Première séance du jeudi 24 octobre 2024
- Présidence de Mme Naïma Moutchou
- 1. Débat sur les finances locales
- Mme Catherine Vautrin, ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation
- M. Laurent Saint-Martin, ministre du budget et des comptes publics
- M. Charles de Courson, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
- M. Emmanuel Mandon, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
- M. Éric Coquerel, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
- M. Stéphane Delautrette, président de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation
- Mme Sophie Pantel (SOC)
- M. Nicolas Ray (DR)
- M. Tristan Lahais (EcoS)
- M. Emmanuel Mandon (Dem)
- M. Christophe Plassard (HOR)
- M. Jean-Pierre Bataille (LIOT)
- M. Nicolas Sansu (GDR)
- M. Gérault Verny (UDR)
- M. Philippe Lottiaux (RN)
- M. Didier Le Gac (EPR)
- M. Gabriel Amard (LFI-NFP)
- Mme Stella Dupont (NI)
- Mme Catherine Vautrin, ministre
- M. Laurent Saint-Martin, ministre
- Suspension et reprise de la séance
- 2. Projet de loi de finances pour 2025
- Première partie (suite)
- Après l’article 3 (suite)
- Amendements nos 255, 703 et 2779
- M. Charles de Courson, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
- M. Laurent Saint-Martin, ministre du budget et des comptes publics
- Amendements nos 3472, 615, 2424, 3053, 3054, 3055, 3056, 3575, 3572, 2694 rectifié, 1086, 2133, 2219, 3634, 3300, 3516, 3298, 3517, 3299, 2044, 3633, 3457, 2891, 1084, 2134, 2222, 2131, 2215, 2977, 1087, 2135, 2221, 2220 rectifié, 2971 rectifié, 3020 rectifié, 2987 , 2210, 1424, 1085, 2132, 2213, 2136, 2217, 2983, 3019, 3408, 559, 1416 et 1377
- Rappels au règlement
- Après l’article 3 (suite)
- Après l’article 3 (suite)
- Première partie (suite)
- 3. Ordre du jour de la prochaine séance
Présidence de Mme Naïma Moutchou
vice-présidente
Mme la présidente
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures.)
1. Débat sur les finances locales
Mme la présidente
L’ordre du jour appelle, en application de l’article 52 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, un débat sur la situation des finances publiques locales.
La parole est à Mme la ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation.
Mme Catherine Vautrin, ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation
Ce débat sur les finances locales, prévu par la loi organique du 28 décembre 2021, est l’occasion d’échanger avec vous dans un contexte budgétaire particulièrement difficile. Nous ne pouvons pas nous voiler la face : l’état des finances publiques nous oblige, collectivement, à redresser une situation – le Premier ministre l’a dit et répété – qui porte préjudice à la souveraineté de la France. Le moment n’est pas de s’interroger sur les origines et les responsabilités, mais bien de se demander comment nous devons agir, collectivement.
M. Nicolas Sansu
Ben voyons !
Mme Catherine Vautrin, ministre
Certains d’entre vous sont aussi des élus locaux et savent, comme moi, que les collectivités ont, dans leur immense majorité, un souci de bonne gestion. Elles ont fait face en 2022 et en 2023 à l’inflation, à la hausse des coûts de l’énergie dans un contexte international instable et elles ont assumé des choix sociaux courageux – je pense à la revalorisation du point d’indice, aux dispositions en faveur des bas salaires dans la fonction publique et au Ségur de la santé, mesures de progrès que nous assumons mais qui, nous ne pouvons l’occulter, ont aussi pesé sur les comptes.
Je souhaite, avec une certaine solennité, souligner le rôle de la représentation nationale dans la maîtrise de l’ensemble de nos finances publiques. Je suis attachée à éviter toute séparation entre le législateur et les collectivités, avec la même sollicitude que celle avec laquelle je m’efforce d’approfondir le partenariat entre l’exécutif et les institutions territoriales. Je suis également ici pour trouver et construire avec vous les meilleures solutions, tout en restant à l’écoute des élus locaux, avec lesquels j’échange continûment depuis un mois.
Le Premier ministre l’a rappelé dans sa déclaration de politique générale, la réduction de la dette financière et de la dette écologique est au premier rang des objectifs du Gouvernement. Cette situation nécessite un effort exceptionnel et donc un sursaut national qui ne peut être que collectif, car le contribuable français est unique et ne fait qu’un avec le citoyen. C’est tout l’objet des mesures que nous vous présentons, Laurent Saint-Martin et moi-même, dans un objectif de contribution des collectivités locales à leur juste part, portée dans ce projet de loi de finances (PLF) pour 2025 à 5 milliards d’euros, soit 12,5 % de l’effort total d’économies. Croyez-moi, ce n’est franchement pas de gaîté de cœur que l’élue locale que je suis, mais qui croit en notre devoir de responsabilité devant nos concitoyens, s’y résout. C’est difficile, chacun le sait, mais la gestion des affaires publiques nous oblige.
Le premier point que je souhaite souligner dans ce projet de loi de finances, c’est le soutien continu aux collectivités par les concours financiers de l’État. J’en veux pour preuve la stabilité de la dotation globale de fonctionnement (DGF) qui s’établit à 27,5 milliards d’euros, le maintien des dotations d’investissement que sont la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR), la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL), la dotation de soutien à l’investissement des départements (DSID) et la dotation politique de la ville (DPV) à un niveau historiquement haut, parce que l’État a voulu et veut le succès des collectivités locales, principales contributrices de l’investissement public. Je veux le souligner devant vous : ce sont les collectivités locales qui investissent dans les territoires. Il ne s’agit donc pas de briser la dynamique qui a conduit le niveau d’investissement des collectivités à progresser de 27 % depuis 2017.
Le Gouvernement continuera également d’apporter son soutien aux collectivités afin de leur permettre d’assumer leurs missions de proximité. La dotation pour les titres sécurisés (DTS) et la dotation de soutien aux communes pour les aménités rurales sont ainsi maintenues chacune à hauteur de 100 millions d’euros.
La péréquation gardera également toute sa place, puisque la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (DSU) et la dotation de solidarité rurale (DSR) seront portées respectivement à 140 millions et à 150 millions dans le projet de loi qui vous est présenté.
Nous avons aussi pu préserver le fonds Vert à hauteur de 1 milliard – c’est moins que l’an passé, je vous l’accorde, mais cela reste un montant élevé qui contribuera incontestablement à notre action commune au bénéfice de la transition écologique. Il est important de souligner à cet égard la prise en main de ce sujet par les collectivités locales qui engagent de plus en plus de projets d’investissement, notamment dans le cadre de la DETR, allant dans le sens de la transition écologique.
Mme Christine Arrighi
Elles ne vous ont pas attendue !
Mme Catherine Vautrin, ministre
Tout cela ne doit pas être occulté par la participation demandée aux collectivités territoriales au titre du redressement des finances publiques, dès lors que les dépenses augmentent plus vite que les recettes. En votre qualité de parlementaires, vous êtes aussi préoccupés que moi de l’état du déficit public et vous mesurez le défi que nous avons à relever ensemble. Je suis, bien sûr, à votre disposition pour ouvrir un débat avec vous, afin d’identifier les meilleures pistes d’économie, au sein du périmètre des finances des collectivités locales, dans le respect de leur autonomie financière et de leur libre administration.
J’ai souhaité que cette participation des collectivités à l’effort de redressement, que Laurent Saint-Martin détaillera dans un instant, reste calibrée au vu de la réalité des comptes des collectivités et qu’elle soit respectueuse de leur participation.
Mme Claire Marais-Beuil
C’est une blague !
Mme Catherine Vautrin, ministre
C’est la raison pour laquelle le mécanisme de fonds de précaution sera déclenché sur la base des comptes exécutés en 2024 – c’est un devoir de vérité vis-à-vis des collectivités que de partir des comptes effectivement exécutés et non pas de projections. C’est aussi pour cela que le Comité des finances locales (CFL) jouera un rôle prépondérant et responsable dans les décisions de répartition de ce fonds, qui reviendra aux collectivités.
Le projet de loi de finances qui vous est présenté est le projet du Gouvernement, mais il peut et doit encore être amélioré grâce à vos apports, pour mieux coller aux réalités des collectivités territoriales.
Avec mon collègue Laurent Saint-Martin, nous voulons que cette contribution reste protectrice des collectivités les plus fragiles : les communes les plus vulnérables au regard de la DSU et de la DSR, les intercommunalités en situation difficile, les départements dont les dépenses sociales sont très élevées, les régions d’outre-mer et de Corse seront dispensés de participer au fonds de précaution prévu par le projet de loi.
Nous voulons aussi que cette contribution soit respectueuse de la capacité des collectivités à dégager un autofinancement pour financer leurs investissements et, enfin, c’est une évidence, qu’elle soit respectueuse de la libre administration des collectivités territoriales.
Je suis bien évidemment ouverte, tout au long des débats sur le projet de loi de finances, à toutes les propositions constructives pour faire évoluer le dispositif, dès lors que nous maintenons l’objectif de maîtrise des finances. Je compte donc sur la sagesse et la capacité de réflexion de chacun pour nous aider à franchir collectivement ce cap.
Quatre mots définissent mon approche : écoute, dialogue, suivi et contractualisation.
C’est pourquoi, au-delà du projet de loi de finances, je souhaite que le Parlement et le Comité des finances locales soient plus souvent associés, au cours de l’année, au suivi et aux débats sur les grandes orientations des finances locales. Je suis également sensible aux réflexions des collectivités visant à mieux maîtriser leurs ressources, dans le respect de la compétitivité de notre économie et du pouvoir d’achat des Français. Je serai également attentive à ce que la variété et les contraintes particulières de nos territoires insulaires et ultramarins soient comprises et prises en considération.
Enfin, pour réduire les charges excessives qui pèsent sur les collectivités, je souhaite m’inspirer des remontées du terrain, des propositions concrètes de simplification pour lesquelles nous serons conduits à vous demander de lever certains obstacles qui relèvent de la loi.
Mesdames et messieurs les députés, cette période budgétaire est extrêmement difficile, mais je suis profondément convaincue que c’est dans la difficulté que nous trouverons les solutions pour apporter au pays, à nos territoires et à leurs habitants les réponses qu’ils attendent. (Applaudissements sur les bancs des groupes DR et Dem.)
M. Nicolas Sansu
Dommage qu’il n’y ait personne sur les bancs du groupe EPR pour vous écouter !
M. Jacques Oberti
Les bancs de la minorité gouvernementale sont dégarnis !
Mme Catherine Vautrin, ministre
Ils ne savent pas ce qu’ils perdent ! (Sourires.)
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre du budget et des comptes publics.
M. Laurent Saint-Martin, ministre du budget et des comptes publics
Je suis très heureux d’avoir ce débat sur les finances locales avec vous, débat que nous avions voulu lors de la modernisation de la loi organique relative aux lois de finances (Lolf), car il s’agit d’un moment important dans notre automne budgétaire et il semblait utile d’ouvrir cette discussion en parallèle de l’examen du projet de loi de finances. Il doit permettre d’aborder non seulement les questions budgétaires pour l’année 2025 mais aussi, et c’est tout son intérêt, de réfléchir dans une prospective à plus long terme – j’y reviendrai.
S’agissant de la procédure budgétaire, la nouvelle Lolf nous permet désormais de disposer d’un jaune budgétaire dédié, annexé au PLF, qui éclairera utilement les travaux menés dans le cadre des commissions compétentes et de la Délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation (DCT).
Je structurerai mon propos en quatre points : d’abord, la situation des finances locales en 2024 ; ensuite, le cadre des finances publiques pour l’année 2025 – rapidement, puisqu’il a été évoqué à de multiples reprises ; puis, dans un troisième temps, les mesures de contribution au redressement des finances publiques que le Gouvernement propose aux collectivités locales dans le cadre du PLF pour l’année 2025 ; enfin, je conclurai mon propos – et c’est sans doute la partie la plus importante – par un mot de méthode, pour vous présenter la manière dont nous voulons, avec Catherine Vautrin, travailler non seulement avec les parlementaires…
Mme Christine Arrighi
Lesquels ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
…mais aussi avec les collectivités, afin de tracer, dans la concertation, ce chemin du redressement.
Selon les données comptables dont nous disposons, nous constatons non seulement une évolution dynamique des dépenses des collectivités, mais aussi un accroissement des divergences entre les différentes strates territoriales. Je ne reviens pas sur l’année 2023, dont vous trouverez une analyse détaillée dans le rapport sur la situation des finances locales qui vous a été transmis en annexe du PLF pour 2025. S’agissant de l’année 2024, je précise d’emblée que les dernières données disponibles remontent à la fin du mois d’août. Je le précise compte tenu de ce qu’a évoqué très justement la ministre du partenariat avec les territoires : le mécanisme du fonds de précaution qui sera instauré se fondera sur la vérité des prix à la fin de l’année 2024 – à ce jour, nous ne disposons, j’y insiste, que des chiffres à la fin du mois d’août.
Sans en tirer, par définition, de conclusions définitives, nous pouvons tout de même dresser quelques constats provisoires, qui devront, précisons-le, être affinés.
Première observation, les dépenses locales sont dynamiques. Les dépenses de fonctionnement connaîtraient, en 2024, une croissance supérieure à celle des recettes de fonctionnement, malgré le ralentissement de l’inflation. Les dépenses d’investissement, portées notamment par le cycle électoral, resteraient également dynamiques pour toutes les strates de collectivités. Comme vous le savez, la hausse des dépenses des collectivités sur le temps long s’explique essentiellement par la hausse des charges de fonctionnement, tirées notamment par la croissance des effectifs locaux et donc des dépenses de personnel.
Mme Estelle Mercier
Non, c’est en raison de la revalorisation du point d’indice !
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Sur la période 2002-2023, les charges de personnel sont passées de 47 milliards à 92 milliards, soit + 3,4 % par an en moyenne. Les dépenses d’investissement ont également marqué une forte progression depuis 2017, de l’ordre de 20 milliards. L’investissement public local est essentiel pour notre pays et l’État vient en soutien des collectivités, depuis sept ans, dans le cadre notamment du renforcement des concours financiers versés en faveur de l’investissement local.
Deuxième observation, les différents niveaux de collectivités connaissent des évolutions divergentes. Ainsi, la situation du bloc communal poursuivrait son amélioration, avec une croissance consolidée de l’épargne brute – là encore, il s’agit de chiffres globaux, qui ne préjugent pas des réalités particulières et locales –, tandis que celle des régions et surtout celle des départements se dégraderaient. Voilà les tendances observées à ce stade pour l’année 2024 et notre base de travail pour préparer 2025.
Venons-en au cadre de finances publiques dans lequel s’inscrivent les propositions du Gouvernement pour 2025. Le moment local qui nous occupe aujourd’hui est utile et pertinent en temps normal. Il l’est encore davantage à l’heure où nous devons ensemble redresser les comptes publics. Ayant déjà eu à plusieurs reprises l’occasion de vous exposer la situation de nos finances publiques, toutes administrations publiques (APU) confondues, je serai bref.
Notre objectif dans le projet de loi de finances pour 2025 est de ramener le déficit public à 5 % du PIB, première marche d’une trajectoire ambitieuse de retour sous la barre des 3 % à l’horizon 2029. En visant 3 %, il s’agit non de répondre à une quelconque injonction ni de se donner un cap totémique, mais de stabiliser la dette et de commencer à la réduire. C’est s’engager sur la voie d’un retour salutaire à une trajectoire financière soutenable.
Le contexte est difficile, ne nous le cachons pas. Cette réduction de la dette s’opérera au bénéfice de l’ensemble des administrations publiques. La dette publique, c’est la dette publique. Il n’y a pas la dette publique de quelques-uns et celle des autres. C’est la dette de tout le monde.
Mme Christine Arrighi
C’est la vôtre !
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Les marchés ne font pas de différence – ou très peu – entre l’endettement de l’État, de la sécurité sociale et des collectivités. Ce qui compte pour nos créanciers, c’est la crédibilité de la signature de la France, laquelle conditionne notre capacité à financer collectivement nos services publics et notre action publique.
Nos conditions de financement ne sont pas une réalité abstraite et purement comptable. Il y va de notre capacité à investir, à mener des politiques régionales, locales ou nationales d’attractivité ; de la capacité des communes et de l’État à investir ensemble dans la transition écologique, à conduire des projets d’infrastructure et à construire des logements ; de notre capacité à financer nos services publics, qu’ils soient locaux ou nationaux ; de la capacité des départements et de la sécurité sociale à venir en aide à nos concitoyens les plus vulnérables et à les protéger. Il y va de la capacité de chaque administration publique à agir et à exercer les compétences que lui attribue la loi.
Si on ne résout pas cette équation-là, avec plus de 3 220 milliards d’euros de dette publique, un choc de taux de 1 % augmenterait la charge de la dette de 3,2 milliards d’euros la première année, de 20 milliards d’euros la cinquième année, et de 33 milliards d’euros la neuvième année, ce qui serait insoutenable pour l’ensemble des administrations publiques. Nous n’en avons pas les moyens, et je refuse de proposer à nos concitoyens un alourdissement du service de la dette, qui constitue déjà l’un des principaux postes budgétaires de l’État.
Mme Christine Arrighi
Cela ne vous dérange pas de l’avoir creusée !
M. Laurent Jacobelli
Un joli record ! Bravo !
M. Laurent Saint-Martin, ministre
À la lumière de notre objectif, il est impératif de contenir le déficit à 5 % l’année prochaine. Je ne reviendrai pas sur la part de baisses de dépenses publiques et celle de hausses des prélèvements obligatoires, vous les connaissez.
Surtout, nous ne sommes pas là pour distribuer les bons et les mauvais points. La question n’est pas de savoir si la gestion est bonne ou mauvaise – la situation des finances publiques est bien trop grave pour jouer à se refiler la patate chaude. Si nous avons décidé de mettre à contribution l’ensemble des administrations publiques, c’est précisément pour les raisons que je vous ai exposées : le déficit et la dette publique sont l’affaire de tous, il y va donc de l’intérêt et de la responsabilité de chacun de contribuer à redresser la situation. Ce n’est pas plus que cela.
Si les collectivités territoriales sont par construction de bons gestionnaires en vertu de la règle d’or,…
M. Nicolas Sansu
Eh oui !
M. Laurent Saint-Martin, ministre
…nous devons néanmoins réfléchir à la manière de contribuer ensemble à redresser les comptes publics. Les collectivités représentent 20 % de la dépense publique. L’effort que nous leur demandons dans le cadre du redressement des finances publiques n’est pas négligeable, puisqu’il représenterait 12 % de l’effort global. C’est un effort réel et complexe eu égard aux compétences des collectivités territoriales et à leurs contraintes, je ne le nie pas, mais cet effort n’est pas excessif.
Mme Mathilde Feld
C’est absurde !
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Nous en reparlerons lors de l’examen du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), mais je veux dès aujourd’hui vous présenter les quatre mesures que propose le Gouvernement, en précisant d’emblée deux points importants. D’abord, comme l’a souligné ma collègue chargée du partenariat avec les territoires et de la décentralisation, le montant de la DGF restera stable, comme nous nous y sommes engagés. Ensuite, la contribution que nous proposons repose essentiellement sur les plus grandes collectivités, et exclut au maximum les collectivités présentant des difficultés financières. C’est une question d’équité.
Première mesure : nous proposons la création d’un fonds de précaution abondé grâce à un prélèvement sur les recettes des plus grandes collectivités – 450 environ, celles qui ont la capacité de contribuer. Je reviendrai sur l’évolution de ce quantum et sa composition lorsque j’évoquerai les méthodes. Ce fonds sera à la main des collectivités, qui pourront le mobiliser dès 2026 selon des modalités que nous définirons en partenariat avec elles.
Deuxième mesure : nous proposons de reconduire en 2025 le niveau de TVA versé aux collectivités en 2024, retardant ainsi d’une année la prise en compte de la dynamique fiscale. Cette mesure permet de faire participer les collectivités locales à l’effort global de maîtrise des dépenses publiques, tout en préservant les concours financiers de l’État qui ne diminueront pas.
Mme Christine Arrighi
Pas participer, supporter !
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Nous n’agissons que sur la maîtrise de la dynamique. Ce dispositif présente en outre l’avantage de garantir la stabilité des transferts de TVA et d’améliorer la prévisibilité des ressources, puisqu’il n’y aura en conséquence pas de régularisation en cours d’année.
La troisième mesure – je sais qu’elle est particulièrement sensible, mais je la présente puisqu’elle figure dans le texte initial – est l’ajustement du fonds de compensation pour la TVA (FCTVA), qui représente un effort de 800 millions d’euros par rapport à l’évolution tendancielle du fonds pour 2025, et de 300 millions d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2024. Je précise que cette mesure concernera plus particulièrement le bloc communal, qui est probablement le moins concerné par les deux mesures précédentes.
Mme Véronique Louwagie
Et les départements ?
Un député du groupe EcoS
Et les investissements ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Nous aurons ce débat.
Enfin, quatrième mesure, cette fois dans le cadre du PLFSS : le relèvement du taux de cotisation des employeurs publics à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) est nécessaire pour améliorer l’équilibre du régime de retraite des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers.
M. Nicolas Sansu
Ça, ça fait mal !
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Comme l’a dit le Premier ministre, le budget que nous proposons pour 2025 est, de manière générale et en particulier pour les collectivités, perfectible – eu égard notamment au calendrier de préparation très resserré qui a été le nôtre.
Un député du groupe LFI-NFP
On ne vous le fait pas dire !
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Cela signifie que nous avons besoin de l’améliorer ensemble, que nous sommes ouverts au débat parlementaire et à la concertation avec les élus et leurs associations.
M. Laurent Jacobelli
C’est quand même normal !
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Cette copie imparfaite – nous l’assumons – constitue une proposition de départ pour trouver les conditions de la juste participation des collectivités au redressement des finances publiques. Comme nombre d’entre vous, je suis moi-même élu local et je crois sincèrement aux vertus du dialogue, de l’écoute et de la concertation. (Rires et exclamations sur plusieurs bancs.) Je souhaite que nous construisions, avec l’ensemble des parties prenantes, un chemin qui fonctionne et qui permette de renouer avec une trajectoire financière globale soutenable. Catherine Vautrin et moi-même l’avons dit devant le Comité des finances locales et je le répète : il n’y a ni totem ni tabou dans ce budget, si ce n’est une ligne rouge que nous avons posée en responsabilité, celle de redresser les comptes en écartant le matraquage fiscal.
Mme Christine Arrighi
Ah là là !
M. Laurent Saint-Martin, ministre
À cet égard, j’ai entendu les alertes sur la situation de certains départements. Je reconnais volontiers que le dispositif de maîtrise de la dépense que nous proposons est imparfait dans certains cas particuliers. J’ai d’ailleurs vu plusieurs propositions émanant de vos bancs comme de ceux du Sénat afin d’améliorer le dispositif. Je suis ouvert à la discussion et j’examinerai volontiers vos propositions.
J’ai relevé par ailleurs de nombreux amendements visant à donner davantage de marges de manœuvre aux collectivités sur les recettes – je pense notamment aux propositions relatives aux cartes grises. Nous sommes également prêts à y travailler avec vous. D’autres propositions émergeront pendant le débat parlementaire dans cette assemblée et au Sénat.
Au-delà des seules finances locales, nous devrons envisager ce débat dans une perspective plus large, notamment à la lumière des récents rapports d’Éric Woerth et Boris Ravignon. Il s’agit de nourrir la nouvelle mission confiée à ce dernier par Mme Vautrin pour les prochains mois. Je suis à votre écoute pour ce débat et il y aura matière à apporter des modifications lors de l’examen du PLF et du PLFSS.
M. Nicolas Sansu
Le compte n’y est pas !
Mme la présidente
La parole est à M. Charles de Courson, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.
M. Charles de Courson, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
La politique menée par le Gouvernement à l’égard des collectivités locales depuis sept ans n’est pas la bonne. D’abord, depuis 2017, les gouvernements successifs ont considérablement accéléré la réduction de l’autonomie fiscale locale à travers un double phénomène. D’une part, la suppression de la taxe d’habitation a rompu le lien entre le citoyen électeur et le citoyen contribuable. D’autre part, la suppression progressive de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) a dégradé la relation entre l’échelon local et les entreprises.
Ensuite, le Gouvernement propose dans le PLF 2025 que les collectivités participent au redressement des comptes publics à hauteur de 4,8 milliards d’euros, non compris le gel de la DGF, qui n’est pas nouveau. Sont notamment prévus la hausse des cotisations employeur au titre de la CNRACL pour 1,3 milliard, la réduction du fonds Vert de 2,5 à 1 milliard d’euros en autorisations d’engagement (AE), le gel de la dynamique de la TVA à hauteur de 1,2 milliard et la réduction du FCTVA à hauteur de 800 millions.
Enfin, pour couronner le tout, le Gouvernement prévoit la création d’un fonds de réserve dont le coût pour les 450 collectivités et établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) concernés est estimé à 3 milliards d’euros. Ce pacte de Cahors revisité n’est rien d’autre qu’un prélèvement de l’État sur les recettes de fonctionnement des collectivités locales sur la base des comptes de 2024, même s’il est prévu de leur redonner ces 3 milliards en 2026. (Exclamations sur les bancs des groupes EcoS et GDR à l’arrivée de M. Jean-René Cazeneuve dans l’hémicycle.)
Mme Christine Arrighi
Ah, enfin un député EPR !
M. Nicolas Sansu
C’est l’EPR du peuple ! (Sourires.)
M. Charles de Courson, rapporteur général
C’est une sanction inique, car elle est collective et rétroactive et ne tient pas compte de la qualité de la gestion. L’épargne brute des collectivités locales au 31 août 2024 est en diminution de 14 milliards par rapport au 31 août 2023. Ce recul de l’épargne, concentré sur les départements et les régions, nuit à l’investissement public, largement porté par les administrations publiques locales – à hauteur de 70 %. Cette politique favorise, hélas ! l’affrontement entre l’État et les collectivités locales.
C’est pourquoi les relations entre le Gouvernement et les collectivités locales doivent être repensées. À court terme, il est nécessaire de répondre aux situations financières les plus difficiles. L’équilibre budgétaire des départements est particulièrement inquiétant : quatorze départements sont en déficit de fonctionnement en 2024 et, selon les projections de Départements de France, vingt-neuf le seront en 2025 et une cinquantaine en 2027. C’est pourquoi j’ai proposé d’abonder le fonds de sauvegarde des départements dans le PLF 2025 à hauteur de 466 millions d’euros. Cet amendement a d’ailleurs été adopté par la commission des finances. (M. Gabriel Amard applaudit.)
À moyen terme, il faut responsabiliser les élus locaux et assurer la reprise du dialogue avec l’État. Il faut pour cela rendre de l’autonomie fiscale aux élus, à partir d’un impôt démocratique, c’est-à-dire une assiette la plus large possible et un pouvoir de taux pour les exécutifs locaux.
M. Gabriel Amard
Ah !
M. Charles de Courson, rapporteur général
Je m’inscris ici dans la continuité des travaux d’Éric Woerth sur la création d’une contribution sociale généralisée (CSG) départementale. Cet impôt disposerait d’une assiette départementale au taux de 1 % à partir du 1er janvier 2025. À partir de 2026, les départements auraient la possibilité d’ajuster ce taux, à l’intérieur d’une fourchette comprise entre 0,95 % et 1,15 %. Un fonds de péréquation, basé sur le revenu par habitant serait également créé. Cette réforme serait neutre financièrement. Actuellement, la CSG est perçue par la sécurité sociale. L’État compenserait la perte de 1 % de CSG en réduisant les dotations aux départements de 15 milliards d’euros et les taux nationaux de CSG seraient abaissés de 1 %.
Enfin, il faudrait redonner un impôt économique aux régions et sanctuariser l’autonomie fiscale encore détenue par le bloc communal – mais pour combien de temps ? Telle est ma modeste contribution à ce débat. (Applaudissements sur les bancs des groupes LIOT, LFI-NFP, SOC, Dem et GDR.)
Mme la présidente
La parole est à M. Emmanuel Mandon, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.
M. Emmanuel Mandon, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
En ce début d’examen du projet de loi de finances, je salue l’organisation de ce débat nécessaire, particulièrement en ce moment, sur la situation des finances publiques locales. En qualité de rapporteur spécial de la mission Relations avec les collectivités territoriales (RCT), plusieurs points d’attention relatifs au projet de loi de finances pour 2025 méritent selon moi d’être relevés.
Tout d’abord, les crédits demandés au titre de la mission RCT sont particulièrement stables et s’élèvent à 4 milliards d’euros en autorisations d’engagement – soit une baisse de 2,06 % – et à 4 milliards d’euros en crédits de paiements (CP) – soit une hausse de 2,51 % par rapport à la loi de finances pour 2024. La mission ne constitue, il est vrai, qu’une part minoritaire – 8 % – des concours financiers de l’État aux collectivités. Je salue le fait que les crédits prévus en 2025 pour soutenir l’investissement du bloc communal et des départements – actions nos 1 et 3 du programme 119 – enregistrent une hausse de 17 millions d’euros en crédits de paiement – soit une augmentation de 0,86 % par rapport à la loi de finances pour 2024 – et demeurent stables en autorisations d’engagement, à 2,182 milliards d’euros. Cette stabilité confirme le maintien du soutien de l’État au-dessus du niveau symbolique de 2 milliards d’investissements en faveur du bloc communal et des départements.
J’approuve par ailleurs la progression de la part minimale de ces dotations au soutien à des concourants à la transition écologique. Les cibles de pourcentage de dotations d’investissement concourant à la transition écologique sont rehaussées de cinq points, passant à 30 % de l’enveloppe de la DSID, 25 % de la DETR et 35 % de la DSIL.
Néanmoins, au-delà des crédits de la mission RCT au sens strict, je me suis également intéressé aux dispositifs proposés par les articles rattachés à la mission, et c’est là que le bât blesse. L’article 61, qui prévoit quelques évolutions de la répartition de la DGF, ne propose aucun abondement de l’État pour financer l’augmentation des dispositifs de péréquation – DSR, DSU, dotation d’intercommunalité. Au total, les évolutions péréquatrices de la DGF se chiffreraient à 380 millions d’euros, sans abondement de l’État. Si cette mesure se comprend à la lumière de la situation budgétaire actuelle, les collectivités la reprocheront sûrement à l’État.
L’article 62 tire les conséquences d’une décision du Conseil constitutionnel de non-conformité au principe constitutionnel d’égalité devant les charges publiques des modalités dérogatoires de droit commun de répartition interne du fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (Fpic) au sein des établissements publics territoriaux (EPT) de la métropole du Grand Paris (MGP). Sur ce point, les changements proposés par le Gouvernement me semblent aller dans la bonne direction.
L’article 63 propose une répartition des produits des trois taxes afférentes aux laboratoires géologiques et aux centres de stockage de déchets radioactifs, notamment du projet Cigéo (centre industriel de stockage géologique). Particulièrement complexe et sensible, ce sujet sera suivi de près par les territoires de la Meuse et de la Haute-Marne. Le dispositif proposé me semble parvenir à préserver les équilibres politiques et fiscaux locaux.
Enfin, l’article 64 propose un fonds de précaution, abondé en 2025 à hauteur de 3 milliards d’euros par un prélèvement sur les recettes des collectivités territoriales dont les dépenses réelles de fonctionnement sont les plus élevées. Si j’en comprends le principe, les modalités précises du dispositif pourraient être améliorées par le débat parlementaire, notamment au sujet des départements et des marges de manœuvre conférées au Comité des finances locales.
L’effort de participation au redressement des finances publiques demandé aux collectivités territoriales, marqué la stabilisation de la DGF, est important, mais je fais confiance au débat pour enrichir les dispositifs prévus et les adapter aux enjeux.
Mme la présidente
La parole est à M. le président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.
M. Éric Coquerel, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
Le Gouvernement est incapable de trouver une majorité au sein de cet hémicycle, mais reconnaissons qu’il existe un sujet sur lequel il parvient à faire l’unanimité, malheureusement contre lui : tous les élus locaux sont vent debout contre le projet de budget qui va asphyxier financièrement les collectivités territoriales. Le Gouvernement annonce une baisse des recettes de 5 milliards, mais selon André Laignel, président du Comité des finances locales (M. Didier Le Gac s’exclame), le coup de massue atteindra plutôt 9,5 milliards d’euros, voire davantage.
Diminution de 1,2 milliard de la TVA versée pour compenser les suppressions d’impôts locaux, non-remboursement de 0,8 milliard de TVA qu’elles ont pourtant payée sur leurs dépenses et prélèvement de 3 milliards d’euros sur les collectivités. Cette seule dernière mesure appliquée dans ma circonscription représenterait une charge supplémentaire de 2 millions d’euros pour la commune de Saint-Ouen. Quels services publics devront fermer pour compenser cette ponction ? Ma commission avait annulé une partie de ces mesures avant que la coalition gouvernementale et le groupe RN n’annulent le résultat, en votant contre ce budget transformé. J’espère pour nos élus locaux que ce scénario ne se reproduira pas.
Au-delà de ces 5 milliards assumés par le Gouvernement, il faut en ajouter presque le double : coupe de 1,5 milliard d’euros dans le fonds Vert, gel des transferts financiers, dont la dotation globale de fonctionnement pour 3 milliards d’euros, et augmentation non compensée des cotisations à la CNRACL. Jamais l’État n’a autant prélevé ! Et pourtant, il a fait main basse sans scrupule sur les recettes des collectivités ces dernières années. Depuis 2012, certaines estimations portent à 250 milliards la baisse organisée de leurs ressources : réduction des dotations, dépenses imposées sans compensation ou suppressions d’impôts. La seule absence d’indexation de la DGF sur l’inflation depuis 2017 a fait perdre 3 milliards d’euros aux collectivités. La suppression progressive de la CVAE, qui profite surtout aux grandes entreprises, représente une sous-compensation de 750 millions. Il faut aussi ajouter la suppression de la taxe d’habitation, en échange de 23 milliards d’euros de TVA qui ne suffisent même pas à compenser les pertes locales.
Ces décisions sont d’autant plus problématiques qu’elles viennent aggraver la dette de l’État et justifier ensuite de nouvelles coupes. S’il n’avait pas été nécessaire de transférer un quart de la TVA aux collectivités, le Gouvernement n’aurait pas eu à présenter un budget austéritaire. Si la TVA ne représentait pas plus de 50 % du produit de fonctionnement des collectivités, leur autonomie fiscale, et donc leur situation financière, auraient été préservées. Soulignons l’hypocrisie du Gouvernement qui se félicite d’une moindre pression fiscale sur nos concitoyens, alors que les collectivités sont obligées d’augmenter la taxe foncière pour compenser la baisse de leurs ressources.
Les alertes avaient été données : avec la mise sous dépendance de la TVA, le Gouvernement peut réduire les recettes des collectivités comme bon lui semble. En 2025, la crainte s’est transformée en réalité. J’espère que l’article 31 du PLF sera supprimé en séance, et que de nouvelles recettes sur lesquelles les collectivités ont la main seront votées : par exemple, autorisons les départements à relever le taux des droits de mutation à titre onéreux (DMTO), nous leur offrirons ainsi une bouffée d’air nécessaire.
Mais tout ne se résume pas à un problème de recettes. L’État impose aussi des dépenses, certes nécessaires, comme les revalorisations insuffisantes du RSA ou du point d’indice, le Ségur pour tous, l’avenant 43 pour les aides à domicile ou la prime de feu pour les sapeurs-pompiers. Mais en l’absence de compensation à l’euro près, les collectivités doivent-elles renoncer aux services publics de proximité ? L’État impose aussi des dépenses illégitimes, lorsqu’il se défausse sans accorder de moyens supplémentaires, par exemple en matière de sécurité, en comptant sur la police municipale pour jouer le rôle de police de proximité.
Baisse de leurs recettes, augmentation de leurs dépenses : voilà les deux mâchoires de l’étau que les gouvernements successifs resserrent sur nos collectivités, au détriment de nos concitoyens. Je le répète : quand les services publics reculent, c’est le privé qui avance – jamais au profit de ceux qui en ont besoin. C’est aussi un risque d’écroulement, non seulement pour l’économie locale, mais aussi pour l’activité nationale. Alors que votre politique provoque la baisse des investissements des entreprises, qui sont passés de 56 % à 54,2 % entre 2017 et 2023, ce sont les investissements publics qui portent la croissance, puisqu’ils ont augmenté de 3,5 points sur la même période, largement grâce aux collectivités qui en réalisent 70 %.
Si le Gouvernement a abandonné toute ambition écologique, qu’il laisse au moins les élus locaux transformer leurs territoires. Les besoins supplémentaires sont connus : l’Institut de l’économie pour le climat (I4CE) les a chiffrés à 23 milliards d’euros d’ici à 2030 pour les collectivités. La marche est déjà suffisamment haute, il ne faut pas encore l’augmenter. En aggravant cette pression intolérable, le Gouvernement veut associer les collectivités territoriales à son projet récessif et injuste. Ce n’est donc pas uniquement un coup de massue sur les finances locales, mais sur toute l’économie et sur la planète. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP, SOC, EcoS et GDR.)
Mme la présidente
La parole est à M. le président de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation.
M. Stéphane Delautrette, président de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation
Ce débat sur les finances publiques locales est l’occasion d’un temps d’échange spécifique sur un sujet qui fait l’objet de crispations croissantes et d’incompréhension mutuelle entre l’État et les collectivités territoriales – d’autant plus aujourd’hui, avec la ponction sans précédent sur le budget des collectivités que prévoit d’opérer ce projet de loi de finances. On nous a annoncé 5 milliards d’euros de coupes budgétaires ; en réalité, on s’approchera plutôt des 10 milliards pour la seule année 2025. Jamais l’État n’aura autant prélevé sur une seule année !
Permettez-moi de rappeler la bonne gestion publique qui caractérise les comptes publics des collectivités locales,…
M. Peio Dufau
Eh oui !
M. Stéphane Delautrette, président de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation
…l’équilibre des comptes locaux, la stabilité de la dette depuis le début des années 1980, alors que dans le même temps, celle de l’État quintuplait. Cette bonne gestion a été maintenue, alors même que les collectivités ont subi les effets du coût de nouvelles normes, endossé les décisions de création de charges supplémentaires par les gouvernements successifs, supporté les conséquences des crises sanitaires et économiques successives, et accompagné les grandes transformations sociétales.
M. Inaki Echaniz
Eh oui !
M. Stéphane Delautrette, président de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation
Les collectivités sont en première ligne face au sous-financement des services publics, à la crise du logement, à la dégradation du système de soins, à la montée de la précarité pour beaucoup de nos concitoyens et à l’urgence climatique. Alors que les démissions de maires se multiplient et que les vocations à exercer un mandat local sont à la peine, il est urgent de reconnaître l’engagement d’élu local à sa juste valeur. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, LFI-NFP, EcoS et GDR.) Cela passe par un véritable statut de l’élu local, mais aussi par un budget qui donne à nos maires et présidents d’exécutif ce qui est leur indispensable : du pouvoir d’agir. (Mêmes mouvements.)
Or, disons-le tout net, ce projet de loi de finances n’y contribuera pas, bien au contraire. Comment relever le défi de la transition écologique qui nécessite 12 milliards d’efforts supplémentaires de la part des collectivités chaque année selon I4CE, quand vous rabotez le fonds Vert de 1,5 milliard d’euros ?
M. Inaki Echaniz
La honte !
M. Stéphane Delautrette, président de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation
Comment accélérer les investissements d’avenir, dans les infrastructures de mobilité, dans la rénovation des bâtiments publics, dans la décarbonation et la réindustrialisation de l’économie locale, dans les services publics de proximité et de solidarité, lorsque vous proposez 3 milliards de prélèvements sur les dotations au moyen d’un fonds de précaution – dont les ponctions sont aussi rudes que les modalités de répartition sont floues –, que vous écrêtez la dynamique du produit de la fraction de TVA reversée aux collectivités et que vous réduisez de 800 millions d’euros les remboursements du FCTVA ?
M. Inaki Echaniz
La honte encore !
M. Stéphane Delautrette, président de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation
Le constat de la direction générale des collectivités locales (DGCL), aujourd’hui largement partagé, est celui d’une fragilisation de la situation financière de toutes les collectivités, qui s’est intensifiée depuis deux ans.
M. Jean-René Cazeneuve
C’est factuellement faux !
M. Stéphane Delautrette, président de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation
À cet égard, la situation des départements est particulièrement alarmante. Quatorze d’entre eux ont bénéficié du fonds de sauvegarde à hauteur de 106 millions d’euros au titre de l’exercice 2023. Cette année, une trentaine devront être aidés : le fonds de sauvegarde devra être abondé. Je crains donc que l’affaiblissement des finances des départements et des régions, conjugué aux mesures austéritaires de ce budget, ne conduise à un fort recul de l’investissement public local au détriment des populations et des entreprises de proximité.
Ma conviction est qu’il faut donner tout son sens au partenariat que vous appelez de vos vœux, madame la ministre. Cela ne passe ni par des contrats de Cahors punitifs, ni par des pactes de confiance coercitifs, ni par un fonds de précaution qui n’a fait l’objet d’aucune concertation en amont.
Pour conclure, je veux insister sur deux impératifs qui sont à mes yeux le préalable à la réussite du partenariat souhaité entre l’État et les collectivités territoriales. Premièrement, l’autonomie financière des collectivités territoriales, inscrite dans la Constitution, doit être réelle. Depuis 2017, la perte de pouvoir de taux des collectivités s’est accélérée, et le lien entre la fiscalité locale et le territoire s’est largement distendu avec la suppression regrettable de la taxe d’habitation et de la CVAE. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. – M. Gabriel Amard applaudit également.) Je plaide pour une fiscalité locale qui redonne un levier fiscal aux collectivités, associant entreprises et ménages au financement des services publics dont ils bénéficient sur leur territoire.
Deuxièmement, il est indispensable de réformer la DGF qui, nous le savons tous, est à bout de souffle.
M. Laurent Marcangeli
Elle l’est depuis 2014 !
M. Stéphane Delautrette, président de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation
Le financement de la péréquation au sein de la DGF se fait par des écrêtements reposant sur un nombre de plus en plus restreint de collectivités qui, de surcroît, ne sont pas les plus aisées. Nous devons avoir le courage d’ouvrir rapidement ces grands chantiers. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.)
Mme la présidente
Les orateurs des groupes vont maintenant s’exprimer.
La parole est à Mme Sophie Pantel.
Mme Sophie Pantel (SOC)
Ce budget représente la plus grande offensive contre les collectivités territoriales,…
M. Jean-René Cazeneuve
Non, c’était en 2014 !
M. Jacques Oberti
En 2014, il y avait encore la taxe d’habitation !
Mme Sophie Pantel
…sur qui il fait peser un effort disproportionné – 5 milliards annoncés, en réalité le double –, par ailleurs aveugle et rétroactif. La question qui se pose à nous est de savoir comment nous devons répartir l’effort de redressement des comptes publics. Le sujet est suffisamment grave et sérieux pour que nous évitions de tomber dans la caricature grossière selon laquelle il y aurait d’un côté les bons gestionnaires donneurs de leçons, dispensés de tout droit d’inventaire – en réalité les champions des 1 000 milliards de dette publique des sept dernières années –, et d’un autre côté les champions de la taxation. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. – M. Gabriel Amard applaudit également.)
Faire de la politique, c’est changer la vie des gens, c’est améliorer leur quotidien. C’est le fondement même de la République : dès le 21 septembre 1792, à peine la royauté abolie, la Convention nationale a été chargée de bâtir la République, mais aussi de changer la vie par la loi. Nos votes traduisent notre choix d’exonérer d’effort les classes moyennes, les très petites, petites et moyennes entreprises (TPE et PME) et de préserver les collectivités locales. Nous comptons ainsi soutenir l’économie locale et les politiques publiques adaptées aux spécificités du territoire en matière d’aménagement, de solidarité humaine, de jeunesse, d’économie ou d’attractivité.
Les collectivités ont prouvé leur capacité d’adaptation et leur agilité face aux défis et aux crises. Elles sont en première ligne face aux conséquences de l’accélération du changement climatique, elles sont les premiers acteurs pour prévenir ou réparer.
Vos propositions sont injustes eu égard au faible poids de la dette des collectivités : non seulement elle n’est que de 8 %, mais elle a pour origine l’investissement et donc le soutien à l’économie locale. Je rappelle en effet que les collectivités votent leur budget à l’équilibre et n’empruntent pas pour financer leurs dépenses de fonctionnement.
Vos propositions sont injustes eu égard aux efforts qu’elles consentent déjà pour réduire leur budget de fonctionnement, aux recettes qui leur ont déjà été enlevées, mais aussi aux charges qu’elles assument pour le compte de l’État. L’exemple des allocations individuelles de solidarité (AIS) est éclairant : l’État les finançait à 70 % autrefois, à 40 % aujourd’hui. L’État est le créancier des départements. Autres exemples de charges imposées sans concertation et sans compensation financière : l’avenant 43 à la convention collective de l’aide à domicile, la revalorisation du point d’indice, la prime de feu, le Ségur de la santé… Je pourrais en citer un certain nombre, même si nous ne contestons pas la nécessité ou le bien-fondé de plusieurs de ces mesures.
Si d’aventure vous n’entendiez pas le cri d’alarme des élus locaux, vos décisions remettraient durablement en cause la capacité même de l’action publique à répondre aux besoins de la population et à conduire les efforts d’investissement nécessaires. Nous assisterions à la baisse de la commande publique locale, qui soutient l’économie et les emplois privés. C’est une asphyxie programmée, particulièrement pour les départements. J’appelle avec force votre attention sur cette strate, par ailleurs exemplaire grâce à l’instauration d’une péréquation horizontale.
La strate départementale connaît un effet ciseau du fait de la perte du levier fiscal, de la baisse des DMTO et des transferts de charges – des dépenses liées à l’humain – alourdis par une comitologie excessive, qui conduit les départements dans le mur. La hausse de la cotisation de la CNRACL mettrait gravement en péril les finances des établissements publics de santé et médico-sociaux, ce qui aurait encore des répercussions sur le budget des départements, qui sont autorité de tarification. C’est par ailleurs la seule variable d’ajustement pour le budget des services départementaux d’incendie et de secours (Sdis), qui font face à une sursollicitation opérationnelle. Le seul abondement du fonds de sauvegarde ne suffira pas, monsieur le rapporteur général ; les départements contributeurs sont eux-mêmes en difficulté et entraîneront les autres dans leur chute.
Madame la ministre, vous avez parlé d’ouvrir « un nouveau chapitre » avec les collectivités ; nous le cherchons encore. Les députés Socialistes ont toujours été force de proposition. Nous vous proposons une véritable décentralisation (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. – M. Christine Arrighi applaudit également), bien différente de la déconcentration, de la différenciation ou de la volonté de vos prédécesseurs de transformer les collectivités territoriales en agences de l’État. Nous vous proposons de rétablir la confiance avec les collectivités locales. Nous vous proposons de respecter la libre administration des collectivités. Nous vous invitons au dialogue et souhaitons connaître vos intentions et méthodes quant à la relation entre État et collectivités, mais aussi votre position au sujet du chantier de la révision des valeurs locatives.
C’est donc avec un esprit de responsabilité et de gravité que le groupe Socialistes et apparentés vous demande de renoncer aux mesures envisagées contre les collectivités territoriales. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP. – Mme Christine Arrighi applaudit également.)
Mme la présidente
La parole est à M. Nicolas Ray.
M. Nicolas Ray (DR)
Ce débat sur les finances locales, en pleine discussion du projet de loi de finances, est bienvenu. Il nous donne l’occasion de rappeler le rôle crucial des collectivités locales et de répondre aux attaques répétées dont elles ont injustement fait l’objet ces derniers temps. Rappelons-le, les collectivités assument la plus grande part de l’investissement public, ont la charge des services publics locaux et font vivre quotidiennement la République des territoires au plus près de nos concitoyens.
Mme Marie-Christine Dalloz
Très bien !
M. Nicolas Ray
Plutôt que d’accabler les collectivités, l’État ferait mieux de s’en inspirer. Rappelons que toutes les collectivités sont tenues de respecter la règle d’or qui leur interdit de voter un budget en déficit, une règle que l’État, lui, a respectée pour la dernière fois en 1975. De même, la dette des collectivités est stable depuis trente ans, voire en légère diminution, alors que celle de l’État est passée de 65 % à 110 % du PIB entre 2007 et 2023. Disons-le une fois pour toutes, les collectivités ne sont pas responsables de la situation très dégradée de nos finances publiques.
Pour garantir la qualité des services publics locaux, nous devons cesser de réclamer toujours plus d’efforts aux collectivités locales. Il est temps que l’État aussi fasse mieux avec moins. Si nous reconnaissons que les collectivités doivent participer au redressement des comptes publics, certaines mesures du projet de loi de finances ne sont pas acceptables en l’état. Je pense notamment à l’abaissement du taux du fonds de compensation pour la TVA et à la réduction de son champ d’application.
M. Philippe Brun
Nous sommes d’accord !
M. Nicolas Ray
D’une part, il est toujours pénible de changer les règles en cours de jeu ; les collectivités ont monté leur plan de financement de leurs investissements pour l’an prochain et pour la fin du mandat municipal, elles ont donc besoin de la recette issue du FCTVA. (M. Stéphane Delautrette, président de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, applaudit.) Par ailleurs, après les y avoir intégrées, vous voulez désormais sortir de l’assiette du FCTVA les dépenses d’entretien de bâtiment et de voirie. Or en la matière, la distinction comptable entre dépenses d’investissement et dépenses de fonctionnement n’est pas toujours claire. En outre, de nombreuses communes ont connu ces dernières années de lourds dégâts dus à des intempéries, notamment à la grêle. Les remises en état qui s’ensuivent constituent des dépenses de fonctionnement, il serait donc injuste de les exclure du FCTVA.
Mme Christine Arrighi
Eh oui ! Vous devriez rejoindre le groupe écologiste, monsieur Ray !
M. Nicolas Ray
La suppression de l’article 30 du PLF en commission des finances témoigne de cette préoccupation. Nous vous demandons, madame et monsieur les ministres, d’en tenir compte.
Il est urgent aussi de remédier à la situation financière des départements qui, comme cela a été souligné, connaissent un véritable effet ciseaux, pris entre l’explosion des dépenses sociales et la diminution des recettes. Certains proposent d’abonder le fonds de sauvegarde des départements ; pourquoi pas, mais attention à ce que ce fonds ne serve pas à récompenser les moins bons élèves, car cela pourrait ôter aux présidents de département l’envie d’être de bons gestionnaires.
Mme Marie-Christine Dalloz
Tout à fait !
M. Nicolas Ray
Il faut donc inscrire parmi les critères d’attribution du fonds des règles de bonne gestion.
Il faut aussi donner aux départements les moyens d’assumer leurs compétences – différentes propositions existent en la matière –, notamment pour soutenir les Sdis. Je pense par exemple à une meilleure répartition de la taxe sur les conventions d’assurance, à une affectation partielle de la taxe de séjour ou à une hausse modérée du plafond de droits de mutation.
Enfin, nous attendons du Gouvernement qu’il redonne une réelle autonomie financière et surtout fiscale aux collectivités. Depuis plusieurs années, l’État leur a enlevé quasiment tous les leviers fiscaux dont elles disposaient. Or les élus sont des gens responsables, capables de justifier leur gestion et leur politique fiscale. Je le répète, la suppression de la taxe d’habitation fut une grave erreur,…
Mme Christine Arrighi
Eh oui !
M. Nicolas Ray
…une proposition démagogique lancée lors de la campagne présidentielle de 2017. (Applaudissements sur les bancs des groupes DR et SOC. – Mme Christine Arrighi applaudit également.)
Mme Marie-Christine Dalloz
C’est tellement vrai !
M. Nicolas Ray
Cette suppression n’était réclamée par personne. C’était la seule taxe payée par presque tous les habitants. On nous a rétorqué qu’elle était assise sur une base injuste, calculée à partir de valeurs locatives anciennes ; si l’on suit ce raisonnement, il faut aussi supprimer la taxe foncière, qui est assise sur la même base. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SOC.)
Mme Christine Arrighi
Exactement !
M. Nicolas Ray
Il est indispensable de donner davantage de liberté aux élus dans la fixation des taux. Je pense notamment à la suppression du lien entre la taxe foncière et la taxe d’habitation sur les résidences secondaires, qui sont pour l’instant tenues d’évoluer dans les mêmes proportions. Il convient aussi d’instaurer une véritable taxe sur les logements vacants ; aujourd’hui, le taux est le même pour les résidences secondaires et pour les logements vacants, or les maires veulent un levier pour agir en la matière.
M. Inaki Echaniz
Tout à fait !
Mme Christine Arrighi
Vous avez raison !
M. Nicolas Ray
Le Premier ministre a annoncé vouloir bâtir un nouveau contrat de confiance entre les collectivités locales et l’État. Comme lui, madame la ministre, vous avez été une grande élue de province. Nous vous faisons confiance pour redresser nos comptes publics et surtout pour retrouver la confiance des élus et des territoires. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR.)
Mme Marie-Christine Dalloz
Bravo !
Mme la présidente
La parole est à M. Tristan Lahais.
M. Tristan Lahais (EcoS)
Au nom du groupe Écologiste et social, je veux témoigner de notre attention toute particulière à la situation des collectivités et de notre opposition résolue au sort qui leur est réservé dans le PLF, sidérant de nombreux élus locaux tant l’effort demandé est brutal et injuste.
Il convient de préciser d’abord que la part de dette générée par les collectivités n’est pas un problème pour nos comptes publics. Elle ne concerne que leurs dépenses d’investissement et ne peut être contractée que si le budget est non seulement équilibré, mais excédentaire ; cette dette est donc parfaitement saine.
Il convient de rappeler ensuite quelques ordres de grandeur. En 2023, la dette de l’État représentait 92 % du PIB et celle des administrations locales 8 % du PIB. Sur les 3 101 milliards d’euros de dette publique, celle des collectivités avoisinait 250 milliards et celle de l’État 2 513 milliards. Même si nous acceptions votre raisonnement consistant à demander un effort aux collectivités, encore faudrait-il que celui-là soit proportionné à leur prétendue responsabilité dans la dette, soit environ 8 %.
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Le problème n’est pas la dette, c’est la dépense !
M. Tristan Lahais
Le compte n’y est pas du tout, puisque ce sont entre 8 et 9 milliards d’euros qui seront soustraits au financement des collectivités : 3 milliards prélevés sur les ressources des plus importantes d’entre elles, 1 milliard dû au moindre remboursement de la TVA, 2 milliards correspondant à la nouvelle base de calcul de la TVA transférée, 1,5 milliard relatif à l’augmentation des cotisations pour la retraite des agents publics, 1 milliard d’économies sur le fonds Vert et 500 millions de crédits en moins pour l’Agence de la transition écologique (Ademe), dont les interventions concernent en grande partie les collectivités locales. Nous payons là le prix de la suppression, en 2017, de la taxe d’habitation ; cette mesure représente un manque à gagner de 22,5 milliards pour les comptes publics, c’est-à-dire bien plus que ce que le Gouvernement veut reprendre aux collectivités locales.
Au passage, je soulignerai que la légalité de certaines dispositions du PLF est discutable. Il en va ainsi de la désignation arbitraire de 450 collectivités tenues pour responsables de la dette qui aurait été formée par toutes les collectivités, toutes tailles et strates confondues.
Mme Christine Arrighi
Eh oui !
M. Tristan Lahais
Surtout, quid du principe d’autonomie financière des collectivités, protégé par la Constitution, qui exige qu’une part substantielle de leurs recettes soient issues de la fiscalité et ne puissent être confondues avec des dotations ? Le choix de geler à leur valeur de 2024 les fractions de la TVA transférées de l’État vers les collectivités, outre qu’il est scandaleux parce que l’année concernée est évidemment la moins rémunératrice, transforme de fait cette ressource en dotation insensible aux variations de taux et d’assiette consubstantielles au principe de l’impôt. Le doute est donc réel sur la constitutionnalité du dispositif. Ce coup de massue intervient après que les élus locaux de tous bords vous ont déjà alertés sur leurs difficultés financières provoquées par une inflation très importante et des mesures sociales légitimes mais non compensées.
Disons-le tout net, dans ce contexte, ces baisses de crédit sont insensées et irresponsables. Derrière les chiffres, nous parlons là des services publics du quotidien, de la solidarité en direction des plus fragiles ou encore de la concrétisation des discours entendus sur la transition écologique. Sidérés, tous les élus nous disent que c’est le périmètre du service public qui est en cause.
Mme Christine Arrighi
Ben voilà !
M. Tristan Lahais
Dans les départements, il n’est pas certain que la suppression de toutes leurs politiques dites facultatives suffise à absorber la réduction des moyens. Exit la culture, l’économie sociale et solidaire, le sport, ou encore la solidarité vis-à-vis des petites communes.
M. Emmanuel Duplessy
Et la santé !
M. Tristan Lahais
Dans les villages et dans les villes, il faut dire adieu à la rénovation des groupes scolaires, à celle des gymnases ou encore au soutien aux associations. Dans les régions, le développement du ferroviaire restera à quai. Et je pourrais continuer la liste. Tout cela soulève la question de la mesure du caractère récessif d’une telle saignée, à travers ses conséquences sur l’investissement et la filière bâtiment et travaux publics (BTP) ou sur les plans sociaux inévitables dans les associations.
En l’état actuel du budget, tous les élus locaux nous disent ne pas savoir comment faire. Nombreux sont ceux qui témoignent de leur souffrance, comme l’illustrent les multiples démissions de maires. Il leur reviendrait désormais d’annoncer les mauvaises nouvelles, qu’il s’agisse de la fin des subventions aux associations ou de l’absence de moyens pour les Ehpad des aînés. Il est donc urgent de revenir à la raison, en renonçant à l’article 64 du PLF et au tripatouillage des remboursements et transferts de TVA. (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS et GDR, ainsi sur quelques bancs du groupe SOC.)
Mme la présidente
La parole est à M. Emmanuel Mandon.
M. Emmanuel Mandon (Dem)
Le débat toujours nécessaire sur les finances locales est particulièrement indispensable en un temps où la situation des finances publiques conduit à faire des choix cruciaux pour nos territoires et à prendre des engagements que nous voulons communs en faveur de la décentralisation. Ce débat permet la bonne information de notre assemblée et de nos concitoyens. Soyons objectifs : élaboré dans l’urgence, placé sous le signe du redressement des finances publiques à tous les niveaux de l’administration, le projet de loi de finances du Gouvernement ne pouvait guère proposer, quant aux relations entre l’État et les collectivités territoriales, autre chose que des mesures d’urgence.
Pour le calcul des dotations d’investissement qui relèvent de la mission Relations avec les collectivités territoriales, le Gouvernement a fait le choix de la stabilité. En revanche, les autres transferts financiers de l’État aux collectivités sont affectés de fortes réductions. Trois mécanismes de mise à contribution des collectivités territoriales au redressement des finances publiques sont proposés.
Premièrement, le taux de subvention du FCTVA est réduit de 1,55 point et le soutien de l’État est recentré sur les seules dépenses d’investissement, à hauteur de 0,8 milliard. L’objectif est facile à comprendre : réduire la forte dynamique de dépenses des collectivités, même celle des investissements. L’augmentation de ces dépenses n’avait sans doute pas été anticipée par les services de l’État. Nous soutenons l’objectif d’une mesure préconisée tant par l’Inspection générale des finances (IGF) que par la Cour des comptes. Ce mécanisme a toutefois l’inconvénient d’affecter toutes les collectivités, quelles que soient leur taille ou la qualité de leur gestion. C’est pourquoi le groupe Les Démocrates entend proposer, sur ce point, des évolutions.
Deuxièmement, un gel exceptionnel des transferts de TVA de l’État aux collectivités à leur niveau de 2024 est proposé. Il convient de soutenir cette mesure, à condition d’en assurer l’application dans le temps.
Troisièmement, la création du fonds de précaution, selon sa dénomination provisoire, ne me paraît pas illogique dans son principe. Renforcer la péréquation et lisser les ressources des collectivités permet de les mettre à l’abri d’accidents tels qu’une variation non prévue ou mal anticipée de leurs ressources. Des mesures procédant de la même préoccupation ont déjà été proposées. Il devrait être possible de parvenir, en lien avec les représentants des collectivités territoriales, à une meilleure adaptation du dispositif.
Il est demandé aux collectivités de participer au redressement des finances publiques. Elles ont, de fait, pleinement bénéficié du soutien de l’État pendant la crise sanitaire et l’envolée des tarifs de l’énergie. La règle d’or qui impose que le budget de fonctionnement des collectivités soit à l’équilibre est certes essentielle, mais c’est une obligation de nature comptable. Elle ne dispense certainement pas de faire des efforts pour une meilleure gestion et pour une rationalisation des choix de dépenses, notamment des dépenses de personnel.
Comme toujours en matière de finances locales, il conviendrait d’affiner davantage les dispositifs proposés pour tenir compte des différences de situation entre les collectivités, de sorte que les collectivités dont la situation financière est la plus délicate, en premier lieu les départements, soient aussi épargnées que possible par le déploiement de dispositifs auxquels elles ne sont, à l’évidence, guère en état de participer.
J’ai voulu connaître le regard des maires de ma circonscription sur toutes ces questions. Des réponses que j’ai reçues – et dont je remercie vivement les auteurs – ressort la revendication de la restauration d’une véritable autonomie des communes quant à leurs choix de recettes et aux orientations de leurs dépenses. Les maires déplorent en outre les injonctions technocratiques, souvent contradictoires, qui leur sont adressées.
Pour définir les relations entre l’État et les collectivités territoriales, comme sur bien d’autres sujets, il convient de travailler avec les acteurs concernés. C’est ainsi, et non à partir de décisions imposées unilatéralement, que nous pourrons définir les moyens d’une participation durable de chacune des parties prenantes à l’effort de rétablissement des comptes publics. Il nous faut donc trouver des solutions avec les acteurs de terrain. C’est en effet en travaillant avec les associations d’élus et les collectivités que nous trouverons, nous le savons, les voies et moyens d’une trajectoire soutenable sur le plan financier.
Mme la présidente
Il est temps de conclure.
M. Emmanuel Mandon
Nous formons donc le vœu que nos débats puissent permettre, dans un esprit de responsabilité partagée, de créer ensemble les conditions du dialogue au service de la démocratie locale et des collectivités.
Mme la présidente
La parole est à M. Christophe Plassard.
M. Christophe Plassard (HOR)
Les collectivités locales sont les premiers partenaires de l’État dans le déploiement des politiques publiques. Elles forment le poumon de nos territoires et l’épine dorsale des services de proximité. C’est au niveau local que nos concitoyens prennent conscience de ce qui est instauré pour eux, de la dimension concrète et palpable des services publics, à travers les écoles, les collèges, les lycées, les crèches, les Ehpad, ou encore la sécurité de proximité et les services d’incendie et de secours. C’est aussi au niveau local qu’ils mesurent la carence des services publics malgré les efforts conjugués des élus locaux et de l’État. Il ne nous faut pas perdre de vue qu’investir dans les territoires, c’est investir dans l’avenir de la France.
Face à une crise budgétaire sans précédent, personne n’est épargné, et si les collectivités locales ont l’obligation légale de présenter des budgets à l’équilibre, il est nécessaire d’évaluer l’efficience de leurs dépenses. Les collectivités territoriales, au même titre que l’État et que la sécurité sociale, doivent participer au rétablissement des finances publiques.
Toutefois, cette participation doit se faire en bonne intelligence avec les élus locaux, qui connaissent leur territoire et ses besoins. Nous sommes attachés à certains points de méthode : nous jugeons ainsi qu’il faut maintenir avec eux un dialogue franc et respectueux. Trois points nous semblent essentiels : concertation, réciprocité et juste contribution.
Si l’on regarde les grandes masses, il apparaît que ce sont bien l’État et les organismes de sécurité sociale qui pèsent le plus dans le déficit public et l’endettement. Ce sont donc eux qui devront fournir la grande majorité des efforts.
Face à l’inflation, l’État a été présent pour les collectivités locales, notamment avec le bouclier tarifaire qui a bénéficié à plus de 30 000 communes. L’État a également été présent pour aider la transition écologique des territoires, en débloquant 2,5 milliards d’euros au moyen du fonds Vert. Crise sanitaire et crise de l’inflation sont désormais derrière nous, il est donc temps de revoir les dépenses publiques – toutes les dépenses publiques, y compris celles des collectivités locales. En effet, dès lors qu’un effort national est collectif, il ne serait pas normal que des acteurs y échappent.
Cependant, revoir ne signifie pas pour autant ponctionner. Cela signifie surtout, dans un premier temps, évaluer la pertinence et l’efficacité des dépenses, que ce soit en termes de résultats ou de besoins. Je rappelle au groupe Socialistes que la baisse de la DGF, au sujet de laquelle ils se sont exprimés, date de 1914, sous leur mandat.
Plusieurs députés du groupe SOC
De 2014 !
M. Christophe Plassard
De 2014, pardon ! (Sourires.) Certaines collectivités ont besoin de plus d’aides que les autres, notamment les départements, qui appliquent les politiques d’aide sociale. Même au sein de cette strate de collectivités, tous les départements ne font pas face aux mêmes problèmes. Entre un département favorisé par sa situation géographique, son tissu entrepreneurial, ses recettes fiscales propres, et un autre dont la situation selon ces critères est différente et qui est confronté à des enjeux comme l’eau, qu’elle soit douce ou salée, le trait de côte, des îles ou un marché immobilier instable, les défis sont bien différents – vous l’avez compris, je parlais de la Charente-Maritime.
Cette inégalité entre les collectivités a d’ailleurs été pointée par un rapport de la Cour des comptes publié le 9 octobre dernier, qui explique que la dotation globale de fonctionnement est devenue de plus en plus complexe pour les collectivités et ne parvient plus à répondre à ce qu’elles attendent.
Il est impossible de trouver de bonnes solutions sans mener préalablement de bonnes évaluations. À l’Assemblée, nous votons la loi, mais nous en oublions presque l’évaluation des politiques publiques, qui sera essentielle pour faire des économies, et surtout de bonnes économies. Celles-ci doivent être trouvées parmi les dépenses mal calibrées que la libre administration des collectivités ne saurait justifier dans ce contexte budgétaire difficile, mais sans perdre de vue que de nombreux élus locaux prennent eux-mêmes part aux opérations de nettoyage ou répondent à d’autres besoins du quotidien de leur commune sans être financés pour cela. Les préfets doivent aussi être mobilisés pour aider les élus locaux à faire ces économies – j’insiste sur le mot « aider », car je pense sincèrement que le préfet est l’allié des élus locaux, de la même manière que les collectivités locales sont les partenaires de l’État. En ces temps difficiles, les partenaires doivent se prêter assistance.
Les députés du groupe Horizons & indépendants seront attentifs à ce que l’effort demandé n’affecte ni leur fonctionnement quotidien ni leur capacité d’investissement futur, et à ce que les bons gestionnaires ne soient pas pénalisés. Nous aurons à cœur d’améliorer les dispositifs proposés par le Gouvernement afin de parvenir à un compromis acceptable par tous, car les économies seront mieux et plus rapidement effectuées si elles sont consenties.
Nous avons par exemple déposé un amendement d’appel visant à créer un mécanisme de bonus pour verser un supplément de dotation d’investissement à ceux qui maîtrisent leurs dépenses de fonctionnement. Cette dotation serait attribuée aux collectivités dont les dépenses réelles de fonctionnement sont inférieures à l’objectif fixé par la loi de programmation des finances publiques (LPFP). La dotation serait d’un montant équivalent à la moitié de la différence entre l’objectif de la LPFP et l’exécution des dépenses réelles de fonctionnement. La dotation serait alors affectée à la section d’investissement de la collectivité, qui aurait le libre usage de cette somme. Je ne doute pas que les collectivités locales consentent à faire des efforts supplémentaires. En revanche, ces économies ne peuvent pas être faites n’importe où ni imposées unilatéralement. Il est donc de notre responsabilité collective de trouver des solutions ensemble avec une méthode efficace. Le groupe Horizons & indépendants y prendra toute sa part. (Applaudissements sur les bancs des groupes HOR et Dem.)
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-Pierre Bataille.
M. Jean-Pierre Bataille (LIOT)
Manifestement, les finances locales sont mieux gérées que les finances de l’État – tant mieux ! Fin 2022, leur dette, y compris celle de leurs groupements, s’élevait à 159 milliards d’euros. Au regard des 3 228 milliards de dette publique, on comprend facilement que le poids des collectivités territoriales dans la catastrophe budgétaire de notre pays est infime. Pour être tout à fait sincère, cet endettement a progressé ; c’est non seulement le résultat de la crise sanitaire puis de la crise énergétique, mais aussi des décisions prises par l’État qui sont cependant laissées à la charge des collectivités. En moyenne, nos collectivités n’empruntent réellement que 16 à 18 milliards et le taux d’endettement est relativement maîtrisé : il est de 74 % pour le bloc communal et de seulement 43 % pour les départements. Seules les finances des régions connaissent de plus grandes difficultés : le niveau d’endettement s’élève à 116 %.
Vous avez évoqué la règle d’or qui encadre les finances de nos collectivités. Rappelons tout de même qu’elle cantonne l’endettement à des politiques d’investissement et non de fonctionnement : l’État devrait s’en inspirer, puisqu’il est à l’exact opposé. Alors que les collectivités restent des investisseurs importants, l’État, lui, n’est plus en capacité d’agir en investisseur stratège, préparant l’avenir et donnant à notre société les leviers pour rester à l’avant-garde du monde de demain.
Est-ce à dire que la situation financière des collectivités est parfaite ? Certainement pas, en raison de l’absence d’autonomie fiscale. À tous ceux qui estimeraient que c’est justement grâce au centralisme que nos collectivités se portent bien, je dirai que vous n’avez pas au cœur l’expérience du terrain, le sens de la proximité, le souci du quotidien. Vous nous avez privés de leviers fiscaux ; il est temps de supprimer toutes les règles de liens entre les taux qui demeurent encore.
M. Nicolas Ray
Il a raison !
M. Jean-Pierre Bataille
Les élus locaux sont de ceux qui peuvent s’enorgueillir d’être les plus appréciés de nos concitoyens. Et pour cause : ils gèrent leurs comptes bien mieux que l’État, ne peuvent pas se réfugier dans une dette toujours plus grande pour masquer leur manque de courage, et maintiennent à flot les services de proximité par des investissements courageux.
Quand on accorde sa confiance à ceux qui font vivre, par la base, notre démocratie et notre société, on ne peut pas se tromper. C’est pourquoi, chaque année, le groupe LIOT n’a de cesse de renouveler son appel à une refonte de notre fiscalité locale, afin que soit restaurée une réelle autonomie des collectivités.
Permettez-moi de profiter de ce débat pour vous rappeler quelques fondamentaux auxquels mon groupe ne dérogera pas. Je n’irai pas jusqu’à dire, à la façon du président Pompidou, qu’il faut arrêter d’emmerder les collectivités, mais je dirai plutôt qu’il faut enfin leur faire confiance.
Plus de quarante ans après les grandes lois de décentralisation, arrêtons de prendre les collectivités pour des enfants immatures, à qui on devrait sans cesse rappeler qu’il faut bien se comporter. Madame et monsieur les ministres, vous qui avez été élus locaux, vous savez que les collectivités sont composées d’élus qui comptent parmi les plus proches et les plus appréciés par nos compatriotes. Chaque jour, ils ont à l’esprit l’utilité et l’efficience de la dépense publique.
Alors que leurs missions se multiplient, vous prévoyez de réduire leurs moyens de 5 milliards – et même plutôt de 10 milliards si j’y ajoute les trois années de revalorisation des taux de la CNRACL et la diminution du fonds Vert. Vous avez en effet annoncé une baisse du FTVA, un gel de la part de TVA qui compense les anciens impôts économiques, une baisse des dotations de compensation et un prélèvement de 2 % des recettes de fonctionnement des 450 plus grandes collectivités, afin d’abonder un fonds de redistribution dont les critères sont inconnus.
Pour illustrer mon propos, je prendrai l’exemple du budget de la région Hauts-de-France, dont je suis le rapporteur depuis sept ans aux côtés de Xavier Bertrand. L’accumulation des retenues, gels et non-compensations envisagés par le Gouvernement nous priverait de 128 millions d’euros, soit 50 % de l’épargne brute de 2023, nous contraignant à une épargne nette négative.
L’État – et non pas le Gouvernement auquel vous appartenez – est responsable de la dette : il ne peut pas faire assumer aux collectivités les conséquences de décisions qu’elles n’ont pas prises !
Enfin, comment conclure sans évoquer nos territoires insulaires et ultramarins ? L’État doit être à la hauteur de tous nos compatriotes, même les plus éloignés. Cela passe par une écoute des aspirations profondes des habitants de ces territoires. Je pense à la Corse, où il est impératif que le processus de Beauvau aboutisse à une réforme statutaire et fonctionnelle de l’île ; à mes collègues des Antilles, où les sociétés expriment leurs souffrances dans des cris de détresse qui ne semblent pas trouver d’écho à Paris ; et à la Nouvelle-Calédonie, dont le sang versé ne doit pas être oublié. Ici, mais encore plus là-bas, il y a urgence.
Mme la présidente
La parole est à M. Nicolas Sansu.
M. Nicolas Sansu (GDR)
Sur tous les territoires, dans l’Hexagone comme dans les pays dits d’outre-mer, les collectivités locales – au premier rang desquelles les communes – sont bien souvent le premier soutien et parfois le dernier recours.
C’est une grande part de notre vie quotidienne qu’elles structurent : les crèches, l’école, la culture, le sport, l’accueil de nos anciens, la mobilité et les déplacements, le développement économique, les investissements de la bifurcation écologique – tout simplement, ce qui nous permet de faire société. Elles jouent ce rôle fondamental alors que l’État n’a cessé de se désengager depuis trente ans, ce qui explique en grande partie la croissance de leurs dépenses.
C’est d’autant plus méritoire de la part des collectivités locales que tous les services publics locaux et tous les investissements publics locaux sont financés dans le cadre de la règle d’or. Ainsi, tous les budgets des collectivités locales sont à l’équilibre, car il est interdit – et c’est une très bonne chose – d’emprunter pour financer le fonctionnement. Les collectivités locales ne sont donc en rien – ou si peu – responsables du déficit.
L’autofinancement dégagé permet de réaliser 75 à 80 milliards d’euros d’investissements publics locaux, lesquels sont vecteurs d’emplois, de soutien à la transition écologique et à l’innovation.
Même en période de finances publiques contraintes – ces contraintes étant organisées par le désarmement fiscal –, dégrader le soutien aux collectivités locales est donc une ineptie.
À la ponction inique de 3 milliards sur les 450 plus importantes collectivités, de la coupe drastique sur le fonds Vert, du gel de la DGF, qui devrait pourtant être au moins indexée sur l’inflation, de la réduction du FCTVA par la réduction de l’assiette et la baisse du taux, s’ajoute maintenant une charge supplémentaire intolérable : l’augmentation de quatre points de cotisation de la CNRACL, soit 1,3 milliard d’euros non compensés. C’est irresponsable.
Plus de 8 milliards d’euros manqueront aux finances locales. Madame et monsieur les ministres, vous êtes dans l’erreur et l’histoire récente de 2014 devrait vous inciter à faire preuve de davantage de respect et de soutien envers les collectivités locales. Madame la ministre, rappelez-vous, à cette époque-là, nous étions ensemble à l’association des maires de France et ne cessions de protester à cor et à cri auprès de l’État.
Le risque évident tient dans l’attrition des investissements, mais aussi dans la diminution des services de proximité et des emplois au sein des collectivités, sous la pression du dernier rapport de la Cour des comptes qui proposait la suppression de 100 000 emplois.
Certes, le rapport que vous nous avez livré montre de fortes disparités entre les différentes collectivités, mais les différences sont également marquées au sein d’une même strate. Dans le bloc communal, dont vous jugez la situation financière favorable, permettez-moi de citer l’exemple d’une ville de 26 000 habitants que je connais bien : Vierzon.
Bien que cette ville ne soit pas concernée par les mises en réserve, la totalité des nouvelles ponctions, la cotisation de la CNRACL, les nouvelles taxes sur les énergies, l’accroissement astronomique des primes d’assurances et les moindres recettes de FCTVA représentent plus de 900 000 euros, soit l’équivalent de 6 % de taxe foncière. Comment voulez-vous que cela n’ait pas de conséquences sur les services rendus, sachant que de nouvelles compétences s’accumulent, avec les demandes de nos concitoyens en matière de santé, de sécurité et de commerce ?
Il est aussi à prévoir des difficultés en cascade pour les régions, qui voient les fractions de TVA en forte diminution par rapport au niveau attendu, et pour les départements, laissés exsangues par la baisse des recettes de DMTO.
Pour finir, je voudrais insister sur trois enjeux. D’abord, la spécificité des collectivités dites d’outre-mer, qui doivent faire l’objet d’un traitement particulier, car leurs charges sont plus importantes, notamment en matière de fournitures et de services. Comme nos concitoyens, ces collectivités subissent aussi la vie chère. En Guyane, il manque, au global, 80 à 100 millions d’euros pour que le budget des collectivités soit à l’équilibre.
Ensuite, il faudra se poser la question des dispositifs spécifiques, de leur multiplication – entre zones franches, ex-zones de revitalisation rurale (ZRR) et autres – et de leurs nombreux effets de bord. Si certains territoires ont besoin de soutien, il m’apparaît que les aides directes sont une meilleure politique en vue d’assurer l’égalité territoriale.
Enfin, il devient impérieux que nos collectivités retrouvent de l’autonomie financière et fiscale, par un lien réel entre citoyen et contribuable, par une contribution territoriale universelle, même symbolique, mais surtout par un impôt économique territorial digne de ce nom. Depuis la suppression de la part salaires de la taxe professionnelle, puis sa suppression totale, suivie de la mutilation de la cotisation foncière des entreprises (CFE) et de la CVAE, la participation des entreprises, toutes contributions confondues, a été divisée par trois en vingt-cinq ans.
Ajoutons qu’en matière de mobilité, il faudra bien desserrer l’étau du versement mobilité pour toutes les strates. Madame la ministre, même si j’ai bien entendu votre exercice de quasi-contrition, vous ne pourrez pas faire l’économie d’une telle réflexion. Le groupe GDR portera cette exigence, tant les collectivités territoriales sont les vigies de notre République. Chaque jour, les associations d’élus vous le rappellent. Elles le feront bientôt lors du congrès des maires, le mois prochain. Notre premier objectif sera de faire supprimer toutes les ponctions, si injustes, inscrites dans ce PLF. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, SOC et EcoS.)
Mme la présidente
La parole est à M. Gérault Verny.
M. Gérault Verny (UDR)
Premièrement, je tiens à souligner que les collectivités locales sont, dans leur ensemble, plutôt vertueuses. Cela n’a pas empêché le Gouvernement d’essayer, pour tenter de diluer sa responsabilité écrasante dans la dérive des comptes, de reporter sa faute sur ce qu’il appelle une dérive financière des collectivités.
En effet, les collectivités locales réalisent, pour la plupart, des efforts certains. Elles ont cependant dû subir, d’une part, d’importants transferts de compétence, et, d’autre part, des baisses de ressources – que ce soient des baisses de dotation ou des baisses de ressources directes, qu’elles maîtrisaient en partie, comme la taxe d’habitation, supprimée de façon totalement démagogique par Emmanuel Macron. Dans les faits, nombre de nos collectivités locales, notamment des mairies ou des conseils généraux, se retrouvent complètement étranglées financièrement.
Les collectivités sont contraintes à cette relative vertu budgétaire par une double règle d’or : elles ne peuvent présenter de budget en déséquilibre pour leurs deux sections de fonctionnement et d’investissement, et ne peuvent pas non plus équilibrer la section de fonctionnement par la dette. Ainsi, la hausse de leurs dépenses de fonctionnement depuis le début de l’année est modérée : elle s’élève à 5,4 %, selon la Cour des comptes.
L’État serait bien inspiré d’appliquer à lui aussi cette double règle d’or vertueuse. Nous pourrions l’adopter collectivement et l’appliquer progressivement à l’ensemble des comptes publics, afin de ne plus obérer à ce point nos marges de manœuvre et notre avenir collectif par le recours massif – fou, même – à la dette publique.
Naturellement, cette rigueur générale ne veut pas dire que tout est parfait dans la gestion des finances locales. Certaines collectivités sont plus vertueuses que d’autres. Ainsi, il y a des marges d’améliorations potentielles, parfois considérables, afin de baisser les dépenses et de renforcer l’efficience des collectivités territoriales.
Par exemple, il est certain que les transferts de compétences et l’absence de principe strict de spécialité, qui autorise toutes sortes de dépenses de la part des collectivités territoriales, donnent lieu à de nombreux doublons, et parfois à des dépenses inconsidérées. Nous en avons tous des exemples locaux qui choquent nos concitoyens, qui doivent, eux, se serrer la ceinture.
Il est également certain que l’architecture des différentes strates administratives locales doit être revue, simplifiée et améliorée, afin d’abaisser, là encore, le fardeau fiscal qui pèse sur les Français et le déficit public.
M. Emmanuel Mandon
Et sur la libre administration !
M. Gérault Verny
Tous les échelons actuels sont-ils réellement indispensables ? Nous ne le croyons pas. Une plus grande efficacité, avec un partage plus clair des compétences sur un nombre d’échelons réduit, pourrait être obtenue à moindre coût. Au niveau des collectivités locales comme de l’État, nous avons besoin d’un véritable choc de clarification et d’efficacité.
Plus spécifiquement, notre groupe UDR accueille avec intérêt la recommandation de la Cour des comptes, qui appelle à la mise en œuvre d’un retour progressif des effectifs des collectivités à leur niveau du début des années 2010. Je ne crois pas qu’en 2010, nous souffrions d’une sous-administration de nos collectivités locales – c’était même le contraire, tant le nombre ne fait pas l’efficacité. Le retour au niveau d’emploi de 2010 entraînerait une réduction de 100 000 postes, ce qui permettrait d’économiser 4,1 milliards d’euros par an dès 2030.
Le groupe UDR considère que cette proposition va dans la bonne direction et qu’il faut l’appliquer avec intelligence, en ciblant les strates suradministrées et en épargnant les collectivités qui manquent de moyens pour mettre en œuvre leurs compétences. Nous le devons à nos concitoyens, c’est-à-dire aux contribuables. C’est une question de bonne gestion des deniers publics. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDR et RN.)
Mme la présidente
La parole est à M. Philippe Lottiaux.
M. Philippe Lottiaux (RN)
Qu’ont fait les collectivités territoriales aux gouvernements macronistes pour être autant malmenées et méprisées ? Régulièrement mises en cause par les ministres successifs, elles seraient responsables de nos dérives budgétaires et devraient « participer au redressement des comptes publics », termes diplomatiques pour dire qu’elles doivent être sauvagement ponctionnées.
Pourtant, la dette des seules collectivités territoriales s’élevait à 175 milliards à la fin de l’année 2023, soit 5,5 % de notre dette publique. Elle a progressé de 1,9 milliard par rapport à 2022, soit moins de 2 % de l’augmentation globale.
Les excédents de fonctionnement de nos collectivités et EPCI leur ont permis d’opérer plus de 72 milliards d’investissements en 2023.
Quant à leurs charges financières, elles représentent 2 % de leurs dépenses de fonctionnement, alors qu’elles seront demain l’un des principaux postes de dépenses de l’État.
Tordons donc le cou à ce que l’on entend çà et là : si la période est budgétairement difficile, ce n’est pas la faute des collectivités territoriales – des collectivités bien gérées, pour une large majorité d’entre elles.
On entend dire que l’État verse des dizaines de milliards aux collectivités. Ces dotations ou ces transferts de fiscalité ne sont pas des cadeaux ! Ils sont la compensation de compétences – donc de dépenses –, transférées par l’État, voire de suppressions d’impôts également décidées par l’État, parmi lesquelles la malheureuse suppression de la taxe d’habitation.
Ces compensations sont parfois loin de couvrir l’intégralité des charges transférées – les départements, qui assument des milliards de dépenses sociales non compensées en savent quelque chose –, sans compter les secteurs où les collectivités pallient les carences de l’État, sans financement propre, en matière de sécurité avec les polices municipales, de santé ou d’enseignement supérieur.
Ces dotations et transferts, ainsi que leur dynamique, sont donc essentiels à l’équilibre des finances locales. Ils ne doivent en aucun cas être des variables d’ajustement. Or c’est souvent ainsi que le Gouvernement les considère, et le PLF 2025 en donne malheureusement une éclatante illustration.
On entend aussi dire que les collectivités auraient fortement augmenté leurs dépenses, et qu’il faudrait les contraindre à les freiner.
Outre qu’il s’agit là d’une curieuse interprétation de la décentralisation, d’où vient cette augmentation ? De la hausse du point d’indice, décidée par l’État. De la revalorisation d’allocations sociales, de la multiplication des normes, décidées par l’État. D’une architecture administrative baroque, là encore décidée par l’État. Celle-ci s’apparente d’ailleurs plus à un crumble qu’à un millefeuille – au moins, dans le millefeuille, on arrive à distinguer la pâte de la crème ! (Sourires et applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
Alors oui, nous devons dépenser moins et mieux. Bien sûr, les collectivités locales doivent et peuvent y prendre part, mais pas – surtout pas ! – de la manière dont le Gouvernement s’y prend !
Plutôt que de se servir de la DGF comme variable d’ajustement,…
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Ce n’est pas ce que nous faisons !
M. Philippe Lottiaux
…rétablissons le dialogue et la confiance avec les collectivités, et rendons la DGF compréhensible et transparente.
Plutôt que de ponctionner les recettes des collectivités par un fonds de réserve technocratique, garantissons aux collectivités la visibilité budgétaire à moyen terme qu’elles n’ont plus.
Plutôt que de réduire l’investissement local en baissant le FCTVA, mesure rétroactive qui débouchera sur davantage d’endettement local, soit le contraire de l’effet recherché – c’est ballot ! –, regroupons les diverses dotations d’investissement dans une dotation unique et pluriannuelle.
Plutôt que de réduire l’autonomie fiscale des collectivités ou, pire, de recréer une nouvelle taxe d’habitation, redonnons aux communes et aux départements un pouvoir de taux, pourquoi pas par un transfert partiel d’impôts nationaux existants.
Plutôt que de multiplier les contraintes et les normes, qui coûtent des milliards aux collectivités, procédons à un vrai travail de simplification administrative, revoyons les règles de la commande publique, donnons aux collectivités plus de libertés quant à la gestion de leur personnel. Même si nous n’en partageons pas toutes ses conclusions, le rapport Ravignon présente des propositions intéressantes à cet égard.
Plutôt que de développer le pouvoir réglementaire local, qui n’intéresse que quelques grosses collectivités, et rendra encore plus illisible notre schéma institutionnel, revenons sur notre organisation territoriale. Revoyons la répartition des compétences en nous appuyant sur les communes et sur les départements.
Retrouvons des EPCI qui soient des structures de coopération consentie par les communes. Respectons le principe de subsidiarité, un principe qui s’appliquerait également aux relations entre les départements et les régions, ces dernières devenant des structures légères de coopération interdépartementale, d’où l’intérêt du conseiller territorial.
Le rapport Ravignon chiffre à 6 milliards le coût de l’enchevêtrement des compétences locales – 6 milliards que nous pourrions ainsi économiser.
Tels sont les axes qui permettraient de réduire les dépenses de nos collectivités, tout en améliorant leurs finances, contrairement aux ponctions technocratiques et déconnectées qui nous seront proposées dans le PLF.
Nous pourrions alors nourrir la double et belle ambition d’un dialogue apaisé entre l’État et les collectivités, et de services publics de proximité renforcés. (« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
Mme la présidente
La parole est à M. Didier Le Gac.
M. Didier Le Gac (EPR)
En 2025, dans un contexte contraint, pour les raisons que l’on connaît, l’État continuera cependant d’être bien présent au côté des collectivités territoriales.
En effet, le projet de loi de finances pour 2025 prévoit bien une stabilité des concours financiers de l’État aux collectivités territoriales, pour un montant de 53,5 milliards en euros courants.
M. Gabriel Amard
Vous êtes sérieux, là ? Le compte n’y est pas !
M. Didier Le Gac
Néanmoins, en 2025, 450 collectivités environ, parmi lesquelles les régions, les départements et les métropoles, devront participer à l’effort budgétaire à hauteur de 5 milliards. Cette participation se traduira par trois mesures inscrites dans le PLF, sur lesquelles je ne reviendrai pas.
Je mesure ce que ces annonces peuvent avoir d’anxiogène pour les élus locaux concernés. Toutefois, en ce qui concerne les communes – j’ai été maire de 2001 à 2017 –, je peux dire que l’effort sera moindre qu’en 2014, lorsque la politique dite de modernisation de l’action publique a été menée. On avait vu les dotations rabotées de 20 à 25 % – sur trois ans, il est vrai.
M. Stéphane Delautrette, président de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation
On n’est jamais content !
M. Didier Le Gac
Cette année, la quasi-totalité des communes verront leur DGF stabilisée. Les enveloppes de la DETR et du FSIL – fonds de soutien à l’investissement local – seront reconduites.
S’il est légitime que nos élus et leurs associations protestent contre le projet de loi de finances, il apparaît toutefois que toutes les collectivités territoriales ne se trouvent pas dans la même situation.
L’échelon départemental est assurément le plus touché.
Dans son rapport de juillet 2024 sur les finances publiques locales, la Cour des comptes relève que si l’année 2023 témoignait d’une amélioration financière pour le bloc communal, elle s’était caractérisée en contrepartie par une pression accrue sur les régions et sur les départements.
Cette année encore, l’effort budgétaire semble se concentrer plus particulièrement sur les départements. S’agissant de la constitution du fonds de précaution, le PLF prévoit que ceux-ci contribuent à hauteur de 37 %, contre 20 % pour les régions, 27 % pour les communes et 17 % pour les EPCI.
De même, les départements seront davantage touchés par l’augmentation des cotisations de la CNRACL, puisque 20 à 30 % de leur budget de fonctionnement est composé de salaires contre 10 à 15 % pour les régions.
Enfin, ils seront plus touchés par l’écrêtement de la TVA, comme les régions et les EPCI.
Dans le Finistère, un département que je connais bien pour y avoir été conseiller général, l’effort financier demandé aux départements devrait dépasser 10 %, quand celui des régions devrait demeurer en dessous de 5 % – la situation doit être à peu près la même dans les autres départements.
Cela correspond à un effort financier trois fois plus important que pour les autres collectivités territoriales – régions, communes et EPCI.
Or les départements, on le sait, sont chargés de répondre aux besoins des populations les plus fragiles, les plus précarisées et les plus isolées. Leurs politiques touchent plus directement encore que d’autres strates de collectivités ce que l’on appelle la France périphérique, plus vulnérable, et qui se sent souvent malmenée par les politiques publiques.
Il convient donc d’être particulièrement vigilant quant à l’impact financier sur l’échelon départemental, en considération de leurs compétences en matière de solidarité.
Il faut mieux répartir l’effort entre les différentes collectivités, redonner des marges fiscales aux départements,…
Mme Christine Arrighi
Vous n’êtes pas d’accord avec la politique du Gouvernement, alors !
M. Didier Le Gac
…remplacer la logique d’écrêtement et utiliser la CNSA – Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie – pour compenser l’extension du Ségur aux oubliés.
Dans le rapport sur la décentralisation qu’il a remis au Président de la République, notre collègue Éric Woerth a fait des propositions pertinentes pour assurer le financement des départements, notamment en leur affectant une part de CSG, qui serait, avouons-le, beaucoup moins volatil que les DMTO.
Surtout, il est temps d’arrêter de transférer aux départements des charges qui ne sont pas compensées ou qui le sont très peu.
Mme Christine Arrighi
EPR n’est pas d’accord avec EPR !
M. Pierre Pribetich
Aucun applaudissement !
Mme la présidente
La parole est à M. Gabriel Amard.
M. Gabriel Amard (LFI-NFP)
Les finances de nos communes, ces phares de la démocratie locale, sont battues par une tempête glaciale. Une fois de plus, les vents austéritaires se lèvent, emportant avec eux les ressources vitales de nos collectivités, affaiblies par un projet de loi qui préfère servir les puissants que protéger l’intérêt général.
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Je pensais bien que cela arriverait dès la première minute !
M. Gabriel Amard
Sous le coup de 60 milliards de coupes budgétaires imposées, nos services publics se désagrègent. Les déserts se créent là où doit régner la solidarité.
Dans ce monde parallèle où nos hôpitaux sont en parfaite santé, où les enseignants trouvent aisément leur place dans un système florissant, le Gouvernement persiste.
Pourtant, la réalité nous dit tout autre chose. Les urgences saturées, les professeurs épuisés, les communes exsangues témoignent d’un démantèlement méthodique. Derrière chaque décision se cache une volonté cruelle : affaiblir l’État, les communes et toutes les collectivités, et ouvrir les portes aux appétits voraces du privé. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
Voici que nos collectivités locales, pourtant soumises à des règles budgétaires strictes, se voient imposer une réduction sans précédent de leurs moyens. Ce ne sont pas 5 milliards d’économies qui leur sont demandés, mais près de 10 milliards !
Le braquage se fait en plein jour, et les chiffres du Comité des finances locales témoignent de son ampleur. Ce sont 3 milliards pour créer un fonds de précaution ; 1,2 milliard par le plafonnement de l’évolution des recettes de TVA reversées aux collectivités territoriales ; 800 millions par la réduction du fonds de compensation pour la TVA ; 1,5 milliard par la baisse du fonds Vert ; 1,9 milliard, par la diminution des subventions de fonctionnement des ministères concourant au financement des collectivités ; 1,3 milliard par la compensation du déficit de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités territoriales, orchestrée par le recours croissant aux contractuels.
Enfin, 40 millions sont retirés au fonds de soutien au développement des activités périscolaires et 120 millions aux agences de l’eau, sans compter la non-indexation de la DGF.
C’est un véritable étouffement de nos communes, ces bastions de la délibération collective, de l’action sociale et de la planification écologique concrète. Chaque coupe est une entrave à leur mission fondamentale : assurer les services publics indispensables, qui maintiennent le lien social dans chaque bassin de vie. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)
Le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire, ses élus locaux, ses maires et ses présidents d’EPCI ne laisseront pas cette entreprise de démolition se poursuivre sans résistance. Nous nous opposons à cette austérité dévastatrice en protégeant le fonds Vert, en indexant les dotations sur l’inflation, et en maintenant les fonds de soutien au développement des activités périscolaires. Nous continuerons à défendre l’autonomie financière et la libre administration des communes, ces lieux d’action populaire, contre l’asphyxie que leur impose votre gouvernement.
Pour conclure, je veux rappeler les mots de Jean Jaurès : « Le courage, c’est de chercher la vérité et de la dire ; c’est de ne pas subir la loi du mensonge triomphant qui passe ». C’est avec ce courage que nous lutterons pour la vérité et pour la justice sociale, afin que nos communes et nos intercommunalités puissent continuer à servir le peuple et non les intérêts des puissants. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP et GDR.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Stella Dupont.
Mme Stella Dupont (NI)
La dégradation brutale de nos finances publiques nous concerne tous : les élus locaux sont extrêmement préoccupés par le niveau alarmant du déficit. Dans leur ensemble, les collectivités peinent à boucler leur budget. Le dernier rapport de l’Observatoire des finances et de la gestion publique locales révèle qu’en 2023, les dépenses ont augmenté plus vite que les recettes, d’où une épargne brute en baisse de 9 % par rapport à 2022.
Compte tenu de son ampleur, l’effort budgétaire doit impérativement être réparti entre les administrations, et ce, de manière concertée. Il y a moins d’un mois, le Premier ministre, tout en mentionnant dans sa déclaration de politique générale la nécessité de réduire les dépenses, précisait que les décisions en la matière seraient prises en collaboration avec les collectivités locales, « pas contre elles ni sans elles ». Cependant le couperet est tombé le 8 octobre, lorsque vous avez présenté devant le CFL les modalités de l’effort demandé aux collectivités pour redresser les comptes publics, sans avoir au préalable consulté les élus concernés.
Alors que la défiance est au plus haut, je souhaite donc aborder la question de la méthode. Profondément attachés à la République, les élus locaux ne sont pas irresponsables : ils tiennent bien leurs comptes. (M. Jacques Oberti applaudit.) Je suis persuadée qu’entre l’État d’une part, d’autre part les communes, EPCI, départements et régions, un dialogue sincère et constructif peut s’établir autour d’un diagnostic partagé, permettant d’adopter une logique de coconstruction et de renforcer les décisions pluriannuelles. Afin de gérer au mieux leur collectivité, les élus ont besoin de visibilité : il faut donc un travail de fond, où aucune décision ne soit désormais prise sans concertation préalable.
Ce travail n’ayant encore pu être entrepris – nous le comprenons tous –, j’ai déposé divers amendements soutenus par le collectif social-démocrate qui vient de se constituer au sein de notre assemblée et visant notamment à préserver la dynamique de la TVA, dont une partie a été transférée aux régions, départements et intercommunalités en échange de la suppression d’impôts locaux ou de dotations.
Nous devons également nous unir face à un défi majeur : la transition écologique. Bien que les investissements des collectivités en faveur du climat soient en hausse, les besoins restent immenses. Selon I4CE, il faudrait 12 milliards par an pour que la France atteigne ses objectifs en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Il est donc crucial de maintenir à un niveau élevé les dotations – DETR, DSIL, DSID, DPV et fonds Vert – qui constituent l’un des principaux leviers de l’investissement local. Un autre de mes amendements tend à préserver le taux de compensation du FCTVA, dont la diminution risque de freiner les projets d’investissement et l’ambition des plans pluriannuels d’investissement.
Le Gouvernement ayant eu peu de temps pour préparer un budget qui nécessite des efforts considérables, il conviendrait de suspendre les mesures que prévoit ce PLF pour les collectivités et de prendre le temps, je le répète, d’un travail de fond, dont le résultat pourra consister en un projet de loi de finances rectificatif. D’ailleurs, consacrer chaque année un débat aux finances locales est certes pertinent, mais pourquoi ne feraient-elles pas l’objet, comme celles de la sécurité sociale, d’un projet de loi spécifique ?
Vous l’aurez compris, madame, monsieur les ministres, je crois fermement au dialogue ; j’espère que vous pourrez accepter des ajustements de méthode favorisant cette approche. La conception même de la relation entre l’État et les collectivités fait l’objet d’un désaccord fondamental, alors que chacune des deux parties a besoin de l’autre : c’est à une révolution culturelle que je vous convie, en vue de sortir d’une opposition stérile, de renoncer aux postures, de reconsidérer la hiérarchie actuelle, de concevoir un partenariat.
Mme la présidente
Merci de conclure, chère collègue.
Mme Stella Dupont
Il ne faut plus se tenir face à face, mais côte à côte, afin de construire ensemble. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOC.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Catherine Vautrin, ministre.
Mme Catherine Vautrin, ministre
Je commencerai par rappeler plusieurs points que vous avez soulignés : la volonté d’un dialogue entre État et collectivités ; l’implication de celles-ci dans le quotidien de nos concitoyens ; l’engagement, le courage des élus, en particulier des maires et surtout des maires ruraux, seuls face aux sollicitations ; le souhait que le PLF soit retravaillé, notamment en lien avec les associations. Sur ce point, je veux vous faire part de l’ouverture du Gouvernement, dans l’esprit du « dialogue sincère et constructif » évoqué par Mme Dupont : c’est la raison pour laquelle nous avons voulu partir des comptes exécutés de 2024, et non d’estimations, afin qu’il y ait au moins accord sur la base de travail.
Le rapporteur général estime qu’il faut un nouveau schéma de financement des collectivités : nous sommes disposés à y travailler, comme je l’ai d’ailleurs déclaré au CFL. Il nous a fait des suggestions concernant les départements : nous sommes, là encore, tout à fait ouverts à une augmentation du taux des DMTO et prêts à discuter d’un fonds de sauvegarde ou d’un accroissement de la péréquation. Le problème des départements nous interpelle tous ; nous restons à l’écoute des propositions, particulièrement au sujet des AIS et de leur prise en compte.
Mme Christine Arrighi
On les a déjà faites à Mme Faure, les propositions !
Mme Catherine Vautrin, ministre
Le rapporteur spécial a évoqué la nécessité d’échanger avec les associations : c’est ce que nous faisons quotidiennement, de même que nous sommes ouverts, je le répète, à la discussion touchant l’ajustement des mesures.
Le président Coquerel dépeignait des élus locaux vent debout. J’en rencontre tous les jours, et si les choses ne sont effectivement pas simples, la question demeure la suivante : quelles voies emprunter pour travailler ensemble ? J’ai donc entendu avec beaucoup d’intérêt votre suggestion de rehausser le RSA ; reste à savoir comment nous financerions cette mesure. Je rappellerai également qu’il importe, en analysant les évolutions budgétaires, de ne pas passer par pertes et profits le soutien de l’État aux collectivités durant la crise – filet de sécurité, DSIL exceptionnelle, 640 millions supplémentaires de DGF.
Stéphane Delautrette a mis en avant le statut de l’élu local et son pouvoir d’agir. Le Premier ministre s’est engagé à ce sujet majeur ; il s’agit d’agir rapidement, afin que vous puissiez dès la fin de la période budgétaire, ou au début de l’année prochaine, examiner et enrichir un texte très attendu dont le point de départ sera sans doute la proposition de loi visant à rendre aux élus locaux leur pouvoir d’agir, adoptée par le Sénat. Je suis, pour ma part, entièrement disposée à utiliser l’autonomie financière afin de redonner aux collectivités des marges de manœuvre. Le CFL avait entamé en 2023 des travaux consacrés à la DGF : reprenons-les et poursuivons la discussion.
M. Emmanuel Mandon
Très bien !
Mme Catherine Vautrin, ministre
Madame Pantel, vous avez choisi d’aborder le problème des AIS : j’ai répondu à l’instant sur ce point. Encore une fois, nous restons ouverts aux propositions visant à rendre aux départements du pouvoir sur les taux. Pour avoir à la fois siégé sur ces bancs et présidé dix années durant un exécutif local, je porte à cette arlésienne des taux un intérêt tout particulier. Ne conviendrait-il pas d’élargir notre réflexion en y conviant l’échelon local ? Les élus locaux ne sont-ils pas les mieux placés pour en parler ? Cessons de repousser ce débat ; regardons avec courage comment faire. Pour nos concitoyens, ce jeu où les instances nationales et locales se renvoient la balle n’a que trop duré.
J’ai été très sensible, monsieur Ray, à vos propos touchant l’encouragement à la bonne gestion. J’attends les propositions de votre assemblée en la matière : si on ne veut pas parler d’injonctions de l’État, discutons-en ! Qu’appelons-nous une bonne gestion ? En outre, cette notion nous amène tout droit à celle d’autonomie fiscale, ce qui nous permettra, je le répète, de restituer aux collectivités des marges de manœuvre. S’agissant du FCTVA, le ministre chargé du budget a insisté, dans son intervention liminaire, sur le fait que nous étions prêts à y travailler.
S’agissant des inondations, nous devons bien évidemment répondre présent dans le délai le plus bref possible : des communes, notamment rurales, sont en grande difficulté, ce dont il a beaucoup été question cette semaine lors des questions au Gouvernement. La dotation de solidarité en faveur de l’équipement des collectivités territoriales et de leurs groupements touchés par des événements climatiques ou géologiques (DSEC) constitue un instrument ; j’ai demandé à la directrice générale des collectivités locales de regarder comment nous pouvions œuvrer avec les communes concernées.
Au député Lahais…
M. Benjamin Lucas-Lundy
Excellent député !
Mme Catherine Vautrin, ministre
Comme tous les parlementaires ! Au député Lahais, donc, je souhaitais rappeler que, si la dette des collectivités ne représente que 8 % de la dette publique globale, leurs dépenses progressent plus rapidement que leurs recettes ; or l’effort national auquel nous devons tous contribuer, dans la diversité de nos responsabilités respectives, consiste justement à freiner la dépense. Vous avez également évoqué les services publics et les compétences facultatives : incontestablement, il faut clarifier cette répartition. Qui est à l’origine de quoi, le citoyen s’en moque ; ce qu’il veut savoir, c’est qui fait quoi.
Le député Plassard a consacré son intervention à l’efficacité des dépenses : nous devons en effet, dispositif par dispositif, les passer en revue, y compris les dépenses locales. Par ailleurs, les inégalités entre départements sont indéniables. Nous parlions de hausse des DMTO : tous les départements n’auront pas la même latitude.
M. Nicolas Sansu
C’est vrai !
Mme Catherine Vautrin, ministre
Les DMTO par habitant varient du simple au double !
M. Nicolas Sansu
Bien sûr !
Mme Catherine Vautrin, ministre
Il importe de renforcer la péréquation et de réformer la DGF, dont certaines références peuvent être considérées comme obsolètes, afin de la rendre plus juste au vu des richesses de chaque territoire.
Jean-Pierre Bataille a abordé deux sujets sur lesquels je voudrais revenir. S’agissant de la Corse, j’ai eu l’occasion de répondre au député Castellani, lors des questions au Gouvernement du 9 octobre, que le processus de Beauvau redémarre, que nous restons attentifs aux travaux du Sénat aujourd’hui, de votre assemblée demain, l’objectif étant une loi constitutionnelle en 2025 ; mais notre tâche ne s’arrête pas là, car nous devons en outre nous pencher sur le quotidien des Corses.
S’agissant de l’outre-mer, je conçois la détresse que suscitent la vie chère et l’insécurité ; de même que François-Noël Buffet, je souhaite que les communes ultramarines, souvent en grande difficulté, soient protégées. Nous devrons sur ce point améliorer le PLF.
À Nicolas Sansu, je dirai que les communes situées en ZRR sont bien au nombre de 17 500 et que nous respectons les engagements passés. Concernant les collectivités d’outre-mer, je viens de répondre ; concernant l’autonomie fiscale et le juste retour de l’accueil d’entreprises, je suis favorable à une réflexion. De même, je m’intéresse fort au versement mobilité, enjeu majeur du financement des services express régionaux métropolitains (Serm), des transports de proximité, notamment des longs trajets du quotidien. Il est indispensable que nous y travaillions : j’ai dans ce but rencontré hier soir le président du groupement des autorités responsables de transport. En revanche, la contrition n’est pas mon genre : j’ai toujours préféré discuter avec les parlementaires, les associations d’élus, et faire progresser les choses.
La réflexion sur les échelons, évoquée par M. Verny, fait l’objet de plusieurs propositions formulées dans le rapport Woerth – il y est notamment question de la métropole du Grand Paris ou du rôle du conseiller territorial. Une clarification est indispensable, il faut mettre fin aux enchevêtrements. J’ai demandé, avec le ministre des comptes publics, à Boris Ravignon de travailler sur ce sujet dans les meilleurs délais.
J’en viens à l’intervention de M. Lottiaux qui a notamment parlé de la DGF. Il faut, certes, comme il l’a appelé de ses vœux, la rendre transparente, mais nous devons aussi pouvoir travailler avec le Comité des finances locales. Nous devons simplifier l’accès aux dotations dès 2025 – le Premier ministre l’a annoncé aux préfets – et clarifier la répartition des compétences.
Monsieur Le Gac, je vous remercie d’avoir rappelé qu’on peut constater, face à ces enjeux, une certaine stabilité des concours financiers de l’État. Par ailleurs, comme je l’ai déjà dit, il est vrai que l’échelon départemental doit faire l’objet d’une attention toute particulière.
Monsieur Amard, la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales se trouve dans une situation extrêmement grave. Il faut la sauver – nous le devons aux agents qui relèvent de ce régime. Nous serons très vigilants sur ce point.
Madame Dupont, vous avez souligné l’importance de la méthode. Je partage votre point de vue. Je souhaite renforcer le rôle du CFL et celui du Conseil national d’évaluation des normes parce qu’il convient de limiter le flux des normes et surtout envisager celles-ci en considérant leur coût et non les effets qu’elles pourraient éventuellement produire.
Nous devons continuer à travailler sur ces sujets. Je demanderai aux préfets de renforcer deux pratiques : la pluriannualité et la contractualisation. Celle-ci permet en effet d’avoir une visibilité et, par conséquent, de travailler en partenariat, en passant par le dialogue, ce qui rend possibles une évaluation et un suivi. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR et DR.)
M. Idir Boumertit
Et ce qui permet de mieux contrôler les collectivités !
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre.
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Pour compléter les propos de la ministre, je commencerai par citer la conclusion de l’intervention de Stella Dupont : il faut renoncer aux postures.
M. Benjamin Lucas-Lundy
Et aux impostures !
M. Laurent Saint-Martin, ministre
C’est la clé pour que l’État et les collectivités territoriales nouent un dialogue fondé sur la confiance. Il faut cesser de lancer des anathèmes et de considérer que ce débat opposerait, d’un côté, une accusation, de l’autre, une défense, d’un côté, les représentants des collectivités, de l’autre, les avocats de l’État.
Nous devons nous mettre d’accord sur les termes du débat s’agissant du budget pour 2025. Au fond, la seule question que nous devons nous poser est : peut-on – et doit-on – demander aux collectivités territoriales de participer à l’effort de redressement des comptes publics ? Oui ou non ? Pardon de la formuler ainsi mais c’est bien la question qui se pose. (Exclamations sur les bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.)
M. Gabriel Amard
Cela va avoir un effet pervers !
Mme la présidente
Chers collègues, je vous demande d’écouter M. le ministre. La question qu’il a posée n’appelle pas de réponse de votre part ! (Sourires.)
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Si vous répondez à cette question par la négative, je vous renverrai à nos débats de juin 2020, en pleine crise du covid, sur le troisième projet de loi de finances rectificative. J’étais alors assis à la place du rapporteur général de la commission des finances. Un large consensus, voire une unanimité, existait à l’époque (Protestations sur les bancs du groupe LFI-NFP) – et c’est bien normal – pour que l’État, par la volonté du législateur, déploie des filets de sécurité afin de compenser les pertes fiscales et domaniales, aussi bien pour le bloc communal que pour les départements et les régions. C’était une mesure de bonne gestion dans un pays comme la France, avec ce niveau de décentralisation. Dans un tel contexte de pertes fiscales fortes, il était en effet nécessaire que l’État intervienne pour soutenir les finances locales à l’ensemble des échelons. Il fallait le faire, et cela a été fait.
Il existe toutefois à mon sens un corollaire. Sans remettre en question ni contester tout ce qui a été dit de façon très juste – qu’il s’agisse de la réalité des finances locales ou du fait que l’accélération des dépenses est aussi justifiée par des demandes faites par l’État auprès des collectivités territoriales –, il faut savoir si nous devons demander aux Apul, les administrations publiques locales, de contribuer au redressement des comptes publics et ainsi de faire partie de la solution.
À cette question je réponds : oui. Si c’est également votre cas – et il me semble que c’est bien le point de vue majoritaire ici –, il nous faut entrer dans un débat un peu plus technique pour savoir quels sont les meilleurs mécanismes permettant de faire contribuer les différents échelons tout en prenant en considération l’hétérogénéité des situations en matière de finances locales.
Nous ne cessons de le répéter avec la ministre Catherine Vautrin : la copie initiale du Gouvernement est perfectible – nous n’avons aucun problème pour le reconnaître. Vous êtes par exemple très nombreux – je pense à MM. Le Gac ou Sansu, entre autres – à mettre en avant les difficultés des départements. Vous avez raison : la copie initiale ne prend pas assez en considération la fragilité de ces collectivités. Nous allons donc la retravailler dans ce sens.
Mais si vous considérez que les collectivités territoriales doivent contribuer et que vous vous opposez, de façon collective, voire unanime, au fonds de précaution, au ralentissement de la dynamique de la TVA ou au freinage en matière de FCTVA, vous devez formuler des contre-propositions. Cela me paraît important : on ne peut pas dialoguer si l’on s’en tient aux postures. Si nous considérons collectivement que les collectivités doivent contribuer, nous devons trouver les meilleures solutions. De notre côté, nous avons formulé des propositions. Certes, elles sont très largement perfectibles mais je n’en ai pas entendu beaucoup d’autres sur le sujet.
En revanche, j’ai entendu des propositions très intéressantes – de la part du rapporteur général, entre autres – concernant par exemple la prise en compte des critères de bonne gestion pour l’attribution du fonds de précaution.
M. Nicolas Sansu
Ça veut dire quoi, « de bonne gestion » ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Ce ne sera pas possible dans le cadre du budget pour 2025 mais, pour 2026, nous pourrions parfaitement envisager de retenir ce critère pour les prochains versements – ou au moins travailler sur cette éventualité. Le sujet pourrait ainsi être mis sur la table de façon profitable dans le cadre de la mission Ravignon.
Je ne veux pas éluder le débat relatif à la hausse des taux de cotisation à la CNRACL, que M. Coquerel a été le premier à évoquer. Je tiens à préciser qu’il s’agit, non pas d’une mesure d’économie, mais d’une mesure structurelle…
Mme Catherine Vautrin, ministre
C’est une mesure de sauvetage !
M. Laurent Saint-Martin, ministre
…prise afin de rétablir une trajectoire en forte dérive. On parle d’un déficit de 10 milliards à l’horizon 2030 si l’on ne procède à aucune correction paramétrique comme celle que propose le texte. J’insiste : ce n’est pas une mesure d’économie qui vient s’ajouter aux autres. La situation est très différente. Du point de vue structurel, le montant de ce déficit pourrait représenter un tiers du déséquilibre de nos recettes globales alors même qu’il s’agit d’une petite caisse de retraite si on la compare aux autres. Chacun comprendra que le rééquilibrage de cette caisse est nécessaire et qu’il s’agit donc d’une mesure de bonne gestion.
Mme Vautrin a répondu à nombre de vos questions. Cependant, je tiens à insister sur le fait que les collectivités d’outre-mer – un sujet évoqué par M. Sansu – seront exclues des dispositifs et que nous devrons veiller à les protéger dans le cadre du PLF. La mission Outre-mer, que nous étudierons dans le cadre de l’examen de la deuxième partie du budget, nous donnera l’occasion, comme chaque année, d’apporter des précisions à ce sujet.
Monsieur Lottiaux, il faut en effet travailler à une meilleure répartition des compétences et à une simplification – trois fois oui. À cet égard, les rapports d’Éric Woerth et de Boris Ravignon seront particulièrement nécessaires. Il faudra s’y référer en mettant l’accent sur leur complémentarité car, pris ensemble, ils offrent une matière très intéressante, à même de donner des idées. Une fois que ce travail sur les paramètres aura été effectué, il faudra envisager de passer à l’étape suivante, celle de la réforme. Pour y parvenir, nous aurons besoin de soutien, à commencer par celui de l’Assemblée nationale.
Mme la présidente
Le débat sur la situation des finances publiques locales est clos.
Suspension et reprise de la séance
Mme la présidente
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures dix, est reprise à onze heures quinze.)
Mme la présidente
La séance est reprise.
2. Projet de loi de finances pour 2025
Première partie (suite)
Mme la présidente
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la première partie du projet de loi de finances pour 2025 (nos 324, 468).
Hier soir, l’Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s’arrêtant aux amendements identiques nos 255, 703 et 2779 portant article additionnel après l’article 3.
Après l’article 3 (suite)
Mme la présidente
La parole est à M. Stéphane Buchou, pour soutenir l’amendement no 255.
M. Stéphane Buchou
Depuis le 1er janvier 2023, une demi-part fiscale supplémentaire est accordée aux conjoints survivants des titulaires de la carte du combattant. Or les combattants qui se sont vu accorder le titre de reconnaissance de la nation (TRN) sont exclus de ce dispositif.
Le présent amendement tend à corriger cette anomalie et à étendre le bénéfice de cette demi-part fiscale aux conjoints survivants de ceux qui n’ont pas pu obtenir la carte du combattant, par exemple parce que leur décès est survenu avant que les démarches administratives afférentes aient pu aboutir. Cela concerne environ 2 % des conjoints de combattants.
J’espère que la représentation nationale mettra fin à cette anomalie. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Anne Le Hénanff, pour soutenir l’amendement no 703.
Mme Anne Le Hénanff
Dans la continuité de ce que vient d’indiquer notre collègue, l’étude du dispositif en discussion a révélé que de nombreux combattants en possession de leur titre de reconnaissance de la nation sont malheureusement décédés jeunes, sans avoir eu le temps d’obtenir leur carte du combattant, alors même que leur demande était en cours de traitement, voire que la notification de la décision d’attribution les concernant avait été reçue.
Les épouses de ces combattants titulaires du seul titre de reconnaissance de la nation ressortissent à part entière de l’Office national des combattants et des victimes de guerre (ONACVG) sans pour autant bénéficier de la demi-part fiscale supplémentaire dans le calcul de leurs impôts. C’est cet état de fait que je vous propose de rectifier. (M. Sylvain Berrios applaudit.)
Mme la présidente
La parole est à M. Pierrick Courbon, pour soutenir l’amendement no 2779.
M. Pierrick Courbon
Dans le prolongement des interventions précédentes, cet amendement vise à étendre le bénéfice de la demi-part fiscale aux veuves d’anciens combattants qui n’étaient pas titulaires de la carte du combattant au moment de leur décès mais du seul titre de reconnaissance de la nation.
Au fil des années, la représentation nationale a corrigé un certain nombre d’injustices en octroyant plus largement cette demi-part fiscale supplémentaire. Il en reste une, qui concerne très peu de personnes – moins de 2 % des conjointes survivantes – et dont la correction coûterait donc peu aux finances publiques. Il s’agirait néanmoins d’une belle mesure de reconnaissance pour les veuves de ces combattants.
Mme la présidente
La parole est à M. Charles de Courson, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l’avis de la commission sur ces amendements identiques.
M. Charles de Courson, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
Vos amendements posent un problème, puisque la demi-part en question ne concerne que les veuves dont les maris en bénéficiaient en tant qu’anciens combattants. On ne peut pas l’accorder dans le cas contraire. Il faut rester calé sur la carte du combattant, sans quoi le dispositif ne serait plus cohérent.
Suis-je clair ?
M. Emeric Salmon
On peut être clair sans être honnête !
M. Charles de Courson, rapporteur général
Mon avis est donc défavorable à titre personnel, ces amendements n’ayant pas été examinés par la commission.
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre du budget et des comptes publics, pour donner l’avis du Gouvernement.
M. Laurent Saint-Martin, ministre du budget et des comptes publics
Même avis.
Mme la présidente
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz.
Mme Marie-Christine Dalloz
On parle toujours des veuves des anciens combattants mais il existe aussi des veufs et, à une certaine époque, ils ne jouissaient pas des mêmes avantages ; nous avons réalisé un important travail pour qu’ils leur soient accordés.
L’attribution de la demi-part fiscale supplémentaire dépend de celle du statut d’ancien combattant. Comment l’octroyer légalement à la veuve ou au veuf de quelqu’un à qui ce statut n’avait pas été accordé avant son décès ? Il y a là une incohérence.
J’entends ce que disent les auteurs des amendements au sujet de la reconnaissance de la nation mais le statut fiscal de la demi-part en question est précis. Ces amendements ne tournent pas !
M. Thomas Cazenave
Très bien !
Mme la présidente
La parole est à M. Sylvain Berrios.
M. Sylvain Berrios
Il s’agit d’attribuer une demi-part aux conjoints survivants non pas de personnes qui n’auraient pas été anciens combattants mais de personnes qui ont été reconnues comme tels par l’ONACVG sans avoir eu le temps d’obtenir la carte afférente parce qu’elles sont décédées trop jeunes. La qualité d’ancien combattant n’est pas en question ici.
(Les amendements identiques nos 255, 703 et 2779 sont adoptés.)
Mme la présidente
La parole est à M. Karim Ben Cheikh, pour soutenir l’amendement no 3472.
M. Karim Ben Cheikh
Cet amendement a trait à la fiscalité des non-résidents fiscaux, qui présente une anomalie : elle permet une minoration de l’impôt dû par les plus aisés et une majoration par défaut de celui que doivent les plus vulnérables.
Quand un Français résidant à l’étranger déclare des revenus inférieurs à 27 500 euros, il se voit appliquer un taux d’imposition de 20 % dès le premier euro, appelé taux mondial. Pour bénéficier d’un taux progressif, il a l’obligation de déclarer ses revenus mondiaux. C’est normal : il en va de même pour les résidents fiscaux de France. En revanche, s’il déclare des revenus supérieurs à 27 500 euros, il se voit automatiquement appliquer un taux progressif avantageux, sans obligation de déclarer ses revenus mondiaux.
Cela pose deux problèmes, dont le premier a trait à la transparence : souvent, les contribuables modestes ne sont pas informés de la possibilité de bénéficier d’un taux progressif et le contentieux fiscal tend donc à peser davantage sur les faibles revenus.
Le deuxième problème consiste en une inégalité de traitement : les revenus modestes sont taxés par défaut à 20 % tandis que les hauts revenus profitent d’une progressivité avantageuse sans déclaration des revenus mondiaux.
Notre amendement vise à corriger cette situation paradoxale en appliquant un principe de transparence à tous les Français et non-résidents fiscaux assujettis à l’impôt sur le revenu en France. Il prévoit, en cas de déclaration des revenus mondiaux, l’application de la progressivité et, en cas de non-déclaration des revenus mondiaux, celle d’un taux minimal de 35 % dès le premier euro. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS.)
Mme la présidente
Merci, monsieur Ben Cheikh. Je ne vous ai pas coupé la parole mais je vous rappelle que vous avez collectivement décidé hier de tenter de vous en tenir à des interventions d’une minute pour défendre vos amendements. Merci pour vos efforts en ce sens.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
Aux termes du dispositif en vigueur, les contribuables concernés peuvent choisir entre l’application d’un taux minimal de 20 % et celle du barème. Vous nous proposez le dispositif presque inverse.
La commission a émis un avis défavorable puisque l’application d’un taux minimal constitue une garantie permettant d’imposer les revenus de source française des non-résidents.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Même avis.
Mme la présidente
La parole est à M. Karim Ben Cheikh.
M. Karim Ben Cheikh
Désolé, monsieur le rapporteur général : ce que vous dites n’est pas tout à fait juste. C’est aux plus petits revenus qu’on applique par défaut un taux d’imposition de 20 %. Ils ne peuvent bénéficier de la progressivité qu’en contestant cette application par défaut, à la condition de déclarer leurs revenus mondiaux.
Au contraire, le barème progressif s’applique aux revenus élevés sans nécessité de déclarer les revenus mondiaux.
Il s’agit donc d’une situation injuste et inéquitable : on impose à ceux qui perçoivent les plus bas revenus de déclarer leurs revenus mondiaux, comme on l’impose à tous les Français, alors que cette contrainte ne pèse pas sur ceux qui touchent les revenus les plus élevés. Cet amendement vise seulement à corriger cette situation.
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Charles de Courson, rapporteur général
Ce n’est pas vrai, mon cher collègue. Ceux dont les revenus sont les plus modestes peuvent choisir la progressivité. Ce n’est qu’une option, mais il n’est pas difficile de cocher la case correspondante. Dans ce cas de figure, ceux dont les revenus se situent en dessous du barème seront même non imposables. Cela paraît plus logique.
M. Karim Ben Cheikh
Mais ils auront l’obligation de déclarer leurs revenus mondiaux !
(L’amendement no 3472 n’est pas adopté.)
(Exclamations sur les bancs du groupe EcoS.)
M. Karim Ben Cheikh
Il faut compter !
Mme Marie-Christine Dalloz
On ne remet pas en cause la présidence !
Mme la présidente
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 615.
Mme Véronique Louwagie
Notre collègue Vincent Rolland propose d’accorder aux propriétaires des logements situés dans les stations classées de tourisme une réduction d’impôt à hauteur de 75 % sur les revenus tirés de la location desdits logements, à la condition qu’ils soient loués à des travailleurs saisonniers.
Cela répond à un problème qui se pose à un certain nombre de communes, notamment en montagne, où les saisonniers ne trouvent à se loger qu’avec de grandes difficultés, puisque les logements qu’ils pourraient occuper le sont par des touristes.
Il s’agit donc d’inciter les propriétaires à louer leurs biens aux saisonniers, qui sont parfois obligés de monter vers les stations et d’en redescendre chaque jour, parcourant 40 ou 50 kilomètres dans des conditions difficiles.
Loger les personnes qui travaillent dans des zones touristiques pendant la période où les touristes occupent les communes concernées – l’hiver dans les stations de montagne, l’été dans les stations balnéaires – constitue un réel problème.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
Cet amendement n’a pas été examiné par la commission mais, à titre personnel, j’y suis défavorable.
En effet, les personnes qui louent une partie de leur résidence principale à des travailleurs saisonniers bénéficient déjà d’une exonération totale de l’impôt sur le revenu. En outre, les taux d’abattement de droit commun s’élèvent actuellement à 50 % et peuvent aller jusqu’à 71 % s’agissant des meublés de tourisme classés, dans la limite d’une durée de location de 120 jours. Le régime fiscal actuel est donc déjà extrêmement favorable.
Vous soulevez un réel problème mais il faut se montrer raisonnable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Même avis.
Le logement des travailleurs saisonniers se heurte à de réelles difficultés ; vous avez raison de le souligner. Il est clair néanmoins qu’elles ne se résoudront pas par la création d’une nouvelle niche fiscale en plus des dispositions existantes.
Si l’amendement soulève à juste titre le problème, la solution proposée n’est pas la bonne, parce qu’il ne faut pas – vous le savez comme moi – s’abandonner en permanence au réflexe de la niche fiscale complémentaire. Vous n’ignorez pas les effets pervers inflationnistes que produirait une telle mesure.
Je vous accorde néanmoins que le problème de l’habitat des travailleurs saisonniers reste entier.
Mme la présidente
La parole est à M. Philippe Lottiaux.
M. Philippe Lottiaux
Tout ce qui peut contribuer à résoudre ce problème est bienvenu, dans la mesure où l’hôtellerie et la restauration rencontrent à cet égard de véritables difficultés économiques, dans les zones littorales en été et dans les zones de montagne en hiver, qui freinent parfois le développement économique et touristique d’un ensemble de secteurs.
Certes, la mesure proposée n’est pas la panacée mais, face à cette situation comme face à la crise du logement, c’est d’une série de moyens, de petites choses que nous avons besoin.
J’ai moi-même déposé une proposition de loi à ce sujet. Il faudrait aussi accompagner les employeurs qui construisent ou louent un certain nombre de résidences : cela devient indispensable.
Dans différents secteurs, il faut prendre de-ci de-là des mesures ne consistant pas vraiment dans des créations de niches fiscales mais dans des incitations.
Mme Mathilde Feld
Si, c’est une niche fiscale !
M. Philippe Lottiaux
Il n’y a pas de solution miracle, seulement un ensemble de petites solutions. (Mme Béatrice Roullaud applaudit.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Véronique Louwagie.
Mme Véronique Louwagie
Vous reconnaissez, monsieur le rapporteur général, monsieur le ministre, que nous avons des difficultés de logement aujourd’hui, et pas des moindres, qui concernent tous les saisonniers. Ce sont des métiers souvent difficiles et il faut d’autant plus soutenir ces personnes qui travaillent pendant des durées relativement courtes. J’entends vos arguments, mais je ne les partage pas parce que le dispositif fiscal applicable aux personnes qui louent tout ou partie de leur résidence principale à des saisonniers ne concerne que des cas marginaux par rapport à l’ampleur de la demande, le nombre des saisonniers dans nos stations de ski étant tellement important qu’il ne leur est pas possible de trouver de tels logements aujourd’hui.
Certes, il existe déjà un abattement spécifique, mais il ne concerne que les locations meublées à destination des touristes. Il convient de transformer ces locations, qui le plus souvent sont à la semaine, en des locations pérennes de plusieurs mois car, aujourd’hui, on n’a pas de solution ! J’entends que cet amendement n’est peut-être pas techniquement le meilleur…
Mme Christine Pirès Beaune
C’est une niche de plus !
Mme Véronique Louwagie
…mais, en tout cas, il faut apporter une solution parce que ce sont des gens qui travaillent et qu’il faut soutenir dans leur démarche.
M. Vincent Descoeur
Je suis d’accord.
Mme la présidente
Nous passons au vote. (Protestations sur les bancs des groupes LFI-NFP et SOC.) J’ai pris deux interventions, chers collègues.
Un député du groupe LFI-NFP
Mais la discussion est trop courte !
Mme la présidente
Je vous demande de vous signaler à temps, à moins que vous ne souhaitiez qu’on en revienne à deux minutes par intervention… Je continuerai donc à donner la parole à un orateur pour et à un orateur contre dans la mesure du possible et, sinon, aux deux orateurs qui l’auront demandée les premiers avant la mise aux voix.
(L’amendement no 615 n’est pas adopté.)
M. Emeric Salmon
Ils n’aiment pas les saisonniers !
Mme la présidente
La parole est à Mme Mathilde Feld, pour soutenir l’amendement no 2424.
Mme Mathilde Feld
Chers collègues, comme vous nous reprochez de ne proposer que des taxes, je vais vous proposer ici de faire une économie, figurez-vous !
Cet amendement vise en effet à supprimer le crédit d’impôt sur les fonds communs de placement dans l’innovation (FCPI), conformément au programme du Nouveau Front populaire qui prévoit la suppression des niches fiscales injustes et inutiles. Créés en 1997, ils étaient destinés à dynamiser l’industrie du capital-risque française en incitant les particuliers à placer leur épargne dans des instruments financiers investis dans des entreprises innovantes.
L’efficacité de ce dispositif n’a jamais été démontrée, et pour cause : il ne stimule rien. Cette niche n’est qu’un gaspillage d’argent public. En plus, elle contribue à l’injustice de notre système fiscal puisque le montant des investissements éligibles étant de 24 000 euros, ce crédit d’impôt bénéficie aux ménages disposant de fortes capacités d’épargne, donc les plus aisés, leur permettant une réduction fiscale pouvant s’élever jusqu’à 25 % de leurs investissements.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
Cet amendement a été examiné par la commission, qui a émis un avis défavorable.
J’ajoute que les avantages fiscaux du dispositif sont bornés à fin 2025. On aura donc tout le temps de voir alors ce qu’il faudra faire dans le PLF pour 2026.
Quant à votre appréciation sur l’inutilité du dispositif, je serai plus nuancé. Certes, s’agissant de la Corse et des départements d’outre-mer, les FIP, les fonds d’investissement de proximité, sont considérés comme plutôt utiles ; en revanche, pas un seul des FIP hexagonaux n’a une rentabilité positive – leur taux de rentabilité se situe entre moins 20 % et moins 60 %, il faut tout de même le faire ! C’est pourquoi j’avais proposé en commission de supprimer ce dispositif pour protéger l’épargnant. Toutefois, il n’en va pas de même pour les FCPI, le capital de ces derniers étant de surcroît beaucoup plus important. Je propose donc de revenir sur toutes ces questions l’année prochaine pour voir si l’on décide de renouveler, de modifier ou de supprimer tout ou partie de ces dispositifs dans le budget pour 2026.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Premièrement, madame la députée, vous dites que vous n’augmentez pas les impôts, mais revenir sur une réduction d’impôt aussi installée que le dispositif Madelin revient à les augmenter.
M. Gabriel Attal
Évidemment.
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Deuxièmement, il faut voir quelles seraient les conséquences si cet amendement était adopté. A-t-on besoin d’investissements auprès des PME, notamment des PME innovantes ?
M. Sylvain Maillard
Bah oui !
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Je pense que nous pouvons considérer que oui, n’est-ce pas ? Et nos PME manquent-elles de fonds propres ? La réponse est bien sûr également oui. Le dispositif Madelin n’est peut-être pas la panacée, mais veut-on le casser alors qu’il permet l’investissement dans les fonds propres des PME non cotées ? Non ! (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
L’avis du Gouvernement est donc défavorable. (M. Paul Midy et M. Nicolas Metzdorf applaudissent.)
Mme la présidente
La parole est à M. Daniel Labaronne.
M. Daniel Labaronne
Pour ceux qui n’étaient pas là lors du débat précédent sur les finances locales, je rappelle que, s’agissant des FCPI, le montant moyen des souscriptions est de 7 000 euros et que ces fonds de placement ont l’obligation d’investir aussi dans les régions. Il se trouve que, dans la région Centre-Val de Loire, le FCPI Loir Valley Invest, dont elle est partenaire, est très dynamique dans le soutien aux PME innovantes dans les domaines de la santé, de l’écotechnologie et des services aux entreprises. Par conséquent, revenir sur ce dispositif qui marche très bien localement serait à mon avis une erreur funeste pour le développement des PME dans nos territoires, notamment dans nos territoires ruraux. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR. – M. Laurent Marcangeli et Mme Marie-Christine Dalloz applaudissent également.)
Mme la présidente
La parole est à M. Aurélien Le Coq.
M. Aurélien Le Coq
J’ai bien compris que, selon vous, toutes les niches fiscales actuelles fonctionnent à merveille, que l’investissement productif dans ce pays est absolument parfait, qu’il n’y a pas de chômage, bref, que tout va bien, monsieur Labaronne,…
M. Daniel Labaronne
Oui, et je le redirai !
M. Aurélien Le Coq
…mais il y a un moment où il va falloir accepter que vous ne pouvez pas à la fois tenir de tels propos et dire qu’on a un déficit qui n’a pas été maîtrisé, qu’on s’est planté ces dernières années et que maintenant il faut aller chercher de l’argent. Vous avez passé toute la journée hier, dès que nous avons proposé des sources de rentrées d’argent, à les refuser et à voter des amendements proposant l’inverse, c’est-à-dire de nouveaux abattements et de nouvelles exonérations d’impôts, continuant ainsi à vider les caisses de l’État !
M. Sylvain Maillard
C’est faux !
M. Aurélien Le Coq
Soit vous assumez de vouloir faire un budget où le déficit continue à monter, soit vous devenez un petit peu raisonnable et vous acceptez des amendements qui permettent de remplir les caisses de l’État. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)
M. Sylvain Maillard
Vous voulez tuer les PME !
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre.
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Hier, si des amendements creusant le déficit ont été votés, ce n’était ni à l’initiative du socle majoritaire ni avec l’avis favorable du Gouvernement – je pense notamment aux amendements sur les demi-parts fiscales examinés en fin de journée, qui ont coûté plus de 3,5 milliards… (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe EPR. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Il s’agit non pas d’être pour ou contre des propositions de nouvelles recettes, mais de se demander quelles en seraient les conséquences. On peut tout de même y réfléchir ensemble ! On ne va pas affaiblir les fonds propres de nos PME, lesquelles rencontrent déjà, par rapport à nombre d’autres pays comparables, des difficultés pour en lever ! C’est une mauvaise idée de supprimer la niche Madelin parce qu’il y aurait plus de conséquences sociales négatives que d’argent à récupérer.
Mme Mathilde Feld
Certainement pas !
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Souffrez que nous examinions ligne à ligne vos propositions pour voir quelles en seraient les conséquences – en l’occurrence, elles seraient dévastatrices. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Charles de Courson, rapporteur général
La dépense fiscale de ce dispositif est de 125 millions et il apporte tout de même 600 millions de fonds propres aux entreprises concernées – sur la base d’un taux moyen de 20 % à 22 % multiplié par cinq. Ce n’est pas rien !
Mme Véronique Louwagie
C’est évident.
M. Charles de Courson, rapporteur général
Par conséquent, soyons prudents, examinons la question l’année prochaine afin d’en tirer les conclusions pour le budget de l’année suivante.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 2424.
(Le vote à main levée n’ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 101
Nombre de suffrages exprimés 99
Majorité absolue 50
Pour l’adoption 46
Contre 53
(L’amendement no 2424 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. Charles Alloncle, pour soutenir les amendements nos 3053 et 3054, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
Sur l’amendement no 3054, je suis saisie par le groupe UDR d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
M. Charles Alloncle
L’amendement no 3053 a pour objet de rehausser de cinq points le taux de réduction d’impôt du crédit IR-PME ; ce dispositif, vous le savez, permet d’obtenir une réduction d’impôt sur le revenu si vous investissez dans une PME, une jeune entreprise innovante (JEI) ou une jeune entreprise innovante de rupture (JEIR), et que vous vous engagiez à garder vos parts pour une durée d’au moins cinq ans.
Vous êtes nombreux dans cet hémicycle à avoir voté, depuis plusieurs jours, pour la hausse de la fiscalité des plus hauts revenus. Le risque qui en découle semble réel pour notre économie. Vous conviendrez que la contribution différentielle sur les hauts revenus (CDHR) va détourner une grande partie des fonds qui étaient jusqu’ici dévolus à l’investissement dans nos entreprises. Néanmoins, il est encore possible, chers collègues, de réduire l’impact de cette mesure sur l’ensemble de notre tissu productif en renforçant les moyens incitatifs dont nous disposons.
Je vous propose donc d’agir au moyen de deux leviers complémentaires. D’une part, il faut inciter les hauts revenus qui investissent déjà dans nos PME à l’aide du dispositif précité à y recourir de façon un peu plus large, ce qui nécessite de rehausser le seuil des versements éligibles à cette réduction d’impôts – j’y reviendrai lors de la présentation de l’amendement no 3055. D’autre part, il convient de rendre plus attractif l’investissement en capital dans les petites et moyennes entreprises, ce qui implique de rehausser les taux de réduction d’impôt IR-PME – tel est l’objet du présent amendement.
L’amendement no 3054 est de repli. Il tend à cantonner la hausse de cinq points du taux de la réduction d’impôt aux PME hors JEI et JEIR. Le but est de revenir à un taux proche de celui qui avait cours il y a deux ans avant qu’il ne soit abaissé de 25 % à 18 % par la loi de finances pour 2024.
Notre ligne est claire : il faut couper dans les dépenses de fonctionnement de l’État tout en préservant nos investissements d’avenir – je pense ici particulièrement à nos jeunes entreprises. Si l’on veut se préserver de tout effet récessif, c’est évident. Nous sommes attendus au tournant en tant que législateur. La Banque publique d’investissement, BpiFrance, a indiqué dans sa dernière enquête semestrielle que le moral des chefs d’entreprise était au plus bas et que la situation était encore plus préoccupante pour les patrons de PME. Ce climat économique a un impact morose sur l’investissement. C’est précisément parce que le coût du crédit demeure élevé qu’il faut inciter le financement en capital. L’objet de ces amendements est par conséquent de faciliter le financement en capital et, en parallèle, d’encourager la transmission des PME en incitant de nouveaux entrepreneurs à reprendre le flambeau et à s’investir sur le long terme. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDR.)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
Notre collègue propose dans l’amendement no 3053 de rehausser de cinq points non seulement l’IR-PME standard, de 18 % à 23 %, mais aussi celui applicable aux jeunes entreprises innovantes, de 30 % à 35 %, et celui applicable aux jeunes entreprises innovantes de rupture, de 50 % à 55 %.
La majoration du taux de l’IR-PME à 25 % avait été introduite dans la loi de finances pour 2018 et n’était entrée en vigueur qu’en 2020, puisqu’il avait fallu deux ans pour obtenir l’accord de la Commission européenne. Ce nouveau taux avait été d’emblée défini comme transitoire dans le contexte de la suppression de l’ISF, l’impôt de solidarité sur la fortune, sachant qu’il existait un dispositif ISF-PME qui permettait jusque-là de réduire le montant de cet impôt en investissant dans ces entreprises.
M. Nicolas Forissier
Ce qui était une très bonne idée !
M. Charles de Courson, rapporteur général
L’an dernier, nous avons fait le choix de ne pas proroger ce taux majoré et de revenir à 18 %, l’évaluation qui nous a été transmise faisant état de l’absence d’effet significatif du taux bonifié généralisé sur le comportement des contribuables.
Quant aux JEI et aux JEIR, elles bénéficient de taux dérogatoires depuis à peine moins d’un an. Restons-en donc là à ce stade.
Les amendements ont été repoussés par la commission.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Même avis.
(L’amendement no 3053 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 3054.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 117
Nombre de suffrages exprimés 117
Majorité absolue 59
Pour l’adoption 45
Contre 72
(L’amendement no 3054 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Sur l’amendement n° 3572, je suis saisie par le groupe Écologiste et social d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Charles Alloncle, pour soutenir les amendements nos 3055 et 3056, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
M. Charles Alloncle
L’amendement no 3055 a pour objet de doubler les seuils d’éligibilité au crédit d’impôt IR-PME. Là encore, la loi instaure un réel encadrement en prévoyant une durée minimale de cinq ans de détention des parts des PME, des JEI ou des JEIR financées.
Le plafonnement actuel des seuils n’incite pas les plus gros investisseurs à faire du placement de long terme dans les PME leur levier principal d’investissement. En outre, la CDHR va rediriger vers le fisc des fonds jusqu’alors alloués aux entreprises.
Il convient de renforcer les incitations destinées aux investisseurs qui restent au capital des PME. Doubler les seuils d’éligibilité les encouragerait à doubler leurs investissements. Aux plus sceptiques d’entre nous, je peux dire, au vu des conditions d’éligibilité très encadrées, que les éventuels effets d’aubaine seraient résiduels. En revanche, l’effet d’aubaine pour l’économie et les PME serait bien réel. L’adoption de cet amendement de bon sens permettrait de rediriger vers les PME des fonds actuellement placés sur le marché boursier. Il devrait tous nous mettre d’accord car il est dans l’intérêt des petites et moyennes entreprises.
L’amendement no 3056 est de repli.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
L’un vise à doubler tous les plafonds tandis que le second les augmente de 50 %. La commission a repoussé les deux.
Pour ce qui concerne l’IR-PME, la fraction des versements qui excède la première limite ouvre droit à la réduction d’impôt au titre des quatre années suivantes dans les mêmes limites. Si cette fraction n’est pas reportable pour les JEI et les JEIR, les plafonds les concernant dérogent déjà au droit commun.
De surcroît, la réduction d’impôt est prise en compte dans le plafonnement global des avantages fiscaux pouvant être accordés au titre de l’impôt sur le revenu, fixé à 10 000 euros par an. Il n’y a donc pas d’intérêt à relever les plafonds de versement : ils finiraient par être concernés par ce plafonnement.
(Les amendements nos 3055 et 3056, repoussés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Christine Arrighi, pour soutenir les amendements nos 3575 et 3572, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
Mme Christine Arrighi
Je vais retirer le no 3575 et je vais vous expliquer pourquoi.
Il s’agit à nouveau des fonds communs de placement pour l’innovation. La mesure d’économie que nous proposons s’inspire du rapport de mars 2024 de l’Inspection générale des finances (IGF) portant sur les aides aux entreprises, qui préconise la suppression des avantages fiscaux rattachés à l’investissement dans les fonds communs de placement.
Selon l’IGF, il ne faut pas prolonger la réduction d’impôt liée à ces investissements. Ce n’est pas que l’IGF soit défavorable à l’innovation – les écologistes non plus d’ailleurs, surtout quand elle concerne des sujets écologiques, enjeux essentiels des prochaines années. L’IGF précise également que, par son rôle dominant, BPIFrance est plus efficace que ces investissements dans l’allocation des moyens publics, notamment vers les segments de marché présentant des défaillances. Les avantages fiscaux dont je parle constituent un coût immédiat pour les finances publiques. Nous cherchons des économies : en voilà !
Cependant, il ressort de nos travaux en commission que ces avantages fiscaux peuvent avoir une grande importance pour l’investissement en Corse et en outre-mer. Contrairement à celle de l’amendement no 3575, la rédaction du no 3572 prévoit d’y maintenir le dispositif en fixant un taux de réduction d’impôt sur le revenu à 18 % des versements effectués. Pour pallier une difficulté relevée en commission par M. le rapporteur général, elle prévoit également que les modifications n’entrent en vigueur qu’à partir du 1er janvier 2026. Ce délai raisonnable avant la suppression de ces avantages fiscaux devrait permettre aux gestionnaires des fonds de trouver des solutions pour garantir la continuité des portefeuilles existants. Ainsi, toutes les précautions sont prises, autant pour les investisseurs ou pour les fonds que pour réduire le déficit de l’État.
(L’amendement no 3575 est retiré.)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement no 3572 ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
Mon argument sera le même que précédemment. La France devant redemander l’autorisation de la Commission européenne, il nous faudra travailler sur le sujet en 2025 et nous en tirerons les enseignements pour le budget pour 2026.
Cela étant, comme je l’ai dit tout à l’heure, je partage l’analyse de notre collègue sur les FIP en dehors de la Corse et des outre-mer.
L’amendement a été repoussé par la commission.
Mme Christine Arrighi
Non : c’est le no 3575 qui avait été examiné par la commission !
M. Charles de Courson, rapporteur général
En effet, le no 3572 n’a pas été examiné par la commission. Néanmoins, mon avis est défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Il est lui aussi défavorable, entre autres parce que la comparaison avec BPIFrance ne tient pas. Les deux types d’investissements n’ont pas le même objectif. Évidemment que BPIFrance tient le rôle de chef de file dans l’investissement en fonds propres dans les PME. L’idée n’est pas de faire du dispositif Madelin le principal véhicule en la matière. Il est complémentaire et met évidemment en jeu des montants bien plus faibles que ceux liés à l’action de BPIFrance. La question posée à travers le débat sur la prolongation ou non du dispositif est : veut-on un outil de fléchage et d’incitation fiscale à l’investissement en fonds propres dans les PME de notre pays, qui en manquent encore ? (Mme Christine Arrighi s’exclame.) Je maintiens qu’il ne faut pas détruire ni abîmer cette niche car cela rendrait encore plus difficile pour les PME la recherche de fonds propres.
Mme Christine Arrighi
Mais ce n’est pas efficace !
Mme la présidente
Madame Arrighi, si vous me demandez la parole, je pourrai vous la donner.
Mme Christine Arrighi
D’accord !
Mme la présidente
C’est mieux comme ça ! La parole est à Mme Christine Arrighi.
Mme Christine Arrighi
Vous avez raison, madame la présidente : c’est mieux quand vous distribuez la parole.
Le problème, ce n’est pas qu’on veuille ou non financer les PME, c’est que le dispositif n’est pas efficace, comme l’a démontré l’IGF. Donc, supprimons-le ! (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS et LFI-NFP.)
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 3572.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 140
Nombre de suffrages exprimés 138
Majorité absolue 70
Pour l’adoption 60
Contre 78
(L’amendement no 3572 n’est pas adopté.)
M. Aurélien Le Coq
Le RN suit les avis du Gouvernement !
Mme la présidente
L’amendement no 2694 rectifié de M. Michel Castellani est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
La commission a adopté cet amendement.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Même si cet amendement cible l’avantage fiscal sur les FIP de Corse et d’outre-mer, ma réponse sera la même que précédemment. La volonté de raboter ou de supprimer une niche fiscale n’est pas le bon signal à envoyer aux investisseurs en fonds propres, même si les FIP sont moins efficaces que les FCPI.
Avis défavorable.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 2694 rectifié.
(Le vote à main levée n’ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 135
Nombre de suffrages exprimés 135
Majorité absolue 68
Pour l’adoption 57
Contre 78
(L’amendement no 2694 rectifié n’est pas adopté.)
Une députée du groupe LFI-NFP
Bravo l’extrême droite !
Mme la présidente
Je suis saisie de trois amendements identiques, nos 1086, 2133 et 2219.
L’amendement no 1086 de M. Emmanuel Tjibaou est défendu.
La parole est à M. Nicolas Metzdorf, pour soutenir l’amendement no 2133.
M. Nicolas Metzdorf
Il concerne les fonds d’investissement de proximité qui soutiennent les PME ultramarines et offrent un avantage fiscal de 30 % à leurs souscripteurs. Nous proposons de faire passer cet avantage fiscal à 50 % pour la Nouvelle-Calédonie, compte tenu des émeutes qui ont eu lieu et du manque de confiance des investisseurs dans la reconstruction de l’archipel. Nous voulons donner un avantage supplémentaire aux contribuables qui veulent bien investir leur argent en Nouvelle-Calédonie.
Mme la présidente
L’amendement no 2219 de M. Moerani Frébault est défendu.
Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
Je rappelle que le taux de cet avantage fiscal est de 18 % en métropole et de 30 % en Corse et en outre-mer. En raison de la situation en Nouvelle-Calédonie, les amendements visent à y porter ce taux à 50 %. La commission des finances a émis un avis favorable mais il me semble qu’il faudrait borner cette hausse dans le temps. Autre réserve : toutes les aides de ce type sont subordonnées à un accord de la Commission européenne.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Je partage l’analyse de M. le rapporteur général. Même si j’étais plutôt favorable à faire une exception pour le territoire calédonien où je comprends la nécessité de faire revenir des capitaux, nous n’aurons pas la possibilité d’appliquer cet amendement. Ce serait totalement contraire aux règles européennes au regard desquelles, comme l’a dit M. le rapporteur général, le dispositif des FIP n’est pas lui-même totalement sécurisé. Je serais plutôt favorable à des amendements à venir tendant à majorer le taux de réduction d’impôt sur l’investissement productif. Ils portent sur une autre niche fiscale et répondent un peu différemment à la nécessité d’inciter davantage à l’investissement. En revanche, modifier le dispositif Madelin l’exposerait à se retrouver percuté par la réglementation européenne.
Je demande donc le retrait des amendements identiques au profit d’amendements suivants ; à défaut, mon avis serait défavorable.
Mme la présidente
La parole est à M. Sébastien Chenu.
M. Sébastien Chenu
Il faut faire des outre-mer des zones d’attractivité économique. Cet amendement va évidemment dans le bon sens, en particulier pour nos compatriotes de Nouvelle-Calédonie. J’ai un peu le sentiment que l’Union européenne a bon dos quand M. le rapporteur général et M. le ministre évoquent les règles communautaires. Vu la faiblesse des montants en jeu et de ce qui est par ailleurs accordé à certains pays, je pense que l’Assemblée devrait se prononcer en faveur de cet amendement. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
(Les amendements identiques nos 1086, 2133 et 2219 sont adoptés.)
M. Sylvain Maillard
Eh bien ! N’aimez-vous pas la Nouvelle-Calédonie, chers collègues du NFP, pour voter contre ?
Un député du groupe RN
Ah, s’il s’était agi de Gaza !
Mme la présidente
S’il vous plaît ! Il n’y a pas d’indignité dans les votes : chacun est libre de ses décisions.
La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement no 3634.
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Il s’agit de corriger une erreur matérielle introduite par la loi de finances pour 2024 lors de la réécriture de l’article 199 terdecies-0 A du code général des impôts.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
Avis favorable, à titre personnel.
(L’amendement no 3634 est adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. Paul Midy, pour soutenir l’amendement no 3300.
M. Paul Midy
À la différence de l’IR-PME, le dispositif IR-JEI se focalise sur les jeunes entreprises innovantes. Nous l’avons créé l’année dernière et il fonctionne très bien depuis plusieurs mois. Parmi les bénéficiaires, je citerai Inscoper, dix emplois à Rennes, Kahe Nautic, neuf emplois à Lacanau, Hephaistos-Pharma, quinze emplois à Lyon et à Orsay, Aerix Systems, dix emplois à Mérignac… Je pourrais donner d’autres exemples à Orléans, à Aix, à Saint-Cloud, à Rouen, à Grenoble, à Fontaine – dans l’Isère – et sans doute dans chacune de vos circonscriptions. (M. Jean-René Cazeneuve applaudit.) Le dispositif crée de l’emploi ; merci donc aux collègues qui avaient voté en sa faveur.
L’amendement vise à donner de la visibilité sur les prochaines années tout en maintenant le seuil à 50 000 euros. Il n’aurait pas d’impact budgétaire majeur pour l’année 2025. Nous n’avons pas de fonds de pension, mais nous avons de l’épargne ; autant bien l’utiliser !
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
Défavorable. L’avantage est actuellement borné à 2028 ; vous proposez d’ajouter une année. Attendons d’évaluer le dispositif pour décider s’il faut le prolonger !
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Même avis.
Mme la présidente
La parole est à M. Matthias Renault.
M. Matthias Renault
Les amendements de M. Alloncle, que nous soutenions, portaient sur le même thème. Nous voterons contre ceux de M. Midy, pour accélérer le débat. Est-ce la peine de revenir trente-six fois sur le même sujet ? (Exclamations sur les bancs du groupe EPR.)
Mme Prisca Thevenot
C’est la liberté d’amendement !
(L’amendement no 3300 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. Paul Midy, pour soutenir les amendements nos 3516, 3298 et 3517, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
M. Paul Midy
Je vais retirer l’amendement no 3516 car nous avons voté l’amendement no 3311 hier. Je retire également l’amendement no 3298 au profit de l’amendement suivant, no 3517.
Ce dernier, un amendement du groupe EPR, concerne le même dispositif, l’IR-JEI, et vise à permettre aux particuliers d’utiliser cette incitation au travers de FCPI dédiés aux jeunes entreprises innovantes. Cela permettrait de démocratiser cet outil : les Français pourraient investir dans les JEI avec de petits montants, qui pourraient commencer à quelques centaines d’euros ; le risque serait mutualisé et le dispositif serait accessible par le réseau bancaire.
L’amendement n’aurait pas d’impact en 2025, l’entrée en vigueur étant programmée pour 2026. Par ailleurs, nous avons voté la limitation d’une niche fiscale concernant l’impôt sur le revenu, qui permettra de financer le mécanisme pour les prochaines années.
Je vous appelle à soutenir cette disposition, qui transforme l’épargne des uns en salaire des autres.
M. Jean-Yves Bony
Très bonne initiative !
M. Paul Midy
Le coût de l’incitation est en partie assumé par l’État, mais il est bien moindre que celui du chômage. C’est très efficace ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)
(Les amendements nos 3516 et 3298 sont retirés.)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement no 3517 ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
Les JEI et les JEIR bénéficient déjà d’un régime très dérogatoire. Nous n’allons pas en élargir davantage le champ pour compenser le risque induit par des investissements dans les fonds communs de placement à risques (FCPR) ! Ces fonds, comme vous le savez, présentent un niveau de risque particulièrement élevé sans que l’efficacité économique des investissements soit garantie.
La commission a émis un avis défavorable.
(L’amendement no 3517, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)
M. Nicolas Forissier
C’est dommage !
M. Vincent Descoeur
Vous avez été mal inspirés !
Mme la présidente
La parole est à M. Paul Midy, pour soutenir l’amendement no 3299.
M. Paul Midy
En rejetant l’amendement no 3517, vous êtes passés à côté d’un bon outil ! Je retire l’amendement no 3299.
(L’amendement no 3299 est retiré.)
Mme la présidente
L’amendement no 2044 de Mme Cyrielle Chatelain est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
Lorsqu’un amendement est défendu, nous étions convenus que je pouvais me contenter de dire « favorable » ou « défavorable ». En l’occurrence, avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Même avis.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 2044.
(Le vote à main levée n’ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 136
Nombre de suffrages exprimés 136
Majorité absolue 69
Pour l’adoption 54
Contre 82
(L’amendement no 2044 n’est pas adopté.)
M. Éric Coquerel, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
Vous n’aimez pas l’actionnariat solidaire !
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement no 3633.
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Il procède à une simple correction d’erreurs matérielles – une coordination rendue notamment nécessaire par l’adoption de l’article 8 de la loi visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France. L’application du dispositif est d’autre part conditionnée à l’autorisation de la Commission européenne, accordée au regard du droit européen sur les aides d’État.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
L’amendement a été examiné par la commission, qui a donné un avis favorable.
(L’amendement no 3633 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
L’amendement no 3457 de M. Olivier Serva est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
Il s’agit d’élargir le régime d’aide fiscale à l’investissement productif en outre-mer en l’ouvrant aux investissements non neufs. L’amendement présente trois risques : un risque de fraude, avec la possibilité de bénéficier deux fois de la défiscalisation par la vente de biens en seconde main ; un risque d’inflation sur le marché des biens d’occasion, la poussée des prix pouvant se répercuter sur le marché des biens neufs ; un problème de compatibilité avec le droit européen, qui prévoit que de telles aides doivent en principe porter sur des biens acquis neufs.
L’amendement a été repoussé par la commission.
(L’amendement no 3457, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-René Cazeneuve, pour soutenir l’amendement no 2891.
M. Jean-René Cazeneuve
Il s’agit d’un amendement d’appel. Bien évidemment, je pense qu’il convient de soutenir les investissements dans les territoires d’outre-mer – je tiens à cet égard à saluer le travail remarquable de nos collègues Metzdorf et Frébault. L’Inspection générale des finances met cependant en doute l’efficacité de cette niche fiscale. Je propose d’abaisser le seuil de chiffre d’affaires conditionnant l’accès à la réduction d’impôt.
J’ai l’intention de retirer l’amendement pour éviter qu’il ne crée de l’émotion, mais je voudrais que le Gouvernement s’engage à travailler sur le contenu de cette niche pour s’assurer de l’absence d’un effet d’aubaine.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
L’amendement a été adopté par la commission. Le basculement entre la réduction et le crédit d’impôt, démarré en 2014, a été interrompu, si bien que ces deux outils coexistent. Pour limiter les coûts d’intermédiation et faciliter les contrôles, il est opportun de poursuivre cette transition.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Même avis.
(L’amendement no 2891 est retiré.)
Mme la présidente
Je suis saisie de trois amendements, nos 1084, 2134 et 2222, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 2134 et 2222 sont identiques.
L’amendement no 1084 de M. Emmanuel Tjibaou est défendu.
La parole est à M. Nicolas Metzdorf, pour soutenir l’amendement no 2134.
M. Nicolas Metzdorf
La loi de finances pour 2024 avait rendu l’acquisition des friches hôtelières éligible au dispositif d’aide fiscale à l’investissement outre-mer. L’amendement propose d’en faire de même pour l’acquisition de friches consécutives aux destructions en Nouvelle-Calédonie. L’aide fiscale pourrait ainsi être accordée à un investisseur qui reprend une friche pour reconstruire une entreprise à l’identique, comme à celui qui investit dans les secteurs déjà éligibles dans le dispositif de la loi de finances pour 2024.
M. Romain Daubié
C’est bien normal !
Mme la présidente
L’amendement no 2222 de M. Moerani Frébault est défendu.
Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
L’amendement no 1084 risque d’occasionner plusieurs effets de bord, qui ont amené la commission des finances à émettre un avis défavorable.
Quant aux deux amendements identiques, la commission les avait certes adoptés, mais je voudrais faire une observation. La loi de finances pour 2024 a entamé le verdissement des aides fiscales pour l’investissement en outre-mer sur la base des travaux réalisés par l’Inspection générale des finances. La question d’ouvrir ces aides à toutes les friches avait été identifiée, mais posait trois difficultés : un risque de fraude, un risque d’inflation et un problème de compatibilité avec le droit européen. N’oublions pas enfin que ce crédit d’impôt coûte déjà 1,05 milliard.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Même avis sur l’amendement no 1084.
Monsieur Metzdorf, il y a un hiatus entre l’exposé sommaire de votre amendement et le dispositif qu’il décrit ; je m’en remettrai à la sagesse de l’Assemblée sur les amendements identiques, mais, s’ils sont adoptés, il faudra en retravailler la rédaction afin de rendre le mécanisme cohérent par rapport à son objectif.
(L’amendement no 1084 n’est pas adopté.)
(Les amendements identiques nos 2134 et 2222, modifiés par la suppression du gage, sont adoptés.)
Mme la présidente
Je suis saisie de trois amendements identiques, nos 2131, 2215 et 2977.
La parole est à M. Nicolas Metzdorf, pour soutenir l’amendement no 2131.
M. Nicolas Metzdorf
C’est un amendement que nous tentons de faire adopter tous les ans dans le cadre du débat budgétaire ; il concerne l’aide fiscale aux panneaux photovoltaïques. L’avis du Gouvernement est chaque fois défavorable, mais nous y tenons : les factures d’électricité dans les outre-mer, notamment en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie, sont de 30 % à 40 % supérieures à celles de la métropole parce que nos territoires ne participent pas au fonds national de péréquation – nous avons notre propre système, évidemment très coûteux. Les panneaux photovoltaïques participent à l’abaissement du coût de l’électricité pour les consommateurs ultramarins du Pacifique. Nous espérons que, cette fois, l’amendement pourra être adopté.
Mme la présidente
La parole est à M. Moerani Frébault, pour soutenir l’amendement no 2215.
M. Moerani Frébault
Comme mon collègue Nicolas Metzdorf, je vous appelle à soutenir cet amendement qui vise à clarifier les conditions d’éligibilité au régime d’aide fiscale à l’investissement dans les panneaux photovoltaïques, principalement destinés à l’autoconsommation – un enjeu stratégique pour nos entreprises.
L’article 75 de la loi de finances pour 2024 avait posé une première pierre en permettant la défiscalisation du photovoltaïque, mais les incertitudes demeurent, freinant le déploiement de ces projets pourtant cruciaux. Sans une clarification rapide, nous risquons de perdre une occasion unique de dynamiser un secteur clé pour nos entreprises. En votant en faveur de l’amendement, vous choisissez d’investir dans un avenir où l’outre-mer peut non seulement être autosuffisant en énergie, mais aussi jouer un rôle de leader dans la transition énergétique nationale. C’est un pas décisif vers un modèle durable et innovant pour nos entreprises, dont nous pourrions tous être fiers. Nous comptons sur votre soutien !
Mme la présidente
L’amendement no 2977 de M. Jiovanny William est défendu.
Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
La commission les a rejetés. Comme nos collègues l’ont rappelé, l’extension de l’aide fiscale aux panneaux solaires en autoconsommation est une avancée de la loi de finances pour 2024. Prenons le temps d’évaluer le dispositif avant de penser à l’étendre encore !
En outre, l’extension de cette aide aux investissements réalisés par des tiers proposée par les auteurs des amendements risquerait de provoquer une double comptabilisation et de soulever des difficultés pour contrôler le respect du critère d’autoconsommation. Elle comporterait un risque de fraude qu’il faut bien mesurer avant de s’engager dans cette direction.
Avis défavorable.
(Les amendements identiques nos 2131, 2215 et 2977, repoussés par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
Je suis saisie de trois amendements identiques, nos 1087, 2135 et 2221.
L’amendement no 1087 de M. Emmanuel Tjibaou est défendu.
La parole est à M. Nicolas Metzdorf, pour soutenir l’amendement no 2135.
M. Nicolas Metzdorf
Je tente à nouveau d’obtenir l’extension à la Nouvelle-Calédonie du taux majoré de réduction d’impôt, déjà appliqué en Guyane, à Mayotte, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Wallis-et-Futuna. Il convient de favoriser la reconstruction économique de ce territoire en soutenant les entreprises qui veulent bien y investir.
Mme la présidente
L’amendement no 2221 de M. Moerani Frébault est défendu.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
Ces trois amendements visent à rehausser le taux de droit commun de la réduction d’impôt pour l’investissement productif en outre-mer à 45,9 % en Nouvelle-Calédonie pour l’aligner sur le taux applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Guyane et à Mayotte.
La Nouvelle-Calédonie bénéficie déjà d’un taux majoré pour les investissements réalisés dans la production d’énergie renouvelable ainsi que pour les travaux de réhabilitation et de rénovation d’hôtels.
Plusieurs aides budgétaires ont été créées par l’État ; de telles subventions constituent un outil dont beaucoup pensent qu’il serait plus efficace qu’un taux majoré. Néanmoins, et même si je pense moi aussi que ce dernier n’est pas un outil bien adapté à l’objectif visé par nos collègues, la commission a adopté ces amendements.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
M. le rapporteur général a probablement raison concernant la finalité du dispositif. Celui-ci a tout de même le mérite de fonctionner, contrairement à celui portant sur l’IR-PME.
Avis favorable.
(Les amendements identiques nos 1087, 2135 et 2221, modifiés par la suppression du gage, sont adoptés.)
Mme la présidente
Je suis saisie de quatre amendements, nos 2220 rectifié, 2971 rectifié, 3020 rectifié et 2987, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 2220 rectifié, 2971 rectifié et 3020 rectifié sont identiques.
La parole est à M. Moerani Frébault, pour soutenir l’amendement no 2220 rectifié.
M. Moerani Frébault
Je vous invite à soutenir cet amendement, qui avait été adopté par la commission des finances : il vise à améliorer le dispositif d’aide fiscale à l’investissement pour lutter plus efficacement contre les friches.
Ce dispositif est pour l’instant limité aux friches hôtelières ou industrielles, ce qui restreint les possibilités de réhabilitation. Nous proposons d’étendre son périmètre aux friches de toutes natures dans les secteurs éligibles, définis par l’article 199 undecies B du code général des impôts.
Cela permettrait de lancer des projets de reconversion sur des terrains inutilisés tout en conservant les garanties existantes, à savoir l’absence de lien d’intérêt entre le cédant et l’acquéreur, ce qui écarte tout risque de spéculation immobilière sur des biens de seconde main. Cette disposition répond à un enjeu urgent, notamment en Polynésie, où quinze friches hôtelières restent inexploitées depuis trop longtemps. Leur réhabilitation est essentielle pour redynamiser l’économie locale et l’emploi.
Mme la présidente
L’amendement no 2971 rectifié de M. Jiovanny William est défendu.
L’amendement no 3020 rectifié de M. Max Mathiasin est défendu.
L’amendement no 2987 de M. Christian Baptiste est défendu.
Quel est l’avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
La commission des finances a adopté les amendements identiques. À titre personnel, je voudrais toutefois répéter que l’extension de ces aides à toutes les friches pose trois difficultés, identifiées par l’Inspection générale des finances : un risque accru de fraude, à cause de la possibilité de bénéficier deux fois de la défiscalisation par la vente de biens de seconde main ; un risque d’inflation, tant sur le marché des biens d’occasion que sur celui du neuf ; un problème de compatibilité avec le droit européen, qui prévoit que de telles aides ne doivent aller qu’à des biens acquis neufs.
En tant que rapporteur général, j’appelle donc votre attention sur les difficultés à mettre en œuvre cette disposition.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Pour les raisons indiquées par le rapporteur général, je demande le retrait des amendements, afin de pouvoir continuer à travailler sur le sujet ; à défaut, mon avis serait défavorable.
Mme la présidente
La parole est à M. Matthias Renault.
M. Matthias Renault
Nous examinons une série d’amendements portant des mesures de défiscalisation outre-mer et nous venons d’en adopter plusieurs, dont les amendements identiques nos 2134 et 2222, qui sont tout de même assez puissants sur le plan budgétaire puisqu’ils représentent une dépense de 1 milliard d’euros.
Nous soutenons évidemment les dispositifs de défiscalisation outre-mer. Je relève tout de même que M. Cazeneuve voudrait, à la suite d’un rapport de l’IGF, s’attaquer au régime d’aide fiscale à l’investissement productif en outre-mer. Il me semble qu’il faudrait s’inquiéter de cela plutôt que de multiplier les dispositifs.
Nous voterons contre les amendements à seule fin d’éviter une accumulation déraisonnable des dispositifs.
Mme la présidente
Je mets aux voix les amendements identiques nos 2220 rectifié, 2971 rectifié et 3020 rectifié.
(Le vote à main levée n’ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 125
Nombre de suffrages exprimés 107
Majorité absolue 54
Pour l’adoption 54
Contre 53
(Les amendements identiques nos 2220 rectifié, 2971 rectifié et 3020 rectifié sont adoptés ; en conséquence, l’amendement no 2987 tombe.)
Mme la présidente
Je suis saisie de deux amendements, nos 2210 et 1424, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Moerani Frébault, pour soutenir l’amendement no 2210.
M. Moerani Frébault
La question du logement social en Polynésie revêt une importance cruciale, car la demande des populations locales reste largement insatisfaite. Face à cette pénurie de logements, une solution viable se présente : la réhabilitation des friches immobilières permettrait de créer rapidement des logements sociaux, tout en répondant aux enjeux environnementaux.
En Polynésie française, la société Arana a été constituée en 2023 pour répondre à la grave pénurie de logements sur notre territoire. Cette société se heurte cependant à des obstacles administratifs dus à une interprétation restrictive des critères d’éligibilité aux aides fiscales, ce qui entrave son action et retarde la création de logements nécessaires.
Afin de remédier à cette situation, je vous propose d’inclure les immeubles réhabilités dans le champ d’application des aides fiscales pour le logement social. Cet amendement a été élaboré en collaboration avec la Fédération des entreprises des outre-mer et la direction outre-mer de l’Union sociale pour l’habitat, ce qui témoigne de son sérieux et de sa pertinence. Je vous invite à soutenir cet amendement, qui va dans le même sens que celui de ma collègue Mereana Reid Arbelot, du groupe GDR, qui n’a pu être présente pour défendre le sien.
Mme la présidente
La parole est à M. Laurent Mazaury, pour soutenir l’amendement no 1424.
M. Laurent Mazaury
Cet amendement vise à préciser la définition des logements sociaux neufs ouvrant droit à un crédit d’impôt dans les collectivités d’outre-mer.
Les constructions neuves et certaines opérations de rénovation d’immeubles anciens sont en effet éligibles. Toutefois, une interprétation stricte des textes conduit à exclure les opérations d’acquisition d’immeubles existants qui ont préalablement fait l’objet de travaux de remise à neuf.
Selon l’interprétation précitée, de tels immeubles ne seraient éligibles ni au titre des immeubles neufs, ni à celui des opérations de rénovation. Une telle exclusion paraît totalement inopportune étant donné que l’acquisition de logements remis à neuf constitue un moyen d’atteindre les objectifs de la transition écologique.
Nous proposons donc de préciser que les « constructions neuves » éligibles au dispositif de l’article 199 undecies C du code général des impôts doivent être entendues en un sens qui permette d’inclure les opérations de remise à neuf.
Cet amendement a lui aussi été élaboré avec la direction des outre-mer de l’Union sociale pour l’habitat.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
La commission ne les a pas adoptés. En effet, si leurs auteurs jugent trop restrictive la doctrine fiscale fixant la définition de l’immeuble neuf, la réduction d’impôt bénéficie déjà à la réhabilitation de logements, à condition qu’ils aient été acquis depuis plus de vingt ans. Je ne crois pas nécessaire d’élargir encore le champ de ce dispositif.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Même avis.
Mme la présidente
La parole est à M. François Jolivet.
M. François Jolivet
Je voudrais apporter mon soutien à ces deux amendements puisque le logement constitue la première préoccupation des Ultramarins – c’est ce que déclarent 83 % des personnes interrogées. Dans le reste du pays, cette proportion s’élève d’ailleurs à 62 %, ce qui en fait aussi le premier souci des Français métropolitains.
Comme le note M. le rapporteur général, il faut que les logements aient été acquis depuis plus de vingt ans pour pouvoir bénéficier du dispositif. Or, quand un organisme HLM achète des biens pour les réhabiliter, il ne peut les avoir acquis vingt ans plus tôt et laissés en stock dans son patrimoine ! Cette règle est stupide et n’est d’ailleurs applicable nulle part ailleurs. Je ne voudrais pas que les Ultramarins soient les seuls à pâtir de ce système.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 2210.
(Le vote à main levée n’ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 136
Nombre de suffrages exprimés 99
Majorité absolue 50
Pour l’adoption 76
Contre 23
(L’amendement no 2210 est adopté ; en conséquence, l’amendement n° 1424 tombe.)
(Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR, EcoS et LIOT.)
Mme la présidente
Je remarque depuis un moment un écart entre les votes à main levée et les scrutins publics.
Je suis saisie de trois amendements, nos 1085, 2132 et 2213, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 2132 et 2213 sont identiques.
La parole est à M. Nicolas Sansu, pour soutenir l’amendement no 1085.
M. Nicolas Sansu
Je défends cet amendement au nom de mon collègue Emmanuel Tjibaou.
Il s’agit d’augmenter le crédit d’impôt accordé aux organismes de logements sociaux (OLS) pour la réhabilitation. En effet, ne pouvant financer les opérations de rénovation, les OLS de Nouvelle-Calédonie sont enclins à privilégier les démolitions et les nouvelles constructions. Cela n’a pas de sens.
Au lieu de fixer le plafond à 50 000 euros par logement, l’amendement vise à l’établir à 2 000 euros par mètre carré, ce qui permettrait d’assurer la rentabilité des opérations de réhabilitation pour les OLS.
Mme la présidente
La parole est à M. Nicolas Metzdorf, pour soutenir l’amendement no 2132.
M. Nicolas Metzdorf
Mon amendement est presque identique au précédent. J’ajoute seulement que le coût des constructions et des rénovations a explosé en Nouvelle-Calédonie, à cause du conflit russo-ukrainien d’abord, puis des émeutes que nous avons connues il y a six mois.
Pour les nouvelles opérations, les plafonds ne correspondent plus du tout à la réalité des prix en Nouvelle-Calédonie. Or le parc social, qui doit accueillir les populations les plus défavorisées dans des conditions décentes, a vieilli. Il est temps de le rénover, ce qui favoriserait en outre le développement économique en donnant du travail à nos entreprises.
Mme la présidente
La parole est à M. Moerani Frébault, pour soutenir l’amendement no 2213.
M. Moerani Frébault
Les OLS sont soumis à un plafond de 50 000 euros par logement pour les travaux de rénovation. Rigide et inadapté, un tel plafond ne tient compte ni de la nature des travaux ni de la surface des logements concernés.
En Polynésie, nous faisons face à une pénurie alarmante : il nous faut 30 000 logements supplémentaires, dont près de 15 000 logements sociaux. Les OLS sont contraints de privilégier la construction au détriment de la rénovation, faute d’un soutien fiscal suffisant. En effet, les avantages fiscaux actuels ne couvrent que 15 % des coûts de rénovation, ce qui rend les opérations de réhabilitation financièrement intenables.
Afin de remédier à cette incohérence, je vous propose d’augmenter le plafond de l’aide fiscale à 150 000 euros par logement. Ce montant serait davantage en adéquation avec nos réalités économiques, les coûts de construction ne cessant de croître. Une telle mesure permettrait aux OLS de mieux équilibrer leurs plans de financement et d’accélérer la rénovation du parc existant, tout en réduisant la pression en faveur de la construction neuve.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
Monsieur Sansu, vous proposez de substituer au plafond de 50 000 euros applicable à la réduction d’impôt pour rénovation de logements anciens dans les collectivités d’outre-mer un plafond de 2 000 euros par mètre carré. D’une part, la loi de finances pour 2024 a supprimé la condition de localisation géographique qui devait être remplie pour bénéficier de la réduction d’impôt au titre des travaux de rénovation ou de réhabilitation des logements achevés depuis plus de vingt ans. D’autre part, l’adoption de votre amendement reviendrait à augmenter considérablement le plafond en question : pour un logement de 100 mètres carrés, le plafond s’élèverait à 200 000 euros, ce qui représenterait un quadruplement du plafond existant. C’est apparu excessif à la commission des finances, qui a rejeté cet amendement.
Avis défavorable sur l’ensemble.
(L’amendement no 1085, repoussé par le Gouvernement, est adopté ; en conséquence, les amendements identiques nos 2132 et 2213 tombent.)
Mme la présidente
Je suis saisie de quatre amendements identiques, nos 2136, 2217, 2983 et 3019.
La parole est à M. Nicolas Metzdorf, pour soutenir l’amendement no 2136.
M. Nicolas Metzdorf
Il concerne à nouveau les investissements en matière de panneaux photovoltaïques, mais cette fois lorsqu’ils sont destinés aux logements sociaux. Il s’agit donc en quelque sorte d’un amendement de repli par rapport à celui que j’ai défendu tout à l’heure, qui s’appliquait à l’ensemble des logements ultramarins. Il vise à rendre éligible aux dispositifs de défiscalisation l’installation de panneaux photovoltaïques sur les logements sociaux de Nouvelle-Calédonie, afin que le coût de l’électricité, qui y est très élevé, ne grève pas le pouvoir d’achat des populations les plus défavorisées.
Mme la présidente
La parole est à M. Moerani Frébault, pour soutenir l’amendement no 2217.
M. Moerani Frébault
En adoptant cet amendement, nous encouragerions l’intégration des énergies renouvelables dans les logements sociaux, au bénéfice des locataires et de l’environnement. Il importe de préciser que ce dispositif ne serait pas un doublon par rapport à celui instauré par la loi de finances pour 2024 : il est spécifiquement dédié au secteur du logement social, tel que défini aux articles 199 undecies C et 244 quater X du code général des impôts, et ne concerne pas l’investissement productif visé à l’article 199 undecies B du même code. En votant pour cet amendement, nous ferions un choix clair en faveur de l’avenir de notre territoire et de la transition énergétique.
Mme la présidente
L’amendement no 2983 de M. Jiovanny William est défendu.
La parole est à M. Laurent Mazaury, pour soutenir l’amendement no 3019.
M. Laurent Mazaury
En soutenant l’éligibilité aux dispositifs de défiscalisation de l’installation de panneaux photovoltaïques sur les logements sociaux de nos territoires, nous visons aussi l’objectif d’atteindre 100 % d’électricité renouvelable en 2030 pour l’ensemble des outre-mer. Il n’est pas nécessaire d’insister sur le fait que le logement ultramarin traverse une crise structurelle grave, d’autant plus que les surcoûts de construction et d’entretien des parcs locatifs ultramarins ne sont pas suffisamment pris en compte dans les dispositifs de financement du logement. Dans le contexte financier étriqué que nous connaissons, les bailleurs sociaux sont très souvent contraints de diminuer leurs coûts, y compris en renonçant à équiper les logements en panneaux photovoltaïques. Je précise que cet amendement a été adopté par la commission des finances et qu’il a été élaboré en concertation avec la Fédération des entreprises des outre-mer.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
Comme l’ont souligné les auteurs des amendements, la loi de finances pour 2024 a rendu éligibles les investissements ayant trait aux installations produisant de l’énergie solaire, en vertu de l’article 199 undecies B du code général des impôts, lorsqu’elles sont affectées pour au moins 80 % à l’autoconsommation par l’exploitant.
La commission des finances a adopté ces amendements – l’avis est donc favorable – mais il est vrai que nous risquons de créer un doublon entre les différents systèmes d’aide existant en la matière.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Les textes réglementaires qui définissent le prix de revient des logements sociaux éligibles à ce dispositif d’aide fiscale disposent déjà que le coût des équipements photovoltaïques est pris en compte dans l’assiette éligible pour son montant réel et justifié. De fait, les amendements sont satisfaits.
Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à M. Matthias Renault.
M. Matthias Renault
Le groupe Rassemblement national s’abstiendra lors du vote de ces amendements.
Cela dit, alors que nous finissons d’examiner cette série de dispositions concernant l’outre-mer, nous aimerions disposer d’un bilan d’étape sur le coût budgétaire de ce que nous venons de voter. Nous avons adopté de nombreux amendements qui introduisent des mesures de défiscalisation en outre-mer et je note que nous votons par ailleurs des baisses d’impôts – ce dont je me réjouis. Hier, nous avons ainsi voté la défiscalisation des heures supplémentaires et le rétablissement de la demi-part fiscale pour les veufs et veuves. Cependant, il nous faut rester raisonnables !
M. Ugo Bernalicis
Oh, que c’est convaincant !
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre.
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Vous avez raison de demander combien coûtent ces mesures ; cela dit, l’ordre de grandeur n’est pas du tout le même qu’hier. Le rétablissement de la demi-part représente une dépense de plus de 3 milliards d’euros.
Mme Marie-Christine Dalloz
Oui !
M. Laurent Saint-Martin, ministre
D’ailleurs, je remarque qu’aucune proposition de gage n’a encore été formulée – cela viendra, je n’en doute pas.
Les dispositions dont nous discutons en ce moment sont en revanche des accélérateurs d’investissement, qui doivent notamment servir à la reconstruction de la Nouvelle-Calédonie. Elles sont absolument nécessaires et le Gouvernement les soutient totalement ; en outre, elles coûtent non pas 3 milliards mais plutôt quelques dizaines de millions. Il faut savoir à la fois être raisonnable et responsable lorsqu’on touche aux finances publiques – cela n’a pas été le cas hier avec l’adoption de l’amendement sur la demi-part – et avoir le sens des priorités. (M. David Amiel applaudit.)
M. Nicolas Forissier
Très bien !
(Les amendements identiques nos 2136, 2217, 2983 et 3019 sont adoptés.)
Mme la présidente
La parole est à M. Daniel Labaronne, pour soutenir l’amendement no 3408.
M. Daniel Labaronne
Il vise à opérer une clarification dans le domaine des services à la personne, en distinguant les différentes catégories d’acteurs qui interviennent sur ce marché. Trois types d’intervenants sont concernés : les entreprises qui offrent ce type de services, les mandataires qui servent d’intermédiaire entre un particulier et un salarié, enfin les particuliers employeurs.
Je propose donc la création d’un crédit d’impôt spécifique pour les particuliers employeurs. Cela n’aurait aucune incidence fiscale : c’est une simple clarification qui doit nous permettre d’assurer une meilleure information quant à l’utilisation du crédit d’impôt services à la personne (Cisap).
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
Elle a voté contre cet amendement en vertu d’un argument assez simple : une telle mesure ne coûterait ni plus cher ni moins cher, c’est vrai, mais elle rendrait le dispositif plus compliqué. En effet, les bénéficiaires du Cisap ont souvent recours à plusieurs catégories de prestataires – sociétés ou salariés – pour assurer différents services.
Avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Je loue l’ambition du député Labaronne sur les sujets ayant trait au Cisap, mais, en l’occurrence, à l’heure de la grande simplification, son amendement viendrait plutôt complexifier les choses.
Mme Marie-Christine Dalloz
Eh oui !
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Nous devons faire preuve de vigilance quant à ce type d’initiatives. Avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à Mme Véronique Louwagie.
Mme Véronique Louwagie
Notre collègue Christine Pirès Beaune avait déjà ouvert ce débat l’année passée. Il serait certes judicieux de mieux connaître les différentes catégories d’emplois concernées, mais je ne suis pas du tout favorable à cet amendement qui, loin de simplifier, vient plutôt complexifier. En outre, depuis maintenant un an – il semble que ce soit désormais généralisé –,…
Mme Marie-Christine Dalloz
Oui !
Mme Véronique Louwagie
…les nombreuses personnes qui ont recours à ce dispositif ont l’obligation, avant de finaliser leur déclaration Cesu – chèque emploi service universel –, d’identifier précisément les missions qui ont été remplies.
Ne faites pas cette tête, monsieur Labaronne ! Je remplis moi-même ma déclaration Cesu et je sais ce qu’il en est.
M. Daniel Labaronne
Je ne dis pas le contraire !
Mme Véronique Louwagie
Il faut indiquer à quels services on a eu recours, en s’appuyant sur la liste proposée sur le site. L’information est donc déjà disponible et l’adoption de cet amendement ne ferait qu’apporter de la complexité ; je voterai contre.
Mme la présidente
La parole est à M. Daniel Labaronne.
M. Daniel Labaronne
Mais je suis d’accord ! Nous pouvons désormais savoir quelle utilisation est faite du Cisap, en distinguant les vingt-six activités qui constituent le secteur des services à la personne : c’est une vraie avancée, je ne le nie pas.
Mme Véronique Louwagie
Voilà !
M. Daniel Labaronne
Je propose simplement d’ajouter une information supplémentaire concernant le statut de celui qui a recours à un service à la personne. Je peux retirer mon amendement et le retravailler pour que nous avancions,…
Mme Marie-Christine Dalloz
Très bien !
M. Daniel Labaronne
…mais je crois qu’une clarification est nécessaire s’agissant d’un crédit d’impôt qui coûte tout de même plus de 6 milliards d’euros – parmi les niches fiscales s’adressant aux particuliers, c’est l’une des plus coûteuses. (M. David Amiel, Mme Véronique Louwagie et M. Charles Sitzenstuhl applaudissent.)
(L’amendement no 3408 est retiré.)
Mme la présidente
Je suis saisie de trois amendements, nos 559, 1416 et 1377, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 559 et 1416 sont identiques.
La parole est à M. Nicolas Ray, pour soutenir l’amendement no 559.
M. Nicolas Ray
J’introduis un sujet qui va nous occuper dans les prochaines minutes, puisque plusieurs amendements y ont trait. Il s’agit de transformer en un crédit d’impôt la réduction d’impôt relative aux frais liés à la dépendance et à l’hébergement en Ehpad.
Je fais face à un dilemme dont nous avons parlé en commission des finances avec le rapporteur général : je sais que l’amendement est coûteux, mais le système actuel est marqué par une véritable injustice – il s’agit même d’une double injustice.
En effet, les dépenses relatives au maintien à domicile font l’objet d’un crédit d’impôt, tandis que les frais de séjour en Ehpad sont associés à une réduction d’impôt – vous connaissez la différence. On sait très bien que l’admission dans un établissement pour personnes dépendantes n’est pas un choix et que cela représente des frais très élevés, bien davantage que le maintien à domicile. Or le traitement fiscal n’est pas le même !
En outre, le système produit une autre injustice qui prend la forme d’une inégalité, parmi les résidents d’Ehpad, entre ceux qui sont imposables et ceux qui ne le sont pas : les premiers peuvent réduire leur impôt alors que les autres ne le peuvent évidemment pas.
Le problème est donc réel. Notre collègue Pirès Beaune, qui connaît très bien le sujet, aura d’ailleurs l’occasion de développer ses arguments. Quant à nous, nous avons conscience du coût d’une telle mesure mais nous pensons qu’il faut absolument résoudre cette injustice.
Mme la présidente
La parole est à M. Corentin Le Fur, pour soutenir l’amendement no 1416.
M. Corentin Le Fur
C’est en effet un sujet essentiel : une telle différence de traitement constitue une rupture d’égalité, une injustice que le présent amendement vise à corriger. Je soutiens Mme Pirès Beaune dans son combat ancien et j’espère que nous pourrons avancer, même si je sais que le contexte budgétaire n’est pas simple.
Il s’agit en outre d’une mesure d’équité en faveur du pouvoir d’achat des résidents en Ehpad et de leurs familles, dont le reste à charge est de plus en plus élevé. Je rappelle que près de 600 000 de nos compatriotes sont hébergés en Ehpad : pour beaucoup d’entre eux, il est très compliqué d’assumer ce coût et ils sont nombreux à devoir solliciter leur famille. Nous devons donc traiter ce sujet.
Plus généralement, le modèle de nos Ehpad, qui est à bout de souffle, doit être réévalué. Les pouvoirs publics doivent en faire une priorité : 85 % de nos Ehpad sont en déficit et la situation est encore plus préoccupante dans ma région, en Bretagne, où 63 % des Ehpad sont publics. Nous avons besoin d’une grande loi « autonomie et dépendance ». J’espère que nous l’aurons rapidement.
Mme la présidente
La parole est à M. François Gernigon, pour soutenir l’amendement no 1377.
M. François Gernigon
Je ne voudrais pas paraphraser ce qu’ont dit mes collègues mais la différence de traitement entre les personnes maintenues à domicile et celles qui sont en Ehpad fait naître un réel sentiment d’injustice. Un Ehpad coûte entre 2 000 et 2 500 euros par mois. Les personnes retraitées qui ne perçoivent que 1 000 euros par mois et ne sont pas imposables ne trouvent pas leur intérêt dans le dispositif de la réduction d’impôt. L’instauration d’un crédit d’impôt les soulagerait d’un poids financier considérable. Nous ne pourrons faire l’économie d’une réflexion à ce sujet, ne serait-ce que pour assurer l’équilibre financier du PLF et de la cinquième branche de la sécurité sociale.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
Ce sujet hante les débats de la commission des finances depuis plusieurs années et l’on ne compte plus les rapports qui y ont été consacrés.
La commission a repoussé ces amendements, qui représenteraient une dépense de 880 millions d’euros.
Mme Alma Dufour
C’est toujours mieux que 3 milliards !
M. Charles de Courson, rapporteur général
Certes, mais ce n’est pas rien tout de même.
Mme Christine Arrighi
Supprimez les aides !
M. Charles de Courson, rapporteur général
À titre personnel, je souhaiterais que l’on rouvre le débat lorsque nous en arriverons à l’examen de l’amendement no 871 de Mme Pirès Beaune.
Avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
L’examen de l’amendement de Mme Pirès Beaune nous donnera en effet l’occasion d’évoquer à nouveau ce sujet, à la lumière des conclusions du rapport qu’elle a rendu et qu’elle ne manquera pas de nous exposer.
Cela étant, je suis d’accord avec M. Le Fur, il importe de prendre en compte le reste à charge mais, et M. Gernigon l’a rappelé, il ne faut pas oublier le financement de la cinquième branche, qui doit rester notre priorité. La solution est-elle de transformer la réduction d’impôt en crédit d’impôt, ne serait-ce que temporairement ? C’est la question à laquelle nous devrons répondre, en ayant bien en tête l’effet cliquet d’une telle décision. Si nos débats aboutissent à la conclusion qu’il faut transformer le dispositif, quelle contrepartie prévoyons-nous ? M. Labaronne propose de revoir le Cisap mais prenons garde aux effets indésirables, en particulier le risque d’une recrudescence du travail au noir. N’oublions pas non plus que des prestations sociales ont été prévues pour accompagner les résidents.
Le sujet est complexe car il faut prendre en compte de multiples paramètres mais ce qu’il faut garder à l’esprit, c’est le financement de la cinquième branche. Voulons-nous créer une sorte de rustine fiscale ou acceptons-nous de nous pencher plus sérieusement sur la question afin de la traiter dans sa globalité ? Écoutons Mme Pirès Beaune exposer les conclusions de son rapport et nous présenter son amendement, avant de prendre une décision.
Mme Alma Dufour
On va en reprendre pour dix ans !
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Je vous invite par conséquent à retirer les amendements ; à défaut, mon avis serait défavorable.
Rappels au règlement
Mme la présidente
La parole est à M. Sébastien Chenu, pour un rappel au règlement.
M. Sébastien Chenu
Rappel au règlement sur le fondement de l’article 50 en vertu duquel l’Assemblée se réunit chaque semaine en séance publique le matin, l’après-midi et la soirée du mardi, l’après-midi et la soirée du mercredi ainsi que le matin, l’après-midi et la soirée du jeudi.
Or dans une tentative de sabotage et de détournement de cet article, les députés du socle majoritaire sont moins de trente : ils sabotent et dénaturent le débat budgétaire en n’y contribuant pas. Je tenais à dénoncer ce comportement inadmissible, qui est une première sous la Ve République. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – Exclamations sur divers bancs.)
M. Nicolas Forissier
Quel cinéma !
Mme la présidente
Je puis vous dire, du haut du perchoir, que la représentation des groupes est aléatoire et varie en fonction des sujets abordés. Je n’aime pas beaucoup qu’il soit insinué que des députés seraient absents sciemment. Vous savez fort bien que des commissions peuvent se réunir au même moment que la séance, sans parler des auditions, des réunions, voire de la présence parfois requise du député dans sa circonscription.
M. Jean-François Coulomme
C’est surtout la Macronie qui semble être en circonscription…
Mme la présidente
La parole est à M. David Amiel, pour un autre rappel au règlement – sur quel fondement ?
M. David Amiel
Rappel au règlement sur le fondement de l’article 100, pour la bonne tenue de nos débats.
En accord avec la décision prise en conférence des présidents, nous souhaitons que les débats accélèrent afin d’examiner l’ensemble du texte. Or le Rassemblement national privilégie les rappels au règlement d’obstruction. (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
Mme la présidente
Il ne tient qu’à vous d’accélérer, chers collègues, puisque nous en sommes à une minute de temps de défense par amendement. On peut difficilement faire moins mais il reste en effet un nombre important d’amendements à examiner.
La parole est à M. Arnaud Le Gall, pour un rappel au règlement.
M. Arnaud Le Gall
Je ne comprends pas le sens du rappel au règlement du RN. Ils ont raison sur un point, le Gouvernement sabote les débats, mais les députés du groupe EPR n’ont pas besoin d’être là puisque ceux du RN votent toutes les mesures proposées par le Gouvernement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. – Mme Christine Arrighi applaudit également. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
M. Hervé de Lépinau
La bonne blague !
Mme la présidente
Ce n’était pas un rappel au règlement !
La parole est à Mme Véronique Louwagie, toujours pour un rappel au règlement – sur quel fondement ?
Mme Véronique Louwagie
Rappel au règlement sur le fondement de l’article 58.
Le rappel au règlement de M. Chenu m’a profondément choquée car les députés ont la liberté d’agir comme ils l’entendent. Tous les groupes sont représentés, rares sont les amendements qui ne sont pas défendus – en tout cas, ils sont beaucoup moins nombreux que les années précédentes. Son propos était donc inutile. (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR. – M. Nicolas Forissier applaudit également. – Vives protestations sur les bancs du groupe RN.)
Mme Liliana Tanguy
Où est-elle, Marine Le Pen ?
M. Jean-Philippe Tanguy
Elle sait être là sans être là. Vous, vous n’êtes pas là même quand vous êtes là ! (Exclamations sur les bancs du groupe EPR. – Divers échanges se poursuivent de bancs à bancs.)
Mme la présidente
L’image qui est donnée de l’Assemblée, mes chers collègues, n’est pas très glorieuse. Je suspends la séance pour une minute.
(La séance, suspendue quelques instants, est immédiatement reprise.)
Après l’article 3 (suite)
Mme la présidente
Reprenons la discussion dans le calme.
La parole est à M. Mathieu Lefèvre.
M. Mathieu Lefèvre
Il s’agit en effet d’un sujet important – le financement de la dépendance dans notre pays –, qui mériterait un débat serein.
Je suis en désaccord avec M. Le Fur : il ne s’agit pas d’une rupture d’égalité sinon toutes les réductions d’impôt seraient inégales et injustes. La fiscalité ne doit pas être le seul angle d’attaque et le sujet doit être abordé dans sa globalité, ce que nous confirme la lecture du rapport de Mme Pirès Beaune. Cela n’empêche pas d’envisager des solutions transitoires, comme l’a suggéré le ministre, pour répondre à des situations délicates, mais en aucun cas l’instauration d’un crédit d’impôt ne pourrait garantir une baisse des prix ou une amélioration de l’accueil des personnes. Nous devons réfléchir à des mesures sur le long terme et je ne vois que deux moyens de réussir, même s’ils seront compliqués à appliquer : imposer une assurance privée dès le plus jeune âge pour financer la dépendance et prévoir une réserve héréditaire sur certains biens, dans le même objectif. Tant que nous n’aurons pas accepté d’en venir à ces dispositifs, nous continuerons à traiter le sujet par le petit bout de la lorgnette. C’est ce que nous ferions en adoptant ces amendements, que le ministre a eu raison de qualifier de rustine fiscale, qui plus est coûteuse puisque la dépense s’élèverait à 1 milliard d’euros.
Mme la présidente
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz.
Mme Marie-Christine Dalloz
Cela fait des années que nous entendons parler d’une rupture d’égalité en la matière. Ce n’est pas du tout la même chose de vieillir chez soi ou dans un Ehpad, personne ne le nie, mais tout le monde semble oublier les nombreux dispositifs qui ont été prévus pour accompagner les résidents d’Ehpad. L’allocation personnalisée d’autonomie comprend des forfaits permettant de financer l’hébergement et les soins. Si l’on veut comparer les situations, il faut être plus précis et ne pas s’arrêter à la simple fiscalité.
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Absolument.
Mme Marie-Christine Dalloz
Je suis d’accord, nous ne pouvons faire l’économie d’un travail approfondi sur le sujet mais nous devons prendre en considération tous les paramètres.
En revanche, je ne partage pas l’avis de M. Lefèvre sur une éventuelle assurance. Nous devrons trouver des solutions, bien sûr, mais dans le respect du principe de solidarité à l’égard des personnes âgées, à l’image de l’allocation personnalisée d’autonomie.
Je suis défavorable à ces amendements.
Mme la présidente
La parole est à Mme Christine Pirès Beaune.
Mme Christine Pirès Beaune
J’invite mes collègues à retirer leurs amendements, comme je l’ai fait en commission des finances, et à se rallier à l’amendement no 871, qui prévoit le même dispositif, en le limitant à 2025 et 2026.
Je l’ai écrit dans mon rapport : cette mesure ne doit pas être pérenne. En revanche, une mesure d’aide universelle à l’hébergement devrait l’être – ce qui pose problème, ce n’est pas le financement du soin, c’est celui l’hébergement.
Nous voterons contre les amendements s’ils ne sont pas retirés.
Mme la présidente
La parole est à M. Corentin Le Fur.
M. Corentin Le Fur
Je retire d’autant plus volontiers cet amendement que j’en ai déposé un autre, identique à celui de Mme Pirès Beaune.
(Les amendements identiques nos 559 et 1416 sont retirés.)
(L’amendement no 1377 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La suite de l’examen du projet de loi de finances est renvoyée à la prochaine séance.
3. Ordre du jour de la prochaine séance
Mme la présidente
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Suite de la discussion de la première partie du projet de loi de finances pour 2025.
La séance est levée.
(La séance est levée à treize heures.)
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra