Première séance du vendredi 08 novembre 2024
- Présidence de Mme Nadège Abomangoli
- 1. Projet de loi de finances pour 2025
- Première partie (suite)
- Article 17
- Article 18
- Suspension et reprise de la séance
- Après l’article 18
- Amendement no 668
- Article 19
- Suspension et reprise de la séance
- Après l’article 19
- Article 20
- M. Antoine Golliot
- Amendements nos 2105 et 633
- Article 21
- Amendements nos 2721, 3325, 3190 rectifié, 3230, 2861 et 3077, 3129 rectifié
- Article 22
- Amendements nos 1139 et 1138 rectifié
- Article 23
- Amendement no 3405
- Article 24
- Après l’article 24
- Amendement no 2472
- Article 25
- Amendements nos 2938, 3319, 3320, 2924 et 3098
- Après l’article 25
- Amendements nos 3309, 3307, 3310
- Rappels au règlement
- Après l’article 26
- Première partie (suite)
- 2. Ordre du jour de la prochaine séance
Présidence de Mme Nadège Abomangoli
vice-présidente
Mme la présidente
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures.)
1. Projet de loi de finances pour 2025
Première partie (suite)
Mme la présidente
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la première partie du projet de loi de finances pour 2025 (nos 324, 468).
Hier soir, l’Assemblée a poursuivi la discussion des articles, s’arrêtant à l’article 17.
Article 17
Mme la présidente
La parole est à M. Matthias Renault, pour soutenir l’amendement no 3489, tendant à supprimer l’article 17.
M. Matthias Renault
L’article 17 prévoit un nouveau cas de fusion ou de scission réalisée sans échange de titres. Cette disposition résulte de la transposition d’une ordonnance ratifiée par la dernière loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne (Ddadue). Ces textes, assez techniques et peu discutés, comportent des autorisations et des ratifications relatives à des ordonnances elles-mêmes peu débattues.
Dans l’évaluation préalable, qui figure en annexe du projet de loi de finances (PLF) pour 2025, il est indiqué, concernant l’article 17, à la rubrique « incidences budgétaires » que « la mesure présente un impact non chiffrable à compter de 2025 pour l’État, en l’absence de données disponibles ». Il serait pour le moins gênant de voter un article dont nous ne connaissons pas l’incidence fiscale. C’est pourquoi, au nom du principe de clarté et de lisibilité de la loi, notre amendement vise à supprimer l’article.
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l’avis de la commission.
M. Charles de Courson, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
Cet amendement n’a pas été examiné en commission. Je répondrai cependant avec humour à notre collègue : si nous votions tous les dispositions que nous examinons dans la clarté et en fonction de leur évaluation, cela se saurait ! Sur le fond, il n’a pas tort ; néanmoins, ce n’est pas la première fois que nous nous prononçons dans ces conditions.
L’objectif de l’article 17 est d’étendre le régime des fusions aux nouvelles opérations prévues par le droit commercial et j’y suis favorable. Par conséquent, j’émets un avis défavorable sur l’amendement.
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre du budget et des comptes publics, pour donner l’avis du Gouvernement.
M. Laurent Saint-Martin, ministre du budget et des comptes publics
Même avis.
(L’amendement no 3489 n’est pas adopté.)
(L’article 17 est adopté.)
Article 18
Mme la présidente
La parole est à M. Nicolas Ray, pour soutenir l’amendement no 575.
M. Nicolas Ray
Le dispositif de déduction pour épargne de précaution (DEP) est très utile pour le monde agricole, en ce qu’il permet de faire face à la volatilité des revenus, en réduisant la fraction imposable du bénéfice agricole. Il incite à une gestion pluriannuelle responsable des trésoreries des exploitations, en permettant de tenir compte de la multiplication des aléas climatiques, sanitaires ou naturels. Grâce à ce dispositif, en cas de difficultés, l’exploitant a la possibilité d’améliorer la trésorerie de son entreprise en réintégrant tout ou partie de la DEP.
Le présent amendement propose que 50 % seulement des sommes déduites au titre de l’épargne soient réintégrés, contre 70 % actuellement. Cette mesure permettrait d’améliorer l’efficacité du dispositif et constituerait une véritable aide pour l’activité des agriculteurs.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
Cet amendement a été rejeté par la commission. L’exonération, totalement dérogatoire, de la reprise de DEP à hauteur de 30 % des sommes utilisées est déjà très favorable ; la porter à 50 % me paraît complètement déraisonnable. Cela pourrait même avoir un effet pervers et dissuader les exploitants de souscrire un contrat d’assurance récolte. Avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
L’article 18 propose de nouvelles dispositions, bienvenues, qui permettent d’assouplir les modalités d’application de la DEP. Cependant, en allant trop loin, nous risquerions de passer d’un régime qui vise à faciliter le report d’imposition à un régime de défiscalisation. Gardons l’esprit de cet outil. Avis défavorable.
(L’amendement no 575 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je suis saisie de trois amendements, nos 281, 2674 et 776, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 281 et 2674 sont identiques.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 281.
Mme Véronique Louwagie
L’article 18 est effectivement bienvenu puisque le dispositif de déduction pour épargne de précaution permet aux agriculteurs d’effectuer un lissage en fonction des variations de revenus. Il nous semble important de garantir, sans risque, la réintégration des sommes déduites. Or, tel qu’il est rédigé, l’article peut conduire à une ambiguïté. C’est pourquoi nous proposons de substituer aux mots « faire face aux dépenses résultant directement » la phrase suivante : « La survenance de ces risques est réputée établie à la suite ». Il est important, j’y insiste, de sécuriser la manière dont la réintégration des sommes déduites au titre de l’épargne de précaution sera effectuée et d’éviter tout risque juridique.
Mme la présidente
Les amendements nos 2674 de M. David Taupiac et 776 de Mme Lise Magnier sont défendus.
Quel est l’avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
La commission a rejeté ces amendements. Par définition, la réintégration de la DEP est liée aux pertes résultant des aléas climatiques et sanitaires. Si, comme vous le proposez, nous décorrélons les dépenses mobilisées des pertes résultant de ces aléas, nous risquons d’en perdre le fondement même. De plus, cela inciterait les exploitants à réintégrer au maximum leur DEP lors des mauvaises années, sans lien avec leur besoin réel – ces mauvaises années pouvant être liées à tout autre motif, tels que des aléas économiques –, afin de profiter de l’exonération de 50 000 euros.
L’amendement no 776 est différent, puisque l’exonération n’est même plus liée à un quelconque aléa. C’est totalement contraire à l’idée même de la création de la DEP. Avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Je suis sensible aux arguments avancés par Mme Louwagie. Il faut accorder davantage de souplesse. Néanmoins, comme je l’ai précisé tout à l’heure, il ne faudrait pas basculer dans un dispositif qui perdrait l’esprit de la DEP. Ces amendements se ressemblent, même si le dernier est un peu différent.
M. Charles de Courson, rapporteur général
Il est libertaire !
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Ce n’est pas faux. Je m’en remets à la sagesse de l’assemblée sur ces amendements.
Mme la présidente
La parole est à Mme Lise Magnier.
Mme Lise Magnier
Je retire l’amendement no 776, au profit du no 281 de Mme Louwagie.
(L’amendement no 776 est retiré.)
Mme la présidente
La parole est à M. Joël Bruneau.
M. Joël Bruneau
Je retire également l’amendement no 2674 de M. Taupiac.
(L’amendement no 2674 est retiré.)
M. Emeric Salmon
Cela n’a pas de sens, puisqu’il est identique au no 281 !
(L’amendement no 281, modifié par la suppression du gage, est adopté.)
Mme la présidente
Je suis saisie de cinq amendements identiques, nos 290, 578, 774, 820 et 2676.
L’amendement no 290 de Mme Véronique Louwagie est défendu.
La parole est à M. Nicolas Ray, pour soutenir l’amendement no 578.
M. Nicolas Ray
Il vise à compléter la liste des risques auxquels s’applique le dispositif de la DEP, actuellement limitée aux aléas sanitaires, naturels ou climatiques. Ainsi, les risques économiques en sont exclus. Or, compte tenu de la variation des cours ou encore des hausses des charges d’approvisionnement qui menacent l’équilibre financier des exploitations agricoles, il serait nécessaire d’élargir le champ d’application de la DEP aux risques économiques.
Mme la présidente
L’amendement no 774 de Mme Lise Magnier est défendu.
La parole est à M. Stéphane Travert, pour soutenir l’amendement no 820.
M. Stéphane Travert
Le dispositif de réintégration partielle instauré dans le cadre de la loi de finances permet de renforcer l’efficacité de la DEP lors de la survenance de risques sanitaires, naturels ou climatiques – risques qui sont de plus en plus fréquents. Cependant, les agriculteurs subissent également les conséquences de risques économiques – du fait de méventes, de variations des cours de leurs productions ou encore des hausses des charges d’approvisionnement auxquelles ils sont confrontés –, pour lesquels ce nouveau dispositif n’est pas applicable, alors que ces aléas ont un impact majeur sur les exploitations.
C’est pourquoi le présent amendement prévoit d’élargir le champ d’application du dispositif de limitation à 70 % de la réintégration des sommes aux aléas économiques qui peuvent frapper les exploitants agricoles, ce qui permettra d’accroître l’efficacité d’un dispositif que nous avions créé avec Bruno Le Maire en 2017. (Mme Laetitia Saint-Paul applaudit.)
Mme la présidente
La parole est à M. Joël Bruneau, pour soutenir l’amendement no 2676.
M. Joël Bruneau
Je le retire au profit de celui de M. Ray.
(L’amendement no 2676 est retiré.)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
La commission des finances a adopté ces amendements identiques. Je m’y étais opposé pour les raisons suivantes. Cela changerait complètement l’objectif initial de la DEP, qui était de faire face aux catastrophes naturelles, aux problèmes climatiques. Les amendements étendent l’exonération de reprise de la DEP aux cas des aléas économiques, ce qui est beaucoup plus large : il peut par exemple s’agir d’un effondrement des prix pour des raisons internationales qui n’ont rien à avoir avec la gestion de l’exploitation.
La DEP est déjà un outil souple, que nous avons beaucoup réformé – je pense à la réévaluation des plafonds ou à l’indexation sur l’inflation. Les exploitants disposent d’autres outils fiscaux adaptés aux spécificités de la production agricole : le blocage de la valeur des stocks, l’étalement des revenus exceptionnels…
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à Mme Manon Meunier.
Mme Manon Meunier
Les aléas économiques et la fluctuation des prix sur les marchés sont dus au fait que vous vous opposez à la régulation de ces derniers. En proposant comme solution d’exonérer les risques économiques que vous créez – au lieu de les réduire –, vous mettez un pansement sur une jambe de bois. (M. Bastien Lachaud applaudit.)
Mme Véronique Louwagie
On n’a pas exonéré les risques économiques !
Mme Manon Meunier
Les agriculteurs demandent des prix justes et des revenus fixes – ils veulent vivre de leur travail. La solution n’est pas d’exonérer les risques économiques mais d’instaurer un vrai rapport de force face à la grande distribution et de sortir des traités de libre-échange. Nous devons arrêter de laisser le marché faire la loi sur les prix agricoles. (Mêmes mouvements.) Il est hypocrite de proposer, pour remédier à un problème structurel et profond, toujours et encore la même solution, comme un pansement sur une jambe de bois : des exonérations fiscales qui appauvriront l’État. Les agriculteurs vous demandent de sortir des traités de libre-échange et de la dérégulation des marchés. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. – M. Dominique Potier applaudit également.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Véronique Louwagie.
Mme Véronique Louwagie
Je souhaite réagir aux propos de ma collègue. La déduction pour épargne de précaution n’est pas une exonération : c’est un lissage du revenu. Les entreprises agricoles sont probablement celles qui connaissent les plus grandes variations de revenu. Se limiter aux facteurs économiques comme vous le faites, c’est méconnaître le monde agricole.
Mme Manon Meunier
C’est votre amendement qui mentionne les aléas économiques !
Mme Véronique Louwagie
Ces variations dépendent d’un grand nombre de facteurs, parmi lesquels les aléas climatiques, sanitaires et économiques. Le dispositif ne constitue en aucun cas une exonération. Il est de notre responsabilité de créer des outils pour aider…
Mme Manon Meunier
La dérégulation !
Mme Véronique Louwagie
…à limiter les effets des aléas sur les variations de revenus.
Je me satisfais de l’article 18, qui répond concrètement aux souhaits des agriculteurs.
(Les amendements identiques nos 290, 578, 774 et 820 sont adoptés.)
Mme la présidente
Levez-vous le gage, monsieur le ministre ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Oui.
Mme la présidente
Les amendements identiques nos 821 de M. Stéphane Travert, 1218 de M. Corentin Le Fur et 2677 de M. David Taupiac sont défendus.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
La commission a rejeté ces amendements qui visent à supprimer le plafond de 50 000 euros concernant l’exonération de reprise de la DEP. Si l’exonération était illimitée, les exploitants pourraient inscrire l’intégralité de leur revenu en déduction. Ce n’est pas raisonnable. Ces amendements vont beaucoup trop loin : ils dénaturent la DEP et la font exploser.
La position de la commission s’explique par trois raisons. Premièrement, le plafond de 50 000 euros est relativement élevé quand on connaît le revenu moyen des exploitations.
Un député du groupe LFI-NFP
Exactement !
M. Charles de Courson, rapporteur général
Pour les exploitants qui sont membres d’un groupement agricole d’exploitation en commun (Gaec), le plafond est multiplié par le nombre de participants. Il peut donc atteindre 200 000 euros – avec la limite de quatre personnes.
Deuxièmement, le plafond est nécessaire pour limiter le coût de la mesure et éviter les effets d’aubaine. Madame Louwagie, vous n’aviez raison qu’à 70 % : ça n’est pas qu’un lissage du revenu. Les 30 % restants sont exonérés – vous vouliez même aller jusqu’à 50 %.
Mme Véronique Louwagie
Je n’ai pas signé cet amendement.
M. Charles de Courson, rapporteur général
Votre voisin, M. Ray, l’avait fait.
Troisièmement, le bénéfice de la DEP est subordonné au respect de la règle de minimis, qui encadre les dérogations aux règles de droit européen applicables en matière d’aides d’État. En cas de suppression du plafond, cette règle ne serait pas respectée – les exploitants pourraient ne plus payer d’impôt pendant des années et accumuler des revenus. Adopter de tels amendements n’est pas raisonnable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Même avis.
(Les amendements identiques nos 821, 1218, 2677 ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
Les amendements nos 1606 et 1607 de M. le rapporteur général sont rédactionnels.
(Les amendements nos 1606 et 1607, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.)
Mme la présidente
Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 581 et 822.
La parole est à M. Nicolas Ray, pour soutenir l’amendement no 581.
M. Nicolas Ray
Il concerne la provision comptable à l’article 18, qui remplace la déduction élevage. Cette disposition bienvenue, qui constitue une avancée nécessaire, pourrait toutefois être améliorée.
L’amendement propose de ne pas réintégrer la provision au cours de l’exercice de sortie d’un animal lorsque la valeur globale du stock est au moins égale à celle constatée sur l’exercice de constitution de la provision, ce afin de tenir compte de la valeur du stock des animaux.
En cas d’abattage du troupeau, il est proposé de ne pas rapporter la provision sur l’exercice d’abattage des animaux. En effet, l’exploitant subissant la perte de ses animaux aura du mal à supporter le poids fiscal de la réintégration de la provision.
Mme la présidente
La parole est à M. Stéphane Travert, pour soutenir l’amendement no 822.
M. Stéphane Travert
Les arguments de mon collègue Nicolas Ray étant suffisants, il est défendu.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
Ces amendements relatifs à la provision pour stock de vaches visent à alléger la condition de conclusion d’un contrat d’engagement, à ne pas réintégrer la provision au cours de l’exercice de sortie d’un animal en cas de stabilité du cheptel et à ne pas rapporter la provision sur l’exercice d’abattage des animaux en cas d’abattage sanitaire.
Il est utile d’inciter les exploitant à signer des contrats sur la vente de leurs produits pour leur garantir une plus grande visibilité sur leurs débouchés et contribuer à une meilleure adéquation entre l’offre et la demande. Ces contrats existent depuis 2010 et ils sont bien connus des agriculteurs ; la loi n’est pas imprécise sur ce sujet. Exonérer l’exploitant de l’obligation de reprendre la provision en cas de stabilité du cheptel est contraire à l’objectif de cette provision, qui est de favoriser une recapitalisation. La commission des finances a rejeté ces amendements.
S’agissant de l’exonération de reprise en cas d’abattage sanitaire, nos collègues ont raison, mais c’est l’objet de l’amendement suivant, qui est sous-amendé par le Gouvernement. Je vous demande de retirer ces amendements au profit de l’amendement suivant sous-amendé.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Même avis. J’ai bien entendu vos arguments. Le sous-amendement du Gouvernement restreint le champ d’application de l’amendement de Mme Christelle Petex que nous examinons dans un instant.
Mme Véronique Louwagie
Il ne sera pas soutenu.
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Aucun des cosignataires n’est présent pour le défendre ? Je demande une suspension de séance pour sous-amender ceux qui sont défendus.
Suspension et reprise de la séance
Mme la présidente
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à neuf heures vingt-cinq, est reprise à neuf heures trente.)
Mme la présidente
La séance est reprise.
La parole est à M. le ministre.
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Il serait très complexe d’appliquer aux amendements identiques que nous examinons le sous-amendement que le Gouvernement a proposé à l’amendement qui suit, car ils ne concernent pas le même code juridique. Je formule donc un avis de sagesse mais il faudra modifier l’article lors de la navette, dans l’esprit du sous-amendement que le Gouvernement a déposé.
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Charles de Courson, rapporteur général
Faisons un peu de gymnastique : nous sous-amenderons l’amendement de M. Travert dans la suite du parcours législatif car l’amendement qui suit, sous-amendé par le Gouvernement, ne sera pas soutenu. Vous suivez tous ? (Sourires.) C’est très simple et très clair ! Exonérer l’exploitant de la reprise de la provision en cas de stabilité du cheptel est contraire à l’objectif de la provision qui est de favoriser une recapitalisation du cheptel. En revanche, rendre la reprise facultative en cas d’abattage sanitaire est intéressant. Le rapporteur général donnera donc un avis favorable à ces amendements une fois ceux-ci sous-amendés.
Mme la présidente
La parole est à M. Nicolas Ray.
M. Nicolas Ray
Souvenons-nous que la contractualisation prévue dans les lois Egalim de 2018, 2021 et 2023 a été faible. De plus, allons au bout de la logique de simplification attendue par nos éleveurs en prenant en compte la valeur globale du cheptel et non la valeur par tête. Je maintiens donc mon amendement, qui pourra bien sûr faire l’objet d’une précision dans le cadre de la navette.
(Les amendements identiques nos 581 et 822 ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
Les amendements nos 1608, 1610 et 1609 de M. le rapporteur général, sont rédactionnels.
(Les amendements nos 1608, 1610 et 1609, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.)
Mme la présidente
Je suis saisie de six amendements, nos 1705, 584, 824, 1219, 658 et 2198, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 584, 824 et 1219 sont identiques.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement no 1705.
M. Charles de Courson, rapporteur général
Cet amendement prévoit de rehausser de manière progressive l’exonération de taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFPNB) visant les terrains à usage agricole en portant son taux à 30 % au 1er janvier 2025 – c’est ce que propose le Gouvernement dans le texte initial –, puis à 40 % au 1er janvier 2026 et à 50 % au 1er janvier 2027. Si le terrain fait l’objet d’un bail, le bénéfice de l’exonération est partagé entre le propriétaire et l’exploitant en fonction de la fraction de taxe foncière mise à la charge de l’exploitant. Cette mesure vise à rendre le portage du foncier agricole plus attractif et à réduire les impôts de production supportés par les exploitants agricoles.
Dans l’état actuel du droit, les terrains à usage agricole bénéficient d’exonérations de taxe foncière sur les propriétés non bâties dont le taux varie selon leur localisation. Ils sont exonérés en totalité de TFPNB lorsqu’ils sont situés en Corse ; à hauteur de 80 % lorsqu’ils sont situés en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à Mayotte et à La Réunion ; à concurrence de 20 % dans le reste du territoire français. Le présent amendement vise à rehausser l’exonération de manière progressive ; le Premier ministre du précédent gouvernement s’était d’ailleurs engagé en avril 2024 à porter ce taux à 30 % dès 2025. La hausse d’exonération à hauteur de 30 % coûte à peu près 50 millions.
La loi dispose par ailleurs que l’exploitant doit payer au propriétaire une fraction de la taxe foncière – c’est-à-dire le rembourser – pour les biens pris à bail. La clé de répartition est libre, le propriétaire ne pouvant pas faire supporter la totalité de l’impôt foncier à l’exploitant. L’actuelle exonération de 20 % doit toutefois bénéficier obligatoirement à l’exploitant agricole. Nous proposons de répartir le bénéfice de l’augmentation de l’exonération entre le propriétaire et l’exploitant, en fonction de la fraction de la taxe foncière mise à la charge de l’exploitant. Ainsi, l’exploitant continuera à bénéficier de l’exonération actuelle de 20 %, en plus de la fraction supplémentaire d’exonération de 10 % en 2025, de 20 % en 2026 puis de 30 % en 2027 bénéficiant alternativement à l’exploitant ou au propriétaire selon les dispositions contractuelles ou légales. Cet amendement a été adopté en commission.
Mme la présidente
La parole est à M. Nicolas Ray, pour soutenir l’amendement no 584.
M. Nicolas Ray
Dans le même esprit, nous proposons d’augmenter le taux d’exonération permanente des parts communales et intercommunales de taxe foncière sur les propriétés non bâties à hauteur de 50 % contre 20 % actuellement, afin d’alléger l’impôt de production qui pèse sur les exploitations agricoles et de renforcer leur compétitivité – de même que la baisse de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) a bénéficié aux entreprises industrielles. Cet allégement de TFPNB permettra de diminuer les charges qui pèsent sur nos éleveurs et nos agriculteurs sur lesquels 99 % de cette taxe est répercutée. Cet amendement de bon sens vise à soutenir nos agriculteurs dans la crise qu’ils traversent.
Mme la présidente
La parole est à M. Stéphane Travert, pour soutenir l’amendement no 824.
M. Stéphane Travert
Nos terres agricoles sont de véritables puits de carbone qui contribuent à atteindre les objectifs français en matière de captation de gaz à effet de serre. À cet égard, selon leur utilisation, les cultures qui y sont produites et la couverture permanente de leurs sols, elles constituent des atouts indispensables. C’est tout le sens et l’ambition de l’initiative « 4 pour 1 000 : les sols pour la sécurité alimentaire et le climat ». Dans le cadre de la lutte contre le changement climatique, la taxation doit prend en compte la forte contribution non financière de l’agriculture dont l’ensemble de la société bénéficie. C’est pourquoi cet amendement vise à soutenir les efforts et la compétitivité de nos exploitations.
Mme la présidente
La parole est à M. Corentin Le Fur, pour soutenir l’amendement no 1219.
M. Corentin Le Fur
La transmission des exploitations agricoles est un enjeu majeur, c’est pourquoi toute baisse des charges qui pèsent sur nos agriculteurs est la bienvenue. En l’occurrence, le coût de la mesure proposée est modéré, voire modique pour les finances publiques.
Mme la présidente
L’amendement no 658 de M. Julien Dive est défendu.
La parole est à M. Jean-René Cazeneuve, pour soutenir l’amendement no 2198.
M. Jean-René Cazeneuve
Je salue les mesures introduites dans le PLF par le Gouvernement, qui respecte ainsi les engagements pris en matière fiscale à l’égard des agriculteurs à la suite de la crise du début d’année. Je propose un effort supplémentaire consistant à porter l’exonération des parts communales et intercommunales de la TFPNB de 30 % à 40 %, afin de soutenir nos agriculteurs qui traversent une crise très importante liée aux aléas climatiques.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
Tous ces amendements ont pour objectif de porter l’exonération de TFPNB de 20 % à 30 %, voire à 40 % ou 50 %. L’amendement de Jean-René Cazeneuve propose de le porter à 40 % dès 2025. Les amendements nos 584, 824, 1219 et 658 visent à le porter à 50 % dès 2025. Mon amendement propose une progressivité de 10 points par an répartie sur les années 2025, 2026 et 2027. Sachant que le coût d’une hausse d’exonération de 10 points est de 50 millions d’euros, mon amendement entraîne un coût de 50 millions par an pendant trois ans ; les suivants de 150 millions dès 2025 ; l’amendement de M. Cazeneuve de 100 millions dès 2025.
La commission donne un avis favorable à l’amendement no 1705 et défavorable aux autres.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
L’article 18 vise à porter l’exonération de TFPNB de 20 à 30 %, c’est-à-dire à l’augmenter de moitié. Le Gouvernement considère que cette mesure est suffisante et ne souhaite pas aller au-delà. Avis défavorable sur l’ensemble des amendements.
Mme la présidente
La parole est à M. Dominique Potier.
M. Dominique Potier
Les amendements s’inscrivent dans une logique de compétitivité. À cet égard, je voudrais rappeler deux chiffres.
D’une part, la surface moyenne d’une propriété rurale agricole est de 7 hectares, mais celle d’une exploitation agricole est de 69 hectares par actif. Nous nous apprêtons pourtant à voter une exonération sans limite de surface.
D’autre part, l’ensemble des exonérations fiscales touchant l’agriculture représente entre la moitié et les deux tiers du montant de la politique agricole commune (PAC). Or on sait que 50 % des aides de la PAC vont à 20 % des agriculteurs.
Nous avons demandé à Bercy une étude évaluant l’impact de la fiscalité agricole sur chaque catégorie d’agriculteurs et son efficacité du point de vue de la compétitivité et de la transition écologique. N’ayant pas ces informations, nous sommes réservés quant à l’opportunité d’une exonération représentant plusieurs centaines de millions et dont l’efficacité sur les plans de la justice sociale et de l’accompagnement des transitions indispensables à la productivité de demain n’est pas garantie.
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Charles de Courson, rapporteur général
Je tiens à rappeler que la France est le seul pays d’Europe à taxer le foncier non bâti, ce qui handicape les exploitations agricoles françaises par rapport à celles des pays voisins. C’est pour cette raison que certaines parties de la France sont déjà largement exonérées de la TFPNB, comme je l’ai rappelé : la Corse l’est à 100 %, la Guyane et les Antilles à 80 %. L’exonération sert donc la compétitivité, puisqu’elle vise à remettre les exploitations françaises à égalité.
(L’amendement no 1705 est adopté ; en conséquence, les amendements nos 584, 824, 1219, 658 et 2198 tombent.)
(L’article 18, amendé, est adopté.)
Après l’article 18
Mme la présidente
L’amendement no 668 de M. Julien Dive, portant article additionnel après l’article 18, est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
La commission n’a pas examiné cet amendement. J’y suis défavorable à titre personnel, car il me semble excessif de proroger la DEP jusqu’en 2031. En principe, la prorogation d’une dépense fiscale se limite à trois ans.
(L’amendement no 668, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)
Article 19
Mme la présidente
La parole est à Mme Eva Sas, pour soutenir l’amendement no 3571.
Mme Eva Sas
Cet amendement a été déposé par ma collègue Dominique Voynet.
Le PLF pour 2025 prévoit de nouvelles exonérations de fiscalité des plus-values lors de la cession d’exploitations agricoles, notamment lors des départs à la retraite.
Il y a deux ans à peine, la loi du 29 décembre 2023 a déjà rehaussé le seuil d’exonération à 450 000 euros. Loin de faciliter la transmission des exploitations et l’installation des jeunes agriculteurs, ce dispositif facilite la cession et l’achat de machines, encourage la surmécanisation effrénée et entraîne les acquéreurs dans une spirale d’endettement infini. Dans un contexte qui nous appelle à davantage de sobriété, c’est le partage des moyens de production et l’utilisation optimale des équipements les plus coûteux – ce que permettent depuis belle lurette les coopératives d’utilisation de matériel agricole (Cuma) – qu’il faut encourager.
L’exonération initiale, élargie par la loi de 2023, avait pour objet de favoriser et faciliter la transmission des exploitations. Le nouveau dispositif contenu dans l’article 19 y suffit et semble même vertueux, car conditionné à la transmission d’une exploitation. L’amendement vise donc logiquement à supprimer l’ancien dispositif.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
La commission des finances a rejeté cet amendement visant à supprimer l’exonération existante pour lutter contre la surmécanisation. L’approche que vous proposez est disproportionnée : en privant les entreprises agricoles de toute exonération sur les plus-values de cession, nous risquerions de fragiliser les transmissions. Elle est en outre déconnectée des prix du matériel agricole, que les exploitants ne renouvellent pas pour le plaisir.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Même avis, pour les mêmes raisons.
Mme la présidente
La parole est à M. Dominique Potier.
M. Dominique Potier
L’amendement est bienvenu, car il pose une question capitale. Nous consacrons plus de 1 milliard par an aux exonérations de la plus-value sur le matériel mécanique. Selon une étude scientifique et comptable de la Fédération nationale des Cuma (FNCUMA) sur l’effet macroéconomique de cette mesure, l’exonération entraîne un surcoût qui dépasse 15 000 euros par entreprise pour le matériel. L’essentiel des bénéfices de cette plus-value très coûteuse pour l’État va principalement aux constructeurs de machinisme situés en Allemagne ou aux États-Unis.
La France subventionne l’industrie allemande et américaine des tracteurs, moissonneuses-batteuses et autres matériels agricoles, et les entreprises agricoles françaises font face à un surcoût. C’est un échec total. Monsieur le rapporteur général, il faut sans doute procéder par étapes et commencer par convertir cette exonération en une aide à la mécanisation vertueuse, économe, compatible avec la transition écologique ; toujours est-il que le dispositif actuel est une aberration fiscale absolue. Il est grand temps de revenir au bon sens. En l’occurrence, on peut vraiment le dire : on marche sur la tête !
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Charles de Courson, rapporteur général
L’analyse de M. Potier n’est pas forcément erronée,…
M. Bastien Lachaud
Ah !
M. Charles de Courson, rapporteur général
…mais la réforme graduelle dont il parle n’est pas l’objet de l’amendement. L’amendement propose simplement de supprimer l’exonération. Ce n’est pas raisonnable !
M. Bastien Lachaud
Mais si !
(L’amendement no 3571 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
L’amendement no 825 de M. Stéphane Travert est défendu.
(L’amendement no 825, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je suis saisie de huit amendements, nos 79, 1336, 2202, 2957, 1249, 1568, 990 et 2950, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 79, 1336, 2202 et 2957 sont identiques.
Les amendements nos 79 de Mme Émilie Bonnivard et 1336 de M. Vincent Thiébaut sont défendus.
La parole est à M. Jean-René Cazeneuve, pour soutenir l’amendement no 2202.
M. Jean-René Cazeneuve
Il tend à favoriser la transmission à titre gratuit de biens ruraux, sur le modèle du pacte Dutreil. L’augmentation de la taille des exploitations agricoles rend de plus en plus difficile leur transmission entre générations, dont nous avons pourtant besoin.
Mme la présidente
L’amendement no 2957 de Mme Lise Magnier est défendu.
La parole est à Mme Françoise Buffet, pour soutenir l’amendement no 1249.
Mme Françoise Buffet
Dans le cadre du pacte Dutreil, la transmission à titre gratuit d’entreprises bénéficie depuis le début des années 2000 d’une exonération de 75 % sans plafond sous certaines conditions. L’amendement vise à faire converger le régime d’abattement applicable aux terres données à bail à long terme vers celui du pacte Dutreil, en supprimant le plafond d’exonération et en proposant une durée minimale de conservation de la propriété de dix ans.
Mme la présidente
La parole est à M. Hubert Ott, pour soutenir l’amendement no 1568.
M. Hubert Ott
Par cet amendement, nous avons pour ambition de favoriser la stabilité du foncier attaché aux exploitations agricoles et viticoles, indispensable à leur pérennité.
Lorsque des terres ou vignes louées à long terme font l’objet d’une transmission à titre gratuit, elles bénéficient d’une exonération de 75 %, soumise à un plafond de 300 000 euros. Ce plafond est porté à 500 000 euros si le bénéficiaire de la transmission s’engage à conserver le bien pendant au moins dix ans. Au-delà de ces limites, l’exonération est de 50 %.
En règle générale, la transmission à titre gratuit d’entreprises bénéficie d’une exonération de 75 % sans plafond. Une transposition de ce principe au capital foncier attaché durablement à une exploitation agricole ou viticole est d’autant plus nécessaire que la valeur de ce capital est très élevée au regard de sa rentabilité effective et quotidienne, ce qui constitue un frein important aux transmissions des exploitations, en particulier dans un cadre familial.
Pour favoriser la stabilité du foncier, l’amendement vise à alléger la fiscalité applicable aux bénéficiaires d’une transmission à titre gratuit de biens ruraux loués par bail à long terme lorsque ces bénéficiaires s’engagent à les conserver pour une longue durée.
Les filières agricole et viticole traversent des difficultés bien connues. Nous avons le devoir de favoriser leur réussite. La viticulture, par exemple, est un fleuron de l’économie française.
Mme la présidente
Merci de bien vouloir conclure, monsieur le député.
M. Hubert Ott
Nous devons l’accompagner, faire en sorte que ses lendemains soient souriants, car c’est la richesse de la France qui est en jeu. Allégeons donc la fiscalité lorsque le patrimoine auquel elle s’applique est avant tout un outil de travail.
Mme la présidente
Je propose que nous nous en tenions à des interventions d’une minute.
La parole est à M. Matthias Renault, pour soutenir l’amendement no 990.
M. Matthias Renault
Il vise à aligner les conditions de transmission des exploitations agricoles sur celles du dispositif Dutreil, en supprimant les plafonds d’exonération fixés à 300 000 et à 500 000 euros. En effet, le mécanisme actuel d’exonération ne tient pas compte de la valeur des exploitations. L’objectif est la stabilité du foncier, en particulier dans les exploitations viticoles.
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement no 2950 et pour donner l’avis de la commission sur les amendements en discussion commune.
M. Charles de Courson, rapporteur général
Tous ces amendements tendent à faciliter la transmission. Les amendements identiques nos 79 et suivants, partant du constat que le pacte Dutreil n’inclut pas de plafond, visent à supprimer le plafond applicable aux entreprises agricoles individuelles à condition que le bénéficiaire de la transmission s’engage à conserver le bien pendant quinze ans, sous peine de devoir reverser au prorata temporis le montant de l’exonération. Les amendements nos 1249 et 1568 abaissent à dix ans la durée minimale de conservation du bien, ce qui est plus favorable au bénéficiaire. Enfin, l’amendement no 990 vise également la suppression du plafond fixé à 500 000 euros ; je rappelle que le taux d’abattement est de 75 % en deçà du plafond et de 50 % au-delà.
L’amendement no 2950, que j’ai présenté, a le mérite de la simplicité. Il vise à élargir l’exonération à tous les cas de transmission, y compris à celle de parts de groupements fonciers agricoles (GFA), tout en maintenant le plafonnement à 600 000 euros et la durée durant laquelle le donataire doit conserver le bien.
La commission a considéré que déplafonner totalement, même si c’est pour instaurer des conditions équivalentes à celles du pacte Dutreil, pourrait avoir un coût très important. Elle a donc préféré se rabattre sur l’amendement no 2950 de votre rapporteur. Ainsi, nous élargissons les possibilités de transmission, en supprimant la condition concernant l’âge du repreneur pour l’exonération, mais nous maintenons un plafond, même si celui-ci est réévalué à 600 000 euros, sans modifier la durée de détention.
À titre personnel, je pense que mon amendement, soutenu par la commission, est raisonnable. Nous verrons dans l’avenir si le plafond doit être encore relevé.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
L’avis du Gouvernement est défavorable sur l’ensemble de ces amendements, même si, comme le rapporteur général l’a bien expliqué, ils n’ont pas tous la même portée et ils proposent des dispositifs différents.
Déplafonner a deux conséquences sur lesquelles je ne peux que m’exprimer défavorablement. Premièrement, le coût de cette mesure est potentiellement important. Deuxièmement, par définition, si on modifie ou si on supprime le plafonnement pour les exonérations de droits sur 75 % de la valeur du bien, cela va favoriser les plus hauts patrimoines ; ce n’est pas nécessairement un problème, mais c’est un choix. Je ne suis pas sûr que la priorité soit de favoriser fiscalement les hauts patrimoines. Comme l’a dit M. Potier, il est nécessaire d’évaluer la fiscalité agricole actuelle avant de modifier différents plafonds.
À ce sujet, monsieur Potier, le rapport de la FNCUMA que vous avez mentionné est disponible, ou s’il ne l’était pas, nous vous le transmettrions volontiers et nous pourrons travailler sur ces questions.
M. Dominique Potier
Ah ! C’est bien !
M. Laurent Saint-Martin, ministre
La contre-proposition du rapporteur général est intéressante, car elle tend à augmenter le montant du plafond tout en maintenant un plafonnement, ce qui me paraît nécessaire. Le coût de cette disposition serait plus contenu, néanmoins elle favorise également les plus hauts patrimoines.
Mme la présidente
La parole est à M. Dominique Potier.
M. Dominique Potier
Merci, monsieur le ministre, de nous transmettre le rapport sur la répartition des exonérations fiscales dans l’agriculture et leur impact sur les catégories, les régions et les systèmes différents. Ces documents nous seront très précieux. Les socialistes, comme d’autres groupes à gauche, voteront contre ces dispositions, suivant en l’occurrence l’avis du Gouvernement. En effet, elles sont iniques.
Je me souviens très bien – je m’étais même garé tant j’avais été ému – en entendant, lors de la Saint-Vincent, Bruno Le Maire, dans la Marne, faire la promesse aux vignerons de Champagne qu’il ferait sauter les plafonds des exonérations pour la transmission. Je ne sais pas dans quel état il était, mais son manque de lucidité était évident. Renouveler les générations est un enjeu capital. Pour cela, il faut partager les aides.
Monsieur le ministre, comme vous êtes dans des bonnes dispositions, je vous demanderai la publication, avant la fin de l’examen du projet de loi de finances, du rapport du Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) sur la fiscalité de la transmission, à la demande de Marc Fesneau. Ce rapport existe, le ministère de l’agriculture est favorable à sa publication, tandis que Bercy y est défavorable. Au nom de la démocratie et de la transparence de nos débats, j’aimerais que nos futurs échanges sur la transmission dans le cadre de l’examen du PLF soient éclairés par ce rapport. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, LFI-NFP et EcoS.)
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-Paul Mattei.
M. Jean-Paul Mattei
Une terre agricole est un bien à part. En effet, c’est un bien qui est nécessaire à l’exploitation ; il peut faire l’objet d’une mise à disposition, il y a le bail à long terme… Pour bénéficier du pacte Dutreil, il suffit d’apporter les terres à une société commerciale. Cela présente un travers, car dans ce cas nous perdons le contrôle – quid des dispositifs en place ? – même si la loi Sempastous a essayé d’améliorer le système. Vous parlez de grandes exploitations, mais, en l’espèce, le foncier est immobilisé depuis longtemps.
Votre argument pour rejeter ces amendements n’est donc pas satisfaisant. Il est vrai que les choses évoluent dans le bon sens : on est passé de 100 000 à 500 000 euros en quelques années. Néanmoins, je ne vois pas pourquoi moins bien traiter qu’un actif professionnel le capital foncier, alors même que le propriétaire le conserve et qu’il est exploité dans le cadre d’un bail à long terme, avec des contraintes qui visent à s’assurer que le dispositif bénéficie à de vrais exploitants agricoles.
Comme je l’ai dit, le contournement est facile et il engendre des risques pour la maîtrise et le contrôle du foncier. Il y a une forme de financiarisation de l’agriculture : nous devons faire très attention à ce travers. Monsieur Potier, vous pensez aller dans le bon sens, mais je ne suis pas certain que tout cela vous amènera là où vous le souhaitez.
M. Dominique Potier
Nous avons besoin du rapport du CGAAER.
Mme la présidente
La parole est à M. Hubert Ott.
M. Hubert Ott
Je connais le vignoble, en particulier le vignoble alsacien. Nous avons la chance d’avoir une viticulture familiale. Certes, les vignerons détiennent un patrimoine, mais ce patrimoine est un outil de travail. Les transmissions seront importantes dans les prochaines années – je ne vous apprends rien – ; dans ce contexte, il faut favoriser le maintien de la présence territoriale des familles d’exploitants. Si cette présence diminuait, nous perdrions une force économique évidente. Soyons à l’écoute de la réalité du terrain et proposons des réponses qui vont dans le sens de la pérennité des exploitations agricoles et de la réussite viticole française, qui en a bien besoin actuellement.
Mme la présidente
La parole est à M. Joël Bruneau.
M. Joël Bruneau
Nous touchons du doigt un vrai sujet, qui mériterait mieux qu’un débat un peu tronqué autour de quelques amendements. En matière de transmission de l’outil agricole, il y a autant de situations que de formes d’agricultures. Ce qui est vrai pour le vignoble alsacien ne l’est pas pour la transmission d’une exploitation laitière, dont la surface est relativement réduite, pour prendre un cas que Stéphane Travert et moi connaissons bien. Dans ce dernier cas, agglomérer le sujet du foncier et celui de l’outil d’exploitation n’a pas grand sens. Je ne pense donc pas qu’on puisse traiter ces différents cas de la même manière en appliquant à la transmission des exploitations agricoles familiales les règles qui valent pour les sociétés commerciales, à savoir le pacte Dutreil. Ce sujet est, selon moi, plus complexe.
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Charles de Courson, rapporteur général
Avant que nous ne votions, je soulignerai que M. Mattei n’a pas tort intellectuellement. S’il faut passer par le montage de sociétés pour bénéficier sans plafond du pacte Dutreil, il est possible de contourner le dispositif actuel. Je vous rappelle cependant que certains veulent plafonner le Dutreil,…
M. Bastien Lachaud
Oui !
M. Charles de Courson, rapporteur général
…par parallélisme et par souci de cohérence. En déposant l’amendement no 2950, j’ai essayé d’être pragmatique : cet amendement, qui a été voté par la commission, tend à faciliter les transmissions qu’elles soient réalisées ou non dans le cadre familial. Vous savez qu’il y a de plus en plus de reprises hors du cadre familial, notamment dans le cadre de reconversions professionnelles. L’amendement no 2950 offre donc l’avantage d’essayer d’embrasser tous les cas de figure, qui sont très variés.
Je reconnais que M. Mattei n’a pas tort ; il pourrait proposer un sous-amendement à l’amendement no 2950 qui porte le plafond à 600 000 euros. Mais il faut être raisonnable, en cela comme en toute chose.
(Les amendements identiques nos 79, 1336, 2202 et 2957 ne sont pas adoptés.)
(Les amendements nos 1249 et 1568, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 990.
(Le vote à main levée n’ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 108
Nombre de suffrages exprimés 107
Majorité absolue 54
Pour l’adoption 52
Contre 55
(L’amendement no 990 n’est pas adopté.)
(L’amendement no 2950 est adopté.)
Mme la présidente
Sur l’amendement n° 234 et les amendements identiques, je suis saisie par le groupe Droite républicaine d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Je suis saisie de plusieurs amendements identiques, nos 234, 283, 586, 826, 982 et 1220.
La parole est à Mme Françoise Buffet, pour soutenir l’amendement no 234.
Mme Françoise Buffet
L’amendement vise à améliorer les conditions de transmission à titre gratuit des exploitations agricoles familiales en alignant les règles de fiscalité appliquées en cas de transmission des terres agricoles sur celles de l’entreprise familiale. Les terres agricoles étant le support nécessaire de l’entreprise, en cas de transmission, un traitement fiscal identique de l’ensemble des éléments de l’exploitation doit permettre la préservation du modèle économique agricole français composé majoritairement d’exploitations familiales.
Mme la présidente
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 283.
Mme Véronique Louwagie
Nous devons effectivement trouver des mécanismes pour favoriser la transmission des exploitations agricoles et pour permettre à un grand nombre d’exploitants de se maintenir. Si rien n’est fait pour faciliter la transmission, nous assisterons à des regroupements qui produiront de très grosses exploitations, et nombre de jeunes agriculteurs n’auront pas la possibilité de s’installer. Tout ce qui favorise la transmission familiale va dans le bon sens, car cela répond à des préoccupations, à des souhaits. Actuellement, la transmission des terres agricoles ne bénéficie pas des mêmes conditions d’exonération que le régime fiscal applicable aux entreprises, ce qui crée de véritables difficultés. L’amendement vise donc à répondre à un besoin des exploitations agricoles.
Mme la présidente
L’amendement no 586 de M. Nicolas Ray est défendu.
La parole est à M. Stéphane Travert, pour soutenir l’amendement no 826.
M. Stéphane Travert
Dans la droite ligne de ce qu’ont expliqué Mmes Buffet et Louwagie, nous avons élaboré dans le projet de loi d’orientation pour la souveraineté agricole et le renouvellement des générations en agriculture (PLOA) plusieurs dispositifs pour faciliter la transmission des exploitations et le renouvellement des générations. Nous avons besoin de traduire dans le PLF ce qui a été défendu dans le texte qui sera prochainement débattue au Sénat.
Enfin, je rappelle l’impérieuse nécessité dans les mois à venir de nous emparer de la question foncière grâce à une mission parlementaire transpartisane.
Mme la présidente
La parole est à M. Benjamin Dirx, pour soutenir l’amendement no 982.
M. Benjamin Dirx
Ces amendements identiques ont été adoptés en commission. Il est très important de pouvoir transmettre les terres agricoles, notamment les terres viticoles. Actuellement, parce que la fiscalité est trop importante, certains domaines sont rachetés par de gros industriels, que certains, sur les bancs d’en face, n’aiment pas – ce n’est pas le modèle que nous voulons – ou par des puissances étrangères. Nous devons donc à tout prix permettre la transmission de ces exploitations.
Mme la présidente
La parole est à M. Corentin Le Fur, pour soutenir l’amendement no 1220.
M. Corentin Le Fur
Il s’agit d’un amendement essentiel. La transmission des exploitations est un enjeu fondamental, car la moitié des exploitants agricoles partiront à la retraite dans les dix prochaines années. Nous devons donc défendre un modèle d’exploitation familiale, favoriser la transmission et inciter les jeunes à s’installer en agriculture.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
Cette mesure est cohérente avec le Dutreil non plafonné et les systèmes qui maintiennent un plafond même réévalué – on a entendu ce que disait Jean-Paul Mattei. Le texte du Gouvernement prévoit une hausse du seuil d’exonération à 600 000 euros pour la transmission de terres louées à bail à long terme à de jeunes agriculteurs, désormais sans cibler ce public puisque vous avez adopté mon amendement. Donnons-nous le temps d’évaluer cette mesure et le pacte Dutreil, dont le coût est très mal chiffré.
Il semble que les plafonds de 500 000 et 600 000 euros soient déjà largement suffisants pour couvrir la majorité des situations. L’extension proposée risque de créer des effets d’aubaine, pour quelques exploitations seulement.
La commission a adopté ces amendements identiques. Je plaide simplement pour la modération, car nous améliorerons la progressivité au cours des prochaines années.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Avis défavorable pour les raisons évoquées précédemment.
J’en profite pour dire que la demande du Parlement est toujours prioritaire pour le Gouvernement : monsieur Potier, le rapport que vous avez demandé est en ligne. (M. Dominique Potier applaudit.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Manon Meunier.
Mme Manon Meunier
C’est un dialogue hypocrite : vous dites qu’il faut faciliter la transmission familiale des fermes et des petites exploitations à taille humaine, alors que les amendements précédents visaient à faire sauter tous les plafonds d’exonération, donc à faciliter les plus grosses structures et l’agrandissement des exploitations. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)
Or c’est à cette échelle que la transmission est la plus difficile : les jeunes ne s’y retrouvent plus, parce qu’il faut des investissements monstrueux et que seuls les plus gros acteurs peuvent s’emparer des grosses fermes et des grosses exonérations. Un peu de cohérence, donc. Aidons les agriculteurs, définissons des plafonds et des échelles, afin de préserver les exploitations familiales, mais arrêtons de faire sauter les plafonds en parallèle. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente
La parole est à M. Benjamin Dirx.
M. Benjamin Dirx
C’est exactement l’inverse qui se produit. Je prends l’exemple du dernier domaine vendu en Côte-d’Or : d’une superficie de 1,3 hectare, il est parti pour 15 millions d’euros. L’exploitant ne voulait pas cet argent : il souhaitait seulement conserver les terres sur lesquelles il avait travaillé, et son père et son grand-père avant lui. Il n’a pas pu empêcher ce qui s’est produit. L’acheteur, c’est Bernard Arnault, président-directeur général de LVMH – que vous dénoncez tous les jours. En ne votant pas ces amendements, vous créez Bernard Arnault. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Nous ne pouvons pas déplorer collectivement dans l’hémicycle que nos exploitants agricoles ne puissent pas vivre de leur production, et dire à ceux qui finissent par réussir que nous allons tout leur reprendre fiscalement ! Dans tous les cas, l’agriculteur ne peut pas vivre : ce n’est pas normal.
M. Christophe Bex
Qu’est-ce qu’une terre agricole de 1,3 hectare ?
Mme la présidente
Il y a déjà eu un pour et un contre mais je fais une exception : allez-y monsieur Le Fur !
M. Corentin Le Fur
Ces amendements reprennent les arguments de la gauche, je vous invite donc à les voter. Nous devons défendre l’installation et la transmission du modèle familial, et éviter le regroupement de fermes gigantesques.
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Charles de Courson, rapporteur général
Permettez-moi de clarifier le débat. Actuellement, il y a une exonération de 75 % jusqu’à 600 000 euros, et au-delà, sans plafond, de 50 %. Si nous votons pour la suppression du plafond de 600 000 euros, l’exonération s’élèvera à 75 % au-dessus de 600 000 euros au lieu de 50 % – on ne part pas de zéro.
M. Benjamin Dirx
Les 25 % restant, il faudra les payer.
Mme la présidente
Je mets aux voix les amendements identiques nos 234, 283, 586, 826, 982 et 1220.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 129
Nombre de suffrages exprimés 96
Majorité absolue 49
Pour l’adoption 86
Contre 10
(Les amendements identiques nos 234, 283, 586, 826, 982 et 1220 sont adoptés.)
Mme la présidente
Le Gouvernement lève-t-il le gage ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Oui.
Mme la présidente
L’amendement no 85 de Mme Louise Morel est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
À titre personnel, je donne un avis défavorable à cet amendement qui n’a pas été examiné en commission des finances. Il tend à créer une donation-partage agricole permettant d’exonérer de 50 % les outils de travail et d’étaler le versement des indemnités par l’héritier repreneur aux autres héritiers. Le pacte Dutreil permet déjà une exonération de 75 % des droits de mutation à titre gratuit (DMTG) pour la transmission des entreprises agricoles, qui peut se cumuler avec une donation-partage avec soulte. Demandez à M. Mattei, il vous expliquera comment faire ce montage.
Le seul apport de cet amendement est la possibilité pour l’héritier de différer le versement d’indemnités – je ne pense pas qu’il faille revoir le code général des impôts pour envisager ce type d’arrangement.
(L’amendement no 85, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)
Mme la présidente
L’amendement no 86 de Mme Louise Morel est également défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
Avis défavorable, pour les mêmes raisons.
(L’amendement no 86, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je suis saisie de cinq amendements, nos 469, 858, 2539, 3377 et 1783, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 469, 858, 2539 et 3377 sont identiques.
L’amendement no 469 de M. Emmanuel Maurel est défendu.
La parole est à M. Mickaël Bouloux, pour soutenir l’amendement no 858.
M. Mickaël Bouloux
Cet amendement commun au Nouveau Front populaire tend à rétablir la progressivité de l’impôt sur le capital en supprimant la flat tax. Face aux inégalités croissantes, il est temps de redistribuer équitablement les richesses. Loin de soutenir l’économie réelle, la flat tax détourne les bénéfices vers les dividendes, privant les entreprises de moyens pour investir. L’amendement vise à corriger une injustice fiscale et à orienter les profits vers l’investissement productif, afin de financer nos services publics et de renforcer la solidarité nationale.
Mme la présidente
La parole est à M. Aurélien Le Coq, pour soutenir l’amendement no 2539.
M. Aurélien Le Coq
C’est le même amendement. À de multiples reprises, il a été démontré que la flat tax a uniquement servi à augmenter les dividendes. Elle n’a fait progresser ni l’investissement productif – c’est l’inverse –, ni l’emploi, ni les salaires ; en revanche, l’année de son entrée en vigueur, les dividendes ont augmenté de 60 %.
Depuis, cette tendance se poursuit : 107 milliards ont été versés en 2023, et 54 milliards au deuxième trimestre de 2024, soit une hausse de 7 %. La France représente un quart des dividendes en Europe, alors que les salariés sont en grande difficulté, que notre pays compte 11 millions de pauvres et que la moitié de la population a du mal à se nourrir. Il est grand temps de retrouver un peu de justice fiscale. C’est notre principale mission dans ce débat budgétaire. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Cyrielle Chatelain, pour soutenir l’amendement no 3377.
Mme Cyrielle Chatelain
Cet amendement identique du Nouveau Front populaire vise à supprimer le prélèvement forfaitaire unique (PFU), afin de permettre la progressivité de l’impôt sur le capital. D’après France Stratégie, l’année de l’instauration du PFU, les dividendes déclarés par les particuliers ont augmenté de 60 %. La France garde ainsi sa place : elle est l’un des États où l’on verse le plus de dividendes. À elle seule, elle représente désormais plus du quart des dividendes distribués en Europe. Résultat : un dixième des citoyens de ce pays détient près de la moitié du patrimoine total. Ça n’est pas acceptable. L’augmentation des marges et l’inflation qui en découlent ont entraîné des milliers de personnes dans la pauvreté. Cela doit cesser ; retrouvons un peu de justice fiscale. (M. Emmanuel Duplessy applaudit.)
Mme la présidente
L’amendement no 1783 de M. le président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
Avis défavorable de la commission. Ne reprenons pas pour la énième fois le débat sur le PFU.
M. Philippe Brun
Ce n’est pas notre faute ! La séance a placé ces amendements ici !
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Même avis.
Mme la présidente
La parole est à M. Mathieu Lefèvre. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
M. Mathieu Lefèvre
Je ne résiste pas à l’envie de prolonger ce débat important. Au début de la discussion budgétaire étaient évoqués les superprofits ; ensuite, les profits ; désormais, si on vous suit, il n’y aura plus que des déficits et des miettes à taxer.
M. Pierre Pribetich
C’est vous, les déficits !
M. Mathieu Lefèvre
À force de proposer des amendements de ce type, vous découragez la création de richesse. Essayez plutôt de vous réjouir de la distribution de dividendes et de richesses, au lieu de toujours la critiquer. Si les gros meurent, les petits vont aussi mourir. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP et sur quelques bancs du groupe SOC.)
M. Nicolas Sansu
« Quand les gros maigrissent, les maigres meurent ! » Il y avait longtemps qu’on ne l’avait pas entendu celle-là !
Mme la présidente
La parole est à M. Matthias Renault.
M. Matthias Renault
Nous voterons contre cet amendement, car nous avons notre propre disposition sur le sujet : nous souhaitons appliquer le PFU aux foyers fiscaux gagnant moins de 60 000 euros de revenus éligibles par an. En effet, certains dirigeants de très petites, petites et moyennes entreprises (TPE et PME) se rémunèrent en dividendes et ne se versent pas de salaire, sans que cela fasse d’eux des hyper-riches.
Un député du groupe RN
Eh oui !
M. Matthias Renault
N’ayons donc pas une lecture idéologique du PFU : il y a dividende et dividende. Certains relèvent de la rémunération du capital, voire de la spéculation ; d’autres rémunèrent les petits chefs d’entreprise. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – M. Philippe Juvin applaudit également.)
M. Philippe Juvin
Tout à fait !
Mme la présidente
La parole est à M. le président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.
M. Éric Coquerel, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
Monsieur Lefèvre, en effet, sur la forme, l’ordre d’appel des amendements nous amène à reprendre un débat que nous avons déjà eu. Il reste que, sur le fond, rien ne justifie que les revenus du capital soient moins imposés que les revenus du travail.
M. Mathieu Lefèvre
Cela dépend de la nature des revenus !
M. Éric Coquerel, président de la commission des finances
Autrement, vous envoyez inévitablement le message que tous ne méritent pas d’être taxés et imposés de la même façon. Vous organisez le transfert des revenus du travail vers les revenus du capital, afin d’échapper en partie à l’impôt.
Cette politique, qui n’est ni morale ni normale, d’un point de vue économique, rejoint ce que vous défendez depuis des années : favoriser à outrance les revenus du capital pour les attirer en France et créer de l’emploi. Finalement, cela n’a rien créé du tout. Revenons donc à la logique et cessons de faire baisser les dépenses de l’État. Le PFU, la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) et, accessoirement, l’affaiblissement de l’exit tax, expliquent au premier chef l’ampleur du déficit actuel.
Mme la présidente
La parole est à Mme Cyrielle Chatelain.
Mme Cyrielle Chatelain
Nous reprenons ce débat sur la concentration des richesses et du patrimoine, parce qu’il est important. L’accumulation du patrimoine s’accroît dans notre société. Ça n’est pas acceptable !
Le « petit patron » évoqué par notre collègue du Rassemblement national est l’arbre qui cache la forêt. Il ne vous sert qu’à protéger les milliardaires. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP. – M. Emmanuel Duplessy applaudit également.)
Il y a aussi la question de l’égalité : je ne crois pas que le travail du salarié d’une entreprise vaille moins que celui du petit patron. Il est normal que le revenu du chef d’entreprise, petite ou grande, soit imposé de la même manière que celui des travailleurs. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
C’est comme cela que l’on défend la valeur travail, en reconnaissant que le travail du salarié, quelle que soit sa qualification, vaut autant que celui du patron.
M. Bastien Lachaud
Voire plus !
Mme Cyrielle Chatelain
C’est pour cela qu’il faut voter ces amendements. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EcoS et LFI-NFP.)
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre.
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Le débat a déjà eu lieu à de multiples reprises, mais monsieur le président de la commission des finances, à un moment, il faudra arrêter de dire que le PFU a apporté moins de recettes fiscales à l’État. C’est faux ! (Exclamations sur quelques bancs du groupe EcoS.)
Vous pouvez dire « si ! » autant que vous le voulez, si vous regardez le produit fiscal de la flat tax depuis sa création, il est en croissance.
M. Éric Coquerel, président de la commission des finances
C’est normal !
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Si c’est normal, vous reconnaissez que ce produit augmente. Très bien ! Alors arrêtez de dire que le PFU fait perdre des recettes à l’État. C’est faux !
Deuxième point : la mobilité du capital n’est pas celle du travail. À un moment, vous devrez aussi le comprendre s’agissant des différences de fiscalité.
Ce n’est pas la France seule, dans sa bulle, qui a décidé la flat tax en 2017. Elle s’est mise en accord avec une compétition d’abord européenne, puis mondiale, et qui s’internationalise de plus en plus.
On peut considérer que le capital ne sait pas dépasser les frontières, que tout cela n’est qu’un vase clos, qu’il suffit de fixer des taux pour prélever un impôt dans des poches qui ne bougent pas. On a tout à fait le droit de le penser, mais, dans le monde qui se dessine, avec ces compétitions économiques de continent à continent, le résultat est que la France n’aura plus son mot à dire. Personne ne nous attend là-dessus !
Si vous ne voulez pas de capital pour investir dans nos industries et renforcer l’investissement productif dans notre pays, continuez à le considérer comme totalement immobile ! (M. Mathieu Lefèvre applaudit.)
(Les amendements identiques nos 469, 858, 2539 et 3377 ne sont pas adoptés.)
(L’amendement no 1783 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Les amendements identiques nos 686 de Mme Nathalie Colin-Oesterlé et 849 de Mme Christelle D’Intorni sont défendus.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
Avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Même avis.
Mme la présidente
La parole est à Mme Véronique Louwagie.
Mme Véronique Louwagie
Lors de l’examen de l’un de mes amendements en commission, le rapporteur général m’a indiqué que l’article 19, centré sur les entreprises agricoles, prévoit la prorogation de mesures favorables à la transmission pour l’ensemble des entreprises, ce qui m’avait échappé.
Je suis étonnée qu’on cherche à raccourcir la durée d’application d’un de ces dispositifs d’autant que certains amendements viennent des bancs voisins des nôtres. Pourquoi vouloir faire cesser en 2027 ce qui était prévu jusqu’en 2031 ? Il nous faut au contraire soutenir le monde économique et aider à la transmission des entreprises, qui se prépare très longtemps à l’avance.
M. Mathieu Lefèvre
Tout à fait !
Mme Véronique Louwagie
Bien entendu, nous voterons contre les amendements. (Exclamations sur quelques bancs du groupe RN.)
Mme la présidente
La parole est à M. Mathieu Lefèvre.
M. Mathieu Lefèvre