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COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES,
FAMILIALES ET SOCIALES

COMPTE RENDU N° 76

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 20 septembre 2006
(Séance de 15 heures)

12/03/95

Présidence de M. Jean-Michel Dubernard, président.

SOMMAIRE

 

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- Audition, ouverte à la presse, de M. François Goulard, ministre délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche, sur la mise en place de l'Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (AERES)



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La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a entendu M. François Goulard, ministre délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche, sur la mise en place de l'Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (AERES).

Le président Jean-Michel Dubernard a prié le ministre de bien vouloir excuser l'absence des commissaires des groupes socialiste et UDF, retenus par leurs journées parlementaires. Il l'a remercié d'avoir accepté de répondre à un certain nombre de questions, d'autant que les informations parues il y a peu dans la presse semblent en contradiction avec l'esprit comme avec le texte de la loi du 18 avril 2006, mais aussi avec les propos qu'avaient tenu les personnes auditionnées par la commission à l'occasion de l'examen du projet de loi de programme pour la recherche.

En cherchant à donner un nouvel élan très fort à la recherche française, ce texte avait répondu exactement aux attentes des chercheurs sur le terrain, même si certains mécanismes pouvaient susciter quelques craintes.

Pour toutes ces raisons, une mise au point était nécessaire.

S'agissant plus précisément de l'Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (AERES), on peut se réjouir que l'évaluation de l'enseignement supérieur ait été associée à celle de la recherche. C'est une étape significative pour remettre ensemble recherche et enseignement supérieur, qui sont encore trop éloignés l'une de l'autre. Cela tient à des raisons historiques : les grands organismes de recherche ont été créés au début du XXè siècle, à un moment où l'université considérait que la recherche qu'on y menait n'avait pas de réelle signification. C'est ce qui a entraîné la création du Centre national de la recherche scientifique (CNRS), du Commissariat à l'énergie atomique (CEA) et, plus récemment, de l'Institut national de la santé et de la recherche (INSERM).

Les pôles de recherche et d'enseignement supérieur (PRES) sont un autre outil de ce rapprochement. Là aussi, il s'agit de donner un nouvel élan, pour rapprocher des institutions aussi éloignées que peuvent l'être, par exemple, Lyon I, Lyon II, Lyon III, l'École centrale de Lyon et Normale Sup Lyon, et préfigurer cette réforme de l'université qui devra être menée par la prochaine majorité, quelle qu'elle soit.

Pour apprécier si l'AERES est aujourd'hui opérationnelle, il conviendrait que le ministre précisât où en est le projet de décret. Par ailleurs, on peut se demander comment va se passer la transition entre les anciens systèmes et la nouvelle agence, certains craignant que cette dernière ne soit une usine à gaz qui s'ajouterait aux structures d'évaluations existantes, déjà bien complexes. Ne court-on pas également le risque d'évaluer plusieurs fois la même chose ?

Dans un autre registre, pourquoi les syndicats ont-ils peur d'un déficit de démocratie ? En quoi le nouveau système d'évaluation sera-t-il plus légitime que le précédent ?

Comment l'agence va-t-elle se positionner dans le paysage de la recherche française à côté des nouveaux outils que sont le Haut conseil de la science et de la technologie (HCST) et l'Agence nationale de la recherche (ANR) ? La question va se poser d'autant plus rapidement que les textes d'application sont sortis bien plus vite que les membres de la commission ne l'avaient imaginé, l'audition de M. Gilles de Robien, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, sur la mise en application de la loi n'étant prévue que le 31 octobre...

Enfin, en quoi la nouvelle agence renforcera la reconnaissance de notre système d'évaluation au niveau international ?

M. François Goulard, ministre délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche, a remercié le président Jean-Michel Dubernard pour sa présentation et pour ses questions à propos de ce qui constitue sans doute l'aspect le plus délicat des textes d'application de la loi de programme du 18 avril 2006.

S'agissant des délais, un certain nombre de décrets sont aujourd'hui parus. C'est le cas de celui portant statut de l'Agence nationale de la recherche qui, a désormais le statut d'établissement public. Elle est désormais totalement en place dans sa forme définitive. De même, le décret portant création du Haut conseil de la science et de la technologie a été publié. Le décret portant nomination de ses membres sera publié dans les prochains jours puisque l'installation du Haut conseil par le Président de la République aura lieu lundi prochain. La première liste de réseaux thématiques de recherche avancée (RTRA) est sur le point de paraître grâce au travail accompli par une commission présidée par M. Jean Dercourt, secrétaire perpétuel de l'Académie des sciences. Ces réseaux prendront une place très importante dans le paysage de la recherche, en même temps que les centres thématiques de recherche et de soins (CTRS). L'idée est d'encourager la création de réseaux de forces de recherche significatives, composées de plusieurs centaines de chercheurs et se situant au meilleur niveau international. Cela permet d'ailleurs de rappeler qu'il y a en France des organismes de recherche et des équipes qui sont à ce niveau. Encore faut-il qu'elles soient dotées des moyens de demeurer excellentes. S'agissant enfin des PRES, de nombreux projets sont en préparation et certains auront probablement vu le jour avant la fin de l'année.

On le voit, ce que le Parlement a voté au début de l'année est déjà largement devenu réalité. Une telle rapidité n'est guère courante. Le monde de la recherche apprécie aussi les financements nouveaux de l'ANR ainsi que les 3 000 nouveaux postes dans le Parlement a voté la création en 2006. Même s'il n'est pas encore public, il apparaît déjà que le budget 2007 suivra la même ligne.

En ce qui concerne l'AERES, le décret sera publié avant le 31 octobre puisqu'il doit passer en Conseil des ministres le 18. Là aussi, les délais sont tenus alors qu'il s'agissait sans doute de l'aspect le plus délicat du texte. L'agence sera ainsi opérationnelle avant la fin de cette année et, afin qu'elle puisse commencer à travailler, le gouvernement s'efforcera d'aller très vite pour la nomination de ses membres et de ceux des sections, ainsi que pour la composition de son conseil d'administration et la nomination des responsables de sections.

L'AERES marque certes un changement majeur mais pas une rupture : il y a continuité entre l'évaluation telle qu'elle existait et celle qui sera menée sous son égide. Les conditions seront différentes mais les experts retenus seront souvent ceux qui ont déjà acquis une expérience au sein de la Mission scientifique pédagogique et technique (MSPT), de la Commission nationale d'évaluation (CNE) ou du Comité national de l'évaluation de la recherche (CNER). Il est certain que dans un premier temps l'agence s'appuiera beaucoup sur les organes d'évaluation existants, dont elle aura approuvé les procédures.

Le grand changement est en fait que l'évaluation se fera désormais sous l'égide d'une haute autorité indépendante, comme le Parlement l'a voulu. Cette indépendance montre l'importance accordée à l'évaluation, ce qui répond en partie à la question de la légitimité de l'agence. La présence d'une autorité administrative indépendante est une nouveauté dans le paysage scientifique français.

Il paraît difficile de parler d'usine à gaz alors que l'on avait jusqu'ici une quantité de procédures d'évaluation différentes selon les organismes qui les pratiquaient. Désormais l'agence aura compétence complète sur l'ensemble de la recherche financée sur fonds publics. Elle appliquera des critères identiques et offrira ainsi une vision plus claire de la qualité de la recherche.

L'architecture de l'agence n'est pas complexe. Elle sera dotée d'un conseil d'administration composée de deux parlementaires, de neuf personnalités qualifiées, de sept personnes nommées sur proposition des organismes de recherche et de sept autres sur proposition des organes d'évaluation existants. Ce conseil aura des pouvoirs étendus, de même que le président nommé en son sein.

L'agence sera organisée en trois sections. La première aura compétence pour évaluer les organismes de recherche mais aussi les procédures d'évaluation des personnels. En effet, il n'était pas possible d'inclure l'évaluation des personnels dans le champ de compétence de l'agence, dans la mesure où sa nature est différente et où la représentation de ces personnels doit être assurée au sein des organes chargés de cette évaluation. L'agence a donc été chargée de constater qu'il existait des procédures et de les évaluer. La deuxième section sera chargée de l'évaluation des équipes de recherche, et la troisième de l'évaluation des formations et des diplômes de l'enseignement supérieur. Composées d'un directeur et de personnalités, les sections auront recours à des experts désignés sur une liste arrêtée par le conseil d'administration de l'agence.

Au titre des principes qui fondent la légitimité de l'agence, le ministre délégué a rappelé que tous les membres du conseil d'administration seront des personnalités qualifiées du monde de la recherche, à l'exception des parlementaires, qui pourront toutefois l'être également. Les comités d'évaluation sont composés majoritairement de scientifiques des disciplines qu'ils sont chargés d'évaluer, selon le principe internationalement reconnu d'évaluation par les pairs.

Le deuxième principe est celui de l'indépendance des membres de l'agence. Ce serait faire injure aux personnalités scientifiques de penser qu'elles peuvent être sujettes à influence lorsqu'elles exercent la mission d'évaluation scientifique que leur confie la loi.

Parmi les autres principes figurent la transparence et la publicité. Le fonctionnement de l'agence doit être totalement transparent. Ses appréciations seront rendues publiques, de même que les noms et les curriculum vitae, publications comprises, de ceux qui procéderont à l'évaluation.

L'agence obéira aussi au principe du contradictoire, ainsi qu'à celui de l'articulation avec les organes d'évaluation du personnel, dont un représentant fera partie du comité chargé d'évaluer une équipe.

L'agence pourra s'appuyer sur les organes d'évaluation existants, mais sans que le travail ne soit effectué deux fois. En effet, la loi la charge, soit par elle-même, soit en confiant la tâche à un organisme existant, de l'ensemble des évaluations des productions scientifiques, des organismes et des équipes.

Toujours au chapitre de la légitimité, ce dispositif se rapproche des standards internationaux, ce que confirme l'étude menée par les services du ministère sur le système d'évaluation dans les grands pays de recherche - États-Unis, Japon, Finlande, Allemagne.

Tout cela facilitera sans doute la reconnaissance internationale dans la mesure où l'agence, qui homogénéisera les pratiques et rendra ses travaux totalement publics, sera bien plus identifiable de l'extérieur que ne l'étaient les procédures internes aux différents organismes. Cela permettra en outre de repérer la valeur d'une équipe. Les comités d'évaluation comprendront par ailleurs des experts internationaux. Actuellement, tous les contacts européens sont l'occasion de développer les échanges d'experts.

Il est vrai qu'un certain nombre d'organismes ont craint que l'on ne prenne pas suffisamment en compte leurs spécificités. Mais avant d'engager une évaluation, il y a bien évidemment des contacts entre l'agence et les responsables de l'organisme. Il est par ailleurs indiqué dans le décret que les méthodes d'évaluation tiendront compte des spécificités, du secteur et des caractéristiques de la recherche : il est évident que l'on n'évalue pas une recherche fondamentale, qui débouche souvent sur une publication dans une revue internationale, comme une recherche appliquée, pour laquelle il faut apprécier la valeur de l'activité partenariale avec le monde de l'économie.

Certains syndicats reprochent à l'agence de ne pas être démocratique mais il faut s'entendre sur les mots : on ne peut que nourrir le plus profond respect pour la démocratie mais quand il s'agit d'évaluation scientifique, c'est l'expertise qui prime. Or la légitimité d'une expertise scientifique ne repose pas sur le principe démocratique de l'élection mais sur une qualité scientifique incontestable. S'il est normal de prévoir la présence de représentants élus pour l'évaluation des personnels, cela ne se justifie par pour l'évaluation scientifique. D'ailleurs, la plupart des pays procèdent de la sorte ; seule l'Allemagne a recours aux élections, mais parmi l'ensemble de la communauté scientifique et non pas à partir de listes présentées par les syndicats. Qui plus est, une réforme récente au sein de la Deutsche Forschungsgemeinschaft (DFG), organisme de droit privé, confie aux organes élus le contrôle de l'évaluation et non l'évaluation elle-même.

La science est aujourd'hui ouverte et internationale ; celui qui ne respecterait pas la qualité scientifique ne saurait faire longtemps illusion. S'il venait à l'esprit de quelqu'un d'essayer de tordre le système d'évaluation pour montrer que tel organisme ou tel pays est remarquable alors qu'il ne l'est pas, cela se verrait immédiatement et priverait l'évaluation de toute reconnaissance internationale. Le monde scientifique est très compétitif et très exigeant, mais, à quelques exceptions près comme récemment en Extrême-Orient, l'honnêteté intellectuelle y est un principe extrêmement puissant. L'ouverture, le regard porté par les communautés scientifiques des autres pays est donc la meilleure garantie.

M. Pierre Louis Fagniez a souhaité connaître le sentiment du ministre sur la participation démocratique à l'organisation de tout ce qui a été créé par cette loi, qui a donné une suite très favorable aux demandes issues des États généraux de la recherche, en particulier pour le Haut conseil et les PRES. En revanche, la création de l'AERES n'était pas prévue par les États généraux, les chercheurs considérant souvent que l'évaluation doit être faite par les pairs sur la base des publications. Il n'y avait donc aucune raison d'y introduire la notion de représentation démocratique. Un certain nombre de parlementaires se sont d'ailleurs opposés à cette obligation pour le Haut conseil placé auprès du Président de la République, à qui il appartient, comme cela se fait dans un grand nombre de pays et comme l'avait fait le général de Gaulle, de s'entourer des personnes dont il pense qu'elles le conseilleront au mieux.

Dans les PRES, dont on voit le succès, la représentation démocratique est assurée au travers des institutions et on comprend fort bien que les États généraux de la recherche l'aient réclamée. L'AERES s'inscrit dans une toute autre logique, celle d'une exigence de qualité permettant de fournir, pour l'étranger, la meilleure perception de la recherche française. Prétendre aujourd'hui l'inverse, vouloir mettre la démocratie à la place de l'expertise serait donc de la démagogie, que rejetterait sans doute la majorité des grands chercheurs.

M. Jean-Michel Fourgous a souhaité se faire l'écho de questions que les Français se posent, tant sur le pourcentage des chercheurs qui travaillent vraiment sur des projets d'origine industrielle ou permettant une application commerciale, que sur l'évolution du nombre de dépôts de brevets en France, par rapport aux autres pays.

Le président Jean-Michel Dubernard a souligné qu'une réforme engagée aux États-Unis visait à faire évoluer la méthode d'évaluation du système des brevets, qui peut être biaisée par le dépôt d'un nombre considérable de demandes sans aucune signification. S'agissant des publications, il a observé que leur importance variait en fonction des thèmes de recherche et des disciplines : certains chercheurs publient dans Science ou dans Nature, d'autres dans Annals of Surgery... Il a enfin rappelé que, quand il avait suggéré au commissaire européen à la recherche de créer un vivier européen d'évaluateurs, il s'était heurté à des réticences qu'il n'avait pas bien comprises. Peut-être faudrait-il aujourd'hui relancer cette idée. Par ailleurs, il serait souhaitable que le ministre précise combien de personnes travailleront à l'AERES et quel sera son budget.

M. Jean-Jacques Gaultier a demandé si les personnes évaluées auraient connaissance du nom de leurs évaluateurs et souhaité obtenir quelques précisions sur les modalités d'évaluation des formations et des enseignements.

Le ministre délégué a souligné, sans vouloir pour sa part parler de « démagogie », que le plus important était bien évidemment la qualité scientifique. D'ailleurs, même dans les organismes où il y a désignation par les syndicats, les scientifiques élus se comportent d'abord en scientifiques.

La question des retombées industrielles ne concerne pas toutes les équipes de recherche. Certaines matières sont purement académiques, d'autres le sont presque exclusivement. Mais là où il peut y avoir des retombées industrielles, on doit bien évidemment se soucier de la bonne articulation entre recherche et industrie. Tout n'est pas parfait, loin s'en faut, en particulier parce que persiste un modèle ancien dans lequel la recherche était totalement coupée du monde de l'industrie. Les choses évoluent aujourd'hui dans le bon sens. Ainsi, la politique des « instituts Carnot » a eu un effet très favorable : il y a eu d'excellentes candidatures et une vingtaine d'institutions ont bénéficié de ce label qui permet l'attribution de crédits spécifiques. Cette opération sera renouvelée l'an prochain, avec des fonds plus importants. La volonté d'inciter les organismes de recherche à travailler avec le monde de l'économie est plus forte que jamais.

Comme l'a souligné le président Jean-Michel Dubernard, il ne suffit pas de prendre en considération le nombre de dépôts de brevets, il faut y regarder de plus près. Mais il faut bien sûr inciter les institutions à en déposer ou pour le moins à se poser la question de la propriété intellectuelle. Les choses vont aujourd'hui dans le bon sens, mais la France revient de loin car pendant longtemps ses chercheurs ont adopté le comportement classique qui consiste à publier d'abord et à s'interroger ensuite - souvent trop tard dans le droit européen de la propriété intellectuelle - sur un éventuel dépôt de brevet. Cette mission a été rappelée à tous les responsables des organismes de recherche. Ce doit aussi être un des critères retenus par l'agence, qui peut jouer un grand rôle.

Une de ses tâches essentielles consistera par ailleurs à essayer de progresser dans les méthodes d'évaluation. Elle le fera d'abord par son propre travail, grâce aussi à des contacts internationaux, qui seront d'ailleurs facilités par le fait que la France se rapproche des standards mondiaux.

En ce qui concerne les publications, s'il y a en effet de grandes disparités selon les thèmes de recherche, on constate aussi que les chercheurs français ont l'habitude de mal déclarer leur organisme de rattachement au moment de leurs publications, ce qui vaut à ces organismes de perdre des places dans le classement de Shanghai.

Le personnel administratif permanent de l'agence sera composé d'une cinquantaine de personnes. Ce sont les budgets des organismes auxquels elle se substitue qui viendront alimenter le sien, à hauteur de 4,5 millions d'euros. Ce n'est certes pas un budget sur lequel il convient de faire des économies car c'est de contrôle de l'usage des fonds publics qu'il s'agit. Il faudra donc lui donner les moyens de faire son travail.

Concernant les noms des évaluateurs, ils seront rendus publics.

S'agissant des formations, des diplômes et de l'enseignement supérieur, on ne part pas de zéro. Mais l'évaluation doit évoluer, notamment en tenant compte des débouchés des formations. Il faut aussi se demander ce que deviennent les diplômés un ou deux ans plus tard. Combien sont au chômage ? À quels emplois ont-ils accédé ? Y a-t-il adéquation entre le niveau de formation et l'emploi occupé ?

Parce qu'elle aura désormais un rôle dans la valeur des diplômes, l'évaluation se trouve également renforcée. Jusqu'à présent un diplôme trouvait sa légitimité dans la nature juridique de l'organisme de formation qui le délivrait. Ainsi, pour délivrer un doctorat, il suffisait d'être une université. Avec le nouvel arrêté sur les écoles doctorales, celles-ci rassemblent des unités d'enseignement qui veulent préparer au doctorat et l'évaluation permettra de savoir s'il s'agit bien d'une école doctorale. On substitue ainsi à une logique organique une logique d'évaluation, ce qui est beaucoup plus sain. Cela existait déjà pour l'habilitation des masters, mais ce sera désormais systématique, sous l'égide de l'AERES.

Dans l'enseignement supérieur, la contractualisation des établissements reposera à l'avenir également sur les rapports d'évaluation, à partir desquels on discutera des résultats et des objectifs pour les quatre ans à venir.

Il est vrai que jusqu'ici la Commission européenne n'a pas pris d'initiative en faveur de la constitution d'un corps d'évaluateurs européens, alors que l'on met souvent en avant l'intérêt de renforcer les échanges dans ce domaine. En fait, les contacts se font le plus souvent à un niveau bilatéral. Cela tient sans doute au fait que l'Union européenne n'est pas constituée de vingt-cinq grands pays de recherche et qu'il y a entre les États des écarts considérables. Or la Commission raisonne toujours pour l'ensemble du territoire de l'Union. Les échanges entre la France et l'Allemagne ou la Grande-Bretagne ont un sens et les organismes français de recherche sont incités à travailler avec leurs homologues, ce qui serait plus difficile avec d'autres pays.

Le président Jean-Michel Dubernard a observé que si les échanges bilatéraux ne sont possibles qu'avec un petit nombre de pays, il existe aussi, en particulier au Portugal et en Grèce et aux Pays-Bas, quelques équipes de très haut niveau ; l'idée serait donc de remplacer les échanges bilatéraux par des échanges au niveau européen, avec un pool d'évaluateurs, ce qui permettrait d'accéder plus facilement à des équipes nouvelles. Puis, il a remercié le ministre délégué d'avoir apporté toutes ces précisions sur l'AERES, qui est un élément clé de la loi du 18 avril 2006.


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