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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

1ère séance du jeudi 22 juin 2006

Séance de 9 heures 30
107ème jour de séance, 251ème séance

Présidence de M. Maurice Leroy
Vice-Président

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La séance est ouverte à neuf heures trente.

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fin d’une mission temporaire

M. le Président – M. le Premier ministre m’a informé de l’achèvement de la mission temporaire précédemment confiée à M. Yves Fromion.

M. Jean-Pierre Brard - Je pensais qu’il s’agissait de la sienne ! (Sourires)

M. le Président – Patientez donc ! (Sourires)

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débat d’orientation budgétaire
et débat sur les orientations des finances sociales pour 2007 (discussion commune)

L'ordre du jour appelle le débat d’orientation budgétaire et le débat sur les orientations des finances sociales pour 2007, qui font l’objet, sur décision de la Conférence des présidents, d’une discussion commune.

M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l’industrie Je veux vous dire combien nous sommes heureux, Xavier Bertrand, Jean-François Copé, Philippe Bas et moi-même, de vous présenter les grandes orientations de nos finances publiques pour l’exercice 2007.

M. Jean-Pierre Brard - A quatre, cela va être difficile !

M. le Ministre de l’économie – Nous sommes nombreux, certes, peut-être davantage que sur les bancs de cette assemblée.

M. Jean-Marie Le Guen - Vous y siégerez un jour…

M. le Ministre de l’économie – Nous vous apportons de bonnes nouvelles.

Je souhaite vous dire pourquoi ce débat d’orientation budgétaire – n’ayons pas peur des mots – est historique ! Pour commencer, le document que vous avez devant vous intègre de manière exceptionnelle l'engagement national de désendettement, que le Premier ministre avait annoncé en janvier à l'occasion de la Conférence nationale des finances publiques, et à la suite du rapport sur la dette que j'avais demandé à Michel Pébereau. Ensuite, ce document présente les grandes lignes du budget 2007, lequel constitue une étape historique du désendettement : le taux de progression de la dépense de l'Etat sera inférieur de 1 % à celui de l’inflation, du jamais vu depuis vingt ans ! Enfin, ce document intègre cette année les grandes orientations de la politique de sécurité sociale et du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007. C'est là encore une grande première et un signe supplémentaire de la volonté du Gouvernement d'associer tous les acteurs de la dépense publique à l'engagement de désendettement.

C'est d'ailleurs ce que j'ai rappelé le 20 juin au Conseil d'orientation des finances publiques. Cette instance d'organisation et de concertation, lors de sa première réunion de travail à Bercy, a d’ailleurs désigné comme rapporteur M. Gilles Carrez que je le remercie d’avoir accepté cette charge.

Rentrons sans plus attendre dans le vif du sujet. Les résultats du premier trimestre, vous le savez, sont bons : avec un solide 0,54 % de croissance, ils s’inscrivent dans la fourchette annuelle retenue par le Gouvernement – entre 2 % et 2,5 % - et confirment les chiffres du second trimestre 2005.

La composition de cette croissance souligne l'excellente dynamique de notre économie : la consommation des ménages a progressé de 0,9 % – 3,6 % en rythme annualisé – apportant une contribution de 0,5 % à la croissance. L'exportation poursuit son net redressement depuis l'été 2005, affichant une nouvelle progression de 3 % – 12 % en rythme annualisé. On ne le dit pas assez ; il est vrai que dans ce pays, on aime se flageller…

M. Jean-Pierre Brard - Parlez pour vous !

M. le Ministre de l’économie – … mais les faits sont têtus…

M. Jean-Marie Le Guen - Voilà que vous citez Karl Marx !

M. le Ministre de l’économie – La France progresse plus vite que jamais. Le commerce extérieur apporte ainsi une contribution à la croissance de 0,5 %. La différence est constituée par un énorme déstockage, qui traduit une très forte demande que les entreprises françaises devront compenser dans les prochains mois. C’est donc une excellente nouvelle !

M. Augustin Bonrepaux - Que des très bonnes nouvelles !

M. le Ministre de l’économie – Ce n’est pas moi qui le dis. Le rebond est confirmé en 2006, les journaux l’écrivent.

M. Jean-Pierre Brard - Evidemment, votre spécialité, c’est le yo-yo !

M. le Ministre de l’économie – Les enquêtes disponibles montrent une poursuite, voire une accélération de cette dynamique au deuxième trimestre.

Enfin, l'inflation reste très bien contenue – autour de 2 % sur un an – malgré la hausse du prix du pétrole. Contrairement à ce que certains commentateurs ont pu écrire, je ne vois pas d'effet de second tour dans les chiffres d'inflation : l'inflation sous-jacente – hors prix volatils, comme celui du pétrole – reste au niveau bas de 1,1 % en mai, chiffre confirmé par l’Insee ce matin.

Ce rythme d’inflation soutient le pouvoir d’achat : la consommation manufacturée a progressé de 0,6 % en mai. Le maintien des taux d’intérêt à un niveau très bas favorise l’investissement des entreprises et l’investissement immobilier des ménages. Chez nos partenaires, en Allemagne notamment, la conjoncture est favorable. Enfin, la situation de l’emploi ne cesse de s’améliorer : le taux de chômage est passé à 9,3 % en avril.

La phase de reprise conjoncturelle est donc bien passée : la France est désormais installée dans une croissance de 2 à 2,5%, soit la fourchette retenue pour le budget de 2006 et confirmée par l’Insee, dont la prudence est pourtant connue.

M. Jean-Pierre Brard - Une fourchette, c’est bien ; encore faut-il qu’il y ait quelque chose dans l’assiette !

M. le ministre de l’économie L’Insee prévoit également la création de 200 000 emplois avant la fin de l’année – le taux de chômage sera ainsi ramené à 9 % – ainsi qu’un gain de pouvoir d’achat double de celui de 2005. Le scénario défendu par les équipes de Bercy, auxquelles je rends hommage, n’était donc pas si irréaliste !

Comme l’Insee, je crois que notre économie peut absorber des chocs tels que la hausse du prix du pétrole ou l’appréciation de l’euro tout en maintenant son rythme de croissance entre 2 et 2,5 %. Encore cette hypothèse est-elle prudente : notre économie peut et doit faire mieux, et sa croissance peut atteindre 3 % – chiffre que j’ai d’ailleurs retenu pour ce débat d’orientation budgétaire. Un tel résultat nous permettrait d’atteindre nos objectifs de finances publiques avant 2010 tout en améliorant la vie de nos concitoyens.

M. Jean-Pierre Brard - En vendant les bijoux de famille !

M. le ministre de l’économie J’en viens au cœur du débat : l’engagement national de désendettement. Nous devons parvenir à l’équilibre des comptes publics et ramener notre endettement en deçà de 60 % du PIB avant 2010. Cet engagement, auquel nous consacrons des moyens précis et chiffrés, repose sur trois piliers essentiels : le relèvement de notre croissance dans le cadre de la stratégie de Lisbonne – avec la réforme fiscale et celle du marché du travail, la priorité donnée à la recherche-développement et le développement des PME –, la maîtrise de la dépense qui ne progressera pas plus vite que l’inflation pendant ces quatre années et les cessions d’actifs non stratégiques. En 2005-2006, plus de quinze milliards d’euros pourront ainsi être affectés au désendettement en utilisant ces multiples leviers.

Il y a un an, j’avais pris devant vous l’engagement de ramener le déficit en deçà de 3% du PIB : c’est fait, n’en déplaise aux critiques !

M. Jean-Pierre Brard - Cela fera très bien sur votre futur curriculum vitae !

M. le ministre de l’économie – La Commission européenne nous en a d’ailleurs donné quitus. La France est le seul des quatre grands pays européens à avoir obtenu ce résultat. La partie, pourtant, s’annonçait difficile : le budget était bâti sur une croissance à 2,5%, et l’activité fut finalement plus faible d’un point.

M. Jean-Marie Le Guen - Par qui avait-il été bâti ?

M. le ministre de l’économie – Il fallait donc exécuter le budget que vous avez voté sans aucune dérive. Nous avons donc, dès le printemps, décidé de geler puis d’annuler certains crédits, d’adapter les acomptes de l’impôt sur les sociétés et d’améliorer les comptes sociaux.

M. Augustin Bonrepaux - Personne ne vous croit ! Cela fait déjà quatre ans que vous êtes là !

M. Jean-Pierre Brard - Vous descendez à la prochaine station !

M. le ministre de l’économie – La France peut mieux faire. Encore fallait-il la remettre sur les rails, vu votre bilan ! Les résultats sont là : la presse unanime salue ce matin le retour de la croissance.

M. Jean-Marie Le Guen - On croirait entendre Raymond Domenech…

M. le ministre de l’économie – D’autre part, le Gouvernement s’est engagé à réduire l’endettement dès cette année d’au moins deux points pour le ramener à 64,6% du PIB. À cette fin, les recettes de cessions d’actifs doivent être affectées en priorité au désendettement. La cession des concessions autoroutières représente déjà dix milliards d’euros, auxquels s’ajoutent les deux milliards de la vente des titres d’Alstom et d’Aéroports de Paris.

M. Jean-Pierre Brard - On liquide et on s’en va !

M. le ministre de l’économie – L’Agence France Trésor a ainsi pu racheter 8,6 milliards d’euros de dette.

Ensuite, le pilotage de la trésorerie doit être infléchi : dès cette année, il n’y aura pas un euro d’endettement de plus que le strict nécessaire pour faire face à la gestion courante ! L’Agence sera dotée de nouveaux outils, tels qu’un bon du Trésor français à très court terme, pour réduire au minimum son matelas de sécurité.

M. Jean-Pierre Brard - On va finir sur les ressorts !

M. le ministre de l’économie Grâce à la réforme de l’État, elle bénéficiera d’une meilleure remontée des informations provenant des administrations dépensières. Les émissions de dette à court terme seront limitées aux stricts besoins de la gestion courante : l’encours de bons du Trésor à court terme a ainsi été réduit de près de 11,3 milliards depuis le début de l’année. Les vingt milliards que nous pourrons dégager de la seule gestion de la trésorerie contribueront donc au désendettement.

Tous les acteurs publics doivent partager cet effort de gestion : l’État, mais aussi les organismes sociaux, les collectivités locales, la CADES, le Fonds de solidarité vieillesse ou encore le FFIPSA. C’est pourquoi j’ai annoncé avant-hier la création du Comité interministériel de la trésorerie des administrations publiques.

M. Gérard Bapt - Nous sommes sauvés !

M. le ministre de l’économie – En outre, il faut cesser de gaspiller les surplus des recettes fiscales, comme on le faisait à la fin des années 1990. Chacun se souvient de l’immobilisme qui a conduit la France, contrairement à ses partenaires européens, à ne pas utiliser ses exceptionnelles ressources fiscales pour se désendetter.

M. Jean-Marie Le Guen - C’est M. Chirac qui voulait dépenser la cagnotte !

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille - Que vous avez cassée !

M. le ministre de l’économie – Heureusement, nous avons repris notre destin économique en main !

Outre la réduction de l’endettement, nous allons poursuivre notre effort de réduction du déficit public, qui passera de 2,9 à 2,8 % du PIB, et ce malgré le contrecoup de la soulte des industries électriques et gazières. L’exécution du budget 2006 sera respectée à l’euro près. Quatre des six milliards d’euros mis en réserve aux termes de la LOLF sont d’ores et déjà mobilisables pour faire face à des dépenses nécessaires, sans que l’autorisation parlementaire soit pour autant dépassée. Mes collègues reviendront sur les comptes sociaux.

Troisième engagement : ramener le déficit public sous le seuil du déficit stabilisant, afin de pérenniser la dynamique du désendettement amorcée cette année.

M. Jean-Pierre Brard - Est-ce bien du français ?

M. le ministre de l’économie – Le « déficit stabilisant », notion chère à M. le rapporteur général, est essentiel à notre stratégie de désendettement : dès que le ratio entre la dette et le PIB se stabilise, celle-ci se réduit.

M. Jean-Pierre Brard - Il vous manque le talent pédagogique !

M. le ministre de l’économie - Aujourd’hui, il est de l’ordre de 2,5 %, conformément à notre objectif pour 2007.

M. Charles de Courson - Mais non !

M. Gérard Bapt - Il est à 1,7 % !

M. le ministre de l’économie - Telle est la situation assainie que nous laisserons à nos successeurs…

M. Jean-Marie Le Guen - Merci d’avance !

M. le ministre de l’économie – Chacun se souvient qu’entre 1997 et 2002, alors que la croissance européenne atteignait 3 %, tous les pays européens se désendettaient sauf un : la France, dont la dette augmentait de 170 milliards… Il a fallu quatre ans pour remettre la France à l’endroit (Protestations sur les bancs du groupe socialiste).

Pour atteindre le déficit stabilisant, il faut avant tout que la dépense de l’État soit inférieure d’un point à l’inflation – c’est le « moins un volume ».

M. Jean-Pierre Brard - Je sais que vous n’êtes pas candidat à l’Académie française, mais tout de même !

M. le ministre de l’économie - Pour la première fois depuis bien longtemps, le pouvoir d’achat de l’État diminuera ! Le ministère de l’économie, qui doit être la vitrine de la réforme de l’État, sera dès l’année prochaine soumis à la règle du « zéro valeur »,…

M. Jean-Pierre Brard - Je ne comprends que le français !

M. le ministre de l’économie – …c’est-à-dire la stabilisation de ses dépenses en euros courants.

Ensuite, je rappelle que ce projet de loi de finances financera, grâce à la maîtrise de la dépense publique, la réforme fiscale la plus ambitieuse des vingt dernières années, ce qui fera enfin de la France un pays « fiscalement normal » en Europe. Enfin, comme l’a annoncé le Premier ministre, les effectifs diminueront de 15 032 unités, dont 2 988 pour Bercy.

Notre quatrième engagement, c’est de mettre en œuvre dès aujourd’hui les outils de pilotage de nos finances publiques permettant d’atteindre l’équilibre des comptes au plus tard en 2010 et de passer sous la barre des 60% d’endettement. A compter de 2008, l’effort devra se poursuivre et cela ne sera possible qu’en associant mieux encore l’ensemble des acteurs. Tel est l’enjeu du Conseil d’orientation des finances publiques, que nous avons mis en ordre de marche mardi dernier. Je remercie encore Gilles Carrez d’avoir accepté de coordonner le premier rapport qui sera remis à la Conférence, en janvier prochain.

Nos objectifs sont ambitieux mais parfaitement crédibles : sous l’hypothèse d’une maîtrise collective de la dépense, l’objectif serait atteint dès 2009, avec 3% de croissance par an. Même avec une hypothèse prudente de croissance à 2,25 %, il sera atteint en 2010.

Mais l’enjeu est d’abord de maîtriser l’ensemble des dépenses publiques : celles de l’État, qui doivent rejoindre progressivement le « zéro valeur »…

M. Jean-Pierre Brard –parlez donc français !

M. le ministre de l’économie – Les dépenses sociales, ensuite, dont il faudra limiter la progression à « + 1 volume » dans la période. Les dépenses locales, enfin, qu’il faudra maîtriser et faire tendre vers le « zéro volume », dans le respect de l’autonomie financière des collectivités, pour ne pas s’exposer au risque d’une augmentation pénalisante des prélèvements obligatoires.

L'outil de cette réduction ordonnée de la dépense publique, c'est une nouvelle gouvernance, plus stable et plus vertueuse, telle que la proposera, en toute transparence, le Conseil d'orientation des finances publiques. Comme premières pistes de travail, je lui ai soumis avant-hier les différentes options de rénovation de la gouvernance de nos finances publiques qui figurent dans le débat d’orientation budgétaire ou qui ont été évoquées avec les collectivités locales lors de la concertation lancée en mai dernier.

Pour ce qui concerne l’État, la mise en œuvre de la LOLF permet déjà une meilleure gouvernance financière, les audits systématiques pilotés par Jean-François Copé et ses équipes ouvrant de nouvelles pistes de réforme de l'État, dans le souci constant de dépenser mieux , à qualité de service public maintenu ou amélioré.

S’agissant des collectivités locales, le Gouvernement souhaite – dans le cadre du Conseil d'orientation des finances publiques - mieux les associer aux décisions les concernant et élargir leurs marges d'initiative, dans le champ des compétences qui leur ont été transférées. Il convient par ailleurs de réfléchir aux moyens d'une meilleure maîtrise de la dépense locale. Jean-François Copé y reviendra dans un instant.

Enfin, je laisserai évidemment Xavier Bertrand et Philippe Bas revenir en détail sur les questions intéressant les organismes sociaux.

Par ce débat d’orientation budgétaire, le Gouvernement pose aujourd’hui un acte majeur de responsabilité politique. Ses efforts inédits de pédagogie et de sensibilisation quant aux risques, pour notre société, d'un endettement incontrôlé ont porté leur fruits : chacun s’est approprié le sujet et les Français rangent aujourd’hui la dette publique parmi leur cinq préoccupations majeures. Je suis convaincu que les orientations que nous sommes venus présenter aujourd'hui répondent aux inquiétudes de nos concitoyens : le programme pluriannuel de désendettement, ce n'est pas le « on verra plus tard » des socialistes… (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) Chacun peut en juger sur pièces dès aujourd’hui (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Philippe Auberger - Excellent !

M. le Président – La parole est à M. Copé.

M. Jean-Pierre Brard - Ah ! l’Aiglon de Meaux ! (Sourires)

M. Philippe Auberger – Allons, ce n’est pas une oraison funèbre.

M. Michel Bouvard – Et il est mieux portant ! (Sourires)

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l’État Le budget que nous vous présentons avec Thierry Breton est le dernier de le présente législature, ce qui donne une occasion privilégiée de faire le point sur les priorités sur lesquelles nous avons été élus en 2002 et sur lesquelles nous avons des comptes à rendre aux Français.

M. Jean-Pierre Brard - Ça sent le requiem !

M. le ministre délégué au budget - Et puis, c'est l'occasion pour nous de prendre date, de fixer nos choix pour l'avenir, en accord avec les valeurs de notre famille politique…

M. Jean-Pierre Brard - Sont-elles cotées en Bourse ?

M. le ministre délégué au budget - Pour être à même de vous présenter nos choix budgétaires si tôt dans l'année, nous avons profité d'un contexte inédit : des outils nouveaux sont désormais à notre disposition, à travers la LOLF et le rapprochement entre le ministère du budget et la réforme de l'État. Une autre opportunité se présentait, avec la prise de conscience collective de la nécessité de réduire la dette. Nous nous engageons clairement dans cette voie.

A travers ce budget, nous remplissons trois objectifs. D’abord, honorer le contrat passé avec les Français en 2002 sur la restauration de l'autorité de l'État. En 2002, les Français nous ont donné mandat pour restaurer l'autorité de l'Etat à travers ses fonctions régaliennes. En la matière, le retard était colossal : l'insécurité et le sentiment d'impuissance de l'Etat menaçaient directement notre pacte social. Si les Français ont choisi notre famille politique, s'ils ont fait confiance à cette majorité il y a quatre ans, c'est bien pour assumer nos valeurs et nos convictions sur ces sujets. Nous .avons maintenant à leur rendre des comptes sur les engagements pris à cette époque. Nous y sommes prêts, compte tenu de la qualité du travail accompli…

M. Didier Migaud - Avec, pourtant, de piètres résultats !

M. le ministre délégué au budget – Nous sommes au rendez-vous des différentes lois de programmation que vous avez votées. La loi de programmation pour la sécurité intérieure est rigoureusement appliquée : 1787 ETPT de gendarmes et de policiers seront créés. Au total, sur l'ensemble de la législature, plus de 12000 emplois de policiers et gendarmes auront été créés, auxquels s'ajoutent 2000 adjoints de sécurité.

M. Jean-Pierre Brard - Et la délinquance augmente !

M. le ministre délégué au budget - Le budget de la justice augmente de 5 %, afin de poursuivre l'effort de renforcement des juridictions, via l'augmentation des effectifs de magistrats et de greffiers et la modernisation des outils informatiques. La loi de programmation militaire est scrupuleusement respectée, pour la cinquième année consécutive. Depuis 2002, les crédits d'équipements militaires auront ainsi progressé de près de 30 %, pour permettre à la France de tenir son rang. Enfin, les moyens dévolus à l’aide publique au développement atteindront le seuil de 0,5 % du revenu national brut.

Le PLF pour 2007 répond aux défis de l'avenir. L'effort sans précédent accompli depuis deux ans en faveur de l'enseignement supérieur et la recherche se poursuit : conformément à la loi de programme de la recherche, 1 milliard de moyens supplémentaires sont dégagés en leur faveur, répartis entre crédits budgétaires, financement des agences et dépenses fiscales en faveur de la recherche et de l'innovation. 1 500 emplois seront créés dans les universités et les établissements publics de recherche. Là encore, nous agissons en accord avec notre conception de la croissance : une croissance durable, nourrie par l'innovation.

Autre objectif central, rendre un meilleur service public aux Français. Et ce n'est pas par toujours plus de dépense publique qu'on améliore la qualité des services publics …

M. Michel Bouvard - Très bien !

M. le ministre délégué au budget - Ce que les Français demandent, c'est une administration qui se modernise sans cesse et un meilleur service public à un moindre coût. Telle est la démarche qui inspire projet de budget pour 2007 : nous faisons la démonstration qu'il est possible d'améliorer la qualité de nos services publics, tout en réduisant la dépense. Pour cela, nous nous appuyons sur trois outils nouveaux.

D’abord, les nouvelles technologies car elles représentent à l’évidence un levier majeur de modernisation des services publics. L’administration de demain, ce doit être « internet à tous les étages » ! A nous de l’utiliser au mieux, car chaque fois que nous leur avons proposé des téléprocédures, les Français en ont fait de vrais succès. En témoigne l’engouement pour la télédéclaration de l'impôt sur le revenu. A ce jour, nous en sommes à 5,3 millions de télédéclarants. A la clé, il y a un meilleur service rendu aux Français, une administration qui se modernise et de moindres besoins en termes d'effectifs - l’équivalent de 750 postes ETPT selon l’ audit que j’ai fait réaliser.

Ensuite, les audits de modernisation, qui composent une véritable boîte à outils sur laquelle les ministres pourront s’appuyer pour conduire les réformes et justifier leurs choix en matière d'effectifs. J'ai lancé cette semaine la quatrième vague, qui comprend 35 audits. Ce seront 38 milliards de dépenses qui vont être passés au crible, sur des sujets aussi importants que l'allocation parent isolé, la dématérialisation de la chaîne pénale, la mise en place de l'agence de délivrance des titres de l'Etat sécurisés, les aides de l'Etat accordées aux entreprises, les remboursements et dégrèvements d'impôts locaux ; s’y ajoutent les audits transversaux, sur l'entretien de l'immobilier de l'Etat ou sur la gestion administrative des personnels et de la paye, en vue de moderniser la manière dont sont gérés et payés les 2,3 millions d'agents de l'Etat. Ainsi, nous disposerons avant la fin de l'été 100 audits, couvrant 100 milliards de dépenses de l'Etat.

Pour certains ministères, ces audits ont montré des gisements de modernisation. Un exemple, l'audit sur les décharges de services des enseignants du second degré. Je vous rappelle qu'elles représentent l'équivalent de 28 000 postes à plein temps et qu'elles sont régies par des textes de 1950. L'audit conclut à la possibilité de supprimer 10 000 emplois à terme. Dès cette année, Gilles de Robien a décidé d’en tirer les conséquences et 3000 emplois seront économisés, cependant que le système sera entièrement revu. Personne n'y perdra financièrement et ce sont désormais les chefs d'établissement qui piloteront le dispositif.

Enfin, les outils d'intéressement à la réforme. II s'agit des contrats de performance que les ministres signent pour trois ans en s'engageant à moderniser leur administration, tant en matière de moyens qu'en matière d'effectifs. Avec un principe clé : la restitution à ces ministères d'une partie des gains de productivité réalisés dans ce cadre. Ainsi, le ministère des affaires étrangères s'est engagé par contrat - rénovation de l'outil informatique, meilleure gestion des ressources humaines, adaptation du réseau consulaire, politique des achats – et ces réformes vont permettre des gains de productivité et des économies d'emplois - 141 ETPT en 2007. Au ministère des finances, les contrats signés avec les grandes directions permettront de supprimer 2988 ETPT, soit de ne pas renouveler deux départs à la retraite sur trois. Enfin, au ministère de l'équipement, la réduction des effectifs – moins 1267 ETPT - s'inscrit également dans le cadre du contrat en cours de finalisation. Il s'attachera notamment à réformer les services déconcentrés, après la décentralisation de la quasi-totalité du réseau routier national.

Avec ces trois leviers, nous offrons un service public profondément modernisé et rénové aux Français, tout en contribuant à la baisse de la dépense publique et du nombre de fonctionnaires. Comme vous le savez, nous allons pouvoir le réduire de 15 000 dès 2007. J'entends bien, sur ce dernier point, les critiques, les interrogations et les craintes, et je veux y répondre point par point.

D’abord, il ne s'agit évidemment que de départs en retraite non remplacés, dans un contexte bien particulier puisque l'année 2007 sera celle d'un pic de départs en retraite. Il n'aurait pas été responsable de la part de notre famille politique de ne pas saisir cette occasion. Ensuite, ces baisses sont pleinement argumentées. Auparavant, on fixait une norme aveugle et brutale. Aujourd'hui, ces baisses sont le produit d'un diagnostic précis des besoins, secteur par secteur, ministère par ministère, politique publique par politique publique. Enfin, elles ne compromettent en rien la qualité du service rendu aux Français.

Un exemple, celui de l'Education nationale. De quoi s'agit-il ? Tout simplement, de tirer les conséquences des évolutions démographiques, en maintenant un taux d'encadrement des élèves inchangé. Dans le primaire, les effectifs des élèves augmentent, donc nous créons 600 postes. Dans le secondaire au contraire, le nombre d'élèves diminue, nous recruterons donc moins, économisant ainsi 2400 postes.

Dans ce processus, tout le monde est gagnant. Les fonctionnaires eux-mêmes, car rien ne peut se faire sans eux. Je vous confirme que la moitié des économies dégagées est restituée aux ministères pour améliorer la carrière des fonctionnaires et les inciter financièrement à la réforme. Le contribuable, qui « en a pour ses impôts ». L’'usager, à qui l'on offre un meilleur service public à un meilleur coût.

Enfin, certains pourraient nous dire que le moment n'est pas opportun. Pour ma part, je pense justement que c'est parce que nous sommes en année électorale que nous n'avons pas le droit de céder à la facilité. Et puis, souvenons-nous de la dernière année de Lionel Jospin : 17.000 emplois publics créés, et 5 milliards de cadeaux distribués….

M. le ministre de l'économie Oh ! la ! la ! N’oubliez pas Fabius !

M. le ministre délégué au budget - … Sans que le succès électoral ait été au rendez-vous, c'est le moins qu'on puisse dire !

Ce budget marque un tournant à double titre. Première étape de notre stratégie de désendettement, il montre le chemin.

M. Jean-Pierre Brard - Le chemin de croix !

M. le ministre délégué au budgetPour la première fois, nous allons faire baisser la dépense publique tout en assumant les priorités, en garantissant la qualité du service public et en finançant la réforme fiscale.

Nous n’avions que 2,2 milliards d’euros de marge pour des dépenses supplémentaires. Il a donc fallu hiérarchiser nos priorités. Je sais que certains chercheront à tout prix qui sont les perdants et qui sont les gagnants. Il faut en finir avec cette logique. Nous avons négocié ce budget en veillant scrupuleusement à ce qu’il n’y ait aucun passe-droit. Tous les ministères ont contribué à l’effort.

Deux exemples. Alors que les crédits de la défense avaient progressé de 1,3 milliard d’euros en 2006, ils n’augmenteront que de 800 millions d’euros en 2007.

M. Jean-Pierre Brard - Qu’en pense M. Dassault ?

M. le ministre délégué au budget - Au ministère des finances, grâce à une stratégie de modernisation désormais bien ancrée, en 2007, les dépenses ne progresseront pas.

Nous tirons également profit de l’audit transversal lancé sur les achats de l’État, qui permettra, à terme d’économiser 1,3 milliard d’euros. Quant à la réduction des effectifs par le non-remplacement des départs en retraite, elle permettra de gagner 500 à 600 millions d’euros sur la masse salariale de l’État.

Enfin, ce budget permet de prendre date face à une gauche, un parti socialiste en particulier, qui donne le sentiment de n’avoir pas changé d’époque.

M. Didier Migaud - Ce sont les Français qui en jugeront, pas vous, Monsieur le ministre !

M. le ministre délégué au budget – L’alternative est claire. Il y a d’un côté le choix de la responsabilité, c’est-à-dire de la capacité de financer les priorités politiques sur lesquelles les Français attendent des résultats, tout en maîtrisant la dépense publique et en réduisant le déficit et l’endettement -c’est celui que nous avons fait, en accord avec les principes et les engagements de notre famille politique. Il y a d’un autre côté le choix de l’augmentation de la dépense publique, et donc aussi de l’impôt et de la dette, comme en témoigne le programme que vient de présenter le parti socialiste (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste). Comme celui-ci ne semble pas en mesure de le chiffrer…

M. Gérard Bapt - Pas davantage que vous vos réductions d’impôts !

M. le ministre délégué au budget - ... ou du moins tarde à le faire, je me suis moi-même livré à l’exercice. La mise en œuvre de ce programme se traduirait par une aggravation annuelle des charges publiques de 115 milliards d’euros en 2012.

La mise en place d’un contrat d’entrée dans la vie active, le fameux RMI Jeunes, qui est un véritable choix de société qui nous oppose…

M. Didier Migaud - Farfelu !

M. le ministre délégué au budget – Farfelu peut-être, mais c’est dans le programme du parti socialiste ! J’ai la faiblesse de penser, Monsieur Migaud, que vous êtes, parmi vos amis, celui qui comptez le moins mal. Je m’étonne donc de votre réaction. Je vous dis, moi, que le RMI Jeunes coûtera 15 milliards d’euros. Le calcul est simple, puisque vous promettez une allocation de 3 000 euros par an pour tous les jeunes en formation, en recherche d’emploi ou en contrat précaire, soit 4,9 millions de personnes.

M. Jean-Pierre Brard - Vous préférez, vous, le CPE pour les jeunes !

M. le ministre délégué au budget – L’abrogation de la loi Fillon sur les retraites, qui permet une économie de 19 milliards à l’horizon 2020, coûterait 12 milliards dès 2012, compte tenu du pic de départs en retraites prévu entre 2005 et le début des années 2010.

La renationalisation à 100 % d’EDF…

M. Jean-Pierre Brard - Voilà une bonne idée !

M. le ministre délégué au budget – Mais il vous faudra voter les hausses d’impôts et l’endettement qui s’ensuivront ! La renationalisation d’EDF, disais-je, coûterait 11 milliards d’euros.

M. Jean-Marie Le Guen - Celle de Suez, préconisée par M. Sarkozy, 55 milliards !

M. le ministre délégué au budget – La mise en place la « carte Vitale professionnelle » coûterait, elle, 10 milliards, la réactivation des emplois jeunes dans le secteur public 5 milliards.

M. Éric Besson et M. Gérard Bapt – Parlez-nous donc du budget de la France que vous préparez, au lieu de parler du programme socialiste !

M. le ministre délégué au budget - Après avoir été séduits par notre bouclier fiscal, vous proposez aussi un bouclier logement, dont la mise en place reviendrait à 4 milliards d’euros (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste).

Je pourrais énumérer les autres mesures. Bref, le total s’élève à 115 milliards d’euros. Il va falloir, Monsieur Migaud, vous qui êtes de ceux qui comptent le moins mal à gauche, creuser le sujet plus avant, car je ne vous lâcherai pas sur ce point ! (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste)

Ce programme se traduirait par une aggravation annuelle des charges publiques de sept points de PIB. Si la gauche revenait au pouvoir, les dépenses publiques représenteraient 61 % du PIB : un record mondial ! Même Cuba n’a pas osé ! (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste)

M. Didier Migaud - C’est vous qui avez augmenté les dépenses publiques et fait exploser la dette !

M. le ministre délégué au budget – Ces mesures ne pourraient être financées que de deux manières. Soit, – et quand on voit comment la gauche gère les régions, toutes les craintes sont de mise –, en augmentant massivement les prélèvements obligatoires, qui passeraient ainsi au-dessus de 50 % du PIB ; soit en acceptant de tripler le déficit public, avec les conséquences inévitables sur l’endettement de notre pays.

Dans l’un et l’autre cas, les premières victimes de cette politique seraient les classes moyennes, puisque c’est sur elles que reposerait l’essentiel du financement des mesures.

M. Jean-Pierre Brard - Mme Bettencourt ou M. Forgeard dans les classes moyennes ! On aura tout vu !

M. le ministre délégué au budget – Vous prétendez que le retour de la croissance réglera le problème. Mais pour financer 115 milliards d’euros de dépenses supplémentaires par an, il faudrait une croissance annuelle de 8,5 %, c’est-à-dire comparable à celle de la Chine !

M. Didier Migaud - Nous avons en effet la prétention de pouvoir faire mieux que vous !

M. le ministre délégué au budget – Je sais bien que vous ne reculez devant rien et que la Chine, après Cuba, vous intéresse. Mais, chacun l’aura compris, le compte n’y est pas.

Si je vous dis tout cela, ce n’est pas pour être désobligeant à votre égard, et j’espère que vous n’allez pas quitter l’hémicycle en colère (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste), mais parce que je ne vous lâcherai pas sur ces sujets sur lesquels nous devrons avoir un débat de fond, afin que les Français comprennent ce que signifie concrètement la mise en œuvre d’un programme de gauche (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

Le débat budgétaire de l’automne prochain sera l’occasion de tracer des perspectives et de permettre à chacun de choisir entre la responsabilité et la démagogie, la modernité et l’archaïsme, la réforme et le conservatisme. Les temps ont changé et ce débat sera passionnant (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités Ce débat d'orientation sur les finances sociales est une première.

M. Jean-Pierre Brard - Une dernière pour vous !

M. le ministre de la santé – C’est une avancée importante introduite par la LOLF, à l'initiative de votre Assemblée, puisque c'est un amendement de votre collègue Yves Bur qui a instauré ce nouveau rendez-vous.

Il est essentiel que le Parlement dispose, au moment où le Gouvernement s'engage dans la préparation du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale, d'une présentation générale des orientations et des grands équilibres financiers, afin de pouvoir mieux préparer les choix budgétaires de l'automne. C’est à juste titre que le traditionnel débat d’orientation budgétaire a été étendu aux finances sociales, lesquelles représentent plus de 350 milliards d’euros par an, soit davantage que le budget de l'État.

Plus que jamais, la cohérence s'impose dans le pilotage des finances publiques. Notre stratégie en effet ne sera efficace que si toutes les dimensions de la dépense publique sont prises en compte et tous les acteurs associés à la définition de cette stratégie. C'est bien notre objectif, dans le prolongement de la Conférence nationale sur les finances publiques, qui s’est tenue le 11 janvier dernier sous la présidence du Premier ministre et qui a rassemblé autour du Gouvernement, le Parlement, le Conseil économique et social, les associations d'élus locaux, les partenaires sociaux et les représentants des organismes de protection sociale. Afin de pérenniser cette démarche, le Gouvernement a, par décret du 5 mai dernier, institutionnalisé la Conférence et instauré un Conseil d'orientation des finances publiques, dont la composition est calquée sur celle de la Conférence et qui a été installé avant-hier.

Souhaitant placer notre pays sur la voie de l'équilibre des comptes publics et mettre en œuvre une stratégie de désendettement, le Premier ministre a assigné deux objectifs aux finances sociales. Tout d’abord, le retour à l'équilibre du régime général de la sécurité sociale à l'horizon 2009 ; ensuite, pour tenir compte de la nécessaire hausse des dépenses sociales du fait du vieillissement de la population et du progrès médical, une limitation de l’augmentation des dépenses des administrations de sécurité sociale à 1 % au-dessus de + 1 % l'inflation. C'est dans ces perspectives que sera élaboré le prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Le retour à l’équilibre de la branche maladie du régime général en 2009 suppose que les dépenses d'assurance maladie évoluent en moyenne sur la période de 2,2 % en valeur, soit 0,4% en volume, avec l’hypothèse d'une inflation à 1,8 %. Il faut donc que se poursuive l’inflexion constatée déjà en 2004, et encore davantage en 2005 et 2006 grâce à la réforme de 2004. En 2003, les dépenses relevant du champ de l'ONDAM avaient augmenté de 6,4 %. En 2004, l’augmentation n’a plus été que 4,9 %. Et en 2005, première année de mise en œuvre de l'ensemble de la réforme de l'assurance maladie, elle n’a été que de 3,9 %, et, pour la première fois depuis 1997, l'ONDAM voté par le Parlement a été respecté. Pour 2006, l'objectif est une progression de 2,5 %.

Il nous faut poursuivre dans cette voie. Les tendances du début 2006 confirment, mois après mois, la modération des dépenses, en particulier pour les soins de ville qui, de janvier à mai, n’ont augmenté que de 1,4 % par rapport à la même période de 2005.

S’ensuit une réduction très nette du déficit de l'assurance maladie. Après avoir atteint 11,6 milliards d’euros en 2004, il a été ramené à 8 milliards en 2005, alors qu'il aurait été de 16 milliards en l'absence de réforme. Et en 2006, le déficit prévisionnel est de 6,3 milliards. Nous sommes donc bien sur la voie d’un retour à l'équilibre. En 2007, notre objectif est de contenir le déficit à 4 milliards.

M. Jean-Pierre Brard - Vous ne serez plus là !

M. le ministre de la santé – Ce retour à l’équilibre financier doit permettre de sauvegarder notre système de sécurité sociale, en le modernisant et en l'améliorant C'est en cela que la réforme de l'assurance maladie de 2004 se distingue des plans de sauvetage qui l'ont précédée. C’est une réforme structurelle qui vise à soigner mieux en dépensant mieux, et qui, pour ce faire, repose sur les changements de comportement et place la qualité au premier plan.

Le redressement financier de l'assurance maladie va en effet de pair avec une politique de santé ambitieuse. La seule façon de maîtriser durablement la dépense, c'est la maîtrise médicalisée, l'évolution des comportements et le développement de la prévention, qui est un véritable investissement dans l'avenir.

L'essor du parcours de soins coordonné autour du médecin traitant constitue à cet égard un acquis incontestable. En dépit de ce que disaient les Cassandre, près de 40 millions d'assurés sociaux ont choisi leur médecin traitant, ce qui montre bien qu’ils se sont bien appropriés ce dispositif. 78 % des consultations s'effectuent dans le cadre du parcours de soins et moins de 2 % seulement réellement « hors parcours ».

La maîtrise médicalisée est également un succès : le ralentissement du rythme d'évolution des soins de ville est le fruit d'une attention plus grande des professionnels, qu’il s’agisse des médicaments ou des indemnités journalières. L'avenant n°12 à la convention, signé cette année, approfondit l'effort en fixant de nouveaux objectifs – 800 millions pour 2006 et 600 millions pour 2007.

Grâce au parcours de soins et à la maîtrise médicalisée, nous pouvons améliorer la qualité des soins tout en maîtrisant les dépenses car il existe de réels gisements d’économies. La Cour des comptes souligne que les dépenses inutiles représentent chaque année 6 à 8 milliards, dont environ un milliard pour les examens inutiles, estimés à 15 % des examens. Quant aux dépenses d'indemnités journalières, qui jusqu'à ces dernières années avaient crû à des rythmes déraisonnables avoisinant 10 %, elles ont baissé de 1 % en 2004, de 1,4 % en 2005 et de 3,7 % sur les premiers mois de 2006 par rapport à la même période de l’année précédente, grâce au renforcement des contrôles.

Le secteur du médicament contribue lui aussi au redressement durable des comptes.

Grâce aux génériques, tout d'abord, 234 millions ont été économisés en 2005, dont 170 au titre de l'augmentation de la pénétration des génériques. En 2006, une nouvelle impulsion a été donnée à la substitution par les accords signés entre l’UNCAM, les pharmaciens et les médecins, qui fixent l’objectif de 70 % de pénétration en décembre 2006. Celui-ci devrait même être dépassé puisqu’au 15 mai, la pénétration atteignait déjà près de 67 %. Nous avons préféré au TFR la substitution, plus structurante.

Notre politique résolue en matière de prix, ensuite, a permis de dégager 365 millions en 2005.

Enfin, plus de vingt médicaments sont désormais disponibles en conditionnement de trois mois. Nous voulons mettre un terme au gaspillage, les trois quarts des boîtes ouvertes n’étant jamais terminées.

Ces différentes mesures commencent à produire leurs effets : l’infléchissement des dépenses de médicaments est indéniable : 1,8 % seulement en mai, contre 2,2 % en avril, 3,9 % en mars, 4,6 % en février et 5,7 % en janvier.

Quant aux établissements de santé, ils se sont engagés dans les réformes structurelles initiées par le plan Hôpital 2007. La part de tarification à l'activité s'élève à 35 % en 2006 pour les établissements publics et privés participant au service public. Le Gouvernement a lancé des travaux de mesure des charges spécifiques pesant sur le service public hospitalier ; parallèlement, la rationalisation des achats, l'amélioration du contrôle de gestion et des systèmes d'information vont permettre au secteur hospitalier de rendre le meilleur service au meilleur coût.

Enfin, il faut développer la prévention, comme le veut la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique, afin de réduire les inégalités devant la santé. J’ai notamment annoncé le remboursement de l’ostéodensitométrie à partir du 1er juillet et, à partir de la rentrée, celui d’un examen bucco-dentaire de prévention à 6 ans et à 12 ans. Nous avons aussi, vous le savez, lancé un certain nombre de plans stratégiques de santé publique.

C'est grâce à l'ensemble de ces actions que nous continuerons à dégager des marges de manœuvre pour améliorer la qualité de notre système de santé et renforcer l'accès aux soins.

Concernant l'accès aux soins, au-delà des mesures de la loi de financement pour 2006 revalorisant le montant de l'aide à la complémentaire – notamment pour les personnes de plus de 60 ans qui bénéficient désormais d'une aide de 400 euros par an –, le Président de la République vient de demander un relèvement du plafond de revenus des bénéficiaires de 15 à 20 % au-dessus du plafond de ressources de la CMUC. Le PLFSS 2007 devra mettre en œuvre cette décision, qui fera passer le nombre de bénéficiaires potentiels de 2 millions à 2,9 millions. L’égalité d’accès aux soins est un sujet fondamental ; j’ai donc saisi le Président du conseil de l’ordre des médecins de l’étude qui vient d’être publiée par le fonds CMU, en lui demandant quelles décisions il entendait prendre à l’égard des professionnels de santé qui ne respectent pas le principe sacré qu’est l’égalité d’accès aux soins.

M. Jean-Pierre Brard - Les pharmaciens aussi ?

M. le Ministre – Tous les professionnels de santé sont concernés.

Les économies réalisées nous permettent également d'améliorer notre système de santé, s’agissant notamment de la prise en charge de la douleur ou de la mise en œuvre du plan de démographie médicale.

En conclusion, nous sommes fidèles à la feuille de route tracée par le Président de la République en matière de retour à l'équilibre des comptes publics et des finances sociales. La réforme de l’assurance maladie produit ses résultats, notre objectif est d'amplifier la dynamique car il s’agit d’un travail de longue haleine. Depuis le début du printemps, un comité de suivi de la réforme et de pilotage de l'ONDAM réunit le directeur de la sécurité sociale, le directeur des hôpitaux, le directeur général de la santé, le président du comité économique du médicament et le directeur général de l'UNCAM. Le PLFSS 2007 s'inscrira dans cette logique. Nous poursuivrons ainsi le redressement de l'assurance maladie, afin de continuer à moderniser et améliorer notre système de santé (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) ;

M. le ministre délégué à la sécurité sociale - Il est important que nous soyons réunis aujourd’hui pour nous mobiliser tous ensemble sur le thème de l’équilibre de nos finances publiques au sens le plus large, après la conférence nationale des finances publiques que Thierry Breton présidait à Bercy avant-hier, réunissant Gouvernement, gestionnaires de la Sécurité sociale et responsables des collectivités territoriales. Il est essentiel de disposer d'une vision d'ensemble de nos finances publiques pour avoir une claire appréciation des enjeux.

Les comptes publics ne font on effet qu'un dans l'esprit de nos concitoyens, à juste raison car il s'agit toujours de faiRe fonctionner des services publics aussi importants par exemple que l'école ou l'hôpital. Que la première soit financée par l'Etat et les collectivités territoriales et le second par la Sécurité sociale est de peu d'intérêt pour nos compatriotes car c'est toujours la collectivité qui les finance, et ce qui importe, c'est qu'ils fonctionnent efficacement, au meilleur coût et de manière solidaire.

Contrairement aux idées fausses que certains se complaisent à colporter, le taux de couverture des dépenses de santé a progressé au cours des dix dernières années, atteignant 79,8 %, soit deux points de plus qu’en 1994. Pour défendre la Sécurité sociale, qui est leur patrimoine commun, les Français ont massivement accepté de choisir leur médecin traitant et les médecins se sont eux-mêmes engagés dans une nouvelle maîtrise de leurs prescriptions, en matière d’arrêts de travail comme de médicaments. Il n’y a pas d’alternative sérieuse à cette politique. D’ailleurs, dans les pays qui n’ont pas de sécurité sociale, les dépenses de santé sont beaucoup plus importantes, comme en témoigne l’exemple américain. Il prouve bien que dans ces pays, les malades ne sont pas mieux soignés – certains ne le sont même pas du tout !

Cette politique que vous contestez serait selon vous également coûteuse pour les Français, mais une baisse de 5 % du taux de couverture des dépenses de santé par l’assurance maladie représenterait une hausse de 35 % des cotisations d’assurance complémentaire, soit l’équivalent de 0,75 % de CSG ! Nous n’en voulons pas, et c’est pour cela que nous réformons la sécurité sociale, afin de maintenir un haut niveau de protection sociale financé par la solidarité. Vous seriez bien inspiré de soutenir cet effort, comme les Français le font.

Plusieurs députés socialistes – C’est ce qu’on va voir !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale – Notre débat est aussi l’occasion de faire progresser la transparence des comptes. Les relations entre comptes sociaux et finances publiques, qui sont très étroites, ont tendance à défavoriser la sécurité sociale, puisque la dette de l’État à son égard s’établissait au 31 décembre 2005 à 5,14 milliards, dont 3,6 pour le régime général. Il n’est pas question de déshabiller Pierre pour habiller Paul : il faut mener de front la réduction des déficits de l’État et de la sécurité sociale, sans qu’aucun des deux serve de variable d’ajustement à l’autre.

M. Gérard Bapt - Ce n’est pas ce que vous avez fait hier au Sénat !

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale – Nous voulons instaurer la plus grande transparence dans les relations entre comptes publics et comptes sociaux, afin de mesurer exactement les efforts de réforme fournis par chacun des acteurs et leurs résultats. Le solde des uns ne soit pas être subordonné aux impératifs des autres. La modification, l’an dernier de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale a permis d’améliorer la coordination entre finances de l’État et finances sociales, pour parvenir à une maîtrise globale des finances publiques. Elle poursuit aussi un but de clarification. Ainsi, le montant de la compensation par l’État des dispositifs d’exonération de cotisation patronale de sécurité sociale doit dorénavant être approuvé dans chaque loi de financement annuelle de la sécurité sociale – compensation qui doit bien sûr être intégrale. De la même façon, seule une loi de financement pourra désormais déroger au principe de non compensation, ce qui permettra de mieux encadrer cette pratique et d'en avoir une vision plus globale. Ces dispositifs d'exonération sont par ailleurs détaillés dans une nouvelle annexe de la loi de financement.

Plus généralement, la loi organique a renforcé la portée des lois de financement de la sécurité sociale, qui comportent désormais des tableaux d'équilibre rapprochant les objectifs de dépenses et les prévisions de recettes des différentes branches et des fonds de financement. Le Parlement peut ainsi se prononcer sur chacun des soldes et dispose d'une vision d'ensemble. Enfin – et dans le prolongement de la démarche engagée en 1996 par les conventions d'objectif et de gestion entre l'État et les caisses nationales de sécurité sociale – les lois de financement comporteront également une annexe présentant les programmes de qualité et d'efficience de la politique de sécurité sociale pour chacune de ses branches. Ces programmes vous permettront d’appréhender, au moyen d'indicateurs précis et d'un diagnostic de la situation, les objectifs et les résultats des politiques mises en oeuvre. Des avant-projets de ces programmes viennent d'être soumis à votre commission des affaires sociales. Toutes ces mesures représentent une avancée importante dans le pilotage des finances sociales.

J'en viens maintenant aux politiques relatives à la vieillesse et à la famille. S'agissant de la branche vieillesse, le Gouvernement a proposé en 2003 une réforme structurelle pour la sauvegarde des retraites par répartition, réforme qui avait attendu si longtemps que tout notre système était en péril. Il y a un consensus sur la nécessité de la mettre en œuvre. La loi de 2003 a été élaborée dans le cadre de réflexions de long terme et sur la base d'un diagnostic partagé, résultant notamment des travaux du Conseil d'orientation des retraites. Le calendrier et les échéances fixées en 2003 seront respectés. Le principe de rendez-vous réguliers est d’ailleurs une avancée importante. Une attention particulière sera apportée à l’évolution de certains dispositifs, comme les départs anticipés et les rachats de cotisations.

M. Gérard Bapt - Précisez votre pensée ! Allez-vous les remettre en cause ?

M.  le ministre délégué à la sécurité sociale - Il faut aussi développer des stratégies pour accroître le taux d’activité des seniors. C’est tout l’enjeu du plan national d’action concerté pour l'emploi des seniors présenté par le Premier ministre.

Le dynamisme des prestations vieillesse en 2006 résulte de la montée en charge du dispositif des départs anticipés pour les salariés qui ont fait des carrières longues. Ces gens ont commencé très tôt, ont travaillé durement et on leur refusait ce droit élémentaire de partir à la retraite plus tôt ! Pendant des années, nous avons déposé des amendements que le gouvernement socialiste s’est obstiné à refuser. Comment aurait-il d’ailleurs pu faire autrement, puisqu’il refusait aussi de réformer les retraites et de dégager ainsi les ressources nécessaires ? Et pourtant, on ne peut nier la légitimité de cette demande. Ce que vous refusiez, nous l’avons donc fait. À la fin de cette année, 300 000 de nos compatriotes auront pu bénéficier de ces retraites anticipées. Quand je vois que certains programmes – je préfère penser à une erreur qu’à une position de fond – comportent la remise en cause de la réforme des retraites… Comment leurs auteurs comptent-ils expliquer à ces 300 000 personnes qu’ils ne peuvent plus financer les retraites anticipées ? Faudra-t-il leur demander de revenir au travail ?

M. Gérard Bapt - C’est la Comédie française !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale – D’après la commission des comptes de la sécurité sociale, si les résultats de la branche vieillesse sont légèrement dégradés par rapport à nos prévisions…

Plusieurs députés socialistes – Bien sûr !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale - ...puisqu’ils s’établiront à 2,2 milliards au lieu d’1,9, c’est entièrement parce que nous avons investi sur le social et sur l’avenir en permettant ces départs anticipés. Nous l’assumons. La réforme des retraites permettra d’améliorer très fortement les perspectives de la branche vieillesse. Le conseil d’orientation des retraites évalue à près de 50 % du besoin de financement l’impact de la réforme à l’horizon 2020 et remarque que grâce au rythme accéléré de la baisse du chômage depuis la prise de fonction du gouvernement de Dominique de Villepin…

M. Jean-Pierre Brard - C’est gentil pour Jean-Pierre Raffarin !

M. le Président – Monsieur Brard…

M. le ministre délégué à la sécurité sociale - … le redéploiement des cotisations chômage et des crédits consacrés aux emplois aidés permettra d’équilibrer le régime général et de faire face au vieillissement de la population. Un niveau de chômage inférieur à 7% est suffisant pour atteindre cet équilibre à moyen terme.

M. Augustin Bonrepaux - On n’y est pas encore !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale – Nous sommes sur la bonne voie. Ainsi, la politique du Gouvernement pour l’emploi a déjà permis de réduire le nombre des chômeurs de plus de 200 000 en un an.

M. Augustin Bonrepaux - Par des trucages !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale – C’est un résultat sans précédent.

M. Didier Migaud - Il y a des précédents !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale – C’est l’un des facteurs de redressement structurel du régime général, sans compter l’augmentation du produit des cotisations sociales générée par la reprise de l’emploi.

La politique de la famille pèse près de 50 milliards chaque année, dont 62 % sont gérés par la branche famille. Interviennent également les collectivités locales, à travers notamment l'action sociale en direction des enfants, la branche maladie, pour les dépenses de maternité, ou encore l'État, qui assume un supplément familial de traitement pour ses employés et finance les bourses scolaires et universitaires. Au cours de ces dernières années, la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle a été une de nos priorités. La France connaît à la fois le taux de natalité le plus élevé d'Europe, même s’il est encore insuffisant pour assurer le renouvellement des générations, et un taux d'activité des femmes entre 25 et 50 ans de 80 %. Cela montre bien que le travail des femmes n’est pas l’ennemi de la natalité.

Plusieurs députés socialistes – Ça alors !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale – Toute notre politique familiale vise aujourd’hui à favoriser la garde des enfants…

M. Augustin Bonrepaux - Par des cadeaux fiscaux ! C’est honteux !

M. le Président – Monsieur Bonrepaux…

M. le ministre délégué à la sécurité sociale – Je comprends qu’il proteste, il n’a pas voté la prestation d’accueil du jeune enfant !

M. Augustin Bonrepaux - C’est du gaspillage !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale – Les 250 000 familles qui en profitent aujourd’hui ne vous remercient pas mais nous remercient ! C’est un progrès social que nous avons voulu et qui est essentiel pour assurer le libre choix des familles.

M. Augustin Bonrepaux - C’est une disposition honteuse !

Mme Claude Greff - Ne parlez pas de ce que vous ne connaissez pas ! Occupez-vous d’abord de vos enfants !

M. le Président – Madame Greff, n’en rajoutez pas.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale – Cet effort, dont nous sommes fiers, pèse naturellement sur les comptes de la branche famille…

Plusieurs députés socialistes – Évidemment !

Mme Claude Greff - Ils ne savent même pas ce qu’est une politique de la famille ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste)

M. Didier Migaud – Un peu de tenue !

Mme Claude Greff - Vous n’arrêtez pas de dire des bêtises !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale – Le déficit de la branche est plus ou moins stabilisé autour de son niveau de l’année dernière. Nous consacrons également un effort sans précédent à l’ouverture de places de crèches. Je remercie la majorité de soutenir cette volonté de conciliation de la vie familiale et professionnelle. Nous le faisons en veillant à la maîtrise des coûts, par la mise en place d’un nouveau pilotage des dépenses de la caisse nationale d’allocations familiales. Le rythme de progression de ces dépenses, qui a été de 17 % en 2004 et de 15 % en 2005, n’était pas soutenable, et n’a d’ailleurs pas toujours correspondu à une amélioration réelle des services rendus.

M. Gérard Bapt - Ah bon ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale – Je me suis engagé auprès de la caisse nationale d’allocations familiales à assurer une progression des crédits de 7,5 % par an pendant quatre ans pour l’ouverture de nouvelles places de crèches.

C’est un effort sans précédent en valeur : nous avons consacré 2,4 millions d’euros en quatre ans à la création de places en crèche, ce qui permettra de passer de 240 000 places en 2002 à 310 000 en 2008. En 2000, le ministre chargé de la famille, dont le nom m’échappe…

M. Jean-Pierre Brard - Le même sort vous attend ! On vous oubliera aussi !

M. le Ministre délégué à la sécurité sociale - …s’était contenté de créer 264 places pour toute la France !

M. Augustin Bonrepaux - Vous réduisez les crédits de fonctionnement !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale - L’année dernière, nous en avons ouvert 8 500, cette année 10 000. Bref, la politique de la crèche, c’est nous qui la conduisons avec succès et persévérance ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Par ailleurs, je veux rappeler que le déficit de la branche famille n’est en rien structurel.

M. Didier Migaud - Quel acteur !

M. le Ministre délégué à la sécurité sociale Les recettes, étant proportionnelles à l’évolution des salaires, progressent plus vite que les dépenses qui sont, elles, indexées sur les prix. Nous reviendrons donc mathématiquement à l’équilibre…

M. Didier Migaud - Il faut oser !

M. le Ministre délégué à la sécurité sociale …en même temps que pour la branche maladie, grâce à cette réforme essentielle pour la préservation d’un haut niveau de protection sociale.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale Quoi qu’il en soit, Monsieur Brard, ce pays des merveilles, ce n’est pas vous qui le construisez ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean-Pierre Brard –Vous c’est Pinocchio !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale Les progrès enregistrés, grâce à la politique sociale de ce Gouvernement et de cette majorité, sont bien réels.

Pour terminer, je souhaiterais aborder rapidement la question du renforcement de la performance de gestion des organismes de sécurité sociale. Celle-ci est le service public le plus apprécié des Français : 85 % des usagers en sont satisfaits. Avec les conventions d'objectifs et de gestion, le service public de la sécurité sociale s’est engagé dans une démarche d’amélioration de la qualité de service qui se conjugue avec des coûts de gestion modérés, 4,13 % du budget total. Ceux-ci sont deux à trois fois inférieurs à ceux des assurances privées. Ils sont également inférieurs à ceux des autres services publics puisque les cotisations sociales ont un coût de recouvrement inférieur à celui de l'impôt.

Cette dynamique, à laquelle le Gouvernement est très attaché, doit être confortée. C'est la raison pour laquelle les conventions d'objectifs et de gestion signées avec les caisses nationales du régime général à partir de 2005 comportent toutes des objectifs de renforcement de l'efficience des branches. Pour gagner en productivité, nous avons notamment tiré parti du potentiel offert par la croissance des départs à la retraite. Dans la branche vieillesse, ces efforts se traduisent par une quasi-stabilité des effectifs malgré l’augmentation de la charge de travail liée à la réforme des retraites. Dans les autres branches, des efforts de productivité correspondant au non-remplacement de 30 à 50 % des départs à la retraite ont été demandés. Quant à l'assurance maladie, la négociation de la nouvelle convention devra assigner à la branche des objectifs de productivité s'inscrivant dans la continuité de ceux déjà entrepris depuis 2004. Depuis deux ans, ces efforts ont permis de stabiliser les dépenses de gestion des organismes du régime général à dix milliards par an. Ainsi, les organismes de sécurité sociale contribuent au redressement de l’efficacité de l’ensemble de nos services publics.

Pour conclure, le Gouvernement est déterminé à poursuivre cet effort qui se traduira dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances – Je suis heureux que ce débat nous permette d’envisager les finances publiques dans leur ensemble, notamment sous l’angle des relations entre le budget de l’État, 300 milliards, et celui de la sécurité sociale, 450 milliards. Il faut garder à l’esprit que la dépense publique, le budget des collectivités locales compris, représente chaque année 53 % de la richesse produite en France.

S’agissant du budget de l’État, j’approuve sans réserve les orientations excellentes que nous propose le Gouvernement car elles sont tendues vers un seul objectif : la réduction du déficit et du désendettement. En 2002, nous n’avons pas suffisamment mis en évidence la dégradation extrême des comptes dont nous avons hérité.

M. le Ministre de l'économie Juste !

M. le Rapporteur général – Plusieurs années ont été nécessaires pour revenir à l’équilibre. En 2002, il a fallu réajuster le budget de 2,5 milliards d’euros en loi de finances rectificatives !

M. le Ministre de l'économie Oh !

M. le Rapporteur général – L’aide médicale d’État, financée à 40 millions, en coûtait en réalité 400. La prime de Noël avait été versée trois fois, sans avoir été budgétée.

M. le Ministre délégué au budget - Lamentable !

M. le Rapporteur général – Ce Gouvernement a fait preuve d’une détermination totale dans la maîtrise de la dépense avec pour objectif de dépenser mieux en dépensant moins.

M. le Ministre délégué au budget - Très bien !

M. le Rapporteur général – Je veux d’ailleurs rappeler que la politique d’audits, que M. Copé vient d’évoquer, a été initiée par l’Assemblée sous la précédente législature par la mission d’évaluation et de contrôle, et a été appliquée, en premier lieu, sur la redevance télévisuelle et de la politique immobilière de l’État.

M. Michel Bouvard - Très bien !

M. le Rapporteur général – Pour dépenser mieux en dépensant moins, il faut donc conjuguer les efforts de l’exécutif et du Parlement.

M. Michel Bouvard – Bravo !

M. le Rapporteur général – Cette politique de maîtrise de la dépense est exemplaire car les priorités sont respectées. En 2007, l’effort sera poursuivi sur la défense dans le respect de la loi de programmation militaire…

M. Augustin Bonrepaux - Tout cela n’est pas bien contrôlé !

M. le Rapporteur général - …et les OPEX dans leur ensemble seront quasiment financés. Par ailleurs, la justice et la sécurité sont honorées.

En matière d’investissement, de gros efforts ont été également fournis. Ils sont portés par des intermédiaires, dont l’Agence de financement des infrastructures de transport, l’agence de l’innovation industrielle et l’agence nationale de la recherche.

M. Augustin Bonrepaux - Somme toute, ce n’est pas brillant !

M. le Rapporteur général – Ces opérateurs doivent également être soumis à la démarche d’évaluation et de contrôle mise en place par la LOLF.

M. Michel Bouvard - Très bien !

M. le Rapporteur général – La nuit dernière, nous en avons débattu autour d’un amendement que le Gouvernement a accepté.

S’agissant des effectifs de la fonction publique, il ne s’agit pas de les diminuer pour le plaisir mais de les gérer au mieux dans le souci de l’intérêt général. D’ailleurs, le plafond d’emploi général est abaissé de 15 000 mais l’on créée 4 000 postes dans le même temps dans la justice, la sécurité et l’enseignement supérieur et la recherche. Dans certains secteurs, les diminutions sont parfaitement justifiées. Dans d’autres, les créations sont bienvenues. Ainsi, l’enseignement supérieur bénéficie de 1 500 postes supplémentaires, et le primaire de quelques centaines de postes mais le secondaire en perd quelques milliers en raison de la baisse des effectifs des élèves. Cette question doit être abordée de façon pragmatique.

Côté ressources, les orientations budgétaires pour 2007 en matière de recettes fiscales doivent s’appuyer sur l’excellente réforme adoptée en loi de finances pour 2006. Celle-ci comporte un premier volet, la réforme de l’impôt sur le revenu qui permet une meilleure justice fiscale… (Protestations sur les bancs du groupe socialiste)

M. Augustin Bonrepaux - C’est faux ! N’importe quoi !

M. le Rapporteur général – Sur 4 milliards d’euros, 3 ont été consacrés à une diminution d’impôts pour les ménages à revenus faibles ou modestes (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste)

M. Augustin Bonrepaux - Non !

M. le Rapporteur général - …à travers l’augmentation de la prime pour l’emploi et la baisse de l’impôt sur le revenu.

M. le Ministre de l'économie Ce sont les faits !

M. le Rapporteur général – Avec un peu d’objectivité, cette évidence s’impose à tous ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Gérard Bapt - Même M. Méhaignerie dément cette affirmation !

M. le Rapporteur général – Monsieur Bonrepaux, je vous rappelle qu’entre 2000 et 2002, M. Fabius a baissé les impôts davantage que nous ne l’avons fait.

M. Gérard Bapt - Il fallait en rester à la baisse Fabius !

M. le Rapporteur général – Deuxième volet de cette réforme fiscale, la taxe professionnelle, dans un souci d’attractivité et de compétitivité…

M. Didier Migaud - Incroyable ! Depuis ce matin, c’est toujours le même M. Coué qui s’exprime à la tribune !

Ensuite, la baisse du déficit et le désendettement, objectif auquel nous devrons consacrer l’essentiel des marges de manœuvres. Dans le budget 2007, si nous devons procéder à de nouveaux ajustements fiscaux, il faudra donc le faire par redéploiement. En la matière, nos résultats sont incontestables : en 2005, nous aurons été le seul des principaux pays d’Europe dont le déficit a été inférieur à 3 %.

M. Augustin Bonrepaux - Vous vous moquez du monde !

M. le Rapporteur général – En 2006, l’exécution du budget de l’État se déroulera dans d’excellentes conditions. Le déficit devrait être inférieur à celui de 2005, lui-même inférieur à celui de 2004, lui-même inférieur à celui de l’année précédente. Nous sommes sur la voie du redressement, après avoir hérité en 2002 d’une situation très dégradée.

M. Augustin Bonrepaux - Avez-vous lu votre propre rapport ? Ce n’est pas ce qui y est écrit !

M. le Rapporteur général – Nous devons rapidement atteindre le déficit stabilisant, qui nous permettra de diminuer la dette. Monsieur le ministre, je pense que l’engagement que vous avez pris – deux points de PIB de moins sur la dette en 2006 – pourra être honoré.

M. le ministre de l'économie Absolument !

M. le Rapporteur général – Vous en avez été incapable, Monsieur Migaud !

M. Didier Migaud - Nous l’avons fait, vous le savez !

M. le Rapporteur général – Si vous n’aviez pas gaspillé la cagnotte, vous y seriez parvenus (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) !

S’agissant des collectivités locales, je vous remercie, Messieurs les ministres, d’avoir pris la décision de ne pas modifier le contrat de solidarité et de croissance en 2007, qui leur assure sécurité et visibilité.

M. Gérard Bapt - Il ne manquerait plus que ça !

M. Didier Migaud - La purge viendra plus tard !

M. le Rapporteur général – Les collectivités locales représentent à elles un cinquième du budget de l’État. Nous préférons de loin que vous jouiez sur l’ensemble des exonérations et des dégrèvements, ainsi que sur la réforme de la fiscalité locale, en tenant compte d’un certain nombre de problèmes. Les départements, en effet, se trouvent en difficulté, entre les dépenses sociales transférées et l’évolution de la TIPP…

M. Augustin Bonrepaux - Il serait temps que vous vous en rendiez compte !

M. le Rapporteur général – S’agissant des relations entre l’État et la sécurité sociale, il faut clarifier les choses. Monsieur le ministre délégué, vous avez affirmé le principe de la compensation à l’euro près. Il est vrai qu’en 2006, on a transféré les exonérations de charges patronales sur le budget de la sécurité sociale, tout en transférant les recettes équivalentes. Cela doit être stabilisé afin que la sécurité sociale ne soit pas contrainte de demander à l’État des transferts de recettes supplémentaires, que le budget ne pourrait supporter.

Il est vrai que le budget de l’État a aujourd’hui 4 ou 5 milliards de dettes vis-à-vis des comptes sociaux.

M. Charles de Courson - 4,4 milliards !

M. le Rapporteur général – Mais les choses ne sont pas à sens unique. Le budget a aussi une créance de 1,2 milliards sur les comptes de l’UNEDIC. Nous devrions tirer parti de l’année 2006 pour clarifier tout cela.

En conclusion, je voudrais dire à quel point cet exercice de consolidation est important et combien j’ai été sensible à la responsabilité et à la pertinence des intervenants, lors de la réunion du Conseil d'orientation des finances publiques. Grâce à l’action du Gouvernement et de la majorité, chacun prend conscience de cette ardente obligation de redressement de nos comptes. Un travail tel que celui que nous menons ce matin va dans le sens de l’intérêt général (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général de la loi de financement de la sécurité sociale, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et socialesBien que l'organisation d’un débat sur les orientations des finances sociales soit facultative, je me réjouis de son organisation. En effet, l'article 6 de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale a introduit une innovation essentielle, puisque le Gouvernement doit désormais présenter au cours du dernier trimestre de la session ordinaire un rapport sur les orientations des finances sociales, afin d'informer le Parlement sur la situation des finances sociales, l'examen de la situation financière de l'UNEDIC et des régimes complémentaires en étant exclu.

Ce débat offre la possibilité d'anticiper les discussions de l'automne et, le cas échéant, de présenter les mesures prises par le gouvernement et les caisses pour que soient respectés les engagements pris dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale de l'année en cours.

Finances publiques et finances sociales méritent une approche simultanée. Beaucoup de raisons militent en ce sens : l'impact des grandes variables macro-économiques, les engagements internationaux de la France portant sur le champ des finances de l'État et celui des finances publiques, la complexité des transferts financiers existant entre les deux sphères, la nécessité de limiter les transferts de charge intergénérationnels. Le Parlement a d'ailleurs montré la voie en prenant l’initiative de transformer le Conseil des impôts en Conseil des prélèvements obligatoires. Avec le recul, il était étrange de discuter des finances publiques, sans évoquer des masses financières supérieures à celles brassées par le budget de l'État !

Puisqu’il s’agit du premier débat d’orientation commun, il nous faut prendre en compte les spécificités des finances sociales. La majeure partie des dépenses des régimes obligatoires de base est versée conformément à des prescriptions légales. Or, il est difficile de prévoir les événements individuels, tels que la naissance ou la maladie. D'ailleurs, la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale évoque des « objectifs » de dépenses. La loi de finances, elle, si elle comporte des dépenses incompressibles, comprend aussi des mesures pouvant faire l'objet de régulation, voire de gel, au gré d’une inventivité régulièrement saluée par les rapports de la Cour des comptes (Sourires). Elle comporte aussi beaucoup plus de dépenses d'investissement. En outre, les dépenses des régimes de base de la sécurité sociale sont gérées par les partenaires sociaux, ce qui constitue une différence politique fondamentale. Enfin – faut-il le regretter ? – les administrations de sécurité sociale ne peuvent vendre des actifs pour se désendetter, pas plus qu’elles ne peuvent transformer des dépenses en prélèvements sur recettes...

La situation des finances sociales est bien différente de celles des finances de l'État. Comme le rappellent le rapport du Gouvernement et le rapport Pébereau, 80 % de la dette publique sont le fait de l'État, tandis que 8 % relèvent des administrations de la sécurité sociale.

M. le ministre de l'économie C’est vrai !

M. le Rapporteur général - Le besoin de financement de l'État, d'un montant d'environ 43 milliards, se situe à environ 2,5 % du PIB, celui des administrations sociales environ à 0,2 %.

Joindre les deux débats peut néanmoins permettre une réflexion fructueuse sur les allégements de charges sociales. Le principe qui devrait tous nous guider est qu'il est hors de question de financer à crédit la politique de l'emploi par le déficit de la sécurité sociale. A ce titre, la loi de finances pour 2006 prévoit que le manque à gagner dû aux allégements généraux sur les bas salaires est compensé par le transfert d'un panier de taxes aux régimes obligatoires de la sécurité sociale. Cependant, Monsieur le rapporteur général, la compensation à l’euro près n’est pas complètement garantie ! A ce stade, je souhaite relayer les remarques de la Cour des comptes sur le niveau élevé des dépenses que représentent ces allégements de charge. Entendez donc nos arguments !

Enfin, je veux saluer la mise en place d’une Conférence annuelle et d’un Conseil d’orientation des finances publiques, qui feront œuvre de pédagogie auprès de nos concitoyens. A cette fin, Messieurs les ministres, il serait opportun de rendre accessible sur internet le procès-verbal des réunions.

La dynamique des déficits sociaux, enrayée en 2006, ne reprendra pas en 2007. Le déficit du régime général sera un peu plus élevé que prévu, mais, n’en déplaise aux Cassandre, les motifs de satisfaction sont nombreux : pour la première fois depuis huit ans, l'ONDAM a été respecté en 2005

M. Jean-Marie Le Guen - Il ne le sera pas en 2006 !

M. le rapporteur - Il sera « dans les clous » en 2006, l'alerte n'ayant pas été déclenchée ! S'agissant de la branche maladie, le dispositif du médecin traitant est un succès, les indemnités journalières continuent à diminuer et le générique fait enfin une percée.

S’agissant des retraites, le dispositif « carrières longues » fait un tabac : c'est une disposition essentielle, et juste, de la loi de 2003, même si le Parti socialiste, et notamment M. Strauss-Kahn souhaitent revenir là-dessus. S’agissant de la famille, la PAJE, réformée sous cette législature, aide un nombre croissant de familles.

Du point de vue des recettes, la commission des comptes de la sécurité sociale constate que la croissance de la masse salariale se place enfin sur sa tendance de long terme – 4 % - après lui avoir été significativement inférieure. Enfin, la situation du FSV va s'améliorer mécaniquement avec la décrue du chômage.

Concernant l'assurance maladie, le calendrier de son redressement financier est tenu, malgré une croissance de la masse salariale inférieure aux prévisions : le déficit de l'assurance maladie ne devrait pas dépasser 4 milliards en 2007. Certes, il est préoccupant de constater le déficit des quatre branches en 2006, à quoi il faut ajouter ceux du FSV et du FFIPSA. Cette situation appelle des mesures de redressement, alors que le prélèvement sur les anciens PEL, qui a rapporté 2 milliards en 2006, n’est pas reconductible. Néanmoins, l'objectif annoncé d’un déficit de 4 milliards paraît tenable.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 devrait être l'occasion d’élargir l'assiette de la cotisation employeur, sur laquelle les ministres pourront peut-être nous donner des précisions. De même, le rapport du Gouvernement indique, sans autres précisions, qu'un « point d'information régulier sur les finances sociales sera prochainement mis en place ». Il serait intéressant de connaître les modalités précises de ce nouveau rendez-vous.

Enfin, la programmation pluriannuelle est soumise au respect de l’équité entre les générations. Ce sont nos enfants et nos petits-enfants qui auront la charge de la dette publique. Or, la politique doit servir la jeunesse. L’engagement solennel de désendettement pris par le Premier ministre devrait donc tous nous rassembler.

À ce titre, la limitation de la dette sociale est indispensable. Face au vieillissement de la population, le Gouvernement prévoit de limiter l’augmentation des dépenses des régimes obligatoires à l’inflation plus 1 %. C’est un objectif ambitieux et volontariste, qui dépendra de la maîtrise des dépenses de l’assurance maladie liées à la médecine de ville, au médicament et à l’hôpital, de la réduction du chômage et de l’exercice par le Parlement des nouveaux pouvoirs dont il dispose. On pourrait notamment étendre les compétences du comité d’alerte, limitées à l’assurance maladie, aux branches famille et vieillesse.

Enfin, la commission des affaires sociales souhaite la réunion d’un groupe de travail ad hoc consacré au financement de la sécurité sociale : j’espère, Monsieur le ministre délégué à la Sécurité sociale, que vous la satisferez, comme promis (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances - Les orientations budgétaires que nous discutons aujourd’hui sont aussi solides que sérieuses.

M. le Rapporteur général – Très bien !

M. Didier Migaud - Encore M. Coué !

M. le Président de la commission des finances – Dans le cadre de la stratégie de Lisbonne, elles se fondent sur trois idées. Tout d’abord, comme chez nos partenaires européens, la diminution en volume des dépenses publiques est essentielle au retour de l’emploi et de la croissance.

M. le ministre de l’économie – Absolument !

M. le Président de la commission des finances – Ensuite, nos politiques publiques ne souffrent pas d’une insuffisance budgétaire, mais de la confusion des objectifs, de l’empilement des structures et de la complexité des procédures. Enfin, les orientations budgétaires doivent obéir aux trois règles d’or chères au rapporteur général : « zéro en volume » pour la dépense publique ; pas d’emprunt pour les dépenses de fonctionnement ; 1% de croissance en volume des dépenses sociales. En respectant ces règles, on rétablira la confiance.

Je soutiens le choix du Gouvernement de supprimer 15 000 emplois publics (Quelques applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur les bancs des commissions). C’est un choix sage et responsable. La France a créé un million d’emplois publics en vingt-cinq ans.

M. Michel Bouvard - Eh oui !

M. le Président de la commission des finances –De leur côté, les collectivités locales vont en créer vingt à vingt-cinq mille. L’emploi public continue donc de croître. En outre, la simplification de l’architecture administrative devrait dégager des milliers d’emplois et faciliter la vie de nos concitoyens.

L’évolution des finances locales suscite des inquiétudes. La croissance de 3,8 % en volume est trop élevée. Le Gouvernement doit mener un important effort de pédagogie en expliquant que l’augmentation des impôts locaux n’est pas de son ressort, mais de celui des autorités locales. La dépense locale continuera d’augmenter rapidement si nous n’en modifions pas la structure.

M. le ministre délégué à la Sécurité sociale – C’est vrai !

M. le Président de la commission des finances – Sur 79 milliards de dotation globale, 25 milliards le sont au titre de la taxe professionnelle et seulement onze au titre de la taxe d’habitation – que certains voudraient pourtant supprimer ! Quel lien de responsabilité resterait-il alors entre les citoyens et les collectivités locales ?

M. le Rapporteur général – Aucun !

M. le Président de la commission des finances – En effet.

D’autre part, il faut revoir l’empilement actuel des structures. À ce titre, la multiplication des projets de loi, Messieurs les ministres, nuit à la simplification qui s’impose.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales - Excellente remarque !

M. le Président de la commission des finances – Les politiques publiques se répartissent entre sept niveaux administratifs différents : une telle illisibilité est intolérable, et je souhaite que nous en débattions au cours des mois qui viennent.

Enfin, l’évaluation de ces politiques est indispensable. Certes, le récent débat sur les lois de règlement n’a suscité l’enthousiasme ni du Gouvernement, ni du Parlement…

M. Michel Bouvard - Ni celui de certaines commissions…

M. le Président de la commission des finances – Je souhaiterais que le Gouvernement puisse partager les résultats des audits d’évaluation, et que certains membres des corps d’inspection soient mis à la disposition du Parlement, qui a fait la preuve de son efficacité sur l’immobilier ou la redevance télévisuelle. De tels exemples doivent se multiplier, comme c’est le cas ailleurs en Europe.

Aujourd’hui, deux politiques s’opposent : celle du Gouvernement, que je soutiens, et celle que prônent d’autres sensibilités politiques en faveur de plus d’État, plus de dépense publique et plus de règlements.

M. Jean-Claude Sandrier - C’est un peu caricatural !

M. le Président de la commission des finances – C’est en tout cas l’inverse de ce que font nos partenaires ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président de la commission des affaires sociales –Notre débat d’aujourd’hui représente un remarquable progrès pour le contrôle parlementaire. Que de chemin parcouru en dix ans depuis qu’Alain Juppé institue la loi de financement de la sécurité sociale, jusqu’à la loi organique de 2005 ! C’est dans ces conditions favorables que nous préparons le projet de loi de financement de la Sécurité sociale.

M. Fagniez a rappelé la part relative des finances sociales dans la dette publique. Je souhaiterais pour ma part souligner combien les instruments de contrôle à la disposition du Parlement sont nombreux. Grâce à la loi organique relative à la loi de financement de la Sécurité sociale, le Parlement vote désormais l’ONDAM et ses sous-objectifs. En outre, le périmètre de la loi de financement de la Sécurité sociale comprend la dette sociale. Le Parlement peut donc se prononcer sur un objectif annuel d’amortissement. Les programmes de qualité et d’efficience permettront aux parlementaires de mettre en regard les objectifs, les moyens et les résultats.

Le gouvernement doit communiquer régulièrement au Parlement l’état des dettes et des créances réciproques de l'État et des régimes obligatoires de sécurité sociale. Conformément à l'article 17 de la loi organique, avant la fin des mois de janvier et de juillet de chaque année, le gouvernement transmet au Parlement un état semestriel des sommes restant dues par l'Etat aux régimes obligatoires de base. Ce document montre que l'État, au 31 décembre 2005, reste débiteur de 5,14 milliards vis-à-vis des régimes obligatoires de la sécurité sociale. Je ne doute pas que la question de la compensation sera abordée aujourd’hui. J'ajoute que la loi de financement de la sécurité sociale doit désormais approuver le montant des compensations et que seule une loi de financement peut déroger au principe de compensation.

Enfin, de nouveaux outils de contrôle parlementaire sont désormais utilisés. Je me réjouis que la loi relative à l'assurance maladie du 13 août 2004 ait conduit à l’installation d'une Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale, laquelle a été constituée au sein de notre commission des affaires sociales au début de l'année 2005, La MECSS a déjà rendu deux rapports remarqués : celui de M. Door consacré à la gestion des branches de la sécurité sociale et celui de Mme Guinchard, relatif au financement des établissements hébergeant des personnes âgées. Début juillet, elle rendra un rapport attendu sur l'application de la tarification à l'activité. Le succès de la formule est attesté par le fait que la commission des affaires sociales du Sénat vient de créer sa propre MECSS.

Je suis également très fier de la création, dans la loi de financement pour 2003, de l'Office parlementaire d'évaluation des politiques de santé, lequel effectue un travail remarquable selon une approche médico- économique, particulièrement rare en France. Son premier rapport, relatif au dépistage du cancer du sein et présenté par notre collègue Marc Bernier, avançait des propositions concrètes et originales, qui ont récemment connu un nouvel écho.

M. Gérard Bapt - Parlez-nous plutôt de l’INCa !

M. le Président de la commission des affaires sociales – Et je ne parle pas du prochain rapport sur les psychotropes, confié à Mme Briot. II importe désormais de veiller à la manière dont les préconisations de la MECSS et de l'OPEPS sont suivies. S'agissant du rapport de M. Door relatif à la gestion des caisses de la sécurité sociale, la conclusion prochaine de la convention d'objectifs et de gestion avec la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés constituera un premier test, notamment pour ce qui concerne le taux de remplacement des départs à la retraite. Il ne s'agit pas de passer les effectifs au rabot, mais de poursuivre la modernisation d'une institution qui a déjà beaucoup avancé dans le service au public - je pense aux plateformes téléphoniques - et qui doit aller encore plus loin, en usant des possibilités offertes par internet.

Je précise enfin, cher collègue Méhaignerie, que la commission des affaires et sociales est la seule commission permanente de l'Assemblée à appliquer de manière systématique l'article 86 du Règlement, alinéa 8, relatif au contrôle de la mise en application des lois. A ce titre, elle contrôlera mardi juin prochain la mise en application de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale – Je m’y prépare !

M. le Président de la commission des affaires sociales - Contrairement à ce qui est souvent dit, le Parlement n'est en aucun cas dépourvu de moyens de contrôle. Aux parlementaires de s’en saisir, même si cela requiert de leur part l'assiduité aux réunions et un engagement personnel approfondi : je sais qu'ils seront nombreux à répondre à ces défis.

S'agissant de l'assurance maladie, je souhaite faire le point sur la réforme appliquée depuis 2004.

Bien sûr, il y a les chiffres, et pourquoi ne pas les évoquer ? Mais il faut être conscient que la réforme n’avait pas vocation à produire tous ses effets dans les six mois. Certaines évolutions, comme le dossier médical personnel ou le médecin traitant ne porteront leurs fruits que dans les années à venir…

M. Jean-Marie Le Guen - Pourquoi pas au siècle prochain ?

M. le Président de la commission des affaires sociales – Et il en va de même de la tarification à l’activité. La réforme de la gouvernance hospitalière doit s’accélérer…

M. Jacques Domergue - Oui, il y a urgence !

M. le Président de la commission des affaires sociales – L’effort déployé dans le cadre du plan Hôpital 2007 – 10,5 milliards d’investissements – sera reconduit pour 2012. Je suis surpris des réactions de la Fédération hospitalière de France, qui devrait être la première à stimuler ses membres pour accélérer la modernisation alors que, curieusement, elle donne l’impression de tirer sur le frein à main… (Murmures sur les bancs du groupe socialiste)

M. Jean-Marie Le Guen – C’est obsessionnel !

M. le Président de la commission des affaires sociales – L’application de la réforme de l’assurance maladie exige de la conviction, de la ténacité et de la continuité dans l'effort, toutes qualités dont dispose le tandem ministériel en charge de la sécurité sociale. Au reste, les résultats financiers sont « en ligne » avec les éléments de cadrage du redressement financier de l'assurance maladie. Bien sûr, l'assurance maladie reste en déficit. Mais la dynamique de croissance des déficits est enrayée, grâce à la responsabilisation de tous les acteurs.

Permettez-moi de m'éloigner un peu des chiffres pour faire ressortir quelques points essentiels.

Réformer l'assurance maladie, c'est d'abord promouvoir la qualité des soins. A ce titre, la création de la Haute autorité de santé, la labellisation des équipes, le parcours de soins et la rénovation du dispositif de formation des professionnels permettent d'orienter notre système sur le sentier de la qualité.

Réformer l’assurance maladie, c’est aussi garantir l'égalité d'accès aux soins. L'aide à la souscription d'une assurance complémentaire a été sensiblement augmentée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 ; elle le sera encore, conformément au souhait du Président de la République.

Réformer l'assurance maladie, c'est encore orienter le système de soins vers la prévention et prendre en charge des traitements très coûteux. On peut citer le remboursement de l'examen de prévention bucco-dentaire chez les enfants. Les économies réalisées sur certains postes permettent de financer des traitements particulièrement coûteux, comme l'ostéodensitométrie ou les médicaments contre certains cancers.

Enfin, réformer l’assurance maladie, c’est sauvegarder un pilier de notre République, en vue de permettre à la solidarité entre les générations, entre malades et bien-portants, pauvres et nantis de continuer à s'exercer et que la solidité de notre contrat social ne soit entamée.

C'est pourquoi je souhaite que le débat sur les orientations des finances sociales qui nous réunit aujourd'hui n'occulte pas les grands principes qui doivent guider l'action du Gouvernement et de la majorité parlementaire (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

DISCUSSION GENERALE

M. Jean-Marie Le Guen - Curieuse conception du débat que celle qui consiste à ne laisser s’exprimer le premier orateur de l’opposition qu’au bout de deux heures et demie !

M. Gérard Bapt - Enfin un bol d’air !

M. Jean-Marie Le Guen - Quoi qu’il en soit, s’agissant des finances sociales, les orateurs du Gouvernement et de la majorité, plutôt que de se soucier du bucco-dentaire, devraient se pencher sur l’ophtalmologie, car, manifestement, ils n’arrivent pas à lire les chiffres. Depuis quatre ans, la longue litanie des déficits et des dettes cumulées ne cesse de s’allonger…

M. le Ministre délégué à la sécurité sociale – Et vous vous y connaissez !

M. Jean-Marie Le Guen - Nous en sommes à la cinquième année de déficit, alors qu’auparavant, lorsque nous étions aux commandes, les comptes sociaux étaient équilibrés. Pis, pour la troisième année consécutive depuis 2002, le déficit de la sécurité sociale excède 10 milliards. Alors, votre autosatisfaction et vos leçons d’orthodoxie budgétaire… Le décalage entre vos discours et vos actes prêterait à rire si l’on oubliait que ces déficits devront être payés un jour, après 2007…

M. Jean-Marc Roubaud - Comme l’APA !

M. Jean-Marie Le Guen – Hélas, ils ne disparaîtront pas avec votre majorité ! Du reste, vous avez déjà transféré 35 milliards en dette sociale dans le cadre de la réforme de 2004. Or, si j’en crois le sénateur UMP Alain Vasselle, il faudra encore mettre au pot 19 milliards pour tenir jusqu’en 2009. Le bilan de votre action avoisinera par conséquent les 60 milliards de déficit…

Nous en sommes là parce que, depuis cinq ans, vous avez été mauvais en matière de croissance économique et toujours en deçà de ce qui s’est fait dans la zone euro…

M. le Ministre délégué au budget – C’est faux !

M. Jean-Marie Le Guen - Et puis, vous avez fait preuve d’une véritable incurie dans la gestion des finances sociales. Non seulement, vous y avez été larga manu en matière de dépenses, mais vous avez également été peu précautionneux…

M. le Ministre délégué à la sécurité sociale – Qui a réformé les retraites ?

M. Jean-Marie Le Guen - …et vos réformes ont été autant de fiascos.

M. le Ministre délégué au budget – C’est la méthode Coué !

M. le Président de la commission des affaires sociales – Ou plutôt l’anti-Coué !

M. Jean-Marie Le Guen - Je ne crois pas qu’il soit de bonne méthode d’assimiler la dette publique et la dette sociale, car elles ne recouvrent ni les mêmes recettes, ni les mêmes dépenses…

M. le Ministre délégué à la sécurité sociale – C’est vrai.

M. Jean-Marie Le Guen - Pour être clair, je ne pense pas qu’il soit possible de maintenir les régimes sociaux dans une situation de dette permanente comme vous le faites depuis cinq ans.

Vous vous êtes livrés à une véritable maltraitance des finances sociales. D’abord, la Cour des comptes ne cesse de vous alerter sur la dette permanente de l’État à l’égard de la sécurité sociale. Il y a quelques jours, les impayés de l’État à la Sécu représentaient quelque 6 milliards d’euros ! Et, toujours selon le sénateur Vasselle, le non-paiement des dettes de l’État génère près de 360 millions de coûts financiers pour l’ACOSS. A cela s’ajoute le déficit du FFIPSA, qui dépassera 1,3 milliard pour la seule année 2006, et celui du Fonds de solidarité vieillesse. Vous n’avez pas dit un mot sur la manière dont vous financerez ces dépenses, pourtant impératives !

D’une manière plus générale, les recettes de la Sécurité sociale ont été fortement malmenées depuis cinq ans. Il est vrai que la situation s’est un peu améliorée concernant les droits sur l’alcool et le tabac, mais ces recettes ont beaucoup fait défaut les premières années de votre mandature – même si cela n’explique que pour partie le déficit et la dette.

J’en viens à vos réformes. Celle que vous mettez le plus volontiers en avant est celle des retraites. Jusqu’à il y a peu, vous vous targuiez qu’elle garantisse la pérennité de notre système. Mais comme au vu des chiffres, des doutes commencent à se faire jour, vous vantez maintenant la générosité de cette réforme – ce qui est d’ailleurs vrai pour les travailleurs ayant cotisé plus de quarante ans –, mais n’osez plus dire qu’elle assure un financement durable des retraites. En effet, quelle que soit demain la majorité au pouvoir, elle devra s’attaquer de nouveau au problème des retraites. Vous n’avez pas sérieusement progressé en la matière.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale – Ce qu’il faut entendre !

M. Jean-Marie Le Guen - Vous flattant désormais non plus de votre rigueur mais de votre générosité, vous avez bel et bien abandonné les objectifs que vous vous étiez fixés !

Je n’avais pas l’intention de parler de la branche famille, mais les propos de M. Bas m’y incitent. Monsieur le ministre, ce n’est pas parce qu’on fait de la politique qu’on doit être trivial, voire vulgaire. Ce n’est pas vous qui distribuez les allocations familiales aux Français. Ceux-ci paient des cotisations et vous vous limitez à assurer la répartition, équitable ou non, de leur produit. Nous ne sommes plus sous l’Empire romain où les représentants de l’empereur distribuaient des prébendes ! Ce n’est pas là une façon de traiter nos concitoyens. L’électoralisme a ses limites et lorsqu’il est manié sans expérience, il est vraiment trop visible.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale - Il est vrai qu’en la matière, vous en avez, vous, de l’expérience !

M. Jean-Marie Le Guen – S’agissant de l’assurance maladie, chacun sait que la relative réduction du déficit est très largement due à l’augmentation des recettes –CSG, CRDS, moindres remboursements, et recettes de poche avec, par exemple, le siphonnage des plans d’épargne logement…

M. le ministre délégué au budget – Mesure adoptée avec le soutien des sénateurs socialistes !

M. Jean-Marie Le Guen – Le soutien des sénateurs socialistes ne suffit pas à justifier une politique ! (Sourires)

M. le ministre délégué au budget – Je ne manquerai pas de le leur répéter.

M. Jean-Marie Le Guen - Vous vous flattez également que l’ONDAM ait été respecté en 2005. Mais chacun sait déjà qu’il ne le sera pas en 2006. Le comité d’alerte signale, pour la seule médecine de ville, un dérapage de 600 millions d’euros, excusez du peu. Et des financements complémentaires seront nécessaires pour l’hôpital, public et privé.

Je voudrais dire enfin combien ce débat d’orientation des finances sociales est surréaliste alors que pas un seul ministre, pas un seul rapporteur, pas un seul président de commission n’a évoqué la demande formulée par le directeur de l’UNCAM de trois milliards d’euros de recettes en plus ou de dépenses en moins. Je suis le premier orateur à aborder la question ! Cela montre bien votre gêne. Que répondez-vous à ce directeur de l’UNCAM, dont nul ne peut soupçonner qu’il soit le porte-parole de l’opposition ? Nos concitoyens, comme les acteurs du système de santé, sont en droit de le savoir, d’autant que les propositions de M. Van Roeckeghem sont très en deçà de ce qui serait nécessaire, non pas même pour équilibrer les comptes de l’assurance maladie en 2007, mais pour espérer y parvenir en 2009. Pour « rester dans les clous », – et j’entends par là ne pas aggraver le déficit des finances sociales –, il faudrait au moins quatre milliards supplémentaires.

Tant que n’aura pas été abordée avec courage et réalisme la question de l’équilibre de nos finances sociales, la santé de nos concitoyens restera en péril (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Hervé Mariton – On nous présente aujourd’hui de très bonnes orientations pour le budget de la France et pour nos finances sociales. Il y est en effet question de qualité des services publics et de confiance en l’avenir.

L’exigence de qualité des services publics peut se nourrir des nombreux audits qui ont été lancés. La méthode n’a rien d’original. Ce qui l’est beaucoup plus, c’est le rythme auquel ces audits ont été menés, et la façon dont ont été pris en compte leurs résultats. Il était important d’en finir avec la culture des moyens. Nos concitoyens exigent, légitimement, des services publics de qualité. Il est de notre responsabilité de leur expliquer et de les convaincre que ce n’est pas uniquement, ni même essentiellement, affaire de moyens.

Il est également de notre responsabilité de leur redonner confiance. Or, il ne saurait y avoir de confiance en l’avenir sans désendettement. Confiance et désendettement sont les conditions de la croissance.

M. Gérard Bapt - C’est mal parti !

M. Hervé Mariton - Le Gouvernement nous propose un objectif ambitieux pour 2006, avec un désendettement équivalent à deux points de PIB. La méthode et les indicateurs sont intéressants. Le rapporteur général a fort bien développé sans son rapport la notion de « déficit stabilisant ». Trente-six milliards en 2007…

M. le Rapporteur général – Il y a beaucoup d’hypothèses.

M. Hervé Mariton – Le Gouvernement les affinera d’ici à l’automne.

M. le ministre délégué au budget – Sans langue de bois !

M. Hervé Mariton - Cette notion élégante de « déficit stabilisant », pour encourageante qu’elle soit, pourrait prêter à sourire.

M. le ministre délégué au budget – Je reconnais que la formule est un peu technocratique.

M. Hervé Mariton – L’important, c’est d’être conscient des limites du concept. Pour atteindre cet objectif essentiel de réduction de l’endettement, il est important d’apprécier les étapes à franchir et les engagements pris pour 2007 et au-delà. Pour montrer le chemin, nous devons disposer d’instruments de mesure incontestés. Le concept de « déficit stabilisant » peut en être un. La confiance que vous avez créée au fil des quatre dernières années, et que vont renforcer ces orientations budgétaires, sera encore plus forte lorsqu’elle pourra s’établir sur des données chiffrées et des concepts partagés de tous. Justifions nos choix à partir d’indicateurs incontestables, en associant tous les partenaires, notamment les collectivités. Les perspectives tracées avec la stabilisation des dépenses des collectivités et la limitation à 1% au-dessus de l’inflation de la progression des dépenses sociales sont raisonnables. Donnons-nous les moyens de les traduire concrètement.

Un point de moins que l’inflation pour les dépenses de l’État, c’est une décision courageuse. Elle s’imposait, il faudra la respecter, même si la tentation est toujours grande dans les années d’élections de s’affranchir de l’exigence de maîtrise des dépenses publiques. Celle-ci vaut aussi pour les collectivités locales, même si nous respectons leur autonomie ; l’État devra, dans sa politique de transferts, tenir compte de leur propre engagement pour réduire l’endettement public.

Les orientations budgétaires pour 2007 traduisent les priorités que nous avons retenues depuis le début de la législature, à commencer par les dépenses de souveraineté – sécurité, justice et défense. Elles reconnaissent aussi l’importance des dépenses d’avenir, notamment en faveur de la recherche. J’observe d’ailleurs qu’en Finlande, où j’étais il y a quelques semaines, c’est à elle seule qu’est appliquée la notion de « dépenses d’avenir », que nous avons parfois la tentation d’étendre exagérément.

Notre volonté de maîtriser la dépense publique nous conduit aussi à mettre en garde nos concitoyens contre les dérapages qu’entraînerait l’application du projet socialiste, dont la lecture est à cet égard atterrante.

Nous voulons aussi rappeler le respect dû aux contribuable.

M. Jean-Pierre Brard – Aux gros !

M. Hervé Mariton - Nous ne faisons pas partie de ceux qui veulent augmenter les prélèvements.

M. Didier Migaud - Vous les avez augmentés !

M. Augustin Bonrepaux - Mais pas pour tout le monde…

M. Hervé Mariton - Les mesures fiscales votées dans la loi de finances pour 2006 trouveront leur traduction en 2007. Et à mon avis, la baisse des impôts devra se poursuivre, même si les contraintes du désendettement peuvent conduire à marquer des étapes sur ce chemin difficile. Dans le projet socialiste figurent au contraire des propositions d’impôts nouveaux, associées à l’idée de « réconcilier le citoyen avec l’impôt » – la menaçante est élégante.

Notre débat de ce matin est l’occasion de reposer la question du lien entre le budget de l’État et celui de la protection sociale. Nous sommes nombreux sur ces bancs à être résolument hostiles à la fusion de l’impôt sur le revenu et de la CSG, qui ne conduirait qu’à l’augmentation des prélèvements.

D’autres débats sont ouverts, comme celui de la part respective des salaires et de la valeur ajoutée dans le financement de la protection sociale, qu’il n’est pas facile de conclure dans un contexte de mondialisation – avec laquelle il convient de réconcilier les Français.

Messieurs les ministres, nous approuvons ces orientations budgétaires, qui vous permettront de nous présenter pour 2007 un bon PLF et un bon PLFSS. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Charles de Courson – Ce débat fournit l’occasion de faire le point sur les quatre dernières années de gestion des finances publiques et d’examiner nos perspectives.

Le Gouvernement continue à retenir des hypothèses économiques trop optimistes. Tabler sur une croissance du PIB comprise entre 2,25 et 3 % dans les années qui viennent n’est pas raisonnable, alors que le taux moyen de croissance n’a été que de 2,2 % sur la période 1980-2005 et n’a pas tout à fait atteint 2 % sur la période 2000-2005. Il n’est pas raisonnable de penser qu’on gagnera un point de croissance grâce à l’assainissement des finances publiques, la politique de l’innovation et la mobilisation des ressources de main-d’œuvre, du moins dans les trois années à venir. Une hypothèse de 2 % eût été plus raisonnable, quitte, si la croissance était un peu plus forte, à voir comment utiliser les plus-values. La dernière note de conjoncture de l’INSEE retient d’ailleurs une hypothèse de 2 % pour 2006.

Premier frein à la croissance dans notre pays : la perte de compétitivité de l’économie française. Les rapports du Conseil économique et social soulignent que la part des exportations de la France dans celles de la zone euro est passée de 17,3 % en 1998 à 14,3 % en 2005 et que la balance des transactions courantes, qui était excédentaire en 1999, a un solde négatif en 2005. Cette perte de compétitivité représente une perte de 0,7 point de PIB par an en moyenne depuis six ans. L’INSEE constate dans sa dernière note de conjoncture que le commerce extérieur a eu un effet négatif sur la croissance française, de 0,7 % en 2004 et 1 % en 2005, et il estime à 0,2 % la perte en 2006. Première question qu’il faudrait se poser, donc : comment redresser la compétitivité de notre économie, et notamment celle de notre industrie ?

Deuxième frein : la croissance est actuellement soutenue par la consommation des ménages, qui progresse plus vite que les revenus. La consommation a progressé de 2,2 % en 2003, 2,5 en 2004 et 2,2 en 2005, mais au prix d’un recul du taux d’épargne de 6,7 % en 2003 à 5,9 en 2004 et 4,8 en 2005.

Certes, il y a la baisse du taux de chômage à 9 % à la fin de cette année. Mais l’augmentation de l’emploi marchand est très faible, et la baisse s’explique par une forte hausse de l’emploi non marchand, relancé par le Gouvernement, ainsi que par les départs anticipés à la retraite résultant de la loi Fillon – plus de 100 000 par an –, lesquels plombent nos comptes sociaux.

Troisième frein, qu’on oublie trop : la politique allemande de redressement des finances publiques, menée par une grande coalition représentant plus des deux tiers du peuple allemand.

M. le Président de la commission des affaires sociales – Il n’y a pas de centristes pour faire barrage.

M. Charles de Courson - Mais c’est le peuple allemand qui a imposé ces mesures, ce n’est pas un choix des partis ! Au 1er janvier 2007, la TVA allemande sera augmentée de 3 %. Une mesure aussi drastique entraînera forcément une baisse de la consommation des ménages. Or, l’Allemagne est notre premier client, elle absorbe le tiers de nos exportations. On risque donc d’assister à une chute de nos exportations, d’autant plus qu’elles sont essentiellement composées de biens de consommation.

Presque personne n’a parlé non plus des conséquences de la très forte hausse des taux d’intérêt. La réserve fédérale s’étant engagée dans une hausse continue des taux d'intérêt à court terme, qui seront passés de 1% à plus de 5 % à la fin de l’année, les banques centrales européennes sont contraintes d’augmenter leur taux d’au moins un point. Cela aura d’abord des conséquences sur un secteur qui marche très bien, celui du bâtiment, qui crée environ 50 000 emplois par an, soit les deux tiers du secteur marchand. Le BTP a été dopé par ces taux d'intérêt historiquement bas, par la baisse de la TVA sur les réparations et par la politique de logement du Gouvernement, que l’UDF soutient – et la gauche ferait bien, compte tenu des résultats qu’elle avait obtenus, de rester très prudente sur ce sujet.

La hausse des taux va donc peser sur l’emploi et l’activité dès l’année prochaine. Elle aura une autre conséquence importante, sur la dette publique. Nous avons réduit le coût de la dette publique en augmentant la part de la dette flottante, ce qui explique que les intérêts de la dette sont quasiment stables alors que la dette de l’État explose. Mais c’est fini ! Dès cette année, et plus encore en 2007, nous aurons une très forte et durable augmentation du coût de la dette.

M. Gérard Bapt – Eh oui !

M. Charles de Courson - Voilà pourquoi le Gouvernement a tort de faire croire que les prévisions de croissance peuvent atteindre 2,25 ou 3 %.

J’en viens au triple objectif fixé par le Gouvernement : ne pas augmenter le taux des prélèvements obligatoires – c’est le moins que l’on puisse faire ! – réduire les déficits publics, dès 2007 au niveau du déficit stabilisant puis de 0,7 point de PIB pour les deux années suivantes, et maîtriser les dépenses publiques. Or, la politique menée depuis 2002 est parvenue au résultat exactement inverse. Les dépenses publiques – État, sécurité sociale et collectivités locales – se sont accrues constamment, et beaucoup plus vite que la richesse nationale. La part des dépenses publiques dans le produit intérieur brut s’est donc accrue, passant de 52,7 % en 2002 à 54,2 % en 2005 – on espère qu’elle se stabilisera en 2006, mais rien n’est moins sûr. Dans cette même période, les dépenses publiques ont augmenté de 134 milliards et la richesse nationale de 206 milliards : 65 % de la richesse nationale supplémentaire ont été prélevés pour financer des dépenses publiques ! La France est ainsi arrivée en 2005 au deuxième rang européen pour les dépenses publiques – et au rythme où la Suède réduit les siennes, nous serons les premiers d’ici trois ans ! Je suis heureux qu’on nous demande aujourd’hui de prendre le chemin inverse, mais il était plus que temps. Les prélèvements obligatoires se sont eux aussi constamment accrus, passant de 43,1 % du PIB en 2002 à 44,1 % en 2005. A-t-on au moins réduit le déficit public ? Même pas ! Il est passé, hors mesures exceptionnelles, de 3,2 % du PIB en 2002 à 4,1% en 2003, 3,5 % en 2005, et devrait s’établir autour de 2,9% en 2006 et 2,5 en 2007.

L’objectif d’un retour au niveau de « déficit stabilisant » n’est absolument pas tenu. Dans le projet de loi de finances pour 2005, le Gouvernement a fixé celui-ci à 2,5 % : je le défie de nous expliquer comment il est parvenu à ce résultat.

Le déficit stabilisant est fonction de trois paramètres : les taux d'intérêt, la croissance en valeur du produit intérieur brut et le niveau de la dette publique. Avec l’augmentation des taux d'intérêt et une croissance en valeur autour de 4 % – soyons optimistes ! – il faut aller vers 0 ! Le déficit stabilisant est donc loin de 2,5 % du PIB. La Cour des comptes l’établit à 1,7 ou 1,8 %, à peu près comme notre rapporteur général.

L’objectif fixé par le Gouvernement pour les collectivités territoriales est totalement inadapté. Leurs dépenses ne devraient s’accroître que de 0 % en volume, en contrepartie de quoi vous leur donneriez plus d’initiative tout en indexant les concours financiers sur la croissance des dépenses de l’État – sans qu’on en sache précisément le taux. Il n’y a que deux politiques cohérentes vis-à-vis des collectivités locales. La première est thatchérienne : comme les collectivités dépensent trop, il faut contrôler leurs recettes, supprimer toute autonomie fiscale locale et alimenter les collectivités par des dotations de l’État. C’est ce que font ici les gouvernements, de gauche et de droite, depuis quinze ans. On peut être pour ou contre, mais c’est un raisonnement cohérent. La seconde est soutenue par l’UDF depuis des années : responsabiliser les élus locaux, définir clairement les compétences – y sompris de façon négative – cessez de donner les mêmes compétences à différents niveaux de collectivités – autrement dit, préciser ce que peut faire un échelon, mais aussi ce qu’il n’a pas le droit de faire.

M. le Président de la commission des finances – Très bien !

M. Charles de Courson - En revanche, le système actuel ne vous permettra jamais de contenir la croissance des dépenses locales. Il est indispensable de réformer la fiscalité locale, au lieu de nationaliser, comme le font tous les gouvernements les uns après les autres, la dépense locale et d’encourager les élus locaux à de plus en plus d’irresponsabilité : plus ils ont dépensé dans le passé, plus ils sont récompensés aujourd’hui ! Choisissez donc la voie de la démocratie locale : définissez les compétences, restructurez les collectivités et dotez-les d’un impôt. Le seul qu’on puisse affecter aux départements et aux régions, qui se substitue aux impôts sur les maisons, est la CSG, un impôt payé par 80 % des contribuables, qu’on ne peut pas moduler et qui est impopulaire, ce qui est un bon moyen de réguler la dépense.

M. le Rapporteur général – Quel optimisme !

M. Charles de Courson – En l’assortissant d’un système de péréquation et en baissant le taux national, on pourrait abandonner ces pseudo-transferts de fiscalité d’État vers les collectivités territoriales. Votre politique à vous, Monsieur le ministre, échouera.

Les objectifs fixés sont également peu réalistes sans nouvelle réforme de la sécurité sociale. Le déficit du régime général stagne plus ou moins depuis quatre ans. Les 44 milliards qu’il représente sont couverts par l’emprunt – et encore ces chiffres n’intègrent-ils pas toutes les dépenses réelles – nous reparlerons des déficits hospitaliers. En matière de retraites, sans nouvelle réforme, les déficits s’accroîtront de manière mécanique et la pérennité du système est remise en cause. Il est très regrettable que le débat de tout à l’heure n’ait porté que sur le régime général : parlons des régimes spéciaux ! Le dernier rapport de la Cour des comptes, qui concerne quatre de ces régimes, démontre la nécessité d’augmentations massives des cotisations si l’on veut les maintenir en l’état. L’UDF est la seule à avoir le courage de dire que les régimes spéciaux devraient être mis en extinction.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale - C’est facile !

M. Charles de Courson - Les bénéficiaires des régimes spéciaux y resteraient leur vie durant, mais tous les nouveaux salariés devraient être affiliés à un régime général unique. On rétablirait ainsi en une génération l’égalité des citoyens devant la retraite.

M. Pierre-Christophe Baguet - Très bien.

M. Charles de Courson - Selon la Cour des comptes, pour maintenir le régime de la RATP, il faudra augmenter les taux de cotisation de 16 points, et de 9 points pour la SNCF. Ne parlons pas des électriciens et gaziers : il nous a fallu augmenter massivement les prélèvements sur les usagers pour maintenir leurs prestations spécifiques !

S’agissant de la branche maladie, le Gouvernement a consenti d’importants efforts – la croissance de son budget était de 7,1 % en 2002, elle est de 2,5 % en 2006 – qui restent insuffisants. Certaines mesures ont porté leurs fruits. On a réalisé d’importantes économies sur les indemnités journalières en éliminant la moitié des abus en matière d’arrêts de travail. S’agissant des médicaments, il reste encore beaucoup à faire mais la direction prise est la bonne. En revanche, le Gouvernement n’a pas avancé sur la réforme de l’hôpital public. Je laisse à M. Baguet le soin d’évoquer la situation de la branche famille. Quant au FIPSA, il faudra prendre des mesures afin de stopper sa dérive.

Pour le budget de l’État, le Gouvernement a fixé un objectif de 0,8 % de croissance maximale en valeur. Celui-ci ne sera pas respecté puisque ne figurent pas dans ce budget cinq types de dépenses. D’abord, les dépenses fiscales. Or, elles ont explosé, de 51,6 milliards en 2003 à 56,2 en 2006. C’est de la dépense budgétaire à coup de dépenses fiscales. Ensuite, les fonds de concours ont augmenté d’un milliard entre 2004 et 2005. La forte baisse des crédits destinés aux transports – de 9,5 milliards à 9 - s’explique par le fait que l’on finance 650 millions sur l'Agence pour le financement des infrastructures de transport. Autrement dit, on vend des actifs publics pour doter l’AFIT et celle-ci verse des fonds de concours au ministère des transports. C’est aberrant !

Troisièmement, les dégrèvements et déremboursements chers à M. Méhaignerie. Les dégrèvements sur les impôts locaux ont crû de 9,4 milliards en 2004 à 12,8 en 2006. Quelle somme représenteront-ils en 2007 ?

Quatrièmement, les prélèvements sur recettes au titre du budget européen. Dans le rapport du Gouvernement, vous affirmez qu’ils doivent « tendre vers le taux de croissance de la dépense nette du budget général », c’est-à-dire 0,8 %.

Et qu’en sera-t-il des contributions aux collectivités locales ? Seront-elles indexées sur l’inflation comme cela a été suggéré au comité des finances locales ?

Enfin, les comptes spéciaux du Trésor. Il faut arrêter d’y recourir pour donner l’illusion d’une maîtrise de la dépense. L’an dernier, 11 milliards ont été ainsi dépensés. Le groupe UDF propose d’intégrer ces cinq postes dans le budget de l’État afin que le Parlement dispose d’une véritable photo de la croissance réelle de la dépense publique.

En conclusion, le groupe UDF, à l’instar de la Cour des Comptes, considère que les gouvernements qui se sont succédé depuis 2002 ont géré avec laxisme les finances publiques. La politique d’austérité récemment lancée ne permettra pas de résoudre le problème des finances publiques pour l’avenir. En l’absence de quatre grandes réformes structurelles – retraites, assurance-maladie et hôpital public, financement des collectivités locales et réorganisation de l’État, on ne reviendra pas à l’équilibre. Les votes d’abstention puis d’opposition du groupe de l’UDF en matière de finances publiques traduisent l’inquiétude croissante des Français qui commencent à comprendre que l’on ne peut vivre durablement aux frais de ses enfants et de ses petits-enfants (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF).

M. le Président de la commission des affaires culturelles – Très bien !

Mme Jacqueline Fraysse – Je me réjouis de l’organisation de ce débat qui sera l’occasion de tirer, une fois de plus, la sonnette d'alarme sur le caractère inopérant des mesures prises en matière de financement de la sécurité sociale. En effet, la prévision réactualisée des comptes du régime général pour l'année 2006 fait apparaître un déficit de 10,3 milliards au lieu des 8,9 prévus, et le déficit de l'assurance maladie est de 6,3 au lieu de 6,1 millions. Votre réforme est donc un échec patent. M. Douste-Blazy, alors ministre de la santé, avait annoncé que l'effort financier et les réformes permettraient le retour progressif à l'équilibre en 2007. Force est de constater que cette promesse n’a pas été tenue. Ce constat aurait dû vous inciter à réviser votre position. On ne finance pas la protection sociale à coup de plans d'austérité autoritaires ni en exerçant d'inacceptables pressions sur le corps médical dont les conditions d'exercice sont de plus en plus difficiles.

M. le Ministre délégué au budget – Les communistes au secours du corps médical, c’est touchant !

Mme Jacqueline Fraysse – Il est nécessaire de réformer le mode de financement de la protection sociale pour la mettre à l’abri de la privatisation. Depuis quatre ans, vous avez augmenté la part restant à la charge de l'assuré, avec la franchise d’un euro, le forfait de dix-huit euros pour les « K50 » et l'augmentation répétée du forfait hospitalier. Vous avez aussi multiplié les déremboursements infondés. En pédiatrie, depuis l'arrêté de janvier 2006, les médicaments contre la gastroentérite et la rhino-bronchiolite ne sont presque plus remboursés alors qu’il s’agit de pathologies graves chez le nourrisson. Les Français, et les plus vulnérables en particulier, doivent de plus en plus assumer le coût des soins. C’est inacceptable ! Ces déremboursements ont été justifiés par la nécessité de favoriser la prise en charge des médicaments nouveaux, alors que ce ne sont le plus souvent que des molécules déjà présentes sur le marché, et modifiées à la marge. Or, les brevets européens ne représentent plus que 28 % du total mondial au lieu de 55 % il y a peu.

Cette politique ne permettra pas d’assurer l’avenir du système de protection sociale. D’autant plus que vous préférez afficher l’autosatisfaction plutôt que tenir compte du problème des recettes, pourtant souligné par le directeur de l’UNCAM lui-même.

Par conséquent, une véritable réforme doit être engagée. Le Président de la République, lors de ses vœux aux forces vives de la nation, a annoncé une réforme des cotisations sociales patronales, intégrant la notion de valeur ajoutée, que nous défendons depuis plus de dix ans. Il s’agit de réformer l'assiette pour augmenter les ressources et moderniser le financement de la protection sociale afin de conjuguer solidarité, justice sociale et développement économique. II faut donc consolider le lien entre le financement de la protection sociale et la réalité de la production des richesses dans l'entreprise. Ensuite, il convient de mettre à contribution les revenus financiers spéculatifs et de supprimer les exonérations de cotisations qui ont montré leur inefficacité en matière d'emploi. Seule cette réforme permettra de répondre aux défis de la démographie médicale et du besoin de formation de professionnels de santé et de la modernisation du système public hospitalier mis à mal ces dernières années par le plan Hôpital 2007 et la réforme de la T2A. Plutôt que de vous appuyer sur le rapport du Pr. Vallencien qui prône la suppression de plus de cent unités de proximité, il faudrait étudier rigoureusement les besoins de santé, région par région, afin de décider en concertation avec les professionnels, les usagers et les élus quelles structures doivent être maintenues et modernisées. Cette démarche exige que l’on mobilise des moyens.

Le prochain budget de la sécurité sociale devra tenir compte de ces réalités, au lieu de proposer une nouvelle cure d'austérité. Vous ne pouvez pas continuer à traiter le problème du déficit à coups de déremboursements et de pénalités financières pour les assurés.

Messieurs les ministres, vous vous déclarez tous attachés à notre système solidaire et universel de protection sociale. Or, l’échec de vos choix est patent. Il est urgent de répartir plus équitablement les richesses créées, de prélever l’argent là où il se trouve pour l’orienter vers les besoins sociaux, auxquels tiennent nos concitoyens, particulièrement vers le domaine de la santé.

C’est dans ce sens que le groupe des députés communistes et républicains travaillera ce budget (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains).

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu, cet après-midi, à 15 heures 30.

La séance est levée à 13 heures.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Catherine MANCY

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne deux heures après la fin de séance.
Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.
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