vous le savez, ces outils doivent permettre de reloger en priorité les demandeurs ayant l’ancienneté la plus longue et d’améliorer la fluidité de l’accès au logement. Je connais bien cette question dans ma propre commune, vous l’avez évoqué. Je rappelle également que la cotation à Caen la mer prend bien en considération la situation des personnes hébergées et des jeunes.
    En janvier, 1 412 places d’hébergement d’urgence étaient ouvertes dans le département. Comme cela était nécessaire, il a été mis fin au marché national d’hébergement d’urgence avec accompagnement social dans le Calvados compte tenu, vous le savez, de l’absence de décence et des manquements aux premières règles de sécurité des hébergements concernés. Une orientation a été proposée aux 500 personnes hébergées, majoritairement dans le Calvados et à la marge dans les départements limitrophes.
    Lors de deux opérations de relogement réalisées durant l’année 2024, la moitié des personnes hébergées a refusé la proposition d’orientation de l’État et la majorité d’entre elles s’est maintenue dans les lieux. L’État a de nouveau fait des propositions d’orientation la semaine dernière à l’ensemble des occupants.
    Je le déclare ici, les places d’hébergement d’urgence du Calvados seront reconstituées à hauteur de 300 places. La trajectoire régionale des places d’hébergement d’urgence permettra bien de reconstituer les 500 places fermées et nous espérons tous qu’elle répondra ainsi du mieux possible aux besoins des publics de ce territoire.

    M. le président

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    La parole est à M. Arthur Delaporte.

    M. Arthur Delaporte

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    J’entends l’annonce de l’ouverture de 300 places dans le Calvados et de 500 à l’échelle de la région Normandie. J’espère néanmoins que, dès lors que c’est le Calvados qui a perdu 500 places, le préfet de région prendra la décision de flécher les 200 places restantes en direction du Calvados, qui en a tant besoin. En effet, le nombre de demandes auprès du 115 a été multiplié par trois entre 2022 et 2024.
    Le taux de demandes non pourvues reste relativement stable, mais il s’élève à 40 %. Par conséquent, de nombreuses personnes qui appellent le 115 n’obtiennent pas de réponse à leur demande et finissent par ne plus appeler. Je pense à tous les écoutants du service intégré d’accueil et d’orientation (SIAO) qui éprouvent une vive souffrance psychologique car ils ne peuvent pas traiter toutes les demandes, ainsi qu’à toutes les personnes qui n’appellent plus car elles savent qu’elles ne recevront pas de réponse à la hauteur de leurs besoins. Des femmes avec leurs enfants se retrouvent dans des squats ou à la rue. Dans le Calvados, c’est une situation que nous constatons malheureusement bien trop souvent. Le gouvernement doit donc poursuivre ses efforts : 300 c’est bien, 500 c’est mieux, mais plus, ce serait mieux encore.

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre

    M. François Rebsamen, ministre

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    Je voudrais simplement rappeler, mais je pense que vous le savez, qu’existent actuellement –⁠ nous avons veillé à les maintenir dans la loi de finances – 203 000 places d’hébergement d’urgence. L’aide à l’hébergement d’urgence s’élève à 3 milliards d’euros dans le budget de l’État –⁠ c’est trois fois plus qu’il y a dix ans –, cependant ce n’est pas encore tout à fait suffisant, j’en conviens.

    Contournement de Martigues et Port-de-Bouc

    M. le président

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    La parole est à M. Emmanuel Fouquart, pour exposer sa question, no 300, relative au contournement de Martigues et Port-de-Bouc.

    M. Emmanuel Fouquart

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    Cela fait plus de cinquante ans que le contournement Martigues et Port-de-Bouc est attendu par les habitants du territoire de l’ouest de l’étang de Berre. Si les deux tiers de son financement ont jusqu’à présent été sécurisés dans les contrats de plan État-région (CPER) passés, le solde estimé à 50 millions d’euros est toujours attendu par les populations locales, les entreprises et les élus. Chaque jour, la RN568 est empruntée par 70 000 véhicules traversant les communes, dont un nombre alarmant de camions transportant des matières dangereuses. Cette situation met en péril la santé des familles, la sécurité des écoles et fragilise la structure des bâtiments alentour.
    Ce territoire inclus dans la métropole d’Aix-Marseille-Provence, accueille près de 150 000 résidents dont 49 500 habitants à Martigues, 17 000 à Port-de-Bouc et 15 500 à Fos-sur-Mer. Des projets de développement sont prévus pour le grand port maritime de Marseille et dans la zone industrielle de Fos-sur-Mer, qui compte déjà 45 000 emplois et où 10 000 nouveaux emplois seront créés d’ici à 2030 grâce à l’installation de nouvelles industries dans le cadre d’un vaste programme de décarbonation. Parmi ces nouveaux emplois, 3 000 seront créés en 2026 par la société Carbon, pour une production de cellules photovoltaïques. Il est manifeste que le trafic devrait encore augmenter, exacerbant les problèmes actuels.
    À ce propos, le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema) a rendu public un diagnostic de la saturation des routes menant à la zone industrielle de Fos. Selon l’un de ces scénarios, intitulé « choc de croissance d’emplois », 80 000 véhicules en moyenne par jour empruntant le viaduc de Martigues, dont 8 % de poids lourds, sont attendus d’ici à deux ans, soit 10 000 de plus qu’avec le trafic actuel.
    La mise en service du contournement est urgente et répond non seulement aux impératifs sécuritaires, sanitaires et économiques mais aussi à l’impératif écologique en raison de la réduction des différentes pollutions, dont celles dues aux embouteillages considérables sur la route nationale. La dernière ligne du financement est donc vitale pour ce territoire en plein essor industriel. Ma question est la suivante : avez-vous une réponse précise quant au solde du financement ? Allez-vous enfin réaliser ce contournement après cinquante ans d’espoir de la population locale ? Allez-vous enfin améliorer la vie de ces habitants et protéger leur santé ?

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation.

    M. François Rebsamen, ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation

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    En cinquante ans, beaucoup de choses ont été faites, même si ça n’est peut-être pas suffisant. Vous appelez mon attention sur les modalités de financement du contournement routier de Martigues et de Port-de-Bouc. Ce projet a pour objectif de dévier le trafic routier empruntant la RN568 hors des zones urbanisées de ces deux communes, qui sont effectivement traversées par des milliers de voitures et de poids lourds chaque jour, en améliorant ainsi la desserte routière du site industrialo-portuaire de Fos-sur-Mer depuis et vers Marseille. Le projet a été déclaré d’utilité publique en 2017 et des travaux préparatoires de dévoiement de réseaux sont engagés. La demande d’autorisation environnementale est en cours d’instruction.
    Le montant des travaux, même en différant la réalisation de l’échangeur du Réveilla, est estimé à 167 millions d’euros. L’État n’est pas resté inactif : M. le ministre des transports Philippe Tabarot souligne que l’État s’est d’ores et déjà engagé à hauteur de 60 millions et la région à hauteur de 15 millions dans le cadre du protocole préfigurant le volet mobilités 2023-2027 du CPER. Le département et la métropole se sont déclarés également prêts à apporter leur contribution financière, ce qui est indispensable puisque ce contournement concerne tout le département. Toutefois, à ce jour, il est vrai qu’un montant de l’ordre de 60 millions d’euros reste encore à trouver. L’État, en la personne du préfet, mène des discussions, notamment avec la région, pour le financement complémentaire de cette opération prioritaire.
    Ce projet, qui accompagne la transformation de la zone industrialo-portuaire de Fos-sur-Mer, représente un enjeu très important de développement régional et départemental. L’ensemble des partenaires a donc un intérêt commun à dégager une solution pour finaliser son financement dans les meilleurs délais. J’espère que nous allons y arriver, et j’ai demandé au Cerema de prendre sa part.

    M. le président

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    La parole est à M. Emmanuel Fouquart.

    M. Emmanuel Fouquart

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    Ce sont toujours des paroles. J’espère que l’État prendra de véritables engagements car, comme je l’ai rappelé, cela fait cinquante ans que ce projet a commencé –⁠ j’en connais l’histoire et le coût. Néanmoins le contournement est annoncé pour 2027. Nous sommes donc deux ans avant la date prévue pour la fin du chantier, mais si les premiers coups de pioche ne sont pas portés très rapidement, le contournement ne sera pas réalisé en 2027.

    Route nationale 141

    M. le président

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    La parole est à Mme Caroline Colombier, pour exposer sa question, no 301, relative à la route nationale 141.

    Mme Caroline Colombier

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    Avant de prendre la parole, je tiens à dire, car cela me tient à cœur, que la peine d’inéligibilité avec exécution provisoire, prise hier à l’encontre de Marine Le Pen, est une décision inique et injustifiée, qui va priver des millions de Français de leur choix de vote.
    J’en arrive à ma question. Fin 2024, lors du comité de pilotage pour l’aménagement de la route nationale 141 entre Angoulême et Limoges, l’État a annoncé qu’un tronçon de plus d’un kilomètre resterait à deux fois une voie, à hauteur de la commune de Chasseneuil-sur-Bonnieure, dans ma circonscription en Charente. Il a aussi indiqué que l’aire de repos prévue à proximité de la commune de Nieuil ne serait pas mise en service avant 2030.
    Promise depuis plusieurs années et sans cesse repoussée, la fin des travaux sur cet axe structurant, qui est la colonne vertébrale de la route Centre Europe Atlantique (RCEA), devrait être une priorité, afin de relier la façade atlantique au Limousin, ainsi que les métropoles de Limoges et Bordeaux.
    Le doublement de cet axe prioritaire permettra aussi de désenclaver ce territoire, alors qu’aucune ligne de train express régional (TER) n’existe entre Angoulême et Limoges. Cela fait sept ans que les gouvernements successifs se désintéressent de cet axe ferroviaire comme de cet axe routier.
    Pire, comme l’indiquent déjà professionnels, usagers et riverains, l’absence de doublement total de la route nationale 141 aura, sans nul doute, des conséquences sur le trafic, en favorisant la création d’un goulot d’étranglement important aux abords de Chasseneuil-sur-Bonnieure.
    Faut-il également rappeler que le nombre de camions empruntant ce tronçon est de plus en plus important chaque année et qu’il n’existe aucune aire de repos spécialisée sur 100 kilomètres entre Ruelle-sur-Touvre et Limoges, alors que les professionnels de la route doivent respecter des coupures dans leur temps de travail ? Le report de la construction de cette aire jusqu’en 2030 serait une erreur supplémentaire.
    Le gouvernement compte-t-il tenir ses engagements envers les Charentais et les collectivités ? Prendra-t-il ses responsabilités, notamment au sein du contrat de plan État-région (CPER) 2023-2027, en augmentant sa part du financement, afin de revenir aux promesses faites dans un premier temps ?

    M. le président

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    Je dois vous avouer que je ne m’attendais pas à ce qu’une séance de questions orales sans débat soit l’occasion de commenter une question de justice.

    M. Rodrigo Arenas

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    Et la séparation des pouvoirs ?

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation.

    M. François Rebsamen, ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation

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    Madame la députée, je ne commenterai pas vos commentaires, car je ne suis pas là pour cela.
    Permettez-moi de vous rappeler que l’achèvement de la mise à deux fois deux voies de la route nationale 141, c’est-à-dire de la liaison Angoulême-Limoges, est une priorité de l’État.
    Les travaux de la section entre Roumazières et Exideuil sont en cours d’achèvement, la mise en service étant prévue cette année. Les choses avancent. Moi-même, j’ai vu que, dans ma région, également traversée par l’axe essentiel de la RCEA, il a fallu près de cinquante ans pour achever ce projet.
    Les travaux entre Chasseneuil et Roumazières restent à lancer. Compte tenu de la forte inflation depuis 2022, le coût de cette opération a sensiblement augmenté. Les services de l’État ont examiné différentes solutions techniques qui permettent de conserver les fonctionnalités, tout en restant dans l’enveloppe globale de 136 millions d’euros, inscrite dans le volet mobilités du CPER 2023-2027.
    L’aménagement provisoire proposé consiste à raccorder la section à deux fois deux voies au carrefour giratoire existant de Chasseneuil, en conservant une section de transition à deux voies et en différant la réalisation de l’aire de repos de Nieuil. Cette solution provisoire a l’avantage de respecter le montant inscrit au CPER et de pouvoir évoluer ensuite vers une mise à deux fois deux voies complète, avec dénivellation du carrefour de Chasseneuil.
    Cette phase finale s’inscrira soit dans le cadre du prochain CPER, soit par un redéploiement financier par le biais d’un avenant au CPER actuel. Pour cela, une signature des cofinanceurs est indispensable.
    L’État est prêt à lancer ces travaux dans les meilleurs délais, malgré les fortes contraintes budgétaires actuelles. Toutefois, la condition au lancement des travaux est la signature par l’ensemble des cofinanceurs de l’avenant à la convention financière, en cohérence avec le montant inscrit au volet mobilités du CPER.

    M. le président

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    La parole est à Mme Caroline Colombier.

    Mme Caroline Colombier

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    Les gouvernements successifs n’ont cessé de repousser les demandes légitimes des Charentais. Je pourrais évoquer la route départementale 10, avec la déviation entre Hiersac et Moulidar, qui est attendue depuis vingt ans.
    Tenez vos promesses, car à force d’oublier la Charente, c’est la confiance des citoyens que vous fracturez. Et aucune déviation ne pourra la contourner !

    Zones à faibles émissions mobilité

    M. le président

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    La parole est à M. Gérard Leseul, pour exposer sa question, no 307, relative aux zones à faibles émissions.

    M. Gérard Leseul

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    Ma question porte sur les zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m) et les mesures d’accompagnement qui ont été prévues pour permettre leur acceptation.
    L’adoption, par la commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi de simplification de la vie économique, d’un amendement visant à supprimer les ZFE-m, est la preuve, s’il en faut, que les gouvernements successifs n’ont pas prévu de mesures d’accompagnement et de pédagogie.
    Dès l’adoption de la loi d’orientation des mobilités, dite loi LOM, et de la loi « climat et résilience », ainsi que l’annonce de la création de plus d’une trentaine de ZFE-m, de très nombreuses questions ont été posées. Elles portaient tant sur les moyens pour obtenir l’adhésion des personnes touchées, que sur les mesures d’accompagnement des particuliers et des professionnels à prévoir.
    Face à ces interrogations, j’ai mené avec Bruno Millienne, à partir de juillet 2022, une mission flash visant à faire émerger des recommandations et des bonnes pratiques, afin d’accompagner au mieux les personnes concernées par une ZFE et de favoriser l’acceptation sociale de ce dispositif d’amélioration de la qualité de l’air sur le territoire.
    Totalement opposés à l’idée d’une écologie de l’exclusion, tout en souhaitant lutter efficacement contre la pollution de l’air dans les zones urbaines, nous avons présenté des propositions concrètes pour améliorer le dispositif, et le rendre plus progressif et acceptable.
    D’abord, nous proposions de renforcer l’information et la communication sur les ZFE et leur effet sur la qualité de l’air. Pour accepter de modifier ses mobilités individuelles ou familiales, il est essentiel de comprendre l’intérêt et l’impact de ces mesures.
    Ensuite, nous appelions à une refonte des Crit’Air et à une exemption des Crit’Air 2N. Nous proposions d’introduire de l’agilité et de la souplesse dans l’application de ces mesures avec, notamment, un retour à l’usage. En effet, l’usage occasionnel doit être possible pour tous et pour tout type de voiture, afin de garantir à chacun une liberté d’accéder à l’ensemble des services et des loisirs qui se trouvent dans les principales aires urbaines. Nous avons introduit l’idée du pass pour vingt-quatre passages. Plusieurs collectivités, comme la métropole Rouen Normandie, se sont saisies de cette proposition.
    Nous suggérions aussi d’accélérer le déploiement des mobilités alternatives à la voiture dans les territoires touchés. Là encore, comment demander à des usagers de laisser leur voiture au garage, si aucune solution alternative n’existe –⁠ je pense aux transports en commun comme les services express régionaux métropolitains ?
    De plus, nous proposions de mieux cibler les aides à l’acquisition d’un véhicule plus propre, afin de passer d’une logique d’incitation à une logique de solidarité. Pour éviter une exclusion sociale des centres-villes, il est essentiel d’accompagner spécifiquement les ménages modestes. Le leasing social que nous avions réclamé est une première réponse, encore très insuffisante en volume, pour relever le défi du verdissement de notre parc.
    Nous conseillions d’améliorer l’accompagnement des ménages dans le changement de leur véhicule, avec la mise en place d’un guichet unique des aides nationales et locales, ainsi qu’avec l’élargissement du prêt à taux zéro garanti par l’État, notamment à destination des personnes qui bénéficient d’un accompagnement social auprès d’un réseau qualifié.
    Enfin, nous proposions d’étendre le principe de la ZFE aux zones portuaires et industrielles, afin que l’ensemble de nos concitoyens comprennent l’utilité de réduire nos émissions.
    Près de deux ans après ce rapport, après le dépôt d’une proposition de loi et un discours du ministre Béchu pour saluer la pertinence des propositions avancées, rien n’a été fait malgré les annonces. Face à cet échec grave et cuisant du gouvernement, monsieur le ministre, qu’allez-vous faire ?

    M. le président

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    M. le ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation va commencer par vous répondre.

    M. Gérard Leseul

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    Je le souhaite !

    M. François Rebsamen, ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation

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    Je vais m’efforcer de le faire sur un sujet que je connais bien. La semaine dernière, lors de l’examen en commission du projet de loi pour la simplification de la vie économique, les députés ont voté la suppression des ZFE. S’il est confirmé la semaine prochaine, en séance publique, ce vote actera la suppression pure et simple de cette mesure.
    Je le regrette, et vous aussi certainement, car la pollution de l’air a une incidence très grave, parfois mortelle, sur la santé des Français. Elle est responsable de 48 000 décès précoces chaque année, de pathologies cardiaques et respiratoires, ainsi que d’asthme grave chez les enfants.
    Je maintiens donc qu’il est indispensable d’agir pour réduire la pollution de l’air, tout en évitant de pénaliser ceux qui, faute de moyens, n’ont d’autre choix que de recourir à des véhicules polluants ou, en tout cas, définis comme tels. C’est là tout l’équilibre que nous devons trouver.
    Permettez-moi de rappeler que les ZFE ne concernent que les grandes agglomérations où des alternatives de transport existent. Seulement 10 % du parc automobile est concerné par l’interdiction des Crit’Air 3 et 4. Ces véhicules anciens se concentrent dans des zones rurales ou périurbaines peu affectées par les ZFE. Je rappelle également qu’il existe des aides de l’État à l’acquisition de véhicules propres.
    Les ZFE des métropoles de Paris et de Lyon, par exemple, fonctionnent bien. Les deux seules agglomérations qui sont tenues d’interdire les véhicules de plus de quinze ans sont celles de Lille et de Lyon, du fait de leur niveau élevé de pollution.
    Je suis favorable à une mise en œuvre pratique et progressive du dispositif, qui tienne compte des contraintes locales et qui garantisse des alternatives abordables. Nous nous rejoignons sur ce point.
    À l’époque, le ministre, Christophe Béchu, avait répondu favorablement à une demande de la métropole de Rouen. Il faut que les collectivités puissent adapter un tel dispositif, en prévoyant notamment des dérogations pour certaines professions. C’est ce que nous avons fait à Dijon pour les commerçants et les artisans, ainsi que pour certaines catégories sociales.
    Le gouvernement veille à ce que les élus puissent utiliser toute la flexibilité que prévoit la loi, afin que ceux qui n’ont pas de véhicule adapté et ne peuvent se passer de leur véhicule actuel continuent à se déplacer et bénéficient d’une aide pour changer de véhicule.

    M. le président

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    Monsieur Leseul, en un mot s’il vous plaît !

    M. Gérard Leseul

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    Vos réponses sont très insuffisantes. Je pense que nous ne sommes pas sortis d’affaire avec les ZFE.

    Zones à faibles émissions

    M. le président

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    La parole est à M. Romain Daubié, pour exposer sa question, no 276, relative aux zones à faibles émissions.

    M. Romain Daubié

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    Ma question porte sur les zones à faibles émissions (ZFE). La loi du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités, dite LOM, ainsi que la loi « climat et résilience » de 2021 ont permis la création de ces ZFE pour lutter contre la pollution de l’air.
    Je ne nie pas le réchauffement climatique et je ne suis pas non plus de ceux qui nient l’influence de la pollution de l’air sur la santé publique. Néanmoins, force est de constater qu’il existe trois grands problèmes : la complexité administrative, les délais et les critères choisis pour autoriser ou exclure certains véhicules.
    Le calendrier est beaucoup trop rapide. Depuis 2019, de nombreuses choses ont changé, que cela soit la situation économique de la zone euro ou le contexte international. L’adaptation à ce nouveau contexte n’est pas un renoncement, mais une forme de d’intelligence.
    Les critères d’autorisation et d’exclusion, hautement contestables, ne sont basés que sur le type de motorisation et l’année de fabrication. Permettez-moi de vous donner quelques exemples pour illustrer les incohérences que l’on peut constater.
    Une Peugeot 207 diesel HDI de 92 chevaux, vendue à partir de la fin de l’année 2009, est conforme à la norme Euro 5. Pourtant, elle correspond au Crit’Air 3, car elle était vendue avant 2011. Elle ne peut donc pas entrer dans la métropole lyonnaise. De même, une BMW X3 3 litres de 2022 est Crit’Air 1, alors qu’elle rejette 120 grammes de CO? par kilomètre, mais une Citroen C1 essence 1 litre de 2005 est interdite à Lyon, car elle est Crit’Air 3, tout en ne rejetant que 109 grammes de CO? par kilomètre. Je pense aussi à une Peugeot 206 HDI de 2001 qui ne rejette que 112 grammes de CO? par kilomètre. Où est la logique dans ce raisonnement ? Une réforme des critères semble indispensable.
    En outre, le contrôle technique a été renforcé par rapport aux normes de pollution en 2019. Il devrait permettre aux personnes qui entretiennent correctement leur voiture de continuer à l’utiliser. L’interdiction de circulation des véhicules en bon état, conformes au contrôle technique antipollution, doit être remise en question.
    D’un point de vue social, ces ZFE sont vécues par nombre d’habitants des zones rurales ou périurbaines comme des zones d’exclusion, dans la mesure où il n’y a pas d’alternatives en transports en commun, ou pas d’alternatives effectives raisonnables.
    Pour ne parler que des secteurs du Val-de-Saône, de la Dombes, de la Côtière et de la Plaine de l’Ain, dont j’ai l’immense honneur d’être le représentant, nombre d’habitants de mon secteur n’ont pas d’autre choix que de se rendre dans la métropole lyonnaise pour travailler, se faire soigner, passer des examens, suivre des études ou accéder à la vie culturelle.
    En conséquence, les automobilistes aux budgets les plus contraints s’apprêtent à subir une double peine : être exclus de la zone et se voir condamnés à régler une contravention. Or, quand vous travaillez en trois huit dans une zone industrielle, vous n’avez pas le choix ; quand vous devez passer un concours ou un examen tôt le matin dans la métropole lyonnaise, vous n’avez pas le choix ; quand vous voulez vous ouvrir à la culture et assister à un spectacle qui se termine à 23 heures ou plus, vous n’avez pas le choix ; quand vous devez accéder à un hôpital en pleine nuit, vous n’avez pas le choix. Prendre la voiture est une nécessité, non un caprice individuel.
    Enfin, les ZFE sont l’occasion de telles complexités administratives que personne n’y comprend plus rien. Il arrive qu’on se retrouve devant un panneau indiquant l’entrée d’une ZFE alors qu’on est engagé dans une route à deux fois deux voies, sans possibilité de faire demi-tour –⁠ je pourrais vous citer plusieurs exemples de ce type.

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation –⁠ à qui il reste deux minutes pour répondre.

    M. François Rebsamen, ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation

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    Je me permets de le redire, monsieur le député : quand les questions sont trop longues, il nous est difficile de répondre à l’essentiel.
    À titre personnel, je suis favorable à un dispositif qui soit adapté aux réalités locales et facilement déclinable dans les territoires. C’est la position que je défends au sein du gouvernement, et je crois que je suis entendu. Nous devons assouplir le fonctionnement des ZFE, j’en suis persuadé, et il faut que ce mécanisme d’assouplissement soit à la main des maires.
    De la complexité administrative, oui, il y en a, et il convient d’y remédier. Le calendrier, les critères d’autorisation des véhicules doivent dépendre des maires, et d’eux seuls. Ils sont tout à fait conscients des enjeux liés à la qualité de l’air parce que leurs concitoyens peuvent précisément leur reprocher sa mauvaise qualité. Ils savent très bien comment y répondre. Vous avez raison : l’exclusion actuelle de certains véhicules est parfaitement incompréhensible, parce qu’elle ne correspond à rien dans la réalité.
    Dans le temps qui me reste, je voudrais quand même rappeler que des aides ont été instaurées pour permettre l’acquisition de véhicules propres –⁠ je l’avais déjà signalé au député Leseul : le fonds Vert, qui vient en soutien des collectivités, les aides à l’électrification des véhicules, la prime au rétrofit, le bonus écologique, le leasing, le microcrédit « véhicules propres » garanti par l’État à hauteur de 50 %, etc. Des aides peuvent en outre être octroyées localement, par les collectivités territoriales, comme le fait ma ville de Dijon.
    Enfin, avec mes collègues Agnès Pannier-Runacher et Catherine Vautrin, nous avons décidé de nous réunir prochainement avec des élus pour parler de la qualité de l’air. L’idée est simple : il s’agit de partir des problèmes de santé publique que pose la pollution de l’air et de réunir les élus des territoires où la qualité de l’air est significativement en deçà des recommandations de l’OMS, l’Organisation mondiale de la santé, de manière à faire des propositions concrètes en vue d’améliorer les dispositifs existants.
    Mon souhait, je le répète, est d’aboutir à un dispositif pragmatique, qui soit accepté par les élus et qui prenne en considération la spécificité de chaque territoire. Vous avez par exemple évoqué le cas de la métropole de Lyon : je la connais bien et j’estime que vous avez eu tout à fait raison de le faire.

    Filière du transport maritime à propulsion vélique

    M. le président

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    La parole est à Mme Agnès Firmin Le Bodo, pour exposer sa question, no 290, relative à la filière du transport maritime à propulsion vélique.

    Mme Agnès Firmin Le Bodo

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    Monsieur le ministre, je souhaite appeler votre attention sur les difficultés de la filière du transport vélique –⁠ mon collègue Jimmy Pahun est à mes côtés pour s’associer à ma question. En effet, la transition écologique impose de repenser le modèle de transport maritime –⁠ je salue d’ailleurs la volonté des armateurs d’avancer rapidement dans cette direction. Or le transport vélique représente une solution innovante et vertueuse.
    L’entreprise Towt –⁠ TransOceanic Wind Transport –, basée au Havre, est pionnière en matière de transport maritime décarboné. Elle dispose de deux navires déjà en service, Anemos et Artémis, et un troisième est en construction, Atlantis. Elle a récemment franchi une nouvelle étape dans son développement en donnant les noms de six voiliers cargos, commandés aux chantiers bretons Piriou, qui viendront compléter sa flotte. D’ici à la fin de l’année 2027, ce sont ainsi huit navires qui assureront à grande échelle un transport maritime avec zéro émission. Cette ambition se concrétisera dès mars 2026 avec l’arrivée du premier des six nouveaux voiliers cargos, suivie d’un lancement tous les trois mois. Cette cadence permettra à Towt de densifier ses routes et d’augmenter la fréquence de ses traversées afin de répondre à la demande croissante.
    Pourtant, ce dynamisme est menacé. La suppression dans le budget pour 2025 de l’exonération de charges sociales dont bénéficiait la filière entraîne une hausse soudaine, de 25 %, des coûts d’exploitation, ce qui fragilise l’équilibre économique de l’entreprise et met en péril tout le secteur du transport à la voile en France. Le responsable de Towt, Guillaume Le Grand, a donné l’alerte il y a quelques jours en annonçant qu’il serait contraint d’abandonner le pavillon français pour assurer la survie de son entreprise.
    Towt est un armateur français, qui construit en France et transporte des produits français –⁠ je salue les entreprises françaises qui lui font confiance, en ayant la volonté de décarboner leur transport. Nous ne pouvons nous résoudre à ce qu’une entreprise innovante et respectueuse de l’environnement envisage de naviguer sous un autre pavillon faute d’un cadre fiscal et social adapté.
    Monsieur le ministre, face à cette situation critique, quelles actions entendez-vous mener pour accompagner et soutenir ce secteur stratégique afin d’éviter que ces entreprises ne soient contraintes de se délocaliser et que la France ne perde son leadership dans le domaine du transport maritime durable ?

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation.

    M. François Rebsamen, ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation

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    Madame la députée, je réponds à votre question au nom de ma collègue Agnès Pannier-Runacher, qui m’assure qu’elle a pleinement conscience de l’importance de ce dossier et qui soutient bien évidemment la décarbonation du transport maritime et, plus particulièrement, le transport vélique. C’est pourquoi elle souhaite, dans le prochain budget, dont les discussions préparatoires démarrent dès maintenant, remettre à plat la discussion sur le coup de rabot –⁠ pour reprendre la formule convenue – décidé à l’automne sur les exonérations dont bénéficient les entreprises d’armement maritime, en particulier la filière vélique.
    Ce coup de rabot a en effet de graves conséquences sur l’emploi des marins français. La ministre a reçu plusieurs représentants du secteur, qui l’ont alertée sur ce point, ainsi que sur les risques de dépavillonnement de plusieurs acteurs en raison des hausses de charges non anticipées et qui mettent à mal leur activité. Il n’est évidemment pas acceptable qu’une réforme coûte beaucoup plus que ce qu’elle rapporte et touche, au-delà des armateurs, les marins.
    En outre, la ministre s’est assurée que l’entreprise ne rencontrait pas de difficultés dans la constitution de son dossier de demande de certificats d’économies d’énergie –⁠ il s’agit en effet d’une porte de sortie. Ces nouveaux navires véliques, qui se substituent à des navires standards, c’est-à-dire fonctionnant sans gréement et uniquement à propulsion thermique, sur des trajets entre ports français, peuvent demander de tels certificats. Pour l’entreprise Towt, cela devrait représenter une aide de plusieurs centaines de milliers d’euros pour chacun des navires qu’elle exploite et lui permettre de résoudre le problème actuel.

    M. le président

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    La parole est à Mme Agnès Firmin Le Bodo.

    Mme Agnès Firmin Le Bodo

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    Monsieur le ministre, je vous remercie pour votre réponse ainsi que pour l’engagement de Mme la ministre dans le dossier du transport vélique.
    La difficulté réside dans le caractère extrêmement soudain de la mesure imposée à une entreprise innovante en construction. Cette entreprise commence son activité, elle fait du 100 % made in France. On risque de la mettre à mal.
    Je remercie aussi Mme la ministre de sa réponse concernant les certificats d’énergie, question que l’entreprise avait soulevée. Néanmoins, force est de constater que si la volonté est là, dans les faits, il y a encore du travail. Je prends bonne note de l’engagement de la ministre à aller vite. Nous verrons avec l’entreprise comment faire pour que celui-ci se concrétise.
    Je le répète, l’enjeu est important, et nous devons le relever ce défi collectivement. Il s’agit d’un secteur innovant, qui emploie des marins français. Les jeunes formés à l’École nationale supérieure maritime (ENSM) veulent travailler sur des bateaux français, ils doivent pouvoir le faire. Cette entreprise le propose : accompagnons-la !

    Hôpital de Juvisy-sur-Orge

    M. le président

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    La parole est à Mme Claire Lejeune, pour exposer sa question, no 293, relative à l’hôpital de Juvisy-sur-Orge.

    Mme Claire Lejeune

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    Monsieur le ministre, je vous interroge en tant que députée de la septième circonscription de l’Essonne.
    L’Essonne est un département de déserts médicaux, dont les habitants pâtissent d’une dégradation considérable de l’accès aux soins et cela, notamment, en raison du sort fait à l’hôpital de Juvisy-sur-Orge.
    En 2008, la fermeture des services de chirurgie et de la maternité de Juvisy est décidée –⁠ maternité où étaient nés tous les enfants de la ville et du territoire, à commencer par moi, et où 70 % des femmes de Grigny, ville la plus pauvre de France métropolitaine, accouchaient. Le grignotage de l’offre de soins s’est poursuivi jusqu’à la fermeture totale en 2024 des services maintenus à l’hôpital. Cette fermeture a été décidée alors que l’hôpital de Juvisy jouait un rôle social et sanitaire majeur dans le territoire et qu’il aurait pu, si on l’avait voulu et qu’on avait consenti les investissements nécessaires, être réhabilité.
    Les patients de la circonscription sont désormais dirigés vers l’hôpital de Saclay, pourtant situé à plus de trente-cinq minutes de route –⁠ et encore faut-il que la circulation soit fluide ! Il y a alors une véritable perte de chance, notamment pour les cas les plus graves. Cela provoque aussi une surmobilisation des équipes de pompiers, le temps de prise en charge étant considérablement allongé.
    Le 20 mars, sur le parvis de Saclay, les syndicats ont dénoncé l’envers du décor de cet hôpital qu’on a voulu « high-tech ». Ils ont dénoncé les conditions de travail du personnel soignant et ont même évoqué une mise en danger des patients.
    En raison de la saturation de l’hôpital de Saclay, les patients de nos territoires sont redirigés vers les urgences des hôpitaux de Longjumeau et de Villeneuve-Saint-Georges, qui sont elles-mêmes saturées. Deux jeunes femmes de 26 ans et 20 ans, dont l’une était juvisienne, y sont décédées en ce début d’année, dans des circonstances qui peuvent laisser à penser à des morts dites évitables.
    La réouverture du site de Juvisy-sur-Orge, cédé au groupe privé Clariane, qui a entrepris des travaux, est prévue pour le second trimestre de 2027 –⁠ mais elle ne remplacera pas un hôpital public de plein exercice de proximité. Le centre médical d’appui ouvert avec plusieurs mois de retard n’est qu’un palliatif très insuffisant.
    Tout cela traduit de la part des pouvoirs publics à tout le moins un manque criant d’anticipation et un manque tout aussi criant de moyens pour ce qui aurait dû pourtant être la priorité numéro un. Qu’est-ce qui a conduit à une telle situation ? Que comptez-vous faire pour que les habitants de la septième circonscription de l’Essonne aient de nouveau accès à des soins de qualité et à un service public digne de ce nom à Juvisy-sur-Orge ?

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation, qui a accepté de représenter Mme la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles.

    M. François Rebsamen, ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation

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    Cette question permet de faire un point sur la situation de l’hôpital de Juvisy-sur-Orge.
    Le nord de l’Essonne connaît depuis juillet dernier une réorganisation de l’offre de soins hospitalière. Il a d’abord bénéficié de l’ouverture, sur le plateau de Saclay, dans les délais prévus –⁠ ce qui est à souligner –, d’un nouvel hôpital afin de répondre au besoin d’une prise en charge d’excellence et d’innovation dans ce territoire d’avenir. Cela représente un investissement public de 422 millions d’euros.
    La réorganisation de l’offre de soins hospitalière s’appuie sur deux autres piliers : un hôpital de proximité à Longjumeau, avec des urgences, et une offre de SMR –⁠ service médical rendu – privé, comportant 220 lits, auquel seront adossées des urgences publiques et une structure mobile d’urgence et de réanimation (Smur), à Juvisy.
    Le groupe Clariane a indiqué que le projet de Juvisy connaissait du retard. Pour réduire les délais de travaux et éviter que les patients ne se rendent aux urgences dans un chantier en cours, l’agence régionale de santé (ARS) d’Île-de-France a pris la décision de transférer momentanément les urgences à Longjumeau. À ce stade, Clariane a indiqué que la fin des travaux et la réouverture des urgences à Juvisy étaient prévues pour la fin de l’année 2026.
    Parce qu’il fallait répondre aux besoins de la population, notamment de prise en charge en pédiatrie, durant ces trois années de fermeture, un centre médical d’appui a ouvert le 14 février 2025 dans le centre-ville de Juvisy, grâce, il faut le reconnaître, à la mobilisation de médecins libéraux et hospitaliers. Ce sont en moyenne quatre-vingts patients qui y sont pris en charge chaque jour.
    Avant la réorganisation de l’offre de soins, les patients de la circonscription se rendaient pour 75 % d’entre eux dans les urgences de Juvisy, de Corbeil-Essonnes et de Longjumeau. Depuis la fermeture temporaire des urgences à Juvisy, ils se rendent dans la même proportion à Corbeil-Essonnes, à Longjumeau, à Saclay et à Villeneuve-Saint-Georges –⁠ les urgences de Corbeil-Essonnes connaissant la hausse de fréquentation la plus notable. Pour anticiper cela, une refonte de la sectorisation du Samu a permis en juin de diminuer le nombre de patients régulés vers Corbeil.
    Enfin, concernant le temps de dépose des patients, vous avez évoqué les difficultés rencontrées aux urgences de Paris-Saclay par le service départemental d’incendie et de secours (Sdis) de l’Essonne ainsi que par les transporteurs sanitaires. Si cela était vrai à l’ouverture des urgences, la mobilisation sans faille des soignants, que je salue, a permis de réduire ce temps au point qu’il a rejoint la moyenne des urgences du département.
    Je reste très attentif à la réussite de cette réorganisation de l’offre de soins hospitalière dans le Nord-Essonne ; l’agence régionale de santé est d’ailleurs mobilisée pour, de concert avec les soignants, anticiper au mieux les besoins, travailler à des solutions concrètes face aux imprévus et progresser au plus vite vers l’organisation cible des soins hospitaliers.

    M. le président

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    La parole est à Mme Claire Lejeune.

    Mme Claire Lejeune

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    Merci de vos réponses. Paris-Saclay a en effet connu de grandes difficultés à son ouverture et, cet été, ce fut assez catastrophique. La situation sur laquelle je vous ai interrogé reste actuelle : avec l’accumulation des retards à l’hôpital de Juvisy-sur-Orge et la situation délétère de celui de Longjumeau, les habitants ne disposent toujours pas d’un accès à la santé digne de ce nom –⁠ d’où un système de santé à deux vitesses, puisque ceux qui peuvent se le permettre recourent à des cliniques privées.

    Suspension et reprise de la séance

    M. le président

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    En attendant M. le ministre chargé de l’industrie, qui doit prendre la suite, la séance est suspendue.

    (La séance, suspendue à dix heures, est reprise à dix heures cinq.)

    M. le président

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    La séance est reprise.

    M. le président

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    Je demanderai au gouvernement de veiller dorénavant à ce que la coordination soit telle que l’un de ses membres se trouve en permanence dans notre hémicycle lors des séances de questions orales sans débat, dont le timing est extrêmement serré. Pour m’être naguère livré à ce genre d’exercice, je sais que ce n’est pas facile, mais il faut le faire : la représentation nationale l’exige.

    Extension de la prime Ségur aux épiceries solidaires

    M. le président

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    La parole est à M. Rodrigo Arenas, pour exposer sa question, no 295, relative à l’extension de la prime Ségur aux épiceries solidaires.

    M. Rodrigo Arenas

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    En vertu de l’accord du 4 juin 2024, les associations d’aide alimentaire doivent verser la prime Ségur à leur personnel depuis le 1er janvier 2024 ou le 7 août 2024, selon la convention collective dont elles relèvent. Le financement de cette mesure n’étant opposable que pour les établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESSMS), aucune compensation à titre obligatoire n’est prévue ; cette décision menace directement les épiceries solidaires, dont bon nombre se trouvent dans l’incapacité de prélever le montant de ces primes sur leurs fonds propres. Dans le réseau Andès, pas moins de 200 épiceries vont devoir appliquer la mesure de manière rétroactive, au moins à partir d’août 2024, ce qu’elles n’ont pu anticiper, donc prévoir budgétairement.
    Ce problème survient dans un contexte de fragilisation des financements publics, notamment ceux des collectivités, dont les épiceries solidaires dépendent. Dans ma circonscription, j’ai déjà été alerté par des associations comme Solidaya, qui propose à des personnes en situation de grande précarité de faire leurs courses à des prix très réduits. Inutile de vous rappeler combien ces structures sont essentielles : si, ne pouvant assumer la charge de cette prime, au demeurant légitime, elles venaient à fermer, des familles ne parviendraient plus à nourrir correctement leurs enfants, et des personnes âgées ne mangeraient plus à leur faim.
    Le financement de l’accord, en ce qui concerne les associations d’aide alimentaire, étant actuellement soumis à l’arbitrage du gouvernement, je me permets de vous demander quand et comment celui-ci répondra. La survie de très nombreuses épiceries sociales et solidaires est en jeu.

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre chargé de l’industrie et de l’énergie.

    M. Marc Ferracci, ministre chargé de l’industrie et de l’énergie

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    Monsieur le président, monsieur le député, je vous prie de bien vouloir accepter mes excuses pour ce léger retard dont je ne suis pas coutumier.
    L’attractivité des secteurs sanitaire, social et médico-social constituant l’une des priorités de la feuille de route gouvernementale, les professionnels de ces secteurs ont bénéficié, dans le cadre des dispositifs issus du Ségur de la santé et de la mission Laforcade, de revalorisations étendues, à la suite de la conférence des métiers sociaux du 18 février 2022, à 200 000 professionnels de la filière socio-éducative.
    L’accord du 4 juin 2024 prévoit quant à lui l’extension du Ségur à l’ensemble des personnels de la branche associative sanitaire, sociale et médico-sociale (Bass). Les associations d’aide alimentaire sont concernées, soit qu’elles relèvent d’une convention collective nationale de la Bass, soit que leur code NAF les fasse dépendre de cette branche, auquel cas l’accord s’applique à compter du 7 août 2024. Ces avancées ont été le fruit de travaux concertés, impliquant étroitement les acteurs, mais le gouvernement a pleinement conscience des difficultés de certains employeurs à les financer ; il soutient donc ces structures en augmentant de 2 millions d’euros, et pour la deuxième année consécutive, le budget consacré à l’achat de denrées alimentaires.

    M. le président

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    La parole est à M. Rodrigo Arenas.

    M. Rodrigo Arenas

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    Votre prédécesseur à ce banc expliquait tout à l’heure que le gouvernement réarbitrait certains aménagements, entre autres les zones à faibles émissions. Je vous invite à une réflexion analogue, en matière budgétaire, au sujet des réseaux d’épiceries sociales et solidaires à but non lucratif, qui assurent en matière alimentaire une sorte de délégation de service public et dont la disparition, je le répète, plongerait beaucoup de nos concitoyens dans la plus grande précarité, d’autant qu’elles procurent aussi une aide à l’embauche. Mettre en péril leurs salariés, même à temps partiel, compromettrait leur activité dans nos territoires.
    Je suis député de Paris, mais la petite musique qui consiste à opposer la capitale au reste du pays est fausse : il s’y trouve des poches de grande pauvreté, extrêmement dépendantes de ces structures. Écoutons donc plutôt l’intérêt général, le bien commun, l’égalité républicaine face à la précarité !

    Microcrèches

    M. le président

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    La parole est à Mme Justine Gruet, pour exposer sa question, no 280, relative aux microcrèches.

    Mme Justine Gruet

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    Ma question, adressée à Mme la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles, a trait aux vives inquiétudes que le décret prévu pour le 1er janvier 2026 suscite chez les gestionnaires de microcrèches.
    Une fillette de onze mois étant morte, en juin 2022, au sein de l’une de ces structures, le ministre de l’époque avait saisi l’Inspection générale des affaires sociales (Igas). Les réactions politiques à l’émotion soulevée par certains événements ne sont généralement pas les bonnes, mais il a été décidé d’aligner les règles des microcrèches sur celles des crèches publiques.
    Prenons un exemple jurassien : le 6 mars, j’ai visité la microcrèche de Saint-Aubin sur l’invitation de la gestionnaire, que je tiens à remercier pour la qualité de l’accueil et de l’organisation, médités des années avant l’ouverture de cette crèche. Quels sont les objectifs d’une structure concernant la petite enfance ? Permettre aux parents de travailler, aux enfants de découvrir la vie en collectivité et de connaître le meilleur développement psychomoteur possible ; dans nos territoires ruraux, où les trajets peuvent être longs, il est nécessaire que certains accueils permettent des horaires atypiques. Loin de moi l’idée d’opposer les modes de garde –⁠ chacun présente des avantages et des inconvénients –, mais votre réaction risque de déstabiliser tout le secteur de la petite enfance.
    Le rapport sur lequel vous fondez ce futur décret n’indique nulle part que l’accueil au sein des microcrèches soit de moins bonne qualité. En revanche, il soulève plusieurs interrogations.
    Premièrement, vous souhaitez que le soin d’accueillir seule les enfants, ce qui se produit en cas d’ouverture ou fermeture décalée, soit réservé à l’infirmière ou à l’éducatrice de jeunes enfants. Quel manque de reconnaissance envers les titulaires d’un certificat d’aptitude professionnelle (CAP) petite enfance ! Pour celles-ci, la montée en compétences deviendra en outre impossible, puisqu’elle suppose un partage d’expérience ; or le personnel plus diplômé, chargé des horaires atypiques, sera d’autant moins à leurs côtés dans les temps forts de la journée.
    Deuxièmement, un rapport concernant le mode d’exercice des assistantes maternelles devant être remis d’ici à un mois, je m’interroge sur le fait qu’une assistante agréée, qui ne compte que 120 heures de formation, soit réputée plus apte à accueillir seule des enfants que la détentrice d’un CAP, formée durant dix-huit mois en moyenne. Il importe de ne pas tergiverser, car la sécurité de nos enfants ne saurait avoir de prix. Alors que la potentielle financiarisation de ce secteur fait courir des risques de mauvais encadrement, ne serait-il pas plus judicieux de renforcer les contrôles ?
    La Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) a émis un avis défavorable sur ce projet de décret : prenez le temps d’écouter les acteurs de terrain, ne généralisez pas un unique mode de garde alors que les parents ont besoin d’une offre plus individualisée.
    Seriez-vous prêt à revoir votre position ? Serait-il possible d’intégrer plus de pratique au cursus du CAP petite enfance afin de permettre aux titulaires de ce diplôme d’exercer seuls sur des temps courts d’ouverture et de fermeture ? Pourriez-vous attendre la parution du rapport de l’Igas concernant les assistantes maternelles ? Enfin, serait-il envisageable de renforcer le contrôle des micro-crèches par les services de la protection maternelle et infantile (PMI) à l’ouverture et de manière inopinée ensuite, plutôt que de repenser l’organisation générale de toutes les structures ?

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre chargé de l’industrie et de l’énergie.

    M. Marc Ferracci, ministre chargé de l’industrie et de l’énergie

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    Le décret a été signé et sera publié dans les jours à venir. Il a fait l’objet de nombreuses concertations avec les fédérations professionnelles et nous avons fixé l’entrée en vigueur au 1er septembre 2026. Ce décret prévoit d’aligner les normes d’encadrement des microcrèches sur celles qui s’appliquent aux crèches classiques –⁠ vous avez bien décrit ces objectifs. Les enfants accueillis étant les mêmes, il n’est en effet pas envisageable de maintenir une différence de qualification des professionnels entre les microcrèches et les crèches classiques. À compter du 1er septembre 2026, 40 % des personnels des microcrèches devront donc être titulaires d’un diplôme de catégorie 1, ce qui inclut notamment le diplôme d’État d’auxiliaire de puériculture (DEAP) et le diplôme d’État d’éducateur de jeunes enfants (Deeje).
    Toutefois, certaines spécificités seront conservées pour les microcrèches : un professionnel pourra accueillir seul jusqu’à trois enfants dès lors qu’il est titulaire d’une qualification de catégorie 1. La direction des microcrèches sera limitée à deux structures pour un agent. Un agent déjà en poste au 1er septembre 2026 pourra continuer à exercer des fonctions de direction même s’il ne dispose pas d’un diplôme de catégorie 1, en s’assurant du concours régulier d’une personne ayant la qualification requise. Un auxiliaire de puériculture ayant trois ans d’expérience pourra également occuper ces fonctions.
    Un arrêté définira la répartition des 0,5 équivalent temps plein (ETP) par structure entre le temps de direction et le temps d’encadrement. Tous les titulaires d’un CAP présents dans les crèches n’auront pas à acquérir un diplôme de catégorie 1 ; ils pourront continuer d’exercer. Nous souhaitons reconnaître davantage l’engagement et l’expérience des salariés titulaires d’un CAP. C’est pourquoi nous créons les conditions d’une montée en compétences.
    Le salarié qui souhaiterait acquérir le diplôme d’État d’auxiliaire de puériculture pourra obtenir une validation des acquis de l’expérience (VAE) partielle s’il n’est pas en mesure de valider le bloc de compétences sanitaires. Il disposera dans un temps défini de la possibilité de compléter cette VAE partielle par l’acquisition d’un module sanitaire qui sera proposé par les instituts de formation d’auxiliaire de puériculture (Ifap).
    Pour le salarié qui ne souhaiterait pas se tourner vers l’acquisition du diplôme d’État d’auxiliaire de puériculture, une certification de niveau 4, reconnue catégorie 1, sera créée d’ici à septembre 2025. Elle sera accessible par voie de formation initiale ou par VAE. Les premiers jurys se tiendront au premier trimestre 2026. Il n’est évidemment pas question de licencier les salariés, mais bien de reconnaître les compétences acquises par ces biais.
    Vous demandez un renforcement des contrôles. Je veux vous dire que nous le ferons par décret. Les structures seront contrôlées tous les cinq ans au minimum s’il n’y a pas de changement. Enfin, concernant l’accueil individuel des enfants, notamment par les assistantes maternelles, la ministre Catherine Vautrin est en attente de la transmission d’un rapport de l’Igas sur ce sujet. Elle s’engage à étudier les préconisations qui seront formulées par ce rapport.

    M. le président

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    La parole est à Mme Justine Gruet.

    Mme Justine Gruet

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    Je vous remercie pour votre réponse. Nous avons tout intérêt à faire monter les professionnels en compétence, mais en restant raisonnables au vu des coûts –⁠ les détenteurs d’un CAP sont aussi capables d’accompagner les enfants. Je vous remercie de l’intérêt porté à notre démarche : dans nos territoires, les microcrèches ont une importance particulière pour les gens qui travaillent.

    Énergie photovoltaïque

    M. le président

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    La parole est à M. Christophe Bex, pour exposer sa question, no 294, relative à l’énergie photovoltaïque.

    M. Christophe Bex

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    Dans le Volvestre en Haute-Garonne, 150 hectares de terres agricoles sont concernés par des projets agrivoltaïques, dont l’un représente l’équivalent de soixante-dix terrains de foot. Ces projets comportent des risques, tels que la baisse des rendements, la financiarisation des terres, l’absence de partage de la valeur et l’impossibilité du rachat des terres par des agriculteurs.
    Dans la dernière programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), les objectifs de production d’électricité solaire sont fortement réduits pour 2035. Récemment, un arrêté gouvernemental a divisé par trois le tarif de rachat pour les particuliers, ce qui pénalise celles et ceux qui ont fait le choix de produire leur propre énergie. Cette décision bouleverse les modèles économiques construits autour du photovoltaïque résidentiel. Que répondez-vous aux particuliers et aux professionnels de la branche ?
    En faisant reposer plus de la moitié du développement de l’énergie solaire sur de grandes installations, vous priorisez les grands opérateurs et ceux qui peuvent déjà se permettre de financer ce genre de structure. Remettez-vous en question l’affirmation de l’Agence de la transition écologique (Ademe), selon laquelle il est tout à fait possible d’atteindre l’objectif de 100 gigawatts d’électricité solaire en équipant les toitures individuelles, les entrepôts, les friches industrielles et les parkings ? Il suffirait de 3 000 kilomètres carrés –⁠ 0,5 % de la superficie de la France – pour produire autant d’électricité que toutes nos centrales nucléaires.

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre chargé de l’industrie et de l’énergie.

    M. Marc Ferracci, ministre chargé de l’industrie et de l’énergie

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    Je vous remercie d’appeler l’attention du gouvernement sur la filière photovoltaïque, en particulier sur l’arrêté gouvernemental et sur le développement de l’agrivoltaïsme. Tout d’abord, s’agissant du cadre général, l’arrêté modifiant le dispositif de soutien au petit photovoltaïque sur bâtiment, publié il y a quelques jours, vise, pour les particuliers, à recentrer le soutien sur l’autoconsommation, tout en préservant l’ambition de la trajectoire énergétique du gouvernement.
    Je précise que cet arrêté ne vaut que pour l’avenir : les contrats existants ne sont aucunement remis en question –⁠ il est important de le préciser car il peut y avoir des malentendus à ce sujet.
    S’agissant des installations de taille plus importante, le soutien sera recentré sur les plus efficaces économiquement. L’arrêté, qui a été soumis pour avis à la Commission de régulation de l’énergie (CRE) et au Conseil supérieur de l’énergie (CSE), a fait l’objet de nombreux échanges avec les acteurs. Il répond aux préoccupations de la filière –⁠ j’en veux pour preuve les réactions des syndicats professionnels aux modifications opérées à la suite de la consultation.
    L’agrivoltaïsme vise à concilier deux enjeux essentiels pour l’avenir de notre pays : la transition énergétique et la souveraineté agricole et alimentaire. La loi du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables, dite loi Aper, a inscrit pour la première fois dans le code de l’énergie une définition de l’agrivoltaïsme. Le cadre de régulation transparent et équilibré qui s’applique depuis est le résultat d’un long processus de concertation avec les parties concernées : les acteurs du monde agricole, les énergéticiens et les services déconcentrés de l’État.
    L’approche retenue par la loi, et que le gouvernement défend résolument, est fondée sur la confiance dans les acteurs locaux : dans les agriculteurs porteurs de projets, qui sont les plus à même d’identifier les besoins et de concevoir des solutions adaptées aux spécificités locales ; dans les parties prenantes, notamment les commissions départementales de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF), qui réunissent les chambres d’agriculture et les associations ; dans l’innovation technologique qui émergera à partir des différents projets locaux.
    Bien sûr, la confiance n’exclut pas le contrôle. Par ailleurs, nous continuons à travailler sur la question du partage de la valeur avec l’ensemble des parties prenantes sur le territoire.

    M. le président

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    La parole est à M. Christophe Bex.

    M. Christophe Bex

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    Plus de 1 400 projets agrivoltaïques sont sur le bureau du préfet de Haute-Garonne. Les collectifs citoyens, les agriculteurs et les maires dénoncent l’absence d’un cadre clair garantissant une juste répartition de la valeur et la préservation des terres agricoles. L’avis de l’autorité environnementale souligne les pertes irrémédiables de terres cultivables et l’absence d’obligation concrète de remise en état. Votre gouvernement soutiendra-t-il la proposition de loi visant à assurer le développement raisonné et juste de l’agrivoltaïsme de Pascal Lecamp, ou refuse-t-il d’encadrer le développement des installations agrivoltaïques pour garantir une réelle protection des riverains, des terres agricoles et de l’ensemble des acteurs ?

    Répartition du produit de l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux

    M. le président

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    La parole est à M. Philippe Vigier, pour exposer sa question, no 277, relative à la répartition du produit de l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux.

    M. Philippe Vigier

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    En tant que ministre de l’énergie, vous êtes chargé d’un domaine dans lequel nous avons, chacun le sait, des besoins pour faire tourner le pays. Les entreprises et les ménages sont consommateurs d’énergie et les besoins iront grandissant au fil du temps ; il faut y faire face. C’est la raison pour laquelle la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte a instauré la programmation pluriannuelle de l’énergie. La décarbonation est indispensable, d’où la relance du nucléaire et l’accompagnement des énergies renouvelables.
    Dans mon département, que vous connaissez bien, monsieur le ministre, les énergies renouvelables, notamment les éoliennes, ont une longue histoire –⁠ cela dure depuis plus de vingt ans. Ma circonscription compte plus de 200 mâts. Cependant, développer les énergies renouvelables, installer des éoliennes, un parc photovoltaïque et des méthaniseurs –⁠ la méthanisation n’est pas un petit sujet – suppose une acceptation par les populations –⁠ il faut convaincre les élus.
    Pour atteindre l’objectif d’énergies décarbonées fixé par le gouvernement et faire face aux besoins, il faut être au rendez-vous. Nous rencontrons la difficulté suivante : pour les éoliennes installées avant 2019, l’intégralité de l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseau, l’Ifer –⁠ c’est un nom un peu barbare mais qui reflète bien le contenu de cette taxe –, tombe dans les poches des intercommunalités. Pour les installations postérieures à 2019, 20 % de l’Ifer peuvent être attribués aux communes, à condition qu’une délibération en ce sens ait été prise, tandis qu’une partie est attribuée aux départements et une partie aux intercommunalités.
    Nous sommes à un moment majeur : celui du repowering, qui consiste à remplacer des éoliennes qui pouvaient produire 1 ou 2 mégawatts par des éoliennes capables d’en produire 5, 6, 7, bientôt 8. Cela ne se fait pas tout seul : il faut des mâts plus hauts et il faut déplacer l’éolienne –⁠ la nouvelle éolienne n’est pas installée au même endroit que l’ancienne –, donc un nouveau permis de construire.
    Dans mon département, nous avons lancé une charte des énergies renouvelables, que nous avons réactualisée il y a quelques jours avec les services préfectoraux. L’acceptation des élus passe par le fait que la fiscalité revienne à un moment ou à un autre dans les poches des communes. Or le repowering n’est pas considéré comme une nouvelle implantation. La fiscalité reste identique à celle d’avant 2019, ce qui suscite l’incompréhension des élus. Il est important que le gouvernement précise les choses. Avec une seule nouvelle éolienne, on produit autant qu’avec quatre anciennes –⁠ nous devons l’avoir en tête au moment où tout ce qui pouvait être fait en matière d’encerclement des villages et des directives paysagères l’a été. La réponse du gouvernement est très attendue.

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre chargé de l’industrie et de l’énergie.

    M. Marc Ferracci, ministre chargé de l’industrie et de l’énergie

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    Je vous remercie pour votre question au sujet de l’éolien terrestre, en particulier pour l’attention que vous prêtez au renouvellement des installations existantes. Je tiens à vous assurer de l’engagement du gouvernement en faveur de l’éolien, qui est une composante à part entière de notre stratégie de souveraineté énergétique.
    Aujourd’hui, l’éolien terrestre représente 23,5 gigawatts de puissance installée, soit 10 % de notre consommation électrique. La filière connaît un rythme de développement régulier : 1,2 gigawatt de nouvelles capacités ont été raccordées en 2024 et 13,1 gigawatts de projets sont en cours d’instruction. Nous arrivons à un tournant : les premiers parcs, installés il y a une vingtaine d’années, doivent être renouvelés, ce qui offre un potentiel d’amélioration des performances des installations.
    Ce renouvellement, loin d’être un simple remplacement, est une opportunité pour accélérer la transition écologique et pour réduire certaines nuisances pour les riverains. Il s’agit de capitaliser sur l’existant, en se concentrant sur les sites déjà marqués par la présence d’éoliennes. Nous souhaitons améliorer les performances grâce à des éoliennes plus puissantes, ce qui permet, dans certains cas, d’en réduire le nombre, donc d’en limiter l’impact visuel. J’entends vos questionnements sur les retombées économiques et le traitement fiscal de ces installations dans le cadre de l’Ifer, en particulier pour les collectivités s’engageant dans un projet de renouvellement.
    Nous avons la conviction que les territoires doivent tirer pleinement parti des infrastructures qu’ils accueillent, du point de vue de la fiscalité mais aussi de la création d’emplois et des prix de l’électricité. Nous avons pris des mesures concrètes en ce sens. En février, nous avons élargi par arrêté l’autoconsommation collective aux projets éoliens, ce qui permettra aux collectivités d’accéder à une énergie plus compétitive et produite localement. Nous travaillons aussi avec la filière pour simplifier les procédures de renouvellement afin d’accélérer les projets tout en garantissant un cadre stable pour les territoires. Nous poursuivons enfin le dialogue avec cette dernière sur tous ces sujets tout en veillant à l’impact sur les finances publiques, afin de poursuivre notre cap sur la transition énergétique. Nous sommes à votre écoute pour discuter des recommandations qui peuvent être faites pour améliorer ce cadre.

    M. le président

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    La parole est à M. Philippe Vigier.

    M. Philippe Vigier

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    Vous l’aurez compris, il y a un sujet d’acceptation par les collectivités. Comme vous l’avez très bien dit, pour faire face à la nécessité d’augmenter l’énergie disponible tout en profitant de l’opportunité du repowering, il faut considérer une installation remplacée par une nouvelle machine plus performante comme un nouveau projet, aussi d’un point de vue fiscal –⁠ les élus ne comprendraient pas que l’on revienne en arrière.

    Statut du conjoint collaborateur

    M. le président

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    La parole est à Mme Danielle Brulebois, pour exposer sa question, no 284, relative au statut du conjoint collaborateur.

    Mme Danielle Brulebois

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    À l’occasion de la journée internationale des droits des femmes, le 8 mars, la commission femmes de la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb) du Jura m’a fait part de sa profonde inquiétude face à la suppression programmée du statut de conjoint collaborateur. Choisi par près de 26 000 femmes dans l’artisanat du bâtiment, ce statut est le fruit d’un long combat syndical. Il est générateur de droits protégeant les conjoints, tout en étant bien adapté à la vie des très petites entreprises (TPE) et des couples d’entrepreneurs.
    L’article 24 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 impose une limite de cinq ans à l’exercice du statut de conjoint collaborateur. Au-delà de cette durée et à partir du 1er janvier 2027, les conjoints collaborateurs seront contraints de devenir conjoints salariés ou conjoints associés. Cette réforme va toucher directement les femmes, qui représentent 85 % des conjoints collaborateurs, et menacer la viabilité de nombreuses petites entreprises artisanales.
    En effet, cette réforme aurait pour conséquence de plonger les femmes ayant le statut de conjoint collaborateur dans une situation précaire en leur faisant perdre leur protection sociale ainsi que leur mandat de gestion de l’entreprise de leur partenaire. Cela porterait atteinte à la pérennité de l’entreprise artisanale et remettrait en cause la liberté de choix.
    Cette mesure ignore les réalités du terrain en niant le rôle et l’engagement des femmes dans les entreprises familiales, qui sont prépondérantes dans le Jura comme dans d’autres départements. Je sais combien le gouvernement est attaché à la liberté des femmes, à leur protection et à leur intégration économique. Ce sont des enjeux qui lui tiennent à cœur. C’est pourquoi je sollicite son soutien dans ce combat.

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre chargé de l’industrie et de l’énergie.

    M. Marc Ferracci, ministre chargé de l’industrie et de l’énergie

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    La question posée appelle l’attention du gouvernement sur l’évolution du statut de conjoint collaborateur et sur les conséquences de la limitation de sa durée à cinq ans, introduite par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022. Le statut de conjoint collaborateur a été créé en 2005. Il a permis de formaliser la participation régulière du conjoint non rémunéré à l’activité de l’entreprise. Dans la grande majorité des cas, il concerne des conjointes. Ce statut donne accès à une protection sociale partielle, notamment pour la retraite de base, l’invalidité décès, les indemnités journalières et la formation professionnelle, moyennant le versement de cotisations calculées sur des assiettes minimales.
    Il a constitué une avancée importante pour lutter contre le travail dissimulé et contre l’invisibilisation du travail des femmes dans les très petites entreprises en leur permettant d’être identifiées et de bénéficier d’une première couverture sociale. Toutefois, il présente des limites notables en matière de droits sociaux, notamment pour la retraite et la sécurité financière à long terme.
    C’est dans cette optique que l’article 24 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 a prévu une limitation à cinq années de la durée d’exercice du statut. Cette mesure vise à encourager, au-delà de cette période transitoire, le basculement vers des statuts plus protecteurs, comme celui de conjoint salarié, qui ouvre droit à une rémunération et à une couverture sociale complète, ou celui de conjoint associé, qui confère des droits en lien avec la détention de parts dans l’entreprise. À défaut de choix explicite à l’issue de ce délai, le statut le plus protecteur, à savoir celui de conjoint salarié, s’applique automatiquement.
    Cette évolution n’a pas pour objet de pénaliser les femmes ou de fragiliser les très petites entreprises mais, bien au contraire, de garantir aux conjointes une meilleure reconnaissance de leur rôle dans l’entreprise et de renforcer leur couverture sociale. Elle permet aux personnes concernées de commencer leur parcours professionnel avec un statut souple et accessible, tout en les incitant à accéder progressivement à une protection plus complète.
    Le gouvernement reste attentif aux conditions de mise en œuvre de cette mesure et mobilisé pour accompagner les couples d’entrepreneurs dans cette transition. Nous continuerons de travailler en lien étroit avec les organisations professionnelles, comme celle que vous avez évoquée, et avec les acteurs de terrain pour nous assurer que cette réforme bénéficie effectivement à celles et ceux qu’elle entend protéger.

    M. le président

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    La parole est à Mme Danielle Brulebois.

    Mme Danielle Brulebois

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    Je remercie M. le ministre pour sa réponse. Toutefois, je tiens à souligner qu’il serait dommage que l’évolution du statut du conjoint collaborateur aboutisse au fait que la parité dans les instances de gouvernance ne soit plus une priorité et que cette réforme prive les femmes de leur droit de siéger dans des institutions clés, comme les chambres de métiers et de l’artisanat ou les caisses de sécurité sociale. D’autant que, par ailleurs, nous voulons que la parité soit respectée dans toutes les instances de gouvernance.
    De plus, la Capeb a proposé une solution simple et équitable : permettre aux conjointes collaboratrices de cotiser davantage, afin d’améliorer leur protection sociale, tout en leur laissant la possibilité de conserver leur statut au-delà de cinq ans. Cette mesure ne coûterait rien au régime obligatoire et garantirait aux conjointes collaboratrices une sécurité accrue, conformément à l’objectif que vous avez évoqué, monsieur le ministre, sans peser sur les finances publiques. Il est encore temps de réfléchir et d’agir en faveur de la liberté des femmes, de leur protection et de leur intégration économique en revenant sur cette réforme.

    Énergie photovoltaïque

    M. le président

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    La parole est à Mme Julie Delpech, pour exposer sa question, no 287, relative à l’énergie photovoltaïque.

    Mme Julie Delpech

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    Depuis 2021, le guichet ouvert pour les installations photovoltaïques de taille intermédiaire a permis un essor inédit de la production d’électricité par des panneaux solaires positionnés sur les toitures. Par son existence, il a soutenu la transition énergétique et dynamisé toute une filière. Cependant, les révisions successives des tarifs d’achat de l’électricité ainsi produite fragilisent cet équilibre.
    Après une première baisse rétroactive à 95 euros par mégawattheure intervenue en février, un nouvel arrêté, publié le 27 mars, entérine une diminution à 80 euros par mégawattheure, effective dès le lendemain. Ce nouveau tarif est donc déjà en vigueur. En parallèle, les aides au photovoltaïque pour les particuliers ont été fortement réduites : le tarif de rachat a été divisé par trois et la prime à l’autoconsommation par deux, avec des ajustements compensatoires prévus seulement à partir d’octobre. Cette accumulation de baisses suscite une vive inquiétude dans l’ensemble de la filière.
    Dans ma circonscription, Cénovia, acteur public de l’aménagement et du stationnement au Mans, alimente déjà l’équivalent de 17 000 citoyens grâce à ses installations en autoconsommation. L’instabilité tarifaire menace les projets structurants de ce type et freine les investissements locaux nécessaires à la montée en puissance du solaire.
    Les professionnels plaident pour une modulation de la baisse, voire pour sa suspension temporaire, le temps que la filière absorbe les premiers ajustements. Ils proposent également la mise en place rapide d’appels d’offres simplifiés et de mécanismes de régulation plus adaptés, comme des cautions bancaires.
    Envisagez-vous un rééquilibrage du calendrier et des modalités de soutien, afin de préserver la dynamique essentielle déjà enclenchée et d’éviter un ralentissement brutal de cette filière, notamment pour des acteurs locaux comme Cénovia ?

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre chargé de l’industrie et de l’énergie.

    M. Marc Ferracci, ministre chargé de l’industrie et de l’énergie

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    Le gouvernement est pleinement conscient des défis rencontrés par la filière photovoltaïque et des préoccupations soulevées par les révisions successives des tarifs d’achat. Notre objectif est de permettre à la filière de s’adapter tout en garantissant une gestion maîtrisée des soutiens publics.
    L’arrêté tarifaire d’octobre 2021 a entraîné un emballement des demandes, qu’elles débouchent ou non sur un projet, avec un volume largement supérieur aux prévisions. Je vais donner un chiffre qui en témoigne. Les demandes enregistrées au seul mois de janvier 2025 représentaient une puissance de 1 gigawatt, soit la moitié de l’objectif annuel.
    Il était donc nécessaire d’adapter le dispositif pour éviter un déséquilibre. Dans cette perspective, un projet d’arrêté modifiant le dispositif de soutien au photovoltaïque a été présenté à la filière dès le 12 février dernier. Cet arrêté a fait l’objet d’échanges avec la filière, notamment lors d’une réunion du Conseil supérieur de l’énergie (CSE), et a été soumis pour avis à la Commission de régulation de l’énergie (CRE). À la suite de cette concertation, des ajustements ont été apportés, pour répondre aux attentes des acteurs tout en préservant l’ambition de la politique énergétique du gouvernement. L’arrêté a été publié jeudi dernier.
    Pour les installations photovoltaïques de taille intermédiaire, il est prévu un tarif de 95 euros par mégawattheure, applicable jusqu’en juin prochain. Ensuite, le tarif pourra évoluer en fonction du nombre de demandes. Nous avons également prévu un système de garantie financière, afin de nous assurer que les projets demandant un soutien soient matures. Enfin –⁠ et cela répond à votre demande –, un appel d’offres simplifié sera lancé au début du deuxième semestre 2025. Des réunions de cadrage avec tous les acteurs concernés vont prochainement avoir lieu pour le calibrer.
    La mesure prise par le gouvernement est équilibrée. Elle vise à soutenir la filière tout en tenant compte des contraintes économiques actuelles. De plus, un arrêté spécifique au photovoltaïque au sol, particulièrement attendu par le monde agricole, sera bientôt publié, afin de soutenir les petits projets. Enfin, à partir de l’été 2026, le soutien sera réservé aux projets photovoltaïques présentant un approvisionnement résilient en lien avec la souveraineté énergétique du pays et la compétitivité de ses industries –⁠ c’est-à-dire ceux qui utiliseront des matériels produits en France.
    Le gouvernement continuera de travailler avec la filière pour ajuster les dispositifs de manière pragmatique et, ainsi, favoriser un développement équilibré du photovoltaïque en France.

    Étudiants exilés

    M. le président

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    La parole est à Mme Céline Hervieu, pour exposer sa question, no 309, relative aux étudiants exilés.

    Mme Céline Hervieu

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    En France, les étudiants exilés, qu’ils soient réfugiés ou demandeurs d’asile, font face à de nombreuses difficultés pour poursuivre leurs études dans de bonnes conditions. Le préambule de la Constitution de 1946 proclame que « tout homme persécuté en raison de son action en faveur de la liberté a droit d’asile sur les territoires de la République ». Au-delà d’un devoir humanitaire, l’accueil des étudiants exilés en France est un devoir républicain à l’heure où, partout dans le monde, des conflits et des crises forcent de nombreux jeunes à fuir leur pays.
    Or les obstacles qu’ils rencontrent sont considérables. Aux difficultés communes à tous les étudiants –⁠ l’accès au logement, le prix de l’alimentation, le coût de la vie – s’ajoutent, pour les étudiants exilés, des barrières supplémentaires. Les critères d’inscriptions sur les plateformes d’admission Parcoursup, Mon Master ou Ecandidats sont inadaptés à leur parcours. Comment, par exemple, exiger de jeunes qui ont fui leur pays dans l’urgence qu’ils saisissent leurs notes de trois années de lycée et du baccalauréat ? Ils se voient aussi imposer des frais administratifs supplémentaires : entre 70 et 150 euros pour un test de français, entre 30 et 50 euros pour la traduction d’un document et jusqu’à 90 euros pour faire reconnaître leur diplôme.
    Certaines universités tentent d’apporter des solutions, notamment avec des programmes, dits Passerelle, qui prennent en charge certains frais tout en offrant un accompagnement linguistique et académique. Depuis le début de la guerre en Ukraine, de telles initiatives se sont multipliées. Début 2024, on en comptait trente-neuf, dont quinze en région parisienne. De plus, sept établissements ont instauré une procédure de candidature unique pour les étudiants exilés. Dans ma circonscription, par exemple, j’ai rencontré des étudiants palestiniens qui avaient fui Gaza et qui ont pu intégrer les universités Paris-Saclay ou Paris-Dauphine grâce à des programmes spécifiques organisés en lien avec le ministère des affaires étrangères. Mais de tels exemples sont encore trop peu nombreux et ces étudiants ont laissé à Gaza beaucoup d’autres jeunes qui voudraient étudier en France.
    Ces différents dispositifs restent insuffisants et trop dépendants des volontés locales, ce qui laisse seuls de nombreux étudiants après leur admission. Or nous savons que 50 % des étudiants échouent en première année. Ce taux révèle un manque de soutien structurel.
    Pour les jeunes qui ont fui la misère, les conflits ou la guerre, étudier en France est bien plus qu’un projet académique. C’est la possibilité de se reconstruire un avenir. Quelles mesures concrètes le gouvernement entend-il prendre pour améliorer l’accès des étudiants exilés au système français d’enseignement supérieur ainsi que leur réussite ?

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche.

    M. Philippe Baptiste, ministre chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche

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    Je suis très sensible à la question de l’accueil des étudiants et des enseignants-chercheurs exilés. Depuis six ans, le ministère de l’enseignement supérieur soutient fortement les actions déployées en leur faveur. Il a ainsi accompagné la mise en place des diplômes universitaires (DU) dits Passerelle, que vous avez évoqués, dès que l’idée en a été proposée, en 2017.
    Ces diplômes reposent principalement sur un apprentissage intensif du français comme langue étrangère. Ils proposent également des activités d’orientation, d’intégration et d’ouverture socioculturelle, pour aider les étudiants dans la préparation de leur projet universitaire et professionnel.
    Le ministère apporte un soutien constant au réseau des établissements engagés pour l’accueil des étudiants en exil, le Mens, pour migrants dans l’enseignement supérieur. Ce réseau accrédite les DU Passerelle et leur apporte un financement. Par ailleurs, ces dernières années, un assouplissement des procédures d’inscription a été décidé, afin de faciliter l’entrée des étudiants réfugiés dans l’enseignement supérieur français.
    En accord avec les universités, nous les dispensons de la procédure de demande d’admission préalable (DAP), qui permet d’accéder à Parcoursup. Ils peuvent candidater directement auprès des établissements, à qui une circulaire a rappelé qu’il convenait de faire preuve de souplesse dans l’examen des candidatures des étudiants réfugiés, notamment parce que certains ne peuvent pas produire les pièces justificatives dont vous avez parlé. Par ailleurs, nous expérimentons dans plusieurs établissements une procédure dédiée aux étudiants exilés, la demande d’admission adaptée.
    Enfin, le ministère a déployé les mesures de soutien renforcé aux étudiants déplacés d’Ukraine, qui sont assimilés à ceux disposant du statut de réfugié et bénéficient des mêmes dispositifs que ces derniers. Ils ont accès à davantage de cours de français langue étrangère, grâce à des places supplémentaires, ouvertes notamment dans les DU Passerelle, et à des aides spécifiques, comme des bourses sur critères sociaux pour les détenteurs de la protection temporaire, des repas à 1 euro, des aides d’urgence des centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (Crous), un soutien psychologique et l’accès aux logements gérés par les Crous.
    Je tiens à réaffirmer mon engagement plein et entier sur cette question. Accueillir des étudiants et des enseignants réfugiés, qui arrivent dans notre pays après un long parcours, ballottés sur les routes de l’exil, fait l’honneur de la France et transforme nos établissements en havres. Cela donne aussi aux universités et aux écoles de l’enseignement supérieur l’occasion d’accueillir des talents qui s’inscriront dans la durée en France.

    Éducateurs canins

    M. le président

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    La parole est à Mme Corinne Vignon, pour exposer sa question, no 286, relative aux éducateurs canins.

    Mme Corinne Vignon

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    Aujourd’hui, en seulement quelques clics, tout le monde peut exercer la profession d’éducateur canin grâce à la multitude de formations rapides en lien avec l’éducation canine. Cependant, toutes ne sont pas officiellement reconnues, et l’absence de cadre légal nuit au professionnalisme du secteur en favorisant l’usage de méthodes contraires aux bonnes pratiques validées scientifiquement.
    Par exemple, l’attestation de connaissances pour les animaux de compagnie d’espèces domestiques (Acaced) s’obtient après quelques heures seulement de formation en ligne et ne comporte ni mise en pratique, ni mise en contact avec l’animal. Son contenu est souvent inadapté et ne garantit pas le socle minimal de connaissances en matière de bien-être animal.
    Ainsi, toute personne déclarée auprès du préfet et détentrice de l’Acaced, ou d’une équivalence, peut se revendiquer éducateur canin, alors même que cette attestation ne garantit pas une formation adéquate à l’éducation canine. Or ce manque de formation et d’encadrement ouvre la porte à des pratiques discutables, maltraitantes, qui peuvent nuire aux chiens comme à leurs propriétaires et se solder par un abandon, voire une euthanasie, lorsque la situation devient complexe avec l’animal.
    En 2024, le ministre de l’agriculture de l’époque, M. Marc Fesneau, conscient de l’importance de revoir cette formation et surtout de la renforcer, prévoyait de la réviser dans son plan national pour améliorer le bien-être des animaux de compagnie. Il existe, chez nombre des professionnels que j’ai rencontrés, un vrai souhait de professionnaliser ce secteur. Le brevet professionnel apparaît comme une alternative adéquate à l’Acaced pour former les éducateurs canins, mais il peut encore être amélioré.
    Mme la ministre de l’agriculture entend-t-elle reprendre cette proposition pour encadrer enfin l’Acaced, en en proposant une version améliorée, voire la supprimer au profit de formations plus diplômantes, afin de professionnaliser les éducateurs canins ?

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche.

    M. Philippe Baptiste, ministre chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche

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    Je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser Mme la ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire, qui m’a chargé de vous répondre.
    Vous posez une question importante, tant de multiples offres de formation en lien avec l’animal, pas toujours reconnues officiellement, attirent de nombreuses personnes passionnées. Cette situation peut engendrer un manque de professionnalisme du secteur et conduire à la diffusion de méthodes contraires aux bonnes pratiques reconnues par la communauté scientifique. Ainsi, la profession d’éducateur canin, sur laquelle vous appelez notre attention, n’est, à ce jour, pas réglementée.
    Peut donc se dire éducateur canin toute personne dûment déclarée en tant que tel auprès du préfet et détentrice de l’attestation de connaissances pour les animaux de compagnie d’espèces domestiques ou de l’une de ses équivalences, ce qui ne forme pas nécessairement à l’éducation canine.
    Un plan dédié au bien-être des animaux de compagnie a été lancé le 22 mai 2024 pour prolonger la dynamique positive engagée depuis 2020. Pour l’État, l’objectif est d’accompagner et de valoriser pleinement les actions, actuelles et futures, autour de trois enjeux : la prévention et la lutte contre les abandons d’animaux de compagnie ; l’amélioration de la gestion de l’errance canine et féline ; la prévention et la lutte contre la maltraitance des animaux de compagnie. Ce plan d’action est articulé autour de mesures concrètes, comme la sensibilisation de tous et la formation des acteurs, qu’elle soit réglementée ou non.
    À travers ce plan national, qui est toujours d’actualité, le ministère de l’agriculture prévoit : d’abord de promouvoir la formation des futurs éducateurs canins par le brevet professionnel, reconnu officiellement, en mettant notamment en avant des méthodes et des pratiques d’éducation non coercitives ; ensuite, d’améliorer la formation Acaced en procédant au contrôle des organismes de formation et en améliorant le questionnaire d’évaluation.

    Aéroport de Colmar

    M. le président

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    La parole est à Mme Brigitte Klinkert, pour exposer sa question, no 283, relative à l’aéroport de Colmar.

    Mme Brigitte Klinkert

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    Ma question concerne l’aéroport de Colmar-Houssen, un outil essentiel à la vitalité économique du centre Alsace et à l’attractivité industrielle de notre territoire. Si les usages de cet aéroport sont nombreux –⁠ tourisme, loisir, mouvements militaires ou médicaux d’urgence –, c’est surtout son intérêt pour l’aviation d’affaires qui a permis un fort développement industriel à Colmar et dans sa région. C’est donc un outil précieux pour les entreprises qui emploient des milliers de personnes sur notre territoire et qui contribuent à l’équilibre de notre balance commerciale en exportant leur production.
    L’ensemble de ces activités représente plus de 35 000 mouvements par an, soit un volume nettement supérieur à celui d’autres plateformes, qui sont pourtant moins touchées par la réforme du contrôle aérien, laquelle devrait aboutir, à Colmar, à la fin du contrôle aérien en 2028. L’Afis –⁠ service d’information de vols et d’alerte –, un système automatisé sans contrôle humain remplacerait alors le contrôle aérien traditionnel. Or, lors d’un récent déplacement du président de la République, la direction générale de l’aviation civile (DGAC) a explicitement écarté le recours à l’Afis, considérant que cette solution ne garantissait pas un niveau de sécurité suffisant. C’est donc bien que cette solution n’est pas opérationnelle –⁠ donc insatisfaisante.
    Colmar ne ressemble en rien aux autres aéroports où l’Afis a été déployé : nous avons un site urbain dense, à proximité de deux chaînes de montagnes, avec une mixité de trafic particulièrement complexe.
    Notre crainte serait que des acteurs économiques de la région révisent leur stratégie d’investissement en cas de dégradation du service, ce qui nuirait à la réindustrialisation de la France –⁠ une priorité nationale. Ce sont des emplois et des investissements qui sont en jeu. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous garantir que le contrôle aérien ne sera pas supprimé à Colmar en 2028 et qu’une solution fiable et sécurisée sera trouvée avant toute mise en œuvre de cette réforme ?

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche.

    M. Philippe Baptiste, ministre chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche

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    Je vous prie d’excuser le ministre chargé des transports, qui m’a demandé de vous transmettre sa réponse.
    La direction générale de l’aviation civile a entamé une transformation de sa direction des services de la navigation aérienne (DSNA), dont l’un des axes consiste à rationaliser son implantation territoriale. En effet, l’implantation très dispersée des services de contrôle aérien –⁠ actuellement assuré depuis soixante-dix-neuf sites sur le territoire –, les tensions croissantes sur les effectifs et la nécessité de recentrer les investissements techniques imposent de revoir le périmètre actuel.
    L’aérodrome de Colmar, aux côtés de cinq autres terrains, est intégré à la première phase de cette réforme, pour un retrait du service de contrôle aérien à l’horizon 2028. L’objectif de cette réforme est d’adapter le service rendu au trafic d’un aérodrome comme Colmar, sans remettre en cause son activité. En effet, la DGAC comprend parfaitement les enjeux économiques, notamment ceux de l’industrie locale, avec laquelle des échanges réguliers sont menés, mais aussi d’aménagement du territoire, de cet aérodrome.
    La DGAC défend ces plateformes de plus petite taille au niveau national mais il est vital, pour en assurer la pérennité, de pouvoir y adapter le service à l’activité ; il ne s’agit aucunement de limiter le développement économique local. La réforme permet en outre de réduire les coûts pour l’ensemble des usagers aéronautiques et d’améliorer la performance, afin de répondre aux attentes des usagers et passagers aériens.
    Le retrait du service de contrôle n’implique donc en rien la fin de l’activité des aérodromes concernés, les exploitants pouvant installer un Afis. Il se distingue d’un service de contrôle en ce qu’il ne donne pas d’instructions, ni d’autorisations aux pilotes, mais il leur donne toutes les informations nécessaires pour conduire leur vol en sécurité : conditions météorologiques, état de la piste, situation du trafic environnant, etc.
    Des dizaines de services d’information de vols et d’alerte sont déployés en France, sur des aérodromes ayant un volume de trafic parfois supérieur aux six aérodromes concernés par la réforme, une complexité du trafic équivalente et un environnement similaire, comme la proximité d’un milieu urbain dense. C’est par exemple le cas à Angoulême, Arcachon, Vannes, Gap ou encore Valence.
    La DGAC confirme que, concernant l’aérodrome de Colmar et compte tenu du niveau et de la complexité du trafic, l’installation d’un service d’information de vols et d’alerte s’avère pertinent, et que la sécurité des vols sera préservée, y compris pour l’accueil d’un avion présidentiel, par exemple.

    Mme Brigitte Klinkert

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    Bonne nouvelle ! (Sourires.)

    M. Philippe Baptiste, ministre

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    Enfin, la moitié des contrôleurs aériens affectés à Colmar partiront à la retraite d’ici 2028, et certains autres sont susceptibles d’effectuer une mobilité vers d’autres aérodromes avant cette date. Il s’agit donc d’aboutir à un accord négocié entre la DGAC et l’exploitant de l’aérodrome pour assurer une transition maîtrisée permettant de préserver la prestation de lutte contre les incendies, cruciale pour l’aviation en général, et pour l’aviation d’affaires en particulier, donc la continuité d’activité.
    Des échanges constructifs, y compris concernant l’accompagnement technique et financier de la DGAC pour cette transition, sont d’ores et déjà engagés avec l’exploitant ADC (Aéroport de Colmar).

    M. le président

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    La parole est à Mme Brigitte Klinkert.

    Mme Brigitte Klinkert

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    Je vous remercie de votre réponse et j’entends qu’il est nécessaire de mener cette réforme. Je me permets toutefois de répéter que, sur le site de Colmar, cette solution n’est ni fiable, ni sécurisée. Si elle l’était, l’avion présidentiel aurait pu atterrir sans contrôle aérien. Or ce n’est pas ce qui s’est passé.

    M. Philippe Baptiste, ministre

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    Je transmettrai vos commentaires.

    Cétacés en captivité

    M. le président

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    La parole est à Mme Dominique Voynet, pour exposer sa question, no 281, relative aux cétacés en captivité.

    Mme Dominique Voynet

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    Ma question s’adresse à la ministre chargée de l’écologie, donc de la protection de la vie sauvage. Il est urgent de garantir aux cétacés encore détenus en captivité en France des conditions de transfert respectueuses du bien-être animal.
    La loi contre la maltraitance animale du 30 novembre 2021 prévoit la fin des delphinariums d’ici 2027 : ces six années devaient être mises à profit pour relocaliser les animaux. Or plusieurs associations, dont Sea Shepherd, nous alertent sur le risque que les dauphins et les orques soient envoyés vers des établissements situés hors de l’Union européenne, où les réglementations en matière de bien-être animal sont bien moins protectrices. Le zoo aquarium de Madrid s’apprête ainsi à transférer des dauphins vers le parc Hainan Ocean Paradise, en Chine.
    En novembre dernier, la ministre a refusé le transfert des deux orques Wikie et Keijo du parc Marineland d’Antibes vers le Japon, déclarant que son rôle était de s’assurer que les deux animaux soient correctement traités et que leur destination soit conforme à leur intérêt, en termes de santé et de bien-être.
    Pour s’aligner sur les standards de la réglementation européenne, des alternatives existent. Le sanctuaire marin de Tarente, en Italie, a ainsi proposé d’accueillir quatre dauphins du parc Marineland, et cette solution de réhabilitation a été validée par deux vétérinaires mandatés par le ministère. Pourtant, cette solution semble avoir été écartée sans aucune justification, ce qui suscite de nombreuses interrogations.
    Le gouvernement compte-t-il respecter sa parole en s’impliquant dans la recherche de sanctuaires, pour éviter que les cétacés soient exploités jusqu’à en mourir dans d’autres delphinariums ? Nous avions six ans pour nous préparer à leur fermeture ; quatre années se sont déjà écoulées. Allons-nous enfin nous bouger pendant les deux années qui restent ?

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche.

    M. Philippe Baptiste, ministre chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche

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    Je réponds à votre question au nom de ma collègue Agnès Pannier-Runacher, qui souhaite tout d’abord rappeler que, dans le cadre de la loi du 30 novembre 2021, le parc Marineland d’Antibes a cessé son activité le 5 janvier 2025 et cherche à placer ses animaux, dont deux orques et douze dauphins.
    Le transfert de ces animaux doit respecter une réglementation rigoureuse, notamment la Convention sur le commerce international des espèces sauvages (Cites). En novembre 2024, le parc Marineland a déposé une demande d’exportation des orques vers le Japon. Toutefois, en raison des conséquences qu’une telle distance de transport pourrait avoir sur leur santé, les autorités françaises ont refusé cette demande.
    Souhaitant en parallèle étudier la faisabilité technique et financière de placer les orques dans un enclos marin, le ministère de la transition écologique a lancé un appel à manifestation d’intérêt (AMI) en 2024. Cinq structures y ont répondu, et leurs projets ont été analysés dans un rapport de juin 2024 publié par l’Inspection générale de l’environnement et du développement durable (Igedd). Ce travail a conclu qu’aucun projet, ni celui de Tarente en Italie, ni celui de Lipsi en Grèce, n’est en mesure d’offrir les garanties nécessaires en matière de bien-être animal, avant au moins un an.
    Afin d’appuyer l’émergence d’un projet de sanctuaire au niveau européen, la ministre a créé un groupe de travail réunissant les porteurs de projets d’enclos marins, des ONG, le parc Marineland et des experts afin d’étudier les étapes à franchir pour faire aboutir ces projets. Un transfert vers des parcs zoologiques en Espagne est actuellement étudié. L’Espagne est en effet capable de garantir un haut niveau de bien-être animal.
    Le gouvernement reste pleinement mobilisé pour identifier la solution la plus adaptée, en accord avec l’esprit et la lettre de la loi du 30 novembre 2021. La ministre a interpellé la Commission européenne et plusieurs États membres pour travailler conjointement à l’identification de solutions pérennes d’accueil pour les cétacés vivant en Europe dans des sanctuaires marins.

    M. le président

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    La parole est à Mme Dominique Voynet.

    Mme Dominique Voynet

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    Il s’agit, il est vrai, d’un dossier complexe. Destinée à garantir le bien-être d’animaux dont le commerce est par ailleurs strictement contrôlé, la réglementation de la Cites est en effet assez exigeante.
    Si une solution européenne peut être trouvée dans les mois qui viennent, j’en serai ravie. Je voudrais toutefois être certaine que le groupe de travail qui se réunit depuis plusieurs mois déjà ne se contentera pas de jouer la montre ou, du moins, que son manque éventuel de diligence n’exposera pas les animaux au risque d’être abandonnés à la loi de l’offre et de la demande. C’est pourquoi, je prends note de votre réponse et reviendrai vers Mme la ministre de l’écologie dans quelques semaines, pour savoir ce qu’il en est de ce groupe, qui travaille sans compte rendu public depuis très longtemps.

    Club de tir de La Ciotat

    M. le président

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    La parole est à M. Olivier Fayssat, pour exposer sa question, no 310, relative au club de tir de La Ciotat.

    M. Olivier Fayssat

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    Le club de tir de La Ciotat compte environ 1 300 membres, tous tireurs licenciés. Le tir sportif est une discipline olympique et la France est d’ailleurs fière de compter plusieurs athlètes médaillés.
    Fondé il y a près de soixante ans, le club de tir de La Ciotat met ses infrastructures à la disposition des forces de police et des quelque 600 agents pénitentiaires qui y effectuent leurs séances de tir obligatoires, essentielles à la qualité de leur formation, donc à la sécurité publique.
    Après la fermeture de celui d’Allauch, à la suite de plaintes du voisinage, le club de La Ciotat est l’un des derniers dont l’activité ne puisse déranger aucun voisin, puisque personne ne vit à proximité. Il se trouve toutefois dans le parc national des Calanques depuis 2012. En effet, la municipalité de La Ciotat a cédé le terrain au Conservatoire du littoral, d’ailleurs sans concertation préalable et dans des conditions juridiques que je suis en train d’examiner, mais qui semblent pour le moins étonnantes.
    Plus préoccupés par la tranquillité de quelques grenouilles que par la sécurité des agents pénitentiaires, ses puissants interlocuteurs cherchent à faire disparaître le club de tir dans les plus brefs délais par toutes sortes de manœuvres : après lui avoir demandé un loyer de 100 000 euros, on lui a proposé de ramener ledit loyer à 14 000 euros mais dans le cadre d’une convention de trois ans non renouvelable.
    Le Conservatoire du littotal fonctionne avec de l’argent des citoyens. Si ce budget est utilisé pour les terroriser et les rançonner, il faudra se poser la question de la légitimité de son action. En tout état de cause, une telle volonté d’exclure des infrastructures encadrées et utilisées de manière responsable est difficile à comprendre, si ce n’est comme l’expression des névroses d’idéologues acharnés en croisade contre des symboles.
    Discipline populaire, le tir sportif ne dispose que de petits budgets. Une relocalisation du club est donc quasi irréalisable : son coût, estimé à 2 ou 3 millions d’euros, constituerait un gaspillage d’argent impensable et insurmontable.
    Au nom des tireurs sportifs, mais aussi pour la sécurité des policiers et des agents pénitentiaires, pouvons-nous compter sur le soutien du gouvernement pour aider ce club sportif à conserver son emplacement historique et légitime ?

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche.

    M. Philippe Baptiste, ministre chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche

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    Je tiens d’abord à excuser Mme Marie Barsacq, ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative, qui ne pouvait être présente pour vous répondre.
    Vous m’interrogez sur la situation du club de tir de La Ciotat ; j’en profite pour saluer le dynamisme d’un club de tir qui compte 1 300 membres et qui existe depuis près de soixante ans –⁠ vous l’avez rappelé – et les performances de nos athlètes médaillés dans les disciplines de tir lors des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024.
    Vous avez souligné les difficultés de ce club ; le ministère des sports, de la jeunesse et de la vie associative y est d’autant plus attentif que l’activité de ce site joue un rôle important aussi bien pour la pratique du tir sportif que pour l’entraînement des forces de l’ordre. Le ministère va donc se rapprocher des parties prenantes locales afin d’identifier les différentes solutions qui pourraient être apportées, en tenant compte des contraintes de chacun des acteurs. En effet, la situation géographique particulière de ce club de tir, au cœur du parc national des Calanques, impose de regarder son cas au travers du prisme du respect de l’environnement au sein duquel il se trouve.
    Soyez assuré, monsieur le député, de la volonté du ministère des sports, de la jeunesse et de la vie associative de trouver une solution qui puisse répondre aux enjeux particuliers que j’ai évoqués tout en assurant la continuité de la pratique.

    Société ALM-MECA

    M. le président

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    La parole est à M. Théo Bernhardt, pour exposer sa question, no 305, relative à la Société ALM-MECA.

    M. Théo Bernhardt

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    Je souhaite appeler l’attention de M. le ministre des armées sur la situation de la société ALM-MECA, une PME de douze salariés située à Eschbach en Alsace dans ma circonscription.
    Spécialisée dans l’usinage de précision, cette entreprise détient un savoir-faire unique en France dans la fabrication de microturbines pour drones. Classée parmi les cinq premiers fabricants mondiaux en termes de performances, elle fournit déjà des moteurs pour le drone Veloce 330, développé par la start-up française EOS Technologie en réponse à une commande de la direction générale de l’armement (DGA).
    Malgré ce positionnement stratégique et les contacts établis avec de grandes entreprises de l’armement comme Safran, Dassault ou MBDA, l’entreprise ALM-MECA connaît des difficultés financières importantes depuis la pandémie de covid-19 : avec des fonds propres négatifs, elle doit lever 2 millions d’euros dans les six prochains mois pour assurer sa pérennité. Plusieurs investisseurs étrangers, notamment qataris, ont manifesté leur intérêt, mais ils conditionnent leur participation à un transfert de savoir-faire hors de France au bout de trois ans. Une telle perspective fait peser un risque majeur sur notre souveraineté technologique et industrielle, d’autant que la PME participe à la filière des drones militaires, secteur stratégique pour la défense nationale.
    Par ailleurs, la DGA dispose d’un fonds de soutien destiné à préserver les fournisseurs et compétences stratégiques. ALM-MECA, dont la capacité à concevoir et à produire ces microréacteurs est essentielle à la souveraineté française, devrait légitimement pouvoir prétendre à un tel soutien.
    Il est également crucial que l’État encourage et facilite un rapprochement avec de grands industriels français, afin que ce savoir-faire d’excellence ne tombe pas sous contrôle étranger.
    Quelles mesures le gouvernement envisage-t-il de prendre pour soutenir ALM-MECA, préserver et développer ses compétences stratégiques en matière de microturbines pour drones, et pour éviter qu’une entreprise aussi prometteuse ne soit contrainte de se tourner vers des capitaux étrangers ? Entendez-vous mobiliser le fonds de soutien de la DGA, ou tout autre dispositif équivalent, pour sécuriser rapidement cette entreprise et ainsi garantir la pérennité de ce savoir-faire national indispensable à l’autonomie de notre défense ?

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la mémoire et des anciens combattants.

    Mme Patricia Mirallès, ministre déléguée chargée de la mémoire et des anciens combattants

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    Comme vous l’avez souligné, ALM-MECA joue un rôle clé dans le développement du Veloce 330 d’EOS Technologie. Cet équipement a vocation à devenir à court terme une « munition téléopérée », c’est-à-dire un drone kamikaze. Ce projet est encore en phase de développement et les essais nécessaires restent à mener avant toute intégration d’une charge militaire.
    ALM-MECA n’est pas seule sur ce marché. La société Akira développe également une microturbine similaire, affichant des caractéristiques équivalentes à celle d’ALM-MECA en termes d’encombrement, de poids et de performances aérodynamiques.
    Nous avons pleinement conscience des difficultés d’ALM-MECA. C’est pourquoi des industriels comme Safran et Dassault ont été consultés afin d’explorer des solutions de consolidation ou d’investissement. D’autres acteurs industriels, comme Realmeca, ont également manifesté leur intérêt.
    Le ministère des armées soutient activement l’innovation en commandant des munitions téléopérées auprès de plusieurs industriels. En 2024, la direction de la maintenance aéronautique a commandé dix-sept drones Veloce 330, ce qui représente vingt turbines pour ALM-MECA. Cette première commande permettra à nos forces de s’approprier ces équipements. Une fois que le développement du drone Veloce, dans lequel les turbines sont intégrées, sera abouti, nous pourrons envisager de nouvelles commandes.

    M. le président

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    La parole est à M. Théo Bernhardt.

    M. Théo Bernhardt

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    Merci pour votre réponse, madame la ministre. Alors que nous sommes confrontés à des menaces grandissantes en Europe et dans le monde, un problème de financement menace la pérennité d’ALM-MECA : l’entreprise n’a que six mois pour trouver plusieurs millions d’euros. J’espère sincèrement que nous pourrons la défendre grâce à la commande que vous avez mentionnée et à d’autres qui suivront, afin qu’elle puisse rester sur le territoire national.

    Cybersécurité

    M. le président

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    La parole est à Mme Sophie Errante, pour exposer sa question, no 299, relative à la cybersécurité.

    Mme Sophie Errante

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    La cybersécurité est un enjeu stratégique majeur pour la France. Les attaques récentes visant des hôpitaux, des collectivités territoriales ou encore des entreprises sensibles rappellent combien les infrastructures numériques françaises restent exposées, ce qui menace la sécurité des données, la continuité des services publics et, plus largement, la souveraineté économique du pays.
    Dans ce contexte, la montée en puissance des capacités de cyberdéfense, notamment dans le domaine militaire, constitue une avancée notable. La sécurisation des Jeux olympiques de Paris 2024 en est une illustration : l’anticipation des risques et la coordination étroite entre services de l’État et acteurs privés ont permis de bâtir un dispositif robuste, capable de détecter et de contrer en temps réel de potentielles attaques –⁠ je profite de cette question pour remercier encore une fois celles et ceux qui ont permis une telle performance.
    Si ces efforts ont montré leur efficacité pour protéger des infrastructures critiques et des événements d’ampleur mondiale, la question de la transférabilité de ces compétences se pose. Or de nombreuses entreprises, notamment les entreprises publiques locales et les PME, restent insuffisamment armées face aux cybermenaces, souvent faute de moyens ou d’un accompagnement adapté.
    Comment le gouvernement entend-il s’appuyer sur ces acquis pour mieux protéger l’ensemble du tissu économique en partageant les bonnes solutions ? Quels dispositifs compte-t-il renforcer ou déployer pour permettre aux structures les plus vulnérables d’accéder aux expertises et aux outils nécessaires à leur cybersécurité ?

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la mémoire et des anciens combattants.

    Mme Patricia Mirallès, ministre déléguée chargée de la mémoire et des anciens combattants

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    L’amélioration de la résilience des industries de défense est une préoccupation continue du ministère des armées.
    Dès 2019, la convention cyber signée avec les huit principaux maîtres d’œuvre industriels de défense a permis de lancer des actions concrètes pour renforcer la cybersécurité de la base industrielle et technologique de défense (BITD). L’objectif est d’assurer une montée en maturité progressive, en s’appuyant sur des référentiels clairs et accessibles. Très concrètement, un référentiel de maturité de cybersécurité fondamental a été établi, fixant des exigences minimales de protection. Ce référentiel a été coconstruit avec les industriels, afin qu’ils s’en emparent pleinement.
    La dynamique engagée dans le cadre de la convention cyber de 2019 a été amplifiée et pérennisée par la création du conseil pour la cybersécurité de l’industrie de l’armement (CCIA), dont le mandat a été signé par le ministère des armées et les huit grands maîtres d’œuvre industriels à l’été 2024. Là encore, nous avons fait le choix d’une coopération étroite avec les industriels, pour qu’ils s’approprient pleinement les solutions adoptées.
    En parallèle, le ministère accompagne activement les PME de la BITD : BPIFrance, la Banque publique d’investissement, finance des diagnostics de cybersécurité et nous menons des actions de sensibilisation auprès des industriels au cours d’événements organisés sur tout le territoire.
    Enfin, la transposition de la directive européenne concernant des mesures destinées à assurer un niveau élevé commun de cybersécurité dans l’ensemble de l’Union (NIS 2) viendra renforcer encore davantage la cyberrésilience des entreprises de défense, consolidant ainsi l’ambition du ministère en la matière.

    M. le président

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    La parole est à Mme Sophie Errante.

    Mme Sophie Errante

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    Ma question portait plus largement sur la façon dont le ministère des armées compte partager l’expertise militaire en matière de cyberdéfense avec le ministère de l’économie et les collectivités locales. Autrement dit, comment faire bénéficier toutes les entreprises, dont les plus petites, de solutions pertinentes ?
    Le foisonnement des outils, ou au contraire leur absence pure et simple, désoriente les chefs d’entreprise aussi bien que les élus locaux, lorsqu’ils doivent choisir des solutions. Cela pose donc la question du transfert de compétences du ministère des armées vers l’ensemble du tissu économique, d’ores et déjà menacé d’essuyer des cyberattaques.
    La BITD est au point sur cette question ! Ce qui m’intéresse, c’est plus largement la manière dont cette industrie, qui a bien progressé en la matière et qui est donc déjà très qualifiée et très performante, peut partager les outils dont elle dispose, qui ont déjà été testés et qui fonctionnent, pour accompagner avec fiabilité le milieu économique au sens large et nos opérateurs dans les territoires. Je conçois qu’il soit difficile de donner une réponse ferme ce matin, mais je voulais vous interpeller sur notre capacité à partager les bonnes solutions avec l’ensemble des acteurs territoriaux, notamment les collectivités, pour que tout le monde profite de l’expérience accumulée.

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée.

    Mme Patricia Mirallès, ministre déléguée

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    J’ai bien compris que vous appeliez de vos vœux un partage d’expérience. Nous y travaillons, de façon à transmettre à un maximum de personnes, y compris dans de petites entreprises, l’expérience acquise par les armées en matière de cybersécurité.

    Tribunal judiciaire de Cherbourg-en-Cotentin

    M. le président

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    La parole est à Mme Anna Pic, pour exposer sa question, no 308, relative au tribunal judiciaire de Cherbourg-en-Cotentin.

    Mme Anna Pic

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    Ma question a trait à deux sujets relatifs au tribunal judiciaire de Cherbourg-en-Cotentin, dans ma circonscription. Le premier concerne le calendrier de construction du nouveau palais de justice. En 2019, la construction d’un nouveau tribunal permettant le regroupement des juridictions judiciaire, commerciale et prud’homale était actée par la garde des sceaux de l’époque, Nicole Belloubet ; sa réalisation était annoncée à l’horizon 2028-2029.
    Ce projet répondait au programme d’optimisation de l’immobilier de la justice, inscrit dans la loi du 20 novembre 2023 d’orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027, et prévoyait que le ministère se porte acquéreur du foncier dès cette année 2025, pour un lancement des opérations préalables entre 2025 et 2026. Force est de constater –⁠ et mes derniers échanges avec les autorités compétentes en attestent – que ce calendrier n’a toujours pas été confirmé à ce jour.
    Parlementaires, élus locaux, professionnels et administrés s’interrogent donc légitimement quant à son actualité et s’inquiètent du préjudice qu’un éventuel retard pourrait porter au projet. Êtes-vous en mesure de confirmer le calendrier annoncé pour la construction du nouveau tribunal, en apportant les précisions attendues ?
    Ma seconde interrogation concerne la situation de sous-effectif rencontrée par ce même tribunal. Au début de l’année, un juge pour enfants a quitté le tribunal judiciaire de Cherbourg sans être remplacé, ce qui a porté le nombre de magistrats du siège, déjà insuffisant, de dix à neuf. Cette vacance de poste n’est bien évidemment pas sans conséquence sur le bon fonctionnement du tribunal, dans un contexte d’accroissement notable du nombre de saisines –⁠ de l’ordre de 50 % entre 2023 et 2024.
    Le remplacement rapide du magistrat manquant apparaît comme un impératif pour assurer le bon fonctionnement du service public de la justice et pour répondre aux attentes légitimes de justiciables, attachés à la justice de proximité. C’est d’ailleurs en ce sens que l’ancien ministre de la justice Éric Dupond-Moretti avait annoncé, lorsqu’il était en fonction, la création d’un poste supplémentaire de magistrat du siège et d’un poste de greffier au sein du tribunal.
    Pour l’heure, rien de tout cela n’est encore advenu. Par-delà les effets d’annonce, le gouvernement compte-t-il réellement répondre à ce problème de ressources humaines que connaît le tribunal de Cherbourg-en-Cotentin ?

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la mémoire et des anciens combattants.

    Mme Patricia Mirallès, ministre déléguée chargée de la mémoire et des anciens combattants

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    Je vous remercie pour votre question qui me permet d’apporter des précisions sur l’avancement du projet immobilier relatif au nouveau palais de justice, ainsi que sur la situation des ressources humaines du tribunal judiciaire de Cherbourg-en-Cotentin.
    D’abord, s’agissant du projet de reconstruction du palais de justice, je tiens à saluer la mobilisation des élus locaux, à laquelle vous avez participé. Nous travaillons actuellement sur la trajectoire des investissements immobiliers judiciaires pour 2026, et l’objectif est clair : répondre aux besoins des juridictions sur l’ensemble du territoire, en tenant compte des impératifs budgétaires. Dans l’immédiat, nous veillons aussi à l’entretien et à la modernisation des infrastructures existantes, grâce aux crédits dédiés au gros entretien renouvellement, le GER, et à la maintenance. Ces crédits garantissent le bon fonctionnement des implantations judiciaires actuelles.
    En ce qui concerne les ressources humaines, une vacance est anticipée pour le 1er septembre 2025 au tribunal pour enfants, sous réserve des nominations à venir, mais cette projection ne prend pas encore en compte l’affectation des auditeurs de justice, attendue mi-avril, ni les candidatures possibles lors de la transparence intermédiaire du 13 juin.
    S’agissant des attachés de justice, les deux postes sont pourvus et deux créations supplémentaires interviendront d’ici la fin de l’année 2025. Quant aux effectifs du greffe, l’effectif cible du tribunal judiciaire de Cherbourg est fixé à quarante et un agents, dont dix-huit greffiers ; à ce jour, un poste d’adjoint administratif reste vacant. Ces ajustements seront pris en compte lors des prochaines campagnes de mobilisation et de recrutement. Enfin, conformément à nos engagements, un poste supplémentaire de greffier sera bien créé en 2025.
    Soyez assurée que le gouvernement reste pleinement mobilisé pour accompagner nos juridictions et qu’il continuera à suivre avec attention la situation du tribunal judiciaire de Cherbourg-en-Cotentin.

    M. le président

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    La parole est à Mme Anna Pic.

    Mme Anna Pic

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    Il faut souligner que les personnels du tribunal ont fait de gros efforts pour s’adapter à la situation. Ils comprennent bien les difficultés financières que rencontre l’État, mais ils ont la sensation que leurs efforts ne sont pas récompensés à la bonne mesure. Avec dix magistrats, c’était compliqué ; avec neuf, c’est quasiment impossible ! Ils savent que les retards vont s’accumuler si ces problèmes ne sont pas résolus très rapidement.

    Cité judiciaire de Nancy

    M. le président

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    La parole est à M. Thibault Bazin, pour exposer sa question, no 278, relative à la cité judiciaire de Nancy.

    M. Thibault Bazin

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    Je me permets de vous interroger sur la construction de la nouvelle cité judiciaire de Nancy, dans mon département de Meurthe-et-Moselle, qui aurait dû ouvrir en 2025. Le 23 septembre 2019, Nicole Belloubet, alors ministre de la justice, annonçait la construction d’une nouvelle cité judiciaire à Nancy, en raison des conditions de travail inadaptées dans l’actuel bâtiment. Le 30 janvier 2020, le site retenu pour ce projet était désigné : il s’agit de l’ancienne friche industrielle d’Alstom à Nancy. À l’issue du concours de maîtrise d’œuvre qui avait été lancé en janvier 2021, l’agence Kaan Architecten a été sélectionnée en août 2022.
    Cependant, les travaux de déconstruction, de dépollution et de désamiantage de l’ancienne usine Alstom ont pris un retard considérable : ils n’ont toujours pas commencé. C’est la métropole du Grand Nancy qui en est chargée, puisque le foncier lui appartient encore. Elle reste à ce jour dans l’attente de l’acte administratif qui engage définitivement l’Agence publique pour l’immobilier de la justice, l’Apij, afin de pouvoir entamer le chantier de dépollution de la future cité judiciaire.
    En février 2024, l’Apij a souhaité supprimer deux articles de la promesse de vente préalablement à sa signature ; cette signature a donc été reportée une première fois. En juillet 2024, une réunion s’est tenue à la préfecture de Meurthe-et-Moselle avec les parties prenantes pour finaliser la promesse de vente ; pourtant, elle n’est toujours pas signée.
    La métropole du Grand Nancy, quant à elle, a effectué les essais de faisabilité de traitement des sols pollués et de caractérisation des bétons ; les résultats définitifs de ces tests permettent de convenir de la stratégie de dépollution à mener en 2025. Le permis de démolir de la grande halle Alstom est accordé et la consultation servant à désigner les prestataires chargés des travaux de démolition et de désamiantage a été lancée en juillet dernier ; aujourd’hui, les entreprises sont sélectionnées et leur notification est en attente. Les services de la métropole du Grand Nancy sont donc prêts à démarrer les travaux.
    Selon le ministère de la justice, le projet serait toujours en phase d’études à ce jour. Initialement prévue pour 2025, puis pour 2026, avant d’être de nouveau reportée à 2027, la livraison du nouveau tribunal semble désormais encore plus incertaine. J’ai à nouveau été interpellé à ce sujet lors de l’audience solennelle de rentrée qui a eu lieu en janvier dernier.
    Par un courrier en date du 21 mars, le garde des sceaux vient de m’informer que, compte tenu du contexte budgétaire actuel, les règles en vigueur ne permettaient pas la relance de la capacité d’investissement, ce qui a eu pour effet de décaler les opérations immobilières en cours. Toutefois, il m’a aussi assuré que la trajectoire de financement des opérations serait prochainement réétudiée, dans le cadre de l’exercice de la clause de revoyure financière prévue dans la loi d’orientation et de programmation du ministère de la justice.
    Le garde des sceaux a demandé des arbitrages favorables pour que les investissements soient à la hauteur des besoins identifiés pour ce projet. Sous quels délais le gouvernement rendra-t-il ces arbitrages et nous transmettra-t-il le calendrier actualisé ? C’est essentiel pour le personnel du ministère de la justice, qui est actuellement installé dans un bâtiment présentant des malfaçons et des infiltrations d’eau. Il y va vraiment du bon fonctionnement de la justice dans notre département de Meurthe-et-Moselle.

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la mémoire et des anciens combattants.

    Mme Patricia Mirallès, ministre déléguée chargée de la mémoire et des anciens combattants

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    Je vous remercie pour votre question qui me permet de faire un point sur l’avancement du projet de la nouvelle cité judiciaire de Nancy. Comme vous l’avez dit, le marché de maîtrise d’œuvre a été signé en février 2023 et l’opération est actuellement en phase d’études. Cependant, plusieurs éléments ont conduit à un décalage calendaire, notamment les travaux préalables de démolition et de dépollution du site, pris en charge par la métropole, ainsi que la nécessité d’intégrer l’augmentation des effectifs prévue par la loi d’orientation et de programmation du ministère de la justice.
    S’agissant de la dépollution du site, l’Agence publique pour l’immobilier de la justice et la métropole du Grand Nancy poursuivent leurs échanges afin d’aboutir à une estimation précise des travaux nécessaires et de leur coût. L’opération s’inscrit pleinement dans la programmation budgétaire en cours, notamment dans le cadre du projet de loi de finances pour 2026. L’évolution du projet –⁠ lancement de l’appel à concurrence, négociation des offres, entrée en phase de travaux – sera déterminée lors de l’élaboration du budget 2026.
    Enfin, soyez assuré que nous restons attentifs aux conditions d’exercice de la justice. Pendant la conception et la réalisation de cette opération immobilière, mes services veilleront ainsi à identifier et à programmer les travaux d’entretien nécessaires au fonctionnement optimal des sites actuels d’implantation des juridictions.

    M. le président

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    La parole est à M. Thibault Bazin.

    M. Thibault Bazin

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    Je vous remercie pour cette réponse rassurante et qui ne remet pas en cause le projet, même si la promesse de vente n’est toujours pas signée. J’ai bien compris que des échanges étaient en cours, notamment en ce qui concerne le montant final de la dépollution, et que des ajustements étaient prévus, y compris sur le projet immobilier, pour prendre en compte les moyens supplémentaires donnés à la justice –⁠ je rappelle que nous avons soutenu l’ouverture de ces crédits, ici même, lors de l’examen de la loi de programmation.
    Cela dit, pour pouvoir construire un jour, il faut préparer le terrain ; et pour préparer le terrain, il faut s’engager à signer une promesse de vente qui permette de concrétiser cette cession pour doter enfin notre département d’une cité judiciaire digne du XXIe siècle. Il faut que le gouvernement demande à l’Agence de signer cette promesse de vente, en prenant en compte l’ajustement prévu du budget de dépollution.

    Maison d’arrêt de Caen

    M. le président

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    La parole est à M. Joël Bruneau, pour exposer sa question, no 297, relative à la maison d’arrêt de Caen.

    M. Joël Bruneau

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    Je crois pouvoir dire que le territoire de Caen la mer s’est honoré en étant l’un des rares à proposer à l’État un terrain permettant de reconstruire une maison d’arrêt. Je veux donc rendre hommage à mon ancien collègue maire d’Ifs, dont l’ardent travail sur ce sujet a permis que nous jouissions, sur ce territoire, d’une maison d’arrêt moderne, correspondant à ce que l’on est en droit d’attendre tant en matière de qualité de travail des personnels pénitentiaires que de dignité des détenus.
    De ce fait, la maison d’arrêt historique de Caen, construite en 1903, a été vidée de ses détenus en décembre 2023. Mais alors qu’un appel à manifestation d’intérêt (AMI) a été lancé pour le renouvellement urbain du site, les choses semblent un peu en suspens ; c’est en tout cas ce que nous craignons, dans le contexte actuel de pénurie de places de prison dans notre pays.
    J’ajoute que c’est un lieu particulièrement chargé d’histoire, puisque c’est dans cette ancienne maison d’arrêt qu’ont été fusillés soixante-dix-sept résistants au matin du 6 juin 1944. Les occupants nazis ne voulaient laisser aucune trace d’eux et nous n’avons d’ailleurs à ce jour toujours pas retrouvé leurs corps.
    Le quartier de l’ancienne maison d’arrêt est situé au cœur de la ville de Caen. Il convient de le renouveler, de l’ouvrir sur le reste de la cité et d’en faire un véritable lieu de vie, en particulier en y construisant des logements.
    Madame la ministre chargée de la mémoire et des anciens combattants, pouvez-vous me confirmer que le gouvernement ne sera pas tenté de remettre des détenus dans l’ancienne maison d’arrêt ? Outre le nouveau centre pénitentiaire situé dans la commune d’Ifs, il existe un centre de détention à proximité de l’ancienne maison d’arrêt. Si l’agglomération comptait demain trois sites de détention, elle deviendrait sans doute celle qui accueille le plus grand nombre de détenus ramené à la population.
    D’autre part, pouvez-vous, au nom de M. le ministre de la justice, me confirmer l’engagement résolu de l’État en faveur de ce renouvellement urbain ? Nous souhaitons que l’appel à idées soit confirmé et que le processus avance le plus vite possible, en étroite collaboration avec les élus de la ville de Caen.

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la mémoire et des anciens combattants.

    Mme Patricia Mirallès, ministre déléguée chargée de la mémoire et des anciens combattants

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    Je vous remercie pour votre question. Au début du mois de décembre 2023, vous le savez, les détenus de la maison d’arrêt de Caen ont été transférés au centre pénitentiaire de Caen-Ifs. Construite en 1904, cette ancienne maison d’arrêt est située, vous l’avez dit, en plein cœur de l’agglomération. L’avenir du site a fait l’objet d’une réflexion approfondie ; en vue de sa reconversion, un appel à projets a été lancé pour examiner ses nouvelles affectations possibles.
    À ce stade, la direction de l’administration pénitentiaire n’a aucun projet en cours pour cette emprise. Le ministre de la justice a donc pris la décision de prononcer son inutilité, ce qui permettra sa remise à la direction de l’immobilier de l’État, comme le souhaite la ville de Caen. Nous veillerons à ce que cette transition se fasse dans le respect des enjeux locaux et patrimoniaux. J’espère vous avoir rassuré : la maison d’arrêt restera fermée et le site aura une autre vocation. J’espère que les projets à venir intégreront une dimension relative à la mémoire.

    M. le président

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    La parole est à M. Joël Bruneau.

    M. Joël Bruneau

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    Je vous remercie pour cette confirmation. Plus vite nous avancerons dans la reconfiguration de cette ancienne cité pénitentiaire, mieux la ville s’en portera.

    Érosion côtière dans les outre-mer

    M. le président

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    La parole est à M. Davy Rimane, pour exposer la question no 289 de M. Marcellin Nadeau, relative à l’érosion côtière dans les outre-mer.

    M. Davy Rimane

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    La question porte sur le soutien aux initiatives d’adaptation au changement climatique outre-mer. Mon collègue Marcellin Nadeau tient à rappeler au ministre d’État, ministre des outre-mer, que la question de l’érosion côtière est un problème fondamental dans lesdits outre-mer, notamment en Martinique. Il le remercie de s’être rendu en Martinique, en particulier dans l’extrême nord de l’île, pour le constater. Il précise néanmoins que la question ne se résume pas à ce risque naturel majeur, car les risques sont aussi humains et technologiques, ce qui pose un problème de gestion pour l’avenir.
    La Martinique est confrontée à de nombreux risques associés au changement climatique –⁠ élévation du niveau de la mer, submersion marine, érosion côtière – ainsi qu’à de nombreux risques technologiques. Treize des trente-quatre communes de l’île sont inscrites sur la liste des territoires exposés au recul du trait de côte, publiée en avril 2022 par le gouvernement. Elles adaptent leur politique de planification urbaine.
    Chaque année, l’océan gagne du terrain, en moyenne un mètre sur le littoral. Si l’érosion est un phénomène naturel, son accélération tient souvent aux activités humaines : prélèvement de sable, déforestation, suppression des mangroves protectrices, urbanisation, fragilisation des récifs coralliens.
    Pour prévenir ces risques, certaines communes, notamment La Trinité, ont eu recours à des ouvrages de défense tels que des enrochements ou des digues. Mais ces solutions coûteuses se révèlent souvent temporaires ou inadéquates, comme la tempête Xynthia l’a mis en évidence en France hexagonale, à Oléron.
    D’autres communes, notamment Le Prêcheur, ont développé des solutions innovantes d’adaptation à la transition écologique en déplaçant le centre-bourg dans les hauteurs, par mesure de sécurité, et en déplaçant la population concernée. Cette opération a été soutenue par le plan urbanisme, construction, architecture (Puca), mais la direction de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Deal) de la Martinique reste en attente des financements nécessaires –⁠ M. le ministre des outre-mer a pu le constater.
    De telles initiatives constituent des réponses ambitieuses au changement climatique, problème qui se pose avec d’autant plus d’acuité dans les dits outre-mer. Par quel accompagnement le gouvernement compte-t-il appuyer ces initiatives ? Nous insistons sur l’opportunité pour le ministère des outre-mer, qui est présent sur tous les océans du globe, de prendre des mesures fortes en cette année 2025, déclarée symboliquement année de la mer.

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’autonomie et du handicap.

    Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée de l’autonomie et du handicap

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    Permettez-moi de vous répondre au nom du ministre des outre-mer, qui est en ce moment en Nouvelle-Calédonie.
    Vous évoquez l’urgence qui s’attache à l’adaptation au changement climatique dans les outre-mer et, plus spécifiquement, le problème du recul du trait de côte. Bien évidemment, les territoires ultramarins sont particulièrement exposés à l’érosion côtière, notamment du fait de leur insularité. Selon deux rapports remis en avril 2024 par le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema), le territoire français le plus touché à l’horizon 2050 serait la Guadeloupe, où 552 logements deviendraient inhabitables ; la Martinique serait également affectée, puisque 284 habitations y seraient menacées. Au total, 1 190 habitations seraient menacées par l’érosion du littoral dans nos outre-mer dans les vingt-cinq prochaines années.
    Le troisième plan national d’adaptation au changement climatique, présenté le 10 mars dernier, précise que les spécificités géographiques des outre-mer appellent la définition d’une stratégie d’adaptation pour chaque territoire, définie localement avec l’appui de moyens locaux et nationaux, et la mise en place d’une organisation dédiée. L’élaboration de cette stratégie doit être rattachée aux travaux des COP –⁠ conférences des parties – territoriales de planification écologique. Il convient notamment de déterminer les actions à réaliser dans le volet « adaptation » de la feuille de route qui sera issue de ces COP territoriales en 2025. Qu’il s’agisse de prendre des mesures de protection des populations et des infrastructures essentielles, d’actualiser les plans de prévention des risques naturels majeurs ou d’élaborer des cartes locales d’exposition, le recul du trait de côte a vocation à constituer une priorité incontournable des stratégies locales.
    Afin de compléter le rapport remis en novembre 2023 par l’Inspection générale de l’environnement et du développement durable (Igedd) et l’Inspection générale de l’administration (IGA), qui portait essentiellement sur l’Hexagone, une mission d’inspection sur le financement des conséquences du recul de trait de côte des départements et régions d’outre-mer a été lancée. Nous disposerons ainsi d’un inventaire fiable et d’une évaluation de la valeur des biens menacés d’ici à cinq ans et à moyen terme. La mission devra identifier les sources de financement pour anticiper le repli territorial et les éventuelles adaptations nécessaires et pour déterminer les zones à protéger en priorité. Ses conclusions sont attendues avant la fin du premier semestre 2025. Un point intermédiaire sera demandé afin de nourrir les réflexions du prochain comité interministériel des outre-mer (Ciom), qui accordera une place importante aux enjeux d’adaptation aux effets du changement climatique dans ces territoires.

    M. le président

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    La parole est à M. Davy Rimane.

    M. Davy Rimane

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    Je vous remercie pour votre réponse. J’espère que nous obtiendrons rapidement les précisions nécessaires à la mise en œuvre de l’adaptation au changement climatique dans tous les territoires dits d’outre-mer. En effet, le temps joue contre nous : l’érosion côtière se poursuit et les déplacements de population ont déjà commencé.

    Lutte contre le trafic de stupéfiants en Meurthe-et-Moselle

    M. le président

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    La parole est à M. Anthony Boulogne, pour exposer sa question, no 304, relative à la lutte contre le trafic de stupéfiants en Meurthe-et-Moselle.

    M. Anthony Boulogne

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    Ma question s’adresse au ministre de l’intérieur, qui avait déclaré que la lutte contre le trafic de stupéfiants était une priorité nationale, la France étant désormais gangrenée par ce trafic au même titre que certains pays d’Amérique latine. Dans ma circonscription, je reçois des témoignages toujours plus nombreux à ce sujet. Vous le savez, nos villages sont de plus en plus concernés.
    Depuis le début de l’année, plusieurs points de deal ont été démantelés en Meurthe-et-Moselle. En février, dans plusieurs communes de l’agglomération nancéenne, notamment à Maxéville, de la drogue en provenance des Pays-Bas a été saisie, ainsi que d’importantes quantités d’argent et plusieurs armes chargées, dont une de guerre. Il en a été de même à Pont-à-Mousson. Les individus interpellés sont majoritairement –⁠ surprise ! – en situation irrégulière.
    Dans les campagnes lorraines, les laboratoires de drogue se multiplient. Je ne cite qu’un exemple : dans le village de Moivrons, qui compte 500 habitants, les enquêteurs viennent de mettre la main sur un site de préparation artisanale d’héroïne.
    Lors du récent débat sur la proposition de loi relative à la lutte contre le narcotrafic, les Français ont été stupéfaits d’apprendre que des stupéfiants étaient livrés par drone dans les prisons, notamment dans celle de Nancy-Maxéville.
    Dans ce contexte, je tiens à saluer le travail accompli par nos forces de police et de gendarmerie ; leur mobilisation en faveur de la sécurité de nos compatriotes est exemplaire. C’est un travail approfondi et minutieux, qui exige de disposer de moyens et d’effectifs importants. Or force est de constater que le compte n’y est pas. Dans mon département, les syndicats estiment qu’il manque environ une cinquantaine d’officiers de police judiciaire.
    Comme nombre de nos compatriotes, les Meurthe-et-Mosellans attendent une réponse forte pour lutter contre ce fléau à l’origine de tant de morts. Dans quelle mesure le gouvernement compte-t-il renforcer les moyens dans mon département et dans ma circonscription pour enrayer le développement de ces trafics et rétablir la sécurité des habitants ?

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’autonomie et du handicap.

    Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée de l’autonomie et du handicap

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    Permettez-moi de vous apporter la réponse préparée par le ministre de l’intérieur.
    Vous avez raison, les trafics de stupéfiants s’ancrent désormais sur le territoire national, dans les grandes villes comme dans les campagnes. Le développement et la modification des circuits de distribution ont entraîné une extension des trafics depuis les secteurs urbains vers les zones périurbaines et rurales. Plus aucun département de notre pays n’est épargné par le narcotrafic.
    Face à ce fléau, une mobilisation générale s’impose, bien au-delà des seules forces de l’ordre. C’est donc une riposte globale que nous avons engagée. Les consommateurs, collaborateurs actifs du trafic, doivent eux aussi être mis face à leurs responsabilités. S’il faut frapper sans faiblesse les délinquants, il faut également en finir avec une complaisance trop largement répandue.
    Des modes d’action adaptés et mobilisant tous les moyens à la main de l’État doivent être mis en place : investigation, occupation du terrain et contrôles administratifs. C’est dans cet esprit que le ministre de l’intérieur a fixé aux préfets et aux forces de l’ordre une méthode et des objectifs très clairs, offrant toute latitude à leur connaissance des territoires. Dans cette lutte acharnée, État et collectivités doivent agir ensemble. C’est l’objet du plan d’action départemental de restauration de la sécurité du quotidien, présenté le 21 février par la préfète de Meurthe-et-Moselle, où l’héroïne est le produit le plus répandu ; la proximité avec la Belgique, le Luxembourg et les Pays-Bas en est la cause.
    Dans ce département, la direction interdépartementale de la police nationale s’appuie sur près de 1 100 agents, dont plus de 380 dans les seuls services spécialisés de police judiciaire. Ces policiers sont à l’offensive et traquent les trafiquants vingt-quatre heures sur vingt-quatre. En 2024, trente-quatre opérations visant le démantèlement de points de deal ont été conduites par les forces de l’ordre dans la Meurthe-et-Moselle. Elles ont abouti à près de quatre-vingt-dix gardes à vue, à vingt-six écrous et à la saisie de plus de 200 000 euros d’avoirs criminels. Depuis le début de l’année, trois nouvelles opérations de ce type ont été menées.
    Le nombre de points de deal est passé de vingt-huit début 2024 à vingt et un aujourd’hui. C’est encore trop, mais nous portons des coups au trafic. Grâce au travail de la cellule de renseignement opérationnel sur les stupéfiants (Cross), cinq réseaux de trafiquants ont été démantelés l’an dernier dans la Meurthe-et-Moselle, plus de vingt individus ont été écroués et plus de 40 kilogrammes de cocaïne ont été saisis.
    Face aux consommateurs, nos services de police et de gendarmerie ne laissent rien passer non plus : 1 041 amendes forfaitaires délictuelles leur ont été infligées en 2024, et déjà près de 150 cette année.
    L’action de la gendarmerie en matière de lutte contre les stupéfiants a elle aussi permis d’obtenir des résultats probants dans le département : soixante-cinq trafiquants ont été mis en cause en 2024. Les gendarmes ont conduit des enquêtes sous pseudonyme pour démanteler les trafics, notamment ceux dits Uber shit, qui comprennent des offres de livraison et des vitrines sur les réseaux sociaux.
    Il nous faut enfin des moyens techniques et juridiques adaptés ; nous devons réarmer l’État. La proposition de loi visant à sortir la France du piège du narcotrafic, fondée sur une approche transversale, constitue une avancée majeure dans la lutte contre la criminalité organisée. Ces mesures, qui ciblent à la fois les trafiquants, leurs réseaux et leurs avoirs criminels, renforceront l’arsenal législatif et opérationnel contre le narcotrafic. Le texte a été adopté à l’unanimité par le Sénat le 4 février. Le ministre de l’intérieur souhaite qu’il recueille le même soutien transpartisan lorsqu’il sera soumis au vote de votre assemblée.

    M. le président

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    La parole est à M. Anthony Boulogne.

    M. Anthony Boulogne

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    Merci pour le constat et pour les chiffres que vous venez de nous fournir. S’agissant du texte que l’Assemblée s’apprête à voter, votre gouvernement pourra dire merci au Rassemblement national, car les députés qui vous soutiennent n’ont pas été nombreux dans l’hémicycle pour le défendre. S’il est adopté en l’état, c’est grâce à nous. Les Français nous en remercieront.

    Centre hospitalier intercommunal Marmande-Tonneins

    M. le président

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    La parole est à Mme Hélène Laporte, pour exposer sa question, no 302, relative au centre hospitalier intercommunal Marmande-Tonneins.

    Mme Hélène Laporte

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    Né en 1995 de la fusion des hôpitaux de Marmande et de Tonneins, le centre hospitalier intercommunal (CHIC) Marmande-Tonneins est la troisième structure médicale de mon département du Lot-et-Garonne, derrière le centre hospitalier Agen-Nérac et le pôle de santé du Villeneuvois. Depuis la fermeture des deux cliniques privées marmandaises en 2012 et 2015, il constitue le seul établissement de santé d’un bassin de vie comptant 100 000 habitants et, avec le centre hospitalier de Casteljaloux, le seul situé à l’ouest du département.
    En 2019, il comptait 180 lits et 27 places d’hospitalisation partielle ou ambulatoire en médecine, chirurgie et obstétrique, 50 lits de soins de suite et de réadaptation, 27 lits en unité de soins de longue durée, 195 places en Ehpad et 30 places en services de soins infirmiers à domicile.
    Pour la population, majoritairement rurale, du Marmandais et du Tonneinquais, cet hôpital représente une structure vitale, seule garante de l’accès aux soins à des dizaines de kilomètres à la ronde, une situation que la Cour des comptes a pointée dès 2019. Dans un contexte de désertification médicale croissante, cette offre de soins ne saurait être réduite sans compromettre la santé publique du territoire : pour les habitants, le CHIC Marmande-Tonneins est la seule solution.
    Se retrouvant seul sur le front de la santé publique en bassin marmandais et tonneinquais, le CHIC a récupéré personnel et patientèle des anciennes structures privées. Son activité a donc connu durant les années 2010 une hausse singulière, accentuée par le vieillissement de la population et la dégradation de l’accès à la médecine de ville. C’est dans ces conditions qu’un important déficit est né. Il s’élevait à 1,8 million d’euros en 2017 et s’est creusé depuis, pour atteindre aujourd’hui près de 10 millions d’euros. Les charges courantes sont en augmentation constante depuis plus d’une décennie et l’hôpital lutte financièrement pour poursuivre une activité qui, nous l’avons dit, est irremplaçable.
    J’en viens à mes deux questions. La première concerne le désengagement progressif des collectivités publiques vis-à-vis du CHIC observé depuis plusieurs mois. Après avoir subventionné en 2023 l’agrandissement de l’Institut de formation des personnels de santé à hauteur d’1 million d’euros pour augmenter ses capacités d’accueil d’étudiants, le conseil régional a demandé en début d’année une réduction de 30 % des effectifs afin de les porter de soixante-quinze à cinquante-deux places. Certes, nous avons eu l’assurance que l’Institut accueillerait soixante-quinze étudiants de première année en 2025 mais est-ce un revirement durable ou un simple sursis ? Une chose est certaine : si cette réduction d’effectif venait à se réaliser, les conséquences pour les services hospitaliers seraient délétères.
    Ma seconde question concerne la direction du CHIC : après neuf ans à la tête de la structure, le directeur, M. Philippe Meyer, a annoncé son départ dans le courant de l’année 2025. Depuis, au sein du personnel et des patients de l’hôpital, une inquiétude occupe les esprits : celle que M. Meyer ne soit pas remplacé et que la structure soit placée sous une direction partagée avec le centre hospitalier Agen-Nérac, étant observé qu’il y a cinquante minutes de route entre Marmande et Agen. Si cette perspective inquiète, c’est qu’il ne s’agit pas d’une simple question d’organisation administrative. Derrière la suppression ou la mise sous tutelle du CHIC, il y a la crainte –⁠ ô combien légitime – d’un nouvel appauvrissement de l’offre de soins en bassin marmandais et tonneinquais après deux décennies de dégradation marquées par la fermeture des cliniques marmandaises.
    Madame la ministre, pouvez-vous nous confirmer d’une part, que le nombre de places de formation sera stabilisé et, d’autre part, qu’il n’y aura pas de direction partagée du CHIC ?

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’autonomie et du handicap.

    Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée de l’autonomie et du handicap

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    Vous avez appelé l’attention du gouvernement sur les inquiétudes exprimées par le personnel et les usagers du CHIC de Marmande-Tonneins. Je tiens à vous assurer que les préoccupations relatives à la pérennité de cette structure sont pleinement entendues et prises en compte par les services de l’État, notamment l’agence régionale de santé (ARS) Nouvelle-Aquitaine. Il est vrai que, depuis plusieurs années, l’établissement connaît un déficit budgétaire croissant, conjugué à des tensions de trésorerie. Pour accompagner au mieux la structure, l’ARS lui apporte un soutien régulier, notamment via des aides de trésorerie. En outre, un suivi rapproché est assuré dans le cadre d’un dispositif de veille conjoint entre l’ARS et la direction générale des finances publiques (DGFIP). Enfin, lors de la réunion du conseil de surveillance du 19 mars 2025, il a été proposé de lancer un audit complet afin de disposer d’un diagnostic partagé sur les leviers d’amélioration à mobiliser.
    À propos de la formation des soignants, je souligne que la région Nouvelle-Aquitaine est finalement revenue sur son projet de baisse des capacités à l’Institut de formation des professionnels de santé. Cette décision est essentielle pour répondre aux besoins de personnels soignants sur le territoire.
    En ce qui concerne le départ annoncé du directeur actuel du CHIC, les travaux sont engagés pour organiser une période d’intérim, de préférence confié à un chef d’établissement hors département. Cette solution vise à rassurer les équipes en écartant l’hypothèse d’une direction commune partagée avec une autre institution et à apporter un regard objectif sur la situation budgétaire et organisationnelle du CHIC.
    Je rappelle qu’aucun signal inquiétant n’a été remonté concernant la qualité ou la sécurité des soins dans l’établissement : cela témoigne de l’investissement des équipes médicales et soignantes, que je salue.
    Aux côtés des élus et des acteurs locaux, l’État demeure pleinement mobilisé pour garantir à la population du Marmandais et du Tonneinquais l’accès à des soins de qualité.

    M. le président

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    La parole est à Mme Hélène Laporte.

    Mme Hélène Laporte

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    Madame la ministre, je vous remercie pour ces précisions. J’espère que le maintien des effectifs ne concernera pas la seule année 2025. Si tel était le cas, je me permettrais de vous interroger de nouveau car il nous faut trouver des solutions pérennes pour cet hôpital qui est le seul établissement de santé à cinquante kilomètres à la ronde.

    Accès aux soins

    M. le président

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    La parole est à M. Bastien Marchive, pour exposer sa question, no 285, relative à l’accès aux soins.

    M. Bastien Marchive

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    Autrefois reconnu comme un modèle, notre système de santé semble aujourd’hui entré dans une lente agonie : les soignants manquent, les hôpitaux sont saturés, le reste à charge augmente et les délais de consultation explosent. Les gouvernements successifs ont pourtant agi : suppression du numerus clausus, aides à l’installation, Ségur, déploiement de la télémédecine et des assistants médicaux ou encore création des maisons de santé. Mais rien n’y fait. Six millions de Français n’ont pas de médecin traitant, et les panneaux indiquant « commune recherche médecin » fleurissent un peu partout, chez nous dans les Deux-Sèvres, comme ailleurs. C’est une réalité : à mesure que nous manquons toujours davantage de médecins, le temps médical devient particulièrement précieux.
    Dans ce contexte de crise, comment expliquer que l’on n’ouvre pas des formations supplémentaires dans les territoires qui en ont le plus besoin et qu’il n’existe encore aucun mécanisme dissuasif pour encadrer les installations dans les zones déjà surdotées ? Comment comprendre que, pour un médecin étranger, il soit plus difficile de pratiquer en France qu’ailleurs ? Même si de nombreux progrès ont été faits en la matière, comment est-il possible de continuer à mobiliser des médecins pour des pathologies qu’infirmiers ou pharmaciens savent appréhender ? Enfin, comment expliquer que les infirmiers en pratique avancée (IPA) ne soient pas reconnus par la médecine du travail et qu’un texte récent remette en cause la faculté qui leur avait été accordée de renouveler des ordonnances ?
    Madame la ministre, ce ne sont là que quelques exemples de questions soulevées par nos concitoyens lors de mes rencontres locales avec eux et révélatrices de leurs incompréhensions. Si nous devons éviter le piège de solutions simplistes ou de fausses bonnes idées qui entameraient l’attractivité de fonctions médicales déjà contraignantes, vous conviendrez que nous ne pouvons nous contenter d’attendre. C’est pourquoi je vous remercie pour vos réponses à ces interrogations que je relaie, dans l’espoir que nous mettions, ensemble, un terme aux déserts médicaux.

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’autonomie et du handicap.

    Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée de l’autonomie et du handicap

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    Permettez-moi de vous apporter la réponse du ministre de la santé : il confirme que, dans les Deux-Sèvres, comme ailleurs malheureusement, l’accès aux soins est devenu une difficulté quotidienne. Six millions de Français n’ont pas de médecin traitant et les délais pour obtenir une consultation avec un médecin sont parfois supérieurs à un an dans certaines spécialités.
    Face à cette réalité, nous ne pouvons nous contenter de faire « un peu plus », il nous faut changer d’échelle. Nous nous y employons ! Notre stratégie repose sur le pilier fondamental de la formation : sans professionnels de santé, il n’y a pas d’accès aux soins ! Aujourd’hui, nous formons le même nombre de médecins qu’en 1970 alors que la France compte quinze millions d’habitants supplémentaires ! Il faut 2,3 jeunes médecins pour remplacer un seul départ à la retraite.
    C’est pourquoi le gouvernement a encouragé un véritable choc de formation qui passe par la mise en œuvre de la quatrième année d’internat en médecine générale dès novembre 2026 avec 3 700 docteurs juniors présents dans tous les départements, la suppression du numerus apertus au profit d’objectifs de formation définis territorialement, la mobilisation des universités, des agences régionales de santé (ARS) et des collectivités pour ouvrir davantage de stages en dehors des centres hospitaliers universitaires (CHU) et le retour des 12 000 étudiants français partis se former à l’étranger faute de places chez nous. Les ministres de la santé et de l’enseignement supérieur réuniront, dès le mois prochain, tous les doyens de faculté pour accélérer ce mouvement. Les premiers ajustements pourront être mis en œuvre dès la rentrée 2025. Nous devons former mieux, plus et partout !
    Ce n’est pas tout : nous facilitons aussi l’exercice des médecins étrangers avec une procédure d’intégration simplifiée, un statut protecteur et l’ouverture de 4 000 places cette année aux épreuves de vérification des compétences.
    Nous accompagnons mieux nos soignants en revalorisant à 30 euros le prix de la consultation, en déployant des assistants médicaux et en soutenant l’exercice coordonné dans les maisons de santé.
    Monsieur le député, nous ne construisons pas une réforme isolée mais un changement de modèle : davantage de formation, davantage de coordination et de reconnaissance et, surtout, une réponse plus ancrée dans les besoins des territoires.

    M. le président

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    La parole est à M. Bastien Marchive.

    M. Bastien Marchive

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    Je vous remercie pour votre réponse. Comme vous, et comme l’ensemble des acteurs de la santé, qu’ils interviennent dans le secteur médical, le secteur hospitalier ou le secteur socio-médical –⁠ secteur également touché par le manque de main-d’œuvre et de moyens – j’appelle de mes vœux un changement de modèle ; nous serons à vos côtés pour le mettre en œuvre.
    Vous avez évoqué certaines réformes en cours : il faut aller plus loin, notamment en matière d’optimisation du maillage territorial. Si une proposition de loi visant à imposer aux médecins leur lieu d’installation a été repoussée en commission –⁠ cette idée fait partie des fausses bonnes idées que j’ai évoquées précédemment car elle aurait des répercussions négatives sur l’attractivité des fonctions médicales – il n’en demeure pas moins que nous devons être exigeants vis-à-vis des médecins qui souhaitent exercer dans des zones surdotées. Je me tiens à votre disposition pour travailler sur des mécanismes dissuasifs afin que les moyens récoltés soient mis au service de ceux qui, eux, font preuve d’esprit de responsabilité et choisissent de s’installer dans des territoires qui ont besoin d’eux.

    Centre hospitalier de Saint Quentin

    M. le président

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    La parole est à M. Julien Dive, pour exposer sa question, no 279, relative au centre hospitalier de Saint Quentin.

    M. Julien Dive

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    Si, comme Michel Barnier avant lui, François Bayrou a désigné la santé mentale comme grande cause nationale pour l’année 2025, la psychiatrie demeure une grande oubliée en France, particulièrement dans mon département de l’Aisne ! Avec la neutralisation des lits d’hospitalisation du centre Hilaire Cordier de Saint-Quentin en 2023, toute l’organisation de la prise en charge psychiatrique du département a été déséquilibrée. Cette décision n’a pas été compensée : aucune alternative structurelle, aucun renforcement des autres établissements, aucun plan de soutien aux équipes médicales n’a été proposé. Les autres services psychiatriques du département, déjà sous tension, ont dû absorber en urgence un afflux massif de patients, sans moyens supplémentaires et sans renfort humain.
    Cette fermeture est intervenue dans un contexte déjà profondément dégradé. Les professionnels de la psychiatrie nous alertent en effet depuis des années sur la pénurie de psychiatres dans l’Aisne, l’épuisement des équipes et la désaffection des jeunes médecins pour la spécialité !
    Le service psychiatrique du Centre hospitalier de Saint-Quentin est aujourd’hui emblématique de cette crise. Les départs de praticiens se multiplient. Les équipes sont en sous-effectif permanent. La charge de travail est devenue ingérable, aggravée par une réforme de l’hospitalisation, qui a alourdi les procédures sans améliorer la prise en charge. En bout de chaîne, des patients en souffrance se retrouvent sans réponse. Le manque de moyens, tant humains que matériels, demeure un obstacle majeur au développement de projets pourtant indispensables, telle la création d’un service mère-enfant pour accompagner les patientes en souffrance ou la mise en œuvre d’une véritable politique d’attractivité pour faire venir des praticiens dans le département. Et les besoins ne faiblissent pas, surtout chez les jeunes : le suicide est la première cause de mortalité chez les 25-34 ans, la deuxième chez les 15-24 ans. À l’échelle nationale, une personne sur deux sera confrontée à un trouble psychiatrique au cours de sa vie.
    Ce sombre tableau ne doit pas conduire à un renoncement de la part des pouvoirs publics : il n’y a pas de fatalité à ce que la psychiatrie demeure le parent pauvre de la médecine ! C’est pour cette raison, madame la ministre, que je vous interroge sur les mesures concrètes que le gouvernement entend mettre en œuvre pour améliorer l’offre de soins en matière psychiatrique dans l’Aisne et soutenir le centre hospitalier de Saint-Quentin.

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’autonomie et du handicap.

    Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée de l’autonomie et du handicap

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    Je me permets de vous transmettre la réponse de M. le ministre de la santé. Le centre hospitalier de Saint-Quentin a effectivement été mis en grande difficulté à la suite des départs simultanés et inopinés de plusieurs psychiatres en octobre 2023. Une réorganisation a été engagée afin de garantir la continuité des soins. L’hospitalisation conventionnelle a été désectorisée et les autres établissements du département ont été mobilisés, en particulier l’établissement public de santé mentale départemental de l’Aisne, situé à Prémontré, qui assure désormais les soins sans consentement du département.
    Le centre hospitalier de Saint-Quentin maintient toutefois son activité de prise en charge des urgences et l’hospitalisation de jour et en ambulatoire. Tout est donc fait pour assurer la continuité des soins et la qualité du parcours des patients.
    Cependant, consciente de la fragilité de la situation, la direction du centre hospitalier de Saint-Quentin, avec l’appui de l’agence régionale de santé (ARS) des Hauts-de-France, est à la recherche de toutes les solutions permettant de retrouver une dynamique de service. La priorité est donnée au maintien de l’équipe en place –⁠ qui doit être soutenue – et à la recherche de renforts médicaux. La liste des postes est bien entendu publiée et nous sommes en attente de candidats.
    Par ailleurs, l’aide d’autres établissements a été sollicitée, notamment celle du centre hospitalier universitaire Amiens-Picardie. Le travail est en cours. L’objectif est bien de reconstituer une capacité d’accueil en hospitalisation conventionnelle pour les soins psychiatriques à Saint-Quentin.

    M. le président

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    La parole est à M. Julien Dive.

    M. Julien Dive

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    Vous l’avez souligné, les professionnels ont une réelle volonté d’assurer la continuité des soins. C’est incontestable : la direction et les équipes du centre hospitalier de Saint-Quentin font leur travail, et l’ARS des Hauts-de-France est également mobilisée afin de faire face au manque de professionnels.
    Vous avez rappelé, à juste titre, que des postes avaient été ouverts et qu’ils n’étaient pas encore pourvus. La réponse se trouve bien sûr au niveau national. Il faut agir selon moi sur deux leviers.
    Je pense premièrement aux examens. On a en effet constaté cette année une sévérité peut-être plus forte qu’habituellement : peu de candidats ont passé les examens et, parmi eux, un grand nombre a été placé sur liste d’attente.
    Deuxièmement, pour que le service soit assuré, nous pourrions faire appel aux professionnels étrangers, les Padhue, les praticiens à diplôme hors Union européenne, une catégorie bien connue. Or nous n’avons pas mis les moyens nécessaires pour rendre les postes attractifs, en particulier en province, dans un territoire comme l’Aisne, considéré comme un département rural.
    Enfin, ayons une vision prospective. On a bien conscience sur le terrain que d’autres professionnels de la psychiatrie risquent de partir à leur tour, en raison de leur âge ou pour des motifs personnels. Il nous faut donc anticiper cette situation. J’invite le ministre de santé à se rendre dans l’Aisne pour apporter des éléments de réponse à la suite de mon interpellation.

    Centres de santé

    M. le président

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    La parole est à M. Jean-Claude Raux, pour exposer sa question, no 282, relative aux centres de santé.

    M. Jean-Claude Raux

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    Les centres de santé jouent un rôle essentiel pour permettre l’accès aux soins, dans des territoires où la désertification médicale est criante, pour toutes et tous, en particulier les personnes qui ne peuvent se permettre le luxe des dépassements d’honoraires ou même des avances de frais.
    On recense environ 3 000 centres de santé en France, dont 1 200 médicaux. Ils constituent ainsi un maillon essentiel du service public de santé de proximité. On doit leur développement, en grande partie, aux collectivités territoriales, affligées par la disparition des médecins et agacées de l’inaction de l’État.
    Or ces structures font face à de nombreuses contraintes qui freinent leur essor et fragilisent leur pérennité. Un récent rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) énumère ces difficultés : manque d’accompagnement des autorités sanitaires, complexité administrative ou encore financements inappropriés ne prenant pas en considération leurs spécificités. Les gestionnaires des centres de santé dénoncent des sous-évaluations des coûts de fonctionnement et des délais de paiement souvent trop longs.
    Pourtant, d’autres solutions existent. L’expérimentation du paiement en équipe de professionnels de santé en ville –⁠ plus connu sous l’acronyme Peps – a montré l’intérêt d’une rémunération forfaitaire par capitation, c’est-à-dire reposant sur la patientèle plutôt que sur les actes réalisés. Il faut généraliser cette modalité de rémunération, qui favorise une meilleure qualité de prise en charge, à tous les centres de santé pluriprofessionnels volontaires.
    Le recrutement et la fidélisation des professionnels de santé représentent d’autres défis pour les centres de santé. À cet égard, une rémunération attractive est nécessaire. La subvention dite Teulade, créée en 1991, est aujourd’hui insuffisante et son accès est rendu difficile par des lourdeurs administratives. Il est urgent d’en augmenter le taux et d’en simplifier le versement.
    Par ailleurs, j’ai été saisi dans mon département, la Loire-Atlantique, d’une interrogation spécifique sur la certification des comptes des centres de santé. Sur ce point, votre éclairage semble nécessaire pour éviter toute incertitude juridique.
    J’ajoute que, cette semaine, nous devrions enfin avoir l’occasion d’examiner une proposition de loi transpartisane visant à lutter contre les déserts médicaux. Or les centres de santé à but non lucratif et pluriprofessionnels font partie intégrante des solutions pour rendre accessible le service public de santé de proximité à toutes les populations et dans tous les territoires, en complétant l’offre libérale sans la concurrencer.
    Face à l’ensemble de ces constats, quelles mesures concrètes le gouvernement prendra-t-il pour lever les freins et soutenir le développement des centres de santé pluriprofessionnels ? Comment comptez-vous garantir un modèle économique viable, qui assure un accès aux soins pour tous, sur l’ensemble du territoire ?

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’autonomie et du handicap.

    Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée de l’autonomie et du handicap

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    Je me permets de vous transmettre la réponse du ministre de la santé, que vous interrogez sur les difficultés des centres de santé et sur l’évolution de leur mode de rémunération. Le gouvernement partage pleinement votre préoccupation et reste mobilisé pour lever les freins à leur bon fonctionnement, assurer leur pérennité et accompagner leur développement.
    Les centres de santé sont des structures de proximité essentielles, délivrant des soins ambulatoires accessibles grâce au tiers payant obligatoire et à l’absence de dépassement d’honoraires. Ils sont au cœur de la politique de renforcement des soins de ville, avec un objectif de 700 centres pluriprofessionnels d’ici à 2027. Fin 2023, on en comptait déjà 638.
    Les difficultés économiques et administratives que vous soulignez sont bien identifiées. Le ministère travaille en lien étroit avec l’assurance maladie et les représentants du secteur pour mettre en œuvre les recommandations issues du rapport de l’Igas que vous avez mentionné.
    Plusieurs axes sont engagés. Premièrement, la discussion du modèle économique se poursuit dans le cadre du financement conventionnel. Ensuite, des simplifications sont étudiées, notamment s’agissant de l’accès à la subvention dite Teulade. D’autre part, un allègement des obligations administratives et comptables est en cours –⁠ un guide vient d’ailleurs d’être publié à ce sujet.
    L’attractivité des centres auprès des professionnels de santé doit aussi être renforcée car ils offrent une solution alternative, complémentaire de l’exercice libéral, que nous soutenons.
    Enfin, nous voulons faire de l’exercice isolé l’exception. Le travail en équipe et la délégation de tâches sont essentiels pour améliorer l’accès aux soins et la qualité de la prise en charge.
    Soyez assuré de notre engagement total pour soutenir les centres de santé et garantir à chacun un accès équitable aux soins.

    M. le président

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    La parole est à M. Jean-Claude Raux.

    M. Jean-Claude Raux

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    Nous débattrons demain de la proposition de loi transpartisane visant à lutter contre les déserts médicaux. Elle comprend un article sur la régulation de l’installation des médecins qui a suscité une levée de boucliers quelque peu disproportionnée.
    Nous savons qu’il n’existe pas de solution miracle qui résoudrait le problème de la désertification médicale. En tout état de cause, force est de constater l’absence de réponse appropriée sur l’ensemble des territoires. Si, bien sûr, nous ne souhaitons pas opposer médecine libérale et centres de santé, nous constatons que l’exercice salarié est aujourd’hui attractif. Nous devons orienter toute notre énergie vers la défense du développement des centres de santé, qui constituent non pas la solution unique mais une des réponses.

    Lutte contre la pollution au mercure en Guyane

    M. le président

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    La parole est à M. Davy Rimane, pour exposer sa question, no 288, relative à la lutte contre la pollution au mercure en Guyane.

    M. Davy Rimane

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    Je souhaite appeler l’attention du ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins sur l’utilisation inquiétante du mercure dans les activités d’orpaillage illégal en Guyane.
    Depuis des dizaines d’années, des centaines de tonnes de mercure ont été déversées dans les écosystèmes terrestres et aquatiques amazoniens, notamment dans le fleuve Maroni –⁠ et autour de celui-ci – en Guyane.
    Les conséquences dramatiques de cette contamination sur l’environnement, la santé des populations locales et l’économie de la région sont multiples : déforestation, destruction des sols, érosion accrue et pollution des eaux utilisées pour la consommation et les activités quotidiennes.
    Les communautés autochtones, en particulier le peuple autochtone Wayana, qui vit sur les rives du fleuve Maroni, sont particulièrement affectées. Elles sont en effet quotidiennement exposées aux rejets de mercure, avec un impact dévastateur sur leur santé. La situation est d’autant plus critique que le mercure peut devenir du méthylmercure, un neurotoxique puissant qui contamine des espaces de vie.
    À l’occasion des deux derniers projets de loi de finances, j’avais proposé d’établir un plan Mercure, à l’image des plans Chlordécone engagés depuis 2009. Il marquerait une première étape pour mieux comprendre les responsabilités dans la pollution au mercure et cerner ses conséquences sur l’environnement, la santé et l’économie locale. Il permettrait également de créer un comité de pilotage, qui veillerait au renforcement des mesures de protection des populations. Enfin, il donnerait l’occasion de lancer des programmes de santé publique pour protéger les populations exposées, et d’abord celles qui vivent sur les rives du Maroni.
    Je le répète : il est crucial de lancer un plan Mercure pour la Guyane. Je finalise d’ailleurs actuellement une proposition de loi en ce sens. Alors que ce territoire est directement et lourdement affectée par le mercure utilisé par les orpailleurs illégaux, pourriez-vous indiquer clairement si le gouvernement est prêt à apporter son soutien à une telle proposition, destinée à protéger les populations et les écosystèmes de cette contamination dramatique ?

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’autonomie et du handicap.

    Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée de l’autonomie et du handicap

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    Le ministre de la santé m’a chargée de vous transmettre sa réponse à votre question, qui met en lumière un phénomène qui fait l’objet d’une attention toute particulière du gouvernement. Je vous remercie d’ailleurs de sensibiliser la représentation nationale à cette situation.
    Vous l’avez dit, depuis plusieurs décennies, l’utilisation du mercure élémentaire dans les activités d’orpaillage en Guyane a entraîné une contamination importante et répétée de l’environnement. Le mercure qui pénètre dans les milieux aquatiques est converti en méthylmercure, particulièrement toxique.
    Actuellement, l’orpaillage clandestin ainsi que la remobilisation des stocks de mercure existants à partir des sols et sédiments contaminés contribuent à une contamination des populations locales. Parmi celles-ci, les plus touchées sont celles qui consomment régulièrement du poisson des fleuves, notamment autour de l’Oyapock et du Maroni. Les femmes enceintes qui allaitent et les jeunes enfants sont les publics les plus à risque car le mercure a des effets graves sur le développement du système nerveux.
    Face à cette situation, plusieurs actions ont été engagées. Tout d’abord, depuis 2008, l’opération Harpie vise à lutter sur le terrain contre l’orpaillage illégal, avec des destructions de sites et des saisies de matériel.
    Ensuite, le ministère de la santé mène une action en matière de détection des personnes contaminées, grâce à des analyses capillaires ; il conduit également des actions de prévention, notamment auprès des femmes enceintes –⁠ des recommandations spécifiques pour leur prise en charge ont été publiées en 2017.
    D’autre part, la stratégie métaux lourds, dite StraMéLo, lancée en 2021, vise à coordonner les efforts sanitaires, alimentaires, agricoles, environnementaux et de recherche pour lutter contre l’exposition aux métaux lourds.
    Enfin, le dispositif de toxicovigilance mis en place dans les Antilles en 2014 contribue à cette lutte. Il informe et accompagne les professionnels de santé et la population sur les risques liés à l’exposition aux substances toxiques, en lien avec l’agence régionale de santé et les agences nationales.

    M. le président

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    La parole est à M. Davy Rimane.

    M. Davy Rimane

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    Je vous remercie pour votre réponse même si elle n’est pas satisfaisante au vu de la situation que nous traversons. Vous l’avez rappelé, cette pollution est connue de l’État depuis plusieurs décennies. Or celui-ci n’a toujours pas changé de doctrine en matière de lutte contre l’orpaillage illégal : son objectif est toujours de contenir cette pratique alors que nous lui avons demandé de passer à l’étape d’éradication du phénomène.
    Il est urgent que l’État prenne ses responsabilités. Vous l’avez rappelé, des populations sont empoisonnées. Le peuple autochtone Wayana connaît de très grandes difficultés pour s’alimenter et pour vivre au quotidien. Il n’est pas normal que, plus de quarante ans après la découverte de la contamination, nous en soyons toujours au même point. J’attends donc des pouvoirs publics une réponse adaptée à la situation.
    J’estime que cette crise est similaire à celle du chlordécone aux Antilles, avec une pollution massive qui affecte l’ensemble du territoire, notamment le fleuve qui alimente en eau la population. Je compte donc sur une prise de conscience assez rapide de la part des autorités. Dès que ma proposition de loi sera prête, je la soumettrai au gouvernement, en espérant qu’il saura apporter une réponse digne face à une catastrophe qui ne peut plus perdurer.

    Allocation de solidarité aux personnes âgées

    M. le président

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    La parole est à Mme Christine Engrand, pour exposer sa question, no 298, relative à l’allocation de solidarité aux personnes âgées.

    Mme Christine Engrand

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    Ma question s’adresse à Mme la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles. Dans une France où l’inflation grève le pouvoir d’achat des plus modestes et où le coût de la vie ne cesse d’augmenter, il est de notre devoir de nous pencher sur la situation préoccupante de nos aînés, plus particulièrement de ceux qui perçoivent le minimum vieillesse, désormais appelé allocation de solidarité aux personnes âgées, ou Aspa.
    En 2025, une personne seule bénéficiant du minimum vieillesse perçoit 1 034,28 euros par mois, une somme destinée à garantir un niveau de vie décent à ceux qui n’ont jamais ou très peu cotisé. Dans le même temps, de nombreux retraités qui ont travaillé toute leur vie, parfois avec des salaires modestes, comme les aides à domicile, des ouvriers ou des employés, perçoivent des pensions dont le montant ne s’élève qu’à 750 euros par mois, après des décennies d’efforts. Il s’agit d’une injustice flagrante, qui mine la confiance dans notre système de répartition et nourrit un sentiment d’abandon.
    Il convient également de noter l’existence d’un angle mort statistique : l’opacité des chiffres relatifs aux bénéficiaires étrangers du minimum vieillesse et de l’Aspa constitue une lacune majeure dans l’évaluation de notre politique sociale.
    Depuis plus d’une décennie, le gouvernement ne publie plus de données précises sur l’origine des allocataires, comme s’il cherchait à cacher une réalité dérangeante sous le tapis du déni. Pourtant, les derniers chiffres disponibles, qui datent de 2009, sont sans équivoque : sur 70 860 bénéficiaires du Saspa, le service de l’allocation de solidarité aux personnes âgées, 25 205 étaient étrangers, soit plus d’un tiers. Parmi eux, seulement 3 % provenaient d’un pays de l’Union européenne, tandis que 32 % étaient des ressortissants de pays situés hors de l’Espace économique européen.
    Voilà la triste réalité : l’Aspa est une aide financée par les Français, mais une part croissante de ses bénéficiaires est constituée d’étrangers extra-européens. Cette situation pose une question fondamentale de justice sociale : alors que de nombreux retraités ayant travaillé toute leur vie peinent à joindre les deux bouts, notre système continue d’attribuer cette allocation à des personnes qui n’ont parfois jamais cotisé.
    Dans ma circonscription du Pas-de-Calais, de nombreux retraités m’ont fait part de leur colère, mais aussi de leur désarroi. Après une vie de labeur, certains doivent reprendre un emploi car leur pension est insuffisante pour vivre et, dans le même temps, d’autres perçoivent des allocations sans avoir cotisé. C’est le cas de Mme Leroux, 76 ans, qui continue à travailler sur les marchés de Lumbres et touche 720 euros par mois.
    Dans un contexte budgétaire contraint, comment le gouvernement entend-il enfin garantir que ceux qui ont travaillé toute leur vie soient mieux rémunérés que ceux qui n’ont jamais cotisé ? Envisagez-vous de conditionner l’accès à l’Aspa à une durée minimale de cotisation en France, comme c’est le cas dans d’autres pays européens ? Avez-vous conscience que cette situation nourrit un profond sentiment d’injustice chez nos compatriotes et contribue à la défiance envers les politiques publiques ?

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’autonomie et du handicap.

    Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée de l’autonomie et du handicap

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    Non, le gouvernement ne cherche pas à cacher quoi que ce soit. Vous avez raison : il est important pour nos concitoyens que les ressources affectées à la couverture des dépenses sociales soient utilisées à bon escient et avec vigilance. Le gouvernement est notamment très attentif à la lutte contre la fraude sociale.
    Vous m’interrogez sur l’Aspa. Je rappelle qu’elle est servie, au titre de la solidarité nationale, aux personnes âgées modestes, pour leur assurer un minimum de ressources. Elle n’entretient aucun lien direct avec l’activité professionnelle de ses bénéficiaires, au contraire des minima de pension, qui valorisent la durée d’assurance. L’un des objectifs de notre système de retraite consiste à assurer un niveau de vie adapté aux retraités et à garantir la solidarité entre eux.
    Vous souhaitez savoir si le gouvernement prévoit de conditionner l’attribution de l’Aspa à une durée minimale de cotisation en France. La réponse est non. En effet, pour bénéficier de cette allocation, les assurés doivent déjà justifier de la régularité de leur séjour sur le territoire français, pendant une période continue de dix ans précédant la date d’effet de l’Aspa. La condition de titre de séjour de dix ans doit être prouvée par la présentation d’un titre de séjour autorisant à travailler. Une condition de résidence régulière est donc déjà opposable et l’ajout d’une condition de durée minimale de cotisation pour les travailleurs étrangers aurait pour effet de vider ce dispositif de solidarité de sa substance profondément sociale.
    Pour répondre à votre évocation d’un sentiment d’injustice, je reviendrai sur le mécanisme du minimum de pension. Selon les barèmes du minimum contributif en 2025, un assuré qui a cotisé pendant toute sa carrière au régime général sur la base du smic peut voir sa pension de retraite relevée jusqu’à 893 euros par mois. Si l’on y ajoute sa pension de retraite complémentaire Agirc-Arrco, ce montant peut atteindre 1 394 euros, grâce à ce minimum de pension. C’est bien plus que l’Aspa qui, malgré les revalorisations intervenues ces dernières années, s’élève à 1 034 euros.
    Évidemment, du fait de carrières hachées ou de temps partiel, certains assurés ne bénéficient pas de l’intégralité du barème du minimum contributif, mais ces assurés modestes sont éligibles à l’Aspa, qui complète leur retraite personnelle.
    Pour conclure, je tiens à rappeler que le gouvernement est profondément attaché à ce que le travail de toute une vie se traduise par une retraite décente. La réforme de 2023 prévoyait plusieurs mesures en ce sens : nous avons revalorisé les barèmes du minimum contributif, indexé désormais sur le smic ; nous avons intégré la prise en compte des périodes validées au titre de l’assurance vieillesse des parents au foyer et de l’assurance vieillesse des aidants pour la détermination de l’éligibilité au minimum contributif et son calcul ; enfin, nous avons instauré une revalorisation exceptionnelle pour les personnes déjà retraitées.

    M. le président

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    La parole est à Mme Christine Engrand.

    Mme Christine Engrand

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    Merci pour toutes ces informations, madame la ministre. Je vérifierai tout de même ce que vous venez d’affirmer, car il me semble que d’importantes disparités existent, dont pâtissent notamment ceux qui ont eu des carrières hachées, particulièrement les femmes.

    Hypermarché à Clermont-Ferrand

    M. le président

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    La parole est à Mme Marianne Maximi, pour exposer sa question, no 292, relative à l’hypermarché Auchan de Clermont-Ferrand.

    Mme Marianne Maximi

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    Ma question a trait à la fermeture annoncée de l’hypermarché Auchan Nord à Clermont-Ferrand et à la suppression de onze postes à Aubière, autre commune du Puy-de-Dôme. Au total, plus de 200 emplois vont disparaître dans mon département, en conséquence du plan de licenciement annoncé par la direction d’Auchan le 5 novembre dernier.
    Dans le même temps, la famille Mulliez, propriétaire d’Auchan, perçoit des aides publiques et se verse 1 milliard d’euros de dividendes par l’intermédiaire de son autre enseigne, Decathlon. Alors que des vendeurs sont licenciés à Aubière, Auchan recrute actuellement, pour des missions similaires, des équipiers de magasin, dont le salaire est beaucoup plus bas.
    La fermeture de l’hypermarché Auchan Nord à Clermont-Ferrand aura des conséquences dramatiques pour Croix-de-Neyrat –⁠ un quartier populaire qui souffre déjà de relégation et du recul des services publics –, d’autant plus que la galerie commerciale qui accompagne l’hypermarché abrite des commerces de proximité, menacés de fermeture. Face à cette injustice, tandis que les habitants, associations, commerçants et salariés se mobilisent, l’État reste absent.
    Auchan, contraint par la loi Florange de chercher un repreneur, a publié une offre biaisée : l’enseigne affirme que le centre commercial se situe à une heure du centre-ville en transports en commun, alors qu’il ne faut que vingt-deux minutes pour s’y rendre. Cette manœuvre s’inscrit dans la droite ligne des propos cyniques du directeur général d’Auchan Retail, qui invoquait le trafic de drogue pour justifier la fermeture d’Auchan Nord. Après l’y avoir invité, j’invite également Mme la ministre à faire le déplacement pour constater que ce quartier n’a rien à voir avec la caricature honteuse qui en est faite.
    Devant tant de malhonnêteté, plusieurs organisations syndicales ont rejeté le plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) proposé par l’employeur début mars. La Dreets, ou direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités, doit donner son avis sur ce PSE ce mois-ci. Dans ce contexte, le gouvernement en contrôlera-t-il la régularité et contraindra-t-il la famille Mulliez à proposer des reclassements pour préserver la vie de quartier et les emplois à Clermont-Ferrand ? Il y a urgence à agir, pour l’avenir des salariés, pour le quartier de Croix-de-Neyrat et pour la dignité des habitants, qui ne sont pas des citoyens de seconde zone.

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’autonomie et du handicap.

    Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée de l’autonomie et du handicap

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    Permettez-moi d’abord d’excuser Mme la ministre chargée du travail et de l’emploi, Astrid Panosyan-Bouvet, qui m’a chargée de vous faire connaître sa réponse. Ses pensées vont aux salariés d’Auchan et à leurs familles.
    Un plan social est toujours un grand choc pour ceux qui le subissent. La continuité salariale et professionnelle des salariés est la priorité du gouvernement dans toute restructuration d’entreprise. Nous savons que la grande distribution est confrontée à une mutation très forte et rapide. Astrid Panosyan-Bouvet a suivi de près les négociations afférentes au PSE que vous évoquez et les mesures de reclassement proposées par Auchan pour répondre adéquatement au choc que représente cette fermeture.
    Le PSE a été adopté par les syndicats majoritaires le 25 mars : c’est une bonne nouvelle. Il s’agit maintenant d’assurer le meilleur accompagnement aux salariés. La ministre a demandé aux services déconcentrés de l’État de se rapprocher du cabinet de reclassement pour partager toutes les informations relatives aux possibilités d’emploi sur le territoire concerné.
    Auchan s’est par ailleurs engagé à ce que les candidatures des salariés en reconversion, qui souhaitent postuler auprès d’autres enseignes de la famille Mulliez, soient examinées en priorité. Conformément aux engagements pris devant la ministre, Auchan a mis à la disposition des salariés concernés par le PSE une plateforme ad hoc présentant les postes vacants des autres enseignes présentes sur le territoire. Deux salariés du service des ressources humaines sont présents à Clermont-Ferrand pour accompagner les salariés touchés par le PSE vers d’autres postes susceptibles de les intéresser. À ce jour, quinze postes sont vacants à Clermont-Ferrand, pour l’obtention desquels aucune candidature n’a été déposée. Par ailleurs, dix salariés de Clermont-Ferrand ont été reclassés dans certains des onze sites locaux.
    Le préfet du Puy-de-Dôme a demandé à Auchan de financer une étude d’impact sur le territoire. La présentation de cette étude s’est déroulée le 31 mars au matin, en présence du préfet, des élus locaux et des parlementaires. Elle met en avant des pistes relatives aux perspectives de réemploi et de dynamique des espaces libérés par la fermeture de l’hypermarché.
    Plus globalement, la filière de la distribution est structurellement touchée. L’enjeu est d’apporter collectivement des solutions, avec des dispositifs de reconversion simplifiés. C’est le sens de la négociation qui va être proposée aux partenaires sociaux d’ici à quelques semaines.

    M. le président

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    La parole est à Mme Marianne Maximi.

    Mme Marianne Maximi

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    J’ai en effet assisté à la présentation de cette étude d’impact, qui trace peu de perspectives s’agissant des emplois. Je dois dire, après avoir pris des renseignements auprès des salariés d’Auchan Nord, que les annonces d’Auchan sont suivies de peu d’actes concrets dans ce magasin.
    J’interroge surtout le gouvernement au sujet de l’association familiale Mulliez, qui possède énormément d’enseignes, qui est capable de faire remonter des dividendes par l’intermédiaire de ces enseignes, mais sur laquelle ne pèse aucune obligation salariale. L’examen attentif de CV ne vaut pas reclassement. Je pense donc que le compte n’y est pas et que le gouvernement aurait tout intérêt à s’occuper de cette association familiale et de son fonctionnement, qui ne garantit pour l’instant aucun emploi aux anciens d’Auchan.
    Dernier point, qui me semble important : nous sommes face à un groupe qui supprime des emplois qualifiés dans ses magasins, notamment celui d’Auchan Aubière, pour publier très peu de temps après d’autres offres relatives à des emplois moins qualifiés, donc moins bien rémunérés. Cela nous paraît parfaitement scandaleux et facteur de précarisation des emplois dans la grande distribution.
    À ce sujet également, j’ai peu entendu le gouvernement. Il s’agit pourtant d’un problème qui va pénaliser de nombreux territoires –⁠ le Puy-de-Dôme n’est pas le seul concerné. Aujourd’hui, si l’on met à part les associations et les syndicats, peu de monde défend les emplois affectés. Le gouvernement n’est pas à la hauteur : il laisse faire les grandes enseignes, alors même qu’elles ont perçu des aides publiques sans aucune contrepartie ni contrôle de l’État.

    M. le président

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    Nous avons terminé les questions orales sans débat.

    3. Ordre du jour de la prochaine séance

    M. le président

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    Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
    Questions au gouvernement ;
    Vote solennels sur la proposition de loi visant à sortir la France du piège du narcotrafic et sur la proposition de loi organique fixant le statut du procureur de la République national anti-criminalité organisée ;
    Discussion de la proposition de résolution visant à mettre fin à la culpabilisation des victimes de violences physiques et sexuelles ;
    Discussion de la proposition de loi visant à modifier la définition pénale du viol et des agressions sexuelles ;
    Discussion de la proposition de résolution tendant à créer un institut Océan de l’Université des Nations unies en France ;
    Discussion de la proposition de loi visant à renforcer le contrôle du Parlement en période d’expédition des affaires courantes ;
    Discussion de la proposition de loi visant à lutter contre les déserts médicaux, d’initiative transpartisane ;
    Discussion de la proposition de loi visant à assurer le développement raisonné et juste de l’agrivoltaïsme.
    La séance est levée.

    (La séance est levée à douze heures trente.)

    Le directeur des comptes rendus
    Serge Ezdra