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COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

Mardi 12 décembre 2006

Séance de 16 h 15

Compte rendu n° 15

Présidence de M. Edouard Balladur, Président,

 

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– Accord avec l’Agence pour la sécurité de la navigation aérienne en Afrique et à Madagascar relatif à l'établissement à Paris d'une délégation de l'Agence (n° 3351) – Jean-Marc Roubaud, rapporteur

– Accord de sécurité sociale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Corée (n° 3119) - M. Jean-Paul Bacquet, rapporteur

  


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Accord avec l’Agence pour la sécurité de la navigation aérienne en Afrique et à Madagascar

La Commission a examiné, sur le rapport de M. Jean-Marc Roubaud, le projet de loi adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et l'Agence pour la sécurité de la navigation aérienne en Afrique et à Madagascar relatif à l'établissement à Paris d'une délégation de l'Agence pour la sécurité de la navigation aérienne en Afrique et à Madagascar et à ses privilèges et immunités sur le territoire français (ensemble une annexe) et de l'avenant n°1 à cet accord (n° 3351).

M. Jean-Marc Roubaud, Rapporteur, a indiqué que, alors que le trafic aérien ne cessait de s’intensifier sur tous les continents, la question de la sécurité aérienne devenait particulièrement cruciale, surtout dans les régions du monde encore en développement. L’Afrique de l’Ouest constitue à cet égard un modèle puisqu’elle s’est organisée, dès son indépendance, pour que les nouveaux Etats veillent ensemble à la sécurité de la navigation aérienne.

C’est ainsi qu’a été créée en 1959, sous l’égide de la France, l’Agence pour la sécurité de la navigation aérienne en Afrique et à Madagascar (ASECNA). Depuis lors, sa vocation, ses statuts et son organisation ont été redéfinis par la « Convention de Dakar » du 25 octobre 1974 et l’Agence s’est adaptée au nouveau contexte politique et économique.

Progressivement, le rôle de la France et des Français au sein de l’Agence s’est réduit, mais, après le déplacement de son siège à Dakar, l’ASECNA a conservé sa délégation de Paris. Celle-ci n’a encore qu’un statut de fait. Le présent accord vise à reconnaître à l’Agence un statut d’organisation intergouvernementale et à accorder en conséquence à sa délégation un certain nombre de privilèges et immunités qui faciliteront son fonctionnement.

L’ASECNA est chargée d’un espace aérien d’une superficie de 16,1 millions de km2 relevant de six régions d’information en vol définies par l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI), et de dix-sept Etats.

Dans tout l’espace dont elle a la charge, l’Agence est chargée, au titre de ses activités dites « communautaires », de la conception, de la réalisation et de la gestion des installations et services ayant pour objet la transmission des messages techniques et de trafic, le contrôle de la circulation aérienne, le guidage des avions, l’information de vol, le recueil des données, la prévision et la transmission des informations météorologiques. Ces prestations couvrent la circulation en route, l’approche et l’atterrissage. Elles sont assurées dans les vingt-sept aéroports principaux des Etats membres.

L’Agence peut aussi se voir confier par chacun des Etats signataires la gestion de leurs activités aéronautiques. En 2005, elle remplissait cette fonction pour neuf Etats membres.

L’ASECNA est administrée par un Conseil d’administration, placé sous la tutelle d’un Comité des ministres. Dans chaque État membre, les missions de l’Agence sont remplies par une représentation. Toutes les représentations sont organisées selon un schéma identique. Leurs effectifs constituent environ 80 % des effectifs totaux de l’Agence (5 700 agents au total).

Le budget de l’Agence a naturellement considérablement évolué depuis sa création. Son montant est passé de 2,6 milliards de francs CFA en 1961 à 123,95 milliards de francs CFA (185,5 millions d’euros) en 2005.

Surtout, ses recettes ne sont plus les mêmes : jusqu’en 1974, le budget était alimenté par des redevances (à hauteur d’environ la moitié du total), mais aussi par les contributions des Etats africains membres (pour 20 %) et une contribution française (pour 30 %) ; la contribution française a alors été supprimée, tandis que les contributions des Etats africains, maintenues, sont restées d’un faible montant, qui ne représentait plus que 4 % du total des recettes en 1995. Depuis 1996, les redevances, payées par les bénéficiaires des services rendues par l’Agence (les compagnies aériennes, principalement), constituent ses seules ressources.

En plus de ses seize représentations, celle-ci possède deux délégations : l’une d’elle, ouverte en 1990, est située à Montréal, auprès de l’OACI, l’autre, plus ancienne, se trouve à Paris. Cette délégation de Paris existe depuis que, en 1974, le siège de l’ASECNA a été transféré de la capitale française à Dakar. Elle a conservé jusqu’ici un simple statut de fait.

Elle remplit principalement deux fonctions :

– elle est le centre de recouvrement des redevances en route, ce qui permet à l’Agence d’établir et de recouvrer ces redevances en euros, et de se mettre ainsi à l’abri des dévaluations éventuelles ;

– elle sert d’interface entre l’Agence et ses fournisseurs, pour tous les achats relatifs aux investissements et à la maintenance des équipements, qui représentent de l’ordre de 50 millions d’euros par an.

Cette délégation fonctionne grâce à trente-quatre salariés, dont six agents sous statut de l’ASECNA. Le fait qu’elle soit dépourvue de tout statut officiel est aujourd’hui source d’importants problèmes administratifs et juridiques, auxquels le présent accord d’établissement vise à apporter une réponse.

Il reconnaît l’Agence comme un organisme intergouvernemental et lui confère ainsi les mêmes privilèges, immunités et facilités que ceux dont jouissent les organisations internationales établies en France. L’immunité de juridiction reconnue aux responsables de la délégation de Paris est néanmoins plus limitée que celle dont jouissent les diplomates.

L’ASECNA se voit reconnaître la personnalité juridique. L’intégrité des locaux occupés par sa délégation est assurée, tout comme lui est garantie une correspondance sans entrave, quelle que soit la forme prise par les informations communiquées.

Un régime fiscal dérogatoire lui est accordé. Elle est exonérée de tout impôt direct dans le cadre de ses activités officielles. Les acquisitions ou locations d’immeubles nécessaires au fonctionnement de la délégation sont en outre exonérées de droit d’enregistrement et de taxe de publicité foncière. Pour ce qui est des taxes sur le chiffre d’affaires, au premier rang desquelles la taxe sur la valeur ajoutée, la délégation les supporte dans les conditions de droit commun, mais une partie pourra faire l’objet d’un remboursement par les autorités françaises.

Alors que les personnels recrutés en France – qu’ils soient français ou résidents permanents en France – sont soumis au droit commun, il est accordé des privilèges et immunités aux membres du personnel qui assurent les fonctions d’encadrement de la délégation, dans la limite de six personnes.

L’immunité judiciaire dont ils bénéficient se limite aux actes accomplis dans le cadre de l’exercice de leurs fonctions et ne s’applique ni aux infractions aux règles de la circulation routière, ni en cas d’accident causé par un véhicule leur appartenant ou conduit par l’un d’eux ; elle est donc moins large que celle accordée aux diplomates, laquelle s’étend à leurs actes personnels. De même, les membres de leur famille proche ne bénéficient d’aucune immunité, contrairement aux familles de diplomates.

Ces mêmes personnels, qui, dans la mesure où ils sont affiliés au système de prévoyance sociale de l’ASECNA, ne sont pas affiliés à la sécurité sociale française, se voient octroyer une exonération d’impôt sur le revenu pour les traitements qu’ils perçoivent de l’Agence, sous réserve que celle-ci mette en place un système d’imposition interne effectif. L’avenant n° 1 à l’accord, signé le 6 décembre 2004, y ajoute une condition supplémentaire : les rémunérations versées par l’Agence, bien qu’exonérées, devront être prises en compte pour appliquer le barème de l’impôt sur le revenu aux autres revenus perçus par la personne concernée suivant la règle du taux effectif. Ce mécanisme est destiné à maintenir le juste niveau de progressivité de l’impôt sur le revenu.

A côté de ce statut, réservé au personnel dirigeant de la délégation de l’Agence installé en France, notre pays s’engage à autoriser, sans frais de visa ni délai, l’entrée et le séjour de personnes en mission auprès d’elle, qu’il s’agisse des membres du Comité des ministres ou du Conseil d’administration de l’Agence, de son directeur général ou de conseillers ou experts qu’elle aurait désignés.

La participation de la délégation de Paris aux missions de l’ASECNA étant incontestable, et les immunités et privilèges étant strictement limitées aux activités officielles de l’Agence et à l’exercice des fonctions de son personnel de direction, les stipulations de cet accord apparaissent parfaitement acceptables.

Conformément aux conclusions du rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (n° 3351).

Accord de sécurité sociale avec la Corée

La Commission a examiné, sur le rapport de M. Jean-Paul Bacquet, le projet de loi n° 3119 autorisant l’approbation de l’accord de sécurité sociale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Corée.

M. Jean-Paul Bacquet, Rapporteur, a rappelé que la France et la Corée célébraient cette année le 120ème anniversaire de leurs relations diplomatiques et que Mme Han Myung-Sook, le premier ministre sud-coréen, avait effectué, en juin dernier, une visite officielle en France pour cet anniversaire. L’accord bilatéral de sécurité sociale dont il est proposé d’autoriser l’approbation a été signé le 6 décembre 2004.

La Corée du Sud constitue pour la France un partenaire majeur en Asie. Elle a connu un développement remarquable qui lui a permis de passer de la catégorie des nations les plus pauvres à celle des grandes puissances industrielles. Elle est depuis 2004 la onzième puissance économique mondiale. En 2005, son produit intérieur brut a atteint 810 milliards de dollars, avec un taux de croissance de 3,9 %.

La Corée du Sud est le troisième partenaire commercial de la France en Asie. Les échanges commerciaux ont enregistré une forte croissance en 2005, ce qui les a portés à 6 milliards d’euros. Mais cette évolution a surtout profité aux exportations coréennes, si bien que notre solde commercial est nettement déficitaire, à hauteur de 1,25 milliard d’euros. Le potentiel de développement de nos échanges reste important, nos parts de marché respectives étant limitées à 1 %.

La France occupe le quatorzième rang parmi les investisseurs étrangers, avec environ cent soixante entreprises présentes, dont le chiffre d’affaires cumulé dépasse 7 milliards d’euros, soit trois fois le total de nos exportations, qui s’établissent à 2,38 milliards d’euros. On peut citer comme exemples de réussites le train à grande vitesse franco-coréen KTX, la prise de contrôle de Samsung Motors par Renault, le choix du gouvernement coréen en faveur du groupe BNP-Paribas pour privatiser la Chohung Bank. Le groupe EADS a aussi été sélectionné en décembre 2005 comme principal partenaire de l’industriel KIA (Korea aerospace industries) pour un programme d’hélicoptères militaires de transport logistique.

Les investissements coréens en France atteignent actuellement 550 millions d’euros, soit seulement 7 % des investissements coréens dans l’Union européenne. La France a été particulièrement touchée par la contraction des investissements coréens en Europe après la crise asiatique : trois usines de Daewoo, employant 1 300 personnes, ont été fermées en 2002-2003. La réalisation de projets a néanmoins repris : dix ont été menés à bien entre 2004 et 2005, mais la plupart d’entre eux sont de taille modeste. Les seuls projets d’envergure sont l’accroissement de la capacité de production du producteur de cosmétiques Amore Pacific, en 2003, et l’implantation en région parisienne du centre européen de recherche et développement de LG Electronics, annoncée fin 2004.

C’est justement dans le but de renforcer l’attractivité du territoire français pour les entreprises coréennes et celle du territoire coréen pour les entreprises françaises qu’a été négocié l’accord de sécurité sociale qui fait l’objet du présent projet de loi, dans la mesure où il permet principalement à un employeur d’envoyer des salariés sur le territoire de l’autre Etat partie, tout en s’exonérant du paiement des charges sociales dans le pays où va s’exercer l’activité professionnelle temporaire du travailleur « détaché ».

L’accord vise les risques maladie-maternité, vieillesse, à l’exception des régimes complémentaires non obligatoires, et accidents du travail. Les personnes concernées sont les travailleurs salariés ou non salariés, quelle que soit leur nationalité, ainsi que les réfugiés ou apatrides, dès lors qu’ils ont été soumis aux différentes législations entrant dans le champ d’application matériel de l’accord. Leurs ayants droit et survivants bénéficient également des stipulations de l’accord.

Celui-ci repose sur des principes classiques : égalité de traitement ; soumission d’un travailleur à la législation de l’Etat où il exerce son activité, sauf exceptions ; prise en compte des périodes cotisées dans un pays pour l’ouverture d’un droit dans l’autre ; application systématique des règles de calcul des prestations les plus favorables à l’assuré.

Parmi les personnels qui dérogent au principe de l’affiliation des personnes à la législation du pays où elles travaillent, figurent les personnels détachés, à condition que la durée prévisible du détachement ne dépasse pas trente-six mois – et non soixante mois, comme le souhaitait la partie coréenne au début des négociations –, durée qui peut être doublée si celle du travail à accomplir se prolonge, sous réserve de l’accord des autorités compétentes des deux Etats.

Cet accord classique tient compte des spécificités de la législation coréenne dans deux domaines :

– l’adhésion d’un ressortissant français résidant en Corée au régime coréen d’assurance maladie public n’est que facultative, y compris s’il adhère au régime coréen pour les autres risques ; il pourra choisir d’être couvert par la Caisse des Français de l’étranger pour ce risque. En effet, la couverture offerte par le régime coréen d’assurance maladie est beaucoup moins complète que celle assurée par le régime français ;

– en ce qui concerne les règles applicables aux personnels détachés, elles sont spécifiques sur deux points :

• d’une part, l’employeur coréen n’a pas l’obligation de pourvoir à la couverture maladie du salarié qu’il détache en France, cette charge pouvant être transférée à l’employeur qui l’accueille dans notre pays, par le recours à une assurance privée ; cette particularité est la conséquence du droit coréen, qui ne permet pas l’exportation de la couverture maladie hors du territoire coréen ;

• d’autre part, le travailleur coréen détaché en France doit être couvert par une protection contre les accidents du travail et les maladies professionnelles ; s’il n’est pas soumis au régime coréen, son employeur devra souscrire une assurance contre ces risques.

Le présent projet de loi est ainsi de nature à faciliter la réalisation d’investissements français en Corée du Sud et coréens en France, lesquels sont vivement souhaités par les deux parties.

La partie coréenne a ratifié l’accord bilatéral de sécurité sociale en décembre 2005 et l’arrangement administratif complétant les stipulations de l’accord a été signé en mai 2006. Son entrée en vigueur, prévue le premier jour du troisième mois suivant la réception de la dernière notification de ratification, est désormais subordonnée à la ratification française.

Conformément aux conclusions du rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (n° 3119).

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