XVIIe législature
Session ordinaire de 2024-2025

Première séance du mardi 20 mai 2025

Sommaire détaillé
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Première séance du mardi 20 mai 2025
Avertissement: version provisoire établie à 17:05

Présidence de Mme Yaël Braun-Pivet

Mme la présidente

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    La séance est ouverte.

    (La séance est ouverte à quinze heures.)

    1. Souhaits de bienvenue à une délégation étrangère

    Mme la présidente

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    Je suis heureuse de souhaiter en votre nom la bienvenue à une délégation de la Chambre des députés du grand-duché de Luxembourg, conduite par son président, M. Claude Wiseler. (Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement se lèvent et applaudissent.)

    2. Questions au gouvernement

    Mme la présidente

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    L’ordre du jour appelle les questions au gouvernement.

    Construction d’une prison en Guyane

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Yoann Gillet.

    M. Yoann Gillet

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    Monsieur le ministre de la justice, il y a encore quelques mois, vous étiez ministre de l’intérieur. Aux responsabilités place Beauvau, vous avez habitué les Français à un excès de communication visant à cacher vos échecs. Ils se souviennent de vos opérations Place nette, qui n’avaient de XXL que leur couverture médiatique : un petit tour dans les quartiers difficiles, entouré de caméras, et puis s’en va. Les trafiquants continuent ensuite à vivre paisiblement, quand les habitants de ces quartiers, eux, sont toujours dans l’angoisse et dans la peur, encore aujourd’hui.
    Les habitants de Nîmes, commune de ma circonscription, se souviennent très bien de vos coups de com, tout comme de l’annonce d’un nouveau commissariat dans le quartier de Pissevin, qui non seulement n’était qu’un bureau, mais qui, surtout, était le déménagement du bureau de police du quartier voisin. Ils se souviennent aussi qu’à l’avant-veille de son inauguration, à laquelle vous deviez assister, ce bureau de police a été incendié.
    Aujourd’hui place Vendôme, en tant que garde des sceaux, je constate que vous utilisez les mêmes recettes : communication à outrance et faits travestis à votre convenance. Avant-hier, en déplacement en Guyane, territoire gangrené par les trafics et l’hyperviolence, où les maux de la société sont multipliés par dix, vous avez annoncé « la construction d’une prison de haute sécurité ».
    Vous devriez avoir honte ! Dès 2017, dans l’accord de Guyane, il a été pris acte du projet de construction d’une nouvelle prison, nécessaire tant celle de Remire-Montjoly est surpeuplée. Le terrain a été identifié en 2018, les marchés publics pour sa construction ont été publiés en 2020 et les 500 places sont prévues depuis le début. Mais en maniant habilement le verbe, vous faites croire que vous êtes à l’origine du projet alors que vous n’êtes chargé du milieu carcéral que depuis quelques mois.
    À l’intérieur ou à Beauvau, les Français n’attendent pas du gouvernement de la communication politicienne ; ils attendent des résultats. Hier, ils attendaient de vous que vous les protégiez, aujourd’hui, ils attendent de vous que la justice soit ferme et intransigeante envers ceux qui leur pourrissent la vie au quotidien.
    Quand cesserez-vous de faire de la communication et de mentir par omission ? Quand vous mettrez-vous enfin au travail ? (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre d’État, garde des sceaux, ministre de la justice.

    M. Gérald Darmanin, ministre d’État, garde des sceaux, ministre de la justice

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    En vous entendant parler de Nîmes, je pensais que vous vouliez remercier pour les 100 effectifs supplémentaires dont votre circonscription a été dotée grâce à la majorité parlementaire –⁠ vous, vous n’avez pas voté les budgets de la nation. (Exclamations sur les bancs du groupe RN. –⁠ Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et DR ainsi que sur plusieurs bancs du groupe Dem.)
    En ce qui concerne la justice, je propose, monsieur le député, que vous commenciez par la respecter : il convient de respecter toutes les décisions de justice, quelle qu’en soit la fermeté… (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et DR ainsi que sur plusieurs bancs du groupe Dem.)
     
    Le besoin d’autorité et de justice est présent en Guyane comme partout ailleurs sur le territoire national. C’est vous qui ne connaissez pas le dossier guyanais. Je me suis rendu à plusieurs reprises sur le site de la prison dont la construction a été décidée en 2017 : il n’y a toujours pas de permis de construire, il n’y avait pas de budgétisation. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.) C’est grâce au premier ministre que les 400 millions d’euros pour la cité judiciaire ont été inscrits au budget cette année –⁠ ils n’étaient pas prévus dans la loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, évoquée dès 2017 par le gouvernement Cazeneuve. L’autorisation de travaux a été signée aujourd’hui et le permis de construire le sera demain. Les travaux de terrassement débuteront dès le mois de juillet.
    En effet, je concrétise des annonces faites il y a très longtemps mais jamais budgétisées, jamais organisées. (M. Bruno Bilde s’exclame.)

    M. Nicolas Meizonnet

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    C’est vous qui étiez au pouvoir ! Qu’avez-vous fait ?

    M. Alexandre Dufosset

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    Quel aveu !

    M. Gérald Darmanin, ministre d’État

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    En effet, une modification est intervenue : un quartier de haute sécurité de soixante places sera créé au sein de la future prison de Saint-Laurent-du-Maroni, qui comprendra 500 places –⁠ vous vous êtes prononcés en faveur du projet de loi visant à sortir la France du narcotrafic, dont vous avez salué le courage. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.) Je constate que vous avez du mal à reconnaître publiquement que le gouvernement fait des choses efficaces pour la nation. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR.)

    Ligne Polt

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Christophe Proença.

    M. Christophe Proença

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    Monsieur le ministre des transports, quand je monte dans le train Intercités pour rentrer dans ma circonscription, j’ai souvent l’impression de tourner une scène de Retour vers le futur. L’aventure commence à la gare d’Austerlitz –⁠ en travaux depuis des années –, et elle se poursuit dans une rame Corail, mise en service en 1975 –⁠ cela fait cinquante ans, un demi-siècle ! Il ne manque plus que Françoise Sagan dans le compartiment, se rendant dans le Lot, pour une immersion totale ! (Applaudissements et sourires sur les bancs du groupe SOC.) La ligne Paris-Orléans-Limoges-Toulouse (Polt), qui est un chef-d’œuvre, est devenue un chef-d’œuvre d’abandon républicain !
    On y circule plus lentement qu’il y a cinquante ans –⁠ il me faut quarante-cinq minutes de plus que mon prédécesseur, Martin Malvy, pour gagner Paris. Les trains s’arrêtent de plus en plus tôt –⁠ à Limoges ou à Brive – et les suppressions et retards sont le lot quotidien des 5 millions de concitoyens desservis par la ligne. Vous me direz que des travaux ont bien lieu –⁠ c’est vrai –, que des milliards ont été promis –⁠ ils sont dépensés –, et que des rames Oxygène sont annoncées –⁠ elles le sont depuis 2019, nous les attendons toujours !
    Les Lotois sont résilients, mais ils s’épuisent. Il n’y a pas un seul député des circonscriptions desservies par la ligne qui n’ait déjà posé la question : mais que faites-vous ? Chaque fois, on nous promet que cette fois, c’est la bonne. Pourtant, la réalité, c’est que des territoires entiers comme le Lot sont relégués. Nous habitons la Terre du Milieu, mais c’est la France ! Nous avons droit comme Lille, Marseille, Strasbourg ou Rennes à des dessertes rapides et modernes.
    Le 15 avril, nous étions des centaines d’élus et d’usagers à prendre le train de la colère pour monter à Paris, comme on dit chez nous, pour vous voir. Vous n’avez même pas cru bon de nous recevoir. Sortirons-nous d’Un jour sans fin où les problèmes perdurent chaque matin et les promesses ministérielles s’envolent pendant que les ministres se succèdent ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs des groupes EcoS et GDR –⁠ Mme Ségolène Amiot applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre chargé des transports.

    M. Philippe Tabarot, ministre chargé des transports

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    Il est vrai que depuis longtemps, les trains d’équilibre du territoire reliant Paris à Clermont-Ferrand et Orléans et Limoges à Toulouse connaissent bien des difficultés. Celles-ci résultent d’un sous-investissement chronique dans l’entretien des réseaux ferroviaires au cours des dernières décennies –⁠ vous avez été au pouvoir avec vos amis il y a quelques années –, dont nous héritons aujourd’hui. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe DR.)
    Face à cette situation, l’État s’est engagé de manière résolue dans la régénération et la modernisation du réseau. Pas moins de 1,9 milliard d’euros ont été investis dans la ligne Polt et 900 millions dans la ligne Paris-Clermont. Je l’ai rappelé à Clermont-Ferrand le 11 avril, seize nouvelles rames Oxygène ont été commandées, pour un montant de 465 millions. Elles seront mises en circulation dans moins de vingt mois. (Mêmes mouvements.)
    Parce qu’elles en ont besoin, les lignes Polt et Paris-Clermont sont celles qui bénéficient des plus gros investissements. Je peux vous garantir –⁠ les usagers le savent –, qu’elles font l’objet d’un suivi particulier de ma part. J’ai rencontré à plusieurs reprises les membres du groupe du travail parlementaire sur la ligne Intercités Paris-Clermont animé par la questeure Christine Pirès Beaune. J’ai rencontré les élus mobilisés en faveur de la ligne Polt, dont le député Nicolas Forissier ainsi que les sénateurs Rémy Pointereau et Patrice Joly. Je suis en contact avec les associations d’usagers et les élus qui cherchent à faire avancer les choses. Enfin, comme prévu, je me rendrai prochainement à Limoges.
    Soyez assuré que les services de mon ministère sont mobilisés. Je comprends –⁠ je partage – l’exaspération des usagers réguliers de ces lignes face à la mauvaise qualité du service. Je le redis ici devant vous : l’État agit chaque jour pour y répondre. Je serai toujours aux côtés de ceux qui cherchent à améliorer le quotidien des usagers, plutôt que de ceux qui cherchent à instrumentaliser à des fins politiciennes cette situation qui n’a que trop duré. (Exclamations sur les bancs du groupe SOC. –⁠ Applaudissements sur les bancs du groupe DR. –⁠ M. Sylvain Maillard applaudit également.)

    M. Stéphane Delautrette

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    Cette réponse est honteuse !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Christophe Proença.

    M. Christophe Proença

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    Les Lotois ont besoin d’améliorations concrètes. Prenez la Polt et venez nous rendre visite –⁠ je suis prêt à vous accompagner, le Lot le mérite ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)

    Conflit israélo-palestinien

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Nicolas Turquois.

    M. Nicolas Turquois

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    « Violence aveugle », « un mouroir, pour ne pas dire un cimetière » : ce sont les mots que vous avez choisis, monsieur le ministre de l’Europe et des affaires étrangères, pour décrire la situation à Gaza. Notre groupe y souscrit. « Désespérant », « scandaleux », « violation du droit international », « déplacement forcé permanent » des civils : ce sont les mots utilisés dans la déclaration conjointe des dirigeants de la France, du Royaume-Uni et du Canada sur la situation à Gaza et en Cisjordanie.
    L’histoire jugera, elle jugera sévèrement ceux qui n’ont rien dit. (Exclamations et « Enfin ! » et « Vous ! » sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP. –⁠ Mme Sarah Legrain applaudit ironiquement.)
    Le devoir nous impose de dire ce qui se passe sous nos yeux : le massacre de tout un peuple.

    M. Jean-Paul Lecoq

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    Après dix-huit mois, cela s’appelle de la complicité !

    M. Nicolas Turquois

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    Benyamin Netanyahou veut prendre le contrôle de tout le territoire de Gaza et pourrait demain vouloir l’expansion des colonies en Cisjordanie. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Dans un cynisme et une ignominie qui dépassent toutes les limites, il a récemment déclaré qu’Israël devait empêcher une famine « pour des raisons diplomatiques ». La pression internationale a permis d’entrouvrir la porte à la reprise d’un accès humanitaire ; continuons d’intensifier la pression sur le gouvernement israélien pour que cesse ce plan macabre.

    M. Julien Odoul

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    Commencez par libérer Boualem Sansal !

    M. Nicolas Turquois

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    Le 7 octobre était une horreur absolue –⁠ tous, nous condamnons le Hamas. Mais ce qui se passe maintenant à Gaza n’a plus rien à voir avec ces événements. Le droit de se défendre ne doit jamais devenir un droit de se venger. (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et SOC et sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Julien Odoul

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    Quelle honte !

    M. Nicolas Turquois

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    Il y va de l’honneur de la France et de l’Europe. Nous devons mettre fin à cette tragédie.

    M. Julien Odoul

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    Quelle horreur !

    M. Nicolas Turquois

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    Entendez-vous accélérer le processus de reconnaissance de la Palestine ? Plus globalement, quelle stratégie diplomatique la France mènera-t-elle avec ses partenaires ? (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et SOC ainsi que sur quelques bancs du groupe EcoS.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

    M. Jean-Noël Barrot, ministre de l’Europe et des affaires étrangères

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    Oui, la violence aveugle et le blocage de l’aide humanitaire ont fait de Gaza un mouroir. C’est la famine que l’on voit sur les corps décharnés des enfants à Gaza. C’est la terreur que l’on voit dans les yeux désespérés des femmes, en particulier des mères de famille. Oui, vous l’avez dit, le Hamas porte une responsabilité immense dans cette situation. Il doit libérer ses otages, il doit être désarmé, ses dirigeants doivent quitter Gaza. Il ne peut jouer aucun rôle dans l’administration de la Palestine à l’avenir.
    Oui, le peuple juif –⁠ le peuple d’Israël – a été frappé dans sa chair au cours du pire massacre antisémite de notre histoire depuis la Shoah. C’est un traumatisme très profond et très violent qu’il est interdit de relativiser ou de sous-estimer. Mais ce n’est pas faire offense au peuple d’Israël que de dire qu’aujourd’hui, le gouvernement israélien hypothèque la sécurité d’Israël. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe EPR et sur quelques bancs des groupes DR et Dem.)
    On ne peut pas construire la paix et la stabilité sur l’injustice et la violence. On les construit sur le respect du droit, de la dignité de la personne humaine et sur le dialogue. C’est ce que la France dit depuis longtemps. Hier, le Canada et le Royaume-Uni –⁠ vous les avez cités – lui ont emboîté le pas. L’objectif est clair : créer les conditions d’une solution politique, celle qui repose sur deux États vivant côte à côte en paix et en sécurité. Pour y parvenir, nous sommes déterminés à reconnaître l’État de Palestine, de manière à créer un mouvement permettant son existence même. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur quelques bancs du groupe EPR.)

    Mme Ayda Hadizadeh

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    Bravo ! Enfin !

    Utilisation de l’acétamipride

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Delphine Batho.

    Mme Delphine Batho

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    Monsieur le premier ministre, votre ministre de l’agriculture veut organiser le retour du poison des néonicotinoïdes en France, en autorisant notamment un toxique qui se nomme l’acétamipride. (Exclamations sur les bancs des groupes RN, DR et UDR.)

    Mme Anne-Laure Blin

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    Ah, le retour de la décroissance !

    Mme Delphine Batho

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    Au sujet de ce néonicotinoïde, votre ministre de l’écologie déclare : « Ce produit tue les abeilles et les pollinisateurs. (« C’est faux ! » sur plusieurs bancs des groupes RN et DR.)

    M. Pierre Cordier

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    Elle n’y connaît rien !

    Mme Delphine Batho

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    Il est soupçonné d’avoir un effet perturbateur endocrinien et d’être un neurotoxique du développement. Il peut se retrouver dans l’eau potable. C’est donc évidemment un sujet de santé qui n’est pas à prendre à la légère. »

    Mme Émilie Bonnivard

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    Allez vendre des cerises et des noisettes !

    Mme Delphine Batho

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    Voilà ce qu’affirme votre ministre de l’écologie et elle dit vrai. L’acétamipride tue les pollinisateurs et les oiseaux. C’est un neurotoxique qui franchit la barrière placentaire et que l’on retrouve dans le liquide céphalo-rachidien d’enfants : il atteint donc le cerveau. Confirmez-vous devant la représentation nationale que votre gouvernement est favorable au retour de ce poison, en toute connaissance de cause ? (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS et SOC ainsi que sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.) Êtes-vous prêt à le dire, droit dans les yeux,…

    M. Ian Boucard

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    Oui !

    Mme Delphine Batho

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    …aux apicultrices et aux apiculteurs, aux agricultrices et aux agriculteurs des filières dont les rendements baissent faute de pollinisateurs, alors qu’on constate déjà un effondrement de 80 % des populations d’insectes ? (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS et SOC ainsi que sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP et GDR.)

    Mme Anne-Laure Blin

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    C’est vous qui faites couler nos filières ! Cette molécule n’est interdite qu’en France !

    Mme Delphine Batho

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    Êtes-vous prêt à le dire droit dans les yeux aux femmes enceintes et aux parents dont les enfants sont atteints de troubles du neurodéveloppement ? (Mêmes mouvements.) La France a demandé à l’Union européenne d’interdire l’acétamipride, preuves scientifiques à l’appui. Pensez-vous vraiment, dans le contexte géopolitique actuel, alors que se lève partout le vent des forces obscurantistes, que c’est le moment pour la France d’abandonner la bataille des Lumières, de la santé et de la science ? (Les députés du groupe EcoS se lèvent et applaudissent, rejoints par quelques députés des groupes LFI-NFP et SOC.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.

    Mme Annie Genevard, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire

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    Par où commencer, après une question aussi véhémente et caricaturale ?

    M. Jérôme Guedj

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    Non, aussi précise !

    Mme Annie Genevard, ministre

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    Le texte auquel vous faites allusion est d’initiative sénatoriale. Je veux rendre hommage aux sénateurs qui ont souhaité être la voix des agriculteurs…

    M. Jean-Claude Raux

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    D’une partie des agriculteurs !

    Mme Annie Genevard, ministre

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    …qui veulent voir lever toutes les entraves qui pèsent sur l’exercice de leur métier (Applaudissements sur les bancs des groupes RN, EPR, DR, Dem, HOR et UDR)  : l’accès à l’eau et à des bâtiments d’élevage dignes de ce nom, la pacification des relations avec l’Office français de la biodiversité, l’accès à de nouveaux moyens de protection des cultures, sans lesquels il n’y a pas de production…

    M. Jean-Claude Raux

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    Ce n’est pas vrai !

    Mme Annie Genevard, ministre

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    …et sans lesquels il n’y a pas de souveraineté alimentaire possible. (Mêmes mouvements.)

    Mme Annie Genevard, ministre

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    Par ailleurs, il est toujours préjudiciable, en tant que parlementaire, lorsqu’on n’est ni spécialiste de la question ni scientifique –⁠ c’est notre cas à toutes deux – de décréter à la place des scientifiques ce qui est bon et ce qui est mauvais. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN. –⁠ Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SOC.)
    Pour ma part, je préfère me fier aux organismes qui ont autorité pour le faire (Mme Sophia Chikirou s’exclame vivement. –⁠ Vives protestations sur les bancs des groupes RN, DR et EPR), notamment à l’Agence européenne de sécurité des aliments –⁠ l’équivalent européen de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail – qui a décrété accessible le recours à cette substance, dont je rappelle qu’elle est autorisée dans vingt-six des vingt-sept pays de l’Union européenne. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN, EPR, DR, Dem, HOR et UDR.)
    Cette surtransposition a été décidée en son temps par des parlementaires qui, je dois le dire, ne disposaient pas de l’autorité scientifique pour le faire. Cette question sera débattue à partir de la semaine prochaine en séance. Les arguments se déploieront et j’espère que vous n’opposerez pas une obstruction stérile à un texte dont l’examen est très attendu. (Exclamations sur les bancs du groupe EcoS. –⁠ Applaudissements sur les bancs des groupes RN, EPR, DR, Dem, HOR et UDR.)

    Rodéos urbains

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Félicie Gérard.

    Mme Félicie Gérard

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    Vendredi dernier, un gendarme a été percuté volontairement par un motard. Il y a dix jours, c’était un sapeur-pompier qui était gravement blessé par un jeune délinquant lors d’un rodéo urbain. Ces attaques inadmissibles sur nos forces de l’ordre et sur nos pompiers sont loin d’être des cas isolés. Depuis des années, les rodéos urbains pourrissent le quotidien des citoyens et mettent en danger la vie de nos compatriotes.
    L’ensemble du territoire national est touché par ce phénomène et certains habitants le subissent chaque jour. C’était notamment le cas, il y a moins de quinze jours, à Lys-lez-Lannoy dans ma circonscription, où un rassemblement de plus de 200 véhicules, pour la plupart modifiés et sans plaque d’immatriculation, est venu troubler l’ordre public durant de nombreuses heures. Ceux qui pratiquent les rodéos urbains défient l’autorité de l’État ; ils ne respectent ni la loi ni l’ordre.
    La loi de 2018 a constitué un premier pas dans le renforcement de l’arsenal législatif, mais les forces de l’ordre et les maires, en première ligne, se sentent toujours aussi impuissants et démunis pour lutter contre les rodéos. Ces nouveaux drames nous démontrent que les moyens de répression de ces délits ne sont clairement pas à la hauteur.
    Pourtant, des solutions existent pour renforcer l’action de nos forces de l’ordre et de la justice face à ce fléau. L’autorisation de prise en chasse, la saisie et la destruction systématique des véhicules dès la première infraction, ou encore le renforcement des pouvoirs de sanction de nos forces de l’ordre face à ce phénomène sont des solutions trop peu exploitées.
    Monsieur le ministre de l’intérieur, ma question est simple : comment le gouvernement compte-t-il mettre fin aux rodéos urbains ? (Applaudissements sur les bancs du groupe HOR et sur quelques bancs du groupe DR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur.

    M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur

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    Les services de police se sont particulièrement mobilisés, grâce à un dispositif de lutte contre les rodéos urbains régulièrement déployé. Celui-ci comprend des opérations de voie publique, des opérations ciblées avec l’appui des unités de sécurité routière et de motos banalisées pour faciliter les flagrants délits, des opérations judiciaires ainsi que des opérations de prévention. De plus, le ministère de l’intérieur étudie les possibilités d’appliquer plus largement la sanction qui consiste à confisquer les automobiles et les deux-roues –⁠ piste que vous avez vous-même évoquée.
    En 2024, 44 155 opérations de lutte ont été menées contre ces rodéos et ont donné lieu à 3 919 interpellations, 43 857 verbalisations ainsi qu’à la saisie de 1 320 deux-roues et 1 583 automobiles. Le mois dernier, 4 295 opérations ont été menées et ont donné lieu à 637 interpellations et à la saisie immédiate de 209 deux-roues et 154 automobiles. Voilà pour le bilan.
    Quant à la récente évolution, une instruction commune, transmise à la direction générale de la police nationale et à la gendarmerie, modifie les règles d’intervention et d’interception en autorisant les poursuites. La préfecture de police de Paris y procédait déjà, contrairement aux autres services de sécurité. Désormais, tous pourront le faire, en respectant bien sûr certaines conditions de sécurité. Cette instruction a été communiquée aujourd’hui. (MM. Fabrice Brun et Pierre Cordier applaudissent.)

    Situation à Gaza

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Mathilde Panot.

    Mme Mathilde Panot

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    Gaza affamée, Gaza martyrisée, Gaza décimée et maintenant, Gaza annexée ! (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)

    M. Pierre Cordier

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    Le rythme du général de Gaulle ne vous va guère, madame !

    Mme Mathilde Panot

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    Vingt mois de génocide, 53 000 Palestiniens, 20 000 enfants, des centaines de journalistes et de soignants, tous méthodiquement assassinés. Dimanche, Netanyahu a lancé l’offensive dans la bande de Gaza.

    M. Julien Odoul

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    À l’est ou à l’ouest du Jourdain ?

    Mme Mathilde Panot

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    Son but : déporter le peuple palestinien. De cet hémicycle, nous disons à Netanyahu et à ses soutiens inconditionnels : Gaza ne sera jamais israélienne ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. –⁠ M. Benjamin Lucas-Lundy applaudit aussi.) Des Palestiniens transformés en squelettes par une famine utilisée comme arme de guerre, les hôpitaux rasés, l’horreur d’un nettoyage ethnique. Devant le premier génocide de l’histoire de l’humanité filmé en direct, personne ne pourra dire qu’il ne savait pas. (Mêmes mouvements.)

    M. Julien Odoul

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    Quelle honte !

    Mme Mathilde Panot

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    Des voix s’élèvent, de plus en plus nombreuses, mais les mots n’arrêtent pas un génocide. Vous manquez à vos obligations lorsque vous laissez Netanyahu survoler la France, alors qu’il est visé par un mandat d’arrêt international. (Mêmes mouvements.) Vous manquez à vos obligations lorsque vous tardez à convoquer le Conseil de sécurité des Nations unies pour mettre Israël et la communauté internationale face à leurs responsabilités. Vous manquez à vos obligations quand vous n’agissez pas pour suspendre immédiatement l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël. (Mêmes mouvements.) Vous manquez à vos obligations quand vous refusez d’interdire les exportations d’armes.
    Ces obligations sont pourtant les vôtres, au titre de la Convention pour la prévention et la répression du crime du génocide. La France et l’Europe sont responsables. Ne prendre aucune sanction, c’est se rendre complice.

    M. Julien Odoul

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    C’est vous, les complices !

    Mme Mathilde Panot

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    À Gaza, la mort est partout. Elle hantera à jamais la conscience de ceux qui pouvaient agir mais qui, par lâcheté et complicité, n’auront rien fait. Monsieur le premier ministre, comptez-vous reconnaître l’État de Palestine lorsqu’il n’y aura plus de Palestiniens ? (Les députés du groupe LFI-NFP se lèvent et applaudissent. –⁠ Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe EcoS. –⁠ Mme Elsa Faucillon applaudit aussi.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le premier ministre, chargé de la planification écologique et énergétique.

    M. François Bayrou, premier ministre, chargé de la planification écologique et énergétique

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    Vous avez décrit avec exactitude, comme l’ont fait il y a un instant le ministre des affaires étrangères et le député qui lui avait posé la question, la situation créée à Gaza : elle est humainement et humanitairement inacceptable. Le blocage de l’aide alimentaire et l’impossibilité d’organiser les secours et l’amélioration des conditions sanitaires sont des faits qu’en aucune manière, la République française ne peut accepter. À cet égard, les orientations et les décisions annoncées par le Président de la République sont dans un état extrêmement avancé.

    Mme Sophia Chikirou

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    Lesquelles ?

    M. François Bayrou, premier ministre

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    Pour la première fois, trois États majeurs, la France et le Royaume-Uni –⁠ qui ont joué un rôle très important dans cette région – ainsi que le Canada ont décidé ensemble qu’ils s’opposeraient à la situation actuelle et qu’ils reconnaîtraient ensemble l’État de Palestine. (« Quand ? » sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme Sophia Chikirou

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    Il y a urgence !

    M. François Bayrou, premier ministre

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    Ce mouvement qui a été lancé ne s’arrêtera pas. La condamnation et la multiplication des avertissements sont absolument claires dans leur destination…

    M. Jean-Paul Lecoq

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    Elles n’ont aucun effet !

    M. François Bayrou, premier ministre

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    …et s’imposent à nous. Néanmoins, nous n’oublierons jamais –⁠ permettez-moi de vous le dire – que cette explosion et les drames qu’elle a causés ont été produits par un détonateur, déclenché par le Hamas : le 7 octobre, un pogrom organisé a eu lieu. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP).

    M. Julien Odoul

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    Ils ne le diront jamais, sur les bancs d’en face !

    M. François Bayrou, premier ministre

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    Ce n’est pas en criant qu’on efface ce qui est en train de se passer et ce qui a causé cette explosion !

    Mme Marie Mesmeur

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    Et en se contentant de parler, on l’efface ?

    M. François Bayrou, premier ministre

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    Le gouvernement français tient comme un honneur d’être absolument ferme dans la condamnation et tout à fait déterminé à aller vers la reconnaissance de deux États,…

    Mme Ségolène Amiot

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    Toujours pas d’action concrète !

    M. François Bayrou, premier ministre

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    …tout en n’oubliant jamais ceux qui ont provoqué la situation que nous dénonçons tous ensemble. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes RN, EPR et Dem. –⁠ M. Xavier Breton applaudit également. –⁠ Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme Ségolène Amiot

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    Allez, basta, ça ne sert à rien !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Mathilde Panot.

    Mme Mathilde Panot

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    Aucun crime de guerre ne pourra jamais justifier d’autres crimes, surtout celui de génocide. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Thierry Tesson

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    C’est bien commode !

    Mme Mathilde Panot

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    Aucun ! La France doit cesser d’être complice du génocide palestinien ! Quand agirez-vous ? Quand arrêterez-vous de regarder Gaza mourir ? (Les députés du groupe LFI-NFP se lèvent et applaudissent longuement.)

    M. Julien Odoul

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    Quand c’est pourri, c’est LFI !

    Sommet Choose France

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Eléonore Caroit.

    Mme Eléonore Caroit

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    Depuis 2018, le sommet Choose France,…

    Un député du groupe RN

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    Pipeau !

    Mme Eléonore Caroit

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    …lancé par le Président de la République, trace une trajectoire sans équivoque : celle d’une France tournée vers l’avenir, qui choisit l’ouverture, l’investissement et l’innovation.

    M. Fabien Di Filippo

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    Et les anglicismes !

    Mme Eléonore Caroit

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    L’édition 2025 atteint des records inédits : plus de 40 milliards d’euros annoncés, avec des projets majeurs et 13 000 emplois à la clé. Nous nous en félicitons. Il faudra toutefois s’assurer qu’un dispositif de suivi garantisse la concrétisation de ces investissements. Car pour la sixième année consécutive, la France reste le pays d’Europe qui attire le plus d’investissements étrangers. (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR.)
    Ce n’est pas un hasard, mais le fruit des réformes structurelles majeures engagées depuis 2017, qu’il s’agisse du soutien à la réindustrialisation, de la simplification des démarches pour les entreprises, ou encore de la baisse des impôts de production.
    C’est surtout le résultat d’une stratégie visant à réconcilier compétitivité et souveraineté. Mais nous le savons, l’attractivité est un combat permanent. Nos entreprises, qui le vivent au quotidien, le savent bien. Face aux tensions géopolitiques, à une concurrence internationale accrue et à l’urgence écologique qui menace les chaînes de valeur, l’attractivité de notre pays ne peut reposer uniquement sur des annonces. Nous devons regarder avec lucidité les défis qui subsistent : un coût du travail encore trop élevé, une complexité administrative persistante et une instabilité politique qui peut entamer la confiance des investisseurs.
    Dès lors, quelles sont les priorités du gouvernement pour consolider et renforcer l’attractivité française ? Quelles mesures concrètes de simplification envisagez-vous pour que la France reste durablement une terre d’innovation et d’investissement ? (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et Dem. –⁠ M. Joël Bruneau applaudit également.)

    M. Roland Lescure

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    Bravo !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre délégué chargé du commerce extérieur et des Français de l’étranger.

    M. Laurent Saint-Martin, ministre délégué chargé du commerce extérieur et des Français de l’étranger

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    Je vous remercie pour cette question, qui me permet de rappeler que la France est la première destination des investissements directs étrangers en Europe pour la sixième année consécutive. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et Dem.) Nous l’avons constaté hier lors du sommet  Choose France, où nous avons battu de nombreux records. (Exclamations sur quelques bancs du groupe RN.) Vous l’avez dit, les projets annoncés représentent plus de 40 milliards d’euros d’investissements directs étrangers, soit plus de 13 000 emplois à la clé et plus de 163 000 emplois cumulés depuis la première édition de 2018.
    Je le dis aux nombreux Cassandre de cet hémicycle qui voient la France décliner : notre pays est toujours plus attractif (Protestations sur plusieurs bancs du groupe RN) dans un contexte international complexe, un contexte de guerre tarifaire que ni l’Europe ni la France n’ont souhaité. Il se trouve qu’un nombre croissant d’investisseurs internationaux, y compris américains, le choisissent pour ses nombreuses qualités (Brouhaha) : les réformes de structures engagées depuis 2017, la baisse de la fiscalité, la flexibilisation du droit du travail,…

    Mme la présidente

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    Un peu de silence, chers collègues !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre délégué

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    …les nombreuses lois de simplification, notamment sur l’industrie verte, tout cela a permis à des projets qui n’auraient jamais vu le jour il y a encore dix ans de se développer dans nos territoires.

    M. Sébastien Chenu

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    Vous vivez dans un monde parallèle !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre délégué

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    Et je parle de tous les territoires, puisque les trois quarts des investissements directs étrangers dans l’industrie concernent des villes de moins de 20 000 habitants. La revitalisation des territoires, voilà ce que permettent Choose France et notre politique de l’offre et de l’attractivité.
    Vous me demandez comment prolonger cet effort. Il faut d’abord poursuivre la simplification. Le président de la République s’est engagé hier à porter la voix de la France sur la suppression de la directive CS3D, qui alourdit le quotidien de nos entreprises. Nous devons aussi, et surtout, tenir le cap fiscal et réglementaire pour ne pas casser ce qui marche dans notre pays, devenu enfin plus attractif. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et Dem.)

    Eaux en bouteille

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jérémie Iordanoff.

    M. Jérémie Iordanoff

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    Monsieur le premier ministre, une enquête accablante de Radio France et du Monde a révélé les pratiques de la multinationale Nestlé Waters, qui commercialise de manière trompeuse les eaux Vittel et Perrier sous l’appellation « eau minérale naturelle ». Pire, le rapport de la commission d’enquête sénatoriale publié hier met en lumière l’implication de l’État au plus haut sommet. La présidence de la République savait, au moins depuis 2022, que Nestlé trichait et avait connaissance des contaminations de certains forages. Un rapport de l’agence régionale de santé d’Occitanie a été modifié en décembre 2023 sur ordre de Nestlé Waters avec l’aide du préfet du Gard et l’aval du cabinet de la ministre de la santé. Toute mention de pesticides, PFAS, chlorates, perchlorates, bactéries Escherichia coli et entérocoques intestinaux retrouvés dans l’eau a été censurée. Plutôt que de prendre des mesures immédiates, l’État a cherché à gagner du temps, à masquer les faits et a compromis l’indépendance scientifique de son agence.
    Par ailleurs, les multiples rencontres entre le secrétaire général de l’Élysée et la présidente de Nestlé Waters interrogent. Et quand l’Élysée refuse qu’Alexis Kohler vienne répondre devant la commission d’enquête du Sénat, alors qu’il y est juridiquement tenu par l’ordonnance de 1958, c’est le président de la République, supposé garant des institutions, qui entrave les pouvoirs de contrôle du Parlement. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS et sur quelques bancs du groupe SOC.) Cette affaire vient encore saper la confiance dans nos institutions et dans l’action publique. Ce n’est pas en fermant les yeux que les choses vont s’arranger.
    Quel intérêt prime, celui de tous les Français ou celui de quelques industriels ? Comment est-il possible qu’un directeur d’agence régionale de santé et un préfet aient pu céder aux pressions d’un industriel ? Qui du gouvernement ou de l’Élysée est responsable dans cette affaire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS et sur plusieurs bancs du groupe SOC.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire.

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire

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    Je remercie les membres de la commission d’enquête sénatoriale sur les eaux en bouteille pour leur travail, en particulier son président Laurent Burgoa et son rapporteur Alexandre Ouizille. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOC.) Rappelons que la commission d’enquête a défini trois principaux axes d’amélioration dans son rapport : le premier sur la préservation de la qualité de la ressource en eau et la prise en compte d’éventuels nouveaux risques, le deuxième sur le renforcement des contrôles grâce à une meilleure coordination des services de l’État et le troisième sur la nécessaire clarification de la réglementation s’agissant de la notion de pureté originelle et du niveau de microfiltration autorisé. Mon ministère est mobilisé pour analyser les suites à donner aux vingt-huit recommandations des sénateurs.
    Qu’en est-il des eaux embouteillées du point de vue du droit à la consommation ? Je tiens à dire, pour commencer, qu’il ne s’agit aucunement d’une question de santé publique : il n’y a aucun risque pour la santé des consommateurs. (Exclamations sur les bancs du groupe EcoS.)

    Mme Julie Laernoes

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    Les PFAS, c’est bon pour la santé ?

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée

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    Nous ne sommes pas là face à un risque sanitaire, comparé à ce que nous avons pu connaître dans le passé. L’industriel utilise des processus de filtration de l’eau qui permettent sa consommation. Le sujet est donc la loyauté de l’information présente sur l’étiquette. (Mêmes mouvements.)

    Mme Julie Laernoes

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    Les pesticides sont bons pour la santé, c’est bien connu !

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée

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    Deux questions se posent : la bouteille contient-elle de l’eau minérale naturelle ? Autrement dit, l’eau a-t-elle été rendue potable par traitement ? Soyez assuré que des mesures ont été prises. Le 7 mai, le préfet du Gard a mis en demeure Nestlé de retirer sous deux mois le microfiltre utilisé pour ses eaux minérales naturelles. Les experts considèrent en effet qu’il modifie le microbisme de l’eau.

    M. Jean-Paul Lecoq

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    Pas de réponse !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jérémie Iordanoff.

    M. Jérémie Iordanoff

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    Vous n’avez pas répondu ! Comment est-il possible qu’un industriel demande à récrire un rapport de l’ARS et que le directeur de l’ARS, soutenu par la préfecture et par le cabinet de la ministre de la santé, cède à cet industriel ? Pourquoi la présidente de Nestlé Waters a-t-elle rencontré de multiples fois le secrétaire général de l’Elysée ? Quel est le rôle de ce dernier dans cette affaire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS et sur quelques bancs du groupe SOC.)

    Réforme du transport sanitaire

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Fabrice Brun.

    M. Fabrice Brun

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    « Taxi rural, taxi vital » : tel est le cri d’alerte des artisans taxis ambulanciers. Dans mon département, ils transportent chaque année 100 000 patients ardéchois, soit un habitant sur trois. Toutes les familles sont concernées en Ardèche comme ailleurs. Mais la nouvelle tarification de l’assurance maladie menace la viabilité des courses médicales partout en France.

    M. Jérôme Nury

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    C’est une honte !

    M. Fabrice Brun

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    Une fois de plus, malheureusement, les particularités de la ruralité sont ignorées, qu’il s’agisse de la densité démographique, de la mobilité ou de l’éloignement des CHU. Une fois de plus, le gouvernement passe en force sur la réforme inacceptable, en l’état, du transport sanitaire. (M. Gabriel Amard s’exclame.)

    M. Jean-Paul Lecoq

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    C’est votre gouvernement !

    M. Fabrice Brun

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    Elle va pénaliser l’accès aux soins des patients les plus âgés et les plus fragiles et mettre à genoux des petites entreprises familiales, des hommes et des femmes qui travaillent dur. Dans un contexte de lutte contre les déserts médicaux et de développement des soins ambulatoires, vous ne pouvez pas faire des taxis ambulanciers les boucs émissaires d’une politique de santé dont ils ne sont pas les prescripteurs.

    M. Jean-Paul Lecoq

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    Il est bien le gouvernement avec des alliés comme ça !

    M. Fabrice Brun

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    Dans un monde de plus en plus déshumanisé, vous ne pouvez pas faire de l’ubérisation un projet de société. (M. Laurent Wauquiez applaudit.)
    Monsieur le premier ministre, vous le savez, nous sommes à vos côtés pour lutter contre les abus et les fraudes et réduire les déficits. Nos propositions concrètes sont sur la table –⁠ je pense notamment à la carte vitale biométrique. Mais sur le taxi médical, vous faites fausse route.

    Un député du groupe RN

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    C’est votre gouvernement !

    M. Fabrice Brun

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    Êtes-vous prêt à geler cette nouvelle tarification et à ouvrir une vraie concertation –⁠ j’insiste sur « vraie » – pour écouter enfin les propositions de la profession ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe DR.) Notre groupe, les Français et les malades qui soutiennent leurs taxis ambulanciers vous le demandent ! (Applaudissements sur les bancs du groupe DR. –⁠ M. Paul Molac applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles.

    Mme Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles

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    Le transport médical est un sujet important pour de nombreux patients dont la pathologie nécessite qu’on les transporte, parfois même de manière allongée, qui sont isolés ou qui ne conduisent plus en raison de leur pathologie. Personne, dans cet hémicycle, ne dit le contraire. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.) Il reste que le transport sanitaire représente 6,3 milliards d’euros. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR et Dem.)

    M. Philippe Vigier

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    Très bien !

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    La réforme que vous évoquez permettrait une économie de 150 millions d’euros. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Gabriel Amard

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    C’est faux !

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Elle cherche à mutualiser le transport sanitaire en faisant en sorte, par exemple, qu’un taxi ne revienne pas à vide après avoir transporté un premier patient, qu’un second taxi devra ensuite venir rechercher. Il s’agit d’éviter deux allers et retours. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR et Dem. –⁠ Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP) Voilà ce dont nous parlons concrètement.
    Bien évidemment, les représentants des taxis ont été associés à la réflexion avec la caisse nationale d’assurance maladie (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP), mais ils n’ont pas souhaité poursuivre le travail et ont quitté la discussion. C’est dommage. L’offre de soins de notre pays nécessite d’être examinée pour être pérennisée.

    M. Louis Boyard

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    N’importe quoi !

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    L’important est de répondre à celles et ceux qui en ont besoin. Faire de la prévention, c’est aussi mieux gérer l’offre et éviter que les patients dont la situation n’exige pas un transport sanitaire y aient accès. C’est cela, agir en responsabilité. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, Dem et HOR.)

    M. Philippe Vigier

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    Bravo !

    M. Sébastien Chenu

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    Ne tirez pas sur l’ambulance !

    Un député du groupe RN

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    Et l’AME ?

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Fabrice Brun.

    M. Fabrice Brun

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    Comme vous, nous connaissons les chiffres, mais, je le répète, est-ce aux artisans taxis ambulanciers de porter le chapeau d’une politique de santé publique dont ils ne sont pas les prescripteurs ? Derrière, il y a les malades. Vous n’avez pas répondu sur les spécificités de la ruralité. Une fois de plus, c’est la grande oubliée ! (Applaudissements sur les bancs du groupe DR.)

    Loi de programmation militaire

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Caroline Colombier.

    Mme Caroline Colombier

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    Monsieur le ministre des armées, permettez-moi tout d’abord de rendre hommage au sergent Maxence Roger, décédé en Guyane dans le cadre de l’opération Harpie. Honneur et respect à nos militaires ! (Les députés et les membres du gouvernement se lèvent et applaudissent.)
    Il y a quelques mois, nous votions avec gravité la loi de programmation militaire 2024-2030, actant un effort sans précédent de 400 milliards d’euros pour permettre à nos armées d’être à la hauteur d’un monde redevenu brutal et dangereux. (M. François Cormier-Bouligeon s’exclame.) Depuis, les signaux d’alerte se multiplient : l’inflation rogne la valeur réelle des crédits, les arbitrages budgétaires manquent de clarté, les surcoûts liés aux opérations extérieures sont sous-évalués et le report de charges a doublé en deux ans, atteignant désormais plus de 8 milliards. Les crédits d’équipement sont sous tension dès les premières années d’exécution.
    Par ailleurs, l’écosystème de défense peine à suivre : complexité administrative, délais d’acquisition trop longs, pénurie d’ouvriers qualifiés et absence de visibilité entravent l’investissement et l’anticipation. La base industrielle et technologique de défense est frappée de plein fouet par les politiques ultralibérales inconséquentes des gouvernements qui ont désindustrialisé la France ces dernières années. Cette situation est très inquiétante, d’autant que le Parlement n’a plus accès aux données sur la disponibilité des matériels –⁠ on dissimule à la représentation nationale une situation qui pourrait devenir dramatique.
    Le ministère achète plus qu’il ne peut financer et la soutenabilité de cette trajectoire budgétaire interroge. Dès lors, comment garantirez-vous, de façon durable et transparente, le financement intégral de la LPM à l’horizon 2030 afin que nos industries avancent avec confiance et que nos armées soient réellement prêtes aux confrontations les plus dures ? (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre chargée des comptes publics.

    Mme Amélie de Montchalin, ministre chargée des comptes publics

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    Le gouvernement s’associe à l’hommage que vous avez rendu à ceux et celles qui défendent notre pays.
    En l’absence de M. le ministre des armées, je réponds en son nom, au nom du gouvernement et, je le crois, au nom de la France : nous avons besoin de nous réarmer, non pour faire la guerre, mais parce que cet effort est nécessaire à la paix. C’est la condition de notre dissuasion et de notre souveraineté. Nous nous sommes engagés à respecter totalement la loi de programmation militaire. Nous l’affirmons d’autant plus sereinement et avec d’autant plus de conviction que, depuis 2017, les lois de programmation militaires ont été respectées. Nous avons réinvesti dans nos armées. Leur budget s’élevait à 32 milliards d’euros en 2017 ; il a atteint 50,5 milliards cette année et atteindra 67 milliards en 2030, à moins que nous augmentions cet objectif –⁠ en tout cas, il n’est pas question de le diminuer.

    M. Jean-Michel Jacques

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    Il faut l’augmenter !

    Mme Amélie de Montchalin, ministre

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    Évidemment, nous sommes dans une année difficile, mais il n’y a eu aucun surgel, aucune annulation de crédits et la moitié des crédits mis en réserve, qui concernent notamment les équipements de défense, ont déjà été dégelés pour engager les commandes nous permettant d’accompagner notre base industrielle.
    Je dois vous dire aussi que s’il y a une chose qui a retardé l’écosystème de l’industrie de défense, c’est la censure. (Protestations sur plusieurs bancs des groupes RN, LFI-NFP et GDR.)

    M. Stéphane Peu et Un député du groupe RN

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    C’est la dissolution !

    Mme Amélie de Montchalin, ministre

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    Pendant deux mois, le ministère des armées n’a pas pu engager ses commandes. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.) Je le dis calmement, sans polémique.
    Notre base industrielle et technologique de défense a besoin de deux choses. Premièrement, de commandes, ce qui suppose le respect de la loi de programmation ; deuxièmement, de fonds propres et d’investissements. C’est pourquoi, le 20 mars, Éric Lombard, Sébastien Lecornu et l’ensemble des industriels et des investisseurs se sont réunis. La responsabilité sociale des entreprises me tient à cœur mais elle ne doit pas empêcher d’investir dans notre défense, car notre première responsabilité est de défendre et de protéger la nation.

    M. Pierre Cordier

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    Très bien !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Caroline Colombier.

    Mme Caroline Colombier

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    La réalité corrobore tous les constats faits par Marine Le Pen (« Ah ! » sur quelques bancs des groupes Dem et GDR) et par le Rassemblement national, qui avaient encore une fois raison. Elle seule pourra assurer une trajectoire budgétaire cohérente dès son arrivée au pouvoir. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – Mme Hanane Mansouri applaudit également.)

    Filière automobile française

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Matthieu Bloch.

    M. Matthieu Bloch

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    « Il faut être clair : le marché n’achète pas ce que l’Europe veut que nous vendions. Remplacer la totalité des volumes actuels par de l’électrique, dans les conditions actuelles, nous n’y arriverons pas. » Ce n’est pas moi qui le dis ; c’est Luca de Meo, président de Renault, le 6 mai. Tout comme John Elkann, son homologue de Stellantis, il tire à raison la sonnette d’alarme. Ce n’est plus un débat technique, c’est une question de survie pour la filière automobile française. Un demi-million d’emplois sont en jeu. La filière automobile est le poumon économique de nombreux territoires dont le mien, le pays de Montbéliard. Entendrez-vous cet appel à la raison de nos deux constructeurs nationaux ?
    Voici un exemple frappant : entre 2015 et 2030, le prix d’une Renault Clio aura augmenté de 40 %. Selon Renault, 92 % de cette hausse est liée à l’inflation réglementaire imposée par Bruxelles. Résultat, les véhicules de marque française deviennent inaccessibles pour la majorité des Français. Qui peut s’offrir une Renault 5 à 33 000 euros ? Pas les ouvriers, pas les classes moyennes à qui ces véhicules sont pourtant destinés.
    Face à nous, les constructeurs chinois avancent à grande vitesse. Ils produisent moins cher, innovent plus vite, déploient des batteries interchangeables qui résoudront bientôt les problèmes de charge. Pendant ce temps, vous mettez des sommes astronomiques dans le développement de la filière hydrogène, sans marché, sans réseau de distribution, complètement à contre-courant. Le Japon et la Corée résistent bien mieux à cette terrible concurrence chinoise grâce à leur décision de développer l’hybridation, qui fonctionne mieux ; eux arriveront certainement à exporter leurs véhicules. Et que fait l’Union européenne ? Elle impose le tout-électrique, elle impose des normes intenables ; pire, elle négocie même la baisse des droits de douane sur les véhicules électriques chinois. On marche sur la tête !
    Ma question est simple. Allez-vous enfin écouter nos constructeurs et faire pression sur Mme von der Leyen, votre alliée, afin qu’elle cesse d’aider à mourir notre industrie automobile ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDR et sur quelques bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre chargé de l’industrie et de l’énergie.

    M. Marc Ferracci, ministre chargé de l’industrie et de l’énergie

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    Vous soulignez les difficultés de la filière automobile française. Nous n’avons pas attendu pour les constater et pour aller sur le terrain –⁠ je crois d’ailleurs que nous nous sommes croisés il y a quelques semaines dans votre circonscription, à Allenjoie, dont l’usine réorientera notamment son activité vers la filière hydrogène.
    Ces difficultés sont liées à une concurrence féroce et parfois déloyale –⁠ vous avez cité les constructeurs chinois, qui ont récemment été soumis à des tarifs douaniers accrus car il est apparu que toute leur chaîne de valeur était subventionnée, de l’extraction du lithium destiné aux batteries des véhicules électriques jusqu’au fret maritime. C’est pourquoi nous avons besoin en premier lieu de protection commerciale, et nous sommes prêts à agir en la matière.
    Ni les constructeurs automobiles que vous évoquez ni les équipementiers ne remettent en question l’objectif consistant à ce que les véhicules neufs vendus soient exclusivement électriques à partir de 2035. (Mme Anne-Laure Blin s’exclame.) Vous pouvez le leur demander : MM. de Meo et Elkann se sont exprimés à ce sujet. Les constructeurs ont consenti de lourds investissements pour électrifier leur gamme ; la difficulté qu’ils rencontrent désormais réside dans l’insuffisance de la demande en matière de véhicules électriques.
    Face à ce problème, nous agissons. À l’échelle nationale, nous avons déposé dans le cadre du projet de loi de finances pour 2025 un amendement destiné à accélérer l’électrification des flottes professionnelles. Nous en voyons déjà les premiers résultats, au sujet desquels nous communiquerons bientôt. À l’échelle européenne, des propositions ont été adoptées à l’initiative de la France –⁠ sachez-le, puisque vous nous demandez de faire pression sur la Commission européenne –, dont celle qui consiste à alléger les amendes liées aux émissions de CO2 pour les constructeurs européens. C’est la conséquence des interpellations du gouvernement français, relayées par Benjamin Haddad, Agnès Pannier-Runacher et moi-même.
    Vous le voyez, nous agissons au niveau européen pour offrir des marges de manœuvre à nos constructeurs et pour assumer cette transition absolument nécessaire à notre souveraineté. En effet, électrifier signifie décarboner, s’affranchir de notre très coûteuse dépendance envers les énergies fossiles et par conséquent de notre dépendance envers des pays comme la Russie avec lesquels nous souhaitons moins de relations.

    Promotion de Bernard Hayot au rang de grand officier de la Légion d’honneur

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Émeline K/Bidi.

    Mme Émeline K/Bidi

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    Le 15 mai, Bernard Hayot a été hissé par le président de la République au rang de grand officier de la Légion d’honneur.

    Une députée du groupe LFI-NFP

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    La honte !

    Mme Émeline K/Bidi

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    Bernard Hayot, fondateur de GBH –⁠ le groupe Bernard Hayot –, principal acteur du commerce en outre-mer. Bernard Hayot qui selon les mots du ministre des outre-mer, joue « un rôle d’étouffement de l’économie et du pouvoir d’achat » dans les outre-mer. Celui qui, depuis 2018, refusait de publier ses comptes. Celui dont les bénéfices cumulés atteignaient en 2023 la somme astronomique de près de 900 millions d’euros.
    Qui paie cette belle médaille offerte au fondateur de GBH ? Vous le savez : ce sont les familles d’outre-mer. Cette distinction, c’est la prime à la vie chère. Ce sont nos familles modestes, ce sont les plus fragiles qui paient cette médaille à chaque fois qu’ils passent à la caisse et subissent des prix de 19 à 38 % plus chers que dans l’Hexagone. Le taux de vie chère à La Réunion augmente en même temps que les parts de marché du groupe Bernard Hayot. Coïncidence ?
    Pendant que, dans cet hémicycle, le ministre des outre-mer dénonce le comportement du groupe GBH, que fait l’Élysée ? Il applaudit. Il offre une nouvelle distinction à celui qui s’enrichit en toute opacité et donc en toute impunité sur le dos des ultramarins. GBH attend d’être condamné pour publier ses comptes ? Qu’on lui offre une médaille ! GBH continue d’augmenter ses marges et ses profits ? Qu’on lui offre une médaille ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP et sur quelques bancs des groupes GDR, SOC et EcoS.) On décore ceux qui s’enrichissent, on oublie ceux qui s’appauvrissent.
    Ma question est simple. On voit ce que le chef de l’État fait pour les plus puissants, mais que fera votre gouvernement pour ceux qui, dans la France d’outre-mer, continuent de subir la vie chère ? À quand la grande loi promise par Manuel Valls contre la vie chère ? (Mme Nadège Abomangoli applaudit longuement.)
    Pour terminer, permettez-moi d’attribuer moi aussi une distinction au président de la République et au fondateur de GBH. Au nom de toutes les familles françaises, je leur remets la médaille du cynisme : celle-là, au moins, est méritée. (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes GDR, LFI-NFP, SOC et EcoS.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire.

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire

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    Permettez-moi de rappeler les principes qui guident l’attribution de la Légion d’honneur. Cette distinction placée sous l’autorité de la grande chancellerie de la Légion d’honneur récompense le mérite individuel, l’universalité de la reconnaissance républicaine et la contribution au bien public sans considération d’origine sociale ou professionnelle.

    Mme Émeline K/Bidi

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    C’est bien le problème !

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée

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    Vous m’interrogez également au sujet de la vie chère en outre-mer –⁠ je comprends l’inquiétude que vous exprimez au nom des citoyens – et du rôle des grands groupes économiques. Je tiens à rappeler que le gouvernement agit avec détermination. Ainsi, il a soutenu deux propositions de loi, déposées respectivement par Mme Béatrice Bellay et par M. Victorin Lurel, visant à lutter contre la vie chère, à renforcer la concurrence et à réguler la concentration des acteurs économiques en outre-mer. Par ailleurs, comme l’a annoncé M. le ministre d’État, ministre des outre-mer, un projet de loi complet contre la vie chère, assorti d’un plan d’action non moins complet, sera présenté cet été. Ce texte s’appuiera sur une large concertation et engagera de nombreuses mesures. Enfin, un comité interministériel des outre-mer se tiendra le 10 juillet pour fixer les orientations de la transformation économique des territoires ultramarins.
    Le gouvernement reste pleinement mobilisé pour répondre aux attentes des citoyens au sujet de la vie chère en outre-mer et pour bâtir un avenir plus juste pour l’outre-mer. Il consulte, agit et propose des solutions.

    Audition du premier ministre dans le cadre de travaux d’enquête de l’Assemblée nationale

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Sarah Legrain.

    Mme Sarah Legrain

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    Monsieur le premier ministre, vous faites honte à votre fonction. (Murmures sur les bancs du groupe RN.) Devant la commission d’enquête sur les violences en milieu scolaire, vos propos ont sidéré et écœuré.
    Vous avez écœuré par le mépris et les attaques systématiques envers celles et ceux qui ont osé parler, alerter, combattre l’omerta. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Non, l’enseignante qui donnait aux élèves battus et violés de Bétharram le numéro d’urgence pour les enfants maltraités n’était pas « dérangée » : elle était la seule à avoir gardé raison et humanité dans cet océan de silence et de violence. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP ainsi que sur quelques bancs des groupes SOC, EcoS et GDR.)
    Vous avez sidéré en justifiant la violence physique dans l’éducation ou encore en présentant les pédocriminels comme des adultes choisissant des enfants pour partenaires. Il n’y a guère plus que l’extrême droite pour vous applaudir sur un tel sujet. (Exclamations sur quelques bancs des groupes RN et UDR.) Nous n’oublions pas, d’ailleurs, qu’elle est en croisade contre l’éducation à la vie sexuelle et affective qui donne aux enfants les outils nécessaires pour nommer les crimes des adultes. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
    Lors de votre audition, vous n’avez cessé de crier à l’acharnement et de discréditer le travail de la commission pour protéger les enfants. Il n’y a pas de procès politique dont vous seriez la victime ; il y a une certaine idée de la fonction que vous occupez. Un premier ministre ne peut mentir à la représentation nationale sans gravement porter atteinte à notre démocratie. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Vous avez menti ici même, face à nous, le 11 février, lorsque vous avez affirmé : « Je n’ai jamais été informé de quoi que ce soit de violences, ou de violences a fortiori sexuelles. Jamais. » Lors de votre audition, vous avez pourtant reconnu sous serment disposer d’informations parues dans la presse dès 1995 au sujet de violences physiques. (Mêmes mouvements.) Hier, document à l’appui, les victimes de Bétharram ont mis en cause vos déclarations devant la commission d’enquête. Non, le surveillant condamné en 1996 pour des violences sur un élève n’a pas été licencié ; il a été promu !

    M. Julien Odoul

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    Et le lycée Averroès, qu’en pensez-vous ?

    Mme Sarah Legrain

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    Par votre inaction, vous avez trahi autrefois votre responsabilité de ministre de l’éducation et laissé des pédocriminels continuer à sévir pendant des décennies. Par vos mensonges, vous déshonorez à présent la fonction de premier ministre face aux représentants du peuple français. Monsieur Bayrou, quand allez-vous démissionner ? (Les députés du groupe LFI-NFP se lèvent et applaudissent. –⁠ Mme Elsa Faucillon applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le premier ministre, chargé de la planification écologique et énergétique.

    M. François Bayrou, premier ministre, chargé de la planification écologique et énergétique

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    Je sais bien que La France insoumise voudrait que dure éternellement cette polémique. J’ai été entendu cinq heures et trente minutes par la commission, dont je prétends que vous l’avez dévoyée de sa vocation et de son sujet. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR, DR et Dem. –⁠ Mme Brigitte Barèges applaudit également. –⁠ Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Patrick Hetzel

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    Eh oui !

    Plusieurs députés du groupe LFI-NFP

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    La honte !

    Un député du groupe LFI-NFP

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    C’est vous, le dévoyeur !

    M. François Bayrou, premier ministre

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    Le sujet des travaux d’enquête de la commission, c’était l’ensemble des établissements.
    Vous venez de dire que le surveillant n’avait pas été licencié. Je cite le document envoyé le 5 novembre 1996 à l’inspecteur par le directeur de l’établissement : « Je viens de licencier, même si cela risque d’avoir des retombées, le surveillant en question. » (Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme Sarah Legrain

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    Il a été promu !

    M. François Bayrou, premier ministre

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    Par ailleurs, je n’ai critiqué personne. Je me suis contenté de montrer que les affirmations…

    Mme Ségolène Amiot

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    Menteur ! (Vives exclamations sur les bancs des groupes RN, DR et UDR.)

    Mme Caroline Parmentier

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    Ce sont des voyous !

    M. François Bayrou, premier ministre

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    Je sais bien que cela vous gêne. (Mme Ségolène Amiot continue de s’exclamer.)

    Mme la présidente

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    Madame Amiot, veuillez laisser le premier ministre répondre ! Vous n’avez pas la parole.

    Mme Ségolène Amiot

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    Mais il ment !

    M. François Bayrou, premier ministre

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    Je sais bien que cela vous gêne, mais il se trouve que je me suis contenté de montrer devant la commission, sous serment, que les propos tenus devant elle étaient, purement et simplement, factuellement, impossibles.

    Mme Ségolène Amiot

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    Les victimes mentent ?

    Mme Marie-Christine Dalloz

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    Elle ne veut pas se taire ?

    M. François Bayrou, premier ministre

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    J’ai montré qu’il y avait deux ans d’écart entre les propos rapportés par Mme Gullung et la mise en examen de Carricart, qu’il était donc inimaginable qu’elle ait raison et que cela était la preuve d’une affabulation. Je le maintiens devant vous.
    Enfin, pour que cette polémique soit close…

    Mme Ségolène Amiot

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    Elle ne sera jamais close !

    M. François Bayrou, premier ministre

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    …j’ai l’intention de mettre en ligne, dans les quarante-huit heures, la totalité des documents –⁠ je viens d’en citer un – qui montreront que ces accusations sont scandaleusement inexactes (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR) et qui, je l’espère, permettront à tous ceux qui s’y intéressent de se faire une opinion loyale. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR, DR, Dem et HOR.)

    Homophobie dans le football

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Bruno Clavet.

    M. Bruno Clavet

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    Le 17 mai dernier, à l’occasion de la Journée internationale contre l’homophobie, le football français a été le théâtre de comportements profondément choquants, qui piétinent les valeurs que le sport est censé incarner. Nemanja Matic, joueur de l’Olympique lyonnais, a sciemment dissimulé le logo arc-en-ciel apposé sur son maillot en signe de refus. Ce geste revendiqué fait tristement écho à celui du joueur de l’AS Monaco Mohamed Camara l’année dernière. De son côté, Mostafa Mohamed, attaquant du FC Nantes, a pour la troisième année consécutive refusé de participer à une rencontre en raison de cette campagne de sensibilisation, invoquant des pressions personnelles qui ne trompent personne puisqu’il s’agit en réalité de pressions religieuses. À ce sujet, le tweet de Jordan Bardella résume tout du cas de ce joueur qui aurait très bien pu dire : je suis homophobe car je suis islamiste. Ces faits, qui ne sont malheureusement pas isolés, témoignent d’une homophobie décomplexée, alimentée par des convictions religieuses radicales qui prônent l’exclusion et la haine des personnes LGBT. En effet, ce n’est pas seulement l’homophobie qui s’exprime ici, c’est la voix insidieuse du fondamentalisme islamiste, qui oppose la charia à la République et la haine à l’égalité.
    À l’inverse, je salue le courage de Jonathan Closse, ancien joueur du RC Lens, qui a défendu un message d’ouverture et de tolérance. Ce sont ces modèles qu’il faut valoriser et non ceux qui défient les principes fondamentaux de notre société car, en France, l’homophobie n’est pas une opinion, ni encore moins une liberté religieuse, mais un délit. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
    Ainsi, ma question est double. Madame la ministre des sports, pouvez-vous nous confirmer que de lourdes sanctions seront demandées par votre ministère pour ces joueurs qui se revendiquent ouvertement homophobes ? Surtout, pouvez-vous nous dire quand reviendra enfin le temps où il faisait bon en France d’être une femme, d’être juif ou d’être homosexuel ? (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative.

    Mme Marie Barsacq, ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative

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    Effectivement, ce week-end a été placé sous le signe de la lutte contre l’homophobie. Le football professionnel y a pris toute sa part, ce qui est important : il a un devoir d’exemplarité parce qu’il est suivi par toute notre jeunesse.

    M. Erwan Balanant

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    Eh oui !

    Mme Marie Barsacq, ministre

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    Nous devons mobiliser celle-ci pour lutter contre l’homophobie, car en France –⁠ les chiffres ont été publiés ce week-end, le nombre d’actes contre les personnes transgenres ou homosexuelles continue d’augmenter.

    M. Julien Odoul

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    Il faut des sanctions !

    Mme Marie Barsacq, ministre

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    Il est essentiel que l’ensemble des joueurs professionnels se mette en ordre de marche pour participer à cette campagne et se prêter au jeu du dispositif prévu par la Ligue de football professionnel.

    M. Julien Odoul

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    Des sanctions !

    Mme Marie Barsacq, ministre

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    J’ai effectivement sanctionné clairement ceux qui n’avaient pas pris part à cette campagne. C’est inadmissible, peu importe les raisons.

    M. Sébastien Chenu

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    Non, pas « peu importe » !

    Mme Marie Barsacq, ministre

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    Ils jouent dans le championnat français or, quand la Ligue de football professionnel lance une campagne de lutte contre l’homophobie, l’ensemble des joueurs professionnels de football y participent. Ne pas le faire entraîne des sanctions morales et professionnelles.

    M. Julien Odoul

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    Quelles sanctions ?

    Mme Marie Barsacq, ministre

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    Pour ce qui est des sanctions, puisque vous les évoquez, les clubs ont très clairement affiché le fait qu’ils allaient prononcer des sanctions contre les joueurs.

    Mme Hanane Mansouri

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    Non, c’est faux !

    Mme Marie Barsacq, ministre

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    Nous sommes tous prêts à les condamner ; nous l’avons fait très clairement.

    Un député du groupe RN

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    Quelle lâcheté !

    Mme Marie Barsacq, ministre

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    Le sport en général contribue à faire évoluer les sujets de société.

    M. Hervé de Lépinau

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    C’est de l’aviron ! (Sourires sur les bancs du groupe RN.)

    Mme Marie Barsacq, ministre

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    Nous sommes pleinement engagés pour que le sport prenne toute sa place dans la société. En effet, il accueille toutes et tous et joue un rôle essentiel d’éducation de la jeunesse aux côtés des parents et de l’éducation nationale.

    Un député du groupe RN

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    C’est nul !

    M. Julien Odoul

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    Quelles sanctions pour les joueurs homophobes ?

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Bruno Clavet.

    M. Bruno Clavet

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    Ce sont votre silence, votre complaisance et vos compromissions qui ont laissé prospérer l’islamisme. Je l’affirme clairement : le meilleur bouclier des juifs, des femmes et des homosexuels, ce sont Marine Le Pen et Jordan Bardella. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR. –⁠ Exclamations sur les bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.)

    Moyens de la police municipale

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Laurent Mazaury.

    M. Laurent Mazaury

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    Monsieur le ministre de l’intérieur, le 18 mars dernier, je vous interrogeais ici même sur la nécessité de renforcer les moyens juridiques et opérationnels des polices municipales pour répondre plus efficacement aux enjeux de sécurité du quotidien. J’évoquais notamment la progression du trafic de stupéfiants qui gangrène toutes les communes, comme j’ai pu le constater hier encore lors d’une balade urbaine avec les élus et les habitants de Saint-Cyr-l’École, dans ma circonscription. Face à cette réalité, les polices municipales, maillon essentiel, sont désarmées et leurs capacités d’intervention sont trop limitées.
    Les récentes déclarations du président de la République en faveur d’un projet de loi pour étendre leurs missions sous l’autorité du parquet vont précisément dans le sens de la proposition que je vous avais faite. Je l’avais alors souligné, des outils tels que l’amende forfaitaire délictuelle, l’accès aux fichiers, l’utilisation des nouvelles technologies et la possibilité d’effectuer des fouilles de véhicules constitueraient des leviers concrets pour renforcer la sécurité.
    Je souhaite insister sur un point fondamental : la coopération et la complémentarité entre toutes les forces de l’ordre sont les clés d’un dispositif cohérent et efficace. Dans ma circonscription, à Élancourt, la police municipale travaille depuis des années en étroite collaboration avec la police nationale, avec laquelle elle partage informations et interventions. L’an dernier, l’accueil des Jeux olympiques a encore renforcé ce partenariat, qui a démontré son efficacité. Par ailleurs, Saint-Quentin-en-Yvelines accueillera dans quelques semaines le commissariat du futur, site pilote en matière d’innovation, de modernisation et d’expérimentation pour la police nationale. Ce contexte local crée les conditions idéales pour envisager une expérimentation territoriale permettant une remontée d’expériences concrètes pour nourrir les travaux parlementaires à venir. De nombreux maires sont volontaires et mobilisés et ils attendent des moyens. Pourriez-vous nous préciser les modalités de préparation de cette réforme et le calendrier envisagé ? (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe LIOT.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur.

    M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur

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    Voilà un sujet qui nous rassemblera. Les polices municipales, qui constituent la troisième force de sécurité intérieure de notre pays, font l’unanimité. La volonté de leur donner plus de pouvoir, ou plus exactement de donner plus de pouvoir aux maires est partagée. Ils pourront piocher dans une boîte à outils que nous leur proposerons dans quelque temps pour doter la police municipale de capacités d’action nouvelles. La formation et les règles déontologiques seront renforcées. Les policiers municipaux auront la capacité de délivrer des amendes délictuelles forfaitaires sous le contrôle du procureur de la République, donc du garde des sceaux. Ils auront aussi la possibilité de procéder à des contrôles d’identité et peut-être de vérifier ce qui est transporté dans le coffre des véhicules ou de saisir des stupéfiants. Ils pourront également accéder à des fichiers nouveaux dont la consultation est actuellement limitée ou interdite : nous voulons aller beaucoup plus loin.
    Le Beauvau des polices municipales s’achève. Le texte est en cours de rédaction ; il devrait être définitivement prêt à la fin du mois de juin et donnera lieu à un débat dans cet hémicycle probablement à l’automne.

    Éducation et écrans

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Graziella Melchior.

    Mme Graziella Melchior

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    Le 10 janvier 2024, le président de la République avait lancé sur l’impact de l’exposition des jeunes aux écrans une commission d’experts dont les conclusions étaient accablantes. Il est donc de la responsabilité des pouvoirs publics de déterminer le bon usage des écrans, à la maison comme en classe. La semaine dernière, dans le cadre de l’opération Dix jours sans écrans, vous avez formulé plusieurs propositions que nous saluons. Cependant, madame la ministre de l’éducation, en même temps qu’il est nécessaire de déconnecter les enfants des écrans, il faut les relier à la nature.

    M. Jean-René Cazeneuve

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    Très bien !

    Mme Graziella Melchior

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    Des actions ont été menées ces dernières années. Ainsi, votre ministère soutient le déploiement des aires marines et terrestres éducatives qui constituent un formidable dispositif. Toutefois, face à l’urgence, il nous faut aller plus loin et permettre notamment le développement de la pratique de la classe dehors dont les bienfaits sont amplement documentés. La semaine dernière se tenaient à Marseille les rencontres internationales de la classe dehors, organisées par la Fabrique des communs pédagogiques qui fait un remarquable travail soutenu par le Fonds mondial pour la nature. Ces rencontres ont permis de mesurer le besoin des enfants et l’enthousiasme de la communauté éducative.
    Forts de cette dynamique et en m’appuyant sur les conclusions de mon rapport relatif à l’adaptation de l’école aux enjeux climatiques,…

    M. Jean-René Cazeneuve

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    Excellent !

    Mme Graziella Melchior

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    …je déposerai dans les prochains jours avec Florence Herouin-Léautey et Jérémie Iordanoff une proposition de loi transpartisane visant à reconnaître l’éducation à et par la nature. Pouvez-vous détailler vos objectifs en matière de lutte contre la surexposition des enfants aux écrans et indiquer à la représentation nationale de quelle manière vous souhaitez aborder la reconnexion à la nature par votre action, peut-être en soutenant notre proposition de loi ? (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR et sur quelques bancs du groupe socialiste. –⁠ M. Jimmy Pahun applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre d’État, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.

    Mme Élisabeth Borne, ministre d’État, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche

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    Vous avez raison, si les écrans nous rendent évidemment service, ils nous rendent aussi dépendants. Les enfants le voient et ils considèrent que cette relation est normale. Il ne s’agit pas de nous passer d’écrans, mais il nous faut en reprendre la maîtrise. C’est à la fois un enjeu d’éducation, de santé et de société. Vous l’avez rappelé, le président de la République s’était emparé de ce sujet avec la commission d’experts sur l’impact de l’exposition des jeunes aux écrans, qui a remis en avril 2024 un rapport alarmant.
    J’ai décidé, en lien avec les collectivités locales, de généraliser la pause numérique dans tous les collèges à la rentrée 2025. J’ai également décidé de suspendre la mise à jour de l’environnement numérique de travail et du logiciel de vie scolaire Pronote de 20 heures à 7 heures du matin, le week-end comme en semaine. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR et Dem.)

    M. Erwan Balanant

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    Quelle bonne nouvelle ! Tous les parents la saluent !

    Mme Élisabeth Borne, ministre d’État

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    Passer moins de temps devant les écrans permet de consacrer plus de temps aux activités sportives, culturelles et en extérieur. L’éducation au développement durable est indispensable pour chaque élève tout au long de sa scolarité. C’est pourquoi j’ai tenu à inscrire dans les programmes d’enseignement moral et civique l’éducation au développement durable suite aux Rencontres jeunesse de Matignon au printemps 2023. J’avais alors annoncé un plan reposant sur vingt mesures de sensibilisation et de formation des élèves et des enseignants, qui tend également à reconnaître l’engagement des écodélégués. Je suivrai avec attention les propositions que vous ferez dans le cadre de votre proposition de loi visant à rendre effective l’éducation à et par la nature. (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR et sur quelques bancs du groupe DR.)

    Gestion financière des établissements de santé

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Fabrice Barusseau.

    M. Fabrice Barusseau

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    Le premier ministre réclame aux agences régionales de santé des efforts budgétaires sur les établissements de santé. La circulaire du 23 avril 2025 relative à l’efficience et à la performance des établissements de santé vise l’amélioration de l’efficience accompagnée d’un dialogue de gestion renforcée entre les gestionnaires et leur agence de tutelle, en tenant compte des caractéristiques de chaque bassin territorial. Ce ne sont pourtant pas l’hôpital public ni le secteur sanitaire et médico-social en général, étant donné leur activité, qui doivent payer pour le déficit organisé par le gouvernement depuis 2017. La réduction du déficit ne doit pas se faire au détriment de la qualité d’exercice des professionnels et par conséquent de la qualité de l’accompagnement et des soins. Actuellement 20 % à 25 % du tissu hospitalier français est dans une situation à la fois difficile et complexe. Par exemple, le groupe hospitalier de la troisième circonscription de Charente-Maritime cumule un problème de trésorerie et de dette. Les professionnels se serrent la ceinture ; ils font confiance à l’institution ; mais jusqu’à quand ?
    La tarification à l’acte aurait pu être un levier financier pour apurer le déficit mais l’activité est peu attractive. Au centre hospitalier de Saintes, 25 % des postes sont vacants, notamment à cause d’une mauvaise régulation de l’affectation des internes qui entraîne une baisse de la démographie médicale. L’ARS ne s’engage pas et les centres hospitaliers universitaires font leur marché. Cette situation amène la population à quitter le territoire pour aller se soigner à plus de 40 kilomètres de chez elle. Monsieur le ministre de la santé, vous conviendrez que la situation ne peut être réglée par de simples mécanismes budgétaires et d’optimisation, sans un réaménagement du territoire de santé, une pratique collective de la coopération et le renforcement d’une offre cohérente qui fasse correspondre les moyens aux besoins. Quelle marge de manœuvre octroierez-vous aux différentes ARS ainsi qu’aux gestionnaires d’établissement pour déployer une offre de santé sécurisée, efficiente et ciblée étant donné les problématiques particulières de chaque bassin territorial ? Enfin, quelle articulation prévoyez-vous avec votre stratégie comptable ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins.

    M. Yannick Neuder, ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins

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    Vous critiquez la circulaire du premier ministre, mais je pense qu’il aurait été une erreur de ne pas la publier : nous ne pouvons pas rester aveugles face au déficit estimé à 3 milliards d’euros de notre système hospitalier.
    Je suis convaincu que ce n’est pas en dépensant plus que l’on soignera mieux. Il faut regarder les choses tranquillement : il ne s’agit pas de stigmatiser l’hôpital, que nous avons tant applaudi au cours de l’épisode du covid, mais simplement de voir les choses en face et d’adopter des mesures de bon sens –⁠ lutte contre la fraude et le gaspillage, dispositifs d’efficience –⁠ afin qu’aucune économie ne soit faite sur la santé des Français.

    M. Jean-Paul Lecoq

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    Vous avez fermé des lits !

    M. Yannick Neuder, ministre

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    Nous avons des marges de progression collectives, sachant que sur les 3 milliards de déficit, près de 400 millions sont dus à l’inflation –⁠ ce n’est pas de la mauvaise gestion, c’est factuel.
    Catherine Vautrin et moi avons demandé une mission de l’Igas pour faire toute la clarté sur les effets du Ségur, afin d’en tenir compte dans le prochain PLFSS. Ensuite, n’oublions pas l’effort important –⁠ près de 9 milliards supplémentaires – qui a été fait sur l’Ondam dans le précédent PLFSS.
    Enfin, il s’agit surtout de restructurer le système en profondeur. Vous l’avez dit vous-même : nous manquons de professionnels de santé et il faut en former plus. C’est l’un des enjeux du pacte de lutte contre les déserts médicaux, qui vise à réarmer la médecine de ville et l’ensemble des territoires, à soulager l’hôpital et les urgences qui sont surchargés, à réorganiser les services et à prendre le virage ambulatoire.
    Grâce à toutes ces mesures, malgré un contexte budgétaire très tendu, nous conserverons le fleuron de l’hôpital et nous pourrons continuer à dire que notre système de santé fonctionne à l’hôpital public comme à l’hôpital privé. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR.)

    Mme la présidente

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    Nous avons terminé les questions au gouvernement.

    Suspension et reprise de la séance

    Mme la présidente

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    La séance est suspendue.

    (La séance, suspendue à seize heures quinze, est reprise à seize heures trente.)

    Mme la présidente

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    La séance est reprise.

    3. Droit à l’aide à mourir

    Suite de la discussion d’une proposition de loi

    Mme la présidente

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    L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la proposition de loi relative au droit à l’aide à mourir (nos 1100, 1364).

    Discussion des articles (suite)

    Mme la présidente

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    Hier soir, l’Assemblée a poursuivi la discussion des articles de la proposition de loi, s’arrêtant à l’amendement no 2580 à l’article 4. Il nous reste une vingtaine d’amendements à examiner avant d’arriver au vote de cet article.

    Article 4 (suite)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Juvin, pour soutenir l’amendement no 2580.

    M. Philippe Juvin

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    Nous reprenons notre discussion au sujet des critères d’accès à l’aide active à mourir : qui pourra en « bénéficier » ? Qui devrait être exclu d’emblée ? Nous souhaitons que, par principe, soient exclus de cette aide un certain nombre catégories de patients, en particulier les autistes. Nous considérons que, par définition, le consentement de ces derniers ne pourra pas être totalement libre ni totalement éclairé –⁠ ce n’est pas possible.
    Je sais bien qu’il nous faut mettre en balance l’autonomie du patient et la défense des plus vulnérables : toute la difficulté de notre travail consiste à trouver un équilibre intelligent entre les deux. Je suis très franc : je préfère que nous prenions le risque de perdre un peu du côté de l’autonomie plutôt que le risque d’exposer à cette mesure des patients autistes qui n’auraient pas pu être pleinement éclairés sur ce qu’ils demandent. Il en va de même pour les déficients intellectuels, les schizophrènes, les bipolaires, les personnes atteintes d’un syndrome dépressif –⁠ vous avez rejeté hier les amendements qui visaient à les exclure du dispositif, et je le regrette.
    S’il vous plaît, s’agissant des autistes, prenons garde à ce que nous faisons ! Nous devons adopter des critères très stricts. Il ne faut pas que les autistes puissent bénéficier de ce texte.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le rapporteur général, pour la commission des affaires sociales, de la proposition de loi relative au droit à l’aide à mourir, pour donner l’avis de la commission.

    M. Olivier Falorni, rapporteur général, pour la commission des affaires sociales, de la proposition de loi relative au droit à l’aide à mourir

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    Nous reprenons en effet ce débat au point où il s’était arrêté hier soir, sur les mêmes thématiques ; c’est pourquoi, monsieur Juvin, je vous ferai peu ou prou la même réponse. La mise en balance que vous souhaitez entre autonomie et vulnérabilité, c’est l’équilibre même de ce texte. Les personnes autistes sont des personnes. Elles peuvent être atteintes d’affections graves et incurables, qui engagent leur pronostic vital, et éprouver des souffrances insupportables. Si elles devaient être amenées à demander l’aide à mourir, leur discernement sera évalué.
    Je rappelle que, parmi les conditions d’accès que nous avons fixées, figure l’aptitude à manifester sa volonté de façon libre et éclairée –⁠ c’est l’alinéa 9 de l’article 4. En outre, l’alinéa 3 de l’article 6 exclut explicitement les personnes dont une maladie altère gravement le discernement lors de la démarche de demande d’aide à mourir : elles ne peuvent être regardées comme manifestant une volonté libre et éclairée.
    Par conséquent, votre demande est satisfaite. Nous examinerons un peu plus tard un amendement prévoyant que le médecin chargé de la procédure peut, en cas de doute sérieux, recueillir l’avis d’un psychiatre ou d’un neurologue. Encore une fois, je suis convaincu que l’équilibre du texte correspond à la mise en balance que vous évoquez, au demeurant de manière tout à fait justifiée. C’est pourquoi je suis défavorable à l’amendement.

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de plusieurs demandes de scrutin public : sur cet amendement no 2580, par le groupe Droite républicaine ; sur le no 29, par les groupes Ensemble pour la République et UDR ; sur le no 1716, par le groupe UDR.
    Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à Mme la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles, pour donner l’avis du gouvernement sur l’amendement no 2580.

    Mme Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles

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    Monsieur Juvin, je suis parfaitement d’accord avec vous : nous devons être capables de respecter l’autonomie du patient et, en même temps, de protéger la vulnérabilité, je dirais même les vulnérabilités. C’est ce que nous cherchons à faire ensemble depuis plusieurs jours, notamment en examinant la série des conditions fixées à l’article 4. L’alinéa 9 concerne précisément le discernement, dont l’évaluation relèvera de la responsabilité du professionnel de santé. Celui-ci pourra d’ailleurs, s’il a le moindre doute, demander un autre avis à ce sujet.
    À l’attention de celles et ceux qui nous écoutent, je tiens à l’affirmer : lorsque nous répondons que l’amendement est satisfait, nous ne rejetons en aucun cas la protection des personnes vulnérables ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOC.) Nous repoussons les amendements de cette nature parce que le texte tel qu’il est écrit, avec la notion de discernement, prend déjà en compte ces demandes. J’émets un avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Les demandes de prise de parole sont nombreuses. J’en reste aux modalités que nous avons fixées hier : entendre, après les avis, deux orateurs pour et deux contre.
    La parole est à Mme Élise Leboucher, rapporteure de la commission des affaires sociales.

    Mme Élise Leboucher, rapporteure de la commission des affaires sociales

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    Monsieur Juvin, je ne remets pas en cause votre volonté de protéger les patients –⁠ du reste partagée par tous dans cet hémicycle –, mais nous nous opposerons à l’amendement, qui découle d’une incompréhension.
    Je tiens à rappeler qu’il est question des troubles du spectre de l’autisme (TSA) : les symptômes, plus ou moins présents, varient d’une personne à l’autre, voire évoluent au fil du temps. Qui dit diversité des symptômes dit diversité des capacités et des besoins. L’un pourra s’exprimer oralement, l’autre pas. Certains travaillent, ont une vie sociale, familiale, une existence autonome ; d’autres ont des besoins importants en matière d’accompagnement.
    Par conséquent, exclure de l’aide à mourir toute personne présentant un TSA, de ce seul fait, reviendrait à écarter des patients qui seraient en mesure de manifester leur volonté de manière libre et éclairée. Il convient plutôt d’apprécier les situations au cas par cas. Si le ou les médecins considèrent que le critère du discernement n’est pas rempli, il leur appartiendra de rejeter la demande d’aide à mourir –⁠ ce sera leur responsabilité. Ne doutons pas du sens des responsabilités dont feront preuve les médecins dans ce cas particulier ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme Anne-Laure Blin

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    Ça vous arrange bien !

    M. Matthias Tavel

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    Vous n’avez pas confiance dans les médecins, monsieur Juvin !

    M. Hadrien Clouet

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    Ils n’aiment pas les médecins !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jérôme Guedj.

    M. Jérôme Guedj

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    Monsieur Juvin, je ne suis pas sensible à votre argument de la mise en balance. Comme cela a été dit, l’alinéa 9 vise à protéger le patient, qui doit « être apte à manifester sa volonté de façon libre et éclairée » ; il faut sanctuariser cette condition. En creux, il y a dans votre amendement quelque chose de terrible ; qu’il s’agisse hier des déficients intellectuels, aujourd’hui des autistes, vous proposez d’établir –⁠ je lance un mot un peu fort – une forme de discrimination. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes SOC et LFI-NFP.) Les personnes en situation de handicap sont non pas des citoyens à part, mais des citoyens à part entière. Au sein d’un texte visant à créer un droit et à consacrer une liberté, vous introduiriez une discrimination de droit.

    Mme Anne-Laure Blin

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    Ça ne manque pas de sel !

    M. Jérôme Guedj

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    Dès lors, les personnes concernées ne seraient pas éligibles à l’aide à mourir, quand bien même elles rempliraient tous les autres critères –⁠ phase avancée ou terminale, pronostic vital engagé, souffrance. L’amendement a un but contraire à celui qui doit tous nous rassembler : on ne peut introduire, entre les citoyens français, une discrimination fondée sur le handicap. Si en revanche votre objectif est celui, louable, de protéger l’exigence de discernement, il faut sanctuariser l’alinéa 9 –⁠ rien de plus. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes SOC et EcoS.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Claire Marais-Beuil.

    Mme Claire Marais-Beuil

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    D’après les classifications présentant les critères de diagnostic de l’autisme, les altérations de la communication et des interactions sociales constituent des points clés du fonctionnement des personnes autistes. Je suis tout à fait d’accord avec vous, monsieur Guedj : les autistes sont des personnes à part entière. Ce n’est pas cela que nous remettons en cause. En revanche, comment pouvez-vous prétendre qu’ils auront le discernement nécessaire et qu’ils seront parfaitement informés ? (Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
    Si vous connaissiez la médecine, vous ne diriez pas cela ! (Mêmes mouvements.)

    Mme la présidente

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    S’il vous plaît, chers collègues !
    La parole est à M. Philippe Juvin.

    M. Philippe Juvin

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    Lorsque j’ai soutenu mon amendement, j’ai entendu quelque part crier : « C’est une honte ! » –⁠ si je savais d’où cela venait, je répondrais directement à la personne. En tout cas, pardonnez-moi, mais aucun amendement ne saurait être honteux. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe DR et sur plusieurs bancs des groupes RN et UDR. –⁠ M. Charles Sitzenstuhl applaudit également.)
    J’ai une vision différente des choses : j’estime que la priorité consiste à protéger les vulnérabilités, et l’équilibre que j’appelle de mes vœux n’est pas le vôtre. Je le répète, ne dites pas pour autant qu’il est honteux. Soyez présents tous les jours à ces débats, comme le sont certains de nos collègues ; ensuite, nous pourrons discuter.
    Les personnes atteintes d’autisme ne seront pas en mesure de manifester leur volonté de manière libre et éclairée. Vous me répondez que ce critère est sanctuarisé. Or l’alinéa 3 de l’article 6 prévoit d’exclure seulement de la démarche « la personne dont le discernement est gravement altéré ». Considérez-vous donc qu’une personne dont le discernement serait, non pas gravement, mais partiellement altéré remplit le critère fixé à l’alinéa 9 de l’article 4 ?
    Votre définition de l’aptitude à manifester sa volonté de manière libre et éclairée est très partielle, puisque vous n’excluez que l’altération grave du discernement. C’est là l’origine de mon inquiétude : il y a un trou dans le filet ! Or il suffit que le discernement de la personne soit altéré –⁠ pas nécessairement gravement – pour que cela crée une inégalité. Cela risque notamment d’être le cas pour les patients autistes.

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 2580.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        160
            Nombre de suffrages exprimés                156
            Majorité absolue                        79
                    Pour l’adoption                68
                    Contre                88

    (L’amendement no 2580 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Nous en venons à l’amendement no 2396, sur lequel je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à Mme Karen Erodi, pour soutenir l’amendement.

    Mme Karen Erodi

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    Cet amendement, repris de la version votée sous la dernière législature, consacre encore davantage le rôle légal de la personne de confiance désignée dans les directives anticipées.
    La personne de confiance pourra finaliser la demande d’aide en mourir en lieu et place de la personne concernée à trois conditions : si la personne a perdu conscience de manière irréversible du fait –⁠ uniquement – d’une maladie grave et incurable ; si elle a indiqué postérieurement au diagnostic de cette affection grave et incurable les conditions dans lesquelles elle souhaiterait recourir à l’aide à mourir ; si elle a rédigé ou réitéré ses directives anticipées au moins un an avant la perte de conscience.
    La personne en qui le patient a le plus confiance pourrait ainsi activer les directives anticipées. Ces dispositions sont assorties d’une sécurité : le choix de la personne est soumis à un délai de validité, à savoir un an avant la dégradation irréversible de ses capacités cognitives.
    Cet amendement vise à prévenir un maintien en vie non consenti et vide de sens. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP et sur quelques bancs du groupe SOC.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    J’ai eu l’occasion de m’exprimer à plusieurs reprises à propos des directives anticipées. Je reconnais votre constance. Vos convictions sont légitimes ; il est bien sûr nécessaire qu’elles figurent dans notre débat, j’en suis parfaitement conscient. Je vous donne toute légitimité pour débattre de ce sujet, même si je sais bien que je n’ai pas besoin de le faire. (Sourires sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    En revanche, je répète ce que j’ai dit samedi et confirmé hier : je ne suis pas favorable à l’intégration des directives anticipées dans la procédure. Je souhaite qu’il y ait une réitération du choix jusqu’au dernier instant.
    Je ne vous inviterai pas à retirer l’amendement car je sais qu’il s’agit là de votre conviction, mais j’invite tous les députés présents dans cet hémicycle à repousser l’amendement. J’émets un avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Même avis.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Sébastien Peytavie.

    M. Sébastien Peytavie

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    Vous avez certainement reçu, comme moi, de très nombreux messages de personnes en situation de handicap qui manifestent leurs inquiétudes quant à ce texte, notamment quant à la prise en compte de directives anticipées. En effet, cela soulève la question du regard validiste qui peut exister dans la société. L’idée que chacun se fait de ce qui lui sera insupportable n’est pas la même selon que l’on est ou non en pleine possession de ses moyens, ce qui crée un biais. C’est la raison pour laquelle je m’oppose à l’introduction de dispositions relatives aux directives anticipées.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel.

    Mme Marie-Noëlle Battistel

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    Nous avons eu un long débat à ce sujet en commission et l’avons également évoqué au début de la discussion en séance. Néanmoins, nous ne souhaitons pas renoncer à la prise en compte des directives anticipées dans le cas de figure particulier décrit par notre collègue Erodi. Il s’agit d’une situation où la personne est dans l’incapacité irréversible de réitérer sa demande, alors même qu’elle avait déclaré sa volonté de manière très précise dans ses directives anticipées.
    Il s’agit d’un amendement de repli par rapport à ce que nous souhaitions initialement. Nous estimons que cette situation particulière doit être prise en considération. (Mme Sandrine Runel applaudit.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Patrick Hetzel.

    M. Patrick Hetzel

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    S’agissant de l’amendement précédent, je tiens à rappeler qu’un trouble du spectre autistique n’est pas une maladie, mais un trouble du neurodéveloppement.
    S’agissant du présent amendement, nous sommes nombreux à considérer qu’il est nécessaire de s’assurer du consentement libre et éclairé du patient à toutes les étapes de la procédure. Cet amendement entre en totale contradiction avec cette exigence. On ne peut pas prendre en compte les directives anticipées dans de telles situations.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Emmanuel Fernandes.

    M. Emmanuel Fernandes

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    Je souhaite apporter mon soutien à cet amendement. Il s’agit en réalité d’un amendement de repli –⁠ cela a été dit. Il prévoit un cadre très sécurisé et sécurisant pour l’application des directives anticipées, dans une situation très précise.
    Je rappelle les trois conditions fixées : la personne devra avoir perdu conscience de manière irréversible du fait d’une affection grave et incurable ; elle devra avoir indiqué postérieurement au diagnostic de cette affection les conditions dans lesquelles elle souhaiterait recourir à l’aide à mourir ; elle devra avoir rédigé ou réitéré ses directives anticipées moins d’un an avant la perte de conscience –⁠ il y a donc aussi un délai contraignant.
    L’amendement est très équilibré. Il permettra à la personne de confiance de faire valoir la volonté du patient si celui-ci n’a plus la capacité de l’exprimer le moment venu. Pour ces raisons, j’invite chacun à bien réfléchir et à voter pour cet amendement.

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 2396.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        186
            Nombre de suffrages exprimés                171
            Majorité absolue                        86
                    Pour l’adoption                59
                    Contre                112

    (L’amendement no 2396 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Justine Gruet, pour soutenir l’amendement no 1615.

    Mme Justine Gruet

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    La définition de la souffrance insupportable paraît floue, le ressenti d’une douleur étant subjectif. Par cet amendement de repli de mon collègue Thibault Bazin, nous proposons que les critères permettant d’évaluer le caractère insupportable soient précisés par un décret en Conseil d’État pris après avis de la Haute Autorité de santé (HAS) et du Comité consultatif national d’éthique (CCNE). Le but est de conférer un caractère plus objectif à ce critère.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Brigitte Liso, rapporteure de la commission des affaires sociales, pour donner l’avis de la commission.

    Mme Brigitte Liso, rapporteure de la commission des affaires sociales

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    Effectivement, la notion de souffrance est tout à fait subjective –⁠ nous l’avons tous dit à plusieurs reprises au cours des débats. Nonobstant, dans l’avis qu’elle a rendu le 30 avril 2025, la HAS confirme que « la personne malade [est] seule légitime pour dire ce qui relève pour elle de l’insupportable ». En outre, elle recommande d’éviter « toute logique de "procéduralisation" qui enferme les individus dans une approche normative ». C’est exactement, je le crains, ce que fait l’amendement de notre collègue Bazin. C’est la raison pour laquelle j’émets un avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Même avis.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Océane Godard.

    Mme Océane Godard

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    Je suis, comme la plupart des membres du groupe Socialistes et apparentés, heurtée –⁠ pour ne pas dire choquée – de cette remise en cause du ressenti de la personne.
    Si le caractère insupportable de la souffrance était le seul et unique critère d’accès à l’aide à mourir, je pourrais comprendre votre inquiétude. Or, nous l’avons maintes fois rappelé, l’article 4 prévoit cinq conditions cumulatives. Cela crée un cadre solide qui, me semble-t-il, est rassurant. La loi que nous élaborons est loin d’être permissive.
    Si une personne en fin de vie considère que ses souffrances sont insupportables et que celles-ci sont réfractaires dès lors qu’aucun médicament ni aucun soin ne parviennent à les calmer, il faut l’écouter. Avec cet amendement, vous demandez qu’un décret vienne confirmer à la personne que ses douleurs sont bel et bien insupportables ! Cela n’a aucun sens. Bien évidemment, nous nous y opposons. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Hanane Mansouri.

    Mme Hanane Mansouri

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    Vous ne pouvez pas prétendre que ce texte sur l’euthanasie et le suicide assisté est équilibré du fait de l’existence de critères cumulatifs et nous dire en même temps que la souffrance –⁠ l’un des critères les plus importants – peut varier ! Effectivement, les souffrances varient non seulement dans le temps, puisqu’elles peuvent être abrégées par des traitements, mais aussi en fonction des personnes. Ne perdons pas de vue que l’acte proposé, c’est la mort ! (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Dès lors, on ne peut pas se permettre de se tromper sur une souffrance qui pourrait être atténuée par la suite. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes UDR et RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Nicole Dubré-Chirat.

    Mme Nicole Dubré-Chirat

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    Je voudrais revenir sur les notions de douleur insupportable et de douleur ressentie. La douleur s’évalue, qu’elle soit physique ou psychologique. Les échelles d’évaluation de la douleur existent et sont utilisées depuis des années.
    La douleur est tout à fait personnelle et individuelle, puisqu’elle est mémorisée. Lorsqu’on a ressenti des douleurs par le passé, le seuil de tolérance à la douleur augmente. Il faut donc prendre en considération la douleur ressentie, à savoir le niveau de douleur évalué et déclaré par le patient.
    En France, nous parlons du traitement de la douleur depuis près de quarante ans, mais nous ne sommes toujours pas au niveau. Je ne parle pas seulement des consultations antidouleur ; tout professionnel de santé devrait être en mesure de traiter la douleur, qu’elle soit physique ou psychologique.

    Mme Anne-Laure Blin

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    Il faut des moyens pour ça !

    Mme Nicole Dubré-Chirat

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    Quoi qu’il en soit, il y a des cas où on arrive au bout des possibilités de traitement ; il s’agit alors de douleurs réfractaires. Ce n’est pas une histoire de ressenti ou de subjectivité : il est tout à fait possible d’évaluer la douleur.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Justine Gruet.

    Mme Justine Gruet

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    Il y a quelques décennies, la douleur n’était que très peu prise en considération. Depuis, des progrès ont été accomplis et les patients sont mieux pris en charge de ce point de vue.
    L’objectif de cet amendement est précisément de permettre une montée en compétences collective en matière de douleur, en sollicitant l’avis d’autorités expertes telles que la HAS ou le CCNE.
    Madame Godard, le décret que nous proposons ne viendrait pas répondre à une situation individuelle, mais constituerait plutôt un outil d’expertise au service de nos médecins, leur permettant d’accompagner au mieux cette douleur.
    Plus nous aiderons nos professionnels de santé en précisant la notion de souffrance, plus nous arriverons à répondre à cette souffrance en amont de la demande d’aide active à mourir. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UDR.)

    Mme Ayda Hadizadeh

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    Grâce à un décret en Conseil d’État ? Vraiment ?

    (L’amendement no 1615 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement no 29.

    M. Patrick Hetzel

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    Nous proposons d’ajouter un sixième critère d’éligibilité : « Ne pas être dans un état de faiblesse ou de vulnérabilité psychologique susceptible d’altérer [le] jugement. »Nous tenons à ce qu’il figure précisément à l’article 4, qui fixe la liste de ces critères.
    On nous renvoie souvent à l’alinéa 3 de l’article 6, mais celui-ci n’exclut de la démarche que les personnes dont le discernement est gravement altéré. Pour notre part, nous considérons que, dès lors qu’il existe une forme d’altération du jugement, une prudence particulière s’impose. C’est la raison pour laquelle nous proposons cet amendement.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Brigitte Liso, rapporteure

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    Vous avez anticipé toutes mes réponses. La condition fixée à l’alinéa 9 de l’article 4 implique que les personnes dont le discernement est gravement altéré n’auront pas accès à l’aide à mourir. De plus, l’alinéa 3 de l’article 6 exclut explicitement de la démarche les personnes dont une maladie altère gravement le discernement. Mon avis est donc défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Évidemment, le gouvernement ne peut qu’être très vigilant sur l’exigence de discernement. C’est la raison pour laquelle il proposera, à l’article 6, un amendement permettant au médecin qui conduira l’expertise de solliciter l’avis d’un psychiatre ou d’un neurologue dès lors qu’il aura un doute sur le discernement du patient –⁠ je l’ai évoqué à plusieurs reprises.
    L’alinéa 9 de l’article 4 porte sur le discernement, et nous proposerons cet amendement à l’article 6. Vous me direz sans doute, monsieur Hetzel, qu’il n’est pas voté : et pour cause, puisque nous ne sommes qu’à l’article 4.
    Je suis défavorable à l’amendement.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Juvin.

    M. Philippe Juvin

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    Nous étudierons cette proposition avec grand intérêt.
    Toutefois, je ne comprends pas bien pourquoi, alors que nous partageons tous le souci de protéger certaines populations vulnérables, vous n’acceptez pas l’ajout du critère de bon sens proposé par M. Hetzel : « Ne pas être dans un état de faiblesse ou de vulnérabilité psychologique susceptible d’altérer [le] jugement. »
    Vous nous renvoyez à l’article 6, dont l’alinéa 3 exclut « la personne dont le discernement est gravement altéré par une maladie ». Mais l’autisme, par exemple, n’est pas une maladie : cet alinéa n’apporte donc pas les garanties que je demandais. Il ne les apporte pas davantage pour l’état de faiblesse et la vulnérabilité psychologique, qui, de même, ne sont pas toujours des maladies.
    Les mailles du filet de sécurité me paraissent très lâches : avec des critères aussi légers, nous prenons un risque.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Michel Lauzzana.

    M. Michel Lauzzana

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    Mme la ministre l’a dit : ce texte définit non seulement des critères clairs, mais aussi une procédure. Nous l’avons dit et nous le redirons, cette dernière prend en considération l’état psychologique de la personne. Le médecin pourra lui proposer de consulter un psychiatre ou un psychologue.
    Je ne conçois pas qu’un médecin ne prenne pas en compte la dépression passagère ou résultant de l’annonce d’une pathologie, par exemple d’un cancer. Monsieur Juvin, vous êtes médecin, vous le savez aussi bien que moi !

    M. Philippe Juvin

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    C’est bien pour cela que je m’inquiète !

    M. Michel Lauzzana

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    Le médecin en tiendra compte. C’est la première des choses qui vient à l’esprit. Pensez-vous qu’un médecin s’engagera avec légèreté dans une telle procédure ? Je rappelle aussi que la procédure est collégiale.
    Quant aux échelles de mesure de la douleur dont parlait Mme Dubré-Chirat, je précise qu’elles sont personnelles. C’est le patient qui évalue sa douleur : ce rôle ne revient jamais à une personne extérieure.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Vincent Trébuchet.

    M. Vincent Trébuchet

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    Je soutiens l’amendement de M. Hetzel et je souscris aux propos de M. Juvin.
    Monsieur le rapporteur général, j’aimerais que vous me répondiez. Hier, nous avons demandé que certaines populations dont le discernement peut être fortement altéré –⁠ les déficients intellectuels, les personnes atteintes d’autisme – soient exclues de l’aide à mourir. Vous avez alors parlé de stigmatisation ; sans toutefois nous accuser de stigmatiser, vous nous avez reproché de vouloir limiter l’autonomie de ces personnes.
    Désigner une population comme particulièrement vulnérable et vouloir la protéger, est-ce la stigmatiser ? Je prendrai l’exemple de l’un des critères : nous avons collectivement décidé d’exclure les mineurs de la possibilité de recourir à la procédure qu’autorisera cette loi.

    M. Jérôme Guedj

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    Mais le critère d’âge, c’est complètement différent, enfin !

    M. Vincent Trébuchet

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    Pourquoi ne pourrions-nous pas, de la même façon, protéger davantage certaines autres populations qui présentent des caractéristiques similaires, comme l’altération possible du discernement ?
    Je soutiens donc ce qu’a dit monseigneur Juvin… (Rires et applaudissements. –⁠ M. Philippe Juvin se lève et salue l’ensemble de l’hémicycle.)
    Il l’a dit de manière si brillante qu’on ne peut que lui prêter ce titre ! Vous serez clément dans votre réponse, monsieur le rapporteur général !

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 29.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        200
            Nombre de suffrages exprimés                195
            Majorité absolue                        98
                    Pour l’adoption                91
                    Contre                104

    (L’amendement no 29 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Nous en venons à l’amendement no 1716 de M. Bartolomé Lenoir.

    M. Vincent Trébuchet

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    Il sera défendu par monseigneur Trébuchet. (Sourires.)

    Mme la présidente

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    Vous avez la parole, cher collègue.

    M. Vincent Trébuchet

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    Dans la continuité de nos discussions précédentes, nous souhaitons renforcer les dispositions qui permettent le contrôle du discernement. Cet amendement vise à ajouter, à la liste figurant à l’article 4, un sixième critère : avoir bénéficié d’une prise en charge en centre médico-psychologique.
    Le rôle des centres médico-psychologiques nous paraît ici essentiel. Ils sont à même de donner un avis éclairé, et de détecter d’éventuelles pathologies psychiatriques qui ne l’auraient pas été auparavant. Il convient d’être prudent.

    Mme la présidente

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    Sur l’amendement n° 2633, je suis saisie par le groupe UDR d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Brigitte Liso, rapporteure

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    Depuis les lois Kouchner, chacun est libre de refuser un traitement. Par ailleurs, l’article 5 prévoit que le médecin « propose à la personne de l’orienter vers un psychologue ou un psychiatre ». Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Même avis.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Sandrine Dogor-Such.

    Mme Sandrine Dogor-Such

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    Cet amendement est important. Après le confinement et les restrictions de visites qui l’ont accompagné, par exemple, nous avons vu beaucoup de dépressions. Or on ne peut pas se contenter d’accepter les paroles d’une personne dépressive qui dit qu’elle veut mourir.
    Par ailleurs, vous nous renvoyez à l’article 9, madame la ministre. Mais si les amendements qui visent à protéger les personnes dépressives et celles qui ont des problèmes psychologiques ne sont pas adoptés, comment fera-t-on pour sécuriser le dispositif ?

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Julie Laernoes.

    Mme Julie Laernoes

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    Ces différents amendements visent non pas à protéger d’un possible abus, mais à empêcher que la loi ne s’applique. Si le présent amendement était adopté, même une personne mentalement saine, sans le moindre antécédent, devrait passer par un centre médico-psychologique. Cette demande n’est pas raisonnable.
    Le texte est clair sur les conditions d’accès, en particulier l’aptitude à manifester sa volonté de manière libre et éclairée. Tout est dit ici. Il ne sert à rien de chercher des prétextes pour que plus personne ne puisse bénéficier de l’aide active à mourir. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EcoS et SOC.)

    M. Guillaume Garot

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    Très bien !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Charles Sitzenstuhl.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Il ne faut pas reprocher aux députés opposés à ce texte d’essayer de tout faire pour le contrer, pour l’entraver. Tout le monde joue cartes sur table depuis plus d’une semaine : quelques-uns d’entre nous ont été présents de façon presque continue depuis lundi de la semaine dernière pour dire leur opposition. Il est donc légitime que nous cherchions, par voie d’amendement, à en atténuer les effets, voire à le rendre inopérant. C’est le jeu parlementaire ! Je vous renvoie au débat sur les retraites, entre autres réformes. C’est de cette façon que fonctionne la délibération parlementaire.
    Sur le fond, contrairement à ce que vous dites, ce texte est très flou. Nous continuerons à le dire jusqu’à la dernière minute du débat. Les critères ne sont pas stricts ; ce texte n’est pas le plus restrictif d’Europe ; il laisse beaucoup de place à la subjectivité et les marges d’interprétation sont importantes.
    Si cette loi devait entrer en vigueur, il se passera ce qui s’est passé dans tous les autres pays d’Europe –⁠ notamment aux Pays-Bas, que vous connaissez bien, et en Belgique – ainsi que dans certains États américains et au Canada : il y aura des abus, il y aura des dérives, et le nombre de demandes d’euthanasie et de suicide assisté explosera.
    Permettez-nous de nous battre jusqu’à la dernière minute de l’examen de ce texte. (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes RN, DR et UDR. –⁠ Mme Blandine Brocard applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Vigier.

    M. Philippe Vigier

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    J’entends ce que dit notre collègue : tenter de faire barrage à un texte, jusqu’à la dernière seconde, parce qu’on y est opposé, cela fait effectivement partie du débat parlementaire, et je l’accepte. Mais ce débat-ci n’est pas tout à fait comme les autres.
    Je rappellerai que la loi Kouchner n’est pas non plus tout à fait comme les autres –⁠ et vous ne proposez pas de la supprimer. A-t-elle représenté une avancée pour les malades, oui ou non ? Le droit pour un malade de refuser un examen ou un soin, c’est la moindre des choses !
    Dans le cadre de mon activité professionnelle, je suis allé, à plusieurs reprises, dans des centres médico-psychologiques. Je vous invite à faire de même : vous verrez ce que cela représente.
    Enfin, éveiller la défiance à l’égard du corps médical, ce n’est pas bien. La décision d’éligibilité sera collégiale. Je me méfie toujours de ceux qui jettent la suspicion sur celles et ceux dont le métier est de prendre en charge toutes les pathologies, de proposer tous les accompagnements. Ils nous regardent et nous écoutent : attention à cette défiance. La santé est en danger, protégeons-la. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR. –⁠ Mme Sophie Errante applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre.

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Madame Dogor-Such, je faisais référence non pas à l’article 9 mais à l’alinéa 9 de l’article 4 –⁠ mais je peux comprendre qu’au septième jour, on commence à fatiguer un peu.
    J’ai également fait référence à un amendement à l’article 6, no 2657, qui permettra au médecin de recueillir l’avis d’un psychiatre ou d’un neurologue en cas de doute sérieux sur le discernement de la personne. En effet, au moment où nous parlons, cet amendement n’a pas encore été discuté.
    Je le redis, l’article 4 définit un ensemble de critères, qui s’articulent entre eux. Par définition, chacun de ces critères sera adapté à l’examen de la personne concernée.

    M. Philippe Vigier

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    Très bien !

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Ce sont des situations humaines et chaque cas est évidemment spécifique ; il faut le garder à l’esprit quand nous discutons de ces critères.

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 1716.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        211
            Nombre de suffrages exprimés                206
            Majorité absolue                        104
                    Pour l’adoption                84
                    Contre                122

    (L’amendement no 1716 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Brigitte Barèges, pour soutenir l’amendement no 2633.

    Mme Brigitte Barèges

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    Il s’agit, dans le prolongement de ce qui a déjà été dit, de préciser qu’« aucune demande d’aide à mourir ne peut être acceptée si le patient présente des signes de dépression sévère non traitée ».
    Nous voulons donc encore une fois insister sur l’importance du discernement de la personne concernée.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Antoine Golliot.

    M. Antoine Golliot

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    J’ai une pensée pour tous ceux qui souffrent de maladies graves ou incurables alors que vingt départements sont dépourvus de centres de soins palliatifs.

    Mme Sandrine Runel

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    C’était le texte de la semaine dernière !

    M. Antoine Golliot

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    Ces patients sont condamnés à souffrir en raison de la défaillance du système de santé français. Le pays qui prétend avoir le meilleur système de santé au monde condamne des patients à souffrir, alors que des centres de soins palliatifs leur permettraient d’y échapper. (« L’amendement ! » sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme Anaïs Belouassa-Cherifi

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    Il fallait venir il y a huit jours !

    Mme la présidente

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    Merci de conclure, monsieur le député !

    M. Antoine Golliot

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    Ces personnes veulent vivre, et non mourir. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Nous voulons des soins ; nous ne voulons pas d’euthanasie ou de suicide assisté. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    Mme la présidente

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    Merci de vous en tenir aux amendements présentés.
    Je mets aux voix l’amendement no 2633.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        212
            Nombre de suffrages exprimés                209
            Majorité absolue                        105
                    Pour l’adoption                87
                    Contre                122

    (L’amendement no 2633 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Sur l’amendement n° 28, je suis saisie par le groupe Droite républicaine d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir cet amendement.

    M. Patrick Hetzel

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    Mme la ministre a annoncé qu’il y aurait un amendement gouvernemental à l’article 6 portant sur la même question mais nous souhaitons que la disposition suivante figure parmi les critères définis à l’article 4 : « Si le médecin a un doute sur le caractère libre et éclairé de la volonté du patient, il fait appel à un psychiatre. » Évidemment, ce point ne serait pas concerné par l’article 18 de la proposition de loi.
    L’amendement vise à ce que l’équipe médicale dispose de tous les éclairages nécessaires et, dans une telle situation, l’expert le mieux placé est un psychiatre, qui serait saisi par le médecin instruisant la demande.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Brigitte Liso, rapporteure

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    Défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Défavorable.

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 28.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        209
            Nombre de suffrages exprimés                206
            Majorité absolue                        104
                    Pour l’adoption                95
                    Contre                111

    (L’amendement no 28 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Nous en venons à quatre amendements, nos 2589, 1010, 141 et 1614, pouvant être soumis à une discussion commune.
    Les amendements nos 141 et 1614 sont identiques.
    Je suis saisie de demandes de scrutin public : sur l’amendement n° 2589 et sur les amendements identiques nos 141 et 1614, par le groupe Droite républicaine ; sur l’amendement n° 1010 par le groupe UDR.
    Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Philippe Juvin, pour soutenir l’amendement no 2589.

    M. Philippe Juvin

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    Mes chers frères, mes chères sœurs… (Sourires et applaudissements sur divers bancs. –⁠ Murmures sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Matthias Tavel

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    Et la laïcité !

    Mme la présidente

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    Un peu d’humour ne nuit pas à la qualité de nos débats ! (Applaudissements soutenus sur les bancs des groupes RN, EPR, DR, Dem, HOR, LIOT et UDR. –⁠ M. Jérôme Guedj applaudit également.)

    M. Philippe Juvin

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    Avant d’être définitivement excommunié par mes collègues (Sourires), je vais soutenir mon amendement.
    Nous souhaitons ajouter une cause d’exclusion à l’article 4 relative à l’incarcération et aux mesures de probation. En effet, en prison, par définition, on n’est pas très libre. D’autre part, c’est un milieu violent où il y a beaucoup de suicides. D’ailleurs, quand une personne décède en prison, il me semble qu’une enquête est systématiquement diligentée.

    M. Ugo Bernalicis

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    Mouais !

    M. Philippe Juvin

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    On ne peut donc pas affirmer que le dernier critère défini par la rédaction actuelle de l’article 4 –⁠ être apte à manifester sa volonté de façon libre et éclairée – puisse s’appliquer à des personnes incarcérées. Pensez-vous franchement qu’une personne qui a pris vingt ans de réclusion criminelle soit apte à manifester une volonté libre et éclairée ?

    M. Ugo Bernalicis

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    Oui !

    M. Philippe Juvin

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    Ne voyez-vous pas là un problème ?

    M. Ugo Bernalicis

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    C’est vous qui avez un problème ! Avec vous, c’est le droit de souffrir !

    M. Philippe Juvin

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    Si nous parlions d’un pays qui ne respecte pas les droits de l’homme l’organisation de la mort en prison vous poserait un problème. Nous avons intérêt à supprimer tout doute sur les décès en prison, où il y a de la violence et des suicides. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Gérault Verny, pour soutenir l’amendement no 1010. (M. Ugo Bernalicis s’exclame.) S’il vous plaît, monsieur Bernalicis !

    M. Gérault Verny

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    Cet amendement vise à empêcher qu’une personne en situation de privation de liberté, même aménagée, puisse accéder à l’aide à mourir. Je pense qu’existe une incompatibilité fondamentale entre une décision de mort et une situation de contrainte. Une personne privée de sa liberté, qu’elle soit en détention, en hôpital psychiatrique fermé ou sous bracelet électronique, n’est pas dans un état de pleine autonomie. Même si elle semble lucide, la pression du contexte et la perte de repères peuvent altérer profondément sa volonté. Dans une telle situation, le risque de confusion est important et la demande de mourir peut refléter une détresse passagère liée au contexte plutôt qu’une réelle volonté.
    Nous devons par ailleurs être vigilants sur le signal envoyé par la loi. Même indirectement, l’aide à mourir ne doit pas pouvoir être perçue comme une réponse possible à la privation de liberté. Je trouve très problématique qu’un tel dispositif puisse être associé dans l’esprit public à une forme d’issue face à l’enfermement ou à l’impasse sociale. La loi doit éviter toute ambiguïté sur ce point. Je propose donc de refuser l’aide à mourir tant que la personne n’est pas totalement libre physiquement. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement no 141.

    Mme Marie-Christine Dalloz

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    Les mots et les faits ont un sens. Lors d’une privation de liberté décidée par la justice, vous ne pouvez plus choisir l’orientation de votre vie. Comment alors admettre qu’une personne privée de la liberté de circuler, de négocier ou de consommer puisse avoir celle de décider de sa vie ou de sa mort ? (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Ugo Bernalicis

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    Justement, il n’est pas privé de cette liberté-là !

    Mme Marie-Christine Dalloz

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    Vos cris d’orfraie ne me font pas peur ! Une personne privée de sa liberté ne doit pas pouvoir décider de demander l’aide active à mourir.

    M. Ugo Bernalicis

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    Le reste de l’année, vous n’en avez rien à faire des détenus, et soudain ils vous intéressent !

    Mme Marie-Christine Dalloz

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    Quand on est privé de liberté, on est vraiment privé de liberté. Ça a un sens. C’est pourquoi vous commettriez une erreur en n’adoptant pas cet excellent amendement de mon collègue Corentin Le Fur.

    Mme Ségolène Amiot

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    C’est honteux !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Justine Gruet, pour soutenir l’amendement no 1614.

    Mme Justine Gruet

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    Déposé par Thibault Bazin, il vise à exclure de l’aide active à mourir les personnes faisant l’objet d’une mesure de privation de liberté. Chers collègues, tout en nous le reprochant, vous avez accepté, peut-être pour nous faire plaisir, de rendre bavarde la proposition de loi sur l’accompagnement et les soins palliatifs, c’est-à-dire d’y inscrire des dispositions déjà satisfaites.

    Mme Ségolène Amiot

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    C’est anticonstitutionnel !

    Mme Justine Gruet

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    Sur le présent texte, en revanche, vous refusez systématiquement des éléments qui sécuriseraient l’aide active à mourir car vous les jugez satisfaits alors qu’ils sont pour nous essentiels… (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    Madame la présidente, de l’autre côté de l’hémicycle, ils ne supportent pas que nous proposions des choses différentes de ce qu’ils pensent et nous coupent la parole chaque fois que nous la prenons. Sans faire un rappel au règlement au nom de la bonne tenue de nos débats, je souligne combien c’est désagréable. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes RN, DR et UDR. –⁠ Mme Annie Vidal applaudit également. –⁠ Protestations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    Hier soir, vous avez refusé qu’on écrive noir sur blanc dans le texte que les personnes intellectuellement déficientes sont exclues du dispositif car vous avez jugé la demande satisfaite. Sur ce point ou à propos des personnes autistes, il ne me gênerait nullement que la loi soit bavarde. Nous parlons désormais des personnes emprisonnées. En refusant de préciser les choses, vous en venez à ne pas vous poser les bonnes questions. En l’occurrence : comment peut-on avoir un avis libre et éclairé quand on est en prison ?

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    Ils contribuent à saucissonner le débat. Or une personne incarcérée est d’abord une personne. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC, EcoS, Dem et GDR, ainsi que sur certains bancs du groupe EPR. –⁠ Mme Frédérique Meunier applaudit également.)

    M. Ugo Bernalicis

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    Une personne avec des droits !

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    Et une personne incarcérée qui a une affection grave et incurable dans une phase avancée ou terminale, dont le pronostic vital est engagé et dont les souffrances sont réfractaires aux traitements ou insupportables, si elle est en mesure d’exprimer une volonté libre et éclairée, est une personne comme une autre. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC, EcoS, Dem et GDR, ainsi que sur certains bancs du groupe EPR.)

    Mme Anne-Laure Blin

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    Une personne incarcérée peut-elle être libre ?

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    Tous les êtres humains sont les mêmes et, même privés de liberté, ils peuvent accéder, dans le cadre des critères que nous avons fixés, au dispositif que nous créons.

    Mme Anne-Laure Blin

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    Mais ils ne sont pas libres !

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    Je rappelle que je parle de personnes en fin de vie qui ont une maladie grave et incurable dont ils vont mourir.

    Mme Hanane Mansouri

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    Tout le monde va mourir !

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    Oui, nous allons tous mourir, madame Mansouri, mais tout le monde n’a pas une maladie grave et incurable qui engage son pronostic vital. (Applaudissements jusqu’à la fin de l’intervention de l’orateur sur les bancs des groupes LFI-NFP et EcoS, ainsi que sur certains bancs des groupes SOC et EPR.) Revenons à la réalité ! Je suis très défavorable à ces amendements.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Avis défavorable. Nous parlons certes de personnes incarcérées. Toutefois, il faut comprendre le mot « libre » employé à l’alinéa 9 dans le sens de « dénué de pression extérieure ». Être incarcéré n’empêche pas de forger sa volonté en dehors de toute pression extérieure. (Mme Anne-Laure Blin s’exclame.) Les éléments importants qui devront être regardés par le juge seront la capacité de la personne à manifester sa volonté et, probablement, sa souffrance psychologique, point qui nous ramène à l’alinéa 8.

    Mme Anne-Laure Blin

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    C’est la souffrance physique ou la souffrance psychologique, ce n’est pas cumulatif !

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Rien n’interdit à une personne incarcérée de bénéficier de l’aide à mourir si elle répond aux différents critères fixés. Pour elle, comme pour tout autre patient, on regardera l’ensemble des critères, dont bien sûr la pathologie, en s’assurant évidemment de sa capacité à manifester sa volonté de façon libre et éclairée, c’est-à-dire sans pression extérieure. (Mme Ayda Hadizadeh applaudit.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Nicole Dubré-Chirat.

    Mme Nicole Dubré-Chirat

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    Nous sommes capables d’entendre beaucoup de choses dans cet hémicycle, mais un peu de compassion et d’humanité me paraissent nécessaires. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC et EcoS, ainsi que sur certains bancs du groupe EPR.)
    Comme l’a dit M. Falorni, un détenu est avant tout une personne et un citoyen qui conserve sa liberté de penser. Même sanctionné par la justice, on peut penser et exprimer ses souhaits. On peut aussi, malheureusement, être malade. Dans les maisons d’arrêt, les équipes médicales et paramédicales savent prendre en charge les patients qui, si leur état s’aggrave, peuvent sortir pour être hospitalisés ou voir leur peine suspendue. Il est hallucinant d’entendre certains proposer une sorte de double peine ajoutant à la sanction judiciaire l’interdiction de se faire soigner. Incarcéré ou non, tout citoyen a le droit d’être soigné. J’invite les auteurs de ces amendements à réfléchir et à faire preuve d’humanité. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR, LFI-NFP et SOC.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-François Coulomme.

    M. Jean-François Coulomme

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    J’irai dans le sens de M. le rapporteur général et de Mme la ministre. Je suis atterré par les amendements inhumains que vous êtes capables de proposer, sans réfléchir. (Mme Hanane Mansouri s’exclame.)

    Mme Ayda Hadizadeh

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    Exactement !

    M. Jean-François Coulomme

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    Monsieur Juvin, vous êtes d’une terrible hypocrisie puisque les arguments que vous avez mis en avant pour défendre votre amendement ne sont pas ceux qui figurent dans son exposé sommaire. Vous dites vouloir priver les détenus du droit à bénéficier de l’aide à mourir parce qu’ils n’auraient pas la liberté de choix ; mais l’exposé sommaire indique que cela constituerait une « alternative à la prison ». (« La honte ! » sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Oui, c’est honteux !
    Vous voulez empêcher les personnes incarcérées ou faisant l’objet d’une mesure de probation de bénéficier de cette disposition ; mais si notre système carcéral était suffisamment doté et bien organisé, celles qui sont concernées par le texte auraient une dispense ou un aménagement de peine pour raison médicale.
    Je rappelle que la peine de prison consiste à priver les personnes sous main de justice de leur liberté de déplacement, non à leur retirer toutes les libertés. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)
    Quant à vous, vous voulez les faire souffrir ; c’est une forme de torture…

    M. Ugo Bernalicis

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    Eh oui !

    M. Jean-François Coulomme

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    …que prévoient ces quatre amendements pour les personnes déjà privées de leur liberté de mouvement.
    Aujourd’hui, 150 personnes par an meurent en prison de mort naturelle, alors que leur décès devrait avoir lieu en milieu médical. Ces amendements sont absolument ignobles et nous nous y opposons de toutes nos forces, pour des raisons d’humanité. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Juvin.

    M. Philippe Juvin

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    Voilà une semaine qu’on débat et, régulièrement, nous nous voyons accuser d’hypocrisie (« Oui ! » sur les bancs du groupe LFI-NFP), d’inhumanité (Mêmes mouvements), d’absence de compassion (Mêmes mouvements) et, récemment, d’absence de réflexion.

    M. Ugo Bernalicis

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    Ça arrive !

    M. Philippe Juvin

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    Je veux bien ; on a les épaules larges. Je ne suis pas d’accord sur bien des points avec vous qui siégez en face ; mais jamais je ne vous ai fait une leçon de morale ! (Applaudissements sur les bancs des groupes DR, RN et UDR ainsi que sur quelques bancs du groupe EPR. –⁠ Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Ugo Bernalicis

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    Vous ne vous fondez que sur de la morale !

    M. Philippe Juvin

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    Jamais non plus je ne vous ai accusés de ne pas réfléchir.
    Sur le fond, je soutiens qu’en prison, le consentement n’est pas libre et éclairé.

    Mme Ayda Hadizadeh

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    Ils gardent leur liberté de pensée !

    M. Philippe Juvin

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    Non, il n’est pas aussi libre et éclairé que quand on jouit de la pleine liberté ; c’est différent.

    M. Patrick Hetzel

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    Lisez Foucault, vous allez comprendre !

    M. Philippe Juvin

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    En effet : lisez Foucault ! La question du suicide en prison est clé. À votre avis, pourquoi les gens se suicident-ils plus souvent en prison qu’ailleurs ? Y a-t-il une raison ? (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.) En voyez-vous une ?

    M. Ugo Bernalicis

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    Alors ? Allez-y, dites-nous !

    M. Philippe Juvin

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    Si vous percevez cette raison, posez-vous la question : les personnes incarcérées ont-elles les mêmes capacités de choix que les personnes libres ?

    M. Ugo Bernalicis

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    Encore un pas sur la prison et vous deviendrez abolitionniste !

    M. Philippe Juvin

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    Interrogez-vous sur la réponse que vous faites ! On peut ne pas être d’accord, mais votre absence de doute est abyssale. (Applaudissements sur les bancs des groupes DR, RN et UDR.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 2589.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        227
            Nombre de suffrages exprimés                189
            Majorité absolue                        95
                    Pour l’adoption                58
                    Contre                131

    (L’amendement no 2589 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 1010.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        229
            Nombre de suffrages exprimés                192
            Majorité absolue                        97
                    Pour l’adoption                60
                    Contre                132

    (L’amendement no 1010 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 141 et 1614.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        233
            Nombre de suffrages exprimés                206
            Majorité absolue                        104
                    Pour l’adoption                73
                    Contre                133

    (Les amendements identiques nos 141 et 1614 ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    Il nous reste une dizaine d’amendements à l’article 4. Examinons-les sereinement, votons l’article et prenons une pause !
    La parole est à M. Gérault Verny, pour soutenir les amendements nos 882, 888, 911, 925, 967 et 1016, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

    M. Gérault Verny

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    Hier, on m’a reproché de faire de l’obstruction.

    M. Matthias Tavel

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    Oui !

    M. Gérault Verny

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    Ce n’est pourtant pas le cas. Tous les amendements que j’ai déposés sont argumentés,…

    M. Hadrien Clouet

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    La blague !

    M. Gérault Verny

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    …comme le sont les six que je défends. Je suis opposé à ce texte,…

    Mme Ayda Hadizadeh

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    On a compris !

    M. Gérault Verny

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    …c’est pourquoi je l’amende –⁠ et je ne suis pas seul dans ce cas. La grande majorité des amendements déposés par les députés de nos groupes visent à cadrer le texte. Nous ne sommes pas là pour exprimer des émotions, mais pour faire du droit. Nous sommes manifestement nombreux à considérer que le texte est flou et donc trop sujet à interprétation. Tous les amendements cherchaient à y remédier. (« Donc vous les avez retirés ! » sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    J’insiste, monsieur le rapporteur général : oui, je suis contre le texte –⁠ il y va de mes convictions les plus profondes ; non, il n’y a pas d’obstruction. Pour la bonne tenue des débats, j’ai d’ailleurs retiré une série d’amendements. Je ne vous permets pas de dire que nous faisons de l’obstruction.

    M. Hadrien Clouet

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    C’est de l’obstruction !

    M. Gérault Verny

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    C’est simplement la manifestation d’une inquiétude quant à la permissivité du texte. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes UDR et RN.)

    Mme la présidente

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    Merci, monsieur Verny, pour ces explications ! Merci d’avoir effectué un retrait massif de vos amendements et d’avoir défendu ceux-là.

    (Les amendements nos 882, 888, 911, 925, 967 et 1016, repoussés par la commission et le gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    L’amendement no 1717 de M. Bartolomé Lenoir est défendu.

    (L’amendement no 1717, repoussé par la commission et le gouvernement, n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de trois demandes de scrutin public : sur les amendements nos 1940 et 2335, par le groupe Rassemblement national ; sur l’article 4, par les groupes Ensemble pour la République, Socialistes et apparentés et Horizons & indépendants.
    Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    L’amendement no 1940 de Mme Lisette Pollet est défendu.
    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Brigitte Liso, rapporteure

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    Défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Même avis.

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 1940.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        226
            Nombre de suffrages exprimés                214
            Majorité absolue                        108
                    Pour l’adoption                76
                    Contre                138

    (L’amendement no 1940 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Hervé de Lépinau, pour soutenir l’amendement no 2335.

    M. Hervé de Lépinau

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    Il s’agit, en un sens, d’un amendement d’appel. Le texte examiné nous amène à entrer dans des considérations vitales et létales ; on touche le cœur de ce qui constitue notre humanité et on ne peut pas faire les choses à la légère.
    Il m’a semblé intéressant de faire un parallèle avec ce qui se fait en matière contractuelle : en effet, puisque l’échange avec le médecin fera intervenir la notion de consentement, la mort se trouvera de fait contractualisée. Or qui dit consentement, dit possibilité de vice du consentement. On peut parfois être amené à souscrire un contrat sous la contrainte, la menace ou la violence ; le dol et l’erreur sont également sources de vice.
    Dans ces conditions, il paraît important d’ajouter un critère pour qu’un tiers puisse émettre des objections et affirmer, sur la base d’un faisceau d’indices, que le consentement de la personne qui demande la mort n’est pas libre.
    Adopter cette disposition serait faire preuve de responsabilité. Les vices du consentement sont retenus pour n’importe quel contrat signé : un contrat de téléphonie, d’achat de voiture, de machine à laver ou de voyage familial. En l’occurrence, il s’agit de vie et de mort ; nous devrions à tout le moins être très attentifs et chercher à caractériser ces vices, s’ils existent, et surtout le faire avant l’acte létal. En effet, n’oublions pas que l’euthanasie et le suicide assisté obéissent au principe du tube de dentifrice : une fois que la décision est prise et l’injection faite, on ne reviendra jamais en arrière.

    M. Erwan Balanant

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    Comparer cela au brossage de dents, franchement…

    M. Hervé de Lépinau

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    Enfin, vous souhaitez que l’acte de décès porte la mention « mort naturelle » ; à partir du moment où on aura mis en évidence un vice du consentement, on pourra annuler cette mention et engager les enquêtes judiciaires nécessaires pour déterminer pourquoi le consentement était vicié. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Brigitte Liso, rapporteure

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    Nous avons très longuement débattu du consentement libre et éclairé. Je répète : il faut faire confiance au médecin qui examinera la personne ; lors de la procédure, il pourra, s’il le souhaite, faire appel à un psychologue ou à un psychiatre pour s’assurer de la volonté du patient. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Depuis que nous cheminons dans l’examen de ce texte, chacun est conscient que nous parlons de vie et de mort –⁠ une mort entraînée par une pathologie et par une souffrance. Dans ce contexte grevé par la maladie, nous essayons de permettre au patient d’exprimer son souhait, dans un dialogue singulier avec les professionnels de santé, notamment le médecin qui va examiner sa demande.
    Je comprends le parallèle que vous voulez établir avec la notion de contrat ; mais en éminent juriste que vous êtes, vous savez qu’on est là dans un contexte très différent, celui de la relation entre le médecin et son patient, où les critères déterminants se rapportent à l’examen médical et à la volonté du patient, qu’on cherche à recueillir jusqu’au bout. À plusieurs reprises au cours de la procédure, le patient est amené à manifester et à réitérer son souhait. Il doit manifester sa volonté deux fois ; la troisième fois, il répond à la question qu’on lui pose, exprimant par là son consentement. Tout le sens de la procédure est de permettre au patient, à chaque étape, d’exprimer sa volonté, et uniquement la sienne.
    Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Christophe Bentz.

    M. Christophe Bentz

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    Tout d’abord, je souhaite que nos débats restent apaisés. J’ai senti une petite tension lorsqu’il s’est agi des détenus : le sujet est en effet sensible, mais cela ne doit pas remettre en cause notre choix collectif de mener ce débat de façon sereine, dans le respect des convictions de chacun –⁠ y compris celle de Philippe Juvin !
    N’ayant pas réussi à faire supprimer les articles 1er à 3, qui définissent l’aide à mourir, nous avons souhaité restreindre, encadrer, contraindre, voire, certains l’ont assumé, complexifier l’article 4, à défaut de le supprimer, lui aussi. En effet, ce texte contient deux anti-garde-fous : à l’article 4, la « phase avancée » de la maladie constitue un critère flou et permissif ; à l’article 17, le délit d’entrave est tout aussi mal défini.
    Le groupe Rassemblement national réunit des députés aux sensibilités différentes. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme Émilie Bonnivard

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    Ne commencez pas !

    M. Christophe Bentz

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    Nos positions sur ce texte présentent plusieurs nuances, mais nous avons un point commun : nous donnons la priorité aux soins palliatifs, à la défense du corps et de la vie de tous les Français. En effet, nous défendons tous, au sein de notre groupe, la justice médicale et sociale pour nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Yannick Monnet.

    M. Yannick Monnet

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    Je pense que vous n’interprétez pas le texte correctement : vous parlez de consentement, alors qu’il ne s’agit pas de consentement dans le texte. Consentir, c’est donner son accord à une action. En l’occurrence, le patient ne donne pas son accord ; il exprime une volonté, ce qui est totalement différent. Ce n’est pas le médecin qui propose l’aide à mourir, mais le patient qui exprime sa volonté, libre et éclairée. Je ne comprends donc pas pourquoi vous parlez de consentement, puisqu’il ne s’agit en aucun cas de cela.

    M. Philippe Vigier

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    Très bien !

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 2335.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        273
            Nombre de suffrages exprimés                250
            Majorité absolue                        126
                    Pour l’adoption                88
                    Contre                162

    (L’amendement no 2335 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’article 4, tel qu’il a été amendé.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        274
            Nombre de suffrages exprimés                267
            Majorité absolue                        134
                    Pour l’adoption                164
                    Contre                103

    (L’article 4, amendé, est adopté.)
    (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC, EcoS et GDR, ainsi que sur plusieurs bancs des groupes EPR et Dem.)

    Suspension et reprise de la séance

    Mme la présidente

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    La séance est suspendue.

    (La séance, suspendue à dix-sept heures quarante-cinq, est reprise à dix-sept heures cinquante-cinq.)

    Mme la présidente

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    La séance est reprise.

    Après l’article 4

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de plusieurs amendements portant article additionnel après l’article 4.
    La parole est à M. Xavier Breton, pour soutenir l’amendement no 1616.

    M. Xavier Breton

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    Déposé par notre collègue Thibault Bazin, cet amendement, dont je suis cosignataire, vise à exclure l’euthanasie et le suicide assisté des directives anticipées.
    Est-il certain que des personnes bien portantes soient capables de discernement à l’avance, parfois des années avant qu’une maladie ou un accident ne survienne ? Combien de personnes se sont relevées et ont choisi de survivre à une situation de handicap ou de maladie qu’elles n’auraient jamais cru être capables de surmonter ? Comment comprendre sans la vivre la situation d’une personne gravement malade et prévoir son état d’esprit ? La personne encore bien portante est-elle meilleure juge que les soignants de soins palliatifs, qui accompagnent les malades au quotidien et qui nous disent combien l’âme humaine est fluctuante ?
    Toutes ces questions se posent. Les réponses qu’elles appellent sont précieuses et doivent être nuancées. C’est pourquoi mon collègue Bazin et moi-même vous invitons à voter cet amendement.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Brigitte Liso, rapporteure

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    Votre amendement est satisfait, puisqu’au cours des débats nous avons repoussé un grand nombre d’amendements qui visaient établir un lien entre l’aide à mourir et les directives anticipées. Qui plus est, nous avons, à juste titre, longuement examiné les dispositions relatives à ces directives lors de l’examen de la proposition de loi précédente, déposée par Mme Vidal.
    Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Même avis.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Thibault Bazin.

    M. Thibault Bazin

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    J’assistais à une commission mixte paritaire, dont je sors à l’instant ; cela m’a empêché de défendre mes amendements, notamment sur le précédent article, qui me semblait inquiétant, ce que je remercie mes collègues d’avoir fait.
    L’amendement qu’a défendu Xavier Breton est cohérent avec ce que nous soutenons depuis le début et reprend un point d’équilibre mis en avant par Mme la rapporteure : ce n’est pas l’affaire des directives anticipées, puisqu’il faudra au contraire que la demande, libre et éclairée, soit réitérée jusqu’au dernier moment. Cet amendement vise à l’écrire clairement.
    Quand on discute avec nos concitoyens, on s’aperçoit d’ailleurs que nombre d’entre eux croient que le texte permettra en quelque sorte aux personnes de programmer les choses et de dire à l’avance : « Si mon état se dégrade, alors je souhaiterai pouvoir bénéficier de cette aide. » Cela crée beaucoup de confusions –⁠ ce matin encore, des échanges que j’ai eus me le confirmaient – entre ce que le texte prévoit et ce qu’il ne prévoit pas.
    La question est d’autant plus importante qu’il arrive qu’à propos d’éléments très concrets, les personnes malades changent d’avis par rapport aux volontés exprimées dans leurs directives anticipées. Or nous devons à chaque instant tenir compte de leur volonté, et ce jusqu’au dernier moment de la vie, conformément à une éthique de l’autonomie. Les choses ne doivent pas être programmées à l’avance. Tel est le sens de cet amendement, que je vous invite tous à soutenir.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Vigier.

    M. Philippe Vigier

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    Je ne comprends pas l’obstination déraisonnable dont fait preuve notre collègue Thibault Bazin. Nous avons expliqué que les directives anticipées ne concernaient pas l’aide à mourir, et vous voulez réintroduire des dispositions à leur sujet dans le texte ? Je vous ai écouté avec beaucoup d’attention : vous venez de dire qu’il faut prendre en considération la volonté du patient « jusqu’au dernier moment de la vie ». Mais ce que nous avons prévu sur ce point est très clair ! Vous dites que les directives anticipées doivent exclure « tout ce qui pourrait conduire à la programmation de la mort » : ce sont les mots que vous avez écrits ! C’est même à se demander si vous ne regrettez pas que nous n’ayons pas fait figurer l’aide à mourir dans les directives anticipées –⁠ ce à quoi nous nous refusons absolument.

    M. Thibault Bazin

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    Certainement pas !

    M. Philippe Vigier

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    Ne feignez pas de ne pas comprendre, monsieur Bazin : vous comprenez très bien ! Je vous connais par cœur.

    M. Philippe Gosselin

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    Inutile d’être agressif !

    M. Philippe Vigier

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    La réitération de la demande jusqu’au dernier moment, c’est précisément ce qui donne son équilibre au texte. Par votre amendement, vous le fragilisez parce que vous mentionnez les directives anticipées, ce qui est une manière de les réintroduire dans le texte. Ne troublez pas les choses ! Vous aimez la clarté et la transparence ; ne compliquez pas un dispositif qui est, je crois, bien équilibré.

    M. Alexandre Portier

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    Thibault Bazin est un esprit clair !

    (L’amendement no 1616 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Alexandre Portier, pour soutenir l’amendement no 183.

    M. Alexandre Portier

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    Il vise à inscrire dans la loi que « la demande d’aide à mourir ne peut être formulée que directement par la personne concernée, sans intervention d’un tiers », et ce pour deux raisons. Il s’agit d’abord de préserver l’autonomie et la liberté de choix du patient en fin de vie, en interdisant toute intervention extérieure dans la formulation de cette demande –⁠ l’objectif est de le protéger contre les pressions potentielles qui pourraient être exercées par ses proches, des soignants ou d’autres parties prenantes, et de s’assurer que l’aide en question procède toujours d’une démarche volontaire et personnelle qui reflète véritablement sa volonté.
    Il s’agit ensuite –⁠ cette deuxième raison est liée à la première – de renforcer la transparence du processus de demande d’aide à mourir et donc la confiance en celui-ci, en éliminant les risques de manipulation et de coercition. C’est ce qui permet de rester en adéquation avec les principes fondamentaux non seulement de l’autonomie mais aussi de la dignité humaine, en offrant une protection supplémentaire à tous les patients vulnérables.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Brigitte Liso, rapporteure

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    Votre demande est satisfaite, ne serait-ce que par l’alinéa 9 de l’article 4, selon lequel la personne doit « être apte à manifester sa volonté de façon libre et éclairée. » Qui plus est, à l’article 5, que nous examinerons juste après, nous débattrons encore de ce sujet. Avis défavorable.

    (L’amendement no 183, repoussé par le gouvernement, n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Alexandre Dufosset, pour soutenir l’amendement no 725.

    M. Alexandre Dufosset

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    Je ne m’étendrai pas car nous venons déjà d’en discuter longuement. L’amendement vise à exclure de l’aide à mourir les personnes « faisant l’objet d’une procédure pénale en cours pour des faits passibles de sanction criminelle ou correctionnelle, et dont la responsabilité pénale est susceptible d’être engagée ». Cette exclusion s’appliquerait « jusqu’au prononcé définitif de la décision de justice ». L’aide à mourir est un acte irréversible, qui exige un consentement libre, éclairé, constant et non influencé. Or une personne mise en examen, détenue provisoirement ou en attente de jugement, est en situation de forte vulnérabilité psychologique, sociale et juridique. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Brigitte Liso, rapporteure

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    Je crois que nous avons répondu longuement –⁠ et fort brillamment –, par la voix du rapporteur général, il y a quelques instants. Ma position est exactement la même que la sienne : défavorable.

    (L’amendement no 725, repoussé par le gouvernement, n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Bartolomé Lenoir, pour soutenir les amendements nos 1718 et 1719, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

    M. Bartolomé Lenoir

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    Ils visent à s’assurer, que l’on soit pour ou contre le texte, que la demande d’aide à mourir ne résulte pas d’un défaut ou d’une inégalité d’accès aux soins –⁠ il est ici question des soins en général, pas uniquement des soins palliatifs. Il s’agit ainsi de défendre nos campagnes, qui ont moins accès aux soins que les zones urbaines ; il est essentiel de garantir qu’il n’y a pas eu de manquement en la matière. C’est une inquiétude légitime qui s’est exprimée dans ma circonscription, et j’aimerais d’ailleurs savoir ce que vous en pensez.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Brigitte Liso, rapporteure

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    Voilà un sujet dont nous avons aussi très longuement débattu ; pour les mêmes raisons que précédemment, je suis défavorable à ces deux amendements.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Je comprends parfaitement la préoccupation qui est mise en avant par M. le député Lenoir. Nous avons la volonté, exprimée à plusieurs reprises –⁠ nous avons particulièrement insisté sur le sujet des soins palliatifs mais cela concerne l’ensemble des soins –, de garantir notamment le développement de l’hospitalisation à domicile et l’accompagnement des patients. Je prends acte de votre demande mais je suis défavorable à vos amendements, car ils ne relèvent pas du corpus législatif auquel nous nous intéressons ici. Il n’en reste pas moins que ce que vous signalez est essentiel ; je tenais donc à souligner, dans nos débats, l’attention que prête le gouvernement à ce sujet.

    M. Bartolomé Lenoir

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    Merci !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Christophe Bentz.

    M. Christophe Bentz

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    Merci, madame la ministre, de reconnaître que, sur le fond, vous êtes d’accord avec ces amendements de notre collègue Bartolomé Lenoir. À l’image de ce que nous avons fait hier pour d’autres amendements dont l’objectif était proche, nous soutiendrons celui-ci. En effet, autoriser l’aide à mourir dans des territoires marqués par de graves défaillances en matière d’accès aux soins, ce serait commettre une profonde injustice, car elle n’y résulterait jamais d’une véritable liberté de choix.
    Il faut absolument soutenir ces amendements, parce que l’accès aux soins est une garantie fondamentale : c’est le garde-fou le plus puissant, le plus définitif et le plus sécurisant que nous pouvons introduire. En effet, si nous les adoptions, ce que j’espère, alors nous ne pourrions pas proposer l’aide à mourir, le suicide assisté ou le suicide délégué à des Français qui n’ont pas accès aux soins, notamment aux soins palliatifs. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RN et UDR.)

    (Les amendements nos 1718 et 1719, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Brigitte Liso, rapporteure.

    Mme Brigitte Liso, rapporteure

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    Au moment où je vais céder la place à mon collègue Laurent Panifous pour l’examen des articles suivants, je voudrais dire que je suis vraiment très fière et très heureuse que nous puissions débattre enfin de ce texte, dont la discussion ira cette fois-ci, je l’espère, à son terme et se conclura par une adoption. Quoi qu’il arrive, nous vivons un moment qui va marquer notre société. Nous pouvons être fiers de ces deux textes, portant respectivement sur les soins palliatifs et sur l’aide à mourir ; je vous remercie. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR, LFI-NFP, SOC, EcoS et Dem. –⁠ M. Laurent Panifous, rapporteur de la commission des affaires sociales, et Mme Sophie Errante applaudissent également.)

    M. Philippe Vigier

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    Très bien !

    Mme la présidente

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    Quant à nous, nous vous remercions pour votre travail. Merci à vous !

    Article 5

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Thomas Ménagé.

    M. Thomas Ménagé

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    L’article 5 est un pivot essentiel de cette proposition de loi. Il organise la procédure d’accès à l’aide à mourir, à laquelle nous avons défini, au cours de ces dernières heures, les critères d’éligibilité. Je signale d’abord une disposition importante, qui contribue à l’équilibre du texte : la réaffirmation du rôle des soins palliatifs. Avant toute décision, le médecin doit informer la personne de l’existence de ces soins et lui assurer un accès effectif à ceux-ci, si elle le souhaite. Cela nous paraît fondamental car une chose est très claire : l’aide à mourir ne doit jamais être un pis-aller, une réponse par défaut à une absence de soins ; en d’autres termes, un palliatif à l’absence de soins palliatifs. (« Exactement ! » sur les bancs du groupe RN.)
    L’aide active à mourir doit rester une liberté ultime et éclairée, quand tout a été tenté. Or, aujourd’hui encore, des milliers de nos concitoyens n’ont pas accès à des soins palliatifs, faute de structure, de personnel formé et, surtout, de moyens. J’y insiste : ce texte, si nous voulons qu’il soit pleinement cohérent, doit s’accompagner d’un plan national ambitieux en faveur des soins palliatifs, dont les engagements, au-delà des annonces, devront être tenus dans les années à venir. On ne peut pas ouvrir un droit nouveau sans garantir les droits existants !
    Sur le fond, l’article 5 est entouré de nombreuses interrogations. D’abord, protège-t-on assez les personnes qui font l’objet d’une mesure de protection juridique ? Ensuite, porte-t-on une attention suffisante à nos concitoyens en situation de handicap, alors qu’un dispositif les concernant spécifiquement a été supprimé en commission ? Enfin, comment s’assurer réellement qu’une personne ne déposera pas plusieurs demandes simultanées en attendant que l’une d’entre elles aboutisse ?
    Toutes ces questions ont fait l’objet d’amendements de députés du groupe Rassemblement national, qu’ils soient favorables ou défavorables à l’ouverture de ce nouveau droit –⁠ ou de cette nouvelle liberté –, afin de l’enrichir et de le sécuriser le plus possible. J’espère que nos débats continueront d’être apaisés et que nous obtiendrons des réponses sur les différents sujets que je viens d’aborder. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Annie Vidal.

    Mme Annie Vidal

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    L’article 5, que nous nous apprêtons à examiner, porte sur ce que l’on pourrait appeler l’entrée dans le processus de demande de mort, qui sera fondée sur la définition que nous avons adoptée à l’article 4. Comme tous les processus, celui-ci est systémique ; il doit donc être solide. Pour ma part, à ce stade de la rédaction du texte, j’éprouve un certain nombre d’inquiétudes quant à cette solidité.
    Premièrement, l’accès à l’aide à mourir procédera d’une « demande expresse » non écrite. Or nous savons que, dans la plupart des pays voisins qui ont introduit ce droit, une demande écrite est exigée. Pourquoi ? Parce que cette demande de mort n’est pas anodine : sa formalisation par écrit est, pour le patient concerné, l’occasion d’une prise de conscience. C’est fondamental pour qu’il réalise vraiment en quoi consiste concrètement cette demande, sachant que, dans plus de la moitié des cas, quand il faut mettre par écrit la demande de mort, le patient renonce ; le doute est ainsi levé, et c’est tant mieux. Pour l’instant, notre texte n’exige pas que la demande soit écrite mais j’espère que nos débats permettront d’introduire cette précision.
    Je me réjouis de l’ajout de la disposition selon laquelle, au cours de la démarche, le médecin informe la personne qui formule la demande qu’elle peut bénéficier de soins palliatifs. Nous voulons rendre cet accès effectif dans les meilleurs délais mais, à l’heure où nous parlons, il n’est malheureusement pas encore garanti partout. Ce décalage temporel entre les effets des deux textes risque de mettre les médecins dans des situations difficiles. Ils éprouveront en outre des difficultés à informer les patients de ce qu’est l’aide à mourir, compte tenu des imprécisions qui continuent d’entourer sa définition.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Hadrien Clouet.

    M. Hadrien Clouet

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    Dans les articles précédents, nous avons défini les critères d’éligibilité qui permettent de déposer une demande d’aide à mourir. Ici, nous allons examiner la manière dont s’opère concrètement le dépôt de cette demande. L’article 5 est centré sur une figure, celle du médecin, qui est l’acteur de référence à toutes les étapes du processus ; nous sommes donc bien en train de parler d’une aide médicale à mourir.
    L’article crée plusieurs garde-fous essentiels, qui ont fait l’objet d’un consensus et que personne ne remet en cause : par exemple, le médecin sollicité ne doit pas avoir de lien familial proche avec la personne concernée et la demande ne peut être déposée dans le cadre d’une téléconsultation. Sur ces sujets, il n’y aura pas de discussion politique entre nous : ce sont des acquis de la commission dont nous ne pouvons que nous réjouir.
    La loi confie plusieurs missions au médecin saisi d’une demande d’aide à mourir. Il doit informer la personne sur les perspectives de soins, autrement dit être au clair avec elle sur l’état des connaissances scientifiques et pharmaceutiques susceptibles de contribuer au soulagement de ses douleurs, voire, dans certains cas, de mener à sa guérison –⁠ c’est le moment où l’on discute des hypothèses existantes. Il doit aussi lui proposer l’accès aux soins palliatifs ; lui proposer de l’orienter vers un suivi psychologique ; lui rappeler qu’elle peut renoncer à sa demande, à tout moment de la procédure, en lui exposant comment faire ; lui expliquer les conditions d’accès à l’aide à mourir et sa mise en œuvre, si elle le souhaite. Le groupe La France insoumise juge satisfaisant cet ensemble de missions confiées au médecin. Nous allons donc nous battre pour les défendre, ce point d’équilibre étant de nature à recueillir un soutien très majoritaire dans notre assemblée.
    Cependant, il y a deux points sur lesquels nous proposons de clarifier le texte ou de faire un peu mieux. Premièrement, nous voulons nous assurer que, lorsqu’une personne ne veut pas bénéficier de soins palliatifs, elle ne sera pas pour autant exclue du bénéfice de l’aide à mourir. Deuxièmement, nous souhaitons que, dans le cas où une personne perd conscience après avoir déposé une demande d’aide à mourir, on puisse, si elle a rédigé des directives anticipées, donner droit à cette demande. Nous avons donc déposé deux amendements, dont nous espérons l’adoption.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel.

    Mme Marie-Noëlle Battistel

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    L’article 5 est au cœur de la démarche permettant d’accéder à l’aide à mourir. Cette demande, appelée à déboucher sur un acte, doit être entourée de toutes les garanties nécessaires pour préserver la liberté et la dignité du patient, tout en définissant un cadre clair et protecteur pour les soignants. C’est le sens des garde-fous que nous avons toutes et tous prévus, de manière assez consensuelle.
    Plusieurs points restent néanmoins à discuter. Sans vouloir vous paraître trop insistante, je reviendrai, avec plusieurs de mes collègues qui partagent mes convictions, sur la question des directives anticipées. Nous vous présenterons des amendements, incarnant l’esprit de clarté que j’ai énoncé, pour que puisse être prise en compte la volonté que le patient aurait exprimée dans des directives anticipées. Pour certains d’entre nous, cette prise en compte pourrait enclencher la procédure. Pour d’autres, qui souhaitent un cadre plus restrictif, elle ne serait possible que si la démarche a été engagée et que la personne n’est plus capable de réitérer sa demande. Il nous semble essentiel qu’au moins cette solution de repli soit retenue.
    D’autre part, nous serons vigilants, car certains collègues ont déposé des amendements tendant à empêcher le patient d’accéder à l’aide à mourir s’il a refusé les soins palliatifs. Le texte doit rester en l’état pour laisser intacte la liberté de choix du patient. En aucun cas, le refus de bénéficier de soins palliatifs ou d’accompagnement ne doit constituer pour le médecin un motif de rejet de la demande.
    S’agissant de l’accès à l’aide à mourir, il ne faudrait pas non plus que le principe de vulnérabilité s’oppose au principe d’autonomie.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Patrick Hetzel.

    M. Patrick Hetzel

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    Nous en arrivons, avec cet article, à la procédure. L’acte envisagé, nous en serons tous d’accord, est irréversible. Il s’agit, par voie de conséquence, non pas d’un soin, mais d’une décision qui met fin à toute possibilité, aussi bien thérapeutique, relationnelle, qu’existentielle.
    Une telle gravité doit conduire à prévoir une procédure exceptionnelle. Dans ce cadre, la demande d’euthanasie ou de suicide assisté ne saurait être validée par la décision d’un seul médecin –⁠ je dis bien la décision d’un seul médecin. En effet, la collégialité, telle qu’elle est prévue dans le texte, ne peut pas être considérée comme une collégialité au sens propre du terme, ce qui est particulièrement grave dans un contexte potentiellement chargé de pressions implicites, voire d’émotions difficiles à discerner.
    C’est pourquoi une triple vérification s’impose, d’abord dans le temps pour permettre au patient de traverser des phases d’ambivalence ou de souffrance aiguë temporaire. La question de l’ambivalence, même si la tentation est grande pour les promoteurs du texte de l’écarter, ne doit pas être négligée. Une telle décision n’est pas toujours univoque.
    Ensuite, il n’y a pas de discernement médical sans un véritable collège de professionnels indépendants, seul à même d’écarter tout risque de dérive individuelle. Ceci n’est pas une marque de défiance vis-à-vis des professionnels concernés : c’est tout simplement un risque dont on ne peut nier l’existence.
    Enfin, il faut vérifier l’expression de la volonté par la réitération explicite, durant plusieurs jours, de la volonté du patient, afin qu’aucune décision ne soit prise par induction ou de manière impulsive.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Geneviève Darrieussecq.

    Mme Geneviève Darrieussecq

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    Cet article, important en ce qu’il traite de la procédure, doit être écrit au cordeau. S’il est un sujet pour lequel je me suis pleinement investie l’an dernier, c’est bien celui de la protection des plus fragiles, des plus vulnérables, mais aussi des soignants, dans leur ensemble. On leur en demande beaucoup, aux soignants, dans ce texte ! On voudrait qu’ils réalisent des actions qui n’entrent pas dans leurs habitudes et, surtout, qui ne relèvent pas des soins. On voudrait encore qu’ils évaluent la situation des patients, voire qu’ils accomplissent l’acte si le malade n’a plus la capacité de le réaliser lui-même.
    Je vous demande donc de réfléchir, tous ensemble, à ce que les médecins ne participent à cette procédure que sur la base du volontariat, principe qui me semblerait plus puissant que la clause de conscience. Rendons-nous compte collectivement que ce texte est perçu avec méfiance par les personnels des services de soins palliatifs. Introduire le volontariat préviendrait les difficultés et éviterait que la procédure ne soit considérée comme discutable. Je serai donc attentive à l’évolution des débats sur ce sujet. Protégeons les soignants, pensons à eux.

    Mme la présidente

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    Nous en venons à plusieurs amendements de suppression de l’article, nos 32, 143, 400, 671, 772, 1147, 1341, 1617 et 2323, sur lesquels je suis saisie par les groupes Droite républicaine et UDR d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement no 32.

    M. Patrick Hetzel

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    La procédure prévue à l’article 5 ne nous semble pas suffisamment encadrée –⁠ nous avons eu un débat similaire à propos des critères. Nous présenterons donc, après ces amendements de suppression, des amendements qui visent à pallier ses insuffisances. Ayons conscience que la procédure ne doit pas être purement formelle et bureaucratique ; elle doit constituer une barrière de sauvegarde, évidemment humaine, qui protège les plus vulnérables. En l’absence de confirmation claire par le patient lui-même, elle devra être automatiquement suspendue. C’est la précaution minimale que l’on puisse prévoir.
    Si la société encadre l’irréversible, il faut que, pour chaque étape, on fasse preuve de la plus grande prudence. Il faut aussi assurer une traçabilité, non pas par méfiance à l’endroit du patient, mais par respect pour sa liberté, ses fluctuations émotionnelles et son droit à l’hésitation.
    C’est un message que nous serons quelques-uns à porter à travers nos amendements : le patient doit avoir le droit d’hésiter. La procédure ne saurait être irréversible une fois qu’elle est enclenchée, car son terme est aussi le terme de la vie du patient.

    Mme la présidente

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    L’amendement no 143 de M. Corentin Le Fur est défendu.
    La parole est à Mme Justine Gruet, pour soutenir l’amendement no 400.

    Mme Justine Gruet

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    Mme Simonnet disait ne pas comprendre pourquoi nous déposions des amendements de suppression, et je reconnais avoir fini par me poser moi-même la question de leur sens au regard de l’ensemble du texte,…

    Mme Danielle Simonnet

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    Ah ! Vous changez d’avis, alors ?

    Mme Justine Gruet

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    …dès lors que chaque article revêt une importance particulière. Mais Mme la ministre a précisé, et je l’en remercie, qu’il y aurait de nombreux allers-retours dans le cadre de la navette parlementaire, ce qui conforte notre détermination à faire supprimer cet article pour qu’il en soit écrit un autre plus protecteur des malades –⁠ ne serait-ce qu’en prévoyant une véritable collégialité et non plus un seul et unique médecin, qui puisse prendre de surcroît sa décision à distance.
    Supprimons cet article et faisons confiance aux parlementaires pour établir une procédure plus sécurisante.

    Mme la présidente

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    L’amendement no 671 de Mme Anne-Laure Blin est défendu.
    La parole est à M. Charles Rodwell, pour soutenir l’amendement no 772.

    M. Charles Rodwell

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    Je tiens tout d’abord à remercier le rapporteur général, M. Falorni, ainsi que tous les rapporteurs de nous permettre de poursuivre ce débat dans le respect des convictions de chacun.
    J’ai déposé cet amendement de suppression pour trois raisons. Tout d’abord, il traduit mon opposition de principe à ce texte, renforcée par ma conviction que son champ d’application sera inéluctablement élargi dans les prochaines années.
    Ensuite, à titre personnel, je considère que l’aide active à mourir n’est pas un soin –⁠ pas même du point de vue sémantique – mais un acte d’une autre nature, même s’il n’en reste pas moins empreint de dignité.
    Enfin, je ne crois pas qu’il soit judicieux de laisser la décision à un seul médecin, même s’il a consulté au préalable plusieurs de ses pairs. En fait de collégialité, le texte organise l’individualité de la décision. C’est pourquoi je vous propose de supprimer l’article 5.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l’amendement no 1147.

    M. Dominique Potier

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    Comme pour mes collègues, cet amendement est une manière de redire mon opposition de principe fondamentale au texte. Ma conviction est d’autant plus forte que celui-ci intervient dans un contexte géopolitique inquiétant. Dans toutes les grandes démocraties du monde, des courants libertariens s’affirment fortement. L’Europe et la France ne sont pas immunisées contre le développement de ce type de pensée, et je n’ose imaginer de quelle entreprise de discrimination et de ségrégation sociale, contraire à tous nos principes, ce renversement anthropologique pourrait un jour être au service.
    Si l’article devait être maintenu, nous chercherions, par les amendements suivants, à améliorer le rapport entre l’autonomie et la subjectivité, mais aussi à garantir la liberté des soignants de s’engager ou non dans cette démarche d’aide à mourir, pour préserver l’image qu’ils se font d’eux-mêmes et que l’on se fait d’eux. Surtout, nous nous attacherons à protéger les plus vulnérables, ce que ce texte ne fait pas suffisamment, à notre sens.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Charles Sitzenstuhl, pour soutenir l’amendement no 1341.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    En cohérence avec mon opposition à ce texte, l’amendement tend à supprimer l’article 5, qui traite de la procédure. Il a été beaucoup dit ces derniers jours, non seulement par les promoteurs de ce texte mais aussi sur les bancs des commissions et du gouvernement, que nous avions ici le texte le plus cadré, le plus restrictif, le plus consolidé de tous les pays qui se sont engagés dans l’euthanasie et le suicide assisté.

    M. Erwan Balanant

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    L’aide à mourir !

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Le débat sur cet article permettra de montrer qu’il n’en est rien, que ces proclamations sont fausses et que ces arguments ne servent en réalité qu’à rassurer les personnes qui hésitent encore sur la position à tenir par rapport à ce texte.
    Nous serons nombreux à montrer combien la procédure reste floue et laisse une marge à la subjectivité, là où un pays comme l’Autriche a su poser des critères beaucoup plus restrictifs, prévoir une procédure véritablement collégiale et imposer le passage devant un notaire. De notre côté, nous avons à ce stade un texte très permissif, qui ouvrira largement la voie aux abus et aux dérives, inévitables en pareille circonstance. L’expérience de bien d’autres pays, parmi lesquels la Belgique et les Pays-Bas, nous le prouve. C’est pourquoi il est fondamental de débattre de cet article. Nous mettrons en évidence la grande permissivité de ce texte destiné à légaliser l’euthanasie et le suicide assisté.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l’amendement no 1617.

    M. Thibault Bazin

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    Nous en venons à cet article 5 relatif à la procédure, qui fait écho à l’article 4 sur les critères, encore bien trop larges et flous pour mettre fin aux nombreuses incertitudes. Beaucoup de questions demeurent, auxquelles l’article 5 permettra peut-être de répondre.
    Tout d’abord, l’éligibilité aux critères sera-t-elle appréciée seulement au moment de la demande ou bien le sera-t-elle aussi au moment de l’administration de la substance létale ? La question se pose en particulier pour l’un des critères, l’aptitude du patient à manifester sa volonté de façon libre et éclairée.
    Plusieurs alinéas de l’article 5 suscitent des interrogations, notamment l’alinéa 7, qui concerne les personnes vulnérables faisant l’objet d’une mesure de protection.

    ------------------Cette partie de la séance est en cours de finalisation---------------------------------------------

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Julien Odoul.

    M. Julien Odoul

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    Dans l’état d’esprit rappelé par notre collègue Christophe Bentz, je dirai qu’il est évidemment naturel, que nous ayons des positions divergentes, teintées par nos expériences personnelles, familiales, par nos vécus. Il est en outre vrai que, quels que soient les bancs que nous occupons, nous avons tous accompagné ou connu des personnes en fin de vie.
    Un impératif de clarté s’impose : que l’on soit pour ou contre l’euthanasie, on ne peut pas la considérer comme un soin. Le soin, c’est veiller au bien-être de quelqu’un, améliorer ce bien-être. Bien que ce ne soit pas mon sentiment ni celui d’un grand nombre de députés de mon groupe, j’entends que certains puissent estimer qu’il s’agit d’une liberté. Mais, de grâce, à la fois pour les soignants, qui vont connaître une transformation majeure de leur vocation et du serment d’Hippocrate, et pour les patients, clarifions cette situation. On peut parler d’une liberté ; on ne doit pas considérer que nous avons affaire à un soin. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR. –⁠ M. François-Xavier Ceccoli applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Charles Sitzenstuhl.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Je soutiens ces amendements. Je suis assez perturbé par nos débats sur la question du soin. Nous en avons d’ailleurs déjà discuté il y a quelques jours. Dire que l’euthanasie ou le suicide assisté constituent un soin relève, pour moi, de la subversion du sens des mots –⁠ je vous le dis très clairement, comme je le pense ! On peut dire, suivant votre logique, qu’il s’agit d’un droit, d’une liberté, d’une possibilité ou encore d’un ultime recours. Mais dire que provoquer la mort d’un malade ou prêter assistance à un malade dans son suicide constitue un soin, c’est vraiment quelque chose que je ne comprends pas !

    Mme Anne-Laure Blin

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    C’est incroyable !

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Je m’étonne que, sur ce sujet, un certain nombre de collègues aient envie de parler au nom des médecins, en affirmant : « Les médecins considèrent que… » J’observe tout de même que si, lors de nos discussions, certains de nos collègues qui font partie du corps médical estiment qu’il s’agit d’un soin, d’autres pensent le contraire. Le débat est donc très compliqué et je pense qu’il faudrait faire preuve d’une extrême précaution à cet égard.
    Le mot soin n’est pas secondaire dans le langage quotidien. Moi, je ne suis pas médecin. Pour définir ce qu’est un soin, je m’en remets donc à ce qu’indiquent nos autorités publiques. Dans des documents facilement accessibles sur internet, la Haute Autorité de santé définit ce qu’est un acte de soin de la manière suivante : « […]un ensemble cohérent d’actions et de pratiques mises en œuvre pour participer au rétablissement ou à l’entretien de la santé d’une personne ». À « l’entretien de la santé d’une personne » ! Dans le vocabulaire de la HAS, il n’est pas fait référence à la mort, au suicide ou à l’aide à mourir. J’invite vraiment l’ensemble de nos collègues à une grande prudence et à ne surtout pas inverser la valeur du sens des mots. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RN, DR et UDR.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 33 et 144.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        241
            Nombre de suffrages exprimés                235
            Majorité absolue                        118
                    Pour l’adoption                101
                    Contre                134

    (Les amendements identiques nos 33 et 144 ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    L’amendement no 2381 de Mme Brigitte Barèges est défendu.
    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Laurent Panifous, rapporteur

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    Défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Défavorable.

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 2381.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        245
            Nombre de suffrages exprimés                235
            Majorité absolue                        118
                    Pour l’adoption                93
                    Contre                142

    (L’amendement no 2381 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Charles Rodwell, pour soutenir l’amendement no 774.

    M. Charles Rodwell

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    D’un mot rapide, je profite d’abord de cette intervention pour me désolidariser totalement des accusations dont le rapporteur général a fait l’objet. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR, SOC et Dem.) Vous connaissez ma conviction de fond : je suis opposé à ce texte. Mais je respecte évidemment la conviction du rapporteur général et je ne l’ai jamais vu manquer de respect aux convictions de chacun. (Mêmes mouvements.)
    Cela étant dit, cet amendement vise à supprimer le premier alinéa qui codifie la procédure d’aide active à mourir dans le code de la santé publique. Dans cette codification, on trouverait une disposition selon laquelle le médecin propose à la personne de bénéficier des soins d’accompagnement, y compris des soins palliatifs, et s’assure, le cas échéant, qu’elle puisse y accéder.
    Or, en l’état actuel, du fait de la mauvaise application de la loi Claeys-Leonetti –⁠ elle n’est pas appliquée partout et, quand elle l’est, c’est souvent de façon inexacte –, il se trouve qu’une vingtaine de départements n’ont pas accès aux soins palliatifs alors que d’autres, comme le mien, y ont un accès partiel et non conforme au texte –⁠ je pense notamment à ma circonscription, à la suite de la fermeture de la maison de santé Claire Demeure.
    Je ne vois donc pas comment cette partie de l’article pourra être effectivement appliquée si nous décidons conjointement et collectivement de codifier la procédure dans le code de la santé publique. C’est pourquoi je vous propose cette suppression.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Laurent Panifous, rapporteur

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    En réponse à cet amendement de suppression de l’alinéa 4, je dirai deux choses. D’abord, la codification ne fait pas le soin. Ensuite, il est assez paradoxal que celles et ceux qui souhaitent –⁠ je peux l’entendre – faire en sorte que l’on n’ait pas accès à un droit, parce que ce droit ne serait pas assez encadré, proposent de supprimer ce premier alinéa, qui commence à structurer la procédure de demande d’aide à mourir.
    Pour permettre la structuration, l’encadrement de cette demande, il ne faut évidemment pas supprimer les alinéas qui commencent à définir et à préciser la manière dont nous allons procéder. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    L’avis du gouvernement est évidemment le même que celui du rapporteur –⁠ je ne répéterai pas ses arguments. Je ne renoncerai jamais à dire qu’à l’occasion du travail que nous avons mené pendant toute la semaine dernière sur les soins palliatifs, la volonté de les développer s’est effectivement exprimée parmi vous. Vous l’affirmez tous et, s’il se dégage ici une unanimité, c’est bien celle-ci –⁠ en commission, la proposition de loi relative à l’accompagnement et aux soins palliatifs a d’ailleurs été votée à l’unanimité.
    Vous allez me dire : « Oui, mais que faites-vous ? » Je rappelle, pour celles et ceux qui nous rejoignent et insistent sur ces sujets, que, cette année, dans la loi de financement de la sécurité sociale, le gouvernement, conformément aux engagements pris l’année dernière, a choisi de leur consacrer 100 millions d’euros supplémentaires. Nous souhaitons remettre 100 millions sur la table chaque année pendant dix ans, de façon à structurer totalement le pays parce que, oui, nous avons besoin d’une réponse en matière de soins palliatifs. Toutefois, cette réponse n’est pas la seule. C’est pourquoi je suis défavorable à cet amendement.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Michel Lauzzana.

    M. Michel Lauzzana

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    Je voudrais revenir sur cet amendement mais aussi sur les arguments en faveur de la suppression de l’article 5 qui nous ont été livrés au début de son examen. Demander cette suppression me paraît plutôt paradoxal. Depuis le début de la discussion du texte, ceux qui sont contre n’ont cessé de réclamer davantage de contraintes ou d’outils d’encadrement et ils veulent à présent supprimer des éléments de cette procédure qui contribuent à l’encadrer et à la sécuriser. Il y a là quelque chose que je ne comprends pas.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Patrick Hetzel.

    M. Patrick Hetzel

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    Je rappelle que, tout à l’heure, Mme Simonnet est intervenue pour affirmer que les amendements nos 33 et 144 devaient être rejetés, citant un sondage mené auprès d’un échantillon de 400 médecins. Deux remarques : d’abord, ce sondage concerne certes 400 médecins, mais un autre sondage a été mené auprès d’un échantillon de près de 1 400 professionnels des soins palliatifs qui, eux, sont évidemment très opposés à cette disposition. Il me semble important, pour la complétude de l’argumentation, de citer cette étude.
    Ensuite, je vous invite à examiner la manière dont le premier sondage a été mené auprès des 400 médecins. Si la méthode suivie est certes classique, j’en dénonce néanmoins un élément méthodologique : à aucun moment les critères de l’article 4 n’ont été présentés à ces médecins. J’ai eu l’occasion de faire un test auprès d’un certain nombre de médecins que j’ai rencontrés au cours des dernières semaines –⁠ moins de 400, évidemment. Ils sont très nombreux à alerter : d’après eux, ces critères ne sont pas suffisamment précis et nous allons faire peser sur eux une responsabilité très importante puisqu’ils seront amenés à prendre des décisions à la demande des patients. En vue de cette prise de décision, il serait pertinent que ces critères soient plus précis, nous expliquent-ils.
    Ces médecins émettent exactement les mêmes remarques au sujet de la procédure dont nous parlons à présent et dont nous parlerons pendant quelque temps à l’occasion de l’examen de nos différents amendements.
    Tout cela pour vous dire : attention ! Sur ce sujet aussi, il faut être très précautionneux, parce que les choses ne vont pas dans une direction unique et ne sont pas unilatérales, comme d’aucuns voudraient le laisser imaginer dans cet hémicycle.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Vigier.

    M. Philippe Vigier

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    J’ai écouté avec beaucoup d’attention le collègue Patrick Hetzel parler du fameux sondage à l’occasion duquel 1 400 personnes ont été interrogées. Je le renvoie à un autre sondage, mené il n’y a pas longtemps auprès des médecins. Vous avez dû le lire, cher collègue : selon cette étude, plus de 73 % des interrogés se sont dits favorables à l’instauration d’un dispositif d’aide à mourir. Puisque vous vous intéressez aux échantillonnages et que vous êtes très précis dans vos appréciations, vous me permettrez de souligner qu’entre 70 % de 200 000 médecins, soit 140 000, et 1 400, il y a un rapport important.
    Deuxièmement, vous avez dit quelque chose d’essentiel, qui appelle de ma part un bref rebond. Au sujet de ce fameux alinéa 4, cher collègue Patrick Hetzel, vous avez appelé notre attention, en commission, sur le fait qu’il ne doit pas s’exercer sur les demandeurs d’influence familiale dévoyée, sous une forme ou sous une autre. Je lis l’alinéa 4 : « La personne qui souhaite accéder à l’aide à mourir en fait la demande expresse à un médecin en activité qui n’est ni son parent, ni son allié, ni son conjoint, ni son concubin, ni le partenaire auquel elle est liée […]. » Tout cela montre bien que la procédure est conçue pour qu’il y ait une étanchéité totale entre le demandeur et le médecin qui accédera à sa demande. Il est important de le préciser : vous voyez que les mots ont été minutieusement choisis pour écarter toute influence familiale susceptible de donner lieu au dévoiement que l’on peut imaginer.

    (L’amendement no 774 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux demandes de scrutin public : sur l’amendement no 1367, par le groupe Socialistes et apparentés ; sur l’amendement no 1618, par le groupe Droite républicaine.
    Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    Je suis saisie de deux amendements, nos 1367 et 1387, pouvant être soumis à une discussion commune.
    L’amendement no 1367 de M. Nicolas Sansu est défendu.
    La parole est à Mme Émeline K/Bidi, pour soutenir l’amendement no 1387.

    Mme Émeline K/Bidi

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    Nous savons, et nous sommes nombreux à le dire, que la pierre angulaire de cette procédure d’aide à mourir est la volonté du patient.

    M. Philippe Vigier

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    Très bien !

    Mme Émeline K/Bidi

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    Une fois qu’on a dit cela, il reste à déterminer comment cette volonté s’exprime, qui l’exprime et jusqu’à quand elle s’exprime. Je demeure intimement persuadée que la volonté doit être exprimée de façon claire et non équivoque, et qu’elle doit l’être personnellement par le patient, ce qui exclut le recours au tiers de confiance. Cependant je reste également convaincue qu’en refusant d’intégrer les directives anticipées, on ne permettra pas à tous les patients d’exprimer leur volonté d’aide à mourir et qu’énormément de cas ne seront pas pris en compte.
    J’entends la prudence avec laquelle nous avançons dans nos travaux, puisque nous sommes en train d’instaurer un droit nouveau, ainsi que la volonté d’appliquer la politique des petits pas. Néanmoins, il me semble important que l’on puisse mettre cette question sur la table, pour de nombreuses Françaises et de nombreux Français qui pensent que l’aide à mourir pourra être instaurée par nos travaux au bénéfice de ceux qui seraient victimes d’un accident et ne seraient plus en état d’exprimer une volonté personnelle et de ceux qui seraient atteints de maladies neurodégénératives et ne pourraient pas, plus tard, avoir recours par eux-mêmes à l’aide à mourir.
    Je pose cette question et je pense que nous devrions aller dans ce sens. Je pense d’ailleurs, pour rejoindre des propos que j’ai entendus tout à l’heure, que, si le patient pouvait choisir ce qu’il souhaite dans ses directives anticipées, ce qui multiplierait ses possibilités d’expression, cela réduirait un peu la charge qui pèse sur le dos des médecins.
    Cela n’enlèverait rien à l’obligation de l’expression d’une volonté claire, non équivoque, libre, éclairée et personnelle. (Mme Sandra Regol applaudit.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    Nous avons débattu à l’occasion de précédents articles de la question des directives anticipées et nous avons retenu la nécessité que l’expression de la volonté libre et éclairée soit réitérée à plusieurs reprises et jusqu’au bout, c’est-à-dire jusqu’au geste final. J’ai déjà évoqué des témoignages de médecins, très favorables à l’aide à mourir et prêts à s’y investir, qui estiment indispensable que le consentement libre et éclairé puisse être exprimé jusqu’au dernier moment.
    Vous dites, madame K/Bidi, qu’il s’agit d’une « politique des petits pas », mais je pense que c’est néanmoins une grande avancée. Je n’ai pas choisi la logique des petits pas successifs ; sans vous dire que ce sera un grand pas pour l’humanité, je suis sûr que ce sera un grand pas humaniste.
    Je suis défavorable à ces amendements, je m’en suis expliqué. Je vous invite à les retirer.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Défavorable.

    Mme la présidente

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    Les amendements sont maintenus.
    La parole est à Mme Danielle Simonnet.

    Mme Danielle Simonnet

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    Monsieur le rapporteur général, rassurez-vous, je serai favorable à cette loi. J’estime que ce sera une grande avancée même si, au final, elle n’intégrait pas les directives anticipées.
    J’attire néanmoins l’attention sur ces amendements parce qu’ils traitent de situations bien particulières. En effet, je peux entendre que pour certains, des directives anticipées écrites parfois vingt ans auparavant renvoient au moment où la personne n’était pas du tout dans la même situation, pas du tout confrontée à une affection grave et incurable, quelle qu’en soit la cause, et incapable de se projeter dans l’avenir comme celle qui a commencé à vivre avec la maladie.
    Toutefois ces amendements anticipent le cas où la personne pourrait se retrouver dans un coma ou dans un état végétatif irréversible. Ne peut-on pas vouloir anticiper une telle éventualité qui n’engage pas forcément immédiatement le diagnostic vital et peut durer longtemps, et avoir alors le droit, lorsqu’on est en bonne santé, d’user de sa propre liberté pour dire : « Moi je souhaite, si je suis dans une telle situation, pouvoir bénéficier de l’aide à mourir ? » Des collègues me diront pourquoi alors ne pas proposer l’issue de la sédation profonde et continue ? Mais ce n’est pas la même chose que l’aide à mourir : une sédation profonde et continue peut durer plusieurs heures, parfois des jours, voire des semaines. Admettez le fait que dans cette situation bien particulière où il est manifestement impossible d’exprimer de manière réitérée sa volonté, le droit à mourir soit respecté.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Juvin.

    M. Philippe Juvin

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    Nous, nous considérons que ces amendements sont dangereux et assez illogiques.
    Premièrement, une personne en bonne santé a du mal à se projeter dans une situation où ce ne serait pas le cas, du mal imaginer ce qu’elle ressentirait devenue malade. L’expérience montre que beaucoup de gens qui deviennent gravement malades, gravement limités dans leur capacité physique, développent alors des projets de vie peu imaginables quand ils étaient bien portants.

    Mme Danielle Simonnet

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    Là, on parle de gens dans le coma !

    M. Philippe Juvin

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    Le rapporteur général l’a dit : il faut qu’à tout moment le patient puisse dire non quand la procédure a commencé. Or par définition, il ne pourra pas dire non s’il est dans le coma. C’est la raison principale pour laquelle nous nous opposons à ces amendements.
    Deuxièmement, à ceux qui disent que la proposition de loi ne prend pas tous les cas en compte, je dis qu’ils ont raison, mais qu’aucune loi ne les prendra jamais tous en compte. Et c’est la raison pour laquelle les lois évoluent dans tous les pays voisins, à chaque fois qu’on dit : « Ah oui, mais ce cas-là n’a pas été pris en considération… » Je trouve que c’est très illustratif de ce que nous risquons de vivre dans les années à venir.
    Enfin, j’en viens au troisième point. Je note qu’un de ces amendements a été suggéré par la Mutuelle générale de l’éducation nationale (MGEN). Vous savez qu’il y a des médicaments de confort très élémentaires, par exemple les laxatifs –⁠ indispensables entre autres si on est par exemple sous très haute dose de morphine, sinon la vie devient vraiment complexe –, qui ne sont pas remboursés par l’assurance maladie, et donc pas non plus par les mutuelles. J’enjoins une mutuelle, avant de se faire militante d’une cause aussi louable aussi louable soit-elle, de se préoccuper d’abord d’assurer un bon confort aux patients en remboursant ces médicaments élémentaires et de confort. (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes DR et RN ainsi que sur plusieurs bancs des groupes EPR et Dem.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Sandrine Runel.

    Mme Sandrine Runel

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    J’entends l’avis de sagesse du rapporteur général, je le comprends et je pourrai presque le partager. Nous sommes ici pour que cette loi voit le jour, au terme d’un débat entre des collègues qui y sont farouchement opposés et d’autres qui la défendent pour que ce nouveau droit soit un droit plein et entier ouvert à nos concitoyens dans les meilleures conditions.
    Certains répètent qu’il faut sécuriser encore et encore le texte.

    Mme Anne-Laure Blin

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    C’est normal !

    Mme Sandrine Runel

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    Je crois que les amendements de nos collègues Sansu et K/Bidi permettent de sécuriser le recours à des directives anticipées puisque leur usage serait limité à des cas vraiment très précis : le coma ou l’état végétatif irréversible.
    Il est de notre devoir d’offrir aux personnes qui seraient dans de telles situations la possibilité d’imposer aux médecins, puisqu’elles n’en auraient plus alors la capacité elles-mêmes, de se référer à leur directive anticipée le moment venu. Elles auront été en pleine conscience lors de la rédaction de leurs directives et, contrairement à ce que vous dites, monsieur Juvin, les Français plébiscitent tout de même cette future loi à plus de 80 % et nombreux sont ceux qui se projettent dans ce qu’ils appellent leur fin de vie. Ils doivent pouvoir se dire : « Oui, si je suis dans un état irréversible qui m’ôte la capacité de demander l’aide à mourir, j’aurai pu auparavant faire appel à la procédure des directives anticipées. » Cette faculté me semble essentielle et c’est pourquoi en toute liberté, je voterai ces amendements.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Alexandre Allegret-Pilot.

    M. Alexandre Allegret-Pilot

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    J’attire votre attention sur ce qui me paraît un dévoiement de l’esprit des débats que nous avons depuis le début puisque ceux-ci reposent sur la notion de souffrance alors qu’ici, on nous explique qu’il faudrait pouvoir euthanasier des personnes qui sont dans le coma ou dans un état végétatif. Je ne suis pas médecin, mais il me semble que la notion de souffrance est absente de l’état comateux comme de l’état végétatif. On voit donc bien qu’il s’agit d’un dévoiement total : on n’a plus un pied dans la porte, mais la jambe entière. Il y a une pente sur laquelle on s’engage clairement et, si l’on considère l’objectif annoncé du texte, nous sommes face à une véritable aporie. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe RN. –⁠ M. Philippe Juvin applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre.

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    À ce moment du débat, je tiens à préciser à nouveau que nous avons beaucoup insisté, y compris à la reprise de la discussion des articles cet après-midi, sur l’importance du discernement du patient et de sa capacité à réitérer sa demande parmi les conditions d’accès à l’aide à mourir. C’est la raison pour laquelle je suis totalement opposée à ces amendements qui ne respectent en aucune façon le cadre que nous souhaitons établir puisque le patient ne serait plus dans une situation de discernement et donc plus en état de donner son avis.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le rapporteur général.

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    Madame Runel, vous avez salué la sagesse de mon avis en voulant sans doute évoquer celle de mon propos et je vous en remercie, mais je tiens à rappeler que mon avis est défavorable.

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 1367.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        243
            Nombre de suffrages exprimés                219
            Majorité absolue                        110
                    Pour l’adoption                45
                    Contre                174

    (L’amendement no 1367 n’est pas adopté.)

    (L’amendement no 1387 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux amendements, nos 145 et 1618, pouvant être soumis à une discussion commune.
    La parole est à M. Alexandre Portier, pour soutenir l’amendement no 145.

    M. Alexandre Portier

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    Il s’agit d’un amendement de notre collègue Corentin Le Fur qui nous invite à être rigoureux quant aux mots utilisés en proposant d’ajouter après le terme « personne », le terme « malade » pour ne pas créer un droit absolu à mourir et pour que le droit en question ne s’applique bien qu’aux personnes malades.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l’amendement no 1618.

    M. Thibault Bazin

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    Il n’est pas identique au précédent car je souhaite qu’il soit précisé que la personne qui fait la demande devra être « gravement malade », conformément à l’esprit de nos débats.
    L’alinéa 4 de l’article 5 place le médecin au cœur de la réception de cette demande. Le colloque singulier entre le demandeur et lui soulève des questions éthiques car la demande de l’administration d’une substance létale en vue de provoquer la mort peut tout de même transformer la relation patient-soignant, une telle option une fois mise sur la table.
    On voit la responsabilité considérable du médecin. La question qui est posée n’est pas seulement une demande individuelle liée à l’autonomie de la personne : il y a aussi quelqu’un pour répondre, à savoir le médecin. Une telle demande implique fortement le soignant et, au-delà, la société tout entière puisque ce dernier intervient au nom de celle-ci dans notre système de protection sociale.
    Par conséquent, mesure-t-on bien l’impact d’une telle procédure sur le médecin, qui lui sera encore là après l’administration de la substance létale ? Mesure-t-on bien comment une telle option ainsi ouverte peut même modifier durablement la relation du soignant à ses patients et réciproquement ?
    Je crois, comme d’ailleurs les soignants et les bénévoles de la Sfap –⁠ Société française d’accompagnement et de soins palliatifs –, que face à la maladie et à la souffrance, qu’il faut prendre en compte et auxquelles il faut répondre, chaque personne doit pouvoir être accompagnée, soulagée et entourée jusqu’au bout de son chemin sans que cela passe par l’administration délibérée de la mort. La question de l’intentionnalité est l’élément crucial qui fait la différence avec la loi Claeys-Leonetti. Il faut défendre une approche qui n’est pas plus inhumaine que celle vous défendez, monsieur le rapporteur général, madame la ministre, mais bien au contraire très humaine, fondée sur l’écoute, sur la solidarité et le refus de l’abandon. (M. Gérault Verny applaudit.)

    M. Jean-Pierre Vigier

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    Bravo !

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Laurent Panifous, rapporteur

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    Ces deux amendements visent à ajouter après le mot « personne » le mot « malade », pour le premier, ou « gravement malade » pour le second. Les deux propositions se justifient, celle de M. Bazin peut-être même encore davantage.

    M. Thibault Bazin

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    Bah oui ! C’est un amendement rédactionnel !

    M. Alexandre Portier

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    Il est excellent, Bazin, c’est normal !

    M. Laurent Panifous, rapporteur

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    Toutefois la « personne » dont il est question étant la même que celle qui satisfait aux cinq critères prévus à l’article 4, ces précisions ne me semblent pas utiles. Je rappelle que nous parlons d’une personne « atteinte d’une affection grave et incurable » qui éprouve des souffrances insupportables.
    Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Même avis pour la même raison.

    (L’amendement no 145 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 1618.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        238
            Nombre de suffrages exprimés                231
            Majorité absolue                        116
                    Pour l’adoption                102
                    Contre                129

    (L’amendement no 1618 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Gérault Verny, pour soutenir l’amendement no 1533.

    M. Gérault Verny

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    Il vise à substituer aux mots « souhaite accéder à l’aide à mourir » les mots : « envisage une demande d’aide à mourir », afin de mieux traduire la réalité psychologique du patient. La formulation initiale est plus définitive : elle suggère une volonté arrêtée et irrévocable, ce qui ne reflète pas toujours l’état d’esprit de la personne concernée. À cette étape de la procédure, elle est souvent en cours de réflexion. Confrontée à une souffrance intense mais évolutive, elle est ouverte à d’autres formes d’accompagnement ou de soulagement.
    En utilisant le verbe « envisager », le législateur reconnaîtrait que la demande initiale est un projet susceptible d’évoluer ou de s’affiner. Cette précision soulignerait que la démarche doit rester réversible et qu’elle doit être accompagnée. Elle inviterait également les professionnels à maintenir un dialogue continu, à proposer des alternatives et à respecter la complexité émotionnelle et éthique de la situation. En évitant de figer la volonté du patient dans un état définitif et prématuré, cette rédaction plus prudente renforcerait la dimension progressive du dispositif. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.)

    (L’amendement no 1533, repoussé par la commission et le gouvernement, n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Nous en venons à cinq amendements, nos 607, 2420, 212, 501 et 538, pouvant être soumis à une discussion commune.
    Les amendements nos 501 et 538 sont identiques.
    Je suis saisie de deux demandes de scrutin public sur l’amendement n° 607, par le groupe Rassemblement national, et sur l’amendement n° 501, par le groupe Droite républicaine.
    Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à Mme Sandrine Dogor-Such, pour soutenir l’amendement no 607.

    Mme Sandrine Dogor-Such

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    Il revient sur un sujet dont nous avons déjà discuté, monsieur Falorni, madame la ministre.
    Même s’il cache qu’il traite d’euthanasie et de suicide assisté, et n’emploie pas ces termes, le texte promeut une « mort programmée ». Ces mots devraient remplacer l’expression trompeuse « aide à mourir », qui est un euphémisme : elle donne une connotation positive –⁠ en parlant d’« aide » – à un acte qui n’est autre qu’une mort administrée et tend à amalgamer deux actes différents. Certains vont jusqu’à qualifier la mort programmée de soin intime, en contradiction totale avec la notion même de soin. Ce dévoiement est susceptible de dégrader un système de santé déjà bien malade.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Alexandre Allegret-Pilot, pour soutenir l’amendement no 2420.

    M. Alexandre Allegret-Pilot

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    Dans la lignée du précédent, il vise à nommer les choses telles qu’elles sont, puisque « mal nommer un objet, c’est ajouter au malheur de ce monde ». Nous devons cette honnêteté à nos concitoyens. L’aide à mourir constitue une mise à mort demandée, autant l’assumer. (Exclamations sur les bancs des groupes SOC, EcoS et GDR. –⁠ Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Marie-France Lorho, pour soutenir l’amendement no 212.

    Mme Marie-France Lorho

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    Le débat sémantique auquel le Parlement s’est livré lors de l’examen de cette proposition de loi mérite d’être poursuivi. Comme le soulignait le docteur Pascale Favre, « parler de la fin de vie aujourd’hui se réduit bien souvent à évoquer la mort provoquée, sans aucune corrélation d’ailleurs avec la factualité quotidienne […]. Le recours à l’euphémisme [de l’aide à mourir] est doublement trompeur car il offre une connotation positive d’aide à un acte qui n’est autre qu’une mort administrée. »
    En n’énonçant pas clairement les termes initiaux du débat, vous avez entretenu une approximation sur l’objectif, de manière à obtenir une adhésion inconditionnelle du public et à diaboliser toute position alternative à l’acceptation sans contradiction de votre proposition de loi.
    Cet amendement sémantique vise à rappeler l’importance de ne pas jouer sur les mots et de tenir un discours clair aux Français. Ils doivent savoir ce que comporte ce texte : la fin de l’interdit de donner la mort. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN. –⁠ M. Gérault Verny applaudit également.)

    Mme la présidente

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    Nous en venons aux deux amendements identiques de cette discussion commune.
    La parole est à Mme Justine Gruet, pour soutenir l’amendement no 501.

    Mme Justine Gruet

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    En effet, il est identique à celui de Mme Vidal, la rapporteure de la proposition de loi précédente relative aux soins palliatifs. Nous avons eu un long débat sémantique. Toutefois, les députés étant plus nombreux cet après-midi, il m’apparaît nécessaire de le reprendre. Selon certains collègues, il convient de conserver dans le texte la formulation « aide à mourir », même si dans la société, on emploiera les mots « euthanasie » et « suicide assisté ». Cette formulation ne dissocie pas les deux gestes, qui sont différents d’un point de vue éthique : dans un cas, il y a intervention d’une tierce personne et pas dans l’autre.
    Par cet amendement, nous proposons d’ajouter le mot « active » pour parler d’« aide active à mourir », afin d’insister sur l’existence d’une action. Cela me paraît d’autant plus essentiel que la commission des affaires sociales a adopté des amendements précisant que la mort intervenue à la suite de l’aide à mourir sera considérée comme une mort naturelle.
    Si une aide à mourir est une mort naturelle, les soins palliatifs sont une aide à mourir. Nous avons longuement échangé à ce sujet dans cet hémicycle. Vous me direz probablement qu’à ce stade de l’examen du texte, on ne peut plus modifier la formulation. Au contraire, c’est le moment de montrer que dans cette procédure, il y aura une action ; il s’agit donc d’une aide active à mourir.
    Chers collègues, il est important que nous définissions les choses, non par peur, par appréhension ou par anxiété, mais pour sécuriser le dispositif. Enfin, pour que le grand public sache que nous légiférons sur quelque chose de nouveau, il est important d’employer une terminologie nouvelle. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN. –⁠ M. Gérault Verny applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Annie Vidal, pour soutenir l’amendement no 538.

    Mme Annie Vidal

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    Je l’ai moi aussi souligné à maintes reprises depuis le début de l’examen en séance publique, j’aurais aimé que nous parlions d’aide active à mourir. En effet, l’aide à mourir ne passe pas exclusivement par le recours à une substance létale qui est pourtant au cœur du texte puisqu’il définit le droit à l’aide à mourir qui « consiste à autoriser et à accompagner une personne qui en a exprimé la demande à recourir à une substance létale […] ».
    Il est important de différencier ce geste des autres pratiques d’accompagnement des personnes en fin de vie.
    Je regrette, monsieur le rapporteur général, que vous vous soyez bloqué sur ce point qui aurait permis de clarifier les choses.
    J’ai lu ce matin une tribune de la Société française du cancer, rédigée par des médecins oncologues, qui sont habitués à côtoyer la fin de vie et la mort. Ils considèrent que « l’aide à mourir » est une expression qui refuse entre les lignes de reconnaître que nos soins palliatifs actuels sont déjà une aide à mourir dans la dignité et dans la présence. Ils ajoutent que c’est une expression euphémisée qui cache la réalité de l’acte définitif auquel elle se réfère.
    Indépendamment de notre position par rapport à ce nouveau droit, je trouve vraiment dommage, voire dommageable, que nous appelions « aide à mourir » le recours à la substance létale –⁠ l’aide à mourir englobe beaucoup d’autres situations. Je ne comprends pas pourquoi vous vous êtes braqués à ce point sur cette dénomination.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission sur les amendements en discussion commune ?

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    Plusieurs de nos collègues l’ont souligné –⁠ Mme Dogor-Such, Mme Gruet, Mme Vidal –, nous avons eu ce débat sémantique à de nombreuses reprises. J’ai eu l’occasion d’expliciter ma position. Je ne suis pas bloqué ou braqué. De toute façon, c’est vous qui décidez par vos votes, ce n’est pas moi. Je vous donne juste mon avis.
    Je considère en effet que le terme « euthanasie » a été souillé par l’histoire et que celui de « suicide assisté » crée de la confusion –⁠ avec le mot suicide. Je pense que l’aide à mourir est le terme qui convient le mieux. Vous ne pouvez pas dire que ce terme n’est pas défini ou qu’il est imprécis. C’est le sens de l’article 2, que nous avons adopté –⁠ à plusieurs reprises d’ailleurs – de dire ce qu’est l’aide à mourir. Il la définit de manière très précise –⁠ nous avons beaucoup travaillé sur cet article. Je maintiens mon avis : c’est l’expression la plus adéquate, la formulation la plus adaptée. Avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Il convient de distinguer trois types de situations. D’abord, il y a les soins palliatifs, que Mme Vidal mentionnait à l’instant. Les personnes qui font des séjours en soins palliatifs souffrent, elles sont accompagnées et une partie d’entre elles en sortent vivantes, fort heureusement. Les soins palliatifs ne sont pas l’antichambre de la mort : un certain nombre de gens sont rétablis et continuent à vivre.
    Ensuite, il y a la sédation profonde et continue, dans laquelle les personnes sont endormies définitivement –⁠ elles ne se réveillent pas.
    Enfin, l’aide à mourir est l’objet du texte et correspond à une situation dans laquelle un patient qui présente une souffrance réfractaire –⁠ je n’énumérerai pas de nouveau toutes les conditions. Lorsqu’il demande à ce titre à bénéficier de l’aide à mourir, il subit un examen médical.
    J’ajoute, mesdames et messieurs les députés, vous avez adopté samedi un amendement qui prévoit que l’autoadministration du produit létal sera la règle et l’administration par un tiers l’exception. Il ne s’agit donc pas d’une aide active à mourir.

    Mme Anne-Laure Blin

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    La substance létale entraîne bien la mort !

    M. Thibault Bazin

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    En tout cas, ce n’est pas une aide passive !

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    La notion d’aide à mourir me paraît couvrir la situation que je viens de décrire. C’est la raison pour laquelle je suis défavorable à cette série d’amendements.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Hervé de Lépinau.

    M. Hervé de Lépinau

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    Monsieur le rapporteur général, pour que les débats soient totalement transparents, je préciserai que vous nous aviez demandé en commission de restreindre le champ sémantique parce que des mots vous dérangeaient. C’est votre approche du texte, mais ne privez pas vos collègues députés de la possibilité de nommer les choses.
    Il faut bien nommer les choses parce que, je le répète, ce texte marquera un renversement anthropologique. Il fera exploser l’éthique que nous défendons depuis plusieurs milliers d’années. Les mères patries, Athènes, Rome, Jérusalem, nous ont enseigné le principe « tu ne tueras point ». (Exclamations sur les bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.)

    Mme Danielle Simonnet

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    Oh là là !

    Mme Ségolène Amiot

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    Vous êtes sérieux ?

    M. Hervé de Lépinau

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    Le texte renverse un paradigme sur lequel nos sociétés se sont construites. Notre pacte social prévoit que nous allions systématiquement vers les plus faibles et les plus fragiles. (Mêmes mouvements.) Et aujourd’hui, nous avons recours à un euphémisme : l’aide à mourir renvoie a priori à une approche philanthropique. Pourtant, elle ne traitera ni la misère, ni le désespoir, ni la solitude, ni la maladie ; elle proposera la mort comme unique solution à ces problèmes.
    Nous devons nous imposer d’être très précis dans le choix des termes afin d’informer les citoyens.
    J’en profite pour répliquer aux propos tenus tout à l’heure concernant les fameux sondages : une très grande majorité des gens sont favorables au texte. C’est sûr que si on leur pose la question « voulez-vous mourir dans la dignité ? », je crois que dans cet hémicycle, 100 % des députés répondront oui. Les soins palliatifs répondent à cette question. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN, DR et UDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Julie Laernoes.

    Mme Julie Laernoes

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    Ces amendements sont assez choquants voire caricaturaux pour une partie d’entre eux. Leurs auteurs proposent d’être plus précis dans le choix des termes et veulent remplacer l’aide à mourir, qui a été définie à l’article 2 précédemment adopté. Le terme « aide à mourir » est précis et compréhensible pour nos concitoyens : il renvoie à une aide à mourir pour abréger ses souffrances.
    Ces députés continuent à parler de renversement anthropologique et soulignent les énormes dérives qu’il peut y avoir dans d’autres pays. En tant que franco-néerlandaise, je veux le dire : l’instauration de ce droit n’a pas entraîné de dérive anthropologique ni de changement de société au Pays-Bas. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)

    M. Laurent Jacobelli

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    Oh que si !

    M. Gérault Verny

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    Et l’euthanasie des mineurs !

    Mme Julie Laernoes

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    Je me bats aujourd’hui dans cet hémicycle pour que nos concitoyens, qui attendent l’évolution de notre droit, puissent bénéficier de ce droit comme les citoyens néerlandais, qui en disposent déjà. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe EcoS.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Patrick Hetzel.

    M. Patrick Hetzel

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    Nous avons déjà eu ce débat au sujet des Pays-Bas. Lisez les travaux de Theo Boer : selon lui, des questionnements subsistent.

    Mme Anne-Laure Blin

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    Exactement !

    M. Patrick Hetzel

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    Revenons sur la terminologie. Les deux derniers amendements, celui de Mme Gruet et celui de Mme Vidal, visent simplement à nommer les choses. Je ne reviens pas sur les termes « suicide assisté » et « euthanasie », mais utiliser le vocable « aide à mourir » pour désigner le fait de s’administrer ou d’administrer une substance létale soulève deux difficultés.
    D’abord, à tout le moins, c’est une euphémisation, puisque cela ne peut pas se passer sans acte –⁠ à un moment donné, il y a quelque chose d’actif. Alors pourquoi cette obstination déraisonnable à vouloir utiliser le terme « aide à mourir » au lieu d’« aide active à mourir » ?
    Ensuite, ce qui est frappant, c’est que cette terminologie méconnaît le rôle décisif qu’a joué l’instauration des soins palliatifs au cours des dernières décennies. En effet, dans beaucoup de leurs situations professionnelles, les acteurs des soins palliatifs définissent leur mission comme une aide à mourir. Cette confusion sémantique est donc véritablement problématique.
    C’est pourquoi je considère, par sagesse, que ces deux derniers amendements contribueraient à clarifier les choses, ce qui est aussi le rôle du législateur.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Sandrine Runel.

    Mme Sandrine Runel

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    Les premiers amendements de cette discussion commune ont donné à entendre des propositions caricaturales,…

    M. Julien Odoul

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    Parole d’experte !

    Mme Sandrine Runel

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    …mais surtout vulgaires. En parlant de « mise à mort », vous voulez faire peur aux gens : c’est votre méthode habituelle, vous ne savez faire que cela ! (Exclamations sur les bancs des groupes RN et UDR.) C’est ainsi que vous vous adressez à vos électeurs, pour leur faire peur et terroriser la population française.
    « Mise à mort » : vous voudriez dire tant que vous y êtes que l’on va piquer les gens comme des animaux ! Ces propos sont d’une vulgarité qui n’a pas sa place dans cet hémicycle. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. –⁠ M. Emmanuel Duplessy applaudit également.)
    Le rapporteur l’a très bien rappelé : la définition de l’aide à mourir a été adoptée avec l’article 2, il n’y a pas de raison d’y ajouter quoi que ce soit.

    M. Laurent Jacobelli

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    Chez vous aussi, le sommeil est définitif ?

    Mme Sandrine Runel

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    Nos débats doivent avancer. La définition de l’aide à mourir est claire et il nous revient d’en faire un droit. Nous ne voulons pas introduire de la vulgarité dans le débat, mais au contraire de la dignité, car c’est justement l’enjeu de l’aide à mourir. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOC.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 607.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        247
            Nombre de suffrages exprimés                239
            Majorité absolue                        120
                    Pour l’adoption                87
                    Contre                152

    (L’amendement no 607 n’est pas adopté.)

    (Les amendements nos 2420 et 212, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 501 et 538.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        248
            Nombre de suffrages exprimés                245
            Majorité absolue                        123
                    Pour l’adoption                111
                    Contre                134

    (Les amendements identiques nos 501 et 538 ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    Avec l’amendement no 2029, nous allons pouvoir commencer avant la levée de séance une discussion commune qui comporte de nombreux amendements –⁠ l’un d’entre eux, l’amendement no 1899 fait même l’objet d’un sous-amendement,  et plusieurs séries d’amendements identiques.
    La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille, pour soutenir l’amendement no 2029.

    M. Cyrille Isaac-Sibille

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    Cet amendement est à mes yeux très important dans la mesure où le texte ne définit pas précisément qui prend la décision dans la procédure : il laisse donc subsister une certaine ambiguïté. L’alinéa 4 dispose que « la personne qui souhaite accéder à l’aide à mourir en fait la demande expresse à un médecin en activité ». (Brouhaha.)

    Mme la présidente

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    Chers collègues, est-ce trop vous demander, si vous souhaitez quitter l’hémicycle, de le faire dans le calme en respectant votre collègue qui défend un amendement ?

    M. Cyrille Isaac-Sibille

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    Qui décide ? Selon moi, c’est le patient. Il convient de préciser à ce stade. Le rôle du médecin ou du collège médical ne consiste pas à décider à la place du patient, mais à donner son avis d’expert quant au respect des critères d’éligibilité par le patient.
    Je le répète : la rédaction actuelle de l’article laisse planer une grande ambiguïté. On ne sait pas qui prend la décision. Est-ce le patient, le médecin ou le collège médical ? Mon amendement vise à affirmer que c’est le patient qui prend la décision d’accéder à l’aide à mourir.

    Mme la présidente

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    Vous pouvez conserver la parole, pour soutenir l’amendement no 89.

    M. Cyrille Isaac-Sibille

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    Même si les deux amendements font l’objet d’une discussion commune, il s’agit d’un autre sujet, celui de la manière dont le patient formule sa demande.
    Il faut que le processus soit clair. Comme je l’ai dit en défendant l’amendement précédent, c’est le patient qui prend la décision et non le médecin qui ne fait qu’apporter son expertise. Je propose que la décision du patient d’accéder à l’aide à mourir soit formulée par écrit. Elle ne peut pas résulter simplement du colloque singulier entre le patient, le médecin et le collège médical, au risque de créer un flou…

    M. Fabien Di Filippo

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    Et quand c’est flou, il y a un loup !

    M. Cyrille Isaac-Sibille

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    …et de ne plus savoir qui prend la décision.
    Pour moi les choses sont très claires : le patient décide, il exprime sa décision et formule sa demande au médecin et au collège médical par écrit. Il revient ensuite au médecin et au collège médical de formuler un avis, une expertise médicale, pour évaluer si la personne remplit les critères d’accès à l’aide à mourir.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l’amendement no 1620.

    M. Thibault Bazin

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    La procédure, dont traite l’article 5, va donner lieu à l’examen des critères. Si le respect de ceux-ci est laissé à l’appréciation du demandeur, on se demande bien quels vont être le rôle du médecin et sa part de responsabilité dans la décision qui sera prise,…

    Mme Justine Gruet

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    Il a raison !

    M. Thibault Bazin

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    mais aussi les conséquences psychologiques pour lui de l’administration d’une substance létale. Dans les pays où cette pratique existe, on constate les traumatismes dont souffrent les soignants. Or il faut prendre soin d’eux.
    Pourtant, dans sa rédaction actuelle, le texte prévoit –⁠ corrigez-moi si je me trompe – que la demande du patient se fasse sans témoin et sans trace écrite. De plus, le dépôt d’un recours n’est possible, selon l’article 12, que si l’avis du médecin est négatif –⁠ pas si celui-ci accède à la demande de la personne. De toute façon, seule la personne ayant formé la demande peut contester la décision du médecin, et dans le cas où celle-ci est positive, elle ne sera plus là…

    Mme Anne-Laure Blin

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    Elle sera morte !

    M. Thibault Bazin

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    Interrogeons-nous collectivement. Dans sa rédaction actuelle, la procédure prévue est-elle à la mesure de la gravité et surtout de la conséquence irréversible de l’administration d’une substance létale ? Il n’y aura pas de retour en arrière.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Yannick Monnet, pour soutenir l’amendement no 1899.

    M. Yannick Monnet

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    Le texte que nous examinons, eu égard à son importance, nécessite quand même un peu de formalisme. Cet amendement, qui fait l’objet d’un sous-amendement qui le précise et auquel je suis favorable, vise à formaliser la demande de la personne, oralement et par écrit, ou par tout autre mode d’expression si jamais la personne n’est pas en mesure d’exprimer sa volonté ainsi. Le formalisme permet de conforter le caractère éclairé du consentement de la personne, mais aussi sa décision ainsi –⁠ c’est essentiel – que l’avis du médecin relatif à la demande.
    Au vu des changements que nous allons voter et que je partage, nous ne pouvons pas faire l’économie d’un peu plus de formalisme pour cadrer et organiser davantage la procédure.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Élise Leboucher, rapporteure, pour soutenir le sous-amendement no 2701, à l’amendement no 1899.

    Mme Élise Leboucher, rapporteure

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    Il vient conforter l’amendement de Mme Lebon brillamment présenté par M. Monnet et traduit notre évolution et notre maturation sur ce sujet. En commission, nous n’avions pas voté les amendements qui visaient à instaurer une formulation écrite de la demande de la personne. Le fait d’y ajouter la formule « ou, à défaut, par tout autre mode d’expression adapté à ses capacités » nous semble propice à rassurer chacun et à cadrer davantage la demande exprimée par le patient. Nous voterons donc pour l’amendement ainsi sous-amendé.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Gérault Verny, pour soutenir l’amendement no 1711.

    M. Gérault Verny

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    Je propose la rédaction d’un écrit pour exprimer la demande du patient. Le manuscrit a une valeur symbolique : écrire à la main, c’est formuler et choisir ses mots, ce n’est pas remplir une case, c’est prendre le temps d’un engagement personnel et conscient. L’écrit donne à l’acte une solennité qu’aucun formulaire ne peut transmettre. Il éloigne les automatismes. En posant ses mots, la personne s’approprie cette décision.
    En outre, l’écrit comporte une dimension de contrôle objectif qui me semble fondamentale. Un texte manuscrit est une trace et peut constituer une preuve. Il permet de vérifier l’authenticité de la démarche, d’en garantir l’origine et d’exclure toute rédaction par un tiers. En cas de litige, de suspicion de pression ou de contestation familiale, ce document devient une pièce utile que l’on peut exploiter. (MM. Laurent Jacobelli et Julien Odoul applaudissent.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Bertrand Sorre, pour soutenir l’amendement no 584.

    M. Bertrand Sorre

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    Il s’agit d’un amendement de notre collègue Annie Vidal, que j’ai cosigné. Comme les orateurs précédents, je pense qu’il est essentiel que la demande soit écrite, datée et signée. À nos yeux, l’absence d’obligation de demande écrite du patient fragilise profondément le cadre éthique et juridique de l’aide à mourir. Cette omission soulève plusieurs préoccupations majeures. La formulation écrite permet une meilleure compréhension : la parole seule ne suffit pas. Une demande aussi grave, engageant la vie, ne peut reposer sur la seule expression orale.
    De plus, l’écrit favorise un processus décisionnel conscient : la formulation écrite permet une mise à distance et une réflexion lucide, parfois réversible. L’écrit protège aussi toutes les parties : il sécurise les soignants, rassure les proches et offre un repère objectif en cas de doute ou de contestation. L’exemple belge montre la voie : en Belgique, la demande écrite est une pierre angulaire du dispositif. Elle n’entrave pas la souplesse de l’accompagnement mais en garantit le sérieux et la responsabilité.
    En conclusion, la demande d’aide à mourir doit pouvoir être tracée. Cette exigence permet non seulement de confirmer la volonté du patient, mais aussi de protéger le médecin. Il est donc essentiel que la demande d’aide à mourir soit écrite, datée et signée.

    Mme la présidente

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    Dans la discussion commune, nous en venons à trois amendements identiques nos 147, 401 et 265.
    La parole est à M. Alexandre Portier, pour soutenir l’amendement no 147.

    M. Alexandre Portier

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    Dans le même esprit, nous proposons que l’aide à mourir ne fasse pas l’objet uniquement d’une demande orale, mais qu’elle soit formalisée à l’écrit. En effet, il est difficile d’imaginer vivre dans un pays où chacun remplirait plus de papiers pour acheter un téléphone portable que pour demander la mort. Certaines formalités doivent être imposées pour la protection des personnes et pour le sérieux des procédures. (M. Gérault Verny applaudit.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Justine Gruet, pour soutenir l’amendement no 401.

    Mme Justine Gruet

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    En effet, il s’agit là aussi d’ajouter les mots « écrite et signée » à l’alinéa 4. Lorsque j’en ai discuté le week-end  dernier avec les habitants de ma circonscription, tout le monde était très surpris par l’absence d’une demande écrite.

    M. Erwan Balanant

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    Mais quand on a la maladie de Charcot ?

    Mme Justine Gruet

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    La démarche n’est pas anodine puisqu’elle implique l’administration d’un produit létal. Il est donc essentiel de garantir que la volonté du patient soit librement exprimée et qu’il soit pleinement conscient de sa décision.
    De surcroît, une telle procédure permet aux proches, après la mort du patient, d’être plus à même de respecter son choix et de leur épargner ce que j’ai envie d’appeler une forme de recours moral –⁠ puisqu’un recours juridique n’est pas possible – d’autant que le patient a assumé seul la responsabilité de son choix.
    Vous avez déjà rejeté beaucoup de nos propositions et je ne crois pas que ma demande soit ubuesque. Elle ne vise qu’à garantir, sécuriser et tranquilliser la décision du patient.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Juvin, pour soutenir l’amendement no 2625.

    M. Philippe Juvin

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    Le texte indique que la demande du patient doit être « expresse ». Lorsque nous avons, en commission, proposé d’ajouter qu’elle devait être écrite, on nous a répondu que cela était inutile car la notion de demande expresse était similaire à celle de demande écrite. J’ai vérifié : d’après Le Petit Robert, l’adjectif exprès signifie « qui exprime formellement la volonté de quelqu’un ». Il n’implique donc pas que la demande est écrite.
    Nous pensons qu’il faut en cette matière beaucoup de formalisme et recommandons donc que la demande soit écrite et signée. D’ailleurs, dans le cadre de la vie en société, nous ne cessons de signer des documents d’agrément ou encore d’acceptation.

    Mme Anne-Laure Blin

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    L’administration demande beaucoup de papiers !

    M. Erwan Balanant

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    Et si la personne ne peut pas écrire ?

    M. Philippe Juvin

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    L’administration est riche en demandes écrites. La médecine également : le patient doit indiquer par écrit son consentement lorsqu’il subit une intervention chirurgicale importante ou qu’il participe à un essai clinique.
    On nous a fait observer en commission que certaines personnes n’étaient pas capables de signer, mais il existe dans ce cas des possibilités alternatives. Nos collègues du groupe LFI ont trouvé une solution qui résout bien le problème et il faut la soutenir. L’écriture permet la traçabilité, oblige à une réflexion supplémentaire et garantit que la volonté du patient a été respectée. Franchement, c’est la moindre des choses qu’une demande d’une telle gravité soit écrite ; la demande orale n’est évidemment pas suffisante. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR. –⁠ M. Gérault Verny applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

    4. Ordre du jour de la prochaine séance

    Mme la présidente

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    Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
    Suite de la discussion de la proposition de loi relative à l’aide à mourir.
    La séance est levée.

    (La séance est levée à vingt heures.)

    Le directeur des comptes rendus
    Serge Ezdra