La présente loi vise en réalité à corriger les décisions qui n’ont pas été prises en temps voulu par le Gouvernement, je le regrette profondément. En modifiant les dispositions électorales afin d’organiser le report du second tour des élections municipales et communautaires, tout en maintenant valides les résultats du premier tour, je le dis très clairement ici, nous entrons dans une période d’incertitude juridique qui n’est absolument pas nécessaire dans le contexte de crise sanitaire et économique que nous traversons.
 
Il eut été de la responsabilité du Président de la République et du Gouvernement de ne pas procéder aux élections municipales et aujourd’hui nous colmatons comme on peut la situation impossible qui est née de ce premier tour, puis du confinement avec report du second tour.
 
A ce jour les discussions au Parlement ont permis de corriger certaines aberrations telles que la tenue des Conseils Municipaux en pleine période de confinement. Le report des élections des Maires et des adjoints à une date ultérieure entre dans le contexte global du confinement.
 
En revanche, bien que je souscrive aux conclusions du rapport évaluant la situation sanitaire remis au Parlement le 10 mai 2020, l’organisation d’un second tour au mois de juin 2020, soit 3 mois après le 1er tour va poser d’importants problèmes administratifs, juridiques voire constitutionnels et peut fausser totalement les résultats de l’élection populaire. Je souhaite soulever ici nombre de cas précis :
Peut-on rouvrir les listes à de nouveaux candidats ? Que se passe-t-il dans le cas tragique d’un décès de candidat dans l’entre-deux tour ? Va-t-on rouvrir les inscriptions aux listes électorales ? Que se passe-t-il si un Tribunal Administratif, suite à un recours, annule une élection au motif de la crise sanitaire ? Quelle sera la décision du Conseil d’État et comment apprécier telle ou telle décision par rapport à l’ensemble des élections du premier tour sur l’ensemble du territoire ?
 
De plus, si les conclusions du rapport en mai, évaluant la situation sanitaire, ne permettent pas l’organisation du second tour en juin, que se passe-t-il par rapport au premier tour ? N’y a-t-il pas un véritable imbroglio juridique ? Certains anciens élus vont continuer à siéger avec des nouveaux, des EPCI mélangés entre nouveaux et anciens à titre provisoire. Comment le Gouvernement souhaite sortir de cette impasse et quelle est la place réservée au Parlement ? Je m’opposerai à toute décision qui porte atteinte à l’égalité des citoyens et au respect des institutions.
 
Enfin, je suis favorable à la mise en place de l’état d’urgence sanitaire de deux mois prolongeables sur le même modèle que l’état d’urgence « classique ». La vitesse de propagation du virus impose de prendre des mesures rapides pour lesquelles les ordonnances sont plus adaptées.
 
Cependant, ces pouvoirs exceptionnels accordés par le Parlement au Gouvernement doivent rester exceptionnels et contrôlés. Je souhaiterais que les parlementaires soient associés à la rédaction des ordonnances comme cela a pu être le cas sur certains sujets auparavant. Face à la limitation des libertés publiques, l’urgence d’agir ne doit pas empêcher les contrôles pour en limiter les abus.
 
C’est pourquoi je souhaiterais qu’immédiatement après l’état d’urgence sanitaire des débats soient engagés au Parlement pour tirer toutes les conséquences de cette situation. À travers une commission d’enquête dans un premier temps, puis en instaurant une base légale claire, précise et limitée pour apporter une réponse proportionnée lors de la prochaine crise sanitaire.
 
Il me semble que l’instauration d’un « état de catastrophe sanitaire », sur la base de l’état de catastrophe naturelle, serait plus appropriée et mesurée.  

Je soutiens très largement l’ensemble des mesures prises à travers la mise en place d’un état d’urgence sanitaire, de la protection de nos entreprises, du contrôle des parlementaires et des autres mesures d’urgence.
 
Cependant, depuis le mois de janvier, des indicateurs faisaient apparaitre que la crise serait mondiale et pendant ce temps, le Président de la République et le Gouvernement ont pris des mesures inadaptées allant jusqu’à autoriser le premier tour des municipales. Au vu du corps électoral, ce dernier a fait déplacer entre 4 et 5 français sur 10, c’est-à-dire plus de 20 millions de personnes avec tous les risques que cela comportait. Le lendemain est annoncé le confinement général. Je ne peux, en tant que Parlementaire, accepter cette incohérence qui crée un obscurcissement juridique incommensurable sur lequel aucun constitutionnaliste ne sait apporter une réponse. Nous mettons également en danger tous les pans de l’économie française.