Première séance du mardi 05 novembre 2024
- Présidence de Mme Yaël Braun-Pivet
- 1. Hommage aux victimes des inondations en Espagne
- 2. Questions au Gouvernement
- Fusillade en Ardèche
- Politique industrielle
- Politique judiciaire
- Avenir de l’industrie automobile
- Relations entre l’État et les collectivités locales
- Inondations dans la région de Valence
- Propos du ministre délégué chargé de la sécurité du quotidien
- Lutte contre le narcotrafic
- Crise sociale en Martinique
- Plan social chez Michelin
- Enseignements à tirer des inondations en Espagne
- Situation en Nouvelle-Calédonie
- Contrat dépendance équitable
- Voyage d’un ministre israélien en France
- Groupe Atos
- Plans sociaux chez Michelin et Auchan
- Fiscalité des paris hippiques
- Santé mentale des jeunes
- 3. Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025
- Troisième partie (suite)
- Rappels au règlement
- Après l’article 17
- Amendement no 1866
- M. Yannick Neuder, rapporteur général de la commission des affaires sociales
- Mme Geneviève Darrieussecq, ministre de la santé et de l’accès aux soins
- Amendements nos 2320 et 2319
- Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée des personnes en situation de handicap
- Amendements nos 2438, 2445, 2167, 2286, 1115, 2232, 2318, 1848, 2350 et 1092
- Rappel au règlement
- Après l’article 17 (suite)
- Suspension et reprise de la séance
- Article 18
- Rappels au règlement
- Article 18 (suite)
- Après l’article 18
- Amendement no 1103
- Troisième partie (suite)
- 4. Ordre du jour de la prochaine séance
Présidence de Mme Yaël Braun-Pivet
Mme la présidente
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
1. Hommage aux victimes des inondations en Espagne
Mme la présidente
Dans la nuit de mardi à mercredi, la tempête Dana a causé des inondations meurtrières qui ont dévasté plusieurs régions du Sud-Est de l’Espagne, en particulier dans la communauté de Valence. Dans certaines localités, il est tombé l’équivalent d’un an de pluie en une seule heure, entraînant ce que la presse espagnole a qualifié d’inondation du siècle.
Le dernier bilan, qui fait état de 217 victimes, est tragique, effroyable et il pourrait encore s’alourdir alors que les recherches des très nombreuses personnes disparues se poursuivent. Aujourd’hui même, de nouvelles pluies torrentielles s’abattent sur les régions catalane et valencienne, exacerbant la détresse des populations.
Cette catastrophe climatique, qui s’ajoute aux inondations ayant déjà, cette année, endeuillé la France mais aussi l’Allemagne et l’Europe centrale, nous rappelle implacablement que le dérèglement climatique n’est plus une menace lointaine. Ses effets se font déjà dévastateurs.
En cette heure de deuil, la France est totalement solidaire du peuple frère d’Espagne. Nous adressons notre soutien aux populations sinistrées, aux forces de secours mobilisées pour leur venir en aide, ainsi qu’à notre personnel diplomatique qui demeure en alerte, heure par heure, pour soutenir nos compatriotes sur place.
Au nom de la représentation nationale, j’exprime nos condoléances les plus sincères aux familles endeuillées et je vous invite à observer une minute de silence. (Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement se lèvent et observent une minute de silence.)
La parole est à M. le Premier ministre.
M. Michel Barnier, Premier ministre
Avec votre permission, madame la présidente, je souhaite exprimer l’émotion du Gouvernement et associer ce dernier à l’hommage que l’Assemblée nationale vient de rendre aux très, trop nombreuses victimes de ces catastrophes à répétition. Je ne sais pas s’il s’agit des « catastrophes du siècle », mais elles se reproduisent et s’aggravent. Elles ont touché une grande partie de l’Espagne, la région de Valence en particulier. Nombre de nos compatriotes y vivent et sont ici représentés par votre collègue Stéphane Vojetta.
En ce moment très grave, au-delà de l’émotion, de la solidarité exprimée immédiatement par le chef de l’État et par moi-même au président du conseil des ministres d’Espagne, je rappellerai que, dans beaucoup de nos circonscriptions, dans de nombreuses régions, ces catastrophes – qui ont causé tant de morts – résultent de la conjugaison d’accidents climatiques – qui ne sont pas nouveaux – avec le réchauffement climatique, ce qui explique leur multiplication et leur intensification.
Nous n’avons aucune leçon à donner aux autres mais des leçons à tirer pour nous-mêmes en matière de prévention, de réparation, d’alerte… Je pense, depuis tout le temps que je suis engagé sur ces questions, que la prévention coûte moins cher que la réparation et qu’une réparation préparée, organisée coûte moins cher et se révèle plus efficace qu’une réparation improvisée. Voilà pourquoi – et nous en avons longuement discuté, au cours du dernier séminaire gouvernemental, avec le ministre de l’intérieur et la ministre de la transition écologique –, avec le concours des préfets et des élus locaux – j’étais il y a encore quelques jours à Givors où j’ai pu mesurer leur rôle de première ligne, un rôle majeur de solidarité et d’action –, nous allons multiplier, en métropole et en outre-mer, les alertes, les exercices de prévention et de réparation.
De cette immense catastrophe qui touche le peuple frère d’Espagne nous avons des leçons à tirer pour notre pays. (Applaudissements.)
2. Questions au Gouvernement
Mme la présidente
L’ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.
Fusillade en Ardèche
Mme la présidente
La parole est à M. Vincent Trébuchet.
M. Vincent Trébuchet
« Je sors ce soir, ne ferme pas la porte. À demain, je t’aime. Bisous maman. » Nicolas n’a jamais revu sa mère. Il a pris une balle dans la tête, jeudi soir, devant la boîte de nuit Le Seven, à Saint-Péray, en Ardèche, dans ma circonscription. Il a rejoint Thomas, non pas sur la pelouse du Rugby club romanais péageois, mais dans la longue liste de nos enfants morts, sacrifiés sur l’autel de décennies de lâcheté politique.
Faits divers, me direz-vous ? C’est faire fi des trois tués au couteau, des cinq tués par balles, des quatre blessés à la hache, en France, lors de cette Toussaint « Orange mécanique ».
Le meurtre de Nicolas n’est pas une coïncidence. Il faut être aveugle pour ne pas voir que l’arme qui a l’a tué provient du narcotrafic, lequel prend le pouvoir que la République a laissé vacant. Il faut être aveugle pour nier la responsabilité de l’immigration de masse quand le principal suspect du meurtre de Nicolas est étranger : Hassan Youssef Dhabi. Il faut être aveugle ou bien il faut être otage, otage de la bien-pensance et de magouilles électorales inavouables.
Monsieur Daragon, depuis 2014, qu’avez-vous fait comme maire de Valence, devenue plaque tournante du trafic de drogue dans la région ? (Murmures sur les bancs du groupe DR.) Monsieur Daragon, pourquoi, le soir même du meurtre de Nicolas, avoir rejeté d’un revers de main les propositions de loi du Rassemblement national, soutenues par l’UDR, visant à rétablir les peines planchers et la double peine pour les criminels étrangers ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UDR et RN. – Exclamations sur les bancs du groupe DR.)
M. Thibault Bazin
Scandaleux, indigne, indécent !
M. Vincent Trébuchet
Est-ce par solidarité gouvernementale avec M. Migaud qui abandonne la construction des 18 000 places de prison supplémentaires promises ?
Monsieur Retailleau, cela ne sert à rien de parler de mexicanisation de la France quand on affaiblit l’État régalien.
M. Vincent Descoeur
Indécent et honteux !
M. Vincent Trébuchet
Des mots, toujours des mots.
Aussi, monsieur le Premier ministre, je vous serais reconnaissant de garder le silence à l’issue de mon intervention. (Protestations sur les bancs du groupe DR.)
M. Philippe Gosselin
Vous êtes indigne !
M. Vincent Trébuchet
Le silence du deuil, mais surtout le silence assourdissant de votre inaction. À défaut d’avoir su protéger Nicolas, respectez la volonté de sa famille : taisez-vous et… (Après que la présidente a coupé le micro de l’orateur, dont le temps de parole est écoulé, applaudissements sur les bancs des groupes UDR et RN, dont la plupart des députés se lèvent.)
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre de l’intérieur.
M. Bruno Retailleau, ministre de l’intérieur
Vous nous appelez au silence en même temps que vous nous posez une question – drôle de façon de procéder.
M. Philippe Gosselin
Indigne !
M. Bruno Retailleau, ministre
Sans doute ce meurtre vous touche-t-il, mais il nous touche tous et on n’a pas le droit dans ces circonstances de faire de la polémique. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, DR et Dem. – Mme Colette Capdevielle applaudit aussi.) En effet : un homme est mort.
Oui, un homme est mort parce que, dans la nuit du 1er au 2 novembre, est survenu le drame absolu : Nicolas a été touché à la tête par une balle et, le surlendemain, il devait décéder. Oui, vous avez raison : ce n’est pas un fait divers. Quand les faits se répètent, ils deviennent des faits de société et on doit bien entendu les interpréter comme tels.
Vous avez souligné qu’un an après, jour pour jour, il a rejoint son compagnon de sport, Thomas Perotto, membre du même club de rugby que lui.
J’ai eu hier sa maman, impressionnante de dignité, dans sa souffrance, dans sa douleur. Je l’ai assurée de la sympathie du Gouvernement (Exclamations sur les bancs des groupes RN et UDR)…
M. Emeric Salmon
C’est insuffisant !
M. Bruno Retailleau, ministre
…et lui ai dit que nous étions disponibles en cas de besoin.
À l’occasion de ce drame, nos services d’enquête ont montré une efficacité dont je les félicite. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR et sur quelques bancs du groupe EPR.)
M. Pierre Cordier
Très bien !
M. Bruno Retailleau, ministre
En moins de quarante-huit heures, ils ont arrêté deux mis en cause : vraisemblablement le conducteur et l’auteur du coup. Bravo à ces policiers ! (Exclamations sur les bancs des groupes RN et UDR.) L’enquête devra déterminer les mobiles du crime. Sans doute le narcotrafic, bien sûr, y a sa part : on voit bien que, désormais, aucun territoire n’est préservé, avec un rajeunissement de ceux qui sont tués et un rajeunissement de ceux qui tuent. Ne doutez pas une seule seconde de notre détermination dans la lutte contre le narcobanditisme. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR et sur quelques bancs du groupe EPR.)
Politique industrielle
Mme la présidente
La parole est à M. Charles Fournier.
M. Charles Fournier
Bruno Le Maire, en toute modestie, déclarait le 29 mars dernier : « La réindustrialisation est un des plus grands succès économiques des sept ans que nous avons passés au pouvoir. » Mais de quel succès parle-t-on ?
Il y a la communication présidentielle et gouvernementale : « La dynamique de réindustrialisation se poursuit. […] [Nous ferons] de l’industrie le cœur battant de nos territoires », avez-vous déclaré, monsieur le ministre délégué chargé de l’industrie. Et il y a la réalité : aujourd’hui, de nouveau, on ferme plus d’usines en France qu’on n’en ouvre.
M. Emeric Salmon
À cause des écolos !
M. Charles Fournier
Michelin a ainsi annoncé ce matin la fermeture de ses deux sites de Cholet et de Vannes : 1 254 salariés. À Nantes et à Saint-Nazaire, General Electric supprime 360 emplois ; Sanofi, dans l’Essonne, 330 ; Vencorex, près de Grenoble, probablement 500 ; Stellantis, à Poissy, 250 ; Thales, à Toulouse, va également en supprimer.
C’est aussi la maltraitance des sous-traitants : MA France à Aulnay-sous-Bois, Imperial Wheels dans l’Indre, Valeo dans la Sarthe… et la liste n’est pas terminée. (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS, LFI-NFP et SOC.) Tous les secteurs sont concernés, même les plus les plus rentables.
En mai dernier, on a recensé 132 plans de licenciements depuis septembre 2023, soit entre 60 000 et 90 000 emplois menacés. Autant de vies brisées et de cicatrices profondes pour nos territoires. Les salariés sont toujours les variables d’ajustement de la course aux profits pour les actionnaires.
Face à cela, il n’y a ni impuissance ni fatalité. Cette situation doit changer. En tant que puissance publique, votre responsabilité est en jeu. Nous avons besoin d’un État stratège. Or vous donnez le sentiment qu’il n’y a pas de pilote ou alors qu’il y en a un qui abdique systématiquement. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe EcoS.)
Ma question est simple : qu’allez-vous dire aux salariés de Michelin et de toutes les usines menacées ? Allez-vous leur dire que votre politique industrielle fonctionne à merveille ? Ou bien allez-vous enfin changer de cap ? (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS, LFI-NFP et sur de nombreux bancs des groupes SOC et GDR.)
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre délégué chargé de l’industrie.
M. Marc Ferracci, ministre délégué chargé de l’industrie
À la suite des annonces faites par Michelin ce matin, je voudrais tout d’abord, au nom du Gouvernement et plus spécialement du ministre de l’économie, des finances et de l’industrie, témoigner de notre sympathie (Exclamations sur plusieurs bancs des groupes RN, LFI-NFP et EcoS) pour les salariés concernés.
M. Emeric Salmon
C’est insuffisant !
M. Marc Ferracci, ministre délégué
Sachez surtout que le Gouvernement suivra avec une grande attention la suite qui sera donnée à ces plans.
J’ai échangé par téléphone avec les élus des territoires concernés…
M. Emeric Salmon
Comme Retailleau !
M. Marc Ferracci, ministre délégué
…et mes équipes les ont informés de la suite des opérations.
L’accompagnement social des salariés devra être exemplaire. C’est le message que nous avons transmis à la direction de Michelin.
Nous emploierons toute notre énergie à la recherche d’un repreneur afin de revitaliser les territoires. Aucun salarié ne sera laissé sur le bord du chemin.
Nous utiliserons ce faisant la méthode que nous appliquons déjà à l’ensemble des dossiers d’entreprises en difficulté dont nous sommes saisis. Pour ce faire, nous nous appuyons sur l’ensemble des services de l’État, notamment le comité interministériel de restructuration industrielle.
Tous mes échanges avec les élus sont nourris par l’esprit d’un travail collectif, car il est la solution pour résoudre les problèmes de restructuration.
M. Laurent Jacobelli
Cela ne veut rien dire !
M. Marc Ferracci, ministre délégué
La réindustrialisation de notre pays reste un objectif. Vous avez évoqué les fermetures de site, mais l’observatoire de l’emploi industriel et des fermetures de site du ministère de l’économie indique que le cap en matière d’ouvertures nettes d’usines en France est maintenu.
M. Nicolas Meizonnet
Que c’est mauvais !
M. Marc Ferracci, ministre délégué
Nous mobiliserons toute notre énergie à protéger les emplois et les territoires. Nous maintiendrons le cap.
Mme la présidente
La parole est à M. Charles Fournier.
M. Charles Fournier
Finalement, on ne change pas une équipe qui perd. Tout continue comme avant. Vos propos réjouiront sûrement les salariés. (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS et SOC.)
M. Julien Guibert
Il n’a pas tort !
Politique judiciaire
Mme la présidente
La parole est à M. Michaël Taverne.
M. Michaël Taverne
Les tentatives d’homicide ont progressé de 11 %, les violences sexuelles hors cadre familial de 7 %, les vols à main armée de 6 %, les cambriolages de 4 %,…
M. Hervé Berville
Et les emplois fictifs au RN de 50 % !
M. Michaël Taverne
…et on ne compte plus les fusillades mortelles qui ont eu lieu ces derniers jours à Fort-de-France, à Poitiers, à Valence ou encore à Rennes, où un petit garçon de 5 ans est entre la vie et la mort. Et que dire des attaques au couteau ou à la hache ?
M. Hervé Berville
Rendez l’argent !
M. Michaël Taverne
Tout cela démontre l’ensauvagement de la France, dénoncé depuis plusieurs années par Marine Le Pen.
M. François Cormier-Bouligeon
Elle est au tribunal, Marine Le Pen !
M. Michaël Taverne
La délinquance a continué de progresser entre juillet 2023 et juin 2024. Certes, ce n’est pas votre faute : vous héritez d’un bilan pitoyable.
Cela étant, à l’occasion de notre niche parlementaire, vous vous êtes opposés à l’expulsion des délinquants étrangers et au rétablissement des peines planchers. Vous êtes dans la continuité politique de vos prédécesseurs. L’ancien ministre de l’intérieur a quant à lui démantelé la police judiciaire au lieu des réseaux criminels.
« Nous sommes épuisés » ; « le bateau sombre » ; « la procédure pénale va dans le sens des mis en cause, et non plus des victimes » ; « par idéologie, on livre notre pays au banditisme et à l’islamisme, lesquels exploitent nos failles juridiques » : ce sont les propos de policiers et gendarmes expérimentés et courageux, qui ont toujours fait leur travail du mieux possible, malgré les démissions et la résignation provoquées par des conditions toujours plus difficiles.
Cela fait des années qu’avec Marine Le Pen (« Ah ! » sur les bancs des groupes EPR et Dem)…
M. François Cormier-Bouligeon
La prévenue Le Pen !
Mme Sandrine Rousseau
Où est-elle justement ?
M. Michaël Taverne
…et Jordan Bardella, nous alertons au sujet des conséquences des politiques néfastes et déconnectées menées par les différents gouvernements. Malgré nos propositions de bon sens pour assurer la sécurité des Français, nous avons été caricaturés, notamment à cause du lien entre immigration et insécurité que vous êtes désormais nombreux à accepter. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
À propos de l’idéologie islamiste, du réarmement moral des forces de l’ordre, du contrôle aux frontières par lesquelles passe la drogue,…
M. Hervé Berville
Un éclair de lucidité !
M. Michaël Taverne
…nous avons eu raison avant tout le monde – c’est le défaut du RN.
M. Fabien Di Filippo
Pourtant, vous avez changé d’avis quant à l’Europe et l’euro !
M. Michaël Taverne
Notre maison, la France, brûle, mais les gouvernements regardent ailleurs, par ignorance et bien-pensance.
Quelle sera la stratégie judiciaire au service de la sécurité des Français ? (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
Mme la présidente
La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Didier Migaud, garde des sceaux, ministre de la justice
En tant que ministre de la justice, je veillerai à ce qu’une réponse ferme soit opposée à celles et ceux qui enfreignent la loi.
Mme Hanane Mansouri
C’est bien !
M. Didier Migaud, garde des sceaux
La délinquance que vous évoquez est inacceptable. Il y a plusieurs façons de la combattre, mais tout ce qui permet de la prévenir est utile. La justice doit protéger, sanctionner et contribuer à la réparation.
Je remercie M. le Premier ministre d’avoir accepté de revoir à la hausse le budget de la justice, afin de la doter des moyens suffisants pour qu’elle soit rendue dans les délais les plus raisonnables. Je souhaite par ailleurs travailler au raccourcissement des délais entre le prononcé de la peine et son exécution.
Mme Émilie Bonnivard
Très bien !
M. Didier Migaud, garde des sceaux
Avec Bruno Retailleau, ministre de l’intérieur, nous souhaitons condamner le plus fermement possible le narcotrafic et ses criminels, soyez-en assuré. Pour combattre ce fléau, nous souhaitons mieux organiser la justice.
Mme Émilie Bonnivard
Très bien !
M. Pierre Cordier
Ce ministre est de droite !
M. Didier Migaud, garde des sceaux
Sous l’autorité du Premier ministre, nous présenterons vendredi à Marseille un certain nombre de mesures immédiatement opérationnelles, en attendant une loi pour muscler l’État dans sa lutte contre ce fléau. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et DR.)
M. Thibault Bazin
Ce ministre a du Retailleau en lui…
Avenir de l’industrie automobile
Mme la présidente
La parole est à Mme Marietta Karamanli.
Mme Marietta Karamanli
La fermeture de plusieurs sites industriels d’équipementiers automobiles français, ou sa menace, est annoncée. Plusieurs sites de l’entreprise Valéo sont visés : dans la Sarthe, dans les Yvelines, dans l’Isère et dans le Calvados. Ce sont les emplois de plus de 1 500 salariés qui sont menacés, sans compter ceux de plusieurs milliers de salariés chez des prestataires.
Pour Michelin, ce sont les sites de Cholet et de Vannes, lesquels emploient plus de 1 250 personnes, qui fermeront d’ici 2026.
Nous dressons plusieurs constats. D’abord, les investissements à réaliser pour que les grands équipementiers traditionnels passent à l’électrique total et à l’hybride sont considérables. Ensuite, la concurrence systémique, notamment chinoise, explique la forte baisse des ventes d’automobiles. Enfin, les entreprises sont tentées d’investir des marchés où les coûts sont plus bas ou qui sont plus proches des sites de production.
Alors que l’Europe et la France misent sur la mobilité électrique pour sortir de la crise, notre groupe Socialistes et apparentés s’interroge sur trois points.
Quelles initiatives le Gouvernement entend-il prendre pour trouver des repreneurs et assurer effectivement une continuité d’activité lorsqu’elle est possible ?
Quel accompagnement social et local l’État mettra-t-il en place au plus proche des sites afin de conserver les compétences, qualifications et expériences des salariés ?
Quelle politique le Gouvernement entend-il mener pour clarifier les engagements des constructeurs, alors que le secteur bénéficie d’aides ?
Nous ne nous satisferons pas de « sympathie ». Nous voulons des réponses concrètes. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, EcoS et GDR.)
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre délégué chargé de l’industrie.
M. Hervé de Lépinau
Il va se surpasser !
M. Marc Ferracci, ministre délégué chargé de l’industrie
La situation de notre filière automobile est préoccupante.
Mme Marie-Christine Dalloz
C’est d’abord votre responsabilité !
M. Marc Ferracci, ministre délégué
C’est le cas dans la plupart des pays européens. En Allemagne, Volkswagen a annoncé la fermeture de trois grandes usines.
Face à cette situation, la première des réponses d’urgence est d’examiner les restructurations avec l’exemplarité et les moyens nécessaires.
Ces dernières heures, nous avons discuté avec l’ensemble des élus concernés et avec la direction des sites Michelin de Cholet et de Vannes. Nous réunirons tout le monde dans les prochaines heures pour discuter de la reprise des sites et pour envisager toutes les options.
Avec Antoine Armand, ministre de l’économie, nous avons exigé que les engagements pris par Michelin dans l’accompagnement des salariés soient extrêmement puissants et ne laissent personne sur le bord du chemin.
Concernant la filière automobile, les réponses ne peuvent pas seulement se faire à l’échelle française. Elles doivent concerner l’ensemble de la filière – constructeurs et équipementiers – et doivent être formulées à l’échelle européenne.
Je reviens de Berlin. Lors de la discussion que j’y ai eue avec mon homologue allemand, nous avons discuté d’un plan d’urgence européen en soutien de la filière automobile – les constructeurs, l’ensemble des sous-traitants et les équipementiers. Nous défendons un tel plan avec Antoine Armand, sous l’autorité du Premier ministre.
Notre réponse doit s’appuyer sur le soutien à la demande, en particulier pour les véhicules électriques.
M. Fabien Di Filippo
Que devient Nicolas Hulot ?
M. Marc Ferracci, ministre délégué
Nous devons être moins naïfs vis-à-vis de nos concurrents américains et chinois.
Dans les prochaines semaines, nous nous impliquerons donc au niveau européen pour formuler des propositions visant à protéger notre industrie. Soyez-en convaincue. (Mme Stéphanie Rist applaudit.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Marietta Karamanli.
Mme Marietta Karamanli
Dans le cadre du programme France 2030, le précédent gouvernement avait déjà annoncé un plan de soutien à la filière automobile. Nous étions alors collègues, monsieur le ministre.
Mme Sophia Chikirou
Ce plan n’a servi à rien !
Mme Marietta Karamanli
Or aucun des sites dont nous discutons aujourd’hui n’est concerné.
Mme Émilie Bonnivard
Cela n’a rien à voir !
Mme Marietta Karamanli
Il ne peut y avoir une filière d’avenir sans lien avec les entreprises existantes, leurs salariés et leurs compétences.
Certes, les engagements sont utiles, mais il faut reconnecter l’existant à l’avenir. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et EcoS.)
Relations entre l’État et les collectivités locales
Mme la présidente
La parole est à M. Joël Bruneau.
M. Joël Bruneau
Monsieur le Premier ministre, votre déclaration de politique générale appelait à bâtir un nouveau contrat de responsabilité entre les collectivités locales et l’État. Vous vous engagiez à effectuer des choix avec celles-ci, et non pas contre ou sans elles.
Je regrette que les options retenues dans le projet de loi de finances n’aillent pas vraiment dans ce sens ; ni dans la méthode ni sur le fond. Tout ce qui est annoncé, en diminuant fortement l’autofinancement des collectivités, les contraindra à recourir davantage à l’emprunt pour financer des projets déjà lancés. Dans les faits, on ajoutera de la dette locale à la dette nationale.
Cela étant, je crois possible et plus que jamais nécessaire de revenir à l’esprit de vos engagements du 1er octobre. Il faut que vous meniez un dialogue constructif avec les représentants des collectivités locales, en vue d’une nouvelle étape de décentralisation. Non pas pour faire plaisir aux élus locaux, ni parce qu’ils seraient systématiquement meilleurs que les autres, mais tout simplement parce que la France en a besoin.
La France a besoin que soit confortée l’action locale qui constitue aujourd’hui l’un des derniers ciments de notre nation. La France a besoin, face au défi démocratique, que les citoyens soient davantage associés aux décisions prises. La France a besoin d’être administrée plus simplement, sans doublon entre les différents échelons, et avec une économie de moyens à laquelle est obligée toute collectivité, puisqu’elle peut seulement s’endetter pour investir et non pour assurer ses fins de mois.
Face aux défis auxquels notre pays fait face, en particulier l’excès de dépense publique, lequel alimente une dette insoutenable, les collectivités locales ne sont pas un problème, elles peuvent faire partie de la solution.
Je sais, monsieur le Premier ministre, que vous partagez bon nombre de ces convictions, ayant vous-même été élu local.
Êtes-vous alors prêt à engager ce dialogue fondé sur la confiance réciproque et le principe de subsidiarité, pour que l’État et les collectivités forment enfin une équipe de France ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT.)
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation.
Mme Catherine Vautrin, ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation
Le Gouvernement de Michel Barnier veut, sans hésiter, former cette équipe de France. Les élus locaux, et vous-même avez été un grand élu local, sont tous concernés par la situation économique. Les élus de proximité forment la première ligne de la République.
Vous nous interpellez quant à la méthode, mais vous connaissez la situation financière de notre pays. Faire équipe suppose de régler les problèmes ensemble et non pas les uns contre les autres.
C’est pourquoi nous devons revoir ensemble la copie du projet de loi de finances que nous vous avons soumise.
M. Gabriel Amard
C’est lamentable !
Mme Catherine Vautrin, ministre
Nous avons d’ores et déjà commencé, non seulement avec les parlementaires, mais aussi avec les associations d’élus, l’examen des moyens de réduire nos dépenses, donc notre dette, strate de collectivité par strate de collectivité.
La baisse de 20 milliards d’euros de dépenses de l’État – 15 milliards sur les dépenses sociales et 5 milliards sur les collectivités – doit nous permettre d’apurer la situation.
Nous devons décider ensemble des services publics à financer, des dépenses et de notre capacité à répondre aux besoins de nos concitoyens. Les collectivités doivent nous y aider. C’est le but des concertations que nous menons avec les associations d’élus. Ils sont engagés depuis longtemps et proposent des mesures concrètes.
C’est seulement en travaillant ensemble que l’équipe de France apportera des réponses à la hauteur des attentes de nos concitoyens, car nous nous placerons au niveau du bassin de vie vécu par les Français. (Mme Danielle Brulebois applaudit.)
Inondations dans la région de Valence
Mme la présidente
La parole est à M. Stéphane Vojetta.
M. Stéphane Vojetta
Mardi dernier, des inondations cataclysmiques ont dévasté la région de Valence, en Espagne. Une vague de boue, conséquence de pluies diluviennes, a semé le chaos et la mort, particulièrement dans les banlieues du sud de Valence, une ville de la taille de Marseille.
À l’heure qu’il est, 217 victimes ont été dénombrées, mais les disparus restent innombrables, hélas. Si aucune victime française n’est pour l’instant à déplorer, nombre de nos compatriotes résidant dans les zones affectées font partie des sinistrés.
En tant que député des Français établis dans la péninsule ibérique, mais avant tout en tant que Français qui vit en Espagne depuis vingt ans, je vous propose d’exprimer le soutien et l’affection de la représentation nationale et de la France tout entière, pour les victimes et les sinistrés, pour l’Espagne et pour son peuple meurtri mais admirable de solidarité. (Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement se lèvent et applaudissent.)
La plus importante catastrophe naturelle que l’Europe a connue au XXIe siècle a eu lieu à 500 kilomètres au sud de Perpignan. Si loin et si proche, ce drame nous invite à réfléchir à nos systèmes de veille et d’alerte, qui doivent nous permettre d’anticiper ce type d’événements climatiques et leurs conséquences ; aux protocoles à appliquer en cas d’urgence et à la sensibilisation de la population aux situations à risque, notamment en cas de montée soudaine des eaux ; à la gestion de nos cours d’eau ; à notre politique d’aménagement, d’artificialisation des sols et de construction en zones inondables ; ainsi qu’à la résilience de nos infrastructures.
Monsieur le ministre de l’intérieur, alors que nombre d’Espagnols s’insurgent aujourd’hui contre la défaillance de leurs pouvoirs publics et les conséquences d’une décentralisation mal maîtrisée, du point de vue tant de l’anticipation du désastre que de la réponse qui lui est apportée, quel est le degré de préparation de la France à de tels phénomènes ? Votre gouvernement a offert, je le sais, le renfort de nos forces de sécurité civile et même si l’Espagne n’a pas encore saisi notre main tendue, comment la France et l’Europe peuvent-elles épauler notre pays voisin et frère, aujourd’hui dans l’assistance aux sinistrés et demain dans sa reconstruction ? (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR.)
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre de l’intérieur.
M. Bruno Retailleau, ministre de l’intérieur
Si loin et si proche, ce drame vous a particulièrement touché, je le sais. Il a ému l’Assemblée nationale et le Gouvernement, ce qu’ont respectivement rappelé la présidente et le Premier ministre.
Dès mardi, alors que j’étais au Maroc, j’ai échangé avec le ministre de l’intérieur espagnol, pour lui proposer le soutien de nos sapeurs-pompiers. Pour l’instant, aucune aide européenne ou internationale n’a été demandée par l’Espagne, mais j’ai assuré son gouvernement que nous pouvions mobiliser du jour au lendemain 250 sapeurs-pompiers et sauveteurs, équipés de l’ensemble des moyens et véhicules qui pourraient être utiles aux secours.
La France est-elle préparée à faire face à de tels événements ? Notre territoire connaît des épisodes cévenols – sans commune mesure avec les intempéries qui ont frappé la région de Valence, comparaison n’est pas raison. Progressivement se constitue une culture du risque, utile à toutes les étapes d’une crise météorologique. Avant la crise, un système de prévision robuste, un système d’alerte – FR-Alert, qui transforme les téléphones en sirènes individuelles – et des plans communaux de sauvegarde, adoptés par presque toutes les municipalités exposées à des risques météorologiques, jouent leur rôle.
Mme Sandrine Rousseau
C’est surréaliste, quand même ! À vous entendre, il suffit d’une sirène pour que tout aille bien ! Comme si équiper la population civile, c’était être tranquille !
M. Bruno Retailleau, ministre
Pendant la crise, la réactivité des sapeurs-pompiers et des maires, fins connaisseurs de leurs territoires, est à saluer : elle permet d’éviter des dizaines de morts. (Applaudissements sur les bancs des groupes DR et EPR.)
Mme Sandrine Rousseau
Et le changement climatique ?
M. Bruno Retailleau, ministre
Après la crise vient le temps de la construction et de la réparation. Or nos systèmes assurantiels atteignent leurs limites, puisque beaucoup de communes ne parviennent plus à s’assurer contre les risques liés au dérèglement climatique. Nous devons réfléchir à ce problème, je m’en suis déjà ouvert à Michel Barnier.
À l’avenir, c’est au niveau européen qu’il faudra réagir à de tels événements et mobiliser les forces de sécurité civile. C’est à cette réponse que le Premier ministre m’a chargé de travailler, avec mes homologues.
Propos du ministre délégué chargé de la sécurité du quotidien
Mme la présidente
La parole est à M. Paul Christophle.
M. Paul Christophle
« Un étranger criminel ou délinquant n’a rien à faire en France et doit être expulsé […] L’étranger voleur, harceleur, agresseur, trois fois dehors ! » (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR. – Mmes Émilie Bonnivard et Justine Gruet applaudissent également.)
M. Laurent Jacobelli
Excellent, bravo !
M. Paul Christophle
C’est en ces mots prononcés à la tribune de cet hémicycle le 31 octobre dernier, que votre ministre délégué à la sécurité du quotidien a soutenu la proposition que défendait le Rassemblement national et qui visait à automatiser les expulsions de tous les étrangers délinquants, même en l’absence de menaces graves et avérées à l’ordre public. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
Mme Anne-Laure Blin
Il avait bien raison !
M. Paul Christophle
Ces mots, monsieur le Premier ministre, ont choqué une très grande partie de l’hémicycle et de l’opinion publique. (Exclamations sur les bancs des groupes RN et UDR.)
M. Julien Odoul
Non, pas du tout !
M. Pierre Cordier
Allez un peu plus sur le terrain, vous serez démenti !
M. Paul Christophle
Ils ont choqué, non pas parce que nous serions les tenants d’un supposé laxisme. En effet, nous l’admettons : il faut pouvoir, dans des cas strictement définis par la loi, expulser les étrangers qui menacent gravement l’ordre public. Cela, notre droit le permet déjà et assez largement.
Si ces mots ont choqué, c’est parce que pour la première fois dans l’histoire de la Ve République, un ministre a été ovationné par l’extrême droite. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.) Si ces mots ont choqué, c’est parce que pour la première fois, un ministre a repris la rhétorique du Rassemblement national, en essentialisant l’étranger, qui représenterait une menace en soi. (Mêmes mouvements.)
Si ces mots ont choqué, c’est parce que pour la première fois, un ministre a mis sur un pied d’égalité le terrorisme et un simple vol. (Mêmes mouvements.)
M. Jean-Pierre Taite
Une telle question, c’est vraiment honteux !
M. Paul Christophle
Monsieur le Premier ministre, vous le savez nous ne partageons pas vos orientations politiques. Pour autant, le débat et la confrontation de nos idées doivent s’exercer dans un cadre respectueux de nos principes républicains et constitutionnels. Il y va de la cohésion de notre société !
M. Frédéric Weber
Quelle honte !
M. Paul Christophle
Rejetez-vous les propos tenus jeudi dernier par votre ministre ou assumez-vous de servir de marchepied aux idées de l’extrême droite ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, LFI-NFP, EcoS et GDR.)
M. Laurent Jacobelli
Si jeune et pourtant déjà si vieux dans sa tête !
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre de l’intérieur.
M. Bruno Retailleau, ministre de l’intérieur
Les batailles sémantiques sont dérisoires ! (Applaudissements sur les bancs du groupe DR. – « Non ! » sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP, SOC et EcoS.)
Mme Sabrina Sebaihi
Ce débat n’a rien de sémantique !
M. Bruno Retailleau, ministre
Si. Je suis d’ailleurs très étonné que la question migratoire entraîne et suscite tant de polémiques ici à Paris, alors qu’ailleurs, elle met tant de Français et d’Européens d’accord.
Permettez-moi de vous relater le premier conseil européen consacré à la justice et à l’immigration auquel j’ai participé, en présence des vingt-six autres ministres de l’intérieur de l’Union européenne. Quelle que soit leur sensibilité – de la gauche sociale-démocrate à la droite conservatrice –, mes homologues s’accordaient tous pour dénoncer une immigration illégale qui leur était devenue insupportable.
M. Pierre Cordier
Bien sûr !
M. Philippe Gosselin
Ce n’est rien d’autre que de la realpolitik.
M. Bruno Retailleau, ministre
Un étranger qui ne respecte pas les principes de la République et qui commet des crimes n’a rien à faire sur le territoire français. (Applaudissements sur les bancs des groupes DR, RN et UDR.)
M. Thibault Bazin
Bien sûr, il a raison !
M. Pierre Cordier
C’est du bon sens.
M. Julien Odoul
Voilà, on est d’accord !
M. Bruno Retailleau, ministre
L’immigration suppose une réciprocité sans laquelle on serait perdus. Nos compatriotes ne comprendraient d’ailleurs pas qu’elle ne soit plus exigée des étrangers : pourquoi croyez-vous que plus de 70 % des électeurs français et désormais la majorité des électeurs de gauche demandent la fermeté dans la lutte contre l’immigration illégale ?
Nous devons mener cette lutte calmement et sereinement, pour faire prévaloir la loi de la République, juste la loi de la République, rien que la loi de la République, toute la loi de la République. (Applaudissements sur les bancs des groupes DR, RN et UDR.)
M. Laurent Jacobelli
Alors, au boulot !
M. Pierre Cordier
Retailleau, c’est vraiment le meilleur !
Lutte contre le narcotrafic
Mme la présidente
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz.
Mme Marie-Christine Dalloz
Nicolas avait 20 ans et alors qu’il aurait dû profiter encore de l’insouciance de sa jeunesse, il a été tué d’une balle dans la tête. Son décès fait ressurgir la tristesse, mais aussi la profonde colère que la France a ressentie après la disparition de Thomas à Crépol, il y a un an.
Ce n’est pas un fait divers que j’évoque, mais un symptôme supplémentaire de l’ultraviolence qui gangrène notre société. (Mme Nathalie Oziol s’exclame.)
Venue bien souvent des quartiers, où prospèrent communautarisme, trafic de drogue, haine de la France et de ses institutions, cette ultraviolence n’épargne plus aucun territoire.
Les habitants de l’Ardèche ou du Jura méritent la sécurité, première des libertés. (Applaudissements sur les bancs des groupes DR et RN. – Mme Brigitte Barèges applaudit également.)
M. Philippe Gosselin
Elle a raison !
Mme Marie-Christine Dalloz
Monsieur le ministre de l’intérieur, votre parole est forte : c’est celle du courage et de la clarté. Avec la même clarté, nous voulons vous dire combien nos territoires ont besoin de réponses concrètes et immédiates pour lutter contre cette menace.
Oui, notre ruralité doit bénéficier de la vidéoprotection à des points de passage stratégiques ! Oui, nos territoires doivent voir les moyens des forces de l’ordre augmenter et le travail commun des polices municipales et de la gendarmerie se développer, pour éradiquer l’insécurité ! Oui, notre pays doit engager une lutte sans merci contre le narcotrafic et les narcotrafiquants, qui se sont approprié des pans entiers de notre territoire et y imposent leur loi, en lieu et place de celle de la République ! Oui, l’État doit renforcer son arsenal juridique au moyen d’une grande loi contre le narcotrafic, qui prévoirait notamment la création de magistrats spécialisés.
Quelles actions comptez-vous engager pour lutter contre cette violence qui tue nos enfants et gangrène nos territoires ? (Applaudissements sur les bancs des groupes DR et RN.)
Mme Émilie Bonnivard et Mme Véronique Louwagie
Bravo !
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre de l’intérieur.
M. Bruno Retailleau, ministre de l’intérieur
Au moment où je vous parle, un enfant de cinq ans est entre la vie et la mort : victime d’un autre drame du narcotrafic, survenu cette fois à Rennes où il a reçu deux balles dans la tête.
La commission parlementaire sur le narcotrafic, qui évoquait dans son rapport une « véritable submersion », avait parfaitement raison. Oui, nous sommes submergés !
En dix ans, les saisies de cocaïne ont été multipliées par cinq. Désormais, les drogues les plus dures sont disponibles partout, tout le temps !
M. Philippe Gosselin
Même à la campagne !
M. Bruno Retailleau, ministre
Partout dans les villes et dans nos villages…
M. Laurent Jacobelli
Et même à l’Assemblée nationale !
M. Bruno Retailleau, ministre
…et tout le temps, directement aux points de deal ou en livraison à domicile. Depuis ma nomination, je suis frappé par la chronique tristement banale de faits abominables – je pourrai vous en dresser la longue liste –, des familles brisées, des vies volées et des corps disloqués. Qui pourrait s’y résoudre ?
M. Alexandre Sabatou
On se croirait au Salvador.
M. Bruno Retailleau, ministre
À cette sauvagerie, nous répondrons, et avec justesse, comme il y a dix ans nous avons répondu avec justesse au terrorisme, en nous dotant d’un arsenal législatif adapté. Contre le narcotrafic, une meilleure coordination des services de renseignement, une meilleure spécialisation de la réponse judiciaire et des moyens d’enquête supplémentaires seront nécessaires, sinon nous échouerons dans notre lutte contre la sauvagerie. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR.)
L’hyperviolence est devenue une menace existentielle pour nos institutions et la démocratie même !
Mme Émilie Bonnivard
Bien sûr !
M. Arnaud Le Gall
C’est vous, la menace !
M. Bruno Retailleau, ministre
Aussi je ne doute pas que vous soutiendrez tous notre riposte, dans une logique transpartisane. (Applaudissements sur les bancs des groupes DR, RN et UDR.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz.
Mme Marie-Christine Dalloz
Monsieur le ministre, vous connaissez ces problèmes, que vous dénoncez chaque jour depuis votre prise de fonction. Vous le savez : les députés de la Droite républicaine, emmenés par Laurent Wauquiez, se tiendront à vos côtés pour soutenir une action résolue contre la violence. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR. – « Ah ! » sur plusieurs bancs.)
M. Erwan Balanant
La présidentielle, ce n’est que dans trois ans !
Crise sociale en Martinique
Mme la présidente
La parole est à M. Yoann Gillet.
M. Yoann Gillet
Savez-vous qu’en Martinique, nos compatriotes souffrent particulièrement en ce moment ? Au cas où cette information aurait échappé au Gouvernement, les Martiniquais sont atteints dans leur dignité par plusieurs injustices sociales d’une extrême gravité.
Depuis des années pourtant, nous tirons avec Marine Le Pen la sonnette d’alarme et signalons, mais bien en vain, les risques de la situation locale. Quelle famille peut supporter que le prix des produits alimentaires soit en moyenne 40 % plus cher que celui des mêmes produits vendus en métropole ? Quel consommateur peut accepter de voir ses achats grevés à ce point par le surcoût induit par l’octroi de mer ?
L’État a connaissance de cette situation depuis longtemps : des études de l’Insee et de nombreux rapports en attestent. En réalité, cela fait des décennies que les outre-mer sont les parents pauvres des gouvernements qui se succèdent, qu’ils aient été dirigés par la Macronie ou, avant elle, par des membres du Nouveau Front populaire.
Des gouvernements qui, par leur inaction et leur incapacité à garantir un modèle économique digne, ont laissé peu à peu la Martinique s’embraser sous nos yeux. L’ordre n’est plus maintenu et je crains, hélas, qu’à ce rythme, après la Nouvelle-Calédonie et la Martinique, ce ne soient bientôt tous les outre-mer qui sombrent.
Monsieur le Premier ministre, j’ai vu le témoignage de mères de famille qui hurlent de rage, de désespoir, de douleur ; d’autres qui culpabilisent et qui pleurent de honte parce que, bien qu’elles travaillent, elles n’arrivent plus à acheter le minimum pour leur foyer, leurs familles, leurs enfants. En les voyant, je m’en suis senti instantanément proche et solidaire, comme atteint dans ma propre chair. Et vous, avez-vous vu ces témoignages ? Un élu digne de ce nom peut-il rester insensible face à tant d’injustices, de blessures, de maltraitance psychologique ?
Ce ne sont pas des mots mais des actes qui sont attendus urgemment en Martinique. Que comptez-vous faire concrètement pour en finir avec cette situation indigne et les causes profondes de la vie chère ? Quand allez-vous enfin réformer l’octroi de mer ? Quand allez-vous enfin considérer nos compatriotes martiniquais, qui ne demandent que l’égalité ? (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
Un député du groupe GDR
Le RN, parti de la récupération !
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre des outre-mer.
M. François-Noël Buffet, ministre des outre-mer
Les prix pratiqués à la Martinique sont 40 % plus élevés que dans l’Hexagone et cet écart est à peu près le même dans tous les outre-mer.
Mme Estelle Youssouffa
Non, c’est pire à Mayotte !
M. François-Noël Buffet, ministre
C’est un problème majeur et qui n’est pas nouveau. En Martinique, sous la responsabilité du préfet et à la demande du Gouvernement, des négociations ont eu lieu il y a quelques semaines, qui ont abouti à un accord. Celui-ci prévoit, au 1er janvier 2025, une baisse de l’ordre de 20 % du prix de 6 000 produits de première nécessité, couvrant 69 familles de produits. Ce sera une première étape et nous n’en resterons pas là. Nous veillerons aussi à mieux contrôler la transparence des prix et c’est dans ce but que nous avons mandaté des organismes spécialisés à la Martinique. Il faudra sans doute faire de même dans d’autres départements et régions d’outre-mer.
Faut-il réformer l’octroi de mer ? Je rappelle qu’il a donné lieu à un rapport et que, pour l’année 2025, il a été décidé de ne pas y toucher. Cela reste une possibilité, mais n’oublions pas qu’il est l’une des principales ressources des collectivités locales.
M. Yoann Gillet
On peut le compenser !
M. François-Noël Buffet, ministre
Si on le réforme, il faut le faire avec prudence et en veillant à ce que les collectivités locales continuent de vivre normalement. Croyez que le Gouvernement prête une attention toute particulière aux outre-mer. (M. Nicolas Metzdorf applaudit.)
Plan social chez Michelin
Mme la présidente
La parole est à Mme Anne Le Hénanff.
Mme Anne Le Hénanff
La rumeur courait depuis plusieurs semaines ; depuis ce matin, c’est officiel : malgré les efforts engagés, la direction du groupe Michelin a confirmé l’arrêt de la production d’ici 2026 sur les sites de Cholet et de Vannes.
La fermeture du site de Vannes, qui avait fêté ses 60 ans l’année dernière, est un choc et provoque une profonde tristesse, tant le lien entre la ville et l’usine qui a accueilli des générations de salariés est fort. Après une diminution des effectifs – 112 personnes en moins depuis 2019 –, ce sont quelque 300 salariés qui vont perdre prochainement leur emploi. Je tiens à les assurer, ainsi que les équipes de direction, de mon soutien le plus total. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes HOR et SOC.)
Cette fermeture intervient dans un contexte économique difficile pour le secteur depuis plusieurs années, marqué par une baisse de la compétitivité du marché français et une vive concurrence du marché mondial, dont les répercussions affectent plus que jamais nos territoires. Cette fermeture intervient surtout dans un contexte de hausse du chômage dans notre pays. Alors que nous sommes en plein examen budgétaire et que l’état de nos finances publiques impose rigueur et responsabilité, nous entendons certains de nos collègues prôner des hausses de fiscalité pour nos entreprises. (Mme Delphine Lingemann applaudit.)
Ces surcharges fiscales, ajoutées aux nombreuses normes auxquelles elles doivent déjà faire face, ne feraient que mettre en péril nos entreprises : hausse des coûts fixes, perte de compétitivité, licenciements, fermetures !
Monsieur le ministre délégué chargé de l’industrie, comment le Gouvernement entend-il accompagner les salariés, aux côtés du groupe Michelin ? Quelles garanties pouvez-vous apporter aux entreprises françaises et à leurs salariés, dans le contexte budgétaire actuel ? (Applaudissements sur les bancs du groupe HOR.)
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre délégué chargé de l’industrie.
M. Marc Ferracci, ministre délégué chargé de l’industrie
Vous l’avez dit, notre première réaction face aux annonces qui ont été faites ce matin concernant les sites de Cholet et de Vannes, c’est le soutien aux salariés. Nous prêterons la plus grande attention à l’accompagnement social – cette question était au cœur des discussions que nous avons eues au cours des dernières heures avec la direction de Michelin. Il s’agit d’obtenir des conditions de séparation dignes pour les salariés et d’assurer leur reclassement, peut-être leur reconversion, soit en interne, soit à l’extérieur de l’entreprise, et si possible dans le même territoire, car chacun sait qu’il est très difficile de quitter son territoire et que cela crée beaucoup d’anxiété.
Dans les prochains jours, nous allons mettre toutes les parties prenantes autour de la table, afin de trouver des solutions d’accompagnement pour les salariés, mais aussi des solutions pour le site. Il importe en effet d’avoir une stratégie de réindustrialisation et de revitalisation des sites concernés. Nous avons échangé hier soir encore avec les élus du territoire. Notre but, c’est de trouver des repreneurs. Le site de Vannes, dont je sais qu’il vous tient beaucoup à cœur, est suffisamment attractif pour susciter l’intérêt de repreneurs potentiels. Avec les services de l’État, la direction interministérielle aux restructurations d’entreprises et les chambres de commerce, nous allons engager tous les moyens nécessaires pour trouver des repreneurs qui garantissent, comme la direction de Michelin s’y est engagée, qu’il y aura sur ce site plus d’emplois recréés que détruits. C’est l’objectif que nous visons et nous serons très exigeants là-dessus.
Le diagnostic que vous faites est tout à fait juste. La filière automobile a deux défis majeurs à relever : une compétition féroce, qui nous est faite en particulier par les véhicules chinois sur l’électrique, et une transition qu’il faut assumer du véhicule thermique vers le véhicule électrique. Ces deux défis, nous allons les relever ensemble dans un cadre européen. Je l’ai indiqué, nous allons faire dans les prochaines semaines des propositions en faveur d’un plan global, à l’échelle européenne, de soutien à la filière automobile. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)
Enseignements à tirer des inondations en Espagne
Mme la présidente
La parole est à Mme Dominique Voynet.
M. Pierre Cordier
C’est le retour de la gauche plurielle !
M. Laurent Jacobelli
Retour vers le futur !
Mme Dominique Voynet
« Assassins ! Où étiez-vous ? ». C’est avec ces mots de colère que la population a accueilli le roi et le Premier ministre espagnols dans les villes ravagées par des inondations, où les sauveteurs – terme dérisoire quand il n’y a plus rien à sauver – fouillent la boue, à la recherche des cadavres de centaines de disparus.
Oserons-nous encore longtemps qualifier les catastrophes qui se répètent de naturelles ? Les inondations, les sécheresses, les tornades : de plus en plus fréquentes, de plus en plus graves. Le changement climatique est là. Assez causé, il faut agir ! (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EcoS et SOC. – Exclamations sur quelques bancs du groupe EPR.)
M. François Cormier-Bouligeon
Pourquoi vous être opposée au nucléaire, alors ?
Mme Dominique Voynet
« Qui aurait pu prédire […] la crise climatique ? », se demandait l’an dernier le Président de la République. Lui, moi, vous, nous toutes et tous !
M. Pierre Cordier
Si vous aviez été ministre un jour, tout irait pour le mieux…
Mme Dominique Voynet
Cela fait des décennies que les scientifiques nous alertent, que les COP se succèdent, que des plans d’action sont produits. Au mieux, on bricole, on expérimente. Au pire, on continue à bétonner, à bitumer, à artificialiser. Changer ? On verra, plus tard ! La tête dans le sable, le pied sur l’accélérateur, tel est l’homo stultus de 2024. On ne se contente pas de tergiverser : on ricane du peu qui pourrait être fait. On se mobilise contre les éoliennes, décidément trop moches,…
M. Nicolas Meizonnet
Très moches !
Mme Dominique Voynet
…on combat les normes, sans comprendre qu’elles protègent (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EcoS),…
…l’objectif zéro artificialisation nette, c’est de « l’écologie punitive ». Il n’a pourtant pas été imposé par une minorité d’écolos fanatiques se nourrissant de graines.
M. Laurent Jacobelli
Si, c’est bien vous !
Mme Dominique Voynet
Il a été inscrit dans la loi, qui a été votée à une écrasante majorité des parlementaires des deux chambres. (Mêmes mouvements.)
Alors que les besoins de financement sont évalués à 100 milliards par an d’ici 2030, le budget pour 2025 porte la marque de votre indifférence envers la transition écologique. Monsieur le Premier ministre, on vous dit sensible aux questions écologiques. Allez-vous enfin nous le prouver ? (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS et sur quelques bancs du groupe LFI-NFP. – Mme Elsa Faucillon applaudit aussi.)
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre de la transition écologique, de l’énergie, du climat et de la prévention des risques.
M. Jean-François Coulomme
Et du nucléaire !
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition écologique, de l’énergie, du climat et de la prévention des risques
Vous avez raison, les inondations à répétition, les canicules, les périodes de sécheresse, tous ces événements auxquels nous assistons sont évidemment liés au dérèglement climatique et ils nous invitent à l’action. Je le dis avec gravité et avec beaucoup de sérieux car, depuis deux ans, sous l’égide de la Première ministre Élisabeth Borne, puis du Premier ministre Gabriel Attal…
Mme Prisca Thevenot
L’excellent Gabriel Attal !
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre
…et avec vigueur aujourd’hui, sous l’égide du Premier ministre Michel Barnier, nous menons une planification écologique systématique, avec un plan national d’adaptation au changement climatique.
M. Hervé de Lépinau
Avec un numéro vert ?
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre
Un premier volet consiste à rehausser notre capacité à faire face aux catastrophes naturelles, en adaptant notre mode de vie et en développant une culture du risque. Un autre volet consiste à réduire nos émissions de gaz à effet de serre et nous avons des résultats de ce côté, vous le savez !
Mme Sandra Regol
Et votre budget ?
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre
Depuis 1990, la France a réduit ses émissions de gaz à effet de serre de 30 % (Mmes Dominique Voynet et Sabrina Sebaihi protestent) et nous rehaussons notre objectif à l’horizon 2030, avec la nouvelle programmation pluriannuelle de l’énergie et notre nouvelle stratégie nationale bas-carbone. Dans le même temps, nous accompagnons des territoires comme celui du Pas-de-Calais, que je connais bien et qui a vécu des inondations à répétition : nous l’aidons à s’équiper et travaillons à reloger les habitants qui en ont besoin. C’est une course contre la montre que nous avons entamée.
S’agissant du budget, tout le monde doit faire des efforts…
Mme Sabrina Sebaihi
Non, pas là-dessus !
Mme Dominique Voynet
Ce n’est pas une dépense, c’est un investissement !
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre
…mais le Premier ministre a été très clair, en mettant la dette écologique au même niveau que la dette financière. Nous avons renforcé le fonds Barnier et continuerons à agir. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)
Situation en Nouvelle-Calédonie
Mme la présidente
La parole est à M. Nicolas Metzdorf.
M. Nicolas Metzdorf
Monsieur le ministre des outre-mer, il y a quelques semaines, vous êtes venu en Nouvelle-Calédonie. Vous avez rencontré les présidents d’institutions, les maires, les chefs d’entreprise, les salariés, les présidents d’associations et les Calédoniens. À cette occasion, vous avez pu constater l’ampleur du désastre économique, social et humanitaire que traverse notre territoire.
Vous vous êtes engagé à modifier, au cours du débat parlementaire, le projet de loi de finances initiale, qui ne répond pas aux besoins financiers de la Nouvelle-Calédonie. Ma question est simple : puisque nous n’avons pas pu examiner les amendements relatifs à la Nouvelle-Calédonie hier en commission des finances, qu’avez-vous prévu dans ce projet de loi de finances pour les Calédoniens ? (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR.)
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre des outre-mer.
M. François-Noël Buffet, ministre des outre-mer
Je veux redire à quel point le Gouvernement est engagé aux côtés de l’ensemble des Calédoniens et de la Nouvelle-Calédonie. Dès 2024, ce sont 400 millions qui ont été immédiatement mobilisés, après les événements du 13 mai. À l’occasion de ma visite, nous avons accordé au Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie une nouvelle aide dont une partie est fléchée vers les provinces et les communes, pour financer notamment le chômage partiel. Cela représente environ 230 millions supplémentaires sur l’année 2024.
Je profite de votre question pour m’adresser à l’ensemble de la représentation nationale et aux parlementaires de Nouvelle-Calédonie. Sachez que trois amendements vont être déposés sur le projet de loi de finances pour 2025. Il s’agit, premièrement, de créer une enveloppe de 80 millions pour financer effectivement la reconstruction des bâtiments publics, dans le cadre de la circulaire dite reconstruction, que j’ai signée à Nouméa. Nous proposerons ensuite de rehausser de plus de 50 % le montant de la garantie de l’État aux prêts susceptibles d’être consentis par l’Agence française de développement, qui passera de 500 à 770 millions. Cela permettra de financer le régime unifié d’assurance maladie et maternité, Enercal, les dispositifs de logement social et un éventuel filet social, ainsi que de couvrir une partie des pertes de recettes fiscales des collectivités calédoniennes.
Troisièmement, le report du recensement à la fin de l’année 2025. Initialement prévu pour cette année, il est évidemment impossible à réaliser dans les conditions actuelles. Disons les choses : il permettra aussi de stabiliser les dotations aux communes pour les années à venir.
Au total, entre 2024 et 2025, environ un milliard et demi d’euros serviront à aider nos concitoyens de Nouvelle-Calédonie. Le Gouvernement est pleinement mobilisé. Merci pour votre question et pour l’engagement qui est le vôtre et celui d’autres parlementaires, la Nouvelle-Calédonie en a besoin ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)
Mme la présidente
La parole est à M. Nicolas Metzdorf.
M. Nicolas Metzdorf
Je remercie le ministre des outre-mer et le Gouvernement dans son ensemble, en particulier MM. Saint-Martin et Armand pour leurs efforts visibles. (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR. – Mme Anne-Cécile Violland applaudit également.) J’ai conscience des contraintes qui pèsent sur le budget. Je vous remercie donc, chers collègues, pour la solidarité nationale que vous témoignez à la Nouvelle-Calédonie : elle en a besoin.
Permettez-moi cependant d’apporter un petit bémol : jusqu’ici, cette solidarité s’est surtout exprimée au moyen de prêts : depuis le covid, le taux d’endettement est passé de 90 % à plus de 400 %. Il faudra en discuter. La présence à Paris dans les prochaines semaines de Louis Mapou, président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, en fournira l’occasion. Merci pour les échanges. Nous continuons le travail. (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR et sur quelques bancs du groupe DR.)
Contrat dépendance équitable
Mme la présidente
La parole est à Mme Stella Dupont.
Mme Stella Dupont
Permettez-moi tout d’abord de témoigner de mon soutien plein et entier aux 1 254 salariés de Michelin concernés par la fermeture des sites de Cholet et Vannes. (M. Antoine Léaument applaudit.)
En 2019, le rapport Libault considérait le modèle français du grand âge « à bout de souffle ». Je le constate dans les Ehpad et les services à domicile du Maine-et-Loire…
M. Pierre Cordier
Dans les Ardennes aussi.
M. Thibault Bazin
Ainsi qu’en Meurthe-et-Moselle.
Mme Stella Dupont
De nouvelles coupes budgétaires sont envisagées, affectant directement les conditions de travail des professionnels, et la qualité de vie des résidents et des personnes dépendantes à domicile.
Je tiens à rendre hommage à toutes ces femmes et tous ces hommes qui accompagnent nos aînés dans des conditions que l’on sait difficiles. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR, DR et LIOT.) Pour attirer et fidéliser ces professionnels qualifiés, il est essentiel de revaloriser leurs métiers. Malgré les mesures déjà prises, telles que la création de la cinquième branche de la sécurité sociale, l’augmentation des investissements dans les Ehpad ou les revalorisations salariales consécutives au Ségur de la santé, nous n’avons pas réussi à surmonter la crise. Les financements demeurent insuffisants. Or il est urgent d’agir : notre système devra investir beaucoup d’argent, non seulement pour s’adapter aux évolutions démographiques, mais aussi pour améliorer la qualité des services et alléger leur coût pour les familles.
Le financement de la dépendance doit toujours reposer sur la solidarité nationale, j’en suis convaincue. En raison de l’écart croissant entre les besoins et les contraintes budgétaires, il est néanmoins nécessaire d’explorer rapidement de nouvelles solutions. Le Comité consultatif du secteur financier suggère de créer un contrat dépendance solidaire qui fonctionnerait de manière équitable, avec une gouvernance collégiale. La large généralisation de ce contrat permettrait de partager les coûts afin de garantir une couverture suffisante en cas de perte d’autonomie.
Monsieur le ministre des solidarités, de l’autonomie et de l’égalité entre les femmes et les hommes, quelle est la position du Gouvernement vis-à-vis de cette proposition à laquelle votre prédécesseure, Mme Vautrin, s’était montrée ouverte ? Quand pourrions-nous y travailler ensemble ? Nous devons trouver des financements supplémentaires, il y a urgence. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et LIOT.)
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des personnes en situation de handicap.
Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée des personnes en situation de handicap
Je vous prie d’excuser Paul Christophe, retenu au Sénat. Je m’exprimerai au nom du ministère des affaires sociales. Je salue pour leur engagement et leur dévouement les personnes qui travaillent auprès de nos aînés dans des conditions parfois très difficiles. Nous partageons votre constat de la situation financière du secteur, en particulier des Ehpad. Le rapport Libault pointait le problème dès 2019 et proposait qu’une fois amortie, la CRDS soit transformée en une contribution pour nos aînés. Le covid, avec ses conséquences sur la dette sociale, a rendu cette proposition caduque.
M. Jérôme Guedj
Il ne fallait pas affecter la dette covid à la Cades !
Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée
Nous devons trouver d’autres solutions. Chaque année depuis 2019, de nombreux efforts ont été fournis pour trouver des financements complémentaires, renforcer les effectifs des Ehpad, augmenter les rémunérations – vous avez mentionné le Ségur. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale en discussion prévoit de consolider les financements dédiés au grand âge, notamment en fusionnant les sections soins et dépendance dans les Ehpad. Seulement, vous avez raison, ces solutions ne permettront pas de résoudre complètement le problème et la proposition de création d’un contrat dépendance solidaire est intéressante. Le ministre souhaite l’étudier de près, il est disposé à le faire avec le Parlement pour que nous trouvions collectivement des solutions. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)
Voyage d’un ministre israélien en France
Mme la présidente
La parole est à Mme Mathilde Panot.
Mme Mathilde Panot
« Il n’y a pas de Palestinien car il n’y a pas de peuple palestinien. » (« Ah ! » et vives exclamations sur les bancs du groupe RN.)
M. Julien Odoul
Je le savais ! J’ai gagné. Ça faisait longtemps.
Mme Mathilde Panot
Il est « justifié et moral » de bloquer l’aide humanitaire pour la bande de Gaza, même si cela peut entraîner la mort de 2 millions de Palestiniens.
M. François Cormier-Bouligeon
Tout ça, c’est la faute du Hamas !
Mme Mathilde Panot
« Je veux un État juif qui comprenne la Jordanie, le Liban et certaines parties de l’Égypte, de la Syrie, de l’Irak et de l’Arabie saoudite. » Toutes ces phrases ont été prononcées par le ministre des finances israélien.
Ce 13 novembre, Bezalel Smotrich, qui se décrit lui-même comme un fasciste homophobe, est l’invité spécial d’un gala destiné à « mobiliser les forces francophones sionistes au service de la puissance et de l’histoire d’Israël ». Ce gala des génocidaires est organisé par Nili Kupfer-Naouri, qui ose affirmer « qu’il n’y a pas de population civile innocente à Gaza ». Puissent les cris effrayés d’enfants frappés, déchiquetés par les bombes, vous faire comprendre son inhumanité !
Mais votre gouvernement, monsieur le Premier ministre, estime que le ministre Smotrich est bienvenu en France.
M. Julien Odoul
Vous faites bien venir Salah Hamouri !
Mme Mathilde Panot
Comment osez-vous accueillir à bras ouverts un des visages les plus cruels du génocide à Gaza et de l’invasion meurtrière du Liban ? (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP et EcoS ainsi que sur quelques bancs du groupe GDR.) Dans la France de Macron, les personnes qui défendent la paix et parlent la langue du droit international sont poursuivies pour apologie du terrorisme. Mais quand un responsable de plus de 43 000 morts, dont 14 000 enfants, vient à Paris pour faire l’apologie réelle du génocide, vous lui déroulez le tapis rouge.
M. Julien Odoul
Parlez des Français !
Mme Mathilde Panot
La place du ministre Smotrich n’est pas dans un gala, mais dans un tribunal international, sur le banc des accusés ! (Applaudissements prolongés sur les bancs du groupe LFI-NFP dont les députés se lèvent.) Monsieur le Premier ministre, ne voyez-vous pas que la France se déshonore à autoriser ce sinistre personnage, à célébrer ici son œuvre de mort ? Puisqu’il vous faut poser des actes, commencez au moins par interdire au génocidaire de parader à ce gala de la honte. Que résonne jusqu’à vous la question puissante du grand poète Mahmoud Darwich : « Si cet enfer pouvait cesser cinq minutes ! Advienne que pourra ! Cinq minutes. Je dirais presque cinq minutes seulement, pour l’unique chose à faire avant de me préparer à mourir, ou à vivre. (Le temps de parole étant écoulé, Mme la présidente coupe le micro de l’oratrice. – Les députés du groupe LFI-NFP se lèvent et applaudissent longuement cette dernière. – Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SOC, EcoS et GDR.)
M. Laurent Jacobelli
Vous êtes tranquille avec ça, au PS ? (M. Olivier Faure acquiesce et applaudit à son tour.)
Mme la présidente
La parole est à M. le Premier ministre.
M. Michel Barnier, Premier ministre
Vous posez une question importante et grave. Non, nous n’accueillons pas à bras ouverts ce ministre israélien. Ce n’est pas vrai.
Mme Farida Amrani
C’est un gala, quand même.
M. Michel Barnier, Premier ministre
Il est possible, dans le respect du droit international, que M. Smotrich, dont vous avez cité le nom, se déplace à Paris dans un cadre privé. Les autorités françaises ne sont d’aucune manière – d’aucune ! – associées à cet éventuel déplacement. Je le dis calmement et fermement, il n’y aura aucune forme de contact gouvernemental avec lui. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP, SOC, EcoS et GDR.)
M. François Cormier-Bouligeon
Qu’ils fassent la même chose avec les membres du Hamas !
Mme Nathalie Oziol
Tais-toi !
M. Michel Barnier, Premier ministre
J’irai plus loin, car nous avons, nous aussi, l’écho et l’indication des propos tenus précédemment par ce ministre à Paris et en Israël. Nous avons condamné dans les termes les plus clairs les propos irresponsables et inacceptables qu’il a tenus lors d’une précédente visite en France, à l’occasion d’un événement similaire. La France est résolument opposée aux positions exprimées par ce ministre et par tous les groupes dont il est proche. Je ne peux pas être plus clair. J’ajoute que nous avons pris des sanctions contre les colons…
Mme Sarah Legrain
Lesquelles ?
M. Michel Barnier, Premier ministre
…et contre les entités qui incitent à la haine et à la violence en Cisjordanie.
Mme Mathilde Panot
Interdisez le gala, dans ce cas ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe RN.)
M. Michel Barnier, Premier ministre
Nous les avons prises à titre national et avec nos partenaires européens, comme l’ont fait d’autres alliés d’Israël, je pense aux États-Unis, au Canada et au Royaume-Uni.
Au-delà de cette provocation dont ce ministre est à l’initiative, au-delà de cet épisode grave – je viens de dire ce que nous en pensons –, je voudrais confirmer l’engagement de notre pays pour la paix au Proche-Orient, pour obtenir le plus vite possible la libération de tous les otages, pour obtenir un cessez-le-feu. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR, LFI-NFP, SOC, DR, EcoS, Dem, HOR, LIOT et GDR.)
Le ministre des affaires étrangères sera à Jérusalem et à Ramallah ce jeudi. Nous continuerons inlassablement, avec nos partenaires et toute la région, à nous battre pour ce cessez-le-feu…
Un député du groupe LFI-NFP
Reconnaissez l’État de Palestine !
M. Michel Barnier, Premier ministre
…qui est la clé pour que cessent les violences contre toutes les populations civiles, en particulier contre les populations civiles palestiniennes. (Mêmes mouvements.)
Groupe Atos
Mme la présidente
La parole est à M. Hervé de Lépinau.
M. Hervé de Lépinau
L’ancien ministre de l’économie Bruno Le Maire n’a eu de cesse de nous asséner ses deux mantras favoris : la France est en voie de réindustrialisation ; nous sommes sur le chemin du plein emploi. Voilà pour le côté pile. Le côté face est plus sombre : le groupe Michelin annonce la fermeture des usines de Vannes et Cholet, menaçant 1 254 emplois et laissant craindre un transfert de l’outil industriel dans un pays à bas coûts ; le groupe Auchan va supprimer 5 % de ses effectifs en France – 2 400 salariés sont concernés.
M. Pierre Cordier
C’est la même question que la gauche…
M. Hervé de Lépinau
Le groupe Atos prévoit quant à lui de supprimer 380 postes. Notre fleuron informatique, par l’intermédiaire de sa filiale Bull, a perdu le marché des supercalculateurs dédiés à l’intelligence artificielle dans nos systèmes de défense, le ministère des armées ayant préféré l’offre de l’américain Hewlett-Packard. Enfin, le 24 octobre dernier, le tribunal de commerce de Nanterre a validé un plan de sauvegarde qui prévoit le transfert des actifs de l’entreprise vers une holding basée au Pays-Bas pour des raisons fiscales, ainsi que l’entrée au capital de fonds vautours prêts à procéder à une vente à la découpe du groupe en vue de réaliser des profits immédiats : le pire du capitalisme de connivence.
Monsieur le Premier ministre, vous êtes garant de l’action gouvernementale en matière de défense et de sécurité nationale : renoncerez-vous à confier notre IA de défense à une société étrangère ? Avez-vous donné pour instruction au parquet de Nanterre de faire appel du plan de sauvegarde qui menace à terme les systèmes d’infogérance et la souveraineté numérique du pays, du fait de prédations financières étrangères ? (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre délégué chargé de l’industrie.
M. Marc Ferracci, ministre délégué chargé de l’industrie
Je vous prie d’excuser le ministre de l’économie Antoine Armand, retenu à l’étranger. L’entreprise Atos a connu de graves difficultés qui ont fortement affecté sa trésorerie et creusé sa dette. Un accord a été conclu en juillet dernier sous l’égide du Comité interministériel de restructuration industrielle, afin de garantir sa pérennité. La restructuration financière d’Atos, destinée à lui redonner des marges de manœuvre, repose sur deux piliers : la transformation en capital de 3 milliards d’euros de dette ; l’injection de 1,8 milliard. Vous évoquiez cet accord, validé le 24 octobre, dans le cadre duquel les créanciers ont obtenu des assurances concernant les actifs de la société.
À cette occasion, l’État s’est assuré, par l’intermédiaire du ministre Antoine Armand, de disposer au sein d’Atos d’une action préférentielle lui garantissant un droit de regard sur les actifs stratégiques. Notre but est que ces derniers ne soient pas transférés dans les sociétés de droit néerlandais que vous évoquez. Nous sommes intervenus à cette fin et nous protégerons notre souveraineté et nos actifs stratégiques.
Mme la présidente
La parole est à M. Hervé de Lépinau.
M. Hervé de Lépinau
J’en déduis qu’aucun appel n’a été interjeté – dont acte. Vous n’avez pas répondu au problème posé par Hewlett-Packard. Je rappelle que la défense nationale dépend de nos supercalculateurs ; les Américains ont toujours eu des intérêts, jamais des alliés. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
Plans sociaux chez Michelin et Auchan
Mme la présidente
La parole est à M. André Chassaigne.
M. André Chassaigne
Michelin a annoncé la fermeture des usines de Cholet et de Vannes, supprimant 1 254 postes, quand Auchan annonçait un large plan social, détruisant 2 389 emplois. Ces annonces mettent à mal la fable que colportent à l’envi les différents gouvernements du président Macron. Non, la politique de l’offre, caractérisée par des cadeaux phénoménaux aux entreprises et aux plus riches, n’a pas permis de créer une dynamique de croissance et de réduire le chômage. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur plusieurs bancs du groupe EcoS.)
Auchan et ses 33 milliards d’euros de chiffre d’affaires a déjà supprimé 2 000 emplois en 2020, tout en touchant 500 millions d’euros de crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi. Son propriétaire, la famille Mulliez, qui a multiplié sa fortune par quatre en vingt-cinq ans, annonce à présent la fermeture d’une dizaine de magasins, comme celui de Clermont-Ferrand et ses plus de 200 emplois. Michelin, qui a versé, en 2024, 1,4 milliard d’euros à ses actionnaires, a touché, lui aussi, des dizaines de millions d’euros d’aides publiques. À quoi ont-elles servi, sinon à détruire l’emploi sur le territoire national ?
La prétendue lutte contre le risque d’effacement industriel se fracasse contre le mur du réel : pas une semaine ne se passe sans l’annonce de plans de licenciement dans l’industrie et le commerce, tandis que la précarité se développe. Votre ministre chargé de l’industrie affirme que sa stratégie marche sur deux jambes : protéger l’existant et encourager l’investissement. Mais la vérité, c’est que la valeur ajoutée de la production manufacturière est aujourd’hui inférieure de 2 % à son niveau de 2017, avec une production en recul de 0,2 % chaque année.
Un député du groupe RN
C’est vrai !
M. André Chassaigne
Monsieur le Premier ministre, en cette journée noire pour l’emploi, allez-vous encore dire aux milliers de familles touchées que vous êtes fier de cette politique qui distribue des milliers d’aides aux entreprises sans jamais protéger les salariés ? (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC, EcoS et GDR.)
Mme la présidente
La parole est à M. le Premier ministre.
M. Michel Barnier, Premier ministre
Non, je ne suis pas fier d’une politique qui détruit des emplois – jamais. Vous le savez, j’ai été élu dans une vallée industrielle – la Tarentaise – et j’ai vécu le drame que vivent aujourd’hui à Vannes et à Cholet les salariés de Michelin et ceux d’Auchan. J’ai vécu la fermeture d’usines et la catastrophe que cela représente pour la région, pour le tissu industriel mais aussi pour les hommes et les femmes, fiers de leur travail, un travail bien fait – Mme Karamanli a évoqué le savoir-faire de ces ouvriers. Je ne suis pas fier, si vous aviez raison, de ce résultat ; vous ne me trouverez jamais dans cet état d’esprit.
La capacité de production de notre pays soulève une question très importante, qu’il s’agisse des agriculteurs, des usines ou des artisans. Cette question préoccupe légitimement l’Assemblée nationale : j’ai entendu tour à tour Stella Dupont, Charles Fournier, Marietta Karamanli, Anne Le Hénanff et, à l’instant, Hervé de Lépinau évoquer la souveraineté industrielle. Je vous ai tous écoutés ; il n’y a pas forcément de bonne réponse. Je souhaiterais simplement rappeler quelques éléments de contexte – qui ne sont pas des éléments de justification, seulement d’explication.
Le groupe Michelin est un grand groupe, ancré dans les territoires, d’abord à Clermont-Ferrand. Ce groupe s’est toujours honoré en accompagnant la reconversion, la formation – notamment à Clermont-Ferrand – et en se montrant attentif aux gens, au tissu local. Il l’a prouvé lors de précédentes difficultés industrielles, à Joué-lès-Tours et à La Roche-sur-Yon. Il a même rapatrié récemment certaines activités d’Allemagne sur le territoire national. Nous avons donc affaire à un groupe responsable. J’ai rencontré son président, M. Menegaux, il y a quelques jours. Je suis naturellement en désaccord avec sa décision, qui touche Cholet et Vannes, et, comme vous, je la regrette.
Je souhaite simplement indiquer, à la suite des propos du ministre Ferracci – que je soutiens et que je soutiendrai dans son travail stratégique –, que nous saurons nous montrer solidaires, en exigeant du groupe Michelin comme du groupe Auchan de travailler avec le tissu local, les élus locaux – dont beaucoup d’entre vous –, les syndicats, le patronat local, les chambres de commerce et d’industrie, et de déployer tous les outils à disposition pour accompagner individuellement chaque salarié et les territoires concernés dans les différentes reconversions possibles. Cela a été fait ailleurs, cela doit être fait ici, afin que l’expertise et la richesse humaines ne soient pas perdues ou laissées de côté.
Sur le plan offensif, nous devons créer ou recréer de l’emploi industriel, et maintenir l’emploi agricole dans notre pays. C’est l’objet des crédits que nous affectons, dans le budget, au plan France 2030 et des soutiens que nous apporterons à certaines entreprises. Je tiens d’ailleurs à vous dire que je me préoccupe de savoir ce qu’on a fait, dans ces groupes, de l’argent public qui leur a été donné ; je veux le savoir. (Applaudissements sur les bancs des groupes DR, SOC et GDR.) Nous poserons des questions, nous verrons si cet argent a été bien ou mal utilisé, et nous en tirerons des leçons.
M. Thibault Bazin
Il a raison !
M. Michel Barnier, Premier ministre
L’offensive doit aussi se déployer à l’échelle nationale avec plusieurs initiatives : nous proposerons notamment de créer début 2025 un livret d’épargne industrielle, pour encourager l’épargne des Français à s’orienter vers l’industrie. Des réponses doivent également être apportées à l’échelle européenne : il s’agit notamment de nous montrer moins naïfs que nous ne l’avons été par le passé et d’appliquer certaines mesures avec plus d’étalement.
Il faut reconnaître – sans pour autant excuser personne – que le secteur automobile fait face à des difficultés particulièrement graves, pas seulement en France : il doit affronter des transitions technologiques – y compris s’agissant des pneus –, la concurrence pas toujours loyale de grands pays étrangers et les exigences de la décarbonation. De tels défis affectent nécessairement un secteur industriel.
Vous pouvez être sûr, monsieur Chassaigne – raison pour laquelle je tenais à vous répondre à la suite du ministre chargé de l’industrie –, que préserver ou reconstruire le tissu industriel et agricole de la France constituera, à vos côtés, si vous le voulez bien, une des priorités absolues du Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR, plusieurs bancs des groupes EPR, Dem et LIOT et quelques bancs du groupe UDR.)
Fiscalité des paris hippiques
Mme la présidente
La parole est à Mme Géraldine Bannier.
Mme Géraldine Bannier
Monsieur le ministre chargé du budget et des comptes publics, la filière hippique est en émoi ; en cause, un amendement initial du Gouvernement qui prévoyait de faire passer la taxe sur le produit brut des jeux de 6,5 à 7,5 % pour le pari hippique mutuel, et de 6,5 à 15 % pour les paris en ligne. Les conséquences pourraient être désastreuses. Or le système actuel est vertueux : 75 % des enjeux sont reversés aux joueurs ; 16 % servent à financer la filière et font vivre l’écosystème des éleveurs, entraîneurs, propriétaires, jockeys, drivers et lads.
En 2023, le PMU a enregistré 9,3 milliards d’euros de chiffre d’affaires sur les enjeux hippiques ; 837 millions d’euros ont été redistribués aux professionnels – sachant que la filière emploie 70 000 personnes. Les acteurs des courses hippiques, déjà fragilisés par la hausse des charges et une fuite vers les paris sportifs, pourraient subir une baisse des allocations représentant une perte de revenus de 20 à 25 %. Beaucoup mettraient alors la clé sous la porte.
Ces derniers craignent également l’effet d’une telle augmentation sur le fonds d’encouragement aux projets équestres régionaux ou nationaux – le fonds Eperon – qui soutient les projets innovants de la filière équestre. Les courses nous font vibrer, animent nos territoires et font partie intégrante du monde rural – tout cela en plein air ! Tandis que les grands hippodromes font rayonner la France, toute une kyrielle de petits hippodromes attirent un public populaire, nombreux et, pour tout dire, heureux. Mes collègues MM. Blanchet, Cosson et Martineau, ainsi que Mme Poueyto, entre autres, le savent bien.
Comment soutiendrez-vous le dynamisme du PMU et l’aiderez-vous à dégager de nouvelles ressources ? À la veille d’une forte mobilisation des acteurs de la filière, ce jeudi, que pouvez-vous leur dire pour les rassurer ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur quelques bancs des groupes LIOT et UDR. – Mme Laetitia Saint-Paul applaudit également.)
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre du budget et des comptes publics.
M. Laurent Saint-Martin, ministre du budget et des comptes publics
Merci pour votre question qui me permet de recontextualiser l’amendement du Gouvernement étudié lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
M. Olivier Falorni
C’est un cavalier ! (Sourires.)
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Cet amendement vise à harmoniser la fiscalité sur le produit brut des jeux, mais aussi à l’augmenter – nous l’assumons – pour les jeux les plus consommés et les plus addictogènes. Dans ce cadre, les jeux pratiqués dans les casinos et les paris sportifs en ligne verront leur fiscalité s’accroître. Cependant, vous le soulignez à juste titre, certains de ces produits font vivre des filières et des professionnels au quotidien. (M. Jean-Pierre Taite applaudit.) C’est notamment le cas du PMU qui, avec cet amendement, voyait la fiscalité sur le produit brut de ses jeux passer de 6,9 % à 7,5 % pour les paris « en lieu physique » et de 6,9 % à 15 % pour les paris en ligne.
Néanmoins, vous nous avez alertés en séance publique, aux côtés des députés Blanchet et Woerth et de la députée Louwagie, sur tout ce qu’implique le PMU. (Même mouvement.) En effet, ce dernier finance la vie agricole de notre pays à hauteur de 600 millions d’euros par an et permet à la filière hippique de vivre. Il participe à la formation aux métiers, à la promotion de l’élevage, à l’amélioration des espèces et au développement des territoires.
M. Thibault Bazin
Et de la filière équine, qu’il faut préserver !
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Nous avons besoin de ces acteurs et de la filière équine, que nous souhaitons protéger. C’est la raison pour laquelle nous avons émis un avis favorable sur le sous-amendement permettant de limiter la fiscalité à 7 % maximum, pour les paris physiques comme pour les paris en ligne. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, DR et Dem.)
Santé mentale des jeunes
Mme la présidente
La parole est à M. Louis Boyard.
M. Louis Boyard
Ma question s’adresse à la ministre de l’éducation nationale et plus généralement à tous les députés de l’Assemblée nationale. (Exclamations sur plusieurs bancs des groupes EPR, DR et UPR.) Je suis ici pour délivrer un message : les collégiens et lycéens ne vont pas bien. Pour vous convaincre, j’ai lancé une grande consultation sur la vie et la santé mentale des jeunes. En moins de quarante-huit heures, ma vidéo a été vue plus de 3 millions de fois, et plus de 220 000 lycéens et collégiens ont participé à l’enquête, ce qui en fait la plus grande enquête jamais réalisée sur la jeunesse scolarisée. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. – Exclamations prolongées sur les bancs des groupes EPR, DR et UDR.)
Les résultats sont édifiants : près de 75 % des collégiens et lycéens jugent leur santé mentale mauvaise, voire très mauvaise.
M. Pierre Cordier
Pourtant, M. Boyard n’est pas collégien ni lycéen !
M. Louis Boyard
La moitié d’entre eux confient dormir moins de six heures par nuit ; 99 % des jeunes se disent épuisés après une journée de cours et 87 % jugent leur emploi du temps chargé ou surchargé ; 22 % n’ont qu’une demi-heure pour déjeuner et la moitié des jeunes déclarent se priver d’activités extrascolaires, faute de temps libre. Enfin, 80 % d’entre eux voient dans Parcoursup et le contrôle continu une immense source d’angoisse. (Exclamations répétées sur les bancs des groupes RN et UDR.)
Mme Hanane Mansouri
C’est un sondage TikTok !
M. Louis Boyard
Je ne sais pas comment vous le dire autrement : les jeunes n’en peuvent plus. Et s’ils n’en peuvent plus, c’est à cause de Parcoursup, de la mise en concurrence des élèves, de la pression du contrôle continu, de la peur de se retrouver sans orientation, du manque de professeurs. (Exclamations sur plusieurs bancs des groupes EPR, DR et UDR.) Bref, votre politique éducative est en train de faire craquer la jeunesse.
M. Laurent Croizier
C’est un menteur !
M. Jean-Pierre Taite
Madame la présidente, il a vendu de la drogue à des mineurs et il nous parle de l’éducation nationale !
M. Louis Boyard
Les jeunes le disent partout sans jamais être écoutés. Comme il n’y a pas de journaliste influent de 16 ans, les journalistes n’en parlent pas. Comme il n’y a pas de député de 16 ans, l’Assemblée nationale n’en parle pas. Nous devons poser un principe : ce n’est pas parce que les jeunes ne votent pas que leur vie et leur santé mentale ne comptent pas. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Il y a urgence à travailler à un plan d’urgence. En décembre, j’organiserai à l’Assemblée nationale une grande journée sur la question. Son objectif : mettre tout le monde autour de la table, professeurs, parents, ministres, avec évidemment les jeunes au centre. Mes chers collègues, vous y êtes tous invités. Madame la ministre de l’éducation, au vu de la gravité de la situation, serez-vous des nôtres ? (Les députés du groupe LFI-NFP se lèvent et applaudissent.)
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre de la santé et de l’accès aux soins.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre de la santé et de l’accès aux soins
Vous posez une question essentielle. (« Ah ! » sur les bancs du groupe LFI-NFP.) La santé mentale des jeunes, en effet, est aujourd’hui plus fragile. Il n’y a cependant qu’une seule santé, indissociablement mentale et physique. (Applaudissements sur les bancs des groupes DR et Dem.) Nous devons bien entendu continuer de promouvoir des programmes de prévention sur l’alimentation, le sommeil – je vous ai entendu parler de nuits de six heures –, la modération dans l’usage des écrans, qui nuisent également au sommeil, ainsi que sur les contenus, souvent anxiogènes, de ces écrans.
M. Pierre Cordier
C’est TikTok – mais Boyard n’est pas père, il ne peut pas comprendre !
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Vous avez mentionné les rythmes scolaires, et je pense que la ministre de l’éducation nationale sera favorable à ce que s’engage un travail sur ce sujet. (Mme Sarah Legrain s’exclame.) La santé mentale des jeunes nous préoccupe cependant pour elle-même, et je voudrais leur adresser un message. Certes, comme vous le remarquiez, ils ne votent pas, mais ce n’est pas important. Ce qui est important, c’est qu’on s’occupe d’eux, qu’on leur montre du respect et de la bienveillance.
M. Laurent Croizier
Et qu’on ne les instrumentalise pas !
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Ce qui est important, c’est qu’on leur apprenne l’estime de soi, qui est souvent ce qui leur manque, à eux qui ont tant de valeur. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR.)
Mme Sandrine Rousseau
La jeunesse attend des politiques publiques, pas des conseils de développement personnel !
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Nous soutiendrons donc la jeunesse, notamment par la prévention et le repérage de ceux qui vont mal (« Ce n’est pas vrai! » sur plusieurs bancs du groupe LFI) – c’est particulièrement important.
M. Antoine Vermorel-Marques
Il faut parler de la question des drogues !
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Il y a des lignes d’écoute et des programmes de prévention contre les addictions dans les établissements scolaires. Tout cela relève de la santé mentale et me paraît aussi important que les rythmes scolaires. C’est dans cet esprit que nous devons, tous ensemble, rendre service à la jeunesse : notre pays a besoin d’elle, d’une jeunesse en forme, mentalement et physiquement. (Applaudissements sur les bancs des groupes DR et Dem.)
Mme la présidente
Nous avons terminé les questions au Gouvernement.
Suspension et reprise de la séance
Mme la présidente
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures trente, est reprise à seize heures quarante-cinq sous la présidence de Mme Clémence Guetté.)
Présidence de Mme Clémence Guetté
vice-présidente
Mme la présidente
La séance est reprise.
3. Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025
Mme la présidente
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 (nos 325, 480, 487).
Troisième partie (suite)
Mme la présidente
Hier soir, l’Assemblée a commencé la discussion des articles de la troisième partie du projet de loi, s’arrêtant à l’amendement no 1866 portant article additionnel après l’article 17.
Sur les amendements nos 2320 et identique, je suis saisie par le groupe Ensemble pour la République d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Rappels au règlement
Mme la présidente
La parole est à M. Hadrien Clouet, pour un rappel au règlement.
M. Hadrien Clouet
Il se fonde sur l’article 100 du règlement, relatif à la bonne tenue des débats, et sur l’article 95, relatif à l’ordre dans lequel sont examinés les articles.
Pardonnez-moi de revenir sur un sujet déjà évoqué très rapidement : vous savez que nous devons arriver, plus tard dans notre débat, à l’article 23 – par lequel vous essayez de voler six mois de retraite à tous les Français.
M. Vincent Jeanbrun
Oh là là !
M. Hadrien Clouet
Je peux entrer dans le détail si vous le souhaitez mais ce ne serait à pas à votre avantage.
Nous aimerions avoir la possibilité d’examiner cet article. Or figurez-vous que le règlement prévoit justement que la commission saisie au fond – en l’occurrence la commission des affaires sociales – peut se réunir pour décider de l’ordre dans lequel les articles doivent être examinés.
Mme Prisca Thevenot
Professeur Tournesol, c’est bon !
M. Hadrien Clouet
Et nous avons décidément beaucoup de chance puisque le président de cette commission est présent parmi nous.
M. Gabriel Attal
Arrêtez l’obstruction !
M. Hadrien Clouet
L’occasion est trop belle : le bureau pourrait se réunir et décider que nous examinions l’article 23. Nous gagnons la partie et ensuite nous repartons bons amis.
Mme la présidente
La parole est à M. Thibault Bazin, pour un rappel au règlement.
M. Thibault Bazin
Il se fonde sur les articles 121-1 à 121-3, qui portent sur la discussion des lois de financement de la sécurité sociale. Il nous appellent à examiner l’ensemble des parties.
Votre proposition, monsieur Clouet, revient à mépriser certains articles. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe EPR. – Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme Olivia Grégoire
Excellent !
M. Thibault Bazin
Depuis huit jours, vous multipliez les rappels au règlement. Nous avons passé une dizaine d’heures à discuter d’une litanie de taxes à n’en plus finir et de hausses de cotisations.
M. Franck Riester
Il a raison !
M. Thibault Bazin
Je vous propose que nous arrêtions de faire des rappels au règlement et que nous discutions dès maintenant, sur le fond, de l’ensemble des amendements, notamment ceux du Gouvernement car on n’en compte pas moins de six parmi les amendements portant article additionnel après l’article 17. Je rappelle que nous sommes là pour examiner le texte article par article, amendement par amendement, afin d’étudier le projet de loi dans sa totalité. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR et sur plusieurs bancs du groupe EPR.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Stéphanie Rist, pour un rappel au règlement.
Mme Stéphanie Rist
Il se fonde sur l’article 100, alinéa 1. Nous souhaitons examiner tous les articles du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS). Les prochains portent sur l’accès aux soins,…
Mme Justine Gruet
C’est méprisant de penser que ce n’est pas important !
Mme Stéphanie Rist
…les personnes en situation de handicap, les personnes âgées, nos Ehpad ou encore les établissements de santé.
M. Jean-René Cazeneuve
Ça ne les intéresse pas !
Mme Stéphanie Rist
Il me semble important que nous examinions aussi ces articles avant l’article 23. (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR et sur quelques bancs du groupe DR.)
Mme la présidente
La parole est à M. Christophe Bentz, pour un rappel au règlement.
M. Christophe Bentz
Il se fonde également sur l’article 100. Hier plusieurs groupes, dont le mien, ont sollicité et interpellé le Gouvernement, la commission et – à travers la vice-présidence – la présidente de l’Assemblée nationale, autrement dit les trois instances qui ont le pouvoir de décider de l’examen prioritaire d’un article.
Or, a priori, nous n’aurons pas terminé à minuit d’examiner l’ensemble des articles relatifs aux dépenses.
Mme Prisca Thevenot
Est-ce qu’on pourrait arrêter les rappels au règlement et commencer à travailler ?
M. Christophe Bentz
Nous, représentation nationale, devons étudier en priorité un article saillant qui intéresse les Français et qui, sur le fond, constitue un véritable scandale et une injustice sociale puisqu’il prévoit un report de six mois de l’indexation des retraites.
Par ce rappel au règlement, je réitère donc la demande du groupe Rassemblement national. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.)
Mme la présidente
La parole est à M. Jérôme Guedj, pour un rappel au règlement.
M. Jérôme Guedj
Nous avons tous envie – du moins je l’espère – d’aller au bout de ce texte. C’est en tout cas ce que je souhaite car, ces deux dernières années, à cause des 49.3, nous n’avons pu examiner entièrement les PLFSS. (Exclamations sur quelques bancs du groupe EPR.)
M. Vincent Jeanbrun
N’avez-vous pas déposé une motion de rejet ?
M. Jérôme Guedj
Je vous propose une solution de compromis. Il reste 488 amendements.
M. Hadrien Clouet
Dont 300 de M. Bazin !
M. Jérôme Guedj
En effet, nombre d’entre eux – 132 exactement – ont été déposés par la Droite républicaine. Les amendements socialistes restants sont au nombre de 56, et nous sommes prêts à tous les retirer.
Mme Justine Gruet
Ça voudrait dire qu’ils n’ont pas d’importance ?
M. Jérôme Guedj
J’invite ceux qui, parmi les différents groupes, souhaitent que nous avancions, à aller vite. Parmi les amendements qui restent à étudier figurent de nombreux amendements rédactionnels du rapporteur général – j’espère que nous les examinerons très rapidement.
Mme Danielle Brulebois
Nous avons déjà perdu vingt minutes !
M. Jérôme Guedj
Si, grâce à notre intelligence collective et à notre envie d’aller au bout du texte, nous sommes prêts à nous y atteler sérieusement jusqu’à ce soir minuit – voire plus tard car aucun délai constitutionnel ne nous empêche de déborder un peu –, alors chiche ! Nous pouvons y parvenir. Cela suppose toutefois que chacun se responsabilise, retire des amendements et ne fasse pas d’intervention trop longue.
Mme Justine Gruet
C’est un peu hypocrite !
M. Jérôme Guedj
Cela vaut la peine d’essayer. (M. Aurélien Rousseau applaudit.)
Mme la présidente
La parole est à M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales.
M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales
Tout d’abord, tous les articles sont importants – et certains à venir sont très importants.
M. Vincent Jeanbrun
Absolument !
M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales
Vous avez mentionné l’article 23 mais je pourrais citer l’article 19, relatif aux dispositifs médicaux, ou encore l’article 25, relatif à l’Ondam, l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, qui, je le rappelle, est au cœur du PLFSS. Nous n’allons pas jouer au bonneteau des articles car, sinon, nous n’aurons plus le temps de débattre.
J’aimerais ensuite rappeler à Jérôme Guedj qu’avant d’en arriver au cœur de l’examen du PLFSS, nous avons passé beaucoup de temps à écouter une motion de rejet préalable qui n’a servi à rien. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR et DR.)
M. Jérôme Guedj
Elle a été retirée !
M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales
Certes, mais avec les débats qui l’ont entourée…
M. Jérôme Guedj
Il n’y a pas eu de débat ! Ça a duré douze minutes !
M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales
Si !
M. Jérôme Guedj
C’est un mensonge !
Mme la présidente
M. le député, vous avez interpellé M. le président de la commission. Je vous demande d’écouter sa réponse.
M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales
Nous allons donc reprendre le fil de la discussion. Ceux qui souhaitent retirer des amendements pourront le faire, ce qui nous permettra d’avancer plus vite dans les débats.
Je préfère donc retenir votre proposition d’aller au bout de l’examen du texte dans les délais impartis plutôt que l’idée de se satisfaire avant tout de l’examen de l’article 23 ou de tel autre article. Ne jouons pas à ce petit jeu, laissons la discussion se poursuivre et essayons d’examiner l’ensemble du PLFSS. Cela me semble beaucoup plus raisonnable mais aussi beaucoup plus juste vis-à-vis de tous ceux qui attendent des réponses s’agissant de ce texte important. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR et DR.)
Après l’article 17
Mme la présidente
Puisqu’elle semble faire l’objet d’un consensus, nous appliquerons à l’examen des amendements la règle « un pour, un contre ».
La parole est à M. Alexandre Allegret-Pilot, pour soutenir l’amendement no 1866 portant article additionnel après l’article 17.
M. Alexandre Allegret-Pilot
Notre objectif est de limiter l’érosion de notre modèle social, tout en tenant compte des difficultés budgétaires auxquelles nous sommes confrontés. À cet égard, la mesure que nous proposons devrait faire l’objet d’un large consensus.
Le bilan de prévention est gratuit pour l’ensemble des bénéficiaires car il est pris en charge par l’assurance maladie donc, en réalité, par le contribuable – eh oui, rien n’est jamais gratuit.
Je propose donc, par cet amendement, d’instaurer un reste à charge minimal de 5 % pour les personnes non couvertes par la complémentaire santé solidaire (C2S), soit 1,5 euro, le bilan de prévention coûtant 30 euros.
M. Thibault Bazin
C’est n’importe quoi !
M. Hadrien Clouet
Un impôt sur la santé !
M. Alexandre Allegret-Pilot
Par ailleurs, je précise que la gratuité serait maintenue puisque les personnes couvertes par la complémentaire santé solidaire ne régleraient pas cette somme. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.)
Mme la présidente
La parole est à M. Yannick Neuder, rapporteur général de la commission des affaires sociales, pour donner l’avis de la commission.
M. Yannick Neuder, rapporteur général de la commission des affaires sociales
Si je comprends bien, vous voulez instaurer un reste à charge de 5 % pour les consultations de prévention. Votre proposition m’étonne un peu si l’on se place du point de vue de la stratégie de santé publique. En effet, la loi de financement de la sécurité sociale, à l’origine de ces bilans, a bien prévu une prise en charge à 100 %.
D’autre part, cet amendement, qui a été repoussé par la commission, prévoit d’exclure du reste à charge les personnes bénéficiaires de la C2S, ce qui me surprend également – au point que je ne suis pas certain d’avoir bien compris vos propos. À la limite, que vous demandiez à tout le monde de payer 5 %, pourquoi pas, mais, dans ce cas, je ne comprends pas pour quelle raison les personnes couvertes par la C2S, c’est-à-dire par une mutuelle, et qui bénéficient donc d’une prise en charge, seraient exemptées de cette obligation.
Par ailleurs, en formulant cette proposition, vous rouvrez le débat – sur lequel nous ne nous attarderons pas puisque nous voulons gagner du temps – autour du ticket modérateur, dont le montant serait transféré aux complémentaires. Est-il pertinent de faire payer les plus démunis ? Je dois dire que je n’ai pas totalement compris le sens de cet amendement.
M. Hadrien Clouet
Il n’y a rien à comprendre !
M. Thibault Bazin
La prévention, ça doit être pour tout le monde ! C’est une question de santé publique !
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre de la santé et de l’accès aux soins, pour donner l’avis du Gouvernement.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre de la santé et de l’accès aux soins
La prévention est absolument essentielle. Tout le monde doit y avoir accès dans les meilleures conditions, sinon ce travail de prévention ne serait pas efficace puisqu’il y aurait des manques. On sait d’ailleurs déjà que certaines personnes ne se saisiront pas de l’occasion qui leur est désormais offerte d’avoir recours à un bilan de prévention. Je ne voudrais pas créer une barrière financière qui rendrait la démarche encore moins évidente.
Les bilans de prévention, lancés cette année, constituent un dispositif novateur et ambitieux qui mobilisera les médecins, les infirmiers, les sages-femmes mais aussi les pharmaciens, bref différents professionnels de santé qui pourront conseiller les personnes, aux quatre âges clés de la vie, en développant plusieurs axes de prévention.
Quand on est malade, on se rend chez le médecin. En revanche, s’il existe une barrière financière, on n’ira pas spontanément le voir pour un acte de prévention. Il ne faut donc pas décourager les personnes de prendre rendez-vous pour ces bilans de prévention. L’ensemble des assurés doit y avoir accès.
Pour toutes ces raisons, je suis défavorable à cet amendement.
Mme la présidente
La parole est à M. Yannick Monnet.
M. Yannick Monnet
Cet amendement vise à instaurer une franchise sur les bilans de prévention. Cette mesure va totalement à contresens des priorités qui doivent être fixées. La France demeure très en retard en matière de prévention. Ses résultats ont même été jugés globalement médiocres par la Cour des comptes en 2021.
M. Thibault Bazin
Il a raison !
M. Yannick Monnet
L’Organisation européenne du cancer pointe dans un rapport le retard pris par la France en matière de détection de ces maladies. L’écart le plus important concerne le cancer du sein : le taux de dépistage s’établit à 46,9 % dans notre pays, contre 54 % à l’échelle européenne. Les bilans de prévention ne sont pas un luxe, ils revêtent une importance capitale : il faut encourager les Français à se faire dépister. En introduisant un reste à charge, aussi minime soit-il, vous éloignerez encore davantage les populations de la prévention. Nous sommes donc contre cet amendement. (Mme Justine Gruet et M. Thibault Bazin applaudissent.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Stéphanie Rist. Est-ce bien une prise de parole en faveur de l’amendement ?
Mme Stéphanie Rist
Non, contre !
Mme la présidente
Il y en a déjà eu une.
Mme Stéphanie Rist
Alors, c’est pour !
Mme la présidente
Dans ce cas allez-y madame Rist !
Mme Stéphanie Rist
En réalité, je ne suis pas tout à fait pour cet amendement mais, là où je rejoins son auteur, c’est que, comme lui, je pense que tout a un coût, y compris la santé. Cela étant dit, je suis opposée à la mesure qu’il propose. Les rendez-vous de prévention aux âges clés de la vie sont des dispositifs que nous avons adoptés dans le cadre des derniers PLFSS.
M. Thibault Bazin
C’était une initiative du ministre Braun, un très bon ministre de la santé !
Mme Stéphanie Rist
Cette année, ils se concrétisent : les jeunes ont reçu dans leur boîte à lettres un courrier de l’assurance maladie les informant qu’ils pouvaient bénéficier d’un rendez-vous pris en charge par la sécurité sociale – ce fut le cas de mes enfants. L’objectif de cette campagne est d’aller vers les gens éloignés de la prévention ; il est donc crucial de ne pas prévoir un reste à charge, d’autant que la prévention est un investissement. Je suis par conséquent défavorable à cette proposition.
M. Pierre Cazeneuve
Très clair !
Mme la présidente
La parole est à M. Alexandre Allegret-Pilot.
M. Alexandre Allegret-Pilot
J’ai bien entendu vos remarques. La gratuité actuelle bénéficie à tous, y compris aux députés, qui touchent une indemnité s’élevant à 7 500 euros par mois. Je propose d’instaurer un reste à charge de 1,50 euro pour tous ceux qui ne sont pas bénéficiaires de la C2S : les plus pauvres en seront exemptés.
(L’amendement no 1866 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 2320 et 2319.
La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement no 2320.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Nous proposons d’intégrer au droit commun le programme Handigynéco. Ce programme a fait l’objet d’une expérimentation en Île-de-France de 2018 à 2021 ; il a été ensuite progressivement étendu à toutes les régions en 2023 et 2024 grâce à un financement du fonds d’intervention régional (FIR).
M. Thibault Bazin
Très bien !
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Si vous le permettez, madame la présidente, je laisserai Mme Liso défendre son amendement, qui est identique au mien ; elle s’est beaucoup impliquée dans le développement de ce programme. (M. Jean-René Cazeneuve applaudit.)
M. Gabriel Attal
Très bonne idée !
M. Pierre Cazeneuve
C’est très élégant, madame la ministre !
Mme la présidente
La parole est à Mme Brigitte Liso, pour soutenir l’amendement no 2319.
Mme Brigitte Liso
Nous proposons d’intégrer au droit commun le programme Handigynéco. Ce programme, qui s’adresse aux femmes en situation de handicap résidant dans un établissement médico-social, permet à celles-ci de bénéficier d’un suivi gynécologique adapté, dispensé par des sages-femmes formées. Il améliore l’accès aux soins, à la prévention et à l’information sur la vie affective et sexuelle, point essentiel. Madame la ministre, vous en parliez tout à l’heure : l’idée est d’aller vers les personnes concernées.
Par le présent amendement, nous entendons inscrire dans le code de la santé publique la possibilité pour les femmes en situation de handicap résidant dans un établissement médico-social de bénéficier de consultations longues de suivi gynécologique et en santé sexuelle. Ces consultations prises en charge par l’assurance maladie seront assurées par des professionnels de santé, sages-femmes et gynécologues, ayant reçu une formation spécifique leur permettant d’offrir un suivi gynécologique adapté. Nous proposons aussi que tous les usagers de ces établissements soient formés à la vie sexuelle et affective, afin de prévenir les violences sexuelles. (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR et sur quelques bancs du groupe SOC.)
Vous voyez qu’il était important que nous examinions les articles et les amendements à ce PLFSS dans l’ordre.
Mme la présidente
J’ai rappelé en début de séance que la conférence des présidents avait décidé, à l’unanimité des groupes, de limiter les prises de parole à une minute pour, une minute contre. Madame Liso, vous avez parlé une minute trente. Je vous ai laissé développer car le sujet est important.
Mme Stéphanie Rist
Mais elle présentait son amendement !
Mme la présidente
La limitation du temps de parole s’applique aussi aux présentations d’amendement.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Yannick Neuder, rapporteur général
J’y suis très favorable. L’amendement n’a pas fait l’objet de discussions en commission, mais nous l’avons validé au titre de l’article 91 du règlement de l’Assemblée nationale. Quelle que soit notre sensibilité politique, nous pouvons tous nous satisfaire que les femmes concernées soient mieux prises en charge. Merci, madame la députée, d’avoir été à l’initiative de cette proposition, qui a d’abord été expérimentée localement avant d’être généralisée ; elle devrait être bientôt inscrite dans le droit commun. Cela montre que nous pouvons travailler ensemble quand les sujets nous rassemblent.
M. Jérôme Guedj
Très bien !
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des personnes en situation de handicap.
Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée des personnes en situation de handicap
Je remercie Mme Liso et les députés de son groupe d’avoir défendu cette cause et proposé de généraliser l’expérimentation. Je salue également Geneviève Darrieussecq qui avait soutenu cette initiative lorsqu’elle était ministre chargée des personnes en situation de handicap.
L’expérimentation s’est avérée fructueuse. Il faut que les femmes en situation de handicap puissent bénéficier de consultations spécifiques, parfois plus longues – tenir compte du handicap prend du temps –, parfois à blanc, pour bien expliquer à la patiente comment se dérouleront les examens. Ces consultations sont importantes pour évoquer la santé des femmes mais aussi pour aborder des questions quelques fois plus complexes, portant sur la vie sexuelle et affective. Elles jouent un rôle essentiel pour prévenir les violences faites aux femmes, celles en situation de handicap étant particulièrement exposées à ces risques. Merci, madame la députée, et merci aux parlementaires qui soutiendront cet amendement.
M. Gabriel Attal
Très bien !
Mme la présidente
La parole est à Mme Prisca Thevenot.
Mme Prisca Thevenot
Le groupe Ensemble pour la République votera pour cet amendement défendu par notre collègue Brigitte Liso. La santé des femmes recouvre encore beaucoup de tabous, que nous avons réussi à lever ces dernières années avec Élisabeth Borne et Gabriel Attal. Nous sommes parvenus à avancer tous ensemble dans cette chambre parlementaire. Cela montre que nous sommes parfois capables de nous accorder pour progresser sur certains sujets, comme celui de la santé des femmes, notamment celles porteuses de handicap. Oui, nous voulons que l’examen du texte avance vite ; oui, nous voulons examiner l’article 23, mais, par pitié, prenons le temps de parler de ces sujets restés trop longtemps tabous. (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR. – Mme Justine Gruet applaudit également.)
Mme la présidente
Je mets aux voix les amendements identiques nos 2320 et 2319.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 168
Nombre de suffrages exprimés 168
Majorité absolue 85
Pour l’adoption 168
Contre 0
(Les amendements identiques nos 2320 et 2319 sont adoptés.)
Mme la présidente
Je suis saisie de cinq amendements, nos 2438, 2445, 2167, 2286 et 1115, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 2438 et 2445 sont identiques, ainsi que les amendements nos 2167 et 2286.
La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement no 2438.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Il tend à annualiser les examens bucco-dentaires et à modifier les conditions de prise en charge de ces examens et des soins consécutifs.
Dans le cadre du virage préventif de la santé bucco-dentaire – prévention essentielle –, nous proposons que devienne annuelle la périodicité des examens de prévention bucco-dentaires, dont les jeunes âgés de 3 à 24 ans bénéficient pour l’heure tous les trois ans. Les investissements réalisés par l’assurance maladie en matière de prévention doivent être dirigés en priorité vers les jeunes générations. Quant à l’annualisation, elle correspond aux engagements pris par le Gouvernement et l’assurance maladie lors de la dernière négociation conventionnelle avec les chirurgiens-dentistes.
Ces examens de prévention sont très importants car ils permettent d’éviter des dégradations de la santé bucco-dentaire, impliquant parfois de devoir recourir à des prothèses dentaires. Ils offrent une surveillance sur le plan infectieux, les infections dentaires pouvant dégénérer. Notre ambition est aussi de parvenir à une génération sans carie. Nous parlions hier de sodas, de boissons sucrés et autres sucres délétères pour la dentition – ce sont des préoccupations essentielles.
Cette nouvelle périodicité s’accompagne d’une évolution des conditions de prise en charge des examens, afin que les organismes complémentaires puissent s’impliquer dans la prévention. La prise en charge du ticket modérateur devra être inscrite dans les garanties obligatoires des contrats responsables. Malgré l’évolution du financement, la dispense d’avance de frais est conservée, afin d’éviter que les personnes disposant d’une assurance maladie complémentaire renoncent à ces actes de prévention.
Mme la présidente
La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille, pour soutenir l’amendement no 2445.
M. Cyrille Isaac-Sibille
Ce sujet a valeur d’exemple, et ce pour plusieurs raisons. Les dents sont un très bon indicateur de l’état de santé général. En examinant les dents, le praticien peut évaluer la littératie en santé, c’est-à-dire la connaissance et la maîtrise des bons comportements en matière de santé. Parmi toutes les expérimentations de prévention menées ces dernières années, le programme M’T Dents s’est distingué. Jusqu’à présent, le bilan était prévu tous les trois ans ; il faut qu’il soit plus régulier et intervienne tous les ans. Ce programme permet de toucher les publics les plus fragiles, de manière régulière, afin d’améliorer les comportements en matière de santé.
Le sujet est aussi exemplaire car nous proposons d’impliquer davantage les complémentaires santé dans la prévention, comme elles en ont fait la demande – le dispositif est pour l’instant pris en charge à 100 % par l’assurance maladie.
Mme Élise Leboucher
Et c’est très bien comme ça !
M. Cyrille Isaac-Sibille
Cette implication se fera dans le cadre des contrats responsables et en prévoyant un système de tiers payant.
Mme la présidente
La parole est à Mme Justine Gruet, pour soutenir l’amendement no 2167.
Mme Justine Gruet
Nous proposons que les mutuelles prennent en charge les bilans bucco-dentaires destinés aux jeunes à hauteur de 40 %. Notre proposition amène à s’interroger sur le financement de notre système de santé et sur le rôle des complémentaires. Nous courons certes le risque d’une augmentation des tarifs des mutuelles, mais elles ont tout intérêt à jouer le jeu et à s’impliquer dans la prévention : plus on fait de prévention, moins on a de soins bucco-dentaires plus lourds à prendre en charge – par exemple des poses de prothèse à l’âge adulte. L’idée est de miser sur la prévention auprès des plus jeunes. Le programme prévoit notamment de faire de la pédagogie dans les écoles, en formant au lavage de dents et en sensibilisant au capital santé. Nous proposons que les complémentaires participent au financement de ces campagnes tout en évitant qu’elles augmentent leurs tarifs.
Mme la présidente
L’amendement no 2286 de M. Cyrille Isaac-Sibille est défendu.
La parole est à Mme Danielle Brulebois, pour soutenir l’amendement no 1115.
Mme Danielle Brulebois
Le rendez-vous annuel est nécessaire. Le recours aux soins dentaires chez les enfants est inférieur aux recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS), qui préconise une visite chez le dentiste par an. Selon une enquête récente, seuls 70 % des enfants âgés de 5 à 15 ans ont consulté un chirurgien-dentiste au cours des douze derniers mois. Ce pourcentage masque des inégalités sociales mais aussi territoriales. Les jeunes enfants doivent prendre très tôt l’habitude de se rendre chez le dentiste, car c’est aussi une mesure de prévention : le praticien fournit en effet des informations sur les bons comportements en matière d’hygiène bucco-dentaire. Il est important de prévoir un système de tiers payant, comme le propose ma collègue.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission sur ces amendements ?
M. Yannick Neuder, rapporteur général
Nous ne pouvons qu’être favorables à l’annualisation de la prévention bucco-dentaire, ainsi que le recommande la Haute Autorité de santé. Il a été rappelé, à juste titre, que la prévention est un investissement : parvenir à une génération sans carie, c’est éviter de recourir, demain, à des soins dentaires plus importants.
Je partage les inquiétudes et les recommandations de Mme Gruet concernant la participation des mutuelles ; néanmoins, ces dernières ont tout intérêt à favoriser les examens de prévention. D’ailleurs, lors des auditions menées par la commission, l’ensemble des chirurgiens-dentistes se sont déclarés favorables à une revalorisation de leurs consultations, en vue de réaliser ce type d’actes. Des inquiétudes demeurent, cependant, quant à la possibilité, pour les familles, d’obtenir un rendez-vous auprès d’un chirurgien-dentiste, ce qui peut se révéler difficile dans certains territoires – mais c’est un autre sujet.
Quoi qu’il en soit, nous avons raison de privilégier la prévention, si nous voulons atteindre l’objectif Génération sans carie. Cela passe aussi par l’éducation au brossage des dents ou encore à la limitation de la consommation de sucre – n’y revenons pas. Avis très favorable sur les amendements.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Avis favorable. Permettez-moi simplement d’ajouter que cette mesure n’entrera en vigueur que le 1er avril 2025, le temps pour les caisses de procéder aux ajustements techniques nécessaires.
Mme la présidente
La parole est à M. Thibault Bazin.
M. Thibault Bazin
Ces amendements vont dans le bon sens puisqu’une annualisation des examens ne peut que participer à la prévention bucco-dentaire. Toutefois, je serai transparent avec vous, madame la ministre : alors que la convention nationale des chirurgiens-dentistes 2023-2028 a été signée le 21 juillet 2023 et qu’un premier avenant a été signé le 4 juillet 2024, je regrette que cette mesure n’ait pas été inscrite dans le texte initial du PLFSS et qu’elle fasse l’objet d’un ajout par voie d’amendement gouvernemental, nous privant ainsi d’une étude d’impact.
Par ailleurs, l’avenant prévoyait une extension du dispositif jusqu’à l’âge de 28 ans, en fixant pour horizon l’année 2028. Pourquoi cette extension ne figure-t-elle pas dans l’amendement du Gouvernement, alors qu’elle est prévue par la convention nationale ? Envisagez-vous de l’ajouter au cours de la navette parlementaire ou faudra-t-il attendre un prochain PLFSS ?
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Si nous devons introduire des précisions au cours de la navette, nous le ferons. Néanmoins, il me semble que ce dont nous parlons ne concerne pas les mêmes actes – je le vérifierai.
Mme la présidente
La parole est à Mme Frédérique Meunier.
Mme Frédérique Meunier
Certes, il est nécessaire d’annualiser les examens pour favoriser la prévention. Cependant, il ne s’agit pas d’un problème de renoncement, comme vous l’avez mentionné, madame la ministre, mais d’un manque de chirurgiens-dentistes. En Corrèze, par exemple, six à huit mois sont nécessaires pour obtenir un rendez-vous chez un dentiste pour la première consultation d’un enfant de 3 ans. Comment faire ? La prévention est une bonne chose et nous voterons ces amendements ; néanmoins, il convient aussi de se poser les bonnes questions. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe DR.)
(Les amendements identiques nos 2438 et 2445 sont adoptés ; en conséquence, les amendements nos 2167, 2286 et 1115 tombent.)
Mme la présidente
Je suis saisie de trois amendements, nos 2232, 2318 et 1848, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 2232 et 2318 sont identiques.
La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement no 2232.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Il vise à répondre à des enjeux majeurs de santé publique en matière de santé sexuelle, parmi lesquels la lutte contre le VIH et les infections sexuellement transmissibles (IST). L’objectif d’éradiquer l’épidémie de VIH d’ici à 2030 est toujours d’actualité. Or les contaminations par VIH-sida et autres infections sexuellement transmissibles sont en augmentation régulière depuis plusieurs années. De plus, la proportion des découvertes du VIH à un stade avancé de l’infection ne diminue pas, ce qui retarde la prise en charge et augmente le risque de transmission du virus.
Fort de ce constat, le ministère a lancé en 2020 une expérimentation de centres de santé sexuelle d’approche communautaire (CSSAC), désormais appelés centres de santé et de médiation en santé sexuelle (CSMSS), conduite dans le cadre de l’article 51 de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2018.
Quatre centres ont ainsi été ouverts à Lyon, à Paris, à Montpellier et à Marseille, en raison de la prévalence du virus dans ces zones. Ces centres proposent un parcours complet en santé sexuelle, prenant en compte notamment les besoins des populations les plus vulnérables en la matière et les plus éloignées du soin. Leur valeur ajoutée repose notamment sur la pratique de la biologie délocalisée, ces centres pouvant dépister et traiter des personnes dans des délais courts, au sein d’une même unité de lieu. En outre, ils ont consacré le rôle majeur de la médiation en santé, au cœur de chaque prise en charge. Celle-ci constitue l’une des forces et des spécificités du dispositif, compte tenu de l’offre existante en santé sexuelle.
Les résultats de l’expérimentation ayant été évalués positivement, il est proposé une entrée dans le droit commun desdits centres. Ceux-ci sont actuellement dans une période transitoire, qui s’achèvera à la fin du mois de mars 2025, et qui nous a permis de préparer le cadre juridique et financier pour engager leur inscription dans le droit commun, tel que présenté dans l’amendement, assurant l’équilibre entre l’innovation en santé et les textes actuels. Les CSMSS constitueront ainsi une offre complémentaire en santé sexuelle, essentielle pour atteindre les objectifs de santé publique qui sont les nôtres.
Parmi les premiers exemples de pérennisation des expérimentations menées au titre de l’article 51, celui-ci démontre notre capacité à innover dans le domaine de la santé puis à transposer ces innovations dans le droit commun – c’est particulièrement important. C’est l’autre intérêt de cet amendement : démontrer notre capacité à faire aboutir de manière positive une innovation. Pour toutes ces raisons, je vous invite à l’adopter. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Dem.)
M. Philippe Vigier
Très bien !
Mme la présidente
La parole est à Mme Stéphanie Rist, pour soutenir l’amendement no 2318.
Mme Stéphanie Rist
Comme l’a très bien expliqué Mme la ministre, il vise à généraliser une expérimentation lancée au titre de l’article 51 de la LFSS pour 2018 pour faire entrer les CSMSS dans le droit commun. En effet, ces centres permettent une prise en charge globale des pathologies visées, grâce à un accueil assuré par un médiateur de santé, à une offre de dépistages des IST et du VIH, à un parcours d’initiation à la prophylaxie pré-exposition (Prep), ainsi qu’à un parcours en santé sexuelle, incluant la possibilité d’obtenir l’avis de plusieurs spécialistes, tels que des psychiatres ou des gynécologues. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)
Mme la présidente
La parole est à M. Arthur Delaporte, pour soutenir l’amendement no 1848.
M. Arthur Delaporte
Il vise également à pérenniser l’expérimentation que vous venez d’évoquer. Toutefois, dans la mesure où il est moins-disant que celui du Gouvernement, je vais le retirer.
Auparavant, permettez-moi de préciser que j’ai déposé cet amendement à la demande de l’association Aides – au cours de la précédente législature, je représentais l’Assemblée nationale au sein du Conseil national du sida et des hépatites virales. Les centres de santé sexuelle d’approche communautaire présentant un bilan positif, leur pérennisation doit être envisagée – ce sera désormais chose faite. Je me réjouis que mon initiative ait incité le Gouvernement à déposer un amendement qui, je le rappelle, exempte du ticket modérateur les patients pris en charge dans ces centres. Cela mérite d’être salué puisque le dispositif s’adresse à des publics vulnérables, qui n’ont souvent pas les moyens d’accéder aux soins. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOC. – Mme Brigitte Liso applaudit également.)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Yannick Neuder, rapporteur général
L’incidence et la prévalence de certaines pathologies, telles que la tuberculose, le paludisme ou encore le VIH, tendent malheureusement à augmenter de nouveau, malgré nos systèmes sanitaires évolués. Cette expérimentation, engagée dans les territoires au titre de l’article 51, a montré son efficacité : alors qu’elle devait s’achever à la fin de l’année 2023, elle a été reconduite en 2024 compte tenu de son succès, ce qui nous permet désormais de l’inscrire tranquillement, grâce à cet amendement du Gouvernement, dans les politiques de prévention qui s’adressent à tous les publics – en particulier aux personnes les plus éloignées des soins et souvent les plus démunies, comme M. Delaporte vient de le rappeler.
Sur le fond, je vous confirme, monsieur Delaporte, que votre amendement est moins-disant. C’est pourquoi je vous invite à le retirer, au profit des amendements identiques nos 2232 et 2318, sur lesquels j’émets un avis favorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Même avis.
Mme la présidente
La parole est à M. Thibault Bazin.
M. Thibault Bazin
Vous évoquez les expérimentations de centres de santé sexuelle menées dans quatre très grandes et belles villes ; néanmoins, il y a aussi les campagnes !
Mme Justine Gruet
C’est vrai !
M. Thibault Bazin
De très belles initiatives se développent également, en dehors des expérimentations dites article 51. C’est le cas dans ma circonscription : il y a six ans, après le déploiement de la stratégie nationale de santé sexuelle 2017-2030, le centre hospitalier de Lunéville a ouvert un service de santé sexuelle, très innovant. Votre amendement prévoit que les agences régionales de santé (ARS) autorisent l’ouverture de tels centres. Toutefois, qu’en est-il des services existants ? Il s’agit d’une vraie question ! Vous renvoyez également à des appels à manifestation d’intérêt ; il ne faudrait pas que ce soit à géométrie variable et qu’on en oublie les territoires.
Il y a aussi le problème du mode de financement. Compte tenu de la raréfaction des moyens, il ne faudrait pas que les services de santé sexuelle qui fonctionnent actuellement dans certaines villes moyennes ou dans certains territoires ruraux soient déshabillés, si je puis dire, par cet amendement.
Mme la présidente
La parole est à M. Matthias Renault.
M. Matthias Renault
Je n’ai pas d’a priori négatif sur ces amendements. Toutefois, j’aimerais comprendre la différence entre ces centres et les services existants, tels que les centres de dépistage anonyme et gratuit. La distinction s’explique-t-elle par une prise en charge différente ? Ces centres ont-ils un périmètre de dépistage plus large et concernent-ils d’autres pathologies que les IST et les maladies sexuellement transmissibles (MST) ? – vous parliez par exemple de tuberculose.
Mme la présidente
Monsieur Delaporte, maintenez-vous votre amendement no 1848 ?
M. Arthur Delaporte
Non, je le retire. Permettez-moi de répondre à notre collègue Renault, s’agissant de la différence entre ces établissements. Les CSMSS n’assurent pas seulement un dépistage ; ils mettent en place un parcours de soins, avec un accès à la Prep, un accompagnement assuré par différents spécialistes… Ce type d’accompagnement renforcé n’existe pas dans les centres de dépistage classiques.
Je précise que les centres gratuits d’information, de dépistage et de diagnostic (Cegidd) font aussi face à des manques de moyens. Le Gouvernement devra donc intensifier les crédits alloués à la prévention, au-delà de ceux octroyés aux centres spécifiques communautaires dans les grandes villes.
(L’amendement no 1848 est retiré.)
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre.
M. Thibault Bazin
Rassurez-moi, madame la ministre. Le service de santé sexuelle de Lunéville est le premier de France à avoir été créé, il y a six ans, en dehors de l’article 51 !
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Vous avez raison, monsieur Bazin, il existe aussi des centres partout en France et je ne veux surtout pas opposer les territoires urbains aux territoires ruraux ; il y a des choses formidables partout. Nous parlons ici d’une expérimentation dans le cadre de l’article 51. Comme l’a souligné M. Delaporte, il s’agissait de centres spécifiques, répondant à un cahier des charges particulier. Si vous connaissez des centres qui sont prêts à le respecter, pourquoi pas ! Néanmoins, actuellement, les services que vous évoquez ne répondent pas au même cahier des charges que les centres dont nous parlons.
M. Cyrille Isaac-Sibille
Eh oui ! Ce ne sont pas les mêmes !
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
En revanche, les centres existants partout en France sont bien financés.
M. Thibault Bazin
Il s’agit d’un service de santé beaucoup plus global !
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Ces services sont financés et soutenus…
M. Thibault Bazin
Par le FIR !
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Oui ! Ils sont soutenus par le FIR et c’est une bonne chose. Mais ils n’entrent pas dans le cadre de l’expérimentation. Soyez rassurés, ils continueront d’être soutenus.
(Les amendements identiques nos 2232 et 2318 sont adoptés.)
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement no 2350.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Il vise à supprimer la condition d’adressage préalable pour la prise en charge par l’assurance maladie des séances de suivi psychologique. La santé mentale est une priorité de santé publique…
Mme Élise Leboucher
Ce n’est pas le bon amendement ! (Murmures.)
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Excusez-moi, celui-là vient plus tard. Je voulais vous donner satisfaction et aller plus vite. (Sourires.)
Mme Élise Leboucher
Pour une fois que vous parliez de santé mentale, c’est dommage !
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Tous ces amendements sont absolument essentiels pour la santé publique dans notre pays. L’amendement no 2350 vise à organiser une campagne de vaccination contre les sérogroupes A, C, W, Y du méningocoque dans les collèges et les établissements accueillant des adolescents en situation de handicap.
Les données épidémiologiques récentes montrent une reprise de la circulation des méningocoques en France et une évolution simultanée des souches, qui sont préoccupantes. La Haute Autorité de santé recommande, depuis mars 2024, de vacciner contre les sérogroupes A, C, W, Y, tous les adolescents de 11 à 14 ans – ces âges auxquels est proposée depuis la rentrée 2023-2024 la vaccination contre les infections à papillomavirus humains (HPV), dans le cadre d’une campagne nationale organisée dans les collèges publics et privés volontaires.
La première campagne de vaccination contre le HPV dans les collèges – en cours d’extension aux établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESMS) accueillant des adolescents en situation de handicap pour l’année scolaire 2024-2025 – ayant montré des résultats encourageants, il est proposé d’organiser à compter de l’année scolaire 2025-2026 une campagne combinée contre le HPV et les sérogroupes A, C, W, Y du méningocoque. Les deux vaccinations seront proposées et réalisées simultanément, en profitant de l’organisation déjà mise en place par les ARS et les centres de vaccination.
L’amendement instaure un cadre commun entre les deux vaccinations. Il étend à la vaccination contre les méningocoques l’exonération du ticket modérateur et les modalités de rémunération des professionnels de santé telles que prévues à l’article 37 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 pour la vaccination contre les infections à papillomavirus humains. Je vous demande de bien vouloir voter en faveur de cet amendement.
Je redis ici notre attachement – qui est aussi le vôtre –, et tout particulièrement le mien, à toutes les mesures d’accès à la santé des personnes en situation de handicap, où qu’elles se trouvent, dans les établissements mais aussi à domicile. Nous devons veiller à ce que toutes les mesures s’adressent aussi à ces publics.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Yannick Neuder, rapporteur général
C’est un amendement très important, qui risque de déchaîner de nouveau les passions relatives à la vaccination. En effet, il tend à favoriser la vaccination, contribuant ainsi à lutter contre l’obscurantisme. Par cet amendement, le Gouvernement propose d’ajouter dans le panel des vaccinations celle contre le méningocoque, qui connaît une recrudescence et qui provoque parfois des méningites.
Il vise à proposer la vaccination contre le méningocoque, couplée avec celle contre le papillomavirus, à tous les jeunes de 11 à 14 ans, qu’ils soient en situation de handicap ou non – soit un public très large. Des expérimentations ont été menées dans plusieurs régions – j’en avais moi-même lancé une en Auvergne-Rhône-Alpes dans le cadre des politiques de prévention dans les lycées, en lien avec les collèges. Ces campagnes de vaccination sont maintenant de ressort national. La prévention et la vaccination – donc la lutte contre l’obscurantisme – sont toujours plus efficaces.
Surtout, en prévoyant l’exonération du ticket modérateur, l’amendement permet de s’affranchir des barrières financières – la vaccination est prise en charge à 100 %. Il permet de rémunérer les professionnels de santé ayant été habilités à pratiquer la vaccination pendant la crise covid, qui sont impliqués dans ces campagnes de vaccination. Il lève les freins financiers et les obstacles concrets à la vaccination.
Quel juste retour aux sources, quand on sait que beaucoup ont remis en cause la vaccination pendant la crise covid ! Au pays de Pasteur, je me satisfais fortement de l’ajout de la vaccination systématique contre le méningocoque pour tous les jeunes de 11 à 14 ans en France en 2025. Avis favorable. (Applaudissements sur les bancs des groupes DR et Dem.)
M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales
Bravo !
Mme la présidente
La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille.
M. Cyrille Isaac-Sibille
Le groupe Modem se réjouit de ces mesures de prévention, dont il est important de parler dans le cadre de l’examen du PLFSS. Des campagnes de vaccination ont été lancées pour le HPV, nous le faisons maintenant pour le méningocoque, ce qui renforcera la prévention.
La commission devra assurer un suivi de la vaccination dans les collèges. D’après les remontées d’information dont je dispose, elle est très inégale – elle n’est ni systématique ni automatique. Une double autorisation parentale est requise pour le HPV : il en sera probablement de même pour le méningocoque. On constate une certaine inertie par rapport à la vaccination. Il reviendra à la mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (Mecss) d’identifier les points de blocage.
Je me réjouis qu’en matière de santé et de prévention, l’hémicycle soit calme et que nous soutenions tous ces mesures. Bravo à tous !
M. Hadrien Clouet
C’est grâce à une très bonne présidence !
Mme la présidente
La parole est à Mme Nicole Dubré-Chirat.
Mme Nicole Dubré-Chirat
J’appuierai le propos de mes collègues. Alors que les infections à méningocoque connaissent une recrudescence sur le territoire national et que les méningites entraînent des handicaps sévères et lourds, très difficiles à vivre pour les familles et les personnes concernées, on ne peut que se réjouir d’une telle proposition de vaccination – l’association Audrey, dans le Maine-et-Loire la demandait. La prévention est nécessaire et importante. La vaccination des jeunes contre le méningocoque, simultanément à celle contre le papillomavirus, représente une avancée significative.
(L’amendement no 2350 est adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille, pour soutenir l’amendement no 1092.
M. Cyrille Isaac-Sibille
Il porte sur la santé bucco-dentaire. Grâce à la très belle réforme qu’a constitué ces dernières années le dispositif 100 % santé, les couronnes sont prises en charge intégralement par l’assurance maladie et les complémentaires santé.
L’amendement, inspiré de la politique de prévention mise en œuvre en Allemagne, vise à responsabiliser nos concitoyens en prévoyant une bonification – un système de bonus-malus – pour que les patients qui se rendent régulièrement chez leur dentiste soient mieux remboursés que ceux qui ne le font pas. La HAS recommande une visite annuelle chez le dentiste. Nous avons prévu des rendez-vous annuels pour les enfants, nous devons le faire pour les adultes aussi. Notre système de santé va mal, nous devons responsabiliser les acteurs – y compris nous-mêmes en matière de financement – et les patients.
Mme la présidente
Mes chers collègues, sur les amendements nos 2437 et identiques, je suis saisie par le groupe Ensemble pour la République d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement no 1092 ?
M. Yannick Neuder, rapporteur général
Nous avons déjà évoqué cet amendement en commission. Je comprends bien l’idée qui est la vôtre : vous voulez responsabiliser les assurés. Si le patient se rend régulièrement chez le dentiste pour réaliser des examens de prévention bucco-dentaire, on peut supposer qu’il aura moins de problèmes dentaires et que ce serait avantageux pour le système de soins. En revanche, la mise en application de votre idée me semble un peu compliquée.
Votre amendement percute la disposition que nous avons adoptée relative à l’examen bucco-dentaire annuel jusqu’à 24 ans. De plus, plusieurs d’entre vous l’ont dit : certains patients ne demanderaient pas mieux que de profiter d’un examen bucco-dentaire annuel mais il y a une pénurie de chirurgiens-dentistes.
La commission a émis un avis défavorable. Je comprends l’idée, mais je ne vois pas quelle est la finalité précise. Ce serait une usine à gaz. L’amendement mériterait d’être retravaillé pour être présenté à une autre occasion.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Avis défavorable. Vous voudriez subordonner la prise en charge par la sécurité sociale des soins prothétiques à la réalisation des examens de prévention bucco-dentaire annuels. Je comprends la philosophie de cette mesure : les patients qui réalisent ces examens ont, en principe, beaucoup moins besoin de soins prothétiques. Toutefois, les mesures issues de la réforme du 100 % santé dentaire ont amélioré le niveau de prise en charge de certains actes prothétiques dans le but notamment de faciliter l’accès aux soins des personnes défavorisées et éloignées du soin. Prévoir des niveaux de prise en charge différenciés pénaliserait les assurés n’ayant pas réalisé les examens de prévention bucco-dentaires annuels.
L’amendement examiné précédemment concernait la prévention chez les enfants et les jeunes âgés de 3 à 24 ans. Les soins prothétiques s’adressent également à des patients plus âgés – les besoins sont plus forts à des âges plus avancés.
M. Thibault Bazin
Il faut espérer !
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Oui, il faut espérer. Une telle mesure serait source de difficultés et pénaliserait les patients les plus éloignés des soins dentaires, alors que le 100 % santé visait justement à les aider à avoir une meilleure hygiène dentaire.
La convention nationale des chirurgiens-dentistes signée le 21 juillet 2023 avec l’assurance maladie prévoit d’investir largement dans la prévention et définit l’objectif de futures générations sans caries.
La mesure que vous proposez sera sans doute envisageable dans quelques années, pour les générations futures, mais aujourd’hui, cela me paraît difficile. Je ne voudrais pas pénaliser les patients en refusant des soins aux personnes qui ne répondraient pas aux critères.
J’en profite pour répondre à la question que me posait M. Thibault Bazin relative à l’extension jusqu’à l’âge de 28 ans prévue dans l’avenant à la convention nationale des chirurgiens-dentistes. Les soins concernés ne sont pas les mêmes. Il s’agit d’augmenter de 30 % la valorisation des soins conservateurs et de prendre en charge la pose de vernis fluorés jusqu’à 28 ans– ce n’est pas de la prévention.
Mme la présidente
J’ai noté trois demandes de prise de parole. J’ai vu que M. Philippe Vigier était très insatisfait. Je vais donner la parole à M. Cyrille Isaac-Sibille, pour qu’il nous dise s’il maintient son amendement, et à Mme Rist. Je ne donnerai la parole qu’à deux orateurs car nous nous sommes tous entendus pour avancer. (M. Philippe Vigier s’exclame.) M. Isaac-Sibille est pour, évidemment, puisqu’il défend cet amendement, Mme Rist est contre, ce qui fait un pour et un contre – on avance. (Approbations sur les bancs du groupe LFI-NFP. – Protestations sur les bancs du groupe Dem.)
M. Antoine Léaument
Très bien !
Mme la présidente
La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille.
M. Cyrille Isaac-Sibille
Cet amendement va peut-être un peu trop loin – sans doute est-il précurseur –, mais je suis persuadé que nous finirons, comme l’Allemagne, par appliquer une telle mesure si les acteurs de la santé – financeurs ou patients – ne se responsabilisent pas suffisamment à l’avenir. L’entretien annuel d’une voiture ou d’une chaudière est obligatoire pour pouvoir bénéficier de leur garantie. Pourquoi en irait-il différemment pour la santé ? S’agissant de nos concitoyens impécunieux et très éloignés du système de santé, les centres communaux d’action sociale (CCAS) réalisent des missions facultatives susceptibles de prendre en charge leurs soins.
Rappel au règlement
Mme la présidente
La parole est à M. Philippe Vigier, pour un rappel au règlement.
M. Philippe Vigier
Sur le fondement de l’article 100, relatif à la bonne organisation des débats. Après que l’auteur de l’amendement s’est exprimé, il est prévu que deux orateurs d’avis contraires soient entendus. En confondant l’auteur de l’amendement avec l’orateur favorable à l’amendement, vous créez une nouvelle règle !
M. Christophe Bentz et Mme Michèle Martinez
Il faut avancer !
M. Hadrien Clouet
Arrêtez l’obstruction, c’est pénible ! (Sourires.)
Mme la présidente
La conférence des présidents, à l’unanimité, a souhaité que nos débats adoptent un rythme plus rapide. J’ai la possibilité de choisir l’auteur de l’amendement comme orateur en faveur de ce dernier. Nous avons pris le temps nécessaire au débat et nous avons examiné très peu d’amendements depuis le début de la séance, alors que notre volonté partagée est d’avancer plus rapidement.
M. Christophe Bentz
Très bien, madame la présidente !
Après l’article 17 (suite)
Mme la présidente
La parole est à Mme Stéphanie Rist.
Mme Stéphanie Rist
Je suis opposée à la philosophie de cet amendement qui vise à augmenter le reste à charge du patient qui n’aurait pas réalisé son examen de prévention. Pour appliquer une telle mesure de responsabilisation, l’éducation en matière de santé et l’information relative à l’accès aux soins de tous doivent être irréprochables – conditions qui ne sont pas réunies aujourd’hui. Il faut certes favoriser la responsabilisation, eu égard aux enjeux de financement du système de santé, mais si on pousse la logique de cet amendement jusqu’au bout, dirons-nous aux fumeurs ou aux anciens fumeurs que leur cancer du poumon ne sera pas traité, parce qu’ils n’ont pas satisfait à la prévention en continuant à fumer ? Ce débat a eu lieu il y a quelques années, notamment en Angleterre, et je ne partage pas cette façon de voir les choses. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR. – MM. Arthur Delaporte et Yannick Monnet applaudissent également.)
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Yannick Neuder, rapporteur général
Monsieur Isaac-Sibille, pour reprendre votre analogie, je vous assure que, dans certains territoires, il est beaucoup plus facile d’obtenir un rendez-vous chez le garagiste ou chez le chauffagiste que chez le dentiste. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe DR. – M. Hendrik Davi applaudit également.)
M. Arthur Delaporte
Eh oui !
(L’amendement no 1092 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je suis saisie de quatre amendements identiques, nos 2437, 2442, 2444 et 2446.
La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement no 2437.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
La santé mentale, grande cause nationale pour l’année 2025, doit être une priorité de santé publique bien au-delà de l’an prochain. Depuis 2022, le dispositif Mon soutien psy permet le remboursement de séances chez les psychologues conventionnés en ville…
Mme Élise Leboucher
Ils ne sont pas nombreux !
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
…pour l’ensemble de la population dès l’âge de 3 ans, après adressage par un médecin, une sage-femme ou un professionnel de santé de la médecine scolaire. Il est primordial de simplifier l’accès à une offre de soins en santé mentale, en cohérence avec l’augmentation du tarif des séances et du nombre de séances prises en charge – la consultation est désormais valorisée à 50 euros, au lieu de 30 euros, et chaque assuré a droit à douze séances annuelles, au lieu de huit.
Le Gouvernement propose de supprimer la condition d’adressage préalable, afin de permettre aux patients concernés d’intégrer directement le dispositif et de bénéficier du suivi psychologique pris en charge par l’assurance maladie et assuré par un psychologue conventionné. Ces évolutions faciliteront l’inscription des psychologues dans le dispositif Mon soutien psy, qui se déploie trop lentement au goût de certains, et de la réussite duquel dépendent les progrès dans l’accès aux soins de santé primaires et aux soins de prévention primaire en matière de santé mentale.
Mme la présidente
La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales, pour soutenir l’amendement no 2442.
M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales
Il s’agit de concrétiser des annonces faites par l’ancien Premier ministre Gabriel Attal dans son discours de politique générale et étudiées au printemps dernier, visant à rendre plus attractif et donc plus efficace le dispositif innovant Mon soutien psy, qui souffrait de deux verrous. Le premier résidait dans un tarif estimé trop bas par les professionnels et désormais fixé à 50 euros, et dans un nombre de consultations prises en charge estimé lui aussi trop bas et qui est passé de huit à douze. Le second verrou à lever était celui des conditions d’accès, et nous avons souhaité autoriser l’accès direct au dispositif, sans condition d’adressage par un médecin, un médecin scolaire ou une sage-femme, pour faciliter la prise en charge psychologique.
J’espère que cet amendement, qui a été étudié avec les professionnels et satisfait tous les acteurs, fera l’unanimité. Son adoption favorisera une meilleure prise en charge, limitée aujourd’hui par la crise du secteur de la santé mentale et le faible nombre de professionnels intégrés au dispositif, rendu désormais plus attractif.
Mme Natalia Pouzyreff
Très bien !
Mme la présidente
L’amendement no 2444 de Mme Stéphanie Rist est défendu.
La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille, pour soutenir l’amendement no 2446.
M. Cyrille Isaac-Sibille
Le libre accès aux psychologues est une très bonne chose, mais le décret d’application devra prévoir une information du médecin traitant, acteur pivot de notre santé, par l’intermédiaire de l’outil numérique Mon espace santé.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Yannick Neuder, rapporteur général
Ces amendements visent à mieux prendre en charge la détresse psychologique de beaucoup de nos concitoyens, multiple et variée, liée à nos rythmes de vie comme à l’éco-anxiété particulièrement présente chez les jeunes et plus importante qu’on ne le pense. Je ne suis pas un fervent partisan de l’accès direct. C’est pourquoi, comme le préconise M. Isaac-Sibille, informer le médecin traitant me paraît à tout le moins nécessaire.
La commission des affaires sociales, à la demande de M. Peytavie, a prévu qu’un rapport évalue si le nouveau dispositif – douze séances en accès direct – a permis de mieux régler les problèmes rencontrés par les patients. S’il n’a pas été suffisant, une médicalisation – la prescription d’anxiolytiques ou de psychotropes – a-t-elle été nécessaire ? Y a-t-il eu recours à une hospitalisation en psychiatrie ?
Je suis donc favorable à ces amendements visant à une meilleure prise en charge psychologique de la population, sous réserve que le médecin traitant soit informé et que l’évaluation du dispositif soit réalisée, notamment s’agissant de ses conséquences sur les pratiques professionnelles ainsi que sur le recours à l’hospitalisation et à la médicalisation.
Enfin, pour être complet sur le sujet de la prise en charge psychologique, n’oublions pas le manque chronique de moyens dont souffrent les centres médico-psychologiques (CMP) dans nos territoires. Ils éprouvent de grandes difficultés à recruter des psychologues pour proposer des rendez-vous dans des délais satisfaisants. Les délais constatés de dix-huit mois, voire de deux ans, sont sources d’inquiétude pour la prise en charge, notamment des enfants et des plus jeunes.
M. Thibault Bazin
Il existe aussi les CMPP et les Camsp !
Mme la présidente
La parole est à Mme Nicole Dubré-Chirat.
Mme Nicole Dubré-Chirat
Lors de sa création en 2022, le dispositif innovant Mon soutien psy n’a pas suscité l’enthousiasme général des psychologues, compte tenu du tarif trop faible de la consultation, du nombre limité de consultations prises en charge et de la condition d’adressage préalable. Dans le cadre de notre mission d’information sur la prise en charge des urgences psychiatriques, Sandrine Rousseau et moi-même avons pu constater une augmentation de la prise en charge par le dispositif Mon soutien psy, un nombre moyen de six consultations par personne et un adressage non systématique à la psychiatrie ou à l’hospitalisation. Si 380 000 psychologues sont aujourd’hui intégrés au dispositif, la suppression de l’adressage et l’augmentation du tarif et du nombre de consultations vont faciliter l’accès direct et éviter en outre la stigmatisation : il est plus facile d’aller consulter un psychologue qu’un psychiatre, et le travail de psychothérapie peut éviter les traitements lourds et réitérés, prescrits par des médecins généralistes et pas toujours adaptés.
Mme la présidente
La parole est à M. Philippe Gosselin.
M. Philippe Gosselin
Nous apportons notre soutien au dispositif Mon soutien psy. Les causes de la détresse psychologique ont été évoquées, notamment les rythmes et les modes de vie qui accroissent l’anxiété ou encore l’éco-anxiété. Ne sous-estimons pas non plus les effets de la covid : nombre d’étudiants se sont retrouvés tout à fait seuls, parfois en grande difficulté non seulement morale, psychologique, mais aussi alimentaire.
M. Antoine Léaument
Et financière !
M. Philippe Gosselin
Le sujet est toujours prégnant. Nous ne pouvons donc que souscrire aux avancées proposées par ces amendements, à condition de les évaluer – nous ne devrions même pas avoir à le préciser, tant l’évaluation des nouvelles politiques publiques devrait être un réflexe.
Enfin, je souscris à la demande de notre collègue Isaac-Sibille visant à informer le médecin traitant, mais n’oublions pas que les jeunes sont justement les moins nombreux à disposer d’un médecin traitant et qu’il est parfois très difficile, en milieu rural, de trouver un médecin tout court.
Mme la présidente
Je mets aux voix les amendements identiques nos 2437, 2442, 2444 et 2446.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 176
Nombre de suffrages exprimés 107
Majorité absolue 54
Pour l’adoption 107
Contre 0
(Les amendements identiques nos 2437, 2442, 2444 et 2446 sont adoptés.)
Mme la présidente
La parole est à M. René Lioret, pour soutenir l’amendement no 1585.
M. René Lioret
Je serai bref, pour nous donner toutes les chances d’arriver à l’article 23, mais je tiens à défendre l’amendement, car il concerne le sujet important des transports sanitaires, qui représentent un budget de 6 milliards d’euros pour la sécurité sociale. Cette somme est d’autant plus considérable que le financement pour 2025 est contraint.
L’amendement vise à lutter contre la fraude. La Cour des comptes et la Caisse nationale de l’assurance maladie (Cnam) ont estimé que sur ces 6 milliards de dépenses, environ 200 millions sont liés à la fraude. Ainsi, le coût des fraudes au transport en véhicule sanitaire léger (VSL), en ambulance ou en taxi conventionné, qui représentait 19 millions d’euros en 2018, s’élève à 34 millions en 2023. Elle a donc augmenté de 80 % en cinq ans.
Nous proposons donc d’équiper tous les véhicules de transport sanitaire d’un système de géolocalisation permettant de tracer en temps réel le trajet parcouru, ce qui évitera que soient déclarées des distances fantaisistes, voire de fausses courses.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Yannick Neuder, rapporteur général
Je comprends le but de l’amendement et partage l’ambition de lutter efficacement contre la fraude au transport sanitaire. Nous sommes tous d’accord pour cela. Cependant, je ne saurais lui donner un avis favorable, pour des raisons de cohérence. Hier, l’article 16 aurait pu nous donner l’occasion de parler en détail des mesures relatives au transport sanitaire et d’aborder des propositions fort judicieuses évoquées en commission, qui concernaient par exemple la géolocalisation des véhicules ou le déclenchement automatique de la facturation. Or le groupe Rassemblement national a voté sa suppression. Avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Vous proposez de rendre obligatoire l’installation d’un dispositif de géolocalisation dans les véhicules de transport sanitaire.
Bien sûr, je partage l’objectif d’améliorer la qualité des données recueillies par l’assurance maladie, afin de facturer et de rembourser au mieux les transports et de lutter contre la fraude qui, si elle n’est pas généralisée, existe dans ce secteur. Cependant, des actions ont été engagées dans ce sens, notamment au moyen d’une grille tarifaire incitative pour les entreprises ayant équipé leurs véhicules d’un dispositif de géolocalisation et d’un système de facturation spécifique.
En outre, la date que vous proposez me semble trop proche, ce qui pourrait mettre en danger l’effectivité du transport des patients. Je reste ouverte à la poursuite de discussions dans le cadre du débat parlementaire, mais je suis défavorable à votre amendement, car il est techniquement impossible à mettre en œuvre.
(L’amendement no 1585 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Sur les amendements identiques nos 2439 et 2443, je suis saisie par le groupe Ensemble pour la République d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. René Lioret, pour soutenir l’amendement no 1586.
M. René Lioret
Il s’inscrit dans la même logique que le précédent, à ceci près qu’il ne concerne pas la fraude au transport sanitaire, mais les abus en la matière. De nombreux médecins prescrivent systématiquement un transport en ambulance, alors qu’ils pourraient prescrire un transport en VSL ou en taxi. Il est donc nécessaire d’informer et de sensibiliser le corps médical quant au coût des transports publics. Quant aux transporteurs, il leur arrive très souvent de mobiliser un véhicule plus coûteux que nécessaire. La Cour des comptes a estimé ces dépenses à 65 millions d’euros.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Yannick Neuder, rapporteur général
Nous avons eu ce débat en commission. Je demeure d’accord qu’il faut lutter contre la fraude, mais je ne comprends pas en quoi le dispositif que vous proposez serait efficient. J’ai devant moi un bon de transport rempli, signé et daté par un médecin ; le transporteur n’a qu’à vérifier que ce document est en bonne et due forme. Cessons d’alourdir les procédures ! Nous souhaitons tous, je crois, la simplification, l’efficacité et la débureaucratisation des procédures.
M. Fabien Di Filippo
Oui !
M. Yannick Neuder, rapporteur général
Je vous assure qu’il est déjà complexe de remplir un bon de transport. Du moment que le transporteur vérifie l’identité du patient, la date du bon et la signature du médecin, je ne vois pas ce qu’il faudrait y ajouter. Quant à modifier les informations indiquées sur le bon de transport, il s’agit bien sûr d’une infraction. Ne compliquons pas davantage les choses et laissons les professionnels de santé et du transport s’occuper des patients. Avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Comme l’a dit M. le rapporteur général, les dispositions visant à s’assurer que la prescription est conforme aux indications en matière de prise en charge des transports sanitaires par l’assurance maladie ont été supprimées hier avec l’article 16, ce qui ne facilite pas les choses. Néanmoins, en l’état du droit, le transporteur délivre déjà une attestation de service à l’issue du trajet. Je suis défavorable à cet amendement qui ferait doublon avec une procédure administrative existante.
(L’amendement no 1586 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 2439 et 2443.
La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement no 2439.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Il vise à étendre à vingt départements maximum l’expérimentation de l’accès direct aux masseurs-kinésithérapeutes participant à une communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS). Si vous me le permettez, je laisserai Stéphanie Rist défendre l’amendement, puisqu’elle a beaucoup travaillé sur ce sujet. Le Gouvernement y est favorable et lèvera le gage.
M. Fabrice Brun
Heureusement qu’elle peut le défendre, c’est son amendement !
Mme la présidente
La parole est à Mme Stéphanie Rist, pour soutenir l’amendement no 2443.
Mme Stéphanie Rist
Il fait suite à la loi du 19 mai 2023 portant amélioration de l’accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé, qui a permis d’expérimenter dans certains départements l’accès direct à la kinésithérapie dans le cadre des CPTS. En votant cette mesure, notre assemblée avait indiqué qu’elle en souhaitait l’évaluation, comme M. le rapporteur général l’a rappelé s’agissant des précédents amendements au sujet de l’accès direct. Or pour réaliser cette évaluation, il est nécessaire d’étendre l’expérimentation à un plus grand nombre de départements. C’est ce que je propose de faire par cet amendement, d’autant que plusieurs départements ont signalé leur intérêt pour cette démarche. (Mme Olivia Grégoire applaudit.)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Yannick Neuder, rapporteur général
L’amendement vise à étendre l’expérimentation votée dans le cadre de la loi Rist 2. J’entends les arguments de Mme Rist, mais je n’y souscris pas.
M. Fabrice Brun
Nous ne souscrivons pas à la loi Rist 2, d’ailleurs ! Il y en a marre des expérimentations, nous voulons de l’action en la matière !
M. Yannick Neuder, rapporteur général
Certaines CPTS fonctionnent très bien, et leur organisation permet sans doute l’accès direct. D’autres sont moins volontaires et font plutôt de l’affichage, ce qui ne garantit pas le niveau requis pour autoriser l’accès direct. Je ne suis pas opposé par principe aux CPTS ; certaines fonctionnent et c’est tant mieux, mais, là où elles ne fonctionnent pas, il faut leur préférer d’autres formes d’organisation. Je rappelle par exemple que les maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP) permettent plus de concertation entre les médecins et les personnels paramédicaux.
Je ne tiens pas à être pénible, mais je souhaite rester vigilant. Avis de sagesse.
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Je tiens à souligner l’importance des CPTS. Ce sont des communautés médicales à l’échelle de chaque territoire, de chaque bassin de vie, où les professionnels se connaissent et travaillent ensemble, même s’ils n’appartiennent pas à la même structure et ont des habitudes diverses. L’élargissement de l’expérimentation à un maximum de vingt départements nous permettra d’en évaluer le fonctionnement, ce qui me paraît crucial.
Mme la présidente
La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille.
M. Cyrille Isaac-Sibille
Je suis très réservé. Je suis pour l’exercice coordonné que permettent des structures telles que les maisons médicales, mais je ne sais pas si les CPTS le concrétisent de manière satisfaisante, car certaines d’entre elles sont très larges. Je n’adhère donc pas vraiment à la proposition de Mme Rist.
D’autre part, l’exposé des motifs des amendements acte en quelque sorte l’échec des CPTS, puisqu’il souligne « le nombre restreint de masseurs-kinésithérapeutes exerçant en CPTS ». Si vous proposez d’étendre l’expérimentation de l’accès direct, c’est parce que trop peu de kinésithérapeutes adhèrent aux CPTS, ce qui signifie qu’elles ne fonctionnent pas.
Pour ces deux raisons, je crois souhaitable d’évaluer les CPTS dans le cadre de la Mecss.
M. Thibault Bazin
Eh oui ! Il faut évaluer les CPTS, qui coûtent très cher.
Mme la présidente
La parole est à M. Philippe Vigier.
M. Philippe Vigier
Je ne suis pas d’accord avec mon collègue Isaac-Sibille. Je soutiens la loi adoptée en 2023 et dont les décrets d’application, très attendus, vous seront sans doute agréables à signer, madame la ministre – car il y a toujours un délai entre le vote d’une loi et son application.
Comme l’a dit M. le rapporteur général, un grand nombre de CPTS fonctionnent très bien, même si ce n’est pas le cas de quelques-unes. J’ai la chance d’en avoir une, dans mon département, qui a fait ses preuves. L’approche globale de la prise en charge des patients promue par les CPTS, passant par un projet de santé validé par l’ensemble des professionnels, est très efficace. Elle a d’ailleurs fait ses preuves en matière de soins non programmés dans l’ensemble du sud de l’Eure-et-Loir.
Mme Rist a raison : il faut élargir le panel de l’expérimentation, ce qui permettra de mieux l’évaluer.
Monsieur Isaac-Sibille, la délégation de tâches et la possibilité d’accès direct sont dans l’air du temps. Allons-y !
M. Thierry Benoit
Très bien, monsieur Vigier !
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Yannick Neuder, rapporteur général
Monsieur Vigier, ne me titillez pas. Tout se passait si bien ! (Sourires.) Je suis d’accord avec M. Isaac-Sibille : il faut que la Mecss évalue le fonctionnement des CPTS.
M. Thibault Bazin
Oui !
M. Yannick Neuder, rapporteur général
Ce serait une erreur que de refuser de les évaluer et d’affirmer que toutes les mesures instaurées fonctionnent parfaitement. Certaines CPTS fonctionnent très bien, tandis que, dans certains endroits, les professionnels peinent à s’organiser.
Nous devons défendre nos convictions et faire preuve de cohérence avec ce que nous avons défendu par le passé. Nous nous étions fortement opposés à la volonté de rendre ces CPTS obligatoires pour les professionnels de santé. Nous étions en désaccord sur ce point. Vouloir que tout professionnel libéral soit systématiquement rattaché à une CPTS, c’est ne pas respecter l’exercice libéral des praticiens médicaux et paramédicaux.
Quand les gens ont envie de travailler ensemble, ils le font. Certes, il peut y avoir des incitations à la concertation et à la coordination. Cependant, pour avoir exercé la médecine assez longtemps, je peux vous dire que nous n’avions pas besoin d’incitations financières ou autres pour travailler avec des correspondants qui exerçaient en ville. De même, les correspondants, dans ma circonscription, n’ont pas besoin d’une CPTS, dont on ne connaît d’ailleurs pas le coût, pour collaborer. Ce n’est donc pas tout blanc ou tout noir. La mission d’évaluation proposée par Cyrille Isaac-Sibille permettrait justement de tirer au clair cette situation…
M. Thibault Bazin
Oui !
M. Yannick Neuder, rapporteur général
…sans stigmatiser personne, et sans non plus affirmer que les CPTS sont l’alpha et l’oméga de la pratique professionnelle dans les territoires.
Mme la présidente
Je mets aux voix les amendements identiques nos 2439 et 2443.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 170
Nombre de suffrages exprimés 154
Majorité absolue 78
Pour l’adoption 152
Contre 2
(Les amendements identiques nos 2439 et 2443 sont adoptés.)
Mme la présidente
La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille, pour soutenir l’amendement no 1109.
M. Cyrille Isaac-Sibille
Il pourrait permettre à l’hémicycle de se rattraper, s’il le souhaite.
M. Arthur Delaporte
Mais non ! (Sourires.)
M. Cyrille Isaac-Sibille
Il s’agit d’une expérimentation dans quelques départements, qui va dans le sens d’une responsabilisation des patients.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Yannick Neuder, rapporteur général
Avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Je vous répondrai selon la même logique que précédemment. Je comprends le principe et je pense qu’il s’agit d’amendements futuristes, c’est-à-dire qu’ils pourront être adoptés quand une véritable politique de prévention sera effective.
M. Thibault Bazin
C’est Retour vers le futur ! Il les dépose chaque année ! (Sourires.)
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Non, c’est aller vers un futur meilleur pour les dents. Nous devons effectivement déployer tous les moyens pour réaliser les bilans de prévention. Actuellement, ces bilans sont entièrement pris en charge pour les patients entre 3 et 24 ans. Les personnes de 60 ou 70 ans qui ont besoin de soins dentaires, par exemple d’une couronne, ne peuvent pas prouver qu’elles ont réalisé un bilan de prévention régulier. Je pense donc que la mesure que vous proposez serait difficile à appliquer. En revanche, dans le futur, quand les politiques de prévention seront déployées et solides, vous avez raison, il devra être obligatoire de réaliser ces bilans et ceux qui ne le feront pas seront pénalisés ; je suis d’accord. Pour l’instant, c’est trop tôt.
L’avis du Gouvernement est donc défavorable.
Mme la présidente
Je suis saisie de plusieurs demandes de scrutin public : par le groupe Les Démocrates sur l’amendement no 2292, et par le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire sur l’amendement no 1246.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Yannick Monnet.
M. Yannick Monnet
Madame la ministre, franchement, vous ne pouvez pas dire que cet amendement est l’expression d’une politique futuriste ! Pour moi, le futur, ce n’est pas ça, ce n’est pas sanctionner les patients mais que tout le monde puisse avoir accès aux soins dentaires.
Chers collègues, mesurez-vous la situation actuelle des soins dentaires ? Pour avoir un rendez-vous, il faut quasiment six mois.
M. Arthur Delaporte
Parfois un an ou deux !
M. Yannick Monnet
Grosso modo, les patients ne pourront que prendre des rendez-vous tous les ans pour faire de la prévention sans avoir accès aux soins. Pourquoi voulez-vous culpabiliser et faire payer les patients ? En effet, cela revient à ça.
M. Cyrille Isaac-Sibille
Il ne s’agit pas de les sanctionner !
M. Yannick Monnet
Mais dans certains territoires, les gens n’ont pas accès aux dentistes. Quant à ceux qui y ont accès, ils font face à un problème de reste à charge tellement important que les gens rechignent à aller chez le dentiste. Et vous, vous voulez les sanctionner parce qu’ils n’ont pas fait de bilan ! La situation actuelle n’a rien à voir avec ça : le problème est d’accéder au dentiste et de se faire soigner. Nous sommes bien loin des ambitions de prévention. En aucun cas ce n’est futuriste, cette affaire !
Mme la présidente
La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille.
M. Cyrille Isaac-Sibille
D’abord, je crois beaucoup à la délégation de tâches. Souvenez-vous du problème des ophtalmologues : grâce à des dispositions législatives que nous avons votées, désormais les orthoptistes peuvent effectuer certains actes, de sorte qu’il y a beaucoup moins d’attente qu’il y a six mois pour obtenir un rendez-vous avec un ophtalmologue.
M. Frédéric Valletoux
C’est vrai !
M. Yannick Monnet
Il y a des maladies des yeux !
M. Cyrille Isaac-Sibille
Concernant les dentistes, nous avons voté des dispositions créant un statut d’assistants dentaires de niveau 2, qui réaliseront de la prévention. Ce n’est pas aux dentistes de détartrer et d’aller chercher les caries mais aux assistants dentaires de niveau 2. Je pense qu’il y en aura de plus en plus. Ce n’est pas un amendement futuriste.
M. Yannick Monnet
Non !
M. Cyrille Isaac-Sibille
Je pense que cet amendement sera appliqué d’ici deux ou trois ans. Sincèrement, je crois que, si nous ne mettons pas rapidement en place dans notre pays une bonne politique de prévention, c’est notre système de soins qui s’écroulera. Ce n’est donc pas futuriste : d’ici deux ou trois ans, nous devons tous nous responsabiliser pour sauver notre système de santé.
M. Yannick Monnet
Nous n’avons pas de dentistes !
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Yannick Neuder, rapporteur général
J’entends les arguments de Cyrille Isaac-Sibille, en particulier le fait que certaines tâches peuvent être déléguées aux assistants dentaires de niveau 2. Néanmoins, je voudrais rappeler quelques chiffres : sur 26 000 inscriptions annuelles au Conseil national de l’Ordre des chirurgiens-dentistes, la moitié émane de professionnels formés hors de France.
M. Cyrille Isaac-Sibille
Oui, tant mieux : ils reviennent !
M. Yannick Neuder, rapporteur général
Notre problème est là : nous avons clairement perdu le contrôle de notre système de formation.
M. Thibault Bazin
Il y a un problème de qualité : certains ne sont pas validés !
M. Yannick Neuder, rapporteur général
J’espère que nous pourrons y remédier au plus vite. Soyons clairs. Pourquoi 50 % des chirurgiens-dentistes qui s’inscrivent au Conseil de l’Ordre ne sont-ils pas formés en France ?
M. Philippe Vigier et Mme Stéphanie Rist
Et alors, nous sommes en Europe !
M. Yannick Neuder, rapporteur général
C’est pourtant un vrai problème que nous ne puissions pas former les dentistes dont nous avons besoin. La proportion d’un sur deux a été confirmée par le Conseil de l’Ordre au cours de plusieurs auditions, monsieur Vigier ; nous pouvons vérifier les chiffres autant qu’on veut, ils demeurent inquiétants.
M. Cyrille Isaac-Sibille
Heureusement qu’ils sont là !
M. Yannick Neuder, rapporteur général
Je suis tout à fait d’accord, mais cette situation soulève néanmoins des interrogations. Il ne s’agit pas d’un jugement sur quiconque ni d’une injonction. Nous sommes tous d’accord pour voter et déployer des politiques de prévention ; cependant nous pouvons nous poser la question des ressources et celle de savoir qui accomplira ces gestes de prévention.
M. Cyrille Isaac-Sibille
Les assistants !
M. Yannick Neuder, rapporteur général
En parallèle des politiques de prévention que nous approuvons tous, nous pourrions développer une politique pour former plus de chirurgiens-dentistes. Cette proposition n’a rien d’extraordinaire.
M. Jean-François Rousset
Ça n’a rien à voir !
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Je remercie le rapporteur général de lancer le débat. Je partage la préoccupation de tous ceux qui se sont exprimés au sujet de l’accès à un chirurgien-dentiste. Il est vrai qu’il y a des territoires où c’est très difficile : les listes d’attente sont importantes ; il est même compliqué de trouver un professionnel de garde pour soigner un problème dentaire urgent – et Dieu sait que c’est douloureux ! J’ai bien conscience de tout cela.
Néanmoins, je tiens à rappeler que le nombre de places dans les formations de dentistes a augmenté de 25 % après la suppression du numerus clausus et de la première année commune aux études de santé (Paces).
Mme Danielle Brulebois
Oui !
M. Thibault Bazin
Il faut former deux dentistes pour en remplacer un !
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Ce n’est certainement pas assez, mais vous savez bien que nous ne pouvons pas augmenter de façon massive le nombre d’étudiants pour des raisons pratiques : il faut des formateurs et des installations pour les recevoir. Tout le monde est bien conscient de l’écart entre la situation que nous souhaiterions, les injonctions que nous voudrions donner et la réalité. Moi, je suis vraiment dans le concret. Ces questions sont importantes et nous y travaillons.
Pour revenir sur la question des bilans de prévention, sans doute exagérais-je un peu en disant que l’amendement était futuriste. Quand nos politiques de prévention seront bien et totalement structurées, je pense qu’on pourra faire de ce bilan une obligation. Ce qui m’importe, c’est d’abord que cela améliorerait la santé des gens. Secondairement, cela entraînerait moins de soins et donc de coûts pour la société.
Mme la présidente
La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille.
M. Cyrille Isaac-Sibille
Je retire l’amendement.
(L’amendement no 1109 est retiré.)
M. Cyrille Isaac-Sibille
Il est futuriste. Ce sera pour l’année prochaine ! (Sourires.)
Mme la présidente
La parole est à M. Romain Daubié, pour soutenir l’amendement no 2292.
M. Romain Daubié
Il n’aura échappé à personne qu’existe une pluralité d’opinions dans cet hémicycle, où cette diversité s’exprime parfois bruyamment. Néanmoins, certains sujets doivent tous nous rassembler ; nous pouvons alors tous nous engager dans le même chemin. Je défends cet amendement avec notre estimée et courageuse collègue Sandrine Rousseau… (Sourires et applaudissements sur divers bancs.) Sandrine Josso, pardon. Il vise à autoriser, pour une durée de trois ans, l’assurance maladie à rembourser les tests permettant la détection d’une soumission chimique.
Ces tests, qui doivent être réalisés dans des laboratoires spécifiques, peuvent coûter jusqu’à 1 000 euros. En outre, les délais durant lesquels ils peuvent être réalisés sont très restreints. Je précise que le Conseil national de l’Ordre des médecins (Cnom) est favorable à une telle mesure. Enfin, je dirais que cela va dans le sens, que je défends toujours dans cet hémicycle, d’une meilleure prise en charge des victimes de délits et de crimes. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem. – M. Laurent Panifous et Mme Stéphanie Rist applaudissent également.)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Yannick Neuder, rapporteur général
Vous défendez brillamment l’amendement déposé par Mme Josso sur la soumission chimique, les graves effets néfastes et les préjudices qu’elle peut entraîner. Vous souhaitez ainsi sensibiliser l’hémicycle à la question du remboursement. Ces analyses, dont vous avez indiqué le coût, sont très onéreuses ; elles sont cependant nécessaires pour identifier la substance qui a été administrée à l’insu de la victime. Le point de vue que vous développez dans cet amendement a été examiné avec beaucoup d’intérêt par le Conseil national de l’Ordre des médecins : comme vous le savez, il a publié, il y a quelques jours, un avis favorable à ce remboursement.
L’amendement avait été adopté par la commission des affaires sociales, et l’avis de la commission est très favorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Je remercie Romain Daubié d’avoir présenté l’amendement… avec lequel je suis sûre que Sandrine Rousseau est d’accord. (Sourires.) J’ai une pensée pour Sandrine Josso, qui ne peut pas être avec nous aujourd’hui. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, LFI-NFP, SOC, DR, EcoS, Dem, HOR, LIOT et GDR.) Je sais qu’elle porte cela dans sa chair. Il est donc important que nous pensions à elle dans ce moment. Avec elle, vous proposez d’expérimenter dans trois régions pendant trois ans le remboursement par l’assurance maladie des tests de détection, car cela faciliterait leur accès en dehors des laboratoires de toxicologie.
Nous devons améliorer la réponse à ces urgences et la prise en charge des victimes de tels agissements, tout en nous assurant de la robustesse et de la qualité des produits de santé remboursés par l’assurance maladie. Votre proposition est adaptée, puisque l’expérimentation nous permettra d’évoluer vers le droit commun, dans des conditions satisfaisantes pour tous. Avis très favorable. (M. Olivier Falorni applaudit.)
Mme la présidente
La parole est à M. Arthur Delaporte.
M. Arthur Delaporte
Je serai bref, car nos collègues du Modem ont bien défendu l’amendement de Sandrine Josso, que je remercie. Alors que se déroule le procès Pélicot, le remboursement des tests visant à détecter la soumission chimique est d’actualité, mais il pose aussi la question plus large des carences de la prise en charge des victimes de violences sexuelles. Des personnes ont témoigné n’avoir pas été dirigées vers un parcours de tests après le dépôt de plainte. Parfois, les victimes doivent se battre contre un système qui leur refuse l’accès à ces tests. L’expérimentation leur permettra de dépasser ce que leur autorise l’institution judiciaire.
Mme la présidente
La parole est à M. Philippe Vigier.
M. Philippe Vigier
Naturellement, j’ai une pensée affectueuse pour Sandrine Josso. C’est un message très fort que l’Assemblée envoie aux femmes…
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Et aux hommes !
M. Philippe Vigier
…victimes de soumission chimique et de violences sexuelles. Nous savons que c’est le parcours du combattant pour qu’elles soient écoutées et crues, et qu’elles puissent déposer une plainte, le cas échéant.
En outre, si les analyses ne sont pas faites dans les plus courts délais après les faits, une grande partie des traces – et donc des pièces à conviction – disparaissent malheureusement, empêchant la justice d’en disposer le jour où elle se saisira de ces dossiers. C’est vraiment important, comme l’a dit mon collègue Delaporte. Cet après-midi, nous vivrons un beau moment, si nous adoptons ensemble, à l’unisson, cet amendement. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Dem.)
M. Christophe Blanchet
Bravo !
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 2292.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 182
Nombre de suffrages exprimés 182
Majorité absolue 92
Pour l’adoption 182
Contre 0
(L’amendement no 2292 est adopté.)
(Applaudissements.)
Mme la présidente
La parole est à M. Théo Bernhardt, pour soutenir l’amendement no 1933.
M. Théo Bernhardt
L’amendement est défendu. Depuis la reprise des débats, les collègues du bloc gouvernemental semblent être un peu plus bavards que d’habitude, comme s’ils voulaient nous empêcher d’arriver à l’article 23. (M. Cyrille Isaac-Sibille s’exclame.)
Mme Stéphanie Rist
Ça n’intéresse pas l’Assemblée !
M. Cyrille Isaac-Sibille
Parlons de santé !
M. Julien Guibert
Nous ne vous avons pas vus le reste du temps !
M. Théo Bernhardt
J’espère que nous pourrons quand même en débattre, car cet article est très important. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Yannick Neuder, rapporteur général
Avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Ce sont des articles importants, qui intéressent nos concitoyens. Vous parlez à longueur de journée de l’intérêt concret des personnes : les soins dentaires, la prévention, l’accès aux soins, tout cela est très concret pour tous les Français, ceux de la ville et ceux de la campagne. Il faut prendre le temps d’en débattre. (Applaudissements sur quelques bancs des groupe EPR et Dem.)
L’amendement vise à demander un rapport sur l’efficacité du remboursement des dépistages sérologiques du VIH par l’assurance maladie.
M. Philippe Vigier
C’est honteux ! Lamentable !
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Il y a déjà un rapport : le suivi épidémiologique effectué et publié chaque année par Santé publique France. On estime à 7,7 millions le nombre de sérologies VIH réalisées par les laboratoires de biologie médicale. Ce nombre est en augmentation plus marquée par rapport à 2022, en raison, notamment, du dispositif VIHtest – dépistage gratuit, sans ordonnance et sans rendez-vous, en laboratoire de biologie médicale. Entre 2012 et 2023, le nombre de découvertes de séropositivité est en baisse de 10 %. Il est donc déjà possible de mesurer l’efficacité de ces politiques de dépistage. Avis défavorable.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 1933.
(Le vote à main levée n’ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 147
Nombre de suffrages exprimés 131
Majorité absolue 66
Pour l’adoption 53
Contre 78
(L’amendement no 1933 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je suis saisie de trois amendements, nos 1246, 2076 et 396, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à Mme Anne Stambach-Terrenoir, pour soutenir l’amendement no 1246.
Mme Anne Stambach-Terrenoir
Nous demandons un rapport évaluant le dispositif Mon soutien psy et, surtout, la possibilité de réaffecter les crédits alloués vers le recrutement de psychologues en CMP et en centre médico-psycho-pédagogique (CMPP). En 2024, 170 millions d’euros ont été consacrés à ce dispositif élaboré sans concertation avec les psychologues et les usagers, alors que Mon soutien psy est un échec, notamment parce que la réalité du temps long du travail thérapeutique est niée. Cela prend du temps d’établir un lien de confiance avec un thérapeute, de mettre des choses en place et d’en évaluer l’efficacité. Or après les douze séances prises en charge, vous avez un choix impossible : soit vous poursuivez en libéral, ce que la grande majorité de la population ne peut pas se permettre ; soit vous vous tournez vers le secteur public et vous attendez six mois, un an, parfois même deux ans, pour obtenir un rendez-vous en CMP.
Selon nos calculs, avec ces 170 millions, on pourrait financer 2 500 postes de psychologues en CMP. L’urgence est là : 40 à 60 % des patients ne reçoivent pas de soins en temps voulu. Si vous voulez faire de la santé mentale une grande cause nationale, investissez dans le secteur public. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente
La parole est à M. Hendrik Davi, pour soutenir l’amendement no 2076.
M. Hendrik Davi
Cet amendement de mon collègue Sébastien Peytavie, cosigné par le rapporteur général, propose un rapport d’évaluation de Mon soutien psy. Je rejoins les propos de ma collègue Anne Stambach-Terrenoir.
Mme la présidente
La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l’amendement no 396.
M. Thibault Bazin
Fin 2023, un numéro de la revue de l’Union nationale des associations familiales (Unaf) consacré aux réalités familiales invitait à mieux soutenir et accompagner, quand ils le souhaitent, les couples qui traversent des épreuves de la vie – problèmes financiers, soucis de santé d’un membre de la famille, ou difficultés avec l’éducation d’un enfant. Ces problèmes peuvent entraîner de la précarité et avoir des conséquences sur les enfants.
Madame la ministre, votre amendement no 2437, qui a été adopté permettra-t-il de répondre à ces attentes relayées par l’Unaf ? Elles méritent d’être prises en considération.
M. Vincent Rolland
Il a raison !
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Yannick Neuder, rapporteur général
Ce sujet a longuement été évoqué en commission. L’amendement de M. Peytavie a fait l’objet d’un accord unanime, en raison de sa meilleure rédaction et de sa plus grande amplitude.
Monsieur Bazin et madame Stambach-Terrenoir, ce que vous dites a été entendu. Madame la députée, vous avez questionné le dispositif qui permet un accès direct au psychologue. Au terme des douze séances, quelle est l’évolution ? Le patient est-il considéré comme guéri ? A-t-il besoin d’une prise en charge supplémentaire ? Sous quelle forme ? La médicalisation ou l’hospitalisation ? Ces éléments, qui doivent être précisés, feront l’objet du rapport de M. Peytavie.
Je partage votre constat de la détresse des CMP, qui auraient grand besoin d’être renforcés, mais ce n’est pas l’objet de l’amendement.
Ce sera donc un avis favorable sur l’amendement no 2076, sous-amendé en commission afin d’intégrer les éléments d’évaluation médicaux sur l’accès direct, et une demande de retrait, sinon avis défavorable, sur les autres amendements.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Avis défavorable, car les amendements sont satisfaits : le rapport d’évaluation de Mon soutien psy est arrivé hier soir, me semble-t-il, à l’Assemblée nationale.
M. Arthur Delaporte
Ah ?
M. Aurélien Rousseau
Avec le rapport sur les ARS !
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Selon ce rapport, l’expérimentation d’accès aux consultations psychiatriques est menée à un bon niveau, et il est intéressant de la poursuivre et de l’amplifier. Les augmentations du coût de la consultation et du nombre d’heures, ainsi que l’élargissement de l’accès, vont dans le bon sens.
Je partage avec vous le constat du manque de psychologues cliniciens, notamment dans les établissements qui accueillent les personnes ayant des problèmes psychiques ou en situation de handicap – je pense aux CMPP et aux centres d’action médico-sociale précoce (Camsp). Nous devons améliorer la formation, afin de donner envie aux jeunes formés d’intervenir dans ces établissements. Nous devons aussi continuer de déstigmatiser la psychiatrie et la santé mentale. Nous devons enfin renforcer l’attractivité de ces métiers, qui jouent un rôle majeur dans notre société et notre système de santé. Les psychologues, qui ne sont pas considérés comme des paramédicaux, appartiennent à une catégorie professionnelle non conventionnée. Nous devons travailler sur ces questions, car nous avons besoin de davantage de psychologues pratiquant la psychologie clinique.
Mme la présidente
La parole est à Mme Élise Leboucher.
Mme Élise Leboucher
Madame la ministre, pouvez-vous nous fournir des précisions car il semble étrange qu’un rapport ait été rédigé cette nuit ?
Leurs sujets n’étant pas identiques, j’insiste sur la nécessité d’un rapport dressant le bilan du dispositif Mon soutien psy, afin de connaître le nombre de psychologues conventionnés et celui des psychologues qui se déconventionnent ainsi que le nombre de prises en charge par psychologue.
Je rappelle que neuf psychologues sur dix n’adhèrent pas au dispositif.
Mme Stéphanie Rist
D’où viennent ces chiffres ?
Mme Élise Leboucher
Madame la ministre, vous avez vous-même dit qu’il s’agissait de permettre l’accès à des soins primaires et de prévention. Puisque vous avez fait de la santé mentale une grande cause nationale, on ne peut pas se satisfaire de ce seul dispositif. Il faut inclure les autres types de prise en charge en psychiatrie, dans les CMP et dans les hôpitaux. Je rejoins le rapporteur général quant au manque de moyens.
De plus, il est inquiétant que la mise en place du dispositif Mon soutien psy conduise à suspendre les financements pour le conventionnement des psychologues libéraux, comme cela a été le cas, par l’ARS, à Saint-Étienne pour un réseau de santé en périnatalité qui devait fêter ses vingt ans. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Chantal Jourdan.
Mme Chantal Jourdan
Bien que la demande de Mme Leboucher soit légitime, nous privilégierons l’amendement de M. Peytavie, le no 2076.
La situation dans laquelle nous nous trouvons est encore instable. Le dispositif Mon soutien psy fait l’objet d’une réelle attente, notamment là où les CMP sont surchargés – il y a parfois deux ans d’attente. L’accès direct aux soins doit être développé.
En revanche, j’appelle l’attention du Gouvernement sur la nécessité d’augmenter les rémunérations des psychologues hospitaliers. Le tarif des consultations des psychologues libéraux ayant été augmenté, on constate une fuite hors du secteur hospitalier. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOC. – M. Yannick Monnet, Mme Stéphanie Rist et Mme Anne-Cécile Violland applaudissent.)
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Yannick Neuder, rapporteur général
Je reprends la parole pour faire valoir le travail de la commission. Parmi les sujets que nous avons évoqués, tout ne peut pas être réglé. Sans dire que les autres amendements ne posent pas les bonnes questions, il semble que l’amendement de M. Peytavie règle un grand nombre de problèmes, et permet d’évaluer l’évolution après la prise en charge.
J’entends que le dispositif puisse avoir des effets d’attractivité, comme le mentionne notre collègue.
Il ne s’agit pas de remettre en cause la revalorisation dans le secteur libéral. Bien au contraire ! Toutefois, elle conduit forcément certains professionnels hospitaliers à partir. Il faut veiller à ne pas déshabiller Paul pour habiller Pierre car on a besoin d’une prise en charge psychologique dans les structures d’hospitalisation.
D’une façon générale, je ne suis pas favorable aux accès directs. Cependant, je l’étais en l’espèce sous réserve d’une évaluation. Je souhaite donc que nous préservions les engagements pris afin d’évaluer l’accès direct, madame la ministre. Nous pourrions ainsi trouver un accord sur l’amendement de M. Peytavie, dont nous avons débattu en commission, qui pose aussi la question des tarifs.
Madame Leboucher, vous demandez que le rapport évalue le nombre de psychologues qui entrent dans le dispositif et de ceux qui en sortent. Si on veut réaliser une telle évaluation, il faut attendre que les psychologues se saisissent de la nouvelle tarification.
Mme Élise Leboucher
Ils n’en veulent pas !
M. Yannick Neuder, rapporteur général
Je répète que je suis donc plutôt favorable à l’amendement de M. Peytavie, qui règle les questions du nombre de psychologues et du suivi de la prise en charge médicamenteuse.
J’ai noté la nécessité d’être vigilant afin de ne pas vider les structures d’hospitalisation de leurs psychologues, du fait de l’augmentation de la rémunération dans le secteur libéral.
Mme la présidente
La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales
Permettez-moi de reprendre la parole pour évoquer un sujet sur lequel j’ai beaucoup travaillé ces derniers mois, avec les professionnels.
Je suis très favorable à l’idée d’une évaluation, en matière de santé comme dans tous les domaines. Souvent, on la néglige, on ne lui consacre pas assez d’efforts.
Toutefois, par un amendement précédent, on a beaucoup changé le contour du dispositif : on a étendu le nombre de consultations et modifié leur prix pour les psychologues. On va donc sans doute attirer davantage de professionnels.
Il est difficile d’évaluer un dispositif alors qu’on en a changé les contours et l’attractivité. Il ne faut donc ni se précipiter ni mettre trop d’énergie dans l’évaluation, d’autant qu’il reste plusieurs amendements et quelques articles à discuter. Le dispositif devant évoluer, la question de l’évaluation sera peut-être pertinente dans un an ou deux.
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Tout d’abord, je suis désolée de ne pas avoir répondu à M. Bazin au sujet des thérapies de couple. Les couples peuvent naturellement bénéficier du dispositif Mon soutien psy.
Aujourd’hui, 3 825 psychologues font partie de ce dispositif – ce sont 315 professionnels de plus que le mois dernier. Nous sommes en train d’évaluer 6 740 demandes de conventionnement. Les psychologues doivent disposer de plus de trois ans d’expérience et remplir certains critères. La délégation ministérielle à la santé mentale et à la psychiatrie réalise l’évaluation des compétences en vue d’un conventionnement.
J’entends travailler à accélérer cette évaluation, qui n’est pas assez structurée pour venir à bout des demandes suffisamment rapidement. Nous avons besoin de ce dispositif et les volontaires sont là.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 1246.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 224
Nombre de suffrages exprimés 212
Majorité absolue 107
Pour l’adoption 158
Contre 54
(L’amendement no 1246 est adopté ; en conséquence, les amendements nos 2076 et 396 tombent.)
(Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP et sur quelques bancs du groupe SOC.)
Mme la présidente
Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 925 et 2038.
La parole est à M. Aurélien Rousseau, pour soutenir l’amendement no 925.
M. Aurélien Rousseau
Année après année, nous disons tous que la prévention est un investissement, sans savoir exactement ce qu’elle représente dans le PLFSS. Mon amendement vise à engager un travail de fond, qui sera considérable, pour identifier les dépenses en prévention de l’année n.
La vaccination contre le papillomavirus, par exemple, préserve de cancers qui pourraient apparaître vingt ou trente ans plus tard. Un modèle médico-économique est donc nécessaire.
Nous demandons qu’un travail soit engagé car le PLFSS ne saisit pas suffisamment bien la prévention. (MM. Arthur Delaporte et Boris Vallaud applaudissent.)
M. Fabien Di Filippo
Vous disiez l’inverse lorsque vous étiez macroniste !
M. Aurélien Rousseau
À défaut, elle restera l’objet d’applaudissements dans les colloques ou dans nos débats, sans qu’on parvienne à la faire basculer dans la vie réelle. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SOC.)
M. Boris Vallaud
Il a raison !
Mme la présidente
La parole est à Mme Stéphanie Rist, pour soutenir l’amendement no 2038.
Mme Stéphanie Rist
Puisque la prévention est un investissement, il est important qu’on puisse l’isoler dans l’Ondam. Il s’agit de dépenser de l’argent maintenant pour en récupérer plus tard.
On entend souvent que l’on ne fait rien pour la prévention. En réalité, nous examinons chaque année de nombreuses dépenses qui lui sont liées dans l’Ondam. Il faut avancer sur cette question et sortir l’investissement du financement de l’Ondam. (M. Aurélien Rousseau applaudit.)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Yannick Neuder, rapporteur général
Voir la prévention sous l’angle d’un investissement est une bonne chose. Elle est surtout une maladie que le patient ne déclenchera pas, donc une dépense que le système ne fera pas.
Il est bon de pouvoir l’objectiver dans le cadre de l’Ondam et, davantage encore, d’avoir une approche médico-économique. Nous en discutons souvent, par exemple avec la Cnam, pour financer notamment des campagnes de prévention plus larges.
L’essentiel est que cette approche prenne tout en compte, non seulement la morbi-mortalité pour le patient, mais aussi les indemnités journalières qui sont versées en cas de maladie au patient ou à son conjoint, ou le défaut de productivité dont souffre l’entreprise lorsqu’un salarié est absent.
La réflexion devra alimenter la nouvelle loi de programmation pluriannuelle pour la santé que nous réclamons tous.
Je donne donc un avis très favorable à ces amendements identiques.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
La difficulté réside dans le caractère éminemment interministériel de la prévention. Certaines actions sont financées par l’assurance maladie, par l’intermédiaire de l’Ondam ; d’autres, par les assurances complémentaires, par des associations, par des collectivités, voire par le monde professionnel dans le cadre de la santé en entreprise.
M. Pierre Cordier
Personne n’y comprend rien !
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Non, c’est un secteur passionnant car il concerne tous les ministères. La prévention touche la vie profonde de chaque citoyen. C’est pourquoi elle est difficile à chiffrer.
M. Pierre Cordier
Il y a tellement de choses !
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
En 2018, la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) a évalué à 16 milliards par an l’effort financier en matière de prévention – institutionnelle et non institutionnelle. Ces actions transversales sont menées par de nombreux acteurs.
J’ignore s’il serait pertinent de créer un sous-objectif dédié aux dépenses de prévention. Le sujet est vaste. On ne le saisira pas dans son entièreté si on se limite à l’Ondam.
C’est pourquoi je donne un avis de sagesse aux amendements identiques.
Mme la présidente
La parole est à Mme Isabelle Santiago.
Mme Isabelle Santiago
Je soutiens l’amendement de mon collègue Aurélien Rousseau. La dernière étude européenne publiée sur le sujet par la revue The Lancet montre que, pour un pays comme la France, ne pas investir en faveur de la prévention représente un coût induit de 38 milliards de dollars par an, soit le montant des dépenses consacrées à la santé d’adultes ayant subi des psychotraumatismes dans leur enfance. Tous les enfants deviennent des adultes, et on constate que les expériences négatives de l’enfance (ACE) conduisent à développer un jour des pathologies majeures comme le diabète ou le cancer.
S’inscrire dans la prévention est donc une urgence absolue !
Mme la présidente
Monsieur Isaac-Sibille, vous souhaitez intervenir contre les amendements ou en leur faveur ?
M. Cyrille Isaac-Sibille
Ma position est nuancée. (Sourires.)
Mme la présidente
M. Vigier me fait les gros yeux depuis tout à l’heure… Enfin, vous avez la parole.
M. Cyrille Isaac-Sibille
Je suis très heureux que nous examinions ces amendements, d’autant que siègent parmi nous d’anciens ministres chargés de la santé.
M. Aurélien Rousseau
Ça fait plaisir !
M. Cyrille Isaac-Sibille
Nous nous sommes battus afin d’obtenir à partir de 2019 et de 2020 un orange puis un jaune budgétaires consacrés à la prévention. S’il ressort que celle-ci est très disparate, cela donne une vision d’ensemble.
Je plaide depuis longtemps – une telle mesure constituant une prérogative ministérielle – pour que la prévention fasse l’objet d’un sous-objectif de l’Ondam. Le sixième sous-objectif « autres prises en charge » pourrait y être consacré. Il finance déjà par exemple Santé publique France depuis trois ou quatre ans. On y regrouperait l’ensemble des dépenses touchant la prévention.
Mme la présidente
Merci de conclure, cher collègue.
M. Cyrille Isaac-Sibille
Il faudra aussi se poser la question de ce qui relève ou non de l’assurance maladie… (Mme la présidente coupe le micro de l’orateur, dont le temps de parole est écoulé.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Stéphanie Rist.
Mme Stéphanie Rist
Ce rapport visera effectivement à recenser les dépenses ayant trait à la prévention, mais aussi à étudier la possibilité qu’elles sortent du champ de l’Ondam : c’est l’objectif final de notre proposition.
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Yannick Neuder, rapporteur général
Cette discussion se révèle fort intéressante : nous sommes tous relativement d’accord pour envisager le vote d’une loi pluriannuelle de santé, mais il sera difficile d’en poser les fondations. « Ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement » : il importe d’envisager la prévention comme un investissement, de chiffrer chaque année son montant prévisionnel, de l’objectiver, afin de savoir qui est en mesure de le financer, évitant ainsi les coups de rabot et les transferts aux mutuelles. Cette charge reviendra-t-elle à l’assurance maladie obligatoire, à l’assurance maladie complémentaire ?
M. Philippe Vigier
Et voilà !
M. Yannick Neuder, rapporteur général
Si nous voulons pousser le sujet plus loin, l’étude médico-économique de chaque pathologie à laquelle se livrent les centres hospitaliers – le groupe homogène de séjours (GHS) correspondant au tarif du groupe homogène de malades (GHM) – nous permettra d’évaluer financièrement les grandes pathologies comme les cancers, affections cardiovasculaires et affections psychiatriques, lesquels représentent en tout 70 % des affections de longue durée (ALD). En y ajoutant la connaissance, dans chaque cas, du niveau et du coût des préventions primaire, secondaire et tertiaire, nous devrions y voir clair sur notre point d’atterrissage, au bénéfice de tous nos patients.
(Les amendements identiques nos 925 et 2038 sont adoptés.)
(Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. – M. Cyrille Isaac-Sibille applaudit également.)
Mme la présidente
La parole est à M. Théo Bernhardt, pour soutenir l’amendement no 1932.
M. Théo Bernhardt
Mon amendement no 1933, que vous avez rejeté, prévoyait un rapport relatif au dépistage du VIH ; celui-ci vise à évaluer la campagne de vaccination contre les infections à papillomavirus humain. Prévue par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024, cette campagne ciblant les élèves de cinquième a constitué un progrès significatif en matière de lutte contre des pathologies connues pour favoriser certains cancers, entre autres ceux du col de l’utérus ; il s’agit désormais d’en estimer le coût pour l’assurance maladie, de savoir si les moyens sont suffisants ou si des ajustements se révèlent nécessaires à une couverture optimale, et d’étudier les économies potentielles que pourrait permettre la prévention.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Yannick Neuder, rapporteur général
Loin de moi l’idée d’émettre systématiquement un avis négatif sur vos amendements, et je n’ai du reste rien contre ce rapport, mais nous disposons déjà des données en question : environ 500 000 adolescents ont été vaccinés, je crois – je n’ai pas pris le temps de chercher les chiffres, peut-être la ministre pourra-t-elle en fournir de plus précis. Je demande donc le retrait de l’amendement ; à défaut, avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Même avis. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 prévoyait à son article 37 la remise au Parlement, dans les douze mois suivant sa publication, d’un rapport consacré à cette campagne de vaccination dans les collèges. Celui-ci, en cours de finalisation par mes services, sera remis dans les meilleurs délais – bien avant l’expiration des douze mois, en tout état de cause. L’amendement est donc satisfait, d’autant que Santé publique France a publié des chiffrages intermédiaires, comme vient de le rappeler M. le rapporteur général.
Mme la présidente
La parole est à M. Fabien Di Filippo.
M. Fabien Di Filippo
Le rapporteur général l’a dit : les données existent. La ministre l’a dit : un rapport est en cours d’élaboration. Surtout, l’amendement tel qu’il est rédigé passe totalement à côté des écueils essentiels. Pour augmenter une couverture vaccinale qui reste inférieure à 10 %, il ne s’agit ni d’accroître les moyens financiers, ni de proposer une vaccination en dehors du milieu scolaire, jusqu’au sein des associations – imaginez-vous, concrètement, prendre sur le temps des activités sportives et culturelles ? L’enjeu se situe au niveau de la communication. Il s’est produit quelques petits accidents, pas forcément liés au vaccin, mais au sujet desquels nous devrions pouvoir rassurer ; peut-être aussi la classe de cinquième ne correspond-elle pas à la tranche d’âge la plus appropriée – parmi nos enfants, il en reste encore beaucoup, Dieu merci, qui, à 12 ans, ne se projettent pas encore dans leur future vie sexuelle.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 1932.
(Le vote à main levée n’ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 137
Nombre de suffrages exprimés 131
Majorité absolue 66
Pour l’adoption 60
Contre 71
(L’amendement no 1932 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Chers collègues, depuis la reprise de l’examen de ce texte à l’issue des questions au Gouvernement, nous avons examiné 12,5 amendements par heure,…
M. Fabien Di Filippo
Cela fait moins de cinq minutes par amendement !
Mme la présidente
…soit un très net ralentissement par rapport au rythme d’hier soir.
Suspension et reprise de la séance
Mme la présidente
M. le président de la commission demande une suspension de séance. Elle est de droit.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures dix, est reprise à dix-neuf heures vingt.)
Mme la présidente
La séance est reprise.
Article 18
Mme la présidente
La parole est à M. Christophe Bentz.
M. Christophe Bentz
Naturellement, tous les sujets abordés dans cette discussion sont importants puisqu’il s’agit de la santé des Français. Nous sommes pour notre part favorables à l’article 18 sur l’intérim médical. Reste, et vous l’avez souligné avant la suspension de séance, madame la présidente, que nous n’avons examiné, en deux heures, que trente amendements. C’est du jamais vu depuis le début de l’examen du présent PLFSS.
M. Fabien Di Filippo
Oh là !
M. Christophe Bentz
Je pense sincèrement qu’il y a une sorte de stratégie de la part des députés du bloc central, visant à ralentir les débats,…
M. Thibault Bazin
Allez, nous voulons avancer !
M. Christophe Bentz
…pour ne pas arriver à l’article 23 portant sur la revalorisation des retraites. Je vous en supplie : pour les Français, accélérons, ou alors, encore une fois nous le demandons, examinons l’article 23 en priorité, après quoi nous aurons sans doute le temps d’en venir aux autres articles. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
Rappels au règlement
Mme la présidente
La parole est à Mme Stéphanie Rist, pour un rappel au règlement.
Mme Stéphanie Rist
Il porte sur le bon déroulement des débats. Je trouve ça dingue : deux articles du texte concernent la santé, sujet que nous n’avions pas abordé jusqu’à présent, il est donc normal que nous en discutions. Vous n’en avez peut-être rien à faire, de la santé (« Oh ! » sur les bancs du groupe RN) – vous vous abstenez, par exemple, sur les amendements visant à améliorer la prise en charge de la santé mentale –, mais nous, nous avons envie d’en parler. (MM. Gabriel Attal et Jean-Luc Fugit applaudissent.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Stella Dupont, pour un autre rappel au règlement.
Mme Stella Dupont
Il a le même fondement que le précédent. Nous avons en effet un problème de méthode : certes, la santé est un sujet important, mais notre temps est limité et nous devrions revoir notre fonctionnement de façon qu’un certain nombre d’amendements ne soient examinés qu’en commission, à l’image de ce qui se fait au Sénat. Ainsi, la majorité très relative pourrait avancer efficacement, ce qui n’est pas le cas. Nous n’irons pas au terme de l’examen du PLFSS ni du PLF.
M. Thibault Bazin
Bon, il faut avancer, là !
Mme Stella Dupont
C’est un constat d’échec collectif majeur. Aussi, à nous de remettre en cause notre manière de travailler si nous voulons vraiment peser sur les budgets pour l’année prochaine et les suivantes.
Mme la présidente
La parole est à M. Jérôme Guedj, lui aussi pour un rappel au règlement.
M. Jérôme Guedj
Au début de la séance, tout le monde, la main sur le cœur, a déclaré vouloir aller au bout de ce PLFSS afin qu’il soit soumis au vote, ce qui n’a pas été le cas depuis trois ans.
M. Arthur Delaporte
Eh oui !
M. Pierre Cordier
On perd du temps, là !
M. Jérôme Guedj
Je constate que, même si les débats sont intéressants, il n’y a pas vraiment de volonté d’accélérer le rythme de nos travaux. Nous avons, pour notre part, retiré quasiment tous nos amendements pour aller au plus vite. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)
M. Fabien Di Filippo
On devrait calculer le total du temps de parole utilisé par M. Guedj !
M. Jérôme Guedj
Je vois que d’autres groupes ne le font pas, que le rapporteur général et la ministre prennent tout leur temps pour répondre sur des sujets certes intéressants, encore une fois, mais le plus important, pour l’heure, pour l’Assemblée, est d’aller au bout de l’examen du PLFSS, de montrer que nous avons souhaité aborder l’Ondam hospitalier, le gel des retraites, les Ehpad – la branche autonomie n’est toujours pas suffisamment financée… (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.) C’est de tout cela que nous avons envie de parler.
Or on perçoit bien que vous organisez une sorte d’obstruction, parce que vous préférez que le PLFSS ne soit pas soumis au vote. Cela du fait d’un paresseux confort consistant à l’envoyer brut de décoffrage au Sénat, en ayant donc balayé tous les amendements que nous avons adoptés, y compris ceux relatifs aux recettes. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.) Il ne s’agit pas de la coproduction responsable que le Premier ministre a appelé de ses vœux. Ce dernier nous avait déclaré que le PLFSS était perfectible. Nous l’avons amélioré mais vous n’en voulez pas. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)
Mme la présidente
La parole est à M. Damien Maudet.
M. Damien Maudet
Mon rappel au règlement se fonde sur l’article 100. Franchement, tout le monde le sait que vous allez geler les pensions des retraités. Alors pourquoi essayer de vous cacher, de ne pas vouloir discuter de l’article 23 ?
M. Philippe Vigier
En ce moment, c’est vous qui faites durer les débats !
M. Damien Maudet
La vérité, c’est que vous savez que vous allez appauvrir une grande partie des retraités et que vous refusez d’en débattre devant la représentation nationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP et sur plusieurs bancs des groupes SOC, EcoS et GDR.)
Nous avons obtenu tout un tas de victoires, depuis le début de l’examen du PLFSS, et vous faites en sorte que nous ne votions pas un texte, avant sa transmission au Sénat, qui soit fidèle à ce que souhaite la représentation nationale. Vous devriez avoir honte de votre comportement. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Il reste à peu près trois amendements par groupe à gauche. Quand j’entends vos députés prétendre qu’ils veulent discuter parce qu’ils se préoccupent de la santé… Mais si vous vous préoccupez de la santé, ne la sous-financez pas ! Vous proposez une augmentation des crédits pour la santé de 0,6 % alors que cette augmentation devrait être de 4 % ! Quelle honte ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP et sur quelques bancs du groupe SOC.)
Sachez, en tout cas, que même si on ne débat pas aujourd’hui du gel des pensions de retraite, toute la France est au courant, tous les retraités sont au courant que vous vous apprêtez à les appauvrir. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP et sur plusieurs bancs des groupes EcoS et GDR.)
Mme la présidente
La parole est à M. Philippe Vigier, pour un rappel au règlement.
M. Philippe Vigier
Il se fonde sur l’article 100 relatif à l’organisation de nos débats.
Jérôme Guedj, vous n’allez pas nous la faire à l’envers ! (Exclamations sur les bancs du groupe SOC.) Qui a déposé une motion de rejet préalable (M. Gabriel Attal applaudit), qui voulait donc nous priver des débats, nous fait le coup de l’obstruction, en nous objectant que nous défendons trop d’amendements, que c’est scandaleux, que la France nous regarde ? (Vives exclamations sur les bancs du groupe SOC et sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP. – Applaudissements sur les bancs du groupe EPR.)
M. Pierre Cordier
Très bien !
M. Philippe Vigier
Pas vous, pas ça ! (Brouhaha.) Pardonnez-moi, mais c’est la vérité ! D’ailleurs, vous-même vous êtes rendu compte que vous vous étiez mis dans une impasse.
Ensuite, on ne dépose pas 2 000 amendements si on veut examiner toutes les parties du texte dans les temps impartis. (M. Gabriel Attal applaudit. – Exclamations prolongées sur les bancs des groupes LFI-NFP et SOC.)
M. Jérôme Guedj
Eh bien, retirez les vôtres, alors !
M. Manuel Bompard
Vous êtes pathétique !
M. Philippe Vigier
Votre intention première, c’était bien de bloquer le débat.
Enfin, dernier argument, regardez combien nous sommes de députés du bloc central.
M. Arthur Delaporte
Vous êtes trois ou quatre !
M. Philippe Vigier
Donc ne dites pas que nous faisons de l’obstruction. Nous sommes peu nombreux…
M. Arthur Delaporte
Vous êtes trois ou quatre et vous monopolisez la parole !
M. Philippe Vigier
…et donc vos arguments tombent en une seconde. Vous n’êtes pas crédible, Jérôme Guedj, tout le monde a bien vu que vous vouliez nous prendre en otage. Alors maintenant, on avance !
Mme la présidente
La parole est à M. Thibault Bazin.
M. Thibault Bazin
Mon rappel au règlement est avant tout fondé sur ses articles 121-1, 121-2 et 121-3 du chapitre XI portant sur la discussion des lois de financements de la sécurité sociale. Tout y est prévu. Et nous devons suivre le règlement parce que c’est notre règle du jeu. Or qui a fait le plus grand nombre de rappels au règlement depuis une semaine ?
Mme Stéphanie Rist
C’est vous ! (L’oratrice désigne la gauche de l’hémicycle.)
M. Thibault Bazin
C’est vous, Jérôme Guedj ! Qui a défendu une motion de rejet préalable ? C’est vous.
M. Philippe Vigier
Les taxes, c’est vous ! (L’orateur désigne la gauche de l’hémicycle.)
M. Thibault Bazin
Qui, en effet, par paresse, a multiplié les taxes pour financer la protection sociale ? C’est vous.
M. Jérôme Guedj
C’est vous qui avez voté contre l’article 6 ! C’est vous qui humiliez M. Barnier !
M. Thibault Bazin
On n’arrête pas de nous parler de l’article 23, mais il a été supprimé par tous les groupes en commission. Il y a donc un consensus pour qu’il soit récrit – nous ne souhaitons pas le report de la revalorisation des retraites. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Nous le disons clairement et nous n’avons pas peur d’aborder cet article ; mais, en attendant, examinons tous ceux qui le précèdent. (Applaudissements sur les bancs des groupes DR et EPR.) Cessons de nous en tenir à la forme et débattons du fond. Regardez sur les écrans : combien d’amendements de Jérôme Guedj ? C’est vous qui organisez l’obstruction. (Mêmes mouvements. – Vives exclamations sur les bancs du groupe SOC.)
Mme la présidente
La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales, pour une réponse générale, après quoi nous reprendrons, comme chacun a déclaré le souhaiter, la suite de la discussion.
M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales
Je suis malheureusement quelque peu surpris de la tournure que prennent les événements, en particulier de la manière dont M. Guedj, depuis la première minute, entend mettre en scène l’obstruction.
M. Jérôme Guedj
Ça ne va pas ?
M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales
Mais si ! Les orateurs précédents ont rappelé le nombre de vos rappels au règlement,…
M. Jérôme Guedj
Jamais de la vie !
M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales
…le nombre de vos amendements. Pardon, mais je ne vous ai pas vu retirer beaucoup d’amendements.
M. Jérôme Guedj
Ah si ! Et retirez aussi les vôtres !
M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales
Il reste 452 amendements à examiner – ils étaient au nombre de 520 en début de séance, c’est-à-dire il y a deux heures et demie. Donc arrêtez de soutenir que nous organiserions l’obstruction,…
M. Jérôme Guedj
Nous en sommes à douze amendements par heure !
M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales
…que nous devrions avoir honte de la manière dont se déroule la discussion. Depuis deux heures et demie, nous avons passé un tiers du temps à examiner des demandes de rapports qui n’émanaient pas, pour l’essentiel, du bloc central mais de ceux qui crient que le débat est impossible. Ces demandes de rapports sont tout à fait légitimes et ont fait l’objet de nombreuses prises de parole – et tant mieux : cela prouve que le sujet était intéressant –, mais ne venez pas ensuite nous reprocher d’empêcher le débat.
M. Boris Vallaud
Si !
M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales
Reste que ces demandes de rapports ne sont pas le cœur du PLFSS. Or, comme l’a très bien dit Stéphanie Rist, nous discutons présentement de deux articles portant sur les politiques de santé, à savoir le cœur du PLFSS aux yeux des Français.
M. Arthur Delaporte
Bien sûr, nous sommes bien d’accord.
M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales
Nous n’avons aucun problème avec l’examen, le moment venu, de l’article 23.
M. Sébastien Peytavie
Chiche, allons-y !
M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales
Je rappellerai, en tant que président de la commission des affaires sociales, que cette dernière a voté à l’unanimité la suppression de l’article 23. (Exclamations sur les bancs du groupe SOC.) Nous sommes donc politiquement très à l’aise. (Mme Stéphanie Rist applaudit.)
Il n’y a pas que l’article 23, dans le PLFSS, les autres sont tout aussi importants. Alors, s’il vous plaît, qu’on soit pour ou contre les dispositifs proposés par le texte, cessons de parler de débat tronqué, d’obstruction, de la honte que nous devrions éprouver du fait de la lenteur de la discussion. Prenez aussi vos responsabilités : les amendements de M. Guedj figurent toujours sur la feuille jaune et il y en a des dizaines et des dizaines. (M. Nicolas Turquois applaudit.)
M. Jérôme Guedj
Non !
M. Thibault Bazin
Il y en a des centaines !
Article 18 (suite)
Mme la présidente
La parole est à M. Corentin Le Fur, pour soutenir l’amendement no 552 visant à supprimer l’article 18.
M. Corentin Le Fur
La loi Rist partait d’une intention très louable mais force est de constater, hélas, qu’elle a eu des conséquences déplorables dans les services hospitaliers et, surtout, qu’elle a été massivement contournée.
Malheureusement, la situation déjà compliquée dans laquelle se trouvait notre hôpital public s’est détériorée depuis l’adoption de cette loi. On en arrive à des fermetures massives de lits et à la régulation de services d’urgence, en particulier dans des territoires ruraux. Je pense à l’hôpital de Carhaix ou au site de Kerio du centre hospitalier Centre Bretagne, entre Loudéac et Pontivy.
La régulation est en fait le terme policé qu’emploient les ARS pour désigner une fermeture de service. Cela a des conséquences directes pour les habitants, mais aussi sur la prise en charge – nous en paierons lourdement le prix.
La loi Rist a été contournée et a favorisé le recours à des agences d’intérim, au détriment du recrutement de gré à gré. Je suis très hostile à son extension, de surcroît aux services de maternité.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Yannick Neuder, rapporteur général
Mettons-nous d’accord. Je peux choisir de présenter ou non les détails de nos discussions en commission, mais je ne veux que l’on me reproche de ne pas justifier mon avis si je n’entre pas dans le détail. Avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Vous souhaitez supprimer l’article 18, mais je suis embêtée, parce qu’il touche à quelque chose qui affecte tous nos établissements sanitaires et médico-sociaux : le triplement des dépenses d’intérimaire non médical ces cinq dernières années. C’est un sujet important.
Les surenchères liées à l’état du marché de l’emploi peuvent conduire les établissements à accepter des rémunérations très supérieures à celles des agents publics. Cette situation est la source d’une inégalité entre les personnels exerçant des missions identiques au sein d’un même établissement. Cela représente une difficulté pour les équipes, qui s’ajoute au problème économique et financier posé aux établissements.
Le plafonnement des rémunérations du travail intérimaire vise à limiter la concurrence salariale entre établissements et entreprises d’intérim, à renforcer au sein des établissements l’attractivité de la fonction publique hospitalière et la cohésion des équipes soignantes et à mieux maîtriser les dépenses publiques.
Au quotidien, des établissements nous font part de difficultés liées au travail intérimaire et à la contrainte qu’il représente pour eux, notamment sur le plan financier. Il y a quelque chose qu’on ne comprend pas bien dans une telle situation et je trouve que tout cela manque un peu d’éthique, si je puis dire. Parce qu’il me semble justifié de commencer à réglementer les choses, je vous demande de retirer votre amendement ; à défaut, mon avis sera défavorable.
Mme la présidente
La parole est à Mme Stéphanie Rist.
Mme Stéphanie Rist
Mme la ministre a expliqué tout l’intérêt du plafonnement des rémunérations de l’intérim. D’ici à l’année prochaine, nous remettrons à la commission des affaires sociales le rapport d’évaluation de la loi plafonnant ces rémunérations pour les médecins – texte dont j’étais la rapporteure. Il montre que s’il y a bien des établissements de santé – hôpitaux, services d’urgence ou maternité – qui rencontrent des difficultés les amenant à fermer temporairement ou définitivement, c’est en nombre comparable à ce que l’on constatait avant l’entrée en vigueur de la loi.
Il demeure qu’à la suite du plafonnement, il y a eu quelques semaines de flottement lors desquelles des services ont fermé temporairement. C’était le fait de ceux, très minoritaires, qui dépassaient le plafonnement et qui refusaient, de colère, d’accepter certains contrats, alors que la grande majorité des intérimaires, respectueux du plafonnement, acceptaient les contrats. Il reste qu’il s’agit d’une bonne mesure. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe EPR.)
Mme la présidente
La parole est à M. Corentin Le Fur.
M. Corentin Le Fur
Personne ne se réjouit d’avoir recours à l’intérim, mais le fait est qu’il y a des hôpitaux, notamment dans les secteurs ruraux, dont les services d’urgence ferment, laissant les citoyens démunis. Ces derniers se retrouvent dans une situation de détresse parce qu’ils doivent parfois prendre longtemps la route pour accéder à un service d’urgence. C’est une des conséquences de cette loi, et je le regrette, mais c’est une réalité. En outre, la loi a été contournée par le recours à des agences d’intérim.
Nous sommes d’accord avec l’objectif de ces mesures, mais nous ne pouvons nier leurs conséquences. Je maintiens l’amendement.
(L’amendement no 552 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement du Gouvernement no 2351.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Il vise à étendre la mesure de plafonnement des rémunérations en intérim aux préparateurs en pharmacie, une profession particulière et nécessaire aux établissements. À ce stade, la rédaction de l’article 18 ne les concerne pas car cette profession relève d’un autre livre du code de la santé publique.
L’amendement permet de toucher l’ensemble des professions de soins médico-techniques et de rééducation exerçant dans les établissements de santé, évitant ainsi de créer entre elles des différences de traitement injustifiées.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Yannick Neuder, rapporteur général
Avis favorable.
Mme la présidente
La parole est à M. Christophe Naegelen.
M. Christophe Naegelen
Nous sommes favorables au plafonnement, mais il faut faire attention à ce qu’a provoqué la loi Rist : de nombreux professionnels de santé ont privilégié les cliniques privées, parce qu’on a seulement plafonné les hôpitaux publics.
La même chose arrivera pour les personnels non médicaux : ils privilégieront les cliniques privées, au détriment des hôpitaux, qui seront en carence de personnel, notamment dans les zones rurales, comme c’est le cas à Remiremont.
Il serait intéressant de discuter des manières de plafonner aussi les rémunérations du travail intérimaire dans les cliniques privées.
Mme la présidente
La parole est à M. Fabien Di Filippo.
M. Fabien Di Filippo
Cet amendement fournit une excellente illustration des raisons pour lesquelles il ne faudrait peut-être pas précipiter nos débats ce soir. Je le dis aux collègues qui se trouvent sur ma gauche mais aussi à ceux qui siègent de l’autre côté de l’hémicycle, à l’extrême gauche : il y a d’autres sujets tout aussi importants que l’article 23, sur lequel vous vous arc-boutez, alors qu’il ne faut pas se faire d’illusions quant à nos chances de l’examiner. De toutes les manières, à l’issue de la navette budgétaire, son contenu ne sera pas celui que vous pensez…
Mme la présidente
Monsieur le député, pouvez-vous revenir à l’amendement ?
M. Fabien Di Filippo
Je dis justement que c’est une très bonne mesure.
Les collègues auxquels je viens de m’adresser sont favorables au plafonnement des rémunérations dans l’intérim médical et pour les professions médico-techniques. Ils ont bien raison, parce que cela devenait insoutenable pour nombre d’hôpitaux, en particulier dans la conjoncture actuelle. Ces mesures, il ne faut pas les galvauder. Il faut parvenir à les voter et à les intégrer au texte.
Monsieur Guedj, les paresseux, ce ne sont pas ceux qui refusent de parler des retraites, mais ceux qui ne font pas l’effort de proposer des économies pour que nous tenions une trajectoire budgétaire soutenable, tout en revalorisant les retraites. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR. – M. Gabriel Attal applaudit également.)
M. Manuel Bompard
C’est n’importe quoi ! Nous avons voté les recettes !
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Nous ne disposons pas de moyens de contraindre les cliniques privées et j’ose espérer qu’elles sauront d’elles-mêmes mettre des limites. Leur fonctionnement les oblige presque à se limiter d’elles-mêmes.
(L’amendement no 2351 est adopté.)
Mme la présidente
Je suis saisie de deux amendements, nos 1821 et 21, pouvant être soumis à une discussion commune.
L’amendement rédactionnel no 1821 de M. le rapporteur général est défendu.
Il en est de même de l’amendement no 21 de M. Jérôme Guedj.
Quel est l’avis de la commission ? J’imagine que vous êtes favorable à votre amendement.
M. Yannick Neuder, rapporteur général
En effet. Avis défavorable sur l’amendement no 21.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Monsieur le rapporteur général, votre amendement présenté comme rédactionnel n’est pas tout à fait neutre. Il supprime la référence à la « tension sur les ressources », alors que ce critère est absolument nécessaire pour l’application de la mesure de plafonnement des rémunérations de l’intérim.
La tension sur les ressources engendre une concurrence salariale qui se traduit par un surcoût. C’est précisément cette tension qui justifie le déclenchement de la mesure de plafonnement. L’amendement rendrait la mesure techniquement inefficace. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Monsieur Guedj, l’exposé de sommaire de votre amendement affirme explicitement qu’il vise à supprimer la condition relative à l’existence d’une tension sur les ressources. Je le répète, ce critère d’appréciation est nécessaire au déclenchement du plafonnement et à l’application de la mesure. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à M. François Gernigon.
M. François Gernigon
Il ne faut pas se voiler la face, l’intérim dans le milieu médical est devenu un mode de travail – il en va de même pour les Ehpad et les maisons d’accueil et de résidence pour l’autonomie (Marpa).
Quand vous visitez les Ehpad, leurs directeurs vous font part de leur inquiétude quand il s’agit, au mois de juin, d’établir le planning pour juillet et août, parce que les contrats s’arrêtent à la fin du mois de juin et que les gens ne recommencent à travailler qu’au 1er septembre. C’est un fait.
Nous ne résoudrons pas le problème ce soir ; peut-être faudrait-il réviser le droit du travail en la matière ? L’intérim a initialement été créé pour pallier des vacances de poste, mais la loi Borloo de 2005 en a élargi le champ d’application.
Le sujet mérite que nous y travaillions afin de résoudre ce problème, même si ce texte n’est sans doute pas le bon véhicule législatif.
(L’amendement no 1821 est retiré.)
(L’amendement no 21 est adopté.)
Mme la présidente
Cette adoption fait tomber l’amendement no 1823 de M. le rapporteur général, que nous devions appeler un peu plus tard.
La parole est à M. Jérôme Guedj, pour soutenir l’amendement no 23.
M. Fabien Di Filippo
Heureusement que les groupes de gauche n’avaient déposé que trois amendements chacun !
M. Jérôme Guedj
Nous sommes favorables à l’article 18 ; nous cherchons à en améliorer la rédaction.
À la suite d’un rapport de la Cour des comptes sur l’intérim médical, nous proposons le plafonnement de la part des contrats intérimaires à l’hôpital, à la discrétion de chaque groupement hospitalier de territoire (GHT), en fonction de son environnement. Le principe est de laisser les hôpitaux plafonner cette part selon leur situation.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Yannick Neuder, rapporteur général
Avis défavorable. J’ajoute que j’aurais, de toute façon, retiré l’amendement no 1823 qui vient de tomber.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Votre amendement vise à limiter le volume de contrats de recrutement temporaire par GHT et par établissement médico-social.
La recommandation de la Cour des comptes que vous invoquez ne porte pas sur le recours à l’intérim, mais sur la définition d’un contingent de contrats de praticiens contractuels dits de motif 2. Ils permettent une rémunération dérogatoire des praticiens contractuels en cas de difficulté de recrutement ou d’exercice pour une activité nécessaire à l’offre de soins sur le territoire, en contrepartie de l’engagement du praticien sur des objectifs quantitatifs et qualitatifs évalués annuellement.
La nature et le nombre maximal de contrats de motif 2 auxquels peut recourir un établissement public de santé sont déjà encadrés par le contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens (CPOM) conclu entre l’ARS et l’établissement considéré. Ainsi, décliner ce nombre au niveau du GHT ne permettrait pas de limiter le recours à ces contrats.
Nous avons soumis au Conseil d’État un projet de décret prévoyant d’autres mesures de régulation permettant d’encadrer davantage les conditions de recours aux contrats de motif 2 et de mettre fin aux dérives ayant pu être constatées dans leur utilisation. Ces mesures devraient entrer en vigueur au début de l’année 2025.
Si vous ne retirez pas votre amendement, l’avis du Gouvernement sera défavorable.
(L’amendement no 23 est adopté.)
Mme la présidente
Je suis saisie de deux amendements, nos 1604 et 1603, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Yannick Monnet, pour soutenir l’amendement no 1604.
M. Yannick Monnet
N’ayant pas fait de rappel au règlement, vous m’octroierez certainement plus de temps pour défendre mon amendement, ainsi que l’amendement no 1603 de Mme Karine Lebon. (Sourires.)
M. Thibault Bazin
Excellent !
Mme la présidente
Je vous en prie, présentez-nous l’amendement no 1603 en plus du vôtre.
M. Yannick Monnet
Le recours à l’intérim constitue un vrai problème et peut mettre à genoux les finances de nos hôpitaux ; il prospère sur la désertification médicale, grande absente du PLFSS.
Les amendements tendent tous les deux, même s’ils sont rédigés différemment, à prendre en considération les spécificités territoriales dans la régulation du recours à l’intérim. En effet, dans certains territoires, les établissements peinent à faire face à la suppression ou au plafonnement de l’intérim.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Yannick Neuder, rapporteur général
Il est défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Vous souhaitez que les spécificités territoriales et les besoins sociaux ou médico-sociaux soient pris en considération dans l’organisation du plafonnement du recours à l’intérim. Tel qu’il a été rédigé, l’article 18 prévoit déjà de tenir compte « s’il y a lieu » des spécificités territoriales. Je ne souhaite pas que cela soit systématisé, car certains problèmes communs à l’ensemble d’un territoire ne justifient pas l’adaptation locale du cadre réglementaire. Il n’en demeure pas moins qu’en la matière, une possibilité est inscrite dans le texte.
Il est par ailleurs important d’assurer des conditions de mise en œuvre opérationnelle de cette mesure, sachant que les données disponibles ne permettent pas toujours de la décliner différemment d’un territoire à l’autre. Les besoins sociaux et médico-sociaux du territoire sont par ailleurs déjà pris en compte dans l’évaluation des tensions sur les ressources humaines, qui en résultent pour partie. À défaut d’un retrait, mon avis sera défavorable sur cet amendement, en partie satisfait.
M. Yannick Monnet
Non, il ne l’est pas !
Mme la présidente
Sur l’article 18, je suis saisie par le groupe Ensemble pour la République d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Stéphanie Rist.
Mme Stéphanie Rist
Les mesures inscrites à l’article 18 ne visent pas à interdire le recours à l’intérim – il n’a d’ailleurs pas été interdit pour les médecins. L’intérim est nécessaire pour organiser des remplacements ou attirer des professionnels, mais nous souhaitons le plafonner à des niveaux raisonnables en comparaison de ceux constatés parfois – ne généralisons pas non plus.
(L’amendement no 1604 est adopté ; en conséquence, l’amendement n° 1603 tombe.)
Mme la présidente
La parole est à M. Jérôme Guedj, pour soutenir l’amendement no 24.
(L’amendement no 24 est retiré.)
Mme la présidente
Je mets aux voix l’article 18, tel qu’il a été amendé.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 177
Nombre de suffrages exprimés 155
Majorité absolue 78
Pour l’adoption 154
Contre 1
(L’article 18, amendé, est adopté.)
Après l’article 18
Mme la présidente
La parole est à M. Patrice Martin, pour soutenir l’amendement no 1103 portant article additionnel après l’article 18.
M. Patrice Martin
Le problème des rendez-vous médicaux non honorés est bien documenté aujourd’hui et chaque année, 27 millions de consultations sont perdues, pour un volume de travail équivalent à celui, tenez-vous bien, de 4 500 médecins.
Cette situation touche particulièrement les zones sous-dotées ; elle ne fait qu’aggraver les inégalités d’accès au soin et compromet la prise en charge des patients. Il faut donc répondre à ce phénomène, sans imposer une sanction systématique et rigide, mais en donnant aux médecins la possibilité d’imposer une pénalité, après plusieurs absences non justifiées et ce malgré l’envoi de rappels.
Cet outil serait appliqué à la discrétion des praticiens et ne ferait l’objet d’aucune obligation.
Dans certaines régions, l’accès aux soins est un défi. Chaque rendez-vous manqué sans raison prive un autre patient de la possibilité de consulter. Il ne s’agit pas de punir, mais de rendre le système de prise de rendez-vous plus efficace, tout en garantissant un meilleur respect du temps médical, si précieux.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Yannick Neuder, rapporteur général
Votre amendement traite de la taxe « lapin », question déjà ancienne, mais qui n’a pas été évoquée en commission. Il a malheureusement été déposé très tardivement et a été repoussé lors de la réunion tenue en application de l’article 91 du règlement.
Il me semble utile de discuter des rendez-vous médicaux non honorés, qui font perdre du temps à tout le monde. En revanche, je doute que nous parvenions à déterminer, par amendement, un dispositif luttant efficacement contre ce problème et garantissant l’accès aux soins de patients en ayant besoin, lésés par ceux qui prennent des rendez-vous sans les honorer.
Nous devrions discuter de la rémunération à proposer aux professionnels de santé et des modalités d’application du dispositif : faudrait-il instaurer un préfinancement lors de la prise du rendez-vous sur une plateforme comme Doctolib ? Faudrait-il prévoir ou non un remboursement par les mutuelles ? Une avance ?
Le sujet est vaste. Je suis favorable à ce que nous envisagions la mise en place d’une taxe « lapin » pour responsabiliser les patients, mais je ne souhaite pas me prononcer au débotté sur un dispositif que j’ai découvert peu de temps avant la séance. Ne confondons pas vitesse et précipitation, je ne dispose pas d’assez d’éléments techniques pour me prononcer sur un sujet qui aurait pu être utilement débattu en commission.
M. Jean-Pierre Vigier
Très bien !
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Je suis particulièrement sensible au civisme, au respect et à la politesse qui doivent prévaloir dans les relations entre patients et praticiens,…
M. Thibault Bazin
Mais oui, très bien !
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
…mais également à la nécessité de préserver du temps médical. Chacun à son niveau, en adoptant quelques réflexes, peut contribuer à prendre soin du système de santé et à en favoriser le bon fonctionnement. Celui d’annuler un rendez-vous de santé que l’on ne peut pas honorer est par exemple essentiel et permet d’attribuer le créneau ainsi libéré à un autre patient.
Mes services ont commencé à instruire la question de la pénalité applicable en cas de rendez-vous non honoré. En revanche, le mécanisme que vous proposez est difficilement applicable : vous supposez que l’assurance maladie est capable de vérifier qu’un rendez-vous a été honoré ou non, mais elle n’a aucune information à ce sujet. Ainsi, appliquer dès à présent le dispositif que vous proposez pourrait conduire à la pénalisation arbitraire de certains patients et induire un risque de fraude. De surcroît, il serait nécessaire de créer des voies de recours, dont le coût serait important pour l’assurance maladie.
Nous étudions d’autres scénarios, qui inscriraient cette régulation dans le cadre exclusif de la relation entre médecin et patient et ne feraient pas reposer la charge de sa gestion sur le service public.
Cette charge de gestion m’inquiète d’ailleurs moins que notre incapacité à bien identifier les rendez-vous non honorés.
Pour ces raisons, je vous invite à retirer votre amendement et j’y serai sinon défavorable. Permettez-moi de répéter que nous préparons des solutions à ce problème important, qui, je dois bien le dire, pourrit, souvent au quotidien, les agendas des médecins. C’est inacceptable !
Mme la présidente
Sur l’amendement n° 1812, je suis saisie par le groupe Rassemblement national d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Arthur Delaporte.
M. Arthur Delaporte
Je suis content d’entendre la ministre nous expliquer que le dispositif que proposait Gabriel Attal il y a quelques mois est inapplicable et inopportun. Je parle évidemment de cette taxe « lapin », qui pèsera d’abord sur les plus précaires. (M. Jérôme Guedj applaudit.)
Mme la présidente
La parole est à M. Thierry Benoit.
M. Thierry Benoit
Je ne pense pas qu’il y ait tant de patients que cela en France qui n’honorent pas leur rendez-vous par plaisir.
M. Arthur Delaporte
Bravo ! Il a raison !
M. Thierry Benoit
Je tiens également à rappeler que beaucoup de députés travaillent sur la question de la régulation de l’installation des médecins, car un grand nombre de nos concitoyens n’ont plus de médecin traitant et peinent à obtenir un rendez-vous.
Du fait de la dématérialisation et de la généralisation de l’usage de plateformes comme Doctolib, nombreux sont nos citoyens qui rencontrent des difficultés à obtenir un rendez-vous. Certains connaissent des difficultés plus importantes encore pour annuler leur rendez-vous, car ils sont peu familiers des outils électroniques.
Appliquer une taxe sur les rendez-vous non honorés alors que l’accès aux soins est des plus dégradés actuellement n’a rien d’opportun.
M. Arthur Delaporte
Tout à fait !
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
Je ne nie pas que certaines personnes annulent leurs rendez-vous pour des raisons très légitimes, mais il y en a aussi beaucoup – elles sont parfois majoritaires – qui ne viennent pas pour des raisons qui ne le sont pas :…
Mme Sandrine Runel
Que veut dire « légitime » ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre
…par insouciance, sans aucune raison particulière. C’est ce qui remonte du terrain, et c’est du vécu.
Or cela crée des difficultés. Certains médecins font des consultations longues, d’une demi-heure, trois quarts d’heure ou une heure, et ont une liste d’attente. Une personne qui ne se présente pas, c’est du temps perdu et cela pénalise les patients. Je ne mets pas au ban tous ceux qui n’annulent pas leurs rendez-vous, mais c’est un vrai problème, dont se plaignent nombre de médecins.
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Yannick Neuder, rapporteur général
Pour consulter encore une fois par semaine – en dehors des périodes d’examen du PLFSS –, je peux vous dire qu’on a maintenant l’habitude d’ajouter un créneau supplémentaire, un doublon, tous les cinq ou six patients, parce qu’on sait qu’il y a une forte chance que quelqu’un n’honore pas son rendez-vous – c’est parfois pour des raisons médicales. Nous avons intégré cette donnée dans nos agendas, afin de perdre le moins de temps médical possible. Il est vrai que si tout le monde vient, il y a un peu plus d’attente, mais ce surbooking est devenu une habitude.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 1103.
(Le vote à main levée n’ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 156
Nombre de suffrages exprimés 144
Majorité absolue 73
Pour l’adoption 69
Contre 75
(L’amendement no 1103 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
4. Ordre du jour de la prochaine séance
Mme la présidente
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 ;
Suite de la discussion de la première partie du projet de loi de finances pour 2025.
(La séance est levée à vingt heures.)
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra