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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

1ère séance du mercredi 18 octobre 2006

Séance de 15 heures
8ème jour de séance, 16ème séance

Présidence de M. Jean-Louis Debré

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La séance est ouverte à quinze heures.

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souhaits de bienvenue à une délégation étrangère

M. le Président – Je suis heureux de souhaiter en votre nom la bienvenue à une délégation de l’Assemblée de la République d’Albanie, conduite par son vice-président, M. Beja (Mmes et MM. les députés ainsi que les membres du Gouvernement se lèvent et applaudissent).

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questions au gouvernement

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

agence de prévention et de surveillance des risques miniers

M. Jean-Pierre Kucheida – Créée en 1999 et administrée par l’État, les exploitants et les élus locaux, l’Agence de prévention et de surveillance des risques miniers, dont M. le ministre de l’industrie souhaite la suppression, garantit l’existence d’une réelle concertation face aux problèmes de l’après-mines, qui concernent pas moins de quatre millions d’habitants et huit cents communes.

Or, malgré d’énormes besoins, cette agence n’a jamais obtenu les moyens nécessaires à son fonctionnement. Dès lors, vous ne pouvez déclarer qu’elle est inutile et que sa suppression est sans conséquences ! Au contraire, ce devrait être un formidable outil de concertation, de médiation et de gestion.

En outre, l’abrogation d’un texte de loi, pourtant voté à l’unanimité par les deux assemblées, porterait atteinte à l’équilibre de nos institutions et serait un flagrant déni de démocratie. Elle est d’autant plus inacceptable que M. Loos, qui en est à l’origine, est lui-même un ancien ingénieur du corps des mines ! Dois-je rappeler combien les liens entre les exploitants et l’administration des mines sont étroits et séculaires ?

Reviendrez-vous sur la suppression de cette agence, et lui fournirez-vous les moyens de fonctionner en donnant enfin raison aux représentants élus du peuple contre l’administration qui croit trop souvent détenir la vérité révélée ?

M. François Loos, ministre délégué à l’industrie - Je vous remercie de rappeler l’importance que j’accorde aux problèmes miniers, et je sais les efforts que vous menez vous-même dans ce domaine. L’an dernier, nous avons créé l’Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs qui, sous l’autorité de son nouveau directeur général, est soumise à des obligations strictes en matière de qualité de service et de délai de versement des prestations, et dispose de moyens importants pour les respecter. Par ailleurs, je ferai en sorte, par arrêté, que l’ensemble des us et coutumes soient pris en compte.

Quant à l’Agence dont vous parlez, qui garantit la concertation avec les collectivités locales et dont je recevrai prochainement le président, aucune décision n’est encore prise à son sujet.

Par ailleurs, j’ai demandé au président de Charbonnages de France de recevoir dès lundi l’ensemble des syndicats pour aborder les questions de logement qui se posent notamment dans le Midi. Enfin, s’agissant des expropriations, cette année l’État a versé en temps et en heure tous les crédits nécessaires. Il fait tout son devoir (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Instituts universitaires de technologie

M. François Rochebloine – Les instituts universitaires de technologie dispensent des formations de grande qualité et sont aujourd’hui le meilleur relais entre l’université et les milieux professionnels. Pourtant, leur situation se dégrade régulièrement, car la dotation globale de l’État diminue. Ainsi, cette année, il manque 7,7 millions d’euros pour atteindre les objectifs que le ministère a fixés en 2003. C’est d’autant plus regrettable que les effectifs des IUT, eux, augmentent, et que les charges de fonctionnement et le renouvellement des plateaux techniques sont de plus en plus coûteux.

Le réseau des IUT nous alerte aujourd’hui dans le cadre d’une journée de sensibilisation, tant des mesures urgentes s’imposent. Que comptez-vous faire, Monsieur le ministre, pour soutenir le maillage serré de ces instituts et reconnaître ainsi qu’ils sont un modèle de professionnalisation performant ?

M. François Goulard, ministre délégué à l’enseignement supérieur et à la recherche - D’une part, vous avez raison : les IUT, qui fêtent leurs quarante ans, sont une réussite. Ils sont la preuve que l’on peut atteindre l’excellence universitaire tout en dispensant des formations parfaitement adaptées à l’insertion professionnelle. Sur l’ensemble de notre territoire, deux années de formation y permettent avec succès de poursuivre des études comme d’intégrer le monde du travail.

D’un autre côté, vous avez tort : pour cette seule rentrée, nous avons créé dans les IUT dix nouveaux départements – contre trois ou quatre d’habitude – et cent cinquante nouveaux emplois. En outre, la dotation globale de fonctionnement augmente de près de 3 %. Nous sommes nombreux à partager ici votre intérêt pour ces instituts. Je ne peux qu’encourager le groupe UDF à voter la prochaine loi de finances, qui permettra d’en augmenter encore les moyens comme nous le souhaitons ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

pouvoir d’achat des retraités

M. Gilbert Biessy - En cette Semaine Bleue, les retraités manifesteront demain dans toute la France pour clamer combien leur vie est loin d’être rose. Ils revendiquent légitimement une revalorisation de leur pouvoir d’achat, comme nombre de nos concitoyens, ils sont menacés par la pauvreté. Alors qu’en 1996, 430 000 retraités vivaient avec des revenus inférieurs au seuil de pauvreté, leur nombre est passé à près de 700 000 aujourd’hui. C’est là l’un des effets injustes de votre réforme des retraites de 2003 et du maintien des décrets Balladur sur le calcul des pensions.

Alors que les salaires ont bénéficié d’un léger coup de pouce cet été, les retraites n’ont, elles, été revalorisées que de l’inflation, soit 1,8 %. Les retraités, comme les salariés, subissent pourtant de plein fouet l'augmentation du coût de la vie avec la hausse des loyers, de l’énergie, des impôts ou encore des soins. Ils seront d’ailleurs les premiers pénalisés par la prochaine vague, honteuse, de déremboursements, ceux-ci portant notamment sur les médicaments prescrits en cas de trouble de la mémoire ou d’artérite.

Les retraités ne peuvent être les laissés-pour-compte de votre politique, d’autant que l'argent coule à flots dans notre pays et qu’il serait tout à fait possible de satisfaire leurs besoins. Plutôt que de faire la part belle aux plus riches dans la loi de finances et de rester coi d’admiration devant les records boursiers des grandes entreprises, redistribuez les richesses en faveur des retraités et augmentez sensiblement les pensions, de façon qu'aucune retraite ne puisse être inférieure au SMIC. C’est la solidarité qui fait la grandeur d'un pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains)

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la familleQui sont les vrais défenseurs du pouvoir d’achat des retraités ? (« Pas vous ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains) Ceux qui ont laissé, durant cinq ans, se préparer le naufrage de l’assurance vieillesse sans rien faire ou ceux qui ont eu le courage de réformer notre système de retraites pour en assurer la sauvegarde ? En engageant cette réforme, ce n’est pas aux détenteurs de gros patrimoines que nous avons pensé mais aux salariés retraités qui n’ont que leur pension pour vivre.

C’est nous également qui avons permis à 350 000 personnes, souvent des ouvriers, ayant commencé à travailler très jeunes, de pouvoir partir en retraite avant l’âge de 60 ans. Ce n’est pas vous. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; interruptions sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains) Et le pouvoir d’achat de ces retraités est bien supérieur à ce qu’il aurait été si la réforme des retraites n’avait pas eu lieu. Qui a de même apporté la garantie, fondamentale, qu’aucune retraite ne peut être inférieure à 85 % du SMIC ? Ce n’est pas vous, c’est encore nous (Mêmes mouvements). Qui a décidé, il y a quelques semaines, que les 300 000 petites retraites agricoles liquidées avant 2002 seraient augmentées de 20 % et jusqu’à 40 % pour les conjoints ? Ce n’est pas vous, c’est le Président de la République (Mêmes mouvements). Qui a de même augmenté les aides à la souscription d’une mutuelle ? Ce n’est pas vous, c’est encore nous (Mêmes mouvements). Voilà qui se préoccupe vraiment du pouvoir d’achat des retraités. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

sÉcurité dans les transports en commun

Mme Chantal Bourragué – Ma question s’adresse à Nicolas Sarkozy, ministre d’État, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire (« Allô ! » sur les bancs du groupe socialiste). Plus d’un million de Français empruntent quotidiennement les transports en commun pour se rendre à leur travail. Or, de nombreuses agressions, qui ont souvent fait la une des journaux, y ont eu lieu en 2005 et 2006. Nul n’a oublié les violents incidents qui se sont déroulés, la nuit du 31 décembre dernier, dans le TER Nice-Lyon où une bande de jeunes délinquants a injurié et violenté les voyageurs.

Parce que chacun a le droit de se déplacer sans être inquiété, vous avez réaffirmé, Monsieur le ministre, votre détermination à lutter sans relâche contre la délinquance et l’insécurité dans les transports. La police ferroviaire des transports, que vous avez créée en janvier 2006 et qui est pleinement opérationnelle depuis juin, est chargée de coordonner sur l’ensemble du territoire l’action du service régional de la police des transports. Elle devait fonctionner en collaboration avec la SNCF et la RATP. Après quelques mois de fonctionnement, pouvez-vous dresser un bilan de son action ? Les Français peuvent-ils désormais emprunter sans crainte les transports en commun ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Nicolas Sarkozy, ministre d’État, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire Les personnes qui empruntent les transports en commun n’ont bien souvent pas d’autre choix. Il est du devoir d’une démocratie et d’une République de faire en sorte que nul n’ait peur, ni pour lui-même ni pour les siens, en utilisant les transports en commun.

À notre arrivée au pouvoir, nous avons trouvé une situation catastrophique. La délinquance dans les transports en commun avait littéralement explosé, augmentant de 30 % en 2000-2001. (« Cinq ans que vous êtes au pouvoir ! » sur les bancs du groupe socialiste). Nous avons commencé par réorganiser les services de sécurité en région parisienne, où nous avons créé une police des transports, ce qui a permis de sécuriser 1 300 trains quotidiennement. Et la délinquance – là où elle avait explosé de 30 % en 2000-2001 – a reculé de 8 % l’an passé (« Ce n’est pas vrai ! » sur les bancs du groupe socialiste) Ces chiffres, mesurés pour 2001 et 2005, résultant du même appareil statistique, sont incontestables. Je mets d’ailleurs quiconque au défi de les contester. Le système a si bien porté ses fruits en Ile-de-France que des élus, de gauche comme de droite, nous ont demandé de créer le même à Lille, Lyon et Marseille, ce que nous avons fait l’an dernier. Le résultat ne s’est pas fait attendre longtemps : dès 2005, la délinquance a diminué de 7 % dans les transports en commun de ces villes (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Nous avons ensuite décidé d’intervenir pour les TER (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste). Si la situation dans ces trains ne vous intéresse pas, elle intéresse nos concitoyens qui les empruntent ! (Exclamations sur les mêmes bancs) Neuf mois après la mise en place du nouveau dispositif, le 1er janvier dernier, la délinquance a reculé de 4 % dans les TER.

Vous le voyez, il y a d’un côté le bilan accablant de la gauche, de l’autre le nôtre, dont nous n’avons vraiment pas à rougir. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

situation au darfour

M. Jean-Claude Guibal - La guerre qui, depuis février 2003 ensanglante le Darfour au nord-ouest du Soudan, a provoqué, sur fond de manne pétrolière, l’une des plus graves catastrophes humanitaires de ce début de siècle.

300 000 personnes sont mortes, 230 000 sont réfugiées dans des camps et près de deux millions ont été déplacées. Assassinats, viols, tortures, enlèvement de femmes et d’enfants pour les réduire en esclavage sont rapportés par les ONG. Une commission d’enquête internationale constituée par les Nations unies considère que des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité ont été commis au Darfour. La Cour pénale internationale a été saisie.

Ce désastre humanitaire semble avoir été provoqué par la politique de répression lancée par le gouvernement soudanais contre les populations négro-africaines. Certains parlent même de nettoyage ethnique au bénéfice de tribus arabes. Ils craignent que le Soudan ne soit un Rwanda au ralenti et à huis clos.

Outre sa dimension humanitaire, le conflit du Darfour est de nature à remettre en question l’ensemble du processus de paix au Soudan. Il risque aussi de déstabiliser les pays voisins, notamment le Tchad. Après la signature, le 8 avril 2004, d'un cessez-le-feu entre le gouvernement soudanais et les deux mouvements rebelles, la situation semblait s'être en partie stabilisée. Or, depuis le mois de septembre 2005, on assiste à une recrudescence des violations de ce cessez-le-feu. Malgré les négociations, l'intervention de l'Union africaine et les résolutions prises par l'ONU, la situation ne s'améliore pas et la crise humanitaire se fait chaque jour plus alarmante.

Pouvez-vous nous dire, Monsieur le ministre, comment la France se situe face à cette catastrophe humanitaire et ce que fait sa diplomatie pour éviter qu'elle ne prenne des proportions encore plus inacceptables ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères - Le conflit du Darfour est sans aucun doute le plus grave que connaisse le continent africain, au carrefour entre le monde arabe et le monde africain.

Le risque est d’abord humanitaire : 300 000 morts déjà ; plus de deux millions de personnes déplacées, soit un tiers de la population du Darfour ; et près de 300 000 réfugiés au Tchad. Le risque est ensuite politique. C’est celui d’une partition du Soudan et de la remise en cause de l’accord de 2004. Enfin, il y a un risque d’instabilité régionale. Le Soudan est en effet le plus grand pays africain, avec neuf pays limitrophes, dont l’Ouganda, le Tchad et la République centrafricaine.

Le Conseil de sécurité a agi de façon rapide et ferme en votant à l’unanimité la résolution 1706, qui a décidé de la plus grande opération de maintien de la paix jamais autorisée par l’ONU : 17 000 Casques bleus. Mais à l’heure où je vous parle, les autorités de Khartoum refusent l’arrivée des Nations unies au Soudan.

Il faut donc conforter l’Union africaine, qui a décidé, lors de l’Assemblée générale des Nations unies, à New York en septembre, de rester jusqu’à la fin du mois de décembre. Il faut également aller le plus vite possible à Khartoum. Le président Obasanjo, le président Bongo et le président Wade y sont aujourd’hui pour tenter de convaincre le président Béchir d’accepter l’entrée des Nations unies au Soudan, dans le respect de la souveraineté de ce pays (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

services à la personne

Mme Chantal Brunel – L’emploi constitue pour nous tous une priorité et nous nous réjouissons de l’évolution favorable que connaît notre pays dans ce domaine depuis plus d’un an. La loi du 26 juillet 2005 relative au développement des services à la personne participe grandement à cette évolution et permet à notre pays de combler son retard dans un domaine qui répond aux attentes de beaucoup de nos concitoyens.

Les besoins sont énormes, qu’il s’agisse de garde d’enfants, d’aide aux personnes âgées et handicapées, ou tout simplement de faciliter la vie quotidienne de ceux, en particulier les femmes, qui travaillent et qui courent toujours après le temps.

De nombreux outils ont rendu ces services plus accessibles et moins onéreux, ce qui a permis la création de 65 000 emplois au premier semestre 2006, le doublement des structures agréées et l’adhésion de très nombreuses entreprises, souvent d’ailleurs des PME. Au-delà des chiffres, il y a la réalité humaine, car ces emplois sont difficiles, exigeants, aux lourdes responsabilités humaines et aux horaires parfois partiels et hachés. Que prévoit-on, Monsieur le ministre, pour les professionnaliser, les qualifier, les valoriser ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement - Les services à la personne connaissent un développement majeur dans notre pays, au point que l’on peut considérer que nous sommes à la veille d’une révolution. On peut désormais acheter une heure de confort, que ce soit pour le troisième âge, pour les enfants ou pour « déboguer » l’ordinateur !

La bataille cruciale qui est aujourd’hui menée par l’Agence des services à la personne, excellemment présidée par Laurent Hénart, c’est celle de la professionnalisation du secteur. Ces métiers de l’humain sont de grands métiers, où l’on est en responsabilité, puisque l’on se voit confier ce que les gens ont de plus cher – leurs aînés, leurs enfants, leur chez-soi. L’Agence a donc lancé ce mois-ci les assises de la professionnalisation. À Nancy, Marseille, Toulouse, Lille et Paris, il sera donc question des conditions de travail, des conventions collectives, de la validation des acquis de l’expérience et de formations qualifiantes. La grande bataille des services à la personne, c’est évidemment la bataille de la qualification de l’humain. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

crise de la filière viticole dans le languedoc-roussillon

M. Jean-Paul Dupré - Le Midi viticole est en crise et en désespérance ! Il n’est hélas pas entendu par le Gouvernement, alors qu’une véritable catastrophe s’annonce et que des milliers d’exploitants sont en faillite.

Pour faire sortir le Gouvernement de son inertie, la fédération des caves coopératives de l’Aude vient de lancer un signal de détresse en suspendant le paiement de la TVA et des droits d’accise.

Une réponse immédiate est indispensable, tant pour ceux qui veulent continuer à exploiter leurs vignobles que pour ceux qui veulent s’arrêter. Pour les premiers, il faut des mesures structurelles telles qu’un plan de développement de la viticulture languedocienne, un accompagnement au développement commercial, des adaptations réglementaires permettant de gagner en compétitivité. Pour les seconds, il faut une prime d’abandon définitif et une préretraite à 15 000 euros par an.

Les départements viticoles du Midi sont-ils si éloignés de Paris, Monsieur le Premier ministre, que vous n’entendiez pas leur appel de détresse ?

Souvenez-vous, Monsieur le ministre, de ce printemps 1907 où l’apathie du gouvernement Clemenceau provoqua une insurrection et la désobéissance civile dans tout le Midi, des émeutes à Béziers, Carcassonne, Nîmes, Montpellier, Perpignan et, hélas, six morts à Narbonne, après que l’armée eut tiré sur ceux que certains considéraient comme des gueux et des va-nu-pieds ! N’oubliez pas, Monsieur le ministre, les incidents qui ont eu lieu le 4 mars 1976 à Montredon ! Répondez aux légitimes attentes du Midi viticole, entendez ses représentants ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. Dominique Bussereau, ministre de l'agriculture et de la pêche  Vous avez raison d’interpeller le Gouvernement sur la situation de la filière viticole dans le Languedoc-Roussillon, car elle appelle à la fois des réformes de fond et des réformes conjoncturelles. Vous le savez, nous avons déjà décidé des exonérations de taxe sur le foncier bâti, des allégements de charges sociales et financières ainsi que des aides exceptionnelles définies dans le cadre de deux plans d’urgence. Nous avons également mis au point un plan de résorption des excédents par distillation des alcools de bouche en 2005 et une nouvelle fois en 2006 – ce que la Commission européenne n’a accepté que difficilement – et nous tablons sur de nouvelles distillations en 2007. Outre ces mesures conjoncturelles, nous avons défini un plan de restructuration et prévu dans le projet de loi de finances un important budget destiné à promouvoir les vins du Languedoc-Roussillon, qui n’ont rien à envier aux productions étrangères concurrentes et dont il faut améliorer la commercialisation pour permettre aux producteurs de les vendre correctement. Enfin, nous n’acceptons évidemment pas le projet de la Commission, car nous considérons que la solution de la crise ne passe pas par l’arrachage des pieds de vigne mais par une politique d’expansion dynamique, à laquelle je souhaite travailler avec tous les parlementaires de la région. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Sécurité routière

M. Richard Dell'Agnola – Refusant de considérer l’insécurité routière comme une fatalité, le Président de la République a fait de la lutte contre ce fléau l’une des priorités du quinquennat. Le Gouvernement a engagé à cette fin des actions multiples, qu’il s’agisse de l’application stricte des amendes et des peines, du refus déterminé des excès de vitesse ou des campagnes de sensibilisation aux dangers de la route. Pour la Semaine de la sécurité routière qui vient de commencer, les départements multiplient les initiatives et des spots télévisés appellent au respect de la limite de vitesse dans les agglomérations. Quels sont les chantiers en cours ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Dominique Perben, ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer La Semaine de la sécurité routière est l’occasion de faire le bilan de ce qui a été réalisé, d’identifier les problèmes en suspens et de souligner les efforts à accomplir. Qu’en est-il ? Depuis 2002, on dénombre 35 % de tués en moins sur les routes, et 16 % en moins pour les neuf premiers mois de 2006. Au total, 8 500 vies ont été épargnées depuis 2002, et l’on estime à 110 000 les blessures évitées, avec leur cortége de handicaps et de souffrances. Le meilleur respect des règles relatives au respect de la vitesse et au port de la ceinture de sécurité, à l’avant et à l’arrière des véhicules, ont permis ces résultats, mais trois difficultés subsistent. En premier lieu, les résultats concernant les deux-roues sont très insuffisants, ce qui doit inciter à renforcer les sanctions mais aussi la pédagogie, car rien ne justifie que la mortalité des conducteurs de ces engins soit deux fois plus forte en France qu’elle ne l’est en Allemagne. Ensuite, la réduction des risques en agglomération n’est pas satisfaisante, ce qui explique la diffusion des spots télévisés appelant à respecter la limitation de vitesse, fixée à 50 kilomètres-heure en ville. Enfin, les contrôles montrant l’accroissement de l’alcoolémie au volant, il convient de faire reculer ce risque. Je ne conclurai pas sans rendre hommage aux associations et aux collectivités locales qui, au cours de cette Semaine, organisent des opérations de sensibilisation par milliers. C’est bien en parvenant à convaincre chaque conducteur que l’on obtiendra des résultats. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Grippe aviaire

M. Jean-Pierre Door – La grippe aviaire intéresse moins les médias qu’il ne fut un temps. Pourtant, à ce jour, le virus H5N1 a contaminé 245 personnes dans le monde, dont 144 sont décédées. En France, la préparation technique au risque de pandémie grippale, considérée comme prioritaire, s’est traduite par l’élaboration et l'actualisation d’un plan gouvernemental de lutte contre le risque de pandémie, avec la rédaction de fiches opérationnelles, l’ouverture d’une plateforme téléphonique et d’un site internet, la constitution de stocks nationaux de masques et de médicaments et un vaste programme de formation des professionnels de santé. De plus, une campagne de prévention a été engagée, qui cible les écoles et les professionnels de santé. Mais vous avez aussi jugé nécessaire, Monsieur le ministre de la santé, d’intégrer les dimensions humaine et sociale du risque pandémique dans la stratégie de lutte. La mission d'information parlementaire a d'ailleurs insisté sur cet aspect dans le rapport qu’elle a rendu en juillet dernier. La gestion d'une éventuelle pandémie suppose en effet la confiance et la mobilisation des professionnels de santé mais aussi celle de la population. À votre demande, un colloque national intitulé « Éthique et pandémie grippale » s'est tenu il y a quelques semaines. Ce type d'initiative est nécessaire mais, pour mobiliser la population, il faut envisager une action de longue haleine suscitant une prise de conscience responsable. Quelles autres actions comptez-vous engager à cette fin ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités Même si la grippe aviaire ne fait plus la une des journaux, nous avons eu, hier, à déplorer la cinquante-cinquième victime de ce virus, en Indonésie. Face à cette épizootie, au sujet de laquelle la possible transmission des oiseaux aux hommes fait encore débat dans la communauté scientifique, nous n’avons jamais baissé la garde et je tiens tout particulièrement à saluer le travail de votre mission d’information, animée par M. Jean-Marie Le Guen et par vous-même, Monsieur Door. Problème de santé publique, la perspective d’une possible pandémie grippale constitue aussi un sujet de société. Conscients de l’enjeu, nous avons fait en sorte de constituer un stock de médicaments et de masques suffisant, de former les personnels de santé et de sensibiliser l’ensemble de la population au risque.

J’ai également demandé au professeur Xavier Emmanuelli, spécialiste de la gestion des crises, de prendre la tête d’un comité d’initiative et de vigilance civique, pluridisciplinaire et ouvert sur la société civile puisque associant des responsables médicaux, des médias, des sciences humaines, des cultes… Cette instance a vocation à nous aider à définir la conduite à tenir si la maladie gagnait du terrain, de manière à ce que la population puisse continuer à vivre normalement et que cette contrainte d’un genre bien particulier n’attente pas aux libertés individuelles et collectives. L’idée, c’est, dans un contexte extraordinaire, de pouvoir continuer à mener la vie la plus ordinaire possible. Face à ce type de menace, il faut être capable d’anticiper les besoins et d’envisager toute mesure utile pour maintenir la cohésion sociale. Au reste, cette démarche d’anticipation est très utile, même si la menace de pandémie grippale ne s’aggrave pas, car elle nous aidera à prendre les bonnes décisions si survenait une autre crise d’ampleur comparable, sanitaire ou non. Nous n’avons jamais relâché la vigilance et, tant que nous pourrons améliorer notre plan, nous le ferons. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

situation au DARFOUR

M. Paul Quilès – C’est l’honneur de la France de dénoncer les crimes contre l’humanité qui ensanglantent tout un pays et d’agir. C’est l’honneur de notre Parlement de se saisir de ces questions et de ne pas rester silencieux devant un drame qui dure depuis trois ans. Je suis heureux qu’aujourd’hui même, deux questions soient posées dans cet hémicycle sur le drame du Darfour car l’opinion publique, française et internationale, est malheureusement peu mobilisée. Certains parlent de génocide. Je ne sais pas si la qualification juridique est importante. Ce qui est sûr, comme le dit Kofi Annan, c’est qu’au Darfour, c’est aujourd’hui l’enfer sur terre : 300 000 morts, 2 500 000 personnes déplacées, des viols, des massacres systématiques, un pays totalement ravagé… La situation est tellement grave que, pour la première fois depuis longtemps, le Conseil de sécurité des Nations unies demande l’envoi de 20 000 hommes, dont 17 000 Casques bleus. Las, le gouvernement de Khartoum le refuse formellement.

Je sais que la situation est compliquée, du fait des factions en présence et de la position ambiguë de certaines grandes puissances. On parle d’une possible médiation de l’Érythrée… Pendant ce temps, les massacres continuent.

Monsieur le Premier ministre, vous connaissez bien ces questions internationales et je voudrais vous interroger sur plusieurs points. Ms Louise Harbour, Haut-commissaire des Nations unies aux droits de l’homme, vient de déclarer qu’il faudrait que la Cour pénale internationale soit présente au Darfour : quelle est la position de la France à ce sujet ? Que peuvent faire les autorités françaises pour trouver une issue à ce drame ? J’ai posé une question ici-même, il y a deux ans, alors qu’il y avait déjà 10 000 morts. Il y en a 300 000 aujourd’hui. Faudra-t-il attendre qu’il y en ait 500 000, voire 800 000 comme au Rwanda, pour que la communauté internationale se contente – une fois encore ! – de faire repentance ?

Monsieur le Premier ministre, la question n’est pas simplement diplomatique ou géopolitique : c’est aussi une question d’humanité. Monsieur le Premier ministre, mes chers collègues, nous avons là un devoir d’humanité. (Applaudissements prolongés sur tous les bancs)

M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères - Monsieur Quilès, vous connaissez trop les affaires internationales pour ne pas comprendre que, lorsque le Conseil de sécurité des Nations unies adopte à l’unanimité une résolution – la résolution 1706 – pour demander l’envoi de 17 000 Casques bleus et qu’il se heurte au refus du président Al-Béchir, le rôle de la France est primordial. Il s’agit d’abord d’affirmer nos valeurs, tout en respectant la souveraineté nationale et l’intégrité territoriale de chaque État. Et cela ne veut pas dire que l’on ne fait rien : dans quelques jours, je me rendrai moi-même à Khartoum pour demander au président Al-Béchir d’accepter qu’il y ait un passage de témoin efficace avec l’Union africaine, à laquelle je veux rendre hommage puisque c’est elle qui, il y a trois mois, a plaidé pour l’arrivée de Casques bleus au Soudan. Face au refus des autorités de Khartoum, l’Union africaine ne peut pas faire plus, sauf rester sur place, ce qu’elle fait.

Le Président de la République a fixé trois caps : le premier, c’est d’aider l’Union africaine à renforcer son équipement, en vue d’augmenter son efficacité ; il convient ensuite d’approfondir l’accord politique en vue d’y associer l’ensemble des groupes rebelles et pas seulement l’un d’entre eux ; enfin, il faut aller à Khartoum à la suite des chefs d’État africains car il est évident que nous devons tous aller à Khartoum. Le secrétaire général adjoint des Nations unis vient de publier un document qui montre que 250 000 personnes n’ont aujourd’hui pas droit d’accéder à l’aide humanitaire. C’est vraiment l’honneur de la France d’agir, non pas en se contentant d’aller dans un camp du Darfour avec deux caméras, mais en faisant tout pour que survienne enfin un accord politique. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

fièvre catarrhale dans les ardennes

Mme Bérengère Poletti - Récemment touché par trois cas de fièvre catarrhale, le département des Ardennes s’est vu imposer des mesures strictes entraînant l’interdiction des mouvements d’animaux. Ces dispositions, que l’on eût aimé voir appliquer avec plus de rigueur par nos voisins européens, protègent le territoire et il nous faut rendre hommage au professionnalisme des éleveurs ardennais. Cependant, même si les éleveurs les comprennent, elles sont ressenties comme en décalage avec la réalité du terrain. En effet, cette maladie est non contagieuse, non transmissible à l’homme, non dangereuse pour la consommation de viande et elle n’entraîne pas la mort du cheptel.

Grâce à nos éleveurs, la maladie ne gagne pas l’ensemble du pays et leurs efforts doivent être reconnus. Les mesures restrictives ont en effet des conséquences économiques dramatiques pour les Ardennes et pour l’ensemble des quatorze départements voisins, auxquels s’applique un périmètre de surveillance et de protection.

Monsieur le ministre de l’agriculture, vous avez été sensible à ces difficultés et vous avez décidé de faire jouer la solidarité nationale, indispensable en pareille circonstance. Une mission s’est rendue sur place pour évaluer les difficultés sanitaires et la possibilité d’assouplir les mesures imposées. Compte tenu des difficultés économiques de la filière, une première enveloppe d’un million et demi a été débloquée pour les quinze départements concernés. Toutefois, pour le seul département des Ardennes, particulièrement touché par la zone interdite, les éleveurs évaluent les besoins à huit millions. Comment le Gouvernement entend-il apaiser l’angoisse des éleveurs des zones concernées ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Dominique Bussereau, ministre de l'agriculture et de la pêche  La fièvre catarrhale, qui sévit dans les Ardennes et dans le nord-est de la France, est une maladie animale propagée par un insecte. Comme le bétail circule librement en Europe, il est difficile d’en endiguer la progression. Ce que l’on peut espérer, c’est que l’arrivée de la saison froide va faire disparaître l’insecte transmetteur et que les volumes de bêtes touchées diminueront. On observe nombre de cas au Luxembourg, en Allemagne et en Belgique, mitoyenne de votre département et où 300 cas ont été recensés. Fort heureusement, nous n’avons eu à déplorer que cinq cas sur le territoire français, ce qui signifie que la situation épidémiologique est plus favorable. Ce qu’il convient de faire, c’est d’empêcher la propagation de la maladie dans les grandes zones d’élevage du reste de la France.

C’est ce que nous faisons. Mais il est vrai qu’à partir du moment où des zones de surveillance et de sécurité sont créées, nous gênons l’activité économique, en particulier celle des éleveurs. Nous avons donc pris des mesures dérogatoires permettant l’abattage de bovins dans les zones limitrophes et nous avons décidé d’apporter une aide financière aux éleveurs de veaux de huit jours et de broutards, pour un montant d’un million et demi d’euros. Nous avons enfin dépêché sur place une mission, chargée de réfléchir aux mesures supplémentaires qui pourraient intervenir.

Notre piste actuelle est de faire sortir les animaux des zones concernées, afin qu’ils puissent être abattus. Nous travaillons en ce sens, mais j’aimerais connaître l’avis de l’AFSSA avant de mettre en place une telle mesure.

Quoi qu’il en soit, sachez que nous ferons tout pour empêcher la propagation de cette maladie sur l’ensemble du territoire, et que la solidarité gouvernementale jouera en faveur des éleveurs. Nous ne les laisserons pas tomber : le Gouvernement sera à leurs côtés pendant cette passe difficile ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

politique environnementale

M. Jean-Luc Reitzer – Ma question s’adresse à Madame la ministre de l’écologie et du développement durable. Les changements climatiques sont devenus l'un des défis majeurs de notre planète et l’impact des activités humaines sur le climat, notamment les émissions de gaz à effet de serre, est aujourd’hui démontré.

Conformément aux orientations fixées par le Président de la République, le Gouvernement agit activement sur la scène internationale pour inverser les tendances actuelles. Il a ainsi obtenu l’entrée en vigueur, le 16 février dernier, du protocole de Kyoto. Contrairement à certains pays industrialisés, la France se montre du reste particulièrement respectueuse de ce protocole, puisque nous émettons moins de gaz à effet de serre qu’en 1990 – environ 2 % en moins. La Charte de l'environnement, voulue par le Président et intégrée à notre Constitution, confirme la mobilisation de notre pays.

Mme Martine Billard - Rien de concret !

M. Jean-Luc Reitzer - Il est toutefois de plus en plus nécessaire que chaque citoyen prenne conscience de son rôle en la matière. C’est à une telle prise de conscience qu’appelle le pacte national pour l’environnement, qui a été annoncé par le Premier ministre le 4 octobre dernier. Vous-même, Madame la ministre, venez de lancer une campagne nationale intitulée : « L'écologie a besoin de nous tous ». Qu’en espérez-vous ? Quels réflexes civiques nouveaux attendez-vous de la part de chacun et chacune d’entre nous ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme Nelly Olin, ministre de l’écologie et du développement durable Vous avez raison, Monsieur Reitzer : la France respecte le protocole de Kyoto, et nous pouvons en être fiers ! Nous nous accordons tous, à de très rares exceptions près, sur les liens entre le changement climatique et l’activité humaine.

Comme le démontre le rapport remis hier par l’Institut français de l’environnement – l’IFEN –, les activités quotidiennes ont un impact sur l’environnement. Il faut donc que nous fassions en sorte de changer les comportements si nous voulons obtenir des résultats. De telles conclusions ne font que confirmer la pertinence des politiques menées par le Gouvernement contre les pollutions diffuses.

En application du pacte national pour l’environnement, dix milliards d’euros seront en outre mobilisés en faveur de prêts écologiques, grâce au relèvement de 6 000 à 10 000 euros du CODEVI, qui sera désormais un livret de développement durable. Autre mesure sans précédent, un prêt bonifié de la Caisse des dépôts permettra de quadrupler l’offre de logements sociaux respectant les normes les plus exigeantes en matière de performances énergétiques.

L’ensemble des mesures prises depuis un an vont dans le bon sens, mais la mobilisation de nos concitoyens et leur sensibilisation à ces questions sont également une condition nécessaire au succès de nos politiques. C’est pourquoi j’ai lancé une grande campagne de communication axée sur ce slogan : « Il n’y a pas de petits gestes quand nous sommes soixante millions à les faire ».

Plusieurs députés socialistes – Et quelles actions concrètes ?

Mme la Ministre - Cette campagne sera centrée sur le changement climatique et la biodiversité. Elle bénéficiera d’une diffusion sur les chaînes de télévision et de radio jusqu’au 5 novembre (Protestations sur les bancs du groupe socialiste). Vous feriez mieux d’écouter : il s’agit de solidarité ! (Même mouvement)

Nous voulons montrer qu’il n’est pas trop tard pour agir et que, sans bouleverser la vie quotidienne de nos concitoyens, il est possible de modifier les comportements. Il suffit en effet de quelques gestes simples : ne pas laisser ses appareils électriques en veille, c’est économiser 10 % d’énergie et autant sur sa facture ; ne pas ramener de vacances des souvenirs qui contribuent au pillage de la nature, c’est se battre pour la protection de la biodiversité. Il faut également utiliser des solutions naturelles pour le jardinage, comme le compost, mais aussi fermer les robinets, éteindre la lumière et baisser le chauffage quand on part… Il est plus que temps de nous y atteler !

Nous devons tous nous associer à cette démarche, car c’est notre avenir qui en jeu, et surtout celui des générations futures ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

La séance, suspendue à 15 h 55, est reprise à 16 h 15, sous la présidence de Mme Mignon.
PRÉSIDENCE de Mme Hélène MIGNON
vice-présidente

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loi de finances pour 2007 (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2007.

M. Éric Besson – Le rituel est connu : d’après le Gouvernement, ce projet de budget est le meilleur possible compte tenu des contraintes actuelles. Mais dans la réalité, la croissance plafonne, la dépense publique s’accroît – ce qui n’est pas grave en soi, si ce n’est que vous prétendez l’inverse – les finances publiques sont dans un état catastrophique et la dette publique et les déficits sociaux en forte augmentation. Comme chaque année, le Gouvernement va nous promettre de faire l’année prochaine ce qu’il n’a pas fait depuis quatre ans. Mais pour cela, son projet de budget devrait être bien différent des quatre précédents.

Différent d’abord dans ses choix fiscaux, puisque jusqu’à maintenant, vos budgets ont privilégié des baisses fiscales à crédit en faveur des contribuables fortunés, au prix d’une explosion de l’endettement des ménages modestes et des prélèvements pesant sur l’ensemble des Français. Mais dans ce domaine, point de rupture en vue. Différent aussi dans ses priorités, puisque les quatre précédents ont favorisé les fonctions régaliennes – défense, intérieur, justice – au détriment des budgets d’intervention économique, de solidarité et de santé, et même d’avenir – l’enseignement supérieur et la recherche ont beaucoup souffert. Mais ici non plus, pas de changement. Ce budget devrait enfin différer des autres pour ce qui est de sa sincérité, les quatre précédents ayant multiplié les faux-semblants en matière de maîtrise des dépenses de l’État. Compte tenu des artifices comptables et financiers et des transferts de charges qui ne disent pas leur nom au détriment des collectivités territoriales, leur véritable niveau est passé de 51,5 % du PIB en 2001 à 53,9 % en 2005. Au point qu’il est devenu habituel que des membres de la majorité parmi les plus éminents, sans même parler des représentants de l'UDF, s'alarment de ces dérives. Hélas, ce projet de budget renforce encore la logique des précédents. Il est économiquement inopérant et socialement injuste.

Sur les déficits d’abord, c’est un budget en trompe-l'œil. Chaque année, le Gouvernement annonce une réduction du déficit budgétaire « sans précédent ». En réalité, après un creusement massif en début de législature, le déficit de l'État n’est que péniblement stabilisé depuis 2004. Pour 2007, vous annoncez qu’il sera ramené à 41,6 milliards, contre 42,7 cette année et 43,5 en 2005, ce qui permettrait selon vous de ramener le solde de l'ensemble des administrations publiques au niveau stabilisant la dette. En réalité, cette baisse ne résultera que de votre frénésie de privatisations, qui vous a permis de récupérer près de 17 milliards en 2006, en vendant les bijoux de famille – mais chacun voit bien que la vente d’actifs, tels que les sociétés autoroutières au moment où elles commençaient à dégager des excédents, est contraire à l'intérêt général – et de l’effet mécanique du surplus de recettes fiscales de 2006. Voici la première réalité de ce budget : des marges de manœuvre profitant pour un peu à la réduction des déficits et au maximum à la poursuite d'une politique fiscale contestée jusque dans les rangs de votre majorité. Ainsi, Pierre Méhaignerie, le président de la commission des finances, se disait à l'été 2005 « de ceux qui pensaient que nous ne devions pas baisser l'impôt sur le revenu. Nous avons perdu ainsi 7 milliards, dont 80 % au bénéfice des deux tranches supérieures ».

Quant à la dette, ce budget n’est véritablement pas sincère. Entre 2002 et 2006, la dette publique a connu une dégradation historique de plus de dix points de PIB. Si elle avait été réduite entre 1997 et 2001 et si le gouvernement précédent avait réussi à respecter nos engagements communautaires, cela n’a plus jamais été le cas depuis 2003. Selon vous, la dette publique, qui avait atteint un niveau record fin 2005 – 66,6 % du PIB – devrait être ramenée à 64,6 % fin 2006, puis 63,6 % fin 2007. Mais ce reflux ne masque pas une progression de plus de 335 milliards sous la législature. Surtout, la réduction de la dette l'an prochain ne serait pour l’essentiel obtenue que grâce aux recettes exceptionnelles de privatisations et à la modification des règles de gestion de la trésorerie de l'État, alors même que la conjoncture assure au Gouvernement des recettes supplémentaires. Votre propre majorité ne s'y est d'ailleurs pas trompée, à commencer par Alain Lambert lui-même. Cette manipulation des règles de gestion a pour effet de réduire le « matelas de trésorerie » géré par l'agence France Trésor, au point qu’elle connaisse un risque réel d'illiquidité. Elle a d'ailleurs un coût pour le budget, car si elle diminue officiellement le volume de la dette publique, elle en augmente la charge budgétaire en diminuant les intérêts que les excédents de trésorerie de l'AFT, placés sur le marché interbancaire, rapportent chaque année en déduction de la charge brute de la dette, soit 487 millions pour 2005. Voila bien la marque de ce budget : contourner les règles, distordre les principes de bonne gestion pour tenter de sauvegarder les apparences, le tout alors que les déséquilibres s'emballent.

Ainsi, les déficits sociaux cumulés se dirigent vers de nouveaux records. Ils atteindront 93 milliards fin 2006, soit 8 % de la dette publique, dont 14 milliards pour la seule sécurité sociale, toutes branches confondues – et 24 milliards pour cette même sécurité sociale fin 2007 ! Les partenaires sociaux ne s'y sont pas trompés et ont accueilli le projet de loi de financement de la sécurité sociale avec les plus extrêmes réserves. Désormais, c’est une certitude : ce dernier, comme d'ailleurs le budget de l'État, devra être profondément remanié après les élections afin de sortir de l’impasse que vous avez créée faute, entre autres, de vous être interrogés sur l'efficacité des 23 milliards d'exonérations de cotisations sociales qui pèsent sur les budgets sociaux chaque année, ou faute d’avoir pris à temps les mesures nécessaires au comblement des déficits du Fonds de solidarité vieillesse ou au financement du Fonds de solidarité des retraites.

Ce projet de budget n’est pas plus sincère sur la dépense publique. Endettée, face à un déficit public aggravé, la France se trouve sous la menace des promesses de la majorité qui restent à financer : on attend une montée en charge de ces projets à compter de 2007 – autant de bombes à retardement pour l'exécution de la loi de finances. Pour la seule année 2008, il faudra compter 3,9 milliards pour le plan de cohésion sociale, 3,2 pour le plafonnement de la taxe professionnelle ou 3,6 pour la réforme de l’impôt sur le revenu… En y ajoutant le plan grand âge et le plan seniors, on arrive à près de 12 milliards à financer !

Ce budget est également trompeur sur la baisse des impôts : les prélèvements obligatoires ont augmenté de 17 milliards depuis 2002, passant de à 43,1 % à 44 % du PIB, alors qu'ils avaient baissé entre 1998 et 2001. Le ministre des finances annonce un effort de stabilisation des prélèvements d'ici à l'an prochain, mais comme dans tous les budgets depuis quatre ans, les annonces sont prometteuses et les résultats définitifs exécrables, il est difficile de le croire sur parole. En réalité, l'effort sera modique. Selon les prévisions du ministère même, le taux de prélèvements obligatoires restera proche de son record et atteindra 43,7 % de la richesse nationale à la fin 2007, contre 43,1 % fin 2002. Les baisses des impôts intervenues depuis 2002 pèsent en effet peu face à la progression tous azimuts des autres impôts et taxes : fiscalité sur le tabac et le gazole, progression des prélèvements sociaux et de la fiscalité locale, due pour au moins 80 % à des transferts de charges non compensés… L'INSEE a d’ailleurs confirmé, dans les comptes de la nation pour 2005, que la plupart des impôts progressent plus vite que le PIB, notamment la TVA, l'impôt sur le revenu, l'impôt sur les sociétés et la CSG.

Si encore la baisse des impôts profitait au plus grand nombre ! Mais en 2007, une nouvelle fois, les cadeaux fiscaux du Gouvernement ne profiteront qu'aux plus aisés. Dans le seul projet de loi de finances, 4,3 milliards, dont 3,9 liés à la refonte du barème de l’impôt sur le revenu, profiteront aux 10 % de ménages les plus aisés. La baisse de l'impôt sur le revenu bénéficiera, comme l'a souligné l'OFCE, pour 40 % aux 10 % de ménages les plus aisés, alors que les 10 % les plus pauvres ne totaliseront que 2 % des gains et que la moitié de la population n’en recevra que 20 %. Quant au bouclier fiscal, il représente un allégement de 360 millions, dont 250 millions iront aux 10 000 foyers les plus fortunés – soit en moyenne 25 000 euros par an ! Et cela dans le seul but de plafonner l’imposition totale des contribuables les plus aisés, qui auront, depuis 2002, bénéficié de près de dix milliards d’euros de cadeaux fiscaux. Avec cette somme, on aurait pu ouvrir mille cinq cents écoles ou deux mille crèches…

De même, l’an prochain, la remise en cause de la progressivité de l’impôt profitera pour 63 % aux 10 % des Français les plus aisés, et pour près d’un tiers au 1 % de nos concitoyens les plus riches ! Loin d’être le fruit du hasard, cette réforme repose en effet sur la suppression de l’abattement de 20 % qui était plafonné pour les contribuables déclarant dix mille euros par mois.

En somme, la dette ne baisse qu’artificiellement, les prélèvements atteignent des sommets, la nouvelle baisse des impôts directs profite aux plus riches et les comptes sociaux se dégradent toujours plus. L’augmentation des taxes et cotisations sociales illustre parfaitement la politique fiscale du Gouvernement à l’égard des Français qui vivent de leur travail. Certes, le SMIC progresse très légèrement mais, à salaire médian, le pouvoir d’achat régresse, alors qu’il progresse largement pour ceux qui gagnent vingt fois le salaire minimum. Autrement dit, le Gouvernement creuse les inégalités en se concentrant sur l’impôt sur le revenu – tout cela pour des résultats économiques médiocres, puisque le taux de chômage n’a fait que revenir à son niveau de juin 2002. La France a bel et bien perdu quatre ans.

Fidèle à ses habitudes, le Gouvernement tente de masquer ses véritables priorités, et il sacrifie aujourd’hui les marges qu’il n’avait pas hier. Ainsi, il voudrait faire croire qu’il a soudain redécouvert les vertus de mesures sociales et se targue d’avoir doublé la prime pour l’emploi. Voilà qui, comme un coup de baguette magique, devrait selon lui augmenter le pouvoir d’achat des ménages : c’est faux ! Non seulement la prime pour l’emploi est loin de doubler – les crédits ne progressent que de 2,25 à 4 milliards en cinq ans et le montant moyen par bénéficiaire reste presque inchangé depuis fin 2001 – mais elle est aussi loin de suffire au soutien du pouvoir d’achat populaire qui servirait à relancer la croissance. En effet, que pèseront ces 500 millions d’augmentation face aux 400 millions du bouclier fiscal et aux 3,9 milliards consacrés à la refonte, en faveur des plus riches, du barème de l’impôt sur le revenu ? Et que dire de la menace que, dès l’an prochain, feront peser sur le pouvoir d’achat populaire la poursuite annoncée de la hausse des taux d’intérêt – alors même que vous encouragez les ménages à s’endetter – et celle des prix pétroliers – alors que votre majorité refuse de restaurer la TIPP flottante ?

Je pourrais multiplier les exemples des conséquences inéquitables qu’entraîne votre politique fiscale en matière d’emploi, de logement, d’éducation et de recherche, et j’y reviendrai lors de la discussion sur les articles. Inverser la tendance n’était pourtant pas impossible, puisque vous disposez cette année de quelques marges de manœuvre. Pourtant, vous nous présentez, Monsieur le ministre, un budget économiquement inopérant et socialement inquiétant, qui ne fera qu’aggraver le décalage entre vos propos et la réalité que vit l’immense majorité de nos concitoyens.

La France n’a pas besoin d’habileté, Monsieur le ministre, elle a besoin de détermination et d’un projet collectif visant à la rendre plus juste, plus sûre et plus forte. Or, sans défis ni dessein, votre budget ignore l’avenir. Vous persistez dans l’échec par souci de communication, parfois même de propagande ; nous, socialistes, ne pensons pas que votre gestion de l’État est responsable. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Didier Migaud - Rappel au Règlement. Je ne sais, Madame la Présidente, si vous êtes habilitée à envoyer un avis de recherche de députés du groupe UMP. Pourquoi cette absence ? Seraient-ils gênés de devoir défendre un projet de loi de finances injuste, qui affectera gravement l’équilibre de nos comptes publics et la vie de nos concitoyens ? Ou bien est-ce un nouvel épisode du feuilleton de la guerre qui oppose les différents clans de l’UMP ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) J’ai d’ailleurs bien vu le regard inquiet de M. Mariton, lorsqu’il est arrivé tout à l’heure (Sourires). Manifestement, l’UMP préfère disparaître plutôt que d’assumer son bilan (Protestations sur les bancs du groupe UMP) !

M. Charles de Courson - Au début de l’examen du dernier budget de la législature, dressons d’emblée un bilan de la gestion des finances publiques au cours des cinq dernières années. Globalement, la politique menée n’a pas été à la hauteur de la situation : la réduction des déficits, très faible, n’était hélas pas prioritaire. Le rapport Carrez montre que les plus-values spontanées des recettes fiscales ont, entre 2002 et 2007, atteint 68 milliards, dont 60 % ont été affectés à l’augmentation de la dépense, 34 % aux réductions d’impôts et de cotisations sociales et 6 % seulement – soit quatre milliards – à la réduction des déficits. Ces résultats sont semblables à ceux du gouvernement de M. Jospin, qui avait néanmoins procédé à deux fois plus de réductions d’impôts et de cotisations sociales, mais creusé les déficits de sept milliards. La gauche a certes été laxiste et sa gestion irresponsable, mais celle du présent Gouvernement est mauvaise : les déficits cumulés de la période 2003-2007 atteindront 229 milliards, soit 3 % du PIB chaque année – c’est 20 % de plus qu’au cours de la législature précédente.

M. Jean-Christophe Lagarde - Hélas !

M. Charles de Courson – Plus grave encore : le déficit du budget de la sécurité sociale. Jadis, M. Strauss-Kahn, ministre des finances, nous renvoyait systématiquement à Mme Aubry, mais de ce point de vue, rien n’a changé. Les déficits du régime général, des régimes agricoles et du Fonds de solidarité vieillesse demeurent considérables : avec un pic à 14,4 milliards en 2005, ils ne redescendent que doucement cette année et seront à 10,8 en 2007 – quoique le dérapage de l’assurance laisse attendre plus de onze milliards. Sous le gouvernement de M. Jospin – qui bénéficiait, il est vrai, d’une conjoncture économique plus favorable – les comptes de la sécurité sociale étaient en excédent moyen de 0,2 point de PIB ; sous l’actuelle législature, le déficit est en moyenne de 0,5 point de PIB : quel grand écart ! Certes, vous avez pris quelques mesures courageuses en faveur de l’assurance vieillesse, mais elles ont d’abord provoqué une hausse des dépenses due aux départs en retraite anticipés. Quant à l’assurance maladie, si le renforcement des contrôles en matière d’indemnités journalières et de médicaments a permis des économies sensibles, la forte réduction du taux directeur des hôpitaux et la baisse des remboursements dans les cliniques privées entraînent l’augmentation des déficits des établissements médicaux.

J’en viens aux collectivités locales : leurs dépenses, qui augmentaient déjà plus vite que la richesse nationale entre 1997 et 2002, se sont encore accélérées depuis avec la décentralisation – surtout dans les conseils généraux – pour atteindre 5 % d’augmentation en 2007, leur poids dans la richesse nationale passant ainsi de 9,7 % en 2001 à 11,2 % l’année prochaine.

Sans être grave, la situation financière des collectivités s’est dégradée, tout particulièrement celle des départements. À un excédent proche de deux milliards d’euros en 2002 ont succédé des déficits croissants depuis 2004, qui se sont aggravés jusqu’à atteindre sans doute 2,7 milliards en 2007. La perte croissante d’autonomie fiscale des collectivités locales s’est accélérée sous cette législature, dans le droit fil de la politique menée par la gauche entre 1997 et 2002, sans qu’aucune réforme fiscale d’ensemble ne soit engagée. On a substitué à des recettes locales des dotations ou des prélèvements sur impôts nationaux. Plus grave, les mécanismes d’encouragement à la dépense publique locale à travers les dotations, les dégrèvements et les remboursements n’ont pas été inversés. Quant au plafonnement de la TP institué l’an passé, il décourage les élus locaux qui s’étaient attachés à pratiquer une fiscalité faible.

Globalement, les dépenses publiques ont augmenté plus vite que la richesse nationale durant ces cinq dernières années, passant de 51,6 % du PIB en 2001 à 53,8 % en 2005, avant de décroître légèrement en 2006 – 53,3 % – pour descendre, on l’espère, à 52,9 % en 2007. La priorité n’a donc pas été de réduire la part de la dépense publique dans la richesse nationale, contrairement aux engagements pris devant les électeurs. Entre 2002 et 2007, les dépenses publiques ont augmenté plus vite que la richesse nationale.

Les prélèvements obligatoires se sont donc accrus, passant de 42,8 % du PIB en 2002 à 44 % en 2005 et 2006. La baisse de 0,3 point, soit à peine cinq milliards, attendue l’an prochain demeure fragile et pourrait être remise en cause en cas de ralentissement.

Au total, la pression fiscale et sociale s’est accrue de près d’un point entre 2002 et 2007, contrairement à ce qui avait été promis en 2002. La promesse présidentielle de diminuer d’un tiers le poids de l'impôt sur le revenu n’a pas été davantage tenue. Le produit de cet impôt, de 52,6 milliards en 2002 – avant la mesure de réduction de 5 % – passera à 57,7 milliards en 2007. Les 8,9 milliards de réductions accordées entre 2002 et 2007 ne représentent qu’une baisse de 13 %. Et si l’on tient compte de la hausse de 20 % du revenu disponible brut des ménages pendant cette période, la pression de cet impôt n’aura diminué que de 8,3 % – soit le quart de la promesse faite !

Les déficits publics ont explosé entre 2001 et 2003. Depuis 2004, une réduction s’est amorcée, toutefois susceptible de s’inverser dès le prochain retournement de conjoncture. En effet, en valeur absolue, les déficits publics ne baissent que de deux milliards par an : 50 milliards en 2005, 48 en 2006 et 46 en 2007. À cette allure, l'équilibre sera atteint en 2030 !

Une politique budgétaire raisonnable devrait tendre à supprimer le déficit de fonctionnement en cinq ans, alors qu’il atteint encore 22,8 milliards d'euros en 2007. Une utilisation rationnelle des surplus de recettes, qui peuvent être évalués à 12 milliards par an à moyen terme, consisterait à en affecter près de la moitié à la réduction du déficit et à ne consacrer à des baisses d'impôts que le solde – s’il existe –, après financement de l’augmentation des dépenses. Sur ce point, l’UDF est restée fidèle aux engagements qu’elle avait pris devant les électeurs, ce qui n’est pas le cas de ceux qui ont soutenu la politique de finances publiques conduite depuis cinq ans.

Le degré d'insincérité de la présentation du budget pour 2007 a atteint un niveau rarement égalé. Je passe rapidement sur les hypothèses de croissance. Je vous avais invité l’an passé à la prudence, et suggéré de retenir l’hypothèse basse de 1,8 %, étant entendu que si l’on faisait mieux, on pourrait toujours affecter au désendettement l’éventuel surplus. Vous avez préféré retenir un taux de 2 %-2,5 %, et il semble que la croissance sera finalement de 2 %. Mais en 2005, le Gouvernement avait prétendu jusqu’au dernier moment que la croissance atteindrait 2,2 % alors qu’elle n’a pas dépassé 1,2 %. Pour l’année prochaine, la prudence aurait dû prévaloir, et vous auriez dû retenir l’hypothèse basse de 2%. Mais ce n’est pas sur ce point que je critiquerai le plus le projet de budget pour 2007, c’est sur l’évolution des dépenses.

L’objectif d’une baisse d'un point en volume n’est atteint qu’au prix d’artifices de présentation. Le Gouvernement prétend qu’à périmètre constant par rapport à 2006, la dépense nette du budget général n’augmenterait que de 0,8 % : l’augmentation est en réalité de 2,9 %, ainsi que je vais vous le démontrer.

Vous avez recouru à six mécanismes de dissimulation de la dépense. Tout d'abord, en « oubliant » les prélèvements sur recettes au profit des collectivités ou de l’Union européenne, qui constituent pourtant des dépenses du budget de l'État, comme le rappelle régulièrement la Cour des comptes. Ce premier artifice représente à lui seul une sous-estimation de la hausse de 2,7 milliards. Cela porte déjà la hausse des dépenses à 1,5 %.

En second lieu, les remboursements et dégrèvements sur les impôts locaux progressent fortement, passant de 13,49 milliards en 2006 à 14,09 milliards en 2007. En outre, la part de la prime pour l’emploi versée aux contribuables non imposables, qui constitue bien une dépense pour l'État, passe de 2,4 à 3,3 milliards. Enfin, les dégrèvements de redevance audiovisuelle pris en charge par l’État passent de 0,44 milliard en 2006 à 0,51 milliard en 2007. La somme de ces trois éléments porte la croissance des dépenses de l'État à 1,87 %.

Il faut ensuite tenir compte des débudgétisations. Sur ce point, il faut vous décerner, Monsieur le ministre, le premier prix d’imagination de tous les ministres des finances. Les neuf opérations de débudgétisation dissimulent une hausse de 1,51 milliard des dépenses de l’État. Je n’en citerai que quatre à titre d’exemples. L’État propose de transférer 1,2 milliard d’une créance qu’il détient sur l’UNEDIC au Fonds de solidarité – établissement qui finance l’ASS –, étant entendu que celui-ci mobilisera cette créance à hauteur de 550 millions en 2007, ce qui permet à l’État de réduire d’autant sa dotation au Fonds de solidarité vieillesse. De même, les exonérations de charges sociales sur le SMIC dans les entreprises de moins de vingt salariés, dont le coût s’élève à 320 millions, sont financées non par le budget de l’État, mais par un prélèvement sur une partie des droits sur le tabac. Quant à l’Agence nationale de la recherche et OSEO, ils vont être dotés chacun d’environ un milliard, financé par affectation directe à leur profit d’une partie de l’impôt sur le revenu. Enfin, on réduit de 200 millions la subvention de l’État en affectant une partie du produit de la taxe d’apprentissage, qui devrait pourtant aller aux organismes collecteurs. Je passe sur les autres débudgétisations. Ce troisième mécanisme porte la croissance des dépenses de l'État à 2,3 %.

En quatrième lieu, six dépenses fiscales sont transformées en moindres recettes. Le prêt à taux zéro, dont le coût passe de 520 à 770 millions, est financé par une dépense fiscale sur l’impôt sur les sociétés. Celui de la défiscalisation des biocarburants, qui passe de 320 à 610 millions, ne figure pas non plus parmi les dépenses de l’État. Ce quatrième mécanisme porte la croissance des dépenses de l'État à 2,5 %.

II faut également tenir compte de l'incidence des fonds de concours. Les dépenses afférentes passent de 4,02 à 4,25 milliards, soit une hausse de 5,8 %. Le principal concerne l'AFFIT, dont la dotation provient de la cession d’actifs publics. Les investissements sur les routes nationales sont ainsi financés non pas sur le budget de l’État mais par ce fonds de concours.

Enfin, il faut tenir compte des sous-compensations de l'État au profit de la Sécurité sociale et des collectivités territoriales. La dette de l'État à l'égard de la Sécurité sociale passerait de cinq à six milliards, soit un milliard de dissimulation budgétaire. L'État reconnaît sa dette puisqu'il lui paie des intérêts de retard à hauteur de 160 millions qu’il prélève sur le produit des droits sur le tabac ! S’agissant des collectivités territoriales, le surcoût de la prise en charge de l'APA et du RMI par rapport aux recettes transférées représente 430 millions.

Au total, la dépense de l'État s'élève à 373,51 milliards en 2007 contre 363,02 milliards en 2006, soit une hausse de 2,9 %. Encore n’ai-je pas tenu compte dans ce calcul des sous-estimations manifestes de dotations budgétaires, comme celle de l’aide médicale d’État, sous-budgétée d’environ 230 millions, des OPEX, sous-budgétées de 350 millions, notamment avec l’intervention au Liban, de l’API, dont le coût est sous-estimé de 150 millions. Je ne parle même pas des intérêts de la dette, sous-évalués de 200 millions.

Dans ce projet de budget l’évaluation des recettes est fragile, la baisse des prélèvements obligatoires très faible et les réductions d’impôts injustes. C’est d’ailleurs en raison de ces injustices que l’UDF avait voté contre le budget l’an passé.

Les principales mesures de réduction de l’impôt sur le revenu ne nous semblent pas justes. En effet, l'intégration de l'abattement de 20 % – qui était plafonné – dans l'assiette de l’impôt profitera beaucoup plus à un couple avec deux enfants dont le revenu dépasse 200 000 euros – réduction de 14 % – qu’à un couple avec deux enfants et deux salaires de 23 636 euros chacun – pour celui-là, la réduction ne sera que de 5,2 %.

Quant au bouclier fiscal, qui est avant tout destiné à ne pas poser le problème de la réforme de l'ISF, son coût de 400 millions d'euros bénéficiera à 93 000 personnes, dont 14 000 imposables à l'ISF, qui bénéficieront des deux tiers de cette somme !

La hausse de la prime pour l'emploi a été obtenue par Pierre Méhaignerie et nous y sommes évidemment favorables mais nous voudrions que la PPE figure sur la feuille de paie.

Je terminerai par une question : comment redresser les finances publiques ? La première chose à faire est de garantir la sincérité budgétaire et d’ériger en principe constitutionnel l'interdiction de tout déficit de fonctionnement, telle qu’elle s’applique déjà aux collectivités locales. Je rappelle que le déficit de fonctionnement est encore de 23 milliards dans le budget de l’État pour 2007.

La seconde est de donner priorité à la réduction de la dépense publique. Si on ne le fait pas, il n’y aura plus de politique publique possible.

Il convient en troisième lieu d’améliorer l'efficacité de la dépense publique, ce qui passe par quatre grandes réformes structurelles, à commencer par celle des retraites. Disons la vérité aux Français et rappelons-leur qu'ils devront travailler plus longtemps s'ils veulent maintenir leur niveau de prestation. En cela, la loi Fillon était une bonne loi, mais elle n'est pas allée assez loin. La seule véritable solution, à terme, est l'instauration d'un régime unique pour tous les salariés, du public comme du privé. Il faut mettre en extinction tous les régimes spéciaux et laisser à chacun une plus grande liberté de choix pour la date de départ à la retraite.

Une réforme de l'assurance maladie est tout aussi nécessaire. Arrêtons de socialiser toutes les dépenses, afin de préserver le régime obligatoire pour les plus modestes, et responsabilisons nos concitoyens. Impliquons les régions dans une meilleure coordination des soins et réorganisons les structures hospitalières !

S’agissant de la décentralisation, autre réforme à poursuivre, il convient de repenser l'articulation entre régions et départements ainsi que celle entre les communes et les intercommunalités.

Enfin, la réforme de l'État devrait aboutir, dans chaque service, à une hausse de productivité de 2 % par an.

En conclusion, Monsieur le ministre, j’aimerais ne pas avoir à vous dire ce que j’ai à vous dire, à savoir que l’on n'est pas courageux la dernière année d’une législature et que si votre budget est moins mauvais que celui de l’an dernier, il n’est toujours pas à la hauteur des problèmes. Alors que la situation des finances publiques est grave, le Gouvernement a présenté un projet de loi de finances et, dans une moindre mesure, un projet de loi de financement de la sécurité sociale qui tentent de dissimuler l'excès de la hausse des dépenses publiques. Ces deux textes traduisent un choix à court terme. C’est pourquoi le groupe UDF ne les votera pas, en l’état. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF)

M. Jean-Pierre Brard - Nous venons d’entendre M. de Courson faire des additions, scruter la sous-compensation de ceci et la sous-évaluation de cela ! Il a établi savamment l’insincérité de votre budget, Monsieur le ministre, mais où était la critique des privilèges dans son propos ? Nulle part, car bien entendu le groupe UDF ne les remet pas en cause !

Puisque M. de Courson vient de nous parler des retraites, continuons ! Je vois que la droite fait maintenant partir les gens très tôt à la retraite, et dans des conditions avantageuses ! C’est ainsi que M. Antoine Zacharias percevra 2,1 millions d’euros par an, sans compter sa prime de 12,6 millions d’euros. M. Daniel Bernard devra, lui, se contenter, le pauvre, de 1,25 million d’euros de retraite par an, avec, il est vrai, 29 millions de retraite surcomplémentaire ! De cela, ni M. Copé, ni M. de Courson ne parlent ! Pourtant, c’est le résultat de leur politique : toujours plus pour les riches, la misère pour ceux qui ont travaillé toute leur vie !

M. Hervé Morin - C’est à peine caricatural.

M. Jean-Pierre Brard - Les deux exemples que j’ai donnés sont-ils vrais ou non, Monsieur Morin ? Où était la dénonciation de cette politique dans le propos très langue de bois de M. de Courson ?

On a pu lire récemment, à la une d’un grand quotidien du soir, que Robert Polet, le PDG de Gucci Group, de passage à Paris à l'occasion des défilés de mode, se félicitait de l'excellente santé du marché mondial du luxe, estimé aujourd'hui à 180 milliards de dollars. « Il y a de plus en plus de riches dans le monde. Et les riches sont de plus en plus riches », se réjouit l'ex-président de la division crèmes glacées et surgelés d'Unilever (Rires sur divers bancs), que François-Henri Pinault débaucha en 2004 pour relancer l'activité luxe de PPR, alors en crise.

À l'évidence, Monsieur le ministre, vous avez une bonne part de responsabilité dans cet enrichissement, puisque vous pratiquez, depuis le début de cette législature, la redistribution inversée, qui consiste à prendre aux pauvres pour donner aux riches et leur permettre ainsi de devenir plus riches.

En témoigne notamment l'envolée de l'impôt de solidarité sur la fortune, n'en déplaise à nos collègues de droite qui voudraient le voir disparaître au plus vite et qui s'emploient à le vider de sa substance année après année. L'ISF devrait rapporter, en 2007, 5,7 % de plus que les recettes annoncées pour cette année…

M. Philippe Auberger - C’est bien la preuve que nous ne le vidons pas de sa substance !

M. Jean-Pierre Brard - Les recettes de l’ISF ont connu une belle progression ces dernières années : 13,3 % de plus en 2004, 16,8 % en 2005, 18,8 % en 2006, avec un nombre d'assujettis proche de 450 000. M. Auberger trouve que c’est la preuve qu’il y a de plus en plus de justice. Permettez-moi de lui répondre par ce graphique qui montre que le nombre de érémistes augmente dès que la droite revient au pouvoir. D’un côté, il y a de plus en plus de riches, et de plus en plus riches, de l’autre de plus en plus de pauvres ! Voilà la justice selon M. Raffarin ou M. de Villepin !

La droite fait donc des efforts considérables pour alléger l’ISF. Il suffit pour s’en convaincre de regarder la liste des exonérations figurant dans le fascicule « voies et moyens » : exonération des biens professionnels, pour un montant non communiqué ; exonération des placements financiers des personnes physiques qui n'ont pas en France de domicile fiscal, pour un montant de 75 millions et 4 500 bénéficiaires, soit un cadeau royal de 16 650 euros par bénéficiaire et par an ! Il est dommage que nous ne puissions pas demander aux personnes qui sont dans les tribunes ce qu’elles en pensent… Citons aussi l’exonération partielle des bois et forêts et des parts d'intérêts détenues dans un groupement forestier ; l’exonération des objets d'antiquité, d'art ou de collection, des droits de propriété littéraire et artistique et des droits de propriété industrielle, pour un montant non communiqué ; l’exonération des titres reçus en contrepartie de la souscription au capital de certaines petites et moyennes entreprises ; l’exonération partielle des parts ou actions de sociétés objets d'un engagement collectif de conservation ; l’exonération partielle des titres détenus par les salariés et mandataires sociaux…

Mais le summum des cadeaux est atteint avec le bouclier fiscal, votre dernière trouvaille, qui est essentiellement destiné à protéger les riches de l'impôt de solidarité sur la fortune. Cette douceur bénéficiera à hauteur de 300 millions aux plus fortunés, procurant aux 14 000 ménages les plus riches une réduction d'impôt de 18 000 euros par an, en moyenne ! Je me demande là encore ce qu’en pense notre assistance muette, qu’il s’agisse du public des tribunes ou de ceux qui nous regardent à la télévision…

M. Philippe Auberger – C’est affligeant !

M. Jean-Claude Sandrier – Non, c’est vrai !

M. Jean-Pierre Brard – Je vous enlève votre cache-sexe, c’est ce que vous ne supportez pas ! (Mouvements divers)

En matière d’impôt sur le revenu, le plus juste de tous puisqu’il est progressif, les réductions substantielles que vous avez décidées bénéficient principalement aux plus riches. Je me dois de préciser, à l’attention de nos collègues du groupe UMP, qui pourraient finir par croire ce que dit le Gouvernement, que la France est l’un des pays développés dans lesquels l’impôt sur le revenu est le moins élevé. Il ne représente que 3,2 % du PIB, contre 10 % en moyenne dans l’Union européenne. Voilà quelle est la réalité ! C’est donc une grande injustice de poursuivre les baisses et il faudra, au contraire, revenir sur toutes les exonérations. Le « charcutage » du barème opéré l’an dernier était habile, puisque presque tous les contribuables constateront une baisse de leur impôt sur le revenu. Seulement, la baisse ne sera pas uniforme…

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l’État Elle profitera d’abord aux plus modestes.

M. Jean-Pierre Brard – Allons donc ! J’ai ici un graphique qui le montre, le gain des plus modestes aura l’épaisseur d’un trait ! Pour un revenu annuel de 31 503 euros, le cadeau du Gouvernement s’élèvera à 146 euros – soit 0,4 % – et, pour les couches moyennes, celles dont vous parlez tant mais auxquelles vous ne pensez jamais (Protestations sur les bancs du groupe UMP), pour les ménages dont le revenu atteint 82 161 euros (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), ce cadeau sera de 188 euros, soit 0,2 %…

M. Hervé Mariton – Quelle singulière conception des classes moyennes !

M. Jean-Pierre Brard – En revanche, pour les ménages dont le revenu s’élève à 132 000 euros, le Gouvernement porte ses largesses à 908 euros. Et ceux qui gagnent 350 000 euros, ceux auxquels vous pensez jour et nuit (Protestations sur les bancs du groupe UMP), ils bénéficieront d’un cadeau de 6 807 euros – soit 2 % ! Voilà la justice fiscale telle que vous la pratiquez, grâce à laquelle les plus modestes bénéficieront d’une baisse mirifique de leur impôt sur le revenu de 0,2 ou 0,4 % !

M. Hervé Novelli – Démagogie !

M. Hervé Mariton – C’est n’importe quoi !

M. Jean-Pierre Brard – Ce sont vos chiffres ! Mais, contrairement au ministre et à M. de Courson, je ne pratique pas la langue de bois ! Je parle en euros, de ces euros que l’on a en poche pour acheter sa baguette.

Pour comprendre comment fonctionne, au profit des plus aisés, le subterfuge gouvernemental, il suffit de se reporter à un article paru le 27 septembre 2006 dans le quotidien La Tribune, journal pourtant peu suspect de gauchisme. On y lit que « les contribuables déclarant d'importants revenus et pour lesquels l'ancien abattement de 20 % était plafonné sont susceptibles d'être les véritables gagnants de la réforme. Ainsi, pour tout revenu salarial ou assimilé supérieur à 120 100 euros, le contribuable constatera une diminution de 20 % de son impôt sur la fraction du revenu supérieur à cette somme ». S’agit-il là de vos couches moyennes, ces salariés qui perçoivent des revenus supérieurs à 120 100 euros, soit quelque 800 000 francs ? Vous en restez coi, et je vous comprends !

Notre rapporteur général avait d'ailleurs indiqué, dès l'an dernier, que 10 % des foyers bénéficieraient de près de 63 % du coût de la réforme, soit 2,28 milliards et 1 % en auraient 30 %.

Comment justifier de tels cadeaux fiscaux alors que le déficit des finances publiques reste très élevé, que nos services publics manquent de moyens et que la pauvreté progresse, comme en atteste le nombre croissant de érémistes, qui s'élève parallèlement à celui du nombre des assujettis à l'impôt de solidarité sur la fortune. Vous écartelez la société française, avec des riches toujours plus riches et des pauvres toujours plus nombreux.

Une des justifications données à la baisse des impôts est qu’un niveau d’imposition attractif est nécessaire pour attirer cadres supérieurs et entreprises. C’est faux, et vous le savez, puisque la France est déjà très attractive. Ce n’est là qu’un alibi destiné à justifier vos cadeaux. Et comme vous vous êtes trouvés incapables, malgré vos rodomontades, de baisser le niveau des prélèvements obligatoires, les cadeaux consentis aux plus aisés ont dû être compensés par des prélèvements accrus sur les plus modestes. Et c’est ainsi que l’on a cumulé la hausse de la CSG, la cotisation de retraite additionnelle des fonctionnaires, l’augmentation des taxes sur le tabac et les hausses des cotisations de retraite. En outre, la TVA, l’impôt le plus injuste, va rapporter 1,7 milliard de plus que ce qui était prévu dans la loi de finances initiale pour 2006.

Comme le notait l’économiste Mathieu Plane dans La Tribune, le 25 septembre dernier, les baisses d’impôts représentent 0,35 point de PIB sur cinq ans, ce qui n'est « quasiment rien ». Il ajoutait que « les modifications de la fiscalité des ménages ont eu très peu d'effet sur la croissance, les baisses d'impôts ayant été en grande partie compensées par les hausses de prélèvements sociaux et de fiscalité locale ». Autant dire que la politique fiscale que vous menez est purement idéologique, et qu’il s’agit de venir à la rescousse des plus aisés dont vous remplissez les poches en ponctionnant le porte-monnaie du plus grand nombre.

Bien entendu, dans ces cadeaux aux nantis, les entreprises ne sont pas oubliées, qu’il s’agisse des allégements de charges ou du plafonnement de la taxe professionnelle. Ces mesures ont eu des effets remarquables sur les profits, sans empêcher les délocalisations. Les bilans sont florissants, et les actionnaires sont à la fête ! Je vous épargnerai l’énumération…

M. Hervé Novelli – Merci.

M. Jean-Pierre Brard – Je citerai seulement Mme Bettencourt, M. Arnault, M. Pinault et ces Wendel menés par le baron Seillière…

Mme la Présidente – Je vous prie de conclure.

M. Jean-Pierre Brard – J’y viens, Madame la présidente, mais je ne le ferai pas sans avoir exposé les résultats de cette politique sur les missions dont les crédits baissent. Ainsi de l’action extérieure de l'État, des anciens combattants, de la culture…

Mme la Présidente – Vous aurez l’occasion de détailler votre propos au cours du débat. Veuillez conclure, Monsieur Brard.

M. Jean-Pierre Brard – Je m’y emploie, Madame la présidente. Cette loi de finances ne comportant pas de réelles nouveautés, j’ai voulu faire un bref bilan. J’observe que le Gouvernement a appauvri la France et bradé le patrimoine national, qu’il s’agisse d’Air France, de la Snecma ou des autoroutes. Demain, il faudra redresser tous cela par une politique de justice fiscale orientée vers l’emploi et une meilleure répartition de la richesse nationale (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains).

Mme la Présidente – Je tiens à souligner, Monsieur Brard, que chacun peut s’intéresser aux travaux de l'Assemblée nationale, qu’il siège dans les tribunes du public ou qu’il regarde la retransmission de nos débats à la télévision, sans avoir à produire son avis d’imposition (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean-Claude Sandrier – Qu’est-ce que ça veut dire ?

M. le Ministre délégué – C’était en effet un racolage regrettable.

M. Hervé Mariton – Oui, Monsieur Migaud, l’ensemble du groupe UMP va défendre avec conviction le projet de budget qui nous est proposé…

M. Didier Migaud – Vraiment ? Il est troublant que vous vous sentiez tenu de le marteler !

M. Hervé Mariton – Il est intéressant, au moment où notre société s’interroge sur le devenir des classes intermédiaires, que notre collègue Brard considère un ménage percevant 80 000 euros de revenu annuel comme appartenant aux classes moyennes ! Cela témoigne de l’incapacité du parti communiste – et l’ensemble de la gauche – à percevoir la réalité de notre pays. À l’évidence, si l’on retient des niveaux de revenu plus représentatifs de l’ensemble de la population, on constate que la réforme fiscale qui se poursuit cette année aura un effet sensible sur le pouvoir d’achat des Français.

Le projet de loi de finances pour 2007 est crédible dans son contexte. M. Brard a cité l’article publié dans la Tribune par Mathieu Plane, économiste à l’OFCE. Puisque notre collègue semble en faire son économiste de référence, je lui signale que, questionné dans la Croix sur le crédit à accorder à ce budget, M. Plane a déclaré qu’il était tout à fait crédible parce qu’il avait été établi dans un contexte économique maîtrisé, de reprise de la croissance et de l’emploi.

Tout naturellement, la maîtrise des fondamentaux conduit à faire des prévisions raisonnables. Que n’avons-nous entendu, au cours des dernières années, au sujet du caractère prétendument fantaisiste de nos prévisions ! La réalité, c’est qu’en 2006, non seulement les objectifs inscrits en loi de finances ont été tenus, mais encore peut-on considérer qu’ils étaient trop modestes. Quant à ceux qui craignaient que la perspective des échéances électorales de 2007 donne lieu à un excès de volontarisme, qu’ils se rassurent. Il faut faire confiance aux faits : les engagements pris au titre de 2006 seront tenus ; en 2007, ils le seront aussi car nos prévisions sont solides et raisonnables.

On peut comprendre que nos collègues socialistes aient quelques craintes à ce sujet dans la mesure où eux-mêmes, en 2002, avaient bâti, l’ancien Rapporteur général s’en souvient sans doute, un projet de budget fondé sur des prévisions totalement irréalistes. Alors qu’ils avaient estimé le déficit à 30 milliards, la réalité s’établissant en exécution à 50 milliards !

M. Jean-Louis Idiart – Qui a chargé la barque lors du collectif ?

M. Hervé Mariton – Crédible dans son contexte, le projet de loi de finances pour 2007 sera efficace. D’abord, parce qu’il est en phase avec la vie économique de notre pays, alors que tant de budgets, dans le passé, étaient à contretemps. Trop longtemps, la politique budgétaire a reposé sur un choix binaire : tout pour l’offre ou tout pour la demande. Prenant toute la mesure de la situation économique actuelle, le présent budget réalise un bon équilibre entre les mesures destinées à soutenir l’offre – politique de l’emploi, soutien aux « gazelles », etc. – et celles vouées à la vitalité de la demande – augmentation de la PPE, amélioration du pouvoir d’achat des ménages…

Efficace, ce budget le sera aussi en démontrant que la politique de l’emploi peut faire durablement reculer le chômage, non parce que l’on aurait trouvé une recette miraculeuse mais parce que l’on a su faire preuve, quatre années durant, d’une détermination politique sans faille, dont il convient d’amplifier encore les effets favorables. Soyez sûrs, chers collègues de l’opposition, que nous ferons tout pour ne pas vous donner l’occasion de les gâcher.

Je salue au passage la détermination du Gouvernement à respecter scrupuleusement les lois de programme et à donner la priorité aux investissements indispensables dans la recherche et dans les infrastructures.

Crédible dans son contexte, efficace, ce projet de budget est respectueux des citoyens comme des entreprises.

Tourné vers les entreprises, c’est un budget de compétitivité. Il contient des mesures phares en faveur des entreprises les plus dynamiques et il poursuit, grâce à l’engagement personnel du ministre délégué au budget, l’indispensable réforme de la taxe professionnelle. Merci, Monsieur Copé, de n’avoir pas cédé aux pressions de ceux qui voulaient différer la réforme. Vous avez tenu bon et nos entrepreneurs vous en savent gré !

Respectueux des citoyens, ce projet l’est assurément. La réforme de l’IR, n’en déplaise à ceux qui la dénigrent en prenant des exemples caricaturaux, fait partie des initiatives heureuses de ce gouvernement pour améliorer le pouvoir d’achat des ménages. Compte tenu du niveau de la contrainte, on ne peut pas faire de miracle sur le quotient, et l’outil fiscal constitue par conséquent l’une des meilleures voies pour améliorer le pouvoir d’achat des Français. La réforme de l’IR et l’augmentation de la PPE – dont la gestion peut être encore améliorée – représentent les meilleures réponses possibles à la nécessité d’augmenter le pouvoir d’achat de l’ensemble des ménages.

Respectueux des intérêts supérieurs du pays, ce projet de loi de finances l’est encore en ce qu’il concourt à la maîtrise des prélèvements obligatoires. Stabilisé à 43,7% en 2007 – contre 44% cette année –, le TPO reste sans doute excessif. Las, si la part de l’État a diminué de manière très significative, celle des collectivités a littéralement explosé, et, dans l’exécution de la prochaine loi de finances, il faudra faire preuve de beaucoup de maîtrise pour ne pas le laisser dériver. À cet égard, je salue la prudence – peut-être excessive – du Gouvernement dans son anticipation de l’élasticité des recettes à la croissance. Monsieur le ministre, vous avez fait été trop modeste…

M. le Ministre délégué – C’est bien la première fois qu’on me fait ce reproche !

M. Hervé Mariton – Dans la mesure où tout surcroît de recettes doit être prioritairement affecté au désendettement, il faudra être très attentif à la bonne exécution du budget pour 2007, de manière à ce que l’objectif de maîtrise des prélèvements obligatoires ne soit pas perdu de vue.

Comme je l’ai déjà dit, l’activisme fiscal des régions socialistes fait que les collectivités territoriales n’ont que trop contribué au maintien d’un TPO excessif. À cet égard, la réforme de la TP introduira un élément de modération particulièrement bienvenu pour accompagner l’effort de maîtrise de l’État.

Crédible, efficace, respectueux, ce budget est aussi vertueux, notamment pour ce qui concerne le pilotage des dépenses sociales.

N’en déplaise aux Cassandre de l’opposition qui se félicitaient de l’échec programmé de la réforme de l’assurance maladie, une baisse significative des dépenses est intervenue et ce budget repose donc sur deux réussites majeures : la maîtrise des déficits et la baisse de la dépense. Acceptée dans les esprits et traduite en actes, la maîtrise des dépenses constitue une réalité incontestable qui ne saurait donner lieu à une quelconque polémique.

Bien entendu, des ajustements restent nécessaires, notamment pour ce qui concerne les effectifs de la fonction publique et il faut rester libre de tout a priori idéologique. Avec le temps, les Français partagent l’objectif et cela constitue un espoir d’amélioration durable de la situation de nos comptes publics, pour aujourd’hui comme pour demain.

Du fait de la maîtrise des déficits, de la dette et des dépenses, l’on se rapproche du déficit stabilisant et l’on peut raisonnablement envisager que l’objectif d’un budget de l’État en équilibre avant la fin de la décennie ne soit plus hors de portée.

Pour bien mesurer l’ampleur des efforts accomplis, il serait souhaitable de mettre au point une norme parlementaire permettant de faire des comparaisons fiables, à périmètre stabilisé, d’une année sur l’autre.

L’objectif que nous pouvons tous partager, c’est de ne pas créer de créance supplémentaire pour les générations futures. Sur la dette, beaucoup a été fait mais plusieurs chantiers restent ouverts. Je pense notamment au passage aux normes IFRS pour les entreprises publiques. La question de l’impact des retraites de la SNCF se pose également, de même que celle du service annexe de la dette ferroviaire.

Que de chemin parcouru, mais aussi que d’efforts à poursuivre ! Nous voulons en effet que le rétablissement des finances publiques soit durable, et que ce budget soit effectivement mis en œuvre. De leur côté, les socialistes se proposent d’augmenter les impôts – tous les candidats le demandent ! C’est sans doute une question de génétique, comme le suggère le rapporteur général… En tout cas, c’est écrit et signé. Nos concitoyens doivent le savoir et s’en prémunir !

Ces réflexions ne nous dispensent pas, cependant, de nous interroger sur les allégements de charges sociales, qui sont justifiés par leur utilité pour nos entreprises et l’emploi. Cela étant, le débat sur la barémisation doit se poursuivre si nous voulons rendre plus efficace et plus lisible ce dispositif. Interrogeons-nous également sur les contreparties demandées aux entreprises : prenons garde de ne pas faire payer les allégements de charges plusieurs fois, ce qui pénaliserait gravement notre économie ! Il est question d’augmentation des rémunérations et de soutien à l’innovation, mais n’oublions pas que les entreprises doivent également payer l’addition des 35 heures ! Si l’on veut mettre quelque chose en regard des allégements de charges, pensons d’abord aux 35 heures…

J’ajoute que nous devrons aussi envisager de réformer la PPE. C’est certes un bon outil, mais faisons attention à ses imperfections ! Gardons-en les avantages, sans stratifier davantage le dispositif, ni accentuer les défauts actuels – le ciblage est trop large et n’incite pas assez à la reprise d’un l’emploi. Nous devrons enfin nous pencher sur la fiscalité de l’énergie et sur les liens qui existent entre la politique fiscale et l’environnement.

Il n’en reste pas moins que nos efforts doivent être poursuivis. Ne gâchons pas ce que nous avons entrepris depuis quatre ans – c’est la responsabilité de la majorité à l’égard du Gouvernement et de tous nos concitoyens ! Nous devons continuer à faire bouger l’État, ce qui est indissociable de l’effort d’assainissement des finances publiques. Il ne peut y avoir, en effet, de rétablissement de nos finances si le sens de cette démarche n’est pas compris et partagé par nos concitoyens, ce qui est impossible sans réforme de l’État ! À l’inverse, il ne peut y avoir de réforme dans notre pays si les finances publiques ne sont pas durablement assainies…

Parce que nous souhaitons que le budget de l’État soit mis au service de nos concitoyens, nous soutiendrons la première partie de cette loi de finances. Le Gouvernement et la majorité ont préparé un budget qui vise à faire fructifier les talents dans notre pays. Nous y travaillons depuis quatre ans, et nous nous y employons encore cette année. C’est là une belle entreprise qu’il nous faut continuer ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Dosière remplace Mme Mignon au fauteuil présidentiel.
PRÉSIDENCE de M. René DOSIÈRE
vice-président

M. Jean-Louis Dumont – Chacun connaît les exceptionnelles qualités de notre collègue Jean-Pierre Balligand, qui regrette de ne pas pouvoir s’exprimer aujourd’hui à cette tribune. Il m’a chargé de le suppléer, ce que je ferai dans la mesure de mes propres talents.

On nous soumet un budget de dupes. Comme toutes les lois de finances adoptées en fin de législature, ce texte porte la marque de sa temporalité particulière. Certes, il sera amendé par une loi de finances rectificative si une nouvelle majorité émerge des urnes l’an prochain, mais nous ne pourrons modifier toutes ses dispositions. Nous risquons donc de traîner ce mauvais budget comme un boulet !

Comme tous les budgets qui ont été soumis à la représentation nationale depuis 2003, celui-ci illustre à nouveau votre conception particulière de la justice fiscale et de l'orthodoxie budgétaire. C’est même un exemple sans précédent d’iniquité sociale et d'insincérité comptable !

Ses deux principales dispositions – refonte du barème de l'impôt sur le revenu et mise en place d'un « bouclier fiscal » – ont été préfigurées par le projet de loi de finances pour 2006, comme le reconnaissait du reste Gilles Carrez en 2005 : « Les recettes de l'année 2007 sont déjà préemptées dès aujourd'hui à hauteur de 5 milliards d'euros ». Et voilà que vous décidez d'anticiper au 1er janvier 2007 la diminution de 8 % du tiers provisionnel et celle des mensualités de l'impôt sur le revenu, comme si cela ne suffisait pas ! J’imagine que vous n’avez pas la moindre arrière-pensée électoraliste….

Je rappellerai seulement, avec Jean-Pierre Balligand, que le bouclier fiscal était un engagement de campagne de M. Sarkozy, ex-ministre de l'économie et surtout maire de Neuilly, la ville dont le taux de foyers imposés à l'IR est le plus élevé de France et qui compte le plus fort pourcentage de contribuables assujettis à l'impôt de solidarité sur la fortune – 20 % de sa population en 2005 !

J’ajoute que votre plafonnement est une véritable imposture : il ne protégera pas le contribuable lambda, mais seulement une minorité de redevables de l'ISF dont les conseillers fiscaux ont échoué à faire diminuer l'impôt ! 10 000 foyers fiscaux assujettis à l'ISF se partageront 250 des 360 millions que coûtera cette réforme, soit 70 % du montant total... En dépit de vos dénégations, c'est à un démantèlement de l'impôt sur le patrimoine que vous vous êtes attelés, sous le prétexte fallacieux de protéger l'ensemble des contribuables !

Une telle contradiction entre vos discours et vos actes se retrouve, hélas, dans l'ensemble de la politique fiscale que vous avez menée depuis 2002. Le ministre délégué au budget se targue d'avoir réalisé aux deux tiers les promesses du candidat Chirac, qui avait annoncé une baisse de 30 % de l’impôt sur le revenu en cinq ans. Le climat économique n'était certes pas propice à ce genre de diminutions, contrairement à la période 1997-2002, où la croissance était forte, mais on pouvait au moins espérer une baisse des prélèvements obligatoires pour l’ensemble des Français…

Or, nous n’avons rien vu de tel ! Les prélèvements sont passés de 43,1 % à 44 % du PIB depuis 2002, soit 17 milliards d'euros supplémentaires ! Vos cadeaux fiscaux en faveur de certains contribuables – 10 milliards d’euros sur l’ensemble de la législature – n’ont donc fait que cacher un accroissement des prélèvements obligatoires pour tous !

Si l’on additionne le démantèlement de l'ISF, la baisse de la progressivité de l'impôt sur le revenu, la diminution du nombre de tranches d'imposition et la réduction du taux marginal maximal, 63 % du coût de la réforme profiteront en 2007 aux 10 % des Français les plus riches ! À cela s’ajoute la multiplication des niches fiscales sous la pression des lobbies et en vertu de petits calculs préélectoraux… Certains parlementaires de la majorité, notamment le président de la commission des finances, s'étaient pourtant engagés à mettre un terme à cette pratique !

En fin de compte, c'est à une amplification colossale des inégalités de revenus que vous aurez œuvré depuis 2002 ! Le bilan de la politique fiscale menée en cinq ans par la majorité UMP est en effet très simple : elle s’est traduite par une légère perte de revenus pour un salarié gagnant le salaire médian, contre un gain de 4 659 euros pour un salarié gagnant 20 fois le SMIC ! Et la différence de traitement est encore plus flagrante pour un couple de salariés ayant deux enfants : pour une amélioration de la situation très modeste au niveau du SMIC, vos réformes ont engendré une perte nette au niveau du salaire médian et un gain considérable – 10 992 euros – pour un revenu égal à 20 fois le SMIC !

Tout le monde pâtit en revanche de la hausse des cotisations sociales, de la suppression du lundi de Pentecôte, de l’augmentation du coût de la santé et de la hausse des prix de toutes les énergies... Certes, chacun entend déjà l'argument du Gouvernement : tout viendrait de la hausse des impôts locaux ! Une fois encore, vous allez faire des collectivités locales un bouc émissaire, un nouvel âne des Animaux malades de la peste...

Je rappellerai seulement que les prélèvements des collectivités représentent 5,6 % du PIB, contre 16 % pour l'État et 21 % pour la sécurité sociale… Sur la période 2002-2004, l'augmentation des prélèvements locaux s’explique par des transferts de fiscalité d’un montant égal à 0,4 point du PIB, notamment du fait de la cession d’une partie de la TIPP aux départements. N’oublions pas non plus que les administrations publiques locales sont les principales contributrices à l'investissement public – 69 % du total en 2005 – et que leur investissement a progressé de 34 % depuis 2003, et de 7 % cette année ! Les dépenses des collectivités sont enfin contraintes par des causes exogènes, qui résultent largement des réformes de Jean-Pierre Raffarin, et qui expliquent jusqu’à 90 % des hausses de dépenses intervenues dans les départements entre 2004 et 2005 !

J’en viens à la surestimation du taux de croissance, autre constante de votre politique budgétaire. Depuis 2002, la majorité a pris la très mauvaise habitude de ne jamais se fier au consensus des économistes, et de surestimer systématiquement la croissance à venir. Le présent budget ne déroge pas à la règle : la fourchette retenue pour 2007 – entre 2 % et 2,5 % – dépasse d'environ un demi point les prévisions communément admises !

Le contexte mondial est pourtant peu porteur, avec la remontée des taux d’intérêt, le ralentissement du prix des matières premières, la rétractation du marché de l’immobilier outre-atlantique et des marchés financiers ultrasensibles. L’année 2007 se fera donc sur le fil du rasoir et n’offre aucune raison de se laisser aller à des débordements d’optimisme.

Pour ce qui est des fondamentaux du budget, il est désormais clair pour tout le monde que vous êtes dans un processus d’affichage. La vertu que vous revendiquez en matière de progression des dépenses n’est que petite vertu…

M. Jean-Pierre Brard – Celle des vieilles prudes qui n’ont plus que des espoirs !

M. Jean-Louis Dumont – J’espère que cette interruption n’est pas imputée sur mon temps de parole !

M. le Président – Un certain nombre d’orateurs socialistes ayant renoncé à leur temps de parole, vous aurez l’indulgence de la présidence. Mais ce n’est pas un motif pour vous laisser interrompre !

M. Jean-Louis Dumont – Après la soulte de 7,7 milliards versée par EDF en 2005 et la débudgétisation de près de 19 milliards de dégrèvements de cotisations sociales patronales sur les bas salaires cette année, assortie de plus de 17 milliards de privatisations, les astuces abondent encore pour l'exercice à venir : subventions transformées en recettes affectées, dépenses sous-budgétées, charges sociales trop peu compensées, investissements confiés à des opérateurs non étatiques... Le jeu consiste à restreindre le périmètre du budget de l'État pour améliorer son solde apparent et afficher à quelques mois des prochaines échéances une progression des dépenses convenable. La manipulation est telle que le rapporteur général lui-même s’est senti contraint de corriger le chiffre de la progression des dépenses du budget général de 0,8 % à un chiffre un peu moins irréaliste de 1,7 % – et encore n'inclut-il pas toutes les charges à prendre en compte. Ainsi par exemple si les 2,9 milliards de compensations nouvelles d’exonérations de charges sur les bas salaires étaient entièrement intégrés dans le périmètre, et non la seule part relative aux entreprises de moins de 20 salariés, la progression des dépenses atteindrait au bas mot 2,5 % !

Des doutes sur la sincérité de ce projet de loi de finances ont en tout cas été émis au plus haut niveau de la commission des finances : Gilles Carrez l’a reconnu sans ménagement dans son rapport et Pierre Méhaignerie l’a fait savoir à sa manière en dénonçant des « soultes artificielles ». Et il faut encore attendre le rapport de la Cour des comptes... L'an dernier, Jean-Pierre Balligand appelait déjà le Gouvernement à un exercice de vérité et l'alertait contre la crise de confiance que son déni de transparence alimentait. Cette année, les mêmes questions se posent, mais on peut les assortir d’un bilan quasi-définitif de vos choix budgétaires depuis juin 2002 : accroissement de la pauvreté, explosion des inégalités, creusement abyssal de la dette... Au final, vous donnez aux Français encore plus de raisons d'espérer un changement de majorité en juin prochain (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Je voudrais maintenant revenir sur quelques articles du projet de loi. Ainsi, l’article 5 traite de la réduction d’impôt au titre de la télédéclaration – qui est une dématérialisation de la déclaration. Or, une récente loi envisage la dématérialisation des feuilles de paye. Celle-ci ne pourra être mise en œuvre que par l’incitation, car elle soulève de nombreuses questions. La fiche de paye est en effet un élément extrêmement important, surtout pour les petits revenus, dans diverses démarches que peut accomplir un salarié, notamment pour demander un prêt. La fiche de paye dématérialisée restera-t-elle opposable ?

M. le Ministre délégué – Bien sûr !

M. Jean-Louis Dumont – Quelles mesures seront prises pour sécuriser le système, à commencer par le coffre-fort électronique ? Il faudra se montrer très pédagogique en cette matière, mais dans ce cas, pourquoi ne pas accorder le même crédit d’impôt que pour la télédéclaration à ceux des salariés qui accepteraient la dématérialisation de leur fiche de paye ? De vos réponses dépendra la mise en place d’une dynamique.

Parmi les recettes, on peut noter à l’article 11 un prélèvement sur la Caisse des dépôts et consignations au titre de la plus-value réalisée du fait de sa séparation du groupe des caisses d’épargne. Je suppose que cette évaluation tient compte du transfert d’un patrimoine de logements locatifs sociaux à statut HLM de la caisse d’épargne à une des filiales de la Caisse des dépôts et consignations, la société nationale immobilière ! Ce qui, mais ce n’est qu’une parenthèse, fait apparaître le nom de Gestrim, un des éléments forts de la politique de vente à la découpe… Or, la valorisation de ces logements ne figure nulle part. Mieux : vous mentionnez « environ 40 000 logements ». Comment pouvez-vous vous montrer aussi flou à propos du patrimoine de la nation, et a fortiori d’un secteur, les HLM, qui relève de la loi ? Il ne faut pas chercher bien loin pour se souvenir que certaine personne a emprunté de l’argent à une filiale du Crédit lyonnais en se fondant sur le fait qu’elle était propriétaire de 10 000 logements… Il s’agit bel et bien de notre histoire financière et de dettes qui sont encore pendantes devant les tribunaux !

Que la caisse nationale des caisses d’épargne passe un accord avec la Caisse des dépôts et consignations : quoi de plus normal, s’il y a divorce ? Mais il manque une évaluation transparente et sincère, obéissant aux règles de la loi républicaine. Et d’autres zones d’ombre se remarquent : ainsi, le rapporteur général mentionne un gain, qui peut sans doute être expliqué par le solde de 2006, mais ce n’est pas précisé ! L’article 11 mérite donc sans aucun doute de s’y attarder. Les incertitudes concernant les relations financières entre le ministère du budget et un organisme comme la Caisse des dépôts ne peuvent être qu’inquiétantes !

Les articles 13, 14 et 15, qui concernent les prélèvements sur le budget de l’État au profit des collectivités territoriales, soulèvent manifestement beaucoup d’interrogations chez les présidents de conseils généraux et régionaux quant à la fameuse compensation financière « à l’euro près » que vous défendez avec tant de vigueur. Les documents qui nous sont fournis ne nous éclairent pas complètement, y compris lorsque le ministère attribue une compensation largement supérieure au coût du service transféré, comme c’est déjà arrivé ! Mais il n’y a pas non plus de discussion possible lorsqu’elle est largement inférieure…

M. le Président – Monsieur Dumont, il faut vous orienter vers votre conclusion.

M. Jean-Louis Dumont – Volontiers, mais le temps dont je dispose me permet de le faire à mon rythme.

M. le Président – Je vous fais remarquer…

M. Jean-Louis Dumont – Trois fois dix, cela fait trente minutes !

M. le Président – S’il est tout à fait légitime que vous utilisiez le temps de parole d’un de vos collègues, il est moins convenable de lire intégralement son discours. Ce n’est pas dans nos traditions. Vous ne pouvez donc pas y ajouter la totalité de votre temps de parole. Je vous rappelle en outre que vous passez ainsi devant vos collègues qui sont inscrits et attendent de pouvoir prendre la parole.

M. Jean-Louis Dumont – Il faut pourtant que j’évoque devant M. le ministre la délicate question des débitants de tabac, certes peu nombreux, mais essentiels au maillage en petits commerces de notre territoire. M. Mallié, qui en a rencontré de nombreux, a tenté d’appeler l’attention du Gouvernement sur leur situation. Ne croyez pas, comme jadis avec les débitants d’essence, qu’une indemnité de fin de carrière suffira à calmer les gens : aujourd’hui, certains fonds de commerce ne valent plus rien, et le Gouvernement doit entendre l’appel de toute une profession. En outre, il est temps d’agir face à l’économie parallèle qui se développe dans les zones frontalières, au vu et au su de tous, y compris de certains services de sécurité.

Enfin, l’une de nos collègues a posé cet après-midi une question d’actualité relative à la sécurité sanitaire dans les exploitations agricoles touchées par différentes pollutions – dues à la dioxine dans le Nord-Pas-de-Calais, aux polychlorobiphényles dans la Meuse, à la fièvre catarrhale dans le quart nord-est. Le Gouvernement doit être attentif aux signaux d’alerte que nous envoie une filière aujourd’hui très affectée par une pollution insidieuse ou accidentelle, que les animaux sont les premiers à subir.

MM. Daniel Garrigue et Philippe Auberger – Vous polluez le débat budgétaire en vous écartant ainsi du sujet !

M. Jean-Louis Dumont – Pourtant, on ne peut rester indifférent ! L’absence de solidarité nationale en la matière nous conduira à la catastrophe : en tant qu’élu rural, je ne l’oublie jamais ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. le Président – La parole est à M. Garrigue pour dix minutes.

M. Jean-Pierre Brard – Nous chantera-t-il une ode à la flexicurité ou un requiem à Sarkozy ?

M. Daniel Garrigue – S’il ne mérite peut-être pas tous les superlatifs, ce budget est pourtant celui que nous attendions depuis longtemps : il permet enfin la baisse conjuguée de la dépense, de l’impôt, du déficit et de l’endettement. En outre, il s’inscrit dans une politique volontariste de désendettement qui oriente l’action de l’État.

M. Didier Migaud – C’est mal parti !

M. Daniel Garrigue – Hier, Monsieur Migaud, vous compariez la dette publique de 2001 et celle de 2005. Pourtant, la dette est un immense navire qui vogue au gré du contexte économique : une simple photographie instantanée ne suffit pas, il faut voir quelle est la dynamique engagée.

M. Didier Migaud – Tout à fait d’accord !

M. Daniel Garrigue – Ainsi, en 2001-2002, après des années de croissance au cours desquelles vous aviez constamment ajusté la dépense publique à l’excédent de recettes, nous nous sommes trouvés dans une phase de décélération qui nous a mis à découvert, provoquant ainsi une augmentation de la dette et du déficit.

M. Didier Migaud – Dites plutôt une explosion !

M. Daniel Garrigue – Mais c’était la conséquence de la gestion passée.

M. Didier Migaud – C’est toujours de la faute des autres ! Où est votre esprit de responsabilité ?

M. Daniel Garrigue - En 2006, au contraire, nous utilisons l’excédent pour réduire la dette. Vous semblez d’ailleurs vous étonner que nous utilisions à cette fin certaines recettes non répétables : ce qui importe, ce n’est pas la provenance de l’excédent mais bien la réduction de la dette elle-même. En effet, ce faisant, nous cassons l’effet de boule de neige entre l’endettement et les déficits.

M. Didier Migaud – Vous êtes encore dans cette boule de neige !

M. Daniel Garrigue – L’essentiel est d’avoir le courage politique de le faire : c’est ce qui vous a manqué dans le passé.

Plusieurs députés socialistes – C’est faux !

M. Daniel Garrigue – Cette orientation rejoint une idée de M. le rapporteur général, qui propose d’inscrire l’évolution du solde des dépenses, année après année, dans une loi de programmation des finances publiques. Elle fait également écho aux préoccupations exprimées par l’Union européenne dans le programme de stabilité : la Commission européenne est d’ailleurs plus que satisfaite de notre mise en œuvre du programme national de réforme.

M. le Ministre délégué – C’est vrai !

M. Daniel Garrigue – À ce sujet, Monsieur le ministre, dans quel délai sera rapportée l’action en déficit excessif engagée contre la France ?

La dimension européenne devrait être davantage prise en compte dans notre présentation budgétaire, notamment en matière d’évaluation réciproque de performance et de cohérence entre les actions nationales et leur pendant européen – l’Agence nationale de la recherche et le Conseil européen de la recherche, les pôles de compétitivité et les initiatives technologiques conjointes ou encore les mesures d’innovation dans les PME et le programme d’innovation et de compétitivité, par exemple. Notre démarche dans ce domaine est encore trop franco-française.

J’en viens aux collectivités territoriales : il est essentiel qu’elles contrôlent mieux l’évolution de leurs dépenses.

M. le Rapporteur général – Très bien !

M. Daniel Garrigue – Mais la commission des finances devrait se pencher sur le phénomène de la normalisation : j’ai récemment constaté, à l’occasion de l’extension d’une aérogare, combien il pouvait faire augmenter les coûts – jusqu’à 10 % de plus – entre l’avant-projet sommaire et l’avant-projet définitif. En effet, l’entrée en vigueur de nouvelles règlementations – en matière de climatisation ou d’isolation, par exemple – qui échappent au contrôle des collectivités comme à celui du législateur, entraîne presque automatiquement la hausse des dépenses, donc des prélèvements obligatoires.

Enfin, la fiscalité de l’énergie a plusieurs fois été évoquée : certains regrettent que les taxes pétrolières n’augmentent pas ; à l’inverse, le projet de loi de finances allège celles qui portent sur les biocarburants. Toutefois, la dépendance de l’État et des collectivités à l’égard de la fiscalité pétrolière n’est pas atténuée ; c’est pourtant ce qu’il faudrait faire, compte tenu de l’épuisement programmé des sources fossiles et du nécessaire développement de sources alternatives. Une réflexion d’ensemble sur la fiscalité de l’énergie devrait prendre en compte cet aspect, encore trop négligé.

Au bénéfice de ces observations, comme l’ensemble des élus de la majorité, je ne peux qu’approuver ce projet de budget, que je voterai sans hésitation. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Hervé Novelli – Ce projet de budget est certainement le meilleur de la législature. Je le dis d’autant plus volontiers que j’ai souvent été critique sur les budgets précédents.

Bâti sur des hypothèses de croissance réalistes, il limite le déficit à 41,6 milliards d’euros, soit 1,1 milliard de moins qu’en 2006. Cette réduction peut paraître faible mais ce n’est pas à six mois du premier tour de l’élection présidentielle qu’on peut lancer l’indispensable réforme de l’État, que j’appelle de mes vœux depuis longtemps. Ce projet de budget prévoit tout de même le non-renouvellement de 15 000 postes de fonctionnaires l’an prochain. Je ne fais pas de la suppression de postes dans la fonction publique un dogme, mais force est de constater que le nombre de fonctionnaires s’est considérablement accru ces vingt dernières années. Or, beaucoup de compétences ont dans le même temps été transférées aux collectivités territoriales et l’utilisation de l’informatique s’est généralisée. Pour atteindre les objectifs fixés par les gouvernements, il n’est pas toujours nécessaire, loin de là, de créer un service, une direction, un ministère et, partant, des emplois publics. D’autres solutions existent comme en témoignent les partenariats public-privé. Il serait temps de redessiner les contours de l’État et de revoir ses modes d’intervention.

Avec un déficit contenu à 41,6 milliards, soit 2,5 % du PIB, contre 2,7 % l’an passé, la France devrait respecter de nouveau, pour la deuxième année consécutive, les critères du traité de Maastricht.

Il est un autre sujet de satisfaction, la baisse relative de la dette publique. Celle-ci devrait revenir à 63 % du PIB contre 66 % il y a deux ans. Cette réduction prouve le bien-fondé de la politique d’assainissement menée par l’actuel ministre de l’économie, que j’encourage à tenir bon car le désendettement est la condition sine qua non pour que l’État retrouve des marges de manœuvre pour financer des dépenses productives.

J’insisterai maintenant sur quatre points particuliers. Tout d’abord, je regrette que la recherche privée ne fasse pas l’objet de plus d’attention. Lors du sommet européen de Lisbonne, tous les chefs d’État s’étaient engagés à accroître l’effort de recherche, l’un des seuls moyens de sortir par le haut des dangers de la mondialisation. Les dépenses de recherche de la France représentent 2,2 % du PIB, mais la part des entreprises dans le financement de la recherche-développement est dans notre pays l’une des plus faibles de l’OCDE, représentant seulement 52 % contre 75 % aux États-Unis. Il faudrait donc réfléchir à une extension du crédit d’impôt recherche, élément déterminant pour la politique de recherche.

En deuxième lieu, les allégements de charges coûtent de plus en plus cher : 20,2 milliards d’euros en 2007 contre 18,9 en 2006. Or, leurs effets positifs sont de plus en plus incertains compte tenu de la compétition des coûts induite par la mondialisation. Et ils ne sont pas dénués d’effets pervers : non-revalorisation des salaires, « smicardisation » de la société, spécialisation de notre économie sur des secteurs peu productifs et donc soumis à la concurrence des pays à bas coût de main-d’œuvre. Je regrette qu’aucune mise à plat de ces allégements n’ait été effectuée, en dépit de l’excellent rapport de la Cour des comptes sur le sujet.

Autre sujet qui mérite une attention particulière, celui des régimes spéciaux de retraite. En effet, la dotation de l’État à ces régimes augmentera de 10 % en 2007 et l’État versera l’an prochain 2,7 milliards d’euros pour équilibrer celui de la seule SNCF.

Enfin, l’indispensable réforme de l’État reste à entreprendre, en dépit des efforts méritoires consentis ces dernières années et de votre action, Monsieur le ministre, au travers notamment des audits de modernisation. Nul doute que lorsque ceux-ci auront eu lieu partout, des économies substantielles pourront être réalisées. Le problème jusqu’à présent est qu’on raisonne toujours à contours constants. Or, il faudrait réfléchir à ce que doivent être les contours et les missions d’un État moderne.

Après deux décennies d’errements budgétaires, un projet de loi de finances ne saurait, à lui seul, tout régler ! Il n’empêche que celui-ci figure, compte tenu des circonstances, parmi les meilleurs de la législature. Il en est même sans doute le meilleur. Il poursuit l’indispensable maîtrise des déficits tout en redistribuant les rares marges de manœuvre en faveur de la sécurité et de la justice. Je formule le souhait que les efforts réalisés ne soient pas réduits à néant par de nouvelles politiques aventureuses après les prochaines élections. Quelle vraie réforme si, pour une fois, nos finances publiques n’étaient pas mises sens dessus dessous après des élections nationales ! Gageons au contraire que le mouvement engagé sera amplifié. C’est une partie de l’enjeu des élections de 2007.

En tout état de cause, je voterai ce projet de budget sans état d’âme. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Claude Mathis – Le baron Louis, qui fut, comme chacun le sait, ministre des finances de Louis XVIII et de Louis-Philippe, avait coutume de dire à ces deux monarques : « Faites-nous de la bonne politique et je vous ferai de bonnes finances ».

M. Jean-Pierre Brard – Voilà des références républicaines !

M. Jean-Claude Mathis – Cela signifiait que le budget de l'État n'est rien d'autre que l'organisation de l'argent collecté auprès des créateurs de richesses, entreprises et particuliers. Cela impose de le préparer et de le gérer en fonction de l'intérêt général du pays et non d’intérêts particuliers, voire de hasardeuses préoccupations électorales.

Il convient de définir les besoins prioritaires et de déterminer comment les financer à moindre coût dans un souci d'efficacité maximale.

M. Jean-Pierre Brard – Venez visiter les cités HLM de Montreuil et vous verrez les besoins prioritaires !

M. Jean-Claude Mathis – Comme l'a souligné Thierry Breton, le budget n'est ni un arrêté comptable, ni un compte de résultat. C’est d'abord et avant tout une prévision. C'est aussi un acte politique majeur qui traduit des choix forts en matière de dépenses et de fiscalité. Élaborer un budget, c'est donc se projeter dans l'avenir pour définir de la manière la plus loyale et la plus transparente possible des objectifs de recettes publiques et de déficit. C'est ensuite prendre l'engagement politique de tenir les objectifs de dépenses et de solde.

Ce budget s'inscrit dans la continuité des bons résultats déjà obtenus grâce à la baisse de la dépense. Celle-ci était nécessaire ; elle devra aller plus loin lors des prochains exercices, les audits de modernisation ayant montré qu’il existe encore des réserves de productivité dans les administrations françaises. Je partage sur ce point l'opinion de Pierre Méhaignerie pour qui la France est à la fois « sur-administrée et sous-organisée ». La baisse de la dépense dans le budget 2007 a une valeur toute particulière dans la mesure où elle s'accompagne d'une plus grande efficacité du service public et où le budget permet de financer les engagements pris devant les Français en matière de sécurité, de justice et d’aide publique au développement.

Aux six milliards d’euros de baisse des impôts s’ajoute la revalorisation d’un milliard d’euros de la prime pour l'emploi – contre 500 millions l’an passé. Le déficit va être ramené à 41,6 milliards d’euros, ce qui signifie qu’il aura été réduit de plus de 15 milliards en quatre ans. Après avoir diminué de deux points de PIB en 2006, la dette diminuera encore d'un point en 2007, pour s’établir à 63,6 % du PIB, grâce à la baisse du déficit. Notre objectif doit être de stabiliser l'endettement du pays de façon que l'emprunt ne serve plus à financer des dépenses de fonctionnement, mais uniquement des investissements, comme obligation en est faite aux collectivités locales. Ces bons résultats sont obtenus grâce à une méthode qui repose sur la transparence, notamment dans la gestion des surplus de recettes fiscales, et la prudence dans l'évaluation des recettes comme dans les hypothèses de croissance retenues.

Les élus locaux étaient nombreux à s’interroger sur le sort qui serait réservé au pacte de croissance et de solidarité. Les sceptiques en seront pour leurs frais. En effet, ce pacte, sur lequel reposent depuis plusieurs années les règles de calcul des dotations de l’État aux collectivités, sera bel et bien reconduit en 2007. Les élus des départements restent néanmoins sur leurs gardes. Le Gouvernement a en effet prévu de verser une première tranche de 500 millions d’euros – dont une partie attribuée en fonction des efforts consentis en matière d'insertion –, pour aider les conseils généraux à faire face à la hausse exponentielle des dépenses du RMI. Mais cette rallonge ne permettra pas de les couvrir entièrement et le produit des droits de mutation, dont le Gouvernement ne manque pas de rappeler qu'il a explosé, constitue une ressource fragile.

Un autre sujet de préoccupation des élus locaux est que les compensations versées par l’État aux collectivités au titre des exonérations fiscales et dégrèvements ne cessent de croître. Leur montant passera à près de 11,5 milliards d’euros en 2007 – contre 10,5 milliards en 2006. C’est ainsi, hélas, que le lien entre le contribuable et la collectivité se distend.

Ces observations étant faites, je me réjouis que ce projet de budget propose des choix cohérents avec nos valeurs. Sincère et vertueux, il tient les promesses de la maîtrise de la dépense publique et du renforcement de l'efficacité de l'État. Les efforts de ces quatre dernières années portent leurs fruits.

M. Jean-Pierre Brard - Des fruits amers !

M. Jean-Claude Mathis - 2007, année électorale, ne sera pas une année où le mouvement engagé sera interrompu, contrairement à ce qui s’est passé en 2002, où la croissance fut surévaluée et la croissance sous-évaluée. Il est souhaitable que ce mouvement soit durable pour préparer l’avenir.

L’idéal n’est pas de ce monde, mais ce budget n’en est pas moins un budget de progrès. La bonne politique permet de faire de bonnes finances. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Richard Mallié – « L'avenir ne se prévoit pas, il se prépare ». Cette citation du philosophe Maurice Blondel me semble appropriée, Monsieur le ministre, car avec le budget que vous nous soumettez aujourd'hui, vous nous montrez combien le gouvernement a décidé de préparer l'avenir de notre pays, en agissant avec responsabilité. Pour la première fois, les dépenses de l'État baissent en volume. Après avoir progressé de 3 % entre 1998 et 2002, elles ont baissé de 0,8 % entre 2003 et 2007. Cet effort de réduction du déficit de l'État est la preuve de l'attitude responsable du gouvernement et de sa majorité. Notre pays est enfin engagé dans un cycle de réduction de la progression de la dette.

Certes, avec un déficit budgétaire évalué à 41,6 milliards d'euros en 2007, nous sommes encore loin d'avoir véritablement assaini les finances publiques. Mais nous pouvons toutefois être fiers d'avoir déjà réduit le déficit de l'État de plus de 15 milliards d'euros depuis 2003.

Je ne peux donc que vous féliciter, vous et le Gouvernement, Monsieur le ministre, de ne pas avoir choisi la solution de facilité consistant à reporter sur les générations futures le coût de politiques démagogiques coûteuses (Exclamations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste). Il est en effet toujours plus difficile, électoralement parlant, d'opter pour une politique de ménagère rigoureuse que d'ouvrir le robinet des dépenses. Vous avez fait le choix de la rationalité, de l'amélioration de la productivité, de la rigueur budgétaire : bravo.

Je suis par ailleurs convaincu que nous sommes seulement au début du chemin. Avec la mise en place de la LOLF l'an dernier, nous avons résolument fait le choix d'une politique budgétaire plus efficiente. En tant que rapporteur du budget sur la sécurité sanitaire, j'ai pu constater combien cette réforme était porteuse. Je me réjouis que le pouvoir de contrôle du législateur ait été étendu.

Pour nos concitoyens, un avenir encourageant, c'est non seulement un avenir qui permette d’espérer que nous laisserons aux générations futures un pays engagé sur la voie du redressement, mais c'est aussi, de façon plus immédiate, un pouvoir d’achat qui progresse et une situation de l’emploi qui s’améliore.

Avec une progression prévisible de 2,2 % en 2006, le pouvoir d'achat des Français ne se porte pas trop mal. Le taux de chômage est quant à lui passé sous la barre des 9 % en juillet dernier. Poursuivons donc cet effort ! Poursuivons-le en maintenant le travail au cœur de nos principes fondamentaux et en continuant à valoriser le travail par rapport à l'assistance. Un milliard d'euros supplémentaire consacré à la revalorisation du barème de la prime pour l'emploi, c'est un signal fort donné à l'adresse de toutes celles et tous ceux qui ont fait le choix de se lever chaque matin pour aller travailler, même lorsque l'emploi occupé ne correspond pas forcément à leurs attentes, ou à leurs qualifications.

Si l'avenir est donc plutôt encourageant, il n'est pas sans nuages. J’ai ainsi perçu quelques inquiétudes dans le cadre de la mission que le Premier Ministre m'a confiée sur l'avenir des buralistes. S'il est une catégorie professionnelle qui connaît bien la valeur du travail, c'est bien celle des buralistes. Ils ne connaissent pas les 35 heures, eux, et travaillent plutôt 80 heures ! Ouverts bien souvent sept jours sur sept, de 6 heures à 21 heures, ils ne ménagent pas leur peine pour continuer à offrir aux Français un service de proximité…

M. Jean-Pierre Brard – Un peu enfumé…

M. Richard Mallié – Depuis que l'interdiction de fumer dans tous les lieux publics a été annoncée, les gérants de bars-tabac sont encore plus inquiets. Il n'est pas question de rouvrir la polémique sur la décision qui entrera en vigueur dans Ies prochains mois, mais simplement de songer aux moyens d’aider la profession.

Au cours de mes déplacements, j'ai remarqué que nombre de bars-tabac ne disposaient plus de jeux traditionnels du type babyfoot, billard, fléchettes ou autres, alors que ces jeux contribuent à faire de ces établissements plus que de simples lieux où prendre un café : des lieux de convivialité et de sociabilité, en particulier dans les petites communes rurales. Mais ces jeux, qui n'entrent pas dans la catégorie des jeux d'argent, rendent l'exploitant redevable d'une taxe aussi dissuasive que complexe. Pouvant s'élever jusqu'à 368 euros par an et par jeu, elle est en effet soumise à quatre taux distincts pouvant être majorés par trois coefficients ! Cela explique sans doute que depuis 1999, 125 000 jeux aient été retirés sur les 265 000 que comptait le parc.

Face à une telle aberration, Mme Poletti et moi-même allons proposer un amendement simple, visant à instaurer un tarif unique de cinq euros. Le coût de la mesure sera marginal pour notre pays, mais son impact sera important pour le secteur. Une telle mesure prouvera en outre qu'il n'est pas toujours nécessaire d'ouvrir à flot le robinet des dépenses pour égayer l'avenir. Parfois, quelques gouttes suffisent...

Laissons donc aux démagogues le projet de continuer à égarer notre pays dans une gestion inconsidérée…

M. Jean-Pierre Brard – M. Mallié n’est pas démagogue, lui !

M. Richard Mallié – …et poursuivons au contraire notre contrôle de la dépense publique, Monsieur le Ministre. C'est le seul qui a de l'avenir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jacques Myard – Je salue, Monsieur le ministre, votre volonté de maîtriser la dépense. Cette politique va dans le bon sens, mais permettez-moi de vous livrer quelques remarques sur la question de la dette.

Il est de bon ton de dire que la dette est trop importante, que les critères de Maastricht ne sont pas respectés, que nous laissons aux générations futures des milliers d’euros à leur charge. Tout cela est vrai, mais il faut aussi remettre tout cela dans une perspective économique. Qu’est-ce qui est le plus gênant : avoir à travers l’État et les collectivités territoriales une dette de 20 000 euros ou bien devoir cette même somme à son banquier ? Si l’on additionne la dette publique et la dette privée, on s’aperçoit que la France est dans un rang tout à fait honorable, et même dans le peloton de tête.

M. Henri Emmanuelli – Très bien.

M. Jacques Myard – La dette publique est un réel problème et le Gouvernement a le devoir de la réduire, mais voyons aussi que nous ne sommes pas dans la situation du Royaume-Uni, par exemple, où les faillites personnelles se multiplient. Cessons donc de toujours battre notre coulpe et de serrer notre discipline, et replaçons le problème dans une perspective économique.

Quant au déficit, on peut l’envisager sous l’angle des dépenses ou sous celui des recettes. Il faut bien sûr réduire l’excès de dépenses. Je suis convaincu que des économies sont possibles et qu’il faut s’interroger à tous les échelons sur l’efficience de la dépense publique. Il n’en demeure pas moins qu’il y a des missions que seul l’État peut remplir, que ce soit en matière de défense, de justice,de politique extérieure…

Mais il faut aussi considérer les recettes. Si aujourd’hui la consommation ne se porte pas mal, il faudrait remédier à la relative atonie des investissements, qui s’explique selon moi par la surfiscalisation du patrimoine – ISF et droits de succession – laquelle aboutit à cette situation paradoxale : les étrangers qui, eux, ne sont pas soumis à l’ISF et à l’impôt sur les successions, continuent d’investir en France, tandis que les capitaux français s’expatrient. Il faut mettre un terme à cette fuite des capitaux et inciter les Français à investir en France, par exemple dans les PME.

Je crois qu’il convient de s’interroger aussi sur le rôle de la Banque centrale européenne. En effet, alors que les investissements n’augmentent que légèrement dans la zone euro, ils décollent dans la zone hors euro : 6,2 % en Grande-Bretagne, 7,9 % en Suède malgré des prélèvements obligatoires élevés, 6 % au Danemark, contre 3 % en France, 2 % en Allemagne, 2,4 % en Italie. C’est bien la preuve que la politique monétaire de la BCE est absurde, en particulier l’augmentation des taux décidée par M. Trichet. Il est urgent de reprendre le pouvoir et faire rentrer la BCE dans le rang afin qu’elle prenne en compte la croissance des États ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Pierre Brard - Très bien.

M. Henri Emmanuelli – Ce Trichet est un fléau !

M. Axel Poniatowski – Je veux dire d’emblée tout le bien que je pense de ce projet de budget, qui contribuera fortement à l’assainissement des dépenses publiques. Soyez-en félicité, Monsieur le ministre.

Je souhaite enrichir le débat en proposant d’exclure la résidence principale des droits de succession et d’alléger ainsi la fiscalité sur les successions entre parents et enfants. Parce que cette disposition me paraît utile, j’en avais fait la proposition en décembre 2004, et elle avait été cosignée, à l’époque, par 207 de mes collègues. Je l’avais présentée à nouveau, comme amendement au projet portant réforme des successions et libéralités qui nous a été soumis en juin dernier. Je persévère, parce qu'une telle exonération permettrait à nos concitoyens d'accéder plus aisément à la propriété de leur logement, ce qui est un rêve légitime. Le logement constitue le premier poste de dépenses des ménages, et c’est aussi pour eux une préoccupation permanente. L'aspiration des Français à devenir propriétaire de leur logement est fondée, mais 57 % seulement y sont parvenus. Dans des pays aussi différents que le Royaume-Uni, l'Italie, la Belgique ou l'Espagne, la proportion de ménages propriétaires est très sensiblement supérieure. Nos voisins ont en effet très vite compris que constituer un tel patrimoine permet d’alléger ses charges lorsqu'on vieillit et de pouvoir léguer un bien essentiel à ses enfants…

M. Jean-Pierre Brard - C’est le retour de la Monarchie de juillet !

M. Axel Poniatowski - L'amendement que je proposerai tend à une politique plus soutenue en faveur du logement ; il va aussi dans le sens de la politique d'allégement fiscal voulue par le Gouvernement. L'accession à la propriété doit rester un axe majeur de la politique du logement. Certes, le rythme des constructions atteint un record et des dispositifs ont été récemment créés, mais une politique publique plus volontariste ne peut que favoriser l’aspiration légitime des Français à acquérir un toit, dont le Gouvernement n’ignore rien. Avec cette nouvelle disposition, les ménages chercheront systématiquement à devenir propriétaires de leur logement puisqu’il pourront transmettre sans frais à leurs enfants le fruit du travail de toute une vie…

M. Jean-Pierre Brard – Fruits du travail ? Tu parles !

M. Axel Poniatowski – J’ajoute qu’il s'agit d'une mesure relativement peu coûteuse pour les finances publiques.

Outre qu’elle favoriserait l’accession à la propriété, la disposition contribuerait à alléger les charges fiscales pesant sur les ménages, en évitant que soit taxé une nouvelle fois un bien déjà imposé du vivant des parents puisque, presque toujours, la résidence principale a été financée par des ressources déjà imposées au titre de l’impôt sur le revenu.

L’amendement est un encouragement à réaliser un rêve partagé. La disposition est inéluctable ; j’espère, Monsieur le ministre, que vous en mesurerez tout l’intérêt pour nos concitoyens (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP).

M. le Président – La parole est à M. Étienne Pinte.

M. Jean-Pierre Brard – Ah ! Un républicain authentique !

M. Henri Emmanuelli – Voilà qui nous changera de la France des châteaux !

M. Étienne Pinte – Cette session budgétaire n'est pas tout à fait comme les précédentes car les échéances qui s'annoncent doivent nous inciter à afficher dès maintenant des convictions claires, fortes et sereines. Évitons de donner à croire à ceux qui doutent que ce texte est un budget d'attente, qui ne vaudra que par les collectifs budgétaires de 2007. On attend de nous un langage de vérité, dont je ne me suis pour ma part jamais départi. Je continue de penser que c’est aujourd'hui qu'il faut agir pour demain, avec honnêteté et lucidité.

La première partie de ce projet est positive. Ses principes sont bons, en dépit de quelques frilosités sur lesquelles je reviendrai. La réduction des déficits budgétaires et le désendettement sont amorcés. C'est très bien, et cet objectif doit être respecté. J'aurais cependant préféré que la contribution à d'autres administrations publiques que l'État ne soit pas dite « pesante ». Je trouve incongru que les transferts de fonds de l'État vers les collectivités puissent être qualifiés ainsi, mais c'est sans doute une erreur de rédaction de vos services.

C’est aussi un très bon engagement de consolider, par ce budget, l'effort en faveur de l'emploi et de l'égalité des chances, car c’est par l'emploi que nous résoudrons une partie des inégalités sociales. Nous devons donc être volontaires, mais je m'interroge sur l'affectation des masses budgétaires en faveur de l'emploi. Quand disposerons-nous d’une véritable évaluation de tout ce qui s'est fait depuis tant d'années ?

J'approuve également sans réserve la consolidation des fonctions régaliennes de l'État. Les crédits affectés à la sécurité intérieure, à la justice et au rayonnement de la France doivent être préservés. Ceux qui sont consacrés à la défense doivent également l'être et ne surtout pas servir, comme cela s’est produit trop souvent, de variable d'ajustement. Il est temps, en effet, de réaffirmer les prérogatives de l'État, ce qui suppose la simplification et l'allégement de notre système administratif et la clarification des compétences. Ne tombons pas dans le piège de l’« État modeste » ! Ce que souhaitent nos compatriotes, c'est un État moderne, porteur de valeurs et garant de l'avenir.

M. le Ministre délégué – Je suis d’accord avec vous.

M. Étienne Pinte – L'État doit être associé aux collectivités territoriales – chacun ayant des missions bien définies – pour assurer à tous une existence digne, qui ne peut prendre d'autres voies que celles de l'éducation, de la formation et du logement.

Enfin, je note que la hausse du budget est limitée à 0,8 %. C'est l'amorce d'un cercle vertueux qui doit maintenant devenir réalité et se traduire par la réduction des déficits, le désendettement et une hausse réduite des dépenses. Nous posons là un acte responsable et fondateur à l'égard des Français et des générations futures, et nous dégagerons ainsi les marges de manœuvre dont nous avons besoin pour financer d’indispensables actions dans le domaine social.

J’en viens à l’article 12 du projet, qui traite de la reconduction du contrat de croissance et de solidarité. Il est très bien de rappeler les contraintes qui pèsent sur l'État, mais le respect des engagements pris ne doit pas être considéré comme une faveur faite aux collectivités territoriales.

M. Jean-Pierre Brard – Très bien !

M. Étienne Pinte – Affirmer la volonté qu’a le Gouvernement « d'établir des relations de confiance avec les collectivités » est louable, mais je rappelle mes interventions à ce sujet, il y a un an, et les réponses qui m'avaient été apportées concernant un travail de remise à plat des relations, complexes, entre l'État et les collectivités. Vous m'aviez promis, Monsieur le ministre, des informations qui nous auraient permis d’appréhender plus clairement les transferts de charge de l'État vers les collectivités et les aides de l'État à ces mêmes collectivités. Cette clarification n’a pas été faite, et je le regrette. Elle est plus que jamais nécessaire pour éviter divergences et contradictions.

Je souhaite donc savoir quelles actions le Gouvernement entreprendra à ce sujet, et j’attends une réponse plus rapide que celle que j’ai sollicitée l’an dernier. Mais j'en ai peut-être trouvé un élément dans l'exposé des motifs de l'article 12, qui annonce « la désindexation progressive du contrat en 2008 et 2009 pour atteindre une norme de progression compatible avec celle des dépenses de l'État. » Qu'en termes élégants ces choses là sont dites ! J'ai décidé de ne pas voir malice dans cette annonce de désindexation, car je ne peux croire que l'effort de rationalisation de nos finances publiques ne pèsera que sur les collectivités locales, mais je souhaite en avoir l'assurance – si possible dès maintenant – et, surtout, que cette perspective soit enfin le moteur de la clarification du rôle de chacun. Il est sans doute possible de faire mieux avec moins, mais il reste à savoir comment. Des pistes déjà suivies me semblent bonnes, qu’il s’agisse de simplification, de clarification ou d’évaluation. Elles exigent un grand courage. C'est pourquoi je souhaite, avec détermination, que ce budget s'inscrive dans une vision de ce que doit être la France au cours des vingt années à venir. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur quelques bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste)

Mme Christiane Taubira – En écoutant, hier, le rapporteur général, j’ai éprouvé une pointe d’envie à l’égard des démocraties qui, prenant au sérieux le contrôle parlementaire de l’exécutif, réservent à l’opposition la présidence de la commission des finances. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP)

M. le Ministre délégué – Combien sont-elles ?

M. Philippe Auberger – Que ne l’avez-vous fait ?

Mme Christiane Taubira – Nous veillerons à le faire, vous pouvez postuler ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) Certes, le président de la commission des finances a exprimé quelques critiques, mais dans l’ensemble, il n’a pas résisté à la tentation partisane, dressant un tableau manichéen des deux législatures. Le Parlement doit pourtant pouvoir véritablement contrôler les finances de l’État ! Ce n’est pas un manque de charité de dire que le Président de la République a convaincu une partie de son électorat en promettant la baisse des impôts. Comment sa majorité a-t-elle interprété cette promesse ? Dans une République démocratique et sociale, l’impôt doit permettre à chacun de contribuer équitablement à la charge commune – c’est pourquoi il a été conçu comme progressif. L’impôt doit aussi permettre à l’État de se doter des ressources qui lui sont nécessaires. À cet égard, si la révision de l’ordonnance de 1959 par l’adoption de la LOLF a constitué un très grand progrès, l’effort demeure inachevé car le Gouvernement n’a pas procédé à la réforme fiscale nécessaire.

Moralité, la France continue d’apparaître comme un pays à fiscalité forte – 44 % de pression fiscale pour une moyenne européenne de 41 % –, parce qu’avec l’impôt sont comptabilisées les contributions et les différentes cotisations pour la protection sociale. Pour que vous ne pensiez pas que je suis en train de plaider pour la baisse des impôts, je rappelle que le Danemark accuse une pression fiscale plus élevée – de l’ordre de 50 % – mais présente un taux de chômage plus faible, ce qui prouve que tout est affaire de répartition…

M. le Ministre délégué – Vous plaidez pour la flex-sécurité !

M. Henri Emmanuelli – Oh ! Cela coûte très cher. On vous expliquera, Monsieur Copé !

Mme Christiane Taubira – Non, je ne fais pas l’éloge de ce modèle. Ce qui est avéré, c’est qu’on peut avoir une pression fiscale soutenue et un taux de chômage limité.

M. le Ministre délégué – Oui, en faisant de la flex-sécurité… que vous condamnez !

Mme Christiane Taubira – Je vous le confirme. Il est indispensable de réformer le système des prélèvements obligatoires, d’abord parce qu’il ne tient pas compte de la dimension internationale des activités économiques. Les bénéfices extérieurs ne sont pas taxés et les charges et pertes extérieures ne sont pas déductibles. Ce système ne prend pas en compte non plus l’appartenance de la France à l’Union européenne et il ne fait pas de place aux politiques régionales. C’est particulièrement flagrant pour l’outremer, mais valable aussi pour les territoires de l’hexagone. Vous continuez de transférer des compétences et des charges, en ne compensant que très parcimonieusement…

M. Henri Emmanuelli – C’est vrai.

Mme Christiane Taubira – Surtout, vous évitez de mettre en place un dispositif de péréquation général, seul à même de combler les disparités territoriales. Pourtant, le sort vous a été favorable ! 64 milliards de recettes fiscales supplémentaires de 2002 à 2007, que notre rapporteur général qualifie poétiquement de « surplus fiscaux spontanés »…

Il demeure que vous n’avez pas réformé l’impôt personnel en créant un impôt unique et progressif, au lieu de cet assemblage hétéroclite d’IR et de prélèvements proportionnels, comme la CSG et la CRDS qui ne sont pas particulièrement équitables…

M. le Ministre délégué – N’est-ce pas la gauche qui a créé la CSG ?

Mme Christiane Taubira - À l’époque, elle se justifiait pleinement puisqu’elle tendait à combler les déficits que vous aviez creusés. À présent, il convient de la moderniser.

Vous avez aggravé l’écart entre les revenus du travail et ceux du capital. En intégrant l’ancienne réfaction de base et en modulant les taux, vous avez élargi l’assiette d’imposition des salaires de 72 à 90 %, alors que, dans le même temps, la création du bouclier fiscal permet de n’élargir l’assiette d’imposition des dividendes que de 50 à 60 %. Après réforme, l’écart de taxation entre salaires et dividendes est passé de 22 à 30 %, au détriment – faut-il le préciser ? – des salariés et au profit des actionnaires. Voilà une mesure emblématique de la sincérité de vos engagements en matière de justice fiscale et de résorption du chômage ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. Henri Emmanuelli – Bravo !

M. Jacques Bobe – L'un des objectifs affichés du projet de budget que vous nous présentez pour l'année 2007 est de contribuer à une plus grande justice sociale. C'est une ligne de conduite dont nous ne pouvons que nous féliciter et que nous soutenons ardemment. On le sait, la justice sociale commence souvent par la justice dans la formation ou dans l'entrée dans la vie active.

Depuis quatre ans maintenant, j'ai proposé aux ministres concernés de mettre en place une exonération des cotisations sociales pour les sommes que consacrent les comités d'entreprises aux bourses d'études ou aux comptes dotaux, deux mesures qui répondent au souci de justice que je viens d'évoquer. En effet les comités d'entreprises de certains grands groupes constituent, au bénéfice des enfants de leurs salariés à revenus modestes, des fonds permettant de verser des bourses d'études ou d'ouvrir un compte dotal destiné à aider à s'installer dans la vie active grâce à un pécule de départ.

Utile, cette œuvre sociale perdure depuis 1947 et elle me semble toujours d'actualité. Or les comités d'entreprises qui pratiquent ces constitutions de fonds sont soumis, depuis quelques années seulement, aux cotisations sociales pour les sommes engagées. Résultat, plusieurs d'entre eux ont renoncé à cette action, face au poids grandissant des charges financières qui les pénalisent. Alors que les chèques-vacances, les cadeaux de Noël, des voyages, des loisirs et d'autres actions relativement moins nécessaires sont exonérés, les comités d'entreprise ont l'impression de ne pas voir reconnaître le caractère éminemment social des aides financières qu'ils proposent ; en outre, les bénéficiaires potentiels sont lésés si l'aide ne peut plus leur être octroyée, alors même que chacun s'accorde à reconnaître que les étudiants doivent être mieux épaulés et que le Gouvernement ne peut augmenter les bourses – en nombre et en montant – autant qu'il le souhaiterait.

Plusieurs départements connaissent ce type de problème. Afin de soutenir la mise en œuvre de l'exonération de charges demandées, j'ai déposé, il y a deux ans, une proposition de loi. Conscients de l'utilité d'une telle mesure, cent vingt de mes collègues l'ont cosignée. Je gage, Monsieur le Ministre, que vous me répondrez que le PLFSS pour 2007 constituerait un support plus approprié pour retenir cette disposition. Mon intention est d'ailleurs de proposer un amendement dans ce cadre.

Dans l'immédiat, il me serait agréable que vous puissiez prendre, Monsieur le ministre, un engagement en ce sens : exonérer de charges sociales les bourses et les comptes dotaux, ce serait donner aux comités d'entreprises – et, ainsi, indirectement aux entreprises –, l'occasion de participer à leur manière à l'effort collectif, au moment où les budgets sont nécessairement resserrés. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

La discussion générale est close.

M. le Ministre délégué – Quelques commentaires et éléments de réponse à l’issue de cette discussion générale passionnante. Bien entendu, je remercie l’ensemble des intervenants. Chacun, avec ses convictions, a su apporter des éléments enrichissants au débat.

Merci, Monsieur le rapporteur général, de votre contribution, en amont, à la préparation de ce PLF…

M. Didier Migaud – Rarement des remerciements auront été aussi justifiés tant M. Carrez vous a noyé sous les hommages !

M. le Ministre délégué – Ne soyez pas jaloux, Monsieur Migaud, votre tour viendra ! (Sourires)

Si une dynamique nouvelle a pu s’engager, c’est d’abord parce qu’une prise de conscience – liée notamment au rapport Pébereau – est intervenue quant à la nécessité d’évoluer. Il en a résulté un changement d’approche dans la gestion dont les effets sont extrêmement positifs. À titre d’exemples, je pense aux démarches qui ont conduit à la budgétisation des OPEX ou à la recherche d’une sincérité totale dans la prévision des recettes.

Le rôle des outils nouveaux que constituent les audits ne doit pas être sous-estimé, et je tiens à redire combien je souhaite qu’ils continuent d’être utilisés, quels que soient les gouvernements futurs. La démarche d’audit est désormais bien intégrée dans la vie de nos administrations et sa contribution à la modernisation de la dépense publique ne fait aucun doute.

Vous avez plaidé, cher Gilles Carrez, pour l’avènement de lois de programmation pluriannuelles en matière de finances publiques. D’accord pour creuser cette piste, mais à conditions que de tels textes puissent concerner l’ensemble des finances publiques – et c’est du reste tout l’enjeu de la Conférence des finances publiques –, qu’elles relèvent de la sécurité sociale, des collectivités ou de l’État.

Faut-il aller plus loin encore, comme vous le souhaitez, dans l’identification de la dépense ? Je considère pour ma part que la plus grande part des charges est désormais correctement retracé, même si des progrès restent toujours possibles. Bien entendu, le problème du périmètre à partir duquel mesurer l’évolution des dépenses reste posé. Il est toujours envisageable de le modifier, mais il faut se fixer une règle stable et s’y tenir. Du reste, je rappelle que ce n’est pas moi qui ai défini le périmètre actuel puisqu’il a été borné en 2000, après que le Conseil constitutionnel a rendu ses décisions, notamment pour ce qui concerne les prélèvements sur recettes. L’essentiel, je le répète, c’est que l’on puisse raisonner à périmètre constant.

Faut-il réserver les dépenses fiscales aux lois de finances ? C’est une piste à laquelle il faudra continuer de réfléchir. En tant que ministre délégué au budget, vous ne serez pas étonné que je considère que l’emprunt ne devrait financer que l’investissement…

M. Michel Bouvard – Bravo !

M. le Ministre délégué – Mais il faut savoir trouver quelques arrangements avec le réel. Bien entendu, je m’attache à diminuer la part des frais de fonctionnement mal utilisés pour les réorienter prioritairement vers l’investissement.

Vos propositions en matière d’allégement – voire de suppression – de l’IFA pour les petites entreprises ont retenu toute mon attention et seront étudiées avec le plus grand intérêt. Je rappelle qu’une première étape en ce sens a été franchie l’année dernière.

Connaissant le degré d’exigence du président Méhaignerie, j’ai apprécié ses éloges à leur juste prix. Je le remercie d’avoir insisté sur la nécessité de renforcer la performance de l’administration et de généraliser les approches fondées sur le modèle du benchmarking. Cela est, vous le savez, au cœur de ma démarche personnelle.

Je remercie aussi le président de votre commission d’avoir rappelé qu’il ne doit pas y avoir de contradiction entre le ministre chargé du budget et les ministres dépensiers, chaque ministre étant, du fait de la LOLF, chargé de procéder à ses propres arbitrages internes, ce qui constitue à l’évidence une avancée majeure.

Pierre Méhaignerie a déploré la multiplication des agences et commissions…

M. Charles de Courson – Hélas, la tendance ne s’inverse pas !

M. le Ministre délégué – Je prendrai un décret visant à rationaliser les choses, en prévoyant notamment qu’au bout de cinq ans, toute commission devra être évaluée en vue de décider s’il est indispensable de la maintenir.

Je remercie encore le président Méhaignerie d’avoir précisé la nature des relations financières entre l’État et les collectivités locales. On entend dire beaucoup de choses à ce sujet, parfois très inexactes. Il faut reconnaître que l’État remplit tous ses engagements envers les collectivités. Ce n’est pas rien de s’engager sur un versement de 2,8 milliards d’euros entre 2006 et 2007 quand la dépense de l’État diminue d’un point par rapport à l’inflation !

M. Jean-Pierre Brard – Vous n’avez pas écouté M. Pinte !

M. le Ministre délégué – Sur la suggestion du président Méhaignerie, j’ai par ailleurs demandé un audit sur les dégrèvements de fiscalité locale pris en charge par l’État. Chacun pourra constater que l’État est devenu le premier contribuable local.

M. Charles de Courson – Très bien !

M. le Ministre délégué – Et j’espère que nous pourrons ainsi adopter une approche plus constructive des relations entre l’État et les collectivités locales…

Je voudrais dire à Michel Bouvard que ses observations sur l’emploi au sein de l’Éducation nationale correspondent tout à fait à mes propres réflexions, ainsi que ses remarques sur les audits de modernisation. Vous voulez en effet, Monsieur Bouvard, que les administrations adaptent leur format aux évolutions de la décentralisation, et c’est effectivement le sens des vagues transversales d’audit que j’ai lancées, en particulier celle relative aux conséquences de la décentralisation sur l’administration d’État.

S’agissant des suppressions d’emplois non pourvus, j’ajoute que la fongibilité asymétrique doit être mise en œuvre. Il faudra que nous rappelions sans cesse ce message aux administrations centrales ! Je serais du reste heureux si vous pouviez vous en faire l’écho auprès des différents ministres concernés à l’occasion de l’examen des budgets prévus par la seconde partie de la loi de finances…

M. Michel Bouvard – Je n’y manquerai pas !

M. le Ministre délégué – Sur la question des affectations de recettes, je partage votre souhait : nous devons avoir une meilleure vision des opérateurs de l’État. C’est pourquoi j’ai lancé un audit sur le pilotage et la tutelle des opérateurs…

M. Michel Bouvard – Très bien !

M. le Ministre délégué – …notamment les 71 opérateurs du ministère de la culture.

M. Philippe Auberger – C’est effectivement beaucoup !

M. le Ministre délégué – Pour la première fois, un Jaune budgétaire présentera en outre une vision globale des opérateurs, détaillant notamment leurs ressources et leurs emplois, ce qui sera très instructif. Chaque PAP comprendra enfin des développements relatifs aux opérateurs qui contribuent à la réalisation du programme concerné.

Merci également, Monsieur Bouvard, pour vos observations sur le volet « performances » des PAP : il faut effectivement moins d’indicateurs. Nous avons commencé à travailler en ce sens. Comme je l’ai dit l’an dernier, la LOLF est un très petit bébé, qui doit encore grandir sur certains points.

Quant aux systèmes informatiques, nous avons passé sans encombres le palier de l’année 2006, ce qui est un exploit compte tenu de la situation de départ ! C’est un sujet que je suis de très près, car le suivi informatique est essentiel. Les outils informatiques n’étant pas encore pas parfaits, nous avons lancé Chorus, un système intégré, commun à tous les acteurs et couvrant l’intégralité du champ de la LOLF. Nous en aurons une version pilote en 2008, qui devra être déployée en 2009 dans l’ensemble de l’État. J’ai d’ailleurs réuni il y a quelques semaines l’ensemble des fonctionnaires en charge de ce sujet, afin de le leur rappeler. De son côté, chaque ministère doit mettre en place son propre système de pilotage interne – nous suivrons cette question de très près et nous veillerons à une bonne coordination de l’ensemble.

Je vous remercie enfin, Monsieur Bouvard, pour le bilan que vous dressé de l’application de la LOLF : on ne remerciera jamais assez tous les fonctionnaires qui ont travaillé sur cette question et accepté toutes les formations nécessaires. Le travail accompli est remarquable.

Merci également à M. Carcenac, qui a tenu des propos très responsables et très précis sur le changement de statut des Monnaies et médailles. Une telle réforme était nécessaire pour respecter la LOLF ; avec son nouveau statut d’EPIC, l’établissement disposera des marges de manœuvre nécessaires pour établir un véritable projet industriel ainsi qu’un contrat d’objectifs pluriannuel. Sachez enfin qu’il n’est aucunement question de remettre en cause le monopole de frappe des monnaies et que tout se fera dans la concertation.

Je dirai en revanche à Monsieur Perruchot que j’ai moins apprécié sa conclusion que le début de son intervention : s’il a repris le terme de « budget de rêve », je regrette la sévérité de ses propos. N’aurait-il pas rêvé lui-même de ce budget ? Rappelons qu’il a été élu avec des électeurs très similaires à ceux de l’UMP…

M. Jean-Pierre Brard – C’est une menace ! Les obus vont pleuvoir sur Blois !

M. le Ministre délégué – Pas du tout : je note seulement que nous avons fait campagne sur des idées proches : la réduction des dépenses de l’État, des impôts, du déficit et de la dette. Et nous le faisons ! J’ai souffert quand M. Perruchot nous a annoncé qu’il voterait contre ce budget (Sourires).

M. Henri Emmanuelli – Tragendiante, comediante !

M. le Ministre délégué – Je m’efforcerai jusqu’au bout de le convaincre. Nous n’avions pas réalisé, l’an dernier, le « carré magique » : il est vrai que si la dépense publique baissait, elle restait au niveau de l’inflation. Mais nous avons fait mieux cette année, et il serait cohérent que l’UDF vote pour, ou du moins s’abstienne…

M. Jean-Pierre Brard – Ça sent le coup de grâce ! Voilà Ravaillac qui perce !

M. le Ministre délégué – J’ai peu d’espoir en revanche pour le parti communiste et ses apparentés…

De son côté, M. Chassaigne a fait preuve d’une sévérité extrême. Contrairement à ses dires, l’État a été au rendez-vous qu’il avait pris avec les élus locaux. Nous avons honoré à l’euro près l’indexation du contrat de croissance et de solidarité, et la compensation des transferts de compétence respecte tous les engagements que nous avons pris, s’agissant notamment de la cession d’une fraction de la taxe sur les conventions d’assurance et de la TIPP. Dans mes précédentes fonctions, je m’étais engagé à obtenir de Bruxelles une autorisation de modulation pour les régions, et nous l’avons fait… Il aurait été bon de le reconnaître, car un tel respect des engagements n’est pas si fréquent !

M. Henri Emmanuelli – Vous manquez de modestie !

M. le Ministre délégué – Mme Billard a rappelé que l’environnement devait être traité comme une priorité, et elle a raison. Une politique ne se juge pas seulement sur ses moyens, mais aussi sur ses résultats : la France, qui avait pris du retard, a satisfait à ses obligations, s’agissant notamment du recensement des sites au titre de Natura 2000. La Commission a même classé la France au troisième rang des États membres pour le respect des engagements relatifs aux émissions de CO2 dans l’industrie – ce n’est pas si mal !

De l’intervention de M. Deniaud, je retiens plusieurs analyses. Comme lui, je pense que le rapprochement entre le budget et la réforme de l’État est une nécessité, et je souhaite que la structuration ministérielle actuelle perdure. M. Deniaud s’est également réjoui des résultats de la modernisation de la politique immobilière de l’État. Sur ce point, je le remercie pour son action déterminante au sein de la MEC. Enfin, je pense moi aussi qu’aucune réforme de l’État ne peut réussir sans l’implication des agents. C’est pourquoi 50 % des économies tirées du non-remplacement des départs en retraite leur seront rétrocédés, comme Dominique de Villepin s’y est engagé.

M. Giacobbi a déploré les retards pris dans le développement des systèmes d’informations, mais il oublie que ceux-ci ont été largement comblés grâce au lancement de Chorus. S’agissant maintenant du programme exceptionnel d’investissement en Corse, l’État a respecté ses engagements. Seules les conditions de financement ont été modifiées par la création de l’AFITF, qui se substitue au ministère des transports pour financer les projets d’investissement routiers et ferroviaires en Corse. Cette agence interviendra par l’intermédiaire d’un fonds de concours, dont les moyens seront fongibles avec les dotations budgétaires, et qui a déjà été créé – une autorisation d’engagement de 28 millions est même inscrite au budget 2006.

Je remercie M. Auberger, dont l’intervention fut précise et intéressante, comme à l’accoutumée. J’entends son message concernant les entreprises « gazelles » : il ne s’agit que d’un premier pas. Il s’ajoute toutefois à toutes les mesures adoptées depuis 2002 en faveur de l’innovation – le CIR, la réforme des transmissions, mais aussi celle des plus-values professionnelles, qui sont autant de réformes que vous avez approuvées, Monsieur Auberger, et auxquelles vous avez personnellement contribué !

S’il est un sujet dont le Gouvernement peut être fier, c’est en effet la création d’entreprises : la loi Dutreil a apporté un élan essentiel, dont les scores actuels de notre pays rendent bien compte – ils sont bien supérieurs à ceux enregistrées au cours des années 1990, qui connurent pourtant une forte croissance. C’est que cette dernière ne suffit pas : il faut également savoir impulser une législation moderne, qui allège les contraintes et vive avec son temps.

Sur la PPE, nous tiendrons le débat qui est aujourd’hui nécessaire. Je le souhaite, et je note que les propositions de M. Auberger rejoignent mes propres convictions en la matière – nous devons simplifier le barème et réformer les droits annexes, ainsi que le versement par les URSSAF. Nous devrions connaître dans trois mois les conclusions de l’audit que j’ai lancé, et nous reviendrons alors vers vous…

L’exécution des contrats de plan 2000-2006 a effectivement pris des retards, M. Claeys, mais surtout entre 2000 et 2002 !

M. Augustin Bonrepaux – Mensonge !

M. le Ministre délégué – Depuis cette date, le Gouvernement met tout en œuvre pour rattraper ce retard, afin de porter le taux d’exécution à un niveau satisfaisant. Le CIACT du 6 mars2006 a ainsi décidé l’affection de financements supplémentaires de l’AFITF pour un montant de 600 millions. Compte tenu de cette décision, 81 % des crédits pour les contrats de plan État-régions auront été utilisés d’ici à la fin de l’année, soit un taux supérieur à celui de la génération précédente des contrats de plan. Pour le reste, je vous trouve quelque peu injuste, Monsieur Claeys : j’ai rappelé quels efforts considérables nous faisons en faveur des collectivités locales.

Je veux en revanche remercier Georges Tron pour son intervention, tout en répétant que le Jaune relatif aux opérateurs donnera pour la première fois une vision complète du sujet, auquel chaque PAP consacrera également des développements. Par ailleurs, nous étendons progressivement la politique immobilière aux opérateurs et je rappelle que j’ai lancé un audit sur la tutelle et le pilotage. Enfin, je voudrais remercier Monsieur Tron pour sa contribution à la mise en place d’un conseil de l’immobilier de l’État.

M. Henri Emmanuelli – Parlons-en !

M. le Ministre délégué – C’est une excellente réforme, et je suis à votre disposition pour en parler.

Je partage la préoccupation de M. Decool quant à l’égal accès aux soins médicaux, mais les baisses d’impôt déjà décidées pour 2007 rendent nos marges de manœuvre étroites et sa proposition se chiffrerait à 2 milliards ! Néanmoins, c’est un sujet sur lequel il faut continuer de travailler.

M. Besson et moi n’avons à l’évidence pas le même regard sur la réalité.

M. Jean-Pierre Brard – Vous portez des lunettes roses !

M. le Ministre délégué – Ni roses, ni rouges, j’en suis sûr !

Il a parlé de budget en trompe-l’œil, inopérant et même non sincère. Mais c’est Eurostat qui souligne que la France est le seul des grands pays européens à être passé sous la barre des 3 % du PIB pour le déficit, et la Commission et le FMI qui saluent le sérieux de notre budget pour 2007 ! Si vous ne tenez pas leur opinion en grande estime, il faudra veiller à ne pas la répéter si jamais ils se montraient plus sévères sur un autre sujet ! Quant à l’insincérité… Pour tout dire, j’attendais que quelqu’un à gauche s’empare de ce thème, et le fait que ce soit M. Besson qui s’y soit collé me fait comprendre que d’autres hésitent quelque peu à le défendre. L’an dernier, nous avons fait la démonstration de la qualité de nos prévisions, notamment en matière de croissance, et le Conseil constitutionnel, que vous avez saisi de la loi de règlement, a tranché en notre faveur. J’avais donc pensé que vous n’y reviendriez pas.

M. Éric Besson – Que dois-je comprendre de vos allusions ?

M. le Ministre délégué – Ne le prenez pas en mauvaise part : c’est traditionnellement M. Migaud qui m’attaque sur ce thème et le fait qu’il ait délégué l’exercice, que vous avez rempli avec talent et courtoisie, me laisse penser qu’il se sentait moins fort que d’habitude sur ce thème !

M. Didier Migaud – Pas du tout !

M. Jean-Pierre Brard – Est-ce le cas de M. Breton, qui a déserté le débat ?

M. le Ministre délégué – Il est normal de se répartir la tâche : vous n’avez vous-même pas été présent tout du long !

M. de Courson s’est montré sévère, et je n’en ai pas été vraiment étonné. J’ai même presque renoncé à le convaincre, en voyant qu’il resservait d’année en année les mêmes arguments. En ce qui concerne l’évolution des dépenses, les règles du jeu n’ont pas changé. On peut les contester, bien sûr, mais en travaillant à périmètre constant, il est possible de reconnaître le travail que nous avons accompli. On peut certes refuser de voter le budget, mais en donnant acte au Gouvernement qu’il a tenu ses engagements. Par exemple, vous ajoutez les prélèvement sur recettes au profit des collectivités locales et de l’Union européenne.

M. Charles de Courson – Évidemment !

M. le Ministre délégué – Comme vous voudrez, mais alors faites la même comparaison pour les années précédentes et reconnaissez qu’à périmètre égal, la dépense de l’État a diminué ! Il en est de même pour les allègements de charges sociales : je considère qu’il s’agit de moindres recettes pour l’État. Vous pouvez ne pas être d’accord, mais c’est le même exercice que l’an dernier. Quant aux moyens affectés aux opérateurs, ils sont destinés à financer des missions nouvelles. Il ne s’agit donc pas de débudgétisation. Dans l’exemple de l’ANR, ils nous permettent d’honorer nos engagements en faveur de la recherche et de baisser les dépenses de l’État d’un point en volume.

Quant à la réforme fiscale, je vous rappelle que M. Bayrou, dans sa campagne présidentielle, s’était engagé devant les Français à réduire le nombre de tranches – c’est fait ; à supprimer l’abattement de 20 % – c’est fait ; et à réduire le nombre de taux – c’est fait. Je ne l’ai pourtant jamais entendu dire du bien de cette réforme ! Enfin, à propos de la réforme de l’État, vous appelez à des gains de productivité : c’est bien à cela que servent les audits ! Sur ce point au moins, je me déclare donc coursonniste.

Ce qui n’a aucune chance d’arriver avec M. Brard. Comme nous avons tous les deux arrêté la langue de bois, Monsieur Brard, vous ne pouvez plus vous vanter des mesures prises par vos amis socialistes sous la précédente législature lorsque les chiffres sont bons et vous en désolidariser lorsqu’ils sont mauvais ! Hier, M. Sandrier a dit du mal de la CSG, mais il ne me souvient pas que vous ayez censuré le gouvernement à l’époque ! Restons cohérents. Quant aux baisses d’impôts, vous me redonnez les mêmes graphiques, dans tous les sens, tous les ans : j’ai l’impression de les connaître depuis que je suis petit !

Reste qu’un célibataire au SMIC va toucher l’équivalent d’un treizième mois en 2007 grâce à la prime pour l’emploi, alors qu’un couple où chacun gagne deux smics aura environ 16 % de baisse d’impôt, soit 350 euros. Vous savez que ces chiffres n’ont de sens qu’en pourcentage, et non en valeur absolue. Enfin, au total, l’allègement de l’impôt sur le revenu bénéficiera pour 80 % à des revenus inférieurs à 3 500 euros par mois, soit exactement la définition des classes moyennes. Nous avons donc veillé à ce que la réforme soit juste tout en valorisant le travail. Tout cela ne m’empêche pas de saluer votre talent oratoire et votre sens de l’humour. Essayez simplement de ne pas jeter toujours les mêmes noms en pâture : le temps de la décapitation est terminé !

M. Jean-Pierre Brard – On pourrait au moins décapiter les fortunes !

M. le Ministre délégué – Je remercie M. Mariton pour les éloges qu’il a adressés à notre travail : c’est bien la première fois qu’on me qualifie de trop prudent, et même de modeste ! Merci aussi d’avoir souligné que ce budget a pour vocation d’obtenir des résultats, notamment en termes de compétitivité et de pouvoir d’achat. Le travail que nous avons réalisé sur les effectifs n’est pas le résultat d’une approche idéologique, mais le bilan argumenté de l’ensemble de nos audits.

M. Dumont a évoqué les collectivités territoriales. Nous aurons l’occasion d’y revenir longuement, et j’espère vous convaincre que l’État, dans des conditions difficiles, a essayé de tenir ses engagements à leur égard du mieux possible et qu’elles sont particulièrement bine traitées dans le budget.

M. Garrigue nous a interrogés sur les délais de sortie de la procédure pour déficit excessif : M. Breton et moi-même sommes relativement confiants. La Commission fera sa proposition en novembre. C’est d’une grande importance pour nous, car il s’agit d’un travail gigantesque, mené en partenariat avec de nombreux acteurs et qui sera un élément essentiel de nos relations avec nos partenaires européens. Merci aussi d’avoir souligné le rôle du benchmarking que j’ai voulu mettre en œuvre dans ce budget, pour les audits et les nouvelles technologies entre autres. Je suis tout à fait d’accord pour que nous travaillions à la maîtrise de la dépense locale. C’est un sujet difficile, voire passionnel, et j’espère que nous parviendrons à sortir des clivages traditionnels, car il nous engage tous. Dès lors qu’un gouvernement, quelle que soit sa sensibilité, travaille sur la dépense publique, il ne peut que se sentir obligé d’améliorer aussi la maîtrise de la dépense locale. Il faut progresser ensemble sur ce sujet.

M. Augustin Bonrepaux - Vous avez beaucoup de progrès à faire !

M. le Ministre délégué – Quant à la fiscalité pétrolière, il faut se préparer dès maintenant à l’après-pétrole : c’est tout le sens de la mission diligentée par Thierry Breton.

Je remercie M. Novelli pour les propos très aimables qu’il a tenus, qui prennent d’autant plus de poids qu’il est capable d’exprimer le plus clairement du monde son désaccord. En ce qui concerne la recherche, c’est effectivement surtout sur la recherche des entreprises, qui est en retard, que nous devons faire des efforts. Le crédit impôt recherche jouera un grand rôle à ce sujet. Les allégements de charges seront aussi un des sujets majeurs du projet de la majorité pour l’élection présidentielle et sur ce point, nous avons beaucoup de vues en commun. Sur la réforme de l’État enfin, les audits ont été un puissant instrument de modernisation. Il faut maintenant travailler sur le périmètre de l’État.

M. Mathis a exprimé sa préoccupation concernant les collectivités locales. Le conseil d’orientation des finances publiques est l’outil qui doit nous permettre de progresser dans ce domaine et de remettre à plat les relations de l’État avec elles. M. Myard a évoqué la question de la dette, en distinguant les causes de déficit. Mais la dette, d’où qu’elle vienne, représente toujours une perte de marges de manœuvre pour l’État et si nous voulons financer de nouveaux investissements, il faut les reconquérir. Quant à ses réflexions sur l’Europe, il faudrait bien plus que quelques minutes pour y répondre. Je me contente de lui redire toute la force de ma conviction européenne, même s’il est vrai qu’on pourrait de temps en temps aller plus vite ou différemment.

Le travail accompli par M. Mallié dans la préparation du nouveau contrat d’avenir pour les buralistes est tout à fait essentiel. Nous avons beaucoup à faire à ce sujet, et nous avons rencontré ensemble le président de la confédération des buralistes. J’espère une conclusion d’ici décembre. Ce nouveau contrat d’avenir devrait comporter plusieurs initiatives, y compris la baisse de la taxe sur les flippers et autres jeux autres que jeux d’argent.

M. Poniatowski souhaite exclure la résidence principale des droits de succession : c’est une idée qui a du sens, mais que son coût ne permettait pas d’inclure dans ce projet de loi ; il faut continuer à travailler la question.

M. Pinte, que je remercie de ses propos élogieux, a abordé la politique de l’emploi. Avec la flex-sécurité, l’allégement des charges et le plan de cohésion sociale, nous avons diminué le nombre de chômeurs de 300 000 en un an et fait considérablement progresser l’emploi, pour une grande part dans le secteur privé ! Quant au contrat de croissance, sa reconduction ne coûte pas moins d’un milliard d’euros. Or elle n’a rien d’automatique : elle ne témoigne que d’un engagement politique et moral de l’État envers les collectivités locales. Les compensations tarifaires enfin se font dans la plus grande transparence : j’adosse mes décisions aux avis rendus par la Commission consultative d’évaluation des charges qui joue pleinement son rôle d’arbitre indépendant.

Mme Taubira faisait l’éloge de la LOLF en rappelant que l’initiative en revenait à la majorité précédente. C’est vrai : sur certains sujets, nous pouvons nous rassembler au-delà de nos convictions – cela, vous ne l’avez pas dit…

Mme Christiane Taubira - La continuité de l’État vous impose d’assumer les lois votées par d’autres ! Vous ne méritez aucun éloge pour cela, surtout pas de ma part.

M. le Ministre délégué – Je vous rappelle que la droite unanime a voté la création de la LOLF !

M. Michel Bouvard – C’était indispensable !

M. Jean-Louis Idiart - C’est toujours plus difficile à faire lorsqu’on est majoritaire…

M. le Ministre délégué – Par ailleurs, nous avons fait la preuve qu’une baisse d’impôt peut être efficace avec la réforme de la taxe professionnelle, la mise de l’impôt sur le revenu en conformité avec le standard européen et l’augmentation importante de la prime pour l’emploi.

Enfin, Monsieur Bobe a évoqué l’exonération de charges des bourses versées par les comités d’entreprises : je suis prêt à y travailler, et des efforts ont d’ailleurs déjà été consentis avec la création de l’allocation étudiante Aline. Comme vous l’avez rappelé, c’est un sujet à évoquer lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale, et je vais de ce pas l’évoquer avec mes collègues de la Santé et de la Sécurité sociale, afin qu’ils voient ce qui est possible, sinon cette année, au moins dans les années qui viennent. Je vous remercie. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance qui aura lieu, ce soir, à 21 heures 45.
La séance est levée à 20 heures 5.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

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