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COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES, DE L’ENVIRONNEMENT ET DU TERRITOIRE

Mercredi 29 novembre 2006

Séance de 9h30

Compte rendu n° 13

Présidence de M. Patrick Ollier, Président,
puis de M. Yves Coussain, Vice-président

 

pages

– Examen du projet de loi, adopté par le Sénat, en 1ère lecture après déclaration d’urgence, ratifiant l’ordonnance n° 2006-1048 du 25 août 2006 relative aux sociétés anonymes coopératives d’intérêt collectif pour l’accession à la propriété (n° 3426)

 

(M. Gérard Hamel, rapporteur)

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– Examen du rapport de la mission d’information sur les délocalisations

 

(Mme Chantal Brunel, rapporteur)

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– Information relative à la Commission :

 

• Désignation d’un rapporteur sur :

 

– la proposition de loi, adoptée par le Sénat (n° 3427), et sur la proposition de loi de M. Jean Lemière (n° 3414), visant à faciliter le transfert des ports maritimes aux groupements de collectivités

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– sur le projet d’avis de la Délégation de l’Assemblée nationale pour l’Union européenne relatif à la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 97/67/CE en ce qui concerne l’achèvement du marché intérieur des services postaux de la Communauté (COM [2006] 594 final)

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La Commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire a examiné, sur le rapport de M. Gérard Hamel, le projet de loi, adopté par le Sénat en 1ère lecture après déclaration d’urgence, ratifiant l’ordonnance n° 2006-1048 du 25 août 2006 relative aux sociétés anonymes coopératives d’intérêt collectif pour l’accession à la propriété (n° 3426).

M. Gérard Hamel, rapporteur, a indiqué que le projet de loi de ratification de l’ordonnance du 25 août 2006 sur les SACICAP faisait suite à une habilitation du Gouvernement à réformer par ordonnance le statut des sociétés anonymes de crédit immobilier (les SACI).

Cette habilitation a été votée dans le cadre de l’article 51 de la loi portant engagement national pour le logement, dont il a également été le rapporteur. Ce projet de loi a été examiné en premier lieu par le Sénat et a fait l’objet de quelques modifications.

Les SACI constituent une famille d’organismes HLM spécifiques, puisqu’elles exercent une double activité dans le secteur immobilier et dans le secteur du crédit. D’une part, elles sont actionnaires de sociétés anonymes d’HLM et détiennent des filiales de promotion immobilière. D’autre part, elles ont des filiales financières représentant 4,6 % des parts du marché du crédit.

Les SACI sont aussi des acteurs de proximité, finançant du logement social, locatif et en accession à la propriété. Elles ont également des missions sociales en partenariat avec les collectivités.

L’objectif de l’ordonnance consiste à recentrer l’action des SACI sur leur activité de développement de l’accession sociale à la propriété. Elles sont transformées en sociétés anonymes coopératives d’intérêt collectif pour l’accession à la propriété, ou SACICAP. Ces SACICAP conservent l’ancrage territorial des SACI, avec une compétence régionale.

Elles constituent des sociétés coopératives, selon les règles fixées par la loi de 1947 fixant le statut de la coopération. Les associés des SACICAP devront se répartir en collèges, avec au minimum deux collèges composés :

– pour l’un de collectivités territoriales ;

– pour l’autre, d’organismes HLM.

La chambre syndicale des SACI voit son rôle préservé par l’ordonnance, qui transforme néanmoins cet organisme en union d’économie sociale.

Dans le cadre de la réforme, les SACI apportent à l’État une contribution exceptionnelle de 500 millions d’euros, dont 350 en 2006 et 150 millions en 2007. En outre, les SACICAP devront affecter une part de leur bénéfice et des dividendes de leurs filiales à des actions sociales dans le domaine de l’habitat.

L’ordonnance fixe au 31 décembre 2007 la fin de la période transitoire au terme de laquelle la réforme sera pleinement en vigueur.

Enfin, le pôle financier des SACI, le Crédit immobilier de France, a pris un peu d’avance par rapport à cette réforme, en se réorganisant en réseau dès 2003. Le Crédit immobilier de France développement est une holding du pôle crédit du CIF et est devenu l’actionnaire de référence des filiales régionales de ce réseau.

Quant au projet de loi de ratification, il comprend cinq articles :

L’article 1er ratifie l’ordonnance. L’article 2 a trait aux filiales et aux dividendes des SACI. L’article 3 concerne l’organisation en réseau des filiales financières des SACICAP. L’article 4 concerne la mise en place du réseau des filiales financières des SACICAP. Enfin, l’article 5 concerne le devenir du fonds de garantie et d’intervention du réseau des SACI.

À l’article 1er, le Sénat a adopté un amendement relevant de 10 % à 20 % le pourcentage des droits de vote dont pourra disposer un collège rassemblant d'autres SACICAP ou des filiales communes à des SACICAP. En effet, le rapporteur de la commission des affaires économiques du Sénat a indiqué qu’une limitation à 10 % des droits de vote de ce collège pourrait décourager les liens en capital entre les SACICAP, alors que ces liens existent déjà dans les SACI.

Par souci de cohérence avec cette modification, le rapporteur a souligné que le collège d’associés des SACICAP intégrerait les associés des sociétés anonymes et des sociétés coopératives d’HLM dans lesquelles les SACICAP font partie du pacte majoritaire.

En conclusion, le rapporteur a indiqué ne présenter aucun amendement, ayant jugé le texte adopté par le Sénat satisfaisant.

Le président Patrick Ollier a estimé que le présent projet de loi permettrait de recentrer l’activité des SACI sur le développement de l’accession sociale à la propriété, rappelant qu’il était par ailleurs à l’origine de la création d’une procédure d’accession sociale à la propriété votée dans le cadre du projet de loi portant engagement national pour le logement. Le Gouvernement s’est en outre engagé à réaliser 90 000 nouveaux logements en accession supplémentaires grâce à un financement de 320 millions d'euros sur quatre ans.

Il a néanmoins indiqué avoir déposé un amendement à ce projet de loi, afin de prendre en compte la situation particulière de la SNCF. Il s’agit de prévoir que la SACI issue de la transformation de la Société de crédit immobilier des chemins de fer (SOCRIF) et le Crédit immobilier de France ne peuvent détenir de participation commune, ce qui aurait pour effet de permettre à la filiale de la SOCRIF, la Société financière pour l’accession à la propriété (SOFIAP), de poursuivre la distribution de produits et services bancaires adaptés à la clientèle nationale de la SNCF et de leurs familles.

S’exprimant au nom du groupe socialiste, M. Jean-Yves Le Bouillonnec a fait part de son opposition au projet de loi, tant pour des raisons de forme que pour des raisons de fond.

En premier lieu, un débat fort intéressant sur ce type de sociétés a eu lieu dans le cadre de l’examen du projet de loi portant engagement national pour le logement ; en y répondant par un amendement à la rédaction complexe autorisant le gouvernement à régler ce problème par ordonnance, a été démontré une fois de plus le peu de place laissée au Parlement, notamment pour définir des instruments publics de développement du logement locatif social ou en accession à la propriété. Le statut des SACI aurait nécessité un travail approfondi des groupes parlementaires, en procédant aux auditions habituelles et le faux consensus affiché à la suite de la validation du projet de loi par un comité des sages comprenant notamment des représentants des organismes d’habitations à loyer modéré ne suffit pas à justifier que l’on écarte le Parlement du débat.

En outre, il faut rappeler que la volonté de réforme des SACI est latente depuis près d’une vingtaine d’années, tant pour moderniser leur statut, à la suite de la banalisation des prêts à l’accession à la propriété (PAP), que pour tenter d’utiliser leurs fonds propres.

Pourtant, le groupe socialiste a toujours affirmé que cette réforme ne devait pas avoir pour objectif de fournir de nouvelles ressources budgétaires. Or, le gouvernement actuel a initialement, dans le cadre du débat du projet de loi portant engagement national pour le logement, affiché sa volonté de prélever 1,2 milliard d’euros sur le budget des SACI, ce montant ayant ensuite été ramené à 500 millions d'euros, composés d’un prélèvement de 350 millions d'euros en 2006 et d’un autre de 150 millions d'euros en 2007.

Conformément à la loi de finances pour 2007, le premier acompte est partagé entre l’Agence nationale de rénovation urbaine (ANRU), qui percevra 100 millions d'euros, et la Caisse des dépôts et consignations qui recevra 250 millions d'euros pour compenser la baisse du taux de rémunération du livret A. À ces prélèvements, il faut ajouter une taxation annuelle des SACI à hauteur de 50 millions d'euros.

L’utilisation du patrimoine des SACI dans le cadre d’une politique de régulation budgétaire est inacceptable ; conformément à la loi de finances pour 2007, ces fonds serviront à honorer les engagements de l’État envers l’ANRU, qui s’élèvent au total à 465 millions d'euros d’après les dispositions votées dans le cadre de la loi relative à la rénovation urbaine du 1er août 2003. Après que ces engagements ont été honorés en 2006 par un prélèvement sur le fonds de renouvellement urbain, on peut se demander avec quelles ponctions budgétaires ils le seront à l’avenir. Cette contribution des SACI devrait par ailleurs mettre certaines de ces sociétés dans une situation financière délicate.

M. Jean-Marie Binetruy a ensuite exprimé le soutien du groupe UMP à la réforme sur du statut des SACI, soulignant que celle-ci avait déjà fait l’objet d’un large débat lors de la discussion du projet de loi portant engagement national pour le logement (ENL). Les députés du groupe UMP ont en outre veillé à la mise en œuvre de cette réforme en s’assurant que l’organisation en réseau et l’ancrage territorial des SACI étaient préservés, que les activités concurrentielles et l’intégrité du groupe étaient maintenues et, enfin, que la contribution financière des SACI au financement de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine, la Caisse des dépôts et consignations et l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale dans le cadre des aides au logement avait bien un caractère exceptionnel. Une concertation a en outre été menée entre les représentants des SACI, les parlementaires et le Gouvernement qui aboutit aujourd’hui à la présentation d’un dispositif satisfaisant, à tous points de vue.

La vocation sociale et très sociale du réseau des SACI, transformées en sociétés anonymes coopératives d’intérêt collectif pour l’accession à la propriété (SACICAP), est réaffirmée, son rôle, clairement recentré sur l’accession sociale à la propriété, qui est une priorité du gouvernement. La compétence territoriale des SACICAP au niveau régional est préservée permettant le maintien d’un dispositif de proximité. La composition du sociétariat confirme l’importance du rôle tenu par les collectivités territoriales, acteurs locaux majeurs de la politique du logement social, et conforte l’appartenance des SACICAP à la famille du logement HLM. Le projet de loi garantit par ailleurs aux SACICAP la possibilité de détenir des filiales concurrentielles dans le domaine de l’habitat et du crédit immobilier, préservant ainsi, comme le souhaitaient les députés UMP, l’intégrité du groupe et permettant aux filiales financières de poursuivre leur mission sociale de prêt à l’accession à la propriété des ménages modestes. Les ressources propres de ces filiales contribueront en outre sur la base d’une participation volontaire au financement d’actions en faveur du logement social par le biais du dividende social. L’article 2 du projet de loi donne à cet égard un cadre légal aux conventions conclues entre l’État et les SACICAP et prévoit qu’au moins un tiers des dividendes et bénéfices résultant de l’activité des filiales sera consacré au financement d’actions sociales dans le domaine de l’habitat. S’agissant enfin de la contribution financière des SACI à la politique du logement social, l’accord conclu dans ce cadre – et notamment le compromis consistant à fixer le montant du versement exceptionnel à 500 millions d’euros – répond aux préoccupations des députés UMP.

Pour l’ensemble de ces raisons, le groupe UMP soutiendra l’adoption du projet de loi ainsi que l’amendement présenté par le président Patrick Ollier à l’article 1er.

En réponse à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, le président Patrick Ollier a réfuté ses critiques relatives au recours à l’ordonnance pour réformer le statut des SACI, indiquant que le débat sur le fond avait eu lieu en commission et en séance dans le cadre du projet de loi portant engagement national pour le logement, la majorité ayant fait en sorte de trouver une solution opérationnelle à un problème apparu de manière abrupte, tout en mettant en place un comité des sages pour piloter la réforme.

M. Gérard Hamel, rapporteur, a rappelé que la réforme des SACI résultait de la volonté forte du Gouvernement de réorienter ces dernières vers l’accession sociale à la propriété, tout en modifiant leur mode de gouvernance pour laisser une place plus importante aux élus. Le projet de loi de ratification de l’ordonnance sera l’occasion de discuter à nouveau sur le fond de cette réforme, au sujet de laquelle il convient de souligner que les organismes HLM se sont prononcés favorablement, et qui est attendue sur le terrain. Les fonds des SACI ne seront en outre pas réorientés vers autre chose que le logement, que ce soit la construction, la réhabilitation ou les aides à la personne.

La Commission est ensuite passée à l’examen des articles du projet de loi.

Article 1er : Ratification et modification de l'ordonnance n° 2006-1048 du 25 août 2006 relative aux sociétés anonymes coopératives d'intérêt collectif pour l'accession à la propriété

La Commission a examiné un amendement du président Patrick Ollier visant à séparer les activités de la SOFIAP (Société financière pour l’accession à la propriété) filiale de la SOCRIF (Société de crédit immobilier des chemins de fer), de celles du Crédit immobilier de France développement, qui relèvent de logiques différentes, afin que la première puisse notamment continuer de proposer des services adaptés aux besoins particuliers des agents de la SNCF.

Le groupe socialiste a indiqué qu’il s’abstiendrait de voter cet amendement.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission a adopté l’amendement puis l’article 1er ainsi modifié.

Article 2 (Articles L. 215-1-1 et L. 215-1-2 [nouveaux] et article L. 215-7 du code de la construction et de l'habitation) : Filiales des SACICAP. Dividende social

La Commission a adopté l’article 2 sans modification.

Article 3 : Organisation en réseau, au sens du code monétaire et financier, des filiales financières des SACICAP

La Commission a adopté l’article 3 sans modification.

Article 4 (Article L. 422-4-1 du code de la construction et de l'habitation, article 7 de l'ordonnance n° 2006-1048 du 25 août 2006 relative aux SACICAP) : Mise en place du réseau des filiales financières des SACICAP

La Commission a adopté l’article 4 sans modification.

Article 5 : Devenir du fonds de garantie et d'intervention du réseau des SACI

La Commission a adopté l’article 5 sans modification.

La Commission a ensuite adopté l’ensemble du projet de loi ainsi modifié, le groupe socialiste votant contre.

◊ ◊

La Commission a ensuite procédé à l’examen du rapport de la mission d’information sur les délocalisations.

Mme Chantal Brunel, rapporteur, a tout d’abord indiqué que la mission d’information avait procédé à un vaste programme d’auditions – membres du gouvernement, représentants des partenaires sociaux, économistes, représentants d’institutions diverses et spécialistes – complété par trois déplacements à l’étranger, auprès de la Commission européenne, en Finlande et au pays basque espagnol.

Le caractère omniprésent des délocalisations est illustré par les nombreux échos dans les médias d’un phénomène dont aucun secteur économique ne semble protégé et qui constitue une source d’inquiétude majeure dans la société française. Les délocalisations sont l’une des conséquences de la fragmentation de la chaîne de production. En effet, la dissociation des différentes étapes permet de recourir à la sous-traitance pour tout ce qui n’est pas jugé essentiel. La mondialisation se caractérise également par un poids de plus en plus faible de la production par rapport à la conception du produit.

Il existe une multiplicité de définitions des délocalisations : la plus restrictive, pour laquelle une délocalisation consiste en la fermeture d’une unité de production en France suivie de sa réouverture à l’étranger en vue de réimporter sur le territoire national les biens produits à un moindre coût ; celle de l’INSEE, pour qui est une délocalisation toute substitution de production étrangère à une production française, résultant de l’arbitrage d’un producteur qui renonce à produire en France pour produire ou sous-traiter à l’étranger ; celle de M. Jean Arthuis, président de la commission des finances du Sénat, pour qui les délocalisations sont le fruit d’arbitrages réalisés par les entreprises dans un sens défavorable à la localisation des activités et des emplois sur le territoire français. La mission a considéré que constituaient des délocalisations tous les arbitrages d’entreprises qui renoncent à maintenir, développer ou créer leurs activités en France pour produire ou sous-traiter à l’étranger, à destination du marché hexagonal ou des marchés d’exportation. Certaines implantations à l’étranger peuvent certes avoir pour objectif la conquête de marchés extérieurs, même s’il faut souligner l’ambivalence d’une démarche qui constitue à la fois une condition pour exporter et une recherche de baisse des coûts, ainsi Airbus en Chine ou la Logan, fabriquée en Roumanie mais désormais également vendue en France.

La dimension humaine du phénomène est d’autant plus à prendre en compte qu’elle n’est pas sans conséquences graves sur les personnes et les territoires affectés par les délocalisations. Le phénomène est d’autant plus générateur d’angoisse que sa simple évocation peut être un outil de pression sur les salariés. Ils y sont d’autant plus sensibles que les salariés ayant perdu leur emploi à la suite d’une délocalisation rencontrent souvent de sérieuses difficultés à retrouver un emploi équivalent à celui qu’ils ont été contraints d’abandonner.

Soulignant la difficulté d’appréhension du phénomène, le rapporteur a proposé la création d’un observatoire des délocalisations. Afin de ne pas créer de lourdeurs administratives supplémentaires, cet organisme pourrait être rattaché au Conseil d’orientation pour l’emploi en raison, d’une part, du lien évident entre les délocalisations et l’emploi et, d’autre part, de la composition de cet organisme, qui regroupe des représentants de l’ensemble des acteurs politiques, économiques et sociaux.

L’immersion de l’économie française dans le courant des échanges internationaux tend à exclure toute tentative visant à s’opposer à la mondialisation. Dès lors que les exportations françaises représentent 26 % du PIB national et que les investissements directs étrangers en France contribuent à la création ou au maintien d’emplois, le choix est simple : subir ou réagir. Subir, ce serait considérer la France comme une terre isolée et justifier la non-adaptation de nos structures économiques à la nouvelle donne internationale, ce qui aurait pour effet de conduire au déclin et à l’effondrement du modèle social que l’on prétendrait protéger. Réagir, c’est s’adapter à la mondialisation en s’efforçant de bénéficier de la croissance qu’elle induit, tout en luttant contre ses inconvénients.

En faisant des propositions concrètes et réalisables à court ou moyen terme, le rapport écarte toute mesure hors d’atteinte, notamment la politique monétaire et la politique économique européennes, sans nier leur impact sur les délocalisations.

S’agissant des aides aux entreprises, les ressources publiques ne sont pas illimitées et il convient de rationaliser au mieux leur utilisation en évitant leur saupoudrage et en les concentrant sur les entreprises susceptibles d’être sauvées et sur la protection des salariés. Il est nécessaire de procéder à une évaluation objective de leur efficacité et à une coordination décentralisée par les régions, un travail de synthèse étant réalisé au plan national par le Conseil d’orientation pour l’emploi. Il serait ainsi possible d’identifier les secteurs menacés et d’investir plus particulièrement dans la formation des salariés concernés. L’octroi des aides devrait être conditionné à des engagements sur la création ou le maintien de l’emploi, et ce d’autant plus qu’un consensus politique se dégage progressivement sur cette mesure.

S’agissant de la recherche et de l’innovation, les dépenses françaises de R & D se situent en deçà des objectifs européens de Lisbonne, le niveau de recherche privée et les partenariats universités-entreprises étant insuffisants, notamment au regard de la situation dans certains pays étrangers tels que la Finlande.

Dès lors que l’obstacle de la constitutionnalité a été levé, il convient de ratifier au plus tôt les accords de Londres afin de favoriser les dépôts de brevets européens par les entreprises françaises en raison de la simplification des procédures et de la diminution des coûts qu’ils permettraient. Le dispositif du crédit d’impôt recherche pour l’emploi des docteurs peut être renforcé. Il convient d’améliorer le statut des chercheurs, quitte à prévoir, en contrepartie, une modulation de leur rémunération en fonction des résultats. Le rapprochement de l’université et de l’entreprise est indispensable. Pour cela, il serait intéressant de subordonner l’octroi des crédits recherche des universités, hors fonctionnement, à l’obtention de partenariats avec les entreprises lorsqu’il s’agit de recherche appliquée et d’étudier une modulation renforcée du crédit d’impôt recherche des entreprises en fonction d’un partenariat avec l’université.

S’agissant du financement de la protection sociale, des craintes fortes sur la pérennité du système français sont légitimes si son financement n’est pas adapté aux contraintes de la mondialisation. Les pays scandinaves ont ainsi pris des mesures radicales afin de renforcer la compétitivité des entreprises. Il convient donc d’approfondir la manière dont pourrait être introduite une « TVA sociale », sur la base de l’augmentation d’un point du taux normal de TVA, soit 5,7 milliards d’euros, avec, en contrepartie, une réduction à l’euro près des charges patronales. La TVA sociale frapperait les importations, et non plus le seul travail réalisé en France. À la différence des cotisations sociales, elle ne pèserait pas sur le coût des exportations, rendues ainsi plus compétitives. Qui plus est, cette réforme aurait le mérite de rendre plus transparent le financement de la protection sociale dans la mesure où la réduction des cotisations permises par la « TVA sociale » porterait sur les cotisations relevant d’une logique de solidarité. Enfin, l’instauration d’un point de « TVA sociale » permettrait à la France de se rapprocher de l’Allemagne, qui a fait de la réduction des coûts une priorité. Cette mesure ne devrait pas avoir d’impact inflationniste compte tenu de la concurrence et de la baisse des charges pour les entreprises de main-d’œuvre.

S’agissant des PME, le gouvernement a déjà engagé une politique volontariste, mais il est indispensable de rendre effectifs les délais de paiement, de mobiliser réellement les réseaux publics d’aide à l’exportation et d’encourager, encore plus que ne le fait l’article 40 du projet de loi de finances pour 2007, la souscription des titres émis par les PME. Il faut poursuivre la mise en place d’un « Small Business Act » européen et il est nécessaire de mettre en place un site internet unique pour tous les marchés publics.

S’agissant du droit social et des contraintes administratives, il est nécessaire d’alléger et de simplifier les procédures, de mettre fin aux incertitudes juridiques et de s’adapter au monde moderne, notamment en aménageant le temps de travail pour répondre aux besoins des entreprises et à la diversité des aspirations des salariés. Ainsi, il serait souhaitable de pouvoir transférer les journées de RTT sur un plan épargne entreprise avec les mêmes avantages que l’intéressement, hors charges salariales et patronales. L’évolution du droit du travail doit passer par la négociation. La formation professionnelle ne devrait pas se limiter à l’adaptation aux postes de travail. Les crédits de la formation professionnelle devraient être plus lisibles et recentrés sur l’encouragement à la mobilité professionnelle et géographique. Le droit à la formation devrait être particulièrement important pour les salariés ayant un faible niveau de qualification.

La réactivité de l’administration devrait être plus importante et plus en phase avec le « temps des entreprises ». Il faut adapter le droit fiscal aux besoins de l’économie afin de limiter les délocalisations fiscales et entraver les stratégies d’optimisation fiscale. La France devrait donc soutenir activement les propositions de la Communauté européenne visant à harmoniser l’assiette de l’impôt sur les sociétés. La baisse de cet impôt s’impose aussi, le taux français était de 33 % alors que la moyenne européenne est de 26 %. Certains pays récemment entrés dans l’Union européenne n’hésitent pas à se livrer, de manière choquante, à des stratégies de « dumping » fiscal tout en bénéficiant, par ailleurs, de subventions européennes.

En conclusion, le rapporteur a considéré qu’il revenait à la France de se donner le moyen de rétablir pleinement sa compétitivité et de faire ainsi le choix d’appartenir au camp des gagnants de la mondialisation et d’offrir à tous un meilleur niveau de vie. Toutefois, force est de constater que les conditions actuelles sont parfois inéquitables. La création d’une certification sociale européenne garantissant au consommateur européen que la réalisation des produits a été faite dans des conditions minimales d’équité (non-travail des enfants, protection sociale des salariés, non-discrimination sociale et culturelle, respect des normes environnementales) s’impose donc. L’indifférence aux conséquences sociales négatives de la mondialisation et l’oubli de l’éthique peuvent provoquer un fort mouvement protectionniste. Pour préparer l’avenir, il faut lutter en conséquence contre le sentiment de vulnérabilité généré par une mondialisation incontournable et prouver que l’idéal de justice sociale peut être réalisé dans le cadre d’une économie ouverte.

Après avoir remercié le président Patrick Ollier pour la création de cette mission, qui a effectué un travail intéressant et utile, ainsi que le rapporteur et l’ensemble des membres de la mission pour leur assiduité et leurs contributions, M. Jérôme Bignon, président de la mission d’information, a souligné le nombre et la densité des auditions effectuées et estimé que cela démontrait que les missions d’information constituaient un outil privilégié d’information et de contrôle pour le Parlement. Le caractère pédagogique de la réflexion menée a permis une meilleure compréhension des phénomènes économiques et une prise de conscience par les membres de la mission de l’évolution rapide de la mondialisation, tant dans ses aspects économiques que sociaux. L’incompréhension nourrit souvent les peurs. Le rapport de la mission peut utilement compléter les efforts de pédagogie menés dans le domaine de la connaissance économique par le gouvernement, qui a récemment créé un conseil pour la diffusion de la culture économique. Le dernier livre de Jacques Attali, intitulé « Une brève histoire de l’avenir », met bien en lumière l’accélération de la mondialisation liée au développement des transports et des technologies de l’information et de la communication. Le récent forum économique qui s’est tenu à Singapour nous apprend que le Pacifique, premier océan du monde en matière de trafic lié au commerce international, sera bientôt parcouru par des bateaux capables de le traverser en quatre jours. Il n’est donc pas possible de proposer des solutions pertinentes si l’on ne saisit pas cette accélération. Les représentants de Nokia avaient d’ailleurs indiqué aux membres de la mission, lors de leur déplacement en Finlande, qu’un million de portables se vendait par jour et que le tiers de l’humanité en était déjà pourvu. Un milliard d’ordinateurs est désormais relié à travers Internet, 10 % du PIB mondial étant réalisé grâce à ce mode de communication. Il est indispensable de réagir : subir cette mondialisation serait en tout état de cause contraire à l’éthique politique.

Le renouveau du pays basque espagnol, analysé par les membres de la mission lors d’un déplacement dans cette région, a succédé à une crise industrielle sans précédent dans les années 80, amplifiée par les problèmes liés aux actions de l’ETA. Ce renouveau tient beaucoup au niveau important de recherche et développement qui a été insufflé dans l’économie, les basques espagnols s’étant fixés comme objectif d’être les meilleurs sur un certain nombre de secteurs. La réaction des Finlandais, confrontés à l’effondrement de leur principal partenaire économique, l’URSS, et à une économie industrielle vieillissante montre aussi que l’effort pour se redresser paie. La Finlande a su couper les branches mortes pour pouvoir créer des rameaux neufs et modernes, comme l’atteste la formidable réussite de Nokia, qui représente 30 % du marché de la téléphonie mobile. Cette réussite finlandaise s’appuie sur une excellente organisation de la R&D.

Il est certes vrai que le pays basque espagnol et la Finlande, qui comptent respectivement 2 millions et 5 millions d’habitants, représentent des petits territoires en comparaison de la France et qu’il est plus facile d’y faire du traitement sur mesure. En outre, la réussite finlandaise s’appuie sur une culture du dialogue social qui fait défaut à notre pays. Toute fermeture d’entreprise étant synonyme de détresse et d’incompréhension, il appartient à notre pays de s’orienter vers plus de flexisécurité, à l’instar des pays nordiques. Est également crucial le problème de la formation des salariés, les territoires les plus fragilisés étant souvent ceux où la formation initiale et la formation professionnelle continue ont été les plus négligées. Cette absence de formation explique les grandes difficultés des salariés à se reconvertir. La formation doit donc se poursuivre tout au long de la vie sans interruption et permettre une véritable adaptation aux mutations économiques.

M. Jérôme Bignon a également souhaité préciser l’option prise par le rapporteur de ne s’en tenir dans son intervention qu’à la formulation de propositions cruciales dont la mise en œuvre dépend directement du gouvernement et du Parlement français. Ce parti pris, justifié par le souci de formuler des préconisations réalisables à court terme, n’exclut pas la nécessité pour la France de jouer aussi un rôle dans la concertation internationale.

Mme Janine Jambu a souligné la qualité du travail approfondi réalisé par la mission. Toutefois, les propositions formulées ressemblent trop aux vœux exprimés par le MEDEF, qu’il s’agisse de la baisse de l’impôt sur les sociétés, de l’assouplissement du droit du travail ou de la TVA sociale, forme déguisée de diminution des cotisations sociales patronales.

C’est pourquoi le groupe communiste ne peut approuver les orientations du rapport et entend présenter ses propres positions afin de définir une politique alternative aux choix du gouvernement et de sa majorité en matière de lutte contre les délocalisations. Cette contribution porte principalement sur une meilleure utilisation des fonds publics, l’institution de droits nouveaux pour les salariés et pour les élus locaux, le renforcement des moyens de la formation professionnelle et de la sécurité de l’emploi ainsi qu’un ensemble de mesures financières et fiscales.

Mme Claude Darciaux a également salué la qualité du travail de la mission, mais a regretté que son diagnostic s’avère partiel et partial, ce qui rendra peu efficaces ses propositions, même si certaines vont dans le bon sens, notamment en matière de formation professionnelle et de soutien aux PME. Le rapport semble servir de prétexte à démonter le modèle social français afin de libéraliser le marché du travail. Il est en outre permis de s’étonner du satisfecit donné au Gouvernement concernant l’effort de recherche alors que la France a pris du retard dans ce domaine.

Les délocalisations ne constituent pas une fatalité et plusieurs de leurs causes ont été ignorées dans le rapport, ainsi l’augmentation du coût de l’énergie, le taux de change entre le dollar et l’euro, le rôle insuffisant de la politique économique et monétaire européenne. De plus, l’action de la banque centrale européenne ne s’inscrit en aucune manière dans la stratégie de Lisbonne. La réglementation européenne des aides rend difficile leur octroi et met en péril des pans de notre industrie, et ce alors que des pays non européens accordent de leur côté des aides considérables à leurs industries nationales. Il en va de même des normes environnementales et des conditions de travail, contraignantes en Europe, allégées ou inexistantes ailleurs, y compris dans de grands pays industriels comme le Canada et les États-Unis. Il manque à l’Europe une réflexion globale. Le rapport n’évoque pas davantage l’augmentation des bénéfices des grands groupes internationaux et des stock-options. Il faut aujourd’hui réintroduire la préoccupation du long terme dans la stratégie des entreprises, qui ne sont trop souvent guidées que par la rentabilité à court terme.

S’agissant des propositions avancées, l’introduction d’un point de TVA sociale semble une piste, qui reste cependant aléatoire en l’absence d’une sérieuse étude d’impact. La flexisécurité ne suffira pas. Il ne faut pas laisser croire que notre pays se lance dans une politique de dumping fiscal et social pour lutter contre les délocalisations. Le crédit d’impôt au profit des entreprises qui relocalisent leurs activités en France, mis en place en 2005 par M. Nicolas Sarkozy, n’a d’ailleurs en rien freiné les délocalisations. Il faut aussi arrêter de remettre en cause les politiques publiques de recherche et d’aménagement du territoire car elles donnent à la France, du fait de ses infrastructures, un caractère attrayant pour l’économie mondiale. Il devient enfin urgent d’augmenter le budget de l’Union européenne afin qu’elle puisse mener une véritable politique économique et industrielle.

M. Michel Roumegoux a insisté sur l’aspect psychologique des délocalisations, qui touchent à la fois les entreprises, les salariés, l’opinion publique, les élus locaux et la collectivité nationale. C’est pourquoi il faut développer une pédagogie en la matière qui rende de l’espoir et de l’ambition aux Français. Le moral et la combativité de la communauté nationale peuvent être déterminants, comme on le constate dans des pays comme la Finlande, nation entièrement focalisée sur le souci de l’innovation. Les disparités des normes environnementales et de droit du travail donnent toute sa valeur à la proposition de TVA sociale.

M. Alain Gouriou a insisté sur l’impact des délocalisations pour les régions touchées, souvent très brutalement, donnant l’exemple de Quimperlé, où une manifestation a rassemblé le quart de la population la semaine dernière. Aucun secteur d’activité n’est épargné et la désindustrialisation est particulièrement préoccupante dans des domaines où la France comptait des acteurs mondiaux de premier rang : elle ne compte plus aucun fabricant d’ordinateurs ni de téléphones mobiles, après les difficultés de Sagem. La menace des délocalisations constitue en outre un outil de pression sur les salariés, en matière de conditions de travail et de salaires. Les conséquences dans les bassins d’emploi sont dévastatrices, alors que le délai nécessaire pour retrouver un poste dépasse très nettement celui de deux semaines, fréquent dans les pays du nord. L’efficacité de mesures nationales restera très incertaine tant que l’Union européenne sera une économie aussi ouverte ; la conquête de marchés américains ou asiatiques est autrement plus difficile. Quant à la recherche, les propositions de la mission sont intéressantes, mais tardives, les objectifs fixés par le Président de la République au début de son mandat étant loin d’être atteints.

M. Pierre Cohen a salué la prise en compte progressive, par les membres de la mission appartenant au groupe UMP, des véritables enjeux, qui ne se réduisent pas aux 35 heures et au coût du travail, remarquant que M. Louis Gallois, président d’Airbus, auditionné la veille par la Commission, n’avait jamais fait allusion à la durée du travail, mais insisté avec force sur le taux de change euro/dollar. Il a appelé à refuser toute dégradation du modèle français. La force de ce modèle repose sur les droits qu’il confère. C’est dans la qualité des ressources humaines que réside notre richesse. Enfin, la politique de recherche et d’innovation n’est pas à la hauteur des défis posés, la loi de programme n° 2006-450 du 18 avril 2006 pour la recherche comme les choix budgétaires en témoignant malheureusement.

M. François Brottes s’est félicité à son tour de la qualité du travail conduit par la mission d'information, mais a cependant regretté que les conclusions présentées relèvent plus d'un discours défensif qu’offensif. Il est regrettable que la question des délocalisations soit toujours abordée de manière fataliste, même s’il est vrai que la mission ne s’est pas contentée de mettre sur la sellette les coûts du travail, comme on le fait habituellement.

Deux catégories de délocalisations peuvent être distinguées : la première, visant par une installation sur place à accroître les ventes à l'étranger, peut se justifier; ce n'est véritablement que la seconde catégorie, visant à produire depuis l’étranger à destination du marché français, qui suscite potentiellement la critique.

Un traitement plus offensif de cette question relève d'un combat quotidien mené sur le terrain dans un contact direct avec les entreprises concernées, afin d’identifier leurs difficultés et essayer d'y porter remède. La mise en place d'un observatoire n’aurait éventuellement de sens qu’au regard de ce besoin d'action concrète sur le terrain.

Il serait plus utile d’essayer d'établir une cartographie du monde recensant, région par région, les inconvénients d'une implantation à l'étranger, qu'il s'agisse de l'instabilité politique, des aléas dans la fourniture d'énergie ou d’eau, ou encore du laxisme de la législation sociale à l'égard du travail des enfants, de manière à mettre en évidence les risques d’échec des stratégies de délocalisation.

Une analyse des délocalisations en termes de coûts du travail présente l’inconvénient d'omettre que ces coûts étant générateurs aussi de pouvoir d'achat, toute politique de diminution des coûts risque de conduire à terme à une baisse de la demande. S'agissant du régime des aides publiques, on ne peut que regretter la paralysie produite par un contrôle très strict de la commission européenne, alors que les États-Unis et le Japon se donnent en ce domaine de larges marges de manœuvre.

Enfin la mission d'information aurait dû mettre en valeur le rôle joué, dans l’incitation aux délocalisations, par le refus des investisseurs en capital de sortir d'une logique d'appréciation à court terme de la rentabilité.

M. Pierre Ducout a souligné l'intérêt qu'il avait pris à participer aux travaux de la mission d'information et a pris acte de ce que les conclusions mentionnent l’impact potentiellement catastrophique des délocalisations pour l’emploi local. L'idée d’une poursuite de l'effort de rapprochement entre l'université et l'entreprise, déjà engagé avec les pôles de compétitivité, est positive, de même qu’un effort accru de formation, de recherche et de transfert de technologie. Il convient de déplorer l'absence de réelle politique industrielle au niveau européen, celle-ci devant trouver son relais d’une part, au niveau des négociations multilatérales ou bilatérales, notamment en vue de défendre certains secteurs stratégiques comme ceux de l’aéronautique et de l’espace, ou d’obtenir un temps d’adaptation avant l’ouverture des frontières aux produits des pays à bas salaires, et, d’autre part, au niveau de la gestion du taux de change de l’euro, qui justifierait qu’on étudie par exemple la possibilité d’établir des taux de parité de pouvoir d’achat par branche d’activité.

S'agissant des aides publiques, un effort de rationalisation de leur attribution s’impose, un rôle pivot en ce domaine incombant aux régions. Mais la réforme des aides publiques ne doit pas aboutir à priver de soutien des entreprises à fort potentiel confrontées à des difficultés passagères, comme s’y employait le comité interministériel de restructuration industrielle (CIRI). De nombreux pays du monde, y compris au sein de la Communauté européenne, ainsi l’Irlande, n’hésitent d’ailleurs pas à accorder des aides importantes à leurs entreprises, parfois au mépris des règles.

Une entreprise de 1 000 salariés devrait rester une PME si son marché est d’envergure mondiale et, pourtant, elle ne peut juridiquement prétendre à ce statut. Il a indiqué sa réticence à l’égard de la TVA sociale, compte tenu de son caractère non progressif. Il serait préférable d’introduire une taxation des importations pénalisant les manquements aux règles internationales afférentes au travail des enfants ou à l’environnement.

Mme Chantal Brunel, rapporteur, a répondu aux différents intervenants, en évoquant les points suivants :

– il n’est pas possible de présenter les conclusions de la mission d’information comme étant alignées sur les positions du Medef, alors même que la mission a écouté tous les points de vue et que certaines propositions du rapport recueillent un très large accord, ainsi celles sur la formation professionnelle ;

– la mission n’a pas considéré comme utile de présenter des propositions sur la banque centrale européenne, la France étant minoritaire en Europe sur ce sujet, ou sur le prix de l’énergie, que la France ne produit pas ;

– le rapport fournit des chiffres sur l’effort de recherche en France depuis 1995 qui montrent une augmentation sensible au cours des dernières années ;

– la politique d’encadrement des stock-options ne relève pas du champ du rapport ;

– l’idée de la TVA sociale, qui semble une piste prometteuse, mérite une étude préalable approfondie ;

– il est clair que la stratégie de lutte contre les délocalisations comporte une dimension psychologique importante et que cela appelle un effort de pédagogie en direction de nos concitoyens ;

– l’exemple des délocalisations vers la Suisse souligne le rôle de l’instabilité de l’environnement juridique et fiscal dans le phénomène des délocalisations ;

– s’il est vrai que la gestion des délocalisations doit se faire prioritairement au niveau local, un observatoire français est indispensable pour apprécier l’étendue du phénomène et avoir un constat partagé dans notre pays sur ce phénomène, ce qui n’exclut pas l’idée d’un observatoire européen ;

– les aides publiques sont utiles, mais complexes ; il convient donc de faire un bilan des circuits d’attribution pour accroître la lisibilité et l’efficacité des aides ; celles-ci peuvent bien entendu bénéficier à des entreprises ne connaissant que des difficultés passagères. Il faut en contrepartie exiger des engagements en matière d’emploi ;

– l’influence de la financiarisation de l’économie, et de la recherche d’une rentabilité à court terme, sur le phénomène des délocalisations a été analysée dans le rapport, de même que le handicap que représente l’absence d’une politique de l’industrie au niveau européen ;

– il est exact que certains États membres ne respectent pas les règles communautaires en matière d’aides publiques ;

– la définition communautaire de la PME retient la limite de 250 salariés ;

– la désindustrialisation de notre pays est d’autant plus préoccupante que les pays émergents, comme la Chine et l’Inde, n’ont plus seulement l’avantage des bas salaires, mais disposent aussi désormais de travailleurs qualifiés, comme l’illustre l’implantation d’un centre de 1 600 personnes appartenant à l’agence Reuters à Bangalore.

La Commission a ensuite autorisé la publication du rapport, les députés membres du groupe socialiste s’abstenant.

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Information relative à la Commission

La Commission a ensuite procédé à la nomination de rapporteurs. Elle a désigné :

– M. Daniel Fidelin, rapporteur sur la proposition de loi, adoptée par le Sénat (n° 3427), et sur la proposition de loi de M. Jean Lemière (n° 3414), visant à faciliter le transfert des ports maritimes aux groupements de collectivités ;

– M. Jean Proriol, rapporteur sur le projet d’avis de la Délégation de l’Assemblée nationale pour l’Union européenne relatif à la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 97/67/CE en ce qui concerne l’achèvement du marché intérieur des services postaux de la Communauté (COM [2006] 594 final).