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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

Document rectifié

3ème séance du mardi 28 février 2006

Séance de 21 heures 30
65ème jour de séance, 153ème séance

Présidence de M. Jean-Luc Warsmann
Vice-Président

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La séance est ouverte à vingt et une heures trente.

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recherche (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat après déclaration d’urgence, de programme pour la recherche.

M. le Président – L’Assemblée a commencé l’examen de la question préalable. Nous en arrivons aux explications de vote et au vote.

M. Gilles de Robien, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche – Nous avons écouté avec attention l’intervention de M. Hollande : il a fait part, sur un ton consensuel, de ses souhaits, que nous pouvons, comme l’a dit M. Dubernard, partager, notamment sur les objectifs et sur la place de la recherche, en France et en Europe. Toutefois, certaines de ses affirmations méritent une mise au point.

S’agissant de l’université, que M. Hollande nous reproche d’oublier, je rappellerai que le divorce d’avec le CNRS date de 1982…

M. Jean-Michel Dubernard, Président et rapporteur de la commission des affaires culturelles - De 1946 !

M. le Ministre – Dans ce projet de loi, les universités se trouvent, bien au contraire, au cœur du dispositif puisque les pôles de recherche et d’enseignement supérieur – PRES –y seront adossés. Les universités elles-mêmes ne s’y sont pas trompées puisqu’elles ont non seulement suggéré cette démarche mais s’y sont engagées, avec volontarisme, avant même que le pacte soit connu : l’un de nos relais me disait ainsi que nombre d’entre elles réfléchissaient déjà aux futurs PRES. Pour les inspecteurs de l’enseignement supérieur à qui j’ai, tout à l’heure, posé la question, ce projet de loi apparaît bien comme un accélérateur, plutôt que comme un frein.

S’agissant du budget, c’est bien un milliard supplémentaire qui sera destiné à la recherche en 2006. Un milliard a été voté dans le projet de loi de finances pour 2005, un milliard le sera dans le projet de loi de finances pour 2007 : cela fera en tout trois milliards.

Concernant les effectifs, alors que les socialistes prévoyaient 800 emplois sur la période 2001-2010…

M. Pierre Cohen - C’est faux !

M. le Ministre - … nous créerons 3 000 emplois en 2006, après en avoir créé 1 000 en 2005, conformément à nos engagements ! Voilà les précisions que je souhaitais apporter.

M. Jean-Louis Idiart - Ces rectifications sont fausses !

M. François Goulard, ministre délégué à l’enseignement supérieur et à la recherche - A mon tour, je voudrais corriger certaines inexactitudes qu’a commises M. Hollande en venant partager, quelques instants, notre débat. Ce faisant, il est passé à côté d’un certain nombre de données essentielles, que, manifestement, il ignore.

Il a par exemple stigmatisé l’accumulation de certaines structures, citant, sans le savoir, des structures existantes. Il a affirmé que les grandes écoles reçoivent un financement supérieur à celui des universités.

Plusieurs députés socialistes - Par étudiant !

M. le Ministre délégué – Les écoles d’ingénieurs, créées au sein des universités – elles sont de plus en plus nombreuses – reçoivent par étudiant les mêmes dotations que les grandes écoles, à l’euro près ! Vérifiez les chiffres ! Je considère que M. Hollande a été désagréable lorsqu’il a évoqué les pôles de compétitivité, selon lui aussi nombreux que les parlementaires. Il en existe 67. Veut-il prétendre que certaines régions ne le méritaient pas ?

Mme Hélène Mignon – Vous vous les êtes partagés !

M. le Ministre délégué – Ces pôles sont tous justifiés et présentent chacun un intérêt pour le dynamisme économique régional. Quand aux allusions de M. Hollande selon lesquelles certains pôles de compétitivité auraient favorisé les élus de la majorité, elles sont inadmissibles (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP). Je remarque que les critiques de M. Hollande rejoignent celles du Medef… cherchez l’erreur !

M. Hollande nous a expliqué qu’il s’engageait à porter les allocations de recherche à 1 500 euros par mois. Il se trouve que, grâce aux engagements pris par notre Gouvernement, l’allocation de recherche dépassera les 1 500 euros au 1er janvier prochain ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste)

Enfin, s’agissant de l’embauche des jeunes docteurs dans les entreprises, nous créons le dispositif des contrats d’insertion des post-doctorants pour la recherche en entreprise, après que vous avez adopté le doublement du salaire des jeunes chercheurs dans l’assiette du crédit impôt-recherche, ce qui représente une incitation très concrète. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président – Nous en venons aux explications de vote

M. Pierre-Louis Fagniez - Je regrette l’absence de M. Hollande : je lui aurais dit que sa question préalable ne figurera pas comme un moment d’anthologie dans nos annales. Certes, le début et la fin de l’intervention étaient acceptables, et je soupçonne le président Dubernard – qui a été très gentil à l’égard de M. Hollande – de ne pas l’avoir écouté tout du long, contrairement à MM. les ministres.

M. le Rapporteur – Vous êtes un vrai jésuite !

M. Pierre-Louis Fagniez - Après nous avoir dit que nous pourrions nous retrouver par-delà nos clivages, il nous a donné une leçon de libéralisme en affirmant que le modèle devait venir des États-Unis. Il nous a rejoints sur la question de l’embauche des doctorants dans les entreprises et sur l’Agence nationale de la recherche, même s’il a glissé que nous nous étions fourvoyés, dévoyant le système.

Très vite, nous nous sommes aperçus que M. Hollande était approximatif et injuste. Et ce n’est pas bien d’être injuste lorsque l’on est socialiste ! (Sourires sur les bancs du groupe UMP) Il ne doit pas avoir eu le temps de préparer sa question préalable, il a donc utilisé des indicateurs, en les castrant, comme dirait le Professeur Dubernard…

Lorsqu’il parle de la part de 6,5 /°° d’actifs, il a omis de préciser la part qui revenait au public. Or la France est parmi les pays qui ont le plus de chercheurs dans le secteur public. M. Hollande a aussi affirmé qu’il n’y avait pas eu de concertation (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains) ! Nous dire cela à nous, qui n’avons cessé de nous rendre dans les universités !

Il préfère parler d’inflation administrative, plutôt que de stagnation budgétaire, dont il voit bien qu’elle n’existe pas. Puis, alors qu’il apprécie l’ANR et que l’on voit bien qu’il aurait aimé la créer, il nous accuse de sacrifier la recherche fondamentale. Enfin, il termine sur les emplois et les prédictions, avec beaucoup d’injustice à l’endroit de M. Jospin, puisqu’il critique l’allocation de recherche qui a stagné pendant des années, et que nous seuls avons augmentée de 8 % par an (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP). Il fait une dernière pirouette en annonçant qu’on rasera gratis, avec 10 % de chercheurs et de crédits supplémentaires par an.

Après cette question préalable, nous avons envie de dire à M. Hollande : « revoyez votre copie ! » (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme Anne-Marie Comparini - La question préalable est un événement grave qui modifie le cours de nos débats. Rien ne la justifiait dans le discours de M. Hollande, sinon un constat que nous sommes nombreux à partager : le sort de l’enseignement supérieur et de la recherche est enfin, après vingt-cinq années de quasi-immobilisme, devenu un sujet de préoccupation. Sans même se reporter au classement de Shanghai, un simple examen de la situation suffit à révéler combien elle s’est dégradée : locaux vétustes, laboratoires sous-équipés, mauvaises conditions d’hébergement, manque de postes, bourses insuffisantes, financement de la création restreint, méfiance à l’égard de l’innovation… Cet inventaire, hélas incomplet, montre combien ce fonctionnement d’un autre âge est à l’origine de la fuite des cerveaux ou de l’affaiblissement de la compétitivité de nos PME.

Il y a donc urgence ! Chaque année d’inaction nous éloigne un peu plus des pays qui ont su s’adapter en rénovant leur système de recherche. Soyons clairs : notre talon d’Achille n’est pas le manque de talents, mais l’insuffisance de l’effort public conjuguée avec une trop faible mobilisation de la recherche privée.

Certes, le texte est imparfait, mais c’est le rôle du Parlement de l’étudier en prenant la question à bras-le-corps. La recherche n’est ni de droite ni de gauche : c’est une cause nationale. Le groupe UDF espère que les travaux de notre Assemblée ne seront pas ignorés, afin que tous les acteurs de la recherche puissent enfin faire le pont entre les laboratoires et les entreprises (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF).

M. Jean-Yves Le Déaut - J’avais tout à l’heure terminé mon intervention sur un ton consensuel, et M. Dubernard lui-même reconnaissait que nous nous accordions sur le constat, mais les interventions du Gouvernement et de M. Fagniez me donnent l’impression d’assister au bal des amnésiques : loin d’un débat sur la recherche, c’est d’un combat de boxe qu’il s’agit, dans lequel on voudrait se satisfaire de ses propres insuffisances.

Je le répète, le rendez-vous est manqué. M. Hollande citait les Etats-Unis : les présidents Clinton et Bush ont doublé les crédits de la recherche publique afin de développer la recherche privée, notamment en matière de défense. Hélas, l’Europe, elle, a perdu la bataille des nouvelles technologies. Nous paierons cher demain pour n’avoir pas compris aujourd’hui que la recherche doit être la priorité d’un pays moderne.

Vous accusez M. Hollande de ne pas bien connaître son dossier, mais vous-même, Monsieur le ministre, disiez avoir rencontré les inspecteurs de l’enseignement supérieur : or, ceux-ci n’existent pas !

M. le ministre - Les conseillers !

M. Jean-Yves Le Déaut - Encore une approximation (Protestations sur les bancs du groupe UMP)… Vous évoquez les huit cents emplois créés par M. Schwartzenberg, mais vous oubliez ceux que M. Lang a créés dans l’enseignement supérieur, et la loi de programmation de l’emploi scientifique que le gouvernement Raffarin s’est empressé de supprimer ! Vous ne parlez pas de programmation en euros constants : si l’avis de l’Assemblée et de ses commissions l’emporte sur le vôtre, alors nous aurons fait un progrès de deux milliards d’euros sur le chemin des trois points de PIB !

Enfin, il aurait fallu inclure dans notre débat la place de l’université (Quelques applaudissements sur les bancs du groupe socialiste) ! Comment voulez-vous réorganiser le système de l’enseignement supérieur et de la recherche alors que, par peur des étudiants, vous refusez d’aborder cette question ?

M. Cohen et moi-même avions présenté un rapport au Premier Ministre en 1999…

M. Richard Mallié - Qu’a-t-il donné ?

M. Jean-Yves Le Déaut - … en insistant sur la nécessité de se préoccuper du gâchis en cours, au risque de ne plus avoir, d’ici à dix ans, de docteurs formés en France.

C’est l’ensemble des aspects du texte qu’il faudra discuter : programmation de l’emploi, rôle des universités, jeunes chercheurs, simplification des structures – car, au pays de la géologie politique, on aime à empiler les textes de loi… Nous verrons, au cours de l’examen des amendements, si le Gouvernement est prêt pour la réforme ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

La question préalable, mise aux voix, n'est pas adoptée.

M. Alain Claeys – En janvier 2004 naissait le mouvement des chercheurs, suscité par le désengagement des ministres successifs depuis 2002 – alors que le Président de la République faisait une priorité de la lutte contre le cancer, certains laboratoires perdaient jusqu’à 30 % de leurs crédits.

En juin 2004, le Président de la République annonçait une loi sur la recherche ; sept cents jours plus tard, nous y voilà, dans l’urgence, mais avec quinze jours de retard car le Gouvernement lui a préféré la précarité du CPE !

Des grands chercheurs comme MM. Brezin et Kahn, qui parlent d’occasion formidable, mais manquée…

M. le Président de la commission – Ce n’est pas ce qu’ils disaient lors des auditions !

M. Alain Claeys - …aux jeunes doctorants qui ne trouvent pas dans votre projet de loi les réponses qu’ils attendent, tous manifestent leur inquiétude et leur incompréhension.

Nos concitoyens expriment une crainte du progrès et s’interrogent sur la marchandisation de la connaissance. Nos jeunes hésitent à s’engager dans les filières scientifiques.

Ceux qui sont dans ces filières souffrent de ne pas être reconnus. La réflexion de M. Hollande sur les doctorants était à ce propos tout à fait pertinente. Pourquoi notre pays est-il l’un de ceux qui compte le moins de doctorants dans le secteur économique marchand ou dans la fonction publique ? Sa proposition visant à subordonner les allègements fiscaux à l’embauche de doctorants m’a semblé fort judicieuse.

Vous n’avez pas voulu faire de la recherche et de l’enseignement supérieur une priorité. Entre 2002 et aujourd’hui, quoi que vous prétendiez, les gouvernements successifs de M. Chirac n’ont pas été à la hauteur de leur mission.

Universités – où 80% de la recherche s’effectue – écoles d’ingénieurs et leurs classes préparatoires, organismes de recherche : un véritable projet, avant de songer à créer une nouvelle structure, aurait dû d’abord réfléchir à ces trois composantes, qui expliquent d’ailleurs pour une part la complexité de notre système. Il fallait d’abord s’attaquer au problème universitaire comme votre prédécesseur, M. de Robien, s’y était employé vainement car on ne réforme pas les universités lorsque les moyens font défaut. Il convient également de s’attaquer à la question de la gouvernance des universités. Ce n’est pas tant leur autonomie qui est en jeu mais l’articulation entre les universités, les UFR et l’ensemble de leurs composantes. Comment prétendre valoriser les carrières scientifiques lorsque la sélection, en premier cycle, se fait essentiellement par l’échec, comme la Cour des comptes en a fait état dans son excellent rapport ? Vous ne voulez pas de ces réformes parce que la communauté scientifique ne vous fait pas confiance.

Quant aux classes préparatoires, les moyens par étudiants y sont bien supérieurs à ceux dont disposent les étudiants de premier cycle, ce qui contribue aussi à expliquer la faible nombre de doctorants. Les grandes écoles, en effet, forment des ingénieurs qui travaillent ensuite essentiellement dans le management quand les docteurs restent au bord de la route.

Nous aurions pu penser que vous alliez enfin débloquer les moyens nécessaires à une vraie réforme, or, ni la programmation financière ni les dépenses en personnels ne sont à la hauteur : compte tenu de l’évolution probable du PNB, la progression effective entre 2005 – 20 milliards – et 2010 – 24 milliards –, sera insignifiante. Avec d’autres formations politiques, dont celle de M. Bayrou, nous avons quant à nous pris des engagements solennels devant le mouvement « Sauvons la recherche » afin que 3 % du PIB soit consacré à la recherche. S’agissant plus précisément des personnels, vous ne pouvez nier les efforts réalisés par le gouvernement de Lionel Jospin, non plus que leur remise en cause par M. Raffarin.

Deux questions se posent : pourquoi notre système est-il si complexe ? Ne profitez-vous pas de ce projet pour casser ce qui existe ?

M. le Ministre – Mais oui, c’est cela…

M. le Ministre délégué – Nous sommes pervers…

M. Alain Claeys – Votre projet, en effet, menace les organismes de recherche et va à l’encontre ce que qu’il faudrait faire pour l’université.

M. le rapporteur – Vous entendez, chers collègues ?

M. Alain Claeys – Qu’est-ce qui, au bout du compte, différenciera l’Agence Nationale de la Recherche et les organismes de recherche ? L’argent que l’État leur consacrera.

M. le Ministre délégué – Qu’il leur consacre déjà !

M. Alain Claeys - Nous savons très bien que ceux qui auront l’argent auront le pouvoir. J’ai discuté avec des chercheurs qui ont commencé à répondre à des appels d’offres et ils m’ont assuré qu’un déséquilibre était en train de se créer entre l’ANR et les organismes de recherche…

M. le rapporteur – Vous êtes contre les agences de moyens ?

M. Alain Claeys - … au point qu’une menace pèse sur un certain nombre d’entre eux.

M. le rapporteur – 10 % de plus pour le CNRS !

M. Alain Claeys – Quant aux PRES, nous n’y sommes pas a priori hostiles, mais quels seront leur mode de gouvernance et de quels moyens financiers disposeront-t-ils ? Nous ne voulons pas vous faire de procès d’intention, mais nous voudrions comprendre.

Autre thème qui manifestement vous gêne : les réseaux thématiques, d’abord appelés « campus » puis « PRES thématiques ». Nous y sommes en l’occurrence profondément opposés car cela reviendra à exclure les pôles d’excellence des universités.

M. le rapporteur – Mais non ! Vous déformez la réalité !

M. Alain Claeys – Pourquoi, alors, ne pas raisonner uniquement en terme de PRES ? M. Hollande a eu raison d’évoquer les pôles de compétitivité : comment ceux-ci s’articuleront-ils avec les PRES et les réseaux thématiques ? Nous ne le savons pas.

Quant à l’Agence d’évaluation de la recherche, je souhaite qu’elle ne soit pas une nouvelle usine à gaz alors que les évaluations actuellement réalisées sont pertinentes. Nous craignons là encore un nouveau démantèlement.

Les chercheurs attendent les propositions d’un État stratège et veulent continuer à travailler librement. Or, l’État ne sait pas où il va. Par exemple, vous avez créé une agence de biomédecine aux côtés de l’ANR et de l’INSERM, mais quelles relations ces différents organismes entretiendront-ils ?

Enfin, sur le plan du budget communautaire, comment voulez-vous que la France soit crédible lorsque le Président de la République affirme qu’à périmètre constant pas un sou supplémentaire ne sera versé, que toutes les politiques doivent être maintenues et qu’il faut assurer l’élargissement tout en faisant des efforts pour la recherche ?

Je souhaite que le débat apporte des éclaircissements. Les amendements que nous avons déposés n’ont d’autre but qu’éclaircir votre position, faire connaître nos différences et améliorer le texte (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Mme Anne-Marie Comparini - L’université et la recherche sont les moteurs du progrès de la connaissance, mais aussi de la compétitivité de nos entreprises. En France, l’effort public ne s’est pas renouvelé depuis les grandes politiques de 1958. Cinquante ans plus tard, le constat est alarmant : la recherche privée reste parmi les plus faibles des pays développés et la recherche publique souffre d’une absence de programmation financière, d’une grande rigidité et d’une mauvaise articulation avec les entreprises. Il faut donc se féliciter que la recherche soit revenue au premier rang de l’actualité, que la France ait pris conscience de ses faiblesses et qu’elle ait enfin constaté l’apport indiscutable de la recherche et de l’enseignement supérieur dans tous les pays développés.

Le projet de loi comporte des aspects positifs, tels que le renforcement des organes de pilotage et d'évaluation, le décloisonnement et le développement des coopérations entre le public et le privé, la revalorisation des emplois scientifiques et un effort financier de l'État. Mais, disons-le – dans un esprit constructif – il reste, sur certains principes, en deçà des attentes. La première de ces attentes est la responsabilisation et la création d’un lien fort avec les acteurs de l'innovation. Il faut leur faire confiance – et n'était-ce d’ailleurs pas votre intention en insérant cette loi dans un « pacte » ? La meilleure manière de convaincre, en la matière, est d'avoir des règles précises. Il faut d’abord garantir la liberté et l'indépendance des organes de pilotage et d'évaluation, puisque les choix stratégiques devront être développés ensuite par tous. Le projet étant flou, le débat devra préciser leur composition, les modalités de désignation de leurs membres et leur articulation avec les autres institutions. Ce travail de précision est nécessaire si l'on veut que les logiques d'excellence, de performance et de résultat soient intégrées par tous.

Il faut ensuite une architecture simple et lisible. Or, les structures nouvelles, nombreuses, se superposent à un système déjà fort complexe. Elles devraient avoir un rôle précis, pour se compléter plutôt que se neutraliser et pour faire évoluer les méthodes de gestion. Ne tournons pas autour du sujet : l'Agence nationale de la recherche peut aider les équipes scientifiques à sortir de leur mode archaïque d'affectation des crédits, mais il faudra clairement définir ses missions et la répartition financière entre priorités nationales, projets blancs, PRES et réseaux de recherche et d’innovation technologique. Il n’y a jamais eu trop de dialogue sur les missions respectives de l’ANR et de l’agence de l’innovation industrielle. Ce débat devrait en être l’occasion.

La deuxième attente est de redonner aux jeunes l'envie de s'engager dans les carrières scientifiques : cela passe par la rémunération et par de véritables parcours diversifiés et évolutifs, deux composantes qui font aujourd'hui défaut. Or, le projet fait des propositions en matière de politique de ressources humaines, mais elles ne sont pas assez vigoureuses. Il y aurait notamment beaucoup à faire pour simplifier les situations administratives et faciliter la mobilité des chercheurs. En matière de revalorisation des carrières, la France n'échappera pas, et à court terme, à l'examen d'un nouveau statut. Les avantages pourraient en être nombreux : il permettrait de donner de la souplesse dans l’articulation des activités de recherche, de formation et d'animation des équipes, serait conforme à la charte européenne du chercheur et éviterait la coexistence, pour la même activité, de rémunérations et de contrats nombreux et différents.

La troisième attente concerne notre capacité à soutenir la création d'entreprise, et surtout le développement des PME. Si nos grands groupes investissent presque autant que leurs concurrents internationaux dans la recherche et le développement, les PME, qui sont un formidable réservoir, ne sont pas assez présentes dans l'innovation. La création d'OSEO Anvar où les mesures fiscales vont dans le bons sens, mais elles manquent d'ampleur. L’un des problèmes de la croissance française étant de développer, dans les PME, la compétitivité de type qualitatif, moins fragile que la compétitivité-prix, le débat parlementaire ne pourra se passer de la position du Gouvernement sur leur accès aux pôles de compétitivité et aux crédits de l'AII et sur la mise en place d'un plan cohérent, adapté à leurs spécificités.

D’autres enjeux sont délaissés. Il en ressort un projet sous dimensionné, qui laisse le système national en retrait de ceux des sociétés performantes. Les mutations de l'université et de sa gouvernance sont ainsi renvoyées à plus tard, l’université étant la grande oubliée du texte, et la France demeure le seul pays où recherche et formation supérieure ne sont pas réunies malgré un périmètre très proche. Je peux comprendre qu'il soit impossible d’appliquer du jour au lendemain, dans les universités, ce triptyque vertueux recherche-formation-innovation – même s’il est pratiqué dans tous les pays – mais je regrette que vous n'ayez pas saisi l'occasion de la création des PRES pour lancer cette dynamique de gouvernance, ne serait ce qu’à titre expérimental. L'État aurait pu ainsi échapper à sa tradition jacobine. Cette proposition n'est pas le fruit d'un libéralisme échevelé : elle ne fait que prolonger le contrat quadriennal des universités, et la prochaine introduction des masters recherche y mène d’ailleurs tout droit. Plutôt que de subir ce rapprochement, choisissons de l'organiser !

Cette fâcheuse tradition jacobine explique aussi sans doute l'absence remarquée d'articulation de votre projet avec L'Europe. Mais une coordination est indispensable, car les stratégies nationales sont trop limitées dans une économie mondialisée. Je sais que vous en avez conscience, alors donnons à l'ECR les moyens de son action et repensons la politique européenne ! C’est à ce prix que la France retrouvera son rang. Rappelons que les investissements américains sont dix fois plus importants que ceux de l'Europe, que la stratégie de Lisbonne est au point mort et que la Chine et l'Inde ont mis les bouchées doubles !

Les collectivités territoriales, et surtout les régions, sont les autres oubliées du texte. Pourtant, dès 2003, le Président de la République avait déclaré qu’il fallait, pour compléter l’action de l'État pour la recherche et l'innovation, faire davantage confiance aux collectivités territoriales, que les régions étaient les mieux placées pour favoriser l'innovation dans les PME, et d'une manière générale pour développer les interactions, et que la décentralisation était une opportunité de renforcer leur rôle. Je vous épargnerai les compliments qu’il a adressés en la matière à la région Rhône-Alpes…

M. François Rochebloine - Au contraire !

Mme Anne-Marie Comparini – Les régions n’ont pas eu cette place dans l’acte II de la décentralisation et restent délaissées dans ce texte. Nous en reparlerons lors de la discussion des amendements. Ces débats permettront, et c’est essentiel, de s'interroger, avec pragmatisme – regardez la Finlande et la Suède ! – et sans idéologie sur les moyens de promouvoir la créativité, l'excellence et l'ouverture. Les autres universités européennes s'y préparent déjà. Nous ne saurions rester à l'écart de ce mouvement (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe socialiste).

M. Alain Bocquet – Ce projet de loi prétend mettre un terme à une bataille de trois ans entre les acteurs de la recherche et votre Gouvernement. En 2003, l’objectif de vos prédécesseurs était triple : placer la recherche sous pilotage gouvernemental plus étroit, donner la priorité absolue aux recherches de court terme et faire réaliser une grande part de la recherche par des salariés précaires. La mobilisation des personnels depuis lors a permis de stopper cette entreprise de destruction. Et en avril 2004, le gouvernement de l’époque a dû renoncer à transformer cinq cents postes statutaires en CDD, annoncer la création de trois mille postes et consentir un effort d’un milliard d’euros.

Cette première victoire obtenue, il fallait passer de la contestation aux propositions. C’est dans cet esprit que se sont tenus à Grenoble en octobre 2004 des États généraux de la recherche, dont on pouvait espérer que votre projet de loi reprendrait les conclusions.

Or, à vous écouter, Monsieur le ministre, on comprend que, pour vous, notre recherche est battue. Comment nous comparer avec la Californie ? Que faites-vous pour empêcher la fuite des cerveaux que forment nos universités et nos grandes écoles ?

M. Jean-Yves Le Déaut - En effet !

M. Alain Bocquet - Votre texte ne comporte, hélas, aucune avancée par rapport à 2003. Détournant les propositions des États généraux, il est rejeté par la communauté scientifique.

Vous vantez le dialogue mais vous poursuivez votre dessein sans égard ni pour les élans citoyens, ni pour les instances consultatives, comme en attestent la création de l’Agence nationale de la recherche en février 2005, huit mois avant le dépôt de ce projet de loi, et votre manque d’égard pour les avis, pourtant souvent convergents, du Conseil économique et social et des plus hautes instances de la recherche.

M. le Ministre délégué – Le Conseil économique et social est favorable au texte.

M. Alain Bocquet – Ce texte s’apparente davantage à une loi d’orientation qu’à une loi de programmation. Pour tenir les engagements européens pris à Lisbonne, notre pays devrait dépenser 57 milliards d’euros pour la science et la technologie d’ici à la fin de la décennie. Or, le « pacte » que vous proposez donne peu de chances d’atteindre ce résultat. Il prévoit que ces 57 milliards proviennent pour un tiers des caisses de l’État, pour deux tiers de celles des entreprises, ce qui supposerait que celles-ci augmentent leur effort de 70% – pari des plus hasardeux, en dépit des incitations fiscales.

M. le Ministre délégué – Les États-Unis ont fait encore mieux.

M. Alain Bocquet - Ce texte ne comporte pas non plus de véritable programmation pluriannuelle de créations d’emplois statutaires. Si trois mille postes seront créés en 2006 « dans les secteurs prioritaires de la politique scientifique », étant entendu que ce sont des postes supprimés d’un côté qui sont recréés de l’autre, et si « l’effort sera poursuivi en 2007 », vous refusez de vous engager de façon pluriannuelle sur les emplois statutaires. Vous choisissez au contraire de développer l’emploi précaire, bien que cette précarité croissante gangrène la recherche publique. En effet, la qualité du travail scientifique repose sur une capitalisation du savoir qui exige la stabilité des ressources humaines.

L’Agence nationale de la recherche et l’Agence de l’innovation industrielle misent sur l’élitisme, l’excellence au niveau mondial pour financer en fait des équipes portant des projets à exigence de rentabilité immédiate. A mettre ainsi en concurrence laboratoires et personnels, il est à craindre que des pans entiers de notre recherche, jugés non rentables, disparaissent progressivement. C’est l’Agence nationale de la recherche qui déterminera la politique scientifique nationale, alors même que plus de la moitié des membres de son conseil d’administration émane de ministères, et non de la communauté scientifique -preuve, s’il en était besoin, que le Gouvernement cherche bien à piloter la recherche. Dans ce contexte, que vont devenir les grands organismes de recherche, le CNRS en particulier ?

La nouvelle Agence d’évaluation de la recherche aura pour mission d’évaluer la recherche publique « de manière systématique, transparente et homogène ». Mais, aux yeux de la communauté scientifique, la légitimité des évaluations tient au fait qu’elles portent régulièrement sur les unités et les personnes, et dépendent d’instances nationales, seules à même de s’affranchir des intérêts de chapelle. En un mot, ces évaluations ne valent que si elles émanent de chercheurs reconnus et élus par leurs pairs. Ce laminage de notre système de recherche conduira immanquablement à laisser une part croissante au privé.

Les outils prétendument mis en place pour renforcer les coopérations et favoriser le développement de grands campus de recherche reconnus au niveau international entraîneront de fait une concurrence farouche entre établissements. Ainsi les pôles de recherche et d’enseignement supérieur, tels que conçus, laissent-ils redouter une implosion des universités entre collèges universitaires, consacrés aux licences, et ces pôles, les personnels ayant dans les deux cas des statuts et des avantages différents. Articulés aux pôles de compétitivité, ces PRES, reposant sur un modèle concurrentiel, feront, au nom des priorités, le tri entre les personnels et les projets.

Au total, ce projet de loi, sans ambition ni moyens, ne reprend aucun des principes énoncés par les États généraux ni posés par les syndicats. L’empilement de nouvelles structures ne résoudra en rien les difficultés de concertation horizontale au sein de la recherche publique ou entre public et privé, alors qu’il aurait fallu encourager cette concertation plutôt qu’exacerber la concurrence.

Le groupe communiste et républicain a donc déposé de nombreux amendements. Nous exigeons des moyens financiers et humains à la hauteur des enjeux pour notre pays et nos régions, notamment pour compenser des déséquilibres flagrants – ainsi la région Nord-Pas-de-Calais ne regroupait-elle, fin 2004, que 1,76 % des effectifs globaux du CNRS ! Au lieu de créer une Agence nationale de la recherche surdimensionnée, mieux vaudrait augmenter les crédits de base des laboratoires, en lien avec l’investissement des entreprises dans la recherche. Les établissements publics doivent conserver les moyens de leur autonomie et les missions de l’ANR être limitées par la loi. Des emplois de titulaires doivent être programmés pour offrir aux personnels aussi bien scientifiques que techniques et administratifs des carrières gratifiantes. Quant aux doctorants, ils doivent bénéficier d’un véritable statut de salarié.

Attachés à la coopération, nous souhaiterions que les PRES la facilitent entre universités et organismes de recherche, comme entre laboratoires et équipes, grâce à des structures favorisant l’interdisciplinarité et le lien entre recherche et enseignement dans tous les cycles. Nous demandons également que les évaluations des chercheurs et des structures, mieux articulées, relèvent des instances existantes, toutes restant composées majoritairement de membres élus.

Nous tenons enfin à réaffirmer l’importance de la recherche publique qui ne doit pas viser le profit immédiat, mais l’intérêt général à plus long terme, en répondant aux demandes sociétales. Si, comme le soulignaient récemment dans la presse deux éminents directeurs de recherche au CNRS, Francis-André Wollman et Henri Audier, nul ne conteste la nécessité de développer la recherche industrielle ni ses liens avec la recherche publique, le vrai débat porte sur la nécessité ou non de soutenir davantage les recherches visant principalement au développement des connaissances, sans se soucier a priori de leurs retombées. Des chercheurs du secteur public sont ainsi en train de mettre au point en Belgique un vaccin contre la grippe qui, contrairement au vaccin actuel efficace seulement pendant un an, protégerait pendant dix ans. Animée d’abord par la recherche de la rentabilité financière à court terme, l’industrie pharmaceutique ne se hâte pas de le mettre sur le marché… Cet exemple à lui seul montre toute l’importance de défendre l’autonomie de la recherche, dont l’une des conditions est le recrutement de personnels permanents sous statut public.

Contraire aux attentes de la communauté scientifique comme aux besoins de notre pays, votre projet de loi fait la part belle à la recherche privée ou « partenariale », utilitariste et économiquement rentable, au détriment de la recherche fondamentale et d’une recherche publique indépendante au service du bien commun. Il compromet l’avenir et menace un pays comme le nôtre, qui est encore l’un des principaux acteurs de la recherche en Europe et dans le monde. Notre combat sera donc à la hauteur de ces dangers et de ces enjeux (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste).

M. Pierre Lasbordes - Nous voici parvenus à un moment clé d'un long processus dont l'origine se situe notamment dans la mobilisation inédite des chercheurs durant l'année 2004, laquelle a révélé un malaise profond et ancien. Après de nombreux débats et la publication de plusieurs rapports – en particulier celui réalisé par notre collègue Jean-Pierre DOOR –, c’est un texte très attendu qui nous est soumis. Très attendu de la communauté scientifique, traversée par une crise de confiance, mais aussi par notre pays tout entier, soucieux de répondre aux exigences d'un monde en mutation où la science est devenue l'un des principaux moteurs de la compétition économique. Cette double attente nous place à la fois dans la nécessité du mouvement et dans l'obligation de maintenir les équilibres et votre texte satisfait à cette indispensable dualité.

Alors que le monde avait changé, notre recherche est restée en deçà de sa vocation. Prisonnière de règles tatillonnes, la recherche française n'avait pas la place qu'elle était en droit d'attendre. Je ne reprendrai pas l'ensemble des mesures du projet de loi, bon même s'il est perfectible. Jean-Marie Lehn a écrit récemment que ce texte apportait une « bouffée d'oxygène » et qu'il constituait « un véritable outil d'ouverture et de liberté pour la communauté scientifique ». Aussi, j'insisterai tout d'abord sur les mesures qui tendent à restaurer la confiance.

La recherche doit retrouver la confiance, en l'État et en elle-même. Un premier signal fort est lancé à la communauté scientifique, qui rompt avec les habitudes de défiance et les a priori traditionnels. Je veux parler de la création du Haut conseil de la science et de la technologie, qui, par son caractère incontestable, rappelle l’instance créée en son temps par le Général de Gaulle. La parole de la communauté scientifique sera entendue au plus haut niveau et, contrairement à ce que craignent certains, elle ne lui sera nullement confisquée. Cette disposition suffira-t-elle à contenter la volonté du monde socio-économique et associatif de participer au débat ? Je ne le crois pas.

Un second signal est donné en appliquant un contrôle financier a posteriori aux EPST, même s’il sera nécessaire d'en évaluer l'impact. Cette évolution consacre la « culture de confiance » que j'ai appelée de mes vœux lors de chaque examen budgétaire et qui constitue l'assise de relations durablement apaisées.

Bravo, Messieurs les ministres, pour ces deux mesures qui témoignent de la confiance que l'État fait à la communauté scientifique.

Mais faire confiance, c'est également faire simple. L'une des principales difficultés que rencontre notre système de recherche tient à l'obligation qui lui est faite d’accomplir des tâches qui dépassent les contours stricts de l’activité de recherche. Produits du «génie français», la complexité et la rigidité des procédures administratives sont parvenues à un niveau tel qu'elles tendent à paralyser au quotidien le travail de recherche. S’inscrivant dans cette logique détestable, l’application sans discernement du code des marchés publics en a donné une funeste illustration et je suis heureux de constater que le Gouvernement accède à la demande ancienne d'exonérer les EPST et les EPSCP de son application pour ses achats scientifiques. S’ajoute à cet effort important de simplification la mise en place d'un mandataire unique dans les UMR. Oui, Messieurs les ministres, faire simple permet non seulement d'accroître le temps disponible pour la recherche mais répond également aux aspirations les plus profondes de la communauté scientifique.

Pour autant, cette confiance ne peut se satisfaire d'elle-même et rien ne serait possible sans la mobilisation de moyens d’accompagnement appropriés. Après deux exercices budgétaires successifs en forte augmentation, le projet du Gouvernement prévoit un engagement humain et financier de l'État sans précédent, en dépit d’un contexte économique des plus contraints. Les moyens de la recherche augmenteront en effet jusqu'à atteindre un montant cumulé de 19,4 milliards pour la période 2005 – 2010. Les crédits publics de recherche progresseront ainsi de 27 % ! Toutefois, nous souhaitons que ces moyens soient désormais exprimés en euros constants.

M. Claude Birraux, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques – Très bien !

M. Pierre Lasbordes - L'évolution des moyens humains de la recherche publique - près de 3 000 postes créés en 2006 – est d'une ambition comparable ; sans commune mesure avec les annonces électoralistes faites par la gauche en 2002 et qui prévoyait la création de seulement 800 postes nets en dix ans…

M. Roger-Gérard Schwartzenberg - C’est inexact.

M. Pierre Lasbordes - Ce qui est certain, c’est que jamais un Gouvernement n’aura créé autant de postes puisque les recrutements dans la recherche publique vont connaître, dans les prochaines années, un taux de progression de 4,5 %, supérieur au taux moyen de remplacement de 3 %. Certains auraient souhaité voir figurer dans le projet un plan pluriannuel de gestion prévisionnelle d'emploi scientifique. Nous préférons nous associer à l’amendement adopté en commission qui tend à ce que le gouvernement présente chaque année un état prévisionnel indicatif sur cinq ans des recrutements de personnels, statutaires et non statutaires, dans la recherche publique, sans préjuger de la nature des postes afférents.

Enfin, vous mobilisez des moyens structurels. En pérennisant l'Agence nationale de la recherche, le texte permettra à notre pays de se doter d'une grande agence de moyens, outil moderne et adapté. Espace de liberté, l'agence n'est certainement pas, comme on l’a dit parfois, contraire aux « projets blancs ». Elle suscitera une recherche fondamentale forte, irriguée par la base et non par le haut. Et si ses premiers résultats sont très encourageants, deux conditions me semblent essentielles à sa réussite. Il faut d’abord qu’elle fasse preuve d’une transparence totale dans le choix des projets retenus et aussi qu’elle ne confisque pas les crédits dédiés aux opérateurs.

Outre les moyens, pour qu'une recherche soit efficace, il faut assurer son suivi par une évaluation transparente, cohérente et simple. En effet, bien qu’incomplet, notre système d'évaluation actuel est trop compliqué et le volet enseignement de l’activité de recherche n’est pas évalué. Par ailleurs, les procédures souffraient d’un manque flagrant d'harmonisation et de transparence, cependant que la multiplicité des instances était pénalisante. Pour y remédier, votre projet crée l’Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur, chargée d’évaluer de manière systématique les activités de recherche et de veiller à la cohérence des procédures retenues. Toutefois, l'évaluation des personnes sera laissée aux organes internes des établissements. Cette évaluation devra bien entendu s'appuyer sur des critères clairs, être conforme aux pratiques internationales et conduite avec le concours d'experts incontestables, en liaison avec les opérateurs de recherche. Enfin, elle devra s’inspirer d’un souci constant de simplification. En la matière, les efforts déjà accomplis doivent se poursuivre.

Mais ce sont surtout les efforts en direction des jeunes que je tiens à saluer. Si l'attractivité des carrières ne se décrète pas, elle s'organise. Les formations scientifiques sont au cœur d'une économie fondée sur la connaissance et l'innovation. Las, force est d’admettre que ces filières ne sont pas suffisamment attrayantes, faute d’offrir des perspectives de carrière satisfaisantes et d’assurer, après plus de huit ans d'études, une rémunération décente. Aussi, les mesures destinées à favoriser les conditions d'entrée des docteurs dans la carrière scientifique, à permettre aux jeunes maîtres de conférences, lorsque leurs travaux le requièrent, de bénéficier de décharge d'enseignement représentant jusqu'à la moitié du service statutaire, la valorisation de la mobilité internationale et des expériences en entreprises, introduisent une souplesse indispensable et bienvenue. Je salue aussi la création des bourses Descartes, qui permettront à des jeunes enseignants chercheurs, après avoir été sélectionnés par un jury international, de bénéficier d'un complément de rémunération et d'une décharge de leurs activités d'enseignement.

Ces évolutions attendues ne doivent cependant pas occulter l'effort réalisé sur les allocations de recherche. En poursuivant la politique menée depuis 2002, le montant des allocations a été accru de 30 %, alors qu’il n’avait progressé que de ...0 % entre 1997 et 2002 ! D’ici à 2010, je souhaite que ce montant puisse atteindre, au minimum, 1,5 SMIC. Et il est impératif de solder – une fois pour toutes et à brève échéance – les libéralités.

Mais ces formations scientifiques n’attireront vraiment les jeunes que si elles débouchent sur des perspectives claires et lisibles en terme de recrutement et d'emploi, dans les secteur public et privé et en tenant compte à la fois des besoins de la recherche et de ceux de l'économie. Le véritable enjeu est donc de donner aux diplômes des docteurs français une valeur incontestable dans le concert européen, dans la logique de la réforme LMD. A cet égard, il est impératif de favoriser le rapprochement entre les formations doctorales et le monde de l'entreprise, afin de donner une impulsion à l'insertion des doctorants, post-doc et docteurs dans les entreprises.

N'est il pas opportun, Messieurs les ministres, de mobiliser toutes nos énergies pour se rapprocher du monde de l'entreprise – des branches notamment –, de sorte qu'elles apprécient à leur juste valeur les formations dispensées dans les écoles doctorales, et pour qu'à terme, l'embauche des docteurs puisse être favorisée, comme l'est celle des ingénieurs ? Il est d'ailleurs souhaitable que l'option « thèse » soit fortement encouragée dans les grandes écoles d'ingénieurs.

Trop longtemps aussi, la recherche est restée cloisonnée, divisée entre le monde académique et le monde économique, entre recherches publique et privée, entre recherches fondamentale et appliquée. Le projet du Gouvernement consacre la volonté de tisser des liens plus forts entre toutes les facettes de la recherche, et, notamment, d'intensifier la recherche privée, actuellement déficitaire en nombre de chercheurs et en dépenses.

Les PME et les jeunes entreprises innovantes, les grands programmes technologiques et les partenariats entre recherches publique et privée constituent les principaux leviers sur lesquels l'effort de la nation doit peser pour inverser cette tendance. Votre projet de loi y répond.

Pour conclure, je voudrais insister sur les collaborations entre les acteurs de la recherche publique et l'université. Le Gouvernement a su mobiliser avec succès les acteurs scientifiques –universités, organismes, entreprises – dans le cadre des pôles de compétitivité sur des thématiques définies. C'est dans cet esprit que votre projet de loi a crée les PPRES – pôles pluridisciplinaires de recherche et d'enseignement supérieur à forte visibilité internationale pour exaucer une demande ancienne de la communauté scientifique. Ils seront complétés par les RTRA – réseaux thématiques de recherche avancée – qui correspondent, pour faire simple, à des pôles d'excellence thématique. Au reste, de telles structures existaient déjà mais sans cadre juridique.

Messieurs les ministres, l'ambition pour la recherche française se mesure dans la durée. Cette loi de programme va permettre à notre recherche d'être aux rendez-vous du nouveau siècle. Il ne faut cependant pas imaginer que seul un projet de loi suffise pour tout résoudre. Au nom du groupe UMP, je serai toutefois heureux de valider par mon vote l’étape décisive que vous nous faites franchir (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Roger-Gérard Schwartzenberg – Monsieur de Robien, depuis 2002, vous êtes le troisième hôte de la rue de Grenelle, et vous, Monsieur Goulard, le quatrième de la rue Descartes : on ne peut donc pas vous imputer personnellement les erreurs et les lenteurs de vos prédécesseurs. Force est cependant d’admettre que, depuis 2002 et le changement de majorité, les gouvernements successifs n’ont cessé de faire perdre du temps à la recherche française.

Dans un premier temps, de 2002 à 2004, le Gouvernement a fait prendre beaucoup de retard à la recherche en sacrifiant ses crédits et ses emplois et en la traitant en parent pauvre réduit à la portion congrue. Chute des crédits et baisse des emplois ont marqué cette période. Ainsi, le premier budget – celui de 2003 – a supprimé 150 emplois de chercheurs statutaires et a réduit les crédits de la recherche, qui ont en outre subi deux annulations successives. Par leur effet cumulé, ces décisions ont provoqué une baisse de l'ordre de 30 % des moyens de fonctionnement – hors salaires – des organismes de recherche.

Condamnés à l'asphyxie financière, les laboratoires ont connu de graves difficultés, beaucoup devant annuler ou interrompre des projets de recherche. Bref, la recherche française s 'est retrouvée en panne. Vous avez ensuite poursuivi les annulations de crédits et les suppressions d'emplois statutaires. La loi de finances initiale pour 2004 a supprimé 550 emplois de titulaires, remplacés par des contractuels recrutés sur des CDD de trois à cinq ans, soit de véritables « intermittents de la recherche ». Cette suppression de 550 emplois statutaires a finalement été annulée grâce au mouvement de protestation des chercheurs, qui se sont mobilisés contre ces coupes claires dans les budgets et les emplois scientifiques. En effet, on ne peut rien bâtir de solide avec des laboratoires paupérisés et des chercheurs précarisés.

Dans un second temps, face à ce mouvement, changement d'attitude : le 6 janvier 2004, le chef de l’État annonce une loi de programmation de la recherche et son adoption avant la fin de la même année. Las, ceux qui attendaient une réforme TGV ont eu une réforme tortillard ! Nous voici donc fin février – pour ne pas dire début mars – 2006. Il vous aura donc fallu deux ans pour soumettre aux députés le projet de loi annoncé avec solennité dès janvier 2004. Le Gouvernement a accumulé délais et retards dans l'élaboration d’un texte qui n'était manifestement pas sa priorité. Il est allé de reports en reports, d'ajournements en ajournements et d'atermoiement en atermoiement. En janvier 2004, M. Chirac parlait d'une adoption avant la fin 2004 : parole puisque le présent projet n'a été soumis au conseil des ministres que le 23 novembre 2005. Résultat : nous débattons de ce texte, annoncé au nouvel an 2004, le jour du mardi gras 2006, soit 780 jours plus tard !

Autre paradoxe, alors que le Gouvernement a fait preuve d'inertie, puis de lenteur – au risque de transformer l'élaboration de ce texte en « longue marche » –, il somme désormais les parlementaires de délibérer, eux, dans la précipitation, en déclarant l'urgence, ce qui prive les élus du temps nécessaire à un examen rigoureux, alors qu'une navette aurait été très utile pour améliorer un projet aussi important. Après avoir fait traîner en longueur sa rédaction, le Gouvernement contraint les parlementaires à l'examiner dans la hâte et à le voter au pas de course. Le choix de l’urgence traduit un manque de considération pour la recherche, qui méritait mieux que cette procédure expéditive.

Pis, il faut non seulement voter à la sauvette, mais encore délibérer en catimini. Car vous cherchez à escamoter le débat. En effet, vous avez choisi de soumettre ce texte d'abord au Sénat – ce qui est insolite – et, de surcroît, de le faire statuer le 21 décembre dernier, à quelques jours de Noël, en pleine période de fêtes. Il n'était pas très convenable de mettre ainsi à profit la « trêve des confiseurs » pour assurer le moins de publicité possible à ce texte.

Enfin, le texte nous est présenté à l’Assemblée vingt-six mois après son annonce par le Président de la République.

M. Jean-Yves Le Déaut - Quelle gestation douloureuse !

M. Roger-Gérard Schwartzenberg – Ce texte tardif est curieusement rétrospectif – il englobe l'année 2005 – sans être prospectif, le Gouvernement s’étant refusé à s’engager sur une programmation pluriannuelle des crédits et des postes. Pourtant, beaucoup l’ont souligné, la recherche doit être soutenue dans la durée.

Qualifier ce texte de « loi de programme » constitue un abus de langage. En effet, ce type de loi a pour objet d'inscrire une politique dans la durée en lui affectant des crédits pluriannuels, qui doivent être honorés lors de l’adoption des lois de finances annuelles. La communauté scientifique attendait un engagement quinquennal de l’État sur les moyens financiers alloués à la recherche comme celui-ci l’a fait pour la période 2003-2007 par les lois d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure et celle pour la justice, promulguées à l'été 2002. Au lieu de cela, ce texte présente une programmation tronquée, « une programmation croupion », qui vaut seulement pour deux petites années : 2006 – dont le budget est déjà voté – et 2007 – année électorale propice à toutes les promesses. On a envie de dire comme Cyrano : « c'est un peu court ». Dans la version initiale de ce texte, le Gouvernement avait même lié l’attribution de moyens supplémentaires pour les années 2008 à 2010 à un rapport d’étape présenté par le Gouvernement au Parlement avant le 30 septembre 2007. Fort heureusement, le Sénat a supprimé cette disposition. Mais, il y a tout lieu de craindre qu’elle ne soit rétablie à l’Assemblée puisque la Haute assemblée est allée contre l’avis du Gouvernement. Si tel était le cas, votre programmation financière s’interromprait en 2007 et ne relèverait que d’une politique d’affichage.

Par ailleurs, ce texte alloue à la recherche des moyens en trompe-l’œil. Pour faire illusion, le texte additionne pêle-mêle les crédits budgétaires de la mission interministérielle recherche et enseignement supérieur, des ressources extrabudgétaires et des avantages fiscaux, chacun de ces financements représentant un tiers de l'effort supplémentaire annoncé. Ainsi, les moyens de l'agence nationale de la recherche proviennent du compte d'affectation spéciale alimenté par les recettes de privatisations dont rien ne garantit la pérennité à moins que vous ne continuiez de privatiser à tout va ce qu’il reste d’entreprises publiques françaises. Il est d'ailleurs paradoxal de financer un secteur déclaré prioritaire par des crédits virtuels. D’autre part, par un artifice comptable, sont présentées comme de nouveaux moyens destinés à la recherche des dépenses fiscales – crédit d'impôt-recherche et d'autres allégements fiscaux en faveur des entreprises – qui correspondent en réalité à des moindres rentrées fiscales. M. Fourcade, ancien ministre des finances, a noté que les confondre avec les crédits relève de l’artifice comptable. Du reste, leur montant, fixé à 1,7 milliard d'euros en 2010, semble irréaliste à moins qu’il ne soit délibérément surestimé. Au vrai, il dépend de la demande hypothétique des entreprises qui peuvent solliciter ou non ces avantages, dont l’effet incitatif sur la recherche est par ailleurs faible. La croissance de la recherche privée, traditionnellement faible en France, ne se décrète pas.

M. le ministre délégué Pourtant, elle est là !

M. Roger-Gérard Schwartzenberg - Enfin, ce projet de loi ne comporte aucune programmation des effectifs de la recherche à la différence des lois de programmation pour la sécurité intérieure et pour la justice par lesquelles le Gouvernement s’est engagé à créer en cinq ans 13 500 emplois dans la police et la gendarmerie et 10 100 dans la justice et l'administration pénitentiaire. Cela signifie-t-il que, pour ce Gouvernement, la recherche est moins prioritaire que la sécurité intérieure et la justice ? En 2001, alors que j’étais ministre de la recherche du Gouvernement Jospin, un plan de gestion pluriannuelle de l'emploi scientifique avait été adopté. Il donnait aux étudiants et doctorants des perspectives claires de recrutement pour les inciter à poursuivre des études scientifiques. Il poursuivait trois objectifs : anticiper les départs à la retraite massifs des années 2006-2010 ; rajeunir la recherche publique en permettant aux jeunes docteurs de s'y insérer plus rapidement au lieu d'être contraints à une longue attente, voire à l'expatriation ; enfin, renforcer durablement les effectifs de la recherche publique. Il prévoyait la création de 1 000 emplois supplémentaires de 2001 à 2004, dont 800 à titre définitif. Parallèlement, Jack Lang, alors ministre de l’éducation et de l’enseignement supérieur, avec un plan analogue, augmentait le nombre d'enseignants-chercheurs et d’ITA – ingénieurs, techniciens et administratifs – dans les universités. Ces deux plans représentaient une création nette de 1 750 emplois par an, soit 1 500 pour l’enseignement et 250 pour la recherche. Or Mme Haigneré a abandonné ce plan pluriannuel de recrutement et supprimé des emplois statutaires au lieu d'en créer. Face au mouvement de protestation des scientifiques qui s’en est suivi, le pouvoir a déclaré en 2004 se rallier à une programmation pluriannuelle de l'emploi scientifique. Ainsi, le 17 mars 2004, M. Chirac adressait une lettre au collectif « Sauvons la recherche » dans laquelle il promettait une planification transparente de l'évolution chiffrée des effectifs et des crédits de la recherche.

M. Jean-Yves Le Déaut - Ah, que de promesses !

M. Roger-Gérard Schwartzenberg - Le 28 octobre 2004, M. Fillon réitérait devant les États généraux de la recherche à Grenoble l’engagement du Président de la République. Une fois de plus, il y aura donc contradiction entre les promesses et les décisions, entre les discours et les actes. Malgré l’appel que la communauté scientifique a lancé aux parlementaires le 12 décembre dernier et les recommandations de la commission spéciale du Sénat, vous vous bornez à créer benoîtement un observatoire de l'emploi scientifique alors qu'il existe déjà un observatoire des sciences et des techniques. Plutôt que d’observer l’évolution de l’emploi scientifique, vous auriez dû le programmer. Cette attitude dilatoire est particulièrement regrettable et constitue un signal très négatif adressé aux étudiants et surtout aux jeunes docteurs. Faute d'assurances sur les débouchés offerts dans notre pays, ceux-ci risquent de continuer à s'expatrier. Ainsi, la France met gracieusement à la disposition d'économies concurrentes des jeunes chercheurs dont elle a financé la formation, subventionnant ainsi la recherche américaine, britannique ou allemande. Il y a là un gâchis humain et un non-sens économique qui appauvrissent la collectivité nationale.

D’autre part, les 3 000 postes créés par le budget 2006 ne sont pas destinés exclusivement à la recherche : d’une part, ils sont répartis entre des postes de chercheurs dans les organismes de recherche et des postes d’enseignants-chercheurs dans les universités où les tâches d’enseignement sont lourdes ; d'autre part, la moitié d’entre eux sont des postes d'ingénieurs et de techniciens. Bref, en 2006, les établissements de recherche verront leurs effectifs de chercheurs s'accroître d'environ 500 postes, ce qui n'est pas négligeable, et non pas de 3 000 comme cela est parfois entendu. Ce rattrapage était nécessaire : 150 emplois avaient été supprimés dans le budget 2003 et aucun créé dans les budgets 2004 et 2005.

Notre pays doit augmenter sensiblement le nombre de ses scientifiques pour se hisser au niveau des États-Unis et du Japon, qui comptent respectivement 8 et 10 chercheurs pour mille actifs, contre 6 seulement en France. Sans cet effort, notre économie sera moins compétitive et nos jeunes docteurs – qui forment un vivier de grande qualité – partiront à l’étranger.

Au total, votre texte apparaît incertain quant aux moyens financiers annoncés et lacunaire quant à la programmation des emplois. Il constitue plutôt une loi d'affichage, fondée sur de faux-semblants, et, par son caractère tardif, amène à se demander si, depuis 2002, la recherche n'est pas souvent devenue la recherche du temps perdu.

Le 3 juin 1953, dans son discours d’investiture, Pierre Mendès France déclarait : « La République a besoin de savants. Leurs découvertes, le rayonnement qui s’y attache, leurs applications, contribuent à la grandeur d’un pays. » En 1956, il déclarait lors du colloque de Caen : « Le développement de la science est au premier chef affaire politique. »

Puisqu’il en est ainsi, et que nous n’avons pas le sentiment d’être majoritaires…

Mme Martine Lignières-Cassou – C’est plus qu’un sentiment !

M. Roger-Gérard Schwartzenberg - … je pense qu’il faut se tourner vers les électeurs afin qu’ils fassent un choix dans cette matière. Après avoir relu dans Le Monde l’article signé par Edouard Brézin, Pierre Joliot et Axel Kahn, intitulé « Un manque d’ambition navrant », je voudrais dire que, attachés – comme vous, je le sais – à une recherche active, dans une France qui crée, qui innove et qui invente, nous ne sommes pas au même rendez-vous (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Noël Mamère - Très bien !

Mme Valérie Pecresse - Nous ouvrons ce soir un débat crucial. La mobilisation récente du monde de la recherche a permis de prendre conscience que l'économie du XXIe siècle serait fondée sur le savoir et que la France n'était pas suffisamment armée, alors que sa place dans le concert des nations et l'avenir de nos enfants sont en jeu.

Face à l'hyperpuissance américaine et à l'émergence de nouveaux acteurs asiatiques, nous devons rassembler nos forces et les mettre en commun avec nos partenaires européens, afin d’atteindre les objectifs de Lisbonne et de Barcelone, – soit la construction d’une Europe de la connaissance.

Le Gouvernement a pris la mesure de ce défi en proposant un Pacte pour la recherche, inédit par son envergure. La commission des affaires sociales soutiendra un certain nombre d’amendements pour aller plus loin encore : pour consacrer le rôle primordial de la recherche, notamment celui de la recherche fondamentale, pour attirer et conserver dans ces métiers les meilleurs d’une génération et pour encourager la valorisation des découvertes. Tout cela pourrait se résumer en un triptyque : ambition, audace, confiance.

Ambition, d’abord. Si, en 1993, la France se situait au cinquième rang mondial, avec 2,2 % de son PIB consacré à la recherche, elle n'est plus que treizième aujourd'hui… je vous laisse vous souvenir des Gouvernements qui se sont succédé durant cette période. Il est nécessaire de déployer un effort financier de grande ampleur et d’utiliser, de la manière la plus efficace possible, les crédits affectés à la recherche. Au-delà des augmentations spectaculaires prévues pour 2005, 2006 et 2007, nous souhaitons, comme nos collègues sénateurs, une véritable programmation annuelle des crédits, de 2005 à 2010.

C'est pourquoi nous approuvons l'engagement d'atteindre un effort public global de 24 milliards d'euros en 2010, de 27 % supérieur aux crédits de 2004. A l'augmentation des crédits récurrents consacrés aux établissements publics de recherche et d'enseignement supérieur, viendront s’ajouter les 800 millions d’autorisations d’engagement accordés à l’ANR en 2006 et les 2 milliards alloués à l’AII d’ici à 2007. L'augmentation des dépenses fiscales, portées à 1,7 milliards d'euros en 2010, dynamisera la recherche privée et encouragera les entreprises à recruter des chercheurs.

Cette programmation budgétaire jusqu'en 2010 a essentiellement une valeur politique, mais il s'agit d'un « contrat moral », dont on ne peut imaginer qu'il puisse être remis en cause par un éventuel changement de majorité en 2007 (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste). Nous souhaitons qu’elle se fasse en euros constants, afin que cet effort ne soit pas soumis aux aléas de l'inflation et perdure.

Cette programmation devra inclure la mise en place d'un état prévisionnel des emplois, tant il est vrai que nous devons offrir une bonne visibilité en termes d'emplois et de carrière afin d’attirer les jeunes. En effet, la moitié des chercheurs français a plus de 50 ans et le pic des départs sera atteint entre 2008 et 2012 : il est nécessaire que, sans rigidifier les futurs recrutements, le Gouvernement présente des indications claires sur les besoins en ressources humaines afin de mieux orienter les talents, d’éviter les à-coups dans le recrutement et de sécuriser davantage les parcours de formation. Quoi de plus démotivant en effet, pour un futur thésard, que le taux actuel de chômage des jeunes doctorants, de 11 % ?

Nous souhaitons également que le montant des allocations de recherche atteigne au minimum 1,5 fois le montant du SMIC d'ici à 2010, ce qui serait un signe fort de reconnaissance de la nation. Monsieur le ministre, l'ambition de votre projet doit être soutenue par une vraie programmation, des moyens financiers et des emplois à pourvoir.

L'audace, c'est s'engager massivement en faveur de la recherche fondamentale, dont. découlent les grandes découvertes scientifiques. Comme elle n’est pas rentable à court terme, il revient à la puissance publique de la financer. Le projet de loi propose une rénovation de l'organisation de notre recherche, avec le Haut Conseil de la science et de la technologie, chargé d’élaborer une stratégie nationale, et avec l’ANR, chargée des appels à projets.

L'audace sera aussi de consacrer une part notable du budget de l'Agence à des projets « blancs », non thématiques, souvent à l'origine des ruptures scientifiques. Nous devons apprendre à valoriser le talent de ceux qui n'ont rien d'autre à vendre que leurs idées. L'audace sera encore de permettre aux bénéficiaires des crédits de l’ANR de contribuer au financement des organismes auxquels ils appartiennent. L'audace reviendra enfin, comme nous vous le proposerons, à transposer en droit français le Bayh-Dole Act américain, à l'origine de bien des succès en matière de valorisation de la recherche.

La confiance, pour finir. En simplifiant les procédures auxquelles sont soumis les laboratoires, en instaurant un contrôle a posteriori de l'utilisation des crédits, en facilitant la mobilité des chercheurs, en encourageant la constitution de réseaux, nous souhaitons engager un changement culturel.

Le corollaire indispensable de cette culture de confiance est l’instauration d’un dispositif d'évaluation qui concernerait tous les acteurs de la recherche, y compris ceux exerçant leur mission dans des établissements d'enseignement supérieur.

Ce projet n'est qu'une première étape franco-française avant les indispensables rapprochements européens, mais il est pour nous une occasion unique de lancer une nouvelle dynamique et de replacer la recherche au cœur de notre contrat social (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Yves Bur – Quelle audace !

M. Pierre-Louis Fagniez - Ce projet de loi est directement issu des états généraux de la recherche : les chercheurs sont descendus en 2004 dans la rue, un report de crédit ayant réveillé de nombreuses rancoeurs, accumulées depuis vingt ans. Comme les infirmières et les pompiers, les chercheurs ont la faveur des Français. Animés par la passion de leur métier, ils souhaitent seulement que les Gouvernements leur garantissent des investissements de long terme et un emploi stable. Les états généraux de la recherche ont donc fixé quatre priorités : un milliard par an pour la recherche, avec une programmation jusqu'en 2010 ; une élaboration des connaissances fixées par un Haut conseil de la science ; le renforcement de l’attractivité des métiers de la recherche ; la création de PRES afin de refonder le partenariat entre universités et les autres acteurs de la recherche.

Messieurs les Ministres, M. le Rapporteur, Pierre Lasbordes et Valérie Pécresse vous ont donné acte de votre volonté de répondre aux aspirations de nos chercheurs. Je souhaite pour ma part centrer mon propos sur les PRES, qui ont pour objectif de réunir plusieurs établissements ou organismes d'enseignement supérieur et de recherche en associant éventuellement des entreprises et des collectivités territoriales pour la réalisation de projets d’excellence.

Le projet de loi dispose que cette coopération impliquera au moins un établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel et que les établissements ou organismes publics ou privés pourront décider de regrouper tout ou partie de leur activité et de leurs moyens. Les sénateurs ont à juste titre ajouté que ces établissements peuvent être français ou européens.

L'université en tant qu' EPSCP doit occuper une place centrale dans une structure nouvelle qui lui permettra de conclure un contrat « gagnant gagnant » avec des EPST, d'autres organismes publics et privés, ainsi que des collectivités territoriales. C'est un changement de culture puisque tous ceux qui souhaitent échapper au confinement universitaire trouveront là un mode d'expression nouveau. L'université, par son insertion dans le tissu économique et social, est la mieux placée pour diriger et animer ces pôles de coopération. Elle sera ainsi susceptible de développer des structures d'économie mixte pour développer la recherche, sans nuire à sa fonction pédagogique. C'est l'occasion pour elle de se confronter aux réalités économiques et commerciales, et de trouver des modes de cofinancement de sa recherche.

En retour, ses partenaires bénéficieront de la recherche fondamentale effectuée en son sein. Maillon fort de ce regroupement, l’université est appelée à enrichir son action. La mutualisation des moyens lui permettra de traiter d’égal à égal avec les grandes écoles. Néanmoins, l’expérience prouve qu’un tel dispositif ne fonctionnera que si l’on y met les moyens : certains établissements comme le Collège de France ou l’université de Lille ont élaboré des PRES avant même d’y être incités par la loi – les « pré-PRES ».

Ne craignons pas le changement : ces premières expériences rassureront les plus timorés. Dissipons les inquiétudes, réelles ou feintes : les établissements se regrouperont librement et détermineront ensemble le périmètre de leur coopération, les moyens communs et le statut juridique adéquat.

Cette dernière question est centrale : si la loi prévoit que les PRES s’organisent librement, le statut d’établissement public de coopération scientifique offre aux membres la possibilité de se regrouper pour des projets spécifiques à long terme sans perdre leur personnalité propre ; de même, le statut de fondation de coopération scientifique favorise la collecte de fonds publics ou privés. Ces deux statuts, bien qu’adaptés, sont des nouveautés pour les établissements. Il ne faut donc pas en faire des préalables implicites à l’obtention de moyens publics. On doit les autoriser à recourir également au statut éprouvé d’association 1901 sans pour autant les priver du soutien de l’État.

A terme, pourtant, le statut d’EPCS semble devoir s’imposer, car ses avantages sont nombreux – mise à disposition de personnel, contributions et subventions variées. Voilà qui justifie que ces EPCS soient soumis aux règles de comptabilité publique et au contrôle prévu pour les établissements d’enseignement supérieur.

Quant au statut de fondation de coopération scientifique, il a la faveur des établissements souhaitant attirer des partenaires privés pour mener à bien des projets de recherche fondamentale, et il favorise la coopération internationale.

Appliqués à la recherche biomédicale, que je connais bien, les PRES sont une chance à saisir pour coordonner les efforts sur un même site. Que pensez-vous, Messieurs les ministres, d’opérations pilotes comme celle que suggérait le directeur général de l’INSERM – mise en place, dans des pôles mixtes, de jurys de recrutement d’enseignants-chercheurs dérogatoires, composés d’experts extérieurs à l’université et désignés par les membres du PRES ? Une telle procédure ouvrirait la voie à la fusion entre le statut de chercheur et celui d’enseignant-chercheur, gage d’efficacité et de lisibilité.

La recherche clinique française prend du retard : saisissons la chance que nous offre ce texte pour réagir. Un amendement du rapporteur propose justement la création de centres thématiques de recherche et de soins. Cette suggestion bienvenue ne doit toutefois pas dissimuler l’importance de l’effort budgétaire à accomplir si l’on veut rester compétitif avec nos voisins allemands, qui viennent de doubler les crédits de la recherche biomédicale.

Les états généraux de la recherche ont eu raison de souhaiter les PRES, et le Gouvernement a eu raison de les inclure dans la loi. En effet, ils permettent de réduire les frais des structures de recherche et d’accroître l’interdisciplinarité entre partenaires. Sans nuire à personne, ils accordent aux chercheurs la liberté et les moyens qu’ils attendent et leur redonnent confiance en l’avenir (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. Noël Mamère – Vos prédécesseurs ont, pendant trois ans, multiplié leurs efforts pour plonger la recherche française dans un état de crise sans précédent : baisse des crédits de la recherche fondamentale et remplacement de postes par des CDD – bref, une attaque frontale contre notre production scientifique, attaque contre laquelle les chercheurs n’ont pas fait que lutter. Ils ont en effet engagé une profonde réflexion lors des états généraux de Grenoble dont, un an plus tard, vous reprenez les arguments dans votre exposé des motifs, tout en les oubliant dans votre loi. À des questions pourtant simples – qui oriente et qui paie ? –, vous répondez par un fatras de nouveaux dispositifs à la frontière entre public et privé.

Vous annoncez 19 milliards d’euros supplémentaires sur cinq ans, qui se résument en fait à des allégements de charges et à des incitations fiscales sans orientation, sans priorité et sans contrôle. Qu’une multinationale encourage la surconsommation de malbouffe sans envisager l’impact sur l’obésité, et vous lui accordez un crédit d’impôt. Qu’une PME dépose un brevet de conservation de l’élasticité pour les chewing-gums en tube, et vous faites de même. C’est un tiers du budget de la recherche publique qui n’est désormais plus éclairé que par le marché, fût-il contraire au développement durable. En attribuant le reste à l’Agence nationale de la recherche, vous fermez la porte aux découvertes fondamentales, qui ne sont pas programmables.

En matière de ressources humaines, il n’y a plus ni engagement durable pour la programmation, ni plan pluriannuel pour l’emploi. Aucune mesure sérieuse ne vise à accroître l’attractivité des métiers de la recherche, sinon la faible augmentation des allocations doctorales et les quelques dizaines de primes d’excellence. Continuera-t-on à former à grands frais de très bons scientifiques qui traverseront aussitôt l’Atlantique ?

L’illisibilité du système de recherche français était unanimement déplorée : vous ne faites qu’ajouter à la confusion en créant de nouveaux instruments administratifs. Les personnels de recherche continueront donc à chasser les contrats auprès d’opérateurs toujours plus nombreux. La stagnation des personnels de soutien à la recherche va de pair avec la croissance des contrats précaires – dans le droit fil de la politique de précarisation de l’emploi que mène votre Gouvernement.

Vous faites grand cas de l’évaluation des chercheurs – comme s’ils n’étaient pas déjà soumis à évaluation ! Il vaudrait mieux être plus exigeant sur les moyens qu’on leur attribue et sur les retombées de cette évaluation. Pourtant, votre texte reste muet sur ces points, comme il l’est sur les résultats des recherches menées en entreprises, qui bénéficient d’aides publiques toujours plus importantes.

Vous ne citez même pas les agences et les instituts de veille sanitaire, dont la création a pourtant favorisé la connaissance et la santé publique. Elles méritaient une place dans le texte et un renforcement de leur moyens : il en va de leur efficacité et de leur indépendance.

Vous ne reconnaissez pas l’université, noyau central du savoir, comme le pivot possible d’une requalification du système de recherche. La découverte ne se décrète pas : il faut faire davantage confiance aux chercheurs.

Notre Assemblée s’occupe souvent de la société sans pour autant la solliciter : académies et pouvoirs publics devraient considérer avec plus de modestie les savoirs non labellisés d’associations aux moyens souvent dérisoires – protocoles d’essais thérapeutiques élaborés par les associations de malades du sida, logiciels libres de tout intérêt privé, remise en culture d’espèces reléguées dans des conservatoires génétiques… A l’inverse, l’Académie de médecine a prétendu que l’amiante ne présentait pas de danger, l’Académie des sciences s’est opposée au principe de précaution – arrogance coupable qui justifie leur soumission à l’autorité du Président de la République – et l’Académie des technologies, dans son rapport sur les nanotechnologies, ne dit rien des risques et des enjeux éthiques, révélant ainsi sa faiblesse par rapport à ses homologues anglo-saxons.

Votre texte ne répond pas aux besoins actuels. Les députés Verts sont déçus qu’il cumule tant de rendez-vous manqués : avec la démocratie – puisque la société reste tenue à l’écart des orientations données à la recherche –, avec la jeunesse – le lien entre recherche et pédagogie n’est pas revisité – et avec l’avenir – puisque vous privilégiez la compétitivité à court terme face au développement durable (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Yves Durand – « Le projet de loi qui est soumis à l'Assemblée nationale n’est à la hauteur ni des espoirs éveillés par le mouvement de 2004, ni des nécessités. La position de notre nation dans le monde restera donc en péril ». Telle est la conclusion de l’article co-signé par Edouard Brézin, Pierre Joliot et Axel Kahn dans Le Monde de ce soir. Selon eux, «dans un esprit libéré de toute appartenance partisane », les parlementaires doivent se pencher sur des mesures critiques pour notre avenir commun : « nous faisons confiance aux membres des parlements pour se saisir du problème et donner à ce texte l’ambition qui lui fait défaut. » Vous auriez pu, vous auriez dû entendre cet appel, Messieurs les ministres, comme vous auriez dû entendre le monde de la recherche qui cet après-midi était dans la rue. M. Goulard a souhaité que nous soyons unanimes quant à notre ambition pour la recherche. Cela aurait pu être le cas si vous aviez véritablement repris les conclusions des états généraux de Grenoble. Or, vous n’en avez hélas retenu que les mots, pour d’ailleurs en dévoyer le sens…

M. Patrick Roy – Les ministres sont sourds !

M. Yves Durand – … jusqu’à leur faire dire le contraire de ce qu’ils énoncent. C’est vrai des PRES, sur le principe desquels nous ne sommes d’ailleurs pas en désaccord, mais qui risquent d’entraîner des inégalités entre les universités et les territoires. C’est également vrai de l’ANR dont ni le statut, ni les fonctions, ni les missions n’ont été vraiment définis. C’est vrai, enfin, de votre conception de l’évaluation, dont tout le monde a relevé combien elle était confuse. Sur tous ces points, le groupe socialiste présentera des amendements, vous posera des questions et fera des propositions.

Le manque d’ambition de ce projet est flagrant dans deux domaines, et tout d’abord en ce qui concerne la situation des jeunes chercheurs dont la seule perspective, trop souvent, est de partir à l’étranger. L’absence de plan pluriannuel de recrutement réclamé par de nombreux collègues, de même que votre conception des contrats par projet, accroîtra hélas leur précarité. M. Hollande a fait des propositions précises auxquelles vous devrez répondre avec la même précision.

M. Pierre Cohen - Très bien.

M. Yves Durand – En outre, l’université est absente de ce projet – si l’on excepte son inscription dans les PRES et la création des réseaux thématiques de recherche avancée – alors que 80 % de la recherche publique y est menée. Une loi ambitieuse aurait dû s’appuyer sur une réflexion profonde quant à l’organisation des universités, la nature de leur autonomie et leur modernisation. Il aurait fallu également se pencher sur ce terrible drame qu’est l’échec de près de 40 % des étudiants avant la fin du premier cycle. On ne pourra développer la recherche sans augmenter massivement le nombre d’étudiants et sans démocratiser véritablement l’université. Vous avez fait un projet a minima, en contradiction avec les engagements des plus hautes autorités de l’État. C’est un rendez-vous manqué (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Patrick Roy - M. Durand a de la voix, mais le Gouvernement est sourd !

M. Daniel Garrigue – Je souhaite aborder essentiellement la dimension européenne de ce projet et je me ferai l’écho des travaux de la Délégation à l’Union européenne de l'Assemblée nationale.

L’Europe a une grande importance pour notre recherche. C’est vrai si l’on considère l’implication de nos chercheurs dans ce que l’on appelle l’espace européen de la recherche. C’est également vrai si l’on considère les grands projets, d’ailleurs souvent développés à l’initiative de la France, en particulier dans le secteur nucléaire, l’aéronautique ou l’espace. Nos institutions de recherche se situent en outre dans les tout premiers rangs pour ce qui est du programme cadre, qu’il s’agisse du nombre de projets présentés ou de la participation aux projets effectivement retenus.

Le parallélisme est important entre la recherche européenne et la recherche nationale, comme nous pouvons le constater avec la part dévolue aux appels à projets. Ce n’est pas un hasard si le Conseil européen de la recherche est créé au même moment que l’ANR. Je suis persuadé que nous trouverons le point d’équilibre entre la part qui doit aller aux projets et celle qui doit revenir aux structures.

M. le Ministre délégué – Absolument.

M. Daniel Garrigue – Le parallélisme existe aussi en matière d’enjeux technologiques : nous créons l’Agence de l’innovation industrielle et, au niveau de l’Union, ce sont les plateformes technologiques et les initiatives technologiques conjointes qui voient le jour. Je souhaite que l’on parvienne à articuler correctement ces deux démarches.

Enfin, il y a également parallélisme en ce qui concerne les efforts réalisés en faveur du statut des chercheurs dans ce texte et dans le projet de charte européenne des chercheurs présenté par M. le Commissaire Potocnik.

La France doit faire face à trois exigences, la première consistant dans l’évaluation, qui doit être plus diversifiée, plus systématique et plus ouverte. Je suis tout à fait d’accord avec la proposition de M. le rapporteur Dubernard visant à mutualiser les capacités d’expertise afin de mener les évaluations à l’échelle européenne.

M. le Ministre délégué – Absolument.

M. Daniel Garrigue – Nos universités doivent en outre participer plus grandement à la recherche européenne. Ne faudrait-il pas, d’ailleurs, que certaines d’entre elles soient candidates au projet d’institut européen de technologie ?

Enfin, les PME doivent s’intégrer plus facilement dans les programmes européens d’innovation et de compétitivité.

L’Union européenne doit également satisfaire à des exigences, et d’abord en ce qui concerne les instruments mis en œuvre dans le cadre du PCRD : ils sont trop nombreux, trop sophistiqués, trop coûteux, et leur efficacité est discutable. Il faut trouver des formules plus simples, accepter que les procédures ne soient pas mises en œuvre directement par les services de la Commission, avec les lourdeurs bureaucratiques qui en découlent, mais par des agences ad hoc, et être capable de réviser ces procédures en cours de programme.

Autre exigence : celle d’une gouvernance beaucoup plus forte. On constate, dans les domaines de l’espace ou des questions industrielles par exemple, une dispersion entre les différentes directions générales de la Commission. Un système de task force ou de chefs de file permettrait de diriger les programmes avec plus de fermeté. Enfin se pose le problème général de la stratégie de recherche européenne. La stratégie de Lisbonne a eu ceci de positif qu’elle a provoqué une prise de conscience et qu’elle a rendu populaire l’objectif de 3 % du PIB à l’échelle de l’Europe entière. Le projet de loi s’inscrit, pour une part, dans cet objectif…

Plusieurs députés socialistes – Pour une part !

M. Daniel Garrigue - …Mais la stratégie de Lisbonne s’en remet aux États pour atteindre ses objectifs. Nous attendons de l’Europe qu’elle ait une stratégie d’une autre ampleur, sur le modèle américain ou japonais, fondée sur des capacités d’analyse et d’intelligence économique, sur la définition d’enjeux sectoriels et sur la création d’instruments spécifiques nous permettant d’être réactifs – l’actualité récente nous en a montré la nécessité.

Nous sommes au temps de la mondialisation. Pour beaucoup, il ne s’agit que de l’effacement de frontières ou de mouvements financiers, mais c’est encore plus fondamentalement une explosion des connaissances et de l’intelligence à l’échelle de la planète entière. C’est une réalité incontournable ; elle est d’ailleurs très positive. Mais pour l’affronter avec succès, il faut bâtir une véritable recherche européenne, afin d’atteindre une taille critique. La France peut jouer un rôle moteur à cet égard. Ce projet de loi y contribue, par son approche intelligente et volontaire des problèmes de la recherche. Nous le soutiendrons (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Pierre-André Périssol – La recherche est sur les rails. D’abord, l’opinion a pris conscience qu’avec l’éducation et l’enseignement supérieur, elle est la clef de l’avenir, de la croissance et de l’emploi. Ensuite, les crédits qui lui sont consacrés connaissent une augmentation sans précédent : un milliard par année. C’est considérable, mais indispensable sous peine de rejoindre la fourchette basse des nations développées – et bientôt, des pays émergents. Enfin, d’un point de vue qualitatif, vous avez réorganisé et modernisé les structures, en suivant l’essentiel des propositions de la mission d’information sur la recherche présidée par Jean-Pierre Door. Un Haut Conseil de la science et de la technologie placé auprès du Président de la République est essentiel pour conforter le consensus sur les grands choix et pour les rendre plus lisibles : au moment où nos concitoyens s’interrogent sur le bien-fondé du progrès scientifique, il est vital qu’ils comprennent les priorités, car la recherche constitue un défi collectif. Les agences de moyens, telles l’ANR et l’AII, sont des échelons indispensables pour choisir les projets de façon incontestable, et l’Agence d’évaluation sera tout aussi importante, à condition évidemment que toutes les conséquences soient tirées de ses évaluations négatives !

Deux questions demeurent toutefois. Quel sera, d’abord, le rôle assigné au ministère de la recherche et comment le préparer à le tenir ? Si les grands choix se font au niveau du Haut conseil et qu’ils sont financés par les agences de moyens, il lui faut jouer un véritable rôle de stratège. La structure devrait donc être interministérielle, rattachée au Premier ministre, et ses services réorientés de la gestion vers la stratégie.

Quelle sera ensuite la place des universités ? Qu’elles jouent un rôle majeur est important pour la recherche, mais surtout vital pour les universités elles-mêmes ! Dans tous les autres pays, l’université est au centre de la recherche. Notre histoire est différente, mais il est impératif de rehausser la place de nos universités face à leurs concurrentes étrangères. Les PRES vont certes dans le bon sens, mais il faudra bien un jour ouvrir l’ensemble du chantier : recherche et enseignement, déficit de moyens, de gouvernance et surtout de réussite… C’est essentiel pour améliorer le taux de réussite de nos étudiants et donc pour que notre jeunesse retrouve une pleine espérance. C’est un enjeu majeur pour notre avenir (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. Jean-Yves Le Déaut – Nous aurions au moins pu être d’accord sur le constat de la situation malheureuse de notre recherche et de notre enseignement supérieur, mais, avec ce texte, vous n’avez pas mesuré l’ampleur des difficultés, que les états généraux avaient pourtant rappelées. Vous avez sans doute manqué ici l’occasion de réconcilier la France et ses chercheurs.

Notre système est complexe et peu lisible : c’est ce que Pierre Cohen et moi disions déjà dans un rapport remis au Premier ministre en 1999. Nous insistions sur la grande misère des universités, notamment en premier cycle, sur le fait que nous ne consacrions que 6 500 euros par an à chaque étudiant, contre 10 000 en Allemagne, et que nous avions sacrifié les post-doctorats, au prix d’une fuite des cerveaux qui malheureusement ne cesse pas. Nous insistions sur la dévalorisation des carrières scientifiques, sur la perte de contrôle dans les technologies clefs – ce qui fait que de grands secteurs économiques nous échappent dorénavant – et sur le peu de coordination entre les objectifs nationaux et européens – on a malheureusement vu, lors du débat sur le PCRDT le 15 décembre, le fort décalage entre les discours présidentiels nationaux et notre position dans les instances européennes.

Le texte ne prend pas la mesure de cette situation. Le Président de la République a affirmé que notre effort de recherche atteindrait 3% du PIB en 2010, mais personne ne peut raisonnablement penser que cette loi de programmation nous en donne les moyens. Le Gouvernement poursuit une tout autre action que celle qui permettrait d’atteindre les objectifs du Président de la République.

M. le Rapporteur – Et la recherche privée ?

M. Jean-Yves Le Déaut - Dans les pays où elle se développe, c’est de pair avec le soutien accordé à la recherche fondamentale ! Dans le domaine des sciences de la vie, aux Etats-Unis, c’est le doublement des crédits de la recherche fondamentale qui a permis aux industries pharmaceutique et aux biotechnologies de se développer. Si nous ne faisons pas la même chose, nous n’arriverons à rien (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste).

La loi doit impérativement inclure la programmation de l’emploi scientifique. Dans le cas contraire, nous nous battrons à coups de chiffres, chacun accusant les autres de ne pas avoir fait assez, mais il est d’ores et déjà certain que ce que vous avez prévu ne permet même pas de rattraper notre retard. Il faut aussi améliorer la situation des jeunes chercheurs : 1 500 euros nets, soit une fois et demie le SMIC, ce n’est pas trop pour exercer des responsabilités à bac plus 8 ou plus 10 ! Cela ne coûte pas cher : un pays comme le nôtre a les moyens de prendre une telle mesure, et je ne comprends pas que ce texte ne fasse pas apparaître de tels arbitrages.

Les universités doivent être au cœur de notre système de recherche. Il est évident qu’il n’y aura pas de réforme du second sans réforme des premières, d’autant que nous sommes en pleine compétition entre grandes écoles, organismes de recherche et universités. Il faut donc constituer des pôles de recherche structurants au niveau régional, pôles qui doivent tirer vers le haut les universités, plutôt que de compter sur quelques campus pour se donner une apparence de qualité au niveau national, alors qu’en fait ils accapareront les crédits sans permettre d’exploiter, en réseau, notre potentiel qui est fantastique !

Par ailleurs, ce texte entretient une confusion regrettable entre politique de recherche et politique d’innovation. Il faut poursuivre les deux, mais une bonne politique d’innovation suppose obligatoirement un bon système de recherche fondamentale. Or, les structures que vous développez dans tous les sens – Agence de l’innovation industrielle, Agence nationale de la recherche, pôles de compétitivité, qui ne sont d’ailleurs pas financés – ne peuvent que favoriser une grande confusion.

Enfin, il faut une bonne évaluation du système. Or, l’Agence d’évaluation se surajoute malheureusement à d’autres instances en la matière. L’idée pourtant est excellente : nous l’avions proposée, mais par regroupement des deux agences d’évaluation existantes et en précisant bien ses missions !

Il faut traiter le problème des jeunes chercheurs, programmer des emplois, accroître les crédits de la recherche, bref, redonner à ce secteur une vraie priorité. Si vous ne le faites pas, nous serons obligés de nous y atteler dès 2007. C’est en effet le seul moyen de permettre à notre pays de retrouver son rang ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Christian Philip – Je souhaite insister ici sur les liens entre ce projet de loi et les perspectives européennes. Je remercie à cet égard le président et rapporteur Jean-Michel Dubernard d’avoir accordé une attention particulière à la dimension européenne, tout comme l’a fait notre collègue Daniel Garrigue dans son rapport devant la Délégation à l’Union européenne.

Avec ce texte, la France devient l’un des pays de l’Union européenne les plus volontaristes en matière de recherche. C’est essentiel, car la recherche sera bel et bien le premier facteur de développement dans les prochaines années. Il est en effet avéré que la croissance et l’emploi de demain dépendent étroitement de la recherche et de l’innovation d’aujourd’hui. Or, si notre pays occupe un bon rang mondial pour ce qui est du montant des investissements de recherche-développement, son effort de recherche rapporté à son PIB a reculé ces dernières années – y compris entre 1997 et 2002. Il nous faut impérativement rattraper ce retard, surtout par rapport aux Etats-Unis et au Japon, pour ce qui est des dépenses mais surtout des structures. Et notre recherche publique et la recherche dans nos entreprises sont en retard. Une évolution structurelle est nécessaire, qui exige d’améliorer le pilotage stratégique de notre recherche et d’en finir avec les cloisonnements entre enseignement supérieur et établissements publics de recherche, universités et grandes écoles, laboratoires publics et entreprises, recherche publique et recherche privée.

Pour autant, ce texte ne suffira pas si nous ne parvenons pas à convaincre nos partenaires européens de faire de la recherche la priorité budgétaire des prochaines années. Or, force est de constater que ni la France ni l’Union ne sont au rendez-vous de l’ambitieux objectif fixé par le Conseil européen de Barcelone. Si j’insiste sur la dimension européenne, c’est que je suis convaincu que seule l’Europe peut nous inciter à dépasser nos corporatismes nationaux. Ainsi sans l’initiative européenne, nos universités auraient-elles accepté si rapidement le cursus LMD ?

Ce texte peut permettre une évolution essentielle pour nos universités et nos grandes écoles, trop petites à l’échelle mondiale. Les PRES, entre autres éléments, peuvent contribuer à restructurer notre paysage universitaire. J’attends de l’Europe qu’elle définisse un label européen en matière de gouvernance des établissements d’enseignement supérieur et de recherche. Je suis sûr que, pour obtenir ce label, nous saurons accorder aux établissements l’autonomie qui leur est indispensable et qui aujourd’hui piétine en raison de querelles idéologiques.

J’attends aussi de l’Europe qu’elle crée une Agence européenne d’évaluation. Ainsi l’Agence créée par ce texte prendrait place dans un réseau d’agences nationales gravitant autour de cette Agence européenne. Elle devrait respecter les principes fixés au niveau européen afin d’obtenir le label indispensable pour présenter une candidature à un programme financé par le PCRD.

Sans vouloir multiplier les institutions, j’attends enfin de l’Europe qu’elle promeuve la recherche en sciences humaines et sociales. Si les nouvelles technologies sont essentielles, il est tout aussi indispensable de mieux comprendre le monde dans lequel nous vivons. Face aux difficultés de nos sociétés contemporaines, aux conséquences économiques de certaines explosions sociales, il n’est pas improductif d’investir dans la recherche en sciences juridiques, économiques, humaines et sociales.

Je souhaite aussi évoquer, dans le respect du principe de subsidiarité, le rôle important des collectivités territoriales, des régions en particulier, de plus en plus impliquées dans les activités de recherche. C’est notamment le cas dans notre pays par le biais des pôles de compétitivité, dans lesquels elles jouent un rôle de premier plan. A cet égard, l’absence d’une compétence clairement reconnue aux collectivités en ce domaine peut poser problème, comme en attestent déjà plusieurs décisions de tribunaux administratifs. Je partage l’avis de notre collègue Anne-Marie Comparini sur ce point, et il nous faudra y revenir lors de l’examen des articles.

Dernier point : la ratification éventuelle du protocole de Londres sur le brevet européen. Cette question, difficile, rejoint celle de la défense de la langue française. La commission des finances souhaite que nous ratifiions ce protocole. Je pense, pour ma part, qu’un débat plus général serait nécessaire et que nous ne devrions pas en traiter dans ce texte, le sujet méritant un examen à part entière (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Paul-Henri Cugnenc – La recherche est le gisement de nos emplois futurs. Les grands pays industrialisés l'ont bien compris qui, comme les États-Unis, y consacrent une part importante de leur budget national, qu’il s’agisse de la recherche publique ou privée. Notre pays, lui, avait pris du retard ces dernières années. La mobilisation des chercheurs et la vigilance du Gouvernement, qui a bien pris conscience des enjeux, ont permis d'amorcer un retournement de situation salutaire. Avec des crédits en augmentation d’un milliard d’euros en 2005 et en 2006, de façon à porter l’effort public global à 24 milliards d'euros en 2010, soit 27% de plus qu’en 2004, le mouvement est engagé.

Le présent texte prend tout son sens dans cette dynamique nouvelle. Comme l’a souligné le rapporteur, dont je tiens à souligner la qualité du travail, il est un élément d’un édifice en train de se construire dans un environnement largement réglementaire. II propose des réformes ambitieuses, la recherche de l'excellence devant permettre à notre pays de conserver, voire d’améliorer, son rang dans la recherche mondiale. Dans cette perspective, il n’était d’autre choix pour notre recherche que de se réformer.

La mise en place le 7 février 2005 de l'Agence nationale pour la recherche a été un élément-clé. Sa transformation aujourd’hui de groupement d'intérêt public en établissement public conforte encore la volonté exprimée en loi de finances pour 2005. L’objectif de l’ANR est d'accroître le nombre de projets de recherche de qualité, en facilitant le financement des projets de recherche fondamentale aussi bien qu’appliquée dans le cadre des partenariats tant publics que privés. Ont ainsi pu être sélectionnés 35 appels à projets et quelque 1 400 projets dans lesquels sont impliqués 4 500 équipes ou chercheurs individuels. Il faut à cet égard saluer la remarquable mobilisation des équipes. Cette initiative a permis à de jeunes chercheurs de s'engager dans des travaux touchant aux domaines de l'énergie, de l'environnement, des sciences de l'information, de la biologie ou de la santé.

Pour le département Biologie et santé, près de 110 millions d'euros ont ainsi été engagés en 2005, ce qui en fait le deuxième secteur thématique de l'ANR en volume de financement, le premier en nombre de projets soumis – près de 1300 – et financés – plus de 270 – sur des thèmes aussi variés que les maladies cardiovasculaires, les neurosciences, diabète et neurologie, neurologie et psychiatrie, microbiologie et immunologie, les maladies rares, santé et environnement, santé et travail, les biotechnologies, les technologies au service de la santé… Dans tous ces secteurs, les principaux acteurs institutionnels de la recherche ont été associés.

Le présent projet de loi donne à l'ANR les moyens et le statut juridique lui permettant d'inscrire son action dans la durée. L'expérience ayant été concluante depuis 2005, il ne paraît pas déraisonnable de passer à cette nouvelle étape. Cette montée en puissance facilitera les synergies entre recherche fondamentale et appliquée, comme entre public et privé. Du chemin restera bien entendu à parcourir.

Pour éviter toute contestation dans l'attribution des crédits, on pourrait envisager que les résultats de l'évaluation mentionnent explicitement les noms et qualités des évaluateurs. S’il serait sans doute judicieux de faire de l’ANR un établissement public administratif, une certaine souplesse de fonctionnement doit être préservée. Une partie des crédits devrait ainsi pouvoir être allouée à des projets non thématiques, de manière à laisser place à de la recherche non finalisée. On pourrait également imaginer que l'ANR soit dotée de véritables contrats d'objectifs.

Vous le voyez, cette majorité a su entendre les préoccupations du monde de la recherche et trouver les moyens de répondre à ses attentes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Michel Charzat - En mars 2002, le Conseil européen de Barcelone a décidé d’accroître l’investissement des pays membres de l’Union dans le domaine de la recherche avec l’objectif d’y consacrer 3% du PIB d’ici à 2010. L’enjeu était de faire de l’Europe « l’économie de la connaissance la plus compétitive du monde».

Pourtant, la recherche européenne continue d’accuser un retard préoccupant par rapport aux pôles américains, canadiens et bientôt japonais, puisqu’elle ne représente que 2 % de la richesse produite par les Vingt-cinq. Cette situation ne pourrait être redressée que par un effort accru de chaque État membre. Or, depuis 2002, la France semble avoir renoncé à montrer l'exemple. Année après année, les budgets traduisent l'incapacité de votre gouvernement à donner à la recherche la place qu'elle mérite, au cœur des priorités nationales et européennes. Suite au mouvement des chercheurs et des étudiants en 2004, vous vous étiez pourtant engagés à garantir la stabilité et la progression des moyens de la recherche. Qu'en est-il aujourd'hui ? Force est de constater que les promesses ne se concrétisent nullement dans le projet que vous nous soumettez tardivement aujourd'hui, après un long détour par le Sénat.

L'augmentation des moyens dévolus à la recherche suppose un accroissement équilibré des investissements publics et privés dans ce secteur. Or, l'effort national de recherche stagne, alors qu’il faudrait que la part de la recherche publique et privée dans le PIB progresse de 40 % d’ici 2010 pour tenir l’objectif des 3 % du PIB. L'État, qui devrait jouer un rôle moteur dans le financement et dans le pilotage de la recherche française, se désengage de plus en plus. Au lieu d'assumer vos responsabilités, vous déléguez l'élaboration de la stratégie nationale de recherche à de multiples agences, telles l'Agence nationale pour la recherche, l'Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur, l'Agence de l'innovation industrielle, ou encore l'Académie des technologies. Cette prolifération d'agences ad hoc représente la déclinaison d'un modèle politique néo-libéral permettant à l'État de « gouverner à distance », à travers de nouvelles structures qui vont imposer leurs priorités et, en l'occurrence, mettre au pas les universités et les organismes de recherche. En cela, votre projet de loi se refuse à soutenir le service public de recherche, lequel tendra à devenir de plus en plus un prestataire de la recherche privée. Qu'adviendra-t-il de la nécessaire liberté des chercheurs, garante d'une recherche indépendante de qualité ? Quelle place sera accordée aux « projets blancs» exploratoires de l'ANR qui devraient, de notre avis, être développés et encouragés ?

Mais au-delà de ces choix politiques néfastes, l'empilement des structures rend notre système de moins en moins lisible. II faudrait, au contraire, le simplifier notre pour le rendre accessible, notamment à nos partenaires européens. Multiplier les structures est sans doute un moyen pour vous de masquer votre parti pris idéologique et votre méfiance à l’égard de l'université et des organismes de recherche publics. Pour peser à l'échelle de l'Union européenne, il faut présenter une France au potentiel scientifique équilibré au regard de la répartition géographique, des rapports public-privé et des relations entre universités, organismes de recherche et grandes écoles.

Assurer le rayonnement européen de notre pays, c'est aussi rendre les carrières scientifiques attractives et inciter les talents étrangers à venir travailler chez nous. L'indexation des allocations de recherche sur l'évolution des rémunérations de la fonction publique que vous proposez ne suffira pas à enrayer le phénomène de précarisation des doctorants et à assurer leur intégration professionnelle. Par ailleurs, le texte ne présente aucune avancée en matière d'accueil des étudiants étrangers et de mobilité des doctorants et il fait également l'économie d'une réflexion de fond sur la mise en œuvre de la « charte du chercheur européen » et du « code de bonne conduite en matière de recrutement des chercheurs ».

Nous sommes donc non seulement loin de l'intégration du système français dans l'espace européen de la recherche, mais également loin d'offrir à nos chercheurs les moyens de remplir leurs missions dans de bonnes conditions. En panne d'une volonté politique pour relancer la construction de l'Europe, vous êtes incapables de programmer l'avenir de la recherche, c'est-à-dire notre avenir commun de Français et d'Européens ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Roger-Gérard Schwartzenberg - Excellent !

M. Alfred Marie-Jeanne – Ce texte arrive à point nommé puisqu’il sert l’ambition – parfois quelque peu contrariée – liée à la stratégie de Lisbonne, qui recommande de manière pressante aux partenaires européens de s'orienter vers l'économie de la connaissance la plus compétitive. Pour atteindre cet objectif, il prévoit de restructurer le paysage institutionnel, de renforcer les moyens financiers dédiés et de développer les interfaces de coopération entre les acteurs publics et les entreprises.

Au surplus, ces nouvelles perspectives s'inscrivent également dans une dimension territoriale et la politique de recherche est annoncée comme devant être intensifiée par le biais de pôles de compétitivité auxquels les régions peuvent être associées. A ce propos, il est opportun, légitime et vital d'instaurer un pôle de compétitivité endogène couvrant l'ensemble Guadeloupe, Guyane et Martinique, à travers l'Université Antilles-Guyane à qui serait assignée un rôle fédérateur,…

M. Roger-Gérard Schwartzenberg - Très bien !

M. Alfred Marie-Jeanne - … l’objectif étant aussi de corréler la recherche au développement. En effet, leurs caractéristiques géographiques et climatiques font de ces pays des laboratoires naturels, avec des créneaux diversifiés tels la biodiversité, le milieu marin, les énergies alternatives, l'agronomie ou la gestion des risques cyclonique, sismique, environnemental, phytosanitaire et épidémiologique. L'épidémie de chikungunya qui se déchaîne à la Réunion, témoigne de la nécessité de domicilier et d'adapter la politique de recherche dans les pays dits d'outre-mer : à situations particulières, décisions particulières !

Les diverses potentialités que je viens d'énumérer sont d'autant plus stratégiques que les bouleversements sociétaux, économiques, et environnementaux en font des thèmes de spécialisation incontournables. Au reste, il serait erroné de croire que la recherche en Martinique en est restée au stade embryonnaire. Disons plutôt que la Martinique a servi de cobaye dans maints domaines, puisque les résultats ont été dissipés et utilisés ailleurs, sans retombées positives pour elle-même. Je pense notamment au vitroplant banane, dont le brevet a été acheté par un pays étranger qui nous revend à présent le produit !

Aujourd’hui, c’est d’une véritable politique scientifique dont nous avons besoin pour accroître l’attractivité et assurer de façon pérenne l’adéquation entre les vocations scientifiques et la recherche. Messieurs les ministres, le constat est là : les orientations prises ne correspondent pas tout à fait aux enjeux à la Martinique. Évitons de faire sombrer l'université Antilles-Guyane dans le bas de gamme alors que les atouts existent (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste). Évitons de la confiner dans un rôle de formation primaire, avec le risque inévitable de voir les cerveaux s'en aller, ce qui contribuerait d'autant au déclin de l'enseignement supérieur, et, partant, de la recherche. Je gage que vous ne le souhaitez pas mais nous en prenons le chemin.

Rappelons que pour constituer un acteur majeur de la construction de l'Europe de la recherche et de la connaissance, la France propose de consacrer en 2010 3 % au moins de son PIB aux dépenses de recherche et de développement. Dans le même temps, l’ordre de grandeur des crédits d’État contractualisés dans l'actuel CPER Martinique n'atteint même pas 4 millions d'euros étalés sur sept ans ! De tels montants confirment l’effacement irréversible du pôle de recherche de la Martinique. La plus grande partie des aides ira donc vers les grands pôles de compétitivité, là où se trouve déjà presque tout : grands laboratoires, grandes universités, grandes entreprises. Je peux comprendre cette stratégie, mais il ne faut pas soumettre la recherche à l’économie.

Tenant compte de notre contexte, la démarche préconisée, ne doit pas s'opérer au détriment de la Martinique, qui doit jouer le rôle qui lui revient naturellement. Car cela se peut, se veut et se justifie au regard de ses atouts et de ses performances.

Messieurs les ministres, j'espère vous avoir convaincus du bien-fondé de la revendication martiniquaise en ces domaines. N'oubliez surtout pas que la recherche d'aujourd'hui augmentera le savoir de demain, lui-même étant à la source du savoir-faire d’après-demain. Mon intervention est loin d'être une accusation. Elle se veut avant tout une démonstration et un plaidoyer.

Je me demande si, à ma place, vous n'auriez pas agi de même et avec plus de persuasion encore. A votre place, par contre, vous pouvez réagir favorablement en rendant un verdict positif, pas forcément hâtif, car il y va de l'intérêt général. Il n’est jamais trop tard pour mieux faire (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Roger-Gérard Schwartzenberg - Bravo !

M. François Brottes – « C'est sur le développement de la recherche privée que nous avons le plus de progrès à faire » : je vous cite, Monsieur le Ministre, et je suis prêt à vous suivre dans ce raisonnement. Sauf que nous n'allons certainement pas prendre le même chemin !

D’abord, parce que le développement de la recherche privée ne peut se faire au détriment de la recherche publique, aujourd'hui fortement fragilisée. Or, lorsqu'on analyse vos prévisions budgétaires, leur hypothèse de faible augmentation année après année – et le débat sur les euros constants ou courants n'est pas neutre – ne repose que sur un crédit d'impôt virtuel accordé à la recherche privée. C'est donc une hypothèse, non une garantie.

Ensuite, il faudrait éviter de confondre en permanence recherche et innovation. Pour indispensable qu’elle soit, l’innovation tient souvent du marketing – meilleure ergonomie, nouveau look, meilleur rendement ... La recherche, c'est autre chose : c'est le changement de technologie, la mutation profonde des modes de concevoir et d'analyser, la nécessité d'aller toujours plus loin pour que le résultat serve le progrès universel.

Surtout, il faut toujours préserver la vision à long terme, refuser l’obsession de la rentabilité immédiate. Il y a quelques années, j'avais été frappé lorsque le président d'une grande entreprise – encore publique – de télécommunications, à qui je reprochais d'abandonner des pans entiers de son activité de recherche et de transférer les moyens correspondants vers l'action commerciale et le marketing, m'avait répondu que les technologies du futur, il les achèterait sur les étagères de ses fournisseurs car il n'avait pas d'argent à perdre pour chercher ce que d'autres trouveraient à sa place.

L'histoire nous enseigne pourtant qu'une position dominante sur un marché est susceptible de s'écrouler rapidement car une mutation technologique, accessible à un prix devenu prohibitif pour ceux qui ne la maîtrisent pas, peut définitivement éliminer un acteur qui n'a pas su anticiper par manque d'investissement propre dans la recherche.

Ce témoignage traduit assez bien la limite de ce que l'on peut attendre du développement de la recherche privée. S'engager, au titre de l'entreprise, c'est forcément – et c'est légitime – s'inscrire dans une logique de marché à terme rapproché et cela tient plus souvent de l'innovation que de la recherche en tant que telle. C'est la raison pour laquelle il faut être prudent dans le décompte et l'analyse de ce qui est fiscalement éligible au titre de la recherche en entreprise. Comment mesurer la démarche, et comment éviter les effets d'aubaine ? Se satisfaire d'une politique de recherche qui se réaliserait essentiellement dans le cadre de l'entreprise, c'est prendre le risque d'assécher la source régénérante, indispensable à la vie, dans tous les domaines, de la recherche publique fondamentale.

Il est un seuil de moyens en dessous duquel il ne faut pas descendre car cela serait dangereux en premier lieu pour les entreprises elles-mêmes. Enrichir la connaissance, ce n’est pas répondre aux besoins du marché. C’est une exigence plus universelle, moins conjoncturelle.

J'ai la fierté d'être maire d'une commune accueillant depuis 1990 un site mondial industriel de recherche et développement qui constitue l'un des modèles mis en exergue par notre collègue Christian Blanc pour prôner l’émergence des pôles de compétitivité. Lorsque le Président de la République est venu inaugurer une extension importante de ce site, qui comporte un centre de recherche américain délocalisé en France, j'ai tenu à lui rappeler que ces milliers d'emplois et ces succès industriels n'auraient jamais été possibles sans la recherche publique fondamentale, celle de l'université, celle du CEA, et en particulier du LETI. Je veux témoigner ici de la culture des chercheurs du secteur public. Partie prenante de l'aventure humaine, ils ont acquis le sens du travail en réseau, celui de la mutualisation et du partage de la connaissance. Ils sont les tenants d'une générosité qui est seule garante de l'intérêt général.

S'il est vrai que l'économie de demain repose sur l'innovation d'aujourd'hui, l'innovation d'aujourd'hui trouve sa source dans la recherche d'hier.

Plusieurs députés socialistes – Très juste !

M. François Brottes – Alors, de grâce, méfions-nous des thèmes de recherche imposés sans concertation, méfions-nous des statuts précaires ...

Plusieurs députés socialistes – Très bien !

M. François Brottes - La recherche publique a besoin de liberté et de sérénité. Cela ne signifie pas l'absence de contrôle ou d'objectifs définis en commun mais suppose des moyens publics garantis. Faire l'apologie de la recherche financée par le secteur privé pour réaliser des économies sur le budget de l'État, c'est faire fausse route. À mon sens, c’est l’une des carences principales de ce texte avec le rendez-vous manqué avec les universités sur lequel je ne reviendrai pas car il a été abondamment souligné.

Sans opposer recherche publique et recherche privée, je veux rappeler que les PME, malgré l'intelligence de leurs projets, et leur sens de l'innovation, ne pourront jamais financer de vrais laboratoires de recherche. La recherche publique doit rester un partenaire ouvert et disponible. Pour elle, le contrat avec l’entreprise ne doit pas être le moyen de survivre malgré le manque de financements publics. Par conséquent, le développement de la recherche privée passe avant tout par le renforcement de la recherche publique, y compris à l'échelle européenne sans laquelle la respiration de notre intelligence collective n'est pas aussi puissante, ni aussi profonde que l'exige l'avenir des générations futures (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Plusieurs députés socialistes – Que c’est beau ! (Sourires)

M. Pascal Ménage - La recherche et l'innovation sont le reflet de la puissance d'une nation. En ce début de XXIème siècle, marqué par une vive compétition mondiale, c'est un enjeu majeur pour la France. C'est le défi que relève ce texte élaboré en concertation avec les différents acteurs. Avec lui, le Gouvernement confirme l’engagement de notre pays pour la recherche, en mobilisant des moyens humains et financiers sans précédent.

La performance de la recherche française dépend à terme de sa capacité à attirer aujourd'hui les meilleurs chercheurs. Force est de constater que nos prédécesseurs, manifestement frappés d'agnosie, ont laissé s'installer dans ce domaine une situation qui a abouti à la grave crise de 2004. Ce texte comporte de nombreuses mesures très attendues en faveur des jeunes chercheurs. Ainsi, l'allocation de recherche sera revalorisée de 16 % au cours des deux prochaines années, après avoir été augmentée de 17 % en trois ans. Elle sera maintenant indexée sur le point d'indice de la fonction publique. Pour acquérir sa pleine efficacité, elle doit être réévaluée tous les ans de façon à atteindre 1,5 fois le SMIC. La pratique consistant à verser des allocations différentes à des chercheurs partageant les mêmes responsabilités au sein d’un laboratoire doit disparaître. Par ailleurs, pour que la qualification du doctorat soit pleinement reconnue comme une première expérience professionnelle, il est indispensable de rapprocher l’allocation de recherche du niveau actuel du salaire perçu par un chercheur statutaire.

Une fois le doctorant reconnu comme salarié de l'État et bénéficiant à ce titre de la couverture sociale – chômage, maladie et retraite –, il sera possible de résorber les libéralités, pratiques scandaleuses et dégradantes. Cette reconnaissance apporte une première réponse au flou juridique et sémantique qui entoure le statut de doctorant. Travailleur ou étudiant ? Travailleur. Le titre de docteur doit donc être inscrit dans les conventions collectives et intégrer la grille de la fonction publique comme c'est déjà le cas pour les chimistes.

Parallèlement, l'attractivité des carrières dans la recherche publique est renforcée. 3 000 postes sont créés en 2006, répartis de manière équilibrée entre chercheurs, enseignants-chercheurs et personnels techniciens, ingénieurs et administratifs, lesquels sont indispensables au bon fonctionnement des laboratoires. Des décharges d'enseignement sont accordées aux jeunes maîtres de conférences qui souhaitent se consacrer davantage à la recherche et les bourses Descartes distingueront les meilleurs.

Subsiste un problème majeur : celui de l’âge moyen d'entrée, scandaleusement élevé – 30 ans en CR2, 35 ans en CR1. Il doit impérativement être abaissé pour éviter que les thésards restent sans statut pendant une période qui parfois peut atteindre jusqu'à six ans avant leur embauche. Cette précarité constitue un barrage social évident à l'exercice du métier de chercheur.

Enfin, la création des contrats CIPRE est une mesure novatrice qui permet l’intégration des jeunes chercheurs dans l’entreprise, sachant que l'objectif fixé par le Gouvernement est de parvenir à la stabilité de l’emploi dans les trois années qui suivent l'obtention du diplôme.

Nous avons là une loi majeure qui dote la France des moyens indispensables pour affronter les enjeux internationaux. Notre pays, à l’instar de l'Union européenne, a l'ambition d'être aux avant-postes de la connaissance et à l'avant-garde de la compétition mondiale. Gagner cette compétition, c’est gagner le respect des autres en s’assurant la puissance économique, le progrès social et le bien-être individuel. Je suis très fier d'appartenir à la majorité parlementaire et de soutenir le Gouvernement qui agissent en sorte que la France soit dans ce domaine à la seule place qui lui convienne : la première ! (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP)

Plusieurs députés socialistes – Les pauvres, ils sont complètement schizophrènes !

M. Jean Bardet – Ce projet de loi vise à favoriser la recherche en France. Cependant, le rapporteur a insisté sur l’importance de la dimension européenne. Un amendement a même été voté en commission afin que le Haut Conseil « veille à assurer la cohésion de ses recommandations avec les actions menées dans l'espace européen de la recherche ».

Le Gouvernement fixe les grands objectifs de la recherche. Pour autant, il ne doit pas la brider au nom de considérations éthiques. Je m’attacherai à évoquer un problème fondamental pour les chercheurs français, celui de l’interdiction du clonage thérapeutique par l’article 22 de la loi du 6 août 2004. L'article 511-2 du code pénal prévoit une peine de prison de sept ans et une amende de 100 000 euros à l’encontre des contrevenants. Certes, cette loi doit être révisée tous les cinq ans – on m’a opposé cet argument en commission pour m’inciter à renoncer à un amendement – mais dois-je rappeler que la loi de bioéthique de 1994 n’a été révisée qu’en 2002 ? Du reste, un député de l'opposition, apparenté socialiste, a également estimé que ce délai de cinq ans était trop long puisqu’il a présenté le 25 mai dernier une proposition de loi visant à lever cette interdiction.

Des chercheurs de Grande-Bretagne, de Belgique et de Corée du Sud se sont lancés dans la voie du clonage thérapeutique. Les résultats fallacieux de certains d’entre eux ne condamnent pas la recherche sur les cellules souches embryonnaires en soi. Le terme de clonage thérapeutique est d'ailleurs mauvais car il laisse supposer que ces recherches aboutiront dans un avenir proche à l’élaboration de nouveaux traitements pour certaines maladies, aujourd’hui incurables. Mais, Monsieur le ministre, pour que la recherche fondamentale ait des « retombées sanitaires », il faut lui donner des moyens ! Il faut donc préférer les termes de clonage non reproductif ou de clonage scientifique. L'interdiction faite aux chercheurs français de travailler sur ce sujet les condamne à un retard scientifique considérable. Ce n'est pourtant qu'en développant des techniques de pointe que la France pourra rivaliser avec les pays émergents. Notre pays ne doit pas, par excès de rigueur, instituer une forme d’inquisition moderne. Personnellement, je serai toujours du côté de Galilée et non de celui de l'Inquisition, du côté de Harvey et non d'Ambroise Paré…

Un député socialiste – Très bien !

M. Jean Bardet - … qui demandait « Qu'a à faire un chirurgien de la circulation sanguine ? »,…

M. le Rapporteur – Juste !

M. Jean Bardet - …. du côté de Pasteur et non de Pouchet qui défendait la thèse de la génération spontanée, du côté de Darwin et non du côté de certains États ultraconservateurs nord-américains qui interdisent tout enseignement de la théorie évolutionniste.

Le Premier ministre a confié à M. Fagniez la mission d’élaborer un rapport sur le clonage scientifique. Mais, sans préjuger de la qualité de ses travaux, il me semble que la pièce est jouée d’avance puisque le comité consultatif national d'éthique a déjà émis un avis favorable à son interdiction, de même que MM. Claeys et Huriet, en 2000, au nom de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, et que neuf prix Nobel français ayant fait connaître leur position par une pétition. Pourtant, en se privant des retombées des recherches sur le clonage non reproductif, la France se pénalise tant dans le domaine scientifique que dans le domaine économique.

De plus, quel sera le statut du jeune chercheur français travaillant en Angleterre sur le clonage scientifique et revenant en France de manière définitive ou temporaire ? Sera-il jeté en prison ?

M. le Rapporteur - Pour lui, on rétablira la guillotine ! (Sourires)

M. Jean Bardet – Et s’il n'est pas directement jeté en prison, pourra-t-il vivre des royalties qu'il touchera sur le brevet qu’il aura déposé ?

Il est vraisemblable que l’amendement que j’ai déposé sera rejeté en séance comme il l’a été en commission. « Tu as raison, mais ce n’est pas le moment », me répond-on. Certains voteront contre par conviction, d’autres par peur de se mettre à dos une partie de leur électorat, d’autres encore en oubliant qu’ils ont déposé une proposition de loi allant dans le même sens. Tout cela n’est pas glorieux. Pour moi, quand mon amendement aura été rejeté, je conclurai simplement : « Et pourtant, elle tourne » ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Christian Kert – Je me réjouis que le président Dubernard ait prononcé son credo européen, car je crois aussi que la France doit se doter des outils nécessaires pour atteindre les objectifs définis lors du Conseil européen de Lisbonne.

Oui, la recherche est un nouveau paradigme économique. Pendant trop longtemps, il y a eu confusion des rôles, les politiques se tournant vers les scientifiques pour leur demander le chemin, alors que l'inverse eût été plus logique.

J'aime à citer l'ancien directeur de la recherche, Daniel Nahon, qui disait que, si la recherche voulait se mettre au niveau européen, il lui faudrait apprendre à « tailler ses crayons », c'est-à-dire se réorganiser, en réglant notamment les fonctionnements parallèles de l’Université et des organismes de recherche. Pour se mettre aux normes européennes, la France doit apprendre à redéfinir le périmètre de compétence et d'intervention de ses structures : ainsi, il arrive au CEA de répondre à une question qui est de la compétence de l’INRA et, pour la moitié de ses activités, l'INSERM est doublé par le CNRS ! Il est temps de clarifier les choses…

M. le Rapporteur – Absolument, c’est ainsi depuis vingt ans, et on ne parvient pas à régler le problème !

M. Christian Kert – … d’autant que, pendant trop longtemps, la France a accepté de multiplier des programmes faisant doublons avec les programmes européens. L'une des réussites de la science, c'est l'évaluation par ses pairs. Or on n'a pas suffisamment fait appel à l'évaluation par des pairs européens.

Du temps de Pasteur, il y avait un microscope et un chercheur. Lentement, on a appris à grouper des chercheurs autour d'un instrument. Le temps est venu de grouper des campus autour des instruments. On a changé d'échelle dans les faits, mais les esprits ont-il changé ?

Il nous faut imaginer de nouveaux moyens d'informer et faire en sorte que la science entre dans la culture des citoyens, en les faisant entrer, par exemple, dans le collège « grand public » du Haut Conseil de la science et de la technologie. Il nous faut également mettre la recherche en cohérence avec les besoins réels du pays.

Il s'agira d’abord d'apprendre à travailler avec les autres ֤États membres pour accroître la coopération autour de projets de taille. Il conviendra aussi d’encourager la mobilité communautaire et internationale des chercheurs français, ainsi que l'accueil des chercheurs étrangers, en affichant systématiquement dans les contrats d’objectifs et les contrats quadriennaux un objectif de croissance de cette mobilité.

L'un des rapporteurs en appelait à plus de liberté dans la recherche. Voici l’occasion : la recherche française devra se confronter de manière permanente aux normes internationales. Monsieur le ministre, nous adhérons à votre volonté d’introduire davantage d’experts internationaux dans les laboratoires et de créer des laboratoires binationaux et européens, qui conforteront la place des scientifiques français. Renforcer le soutien administratif aux projets européens, anticiper sur le VIIe programme cadre communautaire pour la recherche, voilà des actions qui nous permettront de faire entrer la recherche française dans le XXIe siècle européen !

Il ne faut pas craindre d'impliquer les communautés scientifique et industrielle dans les politiques de compétitivité. Je suis en plein accord avec les conclusions du rapport de notre collègue Garrigue : il paraît en effet indispensable que l'Union se dote d'une stratégie qui lui soit propre, afin de construire une Europe fondée sur la recherche, l'excellence et l'espérance ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet - Beaucoup a été dit, notamment sur l’effort financier considérable en faveur de la recherche, sur la création d’outils utiles, tels que les PRES, l’Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur, et sur le travail relatif à l’architecture des institutions, avec la création du Haut Conseil de la science et de la technologie et de l’ANR.

Je voudrais simplement revenir sur quelques sujets, en me plaçant à la fois sous le signe du grand désarroi qui s’est exprimé ces dernières années et sous celui de l’espoir que soulève aujourd’hui notre travail. La recherche est notre avenir, d’autres pays l’ont compris. Un sursaut est nécessaire, ce texte en est le signal et l’instrument. Il y est question de moyens financiers, dont je souhaite qu’ils soient à euros constants, afin que l’inflation ne rogne pas nos engagements.

Ce texte est une boîte à outils, qui offre à chaque site les moyens de son développement et de sa visibilité, ce qui était indispensable. Les classements internationaux nous rappellent, hélas, que l’organisation éclatée de la recherche nous pénalise. C’est une chance qui s’offre aux institutions et aux laboratoires – qui peuvent se regrouper, se coordonner, se renforcer et se faire connaître –, mais aussi aux chercheurs, grâce à des conditions plus souples de participation aux activités d’une entreprise valorisant les résultats de la recherche.

Je suis l’élue d’un pays de chercheurs – plateau de Saclay, établissement de Bruyères-le-Chatel, sites de Nozay, Marcoussis et Limours – et je sais que rien n’est plus enthousiasmant que de voir un projet de recherche sortir de son laboratoire, pour être développé en entreprise. A l’inverse, rien n’est plus triste que le gâchis d’un projet, tué par la pesanteur d’un système.

Mme Anne-Marie Comparini - C’est vrai !

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet - Le projet de loi marque également une volonté de réconciliation entre le monde de la recherche et la société civile. Je me suis beaucoup intéressée aux travaux du groupe Recherche et société du collectif « Sauvons la recherche », et j’ai eu l’occasion de m’entretenir de ce sujet à plusieurs reprises avec le regretté Gérard Meji, alors patron du CNRS, lors des travaux préparatoires à la Charte constitutionnelle de l’environnement.

Ce dialogue est souvent difficile, rompu puis repris ; il est fait de passion et aussi de méconnaissances : les OGM sont à ce titre un cas d’école. Le Haut Conseil devrait permettre d’institutionnaliser ce dialogue, en devenant une caisse de résonance pour les demandes qui proviennent de la société. A cet égard, la possibilité d’une autosaisine devrait être accueillie favorablement.

Enfin, permettez-moi de dire un mot du défaut de considération dont souffrent la recherche et les chercheurs : il n’est pas supportable que ceux-ci se sentent si peu reconnus et si mal aimés. Si des échanges avec les laboratoires étrangers sont utiles, il n’est pas souhaitable que les « ailleurs » soient des terres promises pour les meilleurs. Nous devons donc œuvrer rapidement à leur réconciliation avec la société française. Ce texte y contribue utilement. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

La discussion générale est close.

M. le Ministre - Je vais m’efforcer de répondre très brièvement à chacun d’entre vous. Je souhaite rassurer M. Claeys, qui s’est beaucoup interrogé sur la qualité de la concertation, en lui disant que ce projet a fait l’objet de beaucoup de discussions avec les universités et les chercheurs. Autant les rapports ont été dans un premier temps difficiles, autant ils se sont par la suite améliorés. Ainsi, les PRES, que nous avons retenus dans le projet de loi, étaient d’abord une proposition émanant des universités.

Mme Comparini demande un nouveau statut pour les chercheurs et pour les enseignants-chercheurs. Pourquoi pas ? Mais la question aujourd’hui est plutôt de leur donner les moyens de travailler ensemble et de les soulager des contraintes administratives, dont ils se plaignent beaucoup. Madame la députée, vous avez dit que la grande oubliée était l’Université. Au contraire, elle se trouve au cœur des PRES. Son engagement en faveur de ce dispositif montre, si besoin était, que, l’autonomie dont elle dispose aidant, elle est prête à évoluer grâce à ces nouveaux outils. Mais nous sommes prêts à examiner vos amendements.

M. Bocquet a insisté sur la précarité. Or nous créons 3 000 emplois, en supprimant les libéralités. Nous sommes favorables à une recherche fondamentale libre, ce qui est la raison pour laquelle l’ANR réserve 30 % de ses crédits pour le financement de programmes blancs.

Monsieur Lasbordes, il est vrai que jamais un Gouvernement n’avait créé autant de postes et que l’ANR est une agence de moyens. Nous avons bien noté votre souci de transparence et votre demande d’un système d’évaluation simple. Il est par ailleurs souhaitable que les entreprises s’intéressent aux doctorants, comme aux ingénieurs, et c’est pourquoi le Gouvernement, soucieux de plus de lisibilité, a souhaité une loi de programme.

Monsieur Durand, vous regrettez l’échec de beaucoup d’étudiants en premier cycle. Il faut reconnaître que c’est la rançon de l’ouverture et de la démocratisation de l’Université, mais nous pourrons diminuer ce taux en travaillant sur l’orientation et sur l’information des jeunes.

En effet, Monsieur Garrigue, l’Europe n’est pas une option mais une nécessité. La taille critique est souvent absente et la dispersion trop grande. Nous sommes, par exemple, au début de la réflexion sur un Institut européen de la technologie, mais en tout état de cause, vous avez raison de dire qu’une stratégie européenne est indispensable.

La France jouera un rôle d’autant plus moteur en Europe qu’elle aura su effectuer très tôt sa restructuration.

Monsieur Périssol, vous avez raison de dire que le ministère doit devenir stratège : la future direction générale de la recherche et de l’innovation sera justement dotée d’une direction de la stratégie.

Il est vrai, Monsieur Le Déaut, qu’il ne faut pas opposer recherche fondamentale et recherche appliquée.

Monsieur Brottes, je vous rappelle que les dépenses de recherche du secteur privé représentent 1 % du PIB, contre 1,26 % pour le public : pour atteindre 3 % du PIB, c’est donc le premier qui doit accentuer son effort. En outre, c’est pour conserver une part essentielle de recherche fondamentale que le texte prévoit des programmes blancs.

Je vous remercie, Monsieur Ménage, d’avoir qualifié cette loi de « majeure ». Notre pacte comporte de nombreuses mesures en faveur des jeunes chercheurs, dont l’allocation de recherche, revalorisée de 17%, et les contrats CIFRE et CIPRE.

Monsieur Bardet, le clonage est un sujet sensible qui exige une large concertation et nous faisons tous confiance au travail de M. Fagniez pour préparer une éventuelle évolution de la législation en la matière.

Ayant répondu à une moitié des intervenants, je laisse le soin à mon collègue et ami M. Goulard de répondre aux autres.

M. le Ministre délégué - M. Schwartzenberg s’est livré à un long examen historique centré sur la période où il était au gouvernement, mais il a omis de nous parler de la programmation manquée du début des années 1980…

M. Michel Charzat - Et les années 2000 ?

M. le Ministre délégué - … où rien ne fut fait malgré les nombreux engagements pris. Il évoque la « virtualité » des crédits de l’ANR, mais ceux-ci existent bel et bien : 700 millions l’an dernier, 800 millions cette année !

M. Michel Charzat - Un tiers de défiscalisation !

M. le Ministre délégué - Il doute de la montée en puissance du crédit d’impôt- recherche, mais les chiffres sont les suivants : 590 millions de dépenses fiscales en 2004, 730 en 2005 et probablement 860 en 2006. C’est ainsi que la recherche-développement progresse très rapidement dans le privé.

Mme Pécresse a fait une analyse très pertinente des besoins de la recherche en ressources humaines : les départs à la retraite sont nombreux, et il faut que la prévision annuelle de l’emploi scientifique soit aussi précise que possible. Quant à la recherche fondamentale, elle n’est jamais rentable à court terme et peut même ne pas être rentable du tout : mais la recherche « gratuite » est aussi respectable que la recherche appliquée. Enfin, évitons la confusion – qu’elle n’a pas faite – entre les programmes « blancs » qui représentent près d’un tiers des financements de l’ANR et la recherche fondamentale qui en représente environ la moitié.

M. Fagniez s’est livré à une explication de texte très utile sur les pôles de recherche et d’enseignement supérieur. La loi permet en effet un statut d’association ou de GIP, mais les statuts proposés dans le texte sauront mieux garantir la pérennité des institutions concernées. Quant au rapprochement des statuts de chercheur et d’enseignant-chercheur, c’est une question qui est actuellement à l’étude.

M. Mamère a multiplié les interprétations erronées, au point que je me demande si elles étaient toutes involontaires.

Deux voies s’offrent à nous, Monsieur Philip, pour construire l’Europe de la science : celle de l’Union, avec les PCRD et la nouvelle agence de la recherche, et celle des partenariats bilatéraux ou multilatéraux comme c’est la cas entre la France et l’Allemagne. L’idée d’un réseau d’agences européennes d’évaluation est par ailleurs très intéressante.

M. Cugnenc a eu raison de préciser que l’ANR était déjà une réussite, dont ont beaucoup bénéficié les jeunes chercheurs.

L’objectif de 3 %, Monsieur Charzat, n’est pas une prévision : c’est une ambition ! Or, notre objectif est d’accroître les dépenses privées de recherche, comme cela a été le cas dans d’autres pays. La France fait d’ailleurs déjà partie du peloton de tête en la matière.

M. Yves Durand - M. Dubernard en doute…

M. le Ministre délégué - Monsieur Marie-Jeanne, la présentation des pôles de compétitivité qu’a faite M. Hollande est méprisante à l’égard de l’outre-mer !

MM. Yves Durand et Michel Charzat – Pas du tout ! Au contraire !

M. le Ministre délégué - Je me réjouis de l’existence du pôle maritime qui concerne, entre autres régions, l’outre-mer, mais vous avez raison de préciser que l’université Antilles-Guyane offre également des possibilités de recherche originales, et la porte n’est pas fermée à de nouveaux pôles de compétitivité.

Je ne crois pas, Monsieur Kert, qu’il y ait de doublons avec les programmes européens, mais je reconnais que l’articulation entre les programmes serait meilleure si nous disposions de plus d’informations sur l’exécution des PCRD. J’approuve l’idée de clarification des missions des organismes, pourvu qu’un champ thématique puisse être traité par plusieurs d’entre eux. La mobilité des chercheurs en Europe doit figurer dans les contrats quadriennaux. Enfin, il faut accueillir une communauté d’experts étrangers pour l’évaluation, mais aussi au sein de l’ANR, par exemple.

Vous avez raison, Madame Kosciusko-Morizet : la loi est une boîte à outils qui doit servir à construire une recherche plus efficace et décloisonnée. Le dialogue avec la société est fondamental : réconcilier la société avec la science est l’un de nos grands objectifs, et M. Dubernard l’a dit tout à l’heure avec les mots justes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu, cet après-midi, mercredi 1er mars à 15 heures.
La séance est levée à 1 heure 25.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Catherine MANCY

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ORDRE DU JOUR
DU mErCREdi 1er MARS 2006

QUINZE HEURES : 1RE SÉANCE PUBLIQUE

1. Questions au Gouvernement (1).

2. Suite de la discussion du projet de loi de programme pour la recherche, adopté par le Sénat après déclaration d’urgence (n° 2784 rectifié).

Rapport (n° 2888) de M. Jean-Michel DUBERNARD, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Avis (n° 2879) de M. Claude BIRRAUX, au nom de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire.

Avis (n° 2837) de M. Jean-Michel FOURGOUS, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan.

VINGT ET UNE HEURES TRENTE : 2è SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l’ordre du jour de la première séance.

(1) Les quatre premières questions porteront sur des thèmes européens.

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne deux heures après la fin de séance.
Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.
www.assemblee-nationale.fr

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