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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

1ère séance du vendredi 10 novembre 2006

Séance de 9 heures 30
22ème jour de séance, 45ème séance

Présidence de M. Jean-Luc Warsmann
Vice-Président

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La séance est ouverte à neuf heures trente.

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Loi de finances pour 2007 – seconde partie – (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2007.

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Écologie et développement durable

M. Philippe Rouault, rapporteur spécial de la commission des finances – En cette dernière année de législature, je tiens à vous remercier, Madame la ministre, pour tout le travail accompli en matière d'écologie. Plus que jamais, le développement durable est l'enjeu de ce siècle pour l'avenir de notre planète, et le budget qui lui est consacré doit être l'une priorité de l’État.

Toutefois, malgré la prise de conscience des Français et leurs attentes croissantes, la mission Écologie et développement durable n’a pas assez évolué au cours des dernières années. Je me félicite donc du rattrapage proposé, qui place cette mission aux premiers rangs de l'effort financier du Gouvernement pour 2007. Ses crédits devraient en effet bénéficier d’une hausse d’environ 2,5 % : 637 millions d'euros en crédits de paiement et 698 millions d'euros en autorisations d'engagement, au lieu de respectivement 614,6 et 623 millions en 2006.

Mais ces seuls crédits ne permettent pas d'apprécier l'ensemble des efforts consentis. La loi de finances pour 2006 a en effet affecté aux opérateurs de la mission, au premier rang desquels l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, des ressources fiscales qui justifient une diminution, voire une suppression, des dotations budgétaires précédentes. De ce fait, les moyens alloués à l'écologie devraient en réalité augmenter de 9,3 % en 2007, et cet effort qui prend une signification toute particulière au vu tenu des contraintes budgétaires actuelles.

Cette hausse des crédits permet tout d’abord de renouveler notre engagement en matière de prévention des risques et de lutte contre la pollution : les crédits de ce programme passent de 135 à 141 millions en autorisations d’engagement. Le marché des quotas de gaz à effet de serre va également monter en puissance, tandis que l’inspection des installations classées, cinq ans après la catastrophe AZF, bénéficiera de nouveaux apports, en complément du plan de renforcement pluriannuel de ses moyens d’intervention. Afin de financer la filière de recyclage, nous instaurons également une taxe sur les déchets d’équipements électriques et électroniques. J’ajoute que la lutte contre les inondations bénéficiera de 110 millions d’euros, sans compter les crédits du fonds Barnier, dont la mobilisation sera portée de 81 à 109 millions d’euros.

Quant au programme Gestion des milieux et biodiversité, ses crédits augmenteront de 32 %, de 109,9 millions en 2006 à 144,2 millions en 2007. Les moyens consacrés à l’application de la loi sur les parcs nationaux passent de 34 à 47 millions, soit une augmentation de 38,6 %. Les crédits engagés dans le cadre de Natura 2000 passeront enfin de 21,2 à 29,3 millions d'euros, ce qui représente une hausse de 38 %.

Par ailleurs, 14,8 millions d'euros financeront la gestion, la préservation et l’évaluation écologique des espaces, tandis que les crédits alloués aux opérations « grand site » sont en légère progression – 1,84 million supplémentaire. En ma qualité de président du groupe d'études sur l'eau et de rapporteur pour avis du projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques, je me félicite enfin de la pérennisation annoncée du mode de financement des agences de l'eau. Principaux opérateurs du ministère de l'écologie et du développement durable dans ce domaine, les agences bénéficient d’un budget annuel de deux milliards – c’est dire leur importance !

Enfin, ce projet de budget accroît de manière significative les moyens du programme Conduite et pilotage des politiques environnementales et développement durable. Les crédits de paiements s'élèveront en effet à 315,9 millions contre 287,3 en 2006.

Je rappelle toutefois que l’application de la loi organique relative aux lois de finances semble poser des problèmes particuliers au ministère de l'écologie et du développement durable : elle interdit les mises à disposition, jusqu’alors fréquemment employées. En effet, affecter un agent rémunéré pour une tâche, dans une administration donnée, à une autre administration, revient à fausser la portée de l'autorisation budgétaire. La réduction de telles pratiques est donc indispensable, mais elle pourrait porter préjudice à la capacité d'expertise du ministère. En tout état de cause, il me semblerait logique d'intégrer progressivement au sein du plafond d'emplois du ministère tous les crédits de personnel concourant à la mise en œuvre de la mission, quel que soit aujourd'hui leur type d'imputation.

Pour conclure, quelques mots sur deux opérateurs du programme. D’abord l’ADEME, à laquelle la Cour des comptes a consacré un rapport particulier, publié en février 2006. Si la Cour reconnaît la régularité des comptes de l'agence, elle souligne les tensions qui résultent de certaines imperfections de gestion et des sollicitations croissantes dont l'agence fait l'objet. Force est de constater que la délocalisation à Angers a été mal conçue et mal conduite, et que la complexité des financements de l’agence rend délicat l’exercice de ses missions. Il me semble que l'ADEME aurait tout intérêt à travailler en meilleure liaison avec la direction générale des impôts afin de mieux connaître et de mieux apprécier l'évolution de ses nouvelles ressources fiscales, ce qui lui permettrait de développer une capacité d'anticipation qui lui a trop fait défaut jusqu'à présent.

Ensuite, le Muséum national d'histoire naturelle, institution qui s’est trop longtemps repliée sur elle-même, tout en étant oubliée des pouvoirs publics. Cet établissement, auquel la loi a confié la responsabilité scientifique de l'inventaire du patrimoine naturel, a besoin d’un programme pluriannuel d'investissements afin de réhabiliter son patrimoine immobilier et de sauvegarder ses collections, qui regroupent 60 millions de spécimens, botaniques, zoologiques ou minéralogiques.

La réforme de 2001 fut certes bénéfique au Muséum, mais les efforts engagés doivent être poursuivis. Dans ce pays où la culture scientifique est encore trop souvent négligée, cet établissement doit mériter à nouveau son titre de « Louvre des sciences » en mettant à disposition du public toutes ces collections.

Nous ne devons plus considérer l'environnement comme un problème politique, mais comme le plus grand défi moral de notre civilisation, ce qui nécessite de véritables mesures. Je souhaite donc que l’examen de cette mission suscite un vrai débat et une prise de conscience de tous les parlementaires (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Christophe Priou, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques – Comme mon collègue vient de le rappeler, l’effort accompli en faveur de l’écologie et du développement durable est significatif, compte tenu du contexte budgétaire actuel. La forte hausse des crédits accordés à la protection de la biodiversité devrait permettre d’accompagner l’entrée en vigueur de la loi sur les parcs nationaux, et de créer deux nouveaux parcs outre-mer ainsi qu’un parc marin.

De même, si les crédits de l’eau et de la prévention des risques naturels augmentent globalement, il est regrettable que la gestion des déchets ne fasse pas partie de vos priorités, alors même que la réduction de leur production ainsi que leur recyclage constituent un enjeu majeur. Nous constatons également que de nombreux plans départementaux de déchets sont au point mort.

Plusieurs autres points doivent être précisés. Quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre pour favoriser l’essor des énergies renouvelables ? Il est par trop réducteur d'aborder cette politique par le seul biais du crédit d'impôt. Vous avez peut-être manqué l’occasion, Madame la ministre, de constituer un pôle énergétique de premier plan regroupant les énergies traditionnelles et renouvelables.

La loi relative aux parcs nationaux a notamment pour objet de garantir aux communes situées dans le cœur des parcs l'attribution d'une partie forfaitaire de la DGF afin de compenser les contraintes spécifiques pesant sur l'économie locale. Les crédits correspondant à ces financements n'étant pas inscrits dans le PLF 2007, cela signifie-t-il que le dispositif est remis en cause ? Je souligne en revanche que, s’agissant de l’élevage dans les zones humides, deux régions pilotes – Poitou-Charentes et Pays de la Loire – ont été déterminées avec la mise en place d’une prime de 150 euros à l’hectare. Les 44 parcs naturels régionaux, tel celui de la Camargue, sont eux aussi inquiets pour leur avenir. Des associations de défense de l’environnement nous ont enfin saisis quant au financement des réserves naturelles régionales. Je note avec satisfaction l’augmentation de l’enveloppe pour Natura 2000, mais des problèmes demeurent sur le terrain avec les DIREM concernant notamment la prise en charge des chargés de missions.

S'agissant de la lutte contre la pollution de l'eau et du respect des directives européennes en la matière, quelle est la situation actuelle de la France ? Quel est l'état écologique de l'eau dans notre pays et plus particulièrement dans l'ouest ?

S'agissant du crédit d'impôt en faveur de la récupération des eaux pluviales, le Sénat a revu à la baisse le dispositif de l'amendement au projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques introduit par l'Assemblée nationale en première lecture. Quelle est votre position, Madame la ministre ?

Quelle est, par ailleurs, la politique du ministère en matière de lutte contre la pollution marine ? L'État s'est-il bien porté partie civile dans le procès de l'Érika, qui sera jugé l'année prochaine ?

Le Conservatoire du littoral, qui ne perçoit plus de subvention du ministère, bénéficie d'une partie du produit du droit de francisation et de navigation des bateaux à moteur. Or, le rendement de cette taxe est en baisse. Quelles solutions envisagez-vous pour garantir des ressources stables et durables à cet établissement ?

Nous soutiendrons bien entendu votre budget, Madame la ministre. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères  Notre débat se tient au moment même où se réunit à Nairobi la 12e Conférence internationale sur le climat. Cette coïncidence est emblématique de la dimension mondiale des problèmes relevant de l'écologie et du développement durable. En quelques mois, le paysage s'est éclairci et des avancées notables ont eu lieu. Les réticences des États-Unis sur le changement climatique, qui ont conduit l'administration Bush à ne pas ratifier le protocole de Kyoto, sont battues en brèche par l'attitude de nombreux États et municipalités américains laissant présager une nouvelle donne au niveau fédéral. Dans le même temps, la nouvelle administration canadienne envisage de sortir du protocole et le Japon lui-même s'interroge. C'est dire que l'effort doit se poursuivre en renforçant les mesures prises au plan national et en préparant Kyoto II ! La France, en l’occurrence, bénéficie de son adossement à l'Union européenne qui, dans ce domaine, est novatrice et fait preuve de cohésion. L'Union européenne est désormais unanime à soutenir la proposition française de mise en place d'une ONUE. Cette proposition, préalable à la constitution d'une OME, correspond à notre engagement en faveur du multilatéralisme et constitue ainsi un levier pour l'ensemble de notre politique étrangère. L'Union européenne représente également un atout, s’agissant d'efficacité énergétique et de stratégie de développement durable. Je souligne à ce propos la pertinence de la campagne de publicité de votre ministère en faveur de l’efficacité énergétique. Le seul changement de comportement d’un certain nombre d’administrations publiques permettrait d’ailleurs d’économiser jusqu’à 10 % de l’électricité qu’elles consomment, soit 50 twh sur 500. Enfin, l’Union européenne est un atout grâce à l’application du système européen d'échanges de quotas. Le marché du CO2 prend une ampleur importante en Europe comme aux États-Unis et il faut noter le rapprochement entre la Californie et le Royaume-Uni sur lequel l'Union européenne se prononce favorablement. Les efforts concertés de lutte contre le changement climatique sont donc réels.

Toutefois, j’appelle l'attention sur un récent rapport des Nations unies : si les émissions de gaz à effet de serre ont légèrement diminué dans les pays industrialisés entre 1990 et 2004, la tendance est à nouveau à la hausse pour la période 2000-2004. Le rapport indique également que la réduction des émissions a été faible en France – 0,8 % – et au Danemark – 1,1 % – alors qu'elle a été très marquée au Royaume-Uni – 14,3 % – et en Allemagne – 17,2 %. Il est vrai que l’on partait de niveaux différents. Sur la période 2003-2004, l'Agence européenne de l'environnement relève que les émissions de CO2 ont augmenté dans notre pays de 0,3 %. Nous devons donc redoubler d'efforts.

Je souhaiterais obtenir quelques précisions sur la création d'un fonds d'achat de crédits carbone doté de 50 millions, qui avait été annoncée en février 2005. Il était notamment destiné à compléter nos instruments de coopération avec les pays du Sud afin de les aider à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. J'ajoute que ce fonds pourrait servir à la constitution d'une réserve de « crédits carbone » qui serait utile pour aider notre pays à remplir ses engagements de réduction des émissions de CO2. La mise en place de ce fonds est-elle prévue dans le Plan climat 2006 ?

Au-delà de la lutte contre le réchauffement de la planète, la France joue également un rôle actif dans les efforts de préservation de la biodiversité. Sur le plan international, elle milite notamment pour la mise en place d'un « mécanisme international d'expertise scientifique sur la biodiversité ». Ces deux champs d'action – changement climatique et biodiversité – sont les priorités du Fonds pour l'environnement mondial, auquel la France apporte une contribution de plus en plus significative. Elles figurent aussi en tête des préoccupations de l'Agence française du développement, donc des actions de coopération bilatérales menées par notre pays. Si les crédits de la mission Écologie et développement durable consacrés à l'action internationale – qui demeurent stables dans un budget global en progression – ne reflètent pas cette réalité, c'est avant tout parce que notre action budgétaire est éclatée entre plusieurs missions. Malgré la LOLF, l'effort de transversalité engagé au niveau du CIDD ou avec la création de conseillers environnement dans les ambassades, à l'instar des hauts fonctionnaires du développement durable dans les ministères, la visibilité budgétaire de notre effort n'est pas parfaite. Je persiste à penser que votre ministère doit avoir un rôle pilote dans ce domaine, en étroite liaison avec le ministère des affaires étrangères, où il conviendrait d’ailleurs de créer une direction des affaires globales. Les contributions françaises aux différents fonds internationaux pour l'environnement ne sont pas versées par le ministère de l’écologie mais, selon les cas, par le ministère des affaires étrangères ou par le ministère des finances. Par exemple, la participation française au fonds pour l'environnement mondial, qui est l'instrument financier des conventions issues de Rio, relève de Bercy. Cette gestion éclatée ne permet pas d'apprécier l'ensemble de nos contributions aux organisations internationales impliquées dans la préservation de l'environnement. Cela est regrettable, car certaines d’entre elles ont progressé de façon significative : la France a par exemple versé, en 2006, 8,9 millions au Programme des Nations unies pour l'environnement, soit une participation en progression de 11 % par rapport à 2005. En ce qui concerne les fonds mis en œuvre au titre de la Convention climat et du protocole de Kyoto, la France prévoit, en 2007, de verser une contribution de l'ordre de 10 millions de dollars au Fonds pour les pays les moins avancés.

Je tiens, en revanche, à saluer la diffusion prochaine d'un « Document de politique transversale » relatif à la politique « climat ». Je souligne également le travail remarquable de la mission interministérielle pour l’effet de serre dont les moyens sont d'ailleurs accrus. Force est cependant de constater qu'un plus grand investissement d'experts français dans les réunions multilatérales est souhaitable. À l'heure actuelle, la MIES ne dispose que d'une seule personne alors que nos partenaires européens disposent d’équipes d'une dizaine de personnes au moins. Il me semble donc nécessaire de renforcer la MIES, dont le fonctionnement repose sur la mise à disposition de personnels d'autres ministères. Le renforcement des outils d’expertise, sur lequel une étude est en cours, serait d’autant plus nécessaire que la coopération avec les pays émergents, comme la Chine et l’Inde, se développe et qu’une double échéance approche, avec la présidence française de l’Union européenne au second semestre 2008, et la négociation sur le futur régime multilatéral du climat, c’est-à-dire Kyoto II. Cette concordance de calendrier constitue pour notre pays un défi.

Au bénéfice de ces modestes observations, la commission des affaires étrangères a, sur ma proposition, donné un avis favorable aux crédits de la mission Écologie et développement durable. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président – Nous abordons la discussion générale.

Mme Geneviève Gaillard – Une enquête récente sur le thème des Français et de l’environnement révèle que 95 % des personnes interrogées sont très préoccupées par cette problématique, ce qui n’est pas surprenant, au vu des dégradations constatées chaque jour et des répercussions dont ils souffrent parfois dans leur chair – sans parler du coût en matière de santé publique, les premiers touchés étant, en France comme dans le monde, les plus pauvres.

Le rapport de l'Institut français de l’environnement, publié en octobre dernier, montre parfaitement ce qui est en train de se passer dans notre pays. Malgré quelques avancées ponctuelles, l'état de l'environnement est loin d'être bon. La possible entrée en lice pour les présidentielles de Nicolas Hulot, qui avait en son temps conseillé le chef de l’État et placé quelques espoirs en lui pour engager une politique volontariste de l’environnement, démontre la crise de confiance de l'opinion publique et des ONG. Les citoyens ne s’y trompent pas, et constatent qu’il y a loin des incantations aux crédits effectivement mobilisés. Ils se sentent aujourd'hui abusés, et ce budget de l’environnement pour 2007 ne peut que conforter leur analyse. Pollution de l’eau, de l’air, des sols, diminution de la biodiversité, augmentation des émissions de gaz à effet de serre : autant d’atteintes à l’environnement dont le comportement de nos concitoyens n’est bien sûr pas seul responsable. Tous les ministères sont concernés – transport, agriculture, pêche, tourisme, ville, économies et finances – et le vôtre, Madame la ministre, ne fait que tenter de remédier aux déviances des autres. Même s’il augmente légèrement cette année, il ne représente que 0,4 % du budget général. Il faudrait beaucoup plus, car avancer dans le bon sens sans élan collectif peut être fatal. Pis, s'arrêter au milieu du gué fait courir le risque d'être submergé !

Le projet de loi sur l'eau, actuellement en cours de discussion, véritable serpent de mer, reste très en deçà de ce que nous sommes en droit d’attendre, et ce malgré l'inscription dans le corpus constitutionnel du principe de précaution et du principe pollueur-payeur. Notre collègue Jean Launay y reviendra. De même, la loi littoral, qui datait pourtant de 1986, a été sournoisement dénaturée par un amendement qui modifie l'article L. 145-1 du code de l'urbanisme. En effet, un décret publié cet été rend donc possibles les constructions en bordure de petits estuaires, sur les rivages des rias, des étiers et des marais côtiers, toutes zones auparavant protégées. De petites choses, me direz-vous, mais si importantes !

Le programme Prévention des risques et lutte contre les pollutions est le grand perdant. Ses autorisations d’engagement comme ses crédits de paiement diminuent. Je trouve, ainsi que mon collègue Kucheida, surprenant, pour ne pas dire plus, que le ministère de l’industrie ait décidé de dissoudre l'Agence de prévention et de surveillance des risques miniers. La gestion de ces risques est essentielle pour les populations des huit cents communes minières du Nord-Pas-de-Calais, de Lorraine, du Centre Midi et du Grand Ouest. N’auriez-vous pas pu, Madame la ministre, éviter un tel gâchis ?

Le programme Gestion des milieux et biodiversité est, lui, le grand gagnant. Néanmoins, on peut s’interroger sur le volet préservation de la nature et de la biodiversité, vu la lenteur avec laquelle sont lancés les plans d'action. En dépit de ce qui a été fait, la biodiversité continue de diminuer. Il manque toujours des moyens humains, des moyens financiers et une véritable volonté politique. Alors que nous fêtons cette année le trentième anniversaire de la loi de 1976, grande loi de la République qui organise la protection de la faune et la flore, et constitue un repère dans notre histoire collective en ce qu'elle consacre la protection de la nature dans son ensemble et affirme que la technique n'est pas seulement source de progrès mais aussi de risque, le cadeau d'anniversaire aurait pu être plus gros ! Il est bien de créer de nouveaux parcs naturels, notamment celui de Guyane, qui était très attendu, mais il vous a fallu, Madame la ministre, rappeler à l’ordre le ministre de l’industrie après l’autorisation donnée de poursuivre l’orpaillage sur le territoire même du parc. Voilà qui montre l’intérêt que portent certains de vos collègues au respect de l’environnement !

Ce programme, dont les moyens progressent sensiblement, devrait toutefois faire l’objet d’une analyse plus détaillée, mon collègue Chanteguet y reviendra. Pour parvenir à une bonne préservation des zones humides, les objectifs devraient être bien plus ambitieux. Il est regrettable à cet égard que l'on ait ergoté sur l'exonération de la TFNB lors de l’examen du projet de loi sur le développement des territoires ruraux, n'accordant une exonération totale qu'à une partie seulement des zones humides. En outre, prévoir que 2 % seulement des zones humides bénéficient d'une intervention des agences de l'eau signifie-t-il que l'on tire un trait sur les 98 % restants ? Ces zones fragiles sont pourtant indispensables à une bonne gestion de l'eau et au maintien de la biodiversité. Leur disparition peut même faire peser des risques sur la santé humaine, on l’a vu avec la grippe aviaire.

J’espère, Madame la ministre, que vous vous opposerez fermement à la diminution des crédits destinés à accompagner la réintroduction de l’ours dans les Pyrénées, proposée par voie d’amendement. Je m’inquiète également du plan Loup qui autorise le tir de six animaux par an, mesure injuste qui peut de surcroît se révéler contre-productive. De plus, on a tué deux loups dans l’Isère l’hiver dernier, dans l’irrespect total de la procédure qui prévoit la levée du dispositif dès l’abattage d’un loup. Je m’étonne que ceux qui, dans cet hémicycle, hurlent si facilement au nom du respect de la propriété privée, ne hurlent pas au nom du respect de la loi.

Je souhaiterais également, Madame la ministre, connaître votre sentiment sur la procédure visant à redonner au Marais poitevin le label de parc naturel interrégional qui se heurte aux assauts répétés du président du conseil général de Vendée, M. de Villiers et, hélas, de certains parlementaires de votre majorité. Je crains que nous ne parvenions pas à reconquérir ce label.

Pour ce qui est du programme Conduite et pilotage des politiques environnementales et développement durable, on est loin des objectifs attendus par nos concitoyens, et ce en dépit des grandes déclarations du Gouvernement. Les crédits disponibles ne sont pas à la hauteur des défis en matière de diminution des émissions de gaz à effet de serre et de développement des énergies renouvelables. Les politiques publiques sont trop souvent illisibles. Et je ne pense pas que votre ministère ait aujourd'hui les capacités d’engager une inflexion majeure. Mon collègue Tourtelier y reviendra.

S’agissant de la stratégie nationale du développement durable, je regrette que les recommandations du CNDD n'aient pas été intégrées à leur juste valeur. Je déplore le manque de cohérence de certains des indicateurs choisis, ainsi que le manque de lisibilité des évolutions d'une année sur l'autre. Insistant sur la révision des objectifs, on ne rend pas compte des retards et des blocages. C’est une manière d’effacer les mauvais états de réalisations. J'ai peine à comprendre comment le Haut comité des fonctionnaires peut être satisfait. Nous nous interrogeons sur la finalité actuelle de la SNDD. Optimisation réelle de l'effort national ou faire-valoir narcissique sans obligation de résultat ?

Si les crédits de la mission Écologie et développement durable augmentent, une augmentation, même forte, sur un budget étique ne donne jamais de grandes marges de manœuvres. De plus, le Gouvernement a décidé de reconduire en 2007 les modalités de la réserve de précaution mise en place en 2006, ce qui n'arrange rien.

La mission d'information parlementaire sur la mise en oeuvre de la LOLF considère que la mission Écologie et développement durable manque de lisibilité. Elle regrette notamment son caractère purement ministériel. Cette présentation ne remédie pas à l’éparpillement des actions de l'État, ce qui interdit une analyse aussi pointue qu'on le voudrait. En outre, de nombreux indicateurs de performance utilisés dans la loi de finances pour 2006 ont été remplacés sans qu'on puisse juger de leur efficacité.

Critiquant ce budget, je ne dénigre pas votre action, Madame la ministre. On sait le combat que vous avez mené cet été pour obtenir les meilleurs arbitrages budgétaires. Alors que les prévisions sur le réchauffement climatique puis le prix galopant du pétrole stocké et le tarissement parallèle des ressources accessibles ont suscité une réponse électoraliste du Gouvernement, avec la fausse bonne idée des biocarburants à tout-va, merci à vous d'avoir su dénoncer les faiblesses et les limites de cette idée.

Votre bonne volonté ne peut hélas compenser la faiblesse de votre budget, accentuée par l'action et les financements des autres ministères. Les moyens budgétaires consentis à la préservation de l'environnement et au développement durable sont, hélas, inversement proportionnels à l'urgence et à la gravité des menaces, ainsi qu'à la somme des discours et vœux pieux, voire démagogiques, du Gouvernement. C'est pourquoi nous ne voterons pas ce budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Jean Lassalle – Nous examinons ce matin, avec le budget de l’environnement, la partie la plus hypocrite du budget de l’État. Il ne représente que 0,4 % du budget général alors qu’il devrait être le premier. Et si nous en débattons devant dix députés en tout et pour tout, y compris vous-même, Monsieur le Président, c’est que nous sommes tous gênés qu’un domaine aussi crucial dispose d’aussi faibles moyens.

Je me suis demandé comment j’avais pu autant vous blesser l’an dernier, Madame la ministre, en évoquant les nuisances sonores de l’aéroport de Roissy à Garges-lès-Gonesse. Vous aviez jugé inadmissible que quelqu’un qui ne connaissait rien à ces problèmes vous « donne des leçons », à vous qui étiez maire de cette commune depuis trente ans. J’avais trouvé cela un peu fort, mais j’ai compris depuis : l’Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires, en faisant le bilan des carences de l’action publique, parle de « catastrophe environnementale ». Certaines communes ont une concentration plus importante que d’autres en oxyde d’azote. Nous sommes passés de 530 000 atterrissages ou décollages en 2004 à plus de 900 000 en 2015, soit d’un avion par minute à un avion toutes les trente secondes : un doublement des nuisances sonores et rejets chimiques. Face à cette catastrophe, on tente de nous anesthésier avec des mots, développement durable, approche équilibrée, commerce équitable. Mais les populations survolées ne sont pas dupes et, face au mépris des pouvoirs publics, elles sont déterminées à mener cette année un combat devant les tribunaux. Je pourrais également évoquer les problèmes de santé publique et la décote des appartements. C’est un bien tragique bilan, et je comprends votre gêne, Madame la ministre.

Tout a été réglé grâce à la biodiversité, par l’arrivée de cinq ours dans les Pyrénées, dont une s’est suicidée. Elle ne voulait pas que son enfant naisse dans un lieu où elle avait été transportée brutalement, déracinée. Il a fallu 300 gardes mobiles chaque fois qu’un ours était introduit, et vous êtes vous-même venue en papamobile, n’hésitant pas à traiter les Pyrénéens d’ânes et d’imbéciles. Vous avez même réussi à réaliser une introduction de nuit. On ne peut plus, dans nos Pyrénées, baisser culotte derrière un arbre sans y trouver un garde-chiourme. C’est un véritable régime policier, qui rappelle les plus tristes heures de notre histoire. Et nous en sommes réduits à nous expliquer devant les tribunaux.

Nous voilà bien loin des véritables enjeux de la planète. Je reviens du Rif marocain, où des centaines d’hommes et de femmes essaient de passer en Espagne pour rejoindre le continent européen. Ils sont eux aussi déracinés de leurs territoires, où il n’y a aucun avenir pour eux, car ils y sont méprisés.

Vous avez, Madame la ministre, au nom de la biodiversité – pour calmer ceux qui vont monter au créneau contre vous du côté de Roissy – humilié les Pyrénéens. Vous n’aviez pas le droit. Je me fais de la politique environnementale de notre grand pays une tout autre idée. Je m’arrête là, car je pense que vous avez compris ma démarche.

M. Patrick Braouezec – L’actualité est dominée par la question du changement climatique, particulièrement cette semaine, quelques jours après la Journée internationale contre le changement climatique, passée totalement inaperçue, et alors qu’une conférence internationale se tient actuellement à Nairobi. Nous ne comptons plus les films, documentaires, articles de presse, rapports d’information, prises de position politiques qui s’alarment des conséquences désastreuses de l’effet de serre sur notre planète : sécheresses, cyclones, inondations, hausse des températures qui frappent principalement des populations déjà vulnérables. En avril dernier, la mission parlementaire présidée par Mme Kosciusko-Morizet a remis un rapport préconisant de poursuivre un objectif de réduction des gaz à effet de serre de 25 % d’ici à 2020, au lieu des 5,2 % d’ici à 2012 du Protocole de Kyoto. Quant au Président Chirac, il déclarait en 2002, à Johannesbourg : « Notre maison brûle et nous regardons ailleurs. La nature, mutilée, surexploitée, ne parvient plus à se reconstituer et nous refusons de l’admettre. » Nous aurions envie d’applaudir. Mais qu’a fait le Gouvernement depuis 2002 ? Vous avez privatisé GDF, adopté une loi sur l’eau qui en fait un bien marchand, abandonné la gestion des déchets nucléaires aux intérêts privés !

Le Gouvernement se targue aujourd’hui, en proposant un budget ministériel qui passe de 0,26 à 0,39 % du budget national, de prendre la mesure du problème. Mais, derrière les discours de façade, la recherche est inexistante, la ligne « Lutte contre le changement climatique » a disparu, et nous ne voyons rien du grand programme pour le développement des énergies renouvelables. Mais surtout, il vient de privatiser GDF, alors que seule l’existence d’un pôle public de l’énergie rendrait possible une recherche efficace en matière d’énergies renouvelables. L’énergie et l’eau sont des biens publics mondiaux trop importants pour les laisser aux seuls intérêts financiers, mais votre budget ne tient pas compte de ces aspects. Plutôt que l’intérêt général et le long terme, ce sont les opérations financières qui primeront.

Le très pertinent rapport Stern, commandé par Tony Blair et publié le 30 octobre, révèle que le coût économique du réchauffement climatique pourrait s’élever à 5 500 milliards d’euros à défaut de mesures contre l’émission de gaz à effet de serre. Les investissements dans cette lutte nécessaire ne pénaliseraient donc pas les économies, mais seraient au contraire créateurs de richesses. Le même rapport insiste sur la nécessité d’investir dans la recherche et le développement ainsi que dans les nouvelles technologies moins polluantes. Je ne vois rien de tel dans votre budget.

M. Jean Lassalle – C’est vrai !

M. Patrick Braouezec – Nous ne pouvons plus rejeter la faute sur nos concitoyens, qui seraient mal éduqués, incapables de gérer correctement leur consommation d’électricité ou trop dépendants de leurs véhicules. Il est certes important de responsabiliser les gens, mais nous ne pouvons pas leur faire porter le chapeau.

Mme Geneviève Gaillard – Très bien !

M. Patrick Braouezec – La réponse doit être avant tout politique. Ainsi, la crise du logement contraint les populations urbaines à s’éloigner des centres. Or, les moyens de transport n’étant pas suffisants, le recours à la voiture augmente ! Le libéralisme sauvage dont votre politique fait preuve impose des choix contraires aux principes fondamentaux du développement durable. Comment pouvez-vous envisager de construire encore 3 000 kilomètres d’autoroutes ces vingt prochaines années ? Comment osez-vous faire l’apologie des transports complémentaires, alors que les crédits du programme Transports terrestres et maritimes diminuent de 11,5 % ?

M. Jean Lassalle – Eh oui !

M. Patrick Braouezec – Nous attendions un véritable engagement des pouvoirs publics en faveur du ferroutage et du transport fluvial, passant par la constitution d’un grand service public du transport.

Nous devons également promouvoir de façon déterminée la diversification de nos sources d’énergie, et en particulier le développement des énergies renouvelables, pour compenser l’épuisement rapide des sols et des ressources pétrolières, mais aussi les risques de pertes d’indépendance énergétique, du fait de l’insuffisance croissante de nos capacités de production. Le développement des énergies renouvelables n’est pas rentable à court terme, mais il s’agit d’investir dans l’avenir de notre planète. D’aucuns ont emprunté cette voie ; ils n’en retirent aucun avantage financier, ou à peine.

Ce sont les plus modestes qui pâtissent le plus de cette dégradation. Qui, en effet, est le plus durement touché par la hausse des charges dans les logements et du prix de l’essence ?

Mme Geneviève Gaillard – Très bien.

M. Patrick Braouezec – Qu’en est-il de la taxe pollueur-payeur ? Les pollueurs sont-ils taxés à la hauteur de la pollution qu’ils engendrent ? Si les bénéfices de certaines entreprises sont indécents, cette indécence est d’autant plus grande que les bénéfices ne sont jamais taxés. Les entreprises doivent supporter les conséquences de leur action sur l’environnement afin que le slogan « qui pollue, paie » devienne effectif.

Réduire de 25 % nos émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2020 suppose de remettre à plat tout ce qui y incite, en commençant par abolir l’exonération de TVA pour le kérosène dans le transport aérien. Mais le rapport de Mme Kosciusko-Morizet…

M. Jean Launay – N’oubliez pas M. Le Déaut !

M. Patrick Braouezec – …n’a pas retenu l’attention du Gouvernement. Quid de la proposition de faire basculer la fiscalité qui pèse sur le travail vers une fiscalité qui pèserait sur la pollution ?

L’enjeu du débat porte sur les conditions de vie des générations futures et l’avenir de la planète. Parce que vous ne nous présentez qu’un budget de façade, le groupe communiste et républicain ne le votera pas. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Didier Quentin – Madame la ministre, il m’est agréable de saluer la détermination tranquille qui vous anime, au moment où le regard de la société française sur les questions d’écologie et de développement durable s’aiguise. Les changements climatiques, la conscience que les ressources ne sont pas illimitées, les menaces sur la biodiversité nous conduisent à des changements de priorité et de comportement. L’expression d’« urgence écologique » est entrée dans le langage courant.

Il est satisfaisant que le budget pour 2007 consacre à l’environnement des moyens en augmentation. Priorité est donnée à la protection de la biodiversité, à la prévention des risques, à la qualité de l’eau.

Il faut enrayer la perte de biodiversité d’ici à 2010. Les crédits affectés à la biodiversité sont donc en forte croissance, augmentant de 30 %. Cela permettra d’appliquer la loi sur les parcs nationaux qui a créé le parc amazonien et celui de La Réunion, ainsi que l'établissement public des parcs nationaux de France. Nous nous félicitons qu'un amendement adopté lors de l’examen de la première partie de la loi de finances permette d'abonder de 3 millions la DGF des communes situées dans les parcs nationaux. L’accroissement de ces crédits permettra d’autre part la constitution du réseau des 1 700 espaces protégés Natura 2000 que la France, respectant enfin l’échéance fixée, a présenté à la Commission européenne. Ces sites couvrent désormais 6,5 millions d'hectares, soit 11,8 % du territoire métropolitain.

S'agissant de la prévention des risques technologiques, le budget permet, fort heureusement, de poursuivre l’augmentation du nombre d'inspecteurs des installations classées, notamment par la création de nouveaux postes attendus pour assurer le contrôle efficace des sites industriels.

Ce programme permet également d'accompagner la montée en puissance des plans de prévention des risques technologiques et de prévention des risques naturels.

Les progrès faits en matière de gestion des déchets rendent réalistes les objectifs fixés. Le nombre de décharges illégales a été ramené de 942 en septembre 2004 à 414 en juillet 2006. Grâce à votre détermination, Madame la ministre, la mise aux normes de tous les incinérateurs est achevée, ce dont nous nous félicitons.

Vous vous êtes également engagée dans une politique volontariste d'amélioration de la qualité de l'air et de l'environnement sonore avec l'application du plan national d'action contre le bruit. À l’avenir, il serait souhaitable de mieux identifier les crédits affectés à cette action.

Pour mettre en œuvre la politique de l'eau, le ministère va se doter d'un nouvel instrument ; l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques. Quand sera-t-il opérationnel ? D’autre part, la dispersion des crédits consacrés à cette politique entre deux programmes différents dans la mission « Écologie » n'en facilite pas la lisibilité. Il serait souhaitable de regrouper ces moyens au sein d'un même programme.

Mme Geneviève Gaillard et M. Jean Lassalle – Très juste.

M. Didier Quentin – Votre ministère accompagne également les politiques transversales de développement durable et de lutte contre l'effet de serre. Le pacte national pour l'environnement présenté par le Premier ministre illustre une politique voIontariste dont nous nous félicitons. Je ne reviendrai pas sur l'action conduite au plan international, largement évoquée par M. Guillet. Faute de temps, je ne pourrai aborder, comme je l’aurais souhaité, la question de l'enseignement de l'environnement à l'école, mais je note que près de la moitié des propositions du parlement des enfants portait, cette année, sur des sujets liés à l'écologie.

Vous me permettrez enfin de souligner l'action du Conservatoire du littoral que j’ai l'honneur de présider. Avec le soutien du Président de la République, qui a décidé, à l’occasion du trentième anniversaire de sa création, qu’une ressource pérenne lui serait allouée, l’établissement public poursuit sa mission. En 2006, le Conservatoire, dont le domaine reçoit chaque année plus de 30 millions de visiteurs, a franchi le seuil de 100 000 hectares définitivement protégés, soit plus de 10 % des rivages de métropole et d'outre-mer. Ce résultat est encourageant, mais il convient de ne pas baisser la garde pour atteindre, à l'horizon 2050,« le tiers naturel », soit 270 000 hectares acquis ou affectés. Dans cette perspective, le Premier ministre a annoncé lors de l'installation du Conseil national du littoral, le 13 juillet 2006, le versement au Conservatoire de 100 % – au lieu de 80 % en 2006 – du produit du droit de francisation des bateaux, soit 35 millions. Ce montant qui représenterait, comme l'a voulu le Président de la République, une augmentation de quelque 40 % de nos moyens d'action, nous permettrait d'engager des opérations ambitieuses aux Salins du Midi, dans le domaine du Marquenterre et dans l'estuaire de la Gironde. Je tiens à souligner que ces acquisitions ne sont pas une fin en soi, mais qu’elles visent à préserver l'avenir et à permettre la mise en valeur des sites ainsi protégés, en liaison avec les collectivités territoriales – premiers partenaires du Conservatoire –, les usagers et les exploitants, qu'ils soient agriculteurs, éleveurs ou conchyliculteurs.

Je tiens néanmoins à faire part de ma crainte. Saint Augustin disait certes que « rien n'est perdu, tant qu'il reste l'inquiétude », mais il se trouve que le nouveau dispositif de perception du droit de francisation a généré une recette inférieure aux prévisions. Je présenterai donc, avec le soutien du Gouvernement, un amendement à ce sujet à la loi de finances rectificative pour 2006. Je compte sur chacune et chacun d'entre vous pour donner au Conservatoire les moyens de poursuivre son action dans l'esprit du contrat d'objectifs.

Je crois pouvoir dire que l’action de l'établissement public est très consensuelle et qu'elle sert de référence pour de nombreux pays. À cet égard, je me réjouis, Madame la Ministre, que vous ayez pu apprécier tout l'intérêt de la contribution que nous apportons à l'action de coopération internationale de la France en vous rendant récemment, à l'invitation des autorités tunisiennes, sur le site de Korba au Cap Bon, qui a été protégé et aménagé avec l'assistance scientifique et technique du Conservatoire du littoral.

Le budget, sérieux et rigoureux, de votre ministère s'inscrit dans l'action déterminée conduite depuis 2002 en faveur de l'environnement et du développement durable. C'est pourquoi, au nom du groupe UMP, je vous invite à voter les crédits du ministère de l'écologie. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Paul Chanteguet – Je traiterai des actions concernant la protection de la biodiversité, enjeu vital pour l’humanité comme il transparaît dans la Convention de Rio signée en 1992 sous l’égide des Nations unies. Or, la situation est aujourd’hui alarmante, la biodiversité régressant au niveau planétaire ; si nous ne faisons rien, de nombreuses espèces de la faune et de la flore auront disparu d’ici quelques années. En France, 10 % des espèces de flore connues et près de 35 % des espèces de mammifères sont considérées comme en danger ou vulnérables. L’Union européenne s’étant engagée, en 2002, à stopper la perte de biodiversité d’ici 2010, Mme Bachelot avait défini une stratégie nationale qui a débouché en novembre 2005 sur la présentation des premiers plans d’action sectoriels qui, pour la plupart, reprennent des décisions déjà prises. Je note avec satisfaction la progression de près de 32 % des crédits qui seront consacrés en 2007 à la protection de la biodiversité mais, aussi encourageant que soit ce montant, il ne représente que 0,053 % du budget de l’État…

Ce budget en forte augmentation doit permettre l’application de la nouvelle loi sur les parcs nationaux et la gestion concertée du réseau Natura 2000. Si je loue votre volonté de faire aboutir dans les meilleurs délais la réalisation du parc amazonien en Guyane, je m’inquiète d’une certaine incohérence gouvernementale. En effet, alors que le Gouvernement a annoncé, le 11 octobre, avoir refusé le projet d’exploitation aurifère de la société canadienne Cambior en raison de « quelques lacunes » en matière écologique, les Guyanais viennent d’apprendre que M. Loos avait accordé, le 1er août, contre l’avis des élus, des administrations et du préfet, un permis de recherche à la société Rexma sur le territoire de la commune de Saül, c’est-à-dire en zone de protection forte du schéma d'aménagement régional et en bordure d'une zone « cœur » du projet de parc national amazonien. Le conseil régional a annoncé son intention d'attaquer en justice l'arrêté ministériel, et vous vous êtes vous-même inquiétée, Madame la ministre, des conséquences de cette décision, indiquant dans un courrier à M. le ministre délégué à l’industrie que le permis qu’il avait accordé « ferait immanquablement basculer la mairie de Saül dans l’opposition au projet de parc national et ferait le jeu des opposants au parc », et lui en demandant le retrait. M. Loos a-t-il répondu favorablement à votre sollicitation ? Dans le cas contraire, il y a lieu de craindre que l’État ne soit pas en mesure de créer le parc amazonien en 2007.

Le réseau Natura 2000 est un autre outil de la politique de préservation de la biodiversité, et je note avec satisfaction une hausse de 38 % des crédits qui lui sont destinés. Quant aux parcs naturels régionaux, où vivent 7 millions d’habitants et qui s’étendent sur 12 % du territoire, ils constituent depuis quarante ans une véritable infrastructure écologique. La contribution de l’État à leur fonctionnement ayant baissé de 7 % en 2006, leurs gestionnaires ne comprendraient pas que vous ne donniez pas suite à leur demande de revalorisation des dotations. L’élaboration des futurs contrats de plan État-région est pour eux une autre source de préoccupation, car ils s’interrogent sur la place qui leur sera réservée.

Enfin, je tiens à dénoncer avec force l’incapacité des responsables politiques de prendre en considération le rôle des zones humides dans la protection de la biodiversité. La loi sur le développement des territoires ruraux devait fixer un cadre juridique spécifique pour ces zones. Mais les décrets d’application ne sont toujours pas publiés. Ensuite, le ministère de l’agriculture a rejeté l’idée, avancée par le groupe d’experts réuni par le ministère de l’écologie, d’instituer une indemnité spéciale pour les zones humides dans le plan de développement rural 2007-2013. Pourtant, la France respecterait ainsi ses engagements internationaux et européens, comme la directive cadre sur l’eau et Natura 2000. Il faut soutenir financièrement l’élevage dans ces zones pour compenser les contraintes liées au maintien de la biodiversité, de la qualité des sols et des ressources en eau et à la régulation des crues. Ce rejet est d’autant plus choquant que des dispositifs identiques, à savoir l’indemnité compensatoire pour handicap naturel dans les zones de montagne, et celle consentie à titre expérimental pour le marais poitevin, ont été efficaces. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

La séance, suspendue à 10 heures 50 est reprise à 11 heures 5.

M. Denis Merville – Le dernier budget de cette législature consacre aux politiques environnementales des moyens en augmentation de 2,5 % et témoigne de l’importance que leur accorde le Gouvernement. Il s’inscrit dans la continuité de son action, marquée entre autres par la loi sur l’eau, le plan climat, la stratégie nationale pour la biodiversité ou le renforcement de la prévention des risques technologiques ou naturels. Il réaffirme également les engagements pris par le Gouvernement en matière de développement durable et de lutte contre le réchauffement climatique. Il faut donc saluer ce budget, Madame la ministre, même si je sais que vous auriez aimé aller encore plus loin : la conscience écologique n’est pas encore la plus répandue à Bercy.

La loi sur l’eau et les milieux aquatiques était attendue avec impatience, depuis plus de dix ans déjà. Elle modernise notre législation, l’adapte aux nouveaux enjeux et transpose la directive cadre européenne sur le bon état écologique des eaux. Sa discussion est, je l’espère, sur le point d’aboutir. Le texte pourra-t-il être promulgué avant la fin de l'année ? Il a été enrichi, au cours de la discussion : représentation des maires au sein des comités de bassin, solidarité envers les communes rurales, maintien des missions du SPANC par exemple. La loi sur l'eau doit également jouer un rôle pédagogique, en nous faisant prendre conscience de certains enjeux et en nous incitant à modifier nos comportements. L’eau est un bien commun et précieux. Il faut des traitements lourds et souvent coûteux pour la rendre potable. Il est donc évident qu’il ne faut pas utiliser de l’eau potable pour laver sa voiture ou arroser son jardin. Pour inciter nos concitoyens à installer des système de récupération des eaux pluviales, vous aviez accepté, en première lecture, d’instituer un crédit d’impôt de 40 % de la dépense. Ce taux a été ramené à 15 % au Sénat. Il me semble essentiel qu’il soit rétabli.

En ce qui concerne le réchauffement climatique, les conclusions de la mission d'information sur l'effet de serre sont sans ambiguïté : c’est le défi majeur du siècle qui s'ouvre et les activités humaines en sont indéniablement la cause principale. La mission a formulé un ensemble de recommandations touchant à tous les domaines : implication des pouvoirs publics, information des citoyens, mesures fiscales, quotas, recherche... Quelles mesures précises entendez-vous prendre, notamment pour actualiser le plan climat ? Confirmez-vous les objectifs que nous avons fixés en matière d’énergies renouvelables et d'économies d'énergie, et les moyens de l'ADEME seront-ils à la hauteur ? J’avais posé ces questions en commission des finances, mais sans obtenir de réponse précise.

Pour nous permettre de respecter nos engagements en matière de réduction des gaz à effet de serre, le Gouvernement a élaboré un plan en faveur des biocarburants. Je m’en félicite. Dans le contexte actuel, il est indispensable d’inciter fortement à leur développement, et c'est aussi un moyen de redonner des espoirs à un monde agricole qui en a bien besoin. Néanmoins, une action complémentaire pour la promotion des huiles végétales pures permettrait de réduire davantage les émissions de gaz à effet de serre, de diversifier les activités agricoles et de diminuer la facture pétrolière. La France a déjà fait un pas en autorisant, dans la loi d'orientation agricole du 5 janvier 2006, la commercialisation de l'huile végétale pure en tant que carburant agricole, à compter du 1er janvier 2007. Ce n'est cependant pas suffisant au regard de la directive européenne, dont on attend toujours la transposition en droit français. Il faudrait généraliser l'utilisation de l'huile végétale pure comme carburant – au moins, dans un premier temps, dans les collectivités locales et administrations. Qu’allez-vous faire dans ce domaine ?

En avril dernier, nous avons adopté un texte réformant les parcs nationaux et faisant de la préservation de l'environnement un objectif constitutionnel. Mais la situation financière des trois quarts des parcs naturels régionaux est spécialement difficile. D'une façon générale, leurs moyens de fonctionnement se composent d’une part statutaire, d'une participation du ministère et de crédits venus des contrats de Plan et des fonds européens. Certains parcs avaient réussi, dans le dernier contrat de Plan, à signer un contrat de Parc permettant une globalisation pluriannuelle de leurs ressources de fonctionnement. Le parc naturel régional des Boucles de la Seine normande, dans mon département, en avait fait la demande, qui n'avait pas été acceptée. Aujourd’hui, avec la disparition des emplois aidés et la fin du contrat de Plan, ce parc connaît de grandes difficultés. Il voudrait avoir la certitude d’être éligible aux contrats de projet, notamment pour la partie ingénierie financière.

M. Jean Lassalle – Très bien !

M. Denis Merville – Nous avons voté il y a quelques années un plan de prévention des risques technologiques et naturels très intéressant, mais il me semble que la part qui reste à la charge des particuliers est trop élevée, pour lutter contre des risques créés, tout de même, par l’industrie. Quant à la lutte contre les inondations et l’érosion des sols – et mon département est particulièrement touché – les dossiers avancent, mais les procédures sont souvent bien trop lourdes.

M. Jean Lassalle – C’est vrai !

M. Denis Merville – Lors des inondations, comme il y en a eu encore il y a quelques semaines, on continue à en accuser les élus, plutôt que les fonctionnaires qui bloquent les dossiers.

M. Jean Lassalle – Très bien !

M. Denis Merville – Le Plan national santé environnement a permis, pour la première fois, de mener des actions destinées à améliorer la santé de nos concitoyens par le biais de la qualité de leur environnement. C'est un tournant dans la lutte contre les pollutions. Ce plan appelle toutefois un suivi et une mise à jour en fonction de l'évolution des connaissances. Un premier rapport d'étape a-il été élaboré ? Par ailleurs, selon de récentes études, les lignes à très haute tension peuvent présenter des risques pour la santé humaine. Certains pays européens en ont prescrit le déplacement ou en ont interdit l’installation à proximité des habitations, comme la Suède ou l'Italie. La France, elle, continue à en construire. Toutes les précautions sont-elles prises ?

Vous avez fixé l’objectif de réduire la production de déchets, aujourd’hui de 360 kilogrammes par personne et par an, à 250 kilogrammes dans cinq ans et à 200 dans dix ans. Des moyens ont été dégagés à cette fin au cours des derniers mois. Comment comptez-vous poursuivre vos efforts en ce domaine ? En compagnie de Jacques Pélissard, j’ai déposé un amendement tendant à préciser une disposition adoptée l’an dernier en loi de finances et visant à accorder un avantage aux communes qui acceptent l’implantation d’un incinérateur sur leur territoire.

S’agissant de la chasse, il est regrettable que les dates d’ouverture de la chasse au gibier d’eau soient sans cesse modifiées. Nous aurions besoin de pacifier la situation en fixant des dates précises.

M. Jean Lassalle – Très bien !

M. Denis Merville – J’ajoute que je m’associerai à l’amendement déposé sur la récupération des textiles.

Toutes ces actions ont un coût, j’en conviens, mais celui de l’indifférence et de l’égoïsme sera bien plus grand encore dans quelques années. Aux pratiques habituelles du « chacun pour soi » doit maintenant succéder le réflexe « chacun pour tous ». Nous devons nous sentir responsables et agir sans attendre, en favorisant l’éco-citoyenneté et en intégrant l’environnement dans toutes nos politiques. Grâce au développement durable, nous préserverons le monde que nous laisserons à nos enfants. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF)

M. Philippe Tourtelier – Nos débats me font songer à ceux qui ont accompagné la chute de Constantinople : alors que les Turcs étaient aux portes de la ville, on continuait à discuter du sexe des anges !

Il est vrai que cette mission représente pour la première fois 0,4 % du budget global, et que vous avez essayé d'utiliser toutes les marges de manœuvre, si minces qu’elles fussent. Mais vous n'êtes pas à l'abri des gels de crédit : l'an dernier, les associations chargées des réserves naturelles avaient par exemple obtenu une rallonge de 10 % des crédits de paiement, mais les gestionnaires n’avaient reçu aucun paiement fin août, les crédits ayant été gelés ; il a donc fallu négocier avec les banques d’importants déficits de trésorerie… Comme d'habitude, vous en êtes réduite, Madame la ministre, à faire de l'épicerie avec Bercy sur votre budget, l'un des plus faibles de cette loi de finances.

Pendant ce temps, le changement climatique se poursuit : trois rapports sur ce thème ont été publiés en 2006, insistant sur l’extrême urgence des mesures que nous devons prendre – celui de la mission Effet de serre en avril, celui de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques en juin, et enfin le rapport « facteur 4 » en juillet. J’ajoute que le rapport Stern vient encore d’enfoncer le clou il y a une semaine, alors que la conférence sur le climat doit se tenir bientôt à Nairobi.

Et pourtant, on a du mal à trouver dans votre budget ce qui relève du changement climatique ! Vous en restez à des classifications anciennes, qui n’accordent aucune priorité à la lutte contre l’effet de serre. Pis encore, vous avez supprimé l’action relative à la lutte contre le changement climatique qui figurait dans le premier programme.

M. Jean Lassalle – Mais que fait Nicolas Hulot ? (Sourires)

M. Philippe Tourtelier – Ce n’est que dans le programme Conduite et pilotage des politiques environnementales et du développement durable que l’on trouve enfin une mention de la lutte contre les gaz à effet de serre, qui ne bénéficie que de 5,5 % du programme.

Vous faites comme si la terre ne se réchauffait pas, alors que près des deux tiers des crédits de votre ministère concernent le réchauffement climatique : l’eau, les risques naturels et la biodiversité. Tout le monde verra dans quelques années, que les crédits de votre ministère sont non seulement d’une insuffisance dramatique, mais surtout qu'ils auront été dépensés en pure perte faute de lutter contre le réchauffement climatique.

M. Jean Lassalle – On ne fait rien !

M. Philippe Tourtelier – Cela vaut pour la ressource en eau, les zones inondables, mais aussi pour la gestion des milieux naturels : chaque fois, on raisonne comme si le climat devait rester constant ! Or, que vont devenir les espèces actuellement protégées avec l'augmentation de la température ? Dans le meilleur des cas, elles migreront de 100 kilomètres vers le Nord par degré supplémentaire, à condition qu'une politique de grands corridors écologiques soit menée, ou bien elles monteront de 150 mètres en altitude, si elles le peuvent. Dans le pire des cas, elles disparaîtront ! Les parcs naturels de demain ne seront pas ceux d’aujourd’hui, et les espèces présentes ne seront pas les mêmes ! Nous devons anticiper toutes ces mutations avec l'aide des associations de terrain, qui suivent au jour le jour les évolutions des milieux.

Nous savons tous que les principaux facteurs du réchauffement climatique ne dépendent pas de votre ministère : jusqu'à quand vos politiques continueront-elles à servir d’alibi ? Vous prétendez que le changement climatique est une de vos préoccupations essentielles, mais rien dans votre budget ne le confirme ! Alors que nous avons besoin d’actions coordonnées, menées avec autorité, la mission « interministérielle » sur l'effet de serre a perdu beaucoup de son efficacité en devenant un simple service de votre ministère. Ce dernier ne représente que 0,4 % du budget global, ce qui réduit considérablement votre autorité.

Nos discussions, mes chers collègues, risquent d'apparaître dérisoires dans quinze ans !

M. Yves Cochet – C’est vrai !

M. Philippe Tourtelier – Même le nom de votre ministère surprendra – « écologie et développement durable » : l'écologie ne fait-elle pas partie du développement durable ? On chercherait en vain dans votre ministère les politiques portant sur les autres piliers, économiques et sociaux, du développement durable. C'est donc en réalité le Premier ministre qui est responsable du développement durable ! Malgré toute votre bonne volonté, l’organisation actuelle des moyens est datée et inefficace. Espérons seulement que la période électorale à venir permettra de remédier à cette situation.

En vous contentant de coordonner un plan climat très insuffisant et en vous appuyant sur l'ADEME, qui ne peut mobiliser les collectivités locales et les particuliers que dans la limite de ses moyens, vous avez externalisé ce qui devrait être la priorité et le cœur de votre budget : la lutte contre le changement climatique.

Face à un tel manque d’ambition, vous comprendrez que nous ne puissions pas voter votre budget, Madame la ministre. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Gérard Voisin – Votre budget nous donne certains motifs de satisfaction. Les crédits augmentent de 2,5 % cette année, voire de 9,3 % compte tenu de tous les moyens mobilisés pour la protection de l'environnement. Cet effort démontre bien qu’il s’agit d’une priorité du Gouvernement…

M. Yves Cochet – C’est faux !

M. Gérard Voisin – …conformément aux attentes de tous les Français. La mission écologie et développement durable ne représente toutefois que 0,4 % du budget national.

Plusieurs députés socialistes – C’est insuffisant !

M. Gérard Voisin – Mais c’est plus que sous le gouvernement précédent – 0,35 % !

M. Yves Cochet – 0,8 % !

M. Gérard Voisin – Cette mission bénéficiera cette année de quarante emplois supplémentaires, mais l'ensemble des effectifs reste inférieur à 3 800 ! Il existe encore un décalage entre les moyens limités que notre pays accorde à cette mission, et l'ampleur de la tâche que nous devrions accomplir – lutte contre le réchauffement climatique, protection de la nature et des paysages, prévention des risques, lutte contre la pollution de l'eau, ...

Soulignons toutefois la hausse de 32 % du budget consacré à la protection de la biodiversité, qui permettra la création de nouveaux parcs nationaux et la conduite de la politique Natura 2000 qui n’est pas le repoussoir souvent décrit, mais un atout pour nos territoires ruraux – élu du Mâconnais, j’en suis convaincu !

Quelques regrets toutefois : la présentation de ce budget ne met pas assez en évidence notre action en matière de paysage, parent pauvre de votre ministère alors qu'il s’agit d’un élément essentiel pour le développement durable. À côté de la préservation de la flore, de la faune, des milieux naturels, la préservation des paysages est une attente très forte de nos concitoyens. Facteur de notre qualité de vie et atout économique pour notre pays, ce capital est en danger !

Le président de l'Assemblée nationale a bien voulu accueillir les signataires du Manifeste pour les paysages, mais nous devons tous prendre conscience de la dégradation en cours, qui est un des aspects les plus visibles des atteintes que l’activité humaine fait subir à notre environnement. Qu’ils soient urbains ou ruraux, ordinaires ou exceptionnels, nos paysages doivent faire l’objet d’une mobilisation générale. Des États généraux se tiendront en ce sens le 8 février prochain.

Votre ministère, chargé de conduire et d'animer la politique du paysage de la France doit mener une action bien plus ambitieuse. Alors que la France vient de ratifier la Convention européenne du paysage, nous souhaiterions une forte réévaluation de la place tenue par cette politique dans l'action de votre ministère ! Le paysage doit devenir une composante de tous les choix du pays en matière d'équipement, d'énergie, d'agriculture.

N’oublions pas non plus les sites remarquables de notre pays. À l’occasion du centenaire de la première loi visant à les protéger, nous pouvons nous féliciter du travail accompli : il y a plus de 2 700 sites classés et 4 700 sites inscrits, pour une superficie deux fois supérieure à celle des parcs nationaux et quatre fois supérieure à celle des réserves naturelles ! Hélas, cette politique reste méconnue et souvent sacrifiée. Pour remédier à cette situation, nous devons renforcer les personnels des directions régionales de l’environnement.

Je vous félicite de votre action, Madame la ministre, tout en souhaitant une nouvelle fois que les moyens d’action en faveur des paysages, des sites remarquables et des Grands Sites de France soient renforcés. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF)

M. Jean Launay – Nous sommes tous conscients des problèmes soulevés par le changement climatique et nous sommes d’accord quant à l’objectif mondial de réduction des gaz à effet de serre d’ici à 2050. La France doit y prendre toute sa place – c’est d’ailleurs l’objectif du facteur 4 du plan climat. Cela devrait se traduire par une véritable ambition budgétaire mais il n’en est rien : le manque de visibilité de la mission Écologie est patent, le programme Prévention des risques et luttes contre les pollutions souffre de n’être pas interministériel, l’action Lutte contre le changement climatique a disparu et la gouvernance dans le domaine de l’eau s’essouffle dans le programme Gestion des milieux et biodiversité. Vous me direz, Madame la ministre, que votre budget augmente en autorisations de programmes et en crédits de paiement mais n’oublions pas la mise en réserve sur les autorisations d’engagements et interrogeons-nous sur la cohérence de ce budget avec l’ensemble de la politique gouvernementale.

Ainsi de la nécessaire diminution d’émission des gaz à effet de serre : comment passer de 140 à 38 millions de tonnes en ne faisant appel qu’aux solutions technologiques et en négligeant la maîtrise de la demande d’énergie ? Par ailleurs, la loi sur l’énergie ne présente aucune mesure coercitive pour réduire les émissions de CO2 dans l’habitat et les transports. Enfin, le rapport de la mission d’information sur le réchauffement climatique formule de nombreuses préconisations fiscales et financières dont il serait heureux de tenir compte.

Comment le pacte de l’environnement annoncé par le Premier ministre serait-il crédible alors que la campagne de promotion des biocarburants ne constitue qu’un encouragement donné aux constructeurs automobiles et aux céréaliers en mal de débouchés nouveaux…

Mme Geneviève Gaillard – Très bien.

M. Jean Launay – …sans qu’aucun bilan écologique n’ait été établi ? Nous savons que le développement des biocarburants industriels aggravera la dégradation de l’environnement et que du point de vue énergétique, les procédés de fabrication actuels sont condamnées à court terme. Où sont les efforts de recherche pour la deuxième génération des procédés de production de carburants verts ?

Quelle est votre situation, Madame la ministre, face à la puissance de Bercy et du ministère de l’industrie ? L’hydroélectricité est considérée comme une énergie renouvelable mais elle a un impact négatif sur les milieux. Je m’interroge sur votre capacité à peser sur la rédaction du cahier des charges des renouvellements des concessions des barrages hydroélectriques. Il faut prendre en compte la notion de mieux disant environnemental…

Mme Geneviève Gaillard – Très bien.

M. Jean Launay – …et apporter des réponses mixtes entre opérateurs industriels et entités responsables de la gestion intégrée dans les bassins versants, l’objectif étant de rendre possible la démodulation et une utilisation plurielle de l’eau.

Nos agences de bassins attendent la fin du parcours législatif de la loi sur l’eau pour finaliser leur neuvième programme d’action pour 2007-2012 mais combien d’inquiétudes subsistent dans ce domaine ! Le million d’astreinte par jour qui pèse sur notre pays pour non respect des directives cadre nitrate et eaux résiduelles urbaines – alors même que la directive cadre sur l’eau et les objectifs de bon état nécessiteront une volonté sans faille et les moyens correspondants – oblitère votre action. L’institut français de l’environnement rappelle qu’il faut modifier nos comportements car l’état des eaux souterraines reste préoccupant et les pesticides sont toujours présents dans la plupart des nappes. Force est de constater, enfin, que l’irrigation peut provoquer localement un certain nombre de déséquilibres.

Le programme des Nations unies pour le développement précise que la communauté internationale doit reconnaître le droit fondamental de tout être humain à disposer d’au moins 20 litres d’eau potable par jour. Or, 17 % de l’humanité manque d’eau potable.

Le congrès des maires de France sera consacré dans quelques jours au rôle du maire dans la République. Je relaie à ce propos une interrogation de M. Brottes : pourquoi le maire n’est-il pas systématiquement consulté par le préfet préalablement au lancement de la procédure d’enquête publique lorsqu’une entreprise a déposé un projet d’installation sur le territoire de sa commune et qu’il peut y avoir un risque technologique ? Il faut combler cette lacune des textes. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Yves Jego – L’écologie est un combat majeur et je suis comme vous persuadé qu’il faut agir mieux et plus pour préserver notre planète.

Nous n’avons pas à rougir de notre politique écologique. Les émissions de gaz à effet de serre dans notre pays sont inférieures de 21 points à la moyenne mondiale. En quelques années, nous avons multiplié par 14 la production d’énergie éolienne. La pollution de l’air diminue quant à elle de 12 % dans la plupart de nos grandes villes. Ces résultats devraient inviter certains de nos collègues à plus de modération.

Ceux qui n’ont pas voté la Charte sur l’environnement…

M. Jean Launay – Sur ce point, nous sommes à l’aise !

M. Yves Jego – …ou qui nous ont légué en 2002 le ministère de l’écologie dans l’état que nous savons…

M. Yves Cochet – En proportion, les crédits étaient le double de ce qu’ils sont !

M. Yves Jego – …ne devraient pas se livrer à une surenchère idéologique et politicienne.

Il faut en outre se féliciter que l’on puisse unir environnement et emploi. Il y a un an, je plaidais pour faciliter le traitement des déchets textiles. Trois mille personnes travaillent dans cette filière et ce sont aujourd’hui 100 000 tonnes de déchets qui sont retraités. Un amendement présenté dans les prochains jours devrait permettre d’instituer une contribution des entreprises pour que cette filière nouvelle puisse se développer. Il s’agit de passer de 3 000 à 6 000 emplois de manière à ce que 400 000 à 600 000 tonnes de textiles soient désormais retraitées. Je salue cet engagement gagnant-gagnant et je voterai bien entendu les crédits de la mission Écologie. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Yves Cochet – L’écologie est à l’ordre du jour comme en témoignent les conversations de nos concitoyens, les films de Nicolas Hulot , de Yann Arthus-Bertrand ou d’Al Gore. Néanmoins, la question n’est pas médiatique mais budgétaire et politique : l’écologie est-elle une priorité gouvernementale ? Non. Bercy parle d’adéquation des moyens aux objectifs mais avec 0,4 % du budget de l’État, c’est une misère que vous nous proposez ! Nous avons droit aux effets d’annonce et aux grands discours vertueux mais depuis 2002, les crédits consacrés à l’environnement n’ont cessé de diminuer alors qu’ils étaient de 0,8 % lorsque nous étions au pouvoir.

Vous annoncez en outre une création nette de 40 emplois au ministère quand nous en avions créé 800 !

M. Jean Lassalle – Hélas !

M. Yves Cochet – Comment ? Il y aurait assez de personnels pour œuvrer en faveur de l’écologie ?

M. Jean Lassalle – Il y en a trop !

M. Yves Cochet – Je comprends pourquoi vous voterez ce budget !

Avec moins de 4 000 agents, le ministère fait moins bien que la mission de conseil et de contrôle de l’État ! Vous annoncez une hausse de 32 % pour le programme Gestion des milieux et biodiversité. Cette hausse bénéficie essentiellement aux parcs nationaux, à l’Agence des aires marines protégées et au réseau Natura 2000. Les réserves naturelles nationales ne constituent toujours pas une priorité nationale, alors même que sept viennent d’être créées ou sont en cours de création. Sous l’apparence du maintien des crédits de paiement, les organismes gestionnaires en région constatent que les moyens globaux stagnent, quand ils ne diminuent pas.

Après avoir réduit de 20 % les crédits des associations l’an passé…

M. Jean Lassalle – Ça, il n’y a pas à s’en plaindre !

M. Yves Cochet – …l’État les néglige de nouveau, alors même que les associations remplissent des missions que le ministère de l’écologie ne peut pas assurer.

Les crédits du programme Prévention des risques et lutte contre les pollutions augmentent de 28,5 %. Mais après leur baisse de 25 % de l’an dernier, ils retrouvent seulement leur niveau de 2005. Ce programme est le grand perdant des arbitrages budgétaires, avec des autorisations d’engagement tombant de 178 millions d’euros en 2006 à 141 millions en 2007. Les six actions du programme voient leurs crédits diminuer.

Les moyens du programme Conduite et pilotage des politiques environnementales et de développement durable augmentent de 9 % en crédits de paiement et de 20 % en autorisations d’engagement. Ces pourcentages peuvent paraître élevés, mais il faut regarder les montants en cause, dérisoires. Ainsi n’a-t-on prévu que 1,25 million pour la mise en œuvre du plan Climat, alors que le réchauffement climatique sera le problème majeur du XXIe siècle. Trouvez-vous, Monsieur Lassalle, que 1,25 million, ce soit trop ?

M. Jean Lassalle – Pas pour le Plan climat !

M. Yves Cochet – Mais il faut des personnes pour l’appliquer sur le terrain. Comment faire avec si peu et, de surcroît, quinze postes gelés à l’ADEME ?

Pour le reste, sont prévus 442 000 euros pour l’adoption de modes de production et de consommation durables ; 320 000 euros pour la reconnaissance et l’évaluation des Agenda 21 locaux ; 220 000 euros pour l’éducation à l’environnement ; 100 000 euros pour les études…, tous montants dérisoires face aux enjeux. Je ne reviens pas sur les coupes claires opérées de manière récurrente dans le budget de l’ADEME depuis 2002.

Madame la ministre, l’écologie, ce sont, non pas des mots, mais des actes. L’urgence écologique nous impose des changements radicaux dans la vie quotidienne et dans les politiques publiques, que ce budget n’engage pas. Ce n’est plus seulement la maison qui brûle. Le bateau prend l’eau et sombre, tandis que votre budget applique une rustine dérisoire.

Pour conclure, je reprendrai à mon compte les propos de Nicolas Hulot, l’ami avec lequel chacun souhaite être pris en photo ces temps-ci : « Avec 0,4 % du budget de l’État, l’écologie reste le parent pauvre de la politique française ». La planète et ses habitants méritent mieux que ce petit 0,4 %. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Mme Nelly Olin, ministre de l’écologie et du développement durable C’est un honneur pour moi que de présenter pour la deuxième fois le budget de l’écologie et du développement durable. Les crédits de mon ministère sont répartis, dans le cadre de la LOLF, entre deux missions et quatre programmes. Ceux de la mission Écologie et développement durable s’élèvent à 637 millions d’euros, dont 133 millions pour le programme Prévention des risques et lutte contre les pollutions, 188 millions pour le programme Gestion des milieux et biodiversité et 316 millions pour le programme Conduite et pilotage des politiques environnementales et de développement durable. Ce programme porte l’ensemble des 3 775 ETPT attribués à mon ministère dans le budget pour 2007. Celui-ci finance également, à hauteur de 278 millions d’euros, un programme de recherche sur les risques et pollutions dans le cadre de la MIRES.

Les crédits de la mission Écologie et développement durable progressent de 2,5 %, si l’on s’en tient à la seule loi de finances. Mais l’augmentation atteint 9,3 %, si l’on prend en compte l’ensemble des crédits mobilisés pour la préservation de l’environnement. D’autres ressources financières que les crédits budgétaires concourent en effet au financement des politiques dont j’ai la charge. Il faut ainsi intégrer les 50 millions d’euros en provenance du fonds de prévention des risques naturels majeurs, dit fonds Barnier, les 376 millions d’euros du produit des taxes affectées à des établissements publics, dont l’ADEME qui voit ainsi, contrairement à ce qui a été dit, ses moyens d’intervention confortés. (M. Yves Cochet s’exclame). Monsieur le député, je ne vous ai pas interrompu. La moindre des choses serait que vous fassiez preuve de la même courtoisie (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). De même, le programme des interventions territoriales de l’État comporte 16 millions d’euros pour les actions relatives à l’environnement.

S’agissant des effectifs, le nombre d’EPTP augmente de 58 unités, ce qui permet la création nette de 40 emplois, les 18 autres correspondant à des transferts d’emplois existants. Ces quarante créations sont prioritairement affectées à Natura 2000, à l’évaluation environnementale et à l’inspection des installations classées ainsi qu’à la mise en œuvre du futur règlement Reach.

Je ne peux évoquer les moyens de mon ministère sans élargir mon propos au service public de l’environnement. Les politiques de l’environnement associent en effet de très nombreux établissements publics ainsi que les autres ministères. Le service public de l’environnement représente plus de trois milliards d’euros et emploie plus de 13 000 personnes.

M. Yves Cochet – Évidemment, si vous comptez les agents de l’ONF !

Mme la Ministre – M’interrompre ainsi est vraiment manquer de courtoisie et de politesse !

La structure actuelle des programmes de la LOLF ne me satisfait pas totalement. En effet, mon ministère, outre le développement durable et la lutte contre l’effet de serre, mène trois grande politiques sectorielles : la lutte contre les risques, la préservation de la biodiversité et l’eau. Chacune de ces politiques relève logiquement d’une administration centrale. Il me semble anormal qu’un programme budgétaire n’ait pas été attribué à chacune. Lorsqu’on fera le bilan de la LOLF et qu’on l’adaptera, il faudra créer un programme Eau. (« Très bien ! » sur de nombreux bancs)

Je n’ai pas ménagé mes efforts pour achever la transposition des directives européennes. Nous y sommes parvenus et avons ainsi pu ramener de deux à un milliard d’euros la provision pour risque contentieux au niveau communautaire. Pour le contentieux nationale, une provision de 8,5 millions d’euros est inscrite. Le droit, notamment la Charte de l’environnement doit être respecté.

Le budget de mon ministère représente 0,4 % du budget civil de l’État. Nous sommes loin de l’objectif de 1 %, seuil symbolique mais qui serait justifié dans la mesure où mon budget constitue un levier extraordinaire pour mobiliser des ressources. En effet, un euro qu’il investit est le plus souvent complété par trois euros supplémentaires en provenance d’autres sources.

L’écologie a besoin de nous tous, et je remercie les députés de prendre part au nécessaire effort de pédagogie nécessaire, ainsi bien sûr que de leur soutien à ce budget.

J’en viens aux réponses aux orateurs. Monsieur le rapporteur Rouault, je vous remercie de la qualité de votre rapport. S’agissant du déménagement de l’ADEME, on a enfin trouvé un terrain et un bâtiment parfaitement adaptés pour accueillir l’ensemble des personnes. La présidente de l’ADEME, qu’il faut féliciter pour l’excellent travail qu’elle a réalisé dans ce dossier difficile, a lancé les procédures d’acquisition et de déménagement. Les difficultés sont à présent derrière nous.

Vous m’avez aussi interrogée sur l’équité en matière d’indemnisation des dégâts provoqués par les espèces sauvages protégées. Comme vous le savez, le Conseil d’État ne manque jamais de rappeler qu’il n’est pas inéquitable de traiter différemment des situations qui ne sont pas comparables. Sur la prise en charge des dégâts éventuels et la gestion des espèces, je partage le point de vue du président Méhaignerie qui estime qu’il convient de privilégier les leviers locaux. Par exemple, s’agissant des grues cendrées, qui créent une forte économie touristique, c’est au niveau départemental et régional que des mesures de prévention, bien plus utiles que l’indemnisation, peuvent être prises, dans les contrats d’agriculture durable. La biodiversité relève de la responsabilité de tous.

Monsieur le rapporteur Priou, la politique des déchets n’est pas sacrifiée, puisque l’ADEME conserve des moyens stables, lui permettant de poursuivre ses actions de soutien et d’appui aux collectivités en mettant l’accent sur la prévention de la production de déchets et sur le développement du recyclage et de la valorisation matière. En ce qui concerne la prévention, nous sommes passés de 15 milliards de sacs de caisse distribués en 2003 à 7,5 milliards aujourd’hui. Nous allons également lancer sous peu un plan de compostage individuel. Pour ce qui est du recyclage et de la valorisation matière, nous poursuivons le développement du tri sélectif, et les taux de recyclage et valorisation des emballages progressent régulièrement. Il faut souligner le développement des filières spécialisées, qui responsabilisent les producteurs : pneus, véhicules hors d’usage, imprimés non sollicités…

L’effort de mise en conformité des installations reste la priorité. Après les incinérateurs en 2005, l’accent est mis sur la résorption des décharges non autorisées d’ici à 2007. Nous sommes d’ores et déjà passés de 900 à 380 décharges non autorisées. La qualité de traitement est fondamentale pour la protection de la santé et de l’environnement.

En ce qui concerne la situation de la France vis-à-vis des directives européennes, celle-ci n’est pas bonne pour les textes antérieurs. Malgré une condamnation en 2004, la France est toujours en retard sur les eaux résiduelles urbaines, c’est-à-dire la mise aux normes des stations d’épuration. J’ai pris et continuerai de prendre des mesures réglementaires fortes contre les collectivités en retard. Ce point sera d’ailleurs une priorité des agences de l’eau.

Le crédit d’impôt pour la récupération des eaux de pluie devrait avoir un impact financier relativement faible en 2007, compte tenu de la montée en puissance nécessaire du dispositif.

En ce qui concerne l’Erika, il était évidemment du devoir de l’État de se porter partie civile. Cette catastrophe restera longtemps dans nos mémoires, et je sais combien vous avez été impliqué sur le terrain.

Monsieur le rapporteur Guillet, le fonds d’achat de crédit carbone ne figure pas dans la plan climat 2006. Il s’agissait de permettre aux entreprises françaises de financer des mécanismes de développement propre dans les pays en voie de développement. Je rappelle que la France a joué un rôle prépondérant dans le financement de la Convention climat qui a créé ces mécanismes. Le plan climat 2006 institue un fonds destiné à financer des projets domestiques, dès lundi. Cet appel à projet ne représentera pas moins de cinq millions de tonnes de CO2 ; à quinze euros la tonne, on voit qu’il n’y a pas de désengagement financier du Gouvernement !

Sur la visibilité budgétaire des actions du Gouvernement, le document de politique transversale qui sera créé dans la loi de finances rectificative répondra à vos observations légitimes.

Pour ce qui est de l’organisation des Nations unies pour l’environnement – ONUE – 35 pays y ont adhéré à ce jour ; nous continuerons d’être mobilisés. La France a déjà une délégation à Nairobi, où je serai moi-même la semaine prochaine.

Madame Gaillard, je vous informe que l’enquête publique relative à la re-labellisation du PNR Marais Poitevin est achevée et que les communes sont en train de délibérer pour adhérer ou non à la charte. Leurs délibérations seront closes au 20 novembre. Le projet, après délibération des conseils régionaux, sera examiné par le Conseil national de protection de la nature. Ce projet fait partie des onze engagements français devant la Commission européenne dans le contentieux du Marais poitevin, aujourd’hui classé.

Pourquoi supprimer l’Agence de prévention et de surveillance des risques miniers ? De ses deux missions, la première – l’archivage d’un double des dossiers d’arrêt de travaux –, peut être confiée à un autre organisme, par exemple le BRGM, et la deuxième – donner des avis sur les plans de prévention des risques miniers –, n’est plus indispensable compte tenu des procédures d’enquête publique déjà prévues dans l’élaboration des PPRM et des concertations que nous prévoyons.

Les élus ayant fait connaître leur attachement à la concertation sur les risques miniers, le Gouvernement met en place un double dispositif. Des commissions locales d’informations sur les risques miniers, qui réuniront l’État, les élus, les exploitants, les associations, ainsi que tous les citoyens concernés, auront vocation à informer sur les risques liés à l’après-mine et les actions menées pour y remédier. Une Commission nationale de concertation sur les risques miniers sera également créée, pour formuler des recommandations sur les risques miniers et sur leur prise en compte dans l’urbanisation. Les textes réglementaires seront pris prochainement.

Comme vous, je pense que les espèces sauvages protégées sont notre patrimoine commun, et je veille au respect des textes. Pour le loup, je plaide avec mon collègue de l’agriculture pour des solutions pragmatiques. Il faut agir de façon à éviter que les orientations politiques ne soient remplacées par des décisions de justice qui figent des situations conflictuelles. La justice a été saisie de deux tirs de loup, et j’attends sa décision.

S’agissant du Conseil national du développement durable, la consultation a été relancée. J’ai procédé à la nomination de son nouveau président, M. Michel Ricard, dans un souci de relations pacifiées. Le délégué interministériel a présenté le 18 octobre au Conseil les réponses aux propositions qu’il avait formulées. Et le Premier Ministre l’a saisi pour avis sur la méthode de révision de la stratégie nationale de développement durable, qui devra être celle de l’ensemble des Français et permettre un engagement de toutes les forces vives de la nation, au-delà de la seule administration.

Monsieur Lassalle, la réduction des nuisances sonores générées par les avions comporte plusieurs axes d’action : les avions les plus bruyants sont interdits de vol de nuit ; des procédures de décollage et d’atterrissage « à moindre bruit » ont été rédigées pour les grands aérodromes, et des volumes de protection environnementale ont été définis pour l’Île-de-France ; plus de 250 aérodromes font l’objet d’un plan d’exposition au bruit imposant des restrictions d’urbanisme ; les logements anciens exposés au bruit d’aérodromes reçoivent des aides à l’insonorisation : le dispositif actuel prend en charge de 80 à 100 % du coût des travaux pour les logements riverains des dix principaux aéroports. Enfin, le produit escompté de la taxe sur les nuisances sonores aériennes, qui s’est substituée au 1er janvier 2005, au volet bruit de la TGAP, est de 55 millions d’euros par an. Ce résultat n’ayant pas été atteint, le Gouvernement proposera une modification du dispositif à l’occasion de la prochaine loi de finances rectificative.

S’agissant la population ursine, je ne ferai que rappeler deux de vos déclarations : l’une de 1996 – bien avant mon arrivée –, quand, en tant que président de l’Institution patrimoniale du Haut-Béarn, vous avez proposé que « le renforcement de la population d’ours en Béarn soit lancé et instruit », et l’autre de 2004 : « L’homme vivant dans les montagnes et l’ours sont aujourd’hui tous les deux condamnés à disparaître. Sauvons-les tous les deux et faisons en sorte qu’ils puissent vivre ensemble ». Je peux comprendre que vous ayez changé d’avis, mais je trouve que fuir vos responsabilités en évoquant le dossier de Roissy, qui vous concerne peu et que vous ne maîtrisez pas, n’est guère courageux. Il faut savoir reconnaître ses erreurs et les assumer !

Monsieur Braouezec, je suis surprise de votre appréciation du projet de loi sur l’eau. Loin de ramener l'eau à un bien marchand, il en consacre au contraire le caractère public, affirme la responsabilité des communes, institue le droit de l'eau pour tous et encadre les modalités de gestion par les collectivités pour garantir équité et transparence. Plutôt que les incantations, le Gouvernement a donc choisi de donner réalité à la gestion publique de l’eau.

Je ne peux davantage souscrire à votre propos sur les moyens consacrés à la lutte contre le changement climatique. La ligne « lutte contre le changement climatique » n'a pas disparu du budget : elle est passée du programme Prévention des risques et lutte contre les pollutions au programme Conduite et pilotage des politiques environnementales et développement durable, dotant ainsi l’'ADEME de 10 millions. Celle-ci bénéficie par ailleurs de taxes affectées : taxe sur les cartes grises et taxe sur le gaz naturel. De plus, le Premier ministre a annoncé que l'ADEME doublerait ses moyens pour la production de chaleur à partir de sources d'énergies renouvelables. Cela sera rendu possible grâce à des ressources supplémentaires, dont une taxe sur le charbon, en cours de finalisation. La recherche sur ce thème figure au nombre des priorités du Gouvernement, par le biais de politiques d'autres ministères, qu’il s’agisse des pôles de compétitivité ou des programmes d'action de l’Agence nationale de la recherche et de l'Agence de l'innovation industrielle.

Les crédits affectés à la recherche environnementale générale ne relèvent pas de la mission Écologie et développement durable mais de la mission interministérielle Recherche et enseignement supérieur. Au sein de cette mission, notre ministère est chargé du programme Recherche dans le domaine des risques et des pollutions, doté de 279 millions, montant stable par rapport à 2006. S’y ajoute l’affectation, à hauteur de 10 millions, de la taxe sur les INB affectée à FIRSN, ce qui accroît les capacités de recherche de cet organisme. Cette recherche est extrêmement importante pour éclairer les politiques publiques.

Je vous remercie, Monsieur Quentin, du soutien que vous avez apporté à la politique du Gouvernement. Concernant le vote par votre assemblée d'un amendement visant à limiter la durée de l'affectation de la taxe de francisation et de navigation à l'année 2007, je précise que cette mesure ne vise pas seulement le Conservatoire du littoral, ce qui ne diminue en rien l'intérêt qu'il y a à assurer un financement pérenne à cet établissement. La mesure s'inscrit dans la volonté du Parlement de limiter la multiplication des affectations de recettes issues du budget général à des organismes publics, qui entrave le contrôle parlementaire de la dépense.

Je suis évidemment fort ennuyée que cette mesure affecte le Conservatoire, et nous étudions les moyens de remédier à cet inconvénient. Vous le savez, jusqu’en 2006, le budget de l’établissement était abondé par une dotation du ministère de l'écologie, mais le CIADT 2004 a décidé de lui affecter une ressource pérenne. Le dispositif retenu a été de lui affecter le produit de la taxe de francisation des navires de plaisance, à hauteur de 80 % en 2006 et de 100 % en 2007. Le Président de la République, en juillet 2005, et le Premier ministre en juin 2006 ont annoncé les montants correspondants – 28 millions et 35 millions. Toutefois, l'attribution de la taxe était concomitante à la modification de son mode de calcul, décidée en 2006 par le Parlement, et il est apparu qu’avec ce nouveau mode de calcul, elle ne rapportera que 30 millions. Le Premier ministre a demandé à un groupe de travail d’étudier les solutions envisageables pour rétablir durablement le niveau de ressources prévu pour le Conservatoire. Pour 2006, un dégel de crédits, au budget de mon ministère, a permis d'attribuer 2,3 millions de ressources complémentaires à l’établissement, ce qui pallie le manque à gagner estimé et, pour 2007, le calcul de la taxe sera modifié pour qu’elle rapporte impérativement les 35 millions nécessaires au Conservatoire.

M. Didier Quentin – Merci, Madame la ministre.

Mme la Ministre – Les moyens de la politique de l’air et de la lutte contre le bruit figurent dans le programme Prévention des risques et lutte contre les pollutions sous diverses formes. S’y ajoutent des moyens extrabudgétaires tels que la taxe sur les nuisances sonores aériennes pour l'insonorisation des logements près des aérodromes, et d’autres ministères disposent de crédits de lutte contre le bruit, celui des transports par exemple.

Les nouvelles modalités de présentation du budget introduites par la LOLF et le souhait de disposer de données synthétiques ont modifié la description du budget. De plus, notre champ d'action étant vaste et protéiforme, les thèmes sont souvent imbriqués. J’ai toutefois pris note de votre observation, et je demande par ailleurs à mes services de vous fournir une synthèse pour les prévisions 2007.

Je considère comme vous, Monsieur Chanteguet, que la conservation de la biodiversité est un enjeu vital et c’est pourquoi j'ai souhaité augmenter les moyens budgétaires du programme Gestion des milieux et de la biodiversité. Je vous remercie de l'avoir salué.

Vous m'alertez sur les conditions d'élaboration du projet de parc amazonien de la Guyane. Souvenez-vous du travail fructueux accompli à ce sujet et du dialogue entretenu entre Mmes Rimane et Taubira et le Gouvernement. Nous avons, ensemble, fondé la loi, et je n’ai donc pas de doute sur le point de départ. Je n'en ai pas non plus sur le point d'arrivée. L'enquête publique pour la création du parc national vient de se terminer et tout porte à croire que concertation et explications portent aujourd'hui leurs fruits, et je continue de rencontrer les élus, notamment les maires guyanais.

Dans le budget, je vous propose 2 millions pour le fonctionnement et 2,5 millions pour investir dans le plan pour le développement de la Guyane. Ainsi, le parc national, dès sa création, en 2007, offrira un cadre neuf qui permettra l'innovation dont la biodiversité de Guyane a besoin.

Je vous rappelle, Monsieur Merville, que les dates de chasse aux oiseaux migrateurs sont aujourd'hui stabilisées. Le 13 juillet, pour la première fois depuis que le conflit sur les dates de chasse a commencé, le Conseil d’État, en rejetant les recours formés contre mon arrêté du 24 mars 2006 sur la date d'ouverture de la chasse, a donné entièrement raison au ministre chargé de la chasse, et les attendus de l'arrêt donnent deux indications précises. En premier lieu, l’abandon par la Commission européenne du contentieux sur les dates de chasse a constitué, pour les juges, un argument fondamental. Les chasseurs au gibier d'eau bénéficient donc d'une première référence au guide interprétatif, alors même que celui-ci n'est pas encore intégré à l'annexe V de la directive, si bien que l'ouverture de la chasse au gibier d'eau dans les zones humides intérieures n'est plus fixée au 1er septembre comme le prescrivait l'arrêt du Conseil d'État du 28 mai 2003 mais à l'intérieur de la dernière décade d'août. De ce fait, la chasse au gibier d'eau a ouvert, excepté pour sept espèces, le 26 août en 2006, et elle ouvrira le 25 août en 2007.

D’autre part, en tenant le plus grand compte, dans son arrêt, d'études scientifiques approfondies et validées, le Conseil d'État a confirmé que la présentation de données scientifiques nouvelles et correctement évaluées serait désormais un ressort essentiel pour faire évoluer les dates de chasse. Il ne suffit pas d'avoir réuni des « données » pour qu'elles vaillent devant la juridiction administrative, elles doivent se fonder sur des études scientifiques sérieuses.

Les dates de fermetures sont également stabilisées depuis le 17 janvier 2005, et j'attends avec intérêt la décision du Conseil d'État sur mon arrêté du 31 janvier 2006 qui repousse de dix jours la fermeture de la chasse aux grives et au merle noir dans dix-sept départements du Sud-Est.

Vous connaissez, Monsieur Merville, mon attachement au partenariat exemplaire noué avec les parcs naturels régionaux, qui a vocation à être inscrit dans les contrats de projets État–région, dans toutes les régions. Je souhaite vous rassurer : j'ai en effet obtenu du Premier ministre la possibilité d'inscrire de façon pérenne le soutien financier de l'État aux actions d'ingénierie liées à des projets d'infrastructures écologiques. C’est une première. Nous entendons reconnaître et soutenir l’effort de ces parcs dans les contrats de projets en y affectant l’essentiel des moyens que le ministère alloue au fonctionnement des parcs régionaux, maintenant ainsi les dotations. Le label « parc naturel régional » est un atout pour le développement touristique et la création d'emplois et, compte tenu de l’attribution, début 2007, des fonds structurels européens, il est judicieux que la contractualisation ait été menée à son terme avant la fin 2006, qu’il s’agisse des grands projets ou du volet territorial des contrats.

Le plan national santé environnement été adopté en juin 2004 et l'état d’avancement de son application fait l’objet d’un suivi régulier. Le dernier bilan, publié en juillet 2006, montre que les quarante-cinq actions prévues sont engagées, et l’on note des progrès sur les grands objectifs que sont la division par dix des émission de dioxines, la prévention des épidémies de légionellose, la lutte contre les pollutions liées aux produits phytosanitaires. Un plan « santé au travail » a été adopté en février 2005 pour améliorer la prévention des risques professionnels et, pour prévenir le risque de saturnisme infantile, le constat de risque d'exposition au plomb lors de la vente de logements anciens a été rendu obligatoire. Enfin, je ferai très prochainement une communication en Conseil des ministres sur la gestion des risques liés aux substances chimiques.

La loi portant création des plans de prévention des risques technologiques a en effet prévu la possibilité de travaux que vous avez évoquée et a aussi voulu en limiter le coût pour les particuliers. Mais le texte n’autorise pas l'État à imposer aux industriels le financement de ces travaux. En revanche, ils devront, bien sûr, financer les investissements d'amélioration de la sécurité de leurs installations, et cofinancer avec l’État et les collectivités les mesures « lourdes » que sont les expropriations et le délaissement. Mes services seront particulièrement attentifs au retour d'expérience des premiers plans. Dans ce cadre, je leur demanderai de surveiller de près la question que vous avez évoquée.

Les plans de prévention des risques naturels sont un élément clé de notre politique de prévention des risques majeurs. Pour améliorer la qualité de la concertation et l'association des élus à cette démarche, j'ai lancé en juin un groupe de travail chargé de formuler des propositions. Elles me seront rendues en décembre et je veillerai à leur application rapide.

En matière de déchets, conformément à la politique que j'avais présentée en Conseil des ministres en septembre 2005, je considère que deux catégories d'actions doivent être menées en parallèle : la prévention, avec la réduction de la production de déchets, et la poursuite du développement du recyclage et de la valorisation. Nous allons lancer sous peu, avec l’ADEME, le plan « compostage individuel », qui peut permettre d’éviter une production importante – jusqu’à 70 kilos – de déchets par habitant. Nous poursuivons bien sûr les actions de tri sélectif et la progression observée est importante, notamment pour ce qui concerne les taux de recyclage et valorisation des emballages ; la multiplication des centres de tri le montre. Nous progressons donc.

Enfin, des filières spécialisées pour les piles, les pneus, les déchets électroniques notamment, seront prochainement en service. Nous pourrons donc atteindre nos objectifs.

Monsieur Jego, effectivement, les filières de récupération textile, jusqu’à présent autofinancées, ont des difficultés en raison de la baisse du prix des vêtements récupérés. Saisis par les associations de l’économie sociale et solidaire, un certain nombre d’élus s’en sont émus. M. Copé a créé un groupe de travail, présidé par Jacques Pélissard, qui vient de rendre ses conclusions. Elles seront reprises dans un amendement au projet de loi de finances, qui vous sera présenté la semaine prochaine.

Monsieur Voisin, je souhaite comme vous renforcer la politique du paysage. Alors qu’entre en vigueur la Convention européenne des paysages et que nous commémorons le centenaire de la loi de 1906, je travaille dans ce domaine selon trois orientations principales.

D'abord, pour améliorer nos connaissances, j'ai lancé en 2006 un programme pluriannuel de recherche sur le thème « Paysages et développement durable » et je compte achever en 2007 la réalisation des atlas du paysage sur l'ensemble du territoire national. Nous connaîtrons mieux la diversité des paysages grâce au système d'Information sur la nature et les paysages qui s’inscrit dans la stratégie nationale pour la biodiversité et dont les modules relatifs aux paysages seront également formalisés dès 2007.

Ensuite, pour mieux intégrer le souci de ce patrimoine commun dans les politiques publiques, je soumettrai prochainement au Conseil national du paysage, organe qui ne s'est réuni qu'une seule fois depuis 2000 et que je souhaite relancer, un plan interministériel de reconquête des paysages urbains et périurbains, qui vise à intégrer la dimension paysagère dans les politiques de l'État et des collectivités territoriales. Au nombre de ses orientations, figurera la maîtrise de l'affichage publicitaire.

Enfin, pour améliorer la qualité, je veux soutenir les professionnels et donc, aux côtés des ministères de tutelle, les écoles qui forment les paysagistes. Un prix du paysage, décerné chaque année, concourt également à la promotion de la qualité paysagère.

Enfin les communes adhérentes aux 44 parcs naturels régionaux partagent l'exigence de maîtriser l'évolution de leurs paysages, et je tiens à saluer l’action d’élus engagés, attentifs et courageux, auxquels mon ministère apporte son soutien. Sur le plan international, mon ministère participe activement au suivi de la Convention UNESCO concernant la protection du patrimoine mondial, particulièrement pour ce qui concerne les biens naturels et les paysages culturels.

Monsieur Launay, la politique en faveur des biocarburants doit en effet faire l'objet de bilans écologiques complets, et j’y insiste sans cesse lors de la mise en place des filières. Les effets bénéfiques sur les émissions de gaz à effet de serre ne doivent pas être contrebalancés par d'autres effets, négatifs. Je partage aussi l'idée qu'il faut développer de nouveaux procédés plus efficaces de passage de la biomasse aux biocarburants. La recherche dans ce domaine sera menée par certains pôles de compétitivité.

Monsieur Tourtelier, s’agissant de la protection de la biodiversité, j’essaie d’impliquer tous les ministères. Soucieuse de ne pas servir d’alibi, j'ai choisi de faire piloter les 10 plans d'actions de la stratégie nationale pour la biodiversité par chacun des ministères concernés. Pour ce qui est des subventions aux gestionnaires des réserves naturelles, je prends l'engagement d'accélérer leur affectation en 2007. Enfin, vous établissez une corrélation forte entre évolution du climat et avenir de la biodiversité. Comme vous, je veux protéger non seulement les réserves naturelles mais la nature ordinaire. J’ai récemment lancé une campagne de communication dans ce sens.

Monsieur Cochet, jamais le budget de ce ministère n’avait atteint ce niveau de 0,4 % du budget civil de l'État. La progression est constante depuis 2002. Mais il faut raisonner à périmètre constant. Intégrer dans le budget du ministère celui des établissements publics, comme cela a été fait pour certaines années, permet d’afficher des augmentations qui ne sont qu’apparentes. J’ai préféré, pour 2007, conforter les établissements publics relevant de mon ministère grâce aux taxes qui leur sont affectées. L'augmentation des crédits budgétaires en 2007 correspond bien à la mise en œuvre des politiques relevant de mon ministère.

Quant aux effectifs chargés du contrôle des installations classées, 346 emplois ont été créés depuis 2002, dont 196 depuis 2004, et dans un contexte budgétaire difficile, nous créons encore 10 emplois en région et quatre au ministère pour mener notre politique concernant les produits chimiques. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

questions

M. François Rochebloine – L’utilisation des fibres céramiques réfractaires risque d’être prochainement interdite. Ces matériaux isolants sont essentiellement utilisés dans l’industrie et favorisent les économies d’énergie. Selon le classement de l’Union européenne, ces fibres relèvent de la liste des produits cancérogènes de catégorie 2 et ne peuvent donc être commercialisées auprès du grand public.

Dans le cadre du plan national santé-environnement qui vise à diminuer de façon significative les effets sanitaires d'une exposition aux agents les plus dangereux, le Conseil supérieur de la prévention des risques professionnels a proposé d’abaisser la limite d'exposition aux fibres céramiques réfractaires de 0,6 fibre par millilitre à 0,1 fibre par millilitre. En raison du fléau qu’a représenté l’amiante, on fait désormais jouer pleinement le principe de précaution, au risque de faire disparaître les quelques entreprises spécialisées dans ces productions.

C'est pourquoi, l'Association européenne des industries de la fibre céramique a engagé une démarche d'explication auprès des autorités administratives compétentes. Elle a été auditionnée par Jean Le Garrec, président de la mission d'information parlementaire sur le sujet et elle travaille actuellement avec l'agence Française de Sécurité Sanitaire et du Travail, l’AFSSET, sur ce dossier. L’association souhaite démontrer que les fibres céramiques réfractaires ne sont pas des substituts de l'amiante, et faire admettre qu'une large consultation des experts mondiaux favoriserait une nouvelle approche de ce dossier.

N'atteignons-nous pas dans ce cas l'une des limites du principe de précaution ? Quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre pour donner suite à cette demande des professionnels ?

Mme la Ministre – Le problème relève du ministère du travail, qui suit les risques professionnels. Je peux cependant vous apporter les informations suivantes.

Les fibres céramiques réfractaires sont des fibres de silicate d'aluminium. Leur classement comme cancérigènes de catégorie 2 au niveau communautaire signifie que leur effet cancérogène est certain sur les animaux. De ce fait, ces produits sont interdits de vente au grand public et le droit du travail impose aux employeurs de leur trouver des substituts.

En application du plan national santé environnement de 2004, qui vise à réduire les expositions professionnelles aux agents cancérigènes, et du plan santé travail, le ministère du travail a commencé à fixer des valeurs limites d'exposition professionnelle contraignantes pour les produits classés cancérigènes, mutagènes et reprotoxiques dont les fibres céramiques réfractaires, jusqu'ici soumises à des valeurs indicatives. Un projet de décret en cours vise à retenir dans leur cas une valeur limite identique à celle applicable à l'amiante, c'est-à-dire à 0,1 fibre par cm3, puisque ces fibres ont les mêmes effets sur les animaux.

Ce décret fait actuellement l'objet de larges consultations et devrait être soumis en début d'année prochaine au Conseil supérieur de la prévention des risques professionnels. C’est au cours de ces consultations que les entreprises peuvent faire valoir leurs préoccupations. D’autre part, l'AFSSET est chargée de chercher des substituts possibles aux fibres céramiques réfractaires.

Je ferai part de vos préoccupations à MM. Borloo et Larcher pour que leurs services vous apportent, si besoin, les informations complémentaires que vous souhaiteriez.

M. Patrick Braouezec – La pollution des sols préoccupe ceux qui ont à travailler dans des zones d’industrialisation ancienne, souvent polluées de longue date. Or, malgré votre volonté affichée de punir les véritables pollueurs, le principe du pollueur-payeur n’est pas toujours appliqué en tenant compte de l'histoire particulière de certains sites.

En général, le pollueur est facilement identifiable. Mais parfois il n’y a pas de traçabilité. Certains vendeurs de terrains doivent dépolluer alors qu'ils ne sont pas les responsables directs de cette situation, et le coût est parfois supérieur à la valeur réelle du terrain. Il serait utile que l'État crée un fonds de péréquation pour prendre en charge ce type de dépollution, dont le coût relève plus de la solidarité nationale que des collectivités locales.

De même, en cas d'expropriation, le juge devrait automatiquement tenir compte du degré de pollution, quitte à recourir à des experts, pour estimer convenablement la valeur réelle des sols.

Enfin, il est urgent d’harmoniser les arrêtés préfectoraux de dépollution des sols. Ce n’est pas le cas actuellement en petite couronne parisienne, ce qui fausse l'égalité de concurrence entre sites et crée de fait un déséquilibra territorial.

Êtes-vous disposée à instituer un mécanisme de péréquation et à faire en sorte que les juges prennent en compte l’état de pollution des sols ?

Mme la Ministre – Je ne peux pas laisser dire que l’État fait peu : il conduit depuis plusieurs années des politiques importantes et le temps consacré par ses services en région à ces questions va croissant. Je connais bien la situation de votre département, et je sais qu’un travail remarquable a été fait pour redynamiser ces territoires.

M. Patrick Braouezec – Par les collectivités locales !

Mme la Ministre – Il n’y a donc aucun laxisme dans ce domaine.

M. Patrick Braouezec – Dans vos déclarations !

Mme la Ministre – Vous me connaissez assez pour savoir que je ne m’arrête pas aux déclarations.

Il faut agir sur plusieurs axes : prévenir la pollution des sols, en imposant des règles drastiques aux usines, connaître les sites pollués ou qui risquent de l’être, grâce à des inventaires publics, assurer une dépollution de qualité, tant pour l’environnement que pour la santé publique, et surveiller les suites. C’est donc un travail d’ampleur et certains sites sensibles, tels que ceux qui doivent servir pour des écoles, entraînent des coûts importants, qui doivent être partagés entre les industriels et l’aménageur.

Même s’il reste des sites orphelins, sans responsable identifié ou solvable, la situation progresse et des dizaines de sites sont dépollués chaque année – y compris pour accueillir des logements.

M. Patrick Braouezec – Ce sont les collectivités locales qui payent !

Mme la Ministre – La loi de juillet 2003 a aussi introduit une obligation de concertation, au moment de l’arrêt des activités, entre l’exploitant et les maires. Malgré la persistance du problème des sites orphelins, on ne peut donc pas dire que l’État se désengage.

Quant au Fonds de péréquation, la proposition est à étudier. Il n’est pas question que des moyens publics se substituent à la responsabilité des pollueurs, d’autant que l’État est loin d’être absent financièrement : il y a les moyens de l’ADEME, du FNADT et du Fonds européen. Quant à l’harmonisation entre les arrêtés préfectoraux des différents départements, nous y veillons au quotidien et je reste à votre disposition si vous constatez des dysfonctionnements.

M. Patrick Braouezec – Le 4 novembre, l'ONU organisait une journée internationale d'action contre le changement climatique, et l’on connaît le documentaire d’Al Gore qui en expose les enjeux. Le bâtiment est, à lui seul, responsable de 20 % des émissions de gaz à effet de serre. C’est le secteur, selon les spécialistes, où résident les plus grandes marges de manœuvre. Il est donc nécessaire de mettre sur pied un vaste plan de rénovation du parc immobilier et de construction de bâtiments hautement performants. Les temps de retour sur investissement seraient très courts, par rapport à la durée de vie des bâtiments, et ce plan doperait le secteur du bâtiment, porteur de nombreuses créations d'emploi car peu sujet à la délocalisation.

Or, les gouvernements successifs n'ont relevé que superficiellement ce défi, se contentant de mesures d'incitation – des crédits d'impôts – là où il faudrait une réglementation. L’obligation d’établir un diagnostic de performance énergétique pour la vente des logements va dans le bon sens, mais c’est encore insuffisant. Tant qu’il n’y aura pas obligation d’employer les énergies renouvelables dans les constructions ou rénovations et d’utiliser des isolations thermiques plus efficaces, l'amélioration de la performance énergétique des bâtiments demeurera marginale. Or, les collectivités locales ne peuvent pas remédier à la carence de l’État, interdites qu'elles sont de fixer des normes plus contraignantes que les normes nationales. L’État pourrait par ailleurs donner l'exemple par le biais de ses commandes publiques, ce qui est loin d'être le cas aujourd'hui. De leur côté, les plans d'entreprise d'EDF et de GDF n'intègrent les énergies renouvelables que de manière limitée et leurs experts sont souvent mal formés à ces nouveaux métiers. Quand imposerez-vous enfin une réglementation digne de ce nom ?

Mme la Ministre – Dans le domaine de la performance énergétique des bâtiments, le Gouvernement s’efforce de mobiliser tous les instruments des politiques publiques, de nature fiscale, réglementaire et incitative. La nouvelle réglementation thermique RT 2005, qui entrera en vigueur début 2007, entraînera une amélioration de la performance de 15 %. En matière fiscale, les crédits d’impôt ont été significativement relevés, tant en ce qui concerne la maîtrise de l’énergie que les équipements en énergie renouvelables. On assiste notamment à une augmentation significative des installations de panneaux solaires. Un diagnostic de performance énergétique est aussi rendu obligatoire pour la vente de logements anciens, et bientôt pour les locations. Par ailleurs, grâce au pacte national pour l’environnement annoncé par le Premier ministre, le seuil du livret d’épargne durable va augmenter et il en ressortira 10 milliards de prêts uniquement dévolus à l’écologie. Enfin, avec l’aide de la Caisse des dépôts et consignations, un quart des logements neufs vont être mis aux normes de haute protection environnementale. Cela ne suffit certes pas, mais c’est un bon démarrage. Le secteur du bâtiment est en effet, avec celui des transports, celui où il est le plus urgent de faire évoluer les choses.

Mme Juliana Rimane – L’Office de l’eau, créé en Guyane depuis à peine un an, n’est pas opérationnel. En 2007, il ne bénéficiera toujours pas de la redevance prévue et continuera à dépendre des subventions ministérielles et des collectivités locales. Pour lui permettre de jouer son rôle, il est indispensable que la contribution du ministère reste élevée. La Guyane connaît des retards si considérables en matière d’infrastructures d’assainissement qu’aucune agglomération ne peut être en conformité avec la directive européenne. En l’absence de ressources et dans l’attente de la création de l’ONEMA, une aide significative du ministère est une condition essentielle pour qu’elle procède aux investissements nécessaires. De nombreuses opérations, lancées en 2005, devraient être réalisées en 2007, pour lesquelles les besoins de financement sont estimés à 2,2 millions. Il est donc impératif que les crédits de paiement prévus soient versés sans attendre. Pour les nouvelles opérations engagées notamment à Cayenne et St-Laurent du Maroni, les collectivités locales ont besoin d’environ 3 millions. Sachant qu’elles n’auront que peu de crédits du FEDER pour la période 2007-2013, elles attendent un engagement fort de l’État. Le réseau hydrométrique n’est plus non plus en mesure de fonctionner, faute de moyens. Il ne comprend plus que cinq stations contre douze en 2006, ce qui est en contradiction avec la directive-cadre sur l’eau. Une mise en commun de moyens interadministrations est en cours d’étude, mais là aussi, l’augmentation significative des dotations est nécessaire. Quels moyens comptez-vous dégager pour mettre un terme à cette situation ?

Mme la Ministre – Je tiens à vous rassurer : l’État continuera à assurer son soutien financier à l’Office de l’eau récemment mis en place, et qui ne disposera pas de ressources propres en 2007. Une subvention de 150 000 euros est prévue. En ce qui concerne l'investissement, l'effort de solidarité nationale en faveur de la Guyane sera poursuivi en 2007 par le budget de l’État, à hauteur d’un million et demi, en attendant la mise en place de l'ONEMA, qui reprendra cette mission à partir de 2008. À ce propos, je précise, pour répondre à une question antérieure, que la loi sur l’eau sera bien votée avant la fin de l’année.

Toutefois, j'attire votre attention sur le fait que les élus doivent se mobiliser pour bien préparer les projets. En effet, plus d'un million de crédits de paiements ne pourront pas être utilisés cette année, faute d'avancement suffisant des projets. II ne faut pas qu’une telle mésaventure se renouvelle. Enfin, il convient de rappeler que les services d'eau et d'assainissement sont des services industriels et commerciaux, qui doivent être financés par le prix de l'eau. Il est important d'améliorer progressivement le taux de récupération des coûts, particulièrement faible en Guyane. Il faudra le faire très progressivement, et je suis prête à vous y aider.

M. Frédéric Reiss – Ma question est relative au problème des déchets. Vous avez dit votre satisfaction, Madame la ministre, sur la mise en conformité des incinérateurs et votre volonté de faire disparaître les décharges non contrôlées. Je vous en félicite. Je voudrais vous interroger sur la taxe générale sur les activités polluantes payée par les syndicats de traitement des ordures ménagères, qui est l’application du principe pollueur-payeur – un principe plutôt bien compris par nos concitoyens – et dont le produit va au budget de l’État.

La TGAP, d’un montant de 9,15 euros par tonne entrante, grève les budgets des syndicats de traitement des ordures ménagères et, par voie de conséquence, augmente le montant des taxes ou redevances de l’usager. La réglementation draconienne et les contraintes nouvelles imposées aux exploitants génèrent des investissements énormes, répercutés eux aussi. Je suis un ardent défenseur du tri sélectif et du compostage individuel, et nos concitoyens sont prêts à faire des efforts pour trier leurs déchets et les apporter dans les déchetteries. Mais ils n’acceptent plus l’augmentation continue de leurs factures. Ne peut-on imaginer un dispositif lisible qui permettrait de revoir l’assiette de la TGAP, en tenant compte des investissements réalisés par exemple, et de financer l’ADEME, dont l’aide sera précieuse pour ramener, ainsi que vous l’avez décidé, le poids des déchets de 360 à 250 kilos par personne et par an ?

Par ailleurs, on entend que les conditions d’élimination des pneus usagés ont été améliorées. Dans ma circonscription, une commune de 1800 habitants a hérité, sur un de ses terrains, de 2 100 mètres cubes de pneus usagés, provenant d’une entreprise aujourd’hui liquidée – il n’y a donc aucun recours possible. Le devis d’évacuation et de traitement est de 50 000 euros, une somme impossible à envisager pour le budget communal.

Comment l’État peut-il aider les collectivités à résorber les dépôts existants, qui s’élèvent à plus de 250 000 tonnes ?

Mme la Ministre – Voici un an que nous soutenons la résorption des dépôts de pneumatiques, qui sont très dangereux – je pense aux incendies, mais aussi au risque de maladies. Comme vous l’avez souligné, des progrès ont été accomplis : obligation a été faite aux manufacturiers et aux importateurs de pneumatiques de procéder à l’enlèvement des pneumatiques usagés, ce qui a permis d’éviter la création de nouveaux dépôts. Selon les données collectées par l’agence de l’environnement et les acteurs associatifs, il y aurait aujourd’hui 242 000 tonnes de déchets répartis sur 114 sites. Ces dépôts peuvent entraîner des nuisances pour les riverains – prolifération de moustiques ou de reptiles – et présenter des risques en cas d’incendie.

À ce jour, 56 000 tonnes de déchets ont été évacués dans 41 sites et 18 autres dépôts, représentant 23 000 tonnes de pneumatiques, sont en cours de traitement. Nous avons enfin demandé aux exploitants de prendre les mesures nécessaires pour évacuer les pneumatiques usagés en surplus avant la mi-2007. S’agissant des 55 sites qui ne sont plus exploités ou dont l’exploitant est insolvable, le coût du traitement doit revenir au pollueur : j’ai donc demandé aux préfets de rechercher les sociétés clientes des entreprises défaillantes, qui demeurent responsables des pneumatiques usagés tant qu’ils n’ont pas été éliminés. J’ajoute que certains acteurs se sont engagés à reprendre les pneumatiques usagés pour lesquels aucun responsable solvable ne peut être identifié et qui représentent 30 000 tonnes de déchets.

Comme vous, je pense qu’il faut intensifier et pérenniser ces actions d’élimination des stocks. Je m’engage, Monsieur Reiss, à me pencher sur le problème spécifique que vous avez évoqué.

Malgré une certaine stabilisation, le coût de traitement des déchets ménagers pose effectivement un problème. La fin des investissements de mise en conformité des décharges et des incinérateurs devrait toutefois contribuer à le régler, de même que les objectifs de réduction des quantités mises en décharge ou incinérées. Je me tiens à votre disposition pour revenir plus en détail sur ce sujet.

M. Frédéric Reiss - Merci, Madame la ministre.

M. Gérard Voisin – Je souhaiterais revenir sur la présentation des crédits destinés aux opérations « grand site », qui relèvent désormais de l’action 4 du programme 153, Gestion des milieux et biodiversité : il est regrettable que ces crédits ne soient plus explicitement mentionnés par le budget, contrairement à l’année passée. Pouvez-vous nous confirmer, Madame la ministre, que le montant de 1,4 million d’euros inscrit en autorisations d’engagement au titre du dispositif « interventions sur les milieux et espaces spécifiques ou exceptionnels » concerne exclusivement ces opérations ?

Je m’inquiète également de la baisse des moyens prévus par rapport à 2006. Les crédits de paiement débloqués l’an dernier ont pourtant eu pour seul effet d’apurer les dettes sans que de nouvelles actions puissent être financées. En l’état, il sera impossible de poursuivre les opérations ajournées les années précédentes malgré l’engagement de l’État, et de lancer des travaux sur de nouveaux sites malgré les besoins constatés. Il serait enfin souhaitable que les contrats de projet État-régions puissent porter, non seulement sur des études, mais aussi sur des travaux réalisés dans les grands sites.

Vous nous avez fait part de votre intérêt pour les opérations « grand site », Madame la ministre, mais nous aimerions plus de précisions sur les moyens qui leur seront consacrés…

Mme la Ministre - Je partage vos préoccupations, Monsieur Voisin. Il s’agit d’opérations partenariales de développement local, soucieuses de réhabiliter et de mettre en valeur les plus beaux, les plus fréquentés et les plus menacés de nos paysages. Nous leur consacrerons 2,2 millions d’euros en autorisations d’engagement, dont 1,8 million sont déjà programmés en région, et 1,8 million en crédits de paiement, auxquels s’ajoutent les crédits consacrés au Marais-Poitevin au titre du programme d’intervention territoriale de l’État. Ces montants permettront à mes services de répondre aux besoins de réhabilitation et de participer aux opérations prévues en coopération avec les régions, les départements et l’Union européenne. Nous continuerons ainsi à honorer les engagements de l’État tout en lançant de nouvelles opérations.

Par leur caractère partenarial et leur assise territoriale, ces opérations se prêtent à des démarches infra-régionales de contractualisation qu’il convient de promouvoir, notamment dans les contrats de projet État-régions, lesquels peuvent porter, non seulement sur les études préalables, mais aussi sur toutes les opérations participant à la création d’une « infrastructure écologique » à l’échelle régionale. Je reste à votre disposition, Monsieur Voisin, si vous avez besoin d’informations complémentaires à ce sujet.

M. Gérard Voisin – Michel Voisin, député de l’Ain et accessoirement mon cousin…

M. Patrick Braouezec – On reste en famille !

M. Gérard Voisin – …m’a chargé de vous poser une question relative à la prolifération des grands cormorans dans notre pays, en particulier dans la Dombes, et à l’arrivée d’un nouvel intrus, le cygne, dont on connaît le rôle dans la transmission du virus H5N1. Les mesures d’effarouchement autorisées ont montré leurs limites et l’obligation d’utiliser la grenaille à plomb dans les zones humides ne permet plus de réguler l’espèce.

De quelle façon comptez-vous donc faire sortir le cormoran de la liste des espèces protégées ? Quelles mesures prendrez-vous pour favoriser une régulation efficace ? Allez-vous permettre les tirs sur le site de Crépieux-Charmy, devenu un véritable lieu de villégiature pour ces oiseaux ? Quand autoriserez-vous le tir au plomb, puisque le tir à la grenaille est inefficace ? Enfin, quelles mesures envisagez-vous concernant le cygne, nouvel intrus dans les fleuves et les étangs ?

Ces problèmes touchent tous les agriculteurs et les pisciculteurs européens, qu’ils soient latins ou scandinaves : tous souffrent de l’absence de mesures et ne sauraient accepter que la réglementation serve d’alibi. Quand il y a une volonté politique, il y a des solutions ! Ils attendent avec beaucoup d’espoir votre réponse, Madame la ministre. Mon cousin aussi ! (Sourires)

Mme la Ministre – Pour m’être rendu récemment en Sologne, je suis au fait des problèmes actuels. Afin de limiter l'augmentation de la population de cormorans et les dégâts sur les piscicultures et la faune d'eau douce, nous autorisons actuellement la destruction d'environ 36 000 cormorans par an, soit 50 % de plus qu’en 2002.

Il reste que le taux de réalisation des tirs d'élimination n'est cependant pas à la hauteur des possibilités données. J’ai donc rappelé aux préfets le large éventail de personnes pouvant participer à ces opérations, et j’ai élargi les zones où ces opérations peuvent intervenir, tout en rallongeant les périodes de tir dans les départements les plus concernés par l'alevinage tardif.

Comme je m'y étais engagée, je fais enfin examiner les conditions dans lesquelles la grenaille de plomb, interdite pour le gibier d'eau, pourra être utilisée dans la saison en cours à titre dérogatoire. Je donnerai des instructions précises pour éviter que les pisciculteurs ou leurs ayants droit soient verbalisés, le tir s'effectuant au même endroit que la chasse. Sachez également que le préfet de l’Ain a déjà préparé l’application de ces mesures afin qu’elles puissent être rapidement mises en œuvre.

S’agissant en revanche des cygnes, je ne suis pas aujourd’hui en mesure de vous apporter une réponse. Je la ferai connaître dès que possible à Michel Voisin.

M. le Président – Nous en avons fini avec les questions.

État B

M. le Rapporteur spécial – La commission a souhaité un débat sur la politique de réintroduction des ours dans les Pyrénées, mais je laisse à M. Launay le soin de défendre l’amendement 168 de la commission.

M. Jean Launay – Il est identique au 179 de M. Augustin Bonrepaux. Le congrès annuel des élus de montagne a voté une motion très détaillée sur la réintroduction de l’ours dans les Pyrénées.

La commission et M. Bonrepaux proposent de modifier les autorisations d’engagement et les crédits de paiement en supprimant, au sein du programme Gestion des milieux et biodiversité, un million correspondant à la surveillance et au déplacement des ours pour l’affecter à l’office nationale de la chasse, l’augmentation correspondante étant consacrée à la prévention des risques matériels. Outre que l’introduction d’ours slovènes ne répond pas aux prescriptions de la convention de Berne précisant que l’acceptation des populations est nécessaire, les gaspillages générés sont déplorables. La gestion des fauves échappant à ses promoteurs, les ours se déplacent vers les villes et les coûts liés aux déploiements de la Gendarmerie et des pompiers, aux vols d’avions et d’hélicoptères sont considérables.

M. Jean Lassalle – C’est malheureux.

M. Jean Launay – L’expérience montre qu’il n’est pas possible de prévenir la prédation. La solution raisonnable et économe pour maintenir les ours sans conséquences graves pour les habitants est de les cantonner sur des territoires réservés, l’État possédant de nombreux milliers d’hectares dans les Pyrénées. Avec des marges plus réduites, il est donc possible de réaliser un projet viable pour l’ours tout en économisant les deniers publics. (Applaudissements de M. Lassalle.)

M. le Rapporteur spécial – Cet amendement a été adopté par la commission des finances mais j’y suis à titre personnel défavorable.

M. Jean Lassalle – Courage, fuyons !

M. le Rapporteur spécial – Outre que le programme Gestion des milieux et biodiversité est encore insuffisamment doté, cet amendement créerait des difficultés supplémentaires car nous devons assurer le suivi de 17 ours et, le cas échéant, l’indemnisation des dégâts.

Mme la Ministre – Avis évidement défavorable.

Je tiens tout d’abord à saluer M. le rapporteur pour ses efforts en faveur des crédits consacrés à la biodiversité. C’est grâce à vous que je pourrai continuer à aider le monde associatif !

Cette suppression de un million est contraire aux intérêts que l’on prétend défendre : en l’occurrence ceux des Pyrénéens. Le budget que je me propose de consacrer à l’ours en 2007 s’élève à 1,9 million, ce qui correspond à la valeur du budget de 2005 avant même la réintroduction de nouveaux plantigrades. Il diminue par rapport au budget de 2006 puisque les actions de renforcement du printemps et de l’été sont achevées. Ce budget est en outre nécessaire pour mener à bien la politique de suivi des ours mais également le soutien aux activités pastorales, auxquelles plus de 50 % d’entre eux sont consacrés, ce qui contribue également à financer des emplois d’aides bergers. Si l’on y ajoute les crédits prévus pour les actions en faveur des forestiers et des chasseurs, c’est 70 % du budget ours, soit plus de 1,4 million, qui sont destinés aux acteurs locaux pyrénéens ! Sur le budget de 1,9 million, le coût strictement dédié au suivi et à la surveillance des ours s’élèvera à 500 000 euros. Outre que l’équipe technique est la seule capable d’effectuer des expertises en cas d’attaques, cette mission répond à une demande des élus locaux concernant la localisation des animaux. La suppression de ce million entraînerait donc un retrait de l’État sur des missions de soutien essentielles. Grâce à cette équipe ours et à ses excellentes relations avec les chasseurs, les activités cynégétiques peuvent se poursuivre sans contrainte et dans le cadre d’un dialogue permanent. Il faut savoir ce que l’on veut !

J’ajoute, enfin, que les forces de l’ordre n’auraient pas été sur le terrain pour l’arrivée des ours si les manifestants ne s’étaient pas conduits de façon irresponsable.

Mme Geneviève Gaillard – M. Launay et moi sommes d’accord avec Mme la ministre et nous ne voterons pas ces amendements.

M. Jean Lassalle – Madame la ministre, vous et moi sommes avant tout deux élus locaux. Vous avez dit tout à l’heure que je n’étais pas cohérent sur cette question des ours et que je m’acharnais sur celle de Roissy. J’ai toujours été cohérent, et si vous êtes remontée jusqu’à 2004, je vous invite à aller jusqu’en 1970 : vous auriez constaté que j’ai toujours été partisan de la cohabitation entre les hommes et les ours. Fils de berger, j’ai vécu cette cohabitation. Il ne faut pas nous contraindre, voilà tout ! Il fallait procéder dans l’esprit de la décentralisation ! Madame la ministre, vous avez désigné sur la carte une partie de la France devenue inutile : les Pyrénées. Les hommes n’y ont plus droit de cité. Cela ne fait rien si paysans et bergers disparaissent, du moment qu’il y a des ours sauveurs de la biodiversité de la planète ! Tout est parfait ! Mme Olin a cédé aux groupes de pression, dont la chambre régionale des comptes serait d’ailleurs bien inspirée de regarder les ressources. Qui finance les fondations, à commencer par celle de Nicolas Hulot ? L’État doit rassembler et non diviser ! La montagne ayant toujours été le lieu de la liberté, je voterai de tout cœur pour la suppression de ce million !

Les amendements 168 et 169, identiques, mis aux voix, ne sont pas adoptés.
Les crédits de la mission Écologie et développement durable, mis aux voix, sont adoptés.

ART. 48

L'article 48, mis aux voix, est adopté.

M. le Président – Nous avons terminé l’examen des crédits relatifs à l’écologie et au développement durable.

La suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2007 est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu cet après-midi, à 15 heures.
La séance est levée à 13 heures 30.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

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