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ART. 7
N° 85
ASSEMBLEE NATIONALE
13 juin 2005

DROIT D’AUTEUR ET DROITS VOISINS
DANS LA SOCIÉTE DE L’INFORMATION - (n° 1206)

Commission
 
Gouvernement
 

AMENDEMENT N° 85

présenté par

MM. Bloche, Christian Paul, Caresche, Mathus
et les membres du groupe Socialiste

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ARTICLE 7

(Art. L.331-5 du code de la propriété intellectuelle)

Substituer au dernier alinéa de cet article les quatre alinéas suivants :

« Toute personne développant un système interopérant avec un système utilisant des mesures techniques doit pouvoir obtenir les informations nécessaires à cette interopérabilité dans un délai raisonnable et dans des conditions non-discriminatoires.

« On entend par informations essentielles à l’interopérabilité la documentation technique et les interfaces de programmation nécessaires pour obtenir dans un standard ouvert, au sens de l’article 4 de la loi 2004-575 du 21 juin 2004, une copie d’une reproduction protégée par une mesure technique, et une copie des informations sous forme électroniques jointes à cette reproduction.

« Les fournisseurs de mesures techniques ne peuvent exiger de contrepartie financière pour la fourniture d’informations essentielles à l’interopérabilité que lorsque ces informations sont transmises sur un support physique et uniquement pour couvrir les frais d’impression, de stockage et de transport.

« Tout intéressé peut demander au président du tribunal de grande instance statuant en référé d’enjoindre sous astreinte à un fournisseur de mesures techniques de fournir les informations essentielles à l’interopérabilité dans les conditions du présent article. »

EXPOSÉ SOMMAIRE

L’interopérabilité, capacité de deux systèmes à échanger des données, est une condition préalable de l’acceptation par les consommateurs des mesures techniques de protection.

Les consommateurs sont en effet aujourd’hui confrontés à une offre complexe. L’incertitude quant à la capacité de lire une œuvre acquise légalement et dont l’usage est contrôlée par une mesure technique les dissuade d’acheter et freine donc considérablement le développement commercial des sites de vente en ligne.

Le présent amendement vise à leur apporter la garantie que les œuvres protégées dont ils auraient fait l’acquisition peuvent être converties dans un format accepté par le système de lecture dont ils disposent.

Il garantit en effet que le fournisseur de cette mesure technique ne pourra pas rendre captif ses clients en bloquant la concurrence, soit en faisant de la rétention d’information essentielles à l’interopérabilité, soit en usant de conditions discriminatoires et non équitables. Il garantit aussi, pour ce qui concerne les informations électroniques jointes à une reproduction, que tous les acteurs du marché pourront faire en sorte que leurs logiciels respectent la loi en ne supprimant pas de telles informations lorsqu’ils manipulent des flux en contenant.

Cet amendement permet également de répondre aux objectifs fixés par la commission européenne lors de la revue de transposition de la directive 2001/29/CE, ainsi qu’aux attentes de nombreux acteurs industriels, associations de consommateurs. Tous ont en effet exprimé le souhait que les fournisseurs de mesures techniques se mettent d’accord sur des formats pivots aux spécifications publiques et librement implémentables par tous (« standards ouverts »).

Mais, sans signal fort d’un Etat membre, les annonces de recherche à l’échelle européenne d’une solution à l’interopérabilité des systèmes numériques de gestion de droits vont rester lettre morte. Elles ne conduiront qu’à des consortiums de grandes sociétés, principalement américaines et japonaises, ou, plus vraisemblablement, à un unique fournisseur américain abusant notoirement de la position dominante, mais pouvant désormais imposer parfaitement légalement à toutes les entreprises et au public européen des licences sur ses technologiques puisqu’ayant signé des accords stratégiques avec les grands producteurs de contenu.

Le texte du projet de loi ne prévoit qu’une licence obligatoire, qui ne permettra pas à tous les acteurs concernés, et notamment les développeurs, commerciaux ou non, de logiciels libres de disposer de la possibilité pratique de mettre en oeuvre cette interopérabilité.

Or, comme le soulignait Bernard Carayon dans son rapport d’information sur la stratégie de sécurité économique nationale, l’alternative de choix face à l’hégémonie américaine dans le secteur informatique pourrait venir du logiciel libre et entraver son développement interdirait à la France de continuer à disposer de systèmes d’informations interopérables et sûrs, dépourvus de portes dérobées (« back doors ») utilisables par des personnes malintentionnées ou des services de renseignement étrangers.