XVIIe législature
Session ordinaire de 2024-2025

Première séance du mardi 04 février 2025

Sommaire détaillé
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Première séance du mardi 04 février 2025

Présidence de M. Jérémie Iordanoff
vice-président

M. le président

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    La séance est ouverte.

    (La séance est ouverte à neuf heures.)

    1. Dépôt de motions de censure

    M. le président

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    La présidente de l’Assemblée nationale a pris acte du dépôt hier, lundi 3 février 2025, de deux motions de censure, en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution.
    La première a été déposée à dix-sept heures quarante par Mme Mathilde Panot et quatre-vingt-dix membres de l’Assemblée nationale, le premier ministre ayant engagé la responsabilité du gouvernement sur l’adoption des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de finances pour 2025.
    La seconde a été déposée à dix-huit heures quinze par Mme Mathilde Panot et quatre-vingt-onze membres de l’Assemblée nationale, le premier ministre ayant engagé la responsabilité du gouvernement sur l’adoption en nouvelle lecture de l’article liminaire et de la première partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025.

    2. Questions orales sans débat

    M. le président

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    L’ordre du jour appelle les questions orales sans débat.

    Incinération des déchets

    M. le président

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    La parole est à M. René Pilato, pour exposer sa question, no 118, relative à l’incinération des déchets.

    M. René Pilato

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    En Charente, l’association Cocip – Collectif des citoyens indignés par le projet d’incinérateur de déchets – m’alerte sur la volonté de la société Calitom de construire un incinérateur d’une capacité de 120 000 tonnes par an, qui serait opérationnel en 2029, pour un coût de 140 millions d’euros, alors même que nous traversons une période budgétaire difficile.
    Comme la plupart des incinérateurs en France, il brûlerait les déchets à une température inférieure à 900 degrés Celsius. Se poserait alors le problème des mâchefers contenant des PFAS, substances polyfluoroalkylées ou perfluoroalkylées, parmi lesquelles certaines se décomposent en molécules encore plus toxiques ; les fumées émises, même à faible dose, provoquent une altération de l’écosystème et de la santé des riverains. Comme partout en France où ils sont à l’étude, ces projets suscitent à juste titre la vive opposition des citoyens, car ils sont non seulement néfastes, mais inutiles.
    En effet, dès 2017, l’Ademe, l’Agence de la transition écologique, recommandait de s’en tenir aux capacités existantes sur le territoire national car elles étaient suffisantes, tandis que la Commission européenne invitait les États membres à instaurer un moratoire sur de nouveaux incinérateurs et à privilégier la prévention, la réutilisation et le recyclage.
    Si l’incinération constituait une alternative à l’enfouissement, la priorité politique doit désormais être à la planification pour que les déchets soient valorisés autrement. Que l’agglomération de Copenhague soit obligée d’importer 110 000 tonnes de déchets en provenance du Royaume-Uni afin de maintenir la combustion et la rentabilité de son incinérateur doit nous conduire à nous interroger !
    En Charente comme ailleurs, ce type de projet engagerait les collectivités territoriales pour des décennies, en contradiction avec les orientations prises pour la réduction des déchets et des rejets de CO2.
    Le débat entre incinération ou politique de réduction des déchets doit avoir lieu. Il s’agit d’une question nationale, car plusieurs projets de construction existent.
    Deux questions écrites sur le sujet adressées aux gouvernements précédents sont à ce jour restées sans réponse.
    Les interrogations sont pourtant nombreuses. Quel est l’état des lieux des pollutions ? Que fait-on des incinérateurs existants ? Quelles pistes pour réduire les pollutions qu’ils provoquent ? Etc.
    Des études montrent la présence dans les sols de dioxines et de PFAS jusqu’à 20 kilomètres autour des sites d’incinération.
    La campagne partielle de relevés des PFAS d’incinération lancée par un décret du gouvernement est nécessaire mais insuffisante.
    Si l’émission des PFAS n’est pas réglementée, selon l’Ineris, l’Institut national de l’environnement industriel et des risques, incinérer au-dessus de 1 400 degrés Celsius assurerait la vitrification de toutes les substances et sous-produits PFAS générés.
    J’ai déposé une proposition de loi visant à instaurer un moratoire sur la construction de nouveaux incinérateurs afin de satisfaire au principe de précaution. Un rapport d’information permettrait de dénombrer les incinérateurs pouvant fonctionner à 1 400 degrés, en attendant que la politique zéro déchet soit totalement opérationnelle.
    Je rappelle que nous subissons toujours les méfaits des usages de l’amiante. Prétendre que l’on ne connaît pas aujourd’hui la dangerosité des PFAS et des maladies qu’elles provoquent serait non seulement irresponsable mais coupable.
    Madame la ministre déléguée chargée de la ruralité, l’État compte-t-il accorder une autorisation administrative aux nouveaux projets d’incinérateurs à basse température ? Le gouvernement s’engage-t-il à inscrire à l’ordre du jour ma proposition de loi afin que la représentation nationale puisse débattre du sujet ?

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la ruralité.

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité

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    Je vous remercie pour votre question, qui permet de rappeler que certains déchets restent non valorisables sous forme de matière. Pour ces derniers, la valorisation sous forme d’énergie dans les incinérateurs constitue à ce jour la solution de traitement la plus vertueuse – si je puis dire.
    En ce qui concerne les émissions des incinérateurs, leur encadrement a été continuellement renforcé, avec des valeurs limites d’émission de polluants de plus en plus basses. Toutefois, afin de renforcer encore la surveillance – comme vous l’appelez de vos vœux –, le gouvernement a prévu, dans son plan d’action interministériel sur les PFAS, de procéder à une campagne systématique de mesure de ces polluants dans les émissions des incinérateurs. Dans cette optique, un arrêté ministériel a été publié le 10 novembre pour rendre obligatoire une campagne de prélèvement et d’analyse des PFAS dans l’ensemble des incinérateurs présents sur notre territoire. La France est le seul pays au monde qui impose une telle obligation, ce qui montre l’importance que nous accordons au sujet.
    Concernant le projet que vous mentionnez, à ce jour, aucune demande d’autorisation n’a été officiellement déposée par Calitom au titre des installations classées pour la protection de l’environnement. Si tel était le cas, les services de l’État seraient extrêmement vigilants quant aux impacts potentiels d’une telle installation.

    M. le président

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    La parole est à M. René Pilato.

    M. René Pilato

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    Merci, madame la ministre, pour votre réponse.
    L’objectif n’est pas d’interdire l’incinération. Nous savons qu’elle est préférable à l’enfouissement. Ce que nous souhaitons, c’est que tous les incinérateurs dont la combustion est inférieure à 1 400 degrés Celsius soient interdits et que l’on conduise une véritable politique d’aménagement du territoire pour déterminer où l’implantation de telles installations répondrait à un réel besoin.

    Zéro artificialisation nette

    M. le président

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    La parole est à Mme Frédérique Meunier, pour exposer sa question, no 105, relative à l’objectif zéro artificialisation nette.

    Mme Frédérique Meunier

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    Madame la ministre, je souhaite appeler votre attention sur une question cruciale : l’évolution de notre politique d’aménagement du territoire, en particulier l’objectif, fixé par la loi, de zéro artificialisation nette – ZAN.
    Comme vous le savez, une proposition de loi visant à instaurer une trajectoire de réduction de l’artificialisation concertée avec les élus locaux, dite Trace, a été récemment déposée au Sénat. Cette initiative est d’une importance capitale, car elle prévoit des modalités simplifiées de comptabilisation de l’artificialisation et assouplit la trajectoire de réduction pour la période 2021-2031. Composée de cinq articles, elle supprime l’objectif intermédiaire de réduction de 50 % du rythme d’artificialisation. De plus, elle inverse la logique de territorialisation des objectifs, offrant ainsi la flexibilité nécessaire pour répondre aux enjeux locaux. Avec ces nouvelles règles, les Sraddet, les schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires, pourraient être modifiés jusqu’en 2026 et les communes auraient jusqu’en 2036 pour réviser les plans locaux d’urbanisme et les plans locaux d’urbanisme intercommunal – PLU et PLUI. Il est à noter que cette proposition avait reçu l’aval de l’ancien premier ministre, Michel Barnier, lors d’une question d’actualité au gouvernement, le 20 novembre 2024 : cela témoigne de son intérêt et de son potentiel.
    Sur le terrain, les maires et tous les élus locaux ne parlent que du ZAN. Les entreprises du bâtiment, les entreprises de proximité ainsi que les particuliers attendent de voir la loi évoluer. Lorsque, après le covid, nos concitoyens ont eu l’envie très légitime de quitter les villes pour s’installer à la campagne, ils se sont retrouvés coincés, parce qu’ils ne pouvaient que restaurer des édifices en ruines ou très légèrement étendre des bâtiments existants. En définitive, ils ne pouvaient plus venir dans la ruralité – or vous savez combien son développement est important pour nos territoires. Si l’on donnait la perspective d’une extension des possibilités de construction, cela changerait la donne – et rassurez-vous, il ne s’agit pas de construire des HLM, mais d’engager une réflexion pour que l’on puisse profiter des terrains disponibles dans nos petites communes, dans nos villages, tout en leur conservant un caractère rural.

    M. Nicolas Sansu

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    Ce n’est pas une honte de construire des HLM !

    Mme Frédérique Meunier

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    Dans ce contexte, je souhaiterais savoir si le gouvernement a l’intention de soutenir cette proposition de loi et s’il envisage des mesures pour faciliter sa mise en œuvre.

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la ruralité.

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité

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    La loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets – dite climat et résilience – a fixé comme objectif de réduire le rythme de consommation de foncier. En effet, durant la décennie 2011-2020, nous avons artificialisé en moyenne 24 000 hectares par an, ce qui représente autant de foncier agricole perdu et une certaine forme de nuisance environnementale. Le législateur a donc souhaité agir pour réduire l’artificialisation.
    À l’heure actuelle, de nombreuses collectivités ont déjà engagé le travail pour faire évoluer leurs documents d’urbanisme. Si l’État les accompagne au mieux, je suis consciente qu’un nombre important de collectivités rencontre des difficultés pour mettre en œuvre le ZAN ou s’interroge. La loi du 20 juillet 2023 a apporté des assouplissements structurants afin de tenir compte de la diversité des territoires et de leurs besoins ; elle a ainsi instauré un droit de préemption spécifique ainsi que la garantie rurale – cela répond à vos inquiétudes concernant les petites communes.
    Cependant, si je salue les efforts des collectivités qui se sont engagées dans la révision des documents d’urbanisme, je crois que des assouplissements sont attendus par nombre d’entre elles, sans qu’il s’agisse pour autant de revenir sur l’objectif fixé. Nous devons donc continuer d’œuvrer ensemble pour une plus grande sobriété foncière, tout en apportant les assouplissements nécessaires.
    La proposition de loi Trace soulève des questions pertinentes. Elle sera examinée au Sénat à la mi-mars. Le maintien d’un jalon intermédiaire pour atteindre l’objectif à l’horizon 2050 me paraît toutefois indispensable – peut-être pourrait-on le décaler en s’appuyant sur des travaux parlementaires.
    Je connais l’intérêt de votre assemblée pour ce sujet. Je tiens à saluer en particulier le travail de la présidente de la commission du développement durable, Mme Le Feur, ainsi que celui de vos collègues de Pélichy et Marchive. La mission d’information en cours à l’Assemblée sur le ZAN nous livrera un éclairage complémentaire sur ce sujet très important.

    M. le président

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    La parole est à Mme Frédérique Meunier.

    Mme Frédérique Meunier

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    Merci, madame la ministre, pour votre réponse encourageante.
    Je voudrais néanmoins vous démontrer l’absurdité de cette loi. J’étais récemment dans une petite commune de 400 habitants. Devant la mairie, il y avait un paysage superbe. Le maire m’a dit : « Tu vois, là je pourrais faire construire un immeuble, mais pas de maisons ». C’est aberrant !

    Nouveau programme national de renouvellement urbain

    M. le président

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    La parole est à Mme Lise Magnier, pour exposer sa question, no 115, relative au nouveau programme national de renouvellement urbain.

    Mme Lise Magnier

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    Depuis le lancement en 2003 du programme national pour la rénovation urbaine, plus de 5 millions de nos concitoyens ont pu bénéficier d’opérations de requalification de leur habitat et de leur quartier ; souvent très réussies, ces opérations leur permettent de profiter d’équipements publics et de services de grande qualité. Chez moi, à Châlons-en-Champagne, dans la Marne, deux quartiers prioritaires de la ville ont ainsi été requalifiés : la Bidée et le Verbeau.
    Après vingt années de rénovation urbaine, il a été jugé utile de redéfinir le zonage de ces quartiers pour tenir compte de l’évolution sociale et sociologique des territoires urbains.
    Forts de l’appui de M. le préfet de la Marne, le maire de Châlons-en-Champagne et moi-même avons ainsi souhaité qu’à la fin de 2023, le quartier Schmit intègre ce zonage, dont la nouvelle définition implique un redéploiement des moyens d’action. Or les programmes de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru), qui permettraient d’intervenir puissamment pour accompagner les collectivités locales et les bailleurs, sont actuellement à l’arrêt, cette agence rencontrant des problèmes de trésorerie, qui seraient notamment dus à l’absence de versement de la participation financière de l’État.
    En 2024, les 50 millions d’euros de crédits budgétaires prévus dans la loi de finances initiale ont été annulés, le projet de loi de finances (PLF) pour 2025 ne prévoyant quant à lui aucune contribution de l’État à l’Anru. Madame la ministre, je vous adresse donc deux questions précises : pouvez-vous me transmettre le rapport commandé par vos prédécesseurs au sujet du renouvellement urbain qui devait être remis au gouvernement à l’été 2024 et m’en confirmer les conclusions ? Surtout, quels engagements pouvez-vous prendre pour que les moyens effectivement déployés soient à la hauteur des besoins et des attentes des habitants de Châlons-en-Champagne, en particulier de ceux du quartier Schmit ?

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la ruralité.

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité

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    Je vous prie d’excuser l’absence de Valérie Létard, qui me charge de transmettre sa réponse. La ville de Châlons-en-Champagne a en effet bénéficié d’un soutien de plus de 15 millions d’euros dans le cadre du programme NPNRU – nouveau programme national de renouvellement urbain. Le quartier Schmit a bien été intégré dans la liste des quartiers prioritaires lors de la redéfinition des périmètres fin 2023. Les opérations isolées que vous évoquez ont pu exister dans le premier programme de rénovation urbaine ; elles ne figurent plus dans le règlement général du second. Néanmoins, les nouveaux contrats de villes, signés en 2024, devront permettre à la politique de la ville d’accompagner tous les quartiers, notamment en réalisant de petits investissements. Le financement de ce nouveau programme sera bien assuré en 2025, conformément à l’engagement de la ministre Valérie Létard : le PLF pour 2025 prévoit une contribution de l’État s’élevant à 50 millions d’euros.
    Le rapport consacré au renouvellement urbain que vous évoquiez sera prochainement remis à François Rebsamen, ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation, et à la ministre du logement, bien que je ne puisse vous indiquer à quelle date. Il ouvre des pistes sur la poursuite et l’amélioration de cette politique. La priorité du gouvernement reste néanmoins de terminer les projets en cours. C’est pourquoi, au premier trimestre 2025, la ministre du logement organisera une revue des projets visant à évaluer leur état d’avancement et leurs effets sur la vie quotidienne des habitants.

    M. le président

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    La parole est à Mme Lise Magnier.

    Mme Lise Magnier

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    Merci, madame la ministre, pour ces précisions. Permettez-moi d’insister : les habitants du quartier Schmit ont été très satisfaits des travaux que nous avons conduits, avec M. le préfet de la Marne, afin d’intégrer leur quartier au zonage de la politique de la ville, ce qui a notamment permis aux enfants de bénéficier du dispositif Cités éducatives. Cependant il nous faut poursuivre des travaux d’ampleur, qui nécessitent un puissant soutien de l’État. À ce titre, je compte sur le gouvernement pour nous fournir les moyens nécessaires afin d’offrir aux habitants une requalification digne de ce que l’on a su faire dans les autres quartiers et qui a été unanimement salué par leurs habitants. Nous souhaitons pouvoir achever ces travaux dans notre ville.

    Ligne ferroviaire Paris-Douai

    M. le président

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    La parole est à M. Thierry Tesson, pour exposer sa question, no 128, relative à la ligne ferroviaire Paris-Douai.

    M. Thierry Tesson

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    En tant que député du Nord, du Douaisis plus précisément, je souhaite appeler l’attention du gouvernement sur la récente suppression de deux dessertes TGV entre Paris et Douai, semble-t-il à la suite d’un accident de motrice survenu en Belgique. Je dis « semble-t-il », car cette motrice paraît avoir le don d’ubiquité : son dysfonctionnement expliquerait également la disparition de dessertes directes entre Lens et Béthune, pourtant situées sur d’autres lignes.
    Cette décision s’ajoute à toutes les fermetures similaires que nous avons connues depuis une décennie – en direction de Paris d’abord, mais aussi du grand Est et du grand Ouest ; elles ont divisé par deux le nombre de TGV desservant la gare de Douai, aujourd’hui réduit à une petite dizaine. En dépit de l’action des élus locaux et des usagers, il est à déplorer qu’aucune réponse n’ait été fournie par la SNCF, et on ne peut même pas dire que cette situation ait suscité de sa part un réel intérêt. Doit-on envisager, à terme, la suppression de toutes les dessertes directes ?
    La contradiction entre vos déclarations et celles de vos prédécesseurs est patente : on affirme vouloir dynamiser et revitaliser les Hauts-de-France, mais, sur fond de recul généralisé des services à la population, la suppression régulière des dessertes de TGV prouve le désintérêt des pouvoirs publics pour notre territoire.
    On a du mal, en outre, à comprendre la logique gouvernementale sur ce dossier : pour répondre aux impératifs écologiques, la population est soumise à une obligation toujours plus ferme de recourir aux transports collectifs – la création de zones à faibles émissions (ZFE) instaure ainsi une véritable interdiction de circuler dans un véhicule individuel pour les plus modestes de nos concitoyens. La fréquentation ferroviaire connaît d’ailleurs une hausse continuelle : celle de la gare de Douai, la deuxième de la région par son importance, est passée de 2,9 millions de voyageurs en 2015 à 3,3 millions en 2023. Comment justifier la suppression progressive de l’offre ferroviaire du Douaisis malgré une telle affluence ?
    Concernant les deux dessertes récemment supprimées, la SNCF évoque un retour à la normale pour l’été 2025, mais, aucune des suppressions précédentes n’ayant jamais été remises en cause, notre méfiance reste totale. L’argumentaire de la société nationale est connu : il faut des habitants pour obtenir des trains. Sur ce point, le serpent se mord la queue : sans train, il est impossible d’attirer de nouveaux habitants. Rappelons que le maintien des dessertes ferroviaires est vital pour Douai, ville de 40 000 habitants au centre d’une agglomération de plus de 200 000 personnes. Outre qu’elle affaiblit les connexions avec le reste du pays, la réduction de l’offre de TGV fait peser une menace supplémentaire sur l’attractivité économique d’un territoire déjà fort malmené.
    En conclusion, nous attendons des engagements fermes concernant la remise en service des dessertes directes supprimées ; nous demandons une communication plus sincère sur les motivations des décisions de suppression ; nous réclamons surtout des engagements en faveur du développement du transport ferroviaire dans les Hauts-de-France. Madame la ministre, quelles mesures concrètes comptez-vous prendre pour répondre à ces impératifs ? Pouvez-vous garantir qu’à l’avenir, aucun nouveau recul ne fragilisera les dessertes ferroviaires du Douaisis ?

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la ruralité.

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité

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    Malgré son absence, dont je vous prie de l’excuser, mon collègue Philippe Tabarot, ministre des transports, surveille de près la desserte de tous les territoires en transports en commun. La situation des liaisons ferroviaires entre Paris et Douai suscite des inquiétudes chez les habitants du Douaisis. Soyez assuré que le gouvernement reste pleinement mobilisé pour garantir une offre de transports ferroviaires de qualité, conscient de son importance tant pour les mobilités quotidiennes des usagers que pour l’attractivité économique des territoires.
    La modification temporaire des liaisons directes dont vous avez parlé est due à une situation exceptionnelle : survenue dans un contexte déjà tendu en matière de disponibilité du matériel roulant, la détérioration d’une rame de TGV a conduit SNCF Voyageurs à adapter son offre de services, comme elle peut le faire en tant qu’opérateur autonome, pour peu qu’elle veille à maintenir une desserte de qualité.
    Je peux toutefois vous apporter plusieurs garanties importantes. Cette situation est bien temporaire : la maintenance de la SNCF travaille activement à la réparation de la rame endommagée et s’est fixé l’objectif d’un retour à la normale cet été. Des mesures concrètes d’accompagnement des usagers ont été prises : les abonnés disposant d’un forfait LGV ou Max Actif + peuvent utiliser les TER sur le parcours avec leur titre de transport TGV et la politique tarifaire a été adaptée pour atténuer les désagréments causés aux voyageurs.
    Je peux vous assurer qu’il ne s’agit en aucun cas d’un désengagement des services publics dans le Nord, mais bien d’une situation temporairement dégradée à cause d’un problème de matériel à laquelle il sera mis fin dès que possible. Par ailleurs, le gouvernement reste vigilant au maintien d’une desserte ferroviaire de qualité pour Douai et son territoire, en cohérence avec la politique de transition écologique que vous avez rappelée et avec celle d’aménagement équilibré du territoire.

    M. le président

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    J’ai bien vu que vous souhaitiez répondre, monsieur Tesson, mais votre temps de parole est épuisé.

    Survol d’Antibes par des avions de ligne

    M. le président

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    La parole est à M. Éric Pauget, pour exposer sa question, no 103, relative au survol d’Antibes par des avions de ligne.

    M. Éric Pauget

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    Je souhaite appeler l’attention du gouvernement sur les nuisances sonores et environnementales que génère, pour les riverains d’Antibes Juan-les-Pins, le survol quotidien de leur commune par des avions de ligne. Certes, les évolutions technologiques de la balise de guidage située sur l’hippodrome de Cagnes-sur-Mer ont permis d’éloigner une grande partie des avions du littoral azuréen.
    Toutefois, il arrive encore que des avions survolent ce territoire, car la procédure d’approche utilisée n’est plus assez efficace ni assez performante, notamment par mauvais temps. Or de nouvelles procédures de guidage aux appellations techniques un peu barbares – procédures de navigation requise à autorisation obligatoires : RNP AR 22 et RNP AR 04 – existent, qui permettraient d’éviter complètement le survol de la commune. Je regrette que la diffusion de ces procédures achoppe sur des difficultés liées à la possibilité d’équiper les flottes des dispositifs idoines et au niveau de formation des pilotes, insuffisant pour les mettre en œuvre. Cette situation ralentit le déploiement d’un système de guidage plus efficace, voire le bloque totalement.
    Parce qu’il y va de la tranquillité des riverains de tout un bassin de vie, je souhaiterais que le recours à ces nouvelles techniques se généralise au plus vite. Aussi ma question sera-t-elle simple : le gouvernement entend-il répondre à cette attente et dans quel délai ?

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la ruralité.

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité

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    Mon collègue Philippe Tabarot, ministre des transports, m’a chargée de vous répondre à propos des nuisances sonores liées au survol de la commune d’Antibes Juan-les-Pins par les avions en approche de l’aéroport de Nice-Côte d’Azur.
    Comme vous le soulignez à juste titre, la situation s’est considérablement améliorée depuis une vingtaine d’années. En effet, lors des atterrissages face à l’est en piste 04, qui représentent plus de 80 % des mouvements, les avions évitent le survol d’Antibes Juan-les-Pins grâce à une procédure spécifique. Celle-ci ne peut toutefois être utilisée quand les conditions météorologiques sont dégradées : les pilotes doivent alors impérativement suivre la procédure d’approche dans l’axe de piste, qui implique le survol d’Antibes Juan-les-Pins. Bien qu’elle occasionne des nuisances, seule cette procédure garantit l’accès à l’aéroport en toute sécurité dans de telles conditions.
    Concernant la procédure satellitaire RNP AR que vous évoquez, je tiens à préciser qu’à Nice, elle n’est opérationnelle, à ce jour, que pour les atterrissages face à l’ouest, piste 22. Adoptée pour pallier l’absence, due aux contraintes du relief, de procédure d’approche de précision dans cette configuration, cette procédure nécessite des équipages spécifiquement qualifiés et des aéronefs dotés d’équipements particuliers. Or, pour le moment, seuls 10 % des avions fréquentant l’aéroport de Nice disposent de tels équipements et sont pilotés par des équipages spécialement formés, ce qui explique la rareté de son utilisation.
    Par conséquent, le recours exclusif à une telle procédure en piste 04 réduirait l’accès de l’aéroport de Nice-Côte d’Azur aux seuls aéronefs équipés, ceux-ci ne représentant qu’une fraction marginale de ceux qui se posent à Nice.
    L’équipement des aéronefs étant du ressort des compagnies aériennes, le gouvernement ne peut qu’inciter les compagnies à augmenter plus rapidement le taux d’équipement de leur flotte, non le leur imposer. Soyez toutefois assuré que mon collègue Philippe Tabarot et la direction générale de l’aviation civile (DGAC) sont particulièrement attentifs à l’évolution d’une situation, dont nous savons qu’elle affecte la qualité de vie des habitants de Juan-les-Pins.

    M. le président

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    La parole est à M. Éric Pauget.

    M. Éric Pauget

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    En complément, je rappelle que 60 % de l’activité de l’aéroport Nice-Côte d’Azur est le fait de deux compagnies : Air France et easyJet. Si un travail commun rassemblait les services de l’État, ceux de l’aéroport et les collectivités territoriales en ciblant précisément ces deux compagnies, la situation pourrait s’en trouver grandement améliorée.

    Ligne ferroviaire Paris-Orléans-Limoges-Toulouse

    M. le président

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    La parole est à M. Nicolas Sansu, pour exposer sa question, no 114, relative à la ligne ferroviaire Paris-Orléans-Limoges-Toulouse.

    M. Nicolas Sansu

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    Avec 713 kilomètres, dix-sept villes desservies dans quatre régions et 5 millions d’habitants concernés, la ligne ferroviaire Paris-Orléans-Vierzon-Limoges-Toulouse (Polt) est une véritable ligne de vie du centre de la France. Elle assure un rôle irremplaçable d’aménagement du territoire, notamment pour les départements ruraux que sont le Cher, l’Indre, la Creuse, la Haute-Vienne, la Corrèze, la Dordogne et le Lot.
    Depuis des années, des mobilisations, propositions et actions ont rassemblé tout le long de cette ligne les élus locaux et nationaux mais aussi les usagers, les organisations syndicales de la SNCF et les associations. Ces mobilisations, qui se poursuivent essentiellement sous l’égide de l’association Urgence Ligne Polt, ont permis des avancées notables qu’il convient de surveiller ; je pense en particulier aux investissements réalisés par la SNCF, l’État et les régions sur la ligne ainsi qu’à la commande de nouvelles rames Oxygène, dont le déploiement a malheureusement pris beaucoup de retard.
    Il n’est cependant pas possible d’attendre 2027 en acceptant de multiples avaries et restrictions de service. Les carences en maintenance de locomotives causent de nombreuses annulations sur tout ou partie de la ligne et laissent en carafe des milliers de voyageurs. Deux allers-retours seront supprimés durant les deux semaines à venir et trois trains ne marquent plus l’arrêt à Vierzon depuis le 1er janvier. En outre, les travaux prévus en 2025 vont entraîner de fortes perturbations, puisque toutes les circulations seront supprimées en pleine journée pendant plus de six mois.
    Le doublement du trafic ferroviaire, objectif affiché tant pour les voyageurs que pour les marchandises et rendu nécessaire par l’urgence climatique, exige pourtant que le fer soit une priorité et que son opérateur public soit préservé.
    Des solutions existent et je souhaite vous poser quatre questions précises que j’ai eu l’occasion de porter à la connaissance de la SNCF au sein du comité de pilotage de la ligne Polt, sous l’égide du préfet de région de Nouvelle-Aquitaine. Premièrement, allez-vous répondre à l’urgence en demandant des embauches rapides et importantes dans le domaine de la maintenance, et allez-vous procéder à la location de nouveaux matériels en attendant la livraison des rames Oxygène ? Les mesures déjà prises en la matière par votre gouvernement s’avèrent bien insuffisantes ; elles entraînent des annulations et des retards inadmissibles.
    Deuxièmement, comment accepter que les travaux sous circulation, qui ont toujours existé, ne soient plus jamais envisagés par les donneurs d’ordre que sont l’État et la SNCF ? Couper les circulations pour faire des travaux est un mauvais signal qui ne contribue pas à promouvoir le train.
    Troisièmement, alors que l’État, autorité organisatrice de cette ligne comme celle de Paris-Clermont, est empêtré dans des travaux compliqués et restreint le service, ne pensez-vous pas qu’appeler à la privatisation de certaines circulations par l’ouverture à la concurrence sonne comme une provocation ? Nous avons besoin du train et c’est un service public, notamment en ce qui concerne les dessertes moins prisées, en pleine journée.
    Enfin, quatrièmement, pouvez-vous envisager, lorsque les travaux seront achevés et les rames livrées, d’appuyer la mise en œuvre de quatorze allers-retours quotidiens sur cette ligne, ainsi que l’arrêt des trains de nuit notamment à Vierzon ? Ce sont des revendications exprimées par les usagers, les associations et les élus.
    Notre vigilance à propos de cette ligne n’a d’égale que notre ténacité, car nous croyons dans le transport ferroviaire ; nous croyons dans la force du service public, et nous croyons dans le respect des cheminots et de leur statut. À une situation exceptionnelle doivent répondre des mesures exceptionnelles à même d’assurer le devenir de cette ligne de vie, au nom d’un principe d’égalité territoriale que le gouvernement ferait bien de ne pas oublier.

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la ruralité.

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité

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    Oui, la ligne Paris-Orléans-Limoges-Toulouse est une ligne de vie ; oui, nous avons besoin du train ; et oui, le gouvernement est mobilisé pour traiter cette situation particulière. Votre question met en lumière des préoccupations légitimes. L’engagement de l’État sur cette ligne, vous le savez, est loin d’être négligeable et se traduit par des investissements sans précédent : 1,9 milliard d’euros ont été investis au cours de la période 2018-2027, auxquels s’ajoutent 400 millions consacrés à l’acquisition de nouveaux matériels roulants.
    Je comprends vraiment l’impatience des usagers et des élus puisque le constructeur, qui n’est pas l’État, accuse effectivement un retard d’environ dix-huit mois dans la livraison de ces nouvelles rames, dont la mise en service progressive est désormais prévue à partir du printemps 2027. Face à cette situation qui a contrarié tout le monde, l’État et SNCF Voyageurs exercent une vigilance accrue et constante pour garantir le respect du nouveau calendrier.
    Dans l’intervalle, un plan d’action spécifique a permis d’améliorer significativement la ponctualité des trains : leur taux de régularité atteignait 83 % fin septembre 2024, soit une progression de près de 8 points par rapport à 2023 – il importe aussi de souligner les progrès et ce qui marche, monsieur le député !
    Concernant les travaux prévus entre fin août 2025 et fin janvier 2026 sur la section Boisseaux-Les Aubrais, nous avons veillé à maintenir des relations directes avec Paris pour l’ensemble des agglomérations desservies. La mise en œuvre complète du schéma directeur fin 2027 permettra une amélioration des temps de parcours ; à titre d’exemple, le trajet Paris-Limoges ne prendra plus que deux heures et cinquante-deux minutes.
    Soyez assuré que le gouvernement – particulièrement mon collègue Philippe Tabarot – reste pleinement mobilisé pour garantir l’avenir de cette ligne, essentielle pour nos territoires.

    M. le président

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    La parole est à M. Nicolas Sansu.

    M. Nicolas Sansu

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    Deux heures cinquante-deux minutes pour relier Paris à Limoges, alors que cela prenait deux heures quarante il y a quarante ans !

    M. Thierry Tesson

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    Exactement !

    Trafic de drogue

    M. le président

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    La parole est à Mme Marie-France Lorho, pour exposer sa question, no 127, relative au trafic de drogue.

    Mme Marie-France Lorho

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    Le trafic de drogue n’est plus l’apanage des grandes villes. Face à la saturation des métropoles, les trafiquants de drogue ont trouvé de nouveaux débouchés à leur commerce : depuis quelques années, les villes de taille moyenne connaissent une inflation particulièrement inquiétante des trafics, qui engendre une insécurité et des violences dues aux règlements de compte qui les accompagnent.
    De l’apparition de points de deal, qui deviennent des zones de non-droit, à la création de planques contenant de la drogue et des armes particulièrement dangereuses, les effets d’un tel essor du trafic sont une menace insupportable pour le quotidien des Français. Cette progression les affecte d’ailleurs tout particulièrement, puisqu’elle encourage l’ouverture du marché à de nouveaux consommateurs : le dernier rapport de l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives, publié en janvier 2025, rend ainsi compte d’une montée inquiétante de la consommation de substances illicites parmi les adultes.
    Cette expansion du trafic de drogue est un fléau, auquel les petites villes et les cités de taille moyenne n’ont pas toujours les moyens de répondre. En Vaucluse, dans ma circonscription, Orange serait, d’après Le JDD – Le Journal du dimanche –, la ville moyenne ayant subi la plus forte explosion du trafic de drogue depuis 2017. La circonscription voisine, Carpentras notamment, n’est pas épargnée.
    Il nous faut répondre à cette progression rapide du trafic. Nos services de police, que je félicite par ailleurs pour leur travail de lutte acharnée contre ce fléau, doivent bénéficier d’un renforcement considérable de leurs moyens. Eu égard aux nouveaux artifices qu’utilisent les trafiquants, notamment des messageries cryptées souvent hors d’atteinte des forces de l’ordre, il est urgent de repenser les mesures de notre défense.
    Quelles dispositions comptez-vous prendre pour endiguer cette accélération massive du trafic de stupéfiants et quels moyens comptez-vous déployer pour que les services de police soient aptes à le freiner ?

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur.

    M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur

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    La question que vous posez est désormais fondamentale pour notre société et pour nos compatriotes. Tout le monde a pris conscience de l’ampleur du narcotrafic et de ses conséquences ; à l’exception de ceux qui font preuve de mauvaise foi, il y a maintenant une forme de consensus pour considérer qu’il s’agit d’un fléau dont l’enjeu est national, à tel point que sur le fondement du rapport très complet rédigé par les sénateurs Étienne Blanc et Jérôme Durain, une proposition de loi visant à sortir la France du piège du narcotrafic a été déposée au Sénat, qui l’a examinée la semaine dernière et la votera cet après-midi.
    Elle permettra de donner à nos services de police des moyens techniques d’enquête de très haut niveau – de nature comparable à ceux employés pour lutter contre le terrorisme. Elle contient, outre la création d’un nouveau parquet national, d’autres mesures importantes dont il est peu question, comme la réforme du statut des repentis, dont l’utilité peut être considérable.
    Cette réponse générale, qui montre à quel point le gouvernement est mobilisé pour lutter contre le fléau du narcotrafic, doit être complétée par un point sur la situation de votre territoire. Vous avez rappelé que les communes de votre département sont la cible de ces trafics, mais il faut préciser que plus de 220 policiers œuvrent en filière judiciaire dans le Vaucluse ; au-delà, la direction interdépartementale de la police nationale du Vaucluse s’appuie sur plus de 700 policiers, contre 598 – à périmètre égal – fin 2016.
    En 2024, nos forces ont mené dans le Vaucluse 794 opérations visant au démantèlement de points de deal. Le résultat est net : leur nombre a baissé de près de moitié, de 43 % dans tout le département et de 80 % à Orange, où il n’en reste plus qu’un, contre cinq auparavant. Quelque 400 kilos de drogues ont été saisis dans le département et les efforts se poursuivent.
    Il ne faut rien lâcher, évidemment. Un chiffre est parfois évoqué : une augmentation de 575 %, qui correspond au nombre d’individus mis en cause à Orange pour trafic de stupéfiants, soit 16 en 2017 et 108 en 2023. Il faut souligner que les données en matière d’infractions à la législation sur les stupéfiants témoignent avant tout d’un travail d’initiative, et donc en réalité de l’engagement accru, positif et puissant, de la police nationale.
    Cela dit, il ne faut pas s’arrêter là. Il est parfaitement légitime d’aller encore plus loin en mobilisant les services concernés mais aussi en prenant en compte les consommateurs : l’ensemble de la population doit prendre conscience de l’existence de ce fléau mais aussi se rendre compte que le simple fait de consommer constitue en soi une forme « d’appel d’air » pour ce marché des stupéfiants, qui est un marché mondial n’épargnant aucun de nos territoires. Gageons que les moyens juridiques qui seront mis à disposition de nos services de police pour les enquêtes, renforcés par les effectifs et le travail du quotidien, nous permettront de mener une lutte sans merci contre ce phénomène, singulièrement dans votre département.

    M. le président

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    La parole est à Mme Marie-France Lorho.

    Mme Marie-France Lorho

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    Je vous remercie pour votre réponse. Peut-être pourrions-nous aussi augmenter les peines pour les trafiquants,…

    M. François-Noël Buffet, ministre

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    Oui, bien sûr !

    Mme Marie-France Lorho

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    …et introduire des peines planchers pour les jeunes qui chouffent en bas des cités.

    Auto-écoles à La Réunion

    M. le président

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    La parole est à Mme Émeline K/Bidi, pour exposer sa question, no 113, relative aux auto-écoles à La Réunion.

    Mme Émeline K/Bidi

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    Ma question concerne – vous vous en doutez – La Réunion, et plus particulièrement la délivrance des certificats de qualification professionnelle de responsable d’unité d’enseignement de la sécurité routière et de la conduite.
    J’ai été alertée il y a un peu plus d’un an par des entreprises d’auto-école réunionnaises, en particulier celles qui forment au métier de gérant d’auto-école. Elles sont confrontées à une difficulté : depuis que l’État a, en 2021, délégué à l’Anfa, l’Association nationale pour la formation automobile, la délivrance des certificats d’agrément permettant de dispenser ces formations, celle-ci n’en a délivré aucun sur le territoire de La Réunion ni, semble-t-il, sur l’ensemble des territoires ultramarins. Auparavant, c’était l’État qui délivrait – ou pas – l’agrément aux entreprises concernées ; depuis que c’est l’Anfa qui s’en charge, plus aucun organisme de formation n’est habilité dans les Drom – départements et régions d’outre-mer.
    Je m’en suis ouverte par question écrite à différents ministres de passage à La Réunion et voilà ce que l’on m’a rétorqué : les statuts de l’Anfa ne prennent pas en compte les Drom et la compétence territoriale se limite, en la matière, à la France métropolitaine. Mais il me semble que ces statuts pourraient être modifiés ! Depuis 2021, l’Anfa aurait pu faire un effort pour permettre aux organismes de formation réunionnais de recevoir ou de renouveler leur agrément – car même ceux qui n’avaient besoin que d’un renouvellement n’ont pas pu en bénéficier.
    Désormais, quiconque souhaite ouvrir une auto-école doit donc se rendre dans l’Hexagone pour obtenir le certificat de qualification professionnelle. Il doit payer son billet d’avion et son hébergement, puis suivre une formation de plusieurs semaines auprès d’une société agréée, afin de remporter ce fameux sésame qui lui permettra de revenir à La Réunion pour ouvrir son entreprise d’auto-école. Or vous savez pertinemment que sur notre île, il est quasiment impossible de se passer de la voiture : nous n’avons ni métro, ni tramway, ni train. En outre, le chômage y est élevé et l’employabilité dépend de l’obtention du permis de conduire.
    Le secteur des écoles de conduite y est donc en expansion et ne connaît pas la crise. Les sociétés concernées de La Réunion et, probablement, d’autres Drom demandent que l’Anfa modifie enfin ses statuts.
    Mes diverses interventions écrites à ce sujet n’ayant pas porté leurs fruits, j’interpelle le gouvernement par la présente question orale.

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur.

    M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur

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    À question technique, réponse technique, assortie en l’espèce d’un engagement.
    Je vous remercie de l’intérêt que vous prêtez aux questions d’accès à la mobilité, singulièrement à La Réunion, dont vous avez rappelé les contraintes. L’éducation routière est, en effet, un sujet fondamental.
    Pour ouvrir une auto-école sur l’île de La Réunion, deux solutions existent actuellement : suivre, dans l’Hexagone, la formation que vous avez évoquée, proposée par l’Anfa ; suivre ou avoir suivi, sur l’île elle-même, un cursus de formation bac + 2 dans le domaine juridique, économique, comptable ou commercial.
    La première solution implique effectivement une formation dans l’Hexagone. La certification de qualification professionnelle « responsable d’unité d’enseignement de la sécurité routière et de la conduite » est délivrée à la suite à d’une formation, confiée à l’Anfa, qui n’est pas proposée sur l’île, les statuts de l’Anfa ne le permettant pas. Le juriste que j’ai été convient volontiers que ces statuts pourraient être modifiés.
    La seconde solution n’implique pas de formation dans l’Hexagone. Il est possible de justifier sa capacité à exploiter une école de conduite à la condition d’être titulaire d’un diplôme d’État ou d’un titre ou diplôme visé ou homologué de l’enseignement supérieur ou technologique d’un niveau égal ou supérieur au niveau 5, ce qui correspond à bac + 2, sanctionnant une formation juridique, économique, comptable ou commerciale. Les établissements d’enseignement ultramarins proposent des formations de cette nature. Je note que la délivrance, par les établissements d’enseignement, des agréments à la conduite automobile s’effectue à La Réunion dans les délais réglementaires prévus.
    Nous entendons veiller au maintien sur place d’une capacité autonome à accéder aux agréments nécessaires pour préparer au permis de conduire. Je m’engage à examiner de plus près le problème technique en question, l’objectif étant de faciliter l’accès au permis de conduire à La Réunion.

    M. le président

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    La parole est à Mme Émeline K/Bidi.

    Mme Émeline K/Bidi

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    Merci pour votre réponse, monsieur le ministre. Il est urgent de trouver une solution, le problème se posant depuis 2021. Vous avez mentionné une solution alternative, à savoir l’obtention d’un diplôme ou titre de niveau bac + 2. Or le taux de détenteurs d’un diplôme de l’enseignement supérieur est particulièrement bas à La Réunion. Entre une formation de quelques semaines débouchant sur un certificat de qualification professionnelle et une formation bac + 2, il n’y a pas photo ! Les règles en vigueur ferment des portes et ont entraîné une perte de bénéfice pour les entreprises qui disposaient auparavant de l’agrément.

    Forces de l’ordre en Flandre intérieure

    M. le président

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    La parole est à M. Jean-Pierre Bataille, pour exposer sa question, no 121, relative aux forces de l’ordre en Flandre intérieure.

    M. Jean-Pierre Bataille

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    La sécurité de nos concitoyens est un enjeu majeur, et je sais combien le gouvernement y est attentif. Néanmoins, en Flandre intérieure, dans ma circonscription, la quinzième du Nord, située entre Lille et Dunkerque, les évolutions intervenues récemment dans l’organisation des forces de l’ordre ont suscité, sur le terrain, des interrogations légitimes.
    Deux dossiers méritent une attention particulière : à Bailleul, ville de 15 000 habitants, les moyens ont été fortement réduits à la suite de la mutualisation du commissariat, en 2016, avec celui d’Armentières ; à Renescure, l’installation de la brigade de gendarmerie se fait toujours attendre, malgré les investissements engagés.
    La ville de Bailleul, très attachée à la police nationale, a vu son commissariat perdre une grande partie de ses effectifs et de ses capacités d’action : on y compte seulement quatre enquêteurs, contre cinquante-cinq auparavant ; un bureau ouvert aux horaires administratifs a remplacé une présence vingt-quatre heures sur vingt-quatre ; il n’y a plus que deux véhicules, pour couvrir 89 kilomètres carrés. Résultat : les délais d’intervention s’allongent considérablement. Quant aux unités spécialisées, notamment la section anticriminalité et les unités dédiées à la lutte contre les stupéfiants, elles rencontrent de réelles difficultés pour assurer pleinement leurs missions.
    Face à cette situation, quelles solutions le ministère de l’intérieur envisage-t-il pour renforcer la présence policière à Bailleul et garantir des moyens adaptés aux besoins du territoire ?
    Par ailleurs, la Cour des comptes préconise le passage en zone gendarmerie de plusieurs circonscriptions rurales et périurbaines. Quelle est la position du gouvernement sur cette recommandation ? Si cette orientation était retenue, elle impliquerait des investissements importants, difficiles à assumer pour la commune, et aurait probablement un impact sur la ville voisine, Hazebrouck, chef-lieu de la circonscription.
    L’installation à Renescure d’une brigade de gendarmerie provisoire a été annoncée à la fin de l’année 2023 par M. Darmanin, prédécesseur du ministre en exercice. L’effectif prévu était de dix gendarmes et, dès mars 2024, une permanence devait être assurée deux à trois matinées par semaine. Or la brigade n’est toujours pas opérationnelle. Pourtant, la commune a investi des sommes significatives et mis à la disposition de la gendarmerie un local mis aux normes et équipé. La gendarmerie paie d’ailleurs un loyer pour un espace inoccupé !
    Le ministère de l’intérieur peut-il préciser où en est ce projet ? Quand la brigade pourra-t-elle effectivement être mise en service ? Qu’en est-il de la brigade permanente qui devait suivre ? Ce deuxième projet semble à l’arrêt, malgré les démarches déjà entreprises par la commune et ses partenaires.
    Lors de l’audience solennelle de rentrée du tribunal judiciaire de Dunkerque, il y a quelques jours, Mme la procureure de la République a qualifié 2024 d’année du dépassement, compte tenu de l’important accroissement du nombre de faits criminels. Dans les territoires ruraux, la sécurité est un besoin impératif.

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur.

    M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur

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    Je vous fais part de la réponse très précise préparée par les services du ministère de l’intérieur. Je suppose que, sur un point, elle ne vous satisfera pas.
    La circonscription de police nationale de Lille dispose de 2 025 agents. La direction interdépartementale de la police nationale dispose de 5 494 agents – cet effectif a augmenté, puisqu’il était de 5 385 agents à la fin de l’année 2016. Il convient de souligner que tous ces policiers, notamment ceux qui appartiennent aux unités départementales et interdépartementales, relèvent d’un commandement unique. Ils peuvent être déployés en renfort en tout lieu du département.
    S’agissant de la ville de Bailleul, la question est de savoir s’il faut y créer un commissariat de plein exercice. Par honnêteté intellectuelle, je dois vous dire que tel n’est pas le projet. En effet, la ville n’est pas isolée : elle relève de la division de police d’Armentières-Bailleul, au sein d’une circonscription de police dotée – je l’ai dit – de plus de 2 000 agents et d’une direction interdépartementale dotée de plus de 5 000 policiers.
    Au moins une des patrouilles de police secours de la division est engagée en permanence à Bailleul, vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept. En outre, des équipages du groupe de sécurité de proximité et de la brigade anticriminalité y patrouillent. La commune dispose aussi, en cas de besoin, d’un potentiel d’intervention rapide de trente équipages présents, là aussi vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept, dans la circonscription de police. En 2024, le délai moyen d’intervention desdites patrouilles à Bailleul à la suite d’un appel au 17 était de onze minutes.
    Les moyens sont donc importants, et l’engagement des policiers porte ses fruits. En 2024, dans la circonscription de police nationale de Lille, les atteintes aux biens ont diminué de 3 % et les violences physiques ont connu une légère baisse, de 0,6 %. À Bailleul même, le taux d’élucidation en matière de délinquance générale a sensiblement progressé, passant de 33 % en 2022 à 37 % en 2024 – ce qui n’est pas négligeable.
    S’agissant de la répartition des zones de compétence entre la police et la gendarmerie, j’ai pris connaissance avec intérêt du rapport de la Cour des comptes que vous avez évoqué. Le ministre d’État et moi-même sommes attachés à ce que toute évolution éventuelle dans ce domaine associe très étroitement les élus locaux, repose sur un constat partagé et apporte une amélioration significative – il n’est pas utile de changer un dispositif qui fonctionne.
    Dans le cadre du plan de création de 239 nouvelles brigades de gendarmerie, 80 brigades ont été créées en 2024 et 159 doivent encore l’être dans les prochaines années. Dans le Nord, la brigade fixe de Zuydcoote, dotée d’un effectif de dix-huit gendarmes, a été créée le 1er mai.
    Parmi les unités restant à créer, la brigade fixe de Renescure fait partie des projets identifiés comme prioritaires, compte tenu des engagements immobiliers que vous avez évoqués. Les locaux provisoires de cette unité seront effectivement installés dans un bâtiment rénové par la commune, que la gendarmerie a pris à bail à compter d’avril 2024. À ce stade, ces locaux ne sont utilisés que quelques jours par semaine. Pour ce qui est des locaux définitifs, le projet immobilier est à l’étude et a vocation à aboutir d’ici à 2028. En tout cas, la détermination du ministère de l’intérieur est totale, l’objectif étant une installation aussi rapide que possible de la brigade à Renescure. (M. Jean-Pierre Bataille fait signe qu’il souhaite intervenir.)

    M. le président

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    Je regrette, monsieur Bataille, le temps de parole est épuisé.

    Parc immobilier de la gendarmerie

    M. le président

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    La parole est à M. Didier Le Gac, pour exposer sa question, no 109, relative au parc immobilier de la gendarmerie.

    M. Didier Le Gac

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    Le 7 janvier dernier, il y a un mois à peine, je me suis rendu avec le colonel Caniotti, commandant du groupement de gendarmerie du Finistère, à la gendarmerie du Conquet, commune de ma circonscription située à l’extrême ouest du département, pour constater avec lui l’état de délabrement de cette gendarmerie. Celle-ci avait été fermée le 13 décembre, sachant que ses occupants, les gendarmes et leurs familles, n’avaient plus ni chauffage ni eau chaude depuis le 4 décembre ! Le maire du Conquet avait alerté la population en ces termes : « En raison des conditions de vie et d’accueil du public déplorables, la brigade du Conquet est fermée jusqu’à nouvel ordre. » Les six militaires affectés à la brigade avaient été redéployés et relogés avec leurs familles à la brigade de Plouzané, non loin de là.
    Cette fermeture contrainte illustre le manque d’entretien et l’état de dégradation des gendarmeries non seulement dans ma circonscription, mais, hélas, sur l’ensemble du territoire national. Pour les gendarmes, je tiens à le rappeler ici, loger à la gendarmerie est non pas un choix, mais une obligation. À la différence de l’immense majorité des agents publics, ils sont soumis à une obligation de logement en caserne ; 80 % d’entre eux y logent en famille.
    Par conséquent, les problèmes soulevés par la dégradation des bâtiments occupés par la gendarmerie dépassent largement le cadre habituel des discussions sur les conditions de travail des agents publics. C’est avant tout une question de dignité. Une gendarmerie vétuste, cela signifie des conditions de travail dégradées pour les gendarmes, des conditions de vie dégradées pour leurs familles, des conditions d’accueil elles aussi dégradées pour le public, notamment pour les victimes.
    Dans un rapport relativement récent, notre collègue sénateur Bruno Belin a dressé un état des lieux alarmant de la dégradation des biens immobiliers de la gendarmerie sur l’ensemble du territoire, tant pour les bâtiments dont elle est encore propriétaire que pour ceux dont elle est locataire – la location concerne plus de 3 000 des 3 728 casernes de France.
    Dans le Finistère, les casernes sont liées depuis 2007 par un bail emphytéotique à un fonds d’investissement qui devait en assurer la gestion jusqu’en 2042. Il s’avère que cette gestion est calamiteuse et qu’il revient désormais au conseil départemental de combler les déficits occasionnés par l’organisme en question.
    Il n’est plus possible que nos gendarmes et leurs familles continuent à travailler et à vivre dans des locaux dégradés, où il fait parfois 10 degrés en plein hiver. Il n’est plus possible non plus que le conseil départemental supporte seul, à terme, les frais de plus en plus lourds des travaux de rénovation. Que compte faire le gouvernement pour que les travaux de rénovation de la gendarmerie du Conquet, en particulier ceux qui ont trait à l’isolation, soient réalisés dans les meilleurs délais ? Il faut éviter que, l’hiver prochain, cette gendarmerie soit de nouveau contrainte de fermer ses portes.

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur.

    M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur

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    Permettez-moi de formuler quelques observations à caractère général avant d’aborder la situation de votre territoire.
    Bien évidemment, l’immobilier de la gendarmerie est un enjeu stratégique pour le ministère de l’intérieur, car il garantit la permanence de la réponse opérationnelle de proximité, la réactivité et la capacité de montée en puissance dans les territoires. La gendarmerie dispose de 3 735 casernes, ce bâti occupant 11 millions de mètres carrés. Il s’agit de 645 casernes domaniales et de 3 090 casernes locatives, ces dernières étant le plus souvent la propriété d’une collectivité territoriale.
    L’amélioration de la qualité du parc immobilier de la gendarmerie et son maintien en bon état figurent parmi les priorités du ministère. Aussi un redressement de la trajectoire budgétaire de l’immobilier de la gendarmerie est-il prévu pour 2025 – le budget est, vous le savez, en cours d’examen. Ces moyens supplémentaires permettront de lancer des plans d’urgence pour la réhabilitation, dans l’Hexagone et outre-mer, des sites dont l’état est le plus critique. Ils doivent en outre donner la possibilité de recourir à des contrats de partenariat pour engager des projets structurants, dans des conditions financières de nature à amortir leur impact sur les finances publiques. Sont concernés le site de Versailles-Satory et, à terme, ceux de Dijon, Melun et Mayotte.
    J’en viens au département du Finistère. Au cours des cinq dernières années, 20 millions d’euros ont été investis pour y entretenir les casernes domaniales.
    Si des travaux sont en cours au siège du groupement implanté à Quimper, au bénéfice des soixante-dix familles qui y sont logées, d’autres opérations de réhabilitation lourde et de maintenance restent nécessaires, notamment au Conquet.
    Sur le fondement des dispositions du décret de décembre 2016 relatif aux conditions de réalisation et de financement de casernes de gendarmerie par les organismes HLM, cinq projets ont été lancés dans le parc locatif afin de remplacer les actuelles casernes vieillissantes et d’améliorer les conditions de vie et de travail d’une centaine de militaires et de leurs familles. Les nouvelles casernes pourraient être livrées d’ici 2028.
    Je n’ai pas de réponse précise sur le cas particulier du Conquet que vous avez évoqué mais je m’engage à faire les vérifications nécessaires pour vous en apporter une. Notre objectif est de donner à nos gendarmes des locaux parfaitement adaptés à leurs missions.

    M. le président

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    La parole est à M. Didier Le Gac.

    M. Didier Le Gac

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    Je prends acte de votre réponse. À plus long terme, il conviendra de revoir complètement les relations locatives et les baux entre l’État et les collectivités locales afin de trouver une solution pérenne.

    M. François-Noël Buffet, ministre

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    Nous sommes d’accord !

    Prison de haute sécurité

    M. le président

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    La parole est à Mme Valérie Bazin-Malgras, pour exposer sa question, no 104, relative à la prison de haute sécurité.

    Mme Valérie Bazin-Malgras

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    Le 12 janvier dernier, le garde des sceaux a fait part de sa volonté de créer une prison de haute sécurité afin d’incarcérer les cent plus gros narcotrafiquants du pays. Pour ce faire, il est prévu de vider une prison, ce qui paraît peu réaliste dans la mesure où nos établissements pénitentiaires sont pleins.
    Aussi, je souhaite appeler votre attention sur la situation de l’ancienne maison centrale de Clairvaux, située dans mon département de l’Aube : elle a été fermée en 2023 alors que des travaux de réhabilitation d’un montant de 12 millions d’euros venaient d’y être réalisés. Cette décision, qui a entraîné la perte de nombreux emplois, a provoqué une profonde désolation économique et sociale au sein du territoire ainsi qu’un sentiment d’abandon chez les habitants de ce bassin de vie.
    Ne serait-il pas intéressant d’étudier la possibilité de rouvrir le site Clairvaux pour répondre aux besoins évoqués par le ministre de la justice ? L’investissement considérable de 12 millions d’euros consenti en 2018 pour rénover cette prison ainsi que son potentiel stratégique, tant du point de vue de son implantation que de ses capacités, justifient une évaluation de sa réouverture dans le cadre du projet gouvernemental d’isolement des détenus liés au narcotrafic. N’oubliez pas, monsieur le ministre, que cette maison centrale emblématique a permis d’assurer la surveillance et l’isolement des criminels les plus dangereux de notre pays pendant deux siècles !
    À l’heure où le narcotrafic représente une menace majeure pour la sécurité de notre pays, Clairvaux pourrait à nouveau être au rendez-vous de notre histoire pénitentiaire. C’est pour cette raison que j’invite M. le garde des sceaux à venir sur place pour prendre connaissance du site et que je le prie de bien vouloir intégrer Clairvaux dans ses réflexions sur la création de nouvelles prisons de haute sécurité.

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur.

    M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur

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    Je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de M. le ministre d’État, garde des sceaux, ministre de la justice, qui m’a demandé de vous répondre.
    Depuis sa prise de fonctions il y a un mois, le garde des sceaux a eu de nombreux échanges sur ce sujet avec les acteurs judiciaires et pénitentiaires. Ainsi qu’il a déjà pu le dire à de nombreuses reprises, il n’est pas compréhensible pour nos concitoyens, ni acceptable pour notre société, que des criminels poursuivent leur trafic depuis leur cellule – ceux qui ont visité des maisons d’arrêt savent que les téléphones y arrivent comme par magie. Il faut y mettre fin !
    C’est pourquoi, le 31 juillet 2025, le garde des sceaux a annoncé que les cent personnes identifiées comme constituant le sommet du spectre de la criminalité organisée seront placées dans un établissement pénitentiaire présentant toutes les garanties d’étanchéité qui s’imposent, pour y être détenues dans des conditions de sécurité drastiques, à même d’empêcher toute communication illicite et toute projection, de lutter contre les livraisons par drone et d’entraver les échanges entre cellules. Les autorités judiciaires travaillent déjà activement avec les services de l’administration pénitentiaire – et plus particulièrement avec le service national du renseignement pénitentiaire – pour identifier collectivement, avant toute chose, ces cent premiers profils.
    Parallèlement, la nécessité de mettre en œuvre un régime de détention particulier – à l’instar de celui instauré, il y a longtemps déjà, par nos homologues italiens pour les chefs d’organisations criminelles et mafieuses – est en cours d’examen.
    L’établissement pénitentiaire qui sera concerné n’a pas encore été choisi et le garde des sceaux poursuit ses visites de terrain avec l’administration pénitentiaire. Je ne manquerai pas de relayer auprès de lui vos observations relatives à la maison d’arrêt de Clairvaux et aux travaux qui y ont été conduits. J’imagine qu’il sera à même de se rendre sur ce lieu particulier, emblématique de notre histoire pénitentiaire et criminelle.

    M. le président

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    La parole est à Mme Valérie Bazin-Malgras.

    Mme Valérie Bazin-Malgras

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    Nul doute que vous n’aurez pas de mal à trouver ces cent narcotrafiquants ! Cependant, vous n’avez pas répondu à ma question : le garde des sceaux se déplacera-t-il dans l’Aube, à Clairvaux, pour visiter cet établissement ayant bénéficié de travaux de rénovation à hauteur de 12 millions d’euros en 2018 ?

    M. François-Noël Buffet, ministre

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    Je le souhaite.

    Mme Valérie Bazin-Malgras

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    Je le souhaite aussi !

    Lycée forestier d’Étang-sur-Arroux

    M. le président

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    La parole est à M. Aurélien Dutremble, pour exposer sa question, no 124, relative au lycée forestier d’Étang-sur-Arroux.

    M. Aurélien Dutremble

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    Je souhaite évoquer la situation du lycée forestier d’Étang-sur-Arroux, qui constitue un sujet de préoccupation majeure dans ma circonscription de Saône-et-Loire, sur lequel j’avais déjà sollicité Annie Genevard en octobre 2024. Élèves, familles, enseignants, élus locaux et habitants d’Étang-sur-Arroux sont dans la tourmente depuis l’annonce du transfert de Velet vers Autun de la totalité des activités de l’établissement. Ce lycée forestier, reconnu pour la qualité de son enseignement, qui fut saluée par le président de la République lors de sa visite officielle en février 2019, est menacé d’une fermeture brutale et incompréhensible.
    À ce jour, ce lycée d’enseignement et de formation professionnelle agricole est implanté au cœur même de l’activité forestière et au plus près des ressources boisées. Là-bas, les forestiers de demain sont formés dans des conditions d’apprentissage qui sont proches des conditions réelles d’exercice de la profession. Comment envisager de le fermer pour le déménager en pleine ville ?
    Madame la ministre déléguée, connaissez-vous beaucoup de lycées agricoles installés en ville, loin des champs et du bétail ? Comment peut-on imaginer transférer un lycée forestier en centre-ville ? Comment croire que demain, des jeunes choisiront de se former aux métiers de la forêt et du bois dans un établissement urbain, éloigné de la ressource et des terrains d’application ? La formation de forestier doit rester à portée d’arbres !
    La suppression du lycée de Velet enverrait un signal négatif à toute la filière bois et affaiblirait considérablement l’attractivité de la formation qu’il dispense, pourtant essentielle à notre économie et à l’aménagement du territoire. L’intégration de ce lycée à son environnement naturel est un formidable atout pédagogique qui serait définitivement perdu si la décision de fermeture était entérinée.
    Madame la ministre déléguée, à l’heure des discours sur la relocalisation, l’aménagement équilibré du territoire et la formation aux métiers d’avenir, comment justifiez-vous cette décision de la région Bourgogne-Franche-Comté ? L’État entend-il s’y opposer et défendre le maintien du lycée de Velet sur son site historique d’Étang-sur-Arroux ? Je veux croire que Mme la ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire s’opposera à ce transfert qui serait vécu comme une gifle donnée à toute une profession et qui enverrait un signal éminemment négatif à toute la filière bois mais aussi à la ruralité et, surtout, à la commune d’Étang-sur-Arroux.
    Vous l’aurez compris, je milite fermement pour le maintien du lycée à Étang-sur-Arroux. L’avenir de la filière bois doit s’écrire là-bas. Agents du lycée, élèves, familles, habitants, professionnels et élus locaux, qui se battent pour préserver cet outil de formation unique, tous attendent votre appui. Ma question est donc simple : le gouvernement soutiendra-t-il le maintien de ce lycée à Étang-sur-Arroux ?

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire.

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire

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    Je vous prie d’excuser l’absence de Mme la ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.
    L’établissement d’enseignement agricole de Velet sur lequel vous m’interrogez dispense des formations qui répondent, vous l’avez dit, à de réels besoins des professionnels du territoire, en particulier dans la filière forêt-bois, grâce à la préparation à deux baccalauréats professionnels – « travaux forestiers » et « gestion des milieux naturels et de la faune » – et à l’organisation de formations continues pour adultes. Je voudrais en premier lieu réaffirmer l’importance et la qualité de cette offre de formation, qui doit être pérennisée.
    La question de l’avenir de l’établissement est un sujet sur lequel le conseil régional et l’État ont vocation à agir conjointement, chacun dans son domaine de compétence propre. Dans un dialogue avec les personnels de l’établissement et les élus locaux, l’État et la région ont conjointement conduit, au niveau régional, une analyse approfondie de deux options : le maintien des formations sur le site actuel ou leur relocalisation à environ 20 kilomètres, à Autun, sur un site où est déjà implanté un lycée de l’éducation nationale.
    Pour conduire cette expertise, une méthode précise a été arrêtée avec l’ensemble des personnels lors d’une réunion sur site, le 21 juin 2024 ; des ateliers de travail avec les personnels se sont tenus les 25 septembre et 4 octobre ; une délégation représentative des personnels a visité le site Leclerc à Autun le 12 septembre ; enfin, le 4 octobre, une visite des ateliers techniques sur le site de Velet aux côtés du personnel a permis de mieux comprendre la situation et d’identifier des solutions d’optimisation logistique. Les conclusions de ces travaux d’expertise collective ont été partagées lors d’une réunion avec l’ensemble des personnels, le 4 novembre dernier.
    C’est sur cette base que, dans les prochains jours, le conseil régional et l’État prendront une décision conjointe. Mme la ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire, Annie Genevard, vous tiendra évidemment informé de sa teneur.

    M. le président

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    La parole est à M. Aurélien Dutremble.

    M. Aurélien Dutremble

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    Je réaffirme mon appel à maintenir ce lycée à Étang-sur-Arroux. Le délocaliser à Autun accentuerait les déserts territoriaux de la ruralité.

    Conchyliculture

    M. le président

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    La parole est à M. Sylvain Carrière, pour exposer sa question, no 119, relative à la conchyliculture.

    M. Sylvain Carrière

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    Je tiens à vous alerter sur le caractère catastrophique pour la conchyliculture de la situation actuelle de l’étang de Thau. La forte mortalité des huîtres y condamne à court et moyen terme l’ensemble de la filière conchylicole, et partant, un savoir-faire ancestral propre au terroir héraultais.
    L’étang de Thau subit de plein fouet les conséquences de l’activité humaine : le changement climatique a entraîné un effondrement des précipitations, une augmentation accrue de l’évaporation, une acidification de l’eau ainsi qu’une élévation de sa température. Dans le même temps, la pression anthropique causée par l’urbanisation accrue de ses pourtours réduit l’écoulement naturel des eaux et limite l’alimentation naturelle de l’étang en eau douce et en nutriments issus de la nappe phréatique. En conséquence, la salinité de l’étang n’a cessé d’augmenter : de l’ordre de 32 grammes par litre il y a quelques années, elle est aujourd’hui constamment au-delà de 38 grammes par litre – ce qui correspond au seuil de mortalité des huîtres –, avec des pics à 42 grammes par litre. Avec d’autres facteurs, ces concentrations contribuent à l’accroissement de la mortalité des coquillages, notamment à cause du pathogène vibrio aestuarianus. Ainsi, en 2023, les agriculteurs de la mer rapportaient 73 % de mortalité estivale des coquillages dans l’étang de Thau.
    La pollution de l’eau est la conséquence directe de la forte pression anthropique en amont du bassin-versant : les conchyliculteurs en sont les « pollués payeurs ». En effet, les collectivités des alentours, telles Sète et Marseillan, développent des projets urbanistiques massifs alors que leurs réseaux d’assainissements sont déjà saturés. En 2022, cela avait causé la crise du norovirus qui, empêchant toute vente au moment des fêtes de fin d’année, avait durablement dégradé l’image de marque de la production.
    Ainsi, il convient de raisonner à plusieurs échelles temporelles pour le bassin de Thau.
    À court terme, afin de garantir aux conchyliculteurs la possibilité de conserver une trésorerie, il est nécessaire de calibrer correctement le Fonds européen pour les affaires maritimes, la pêche et l’aquaculture (Feampa). En 2023, ce fonds, qui vise à pallier les chutes de chiffres d’affaires, n’a bénéficié qu’à un seul professionnel sur les cent trente ayant fait une déclaration de perte. En effet, pour faire face à la mortalité des huîtres et à leurs charges incompressibles, les conchyliculteurs sont obligés de faire de l’achat-revente, qui impacte la marge brute. Il conviendrait donc de raisonner sur cet indicateur qui est le plus révélateur de la crise traversée par la profession.
    Parallèlement, les schémas d’aménagement urbains devraient préserver le milieu naturel et la qualité de l’eau de l’étang de Thau, site Natura 2000, berceau de biodiversité.
    Madame la ministre déléguée, avez-vous prévu d’effectuer, à courte échéance, une refonte des critères d’éligibilité au Feampa correspondant aux besoins de la filière ? Quelles mesures concrètes comptez-vous prendre pour résorber le problème de la salinisation grandissante de l’étang de Thau ? L’ensemble des activités conchylicoles et, avec elles, la biodiversité locale si chère à notre territoire, en dépendent.

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire.

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire

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    Votre question souligne la nécessité d’une approche globale, à différents niveaux et selon différents axes, afin d’assurer la qualité de la conchyliculture et du milieu dans lequel elle évolue.
    Le gouvernement agit, en lien avec les collectivités, pour que les activités conchylicoles puissent perdurer dans un milieu le plus sain possible, notamment en établissant et en respectant des profils de vulnérabilité conchylicoles. Les préfets ont été sensibilisés en 2024 à la nécessité de veiller à ce que les systèmes d’assainissement et les critères de développement urbain – une question qui vous inquiète particulièrement s’agissant de l’étang de Thau – soient définis en adéquation avec le milieu environnant et puissent répondre à des pressions soudaines sans obérer la qualité de ce dernier.
    Puisque vous avez évoqué l’accompagnement des conchyliculteurs, je tiens à vous assurer que le gouvernement est attentif à leur situation. Nous avons pleinement pris la mesure des difficultés d’une profession durement touchée par une baisse des ventes due à une désaffection des consommateurs. Pour répondre aux difficultés individuelles et collectives de la filière, le gouvernement a annoncé et déployé début 2024 plusieurs mesures comme la réduction des redevances domaniales, jusqu’à 90 % pour les entreprises ayant fait l’objet d’une fermeture sanitaire, et – puisque vous avez évoqué les problèmes de trésorerie – la mobilisation des outils bancaires d’urgence annoncés par le président de la République, à savoir des reports d’annuités ou des renégociations d’emprunts à des taux inférieurs au marché.
    S’agissant plus spécifiquement de la mortalité des huîtres dans l’étang de Thau, l’État cofinancera le projet Spread, déposé par l’Ifremer (Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer) et le CNC (Comité national de la conchyliculture). D’un montant global de 1,5 million d’euros, ce plan vise à déterminer et à approfondir les causes de survenance et de virulence du virus. Voilà qui répond précisément à votre question.
    Enfin, sachez que nous organiserons, dans quelques jours, un événement dans le cadre du Salon de l’agriculture 2025, destiné à rassurer le grand public sur la qualité des coquillages et à illustrer la mobilisation conjointe des professionnels et du gouvernement pour assurer une production saine.

    Allègement des normes environnementales

    M. le président

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    La parole est à Mme Brigitte Barèges, pour exposer sa question, no 134, relative aux normes environnementales.

    Mme Brigitte Barèges

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    Ma question s’adresse à Mme la ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.
    L’entreprise Lidea, filiale du groupe Euralis – 2 000 employés, 350 millions de chiffre d’affaires, 17 stations de recherche et 8 sites de production en Europe – vient de décider de mettre fin à ses activités industrielles sur son site de Caussade, une commune du Tarn-et-Garonne. Il s’agit tout de même du dixième semencier de grande culture au niveau mondial et du septième au niveau européen. Son siège se trouve à Pau – voilà qui pourrait intéresser notre premier ministre.
    Cette décision entraîne la suppression de quatre-vingt-un emplois dont soixante dans mon département, le Tarn-et-Garonne. La fermeture de ce site est due à un retournement du marché européen : recul des productions de semences de 28 % dans le Sud-Ouest en 2024 en raison du conflit en Ukraine et de la fermeture du marché russe. Cette situation sera aggravée – vous vous en doutez – par la concurrence que va engendrer l’accord du Mercosur.
    À cela s’ajoute – j’en viens au cœur de ma question – le retard pris par la production de semences françaises en raison des normes environnementales agroécologiques qui interdisent l’usage de nouvelles technologies ainsi que la recherche et le développement en génétique et biotechnologies végétales. Le reste du monde, qu’il s’agisse des États-Unis ou des Brics+, avance pendant que nos entreprises perdent du terrain – une baisse de 20 % en cinq ans sur les cultures de maïs semence.
    Que comptez-vous faire pour libérer nos pépites françaises de ces normes environnementales qui les paralysent face à une compétition internationale de plus en plus féroce ? Préférez-vous voir les plans sociaux et les fermetures de nos usines continuer à se multiplier ?

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire.

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire

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    Vous avez souhaité appeler notre attention sur la fermeture d’un site de l’entreprise Lidea et plus généralement sur l’allègement des normes dans le domaine agricole.
    L’arrêt du site de Caussade, annoncé en octobre par l’entreprise Lidea, a donné lieu à un plan de sauvegarde de l’emploi élaboré avec les services de l’État. Cette procédure a abouti à un accord entre la direction et les salariés. En outre, il convient de signaler – c’est important – qu’un repreneur potentiel a été identifié pour le site industriel, ce qui permettra, je l’espère, de préserver le tissu industriel local.
    Sur le fond – j’en viens à la deuxième partie de votre question –, vous avez raison. Nous devons travailler à réduire l’empilement des normes et des réglementations, à la fois communautaires et nationales, qui pèsent sur le métier d’agriculteur et plus généralement sur le monde économique. À cette fin, la ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire a lancé les « rendez-vous mensuels de la simplification ». Ces réunions ont vocation à faire sauter les verrous qui font barrage à la pleine expression de notre capacité de production. Dans le même esprit, elle a instauré en octobre dernier le contrôle administratif unique, dont tous les préfets ont déjà créé les instances et organisé le fonctionnement. Vous le voyez, les choses avancent dans le bon sens.
    C’est d’ailleurs à l’occasion d’un de ces rendez-vous, en novembre dernier, que la ministre Annie Genevard a annoncé de nombreuses autres mesures comme la déconcentration des calendriers des travaux du sol, la facilitation des déclarations PAC – demandes d’aides de la politique agricole commune – et le versement des avances au premier jour possible, même en cas de contrôle.
    Je vous le concède, beaucoup reste à faire et cela nécessite une mobilisation collective volontariste. Telle est la philosophie du gouvernement qui, je le rappelle, est fermement opposé à l’accord du Mercosur tel que proposé par la Commission européenne.
    J’ajoute enfin que nous nous battons pour faire avancer le dossier des nouvelles techniques de sélection (NBT) et des nouvelles techniques génomiques (NGT), aujourd’hui bloqué à Bruxelles.

    M. le président

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    La parole est à Mme Brigitte Barèges.

    Mme Brigitte Barèges

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    Je ne sais pas s’il m’est possible d’être invitée aux rendez-vous mensuels de la simplification mais je serais enchantée de participer à de tels ateliers.

    Office français de la biodiversité

    M. le président

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    La parole est à M. Aurélien Pradié, pour exposer sa question, no 123, relative à l’Office français de la biodiversité.

    M. Aurélien Pradié

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    Le 15 janvier, un agent de l’Office français de la biodiversité (OFB), fonctionnaire de notre pays, a déclaré à la radio, lors d’une matinale, qu’il était possible, à ses yeux, de comparer nos agriculteurs à des dealers.
    Ces mots ont légitimement créé une onde de choc auprès de nos agriculteurs mais aussi de nombre de responsables publics. Ils sont totalement indignes, tout d’abord parce qu’il est impossible de comparer nos agriculteurs, eux qui produisent et nourrissent nos concitoyens, à des dealers, ensuite parce qu’il est absolument inacceptable qu’un agent de l’Office français de la biodiversité, un fonctionnaire, tienne de tels propos.
    Ma question est simple : depuis le 15 janvier, nous avons entendu de nombreuses déclarations ; le gouvernement, en particulier, s’est désolidarisé de cette comparaison. Cependant, quelles sanctions ont été engagées ? Cet agent a-t-il été mis à pied ? Une procédure a-t-elle été lancée à son encontre ? Qu’en est-il aujourd’hui ?
    Si j’insiste, c’est parce qu’on ne peut laisser quiconque salir l’ensemble de nos fonctionnaires et de nos agriculteurs. On ne peut laisser l’impunité s’installer pour des personnes qui, alors qu’elles portent une parole publique, outrepassent leur rôle et s’essuient les pieds sur ceux qui, au quotidien, souffrent et travaillent dur pour nourrir nos compatriotes.

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire.

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire

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    En octobre dernier, le premier acte de simplification de la ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire a été la création du contrôle administratif unique, attendu depuis longtemps. Toutefois, si le nombre de contrôles constitue un irritant, leurs modalités peuvent aussi être à l’origine de crispations – c’est bien le cœur du problème que vous évoquez. Comme l’indique le rapport de la mission flash interinspections, les contrôles, qui, dans la grande majorité des cas, se passent bien, peuvent parfois entraîner incompréhensions et tensions. C’est pourquoi la pédagogie est particulièrement nécessaire.
    C’est la raison pour laquelle, début décembre, la ministre de l’agriculture a signé et adressé une circulaire au directeur de l’OFB et aux préfets, conjointement avec notre collègue chargée de l’écologie, qui partage la tutelle de cet organisme. Elles y rappellent la nécessaire instauration du contrôle unique et demandent de faciliter la compréhension des missions de l’OFB, de dissimuler les armes des agents en cas de contrôle administratif en exploitation et d’expérimenter le port de caméra-piéton pour faire baisser une éventuelle tension des contrôles sur place.
    Cette volonté commune se traduira par des dispositions prévues dans des outils législatifs en cours d’examen : le projet de loi d’orientation agricole, qui inclut notamment la dépénalisation des atteintes involontaires à l’environnement, et la proposition de loi des sénateurs Laurent Duplomb et Franck Menonville, adoptée au Sénat, qui prévoit par exemple le renforcement de la tutelle des préfets ou encore la transmission par voie hiérarchique des procès-verbaux comme cela se fait à la gendarmerie.
    Au demeurant, la surenchère ne peut être la solution et le gouvernement condamne les propos outranciers d’individus isolés, de part et d’autre, tels que ceux que vous avez cités. Ils doivent cesser. Nous devons retrouver la confiance et le respect nécessaires à l’apaisement des relations entre les agents de l’OFB et les agriculteurs qu’ils sont amenés à contrôler conformément à leur mission. Telle est la priorité du gouvernement.

    M. le président

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    La parole est à M. Aurélien Pradié.

    M. Aurélien Pradié

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    Je vous remercie, madame la ministre déléguée, mais je n’ai pas obtenu de réponse à ma question. Je regrette l’absence de la ministre de l’agriculture ; je vous sais gré de la suppléer, mais elle aurait pu vous transmettre une réponse satisfaisante.
    Que les choses soient bien claires : ce n’est pas un problème de pédagogie. Lorsqu’un agent de l’OFB compare nos agriculteurs à des dealers, il emploie des mots très simples, les agriculteurs n’ont pas besoin qu’on les leur explique. Par ailleurs, il n’est pas possible de l’excuser.
    Je comprends votre réponse car, en réalité, aucune sanction n’a été prononcée contre cet agent, qui est toujours en poste, dans une totale impunité. Cela entraîne deux conséquences. D’abord, il abîme l’image de tous ses collègues – or certains d’entre eux font bien leur travail. Ensuite, il laisse s’installer l’idée selon laquelle ceux qui représentent l’autorité ne seraient pas exemplaires.
    Je le répète : cet agent doit être sanctionné. Il est absolument insupportable de découvrir qu’au-delà des mots, il ne fait l’objet d’aucune procédure de sanction – ce que nous soupçonnions. Notre main ne doit pas trembler. Si nous voulons rétablir l’autorité dans notre pays, ceux qui la représentent doivent commencer par donner l’exemple. Lorsqu’un agriculteur commet une faute, il n’a pas droit à une deuxième chance, on n’évoque pas un besoin de pédagogie, il est sanctionné. Lorsqu’un agent outrepasse son rôle et insulte les agriculteurs comme cela vient de se produire, il ne doit pas non plus rester impuni.
    Je pose une nouvelle fois ma question : une sanction a-t-elle été prononcée contre cet agent ou est-il toujours, sereinement, en poste ? Si la deuxième proposition se vérifie, c’est un bras d’honneur à tous nos agriculteurs.

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée.

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée

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    J’ai bien entendu votre question. Je n’ai pas la réponse aujourd’hui mais Mme la ministre vous répondra précisément.

    Convention fiscale France-Luxembourg

    M. le président

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    La parole est à M. Laurent Jacobelli, pour exposer sa question, no 129, relative à la convention fiscale France-Luxembourg.

    M. Laurent Jacobelli

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    En l’absence du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, je salue Mme la ministre déléguée Louwagie. Je sais que vous vous êtes rendue récemment dans notre belle Moselle. Les Français qui vivent dans ce département et travaillent chaque jour au Luxembourg sont inquiets parce que la nouvelle convention fiscale entre les deux pays, qui devrait s’appliquer cette année, est, pour beaucoup d’entre eux, notamment pour les foyers dont un membre seulement travaille au Luxembourg, synonyme de matraquage fiscal.
    Ces travailleurs frontaliers inquiets sont nombreux : 122 000 en Lorraine et 50 000 en Moselle. Leur vie n’est pas toujours simple. Lors de leurs trajets en voiture entre le domicile et le travail, ils sont confrontés à une heure et demie de bouchons matin et soir. S’ils prennent le TER (train express régional), ils subissent des pannes techniques ou des suppressions de trains, la région Grand Est étant l’une des moins bien gérées en la matière. Ils travaillent 40 heures et non 35 et doivent souvent embaucher une nounou, sacrifiant ainsi leur vie de famille, parce qu’ils rentrent au foyer après vingt et une heures. Dès lors, pourquoi leur infliger ce matraquage fiscal qui représenterait une peine supplémentaire ?
    J’ajoute que notre économie a besoin de ces travailleurs frontaliers qui dépensent 80 % de leurs revenus sur le territoire lorrain. Ils paient la TVA et font vivre les commerçants.
    Par ailleurs, gardons bien à l’esprit que, si de nombreux Français choisissent de travailler au Luxembourg, ce n’est pas par plaisir. Ils paient des années d’incompétence de l’État, lequel s’est révélé incapable de maintenir les emplois à la suite de la désindustrialisation qui a touché, vous le savez, nos mines et notre sidérurgie.
    Pourquoi vouloir serrer davantage l’étau fiscal sur ceux qui travaillent et nous apportent des richesses ? Si cette convention entre en vigueur – nous y échappons depuis deux ans –, elle entraînera une baisse du pouvoir d’achat de ces Français et donc une baisse de la consommation dans ces territoires de notre pays.
    Certains, qui anticipent une surimposition, songent déjà à briser leur pacs ou à divorcer, d’autres réfléchissent à une installation définitive au Luxembourg.
    Vous imaginez bien que tout le monde y perdrait : l’État, qui percevrait moins de recettes fiscales en raison de la baisse de la TVA et du fait que des Français s’installeraient à l’étranger ; les commerçants et entrepreneurs locaux, qui verraient leurs chiffres d’affaires diminuer ; ceux enfin qui seraient obligés de payer davantage d’impôts.
    Député de la huitième circonscription de la Moselle, la première touchée par cette convention fiscale, je vous le demande : instaurerons-nous enfin la paix fiscale pour les frontaliers ? Gèlerons-nous pour une année supplémentaire cette convention qui nous lie au Luxembourg et dont l’application serait désastreuse pour de nombreux foyers ?

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire.

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire

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    Je me trouvais samedi à Metz, où j’ai discuté avec un certain nombre d’acteurs économiques qui ont évoqué cette question. Vous appelez mon attention sur la convention fiscale franco-luxembourgeoise et son incidence sur les travailleurs frontaliers qui résident en France et exercent leur activité au Luxembourg.
    Signée le 20 mars 2018, cette convention est entrée en vigueur le 19 août 2019 et s’est appliquée pour la première fois aux revenus perçus en 2020. Largement inspirée du modèle de convention de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), elle a permis de moderniser le cadre bilatéral franco-luxembourgeois, intégrant notamment les derniers standards internationaux issus du projet BEPS – base erosion and profit shifting.
    Comme l’ancienne convention fiscale entre la France et le Luxembourg signée en 1958, la présente convention maintient le principe d’une imposition des salaires sur le lieu d’exercice de l’activité, conformément au modèle de l’OCDE. Ainsi, les salaires privés de source luxembourgeoise perçus par les travailleurs frontaliers résidant en France demeurent en règle générale imposés exclusivement au Luxembourg. Cette règle garantit l’absence de double imposition des salaires perçus par les travailleurs frontaliers.
    Par ailleurs, la convention franco-luxembourgeoise instaure un régime spécifique aux activités exercées en télétravail, ce qui simplifie les démarches déclaratives des salariés et des employeurs. C’est la première convention de ce type que la France ait conclue.
    L’avenant à la convention signé le 7 novembre 2022 et dont l’approbation sera prochainement soumise au vote de l’Assemblée nationale constitue une nouvelle avancée au bénéfice des travailleurs frontaliers. Par exemple, en portant de vingt-neuf à trente-quatre jours le seuil en deçà duquel les jours télétravaillés restent imposables dans l’État de l’employeur, en étendant ce régime dérogatoire aux agents de la fonction publique, il répond à l’émergence de nouvelles pratiques professionnelles et son impact sur l’environnement sera favorable.
    La convention de 2018 a modifié la méthode d’élimination de la double imposition pour les résidents de France percevant des revenus de source luxembourgeoise. Sans alourdir l’impôt applicable à ces revenus luxembourgeois imposables exclusivement au Luxembourg, ce changement doit permettre de les prendre en compte en France en vue de l’application de la progressivité de l’impôt aux autres revenus suivant une logique de justice fiscale par rapport à nos autres concitoyens.
    Afin de laisser le temps aux foyers concernés de s’adapter, le gouvernement avait annoncé par tolérance la possibilité de continuer d’appliquer l’ancien système aux revenus perçus en 2020 et 2021. Cette tolérance a été prorogée pour les revenus de 2022 et 2023. Après une période transitoire de quatre ans, la convention s’appliquera pleinement aux revenus perçus à compter de 2024.
    En tout état de cause, si la nouvelle méthode d’élimination de la double imposition diffère de celle qui s’appliquait précédemment, elle maintient le principe d’une imposition exclusive des salaires privés dans l’État où s’exerce l’activité et ne laisse persister aucune double imposition. C’est bien cela qui importe. De ce point de vue, il n’est pas possible de parler de matraquage fiscal.

    Ehpad publics

    M. le président

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    La parole est à Mme Marie Mesmeur, pour exposer sa question, no 117, relative aux Ehpad publics.

    Mme Marie Mesmeur

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    Le gouvernement a décidé de reprendre le budget qui a fait chuter le dernier gouvernement et de l’aggraver. C’est du Barnier en pire, au mépris du vote de cette assemblée et toujours du vote des Français en juillet dernier. Votre obsession austéritaire saigne les services publics et les collectivités territoriales, les biens communs de ceux qui n’ont rien.
    J’évoquerai en particulier le service public du grand âge. Les Ehpad publics, dont 85 % affichent un résultat déficitaire à la fin 2023, sont pris en étau entre l’explosion des besoins et l’augmentation inexorable des charges, et risquent la mise sous tutelle, voire la fermeture. Dans tous les cas, les conséquences sont dramatiques : qualité d’accueil en chute libre, soignants épuisés, fermetures d’établissements imminentes. Pendant ce temps, des groupes privés lucratifs imposent des tarifs exorbitants aux familles. Politique de malheur !
    Dans la ville de Bruz, dans ma circonscription, l’Ehpad public affiche un déficit d’au moins 500 000 euros en 2024 alors qu’il était en excédent en 2021.
    Votre austérité pousse des élus locaux à réagir. En Bretagne, cette terre de combat, seize maires soutenus par le département d’Ille-et-Vilaine ont porté plainte contre l’État pour carence, à l’initiative de Xavier Compain, maire de Plouha. La négligence de l’État, qui entraîne une maltraitance institutionnelle, est en cause. Le collectif de ces maires, baptisé Territoires en résistance pour le grand âge, réunit plus de 330 collectivités bretonnes, 5 000 élus et 36 parlementaires. Ils ne demandent qu’une chose : que le secteur soit renfloué afin qu’il soit pris correctement soin des personnes âgées dépendantes.
    Ces déficits ne sont pas seulement une ligne comptable. Prendre soin de nos aînés, c’est honorer celles et ceux qui ont bâti ce pays. Les abandonner à la précarité, c’est rompre le fil qui lie les générations.
    La commune de Bruz et les autres collectivités en souffrance peuvent-elles encore espérer une prise de conscience de l’État ou resteront-elles livrées à elles-mêmes ? Plus largement, avant même les coupes prévues dans votre budget de misère, la situation est déjà critique pour tous les services publics : quatre universités sur cinq sont en déficit, d’après France Universités, quatorze départements sont en grande difficulté financière et une trentaine en quasi-cessation des paiements, et le déficit des hôpitaux a triplé en un an, ce qui a conduit les présidents de trente-deux centres hospitaliers universitaires (CHU) à tirer la sonnette d’alarme.
    Vous ne pourrez pas mettre tout le monde sous tutelle et votre budget qui dépense 23,4 milliards d’euros de moins que le budget pour 2024 ne peut que ruiner davantage nos biens communs. Que comptez-vous faire ?

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire.

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire

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    Le gouvernement prend toute la mesure des difficultés financières que rencontrent les Ehpad, notamment publics. Les moyens accordés à ces structures ont largement augmenté, pour ce qui est de la partie financée par la sécurité sociale. Je rappelle que l’Ondam, l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, au profit des personnes âgées a progressé de 4,68 % entre 2023 et 2024. Ainsi, 650 millions d’euros ont bénéficié aux Ehpad. Je rappelle également que l’ensemble des mesures salariales prises ont été financées par l’État, pour la part du cofinancement qui relève de la sécurité sociale.
    Le gouvernement a également pris la mesure de l’inflation et de l’augmentation de la charge que représentent les soins et le traitement de la dépendance dans les Ehpad, et leur alloue 130 millions d’euros supplémentaires chaque année pour y faire face.
    Outre cette progression, plusieurs fonds d’urgence ont été créés depuis 2023 afin de répondre aux difficultés. En 2023, c’est un fonds abondé de 100 millions d’euros qui a été créé. Il a été reconduit en 2024 et 2025, les sénateurs ayant voté un amendement en ce sens, tandis que le gouvernement a accepté la majoration de l’aide apportée, à hauteur de 200 millions d’euros supplémentaires, pour un total de 300 millions d’euros supplémentaires consacrés aux Ehpad.
    En dépit du soutien qui leur a été accordé, force est de constater que leur situation a continué de se dégrader jusqu’en 2023. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale, le PLFSS, pour 2025 doit permettre de lancer l’expérimentation relative à la fusion des sections soins et dépendance le 1er juillet 2025 et ainsi d’élargir le financement des Ehpad par la sécurité sociale. C’est une demande formulée depuis plusieurs années. Ce nouveau régime de financement, outre qu’il répond à un besoin de simplification des procédures, a pour objet de rehausser le niveau de financement des Ehpad en intégrant une plus grande partie de leur budget dans le périmètre de la branche autonomie. Il donnera également lieu à une harmonisation des valeurs de point GIR – groupes iso-ressources – que les différents départements fixent aujourd’hui de manière très hétérogène.
    J’ajoute que la loi de 2024 portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir et de l’autonomie a introduit l’obligation pour les établissements publics d’appartenir à un groupe territorial. Dans un contexte marqué par la fragilité économique des Ehpad, les stratégies de coopération et de mutualisation à l’échelle d’un territoire peuvent constituer un moyen pour les établissements d’améliorer leurs performances et de retrouver un équilibre financier. Cette même loi prévoit également l’instauration de tarifs différenciés pour les Ehpad, qui sont à l’heure actuelle entièrement soumis à un tarif fixé par le département. À compter de janvier 2025, ils auront la possibilité d’opter pour un tarif d’hébergement libre pour les résidents non bénéficiaires de l’ASH, l’aide sociale à l’hébergement. J’invite les départements, qui y ont tout intérêt, à se saisir de cette possibilité. Cette disposition devrait permettre aux établissements concernés de retrouver des marges financières.

    M. le président

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    La parole est à Mme Marie Mesmeur.

    Mme Marie Mesmeur

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    Vos fonds d’urgence ne suffisent pas car vous laissez les Ehpad et tous les services publics agoniser depuis trop longtemps. Vous évoquez une expérimentation mais elle n’a pas lieu parce que vous bloquez le vote du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour l’année 2025 à coups de 49.3.
    La réalité est que vous vous livrez à un chantage au budget. Nous en avons un, celui de 2024, dans la mesure où nous avons voté la loi spéciale. Même l’OFCE, l’Observatoire français des conjonctures économiques, affirme que le budget pour 2024 serait plus favorable que le budget austéritaire que vous faites passer en force par 49.3.
    En vérité, vous cassez tous les biens communs qui font l’histoire de la France et mettez tous les services publics au service du privé lucratif. Notre modèle ne sera jamais le vôtre mais toujours celui de l’intérêt commun, de la dignité de tous et des solidarités.
    J’espère que la plainte des élus bretons sera entendue et que d’autres maires, avec le soutien des collectivités, les rejoindront afin que la justice vous condamne et vous oblige à agir.

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée

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    Puis-je répondre, monsieur le président ?

    M. le président

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    Je suis désolé, madame la ministre, votre temps de parole est écoulé.

    Société Novethic

    M. le président

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    La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour exposer sa question, no 107, relative à la société Novethic.

    Mme Sophie Taillé-Polian

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    La crise écologique et climatique constitue une menace existentielle pour nos économies. Face à cette menace, notre économie doit se transformer radicalement. C’est une véritable révolution industrielle, économique et sociale que nous devons mener, pour produire et consommer dans le respect des limites climatiques et écologiques.
    À cette fin, les médias ont un rôle crucial à jouer, en fournissant à tous les acteurs des informations fiables au sujet de la crise écologique, des leviers de transformation durable, ou encore des nouvelles normes économiques. Avec soixante de mes collègues députés, j’ai d’ailleurs déposé une proposition de loi visant à soutenir le traitement de l’écologie dans les médias.
    En dépit de cette réalité, la Caisse des dépôts (CDC), acteur public s’il en est, a décidé le démantèlement du premier média français dédié à la transformation durable des acteurs économiques : Novethic. Depuis plus de vingt ans, il analyse les évolutions de notre économie au regard de la transformation bas-carbone et de la prise en compte des enjeux écologiques. Ce média, qui est aussi un centre de formation et de labellisation, accompagne les acteurs économiques et financiers dans l’intégration des nouvelles exigences d’une économie plus durable. Novethic aide les entreprises à comprendre les nouvelles réglementations relatives à la durabilité, comme celles que l’Europe a instaurées s’agissant du reporting extra-financier ou du devoir de vigilance.
    À l’heure de la désinformation écologique, il convient de sauver Novethic. Ces dernières semaines encore, des dizaines de dirigeants économiques, scientifiques et associatifs ainsi que des milliers de citoyens ont demandé à la Caisse des dépôts de maintenir son soutien à Novethic, pour que la puissance publique préserve ce média de service public, qui aide chaque jour les professionnels de la transformation durable.
    En guise de réponse, M. Lombard, ministre de l’économie, qui vient à peine de quitter son poste de directeur général de la CDC, s’est contenté de déclarer que la transition écologique était déjà largement prise en charge par les acteurs privés. Y croit-il vraiment, alors que chaque jour notre économie prend du retard dans l’atteinte de ses objectifs écologiques et climatiques ?
    Il faut sauver Novethic et son caractère public, pour promouvoir une information de qualité au service de l’intérêt général, en l’occurrence d’une transition écologique concrète, grâce à des outils efficaces tels que ce média.

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire.

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire

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    Je vous prie de bien vouloir excuser l’absence du ministre de l’économie et des finances.
    Vous évoquez la situation de la filiale de la CDC appelée Novethic, qui diffuse une information de grande qualité au sujet des enjeux liés à la RSE, la responsabilité sociale des entreprises. C’est malheureusement aussi une société confrontée à des difficultés économiques importantes qui vont croissant depuis plusieurs années.
    C’est pourquoi, en 2024, la Caisse des dépôts a dû intervenir en urgence, à plusieurs reprises, pour lui éviter une cessation des paiements. Concomitamment, la CDC a étudié l’ensemble des scénarios possibles dans le but de préserver les intérêts de sa filiale. Force est de constater que la Caisse des dépôts n’est pas l’actionnaire le mieux placé pour lui permettre de jouir du développement que la qualité de ses équipes et de sa production mériterait.
    Pour cette raison, s’est formé le projet de confier à un grand groupe de presse professionnel, AEF info, une grande partie des activités de Novethic, notamment toutes ses activités journalistiques, d’expertise et de formation. Dans l’optique de pérenniser ces activités et de maintenir les développements prévus, un acteur de cette nature sera mieux à même de donner au travail des équipes de Novethic la visibilité qui lui convient.
    L’information-consultation des représentants du personnel de Novethic relativement à ce projet est en cours. Ce dernier me semble prometteur pour les équipes concernées, dont la grande majorité aurait vocation à rejoindre AEF info, et pour tous ceux qui sont attachés à Novethic.
    Je fais confiance à la CDC pour trouver des solutions satisfaisantes pour le petit nombre des salariés de Novethic qui ne seront pas concernés par ce projet et restent convaincus que l’ambition de la Caisse s’agissant de la transition écologique et énergétique est intacte. Elle se manifestera par son action d’investisseur et de prêteur. Sa feuille de route en la matière, annoncée en septembre 2023, est ambitieuse et repose notamment sur la mobilisation de 100 milliards d’euros sur cinq ans.

    M. le président

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    La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian.

    Mme Sophie Taillé-Polian

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    Vous évoquez la reprise de Novethic par AEF, mais jusqu’à un tiers des salariés ne trouverait pas leur place dans la nouvelle structure. On est donc face aussi à un problème de licenciements, à un problème social.
    Préserver un outil de la puissance publique dans le monde de l’information est une question majeure d’autant qu’on sait bien qu’aujourd’hui, la désinformation se diffuse de plus en plus grâce aux médias et aux réseaux sociaux. Il convient vraiment d’apporter des réponses, tout particulièrement en matière de transition écologique.
    Je ne suis malheureusement pas étonnée de constater que dans la version du projet de loi de finances issue de la commission mixte paritaire, le budget de l’écologie baisse encore de plusieurs milliards. Pour le gouvernement, c’est une variable d’ajustement alors que, dans le monde entier, les scientifiques nous appellent à la responsabilité et à l’action.

    Prix de l’électricité en Polynésie française

    M. le président

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    La parole est à M. Moerani Frébault, pour exposer sa question, no 111, relative au prix de l’électricité en Polynésie française.

    M. Moerani Frébault

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    Je viens porter devant vous la voix de la Polynésie française et de ses habitants ; un peuple qui, malgré son rôle dans l’histoire de la souveraineté énergétique et militaire de la France, et sa place au sein de la République, reste exclu de la solidarité nationale s’agissant des tarifs de l’énergie. En effet, alors même que la loi garantit une électricité et des prix équitables pour tous les Français, et malgré les revendications exprimées depuis plus de dix ans par tous les acteurs locaux – que ce soit l’Assemblée de Polynésie française ou le syndicat de promotion des communes de Polynésie – et le récent rapport du conseil économique, social et environnemental qui recommande d’étendre la péréquation tarifaire aux Polynésiens, rien n’a encore changé.
    Les familles polynésiennes subissent de plein fouet cette injustice, supportant des coûts d’électricité parmi les plus élevés au monde, ce qui aggrave les inégalités sociales existantes. Pourtant, l’ensemble des territoires d’outre-mer, à l’exception de la Polynésie française et de la Nouvelle-Calédonie, bénéficie fort heureusement de la solidarité nationale. Je rappelle toutefois que les collectivités d’outre-mer ont été les dernières concernées. Ainsi, le prix de l’énergie à Saint-Martin, à Saint-Barthélemy et, depuis janvier 2020, à Wallis-et-Futuna, s’est aligné sur celui de l’Hexagone grâce au système de péréquation.
    Ma question est donc la suivante : pourquoi la Polynésie française en est-elle encore privée ? L’histoire de notre territoire témoigne pourtant d’une contribution majeure à la souveraineté énergétique et militaire de la France en raison des essais nucléaires qui ont marqué à jamais nos terres et nos âmes. Les Polynésiens demandent seulement équité et justice. Quelles mesures le gouvernement compte-t-il prendre pour honorer son engagement de solidarité et pour permettre aux Polynésiens de bénéficier enfin des tarifs réglementés de l’électricité ?

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire.

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire

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    Je vous prie en premier lieu, monsieur le député, d’excuser l’absence du ministre Marc Ferracci, retenu par un déplacement international. Vous l’interrogez sur la péréquation des tarifs de l’électricité en Polynésie française, en tant que voix de cet archipel et de ses habitants.
    Seul le gouvernement de la Polynésie française est compétent pour décider des mesures qu’il entend adopter et appliquer en matière d’énergie, en vertu de la loi organique du 27 février 2004 portant statut d’autonomie de la Polynésie française. La mise en œuvre d’une péréquation tarifaire de l’électricité avec la Polynésie française ne peut donc passer que par une remise en cause de la compétence relative à l’énergie accordée à cette collectivité. C’est le choix, vous l’avez rappelé, qui a été fait par Wallis-et-Futuna en 2016 et qui a conduit à l’application de la péréquation en 2020.
    Le gouvernement est pleinement impliqué dans la transition énergétique du territoire polynésien. Lors de son déplacement en Polynésie, en juillet 2021, le président de la République s’est rendu à Manihi et a annoncé : « Cette stratégie indo-pacifique, c’est celle de la transition énergétique. Celle qui va permettre ici de faire du renouvelable, d’émettre moins grâce, je vous l’annonce, à un fonds d’investissement pour les énergies renouvelables de 60 millions d’euros que nous allons doter entre 2023 et 2026. » Les acteurs locaux s’en sont particulièrement bien saisis puisque 35 millions ont déjà été engagés après deux appels d’offres en 2023 et en 2024. Ainsi, la part d’énergie renouvelable dans le mix énergétique polynésien va considérablement augmenter.
    Vous l’aurez compris, monsieur le député, nous nous tiendrons aux côtés des élus de Polynésie pour offrir à nos concitoyens du Pacifique une énergie moins carbonée. C’est aussi par ce biais que nous obtiendrons une électricité à moindre coût.

    M. le président

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    La parole est à M. Moerani Frébault.

    M. Moerani Frébault

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    Je vous remercie, madame la ministre, mais ce n’était pas tout à fait la réponse attendue. J’ai bien noté les efforts et les investissements réalisés pour accompagner la transition énergétique, mais reste encore la question importante de l’extension de la péréquation, ce qui ne me semble pas contradictoire avec les investissements en matière d’énergie renouvelable. Comme vous l’avez dit, d’autres collectivités d’outre-mer ont réussi à trouver les aménagements réglementaires et statutaires nécessaires pour bénéficier de l’extension de la péréquation, et on espère que le gouvernement en offrira la possibilité à la Polynésie, quitte à ce que celle-ci abandonne sa compétence en matière d’énergie.

    Site d’ArcelorMittal de Dunkerque

    M. le président

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    La parole est à M. Julien Gokel, pour exposer sa question, no 130, relative au site d’ArcelorMittal de Dunkerque.

    M. Julien Gokel

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    Le Dunkerquois vit un moment charnière de son histoire, marqué par une transformation industrielle d’une ampleur inédite. Ce basculement repose sur deux dynamiques complémentaires : d’une part, l’implantation des industries du futur, en l’occurrence des gigafactories de batteries électriques et, d’autre part, la mutation de notre industrie historique incarnée par la décarbonation de l’activité sidérurgique. Cette mutation, cette transition, est capitale parce que le site d’ArcelorMittal est le premier émetteur de CO2 du Dunkerquois, territoire qui, je tiens à le rappeler, représente à lui seul 21 % des émissions industrielles de notre pays.
    En 2023, lorsque toutes les planètes semblaient alignées, l’annonce de la décarbonation du site de Dunkerque a suscité de nombreux espoirs, mais la nouvelle récente du report de ce projet nous inquiète à juste titre. J’ai eu l’occasion d’interroger dernièrement le président d’ArcelorMittal, qui met en avant la conjoncture économique mondiale pour expliquer ce report d’investissement dans la décarbonation, invoquant notamment la concurrence internationale qui bénéficie d’avantages compétitifs lui permettant d’inonder le marché à des prix extrêmement bas.
    L’acier est un bien essentiel et la sidérurgie est fondamentale pour notre souveraineté, vous le savez, madame la ministre. Je souhaite donc vous interroger sur les mesures que le gouvernement peut prendre pour garantir la compétitivité de l’industrie sidérurgique française et européenne face à la concurrence étrangère.
    Premièrement, s’agissant de la question fondamentale de l’énergie, le gouvernement est-il en mesure d’accélérer la signature de contrats d’allocation de production nucléaire (CAPN) avantageux entre les aciéristes et EDF afin de leur garantir un accès à une électricité à bas coût ? Je rappelle que l’État détient 100 % du capital d’EDF et doit jouer son rôle dans cette affaire.
    Ensuite, au niveau européen, quels leviers le gouvernement compte-t-il activer pour renforcer les mesures de sauvegarde protégeant notre industrie des importations extracommunautaires ? Envisage-t-il d’intervenir auprès de la Commission européenne pour accélérer la mise en place du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières ? Et pouvons-nous attendre quelque chose de probant du prochain plan d’urgence pour l’acier qui doit être présenté par la Commission à la fin du mois de février ?
    Enfin, quelle est la position du gouvernement sur la suspension, provisoire à ce stade, du projet de décarbonation d’ArcelorMittal à Dunkerque ? L’État, qui a déjà engagé 130 millions d’euros sans que le projet ne soit amorcé, a, je n’en doute pas, son mot à dire. Entend-il maintenir une pression ferme pour que le groupe ArcelorMittal honore ses engagements ?
    Nous sommes nombreux, dans le Dunkerquois et ailleurs, les salariés en premier lieu, à attendre des réponses concrètes concernant l’avenir du site d’ArcelorMittal.

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire.

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire

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    Tout comme vous, le gouvernement est mobilisé pour préserver l’empreinte industrielle d’ArcelorMittal, qui représente près de 15 000 emplois directs en France. Alors que la sidérurgie européenne est en crise, les ministres Lombard et Ferracci expriment des demandes fortes auprès de la Commission pour agir rapidement en faveur de notre souveraineté industrielle, dans le cadre notamment du Clean Industrial Deal – pacte pour une industrie propre –, en particulier par le biais du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières, dit MACF, qui sera pleinement opérationnel en 2026.
    Il doit être renforcé de trois manières : un, par l’utilisation de valeurs par défaut selon l’empreinte carbone de l’acier du pays importateur ; deux, par l’extension progressive du MACF aux produits utilisant des volumes significatifs d’acier pour éviter les fuites de carbone ; trois, par des mesures de compensation du coût de carbone pour les industriels qui exportent.
    Vous avez également posé des questions quant aux mesures de sauvegarde de l’Union européenne en matière d’acier. Il est vrai que les mesures actuelles ne suffisent pas. Et elles se termineront de toute façon en 2026. C’est pourquoi, à court terme, le gouvernement souhaite, d’une part, s’appuyer en renfort sur les mesures de sauvegarde mises en place en 2018 en baissant les quotas d’importation du fait de la baisse de la demande et, d’autre part, demander à la Commission d’accentuer ses enquêtes antidumping. Aussi, nous travaillons dès aujourd’hui avec nos partenaires européens sur l’après 2026.
    S’agissant des prix de l’électricité, je vous confirme que le gouvernement souhaite garantir à notre industrie un prix d’électricité compétitif grâce à notre parc nucléaire. C’est nécessaire à l’électrification et à la décarbonation. Les échanges en ce sens se poursuivent avec EDF et certains contrats ont déjà été signés.
    Vous avez posé également une question sur le projet de décarbonation du site de Dunkerque. L’État s’est engagé à le subventionner à hauteur de 850 millions d’euros pour une unité de réduction directe du fer fonctionnant au gaz naturel, puis à terme avec de l’hydrogène et deux fours électriques, en remplacement d’un haut-fourneau qui fonctionne actuellement au charbon.
    À ce jour, aucun montant n’a été décaissé car la situation de la sidérurgie européenne ne permet pas à l’entreprise de lancer les investissements. L’État ne verse pas d’aide sans commande du matériel par l’entreprise. Pour autant, ce projet est clé pour la souveraineté industrielle de la France et permettra de préserver l’avenir de ce site et des sites qui en dépendent. L’objectif du gouvernement reste donc le lancement de ces investissements, gage de pérennité de l’outil industriel et des emplois qui y sont associés.

    M. le président

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    La parole est à M. Julien Gokel.

    M. Julien Gokel

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    Vous reconnaissez qu’il n’y a pas encore d’aide de la part de l’État…

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée

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    Pas d’aide décaissée.

    M. Julien Gokel

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    Mais le président d’ArcelorMittal nous a indiqué avoir tout de même financé 90 millions d’euros d’études, ce qui n’est pas rien, grâce aux aides publiques. Nous étions donc en droit d’espérer qu’il n’y ait pas de suspension du processus.
    Comme beaucoup, je pense qu’il y a des raisons de croire que la production d’acier en Europe, en France et en particulier dans le Dunkerquois pourra retrouver des marges de compétitivité dans un avenir proche. Cependant, pour cela, il faudra accélérer au niveau européen, faire preuve de plus d’ambition et de moins d’hésitation lorsqu’il s’agit de protéger les intérêts fondamentaux de notre continent.
    L’acier est partout autour de nous, dans l’armature, dans la charpente de nos bâtiments, dans les châssis et la carrosserie de nos moyens de transport, dans nos infrastructures ferroviaires, dans la coque des navires et dans les porte-conteneurs qui transitent chaque jour dans le port de Dunkerque mais aussi dans nos autres ports. L’acier est de surcroît indispensable dans la construction de nos futures centrales nucléaires, de nos éoliennes, de nos machines industrielles et dans la production de milliers d’objets du quotidien. C’est un matériau qui doit être considéré comme un bien essentiel et dont la production doit être maintenue sur notre territoire !
    Dans le Dunkerquois, où l’industrie sidérurgique joue un rôle moteur avec 3 200 emplois directs et près de 10 000 emplois indirects, on dit souvent : « Si ArcelorMittal s’enrhume, c’est tout le territoire qui tousse. » Madame la ministre déléguée, nous comptons sur le gouvernement pour bien évidemment avancer sur ces sujets.

    Éducation sexuelle

    M. le président

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    La parole est à M. Roger Chudeau, pour exposer sa question, no 126, relative à l’éducation sexuelle.

    M. Roger Chudeau

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    Ma question porte sur la publication prochaine du programme relatif à l’éducation, à la vie affective relationnelle et sexuelle.
    Madame Genetet, brièvement ministre de l’éducation nationale, déclarait à Mme Borne, lors de la passation de pouvoir : « L’école est malade. » Chacun sait en effet dans quel état préoccupant se trouve notre système éducatif. Le niveau moyen de nos élèves est médiocre : 50 % des élèves entrant en sixième ne maîtrisent pas la lecture fluide ; 25 % des jeunes de 17 ans éprouvent des difficultés de lecture aux journées défense et citoyenneté ; le niveau de culture générale de nos lycéens s’effondre ; 50 % des bacheliers échouent en première année d’études supérieures ; les diplômes sont dévalorisés ; l’autorité des maîtres est quotidiennement contestée, y compris par des élèves et des parents sous emprise islamiste ; la fonction enseignante connaît une grave désaffection – les concours de recrutement du premier degré et du Capes, le certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement du second degré, ne permettent plus le recrutement, ni quantitatif ni qualitatif, indispensable au renouvellement du corps enseignant.
    Pourtant, dans un tel contexte, le ministère de l’éducation nationale estime que la priorité revient à la publication du programme d’éducation à la vie affective et sexuelle, applicable de la maternelle à la terminale. Quelles sont donc exactement ses priorités pour redresser notre système éducatif ?
    Il est certes utile et même nécessaire de dispenser aux élèves à partir du CM2 ou du collège une information préventive visant à les prémunir des risques, voire des dangers, que comporte la vie sexuelle – maladies sexuellement transmissibles, viols, mutilations, pornographie notamment. Mais je conteste qu’il soit de la responsabilité de l’État d’assurer l’éducation sexuelle des enfants. Celle-ci relève, selon nous, de la sphère privée, intime, de la fonction éducative de la famille.
    De plus, cette « éducation » serait dispensée, comme aujourd’hui, par des associations qui n’ont ni la compétence scientifique, ni le savoir-faire pédagogique, ni la légitimité institutionnelle requis pour assurer cette délicate mission de service public.
    Nous estimons qu’une information de cette nature ne peut être assurée que par des professionnels des ministères de l’éducation ou de la santé – médecins, infirmières, psychologues –, par des professeurs, ou par des conseillers principaux d’éducation (CPE) dûment formés et qualifiés à cette fin.
    Nous considérons également qu’une information de cette nature ne peut être diffusée auprès d’enfants trop jeunes pour la recevoir utilement.
    Nous vous demandons donc de rectifier dans ce sens le programme élaboré par le Conseil supérieur des programmes, et de modifier en ce sens l’article L. 312-16 du code de l’éducation.

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre chargée du travail et de l’emploi.

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi

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    Je tiens à excuser l’absence de Mme Élisabeth Borne, en déplacement avec le président de la République à l’occasion de la Journée mondiale contre le cancer. L’enseignement supérieur et la recherche sont en effet des acteurs mobilisés contre cette maladie.
    Vous posez une question essentielle, dont je vous remercie. L’éducation à la vie affective et sexuelle n’est ni un gadget ni un caprice. C’est une nécessité – avis que nous partageons avec les membres du Conseil supérieur de l’éducation qui ont adopté ce programme à l’unanimité, faut-il le rappeler, le 30 janvier dernier.
    Quand un enfant est victime de violences sexuelles toutes les trois minutes, quand un enfant sur trois est exposé à la pornographie à un très jeune âge, vous l’avez rappelé, soit avant 12 ans, l’école ne peut détourner le regard. On connaît également la prévalence, dans chaque classe, d’enfants victimes de violences sexuelles intrafamiliales.
    Aussi cet enseignement ne concurrencera-t-il pas les savoirs fondamentaux mais les renforcera : un élève en insécurité est un élève qui va mal et qui par conséquent apprend mal ou n’apprend pas. Soyons clairs : il ne s’agit absolument pas de remplacer les familles qui sont en première ligne sur ces questions mais de donner aux élèves les outils pour se protéger mais aussi pour respecter les autres ; il s’agit d’éduquer, d’expliquer avec des mots adaptés à chaque âge ce que sont le consentement, le respect, l’égalité entre les filles et les garçons ainsi que les limites à apporter quant à son propre corps vis-à-vis des adultes ; il s’agit enfin de lutter contre le harcèlement, les violences, les stéréotypes qui, nous le savons tous, se développent dès le plus jeune âge.
    Pour ce qui est des contenus, ils seront encadrés et progressifs, adaptés à l’âge et à la maturité des élèves. À l’école primaire, il ne sera ainsi absolument pas question de sexualité. On parlera de relations, d’émotions, de limites – on dira par exemple que ça n’est pas OK quand un adulte vous touche les cheveux alors que vous ne le souhaitez pas. Au collège et au lycée, en revanche, on abordera les sujets avec sérieux et responsabilité pour informer, prévenir et protéger. Les professeurs concernés y seront formés, des personnels médicaux et éducatifs pourront les accompagner et toutes les associations intervenantes seront agréées et encadrées.

    M. le président

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    Merci de bien vouloir conclure, madame la ministre.

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    Nous voulons des élèves sereins, protégés et épanouis. C’est le rôle de l’école.

    Accueil des élèves en situation de handicap

    M. le président

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    La parole est à M. Salvatore Castiglione, pour exposer sa question, no 122, relative à l’accueil des élèves en situation de handicap.

    M. Salvatore Castiglione

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    De Aubry-du-Hainaut à Wallers-Arenberg, les problèmes liés au manque d’accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH) sont les mêmes. Dans ma circonscription de Valenciennes, des enseignants, des parents d’élèves, des maires m’alertent régulièrement sur ce manque d’AESH et la trop longue attente pour obtenir une notification de la maison départementale des personnes handicapées (MDPH).
    Ce déficit se confirme dans l’ensemble du département du Nord avec pour conséquence de fragiliser l’inclusion scolaire des élèves. Pour le Nord et le Pas-de-Calais, le nombre d’enfants qui devraient être accompagnés est évalué à 13 000. À la veille du vingtième anniversaire de la loi de 2005, qui pose comme principe que « toute personne handicapée a droit à la solidarité de l’ensemble de la collectivité nationale », cette situation n’est pas acceptable.
    Confrontés à des conditions de travail précaires et à une formation insuffisante – la formation initiale de soixante heures n’étant bien souvent que partiellement dispensée et la formation continue non obligatoire –, les AESH eux-mêmes revendiquent la création d’un véritable statut qui permettrait de renforcer l’attractivité et la reconnaissance de leur métier, de lutter contre la pénurie de personnel, et d’améliorer les conditions de travail et de rémunération.
    Par ailleurs, l’application de la loi Vial relative au financement des AESH par l’État pendant la pause méridienne est très inégalement appliquée sur le terrain, contraignant les municipalités à engager des frais pour ne pas laisser les élèves sans solution. Pourtant, cette loi devait entrer pleinement en vigueur dès la rentrée scolaire de 2024.
    Qui plus est, aucune disposition n’est prévue concernant le temps scolaire pour lequel les communes se substituent à l’éducation nationale lorsque plus de 25 % des enseignants sont en grève. Les AESH, même non grévistes, ne peuvent pas accompagner les enfants.
    Je souhaite par conséquent savoir quelles solutions concrètes le gouvernement entend appliquer pour répondre à cette situation préoccupante et pour garantir à chaque élève l’accompagnement humain auquel il a droit.

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre chargée du travail et de l’emploi.

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi

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    Je tiens à nouveau à excuser l’absence de Mme Élisabeth Borne, en déplacement à l’occasion de la Journée mondiale contre le cancer.
    Garantir à chaque élève une scolarisation de qualité, c’est une exigence et c’est un engagement clair du gouvernement. Ainsi, depuis 2017, nous avons créé 34 000 postes d’AESH pour répondre à l’augmentation du nombre d’élèves en situation de handicap et pour relever le pari – toujours à l’ordre du jour – de l’école inclusive.
    Or cet effort va s’amplifier à la rentrée 2025 : 2 000 AESH supplémentaires renforceront les effectifs. Cela signifie concrètement que 90 000 AESH seront mobilisés dans les académies en 2025, soit une augmentation de 68 % depuis 2017.
    Cette montée en puissance – et c’est ici la ministre du travail qui s’exprime – va de pair avec la question essentielle de l’amélioration des conditions de travail et de la reconnaissance due à ce personnel de l’éducation nationale. Nous avons en effet revalorisé les grilles indiciaires pour mieux rémunérer ces professionnels essentiels. Une indemnité de 1 529 euros brut par an a été créée, et les AESH référents bénéficient désormais d’une majoration de 10 %. À cela s’ajoute le relèvement des grilles de 5 points d’indice depuis janvier 2024.
    Une mesure très importante est également entrée en vigueur : un CDI pourra être signé au bout de trois ans au lieu de six. C’est une avancée concrète pour plus de stabilité et de reconnaissance. En outre, dans les prochains jours, un décret sécurisera le financement des AESH intervenant pendant la pause méridienne. Enfin, nous déployons les pôles d’appui à la scolarité (PAS) pour répondre plus vite et mieux aux besoins des familles.
    Soyez donc assuré de notre détermination à faire de l’école inclusive une réalité et à continuer d’avancer sur le chemin que nous avons emprunté.

    M. le président

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    La parole est à M. Salvatore Castiglione.

    M. Salvatore Castiglione

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    Je vous remercie pour tous ces éléments de réponse. Il nous faut aller encore plus vite dans certains domaines comme la formation. Encore une fois, il convient d’apporter des solutions concrètes à ces enfants qui, sans accompagnement, sont en souffrance.

    Écoles rurales

    M. le président

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    La parole est à M. Jérémie Patrier-Leitus, pour exposer sa question, no 116, relative aux écoles rurales.

    M. Jérémie Patrier-Leitus

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    Je souhaite alerter le gouvernement sur l’avenir des écoles rurales. Elles sont l’âme des communes et souvent le dernier service public. Elles sont les piliers de la promesse républicaine, celle de donner les mêmes chances de réussite à tous ses élèves dans les mêmes conditions d’enseignement.
    Or le pays va subir une baisse inédite du nombre d’élèves – 500 000 en dix ans. Si nous ne faisons rien, si nous ne changeons pas les règles du jeu et notre méthode, nous allons assister à de brutales fermetures de classes voire d’écoles, qui vont fragiliser les communes. Pour éviter ces fermetures suscitant l’incompréhension, l’inquiétude et souvent la colère des élus locaux, des enseignants, des parents d’élèves et des élèves eux-mêmes, il est urgent, je l’ai dit, de changer de méthode : anticipation, visibilité et concertation doivent être les maîtres-mots de la gestion des écoles rurales.
    Il est essentiel et urgent que le gouvernement anticipe mieux et associe élus, parents d’élèves et enseignants aux décisions relatives à la carte scolaire et, plus généralement, à l’avenir des écoles rurales.
    Enfin, outre l’anticipation et la concertation, cette nouvelle méthode doit passer par un assouplissement des règles de fermeture dans les territoires ruraux. En effet, la fermeture d’une classe, aussi fondée soit-elle eu égard à la démographie scolaire, peut conduire à la création de classes à plusieurs niveaux, ce qui pourrait fragiliser l’apprentissage chez les élèves les plus fragiles.
    En mars 2023, la ministre de l’éducation, alors première ministre, avait fait des annonces importantes sur les écoles rurales et appelé à une nouvelle méthode. Deux ans après, pas grand-chose n’a bougé, il faut bien l’admettre. Quelles mesures le gouvernement prendra-t-il dans les prochains mois pour changer définitivement de méthode et garantir aux écoles rurales un avenir ambitieux ?

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre chargée du travail et de l’emploi.

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi

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    Je profite de l’occasion qui m’est offerte pour saluer les écoliers présents dans les tribunes du public en compagnie de leurs professeurs.
    Vous l’avez dit, monsieur le député, notre pays connaît une baisse démographique inédite qui touche aussi l’école. À la rentrée 2025, nous compterons 80 000 élèves de moins dans le premier degré, chiffre qui atteindra 300 000 élèves sur trois ans.
    Or, plutôt que de subir cette évolution, nous en faisons une opportunité en améliorant durablement les conditions d’apprentissage des élèves ainsi que les conditions d’enseignement pour les professionnels de l’éducation. Et les résultats sont là. Je tiens à rappeler les chiffres, même s’ils couvrent l’ensemble de la nation et ne répondent donc pas précisément à votre question sur l’école rurale. En 2017, une classe de primaire comptait 23,2 élèves, moyenne passée en 2024 à 21,3 élèves par classe et qui ne dépassera pas la barre des 21 élèves par classe en 2025.
    Dans les écoles rurales, cette dynamique est encore plus marquée puisqu’on compte moins de 20 élèves par classe en moyenne. C’est un tournant historique qui signifie plus d’attention pour chaque élève, plus de sérénité en classe et donc une meilleure réussite. Et cette avancée, nous l’avons choisie.
    Contrairement aux annonces, nous avons décidé de ne pas supprimer les 4 000 postes qui devaient initialement l’être. Nous avons préféré protéger les moyens de l’école partout sur le territoire.
    En ce qui concerne la carte scolaire, Mme Borne a une conviction : elle ne peut plus être définie depuis Paris sans tenir compte des réalités locales. C’est tout le sens de la création, alors qu’elle était première ministre, des observatoires des dynamiques rurales. Ils permettent d’anticiper, en concertation avec les acteurs, donc de ne pas être mis devant le fait accompli quelques semaines seulement avant une fermeture.
    Dans la ruralité, j’ajoute que nous avons aussi renforcé nombre de dispositifs qui font leurs preuves comme les internats d’excellence-ruralité, avec 30 000 places déployées – c’est insuffisant mais nous progressons –, et le réseau des territoires éducatifs ruraux.
    Soyez assuré, monsieur le député, que la ruralité ne sera jamais le parent pauvre de l’éducation nationale.

    M. le président

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    La parole est à M. Jérémie Patrier-Leitus.

    M. Jérémie Patrier-Leitus

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    Merci pour votre réponse et pour les engagements pris au nom du gouvernement. Je me réjouis que la baisse démographique permette de diminuer le nombre d’élèves par classe. Il faut vraiment que nous parvenions à élaborer cette carte scolaire à trois ans. Si tout le monde peut comprendre, même dans les territoires ruraux, que le recul du nombre d’élèves se traduise par des fermetures de classes, d’écoles, il faut les anticiper car c’est toujours un drame.
    À la tête du gouvernement, en avril 2023, Mme Borne avait pris l’engagement de proposer une carte scolaire révisable tous les trois ans afin que l’on sache dans ce délai qu’une classe ou qu’une école devra fermer ; j’espère que cette promesse sera tenue.

    Emploi des seniors

    M. le président

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    La parole est à M. Bruno Clavet, pour exposer sa question, no 125, relative à l’emploi des seniors.

    M. Bruno Clavet

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    En France, près de 60 % des chômeurs longue durée sont des seniors. Dans le Pas-de-Calais, 15 % des demandeurs d’emploi ont plus de 50 ans et rencontrent jusqu’à deux fois plus de difficultés que les jeunes pour retrouver un travail.
    S’il suffit, selon Emmanuel Macron, de traverser la rue pour trouver du travail, force est de constater qu’une grande partie de nos concitoyens est restée sur le côté depuis qu’il est à l’Élysée. Près de 500 000 Français de plus de 50 ans sont au chômage et donc privés de perspectives, alors qu’ils ont encore tant à apporter à notre pays.
    Dans le même temps, on entend ici et là des préjugés injustifiés à leur sujet : ils coûteraient trop cher, ils ne sauraient pas s’adapter, ils seraient davantage une charge qu’un atout pour l’entreprise.
    Ce sont des idées reçues absurdes qui ne tiennent pas face à la réalité sociale et économique, car les seniors apportent au monde de l’entreprise une expertise précieuse, une stabilité professionnelle et un savoir-faire essentiel dans de nombreux secteurs. Leur présence dans une entreprise n’est pas un coût, mais un investissement rentable, puisqu’ils assurent la transmission des compétences en jouant un rôle de mentor.
    Les écarter revient à priver nos entreprises d’un atout précieux et nos jeunes de repères.
    Dans ce contexte, France Travail devrait être un rempart contre l’exclusion de nos seniors en leur offrant les moyens de valoriser leur expérience, de se reconvertir et de retrouver un emploi digne. Or, comme si l’échec était devenu une doctrine d’État, cette institution peine à remplir sa mission. Les dispositifs actuels sont insuffisants, mal calibrés et déconnectés des réalités du terrain.
    Seuls 8 % des demandeurs d’emploi seniors bénéficient d’une formation financée, contre 20 % pour les moins de 40 ans ; à peine 4 % des entreprises se disent prêtes à embaucher un salarié de plus de 55 ans, faute d’incitations financières suffisantes.
    Le système actuel ne favorise pas la réinsertion des seniors ; il les pousse vers la sortie. Il est donc urgent de casser les idées reçues, de généraliser les dispositifs de reconversion et de prévoir des mesures incitatives pour les employeurs.
    Le Rassemblement national y est favorable. Il a déjà proposé en ce sens la création d’un CDI senior destiné aux plus de 60 ans et qui s’accompagne de l’exonération du versement des cotisations familiales pour les employeurs. Il propose aussi d’assouplir les règles encadrant le cumul emploi-retraite, ce qui permettrait aux seniors de continuer à travailler et de percevoir leur pension, favorisant ainsi une transition plus souple vers la retraite.
    Madame la ministre chargée du travail et de l’emploi, sur ce sujet, comme sur tous les autres, il faut une volonté politique forte. Existe-t-elle seulement au sein du gouvernement Bayrou ou bien considérez-vous l’exclusion des seniors comme une fatalité ? Comptez-vous faire de la réinsertion des seniors une priorité ou restera-t-elle un angle mort de la politique macroniste de l’emploi ? Donnerez-vous aux seniors la place dans la société qu’ils méritent et qu’ils ont gagnée tout au long de leur vie ?

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre chargée du travail et de l’emploi.

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi

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    Les chiffres que vous avez rappelés sont éloquents, en particulier le taux d’activité des seniors si on le compare au mieux-disant européen. Il s’agit d’un immense gâchis humain et économique, car ces chiffres cachent des vies et la nation, en excluant les seniors, se prive et nous prive d’expériences, de savoir-faire ainsi que de forces productives et contributives.
    Cette situation a des causes multiples, parmi lesquelles l’ancienneté de la préretraite. Ce dispositif, qui remonte à l’époque de Raymond Barre, nous a habitués, ce dernier demi-siècle, à considérer que l’on n’a plus tout à fait sa place en entreprise à 55 ans passés. Cette culture est bien ancrée et a la vie dure.
    Des avancées significatives ont toutefois été réalisées en la matière. D’abord, grâce au recul de l’âge de départ à la retraite, lequel a un impact sur le maintien dans l’emploi des seniors. L’enjeu n’est pas seulement le chômage des seniors, comme vous l’avez souligné, mais aussi leur maintien dans l’emploi.
    L’accord national interprofessionnel sur l’emploi des seniors, signé en novembre par quatre syndicats et l’ensemble des organisations patronales, constitue une deuxième réussite. Il prévoit un entretien renforcé et englobant de mi-carrière, qui aborde les questions relatives aux compétences et à la santé, laquelle me semble trop peu considérée quand il s’agit d’un certain nombre de métiers à forte usure professionnelle.
    Cet accord impose une négociation obligatoire concernant l’emploi des seniors, pour qu’il soit discuté au niveau des branches et des entreprises. Il prévoit de faciliter l’accès à la retraite progressive, car la deuxième partie de carrière n’est pas uniforme jusqu’à la fin et ne se distribue pas en deux catégories distinctes : avec ou sans activité. Il faut envisager un spectre de possibilités, en particulier en matière d’aidance familiale ou de bénévolat. Il prévoit aussi un contrat de valorisation de l’expérience qui offre plus de facilités à l’employeur et qui se rapproche du CDI senior que vous proposez. Enfin, il contient des améliorations très concrètes pour le cumul emploi-retraite, qui restent néanmoins perfectibles.
    L’emploi des seniors est, avec l’insertion professionnelle des jeunes, la mère des batailles.
    Par rapport aux pays d’Europe du Nord, nous avons une conception très particulière de l’emploi des seniors. Pour changer ce regard et valoriser leur travail, leur expertise, leur fiabilité et leurs apports au monde de l’entreprise, nous voulons lancer, au printemps et en collaboration avec les partenaires sociaux et l’ensemble des organisations professionnelles, une campagne de communication.
    Nous inscrirons dans la loi certaines dispositions de l’accord national interprofessionnel, dès le premier semestre de 2025. Enfin, nous initierons, d’ici à un mois, une concertation avec les partenaires sociaux sur le sujet compliqué du dispositif de reconversion pour les seniors, en particulier dans le cadre de plans de restructuration industrielle.

    Financement des centres sociaux

    M. le président

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    La parole est à M. Alain David, pour exposer sa question, no 131, relative au financement des centres sociaux.

    M. Alain David

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    J’appelle l’attention de la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles sur la situation financière préoccupante des centres sociaux.
    Je prendrai un exemple tiré de ma circonscription, qui illustre parfaitement les difficultés auxquelles ces structures sont confrontées : le centre social La Colline à Cenon.
    Contraint à un licenciement économique en 2024, il demeure sous procédure d’alerte. Faute de trésorerie suffisante, ce sont des avances de fonds de la Fédération des centres sociaux qui lui ont permis, à quatre reprises en 2024, de verser les salaires et de payer les charges.
    Il y a un an, ces structures alertaient déjà sur l’impasse budgétaire dans laquelle elles se trouvaient face à la hausse des charges et aux besoins croissants des habitants en matière de lien social et d’accompagnement. Malheureusement, douze mois plus tard, la situation s’est encore détériorée.
    Certes, l’État s’est engagé à y répondre, notamment avec la création d’un fonds d’aide exceptionnelle de 11,7 millions d’euros, mais des critères trop restrictifs font qu’une grande partie des centres sociaux n’a pas pu en bénéficier ou n’a reçu que des enveloppes dérisoires. Ce panorama sombre est aggravé par le gel de dispositifs de l’État, comme les postes d’adultes-relais, ou par les restrictions drastiques sur les emplois aidés.
    Dans un contexte où les incertitudes pèsent également sur les capacités financières des collectivités locales, leurs premiers financeurs, l’État entend-il prendre des mesures pour répondre aux besoins structurels de financement des centres sociaux ? Prévoit-il pour 2025 de nouvelles mesures exceptionnelles afin de les soutenir ?

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre chargée du travail et de l’emploi.

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi

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    En raison du rôle essentiel que jouent ces structures dans l’animation de la vie sociale, comme vous l’avez rappelé, elles ont fait l’objet d’un ensemble de mesures au sein de la nouvelle convention d’objectifs et de gestion (COG) pour 2023-2027 de la branche famille de la sécurité sociale, signée le 10 juillet 2023.
    La COG prévoit de soutenir financièrement la création de 611 nouvelles structures : 150 centres sociaux et 461 espaces d’animation de la vie sociale. Ils seront implantés dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, dans les zones de revitalisation rurale et dans les territoires aujourd’hui non couverts. Le but est de renforcer le maillage des structures d’animation de la vie sociale en ciblant les secteurs faiblement dotés.
    Ainsi, le comité interministériel des outre-mer a décidé d’inscrire la création de cinquante centres sociaux supplémentaires pour les territoires ultramarins parmi les soixante-douze mesures qu’il préconise.
    La COG prévoit 81 millions d’euros supplémentaires dédiés au fonctionnement des centres sociaux. Par ailleurs, l’ensemble des financements attribués par la branche famille croîtront d’ici à 2027.
    En sus du soutien financier, un effort est exigé de tous les acteurs, qu’il s’agisse des services de l’État, des caisses d’allocations familiales (CAF), des communes ou des conseils départementaux, qui ont aussi pour rôle de soutenir ces organisations proches du terrain. Voilà l’effort de l’État, pour lequel chaque structure, chaque collectivité est appelée à prendre sa part.

    Protection de l’enfance en Haute-Garonne

    M. le président

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    La parole est à Mme Anne Stambach-Terrenoir, pour exposer sa question, no 120, relative à la protection de l’enfance en Haute-Garonne.

    Mme Anne Stambach-Terrenoir

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    Je souhaite alerter la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles sur la situation dramatique du centre départemental de l’enfance et de la famille (CDEF) de Haute-Garonne.
    Cet établissement fait office de service d’urgence de l’aide sociale à l’enfance (ASE) : il prend en charge l’accueil inconditionnel de tout mineur ayant besoin d’une mise à l’abri immédiate, qu’il lui soit confié sur décision de parents, du juge des enfants ou du parquet des mineurs. Qui dit service d’urgence dit, en théorie, séjour bref : les jeunes ne doivent y rester que quelques mois, dans l’attente d’un placement en structure ou en famille d’accueil.
    Cependant ces places n’existent pas, ou en trop petit nombre. En réalité, des dizaines de ces jeunes séjournent donc dans ce centre depuis plus d’un an, parfois plusieurs années, et certains y font plusieurs passages.
    Malgré l’augmentation importante du budget accordé par le conseil départemental ces dernières années, le service souffre terriblement de cette suractivité : sa pouponnière accueille parfois plus de quarante bébés pour seulement trente-six places, des jeunes y dorment sur des matelas posés au sol, on y observe une recrudescence d’actes de violence, parfois graves, entre enfants accueillis et envers les agents. Ces situations intenables provoquent un turnover qui ne permet plus d’assurer un véritable accompagnement. Des agents sont en pleurs toute la journée ; certains enfants sortent traumatisés de leur passage au CDEF.
    Voilà la réalité du quotidien d’enfants et de jeunes qui sont pourtant là parce qu’ils ont un besoin urgent d’être protégés. Voilà la réalité du quotidien des travailleurs sociaux qui s’épuisent à tenir ce service à bout de bras.
    Cette situation n’est pas propre à la Haute-Garonne ; elle n’est pas non plus l’affaire exclusive des conseils départementaux. Elle nécessite une intervention immédiate de l’État, d’autant plus que le budget que vous venez d’adopter par 49.3 retranche plus de 2 milliards des budgets des collectivités.
    La saturation et le manque de moyens des services de pédopsychiatrie ainsi que le cloisonnement institutionnel entre les secteurs sanitaire, social et médico-social expliquent pourquoi beaucoup de jeunes du CDEF, qui ont souvent vécu l’indicible, n’ont pas accès à la prise en charge sanitaire ou médico-sociale dont ils auraient besoin. Leur santé physique et mentale se dégrade et les travailleurs sociaux se retrouvent face à des situations auxquelles ils ne peuvent répondre, mettant en danger les jeunes comme les agents.
    En février 2024, après une succession de drames en psychiatrie au centre hospitalier universitaire (CHU) de Toulouse, le ministre Frédéric Valletoux avait annoncé la création d’un comité de suivi réunissant tous les acteurs pour penser enfin des mesures d’urgence et une réorganisation de la psychiatrie dans le département. Cela faisait des années que les soignants alertaient sur l’effondrement de la psychiatrie publique, sans être entendus.
    Cela fait aussi des années que les agents du CDEF et de l’ASE alertent sur l’effondrement de leurs services.
    Les professionnels demandent que tous les acteurs – département, agence régionale de santé (ARS), services de pédopsychiatrie et préfecture –, soient sans tarder mis autour de la table pour dégager des mesures d’urgence dotées de moyens et des axes de travail concrets.
    Il faut des places pérennes pour accueillir les enfants et les jeunes, pour les accompagner dignement ; il faut des unités supplémentaires au CDEF et les moyens matériels et humains qui vont avec ; il faut des équipes mobiles de pédopsychiatrie et de professionnels du médico-social ; il faut des mesures d’urgence, pour la sécurité et le respect de la dignité des jeunes qui sont placés, comme des agents qui travaillent à leurs côtés. Ces derniers doivent être écoutés maintenant.
    Nous sommes tous responsables des enfants de l’ASE. Lorsqu’ils arrivent au CDEF, c’est qu’ils ont besoin d’une protection immédiate ; or nous les mettons aujourd’hui en danger. N’attendez plus les drames pour agir.

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre chargée du travail et de l’emploi.

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi

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    La situation que vous décrivez appelle toute notre attention. Mme Catherine Vautrin, la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles, s’assurera auprès du préfet et du président du conseil départemental que le nécessaire sera fait avec diligence. Elle demandera, au besoin, une instruction conjointe des directions départementales de l’emploi, du travail et des solidarités (DDETS) et des ARS.
    La ministre a déjà exprimé sa préoccupation et son ambition de refonder la protection de l’enfance. Elle connaît très bien les difficultés que vous venez de souligner.
    La santé et le bien-être des enfants protégés, notamment ceux ayant des besoins spécifiques en matière de prise en charge de leur handicap ou de leur santé mentale, importent tout particulièrement. Une enveloppe de 50 millions d’euros, prévue par l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam) et dédiée au développement de réponses pour ces enfants, sera valorisée dans le cadre de la contractualisation en prévention et protection de l’enfance.
    Cette enveloppe doit faciliter le déploiement d’équipes mobilisables par les professionnels de l’ASE en guise d’appui à l’évaluation des besoins des enfants protégés en situation de handicap ou à l’accompagnement de ces enfants dans le cadre d’interventions de professionnels formés. Il s’agit aussi de développer des places dédiées à ces enfants dans les instituts médico-éducatifs (IME), dont on connaît la situation très contrainte. Nous sommes également très attachés à développer l’accueil familial et thérapeutique (AFT), pour faciliter la prise en charge d’enfants à profil complexe ou souffrant de troubles psychiatriques – Mme Vautrin s’y emploie.
    Face à des situations telles que celles des secteurs social, médico-social et sanitaire, la contractualisation tripartite entre l’État, les conseils départementaux et les ARS vise à apporter des réponses pluridisciplinaires, qui englobent les champs du handicap et de la santé mentale.
    Plus largement, nous portons une attention particulière à la santé de tous les enfants protégés, et les expérimentations en cours – dans le cadre des dispositifs Santé protégée et Pégase (protocole de santé standardisé appliqué aux enfants ayant bénéficié avant l’âge de 5 ans d’une mesure de protection de l’enfance) – se révèlent prometteuses : Mme Vautrin travaillera à leur généralisation. Vous connaissez également notre attachement aux unités d’accueil pédiatrique des enfants en danger (Uaped). Comme vous l’avez dit, l’enfance en danger est l’affaire de tous.

    Garde d’enfants

    M. le président

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    La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour exposer sa question, no 132, relative à la garde d’enfants.

    Mme Marietta Karamanli

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    Ma question s’adresse à la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles, et porte sur la situation des familles en recherche de solution de garde d’enfants.
    À la fin de l’année 2022, on estimait que 20 % des parents d’enfants de moins de 3 ans n’avaient pas trouvé de solution de garde – prise en charge par une assistante maternelle agréée par la protection maternelle et infantile (PMI) et salariée des parents, accueil en crèche ou en microcrèche, généralement exploitée par une entreprise du secteur marchand, préscolarisation en école maternelle ou garde par un salarié à domicile. Ce chiffre recouvre évidemment des situations très différentes et les parents adoptent bien souvent une solution faute de choix ou de moyens. Cela est vrai en milieu urbain, mais aussi en milieu rural où le manque de structures contraint les femmes – c’est encore la norme – à ne pas travailler.
    La Cour des comptes, dans un rapport récent, relève des inégalités sociales et territoriales : les crèches les moins coûteuses pour les familles sont moins nombreuses dans les communes dont le potentiel financier par habitant est plus faible. Je note également que l’absence de solution affecte le taux d’emploi des femmes et qu’elle est l’une des variables, peu visible mais bien réelle, du ratio entre cotisants et retraités.
    Depuis le début de l’année 2025, les communes sont les autorités organisatrices de l’accueil du jeune enfant. À ce titre, elles doivent structurer un service public de la petite enfance, destiné à favoriser, entre autres, la correspondance entre l’offre de garde et les besoins des familles. Du fait de la création de cette compétence nouvelle, l’État a annoncé une revalorisation des aides à l’investissement et au fonctionnement, mais l’enveloppe à partager pourrait être réduite et les intercommunalités ne comportant aucune commune de plus de 3 500 habitants pourraient ne pas en bénéficier.
    Au moment où la natalité accuse une baisse sensible dans notre pays, je souhaite connaître les engagements que le gouvernement entend prendre pour répondre aux besoins des familles, notamment jeunes. Une grande politique de l’enfance, transversale et conçue à partir de bilans territoriaux établis dans chaque département ne devrait-elle pas être appliquée ? L’État devrait également investir pour renforcer l’attrait des métiers : les assistantes maternelles offrent actuellement 50 % des places d’accueil et 50 % d’entre elles partiront en retraite d’ici cinq ans. Enfin, la mutualisation des moyens, qui doivent être programmés et effectifs, devrait être décidée.
    Je tenais à relayer les préoccupations de nos concitoyens : espérons que votre réponse sera aussi précise que possible !

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre chargée du travail et de l’emploi.

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi

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    Vous avez rappelé le contexte de baisse de la natalité et les disparités de l’offre d’accueil existante. En tant que ministre chargée du travail et de l’emploi, je rappellerai que la garde d’enfants est l’un des premiers freins à l’emploi et plus particulièrement à l’emploi des femmes, qui sont chaque année 150 000 à se retirer contre leur gré du marché du travail, faute d’avoir pu trouver une solution de garde.
    Malgré la situation budgétaire que vous connaissez, nous déployons avec volontarisme les premières mesures pour faire face à la situation. En septembre 2025, une réforme du complément de libre choix du mode de garde (CMG) entrera en vigueur : elle permettra d’égaliser les restes à charge que supportent les familles modestes ayant inscrit leurs enfants en crèche et celles ayant opté pour l’accueil individuel. Cela améliorera la solvabilité de ces foyers et contribuera au développement de ce dernier mode d’accueil – solution de garde qui peut s’exercer sans structure propre.
    Dans la convention d’objectifs et de gestion (COG) de la branche famille, les moyens consacrés aux places en crèche sont maintenus, qu’il s’agisse de crédits de fonctionnement ou d’investissement et quel que soit le territoire considéré, communes de moins de 3 500 habitants comprises. En cas de vote du projet de loi de finances (PLF) pour 2025, un soutien financier complémentaire de 86 millions d’euros sera réparti entre les communes, dès cette année.
    L’attrait des métiers est un enjeu essentiel, dans un contexte marqué par les départs en retraite progressifs des professionnels : Mme Vautrin l’a bien en tête et veille au déploiement d’une campagne de communication, aussi vaste que possible, destinée à valoriser les métiers de l’accueil du jeune enfant.
    Nous partageons avec vous le souhait d’aller plus loin, pour rassurer les communes et assurer le déploiement effectif de nouvelles places d’accueil. C’est un chantier sur lequel nous sommes pleinement engagés, tant pour le bien-être des enfants que pour soutenir l’emploi des femmes. Dans le cadre du plan démographique 2050 sur lequel elle travaille assidûment, Catherine Vautrin pourra formuler de nouvelles propositions de réponse aux différents enjeux que nous venons d’évoquer.

    Prise en charge des enfants en situation de handicap

    M. le président

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    La parole est à Mme Hanane Mansouri, pour exposer sa question, no 135, relative à la prise en charge des enfants en situation de handicap.

    Mme Hanane Mansouri

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    Depuis le début de mon mandat, plusieurs familles de ma circonscription, en grande détresse, m’ont alertée sur l’impossibilité d’accéder à des structures de soins adaptées pour leurs enfants en situation de handicap. Pour illustrer leur situation dramatique, j’évoquerai le cas de Nicolas, un garçon de 16 ans dont la mère m’a contactée après avoir épuisé toutes les voies de recours possible. Nicolas souffre de troubles autistiques sévères et reste actuellement à son domicile, pris en charge par sa mère, qui a dû abandonner son activité professionnelle pour se consacrer pleinement à lui. Cette situation a plongé la famille dans la précarité financière et gravement affecté le bien-être de Nicolas, qui en aurait pourtant cruellement besoin. Malgré les traitements, Nicolas peut parfois devenir agressif et mettre son entourage ou lui-même en danger. L’accès insuffisant aux soins engendre une souffrance considérable, tant pour l’enfant que pour ses parents, qui se sentent abandonnés par un système à bout de souffle.
    Cette situation concerne de nombreux parents français qui sacrifient tout, y compris leur travail ou leur sécurité physique, pour pallier les défaillances d’un système de soins déjà trop sollicité. Les listes d’attente pour les instituts médico-éducatifs (IME) et les services d’éducation spéciale et de soins à domicile (Sessad) ne cessent de s’allonger, au point que plusieurs années peuvent s’écouler avant l’accès à une place dans ces institutions. De plus, les demandes déposées alors que les enfants sont encore mineurs ne trouvent une réponse qu’à leur majorité, ce qui rend les recours des familles caducs.
    Selon les parents d’enfants handicapés, qui connaissent cette réalité mieux qui quiconque, ces structures manquent cruellement de moyens humains, matériels et financiers. Cette situation conduit les établissements à concentrer leurs efforts sur les enfants porteurs de handicaps lourds, souvent au détriment de ceux présentant des troubles considérés comme plus légers. Elle accroît la vulnérabilité des enfants, qui peuvent être exposés à la délinquance ou développer des comportements autodestructeurs.
    Madame la ministre, comment comptez-vous inverser la tendance et enrayer le déclin de ces structures ? Quelles mesures comptez-vous mettre en place pour garantir à ces enfants l’accès à des soins adaptés ?

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre chargée du travail et de l’emploi.

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi

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    Ma collègue Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée de l’autonomie et du handicap, est pleinement engagée pour résoudre le problème, important s’il en est, des listes d’attente en IME. Vous évoquez Nicolas et sa maman ; même si derrière les chiffres, il y a des vies, je ne pourrai pas vous présenter les réponses que nous apporterons à leur cas particulier, seulement celles que nous apporterons à un problème national.

    Mme Hanane Mansouri

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    C’est entendu.

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre

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    En tous les cas, je vous remercie de rappeler la détresse dans laquelle sont plongés ces parents et ces enfants. Le nombre de places dans les établissements ou services médico-sociaux a augmenté de 30 % depuis 2006 – ce n’est pas assez, mais cette hausse témoigne de l’effort national fourni dans ce domaine. À la fin de l’année 2022, 531 000 places étaient ainsi disponibles, dont 75 700 étaient ouvertes dans 1 380 IME.
    Pour intensifier cet effort, la dernière Conférence nationale du handicap a acté la création de 50 000 nouvelles solutions au bénéfice des personnes en situation de handicap à l’horizon de 2030, soutenue par un financement de 1,5 milliard d’euros malgré le contexte budgétaire délicat. Chaque agence régionale de santé (ARS) a ainsi conçu des programmes pluriannuels, applicables de 2024 à 2030, et de nouvelles places pourront être créées en IME ou en Sessad pour réduire l’attente des enfants en situation de handicap, âgés de 0 à 20 ans.
    Le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2025 prévoit 260 000 euros pour la création de 15 000 places supplémentaires : elles ne pourront être ouvertes que si le PLFSS est adopté.
    Un acte II de l’école inclusive est prévu – j’ai d’ailleurs été interrogée par un autre parlementaire à ce sujet ; dans ce cadre, nous travaillons sur la question des IME et de leurs liens avec les écoles.
    Vous l’aurez compris, le chemin est encore long, mais le gouvernement est pleinement mobilisé pour réduire les délais d’attente en créant de nouvelles places, adaptées aux besoins de chacun, en particulier des enfants en situation de handicap ou porteurs de handicaps lourds.

    Stage de quatrième année en médecine générale

    M. le président

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    La parole est à M. Stéphane Travert, pour exposer sa question, no 108, relative au stage de quatrième année en médecine générale.

    M. Stéphane Travert

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    Je souhaite appeler l’attention de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles sur la réalisation du stage de quatrième année d’études de médecine générale – le sujet a été abordé la semaine passée lors de la séance de questions au gouvernement.
    Depuis quelques années, plusieurs mesures ont été prises pour améliorer l’offre de soins – un problème national, particulièrement aigu dans les zones rurales –, dont la création du statut de docteur junior.
    La quatrième année d’internat en médecine générale a été officialisée le 2 décembre 2022 par l’Assemblée nationale, avec le vote de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS), puis en août 2023, avec un arrêté. Depuis la rentrée scolaire 2023, cette mesure s’applique aux nouveaux internes en médecine générale. Dans leur dernier cycle d’études, désormais long de quatre ans, ce stage d’un an constitue une dernière étape, qui sera effectuée à partir de novembre 2026. La dernière année d’études de ces futurs médecins sera donc consacrée à un stage pratique ambulatoire, effectué préférentiellement en médecine générale, sous la supervision de praticiens agréés, maîtres de stage des universités. Les internes bénéficieront ainsi d’une année de consolidation pour développer leur autonomie avec le statut de docteur junior et profiter ensuite d’une insertion professionnelle renforcée.
    Alors qu’un peu moins de deux ans nous séparent de la concrétisation de cette nouveauté dans le cursus des futurs médecins, les choses commencent à se mettre en place sur le terrain. Ainsi, il y a quelques semaines, une première réunion des acteurs du monde médical et des élus locaux a eu lieu dans le département de la Manche, où je suis élu. Rien que dans ce département, ce seront trente-cinq docteurs juniors qui seront accueillis, un chiffre qui témoigne à lui seul de l’importance de cette mesure dans l’amélioration de l’offre de soins.
    Deux défis restent encore à relever : trouver des maîtres de stage et faciliter l’hébergement de ces étudiants, qui résident bien souvent à Caen, c’est-à-dire dans le département voisin, à une centaine de kilomètres de distance. Les collectivités locales sont prêtes à s’investir. Comment l’État compte-t-il les accompagner pour concrétiser leur volonté de proposer un logement attractif à des étudiants en dernière année, susceptibles de s’installer dans les territoires où ils ont été bien accueillis et où ils sont très attendus ?
    Par ailleurs, il semble que l’arrêté du 9 août 2023 n’ait pas répondu à toutes les interrogations et qu’un flou subsiste sur plusieurs points, particulièrement sur les conditions de rémunération et d’encadrement du stage en secteur ambulatoire.
    Enfin, je vous demande de bien vouloir nous indiquer quand ces précisions seront apportées, pour que les étudiants en médecine générale bénéficient d’une meilleure visibilité sur la poursuite de leur cursus.

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre chargée du travail et de l’emploi.

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi

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    Je vous prie d’excuser l’absence de M. Yannick Neuder, en raison de la Journée mondiale contre le cancer.
    Je confirme que l’introduction d’une quatrième année d’internat de médecine générale permettra de déployer 3 400 docteurs juniors sur tout le territoire dès novembre 2026. Un comité de suivi vient d’être confié au docteur Guillaume Bailly, qui dispose d’une lettre de mission cosignée par le ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins et le ministre chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche. Les priorités de ce comité rejoignent vos préoccupations : veiller à la qualité de l’encadrement des docteurs juniors de médecine générale, ce qui implique de cartographier l’ensemble des terrains de stage. Les conditions précises d’exercice seront définies avec les élus locaux, en mairie, dans les agglomérations, les intercommunalités, les départements, les régions, afin de tenir compte des besoins en matière de transport, d’hébergement, de garde d’enfants – car la profession se féminise – et d’accès aux équipements sportifs et culturels. Les réponses seront apportées localement, territoire par territoire.
    Le modèle de rémunération sur-mesure des docteurs juniors est en cours d’élaboration. Il inclura des éléments destinés à encourager l’exercice de la médecine dans les zones sous-denses, afin d’assurer la permanence des soins. Les médecins généralistes qui s’engagent à transmettre doivent aussi être aidés au moyen d’incitations financières : nous en discuterons au sein du comité de suivi.
    Je vous remercie pour votre engagement et votre vigilance à l’égard de ce sujet crucial. La nouveauté que constitue la quatrième année d’internat est un véritable pari pour l’avenir. Nous serons au rendez-vous.

    Agences régionales de santé

    M. le président

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    La parole est à M. David Amiel, pour exposer sa question, no 110, relative aux agences régionales de santé.

    M. David Amiel

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    Je suis venu vous parler de bureaucratie, sans grandes phrases mais avec un exemple concret. Si l’on s’indigne souvent, à juste titre, de l’insuffisance de l’offre de soins dans de nombreuses régions, de l’engorgement des hôpitaux ou des délais d’attente trop longs pour réaliser des examens médicaux, ce sont les règles que nous déterminons qui sont, sur le terrain, à l’origine de cette situation.
    Ainsi, les médecins qui veulent installer du matériel médical lourd – imagerie par résonance magnétique (IRM), scanner – doivent demander une autorisation préalable à l’agence régionale de santé (ARS). Pour toucher des fonds ? Non, puisqu’ils achètent eux-mêmes le matériel. Pour des raisons de sécurité – ce qui serait parfaitement légitime ? Non plus. En réalité, l’ARS estime qu’elle peut juger de la pertinence de cette installation en s’appuyant sur un raisonnement simple : la crainte que le développement d’une offre supplémentaire crée une demande excessive, autrement dit que les gens aillent faire des scanners par plaisir, alléchés par la vitrine du cabinet de radiologie, aux frais de la sécurité sociale. Ce même raisonnement malthusien – la crainte qu’une abondance de médecins entraîne des dépenses excessives – avait présidé à l’instauration du numerus clausus. On a par la suite mesuré les effets pervers d’une telle décision et les gouvernements soutenus par le groupe EPR, comme celui auquel vous appartenez, madame la ministre, ont heureusement mis fin à ce système.
    Tout cela prêterait à sourire si je n’avais pas constaté, dans ma circonscription de Paris, plusieurs refus d’installation par l’ARS, lesquels se sont concrètement traduits par une réduction de l’offre de soins et un report absurde de patients sur des hôpitaux déjà surchargés. Quelles simplifications des procédures envisagez-vous afin de faciliter et d’accélérer ces installations absolument nécessaires pour réduire les délais des examens médicaux ? Plus généralement, qu’envisagez-vous pour simplifier la gouvernance et le fonctionnement des ARS ?

    M. Stéphane Travert

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    Excellente question !

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre chargée du travail et de l’emploi.

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi

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    Vous avez raison d’appeler notre attention sur les modalités de délivrance, par les ARS, des autorisations d’installation pour les équipements matériels lourds, et de souligner les difficultés rencontrées dans votre circonscription, illustration des conséquences potentielles des freins administratifs sur l’offre de soins et l’accès aux soins dans différents départements.
    Je rappelle néanmoins qu’en matière d’imagerie médicale, même si des disparités notables subsistent, l’offre en Île-de-France est globalement conforme à la moyenne nationale. À Paris, par exemple, l’offre est deux fois plus importante que dans certains territoires de la grande couronne – d’authentiques déserts médicaux où les projets d’implantation supplémentaires se justifient. En octobre 2023, l’Île-de-France comptait 278 sites d’imagerie diagnostique et 372 IRM, soit 30 par million d’habitants, contre une moyenne de 21,47 au niveau national, ainsi que 316 scanners, soit 25,5 par million d’habitants, contre 23 au niveau national. L’allocation de ces ressources rares à l’échelle du territoire national doit aussi être prise en compte. Les IRM et les scanners représentent un véritable investissement, même si ce dernier est réalisé, comme vous le rappelez, directement par les professionnels de santé.
    L’obtention d’une autorisation par l’ARS nécessite le dépôt d’un dossier qui fait ensuite l’objet d’une instruction. La durée du processus fait l’objet d’interrogations légitimes, dont nous souhaitons débattre. Je me souviens avoir moi-même soulevé ce point lorsque j’étais députée de Paris. La période de dépôt des demandes est ouverte en Île-de-France depuis le 16 novembre 2024, jusqu’au 31 mars 2025. Les décisions de l’ARS sont attendues au plus tard en septembre prochain. Nous prévoyons d’augmenter l’offre de manière significative, à hauteur de 30 %, avec potentiellement 230 équipements supplémentaires, dont 57 à Paris.

    Lutte contre les maladies neurodégénératives

    M. le président

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    La parole est à Mme Sandrine Runel, pour exposer sa question, no 133, relative à la lutte contre les maladies neurodégénératives.

    Mme Sandrine Runel

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    Les maladies neurodégénératives touchent 4 millions de Français. Les personnes qui en sont atteintes et leurs proches aidants demandent depuis plusieurs années un plan pluriannuel, le dernier datant de 2019. Toutes les tentatives pour établir une feuille de route ont été abandonnées. En 2023, le ministre de la santé d’alors, M. François Braun, avait confirmé son souhait d’établir un tel plan pour la période 2024-2028, mais ses nombreux successeurs n’ont rien annoncé. Il est inacceptable que la France n’ait pas de politique de santé publique en la matière alors que cela devrait être une priorité. Ruptures de parcours de soins, manque de soutien aux proches aidants, politiques d’inclusion trop peu lisibles : quand sera mis en place un plan pluriannuel doté de moyens financiers à la hauteur des enjeux ?
    Au-delà des moyens financiers nécessaires, la reconnaissance de la fin de la segmentation par âge des politiques publiques de l’autonomie est un des grands combats des associations. La France est actuellement le seul pays de l’Union européenne à utiliser une barrière d’âge entre le handicap et l’autonomie : lorsque le diagnostic de la maladie intervient avant 60 ans, le patient est considéré en situation de handicap et peut potentiellement toucher la prestation de compensation du handicap (PCH) ; si le diagnostic intervient après 60 ans, le patient sera considéré comme relevant de la dépendance, ne pouvant alors prétendre qu’à l’allocation personnalisée d’autonomie (APA). Le montant de la PCH étant en moyenne deux fois plus important que celui de l’APA, cela n’est évidemment pas sans conséquence.
    Le caractère ubuesque de la situation tient au fait que le législateur a déjà supprimé, il y a vingt ans, cette distinction par l’âge : la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées prévoyait en effet l’application de la disposition dans les cinq ans suivant sa promulgation. Or, vingt ans après, force est de constater que la segmentation est toujours en vigueur. Quand le décret d’application de la loi du 11 février 2005 sera-t-il enfin pris ? La jurisprudence du Conseil d’État est pourtant claire : le gouvernement ne peut refuser de prendre un décret d’application. Nous n’avons donc pas vraiment le choix. Vous me répondrez sans doute qu’une telle réforme coûte trop cher. Cherchons pour une fois des pistes de financement ! Vous savez par ailleurs où les trouver. N’abandonnons pas les malades et leurs familles !

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre chargée du travail et de l’emploi.

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi

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    Je vous remercie de soulever la question de la prise en charge des maladies neurodégénératives sur le long terme, en insistant sur la segmentation par l’âge, spécifique à la France.
    Le problème est épidémiologique : plus de 1,5 million de personnes sont déjà concernées par ces maladies et 50 % de plus devraient l’être dans les vingt prochaines années. Une gouvernance nationale a d’ailleurs été établie depuis 2004 : les plans Alzheimer, notamment, ont permis la création des centres mémoire de ressources et de recherche, les CMRR, ainsi que des maisons pour l’autonomie et l’intégration des malades d’Alzheimer, les Maia. Entre 2021 et 2022, une stratégie nationale pour les maladies neurodégénératives a servi de feuille de route. Dans son prolongement, une nouvelle stratégie de prévention et de lutte contre ces maladies, pour la période 2025-2030, est en cours de finalisation ; cette stratégie devrait être annoncée à l’été 2025. L’objectif du gouvernement est bien de concrétiser en actes concrets et visibles cette logique pluriannuelle que vous appelez de vos vœux.
    En ce qui concerne le décret d’application de la loi du 11 février 2005, le Conseil d’État a statué dans une décision du 4 juillet 2012, rejetant la requête de la Confédération française pour la promotion sociale des aveugles et des amblyopes (CFPSAA) tendant à l’annulation des conditions d’âge pour l’octroi de la PCH. Je comprendrais que cette réponse ne vous satisfasse pas mais il ressort de cette décision que l’article D. 245-3 du code de l’action sociale des familles, fixant la limite d’âge pour solliciter la PCH, n’est pas contraire à la loi et ne viole pas le principe constitutionnel d’égalité devant la loi, malgré l’expiration du délai de cinq ans mentionné à l’article 13 de la loi du 11 février 2005.
    À l’approche des 20 ans de cette loi « handicap » du 11 février 2005, soyez néanmoins assurée, au nom de M. Neuder et de Mme Vautrin, de l’engagement plein et entier du gouvernement dans la lutte contre les maladies neurodégénératives. Nous suivrons attentivement les travaux du Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH), qui planche en ce moment sur des propositions destinées à mettre à jour le pacte national pour l’accès aux droits des personnes en situation de handicap. La consultation citoyenne s’étant terminée le 31 janvier, le gouvernement souhaite laisser le temps aux acteurs de consolider ces mesures venues directement du terrain. Puis il avancera de concert avec le CNCPH pour les concrétiser. Il serait d’ailleurs souhaitable d’y associer la représentation nationale.
    Je vous remercie pour votre engagement et votre vigilance à l’égard de cette problématique essentielle, qui prend de l’ampleur.

    M. le président

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    La parole est à Mme Sandrine Runel.

    Mme Sandrine Runel

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    Merci pour cette réponse. Si je comprends bien, le gouvernement s’engage à élaborer un plan pluriannuel pour la période 2025-2030, qu’il devrait annoncer bientôt. Nous y serons attentifs.

    Défibrillateurs automatisés externes

    M. le président

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    La parole est à M. Hubert Ott, pour exposer sa question, no 101, relative aux défibrillateurs automatisés externes.

    M. Hubert Ott

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    Je souhaite appeler l’attention du ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins sur la nécessité de simplifier et d’améliorer la législation et la réglementation en vigueur concernant les défibrillateurs automatisés (DAE). Chaque année, en France, entre 40 000 et 50 000 personnes sont victimes d’un arrêt cardiaque soudain. Une intervention rapide est cruciale : chaque minute sans prise en charge réduit les chances de survie de 10 %. Associé à un massage cardiaque, l’usage d’un DAE peut doubler, voire tripler ces chances. La loi du 28 juin 2018 relative au défibrillateur cardiaque a marqué une avancée majeure en imposant aux établissements recevant du public (ERP) de s’équiper de DAE et en instituant la base nationale des défibrillateurs, Géo’DAE, qui recense leur localisation.
    Cependant, des lacunes persistent. Le recensement des défibrillateurs est jugé complexe par de nombreux gestionnaires d’ERP en raison des dix-huit champs obligatoires à remplir. Cela freine leur enregistrement et limite leur efficacité en cas d’urgence. De plus, l’absence d’une plateforme institutionnelle unique et accessible au grand public rend difficile la localisation rapide des défibrillateurs. Enfin, environ 30 % des défibrillateurs automatisés ne fonctionneraient pas, faute de maintenance rigoureuse, malgré l’obligation légale. Cette situation est préoccupante alors que l’utilisation rapide d’un défibrillateur permet de relever le taux de survie de 4,8 % à 30 %.
    Le problème est tout aussi alarmant pour les arrêts cardiaques survenant à domicile, qui représentent 70 % des cas. Les ensembles d’habitations demeurent sous-équipés, laissant de nombreux citoyens démunis face à ces urgences. Il serait bon de s’inspirer des avancées réalisées dans d’autres domaines, comme la sécurité routière, qui ont permis de réduire drastiquement la mortalité grâce à des mesures stratégiques et à la mobilisation collective.
    Pour relever ces défis, j’ai déposé le 16 janvier 2025 une proposition de résolution visant à simplifier et à améliorer la législation et la réglementation en vigueur concernant les défibrillateurs automatisés externes. Elle vise à améliorer le recensement et l’accessibilité des DAE, à renforcer leur maintenance et à généraliser la formation aux gestes de premiers secours, notamment dans les écoles, les entreprises et les clubs sportifs. Je propose de simplifier le processus de recensement des DAE dans la base nationale Géo’DAE, en créant une plateforme nationale centralisée. Il convient également d’inciter les ensembles d’habitations à s’équiper de DAE, tout en instaurant des contrôles réguliers pour garantir leur bon fonctionnement.
    Je souhaiterais que le gouvernement engage rapidement des actions concrètes en ce sens. C’est pourquoi je demande à M. le ministre quelles mesures il entend prendre pour garantir un accès rapide et fiable aux DAE, renforcer la sensibilisation de la population dès le plus jeune âge et améliorer les chances de survie de nos concitoyens en cas d’arrêt cardiaque.

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre chargée du travail et de l’emploi.

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi

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    Malheureusement, M. Yannick Neuder, qui est cardiologue, n’est pas là pour vous répondre. Néanmoins, il me demande de vous remercier d’avoir mis en lumière la nécessité de simplifier et d’améliorer la législation et la réglementation applicables aux défibrillateurs automatisés externes. Il tient à saluer l’initiative que vous avez prise de déposer récemment à l’Assemblée nationale une proposition de résolution à ce sujet, qui constitue un enjeu majeur