Accueil > Documents parlementaires > Amendements
Version PDF
ART. 17
N° 28
ASSEMBLÉE NATIONALE
8 février 2007

PRÉVENTION DE LA DÉLINQUANCE
(Deuxième lecture) - (n° 3567)

Commission
 
Gouvernement
 

AMENDEMENT N° 28

présenté par

M. Depierre

----------

ARTICLE 17

Après l’alinéa 8 de cet article, insérer les huit alinéas suivants :

« Art. 33-2. – Les responsables des lieux de vente, de location, de présentation ou de mise à disposition des documents mentionnés à l’article 32, spécialisés ou non, prennent les dispositions nécessaires pour permettre le contrôle de l’âge des acheteurs. Les œuvres ou les documents, et notamment les jeux vidéo interdits au moins de 16 ans, sont obligatoirement stockés dans un lieu non accessible aux mineurs.

« Les sites internet de vente en ligne, spécialisés ou non en jeux vidéo, ainsi que les services proposant des univers virtuels persistants, doivent mettre en en place des procédures de contrôle suffisantes pour vérifier l’âge des acheteurs.

« Art. 33-3 – L’autorité administrative est composée de juristes, professionnels du secteur et représentants des associations familiales. La composition est fixée par décret.

« Art. 33-4 – L’autorité administrative est chargée de la formulation des critères de classification et de la création d’une mention explicite obligatoire “interdit aux moins de, 3, 7, 12, 16 et 18 ans”. Une mention supplémentaire “réservé aux adultes” peut être portée en plus de la mention “interdit aux moins de 18 ans”.

« L’autorité administrative a compétence pour vérifier le contenu de toute œuvre ou document, et notamment tout jeu vidéo, avant et après sa mise à disposition au public.

« L’autorité administrative est habilitée à mener toute action judiciaire afin de faire respecter les dispositions des articles 32, 33-1, 33-2, 33-3, 33-4, 33-5.

« Art. 33-5. – L’organisation de jeux vidéo en public ou en réseau est soumise à déclaration préalable auprès de l’autorité administrative.

« L’autorité administrative dispose d’un pouvoir de surveillance et de régulation concernant tout œuvre et document, et notamment les jeux vidéo organisés en public ou en réseau, ainsi que dans tout univers virtuel créé par ordinateur accessible aux mineurs. »

EXPOSÉ SOMMAIRE

Les jeux vidéo extrêmement violents sont de plus en plus nombreux. Selon certains psychologues et certains pédopsychiatres, l’un des problèmes du jeu vidéo réside dans le fait que le joueur devient acteur. Il agit ; il décide de tuer, de braquer, de torturer, de consommer de la drogue… De plus en plus de CHU ouvrent aujourd’hui des services d’addiction aux jeux vidéo. Beaucoup de médecins observent une augmentation des troubles du comportement des adolescents liés aux jeux vidéo, sans compter les phénomènes de dépendance mais aussi le risque de transfert du virtuel au réel. Même si le passage à l’acte reste minoritaire, les cas récents de tuerie en Allemagne et aux États-Unis montrent qu’il y a un risque de dérapage lié à la banalisation de l’ultra violence.

Demandons-nous comment un enfant ou un adolescent complètement immergé pendant des heures chaque jour, dans un monde virtuel fait de violence gratuite, de meurtre, de torture, sort-il du jeu ? Est-il encore apte à distinguer le réel du virtuel ? Le normal de l’inacceptable ?

Bien sûr, il faut prendre garde de ne pas amalgamer tous les jeux vidéo. On ne peut mettre sur un même niveau un jeu vidéo dont l’objet est de tuer des extraterrestres avec un jeu dans lequel on torture, on tue d’innocentes victimes y compris des enfants.

Le jeu vidéo est un phénomène de société et un secteur économique florissant dans lequel notre pays est en pointe. Il est une création artistique qui doit être encouragée. D’ailleurs, à ce titre, notre Gouvernement a décidé, dans le cadre du projet de loi sur la modernisation de la diffusion audiovisuelle, de mettre en place un crédit d’impôt pour soutenir la création de jeu vidéo, lui reconnaissant ainsi un caractère culturel.

Mais un double constat s’impose : d’une part, l’ultra violence se banalise, voir se normalise dans certains jeux vidéo ; d’autre part, il est très facile aujourd’hui pour des mineurs de se procurer des jeux vidéo très violents en magasins spécialisés, en grande surface ou sur le net.

Le projet de loi sur la prévention de la délinquance prévoit bien une obligation pour les éditeurs et les distributeurs d’apposer une signalétique alertant sur le caractère violent de certains jeux avec la mention « mise à disposition des mineurs interdite », pour certaines catégories d’âge. Cela peut constituer une barrière à la diffusion de certains jeux vidéo particulièrement violents. Mais qui ira vérifier l’âge de l’acheteur ? Comment éviter les trafics de jeux, achetés par de jeunes adultes et revendus sous le manteau ? Enfin, comment mieux réguler les transactions sur le net ?

Il existe un système de classification, le PEGI, qui répertorie les jeux vidéo par critères d’âge et de contenu. Toutefois, ce système semble montrer ses limites puisque les recommandations d’âge sont confondues par les acheteurs avec des niveaux de difficultés et que les pictogrammes décrivant les contenus sont mal compris. La mention actuelle + 16 ou + 18 ne signifie pas “interdit aux moins de 16 ou de 18” mais simplement recommandés aux + de 16 ou 18 ans. Cela fait une différence de taille. A aucun moment n’apparaît clairement en toutes lettres sur les jaquettes des jeux, la mention : “interdit aux moins de 16 ans” ou “réservée aux adultes”.

Un travail de concertation avec les principaux syndicats d’éditeurs de jeux vidéo en France mais aussi l’AFJV, Agence Française des Jeux Vidéo et Familles de France, (association reconnue d’utilité publique) a permis d’aboutir à un consensus sur la manière de mieux protéger nos enfants et nos jeunes adolescents des jeux vidéo très violents.

C’est l’objet des alinéas 2 à 5 de l’article 32 du projet de loi sur la prévention de la délinquance des mineurs, que je soumets à la représentation nationale.