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N° 2572

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 12 octobre 2005.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES,

SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2006 (n° 2540)

TOME IV

DÉFENSE

PRÉPARATION ET EMPLOI DES FORCES

FORCES TERRESTRES

PAR M. Joël Hart,

Député.

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Voir le numéro : 2568 (annexe n° 10)

S O M M A I R E

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Pages

INTRODUCTION 5

I. -  UN BUDGET PRÉSERVÉ DANS UNE PRÉSENTATION NOUVELLE 7

A UNE NOUVELLE ARCHITECTURE BUDGÉTAIRE 7

1. Une construction selon une logique interarmées 7

2. Des comparaisons rendues difficiles 8

B UN BUDGET DE FONCTIONNEMENT GLOBALEMENT SATISFAISANT 9

1. Les rémunérations et charges sociales 9

2. Le fonctionnement courant 10

C. UN BUDGET D'ÉQUIPEMENT À SURVEILLER 10

1. Les crédits de paiement 10

2. Les autorisations d'engagement 11

II. - DES EFFECTIFS EN VOIE DE STABILISATION 13

A. L'ENCADREMENT 13

1. Les officiers 13

2. Les sous-officiers 14

B. LES MILITAIRES DU RANG 15

1. Les engagés volontaires de l'armée de terre (EVAT) 15

2. Les volontaires de l'armée de terre (VDAT) 16

3. La fidélisation des militaires du rang 17

C. LES RÉSERVES 19

D. LES CIVILS 20

III. - UNE PRÉPARATION CONDITIONNÉE PAR LE MATÉRIEL 21

A. LES PRINCIPAUX ÉQUIPEMENTS LIVRÉS EN 2006 21

1. Les livraisons des chars Leclerc sont rééchelonnées 21

2. Les hélicoptères 22

3. Les autres principaux matériels 22

B. L'ÉVOLUTION DE LA DISPONIBILITÉ TECHNIQUE OPÉRATIONNELLE 24

1. Une situation stabilisée 24

2. Les perspectives d'évolution 25

3. Seul un char Leclerc sur deux est en état de servir 25

IV. - L'ACTIVITÉ DES FORCES TERRESTRES 27

A. L'ENTRAÎNEMENT TRIBUTAIRE DE LA DISPONIBILITÉ DU MATÉRIEL 27

1. Une augmentation du nombre de jours d'exercice 27

2. La situation de L'ALAT reste critique 28

3. Les crédits consacrés aux munitions d'instruction restent stables 29

B. TOUJOURS AUTANT DE MISSIONS EXTÉRIEURES ET INTÉRIEURES 29

1. Le redéploiement des forces présentes hors métropole 31

2. Le rythme des missions intérieures ne diminue pas 33

a) Le plan Vigipirate 33

b) Les incendies de forêt 34

c) Les principales autres opérations 34

TRAVAUX DE LA COMMISSION 35

I. -  AUDITION DU GÉNÉRAL BERNARD THORETTE, CHEF D'ÉTAT-MAJOR DE L'ARMÉE DE TERRE 35

II. -  EXAMEN DES CRÉDITS 44

INTRODUCTION

L'exercice budgétaire 2006 constituera la quatrième annuité de la loi de programmation militaire pour les années 2003-2008. Il marquera également l'entrée en application de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) qui devrait profondément modifier l'examen et la perception du budget de la Nation en général, de la défense en particulier.

Dans un contexte économique plus que délicat, le budget des forces terrestres continue à apparaître relativement préservé. Respectant de manière globale, pour la quatrième année consécutive, les dispositions de la loi de programmation militaire, il permettra, malgré quelques aménagements, la poursuite des principaux programmes d'acquisition des matériels terrestres. Il devrait permettre le maintien à un bon niveau de l'entraînement des militaires de l'armée de terre, désormais proche de l'objectif de cent jours d'activité par an. Les hypothèques levées sur le recrutement permettront de conserver aux forces terrestres des effectifs très proches de ceux définis par la programmation.

L'armée de terre, entièrement professionnalisée depuis 2002, a désormais appris à gérer sur le long terme, des effectifs d'engagés recrutés en grand nombre au cours des années passées et qu'il s'agit de renouveler d'une manière continue. Grâce au fonds de consolidation de la professionnalisation et à la poursuite du plan d'amélioration de la condition militaire, le projet de budget lui en donne en grande partie les moyens.

Pendant que se poursuivent ces actions constantes d'adaptation et de modernisation, l'activité des forces ne faiblit pas, qu'il s'agisse de missions intérieures ou d'opérations extérieures : en métropole, les développements récents du terrorisme international imposent une participation toujours considérable des forces terrestres au plan Vigipirate ; hors métropole, aux missions anciennes mais toujours actives (Bosnie-Herzégovine, Kosovo) se sont ajoutées, depuis quelques années les opérations en Côte d'Ivoire et en Afghanistan qui réclament d'importants effectifs constamment renouvelés.

Ces éléments rendent d'autant plus indispensable un examen soigneux des crédits qui seront affectés à l'armée de terre en 2006. Après une présentation générale du budget des forces terrestres, le rapporteur examinera l'évolution des effectifs militaires et civils de l'armée de terre, le maintien en condition opérationnelle des équipements et, enfin, l'activité des forces terrestres au travers de leur entraînement et de leurs missions.

L'article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, tel que modifié par la loi organique n° 2005-779 du 12 juillet 2005, fixe comme date limite, pour les réponses aux questionnaires budgétaires, le 10 octobre.

À cette date, 100 % réponses étaient parvenues à votre rapporteur.

I. -  UN BUDGET PRÉSERVÉ DANS UNE PRÉSENTATION NOUVELLE

La nouvelle approche du budget de l'Etat, conformément à la loi organique relative aux lois de finances, rend nécessaire une présentation de la nouvelle architecture. Les crédits de fonctionnement et de ceux d'équipement restent globalement satisfaisants, même si un suivi attentif de ces derniers apparaît nécessaire.

A UNE NOUVELLE ARCHITECTURE BUDGÉTAIRE

1. Une construction selon une logique interarmées

La loi organique relative aux lois de finances qui entre pleinement en application avec le budget 2006 va modifier la présentation et la perception du budget. La logique ministérielle qui était celle mise en place par l'ordonnance de 1959 est désormais remplacée par une logique de missions elles-mêmes divisées en programmes. La défense de la France est ainsi divisée en quatre missions et neuf programmes présentés dans le tableau ci-après :

Missions

Programmes

Maître d'œuvre

Mise en œuvre de la politique de défense

Environnement et prospective de la politique de défense (144)

Délégué aux affaires stratégiques (DAS)

Préparation et emploi des forces (178)

Chef d'état-major des armées (CEMA)

Equipement des forces (146)

Chef d'état-major des armées (CEMA) et Délégué général à l'armement (DGA)

Soutien de la politique de défense (212)

Secrétaire général pour l'administration (SGA)

Sécurité

Gendarmerie nationale (152)

Directeur général de la gendarmerie nationale (DGGN)

Mémoire et lien avec la Nation

Indemnisation des victimes de la seconde guerre mondiale (158)

Secrétaire général pour l'administration (SGA)

Lien entre la Nation et son armée (167)

Secrétaire général pour l'administration (SGA)

Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant (169)

Secrétaire général pour l'administration (SGA)

Recherche et enseignement supérieur

Recherche duale (191)

Délégué général à l'armement (DGA)

Dans cette nouvelle architecture, le budget de l'armée de terre est réparti, entre les programmes 178, 146 et 212. En termes de fonctionnement, le principal de ces trois programmes est celui relatif à la préparation et l'emploi des forces (178), qui regroupe 93 % des effectifs de l'armée de terre. Mais ce programme ne concerne pas les seules forces terrestres. Il est lui-même subdivisé en sept actions, la deuxième étant plus spécifique à l'armée de terre.

L'essentiel de l'équipement des forces terrestres est décrit dans la deuxième action du programme n° 146 consacré à l'équipement des forces.

Le programme 212, qui regroupe les actions contribuant au soutien de la politique de défense, s'avère plus largement interarmées. Les actions relatives à la politique immobilière et aux systèmes d'information sont les seules qui, au sein de ce programme, concernent véritablement les forces terrestres.

2. Des comparaisons rendues difficiles

La comparaison entre les crédits alloués aux forces terrestres en loi de finances initiale pour 2005 et ceux prévus dans le projet de loi de finances pour 2006 pour le budget opérationnel de programme de l'armée de terre s'avère particulièrement difficile compte tenu des importants changements de périmètres budgétaire intervenus au sein des forces terrestres.

En effet, alors que l'armée de terre comptait en 2005 environ 135 000 militaires, seuls 124 600 (93 %) d'entre eux sont pris en compte au sein du programme 178 (préparation et emploi des forces). Certains éléments des forces terrestres sont comptabilisés au sein d'autres programmes et actions, notamment la direction centrale du génie, la direction centrale des télécommunications informatiques et la section technique de l'armée de terre.

Par ailleurs, le titre II du projet de loi de finances pour 2006 inclut désormais les rémunérations et charges sociales (RCS) des 25 100 civils du programme 178, ce qui n'était pas le cas du titre III du budget de l'armée de terre en 2005, limité aux seuls RCS des militaires.

Le titre III du projet de loi de finances comprend désormais les crédits de fonctionnement, hors rémunérations et charges sociales, ainsi que les crédits relatifs aux munitions, à l'entretien programmé du matériel (EPM) et à l'entretien programmé des personnels (EPP), appellation assez étrange qui désigne l'entretien des effets individuels du personnel (tenues...).

Enfin, le titre V recouvre désormais les petits matériels et les animaux.

Dans le but de pouvoir établir des comparaisons fondées, le tableau suivant porte uniquement sur les forces terrestres incluses dans le périmètre de l'action 2 du programme 178.

Crédits de l'action 2 (préparation des forces terrestres) du programme 178

(en millions d'euros courants)

2005

2006

Titre II (hors pensions)

4 534

4 651 (+2,6 %)

Titre III

1 615

1 610 (-0,3 %)

Titre V

194

194

Titre VI

0,35

0,35

Total

6 343,35

6 455,35 (+1,8 %)

Source : ministère de la défense

Le projet de loi de finances alloue à l'armée de terre un niveau de crédits, en titre II, en cohérence avec les effectifs et les objectifs de la loi de programmation militaire.

En revanche, les crédits de fonctionnement inscrits au titre III imposent une nouvelle économie estimée à 15 millions d'euros constants alors même que le prix des carburants ne cesse d'augmenter. Cette situation imposera la réduction de quatre jours d'activité sur l'objectif annuel de 100 jours fixés par la loi de programmation.

Les crédits destinés à l'entretien programmé du matériel et du personnel, aux munitions et à l'Eurofor (titres III, V et VI) connaissent une totale stabilité.

B UN BUDGET DE FONCTIONNEMENT GLOBALEMENT SATISFAISANT

1. Les rémunérations et charges sociales

La masse financière prévue pour la préparation des forces terrestres s'élèvera, en 2006, à 7 488 millions d'euros dont 4 646 millions d'euros au titre des rémunérations et charges sociales et 2 842 millions d'euros pour les pensions. Ces chiffres ne concernent que les 124 600 militaires (sur les 135 000 de l'armée de terre) et les 25 100 civils des forces terrestres inscrits dans ce programme. Toute comparaison avec les exercices précédents est évidemment rendue impossible.

Cette masse budgétaire devrait permettre le maintien des effectifs à 134 postes de militaires près. Le personnel civil perd, quant à lui, 97 postes.

Le plan d'amélioration de la condition militaire (PACM) se poursuivra en 2006. Avec une dotation de 14,4 millions d'euros, il permettra la revalorisation de l'indemnité pour contrainte militaire qui sera relevée de 6,05 % en région parisienne et de 4,27 % dans les autres régions. Le fonds de consolidation de la professionnalisation sera doté de 1,6 million d'euros, ce qui permettra de mettre en œuvre de nouvelles mesures indemnitaires ciblées pour certaines activités militaires spécifiques et d'augmenter le contingent de colonels hors-échelle. Le plan d'adaptation des grades aux responsabilités exercées (PAGRE) se poursuit également et bénéficiera de 400 000 euros en 2006.

2. Le fonctionnement courant

Le budget de fonctionnement hors RCS s'élèvera à 813 millions d'euros en 2006, en baisse de 148 millions d'euros par rapport à 2005, mais les modifications de périmètres induites par la nouvelle présentation du budget rendent, là aussi, les comparaisons très difficiles. Ce budget a été bâti au printemps 2005 sur l'hypothèse d'un baril de pétrole 36 dollars et d'un dollar à 0,77 euro. La modification de ces hypothèses décidée par le ministère de l'économie et des finances en septembre (un baril de pétrole à 60 dollars et un dollar à 0,81 euro) n'a pas eu de conséquence sur le niveau des crédits consacré au fonctionnement de l'armée de terre qui sont restés inchangés. Compte tenu du prix réel du baril de pétrole, l'armée de terre estime qu'elle devra réaliser une économie de l'ordre de 15 millions d'euros, ce qui correspond à huit jours d'activité sur les 100 inscrits en loi de programmation.

Afin de ne pas trop réduire l'entraînement des forces, le chef d'état-major a décidé de diminuer l'activité de seulement quatre jours, le reste des économies devant être obtenu sur le fonctionnement courant des unités, principalement sur le chauffage. Dans un régiment que le rapporteur a visité lors de ses travaux budgétaires, l'encadrement s'est montré conscient des contraintes à venir : la température des locaux sera abaissée d'un degré. Il reste à espérer que cette mesure, qui ne pourra pas être renouvelée chaque année, ne découragera pas les vocations des engagés volontaires qui sont, pour beaucoup, logés dans leurs casernements.

Le budget alimentation s'élèvera à 114 millions d'euros en 2006, en diminution de 3 millions d'euros par rapport à 2005. Le changement de périmètre dû à la LOLF explique en grande partie cette évolution.

C. UN BUDGET D'ÉQUIPEMENT À SURVEILLER

1. Les crédits de paiement

La plus grande partie des crédits de paiement consacrés au budget d'équipement des forces terrestres sont inscrits dans l'action n° 2 du programme d'équipement des forces. On comptabilise à ce titre environ 1 770 millions d'euros concernant les systèmes d'armes.

Mais on trouve également près de 990 millions d'euros inscrits dans le programme relatif à la préparation des forces. Il s'agit des sommes consacrées à l'entretien programmé des forces, à l'entretien programmé du personnel et aux munitions. On trouve également 277 millions d'euros inscrits dans le programme de soutien à la politique de défense au titre de l'infrastructure, ainsi qu'environ 51 millions inscrits dans le même programme au titre des systèmes informatiques.

L'addition de toutes ces sommes fournit un total d'environ 3 100 millions d'euros, en hausse de 85 millions d'euros (+ 2,8 %) par rapport aux 3 015 millions d'euros de crédits d'équipement dévolus aux forces terrestres par la loi de finances initiale pour 2005. Cette somme est toutefois inférieure à l'annuité 2006 inscrite en loi de programmation militaire et qui a été fixée à 3 313 millions d'euros. Ce décrochage, d'environ 6 %, n'est pas aussi important qu'il a pu l'être dans le passé entre lois de programmation et lois de finances. Il a néanmoins conduit à étaler dans le temps et à réduire un certain nombre de programmes d'équipement.

C'est ainsi que le parc de d'hélicoptères Gazelle antichars sera progressivement diminué, la menace blindée ayant à peu près disparu. La rénovation des hélicoptères de transports Puma est abandonnée : elle aurait nécessité une remise aux normes européennes lourde et coûteuse pour un parc d'appareils déjà très anciens. Seuls les Cougar, version plus moderne des Puma seront rénovés. Le nombre d'engins du génie permettant le franchissement d'obstacles sera également réduit avec la diminution quantitative du programme Sprat1 et l'abandon du programme Mars (Mistral armored system) d'emport de missile sol-air Mistral sur un châssis blindé. Dans ces circonstances, le retard enregistré par le programme VBCI (véhicule blindé de combat d'infanterie) pourrait presque apparaître comme une chance sur le plan financier.

Enfin, les crédits destinés à l'entretien programmé du matériel seront particulièrement contraints, ce qui risque de réduire encore davantage la disponibilité des parcs de matériels. Cela s'avèrera d'autant plus pénalisant que les nombreuses opérations extérieures auxquelles participe l'armée de terre induisent une usure prématurée des équipements dont le surcoût, estimé à environ 20 millions d'euros par an, n'est jamais compensé.

2. Les autorisations d'engagement

Le montant des autorisations d'engagement pour l'ensemble des actions impliquant les forces terrestres, s'élèvera, en 2006, à 3 453 millions d'euros. A cette somme viendront s'ajouter près de 1 400 millions d'euros d'autorisations de programme antérieures non consommées et reportées d'exercice en exercice. Le total des autorisations d'engagement s'élèvera donc à environ 4 800 millions d'euros. Ces ressources pourraient théoriquement permettre de conclure les commandes prévues si elles étaient entièrement employées. Mais les réductions de crédits de paiement intervenus en 2004 et 2005 risquent de conduire les services gestionnaires de crédits à anticiper une situation similaire en 2006 et donc à ne pas utiliser la totalité des autorisations d'engagement inscrites en loi de finances.

L'armée de terre passera commande, en 2006, des principaux équipements suivants :

- 41 systèmes de coordination des feux Martha 2 ;

- 52 systèmes d'information régimentaire SIR ;

- 35 systèmes de drones de reconnaissance au contact (DRAC) ;

- 5 045 tenues de combat Félin ;

- 44 blindés légers AMX 10 RC rénovés ;

- 55 véhicules blindés légers (VBL) ;

- 8 systèmes de pose rapide de travures (SPRAT).

Le budget d'équipement des forces terrestres doit donc plus que jamais être placé sous surveillance afin d'éviter que le petit décrochage enregistré par rapport à la loi de programmation militaire ne s'amplifie, notamment lorsque seront engagés certains programmes lourds portés par d'autres armées : second porte-avions, frégates multimissions, sous-marins de type Barracuda...

II. - DES EFFECTIFS EN VOIE DE STABILISATION

Armée numériquement la plus importante, avec 133 720 militaires et 28 000 civils, l'armée de terre a vu ses effectifs sensiblement réduits par la professionnalisation, alors même que ses missions internes ou extérieures ne faiblissaient pas. Mais la forte diminution des effectifs, redoutée l'an dernier en raison de contraintes intervenues en cours de gestion, a finalement été évitée.

A. L'ENCADREMENT

1. Les officiers

Traditionnellement faible, l'écart entre le nombre d'officiers prévu par les lois de programmation successives et celui inscrit en loi de finances est resté modéré, même s'il s'est légèrement accru en 2005 par rapport à l'année précédente.

De la même manière, les effectifs réels sont restés assez proches des effectifs théoriques : supérieur à 400 en 2002, le déficit n'atteint plus que 109 ou 143 officiers en 2005, selon que l'on se réfère à la loi de finances ou à la loi de programmation. Ce décalage, minime sur un total de près de 16 000 postes, peut être assimilé à un volant de gestion.

Recrutement des officiers par origine depuis 2000

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Direct (1)

228

225

215

228

216

223

213

Semi-direct (2)

199

192

254

238

231

213

221

OAEA (3), OAES (4), rang

220

223

242

253

225

187

160

ORSA (5)/OSC (6)

427

525

325

429

225

254

240

Total des recrutements

1 074

1 165

1 036

1 148

897

877

834

Départs

1 138

1 099

1 134

868

794

826

Solde

- 64

+ 66

- 98

+ 280

+ 103

+ 51

(1) École spéciale militaire (Saint-Cyr), école polytechnique, école nationale supérieure des arts et métiers, commissariat de l'armée de terre (voie directe), corps technique et administratif (voie directe).
(2) École militaire interarmes (EMIA), commissariat de l'armée de terre (voie semi-directe),
corps technique et administratif (voie semi-directe).
(3) Officier d'active en école d'arme.
(4) Officier d'active en école de spécialité.
(5) Officier de réserve en situation d'activité.
(6) Officier sous contrat.

Source : ministère de la défense

L'augmentation du recrutement d'officiers observée en 2003 était due, pour l'essentiel, à l'embauche d'officiers sous contrats (OSC), qui avait traduit le souci de recruter des spécialistes en remplacement des scientifiques du contingent et de faciliter la mise en place d'une filière d'experts.

Depuis lors, le niveau du recrutement n'a fait que décroître, passant, en 2004, pour la première fois sous le seuil symbolique des 1 000 officiers embauchés dans l'année. Cette diminution du recrutement, qui s'aligne sur une réduction similaire du flux des départs devrait contribuer à stabiliser les effectifs d'officiers des forces terrestres.

Récapitulatif des effectifs militaires de l'armée de terre

2002

2003

2004

2005

Officiers

Lois de programmation

16 080

15 792

15 792

15 796

Lois de finances initiales

15 792

15 776

15 804

15 762

écart LPM

- 288

- 16

+ 12

- 34

Effectifs réels

15 674

15 664

15 734

15 653

écart LFI

- 118

- 132

- 70

-109

écart LPM

- 406

- 148

- 58

-143

Sous-officiers

Lois de programmation

50 365

49 277

49 777

49 811

Lois de finances initiales

49 777

49 274

48 605

47 839

écart LPM

- 588

- 3

- 1 172

- 1 972

Effectifs réels

48 320

48 073

48 155

47 117

écart LFI

- 1 457

- 1 701

- 450

- 722

écart LPM

- 2 045

- 1 704

- 1 622

- 2 694

Engagés volontaires de l'armée de terre (EVAT)

Lois de programmation

66 681

66 470

67 470

69 159

Lois de finances initiales

65 470

66 470

68 563

68 422

écart LPM

- 1 211

0

+ 1 093

- 737

Effectifs réels

63 650

66 695

67 255

68 422

écart LFI

- 1 820

+ 225

-1 308

- 620

écart LPM

- 3 031

+ 225

+ 215

- 168

Volontaires de l'armée de terre (VDAT)

Lois de programmation

5 500

3 972

2 382

2 445

Lois de finances initiales

5 544

3 454

2 368

2 345

écart LPM

+ 44

- 518

- 14

- 100

Effectifs réels

3 093

2 938

1 889

1 655

écart LFI

- 2 451

- 516

- 479

- 690

écart LPM

- 2 407

- 1 034

- 493

- 790

LPM : loi de programmation militaire. LFI : loi de finances initiale.

Pour 2005, les effectifs réels constituent une prévision réalisée au 1er juillet.

Source : ministère de la défense

2. Les sous-officiers

Les effectifs budgétaires de la catégorie des sous-officiers ont connu une diminution régulière au cours des dernières années en raison de la professionnalisation des forces. Mais les mesures incitatives au départ ont connu un succès supérieur à ce qui était attendu et la catégorie a pâti d'un sous-effectif, aggravé par l'attractivité croissante du secteur civil. En 2005, le déficit est encore de plus de 700 sous-officiers par rapport à la loi de finances en cours et de près de 2 700 sous-officiers par rapport à la loi de programmation militaire adoptée il y a trois ans.

Pour mettre un terme à cette tendance, l'armée de terre avait augmenté significativement son recrutement, prévoyant d'embaucher 3 850 sous-officiers chaque année entre 2003 et 2004, contre environ 3 000 au cours des deux années précédentes et moins de 2 500 à la fin des années 90. Toutefois, le ralentissement de la promotion interne, réduite d'environ 10 % en 2005, a contribué à augmenter ce déficit de plus de 800 postes. La stabilisation du recrutement à un niveau beaucoup plus faible que celui des départs devrait contribuer à aggraver encore ce déficit.

Evolution du recrutement des sous-officiers

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

Concours externe

1 269

1 554

1 694

1 642

1 595

1 311

1 282

1 282

Promotion interne

1 281

1 396

1 452

2 148

1 821

1 141

1 218

1 218

Total

2 550

2 950

3 146

3 790

3 415

2 452

2 500

2 500

Départs

4 598

4 228

4 190

3 234

3 225

3 280

3 280

3 010

Solde

-2 048

-1 278

-1 044

+ 556

+ 190

- 828

- 780

- 510

Source : ministère de la défense

L'armée de terre a clairement décidé de consacrer prioritairement les ressources budgétaires de l'exercice 2005 à la préservation du recrutement de ses militaires du rang, afin de compenser les contraintes financières imposées durant la deuxième moitié de l'exercice 2004. En contrepartie, c'est le recrutement des sous-officiers qui est réduit sur la période 2005-2007.

Evolution du recrutement externe

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005 (1)

Places ouvertes

1 147

1 269

1 554

1 694

1 642

1 595

1 311

Dossiers de candidatures

9 262

8 176

8 092

7 400

8 853

6 640

4 352

Proportion de candidats retenus

12 %

20 %

25 %

37 %

28 %

26 %

(1) Dossiers déposés au cours du premier semestre uniquement

Source : ministère de la défense

B. LES MILITAIRES DU RANG

1. Les engagés volontaires de l'armée de terre (EVAT)

La professionnalisation a conduit l'armée de terre, depuis 1997, à créer chaque année 5 900 postes nouveaux d'engagés volontaires (EVAT). Compte tenu du nécessaire remplacement des engagés dont les contrats arrivent à échéance, ce sont 10 000 à 12 000 EVAT qui ont été recrutés annuellement, faisant passer le nombre de postes budgétaires d'engagés de 36 000 en 1997 à 68 563 fin 2002.

La réalisation des effectifs a donné toute satisfaction jusqu'en 2003, année qui s'est terminée avec un effectif moyen réalisé en léger excédent de 225 militaires du rang à la fois par rapport à la loi de finances initiale et par rapport à la programmation militaire. En raison des contraintes financières intervenues en cours d'exercice, les effectifs n'ont pas été entièrement atteints en 2004 : 1 308 militaires du rang manquaient aux effectifs moyens réalisés au 31 décembre. Les craintes du chef d'état-major, qui redoutait un déficit bien plus important en 2005, ne se sont heureusement pas concrétisées puisque l'année se terminera avec un déficit prévisionnel d'à peine 620 militaires du rang par rapport à la loi de finances initiale et 168 par rapport à la loi de programmation militaire.

Evolution du nombre de candidatures aux postes d'evat

2000

2001

2002

2003

2004

2005 (6)

Candidatures spontanées

17 154

18 490

16 860

21 445

16 112

Candidatures utiles (1)

12 102

10 692

8 656

12 000

14 648

Effectif total des recrutements

10 647

12 741

9 699

12 791

8 387

9 362

Dont EVAT ultérieurs (2)

3 167

3 466

2 377

2 935

1 510

1 047

Dont EVAT initiaux (3)

7 480

9 275

7 322

9 856

6 877

8 315

Taux de sélection (4)

1,1 (h) 1,9 (f)

1,15

1,18

1,21

2,13

Départs d'EVAT (5)

4 068

6 145

6 940

7 765

8 569

8 920

(1) Dossiers de candidats jugés aptes et orientés. Concerne les seuls EVAT issus du civil.
(2) Issus du personnel volontaire (VDAT).
(3) Issus du civil.
(4) Nombre moyen de candidat par poste ; hommes (h) et femmes (f).
(5) Y compris nominations dans le corps des sous-officiers.
(6) Prévisions établies au 31 mai 2005

Source : ministère de la défense

Le nombre de candidatures spontanées a connu une hausse inattendue et bienvenue en 2003, ce qui a permis à l'armée de terre de combler le déficit accumulé en 2002. En 2004, si le nombre de candidatures spontanées a baissé, le nombre de candidatures utiles n'a jamais été aussi élevé, permettant une hausse spectaculaire du taux de sélection qui dépasse désormais le chiffre de deux candidats pour un poste.

L'augmentation du nombre de candidats se traduit par une amélioration qualitative du recrutement. Alors qu'en 2003 les nouveaux EVAT titulaires du baccalauréat ne représentaient que 21% des nouvelles recrues, leur proportion a presque doublé en un an pour atteindre 38,3 % des personnels recrutés en 2004. Parallèlement, les militaires du rang titulaires d'un CEP-CAP ou sans aucun diplôme ne représentent plus que 13,4 % des recrues contre 20% en 2003 et celles titulaires d'un BEPC représentent 48,3 % des effectifs contre 59 % il y a deux ans.

2. Les volontaires de l'armée de terre (VDAT)

Les volontaires de l'armée de terre (VDAT) constituent une catégorie particulière de militaires, recrutés sur la base de contrats courts. Agés de plus de 18 ans et de moins de 26 ans à la date du dépôt de la première demande de volontariat, les VDAT peuvent souscrire un volontariat pour une durée de douze mois, renouvelable chaque année dans la limite de soixante mois, par tranches successives de douze mois. Si les VDAT sont en majorité des militaires du rang, quelques centaines d'entre eux sont appelés à occuper des postes de sous-officiers, voire d'aspirants. L'idée qui présida à la création de cette catégorie était d'offrir à ceux qui étaient intéressés l'équivalent d'un service militaire, puisque le contrat de base est de douze mois ; il s'agissait aussi de permettre à ceux qui n'étaient pas entièrement sûrs de leur vocation militaire de pouvoir s'éprouver pendant une année au métier des armes avant, éventuellement, de signer un engagement d'EVAT de plus longue durée.

La catégorie des VDAT a toujours connu un important déficit, qui provient sans doute de la différence de solde par rapport aux EVAT, mieux rémunérés, car engagés sur une plus longue période. En 2002, seuls 2 840 postes étaient pourvus sur 5 544 prévus en loi de finances. Aussi, entre 2003 et 2005, plus de la moitié des postes budgétaires de cette catégorie ont été transformés en postes d'EVAT.

Bilan du recrutement et des départs de VDAT

L'année 1999 constitue le point de départ du recrutement des VDAT.

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005 (1)

Recrutements

2 076

2 476

2 651

3 178

2 461

1 812

1 830

Départs

335

1 448

2 336

1 451

2 031

1 309

927

(1) Prévisions

Source : ministère de la défense

Malgré ces mesures et les efforts entrepris en matière de recrutement, les effectifs budgétaires ne sont pas atteints, ce qui confirme la faible attractivité de cette catégorie. En 2005, le déficit est de l'ordre de 700 VDAT pour 2 345 postes budgétaires, soit près du tiers des effectifs.

3. La fidélisation des militaires du rang

Le taux de renouvellement du contrat de trois ans correspond globalement à l'objectif fixé par l'armée de terre : 70 %. Certains de ces contrats sont toutefois renouvelés dans le but principal de bénéficier des dispositifs de la reconversion qui ne sont pas ouverts aux militaires du rang ayant signé un seul contrat.

Le taux de renouvellement des contrats de cinq ans est, quant à lui, inférieur aux objectifs. Ce constat doit toutefois être nuancé dans la mesure où les contrats arrivant à échéance correspondent aux recrutements importants réalisés à la fin des années 90 pour remplir les objectifs de la professionnalisation. La sélection des dossiers était alors moins sévère.

Pour atteindre son objectif d'une durée de service de huit ans en moyenne par militaire du rang, l'armée de terre développe une politique de fidélisation orientée autour des mesures suivantes :

- les conditions de vie et de travail sont en cours d'amélioration ; un nouveau style de commandement, destiné à favoriser les relations humaines, est mis en place ;

- l'attractivité de la formation de reconversion proposée après huit ans de service est renforcée ;

- l'avancement de carrière des caporaux-chefs, après onze ans de service (attribution de l'échelle IV) est favorisé ;

- le recrutement de sous-officiers issus du rang, après treize à dix-sept ans de service, est également favorisé ;

- l'indemnité de départ du personnel non-officier, destinée à compenser la précarité du métier, n'est servie qu'aux militaires ayant servi pendant une durée comprise entre neuf et onze ans ;

- enfin, la formation à la reconversion n'est plus proposée pendant la cinquième année de service, mais à l'issue de cinq ans de service, ce qui implique la signature d'au moins deux contrats pour pouvoir en bénéficier.

Taux de renouvellement des contrats

Année de signature

Durée des contrats

Nombre de

contrats signés

Année de renouvellement

Nombre de contrats renouvelés

Taux de renouvellement

1996

5 ans

1 073

2001

769

72 %

1997

3 ans

2 211

2000

1 645

74 %

5 ans

3 659

2002

1 717

47 %

1998

3 ans

1 260

2001

905

72 %

5 ans

5 016

2003

1 714

57,5 %

1999

3 ans

3 470

2002

2 093

60 %

5 ans

6 077

2004

2 238

64 %

2000

3 ans

2 298

2003

1 274

70 %

5 ans

6 112

2005

En cours

2001

3 ans

2 316

2004

1 201

69 %

Source : ministère de la défense

Malgré ces dispositions, la durée moyenne de service des militaires du rang reste largement inférieure aux objectifs que se sont fixés les forces terrestres. Après une impressionnante diminution de 6 ans 7 mois en 1998 à 4 ans 11 mois en 2002, une légère augmentation a été enregistrée en 2003 puis 2004.

Durée moyenne sous les drapeaux

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

6 ans 7 mois

6 ans 4 mois

5 ans 10 mois

5 ans 5 mois

4 ans 11 mois

5 ans 8 mois

5 ans 11 mois

Source : ministère de la défense

C. LES RÉSERVES

La réserve militaire, qui a notamment pour mission de renforcer les capacités opérationnelles des armées, a été structurée par la loi n° 99-894 du 22 octobre 1999 portant organisation de la réserve militaire et du service de défense. En vertu de ce texte, les réservistes opérationnels souscrivent un engagement à servir dans la réserve (ESR) qui les lie à l'armée d'active. L'objectif pour l'armée de terre à l'horizon 2015 a été fixé à 29 000 réservistes ainsi répartis : 6 500 officiers, 10 000 sous-officiers et 12 500 militaires du rang.

Le nombre des réservistes des forces terrestres connaît une progression continue depuis plusieurs années même si le chiffre global de 16 800 ESR signé fin 2005 cache quelques disparités entre les différentes catégories.

Si le pourcentage de réalisation des effectifs de réservistes pour la catégorie des officiers et celle des sous-officiers s'avère satisfaisant (respectivement 82 % et 58 %), en revanche, il semble plus difficile d'attirer des militaires du rang dans la réserve opérationnelle. L'évolution des statistiques porte néanmoins à l'optimisme : entre 2002 et 2005, leur nombre a été multiplié par 2,5.

État des réserves de l'armée de terre et objectifs

2002

2003

2004

2005 (1)

Objectif 2015

réalisé

Officiers

4 710

5 115

5 368

5 330

6 500

82 %

Sous-officiers

4 450

5 186

5 735

5 800

10 000

58 %

Militaires du rang

2 188

3 003

4 336

5 670

12 500

45 %

Total

11 348

13 304

15 439

16 800

29 000

58 %

(1) Prévisions en date du 1er juillet 2005

Source : ministère de la défense

Pour atteindre l'objectif de 29 000 réservistes à l'horizon 2015, l'armée de terre s'est fixé des étapes annuelles : elle espère recruter 1 750 réservistes supplémentaires chaque année pour atteindre 22 050 réservistes opérationnels en 2008.

Pour attirer et fidéliser dans la réserve les militaires du rang, les forces terrestres envisagent de faciliter la promotion interne et notamment l'accession au corps des sous-officiers. Cette action sera probablement complétée par une évolution de la législation destinée à rendre l'emploi de salariés réservistes plus attrayant pour les employeurs.

La durée moyenne d'activité dans la réserve opérationnelle au sein de l'armée de terre semble se stabiliser aux alentours de 18 jours en 2004 comme en 2005, en baisse sensible par rapport à 2002 (23 jours) et 2003 (21 jours).

D. LES CIVILS

Au 30 juin 2005, l'armée de terre employait 28 077 civils dans les organismes relevant des services déconcentrés, soit une légère baisse, de 139 agents (-0,5 %) par rapport à l'exercice précédent. Ce chiffre inclut le personnel étranger employé par les forces françaises stationnées en Allemagne, mais pas le personnel à recrutement local employé en Afrique. 52 % des civils employés par l'armée de terre, soit 14 624, ont le statut de fonctionnaire ; 43,6 %, soit 12 228, ont le statut d'ouvrier de l'État ; 4,4 %, soit 1 225 personnes, sont des contractuels.

Le projet de loi de finances pour 2006 conduit à une réduction de 379 emplois budgétaires par rapport à 2005. Si une part de cette réduction correspond à des suppressions nettes (notamment par le non-remplacement de la totalité des départs en retraite ou au titre de l'externalisation ou de l'évolution des périmètres), une grande partie de ces suppressions s'explique par des transferts de compétences à d'autres services, extérieurs à l'armée de terre. C'est ainsi le cas de 65 emplois budgétaires transférés au profit de l'établissement public de l'économat des armées et de 100 postes budgétaires transférés au profit du service historique de la défense.

Au 30 juin 2005, le déficit en personnel civil, rapporté aux effectifs budgétaires, s'élevait à 1 677 emplois, dont 698 parmi les personnels fonctionnaires et 1 066 parmi les ouvriers d'Etat. La catégorie des contractuels enregistrait, pour sa part, un sureffectif de 87 agents. Le déficit des personnels titulaire est en légère augmentation puisqu'il s'élevait à environ 1 223 personnes un an plus tôt. Ce déficit varie selon les catégories : il représente 24,4 % des effectifs de la catégorie A, 1,9 % de ceux de la catégorie B, 0,5 % de ceux de la catégorie C et 8,1 % des effectifs du personnel ouvrier d'Etat.

Cet écart résulte essentiellement de la politique de maîtrise de la masse salariale qui a conduit à l'instauration d'un plafond d'emplois par ministère pour l'année 2005.

Le plan de recrutement prévisionnel devrait améliorer légèrement la situation des effectifs du personnel fonctionnaire. En effet, l'organisation de concours en 2005 devrait permettre l'embauche de 80 ingénieurs d'études et de fabrication, de 20 secrétaires administratifs, de 33 techniciens supérieurs des études et fabrication, de 75 techniciens du ministère de la défense, de 250 adjoints administratifs, de 100 ouvriers professionnels, soit un total de 578 agents auxquels il convient d'ajouter 23 anciens militaires recrutés au titre de la loi 70-2 du 2 janvier 1970 tendant à faciliter l'accès des officiers à des emplois civils.

III. - UNE PRÉPARATION CONDITIONNÉE PAR LE MATÉRIEL

L'armée de terre, qui représente l'essentiel de l'engagement humain de la France à l'étranger, ne reçoit que 20 % des crédits globaux du titre V de la défense, en raison du moindre coût de ses équipements, comparés à ceux de l'aviation (Rafale, ravitailleurs...) et de la marine (porte-avions, sous-marins nucléaires). Les crédits qui lui sont alloués lui permettront néanmoins de poursuivre, en 2006, les programmes prévus par la loi de programmation militaire.

A. LES PRINCIPAUX ÉQUIPEMENTS LIVRÉS EN 2006

1. Les livraisons des chars Leclerc sont rééchelonnées

Les programmes de char lourd Leclerc et de véhicule de combat d'infanterie (VBCI) confiés à la société Giat Industries ont subi des retards significatifs depuis 2003. Les dernières livraisons de chars Leclerc ont été retardées, d'une part à la suite de conflits sociaux, d'autre part parce que la fiabilité des chars n'était pas suffisante. La onzième et ultime tranche du Leclerc bénéficie d'avancées technologiques considérables qui en font un char très différent et, en principe, plus performant que ceux des tranches précédentes. En contrepartie, sa mise au point s'est avérée plus longue que prévu.

En 2003, l'armée de terre a reçu seulement vingt-trois chars sur les cinquante prévus. En 2004, sur un nouveau lot de cinquante chars programmés, seuls douze ont effectivement été livrés. Le programme Leclerc, qui devait s'achever fin 2005, a pris deux ans de retard supplémentaire. A ce jour, les forces terrestres disposent de 320 Leclerc sur les 406 commandés : 30 engins sont attendus en 2005 (16 ont été livrés au cours du premier semestre), 30 autres en 2006 et les 26 derniers en 2007.

Pour le VBCI, les retards accumulés dans la fourniture des premiers démonstrateurs ont amené le ministère de la défense à négocier avec Giat Industries un avenant au contrat permettant de fixer un nouveau calendrier de réalisation et de spécifier certaines améliorations à apporter au véhicule. Les premières livraisons ont été décalées de deux ans et devraient avoir lieu en 2008 au lieu de 2006. Depuis lors l'avancement du programme VBCI est conforme au nouvel échéancier. Deux prototypes sont en cours d'expérimentation tandis que deux autres devraient être livrés à l'automne 2005 et en 2006.

Longtemps retardé par d'importants problèmes techniques, le dépanneur Leclerc, commandé à vingt exemplaires et destiné à porter assistance aux chars sur le champ de bataille, est désormais opérationnel. Les livraisons ont débuté en septembre 2004 et atteignent, au 1er juillet 2005, un total de huit engins. Quatre dépanneurs doivent encore être livrés d'ici la fin de l'année 2005, le reliquat devant arriver d'ici la fin de l'année 2006 ou le début de l'année 2007.

Pour pallier le retard pris par le programme VBCI, le blindé léger à chenilles AMX 10 P fait aujourd'hui l'objet de travaux de fiabilisation visant à prolonger son maintien en service jusqu'à son remplacement total par le VBCI, vers 2015. 108 d'entre eux doivent faire l'objet d'une remise à niveau et seront livrés aux forces terrestres pour moitié en 2006 et pour moitié en 2007.

En service depuis le début des années 1980, le blindé léger AMX 10 RC, monté sur roues et équipé d'un canon de 105 mm, fait l'objet d'un programme de modernisation à mi-vie, mené conjointement par la direction centrale du matériel de l'armée de terre (DCMAT) et Giat Industries. Les trois premiers exemplaires rénovés ont été livrés par l'industriel fin 2004. Les livraisons continuent actuellement au rythme de 21 pour l'année 2005, le programme se poursuivant jusqu'en 2010. A cette date, 256 AMX 10 RC sur un parc de 337 auront été rénovés.

2. Les hélicoptères

Le programme d'hélicoptère de combat Tigre, confié à Eurocopter, a également connu un rééchelonnement de ses livraisons. Les premiers appareils, d'abord attendus en 2003, puis en 2004, ont été réceptionnés en 2005. Ce sont au total cinq engins que les forces terrestres devraient recevoir cette année. L'hélicoptère sera ensuite livré au rythme de sept appareils par an entre 2006 et 2008. L'échéancier n'est pas établi avec précision au-delà de cette date. Il restera alors 92 engins à livrer sur les 120 commandés.

L'achat par l'Espagne de vingt-quatre de ces appareils en version HAD (hélicoptère d'appui destruction) a conduit l'armée de terre française, en accord avec l'industriel, à modifier sa commande. Après une première tranche de trente-sept appareils équipés en version HAP (hélicoptère d'appui protection), l'armée de terre recevra à son tour la version HAD, plus polyvalente et mieux adaptée aux nouvelles missions que l'ancienne version HAC (hélicoptère antichar), commandée dans un premier temps et désormais abandonnée.

3. Les autres principaux matériels

L'armée de terre continuera à recevoir les obus antichars à effet dirigé « Bonus », munition franco suédoise capable de détecter de manière autonome un objectif et de l'atteindre sans intervention extérieure.

La loi de programmation militaire prévoit de financer 4 313 obus dans sa version de base dite NET (New electronic technology) ou 3 750 obus dont 1 500 dans la version NET et 2 250 dans une version plus élaborée et plus onéreuse dite DOSMI (Détecteur optronique pour sous-munitions intelligentes). Les 1 500 obus de la version NET ayant tous été livrés, les 1 089 engins dont la livraison est prévue en 2006 devraient appartenir à la catégorie DOSMI, si les essais menés actuellement s'avèrent concluants. Dans l'hypothèse où cette dernière version ne serait pas qualifiée, 563 obus supplémentaires seraient commandés dans la version NET de manière à atteindre les objectifs définis par la loi de programmation militaire.

Réalisation du plan d'équipement en 2006

Fonction

Matériels

Objectif

LPM

2003-2008

Commandes budget 2006

Système d'information et de commandement (SIC)

Rénovation réseau RITA

213

26

Postes radio (PRG4)

7 051

1 250

Information régimentaire (SIR)

752

94

Feux sol-sol

Atlas Canon

9

1

Radar de contrebatterie Cobra

10

5

Obus à effet dirigé « bonus »

4 313

1 089

Canons AUF1 rénovés

174

28

Systèmes blindés

Char Leclerc

406

30

AMX 10 RC rénové

-

32

AMX 10 P rénové

-

54

Hélicoptères

Dépanneurs Leclerc

20

5

VAB rénovés

1 627

306

Tenues de combat « Félin »

24 012

358

Véhicule VBL

290

66

Tigre

80

7

Divers

Systèmes de drones DRAC

-

25

Source : ministère de la défense

L'année 2005 devait voir l'achèvement de la modernisation du système d'artillerie Atlas Canon. Ce système, qui coordonne l'information et la communication des régiments d'artillerie, notamment en matière d'acquisition d'objectifs et de tir, a été commandé à neuf exemplaires. Mais les forces terrestres n'ont pris livraison cette année que du huitième système de tir. Le neuvième et dernier sera livré en 2006.

Après quinze ans d'utilisation, le canon AUF1 bénéficie d'une modernisation destinée à prolonger sa durée d'utilisation et à accroître ses performances. A la suite de la décision prise de doter les forces terrestres du canon automoteur Caesar, le nombre de pièces d'artillerie devant être rénovées a été réduit de 104 à 94, puis à 74. Treize canons ont été réceptionnés en 2004 et 33 en 2005 tandis que les 28 derniers seront livrés en 2006.

Le radar de contrebatterie Cobra, destiné à localiser rapidement et avec précision les lanceurs adverses afin de les détruire, devait être livré en dix exemplaires dès 2001, mais ce programme a connu un important retard, lié à des difficultés techniques, et le premier radar n'a été reçu qu'en 2004. Quatre autres contrebatteries devaient être livrées en 2005 tandis que les cinq dernières sont attendues en 2006.

Enfin, le programme de tenue de combat Félin (fantassin à équipement et liaisons intégrés), qui doit permettre aux combattants de s'adapter au mieux à la diversité des situations opérationnelles, s'est concrétisé en 2005 avec la commande des 1 089 premières tenues sur un total de 31 445. Les 358 premières livraisons sont attendues en 2006, l'armée de terre ayant prévu de s'équiper d'ici 2013.

B. L'ÉVOLUTION DE LA DISPONIBILITÉ TECHNIQUE OPÉRATIONNELLE

1. Une situation stabilisée

La disponibilité technique des matériels de l'armée de terre semble s'être stabilisée en 2005. La situation de certains engins du génie ou des hélicoptères de l'ALAT reste néanmoins préoccupante.

Des difficultés subsistent sur les engins blindés AMX 10 P et AMX 10 RC en raison de l'obsolescence de ces matériels, de la difficulté de trouver des pièces de rechange et des retards pris dans les programmes de modernisation. L'amélioration de la situation repose désormais essentiellement sur les capacités de l'industriel, en l'occurrence Giat Industries, à répondre au besoin de l'armée de terre de prolonger la durée de vie de ces blindés jusqu'à leur remplacement.

Evolution de la disponibilité technique des matériels majeurs

2002

2003

2004

2005 (1)

Blindés légers (VAB, 10 RC, 10 P, SAGAIE)

65 %

62 %

61 %

63 %

Blindés lourds (Leclerc, AMX 30 B2)

54 %

58 %

61 %

61 %

Artillerie (AUF1, TRF1, Roland, LRM)

63 %

57 %

57 %

59 %

Génie (tous matériels gamme génie)

62 %

70 %

52 %

58 %

Hélicoptères

58 %

57 %

57 %

60 %

Crédits de paiement destinés à l'entretien programmé du matériel (en millions d'euros)

383,5

424,7

(+ 10,8 %)

472,8

(+11,3 %)

472,0

(-0,2 %)

(1) Prévisions calculées sur la base des deux premiers trimestres

Source : ministère de la défense

La disponibilité des matériels affectés aux opérations extérieures reste excellente, avec une moyenne de 92 %, supérieure au seuil plancher de 90 %. Mais la priorité accordée à ces matériels accroît d'autant les difficultés que connaissent les engins restés en métropole, entretenus après les autres.

Sur le plan financier, les dotations budgétaires de l'exercice 2004 ont été insuffisantes à la fois pour combler le report de charges hérité de 2003 (135 millions d'euros) et pour subvenir au paiement des factures de l'année (568 millions d'euros). Le report de charge enregistré fin 2004 s'est donc aggravé, atteignant désormais 159 millions d'euros. Un plan de retour à l'équilibre lancé en 2005 a pour objectif de limiter les engagements, de manière à réduire les besoins en crédits de paiement prévus pour les années 2006 à 2008.

Les crédits de paiement destinés à l'entretien programmé du matériel, inscrits dans le projet de loi de finances pour 2006, s'élèvent à 562,9 millions d'euros, en hausse de 19,3 % par rapport à ceux de 2005, qui étaient restés stables depuis 2004.

2. Les perspectives d'évolution

De lourdes contraintes pèsent sur les matériels de l'armée de terre :

- le retard de plusieurs programmes d'équipement des forces (VBCI, Tigre...) ne permet pas de remplacer les matériels anciens dans les délais prévus ;

- les stocks de pièces de rechange sont difficiles à reconstituer, compte tenu du niveau élevé de consommation et des contraintes financières rappelées plus haut ;

- le maintien d'un taux d'activité élevé, notamment en opérations extérieures, entraîne une usure accélérée des matériels ;

Dans ces conditions, l'état-major de l'armée de terre n'exclut pas, en 2006, des chutes temporaires de disponibilité sur certains matériels, même si les résultats attendus fin 2005 semblent plutôt s'inscrire dans le prolongement des exercices précédents.

3. Seul un char Leclerc sur deux est en état de servir

La disponibilité technique opérationnelle du char Leclerc se situe à 51 % en moyenne à la fin du premier semestre 2005 pour l'ensemble du parc après avoir atteint 61 % au mois de mars de cette année. Après une situation catastrophique en 2001, époque où moins d'un char sur trois était en état de fonctionner, la disponibilité avait atteint 55 % en 2004.

Disponibilité du char Leclerc

2001

2002

2003

2004

2005 (1)

30 %

40 %

52 %

55 %

51 %

(1) Résultats du premier semestre

Source : ministère de la défense

Cette évolution favorable entre 2001 et 2004 s'est expliquée principalement par la passation régulière de marchés de réparation, mais aussi par une fiabilisation globale du système d'armes et par l'amélioration de la connaissance qu'en ont les équipages. Mais depuis mars 2005, le char est de nouveau victime de défaillances techniques de plusieurs ordres :

- les chenilles en aluminium qui équipent le char s'usent plus rapidement que celles en acier, habituellement en service sur ce genre d'engin. Or, pour des raisons de restructuration industrielle, Giat Industries a interrompu la livraison de chenilles de rechange en février 2005 et celle-ci ne reprendra, au mieux, qu'en 2006. Cette rupture d'approvisionnement produira immanquablement des conséquences négatives sur la disponibilité des Leclerc au cours du second semestre 2005 et au début de l'année 2006. Une amélioration durable est escomptée avec l'arrivée, fin 2006, de chenilles en acier ;

- le système du viseur du chef de char manque toujours de fiabilité, ce qui a conduit à bloquer, pendant six mois, toute une série de Leclerc prêts à être livrés. La Sagem, sous-traitant de Giat, a commencé à livrer une nouvelle caméra thermique que l'armée de terre espère plus fiable ;

- les éléments de suspension et les récupérateurs d'artillerie, qui intègrent des composants à pression de gaz, doivent faire l'objet d'un entretien spécifique. Or, l'industriel ne parvient pas à fournir, à ce jour, suffisamment de pièces ni à augmenter le rythme des réparations ;

- les épiscopes présentent des défauts d'étanchéité. Giat industries, qui n'est plus en mesure de produire cet appareil pourtant essentiel à un char de combat, a lancé un programme de sous-traitance en République tchèque et en Chine, avec des résultats pour l'instant mitigés.

Compte tenu de ces difficultés, l'armée de terre ne prévoit pas, à court terme, d'amélioration de la disponibilité du char Leclerc.

IV. - L'ACTIVITÉ DES FORCES TERRESTRES

Les forces terrestres continuent à attacher une importance capitale à l'entraînement des unités, gage d'efficacité et de sécurité lors d'opérations. L'aguerrissement des troupes, variable selon les armes, dépend toutefois largement de la disponibilité très fluctuante des matériels. Le poids des projections externes et des missions de service public réalisées en France reste relativement lourd, même si les ajustements entre les différents théâtres d'opération permettent de stabiliser le volume des effectifs servant hors métropole.

A. L'ENTRAÎNEMENT TRIBUTAIRE DE LA DISPONIBILITÉ DU MATÉRIEL

Les exercices et l'entraînement sont indispensables à une armée professionnelle appelée à servir de manière répétée hors de ses frontières, dans un environnement étranger pouvant rapidement devenir hostile. Si les forces terrestres connaissent en 2005 une réelle amélioration de leur entraînement, il n'en va pas de même pour l'aviation légère de l'armée de terre (ALAT), plus que jamais confrontée au vieillissement de son parc d'hélicoptères.

1. Une augmentation du nombre de jours d'exercice

Après un début de décennie difficile, au cours duquel l'activité des forces terrestres était tombée à un plancher de 68 jours par an, l'entraînement s'est amélioré, atteignant 95 jours en 2003. Après un nouveau repli enregistré en 2004, à la suite de l'augmentation des opérations extérieures (Côte d'Ivoire, Ituri, Haïti), le nombre de jours d'entraînement est reparti à la hausse et devrait atteindre en 2005 le chiffre de 96 jours d'activité, proche de l'objectif de 100 jours fixé par la loi de programmation militaire pour les années 2003-2008.

Nombre de journées d'entraînement de l'armée de terre depuis 2000

Années

Nombre de journées d'exercice avec matériels

Nombre de journées d'exercice sans matériels

Nombre total de journées d'exercice

Nombre d'heures de vol par pilote

2000

34

34

68

145

2001

35

40

75

150

2002

36

50

86

145

2003

45

50

95

160

2004

42

48

90

147

2005 (1)

48

48

96

160

2006 (2)

48

48

96

160

objectif 2008

50

50

100

180

(1) estimation (2) projet de loi de finances pour 2006.

Source : ministère de la défense

L'absence d'actualisation des coûts de fonctionnement ainsi que la nécessité de réaliser 3,5 % d'économies budgétaires par rapport à l'année 2005 ont conduit le chef d'état-major de l'armée de terre à aligner les prévisions d'entraînement des forces en 2006 sur l'activité enregistrée en 2005. Les forces terrestres devraient donc s'exercer 96 jours en 2006, ce qui n'est pas un résultat si éloigné de l'objectif final et dénote une réelle amélioration par rapport aux chiffres enregistrés au début de la décennie.

A ce jour, et contrairement à l'année 2004, l'armée de terre n'a dû annuler aucun exercice national et a pu prendre part à tous les exercices internationaux auxquels elle s'était engagée à participer.

En revanche, l'absence d'actualisation du coût des carburants représente une charge importante qui pèse directement sur la qualité de l'entraînement des forces. Le faible niveau de disponibilité technique de certains matériels contribue également à limiter les activités de préparation opérationnelle.

2. La situation de L'ALAT reste critique

Conformément à la loi de programmation militaire pour les années 2003-2008, l'objectif de l'aviation légère de l'armée de terre est de permettre à ses pilotes de voler 180 heures par an, ce qui correspond à un critère interallié garantissant une préparation opérationnelle de qualité tout en améliorant la sécurité des vols. Avec 160 heures de vol prévues par pilote, l'année 2004 devait constituer une étape dans la recherche de cet objectif.

Compte tenu des contraintes de disponibilité s'exerçant sur le parc des aéronefs, le nombre d'heures de vol par pilote n'a pas dépassé 147 heures. Dans ces conditions, la priorité est donnée aux opérations, à la formation des équipages, au maintien des qualifications du personnel navigant et aux grands exercices. Même si des disparités demeurent entre les différents types d'engins en service, l'entraînement des équipages s'est donc globalement situé en deçà du seuil de sécurité fixé à 150 heures de vol par an.

En 2005, l'objectif reste fixé à 160 heures de vol par équipage. Mais, comme en 2004, cette cible a peu de chance d'être atteinte compte tenu d'une diminution de l'activité aérienne des hélicoptères d'environ 23 % liée à la faible disponibilité des matériels. Pour 2006, le projet de loi de finances fixe à nouveau à 160 le nombre d'heures de vols qui devra être réalisé par chaque membre d'équipage. Comme les années précédentes, et avec, en outre, un cours du pétrole durablement élevé, il semble peu probable que cet objectif sera atteint.

Cette situation a des conséquences directes et importantes sur la préparation opérationnelle des forces. Mais au-delà des conséquences négatives qu'il engendre sur les capacités opérationnelles de l'armée de terre et la motivation des équipages, ce sous-entraînement risque de constituer bientôt une menace pour la sécurité du personnel. Compte tenu de l'âge et de l'état du parc d'hélicoptères, une amélioration significative de l'entraînement des équipages ne pourra désormais être constatée qu'avec l'arrivée de nouveaux matériels, aptes à un plus grand nombre d'heures de vol. La livraison des premiers exemplaires du Tigre pourrait apporter un début de concrétisation à cet espoir.

3. Les crédits consacrés aux munitions d'instruction restent stables

La disparition des appelés et la réduction du format de l'armée de terre avaient conduit à une diminution régulière, à la fin des années 90, des crédits affectés à l'acquisition de munitions d'instruction. Le niveau minimum avait été atteint en 2001, avec 51,6 millions d'euros d'autorisations de programme consenties, soit moitié moins qu'en 1998. Depuis lors, le montant des crédits consacrés aux munitions d'instruction s'était stabilisé aux alentours de 64 millions avant de connaître, en 2004 et 2005, une augmentation sensible.

Montant des crédits ouverts au titre des munitions d'instruction

(en millions d'euros)

Années

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Autorisations de programme

51,60

64,79

64,10

114,12

92,60

91,95

Crédits de paiement

64,18

93,44

72,00

66,70

61,40

73,95

Source : ministère de la défense

Les crédits relatifs aux munitions d'instruction connaîtront en 2006, une grande stabilité par rapport à l'année 2005, puisqu'ils se situeront aux alentours de 92 millions d'euros d'autorisations d'engagement, ce qui reste à un niveau cohérent avec les exigences d'une armée professionnelle. Si l'évolution de ces crédits peut parfois sembler chaotique aux observateurs, c'est aussi parce qu'il arrive aux forces terrestres de puiser dans leurs stocks de guerre. Constitués durant la guerre froide pour faire face à un affrontement de grande ampleur sur le sol européen, ces stocks se sont avérés surdimensionnés depuis que cette menace a été réduite. L'armée de terre utilise donc de manière régulière une partie de ces provisions à des fins d'entraînement. L'arrivée de nouvelles munitions, plus modernes et plus performantes, peut aussi conduire les forces terrestres à consommer les stocks les plus anciens.

B. TOUJOURS AUTANT DE MISSIONS EXTÉRIEURES ET INTÉRIEURES

Le volume des forces terrestres stationnées hors territoire métropolitain s'avère globalement stable, fluctuant entre 18 000 et 20 000 militaires selon les années. La diminution des effectifs stationnés sur les théâtres extérieurs où la situation s'est apaisée, comme les Balkans, permet depuis trois ans un redéploiement des forces sur des territoires plus sensibles, comme la Côte d'Ivoire. L'armée de terre assume aussi, lorsqu'il le faut, des missions de service public essentielles à l'intérieur de nos frontières.

Effectifs de l'armée de terre stationnés hors métropole

(Chiffres arrêtés au 1er juillet 2005)

Localisation

Opération/
Commandement

Effectif

1 Opérations extérieures

OTAN

Kosovo

Trident

2 138

Bosnie-Herzégovine

Salamandre

462

Divers Europe

25

Afghanistan

Pamir, Epidote

632

Floride, Emirats arabes unis, Pakistan, Ouzbékistan, Qatar...

Héraclès

35

ONU

Sahara occidental

MINURSO

20

Ethiopie

MINUEE

1

Rép. dém. du Congo

MONUC

5

Egypte, Israël, Liban

ONUST

2

Sinaï

FMO

2

Sud Liban

FINUL

207

Côte d'Ivoire

ONUCI

182

Géorgie

MONUG

1

Accords de défense

Tchad

Epervier

657

Cameroun

Aramis

44

Gabon

Furet

37

Gabon

Griffon

7

Côte d'Ivoire

Licorne

3 561

Centrafrique

Boali

196

Sous-total 1

8 219

2 Forces de souveraineté

Antilles (Guadeloupe et Martinique)

FAA

983

Guyane

FAG

1 451

Pacifique (Nouvelle-Calédonie et Polynésie)

FANC

FAP

1 831

Océan indien

FAZSOI

1 013

TAAF (Kerguelen)

13

Sous-total 2

5 291

3 Forces de présence

Cameroun

MISLOG

8

Gabon

Detsout MONUC

53

Côte d'Ivoire

FFCI

541

Djibouti

FFDJ

1 684

Gabon

TFG

657

Sénégal

FFCV

535

Sous-total 3

3 478

4 Forces stationnées en Allemagne

Allemagne

EFSA

2 196

Total des forces hors de métropole

19 184

Source : ministère de la défense

1. Le redéploiement des forces présentes hors métropole

Le nombre de militaires de l'armée de terre stationnés hors du territoire métropolitain a connu une légère augmentation au cours de l'année 2005. Les théâtres balkaniques ont enregistré une nouvelle réduction significative des effectifs : après la réduction de 1 000 militaires en 2003, puis de 600 en 2004, ce sont près de 400 nouveaux soldats qui ont quitté les Balkans en 2005. La diminution des effectifs de l'armée de terre au Kosovo a atteint l'objectif de 2 400 qui avait été fixé. Il semble désormais hasardeux de réduire de manière significative la quantité de troupes stationnées dans cette région tant que la tension, clairement palpable et liée aux incertitudes quant au devenir juridique de l'entité, ne sera pas retombée. En Bosnie-Herzégovine, où la situation est désormais apaisée, la présence militaire française a été réduite de plus des trois quarts en trois ans, passant d'un peu plus de 2 000 hommes en 2002 à 462 en 2005. Si l'on ajoute à ces deux théâtres celui de la Macédoine, désormais évacué, la présence militaire de l'armée de terre dans les Balkans est passée en deux ans d'environ 6 200 hommes à 2 600.

En Côte d'Ivoire, la présence française a été renforcée, en hommes comme en matériels, à la suite des tragiques événements survenus en novembre de l'année dernière. C'est ainsi que 3 561 soldats des forces terrestres sont désormais présents sur ce territoire au titre de l'opération Licorne, contre 3 265 en 2004 et 3 154 en 2003. Si l'on ajoute à ce chiffre les 182 militaires présents sur ce théâtre au titre de l'opération des Nations unies en Côte d'Ivoire, ce sont 3 743 soldats des forces terrestres qui stationnent dans ce pays.

Au total, au 1er juillet 2005, 19 184 militaires de l'armée de terre étaient stationnés hors du territoire métropolitain, contre 18 470 un an auparavant et 20 604 en 2003, ce qui représente une quasi-stabilité à un niveau assez élevé. Ce sont près de 15 % des effectifs militaires de l'armée de terre qui se trouvent, en permanence, hors de la métropole.

Un redéploiement plus vaste des forces françaises stationnées sur le continent africain, essentiellement terrestres, est à l'étude. Le nombre d'implantations militaires serait réduit à trois : 2 900 soldats, des trois armées, seraient stationnés à Djibouti, 1 200 au Sénégal et 800 au Gabon. A terme, lorsque la crise ivoirienne sera résolue, il est envisagé que l'armée de terre quitte entièrement la Côte d'Ivoire. Cette réforme a peu de chances d'être mise en place rapidement, compte tenu de la situation explosive qui règne dans ce pays et qui rend pour l'instant très difficile le départ des forces de l'opération Licorne. Malgré l'importance des forces stationnées sur place, le format retenu pour l'armée de terre permet de relever tous les quatre mois en moyenne les unités envoyées en opérations extérieures. Cette rotation, qui évite les baisses de moral au sein de la troupe, constitue une performance enviée par les armées professionnelles des pays comparables à la France, dont les militaires restent parfois plus d'un an sans rentrer dans leur pays.

Principaux matériels engagés en opérations extérieures

(Chiffres arrêtés au 1er juillet 2005)

Bosnie-Herzégovine

Kosovo

Afghanistan

Tchad

Côte d'Ivoire

Total

Véhicules légers

VLTT, P4

78

329

43

69

241

760

Blindés légers VBL

40

32

94

166

Blindés légers ERC 90

12

28

40

Blindés légers AMX 10 RC

12

12

Blindés légers VAB

94

18

13

187

312

Camionnettes

9

106

46

88

119

368

Camions

8

142

2

32

221

405

Hélicoptères lourds

3

3

7

13

Hélicoptères légers

2

9

11

Engins du

génie

8

2

10

20

Armes antichars (Eryx, Milan)

28

15

19

73

135

Canons de

20 mm

7

31

35

Mortiers de

120 mm

8

4

12

Mortiers de

81 mm

2

2

2

14

20

Groupes électrogènes

20

132

14

57

223

Source : ministère de la défense

La forte présence de l'armée de terre à l'extérieur du territoire métropolitain confirme certains enseignements. S'il apparaît, comme les années précédentes, que la principale difficulté concerne le manque de moyens aériens destinés à acheminer les hommes et le matériel, l'opération Licorne a également démontré l'importance croissante des munitions non létales, adaptées aux missions de contrôle des foules. Les images des hélicoptères militaires tentant de maintenir à distance la foule qui risquait de menacer l'évacuation de nos ressortissants furent particulièrement éloquentes.

Coût des opérations extérieures

(Pour 2005, prévisions arrêtées au 1er juillet. En millions d'euros)

2002

2003

2004

2005

Titre III

316,99

391,26

392,11

359,20

Titre V

27,14

36,74

31,96

20,30

Total

344,13

(+ 2,2 %)

428,00

(+ 24,4 %)

424,07

(- 0,9 %)

379,50

(- 10,5 %)

Source : ministère de la défense

Les surcoûts des opérations extérieures étant très largement sous-estimés en loi de finances initiale (une centaine de millions d'euros prévus pour 2005, 250 millions d'euros en 2006), l'armée de terre doit avancer la plus grande partie des sommes nécessaires, généralement prélevées sur les crédits affectés aux activités courantes. Pour ne pas nuire à l'activité des forces, des crédits complémentaires sont ouverts par décret en cours d'exercice. Enfin, les lois de finances rectificatives permettent aux forces terrestres d'obtenir le remboursement des opérations. Toutefois, si les frais de fonctionnement sont globalement remboursés de manière correcte, il n'en est pas de même des dépenses liées à l'obsolescence du matériel (titre V), qui ne font l'objet d'aucune compensation financière.

En 2002, 240,78 millions d'euros ont été attribués au titre des rémunérations et charges sociales (RCS) en loi de finances rectificative. S'agissant des dépenses de fonctionnement hors RCS, 20,40 millions d'euros ont été versés par ailleurs aux forces terrestres. Le remboursement des dépenses liées aux opérations extérieures s'est donc élevé à 261,18 millions d'euros.

En 2003, 272,70 millions d'euros ont été attribués au titre des rémunérations et charges sociales et 41 millions d'euros au titre du reste du budget de fonctionnement, soit un total de 313,70 millions d'euros.

En 2004, un décret d'avance publié en septembre a couvert l'intégralité des frais de fonctionnement liés aux opérations extérieures. Pour 2005, la légère réduction attendue des surcoûts devrait faciliter le remboursement des opérations extérieures.

2. Le rythme des missions intérieures ne diminue pas

a) Le plan Vigipirate

Durant l'année 2004, l'armée de terre a engagé dans le plan Vigipirate un effectif moyen de 1 190 hommes ainsi répartis : 560 militaires étaient déployés en permanence sur le terrain et 630 en alerte dans leur garnison. L'engagement a atteint son maximum durant la semaine du 6 juin avec 2 320 militaires mobilisés, puis a décru progressivement pour atteindre un effectif de 740 soldats (170 déployés et 570 en alerte) entre septembre 2004 et juin 2005.

Au cours des douze derniers mois dont les statistiques sont connues (de juillet 2004 à juin 2005), le plan Vigipirate a mobilisé 324 000 journées d'activité, ce qui représente une diminution sensible par rapport à la période précédente qui avait mobilisé 648 000 journées-militaires. La réapparition brutale du terrorisme en Europe occidentale, à Londres en juillet 2005, qui a incité les autorités à placer le plan Vigipirate au stade rouge devrait conduire à une mobilisation accrue des personnels des forces terrestres au cours du second semestre 2005.

b) Les incendies de forêt

En 2004, le plan Héphaïstos de lutte contre les incendies de forêt a été appliqué du 29 juin au 14 septembre. Durant cette période, un effectif sensiblement constant de 200 militaires de l'armée de terre a renforcé les unités de sécurité civile et les pompiers. Jusqu'à trois hélicoptères légers et trois hélicoptères de manœuvre ont été mobilisés durant cette période.

c) Les principales autres opérations

Indépendamment des effectifs mobilisés par le plan Vigipirate, les cérémonies du soixantième anniversaire de la Libération de la France ont mobilisé un effectif de 3 054 militaires pour une durée moyenne de dix jours entre mai et novembre 2004. Cette opération a nécessité 30 968 journées d'activité.

L'organisation du sommet de l'Otan, en février 2005 à Nice a mobilisé 2 500 journées d'activité. L'armée de terre a par ailleurs été engagée dans de nombreuses opérations ponctuelles destinées à faire face à des situations de crise à l'échelon local : actions sanitaires préventives, réquisitions judiciaires, recherches de personnes disparues, inondations, incendies...

Évaluation du coût des missions intérieures menées par l'armée de terre

Opérations

Année

Moyens engagés

Coûts

Vigipirate

2004

Effectif moyen engagé : 1 190 hommes

7,10 M€   

2005

Effectif moyen engagé : 740 hommes

      5,10 M€ (1)

Héphaïstos

2004

Effectif moyen engagé : 200 hommes

2 à 6 hélicoptères

0,31 M€   

Cérémonies Libération

2004

Effectif moyen engagé : 3 054 hommes

2,10 M€   

Visite du pape à Lourdes

2004

Effectif moyen engagé : 130 hommes

0,002 M€ 

Sommet Otan de Nice

2005

Effectif moyen engagé : 250 hommes

0,08 M€  

(1) Prévision au 1er juillet 2005

Source : ministère de la défense

Les dépenses supplémentaires liées aux opérations intérieures sont financées à partir du budget de fonctionnement de l'armée de terre à l'exception du plan Héphaïstos de lutte contre les incendies qui fait l'objet d'un remboursement par le ministère de l'intérieur.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. -  AUDITION DU GÉNÉRAL BERNARD THORETTE, CHEF D'ÉTAT-MAJOR DE L'ARMÉE DE TERRE

La commission de la défense nationale et des forces armées a entendu le général Bernard Thorette, chef d'état-major de l'armée de terre, sur le projet de loi de finances pour 2006 (n° 2540), au cours de sa réunion du mercredi 12 octobre 2005.

Le général Bernard Thorette, chef d'état-major de l'armée de terre, a observé, en préambule, que les événements géopolitiques survenus il y a une quinzaine d'années avaient réaffirmé l'armée de terre comme un outil majeur au service des ambitions et des valeurs de notre pays. De la même manière qu'ont été identifiés par le gouvernement un certain nombre de pôles d'excellence industriels, l'armée de terre peut prétendre à un statut comparable sur la scène internationale.

En effet, trois ans après l'achèvement du processus de professionnalisation, les forces terrestres ont acquis une stature reconnue par nos alliés :

- la totalité des unités a acquis une vraie expérience opérationnelle. Aujourd'hui, ce sont plus de 22 000 hommes et femmes qui sont en posture opérationnelle, en opération ou en alerte. Depuis 2002, plus de 50 000 de nos soldats ont été engagés en Côte d'Ivoire, 15 000 dans les Balkans et 7 000 en Afghanistan ;

- la plupart des opérations auxquelles participe l'armée de terre sont multinationales et nos forces y ont acquis une vraie crédibilité. La lacune identifiée dans le domaine du commandement vient d'être comblée par la création sous enveloppe de crédits et d'effectifs du quartier général du corps de réaction rapide de la France, à Lille ;

- la grande qualité du système de recrutement, de formation et d'entraînement est reconnue par tous.

Instrument performant au service de notre pays, l'armée de terre devra bientôt faire face à trois défis principaux.

Sur fond d'un important engagement opérationnel permanent, elle devra d'abord adapter son organisation à l'image de l'ensemble du ministère de la défense qui a amorcé un processus de modernisation de grande ampleur. L'adoption par le parlement du nouveau statut général des militaires a été particulièrement bien accueillie dans les forces terrestres. La réforme établissant la prééminence du chef d'état-major des armées renforcera la pertinence des arbitrages entre les capacités de nos armées. Elément moteur de la stratégie ministérielle de réforme, l'armée de terre a contribué cette année à la création du service d'infrastructure de la défense et à celle de la direction interarmées des réseaux d'infrastructure et des systèmes d'information. La loi organique relative aux lois de fiances (LOLF) constitue également une opportunité de réforme. Les crédits des forces terrestres seront désormais essentiellement répartis entre trois programmes : « préparation et emploi des forces » à hauteur de 9,3 milliards d'euros, « équipement des forces » et « soutien de la politique de défense » à hauteur de 2,1 milliards d'euros pour ces deux derniers. La gestion de la masse salariale représente une autre opportunité qui doit permettre à l'armée de terre d'adapter au mieux sa pyramide des grades, ce qu'elle commencera à faire en 2006 en transformant 320 postes de sous-officiers en 500 postes de militaires du rang.

A ce défi institutionnel s'ajoute un défi opérationnel dans un contexte nouveau. Face aux situations de guérilla urbaine, la frappe à distance de sécurité à l'aide d'un armement sophistiqué est dépassée par l'action au contact, qu'il s'agisse du contact de l'ennemi ou de celui de populations démunies. Les opérations actuelles demandent des effectifs importants en personnels bien formés. L'armée de terre représente aujourd'hui 80 % des effectifs engagés en opérations. Nos alliés reconnaissent aux forces françaises une réelle efficacité en matière de savoir-faire auprès des populations et d'aptitude à l'engagement. La technologie n'est pas absente pour autant : elle participe à la maîtrise de l'information, à la protection des soldats et à la mobilité.

Le troisième défi concerne la place de l'armée de terre dans la société. Un jeune français sur 12 sollicite chaque année un engagement dans l'armée de terre. Elle en recrute 15 000 annuellement. Ce sont 10 000 jeunes qui rejoignent le marché de l'emploi chaque année en quittant ses rangs, souvent avec une vraie qualification. Depuis 1997, environ 100 000 Français ont quitté les forces terrestres.

Or, dans l'effort important consenti pour elle, l'armée de terre peine à préserver les ressources nécessaires à la préparation de l'avenir. En effet, le changement de statut de l'armée de terre, passée d'une armée « tenue en réserve » pendant la guerre froide, à une armée d'emploi a induit plusieurs conséquences :

- l'armée de terre « consomme » davantage de potentiel de ses matériels qu'elle n'en produit par l'entretien, la revalorisation ou l'acquisition de matériels neufs. Parallèlement aux 72 000 militaires déployés en opérations extérieures depuis trois ans, ce sont 40 000 véhicules et engins divers qui ont été engagés ;

- le rythme élevé du nombre des opérations est devenu la motivation principale des hommes et des femmes de l'armée de terre. Cela est dû, bien sûr, à leur attachement pour leur métier, qui trouve tout son sens en opérations. Cela est dû aussi - il ne faut pas le nier - aux compensations financières qui y sont attachées et également aux difficultés quotidiennes de l'exercice du métier en métropole, au premier rang desquelles figure la disponibilité des matériels ;

- le taux d'utilisation de nos unités, bien qu'acceptable, limite par simple manque de temps leurs capacités à s'entraîner.

Conscient de la priorité accordée par le gouvernement à la défense, le général Bernard Thorette a souligné les avancées réelles permises par le projet de budget, parmi lesquelles il a noté le plan de l'amélioration de la condition militaire, le fonds de consolidation de la professionnalisation et la budgétisation prévisionnelle du surcoût occasionné par les opérations extérieures. Pourtant, ce surcoût ne tient compte que du fonctionnement et pas de l'usure du « capital » représenté par les matériels de l'armée de terre.

La masse salariale attribuée à l'armée de terre dans le cadre de l'action 2 « préparation et emploi des forces terrestres » du programme 178 s'élève à 7,5 milliards d'euros, ce qui correspond à un effectif moyen réalisé de 124 000 militaires, puisque environ 12 000 emplois sont transférés vers d'autres actions ou programmes de la défense. A périmètre identique, les effectifs restent relativement stables. Le sous-effectif en personnels civils qui atteint désormais 5,9 % des emplois apparaît plus préoccupant.

Les crédits de fonctionnement inscrits à cette même action s'élèvent à 813 millions d'euros et ne sont pas réactualisés depuis 2003. Cette contrainte apparaît d'autant plus lourde que le coût du maintien en condition opérationnelle des équipements vieillissants tend à augmenter et que les équipements modernes ont un coût d'entretien important.

Les commandes et livraisons d'équipement pour l'armée de terre seront concentrées sur trois priorités : les systèmes de commandement, d'information et de renseignement, les combats de contact (VBL, VAB, chars AMX 10 RC, système Félin) et l'aéromobilité (hélicoptère Tigre).

Les autorisations d'engagement de l'armée de terre inscrites dans le programme « équipement des forces » s'élèvent à 1,9 milliard d'euros et ceux inscrits dans le programme « soutien de la politique de défense » à 320 millions d'euros.

La numérisation complète de deux brigades d'ici l'été 2009 traduira une avancée de notre pays dans ce domaine qui confortera l'armée de terre comme pôle d'excellence français. Mais la prochaine loi de programmation militaire représentera un enjeu capital pour les forces terrestres qui, pour rester au niveau qui est le leur actuellement, niveau obtenu au prix d'un effort important, devront renouveler une grande partie de leurs matériels majeurs, aériens et blindés notamment.

Le président Guy Teissier a souhaité connaître l'appréciation du chef d'état-major de l'armée de terre sur le fonctionnement du système de « collégialité arbitrée » qu'a présenté le chef d'état-major des armées lors de son audition devant la commission. Observant par ailleurs le renchérissement durable des cours du pétrole, il a demandé si l'enveloppe prévue en faveur du carburant ne risquait pas de se révéler insuffisante pour permettre à l'armée de terre de maintenir sa capacité opérationnelle.

Le général Bernard Thorette a précisé que, dans le cadre du décret du 21 mai 2005 et de la mise en ouvre de la LOLF au sein des états majors, le chef d'état-major des armées a choisi d'exercer ses nouvelles fonctions d'arbitre en appliquant les principes de subsidiarité, consistant à laisser aux états-majors le soin de remplir les tâches qu'ils sont les mieux à même d'accomplir, et de collégialité arbitrée. Cette organisation se distingue de celle de bon nombre d'autres pays qui ont décidé d'aller plus loin dans le sens de l'interarmisation. Un conseil des systèmes de forces regroupant l'ensemble des chefs d'état-major et présidé par le chef d'état-major des armées a été par ailleurs mis en place, afin de faciliter le dialogue au plus haut niveau des états-majors.

C'est le chef d'état-major des armées qui a la vision globale de la constitution d'un outil opérationnel, ce qui justifie son pouvoir d'arbitrage.

La question du coût des carburants est un sujet un peu moins prégnant pour l'armée de terre que pour la marine ou l'armée de l'air. Les crédits prévus pour 2006 concernent principalement le carburant destiné à l'entraînement, pour un montant d'environ 80 millions d'euros, et le fioul utilisé pour le chauffage. Si les cours du pétrole augmentent à nouveau, l'objectif en termes de jours d'activité, de l'ordre de 96 jours - dont 4 consacrés à des exercices internationaux -, pourrait être lui aussi réexaminé. En tout état de cause, l'état-major participe activement à toutes les études actuelles de la direction des affaires financières sur les procédures de couverture des risques pétroliers.

M. Joël Hart s'est félicité que les incertitudes portant sur les effectifs en 2005 ne soient plus qu'un mauvais souvenir et que l'entrée en vigueur de la LOLF offre suffisamment de souplesse pour transformer 350 emplois de sous-officiers en 500 postes d'engagés volontaires de l'armée de terre (EVAT). Des inquiétudes subsistent malgré tout sur l'entretien des matériels des régiments, dont la situation sape le moral des troupes et tout particulièrement celui des jeunes engagés. Les industriels semblent en cause mais il n'est pas exclu que le montant des crédits de fonctionnement soit insuffisant. Pour ce qui concerne les livraisons de matériels neufs, l'entrée en service des Tigre tarde et de réelles interrogations portent sur les commandes du NH 90.

Dans ce contexte, la prochaine loi de programmation militaire apparaît cruciale pour l'armée de terre. Or, compte tenu du lancement des programmes tels que le second porte-avions ou les frégates multimissions, entre autres, le risque est grand que ne lui soit affectée qu'une portion congrue des crédits futurs. L'état-major a-t-il procédé à une évaluation prospective des besoins budgétaires de l'armée de terre d'ici 2015 ? Comment l'accroissement prévisible des besoins, c'est-à-dire la fameuse « bosse » de financement, sera-t-il pris en compte au-delà de 2008 ?

Le général Bernard Thorette a souligné que l'armée de terre ne rencontrerait pas de difficultés en matière d'effectifs en 2006, ce dont on ne peut que se féliciter, au regard des contraintes opérationnelles. Pour l'année 2005, les effectifs moyens réalisés se sont établis à 133 700 militaires, alors que les effectifs budgétaires atteignaient 135 900. L'armée de terre se situe donc dans une marge satisfaisante, ses effectifs étant globalement équivalents à ceux de l'année précédente. La loi organique relative aux lois de finances s'appuie sur la notion de plafond autorisé d'emplois, qui atteint pour l'armée de terre, dans le nouveau périmètre, 126 000 militaires, soit, compte tenu de la masse salariale allouée, 124 000 militaires. Ces effectifs permettent de réaliser les engagements opérationnels demandés à l'armée de terre.

La disponibilité technique opérationnelle des équipements constitue un sujet de préoccupation récurrent, qui comporte des conséquences pour l'entraînement du personnel, mais aussi sur leur moral. Le niveau de cette disponibilité, de l'ordre de 73 %, n'est certes pas satisfaisant, mais doit être apprécié à l'aune de l'objectif de 75 % défini comme cible pour 2008.

Il faut toutefois relever que la disponibilité des matériels atteint 92 % sur les théâtres d'opérations extérieures, grâce à un effort important en matière d'approvisionnement des pièces, mais aussi à la mobilisation des personnels. Parallèlement, quatre mois avant le départ en opération d'une unité, les équipements qui seront nécessaires sur le théâtre extérieur affichent un taux de disponibilité de 97 %.

Les causes de l'insuffisante disponibilité des matériels sont multiples. Parmi celles-ci, figurent les délais de livraison des pièces : si l'armée de terre a sans doute une part de responsabilité dans ce domaine, les constructeurs lui imposent souvent des délais considérables, de trois mois à une année. Le rythme d'emploi des matériels a également une incidence sur leur disponibilité : globalement, l'armée de terre consomme davantage de potentiel de ses matériels qu'elle n'en produit. Ainsi, l'entraînement des forces mobilise fortement les matériels concernés. A titre d'exemple, en mars et avril 2005, l'armée de terre a réalisé, pour la première fois depuis la mise en place de la professionnalisation, un exercice impliquant 15 000 militaires ainsi que 3 000 véhicules. Après cet exercice, la disponibilité des équipements utilisés a certes chuté, mais cela n'est pas négatif, puisque lié à l'entraînement des personnels.

L'armée de terre déplore les retards des livraisons de chars Leclerc, mais aussi les décalages affectant le calendrier de l'hélicoptère Tigre. Si le Tigre constitue sans nul doute un système d'armes particulièrement complexe à mettre au point, ces retards posent des difficultés, notamment en matière de formation. Le prix de l'entretien des matériels neufs est supérieur à celui de leurs prédécesseurs : l'entretien du Tigre coûtera davantage que celui des Gazelle, tout comme la maintenance du char Leclerc est plus onéreuse que celle des AMX 30. C'est pourquoi les crédits consacrés à l'entretien programmé des matériels resteront élevés au cours des prochaines années.

La prochaine loi de programmation militaire devra certes être construite en fonction des grands programmes d'équipement, mais aussi en prenant en considération nos capacités financières. L'armée de terre, armée d'emploi, aura des besoins importants, dont la planification prévisionnelle des grands programmes d'équipement devra tenir compte.

S'agissant du NH 90, les retards constatés ne devraient pas toucher l'armée de terre, pour laquelle les premières livraisons doivent intervenir en 2011. Il convient toutefois de rappeler son importance pour les forces terrestres, qui ont dû renoncer à la rénovation de leurs appareils Puma et se limiter à celle de 24 Cougar. L'arrivée dans les forces des 68 exemplaires du NH 90 à partir de 2011 est donc essentielle.

M. Jean-Michel Boucheron s'est enquis des modalités de la participation de l'armée de terre à la Nato Response Force (NRF) et a souhaité obtenir des précisions sur la récente réorganisation des forces françaises en Afrique : quelles en seront les échéances ? Quelle sera la configuration issue de cette réorganisation ?

Le général Bernard Thorette, observant que cette question était plutôt de la responsabilité du CEMA, a indiqué qu'en avril 2003, le Président de la République a approuvé l'implication de la France dans la NRF et la création du quartier général du Corps de réaction rapide (CRR), ou High Readiness Force, à Lille. Cette décision correspond à la volonté de la France d'être présente dans les engagements de l'OTAN, tout en s'impliquant dans les démarches européennes.

Le quartier général du CRR a été officiellement créé le 1er octobre 2005 et se trouve actuellement aux deux tiers des capacités prévues. Il sera soumis à une première certification de l'OTAN en septembre 2006, afin d'obtenir l'Initial Operational Capability (IOC), tandis que la certification finale, dite Full Operational Capability (FOC), devrait intervenir au début de 2007. Le quartier général du CRR comprend 72 étrangers, sur un effectif total de 400 personnes. Cette démarche apparaissait nécessaire : lors de l'opération menée au Kosovo, la France n'avait pas été en mesure d'envoyer un état-major certifié par l'OTAN.

L'armée de terre doit accepter les contraintes associées à ce processus, notamment les dispositifs d'alertes, prévus par l'OTAN, et qui ont le mérite d'inciter les pays participants à s'engager réellement. L'armée de terre devra ainsi combiner ces contraintes avec ses propres alertes dites « Guépard », correspondant à la possibilité de mobiliser 5 000 hommes dans un délai compris entre douze heures et neuf jours. Cette participation à la NRF implique de participer à des exercices réguliers se calquant sur le système de rotation propre à la NRF, ce qui constituera une contrainte supplémentaire.

La participation de l'armée de terre à la NRF favorisera une certaine émulation, de même que la mise en place des groupements tactiques de 1 500 hommes, lancée par l'Union européenne. Cette dernière se dote ainsi d'un outil opérationnel concret dans le cadre du réservoir de forces de 60 000 hommes prévu par l'objectif d'Helsinki.

Ces dispositifs se traduisent par des obligations supplémentaires pour l'armée de terre mais correspondent à une véritable ambition internationale et permettent incontestablement de valoriser l'outil militaire français.

La réorganisation du dispositif militaire français en Afrique est de la compétence des autorités politiques et du chef d'état-major des armées. La presse a diffusé des informations qui ne correspondent pas entièrement à la réalité. Il existe actuellement un projet, défini dans le cadre de l'Union africaine, visant à donner aux différentes organisations politiques régionales de ce continent les moyens de régler les crises dans leurs zones d'influence respectives. Chaque zone géographique disposera d'une brigade adossée au dispositif RECAMP (Renforcement des capacités africaines de maintien de la paix). Par cohérence géographique, le chef d'état-major des armées a proposé que les capacités françaises, elles-mêmes associées à RECAMP, soient principalement réorganisées autour de Dakar, Libreville, et Djibouti.

Le général Bernard Thorette a précisé, qu'à sa connaissance, le fait que le Tchad ne soit pas cité parmi les principaux points de stationnement des forces françaises ne signifie pas que celles-ci vont quitter le pays. Il appartient au chef d'état-major des armées, au ministre de la défense et au Président de la République, de se prononcer sur l'organisation des forces françaises prépositionnées sur le continent africain.

Le président Guy Teissier a précisé que cette question avait été évoquée avec le général Lamine Cissé ; les journalistes sont allés au-delà des propos tenus.

Reprenant les remarques du chef d'état-major de l'armée de terre sur l'état du matériel militaire, M. Gilbert Meyer a observé qu'un rapport d'information sur l'entretien des matériels des armées, publié en octobre 2002, faisait état d'une disponibilité technique opérationnelle du matériel de l'armée de terre se situant entre 35 et 55 %. Quelle est aujourd'hui la disponibilité des matériels par rapport à ce constat ?

Le général Bernard Thorette a souligné la difficulté d'établir des comparaisons pertinentes. Certains matériels connaissent des variations de disponibilité importantes. A titre d'exemple, la disponibilité technique opérationnelle du char Leclerc est passée de 58 %, il y a six mois, à 35 à 40 % aujourd'hui ; cet écart résulte d'un défaut de patin de chenille d'une part, et de soucis causés par le récupérateur de tir d'autre part. Cette situation n'empêche cependant pas l'utilisation des matériels, dotés des patins existants, ni l'entraînement des personnels même si dans ces circonstances, il leur est impossible d'utiliser les fonctions de tir.

Actuellement, le suivi de la disponibilité technique opérationnelle est effectué à partir d'un tableau de bord élaboré par le contrôle général des armées pour le ministre. Les calculs sont pondérés et ne prennent pas en compte les matériels qui, faisant l'objet d'une rénovation complète, sont de fait retirés des régiments. Le chiffre de 73 % ainsi obtenu ne peut donc être comparé aux chiffres du rapport publié en 2002. Il souligne plutôt une stagnation du taux global de disponibilité technique opérationnelle dans le périmètre qui a été défini, puisque ce chiffre s'élevait à 70 % il y a un an et à 73 % il y a six mois.

Par ailleurs, il est bien évident que l'agrégation statistique des matériels du génie et des véhicules de l'avant blindé, par exemple, n'a pas une grande signification quant au caractère opérationnel global des forces terrestres.

Certains matériels, tels que les hélicoptères Puma, les Sagaie et AMX-10RC bénéficient d'une disponibilité technique opérationnelle constante évaluée entre 50 % et 60 %. Le taux de disponibilité technique des AMX-10 P s'élève à 65 %, ce qui est satisfaisant au regard de la vétusté de ces matériels. Certains matériels sont retirés à tour de rôle des unités en vue d'une rénovation complète : ce sera le cas des AMX-10 RC jusqu'en 2010, et des Sagaie qui vont être équipées d'un moteur diesel, nécessitant une immobilisation de sept mois.

M. Gilbert Meyer a noté que le général Thorette était non seulement un militaire mais également un diplomate.

Le général Bernard Thorette a reconnu que certains régiments avaient dû se contenter de 10 à 12 AMX10-RC opérationnels sur les 48 en dotation.

Le président Guy Teissier a précisé que ces blindés avaient parfois été remplacés par de simples camions lors des entraînements.

M. Jérôme Rivière a estimé avoir décelé dans les propos du chef d'état-major l'expression d'une crainte relative au coût du maintien en condition opérationnelle de l'équipement des forces et notamment des hélicoptères. La mise en œuvre d'un système d'arme volant est-il véritablement au cœur de la mission des forces terrestres ? Ne conviendrait-il pas de recentrer l'effort sur les personnels au sol et le matériel blindé ?

Le général Thorette a précisé que les futurs matériels volants seront coûteux pour toutes les armées. Deux aspects sont à prendre en considération : l'élément financier et l'élément capacitaire. L'action de l'armée de terre se caractérise par un mode de combat aéroterrestre au sol et près du sol. Les trois missions accomplies par les hélicoptères sont la reconnaissance, l'appui et la manœuvre, qu'il convient de distinguer du transport. Ces matériels appartiennent, de façon consubstantielle, à la force aéroterrestre. Ce modèle est celui de toutes les armées du monde. L'armée de terre perdrait beaucoup à sortir les voilures tournantes de cet ensemble. Les crédits d'entretien des aéronefs de l'armée de terre représentent un tiers de ses crédits de maintien en condition opérationnelle du matériel. Le coût de maintenance du Tigre et du NH-90 sera, en tout état de cause, élevé. La simulation constituera, à coup sûr, une source d'économie.

M. Jean-Claude Viollet a demandé s'il était possible, dans le domaine des crédits de fonctionnement, de définir, comme pour la disponibilité des matériels, des seuils critiques. Pour ce qui concerne les effectifs civils, quels sont les éléments, en termes de fonction et de qualification qui sont problématiques ? En matière d'équipement, il est courant d'entendre que la loi de programmation militaire est tenue. La vérification se fera à l'aune de la réalisation du modèle armée 2015. A cet égard, des révisions en volumes sont-elles à prévoir ?

Le général Thorette a rappelé que le coût des services, mesuré par l'INSEE, augmente chaque année de 5 % à 10 %. Or, pour l'année 2006, une économie de 3,5 % est demandée. Dans le domaine du fonctionnement, des économies peuvent certes être réalisées dans certains domaines comme le chauffage, mais le coût de nombreux contrats de sous-traitance apparaît plus élevé d'une année sur l'autre. C'est ce qui rend le fonctionnement contraint.

Les personnels civils mis à la disposition de l'armée de terre par le secrétariat général pour l'administration sont moins nombreux chaque année, en raison, notamment, du non-remplacement d'une partie des départs à la retraite et de la restructuration de GIAT. Il n'est donc pas exclu que doivent être affectés sur des postes civils des personnels militaires. Les effectifs budgétaires de personnels civils au sein des forces terrestres sont suffisants, mais il conviendrait que ces postes soient pourvus.

Les questions relatives à la prochaine loi de programmation militaire relèvent de la compétence du chef d'état-major des armées, qui conduira les travaux sous l'égide du ministre. Le modèle d'armée 2015 est sur la bonne voie. L'abandon de quelques programmes comme le missile à fibre optique ou le châssis blindé du missile Mistral, qui n'étaient pas explicitement inscrits en PLM, ne signifie pas que ce modèle n'est plus pertinent.

M. Francis Hillmeyer a demandé si les effectifs de l'armée de terre s'avéraient suffisants compte tenu du nombre de militaires mobilisés par des tâches de sécurité intérieure.

Le général Thorette a estimé que les effectifs opérationnels mis en évidence par la LOLF, soit 124 000 militaires, étaient suffisants. L'armée de terre peut fonctionner durablement avec 10 000 hommes en opération extérieure ou en mission intérieure. Ce chiffre pourrait être dépassé, s'il le fallait, en acceptant certaines conséquences en matière de disponibilité des matériels, d'entraînement et de déploiement.

Les opérations intérieures mobilisent en moyenne plus de 1 000 hommes, dont 600 à 700 pour Vigipirate, 300 pour la lutte contre les incendies de forêt et divers autres événements. En situation de crise d'une exceptionnelle gravité, l'armée de terre serait à même de mobiliser 15 000 hommes en 48 heures. C'est là son troisième défi : l'armée de terre est une armée de proximité.

Le Président Guy Teissier a souligné que l'armée de terre intervenait également en cas de catastrophe naturelle.

Le général Thorette a rappelé, qu'effectivement l'armée de terre française est aujourd'hui présente au Pakistan.

II. -  EXAMEN DES CRÉDITS

La commission a examiné pour avis, sur le rapport de M. Joël Hart, les crédits de la Mission « Défense » : « préparation et emploi des forces (forces terrestres) », pour 2006, au cours de sa réunion du 26 octobre 2005.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur pour avis.

M. Jérôme Rivière s'est réjoui que la nouvelle nomenclature issue de la LOLF permette d'éviter à l'avenir un détournement de l'utilisation des crédits votés par le Parlement pour la modernisation de certains équipements essentiels, comme les hélicoptères de l'ALAT, au profit du maintien en condition opérationnelle d'autres matériels, ces deux aspects relevant de deux programmes distincts.

Le président Guy Teissier a jugé concluant le maintien des avis budgétaires de la commission sur les crédits prévus pour la préparation et l'emploi opérationnel de chaque armée.

La Commission a alors approuvé les conclusions du rapporteur sur les crédits du programme « Préparation et emploi des forces (forces terrestres) ».

*

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La commission a ensuite examiné, pour avis, les crédits de la mission « Défense ».

M. Jean-Michel Boucheron a déclaré qu'après mûre réflexion, le groupe socialiste voterait contre les crédits de la Mission « Défense », non pour s'opposer aux intentions affichées mais parce que les crédits proposés relèvent d'un exercice virtuel, voire de l'équilibrisme.

M. Michel Voisin s'est étonné de cette prise de position, eu égard à l'effort remarquable consenti depuis quatre ans, tranchant avec une période marquée par les effets de la croyance aux « dividendes de la paix », et qui a permis de faire passer de 1,79 % à 2,17 % du PIB les crédits consacrés à la défense. Ce résultat a été obtenu de haute lutte par la ministre de la défense face au ministère des finances et justifie le vote du groupe UMP en faveur du budget de la Mission « Défense ».

Le président Guy Teissier a souligné que le Président de la République, chef des armées, avait joué un rôle décisif et constant dans les arbitrages budgétaires concernant la défense.

La commission de la défense a alors donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la Mission « Défense ».

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N° 2572-04 - Avis au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées sur le projet de loi de finances pour 2006 (n° 2540), Tome IV : Défense, préparation et emploi des forces terrestres (M. Joël Hart)

1 Système de pose rapide de trabures : il s'agit d'appareils posant des éléments de ponts


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