COMMISSION de la DÉFENSE NATIONALE et des FORCES ARMÉES

COMPTE RENDU N° 7

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 20 octobre 2004
(Séance de 10 heures)

Présidence de M. Guy Teissier, président

SOMMAIRE

 

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- Audition du général Richard Wolsztynski, chef d'état-major de l'armée de l'air, sur le projet de loi de finances pour 2005 (n° 1800)


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Audition du général Richard Wolsztynski, chef d'état-major de l'armée de l'air, sur le projet de loi de finances pour 2005.

La commission de la défense nationale et des forces armées a entendu le général Richard Wolsztynski, chef d'état-major de l'armée de l'air, sur le projet de loi de finances pour 2005 (n° 1800).

Le général Richard Wolsztynski a estimé que l'atout principal de l'armée de l'air réside dans sa cohérence opérationnelle globale. Trois à cinq armées de l'air au monde seulement disposent de la capacité à se projeter sur un théâtre d'opération situé à des milliers de kilomètres et à y exercer une pression de façon durable. C'est cette cohérence opérationnelle globale qui, liée à la réactivité des différentes composantes de l'arme aérienne, permet aujourd'hui à l'armée de l'air de disposer des capacités d'action et de commandement dans un cadre multinational, notamment sous l'égide de l'Union européenne et de l'OTAN.

Dans cette perspective, il est nécessaire de préserver l'aptitude des personnels à s'adapter à toutes les formes nouvelles d'engagement, le rythme et la variété de celles-ci les contraignant à une polyvalence permanente. Aussi, la gestion des effectifs doit-elle être conduite en cohérence avec la rationalisation du réseau des bases aériennes et l'aménagement des structures, par une simplification et une décentralisation de ces dernières, alors même que l'armée de l'air rencontre des difficultés pour attirer les personnels en région parisienne. Cet aménagement, confié à un groupe de projet dénommé « Air 2010 », s'inscrit dans la logique de la loi organique relative aux lois de finances et doit conduire à une meilleure répartition des effectifs, notamment au sein de l'administration centrale. La rationalisation passe également par l'aménagement du réseau des bases aériennes, lequel pourrait se traduire par une réduction sensible du nombre des implantations, qui seraient alors modernisées, au-delà de 2010. Le groupe « Air 2010 », qui s'est adjoint les services d'une entreprise de consultants, travaille à l'élaboration d'un schéma directeur.

Le contexte opérationnel actuel met en lumière l'importance des exercices régionaux pour l'entraînement des personnels. L'armée de l'air a notamment pris part, pour la première fois, à un exercice organisé en Australie en juillet dernier, lequel réunissait les aviations australienne, américaine, singapourienne et thaïlandaise. La qualité des outils français de formation suscite un réel intérêt parmi nos partenaires européens, comme l'illustrent la mise en place de l'école franco-belge de pilotes d'avions de combat et ses perspectives d'élargissement à d'autres Etats ; ce projet laisse apparaître des perspectives d'économies substantielles dans le domaine de la formation des personnels et cette démarche de « mutualisation » doit être encouragée et étendue à d'autres spécialités.

Dans le projet de loi de finances pour 2005, le titre III permet de maintenir l'activité des forces au même niveau qu'en 2004, sous réserve de l'évolution quelque peu erratique des prix du carburant. La dotation budgétaire inscrite ne permettra pas de couvrir l'ensemble des besoins liés aux activités d'entraînement avec le prix du baril de pétrole à son niveau actuel.

Il est nécessaire de poursuivre le redressement de la disponibilité opérationnelle des différents équipements. Si d'importants progrès ont été réalisés, des difficultés subsistent et pèsent sur l'activité opérationnelle, comme l'illustrent les problèmes techniques ponctuels qui affectent actuellement les moteurs du Mirage 2000. Le rétablissement de la disponibilité n'est pas sans engendrer des coûts importants, d'autant plus que certains industriels jouissent d'une situation de monopole. Toutefois, l'effort consenti pour l'entretien des équipements doit être maintenu puisqu'il conditionne la qualité opérationnelle des unités. Il représente un engagement financier important, avec 26 % des crédits dévolus au titre V.

La cohérence opérationnelle globale et la réactivité de l'armée de l'air reposent sur la qualité du réseau des bases aériennes ainsi que sur les structures de commandement et de conduite. A ce titre, l'armée de l'air française compte parmi les seules en Europe à disposer d'une capacité de projection de structures complètes, comme elle l'a montré lors des opérations menées en Afghanistan et en République démocratique du Congo. Ces structures sont d'ailleurs parfaitement adaptées à la conduite de missions sur le territoire national, telles que celles effectuées à l'occasion du 60ème anniversaire des débarquements de Normandie et de Provence. Ces capacités de commandement et de conduite des opérations aériennes garantissent l'autonomie d'engagement de la France, le cas échéant en tant que nation-cadre, dans des opérations européennes, transatlantiques et au sein de coalitions ad hoc.

La cohérence opérationnelle globale de l'armée de l'air repose également sur le renouvellement de ses matériels. Si la loi de programmation militaire engage un effort de modernisation des équipements, il ne faut pas pour autant sous-estimer les difficultés de gestion rencontrées en 2004, qui ont conduit à décaler la satisfaction de certains besoins, notamment dans le domaine de la projection.

L'acquisition d'avions de transport à très long rayon d'action (TLRA) renforcera les capacités de projection de l'armée de l'air dès la fin de l'année 2005, alors que les avions Transall seront peu à peu retirés du service, probablement à partir de 2007. Dans le même temps, le développement de la coopération européenne offre des perspectives d'amélioration en matière de projection des forces, comme l'illustre la mise en place de l'European airlift center (EAC) le 5 juillet dernier, lequel prend la suite de l'European airlift coordination cell (EACC). L'évolution de cette structure permet la constitution d'un embryon d'état-major européen en matière de transport stratégique.

La recherche de financements innovants et, partant, d'un emploi innovant des équipements, doit être poursuivie, notamment pour le remplacement de la flotte d'avions ravitailleurs, avec le programme Multirole Transport Tanker (MRTT).

Dans le domaine de la projection de puissance, les récents aménagements apportés au programme Rafale dans la répartition entre avions monoplace et biplace ne remettent pas en cause les objectifs de la loi de programmation militaire. Avec l'arrivée du Rafale, l'armée de l'air accroît significativement ses capacités de frappe dans la profondeur et de maîtrise du milieu aérospatial. Le même objectif est poursuivi avec la livraison des missiles de croisière Scalp-EG, tandis que les reports de livraison de certains matériels, tels que l'armement air-sol modulaire (AASM) et le missile d'interception et de combat aérien (MICA), demeurent cohérents avec le déroulement des programmes qui leur sont associés.

Le retrait anticipé du service de certains matériels, comme le DC 8 Sarigue, s'est imposé du fait des coûts liés à leur entretien. Loin d'altérer la cohérence opérationnelle, ces mesures se traduisent par des économies permettant de ne pas retarder l'acquisition des équipements futurs.

L'autonomie d'action et de décision doit être préservée, car elle conditionne notre capacité d'influence au sein des alliances et des coalitions auxquelles la France prend part, ainsi que la ponctualité aux rendez-vous fixés dans le cadre de la NATO Response Force (NRF) 5 et 6. Cette autonomie repose sur le renforcement des capacités de surveillance, de reconnaissance et de communication et la mise en service opérationnelle des systèmes intérimaires de drones MALE, dès 2005, y contribuera de façon significative. La consolidation de la capacité de la France à conduire et commander des opérations s'inscrit dans une dynamique interarmées ; les opérations centrées sur des réseaux doivent favoriser la circulation de l'information provenant des différents capteurs, quelle que soit l'armée dont ceux-ci proviennent. De plus, il importe d'améliorer l'intéropérabilité de nos équipements avec ceux de nos partenaires, afin de garantir l'intégration de nos dispositifs au sein des coalitions. L'acquisition de liaisons de données tactiques constitue un élément déterminant ; elles seront intégrées sur le Mirage 2000-5 en 2008 et sur le Mirage 2000 D en 2009.

Le renforcement des capacités de réaction et de flexibilité des différentes composantes de l'armée de l'air et l'amélioration de l'interopérabilité de ses structures doivent guider le processus de modernisation en cours. Le projet de loi de finances pour 2005 permet la poursuite de ces évolutions, qui demeurent résolument inscrites dans une démarche d'ouverture vers l'Europe.

Le général Richard Wolsztynski a clos son propos en évoquant deux événements récents illustrant la permanence de l'activité de l'armée de l'air. Il a d'abord indiqué qu'un nouveau détachement de Mirage F1CR de reconnaissance était parti vers Douchanbé, au Tadjikistan, afin de soutenir l'action des forces françaises déployées en Asie centrale, pendant deux à trois semaines ; il a ensuite salué les prestations de la patrouille de France en République populaire de Chine, notamment à Hong-Kong.

Le président Guy Teissier a indiqué que la mission d'information sur le contrôle de l'exécution des crédits de la défense avait appris, en septembre dernier, que l'armée de l'air enregistrait alors un sous-effectif moyen de 4,26 % et que ce chiffre devrait atteindre 4,75 % à la fin de cette année. Il a demandé quelles étaient les conséquences de cette situation sur le fonctionnement de l'armée de l'air, notamment la maintenance de ses appareils. Se réjouissant ensuite de la mise en service du premier escadron de Rafale en 2006, il a souhaité avoir des précisions sur les mesures mises en œuvre pour préparer l'arrivée de cet appareil totalement nouveau, aussi bien en matière de formation des personnels que d'aménagement des infrastructures.

Le général Richard Wolsztynski a rappelé que l'armée de l'air avait fait le choix d'exclure tout dépassement du montant autorisé pour sa masse salariale, ce qui supposait, par construction, d'accepter un sous-effectif. Il ne faut pas regretter ce choix ; la capacité opérationnelle de l'armée de l'air repose sur le réseau de ses bases aériennes, qui rassemble une mosaïque d'unités très variées et l'appréciation des effectifs doit s'effectuer selon une logique de métiers. Il en résulte que la notion de sous-effectif moyen n'a pas de signification sur le terrain, car les ajustements sont décidés en fonction des besoins. A titre d'illustration, l'escale de la base d'Istres ne pouvant souffrir de tensions sur les effectifs en raison de son importance logistique, à la différence des escales d'autres bases, des prélèvements de personnels sont possibles sur les secondes au profit de la première en cas de difficulté majeure.

S'agissant de la gestion des effectifs, toute décision prise aujourd'hui ne saurait avoir des répercussions à très court terme sur le nombre des officiers et des sous-officiers. Les sous-officiers diplômés de l'école de Rochefort cette année ont été recrutés en 2003. En tout cas, des à-coups dans la gestion des effectifs ne sont pas satisfaisants et doivent être évités. Si, au sein des différentes catégories de personnels, ce sont les sous-officiers qui constituent l'ossature des bases aériennes, notamment dans le domaine mécanique, il ne faut pas pour autant oublier que les engagés, c'est-à-dire les militaires techniciens de l'air (MTA), assurent des missions fondamentales au sein des installations de l'armée de l'air, par exemple en matière de protection des bases et de sécurité. Or, le déficit en engagés excède 6 %. Il s'agit là d'un problème de gestion qui concerne une catégorie de personnels relativement nouvelle ; mise en place il y a seulement cinq ans et demi, elle n'est pas encore stabilisée.

Le président Guy Teissier a demandé si le déficit de MTA résultait des difficultés de recrutement ou s'il répondait à la volonté de maîtriser la masse salariale.

Le général Richard Wolsztynski a répondu qu'il ne s'agissait pas de difficultés de recrutement, en précisant que l'armée de l'air avait utilisé cette catégorie de personnels comme variable d'ajustement de court terme, car il s'agissait du seul levier d'action rapidement disponible. En outre, le déficit de 6 % de MTA constitue un point de vigilance pour la gestion de cette catégorie de personnels.

Pour ce qui concerne l'entrée en service du Rafale, l'armée de l'air est confiante. Cet événement était attendu et il sera désormais possible de déployer cet appareil et de montrer ses capacités à d'éventuels clients. Son admission au service a conduit à élaborer une approche interarmées au niveau national, la marine et l'armée de l'air devant bénéficier d'une mutualisation de sa maintenance et de sa logistique. De plus, si de nouveaux débouchés s'ouvraient à l'exportation, il serait envisageable de partager la charge de formation des équipages avec d'autres pays. Le choix de Singapour, en 2005, sera déterminant à cet égard.

Actuellement, le centre d'expérimentations aériennes militaires (CEAM) de Mont-de-Marsan forme les personnels mécaniciens. Les conditions d'emploi opérationnel du Rafale y seront également définies. L'armée de l'air se verra livrer une version véritablement polyvalente de l'appareil, puisque ses exemplaires seront configurés au standard F2, à la différence de la marine qui ne dispose que d'une version de défense aérienne. Le noyau initial des Rafale de l'armée de l'air sera constitué à Mont-de-Marsan et, fin 2005, il sera transféré vers Saint-Dizier, où d'ores et déjà des travaux d'infrastructure sont en cours. L'inauguration du premier escadron de l'armée de l'air à Saint-Dizier est prévue en 2006.

M. Jean-Louis Bernard a demandé si la récente décision de la marine nationale d'abandonner la version biplace du Rafale aura des répercussions sur la répartition de la cible de l'armée de l'air, qui est actuellement de 95 appareils monoplace et de 139 appareils biplace. Il a également souhaité avoir le sentiment du chef d'état-major de l'armée de l'air sur la proposition faite par EADS de remplacer la flotte de ravitailleurs par des A 330 MRTT, avec le recours à un financement innovant. Enfin, remarquant qu'au-delà des effets des mesures de régulation budgétaire, nombre de problèmes étaient liés à un manque de coordination entre états-majors, délégation générale pour l'armement et industriels, il a souhaité savoir quels pourraient être les moyens d'améliorer et de renforcer cette collaboration.

Le général Richard Wolstzynski a indiqué que, pour le programme Rafale, la cible initiale prévoyait deux tiers d'appareils biplace et un tiers d'appareils monoplace. Cette répartition avait été retenue à l'issue de la guerre froide et sa révision était inéluctable en raison de l'évolution du contexte géostratégique. Plusieurs facteurs doivent être pris en compte. La longueur des missions varie selon les composantes des forces aériennes ; des missions comportant sept heures de vol et plus, comme celles conduites en Afghanistan à partir de la base de Manas, nécessitent, compte tenu des contraintes pesant sur l'équipage, une configuration biplace des appareils ; en revanche, une patrouille composée de plusieurs appareils peut comprendre des unités biplace et d'autres monoplace. La nature des missions et, corollairement, la mise en œuvre des systèmes d'armes, revêtent également une grande importance pour le choix d'une version biplace ou monoplace De plus, dans la mesure où l'armée de l'air assure seule la formation initiale de ses pilotes, il est nécessaire de pouvoir disposer d'appareils biplace opérationnels, c'est-à-dire dotés de systèmes d'armes. Il serait donc dangereux de sous-dimensionner la flotte de Rafale biplace à l'occasion de la révision du ratio. Ce risque n'avait d'ailleurs peut-être pas été suffisamment pris en compte lors de la constitution de la flotte des Mirage 2000 biplace, laquelle n'a été dimensionnée qu'au regard des besoins strictement nationaux, sans tenir compte des demandes de formation qui seraient faites par les pays acquérant le Mirage 2000 ; de fait, cette flotte, très sollicitée aujourd'hui, s'use trop vite. Au total, au regard des aspects opérationnels et de formation, le ratio d'avions Rafale biplace et monoplace a été revu, pour arriver progressivement à un équilibre entre les deux types d'appareil. A terme, cette proportion pourrait même s'inverser, avec deux tiers d'avions monoplace et un tiers d'avions biplace. A ce jour, les deux commandes déjà passées concernent pour 40 % des appareils biplace, ce qui constitue déjà une inversion de la répartition initiale.

S'agissant des ravitailleurs, les Australiens seront les premiers à acquérir une flotte d'A 330 MRTT. Ils devraient être suivis des Britanniques, même si leur processus décisionnel n'est pas encore achevé. La France pourrait être la troisième à adopter ce programme, ce que l'armée de l'air souhaite, car elle ne dispose à ce jour que de quatorze avions ravitailleurs : onze d'entre eux ont été modernisés, mais les trois autres, qui ne l'ont pas été, seront prioritairement utilisés sur le territoire national. S'agissant des modalités d'acquisition, au-delà du recours au financement innovant, concept qui demeure flou, c'est, plus fondamentalement, d'abord une logique d'emploi innovant, où l'armée de l'air ne serait plus le seul propriétaire des avions qu'elle utilise, qui s'impose. Il convient donc de savoir avec quels partenaires s'engager et selon quelles modalités. Certaines garanties doivent absolument être préservées. Seule, la partie des avions ravitailleurs ne contribuant pas aux forces aériennes stratégiques pourrait être utilisée pour un emploi innovant et serait donc disponible pour un usage non militaire.

Si la collaboration tripartite entre les états-majors, la délégation générale pour l'armement et les industriels s'améliore compte tenu des actions en cours, il subsiste encore quelques marges de progrès. L'armée de l'air souhaite l'approfondissement de cette collaboration et la mise en service du Rafale au standard F2 sera l'occasion de mettre en pratique cette orientation.

M. Yves Fromion a souhaité avoir des précisions sur le plan « Air 2010 » : ce plan correspond-il à une modification du dispositif opérationnel ou s'agit-il seulement d'une évolution répondant à un besoin de rationalisation ? Il a également souhaité avoir plus d'informations sur la mise en place de l'école franco-belge de pilotes d'avion de combat. Enfin, il a demandé si l'armée de l'air disposait d'une réserve de carburant acquise au fil du temps, à l'instar de la marine.

M. René Galy-Dejean a demandé si, dans le cadre du projet « Air 2010 », il serait envisageable d'instaurer à terme une mutualisation des bases en Europe, compte tenu des perspectives d'évolution du groupe aérien européen. Il a également souhaité connaître les incidences de l'arrivée en service de drones de combat sur la notion même de base aérienne.

Le général Richard Wolsztynski a estimé que la réflexion engagée par le groupe de projet « Air 2010 » était nécessaire au regard des délais relativement courts, mais aussi afin d'obtenir l'adhésion des personnels au processus de réforme. Les personnels ont d'ailleurs dans l'ensemble bien compris que, même si les crédits dont dispose l'armée de l'air étaient maintenus à leur haut niveau actuel, l'entretien du patrimoine considérable que constituent les bases aériennes resterait difficile à réaliser. Il convient donc d'adapter le volume des infrastructures à celui de la flotte, le nombre d'avions de combat étant passé de 450 en 1992 à un peu plus de 300 aujourd'hui. Le projet « Air 2010 » doit également engager une réflexion sur la nécessaire simplification des structures de l'administration centrale, l'existence de trois commandements distincts pour les flottes de combat, de transport et de ravitaillement n'apparaissant plus justifiée, ainsi que sur la déconcentration de cette administration ; un tel processus permettra de tenir compte de la faible attractivité de la région parisienne pour les personnels. Enfin, le processus de restructuration des bases doit être mené dans un cadre interarmées, tout particulièrement avec l'armée de terre, ce qui n'avait pas été le cas lors de la précédente restructuration.

En ce qui concerne la mutualisation des moyens à l'échelle européenne, l'A 400 M constituera une occasion remarquable de fédérer l'utilisation des plateformes, notamment en ce qui concerne la formation. La mise en place de l'école franco-belge de pilotes d'avion de combat sur la base de Cazaux progresse très rapidement. D'ores et déjà, six Alphajets, trente mécaniciens et des instructeurs sont présents et les premiers élèves belges sont arrivés. Singapour, la Grèce et la Suisse semblent intéressés par cet outil de formation et il n'est pas à exclure que les Allemands finissent également par s'y intéresser, compte tenu du coût élevé de la formation dispensée à leurs pilotes de chasse aux Etats-Unis.

En ce qui concerne les stocks de carburant, l'armée de l'air peut s'appuyer sur les réserves stratégiques dont dispose l'état-major des armées et sur celles du service des essences.

M. Jérôme Rivière a souligné que l'un des objectifs principaux de la loi de programmation militaire 2003-2008 avait été de mettre l'accent sur le maintien en condition opérationnelle, afin de rétablir le niveau de disponibilité des équipements. Il a souhaité savoir si cette disponibilité d'ensemble et l'approvisionnement en pièces détachées étaient satisfaisants, soulignant par ailleurs que le niveau des heures d'entraînement des pilotes d'avion de combat atteignait désormais le seuil minimal fixé par l'OTAN.

Le général Richard Wolsztynski a estimé que les structures de maintenance permettaient d'assurer une bonne disponibilité des appareils projetés sur des théâtres extérieurs et de ceux affectés aux écoles de pilotage en regard du contrat opérationnel fixé. La principale difficulté est d'accepter ce paradoxe entre le taux de disponibilité des matériels, qui se situe aux alentours de 65 %, et leur modernité, laquelle laisse supposer un taux bien supérieur. S'il est souvent reproché à l'armée de l'air une forme de « surmaintenance », il convient de garder à l'esprit qu'à la différence des flottes commerciales, la flotte militaire doit être préservée pour assurer une durée de vie des matériels de l'ordre de trente-cinq ans, ce qui implique de lourds cycles de maintenance. De plus, les opérations d'entretien liées aux besoins de disponibilité instantanée des matériels ne sont pas toujours bien perçues par les personnels.

En trois ans d'existence, la structure intégrée du maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques de la défense (SIMMAD) a réussi à faire passer le taux moyen de disponibilité d'un appareil sur deux à deux appareils sur trois, ce qui constitue une performance remarquable. Le taux de disponibilité des avions de combat frôle 70 %, mais celui des avions de transport diminue en raison du vieillissement des Transall. Le coût du maintien en condition opérationnelle peut être parfois jugé excessif lorsqu'il résulte de situations de monopole de certains industriels. Ainsi, Air France international a été amené à augmenter significativement le prix de ses prestations de maintenance. De ce fait, le coût d'entretien du DC 8 Sarigue a atteint le budget de fonctionnement de six bases aériennes, alors que, dans le même temps, se profilait la perspective d'une modernisation de cet appareil, qui aurait encore alourdi la facture. Dans la mesure où d'autres moyens de renseignement électronique sont disponibles, la prise en compte des arguments opérationnels et économiques a conduit au retrait du DC 8 Sarigue.

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