COMMISSION DES FINANCES,

DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

COMPTE RENDU N° 17

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mardi 5 novembre 2002
(Séance de 18 heures 30)

Présidence de M. Michel Bouvard, Vice-Président

SOMMAIRE

 

pages

- Suite de l'examen de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2003 (n° 230)

· Départements d'outre-mer

· Anciens combattants et article 62

· Territoires d'outre-mer

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La Commission a poursuivi l'examen de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2003 (n° 230).

La Commission a tout d'abord examiné, sur le rapport de M. Alain Rodet, Rapporteur spécial, les crédits des départements d'outre-mer.

M. Alain Rodet, Rapporteur spécial, a rappelé l'effort budgétaire réalisé en faveur de l'Outre-mer durant les cinq dernières années. Puis il a présenté le budget qui devrait s'élever en 2003 à 1.084 millions d'euros, soit une hausse de 0,5% par rapport au budget voté en 2002, et de 1,5% à périmètre constant. Cependant, ces crédits ne représentent que 11% de l'effort financier global de l'Etat en faveur de l'Outre-mer.

Les moyens des services, qui représentent 16,5% des crédits du budget et qui devraient s'élever à 178,92 millions d'euros, enregistrent une baisse de 16%. Les interventions publiques connaissent une hausse, modeste, de 0,1%, mais Mayotte et Saint-Pierre et Miquelon bénéficient de crédits supplémentaires. Les investissements exécutés par l'Etat devraient s'élever à 6 millions d'euros. Enfin le présent projet prévoit de consacrer 268 millions d'euros aux subventions d'investissements, soit une hausse de 1,56%. Ce budget représente un effort financier important, même si on peut regretter que sa progression soit moins importante que celle des années précédentes.

L'Etat maintient sa politique en faveur de l'emploi dans les départements d'outre-mer. Cela paraît essentiel en raison de leur taux de chômage élevé. Le FEDOM, qui constitue la colonne vertébrale de cette politique, devrait financer près de 80.500 mesures pour un montant de 457,58 millions d'euros. Le FEDOM finance des actions traditionnelles comme les emplois solidarité ou les emplois jeunes. Cependant, depuis la loi d'orientation pour l'Outre-mer du 13 décembre 2000, de nouveaux dispositifs ont été mis en place : le projet initiatives-jeunes, le congé-solidarité et l'allocation de retour à l'activité. De plus, la loi d'orientation a aussi prévu l'alignement du RMI dans les départements d'outre-mer sur le niveau du RMI métropolitain, ce qui constitue une mesure essentielle. En outre, le présent projet finance le passeport-mobilité qui devrait permettre d'ouvrir de nouvelles perspectives aux étudiants.

Par ailleurs, les crédits attribués à l'action sociale et culturelle devraient s'élever à 44,6 millions d'euros en 2003, avec un effort particulier en faveur de Mayotte. Ce budget finance aussi le service militaire adapté (SMA), dont les missions ont évolué depuis 1997. 390 nouveaux postes vont être créés dans les DOM et à Mayotte, portant l'effectif à 2.492 volontaires.

Le logement fait l'objet d'une attention particulière. Il est financé par des crédits regroupés sur une ligne budgétaire unique totalement fongible et laissant au niveau local une possibilité d'adaptation. Elle sera dotée de 287,32 millions d'euros en autorisations de programme, et 173 millions d'euros en crédits de paiement. Cet effort concernera environ 15.000 logements dont 10.000 en construction neuve et 5.000 en amélioration. S'agissant des subventions aux collectivités locales, le Rapporteur spécial a tenu à souligner les efforts consentis en faveur du fonds mahorais de développement et en faveur des infrastructures de Guyane.

Enfin, le Rapporteur spécial a indiqué le montant des transferts publics qui représente 2.600 euros par habitant en Guadeloupe, 3.500 euros par habitant en Martinique, 3.300 euros par habitant en Guyane, 4.500 euros par habitant à la Réunion, 8.000 euros par habitant à Saint-Pierre-et-Miquelon et 1.600 euros par habitant à Mayotte. Ces chiffres mettent en évidence la nécessité d'un effort budgétaire particulier en faveur de Mayotte.

Usant de la faculté que l'article 38 du Règlement de l'Assemblée nationale confère aux députés d'assister aux réunions des commissions dont ils ne sont pas membres, Mme Béatrice Vernaudon a souhaité savoir si les ratios détaillés par le Rapporteur spécial prenaient en compte l'ensemble des crédits du budget de l'État ou les seuls crédits du ministère de l'Outre-mer.

Rappelant que le budget de l'Outre-mer ne représente que 11 % des crédits destinés aux DOM, M. Alain Rodet, Rapporteur spécial, a précisé que les données qu'il avait exposées prenaient en compte l'ensemble des crédits affectés à l'Outre-mer dans le budget de l'État.

M. Michel Bouvard, Président, a souhaité savoir si la fongibilité des crédits du logement avait permis d'améliorer le problème de sous-consommation des crédits constatés lors des exercices précédents. Quels sont les taux de consommation des crédits des fonds européens 2000-2006 pour les DOM ? Le tourisme étant le principal porteur d'emplois et d'investissements, les programmes de formation incluent-ils une démarche qualité, notamment en matière d'accueil ? Les rapports des professionnels du tourisme dénoncent, en effet, fréquemment les déficiences en termes de qualité d'accueil dans les DOM.

M. Alain Rodet, Rapporteur spécial, a indiqué que, comme l'a montré le rapport de M. Bertrand Fragonard, le problème de sous-consommation des crédits était général, même si la problématique de l'outre-mer se caractérise par certaines spécificités. Le taux de consommation des crédits est de 45 % fin août 2002 et 38,7 % pour l'aide au logement. Ces taux ne sont pas satisfaisants.

M. Michel Bouvard, Président, constatant que la fongibilité n'avait pas permis d'améliorer la situation, M. Alain Rodet, Rapporteur spécial, a indiqué que la spécificité du problème foncier outre-mer rend toujours délicate la mobilisation des crédits. Il a ajouté que la consommation des fonds européens pose les mêmes problèmes qu'en métropole. Enfin, la question de la formation à l'accueil touristique est effectivement un enjeu important et un effort supplémentaire pourrait être mené dans les Antilles. Toutefois, l'exemple des mesures de sécurité extrêmes en faveur des touristes à Saint-Domingue invite à ne pas oublier la dimension éthique qui s'attache à cette problématique. Il ne faut pas oublier, du reste, que la zone Caraïbes fait face à des problèmes spécifiques, à la suite des attentats du 11 septembre 2001 et des difficultés d'AOM Air Liberté. Le budget doit chercher, en outre, à maintenir un niveau de vie dans les DOM comparable à celui de la métropole.

Le Rapporteur spécial s'en remettant à la sagesse de la Commission, cette dernière a adopté les crédits des Départements d'Outre-mer.

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La Commission a ensuite examiné, sur le rapport de M. Xavier Bertrand, Rapporteur spécial, les crédits des Anciens combattants.

M. Xavier Bertrand, Rapporteur spécial, a indiqué que les crédits du secrétariat d'État à la Défense chargé des Anciens combattants s'élèveront en 2003 à 3.486,23 millions d'euros, contre 3.630,89 millions d'euros en loi de finances initiale pour 2002. Cette baisse de 3,9 % des crédits s'explique par la baisse du nombre des ressortissants du ministère, évaluée à 4 %. Des marges de manoeuvre atteignant 80 millions d'euros ont été dégagées permettant de financer des mesures nouvelles. Le plafond majorable de la rente mutualiste du combattant est ainsi relevé de 115 à 122,5 points, pour un coût de 6,69 millions d'euros. Les actions de mémoire voient leurs crédits progresser de 157.000 euros, un bilan médical gratuit sera institué pour les victimes de psychotraumatismes, les crédits de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC) seront confortés, tandis que la dotation de l'Institution nationale des invalides (INI) sera relevée. Enfin, suite à l'arrêt du Conseil d'État « Diop », des provisions permettant d'engager la décristallisation des pensions des anciens combattants ressortissants des États antérieurement placés sous souveraineté française seront inscrites au budget.

S'agissant des prestations servies par le secrétariat d'État, il convient de souligner que la dette viagère est marquée par une double évolution. La diminution du nombre des parties prenantes, estimée à 4 % pour l'année 2003, entraînera une baisse des crédits des pensions d'invalidité, partiellement atténuée par l'application du rapport constant. Au total, la baisse de ces crédits se limite à 2,9 %, soit 71,4 millions d'euros. En revanche, les crédits affectés à la retraite du combattant connaissent une augmentation. En raison de l'entrée massive dans le dispositif des Anciens Combattants d'Afrique du Nord, ceux nés en 1937 atteignant l'âge de 65 ans en 2002, et des évolutions de dépenses qu'elle implique, les crédits augmentent - malgré plusieurs mesures d'ajustement négatives et positives - de près de 1 % par rapport à 2002. Dans l'ensemble, ces deux évolutions opposées conduisent à une légère baisse des crédits de la dette viagère (- 2,2 % par rapport à 2002).

La diminution du nombre des pensionnés est à l'origine d'une baisse de 13,4 % des crédits destinés aux soins médicaux. Les autres crédits liés aux soins médicaux gratuits, tels que le thermalisme, les maladies mentales et les frais de convocation des anciens militaires devant les centres de réforme diminuent de 13,8 % par rapport à 2002. S'agissant du thermalisme, il convient de souligner que le Gouvernement a décidé de porter, par un prochain arrêté interministériel, la prise en charge des frais d'hébergement de 3 à 5 fois le taux de la Sécurité sociale. En effet, cette pratique avait dû être abandonnée en 2000, le Conseil d'État ayant décidé qu'elle était dépourvue de base réglementaire. Malgré la diminution du nombre de pensionnés, les crédits correspondant au remboursement à la SNCF de la prise en charge des frais de déplacement sont quasiment stables à 6,77 millions d'euros (- 1,3 %). Les dotations « Indemnités et pécules », désormais inscrites au chapitre 46-04 (article 30), sont maintenues à leur montant établi par la loi de finances pour 2002.

L'insertion du secrétariat d'État aux anciens combattants et victimes de guerre au sein du ministère de la défense, intervenue à la fin de l'année 1999, s'est traduite, sur le plan budgétaire, par l'intégration des dépenses de rémunérations et charges sociales de l'ancien secrétariat d'État au sein du budget du ministère de la défense et la fusion des effectifs budgétaires de ces deux administrations. Il est regrettable qu'il ne soit plus possible de réaliser un suivi particulier de la situation des personnels de l'ancien secrétariat d'État aux Anciens combattants. Cette situation est, en outre, incompatible avec l'entrée en vigueur de la loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001. Les crédits de personnel de l'ONAC enregistrent 50 suppressions d'emplois d'adjoints administratifs dans les services départementaux. Ces suppressions étaient inscrites dans le contrat d'objectifs - discuté lors du conseil d'administration du 7 mars 2002 - entre l'établissement public et l'État. Ces engagements pris dans le cadre du programme « nouvel élan pour l'ONAC », adopté à une très large majorité, tendent à assurer la pérennité de l'Office. Les emplois mémoire, qui sont des emplois jeunes, devraient ainsi être pérennisés - et pas seulement pour l'année en cours - et des contractuels de catégorie A recrutés pour développer des actions de mémoire. L'ensemble de ces mesures doit permettre le bon fonctionnement de l'Office et assurer son avenir. Par ailleurs, les moyens administratifs de l'Institution nationale des invalides (INI) seront renforcés grâce à 20 transformations d'emplois. Le projet de loi de finances prévoit la consolidation des moyens de fonctionnement des établissements publics. L'ONAC connaît une diminution de sa dotation de fonctionnement de 0,9 million d'euros. Cette baisse de 2,3 %, qui est la conséquence financière de la suppression nette de 46 emplois, ne doit pas cacher la progression de la part de la subvention de l'État, strictement liée au fonctionnement de l'établissement. La dotation de l'INI pour 2003 progresse de 4,2 % après une baisse de 9 % l'an dernier, pour s'établir à 6,5 millions d'euros. Ces crédits devraient permettent de poursuivre la modernisation de l'Institution, suite à son insertion dans le service public hospitalier, effectif depuis le 1er juin 2001. Grâce à sa démarche d'amélioration de la qualité et de la sécurité des soins, l'INI devrait être accréditée par l'Agence nationale d'évaluation et d'accréditation en santé d'ici à la fin de l'année 2002.

Le projet de budget met en œuvre des mesures favorables au monde combattant. L'ajustement des pensions à l'évolution des rémunérations de la fonction publique, en application du rapport constant, justifie l'inscription d'un ajustement positif de 2,916 millions d'euros au titre de la dette viagère (chapitres 46-20 et 46-21) et une provision de 2,845 millions d'euros pour financer la revalorisation prévue pour 2003.

Ce projet de budget est aussi l'occasion de faire un premier pas en faveur de la décristallisation des pensions. Le Conseil d'État a, dans arrêt du 30 novembre 2001 « Diop », estimé que les dispositions législatives instaurant une différence de traitement entre anciens agents publics à raison de leur nationalité constituaient une discrimination au sens de l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme. Pour anticiper le financement de la décristallisation des pensions, le Gouvernement propose de provisionner 58,25 millions d'euros au titre des pensions militaires d'invalidité et 14,25 millions d'euros au titre de la retraite du combattant, le dispositif législatif correspondant devant être adopté en 2003. La dotation du Fonds de solidarité pour les anciens d'Indochine et d'Afrique du Nord passe de 90,71 millions d'euros en 2002 à 50 millions d'euros en 2003, soit une forte diminution de 55 %. Cette évolution s'explique par le fait que la classe d'âge la plus importante des allocataires du Fonds de solidarité a atteint 60 ans en 2001 et 2002 ainsi que par l'amélioration de la situation économique générale. Le chapitre 46-10 comprend un article 20 dont la finalité est de retracer les crédits destinés à la mise en place du dispositif « ARPE - Anciens combattants », institué par l'article 121 de la loi de finances initiale de 1999. Cette ligne, qui était déjà en baisse de 75 % l'an dernier, n'est désormais plus dotée. Cet état de fait traduit, en réalité, l'achèvement de la mise en œuvre de cette allocation.

Par ailleurs, le projet de loi de finances accentue l'effort engagé depuis quatre ans pour la revalorisation des rentes mutualistes du combattant. Elles concernent un nombre élevé de personnes, puisqu'on estime le nombre de leurs bénéficiaires à 360.000, pour une rente d'un montant annuel moyen de 869 euros. Ces rentes bénéficieront, ainsi, d'une mesure nouvelle permettant le relèvement de 115 à 122,5 points d'indice de pension militaire d'invalidité. Cette mesure, d'une ampleur sans précédent, les précédents relèvements se limitant à 5 points, est proposée à l'article 62 du projet de loi de finances. Elle se traduit par une mesure nouvelle de 6,69 millions d'euros. Elle permettra d'améliorer les conditions de vie des anciens combattants, membres de sociétés mutualistes au moment de leur retraite.

L'augmentation de 1,52 million d'euros des crédits d'action sociale de l'ONAC résultant de la loi de finances pour 2002 n'est pas reconduite pour 2003. Il est souhaitable que le Gouvernement dépose un amendement de crédits maintenant la dotation au niveau de 2002 afin d'assurer le financement de ses missions d'action sociale, principalement à destination des veuves. Les dotations d'action sociale, qui atteignent 10,6 millions d'euros, doivent permettre à l'Office de poursuivre ses actions en faveur de la résolution des problèmes liés au vieillissement (dépendance, maintien à domicile et placement en établissement). Au total, ce sont 28.447 ressortissants du ministère qui auront bénéficié, en 2002, de l'action sociale menée par l'Office.

Le projet de loi de finances renforce considérablement l'effort de mémoire, en favorisant notamment la restauration et la préservation du patrimoine. Compte tenu de la réforme du secrétariat d'État, les moyens consacrés à la mémoire sont inscrits sur deux budgets, les crédits de fonctionnement venant abonder le budget du ministère de la Défense, les crédits de subventions aux associations demeurant sur celui des Anciens combattants. Cette présentation budgétaire manque de lisibilité et de cohérence. La question du regroupement de ces crédits sur l'un ou l'autre des deux fascicules est particulièrement complexe, mais devra être résolue avant l'entrée en vigueur de la loi organique relative aux lois de finances. Les crédits inscrits à la section des anciens combattants progresseront de 4,1 % en 2003, après une baisse de 22 % en 2002, pour s'établir à 2,37 millions d'euros. Cette progression s'explique par l'inscription d'une mesure nouvelle d'un montant de 157.000 euros destinée à financer des actions de mémoire. Il convient aussi de souligner la forte progression des crédits affectés aux travaux de rénovation et d'aménagement des lieux de mémoire. Cette priorité se traduit par l'inscription de 1,16 millions d'euros d'autorisations de programme et de 6,6 millions d'euros de crédits de paiement (+ 35,2 %). Il faut rappeler que ces crédits figurent au fascicule budgétaire de la défense.

M. Jean-Pierre Kucheida a jugé que ce budget, en baisse de 4 %, était particulièrement décevant, même si la baisse des parties prenantes atteint elle aussi 4 %. En effet, ces dernières années, le taux de réduction des crédits des Anciens combattants se limitait à la moitié de la baisse de celui du nombre des ressortissants. Il a d'ailleurs rappelé qu'il avait réclamé, en vain, que ce budget soit maintenu constant pour une année, permettant ainsi de dégager d'importantes marges de manœuvre en faveur du monde combattant. Le relèvement de 7,5 points du plafond majorable de la rente mutualiste ne concerne que 20 % des anciens combattants, qui ne sont pas, en outre, les plus démunis. S'agissant du thermalisme, la solution trouvée doit être saluée.

Des organisations d'anciens combattants ont demandé que la carte du combattant soit attribuée dès 4 mois de service en Afrique du Nord, comme c'est le cas pour certaines forces de police. Comment la remise à niveau des maisons de retraite sera-t-elle menée à terme ? Les actions de mémoire doivent être encouragées car elles permettent aux jeunes générations de prendre conscience de l'ampleur des sacrifices de leurs aînés. La participation d'historiens à ces actions, illustrée, par exemple, par la venue récente de M. Pierre Miquel dans le Pas-de-Calais, permet de rendre vivants les événements de notre histoire. S'agissant enfin des crédits d'action sociale de l'ONAC qui ne sont pas reconduits, il est souhaitable d'adopter un amendement assurant le financement de cette mission essentielle.

Après s'être associé aux propos de M. Jean-Pierre Kucheida sur les crédits d'action sociale de l'ONAC, M. Alain Rodet a souligné l'importance de l'effort à accomplir en faveur de la mémoire. Même si l'essentiel des financements de ces actions provient du ministère de la défense, les services des affaires culturelles interviennent aussi, sur les questions historiques, dans des musées de la Résistance et de la déportation, même si cette intervention est parfois pointilleuse. Il faut également encourager les concours de l'État aux projets développés par les collectivités locales.

Après avoir souligné la qualité du travail du Rapporteur, M. Laurent Hénart a demandé s'il existait un ratio permettant d'appréhender l'effort que l'État consacre à chaque ancien combattant. Le travail culturel autour de la mémoire est essentiel.

Après avoir rappelé qu'il avait demandé des statistiques au gouvernement sur ce sujet, M. Jean-Pierre Kucheida a souhaité avoir des précisions sur la mortalité des anciens combattants ayant servi en Algérie.

Après s'être associé aux propos de Laurent Hénart sur la qualité et la précision du travail du Rapporteur, M. Jérôme Chartier s'est interrogé sur la possibilité de créer une journée nationale du souvenir, complétant les célébrations existantes, afin de commémorer l'ensemble des sacrifices accomplis pour la Nation.

Après avoir rappelé qu'élu d'une région libérée à la fois par le Maquis et les Tabors marocains, il était particulièrement sensible à la question de la décristallisation, M. Michel Bouvard, Président, a rappelé qu'un amendement permettant d'indemniser les orphelins de déportés pour faits de Résistance a été frappé d'irrecevabilité. Pour autant, les mesures prévues pour les orphelins de déportés victimes des mesures antisémites devraient être étendues aux orphelins de déportés pour faits de Résistance. Il s'agirait d'une mesure de moralisation.

En réponse aux différents intervenants, M. Xavier Bertrand, Rapporteur spécial, a apporté les précisions suivantes :

- le Gouvernement, inscrivant pourtant sa politique dans une logique de maîtrise de la dépense publique, a su dégager des marges de manœuvre de 80 millions d'euros, quatre fois supérieures à celles de l'an dernier ;

- les rentes mutualistes du combattant concernent 360.000 anciens combattants. L'effort, d'un montant de 6,69 millions d'euros, destiné à améliorer leur situation n'est donc pas neutre ;

- la prochaine parution d'un arrêté interministériel relatif aux frais d'hébergement occasionnés lors de cures thermales permettra de donner une base réglementaire solide à la prise en charge offerte aux anciens combattants ;

- la carte du combattant étant attribuée à certains membres des forces de police dès quatre mois de présence en Afrique du nord, il conviendra de réfléchir à un traitement plus équitable pour les autres anciens combattants d'Afrique du Nord ;

- l'effort de mise en sécurité et d'habitabilité des maisons de retraite s'intensifie. En effet, la subvention d'investissement, imputée au budget de la défense, s'établira à 4,7 millions d'euros en autorisations de programme, contre 1,524 millions d'euros en 2002 (+ 208 %) et à 2,79 millions d'euros en crédits de paiement ;

- l'utilisation des crédits de mémoire peut donner d'excellents résultats. La mise en place de correspondants et d'assistants de mémoire dans les régions doit être encouragée. Seuls les ministères de la défense et des anciens combattants affectent des crédits à des opérations valorisant la mémoire combattante, même s'ils travaillent en étroite collaboration avec les autres ministères. Ainsi, une circulaire conjointe du secrétariat d'État et du ministère de l'Éducation nationale a-t-elle été signée en 2001, tout comme des conventions avec le ministère de la culture. La mémoire vivante et orale doit être valorisée. Les collectivités locales interviennent fréquemment dans le domaine de la mémoire même si seulement deux régions ont inscrit des crédits à cet effet dans leur contrat de plan avec l'État. Le mécénat, s'il s'exerce dans un cadre strict afin ne pas dénaturer la mémoire, pourrait être encouragé ;

- un amendement parlementaire tendant à augmenter les crédits d'action sociale de l'ONAC sera irrecevable. En conséquence, il convient de demander au Gouvernement de présenter un amendement de crédits, comme il l'a fait lors des précédents débats budgétaires, même si cette formule n'est pas d'une parfaite orthodoxie budgétaire ;

- le conseil d'administration de l'ONAC du mois d'octobre a adopté le programme « nouvel élan » à une très large majorité, traduisant une volonté commune d'assurer l'avenir de l'Office, ce programme repose sur les recommandations de l'Inspection générale des finances tendant à plus de cohérence et de rationalité. Le taux de consommation des crédits de l'ONAC doit être le meilleur possible, surtout en matière sociale ;

- la dotation par ancien combattant est légèrement supérieure à celle observée en 2002. Elle dépasse 7.800 euros par pensionné.

M. Jean-Pierre Kucheida a souligné que cette progression était due à l'inscription de dotations anticipant la décristallisation des pensions.

M. Xavier Bertrand, Rapporteur spécial, a indiqué que l'observatoire des vétérans, dont la création est prévue en 2003, pourra se pencher sur le cas des anciens combattants d'Algérie et pas seulement sur le syndrome du Golfe. L'Union européenne a proposé la mise en place d'une journée européenne du souvenir. S'il existe un memorial day aux États-Unis, il n'est pas souhaitable qu'une date unique se substitue aux différentes manifestations célébrées en France, auxquelles la population est particulièrement attachée. Le ministre agit avec méthode, en proposant aux associations d'anciens combattants de discuter, avec elles, de l'ensemble des questions qui les préoccupent, afin de déterminer celles qui pourront être réglées. En outre, il a annoncé la création d'une commission présidée par une personnalité indépendante et dont l'impartialité sera incontestée, chargée de faire des propositions afin de ne pas introduire d'iniquité entre les orphelins de déportés.

Sur la proposition du Rapporteur spécial, la Commission a adopté les crédits des anciens combattants.

Article 62 : Augmentation du plafond majorable de la rente mutualiste du combattant

La Commission a adopté, sur proposition du Rapporteur spécial, l'article 62, rattaché à ce budget, sans modification.

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La Commission a enfin examiné, sur le rapport de M. Victor Brial, Rapporteur spécial, les crédits des Territoires d'Outre-mer et de la Nouvelle-Calédonie.

M. Victor Brial, Rapporteur spécial, s'est tout d'abord félicité de voir l'outre-mer disposer au sein de la structure gouvernementale, d'un ministère, et non plus d'un secrétariat d'État. Il a souligné que le problème des reports de crédits était crucial pour ce budget et que des négociations avec le ministère étaient actuellement en cours afin de parvenir à des solutions concrètes pour améliorer la gestion des crédits.

Le projet de loi de finances prévoit un budget de 1.084,07 millions d'euros pour le ministère de l'outre-mer, soit une hausse de 0,56 % par rapport au budget voté en 2002. Cependant, il convient de souligner que l'augmentation réelle, à périmètre constant, est de 1,5 %. En effet, une expérimentation concernant la gestion des crédits de la préfecture de la Martinique conduit à transférer, en 2003, 10,5 millions d'euros de crédits de rémunération du personnel de cette préfecture au budget du ministère de l'intérieur, les crédits de fonctionnement étant déjà inscrits à cette section ministérielle.

Cependant, le budget de l'outre-mer ne retrace qu'une partie des moyens budgétaires consacrés aux territoires d'outre-mer (TOM). L'État accompagne le développement économique des pays et territoires d'outre-mer par des crédits qui transitent par l'ensemble des ministères. Ainsi, en 2003, les pays et territoires d'outre-mer devraient bénéficier au total de 1.852,32 millions d'euros, soit une augmentation de 3,5 % par rapport aux crédits votés en 2002.

Les crédits relevant du budget du ministère de l'outre-mer consacrés aux TOM représentent 227,57 millions d'euros, soit 12,28 % de l'ensemble des crédits de l'État destinés à ces territoires. Les crédits du ministère affectés aux TOM sont en hausse de 5,92 % par rapport aux crédits votés en 2002. Les dépenses ordinaires représentent 171,22 millions d'euros, en hausse de 10,57 % par rapport à 2002. Les dépenses en capital devraient représenter 52,29 millions d'euros, en baisse de 6,77 %. Cette diminution résulte principalement de la suppression d'un chapitre ayant conduit à redéployer 17,951 millions d'euros, suite aux conclusions d'un rapport de la Cour des comptes sur le problème des arrêtés de répartition et à la dénonciation, par les parlementaires, d'un manque de transparence dans le budget de l'Outre-mer. Les moyens affectés à la Nouvelle-Calédonie représentent 63,6% des crédits du ministère attribués aux TOM et connaissent une baisse de 2,55%. Les crédits affectés à la Polynésie française représentent 20,8 % des crédits, en hausse de 1,37 %. Enfin, ceux attribués à Wallis-et-Futuna représentent 4% du budget, en hausse de 11,5 %.

S'agissant des dispositifs communs aux pays et territoires d'outre-mer, les moyens des services atteignent 175,97 millions d'euros. Les dépenses de personnel s'élèvent à 142,82 millions d'euros. L'effectif total des personnels de l'État affecté à l'outre-mer devrait atteindre 5.782 personnes en 2003, contre 5.572 en 2002, soit une augmentation de 3,8 %. La principale mesure nouvelle demandée concerne la création d'emplois d'attachés permettant la régularisation des agents contractuels d'assistance technique placés auprès des secrétariats généraux pour les affaires régionales.

Sont également demandées des créations et des transformations d'emplois en Nouvelle-Calédonie en application de la loi organique n°99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie, afin que les emplois créés soient en adéquation avec les possibilités de reclassement réelles des agents territoriaux ayant opté pour l'État, ainsi que des transformations d'emplois, en Polynésie française, pour que le haut-commissariat puisse disposer des postes budgétaires correspondants à ses besoins réels.

De plus, le passeport mobilité a été mis en place à compter du 1er septembre 2002. La politique d'action sociale et culturelle recouvre trois dispositifs dans les TOM : les mesures d'insertion, les bourses d'enseignement supérieur et la formation professionnelle, dont les programmes en faveur des cadres à Wallis-et-Futuna, et en Nouvelle-Calédonie. S'agissant du service militaire adapté, 92  nouveaux postes de volontaires devraient être créés dans les TOM portant l'effectif à 460 volontaires.

En ce qui concerne les subventions aux collectivités locales, les communes de Polynésie française et de Nouvelle-Calédonie et les circonscriptions de Wallis-et-Futuna perçoivent la dotation globale de fonctionnement des communes. On soulignera que Wallis-et-Futuna a perçu 506.698 euros au titre de subvention de fonctionnement en 2001 et que le budget 2003 prévoit une subvention de 926.698 euros, notamment destinée à améliorer la desserte intérieure. S'agissant des subventions d'investissement, au chapitre 67-51 « travaux divers d'intérêt local », les autorisations de programme affectées aux TOM s'élèvent à 762.000 euros en autorisations de programme et 180 000 euros en crédits de paiement.

Le régime d'aide fiscale prévu en faveur des investissements productifs réalisés dans les départements et territoires d'outre-mer est issu de la loi de finances rectificative du 11 juillet 1986. Il a été ensuite régulièrement modifié jusqu'à la loi de finances pour 1999. L'article 19 de la loi de finances pour 2001 a créé un nouveau dispositif d'aide à l'investissement outre-mer, largement inspiré du précédent, mais visant à en corriger certaines dérives. Ces nouvelles dispositions s'appliquent aux investissements réalisés entre le 1er janvier 2001 et le 31 décembre 2006. Le volume total d'investissements agréés en 2001 s'élève à 630,6 millions d'euros, soit une augmentation de 22 % où il représentait 517,2 millions d'euros.

Les crédits du Fonds d'investissement pour le développement économique et social des territoires d'outre-mer (FIDES) s'élèvent à 46,22 millions d'euros en autorisation de programmes (+74,19 %), et 49,41 millions d'euros en crédits de paiement (+140,32%). En 2003, le FIDES devrait financer les contrats de développement de Nouvelle-Calédonie à hauteur de 26,45 millions d'euros en autorisations de programme, les contrats de développement de Polynésie à hauteur de 8,61 millions d'euros en autorisations de programme, le financement de la troisième tranche du contrat de développement de Wallis-et-Futuna à hauteur de 2,094 millions d'euros en autorisations de programme. Ces contrats représentent un engagement financier de l'État de 563 millions d'euros entre 2000 et 2004.

Au titre des dispositifs spécifiques, on soulignera qu'ont été financés le Fonds pour la reconversion économique de la Polynésie française et le Fonds d'équipement et de promotion pour la Nouvelle-Calédonie. La loi organique du 19 mars 1999 a prévu le transfert à la Nouvelle-Calédonie de certains établissements publics d'État, notamment l'Institut de formation des personnels administratifs (IFPA), l'Agence de développement de la culture Kanak (ADCK) et l'Agence de développement rural et d'aménagement foncier (ADRAF).

Enfin, le projet de loi de finances prévoit la mise en place d'une convention spécifique à Wallis-et-Futuna. Celle-ci est financée à l'article 21 du chapitre 68-90 relatif aux subventions d'investissements en faveur du développement des TOM ainsi que sur d'autres articles pour ce qui concerne la desserte inter-îles (0,42 million d'euros) et les chantiers de développement (0,46 million d'euros). Cette convention devrait bénéficier de 2,5 millions d'euros en autorisations de programme et 0,5 million d'euros en crédits de paiement en 2003.

M. Victor Brial, Rapporteur spécial, a tenu, pour finir, à insister sur la nécessité d'une meilleure consommation des crédits de ce budget.

M. Michel Bouvard, Président, a souligné que le problème du taux de consommation des crédits se retrouve dans d'autres éléments du budget de l'État et qu'il appartenait à la commission des Finances de permettre une meilleure gestion des crédits. L'éloignement ne doit pas être un prétexte à l'inaction s'agissant des TOM.

M. Jérôme Chartier a tenu à souligner le problème posé par la société Eramet et s'est interrogé sur l'opportunité de la mise en place d'une mission spécifique sur l'avenir du Nickel en Nouvelle-Calédonie. Quel est l'avenir de la société d'exploitation et de sa structure capitalistique ? Qu'en est-il de l'action du Laboratoire du bâtiment et des travaux publics (LBTP) en ce qui concerne le nickel ? Par ailleurs, quelles sommes sont prévues pour la revalorisation de l'atoll de Mururoa ? Une mission parlementaire sur le Fonds pour la reconversion économique de la Polynésie française pourrait être opportunément créée au sein de la commission des Finances, afin de contrôler l'emploi de crédits souvent considérables. Enfin, les lignes exploitées vers les terres australes et antarctiques françaises (TAAF) sont-elles compensées ou pas ? Les navires scientifiques affrétés vers les TAAF accueillent-ils des passagers privés, comme le pratiquent souvent les Russes, afin de parvenir à un meilleur équilibre d'exploitation ? Cette démarche pourrait inspirer les navires français, afin de les doter de ressources nouvelles.

M. Michel Bouvard, Président, a souhaité connaître le montant des sommes destinées aux TAAF, étant entendu qu'il s'agit de montants certes très faibles au regard du budget de l'État, mais qui doivent néanmoins être examinés avec attention. Il a précisé que des crédits étaient également destinés aux TAAF sur le budget du ministère de la Recherche. Rappelant que M. Philippe Auberger avait publié, sous la précédente législature, une étude très complète sur le problème du nickel, il a indiqué que les conclusions de cette étude avaient été reprises, en partie, dans le précédent rapport spécial sur les crédits des TOM.

M. Victor Brial, Rapporteur spécial, a précisé que le problème du nickel était un dossier très discuté. Des études sont en cours en matière de pollution, que le Rapporteur spécial communiquera aux membres de la commission des Finances, dès qu'il en disposera. En ce qui concerne les TAAF, les crédits budgétaires servent principalement à financer l'équipement. Enfin, le LBTP a gardé des missions de service public. Une étude, ou une mission parlementaire, pourrait effectivement être diligentée. Il a enfin précisé qu'à sa connaissance, des passagers privés étaient déjà transportés par des navires de recherche vers les TAAF.

La Commission a adopté, sur proposition du Rapporteur spécial, les crédits des Territoires d'Outre-mer.

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