A situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles.

La France traverse la pire crise sanitaire de ces 100 dernières années. C’est une épreuve extrêmement difficile, un défi sans réel précédent. Mais un défi auquel nous faisons face et que nous surmonterons.

Le régime de l’exception s’impose. Ce n’est pas une question, ce n’est pas un débat : ce texte doit être voté et il le sera.

Le Président aurait pu utiliser l’article 16 de la Constitution. Personne en ces circonstances ne le lui aurait reproché. Il a cependant fait le choix de réunir le Parlement et de maintenir le fonctionnement de nos institutions. La guerre est aussi affaire de symbole : nos médecins, infirmiers, pharmaciens… sont en première ligne, mais l’arrière doit impérativement faire bloc. La démocratie continue, comme notre économie doit continuer de participer à l’effort de guerre.

Le présent texte prévoit le report des élections municipales et les dispositions pratiques qui en découlent pour assurer la continuité des services publics locaux : c’est le bon sens même.

La création d’un état d’urgence sanitaire ne peut aussi faire que consensus. L’idée qui sous-tend ce nouveau dispositif est le principe de proportionnalité : le gouvernement peut restreindre les libertés publiques, notamment celle d’aller et venir, selon la gravité des circonstances. La crise actuelle nous démontre hélas que c’est indispensable : il s’agit ni plus ni moins de protéger la population contre elle-même. Pour cela, l’Etat a l’obligation de régenter jusqu’au quotidien des familles. C’est un mal, passager, pour un bien.

Les mesures économiques, pour lesquelles le gouvernement aura massivement recours aux ordonnances, sont peut-être celles où le langage de la coercition est le plus explicite. Evidemment, en « temps normal » le Parlement aurait aimé débattre, interroger, obtenir des précisions, ce n’est pas de gaité de cœur que les parlementaires donnent ainsi un si large blanc-seing au gouvernement (fussent-ils de la majorité ou de l’opposition). Mais voilà, de temps, il n’y en a pas, et le contexte est tout sauf normal.

En période de guerre, l’Union sacrée doit être l’horizon de nos consciences et la confiance en nos pouvoirs publics la règle.

Sur le terrain, nous, élus, sentons bien l’inquiétude légitime de nos concitoyens, nous avons connaissance des difficultés des entreprises, de leurs salariés. Nous connaissons aussi le terrible combat mené quotidiennement, 24h/24h, par les personnels de santé. Il y a bien urgence aujourd’hui à agir, « quoi qu’il en coûte », pour reprendre l’expression, simple et directe, du moment.

Notre Nation est aujourd’hui face à l’un de ces moments qui façonne l’Histoire. Je ne doute pas que nous sortirons collectivement grandis de cette épreuve.

J’en appelle enfin à l’Europe. Député d’une circonscription située au bord du Rhin, je ne peux raisonnablement que déplorer le chacun-pour-soi qui semble guider les Etats. Nous-mêmes avons pris du temps à bien mesurer le cataclysme qui s’abattait sur l’Italie. Aujourd’hui, les pays les plus touchés ont adopté les mêmes mesures et les autres y viendront sans aucun doute. Mais je reste perplexe lorsque j’entends qu’un travailleur frontalier alsacien risque une amende parce qu’il traverse la frontière avec une carte d’identité de plus de 10 ans encore valable en France mais non reconnue en Allemagne.

L’Union européenne vient d’annoncer la création d’une réserve stratégique d’équipement médical dans laquelle les pays pourront puiser. C’est bien cela que j’attends aujourd’hui d’elle : de l’entraide, de la solidarité, de la mise en commun de nos moyens et de nos connaissances. Naturellement, je l’invite à multiplier ces initiatives qui vont dans le bon sens.

Lorsque l’heure sera venue de tirer les conclusions et de faire le bilan de cette crise sanitaire, je souhaite vivement que nous puissions aussi nous pencher sur ces aspects. C’est en apportant des réponses coordonnées entre les Etats, que nous parviendrons à l’avenir à répondre plus efficacement à de telles crises. L’Europe ne doit pas seulement être un espace économique, elle doit aussi s’affirmer, pour ses citoyens, comme un espace de vie.