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Rapport sur l'aval du cycle nucléaire
Par M. Christian Bataille et Robert Galley
Députés
Tome II : Les coûts de production de l’électricité

Chapitre II (suite de la partie III)

III. Les différentes filières de production de l’électricité : réexamen des coûts et perspectives

B. Les turbines et les cycles combinés à gaz 111

1. L’extraordinaire essor des turbines et du cycle combiné à gaz 114

2. Les technologies du gaz et l’environnement 117

3. La position concurrentielle de la France sur le marché des turbines à gaz 118

4. Les cycles combinés en France 119

5. Les coûts du kWh gaz selon la Digec 120

C. La cogénération 123

1. Des progrès technologiques importants 123

2. Les enjeux du développement de la cogénération 125

3. Le marché de la cogénération en Europe 126

4. Le développement de la cogénération en France 129

5. Les tarifs de rachat de l’électricité produite par cogénération et leur pérennité 131

B. Les turbines et les cycles combinés à gaz

La consommation mondiale de gaz naturel a atteint en 1996 2 milliards de tonnes équivalent pétrole, soit 21,1 % de la consommation totale d’énergie. Cette consommation est en augmentation forte.

Pour autant, les réserves mondiales, grâce à l’abaissement des prix de revient et aux découvertes de nouveaux gisements, ont augmenté de 110 Tm3 sur la période 1976-1996, alors que la consommation cumulée atteignait 34 Tm3.

Le fait majeur concernant les réserves de gaz naturel est qu’elles se trouvent à hauteur de 32 % au Moyen Orient et à hauteur de 41 % en Russie.

Figure : Répartition géographique des réserves mondiales de gaz – estimations de 1996 – Tm31

En 1997, l’approvisionnement de la France était d’origine d’Europe occidentale, à concurrence de 47 %, la part de la Russie étant de 27 % et celle de l’Algérie de 26 %.

Figure : Origine géographique des approvisionnements de la France en gaz naturel2

Grâce aux efforts de diversification des approvisionnements, et malgré une hausse prévue de 16 % de la consommation en l’an 2000, la part de l’Algérie devrait, à cette date, être réduite à 22 % et celle de la Russie à 23 %3.

Un phénomène doit être noté, celui de la réduction des coûts d’extraction du gaz naturel, en raison des améliorations des technologies d’exploration, d’exploitation et d’acheminement.

Figure : Evolution des coûts des puits offshore4

Concernant le prix du gaz, la majorité des experts estiment que l’on est arrivé à la formation d’une « bulle gazière », ce qui veut dire que si le pétrole repartait à la hausse, le prix du gaz resterait bas, aux alentours de 2 dollars/Mbtu au moins jusqu’en 2010.

Néanmoins, à long terme, l’augmentation de la consommation de gaz devrait être relativement importante, non seulement pour le résidentiel et les transports mais aussi probablement pour la production d’électricité.

La moitié au moins de l'accroissement de la demande de gaz en Europe pourrait être due à la production d'électricité à l'horizon 2020. La capacité de production installée était de 34,3 GW en Europe de l'ouest fin 1994. Un an plus tard, elle avait pratiquement doublé à 61,4 GW. La prévision pour 2000 ont été réévaluées à 96,6 GW.

La limitation des réserves, quelle que soit l’ampleur de celles-ci, et l’augmentation de la consommation devraient alors favoriser une remontée des prix, à un horizon qu’il est bien évidemment impossible de prévoir. La figure suivante schématise le fait que des tensions sur les prix pourraient apparaître en tout état de cause vers 2010-2020.

Figure : Prévisions des consommations de gaz et d’évolution des réserves5

La situation de la production d’électricité à partir du gaz bénéficie non seulement de la faiblesse du prix des hydrocarbures mais également des progrès techniques qui se sont accélérés depuis cinq ans.

Les turbines à gaz ont vu, grâce à la diffusion des technologies aéronautiques, leurs rendements s’améliorer de plus de 10 % dans cette période - un progrès d’une ampleur exceptionnelle dans le domaine de l’énergie –.

Fait remarquable, ces progrès de rendement concernent aussi bien les turbines de grande puissance pour les cycles combinés qui atteignent des puissances unitaires de 380 MWe que les petites turbines. Dès lors, les débouchés du gaz pour la production d’électricité semblent se multiplier.

1. L’extraordinaire essor des turbines et du cycle combiné à gaz

Les progrès technologiques fondamentaux portent sur les turbines à gaz. Celles-ci voyant leurs performances s’améliorer, les cycles combinés ont pu être à leur tour perfectionnés, ainsi qu’au final la cogénération.

Les plages d’utilisation de ces différents équipements sont très différentes. Les turbines à gaz à cycle simple correspondent à la fourniture de courant en pointe. Les petits cycles combinés correspondent à la semi-base. Les nouveaux grands cycles combinés, dont l’apparition sur le marché est relativement récente, ont comme domaine d’application privilégiée et sous certaines conditions, la production d’électricité en base. La figure suivante présente le schéma correspondant.

Figure : Domaines d’application préférentiels des centrales à gaz6

· Les progrès technologiques sur les turbines à gaz

Le premier progrès notable concernant les turbines à gaz provient de la mise au point de nouveaux matériaux supportant de hautes températures. La température d'entrée turbine atteint en effet 1 500°C aujourd'hui contre 1 100°C il y a 50 ans. Simultanément, les matériaux mis au point pour les hautes températures se sont avérés capables de supporter de fortes contraintes mécaniques. Le ratio de compression, qui n'excédait pas 15 il y a quelques années, atteint ainsi aujourd'hui une valeur de 30. Un troisième progrès majeur est imputable à la mise en œuvre de techniques de revêtement céramique. Enfin, de nouvelles techniques de refroidissement ont été héritées de l'industrie aéronautique.

Figure : Schéma de principe d’une turbine à gaz7

Au final, ces différentes avancées techniques, accompagnées au surplus d’une baisse continue des coûts, ont apporté une progression majeure des rendements électriques, qui sont passés de 25 % dans les années 1960 à 41 % aujourd’hui.

Une deuxième évolution majeure des turbines à gaz est celle de l’élargissement de leur gamme de puissance. Les puissances unitaires maximales des turbines à gaz ont fortement augmenté ces dernières années. En 10 ans, elles ont doublé pour avoisiner les 300 MW électriques. A l'opposé, les progrès techniques ont permis, pour certaines applications8, le développement de turbines de faible puissance (1 MW)

· Les micro-turbines à gaz

Les progrès techniques permettent aussi d’obtenir des rendements satisfaisants avec les microturbines à gaz. Vingt-cinq prototypes de microturbines, dans une gamme de très faibles puissances (30 à 200 kW) sont actuellement testées aux Etats-Unis sous la direction de l'EPRI (Electric Power Research Institute).

Ces turbines offriraient des avantages similaires à ceux des turbines à gaz de taille plus importantes: efficacité énergétique, fiabilité (un seul élément mobile), compacité et émissions réduites.

Parmi les fabricants impliqués dans ces recherches, Allied Signal semble être relativement en pointe. Cette entreprise espère vendre des unités de 75 kW dès 1999 à un prix compris entre 35 000 et 40 000 dollars (soit environ 500 dollars/kW installé) qui devrait descendre à 25 000 dollars en 2002 (soit environ 330 dollars/kW installé)9.

· Les améliorations des cycles combinés à gaz

Le principe du cycle combiné à gaz réside dans la récupération de la chaleur de combustion des gaz dans la turbine, en vue de la production de vapeur, qui, elle-même, sert à alimenter une deuxième turbine, selon le schéma ci-après.

Figure : Schéma de principe d’un cycle combiné à gaz10

Les progrès technologiques réalisés sur les turbines à gaz ont permis d'améliorer considérablement le rendement des cycles combinés. Des rendements légèrement supérieurs à 55% ont d'ores et déjà été atteints.

Cette tendance devrait se poursuivre dans les années à venir, et un niveau de rendement de 60% devrait pouvoir être atteint.

Les pistes prometteuses sont l’utilisation du cycle de Kalina (vapeur de cycle formée d'eau et d'ammoniac), le développement de turbines ICAD (Intercooled aero derivative) de rendement égal à 50% en cycle simple et l’utilisation de piles à combustible à haute température11.

Les cycles combinés à gaz évoluent vers des puissances unitaires en forte augmentation (jusqu'à 376 MW), en liaison avec l'augmentation de la taille unitaire des turbines à gaz. Par ailleurs, il semble que leur durée de vie soit relativement longue. En l'absence de données statistiques significatives et compte tenu des températures élevées en entrée de turbine, la durée de vie annoncée de 30 ans est peut-être optimiste. Une durée de vie de 25 ans apparaît plus probable.

Un autre avantage majeur des cycles combinés à gaz est la faiblesse relative de leur coût d’investissement. La dépense d'investissement par kilowatt net installé est plus réduite que pour les autres filières de production. Elle est d’environ 4 000 F/kW, contre 8 000 F/kW pour le charbon et 11 000 F/kW pour le nucléaire.

Les cycles combinés à gaz présentent une grande flexibilité Leur conception modulaire permet d'ajuster le rythme d'évolution du parc à celui de la demande électrique. Leur mode de fonctionnement permet aussi de moduler la puissance en service de façon souple, grâce à la grande rapidité de démarrage d’une telle centrale.

Mais les cycles combinés à gaz ont un dernier avantage économique essentiel, à savoir des délais de réalisation très courts. Ces délais sont en effet d’environ deux ans, contre quatre ans pour une centrale à charbon propre et huit ans pour une tranche nucléaire. La figure suivante donne le planning de réalisation d’un cycle combiné à gaz, selon Alstom12.

Figure : Planning de construction d’une centrale à cycle combiné au gaz13

2. Les technologies du gaz et l’environnement

S’agissant de leur impact environnemental, les émissions des turbines à gaz sont plus faibles que celles de la filière charbon tant pour le CO2, le SO2, que les NOx. Par ailleurs, grâce à leurs rendements élevés, les cycles combinés minimisent encore les rejets.

Les moyens de lutte contre les émissions de NOx sont moins coûteux avec le gaz naturel qu'avec les autres combustibles fossiles:

Les rejets d'oxyde d'azote sont passés de 200 ppm dans les années 70 à 100 ppm à la fin des années 80, puis à moins de 10 ppm aujourd'hui. L’absence d'impuretés dans le gaz naturel permet de recourir en effet à l'utilisation de la réduction catalytique sélective sur les gaz d'échappement. Une autre approche plus récente pour réduire ces émissions consiste à chercher à limiter la formation de NOx dans la chambre de combustion, notamment en modifiant le design du brûleur, en utilisant une combustion étagée ou en faisant appel à la combustion catalytique.

Enfin, la consommation d'eau d’un cycle combiné à gaz est trois fois moindre que celle d'une centrale charbon et son emprise au sol est très réduite.

Les émissions fugitives de méthane insignifiantes dans les systèmes bien entretenus, ne compromettent nullement la supériorité du gaz naturel. Même quand les fuites sont prises en compte, le gaz naturel reste un bon instrument de lutte contre les changements climatiques.

Si le méthane exerce un effet de serre plus puissant, molécule pour molécule, il ne réside que 12 à 15 ans dans l'atmosphère, alors que le dioxyde de carbone y subsiste de 50 à 200 ans. Le pouvoir réchauffant des deux gaz doit être calculé pour des échelles de temps différentes. En cent ans, les fuites des réseaux de gaz naturel devraient dépasser 16 % du débit pour que le gaz naturel perde son avantage sur le charbon. Lorsque l'on inclut dans le calcul l'efficacité des applications de production d'électricité, par exemple, l'avantage du gaz naturel par rapport au charbon se montre encore plus marqué.

Les estimations des pertes de gaz naturel dans les réseaux d'approvisionnement (1,1% dans le monde, 0,7% en Europe), sont ainsi, selon Gaz de France14, largement en dessous du niveau de perte de méthane qui annulerait l'avantage climatique du gaz naturel.

3. La position concurrentielle de la France sur le marché des turbines à gaz

La compagnie franco-britannique Alstom, au travers de sa filiale à 90% EGT, fait partie d'un nombre restreint de fabricants de turbines à gaz de dimension internationale (General Electric, ABB, Siemens, Mitsubishi).

Le pôle « Energie » d'Alstom a installé ou installe actuellement environ 15% de la capacité mondiale totale existante, avec une implication croissante dans l'activité « grandes turbines à gaz ».

Le segment « grandes turbines à gaz » a représenté directement 4,3 milliards de francs de chiffre d'affaires en 1997/1998 et représente environ 8% du chiffre d'affaires d'Alstom au cours des trois dernières années.

Alstom est notamment en train d'installer une capacité totale de 21 GW de cycles combinés au gaz en Chine, et a remporté récemment des marchés au Royaume-Uni (contrat de 1 milliard de francs), au Luxembourg (1 milliard de francs), en Inde, en Argentine, en Australie, aux Emirats Arabes Unis, à Oman, en Iran, au Brésil, au Vietnam, etc.

Sur la période 1993-1997, Alstom a obtenu une part de marché de 9 %, le plaçant en première position des fabricants sous licence, devant Mitsubishi Heavy Industries (8 %).

Les leaders mondiaux en termes de technologies et de débouchés sont Siemens-Westinghouse, avec 27,5 % de part de marché, General Electric avec 27 % de part de marché et ABB avec 13 % .

4. Les cycles combinés en France

Le remplacement abrupt à 100% du parc nucléaire existant par des centrales à cycle combiné au gaz naturel aurait des conséquences économiques et financières insupportables. Les émissions additionnelles de C02 s'élèveraient à 140 Mt, soit un accroissement de 37% de l'ensemble des émissions françaises de CO2 (bilan en totale contradiction avec les engagements de stabilisation de ces émissions contractés par la France)15.

La demande annuelle de gaz naturel, actuellement de l'ordre de 37 milliards de m3, passerait à 105 milliards de m3, soit un quasi triplement16, impliquant des investissements énormes en terme d'infrastructures gazières, un risque d'augmentation des coûts du gaz naturel et une menace sur la sécurité d'approvisionnement.

Un volume financier d’environ 250 milliards de francs devrait être mobilisé uniquement pour la construction des centrales. A ces sommes, il conviendrait d'ajouter le coût des infrastructures gazières supplémentaires, le coût des externalités, les coûts échoués, etc.

Le remplacement du nucléaire par des centrales à cycle combiné n’est donc en aucun cas crédible.

Un scénario réaliste de réduction sensible de la part du nucléaire dans la production d'électricité française passe par deux volets distincts. D'une part, une réduction de la part des usages thermiques de l'électricité devrait être à l’ordre du jour. D'autre part, une pénétration accrue, mais compatible avec les contraintes techniques et financières de développement des infrastructures gazières, du gaz naturel dans le bilan de production électrique devrait intervenir.

Les Rapporteurs estiment en tout état de cause que le domaine privilégié d’application des nouvelles technologies du gaz est en France la production d’électricité en semi-base et en pointe.

5. Les coûts du kWh gaz selon la Digec

L’étude « coûts de référence » de la production électrique de la Digec, publié en 1997, propose des estimations de coûts pour deux types de technologie, l’une pour une mise en service industriel en l’an 2000 et l’autre pour une mise en service industriel en 2005.

· Un cycle combiné de 650 MW et son extrapolation technique

Le cycle combiné dont la mise en service est considérée en l’an 2000, correspond. à un cycle combiné de 650 MW. La centrale prise en référence pour l’an 2005 est d’une puissance identique mais les progrès technologiques survenus entre temps impliquent une baisse des coûts d’investissement et une amélioration des rendements.

Tableau : Caractéristiques générales des installations étudiées dans l’étude « coûts de référence » de la production électrique Digec 1997

 

cycle combiné avec mise en service industriel en 2000

cycle combiné avec mise en service industriel en 2005

caractéristiques techniques

- 650 MWe

- deux turbines associées à deux chaudières de récupération et une turbine à vapeur

- 400 MWe (chaudière 2 ou 3 corps) – extrapolation chaudière actuelle de 250 MWe

- régime sous-critique (170 bars, 567 °C, 566 °C)

- rendement : 40 % sur PCI

caractéristiques du fonctionnement en semi-base

- 2 niveaux de pression et de resurchauffe

- fonctionnement centré sur l’hiver

- PCN : 678 MW

- rendement sur PCI : 51,3 %

- pour mémoire

caractéristiques du fonctionnement en base

- 3 niveaux de pression et de resurchauffe

- PCN : 660 MW

- rendement sur PCI : 52,1 %

- rendement sur PCI : 57 %

durée de vie économique

25 ans 25 ans

disponibilité

90 % en base 90 % en base

durée de construction

34 mois 34 mois

coûts d’investissement

F / kWh

(taux d’actualisation : 5 %)

- semi-base : 3 988

- base : 4 202

- baisse de 15 %

- semi-base : 3 400

- base : 3 600

Des hypothèses différenciées d’évolution des prix du combustible sont posées, en prenant deux valeurs du dollar, à savoir des parités de 5 et 6,5 francs pour un dollar.

Tableau : Hypothèses sur le prix du combustible

 

hypothèse d’évolution du cours du gaz

scénario « bulle gazière »

- baisse du prix du gaz à 2 dollars par Mbtu en 2000

- stabilité à ce niveau de 2000 à 2010

- remontée de 2010 à 2015 pour atteindre 3,3 dollars par Mbtu

- stabilité au-delà de 2015

scénario bas

stabilité du prix du gaz

2,7 dollars /Mbtu

scénario médian

- hausse jusqu’à 3,3 dollars par Mbtu en 2005

- stabilité au-delà

scénario haut

- hausse jusqu’à 3,9 dollars par Mbtu en 2010

- stabilité au delà

A ce prix frontière du gaz, l’étude Digec rajoute les coûts de transport et de distribution, ainsi que les coûts de stockage du gaz, coûts nécessaires pour mettre le gaz à disposition de la centrale.

· Un coût compétitif avec le nucléaire mais une sensibilité importante aux variations des cours du gaz et du dollar

Le coût du kWh produit avec une centrale à cycle combiné à gaz est selon la Digec, compris entre 18,2 et 27,2 centimes.

Tableau : Coûts du kWh produit avec un cycle combiné à gaz – taux d’actualisation de 5 %

 

mise en service industriel en 2000

mise en service industriel en 2005

scénario et parité dollar /franc

bulle et 1 $ = 5 F

haut et 1 $ = 6,5 F

bulle et 1 $ = 5 F

haut et 1 $ = 6,5 F

coût d’investissement

3,7

3,7

3,1

3,1

coût d’exploitation

2,2

2,2

2,2

2,2

combustible

12,4

21,3

12,2

25,6

total

18,2

27,2

17,6

25,6

Ce coût présente une sensibilité non négligeable vis-à-vis du prix du gaz importé. Si l’on fait le cumul de la sensibilité au prix de la ressource et de celle vis-à-vis de la parité franc – dollar, cette sensibilité atteint en réalité près de 50 % .

Un autre facteur de sensibilité est le rendement de l’installation. Une variation de 1 % du rendement entraîne une variation d’environ 0,3 centime sur le prix du kWh.

· La prise en compte des infrastructures de transport

L’étude Digec semble, dans une certaine mesure, sous-évaluer, dans le cas du cycle combiné à gaz, l’impact du coût des infrastructures sur le coût de production du kWh.

Certes les coûts de transport et de distribution, ainsi que les coûts de stockage, semblent sont ajoutés au prix « frontière » du gaz. Pour chaque type de moyen de production et chaque durée de fonctionnement, le coût de transport et de stockage est de la forme « a + b . Pg » avec Pg prix d’importation du gaz naturel ; b part proportionnelle et a coût fixe.

Selon Suez-Lyonnaise des Eaux, les capacités de transport sont suffisantes17. Le tableau suivant détaille les dernières mises en service de gazoducs.

Tableau : Infrastructures de transport du gaz en Europe

 

mise en service

capacité

milliards de m3 par an

Interconnector

1997

20

NorFra

1998

14

Maghreb-Europe

1998

10

Europipe 2 Norvège- Allemagne

1999

21

Mais en réalité, on peut se demander si les infrastructures actuelles suffiraient à alimenter un ou plusieurs cycles combinés de grande puissance installés dans plusieurs des pays membres de l’Union européenne.

C’est pourquoi il paraît nécessaire de réviser le coût du combustible en intégrant la construction et l’amortissement de l’équipement de transport de la ressource jusqu’au lieu de la centrale.

C. La cogénération

La cogénération est la production simultanée, à partir d'un seul combustible, de chaleur et d'énergie mécanique, cette dernière étant utilisée le plus souvent pour entraîner des alternateurs produisant de l'électricité

Une définition précise de la cogénération est donnée par l'arrêté du 23 janvier 1995 définissant les installations bénéficiant de l'obligation d'achat par EDF. Pour bénéficier de la dénomination de cogénération, une installation doit respecter les contraintes suivantes :

a) le rendement énergétique global de l’installation doit être supérieur ou égal à 65%

b) le rapport chaleur / force (rapport entre la chaleur utile produite et l'électricité) doit être supérieur ou égal à 0,5.

La cogénération peut exister à partir de chaudières brûlant n’importe quel type de combustible - fioul, charbon, gaz, biomasse ou biogaz. En pratique, les projets actuels de cogénération concernent en quasi totalité des cycles combinés à gaz.

1. Des progrès technologiques importants

Les installations de cogénération de forte puissance comme celles de faible puissance ont bénéficié des progrès effectués sur les turbines à gaz et les cycles combinés. Dans son principe, une cogénération au gaz est en effet un cycle combiné dont on soutire une partie de la vapeur formée dans la chaudière de récupération des gaz brûlés en sortie de turbine.

Figure :Schéma de principe d’une cogénération à cycle combiné18

C’est principalement dans le domaine des petites installations que des progrès marquants ont été faits dans les dernières années.

· La mise au point d’installations de petite taille

Le rendement des moteurs thermiques à gaz n'a cessé de croître au cours des dernières années (jusqu'à environ 85%), grâce à l'amélioration de la récupération de toutes les sources de chaleur sur le moteur. Ces progrès ainsi que ceux réalisés en matière de fiabilité et pilotage à distance par informatique ont permis d'accroître la plage de rentabilité économique dans des gammes de puissances très faibles.

On a vu ainsi se développer, notamment aux Pays-Bas, au Danemark, en Allemagne et au Royaume-Uni, le concept de « micro-cogénérations ». Ces installations de très faible taille, conçues sur la base d'un moteur alimenté en gaz naturel, sont utilisées pour alimenter en chaleur et en électricité de petits sites tertiaires ou un groupe de logements, avec des puissances électriques installées pouvant ne pas excéder 40 à 50 kW électriques seulement.

Si ces gammes de puissances ont dominé le marché de la petite cogénération ces dernières années, on voit aussi apparaître des unités plus importantes de 1 MW, basées sur des petites turbines à gaz et non plus des moteurs thermiques.

· L’influence de la taille sur les coûts

Un effet de taille agit sur le coût du kWh produit par une turbine à gaz. Pour un fonctionnement en base, le coût du kWh produit avec une installation de 6 MW est inférieur d'environ 3,5 centimes à celui issu d’une installation de 1 MW. La même différence existe pour une puissance de 40 MW par rapport à une installation de 6 MW. En semi-base, le gain est légèrement supérieur. Cet effet de taille existe également pour les moteurs à gaz. Le gain est de 1,5 à 2cF/kWh lorsque l'on passe d'un seul moteur à une installation de 5 moteurs.

La turbine à gaz de 6 MW apparaît certes moins compétitive que le cycle combiné au gaz de 650 MW. Toutefois, la faiblesse de l'écart de coût (1,5 cF/kWh) entre les deux moyens de production témoigne de l'intérêt de la cogénération dans la mesure où celle-ci permet d'économiser des coûts de transport et de distribution de l'électricité.

· Cogénération et environnement

L’efficacité environnementale de la cogénération est évidente, dans la mesure où cette dernière se caractérise par des rendements élevés, supérieurs à 70 % dans la majorité des cas. Permettant une production d’électricité proche de l’utilisateur, la cogénération permet en outre des économies de réseau. La condition essentielle de sa mise en oeuvre n’en demeure pas moins l’existence de besoins réels et solvables en chaleur.

Par ailleurs, l’apport environnemental de la cogénération dépend étroitement de la situation de départ. En réalité, la majorité des projets de cogénération moderne font appel au gaz. Il y a donc lieu d’apprécier la part de la substitution du gaz à une autre forme d’énergie dans la réduction des émissions de SO2, de NOx et de CO2.

Dans le cas où une cogénération au gaz vient remplacer une turbine au fioul voire une chaudière à charbon, la simple substitution du gaz à ces procédés constitue un apport essentiel à la lutte contre la pollution. S’agissant de la situation française, il est clair que si la cogénération, hypothèse peu probable, devait venir en remplacement d’un réacteur nucléaire, la conséquence en serait une augmentation de rejets de CO2.

2. Les enjeux du développement de la cogénération

Le premier enjeu du développement de la cogénération est celui de l’efficacité énergétique.

Au plan global, il est établi que la cogénération de par les rendements de plus de 70 % qu’elle permet d’atteindre est un facteur d’efficacité du système énergétique, à condition que la production de chaleur soit la priorité de l’opération et qu’elle trouve une valorisation optimale.

· Le nouveau marché des « process » industriels

Le deuxième enjeu est l’optimisation de certains processus industriels de la chimie lourde, dans lesquels la production de chaleur et d’électricité est liée à celle d’un « process ». C’est ainsi le cas pour Air Liquide, le premier producteur mondial de gaz industriels, qui connaît depuis deux ans une accélération sans précédent de ses projets dans la cogénération. Sa capacité installée dans le monde entier est déjà de 2500 tonnes de vapeur par heure et de 1000 MWe19.

L'énergie est ainsi un moyen pour Air Liquide de gagner de nouveaux marchés, avec des usines fournissant à la fois des gaz industriels, son métier de base, mais aussi de la chaleur et de l'électricité de haute qualité c'est-à-dire sans micro-coupures. La cogénération apparaît ainsi comme un nouveau champ de développement industriel, avec même dans certains cas la valorisation de résidus énergétiques aujourd’hui inutilisés.

C’est ainsi qu’un projet novateur de cogénération à partir de résidus lourds issus du raffinage du pétrole va être lancé par EDF et Total à Gonfreville-l'Orcher20. Il s’agit d’un projet mixte de cogénération et de gazéification pour produire de l'électricité et de la vapeur et des gaz comme l'hydrogène et le monoxyde de carbone utilisés dans la synthèse de produits chimiques. L'usine fonctionnera à partir des résidus pétroliers les plus lourds, difficiles à valoriser. Total utilisera l'essentiel de la vapeur et EDF récupèrera le courant. Le démarrage de l’installation est prévu en 2003-2004. La capacité de production d'électricité sera de 350 MWe. S'il atteint ses objectifs, ce projet pourrait être dupliqué dans de multiples autres sites de raffinage à travers le monde

· La production décentralisée de chaleur et d’électricité

Le troisième enjeu du développement de la cogénération est la production efficiente de chaleur et d’électricité non seulement pour les agglomérations équipées de réseau de chauffage urbain mais aussi pour les collectivités de taille plus réduite.

A cet égard, des projets de ce type peuvent aussi résoudre les difficultés de réseau, dues à l’insuffisance de capacité de lignes de raccordement.

Les établissements publics, - hôpitaux, aéroports, universités, administrations – représentent à cet égard un potentiel très important pour le développement de la cogénération.

3. Le marché de la cogénération en Europe

La France est réputée être en retard pour la cogénération. Il est certain que l’importance du parc électronucléaire n’a pas été, dans le passé, un facteur de développement de la cogénération. Toutefois, deux points doivent être évoqués. D’une part il s’agit de l’influence des définitions de la cogénération sur les statistiques. D’autre part, il s’agit du mécanisme de rattrapage engagé en France depuis 1995.

Les comparaisons internationales, telles que celles indiquées dans la figure suivante, sont tributaires des définitions retenues pour la cogénération. On a vu précédemment que la définition française est particulièrement restrictive. Il n’en est pas de même pour celles en vigueur dans d’autres pays européens.

Figure : Part de la cogénération en 1995 dans la production d’électricité dans l’Union européenne21

Ainsi au Danemark ; un procédé est réputé être de la cogénération, si son rendement global est supérieur à 65 %. En revanche, en France, une installation pour être classée en cogénération requiert en outre un rapport chaleur/force supérieur à 50 %, ce qui éliminerait un nombre important dite de cogénération au Danemark.

Par ailleurs, la cogénération, séduisante sur le plan technique et économique, requiert la réunion de conditions particulières pour être mise en oeuvre. Il peut y avoir un écart important entre les objectifs et les réalisation, ainsi que l’indique la figure suivante.

Figure : Parc installé et objectifs gouvernementaux en matière de cogénération22

Le tableau suivant résume les politiques de différents pays de l’Union européenne en matière de cogénération.

Tableau : Politiques européennes en matière de cogénération23

pays

part de la cogénération dans la production

régime d’autorisations d’installations de production

incitations fiscales et subventions

conditions d’achat de l’électricité produite

 

actuelle

objectifs pour 2010

     

Grande-Bretagne

5 %

10 %

10 000 MW

procédures d’autorisation allégées

- exonération de la taxe sur les combustibles (fossile fuel levy)

- subventions aux études de faisabilité (energy saving trust)

obligation d’achat pour une certaine quantité

Espagne

6 %

12 %

5 000 MW

pas d’autorisation administrative si < 50 MW

promotion de la cogénération au travers d’aides et incitations fiscales obligation d’achat

Allemagne

21 %

25 %

28 300 MW

pas d’autorisation administrative si < 10 MW

- réduction de taxe

- aide au chauffage urbain

accord entre professionnels

Pays-Bas

376 %

50 %

12 000 MW

procédures d’autorisation allégées

- exonération de taxe sur le gaz

- incitations fiscales

obligation d’achat

Danemark

49 %

55 %

5 500 MW

procédures d’autorisation allégées

- subventions

- taxe sur le carbone

- obligation d’achat

- décision de convertir en cogénération toutes les installations de chauffage urbain

Les utilisations de la cogénération sont relativement constantes suivant les pays. Le Danemark étant mis à part, la cogénération répond environ pour moitié à des usages industriels et pour moitié à des usages climatiques, ainsi que l’indique la figure suivante.

Figure : Utilisation de la cogénération en Europe

Il est à noter par ailleurs qu’un nouveau créneau semble se développer du fait des bas prix du gaz et des progrès intervenus sur les turbines de faible puissance. Ainsi, les études de marché pour la petite cogénération en Allemagne et en Grande-Bretagne montrent que de nouveaux créneaux apparaissent pour l’avenir.

Tableau : Principaux marchés de la petite cogénération en Allemagne et en Grande-Bretagne24

 

Allemagne

Grande-Bretagne

piscines – écoles

38 %

58 %

habitat, hôtels, hôpitaux

30 %

25 %

petites industries, artisans

15 %

-

stations d’épuration (biogaz)

12 %

8 %

autres

5 %

9 %

total

100

100

4. Le développement de la cogénération en France

Si la France était en retard il y a encore 5 ans, dans le domaine de la cogénération, en réalité, ce retard est aujourd’hui en passe d’être rattrapé. La France devrait se situer à 5 % de cogénération dans la production d’électricité. L’obligation d’achat de l’électricité produite, à des conditions favorables pour les producteurs, aurait, selon certains observateurs, révélé la quasi-totalité des projets rentables.

Figure : Le développement récent de la cogénération au gaz en France25

Ce sont les conditions de rachat du courant électrique par EDF, qui ont permis le démarrage de la cogénération en France. Le tableau suivant montre la progression des décisions de réalisation, en distinguant les types d’application.

Tableau : Evolution des décisions de réalisation de cogénération au gaz en France depuis 199126, en MWe

 

tertiaire

régies, réseaux

industrie

total

1991

5

40

0

45

1992

25

0

13

38

1993

12

15

33

60

1994

21

20

62

103

1995

31

36

92

159

1996

34

88

92

214

1997

20

136

429

585

total

148

335

721

1204

· Les perspectives de marché selon Vivendi

Actuellement les réalisations de Vivendi dans le domaine de la cogénération sont les suivantes : 767 MWe pour 280 dossiers dans le domaine de la cogénération climatique et 415 MWe pour 31 dossiers dans le domaine industriel.

Ces réalisations, en exploitation ou en cours de construction, utilisent deux technologies différentes: les moteurs à gaz et les turbines à gaz.

Le choix entre ces deux solutions techniques sur chacune des opérations est effectué en fonction de la température nécessaire au fluide thermique de récupération de la chaleur spécifique à chaque installation.

D'une manière générale dans le domaine du climatique, les températures de récupération sont fréquemment aux alentours de 90 à 100°C ce qui autorise l'installation de moteurs à gaz. Dans le domaine industriel, où l'énergie consommée est souvent sous forme de vapeur, ce sont des turbines à gaz qui sont utilisées.

Cette règle n'est toutefois pas systématique puisque certains réseaux de chaleur dans l'habitat utilisent de la vapeur ou de l'eau surchauffée et dans ce cas la solution technologique la plus appropriée est la turbine à gaz.

La solution turbine à gaz pouvant fabriquer de la vapeur peut par conséquent fabriquer de l'eau chaude. Les choix, en général, ne se sont toutefois pas portés jusqu'à présent sur cette solution technologique car elle était moins rentable économiquement. L'évolution technique actuelle des turbines à gaz devrait probablement remettre en cause cette situation.

Les contraintes techniques rencontrées ont essentiellement concerné les conditions de raccordement au réseau électrique ou au réseau gaz. Les contraintes économiques n'ont pratiquement pas permis de réaliser d'opérations de moins de 1 MWe.

Selon Vivendi, le parc de production en France est peu développé en comparaison des autres pays européens. Mais les perspectives de développement en France sont importantes:

Dans le domaine du climatique elles concernent les réseaux de chaleur non encore équipés (puissance estimée 500 MWe) ; la création de réseaux de chaleur par regroupement de chaufferies relativement proches (puissance estimée 800 MWe) ; le marché de la petite cogénération de 50 à 1000 MWe (puissance théorique estimée 12 000 MWe).

Dans le domaine industriel, elles concernent surtout les industriels fonctionnant en discontinu et représentent un potentiel de 2 500 MWe.

Selon Vivendi, le développement effectif de ces cogénérations dépendra essentiellement des nouvelles conditions tarifaires d'achat d'EDF pour toutes les installations ne pouvant desservir de clients éligibles. En particulier la petite cogénération, d'une puissance inférieure à 1 000 kW, ne connaîtra son développement réel que si les prix d'achat augmentent de 10% par rapport au prix actuel. La prise en compte des coûts de distribution de l'électricité, qui n'avaient pas été intégrés dans les conditions tarifaires d'achat actuelles, devrait permettre d'améliorer les conditions d'achats.

5. Les tarifs de rachat de l’électricité produite par cogénération et leur pérennité

Les pouvoirs publics ont défini en 1997 un objectif de développement de la cogénération en France consistant en l’installation de 1000 MW sur cinq ans. Cet objectif a été atteint en un an.

Le prix de rachat de l’électricité par EDF a constitué la pierre angulaire d’un dispositif valable deux ans, instauré en mars 1997 et dont les éléments sont en cours de renégociation.

· Les modalités de calcul du prix du kWh produit

L’avantage essentiel de la cogénération est de permettre une économie d’énergie primaire, lorsque la chaleur et l’électricité produites trouvent une utilisation conjointe.

La quasi-totalité des coûts de production sont communs à la production d’électricité et à celle de chaleur. Il est donc impossible d’allouer les coûts, ni en fonction des rendements, ni en fonction des prix de vente.

Deux méthodes sont alors utilisables, celle de la chaudière dite équivalente et celle du prix de vente contractuel.

a) la méthode de la chaudière équivalente

Dans la méthode de la chaudière équivalente, la valorisation de la chaleur se fait au coût évité, par une chaudière indépendante utilisant le même combustible et dont le rendement conventionnel est de 90 % PCI27. On peut alors valoriser la chaleur au coût proportionnel, ce qui inclut le seul coût du combustible, ou au coût complet, en additionnant les coûts d’investissement, d’exploitation, de maintenance et de combustible.

Pour une cogénération au gaz produisant le kWh au coût variable ou proportionnel de 6,9 à 7,6 centimes, le prix de la chaleur ressort entre 8,5 et 10,5 centimes par kWh thermique. La différence entre le coût complet et le coût proportionnel de la chaleur est de l’ordre de 1,5 centime par kWh thermique.

b) la méthode de la valorisation par le prix de vente contractuel

Cette méthode conduit classiquement à des coûts compris entre 10 et 12 centimes par kWh thermique. Les facteurs influant sur le prix sont bien entendu les conditions du marché local de la chaleur : besoins, nombre de clients et de fournisseurs, services et garanties proposés.

Figure : Exemples de résultats de coût de l’électricité produite par cogénération selon l’étude Digec 1997

· Le dispositif de mars 1997

Les réseaux de chaleur bénéficiaient d’une obligation d’achat du courant produit par cogénération.

Le dispositif de mars 1997 a eu pour effet principal de permettre aux installations industrielles d’une taille égale ou supérieure à 8 MW de bénéficier de cette même obligation.

La croissance des projets de réseaux et de régie a été forte : 136 MW en 1997 contre 88 l’année précédente.

Mais c’est dans l’industrie que la croissance est la plus forte, avec un total de 429 MWe contre 92 l’année précédente. Sur ces 429 MW décidés en 1997, 400 relèvent d’installations de plus de 8 MW28.

Telle qu’elle a été définie en mars 1997, la rémunération principale de l’électricité produite par cogénération repose sur les « coûts de développement évités », incluant les « coûts de réseau ».

Les coûts de réseau d’EDF, d’après les résultats de l’entreprise en 1996, sont indiqués dans le tableau ci-après.

Tableau : Coûts de réseau pour EDF en 1996

  transport distribution
réseau THT et HTA HTB et BT
tensions ³ 63 kVA £ 20 kV
coût moyen par kWh 4 centimes 18 centimes
investissement 5,7 milliards de francs 14,1 milliards de francs

L’un des avantages de la cogénération est de permettre, au moins en théorie, des économies de réseau. En conséquence, l’un des paramètres du prix de rachat du courant est l’économie générée.

Tableau : Valorisation des économies de réseau dans le contrat cogénération EDF de 1997

 

100 mW sur THT

20 MW sur HTA

20 MW sur HTB

part fixe (F / kW)

45

195

145

par proportionnelle (cF / kWh)

0

1,3

0,9

total en centimes / kWh

production en base (8000 h)

0,6

3,5

2,7

total en centimes / kWh

production en semi-base

1,1

6,7

4,5

La mise en oeuvre de ce contrat a conduit à une véritable explosion du développement de la cogénération, à tel point que le gisement des cogénérations industrielles semble avoir été exploité en presque totalité, ce qui assèche un segment de marché sur lequel la concurrence était appelée à se développer.

La fin de la période de deux ans au cours de laquelle des tarifs favorables de rachat ont été consentis a suscité un afflux de demandes d’agrément.

· La thèse d’EDF : les conditions de mars 97 sont une charge trop lourde

Les conditions d’achat de l’électricité étant fixées, la rentabilité économique des cogénérations dépend principalement du coût d’investissement des installations et de la valorisation de la vapeur.

Le coût d’investissement pour une cogénération de grande taille est de l’ordre de 3500 F/kW29. La valorisation de la vapeur doit être faite par rapport au coût du combustible qu’il aurait fallu brûler pour produire cette même chaleur, les projets de cogénération se substituant à des chaudières existantes.

Les figures suivantes indiquent, sous ces hypothèses quels sont, selon EDF30, les écarts entre le prix de revient de l’électricité produite par cogénération et le tarif de rachat par EDF du courant produit.

Figure : Conditions d’achat par EDF de l’électricité produite en base par cogénération31

Figure : Conditions d’achat par EDF de l’électricité produite en semi-base par cogénération32

EDF en conclut qu’il existe un écart très important entre le prix de revient du kWh électrique produit par une cogénération et le prix de rachat par EDF de cette électricité.

Selon EDF, cet écart crée une rente économique considérable qui est captée, dans la plupart des cas, par l’utilisateur de la chaleur. La deuxième conclusion tirée par EDF est que les installations de cogénération d’une puissance supérieure ou égale à 40 MW produisent de l’électricité à des prix compétitifs. En conséquence, l’obligation de rachat devrait être supprimée, le marché ouvert à la concurrence devant être le débouché naturel de l’électricité produite par ces cogénérations de puissance.

En 1998, étant donné le faible nombre de centrales en cogénération, l’obligation d’achat ne représente pour EDF que quelques millions de francs. En 1999, en revanche, EDF estime qu’il lui en coûtera 500 millions de francs. En 2000, dans l’hypothèse de 3000 MW installés prévus (un millier de projets de moins de 8 MW et 2000 de plus de 8 MW), le surcoût du rachat pourrait atteindre 3 milliards de francs.

Cliquer ici pour accéder à la suite de la partie III du chapitre II:
D Les piles à combustible
E Le charbon propre, une technologie d'avenir pour les pays producteurs
F L'hydrolique

Cliquer ici pour retourner au sommaire général

1 Source : BP citée dans Le contexte énergétique, CEA-DSE/SEE, janvier 1999.

2 Source : GDF, audition du 17 décembre 1998.

3 Source : GDF, audition du 17 décembre 1998.

4 Source : GDF, audition du 17 décembre 1998.

5 Source : Alstom, audition du 21 janvier 1999.

6 Source : Alstom, audition du 21 janvier 1999.

7 Source : Alstom : audition du 21 janvier 1999.

8 En l’occurrence, le marché de la petite cogénération.

9 EDF vient de signer un accord avec Allied Signal sur ce marché des microturbines. Le marché visé est celui de la micro cogénération, essentiellement pour les petits sites tertiaires ou des immeubles d'habitation (voir plus loin).

10 Source : Alstom : audition du 21 janvier 1999.

11 Voir plus loin, les développements sur les piles à combustible.

12 Source : Alstom, audition du 21 janvier 1999.

13 Source : Alstom, audition du 21 janvier 1999.

14 Source : GDF, audition du 17 décembre 1998.

15 Source : GDF, audition du 17 décembre 1998.

16 Le marché de l'Union Européenne est actuellement de 330 milliards de m3.

17 Suez-Lyonnaise des Eaux, audition du 19 janvier 1999.

18 Source : Alstom, audition du 19 janvier 1999.

19 Les Echos, 5/10/1998.

20 La Tribune, 21/8/1998.

21 Source : Cogen Europe - Unipede

22 Source : Vivendi, audition du 14 janvier 1999.

23 Source : Vivendi, audition du 14 janvier 1999.

24 J. Zirngibl, La petite cogénération en Europe, Colloque Cogénération, ATEE, Paris, 3 et 4 février 1998.

25 Source : Gaz de France, audition du 17 décembre 1998.

26 Source : ExpertGaz.

27 JP Tabet, Ademe, séminaire EFE « Coûts et tarification de l’énergie », 27 novembre 1998.

28 O. Favre, De la théorie à la pratique dans les installations industrielles, Colloque Cogénération, ATEE, Paris, 3 et 4 février 1998.

29 Cas de la turbine LM 6000 de General Electric, d’une puissance de 40 MW.

30 F. Falgarone, Le point de vue d’EDF : quel avenir, quelles solutions, quelle évolution ? Colloque Cogénération, ATEE, Paris, 3 et 4 février 1998.

31 F. Falgarone, Le point de vue d’EDF : quel avenir, quelles solutions, quelle évolution ? Colloque Cogénération, ATEE, Paris, 3 et 4 février 1998.

32 F. Falgarone, Le point de vue d’EDF : quel avenir, quelles solutions, quelle évolution ? Colloque Cogénération, ATEE, Paris, 3 et 4 février 1998.



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