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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

1ère séance du jeudi 23 novembre 2006

Séance de 9 heures 30
29ème jour de séance, 62ème séance

Présidence de M. Maurice Leroy
Vice-Président

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La séance est ouverte à neuf heures trente.

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Organisation de certaines professionS de santé

L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi ratifiant l’ordonnance du 26 août 2005 relative à l’organisation de certaines professions de santé et à la répression de l’usurpation de titres et de l’exercice illégal de ces professions et modifiant le code de la santé publique.

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités Ce projet de loi a pour objet de structurer l’organisation des professions de santé et de simplifier leur conditions d’exercice, en pleine cohérence avec la loi du 4 mars 2002 et les lois déjà votées, ou en cours d’adoption, tendant à créer des ordres professionnels pour les masseurs kinésithérapeutes, les pédicures podologues et les infirmiers.

Ce texte prévoit également la reconnaissance pleine et entière de la profession de diététicien, dont seul le titre était jusqu’à présent réglementé et protégé par le code de la santé publique. En complément de la loi sur la prévention de la délinquance, nous proposons enfin au Parlement d’adopter un amendement habilitant le Gouvernement à prendre par ordonnance des dispositions réformant la loi de juin 1990, sur lesquelles la concertation avec les professionnels est déjà engagée.

Ce projet de loi homogénéise tout d’abord le fonctionnement des ordres en créant un corpus de normes applicables aux différentes professions. Sur ce point, nous avons largement consulté les acteurs concernés et veillé à prendre en considération leurs recommandations afin de préserver les spécificités et les contraintes de leurs professions.

Nous renforçons par ailleurs les garanties procédurales dont bénéficient les patients et les professionnels : la procédure de conciliation est réorganisée, avec la création d’une commission spécifique au sein des conseils départementaux ; des incompatibilités seront prévues entre chambres disciplinaires de première instance et chambres d’appel ; la présidence des chambres disciplinaires par un magistrat de l’ordre administratif sera généralisée à l’ensemble des ordres, notamment à celui des pharmaciens. Le projet de loi améliore enfin le fonctionnement des ordres en créant une autorisation d'absence pour les professionnels salariés et agents publics conseillers ordinaux.

En vue de simplifier les procédures administratives, nous continuerons l’établissement d’un répertoire partagé des professions de santé, comprenant notamment un numéro d'identifiant unique et permanent pour chaque professionnel. Je rappelle que les professionnels disposent aujourd’hui de différents identifiants, un pour la DDASS, un autre pour l’ordre et un troisième pour les caisses, ce qui contraint les professionnels à suivre plusieurs procédures en cas de changement de département.

Grâce au répertoire partagé, les démarches administratives seront facilitées, ainsi que le suivi statistique des professions de santé. Nous pourrons mieux connaître le maillage territorial de nos départements et anticiper plus efficacement l'évolution démographique des professions. D'apparence purement technique, cette réforme simplifiera donc profondément la vie des acteurs de la santé.

Simplifier, c'est aussi moderniser les conditions d'établissement et la diffusion des listes de professionnels d'un département : ces listes ne seront plus obligatoirement transmises aux parquets, mais mises à disposition sur internet, donc consultables par tous nos concitoyens. Nous faciliterons également les remplacements en allégeant les procédures. L’autorisation préalable, aujourd’hui délivrée par les préfectures, sera supprimée et la compétence de l'ordre élargie.

Afin de garantir la qualité des prestations, ce texte harmonise la définition et la sanction de l’usurpation des titres et de l’exercice illégal des professions, tout en rétablissant une hiérarchie cohérente dans l'échelle des peines. La sanction de l'exercice illégal de la profession d'infirmier passera ainsi de 3 750 à 30 000 euros d'amende.

J’en viens à la profession de diététicien. Par la création d’un véritable statut de profession de santé, nous reconnaîtrons pleinement ce métier, appelé à jouer un rôle croissant dans notre système de santé, qu’il s’agisse des actions de prévention, comme l’éducation et le conseil, ou de la prise en charge des pathologies liées à une mauvaise nutrition.

Enjeu essentiel de la santé publique, compte tenu du développement de l’obésité et des pathologies impliquant la nutrition, comme les cancers, les maladies cardiovasculaires et le diabète, qui touchent plusieurs millions de Français, la nutrition est également un enjeu social et sociétal.

Le deuxième programme national « nutrition santé », que j'ai lancé le 6 septembre dernier, prévoit ainsi un plan spécifique de repérage précoce et de prise en charge de l'obésité. Par essence multidisciplinaires, ces actions imposent la création de réseaux consacrés à l'obésité et associant médecine de ville et médecine hospitalière. Les diététiciens doivent être des interlocuteurs privilégiés au sein de ces réseaux, mais aussi dans les établissements de santé, notamment pour lutter contre la dénutrition des patients.

Ce projet de loi permet de franchir une étape importante dans la reconnaissance de la profession, jusqu’alors limitée à l’usage du titre, sans définition de l'exercice professionnel. Les diététiciens seront désormais reconnus comme des professionnels de santé à part entière, avec tous les droits et les devoirs afférents.

Première avancée de l'article 7, le diététicien est défini comme un professionnel qui dispense des conseils nutritionnels et participe, sur prescription médicale, à l'éducation et à la rééducation nutritionnelle des patients atteints de troubles du métabolisme ou de l'alimentation. Il établit un bilan diététique personnalisé de la personne prise en charge et contribue au suivi, à l'évaluation et au contrôle de la qualité de l'alimentation servie en collectivité, ainsi qu'aux activités de prévention en santé publique relevant du champ de la nutrition.

Deuxième progrès, un diplôme d'État se substituera aux actuels brevets de technicien supérieur et diplômes universitaires de technologies. Par un arrêté conjoint avec le ministre de l'éducation nationale, nous définirons le contenu du diplôme et des formations qui y préparent. En lien avec les professionnels de santé, nous travaillerons également sur des référentiels pour les diététiciens afin d’améliorer la qualité de leurs prestations, de favoriser leur reconnaissance au sein des professions de santé et de mieux les associer à la prise en charge des patients.

Autre avancée, la profession sera protégée de l’usage illégal du titre de diététicien par l’application de sanctions pénales. Les professionnels devront enfin s'enregistrer sur le fichier national ADELI, ce qui permettra de connaître avec précision la démographie de la profession.

En dernier lieu, ce texte répond aux interrogations que le projet de loi sur la prévention de délinquance a suscitées au sein de la communauté psychiatrique, mais aussi des associations de familles et d'usagers, qui demandent une approche globale des procédures de soins psychiatriques sous contrainte, dans un texte porté par le ministère de la santé.

C'est pourquoi le Gouvernement a déposé un amendement tendant à l’habiliter à réviser par ordonnance la loi de 1990. Cette réforme globale comportera, outre les éléments concernant les procédures de l'hospitalisation d'office, un volet sanitaire qui concerne directement les professionnels de santé du champ psychiatrique. Il est donc légitime d’introduire cet amendement dans cette ordonnance sur les professions de santé. Je vous invite à mesurer, en l’occurrence, les avantages qu’il y a à légiférer par ordonnance : disposer d’un texte appréhendant de manière globale les problématiques liées à l'hospitalisation sous contrainte ; aller vite, sans pour autant négliger l'indispensable concertation avec les acteurs de la santé mentale…

M. Gérard Bapt – Pourquoi n’a-t-elle pas eu lieu avant ?

M. le Ministre – …et pouvoir disposer d'un texte finalisé dès le début de l’année 2007, ce que le calendrier parlementaire n’aurait pas permis. Le Gouvernement a entendu les préoccupations qui se sont exprimées (Protestations sur les bancs du groupe socialiste). Il faut rester serein (Protestations sur les bancs du groupe socialiste). Légiférer par ordonnance ne fait nullement obstacle à une concertation approfondie.

M. Jean-Marie Le Guen – Cela empêche sans doute les bêtises des parlementaires…

M. le Ministre – Je compte sur les députés pour nous faire connaître leur choix. Doit-on poser les principes nécessaires ou préfère-t-on polémiquer ? (Protestations sur les bancs du groupe socialiste)

Je salue le travail accompli par le président Dubernard afin de trouver une solution équilibrée…

M. Serge Blisko – Tu parles !

M. le Ministre – …à partir des remarques des professionnels et des associations. Si nous tenons tous à éviter de confondre les problèmes liés à la délinquance et ceux de la santé mentale, nous devons également prendre nos responsabilités.

Ce texte cohérent et de bon sens simplifiera la vie des professionnels de santé. Je demande à l'Assemblée nationale de bien vouloir l’adopter (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Pascal Ménage, rapporteur de la commission des affaires culturelles – Ce projet poursuit un mouvement de fond amorcé par la loi d'habilitation du 2 juillet 2003 qui a lancé le plus grand mouvement de simplification administrative depuis 1945, relayée par la loi du 9 décembre 2004 de simplification du droit autorisant le Gouvernement à prendre par ordonnances toute une série de mesures. Le présent texte vise principalement à ratifier l'ordonnance du 26 août 2005 tout en modifiant ou complétant certaines de ses dispositions. Il complète ainsi la réforme entreprise par la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé et poursuivie par celle du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique. L'ordonnance s’inscrit quant à elle dans une démarche à long terme de simplification du droit.

Ce projet vise à ratifier l'ordonnance relative à l'organisation de certaines professions de santé : médecins, sages-femmes, chirurgiens-dentistes, masseurs-kinésithérapeutes et pédicures podologues. Il comporte également d'autres dispositions rectifiant ou complétant le dispositif de l'ordonnance et modifiant de façon plus générale le code de la santé publique. Par ailleurs, la commission des affaires culturelles a adopté onze amendements, dont dix à l'initiative du rapporteur, qui ont permis de d’enrichir ce texte. Un amendement a ainsi notamment été adopté afin de soumettre les orthophonistes et les orthoptistes à l'obligation de se conformer aux règles professionnelles, qui seront définies par décret en Conseil d'État. Deux autres amendements concernent la profession de diététicien et le régime des hospitalisations d'office des personnes atteintes de troubles mentaux.

Le nombre important de dispositions que comprend l’ordonnance témoigne à lui seul de la réussite de la politique de simplification. Pour l'essentiel, cette ordonnance comporte des mesures de clarification de forme, quelques innovations, de nombreuses mesures de simplification et une harmonisation des dispositions répressives applicables aux infractions d'exercice illégal et d'usurpation de titres. Les mesures de clarification de forme sont des mises en cohérence juridiques consistant à regrouper dans des articles communs des dispositions qui figuraient dans les différents chapitres concernant chacun des ordres, ainsi que des corrections d'erreurs matérielles.

L'ordonnance contient également quelques nouveautés significatives et en particulier une meilleure transparence entre les praticiens et les ordres des professions médicales, une véritable continuité dans le fonctionnement des instances ordinales nationales, un meilleur respect du principe du double degré de juridiction, notamment grâce à la fixation des conditions d'inéligibilité et d'incompatibilité auxquelles sont soumis les membres des chambres disciplinaires nationales des professions médicales, un rôle accru du fonctionnement de la commission de conciliation au sein des conseils départementaux des professions médicales, la création d'une autorisation d'absence pour les conseillers ordinaux des professions médicales leur laissant le temps nécessaire pour participer aux séances du conseil sans diminution de leur rémunération.

Les mesures de simplification ont notamment trait à l’organisation et au fonctionnement des ordres des professions de santé. L’article 9 allège les règles de diffusion des listes de professionnels de santé inscrits aux tableaux de leur ordre. Le partage efficace des informations grâce aux nouvelles technologies de l'information devrait, quant à lui, être encore amélioré grâce à l’établissement d'un répertoire partagé des professionnels de santé. Citons aussi la simplification du dispositif d'encadrement des professions réglementées dans les domaines sanitaire et social. La simplification porte également sur les procédures d'enregistrement applicables aux psychologues et aux assistants de service social, ainsi que sur les procédures de remplacement des professionnels de santé et de création ou de changement d'exploitant des pharmacies.

Enfin, l'ordonnance comporte des mesures destinées à harmoniser les dispositions répressives applicables aux infractions d'usurpation de titre et d'exercice illégal des professions. Concernant l'usurpation de titre, la rédaction des articles du code de la santé publique renvoyant à l'article 433-17 du code pénal différait jusqu'ici selon les professions quant à la définition de l'infraction. Il était donc urgent de l’harmoniser. Quant à l'exercice illégal, il ne devait pas être puni moins sévèrement que l'usurpation de titre, elle-même passible à titre principal d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende. En pratique, on constatait que la répression de l'exercice illégal des professions de santé variait considérablement d'une profession à une autre : inexistante pour la profession de diététicien, simple contravention pour la profession d'orthophoniste, mais délit pour les professions médicales. L'ordonnance harmonise les dispositions répressives en mettant fin à l'extrême hétérogénéité de l'échelle des peines sans les uniformiser pour autant. S’agissant en particulier de la profession de diététicien, il est apparu nécessaire de définir préalablement l'exercice de cette profession avant de fixer des sanctions pénales relatives à son exercice illégal. L'habilitation législative ne permettant pas de procéder à cette définition dans le corps de l'ordonnance, celle-ci figure à l'article 7 de ce projet. Les articles 7 et 8 fixent les règles propres à l'encadrement de l'enseignement et de l'exercice de la profession de diététicien. À titre personnel, je regrette qu’il n’en ait pas été de même pour les psychothérapeutes.

M. Jean-Marie Le Guen – Voilà un modèle de concertation !

M. le Rapporteur – La réglementation de la profession de diététicien se limitait jusqu'à présent à la seule protection légale du titre de diététicien. Le vide juridique relatif à l'exercice de cette profession était devenu problématique avec les dispositions de l'ordonnance du 26 août 2005 visant justement à harmoniser les sanctions de l'exercice illégal de l'ensemble des professions de santé. Cette mesure s'inscrit dans le programme national nutrition-santé relancé en septembre 2006, qui place notamment les réseaux de conseils, de prévention et de soins au cœur du dispositif. Ces articles posent le principe d'un diplôme d'État français et l'enregistrement de la profession sur le fichier national ADELI, qui rendra possible un décompte précis de ses membres. Un amendement a été adopté par la commission afin de combler un vide juridique relatif à la situation de certaines personnes autorisées, par dérogation, à continuer à exercer la profession de diététicien et à en porter le titre sans pour autant être titulaires du nouveau diplôme d'État ni de l'autorisation spécifique réservée aux membres de la Communauté européenne. L'ordonnance réglait en effet la situation de ces personnes à compter de la date d'entrée en vigueur de l'acte réglementaire fixant le programme de formation du nouveau diplôme d'État français de diététicien, mais elle ne disait rien de la période comprise entre la promulgation de la loi et l'entrée en vigueur de cet acte réglementaire. En comblant ce vide, cet amendement apporte à ces personnes une meilleure sécurité juridique sans attendre l'édiction de l'acte réglementaire fixant le programme de formation au diplôme d'État.

Par ailleurs, l’introduction de dispositions relatives au régime des hospitalisations des personnes atteintes de troubles mentaux dans le projet de loi relatif à la prévention de la délinquance – article 18 à 24 – a suscité interrogations et inquiétudes de la part des professionnels de santé et des associations d'usagers représentant les patients et les familles.

M. Jean-Marie Le Guen –.Évidemment !

M. le Rapporteur – Comme l'a justement souligné le président Dubernard, leur émotion est compréhensible en raison du risque de confusion entre délinquance et troubles psychiatriques.

Mme Jacqueline Fraysse – Assurément.

M. le Rapporteur – Pour répondre à ces préoccupations, le Gouvernement a présenté un amendement portant article additionnel après l'article 10 habilitant le Gouvernement à modifier par ordonnance les dispositions législatives relatives aux soins psychiatriques sans consentement, conformément à l'article 38 de la Constitution. Cela permettra de clarifier les procédures administratives relatives aux personnes dont les troubles mentaux nécessitent des soins, de faciliter leur accès aux soins, de préciser le rôle des professions de santé et des autorités locales, d’accroître les garanties relatives aux droits des personnes atteintes de troubles mentaux faisant l'objet de soins sans consentement, d’améliorer le suivi des mesures d'hospitalisation d'office et de faciliter l'instruction des demandes d'autorisation relatives aux matériels, armes et munitions prévues par le code de la défense par la création d'un traitement national de données à caractère personnel et, enfin, de modifier les dispositions relatives à l'hospitalisation psychiatrique des personnes détenues.

Attendue de très longue date, la réforme de la loi du 27 juin 1990 relative aux droits et à la protection des personnes hospitalisées en raison de troubles mentaux et à leurs conditions d'hospitalisation pourra ainsi être appliquée avant la fin de la législature, en concertation avec l'ensemble des acteurs.

Bref, ce projet comporte d’indéniables avancées…

M. Richard Mallié – Oui.

M. le Rapporteur – …pour les professions de santé, les patients et les usagers. Je vous propose donc de l’adopter, avec sagesse et fierté ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles – Je remercie M. le rapporteur pour sa présentation aussi claire que précise de l’amendement gouvernemental en particulier. Si les articles 18 à 24 de la loi sur la prévention de la délinquance soulèvent le problème de la possible confusion entre délinquance et maladie mentale, nous savons également qu’un certain nombre de crimes sont commis par des malades mentaux.

M. Jean-Marie Le Guen – Voilà une nouvelle approche fort intéressante !

M. le Président de la commission – Nous avons tous en tête les événements de Pau et de Nanterre par exemple. Ces articles ont donc leur place dans ce texte.

Je comprends néanmoins la position des professionnels de santé – psychiatres, mais aussi personnels des hôpitaux psychiatriques et personnels administratifs. Tous leurs syndicats se sont élevés contre la présence dans le projet de loi sur la prévention de la délinquance d’articles qui relèvent du code de la santé publique. Le Gouvernement a fait un choix de bon sens, qui permet de satisfaire les professionnels choqués par le fait que l’on puisse considérer leurs malades comme des délinquants – même si c’est parfois vrai.

M. Jean-Marie Le Guen – Qu’est-ce qui est vrai ?

M. le Président de la commission – Il est vrai, mon cher confrère, qu’un certain nombre de malades psychiatriques ont commis des crimes qui auraient pu être évités grâce à un meilleur encadrement médical.

M. Serge Blisko – Le diagnostic est juste, mais la thérapeutique est erronée !

M. le Président de la commission – Les milieux de la psychiatrie attendent d’autre part une révision de la loi de 1990, dont vous ne contesterez pas la nécessité.

M. Gérard Bapt – Une vraie révision, pas une greffe ! (Sourires)

M. le Président de la commission – Eu égard à la complexité du sujet, qui dépasse les clivages politiques, Monsieur le ministre, ne pourrait-on associer les députés qui s’intéressent à cette question…

M. Jean-Marie Le Guen – J’ai une idée : on va inventer le Parlement ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Paul Garraud – Quel mépris !

M. le Président de la commission – …à la préparation de ce texte ?

Quoi qu’il en soit, Monsieur le ministre, je vous félicite d’avoir renoué le contact avec les professionnels lors de la réunion du 15 novembre, car ce n’était pas chose facile. Vous avez désormais un programme de concertation. J’espère donc que nos collègues pourront être associés à l’élaboration du texte (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP).

EXCEPTION D’irrecevabilité

M. le Président – J’ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste une exception d’irrecevabilité déposée en application de l’article 91, alinéa 4, du Règlement.

M. Serge Blisko – J'attire évidemment votre attention sur l'article additionnel ajouté à ce projet de loi par amendement. Ne nous y trompons pas : ce projet n'est là que pour porter un cavalier législatif. C'est un simple support sorti d’un fond de tiroir. Le Parlement n’est donc que le jouet du Gouvernement : ce n’est pas supportable.

Nous nous indignons d’abord de la méthode choisie. Une fois de plus, les parlementaires de la majorité sont considérés comme de véritables pantins. L’embarras de M. Dubernard prouve d’ailleurs que l’article additionnel est une greffe qui ne prend pas. Revenons sur la chronologie ubuesque de ce texte. Vous aviez décidé d'insérer dans le projet de loi sur la délinquance un volet « santé mentale », les articles 18 à 24, qui a immédiatement suscité de vives critiques. Ses dispositions, prises sans concertation, assimilent en effet malades et délinquants, sans procéder à la nécessaire réforme de la loi de 1990. Devant l'indignation des professionnels de la santé, des associations de malades et des familles, la majorité a voulu faire machine arrière sans froisser le ministre de l’intérieur, ou président de l’UMP, ou candidat à la présidentielle… Le président de la commission des affaires sociales, Jean-Michel Dubernard, a jugé « préférable » dans la presse, le 8 novembre, de retirer le volet santé mentale du projet de loi sur la délinquance. Le Gouvernement a donc décidé de légiférer par ordonnance et contraint la majorité parlementaire à céder sa « niche », pour nous soumettre un texte servant de support à un article additionnel qui permet de légiférer par ordonnance sur l'hospitalisation psychiatrique.

Cette procédure abracadabrantesque ne s'arrête pas là : nous apprenons que la majorité a décidé que « par précaution », les articles 18 à 24 seraient maintenus et votés dans le cadre du projet de loi sur la délinquance. Ce bricolage reflète votre précipitation et votre embarras. Vous vous êtes en outre livrés auprès de la presse à un véritable travail de désinformation pour désamorcer la colère des professionnels de santé et des associations…

M. Jean-Marie Le Guen – Très juste !

M. Serge Blisko – …si bien qu’ils croyaient tous que les articles 18 à 24 seraient discutés à un autre moment. La méthode est particulièrement grossière, et nous ne pouvons que rejeter votre dispositif.

Nous sommes face à un cavalier législatif, sans rapport avec le texte que vous nous soumettez, qui traite de la diététique, des pédicures podologues et de la création d’un conseil régional de l'ordre en Corse. Si l’article additionnel ne touchait pas aux libertés individuelles, nous pourrions penser que c'est une plaisanterie. C’est un manque de sérieux. Les cavaliers, symboles de la mauvaise pratique législative, ne peuvent être tolérés. Le Conseil constitutionnel a été très clair dans sa décision du 19 janvier 2006 : un amendement doit obligatoirement avoir un lien avec l'objet du texte. Nous attendons que vous nous expliquiez le lien entre la réglementation de la profession de pédicure et les dispositions relatives aux soins psychiatriques sans consentement !

Vous faites fi du Conseil d’État. Dans sa décision du 3 avril 2003, le Conseil constitutionnel a affirmé que « l'ensemble des questions posées par le texte adopté en Conseil des ministres doit avoir été soumis au Conseil d'État lors de sa consultation ». Or celui-ci n'a pas été consulté sur l'article additionnel.

Votre méthode est le système du double emploi. « Il vaut mieux deux fois qu'une » semble être votre logique. Les dispositions relatives à la santé mentale demeurent dans le projet de loi sur la délinquance, mais font également l'objet d'une ordonnance. Vous ferez ainsi voter deux fois chaque disposition, pour être certains qu'elles soient bien adoptées, conscients que vous êtes que les présentes dispositions seront déclarées inconstitutionnelles par le Conseil constitutionnel ! Vous vous efforcez de contenter à la fois à ceux qui vous ont critiqués et le ministre de l’intérieur ! Or nous touchons aux libertés fondamentales. Sur le « manque de sincérité dans la procédure parlementaire », je vous renvoie à la décision du Conseil constitutionnel du 27 juillet 2006.

M. Jean-Marie Le Guen – Très bien !

M. Serge Blisko – Vous maltraitez la Constitution ; vous maltraitez le Parlement et votre majorité. Nous aurons eu droit à tout. Il y a quelques mois, le Président de la République promulguait la loi sur le CPE tout en affirmant qu'il ne faudrait surtout pas l'appliquer ! Avec ce tour de passe-passe, vous avez écrit un nouveau chapitre dans l’histoire de l’abaissement du Parlement. Vous allez encore plus loin avec ce vote « par précaution ».

Cela ne fait que traduire l’absence de respect du rôle du législateur. Des dispositions aussi importantes que celles touchant à la santé mentale, donc aux libertés individuelles, sont du ressort du législateur et non du Gouvernement. Si ce n'est pas le cas, il va falloir expliquer aux Français le rôle du Parlement.

L'usage des ordonnances est du reste strictement encadré. Aux termes des décisions du Conseil constitutionnel des 25 et 26 juin 1986 et 1er et 2 juillet 1986, confirmées par celle du 26 juin 2003, le Gouvernement est dans l'obligation d'indiquer avec précision au Parlement la finalité des mesures qu'il se propose de prendre par ordonnances, ainsi que leur domaine d'intervention. La précision n'est pas de mise dans cet article additionnel. Le Parlement ne peut se dessaisir dans un domaine qui touche autant la santé publique que les libertés individuelles sans connaître exactement l'objectif du Gouvernement.

M. Jean-Marie Le Guen – Très bien !

Mme Marylise Lebranchu – Il a raison !

M. Serge Blisko – Et ni M. le rapporteur ni M. le ministre ne nous ont convaincus sur ce point. L’objectif du Gouvernement n’est en effet que de faire plaisir au ministre de l’intérieur en période préélectorale, ce qui n’a rien à voir avec la psychiatrie.

M. Jean-Marie Le Guen – Il s’est fourvoyé ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

M. Serge Blisko – Plus grave, les dispositions prévues en matière de santé mentale n'offrent pas de garanties constitutionnelles. Dans sa décision du 26 juin 2003, le Conseil constitutionnel a pourtant affirmé que « les dispositions d'une loi d'habilitation ne sauraient avoir ni pour objet ni pour effet de dispenser le Gouvernement de respecter les règles et principes de valeurs constitutionnelles, ainsi que les normes européennes et internationales applicables. » Or l’article 66 de la Constitution dispose que « nul ne peut être arbitrairement détenu. L'autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle, assure le respect de ce principe dans les conditions prévues par la loi ». Nous avons donc toutes les raisons de soulever l'inconstitutionnalité de ce texte. Du reste, je n’en suis pas surpris : l’actualité de ces derniers mois nous a bien montré que les juges importunent le ministre de l’intérieur et que la garantie des libertés publiques est un obstacle au déploiement de sa campagne électorale (Protestations sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean-Marie Le Guen – Très bien !

M. Jean-Paul Garraud – Caricature !

M. Serge Blisko – Avec cet amendement d’habilitation, le Gouvernement veut s'attaquer aux « dispositions législatives relatives aux soins psychiatriques sans consentement ». Ce texte ne recouvre donc – et heureusement – qu'une partie limitée de la santé mentale. Nous sommes loin de la réforme globale de la loi de 1990 attendue par l'ensemble de la profession et des associations. Vous n’abordez qu’un aspect du problème de la santé mentale, et dans des conditions détestables, puisque vous transformez une mesure thérapeutique en mesure sécuritaire…

M. le Ministre – C’est tout le contraire !

M. Serge Blisko – …au nom d’une philosophie difficilement supportable. Monsieur le ministre, nous vous estimons assez pour savoir que vous n’êtes pas l’auteur des articles 18 à 24. On reconnaît bien celui qui, après les immigrés, les demandeurs d’asile, les jeunes de banlieue, les enfants de trois ans qu’on va chercher dans les écoles, s’attaque maintenant aux malades mentaux en les traitant de délinquants !

M. Jean-Marie Le Guen – Et j’entends Monsieur Garraud murmurer « les socialistes » !

M. Serge Blisko – Cette fois, vous avez franchi la ligne rouge ! Vous ne cessez de mettre en avant la sécurité, projet après projet, pour préparer une campagne présidentielle haineuse.

M. Philippe Vitel – La sécurité, c’est une invention de la droite ?

M. Serge Blisko – L’eugénisme social est effrayant. Vous faites primer la sécurité sur la santé publique, et quand celle-ci risque de coûter de l’argent, on l’oublie. Dans le pays de Henry Ey, Jean Delay, Lacan, Françoise Dolto, je suis vraiment navré que la seule fois où l’on parle de psychiatrie à l’Assemblée depuis 2002, ce soit pour entretenir la confusion entre délinquance et maladie mentale. Les craintes des professionnels sont confirmées.

Leurs attentes sont tout autres, car la psychiatrie est en crise. L’offre de soins est insuffisante. Dans le public, il faut trois à six mois pour prendre un rendez-vous, et en secteur libéral, ce n’est pas mieux.

M. le Ministre – Vous niez l’effet du plan santé mentale.

M. Serge Blisko – On manque de personnel, je le sais pour présider le conseil d’administration d’un important hôpital psychiatrique. On manque aussi de places dans les structures extrahospitalières et de post cure. la situation est très critique pour les adolescents. Il aura fallu que Mme Chirac, très sensibilisée, s’implique fortement pour qu’on crée enfin une maison des adolescents, mais à Paris seulement.

L’humanisme médical n’est ni de droite ni de gauche, et tout son effort, depuis 200 ans, c’est de libérer la psychiatrie de l’image de l’enfermement. Les patients et les familles s’impliquent aussi pour que le malade mental ne soit plus mis à l’écart, dans un pays qui l’accepte mal. Vous préférez en faire un débat sécuritaire, au nom du danger potentiel que représentent les malades mentaux. Il existe certes, mais c’est principalement à l’égard des malades eux-mêmes ! 15 % des Français souffrent d’une tendance suicidaire,sans parler des risques de dérive sociale et familiale. Le danger pour les tiers est bien moindre. Il faut donc soigner et non enfermer. J’en suis désolé, Monsieur le ministre, mais vous resterez celui qui n’aura pas su défendre la psychiatrie contre la tentation sécuritaire. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP)

M. le Ministre – Vous n’êtes pas au niveau d’un tel débat !

M. Serge Blisko – J’en veux pour preuve la situation des détenus dans les prisons.

M. le Ministre – Agissez, plutôt !

M. Serge Blisko – Qu’avez-vous fait pour rompre le cercle vicieux prison-rue-hôpital ? En cas de conduite déviante, on hésite entre une prise en charge médico-légale à l’hôpital ou – et c’est un soulagement – le renvoi en prison où ces personnes posent d’énormes problèmes à l’administration, aux surveillants, et aux co-détenus, qui sont les premières victimes, avec de nombreux drames. C’est en préparant le projet qu’il fallait travailler sur ces questions.

Mais votre texte est dangereux pour les libertés publiques. (Protestations sur les bancs du groupe UMP) En créant un « traitement national de données à caractère personnel », vous voulez ficher les personnes…

M. Philippe Vitel – La liberté, c’est la sécurité !

M. Jean-Marie Le Guen – C’est du beau !

M. Serge Blisko – De la part d’un confrère, en effet. Vous entendez ficher ceux qui doivent subir des soins psychiatriques. C’est intolérable pour la préservation des libertés personnelles et de la vie privée. Le secret ne sera plus garanti, la réinsertion sera difficile. Certains refuseront même de se faire soigner de peur d’être fichés.

D’autre part, la procédure d’hospitalisation d’office est très encadrée. Enfermer quelqu’un contre son gré pour des raisons non judiciaires est un acte très délicat. Il y a donc un ensemble de garanties contre les dérives arbitraires et l’utilisation de la psychiatrie telle qu’on la constate dans des États dictatoriaux. Mais vous substituez à un avis circonstancié un avis médical beaucoup plus flou, et à Paris, la compétence de droit commun passera du préfet au commissaire de police. Ce n’est pas la même chose.

M. Jean-Marie Le Guen – C’est le moins qu’on puisse dire !

M. Serge Blisko – C’est la liberté d’aller et venir du malade qui est en jeu.

À ce propos, nous avons à Paris un établissement qui préfigure le système Sarkozy. (Protestations sur les bancs du groupe UMP) C’est Vidocq qui a créé cet établissement spécialisé appelé l’IPPP, l’infirmerie psychiatrique de la préfecture de police, exorbitante du droit commun…

M. Jean-Marie Le Guen – Et c’est l’avenir !

M. Serge Blisko – …Véritable prison psychiatrique où s’accumulent depuis 200 ans des fiches, désormais informatisées, sur des millions de personnes, sans contrôle de la CNIL ni du juge des libertés. C’est l’état de droit que vous voulez généraliser…(Protestations sur les bancs du groupe UMP) et qui est contraire aux principes de la convention européenne des droits de l’homme, qui utilise le terme rétention : nous avons donc un centre de détention en plein Paris.

M. Jean-Marie Le Guen – Une zone de non-droit !

M. Serge Blisko – Le maire, enfin, doit être un médiateur, non un shérif. Vous faites l’inverse. La loi de 1990 avait veillé ne pas confier à l’élu local une responsabilité pour laquelle il serait beaucoup plus exposé que l’administration aux pressions des familles. Imaginez le maire d’une petite ville qui devra prendre une décision d’internement.

Mme Arlette Franco – C’est courageux !

M. Serge Blisko – Ce n’est pas une question de courage, mais de discernement. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) Évidemment, les maires sont garants de la tranquillité publique. Mais c’est d’abord une fonction régalienne du ministère de l’intérieur et de la police nationale. Lors de l’affaire Human Bomb à Neuilly, un jeune maire, courageux, était dans son rôle en réconfortant les parents et les enseignants. Mais il n’a pas aidé le Raid ! Vous allez faire du maire exactement ce que M. Sarkozy ne voulait pas être à cette époque. (Protestations sur les bancs du groupe UMP) Le maire veut rester un médiateur. Et il est quand même surprenant de le mettre en avant constamment sous prétexte qu’il est une autorité de proximité, alors que vous avez supprimé la police de proximité. C’est incohérent, et la situation sera intenable pour des maires dont la responsabilité sera constamment mise en jeu.

M. le Ministre – Faute d’arguments, vous pratiquez l’amalgame !

M. Serge Blisko – Les articles 18 à 24 de la version initiale du projet prouvent à quel point le ministre de l’intérieur a une vision policière de la psychiatrie, à laquelle je vous reproche, Monsieur le ministre, de ne pas vous être opposé.

M. le Ministre – Et moi, je vous reproche de ne pas avoir d’arguments.

M. Serge Blisko – Or il n’y a pas de politique de santé publique sans politique de santé mentale. 12 % de la population souffrent de troubles anxieux, 3 % de syndromes psychotiques et 15 % de tendances suicidaires. Si demain, un suicidaire ne va pas consulter parce qu’il a peur d’être fiché, vous n’aurez pas fait votre travail, qui est de protéger les plus faibles.

Mme Arlette Franco – Cela veut dire quoi exactement ?

M. Serge Blisko – Il aurait plutôt fallu combattre les préjugés sur le caractère dangereux et incurable des troubles mentaux, et poursuivre le travail engagé en ce sens depuis la Libération. Je ne citerai pas tous ceux qui, après les 50 000 morts dans des hôpitaux psychiatriques, par manque de soins, des années 1940 à 1945, se sont battus pour que ces établissements ne soient plus des lieux d’exclusion. Des progrès avaient été accomplis avec la sectorisation psychiatrique, qui replace l'hôpital psychiatrique dans une chaîne de soins et de prévention où l'hospitalisation d'office et l’enfermement doivent rester des exceptions. Aujourd’hui hélas, vous prônez le contraire de ces pionniers. La psychiatrie avait pénétré, outre le champ du travail social, des secteurs nouveaux comme la périnatalité ou la pédiatrie. Elle était devenue une discipline à la frontière du soin individuel et du soin collectif. Vous êtes en train de saboter soixante ans de travail (Protestations sur les bancs du groupe UMP). En confondant justice et psychiatrie, prison et hôpital, enfermement et soin, vous éloignez la psychiatrie de la médecine et remontez les murs de l'asile.

Ce qui rend l'affaire totalement détestable c'est la méthode, ce détournement de la procédure parlementaire, la désinformation visant à faire croire que les articles 18 à 24 allaient être retirés du projet de loi sur la délinquance. C'est aussi votre aveuglement devant les personnes les plus fragiles de notre société, les SDF, les personnes très âgées, perdues, les handicapés, les malades. Le rôle du législateur est de protéger les plus faibles. Le ministre de l'intérieur, lui, veut éradiquer avec un kärcher sanitaire la déviance et la différence.

Plusieurs députés UMP – Voyons !

M. Serge Blisko – Il y a dans ce pays une vision humaniste, qui considère la personne fragile à la fois comme une victime et comme un symptôme du malaise social. On la trouve aussi bien dans la pensée progressiste de gauche que dans le personnalisme de Mounier. Il apparaît une autre vision : celle d'une société plus dure, qui pratique une forme édulcorée de l'eugénisme social consistant à soigner, certes, les plus faibles, mais en les tenant soigneusement à l'écart du reste de la société. Notre pays a toujours privilégié la solidarité, tant dans le cadre familial que dans la sphère publique. Mais votre projet glacial tourne le dos à cet humanisme en faisant des individus des êtres isolés où les meilleurs prennent le pas sur les autres. Vous comprendrez pourquoi nous refusons absolument de livrer des malades à l'arbitraire, qu’il soit d’État ou municipal. Les droits de l’homme sont inaliénables, même en cas de troubles psychiques. Nous souhaitons que les malades soient soignés, éventuellement gardés, mais jamais détenus ou retenus. Nous dénonçons cette mascarade parlementaire et regrettons que vous vous soyez laissé déborder, Monsieur le ministre, par votre collège de la place Beauvau (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

M. le Ministre – Je ne peux que dénoncer cette mascarade parlementaire. Vous pouvez présenter vos convictions, vous avez même le droit de les appuyer par des arguments. Ce n’est interdit ni par le Règlement de l’Assemblée, ni par l’éthique de la politique. Mais vous vous limitez à l’amalgame, tout en le dénonçant bien sûr. Les articles du projet de loi sur la délinquance posaient problème : nous avons entendu le message et trouvé des solutions, au prix d’un travail important, car, loin de nous contenter de disjoindre les articles, nous y avons ajouté la réforme de la loi de 1990 qui était attendue par tous. Cela fait des semaines que nous travaillons avec les professionnels, depuis que nous avons rempli le préalable qu’ils avaient posé. Dès lors, tous vos arguments n’auraient été valables que si nous n’avions pas fait ce travail.

Vous n’avez à aucun moment parlé du plan de santé mentale. Vous n’avez pas dit qu’en dix-huit mois, 41 % des crédits promis ont déjà été débloqués. Vous n’avez pas dit que les projets sont déjà sur pied. Omettre tout cela, ce n’est pas critiquer le Gouvernement, mais mépriser le travail des professionnels, qui se mobilisent, eux, autour du plan de santé mentale. Si vous n’avez pas de respect pour nous, ayez-en au moins pour eux (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. le Rapporteur – Avis défavorable.

M. Philippe Vitel – M. Blisko a excellé. Excellé dans l’excès, la caricature, l’arrogance et l’amalgame. C’est vrai, c’est une mascarade parlementaire. Je comprends que nos méthodes le perturbent, car il y a une grande différence entre nos capacités de résoudre un problème donné. Le pragmatisme vous gêne parce, comme d’habitude, vous êtes à contre-courant des réalités. Nous ne voterons pas cette exception d’irrecevabilité (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Mme Jacqueline Fraysse – Nous partageons les propos de M. Blisko. Oui, la méthode est particulièrement choquante, pour les parlementaires certes, mais surtout pour les professionnels, les associations, les patients et leurs familles, qui sont aux prises avec des difficultés insurmontables, face à des pathologies qui se développent alors que les moyens manquent. Je regrette que des sujets aussi sérieux, dont d’ailleurs certains sont traités de façon positive, comme ce qui concerne les diététiciens, soient abordés de cette façon. Et que dire de la lamentable révision de la loi du 27 juin 1990 ! Des problèmes d’une telle ampleur et d’une telle complexité, qui touchent à la fois à la santé, au respect des personnes, à la sécurité et aux libertés individuelles, méritent autre chose qu’une acrobatie politicienne pour sortir votre ministre sécuritaire d’un mauvais pas (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste).

Vous avez manifesté souvent, Monsieur le ministre, une réelle volonté de faire avancer la santé. Accepter une telle manœuvre pour rendre service n’est pas brillant. La santé mentale mérite une vraie loi, un vrai débat, une vraie concertation, et des moyens pour traiter et pour suivre les patients. Vous avez évoqué le drame de Nanterre : il y a eu sans doute manquement dans le suivi du patient, mais aussi dans le traitement administratif de son dossier. Le patient avait été signalé par son psychiatre, qui avait été menacé avec une arme, mais on n’est pas allé reprendre le permis de port d’armes ni récupérer les armes ! Voilà qui montre bien toute la complexité de ces questions. Ce n’est donc pas d’une façon accessoire, à l’occasion d’une loi qui n’a rien à voir, que l’on traite de ces questions. Il faut envisager toute la chaîne médicale et administrative. Votre façon de procéder est extrêmement méprisante et n’a pas le sérieux requis. Ce sont les raisons pour lesquelles je soutiens sans réserves cette exception d’irrecevabilité (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste).

M. Jean-Marie Le Guen – Il suffira de relire l’intervention de Serge Blisko pour voir combien elle est précise, construite et argumentée, tant du point de vue juridique que de celui de la santé publique. Sur tous les sujets, nous irons au bout de la discussion, ce matin certes, de façon très partielle, mais surtout – et malheureusement – dans le projet de loi sur la délinquance ; car, contrairement à ce que vous prétendez, les articles 18 à 24 seront bel et bien discutés et votés. Peut-être ne seront-ils pas adoptés, mais si par hasard l’Assemblée souveraine votait le même texte que le Sénat, ils s’imposeraient comme loi !

Cet après-midi donc, nous discuterons et voterons un texte intégré au projet sur la « prévention » de la délinquance – c’est son titre, mais nous savons tous qu’il s’agit plutôt de répression. Je comprends, Monsieur le ministre, combien votre situation est douloureuse. Il n’est pas facile, pour un ministre de la santé, d’être à ce point négligé dans les arbitrages interministériels que c’est à quelques jours du vote, par un artifice inouï, qu’on ressort des questions de santé mentale – je ne parle même pas de la toxicomanie – d’un projet de loi qui est dans les tuyaux depuis longtemps. Vous étiez au conseil des ministres qui a examiné ce projet de loi : comment n’avez-vous pas vu que l’affaire était mal embarquée ?

Je comprends donc votre énervement. Il y avait déjà une énorme faute dans le processus législatif. La deuxième faute, c’est que nous allons légiférer par ordonnance. Aucun parlementaire ne peut considérer comme secondaire le fait que, sur des questions aussi essentielles, le Parlement se dessaisisse au profit du Gouvernement ! Le Conseil constitutionnel trouverait certainement à y redire. Et je ne parle pas du ridicule du fait que le groupe majoritaire renonce à sa faculté d’initiative, aussi limitée soit-elle par notre Constitution, pour offrir une porte de sortie – un soupirail ! – au ministre de l’intérieur. Nous confions des lois touchant à des questions de santé essentielles, mais aussi à des problèmes d’équilibre entre la sécurité publique et les libertés individuelles, excusez du peu, à l’exécutif. Dans quel pays occidental pourrait-on voir une chose pareille ailleurs qu’en France ?

En 1838 et en 1990, le Parlement s’était saisi de ces questions. Nous nous sommes par ailleurs souvent félicités les uns les autres – à raison – d’avoir travaillé sur les questions de bioéthique. Nous sommes aujourd’hui confrontés à un enjeu tout aussi fondamental, et pourtant, vous vous défaussez de votre responsabilité en laissant le Gouvernement agir par ordonnance !

M. Richard Mallié – Et si on votait, enfin ?

M. Jean-Marie Le Guen – Vous abandonnez certaines de vos prérogatives essentielles et renoncez à des principes de base de la déontologie médicale.

MM. Richard Mallié et Philippe Vitel – Nous attendons surtout votre explication de vote !

M. Jean-Marie Le Guen – Restez calmes, même si je comprends que la situation vous soit pénible. En effet, le droit des malades est constamment bafoué depuis 2002, la santé mentale est maltraitée et, de surcroît, la responsabilité du Parlement n’est pas respectée !

M. Richard Mallié – N’importe quoi !

M. Jean-Marie Le Guen – Vous maquillez ces questions de libertés fondamentales dans un débat tantôt technique, tantôt politicien.

MM. Richard Mallié et Philippe Vitel – C’est vous qui politisez ce débat !

M. Jean-Marie Le Guen – Voilà pourquoi nous voterons l’exception d’irrecevabilité présentée par M. Blisko ! (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains)

L'exception d’irrecevabilité, mise aux voix, n’est pas adoptée.

question préalable

M. le Président – J’ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste une question préalable, déposée en application de l’article 91, alinéa 4, du Règlement.

Mme Marylise Lebranchu – Ce débat a commencé dans l’énervement. Les psychiatres expliquent souvent que l’agacement est un symptôme caractéristique des gens malheureux. Ils doivent être nombreux sur ces bancs, car l’agressivité ne manque pas, ce matin.

M. Michel Piron (Désignant M. Le Guen) – Manifestement !

M. le Ministre – Vous n’êtes pas très aimable pour vos propres amis !

Mme Marylise Lebranchu – Vous nous reprochez de ne pas avoir agi avant ; au printemps prochain, pourtant, vous saurez en défendant votre programme que vous n’avez pas non plus tout fait.

M. Richard Mallié – Nous avions tant de retard !

M. le Ministre – Les élections ne sont pas le problème.

Mme Marylise Lebranchu – Je le reconnais d’ailleurs solennellement : sur les questions de santé mentale en général – et de psychiatrie en particulier – nous n’avons pas fait assez. À défaut d’aboutir à un texte en la matière, nous avons tout de même légiféré sur les droits des malades, avec le soutien de certains parlementaires de la majorité actuelle, d’ailleurs.

Au fil des nombreuses visites d’établissements pénitentiaires que j’ai effectuées en tant que Garde des Sceaux, j’ai pu constater la fragilité de la frontière entre la psychiatrie et la prison, où sont enfermées de nombreuses personnes qui relèvent pourtant de la médecine mentale. Or, au lieu de prendre ce problème à bras-le-corps en engageant une large concertation avec les professionnels, les familles et les anciens malades, le ministre de l’intérieur, toujours prompt à justifier son action par un exemple unique, a dû tomber, au détour d’une note de cabinet, sur un cas qui l’a poussé à agir.

M. Jean-Marie Le Guen – Ou bien il en aura pris connaissance à la télévision !

Mme Marylise Lebranchu – Et parce qu’il faut toujours qu’il fasse quelque chose…

Mme Jacqueline Fraysse – Et il fait pas mal de « conneries » !

Mme Marylise Lebranchu – …il a ainsi décidé de réformer le placement sur la base d’un seul cas de dysfonctionnement de la chaîne médicale, peut-être dû à une incompréhension ou à une réticence familiale. Une décision aussi lourde prise au motif d’un seul exemple !

Les maires, quant à eux, s’appuyant sur une expérience bien plus variée, ne veulent pas être entraînés dans cette spirale. Cependant, le ministre de l’intérieur entend de nouveau réformer seul, bien que le ministre de la santé soit normalement chargé de ce dossier.

Le ministre de l’intérieur ne peut pas être le tuteur du ministre de la justice, comme on l’a vu hier, de celui de l’éducation nationale, puisqu’il crée désormais les internats, et de celui de la santé !

M. le Ministre – S’il l’était, nous n’aurions pas cette discussion ce matin !

MM. Jean-Marie Le Guen et Lilian Zanchi – C’est lui qui vous l’a imposée !

Mme Marylise Lebranchu – Ce texte, préparé pendant trois ans, voit donc le jour à la lumière d’un seul cas. Pourquoi ne pas avoir mis tout ce temps à profit en organisant une concertation ? Du coup, les articles 18 à 24 provoquent aujourd’hui un tollé général – car la société veille, heureusement !

Au terme de ces trois années, vous reconnaissez votre erreur – dont acte. Et pourtant, vous allez agir par ordonnance et demander aux parlementaires de rentrer chez eux tranquilles, puisque vous organiserez au passage une concertation qui, selon le ministre de la santé, ravit les partenaires !

M. le Ministre – Ai-je employé ce terme ?

Mme Marylise Lebranchu – Disons qu’elle les intéresse, alors.

M. le Ministre – Et pour cause : ils participent à la concertation.

Mme Marylise Lebranchu – À raison, tant l’urgence est grave ! Quoi qu’il en soit, vous allez légiférer par ordonnance sur un texte qui concerne l’ensemble de notre société.

On a trop longtemps mêlé justice et psychiatrie. Lorsqu’une personne souffre d’une maladie grave, la famille en parle, partage sa douleur et cherche du secours.

M. Jean-Marie Le Guen – Depuis peu, d’ailleurs.

M. le Ministre – En effet : c’est un phénomène plutôt récent.

Mme Marylise Lebranchu – Pourtant, ce n’est pas encore le cas pour les maladies mentales : les familles n’expriment pas encore leur souffrance. On ose à peine se confier à voix basse à des amis, tant la maladie mentale est encore peu admise.

M. Pierre-Louis Fagniez – Les choses commencent à changer, néanmoins.

Mme Marylise Lebranchu – Oui, on commençait tout juste d’observer quelques progrès avant la grande claque d’aujourd’hui. Les familles de personnes atteintes d’une maladie grave rechignent souvent à accepter l’hospitalisation à la demande d’un tiers, mais le danger que pose le patient pour les autres et pour lui-même peut rendre l’hospitalisation d’office indispensable. On réussit parfois à convaincre, à expliquer cette privation de liberté. L’essentiel, pourtant, est d’arriver enfin à parler sereinement de la maladie mentale, que chacun tait par crainte enfouie d’en être lui-même la victime.

Je préside le conseil d’administration d’un hôpital qui comporte des services ordinaires et des services de psychiatrie. Mes collègues ont tous visité les premiers ; trois d’entre nous seulement avons visité les seconds. On ne veut pas voir, on préfère ne pas savoir. Les conditions en psychiatrie ne sont pas aussi bonnes que dans les autres services ; ce n’est pas le même confort, pas le même accueil.

Mme Henriette Martinez – Vous ne pouvez pas généraliser !

Mme Marylise Lebranchu – Les choses évoluent, heureusement, et il est vrai que les établissements à vocation uniquement psychiatrique offrent des conditions un peu meilleures.

La capacité des familles et des malades de s’exprimer et de réclamer est quelque chose de très récent. En mettant ce sujet dans une loi de prévention de la délinquance, on casse la reconnaissance, en train de se construire, du besoin de soins, du droit des malades…

M. Jean-Marie Le Guen – De la normalité !

Mme Marylise Lebranchu – Nous voulons faire des hôpitaux psychiatriques des hôpitaux comme les autres. Dans nos permanences, chers collègues, il y a encore trop de gens qui ne veulent pas dire les choses ou nous demandent de ne pas répéter.

Si je peux bien comprendre que le ministre de l’intérieur se soit trompé, encore qu’en tant que ministre d’État il serait normal qu’il soit mieux renseigné…

M. Jean-Marie Le Guen – Surtout s’il est candidat à la présidence de la République !

Mme Marylise Lebranchu – …ne nous trompons pas avec lui ! Corrigeons le tir. Nous sommes favorables à une révision de la loi de 1990, que nous ne sommes pas fiers de ne pas avoir entreprise. Il aurait fallu se poser la question du nombre de psychiatres. Peu de psychiatres acceptent encore d’être experts auprès des tribunaux. Après le certificat des 72 heures, il faudra trouver deux médecins extérieurs au service pour donner un avis, et on se tournera donc vers les experts inscrits auprès des tribunaux, qui sont de moins en moins nombreux ! Certains d’entre eux nous disent que le délai de 72 heures sera, dans ces conditions, intenable. C’est un vrai problème d’organisation.

M. Gérard Bapt – Argument très fondé !

Mme Marylise Lebranchu – Je plaide pour des textes de loi applicables. Après les certificats de 24 heures et de quinze jours, des gens sont restés trois mois en attente de décision. Ne sommes-nous pas en train de charger la barque encore plus ? Le ministre de l’intérieur n’a pas voulu tenir compte de la situation. Dans certains endroits, le texte sera tout simplement inapplicable.

Nous avions proposé qu’en augmentant le numerus clausus de médecins, on essaie de convaincre les jeunes de se tourner vers la psychiatrie. Ils vont facilement vers la chirurgie, la radiologie, la dermatologie – pour la qualité des postes, mais aussi pour la notoriété de l’action. Quand un malade a fait en France un ou deux infarctus, puis décède dix ans plus tard, on remercie le médecin dans les avis d’obsèques. Mais si un malade a fait une tentative de suicide, et meurt quinze ans plus tard d’une seconde, c’est un échec pour la psychiatrie, et on ne remercie pas le psychiatre. Les jeunes ne voient pas à la télévision celui qui, pendant dix ans, a permis que la jeune mère de famille ne récidive pas. Pour lui, pas de papier glacé ! Nous sommes à ce point dans une société de l’image que la psychiatrie est devenue un véritable sacerdoce, auquel se destineraient ceux qui ont eu à connaître personnellement ce genre des situations, ou des littéraires, qui étudient la médecine pour des raisons familiales et s’orientent vers la psychiatrie par goût de la philosophie, pour parler de l’humain. Bref, on ne motive pas les jeunes.

Le ministre de l’intérieur, en confondant délinquance et psychiatrie, se rend-il compte de l’image qu’il donne de cette dernière aux jeunes ? Ceux qui étudient la médecine n’entendent pas devenir des chiens de garde. Ils n’ont pas fait médecine pour être propriétaires des clés. Certes, ils acceptent, dans leurs établissements, de gérer des cas extrêmement difficiles. Allez à Sarreguemines, pour comprendre ce qu’est la vie des médecins dans ces établissements. Allez voir ce qu’est la vie du personnel dans les services psychiatriques fermés. Vous voudriez leur expliquer que leur mission première est la sécurité ? Non, ce sont des soignants, et ils entendent le rester.

Avec ce texte mal venu, mal pensé, mal ficelé on martèle que les hôpitaux psychiatriques sont des annexes de prison. Nous assumerons alors la responsabilité du fait que, dans cinq ou dix ans, il n’y aura toujours pas assez de psychiatres dans ce pays.

Les professionnels de la santé ont dit qu’ils avaient été amenés à la concertation sous la contrainte…

M. le Ministre – Je ne peux vous laisser dire cela : ils réclament la révision de la loi de 1990 !

Mme Marylise Lebranchu – Mais ils veulent un vrai débat ! Nous avions tous appelé de nos vœux l’abandon de la formation des infirmiers psychiatriques et la reconnaissance d’une spécialité. Celle-ci est aujourd’hui désaffectée. Il n’y a pas assez de personnes dans ces services. En même temps, les psychiatres estiment, à juste titre, avoir de plus grands besoins de formation continue que la plupart de leurs collègues, car ils doivent jouer des rôles que d’autres médecins n’ont pas. Il faut, par exemple, qu’ils rencontrent les partenaires médico-sociaux, pour permettre des sorties dans de bonnes conditions. Il faut qu’ils aillent s’occuper des départements thérapeutiques. Et pendant qu’ils sont là, il n’y a plus personne dans les services, qui se retrouvent parfois 48 heures sans équipe.

Il nous faut un programme collectif ambitieux pour la psychiatrie, et non la petite porte que propose le ministre de l’intérieur. Ce rapt fait du mal. Cette niche parlementaire, pour autoriser le Gouvernement à prendre des ordonnances, c’est un constat d’échec. On gâche une occasion de modifier dans de bonnes conditions la loi de 1990. Remettons-nous au travail, auditionnons, rendons-nous sur place pour rencontrer les malades et leurs familles. En procédant ainsi, je suis sûre que nous pourrions voter un texte à l’unanimité.

Dans le drame de Nanterre, ce qui a dysfonctionné, ce n’est pas l’hospitalisation d’office, mais le système de signalement. Dans le cas des alcooliques dangereux, on essayait de convaincre la personne signalée de se faire hospitaliser, et en cas de refus, on procédait à une hospitalisation d’office. Mais combien de signalements sont restés incertains ? Il faudrait ouvrir une consultation sur le traitement des signalements dans les préfectures. J’ai en mémoire un cas où il a fallu attendre dix-neuf mois pour qu’une décision soit prise !

M. Pierre-Louis Fagniez – C’est un vrai problème !

Mme Marylise Lebranchu – Comme me l’indiquait un membre de L’union nationale des amis et familles des malades psychiques, les personnes concernées sont souffrantes. Or, la logique de ce projet n’est pas de traiter la souffrance, mais d’envoyer un message à la population en lui faisant croire que vous adoptez des solutions d’urgence.

Bien au contraire, ce texte remet en cause les formidables progrès réalisés dans notre rapport à la maladie mentale : on a compris qu’il s’agissait de souffrances, qu’il fallait mettre au rancart la honte et le mépris, et que l’on pouvait embaucher des personnes sorties d’un hôpital psychiatrique. Malgré cela, les familles des malades pourront témoigner des difficultés éprouvées par les malades mentaux pour trouver un travail malgré leurs diplômes et leurs qualifications. Vous allez renforcer l’exclusion par la maladie en faisant l’amalgame entre les troubles mentaux et la délinquance !

Je reconnais volontiers que vous n’êtes pas le seul responsable d’une telle régression, Monsieur le ministre, mais il aurait fallu que vous arrêtiez le processus en cours. Proposez nous plutôt une révision de la loi de 1990, menée dans la concertation et assortie d’une bonne communication sur la maladie mentale. Souvenons-nous que c’est notre pays qui a démontré au monde entier que la psychiatrie n’est pas seulement un instrument aux mains de l’État. Il est encore temps d’éviter le retour en arrière que vous proposez ! Adopter cette loi serait commettre non seulement une erreur, mais une véritable faute ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. le Ministre – J’ai apprécié la modération de votre propos. Nous sommes tous d’accord sur le fond, car nous suivons la même logique : la disjonction des articles relatifs à la santé mentale. Vous confondez la réforme de la loi de 1990 avec la loi de prévention de la délinquance et le plan « santé mentale ». Je précise que nous avons consulté les professionnels et les associations, et que nous nous appuyons sur une enquête de l’IGAS. Il y a aujourd’hui un consensus sur la nécessité de réformer la loi de 1990…

Mme Marylise Lebranchu – Mais pas de cette façon !

M. le Ministre – Il existe un accord sur les modalités de réforme. Ne laissons donc pas les divergences sur la forme l’emporter sur le fond ! Enfin, contrairement à ce que j’ai entendu dire, la méthode retenue vous laisse la possibilité de vous exprimer. Si vous ne votiez pas ce texte, vous vous priveriez de nombreuses avancées (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Seules vos contradictions vous empêchent de le reconnaître !

M. le Rapporteur – Avis défavorable.

M. Philippe Vitel – J’ai apprécié moi aussi le ton mesuré de Mme Lebranchu, et je suis en accord avec elle sur certains points : nous devons promouvoir les études de psychiatrie afin d’attirer davantage de jeunes médecins vers cette spécialité. Il faudrait en effet renforcer la prévention des suicides, qui provoquent 15 000 morts par an, soit trois fois plus que les accidents de la route.

J’ajoute que nos travaux sur la loi de prévention de la délinquance ont abouti à un constat partagé : les secteurs de pédopsychiatrie ne sont pas suffisamment associés aux politiques menées sur le terrain. Le lien entre prévention de la délinquance et protection de l’enfance reste encore insuffisant.

Cela dit, nous voulons saisir l’occasion de débattre que nous donne la disjonction des articles. Par conséquent, nous ne voterons pas la question préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme Jacqueline Fraysse – Cette motion tend à reconnaître qu’il n’y a pas lieu de discuter sur ce texte. Les troubles mentaux constituent en effet un sujet sensible et complexe, qui exige une autre procédure de réforme. Comme l’a montré Marylise Lebranchu, avec toute sa compétence et toute son humanité, il reste un immense travail à faire. Sur un sujet aussi essentiel que celui-ci, nous ne pouvons pas procéder comme le Gouvernement le propose !

Autre motif de voter la question préalable, que vont devenir les articles 18 à 24 du texte sur la prévention de la délinquance ? Une telle incertitude est inacceptable. La seule façon de sortir par le haut de cette situation peu glorieuse – c’est un euphémisme – serait de retirer les articles 18 à 24 et de déposer un texte spécifique à la santé mentale, une fois organisée une véritable concertation avec les professionnels et les associations concernés. C’est à cette seule condition que nous pourrons débattre sereinement (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste).

M. Jean-Marie Le Guen – Ne vous félicitez pas trop que le débat ait lieu, Monsieur le ministre : ni les associations ni les professionnels n’ont été consultés et ce n’est pas parce que la maison brûle qu’il faut féliciter les incendiaires de nous avoir contraints à débattre de la lutte contre le feu. Au demeurant, j’ai du mal à comprendre pourquoi vous n’avez pas lancé plus tôt la consultation : cela fait des années que le ministre de l’intérieur s’est emparé des sujets dont nous débattons aujourd’hui.

Je m’interroge également sur le lien que vous instaurez entre la santé mentale et la dangerosité des malades. Il y a quelques jours, j’ai reçu un mail envoyé par un jeune homme devenu paraplégique à la suite d’un accident de la route causé par un chauffard souffrant de la maladie d’Alzheimer. Cette affection est effectivement un facteur de danger, sur la route comme dans la vie quotidienne – un malade peut très bien oublier de débrancher un appareil ménager. Les diabétiques et les personnes souffrant de problèmes cardiaques présentent aussi des dangers ! Que les troubles mentaux comportent une certaine dangerosité, c’est indéniable, mais évitons les stigmatisations.

J’en viens au critère de l’hospitalisation. En faire un signe de dangerosité des malades serait une erreur, car on hospitalise bien souvent des patients peu dangereux pour eux-mêmes et pour les autres – je pense notamment aux problèmes d’alcoolisme, sans danger chronique hormis sur la route. A contrario, si nous avons tous été bouleversés par certains infanticides, personne n’en a conclu que l’état de maternité serait dangereux, pas plus que la rupture familiale en tant que telle. Nous contestons fondamentalement le lien que vous établissez entre santé mentale et dangerosité. Il s’agit-là d’une régression considérable alors que tout le mouvement de la psychiatrie française, de Pinel à Charcot, a consisté à libérer les aliénés de leurs chaînes : ce sont des malades, pas des délinquants !

M. le Président de la commission – C’est bien ce que dit le texte du Gouvernement.

M. Jean-Marie Le Guen – Les articles 18 à 24 du texte sur la prévention de la délinquance font état d’une obligation d’hospitalisation, alors que c’est d’une obligation de soins qu’il s’agit ! L’amendement gouvernemental est un rideau de fumée, dès lors que projet confond santé mentale et délinquance ! Retirez ce texte ! L’urgence ne justifie pas un travail aussi rapide ! Laissez travailler le Parlement au lieu de le dessaisir de sa responsabilité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

La question préalable, mise aux voix, n'est pas adoptée.
La séance, suspendue à 11 heures 35, est reprise à 11 heures 55.

Discussion générale

Mme Jacqueline Fraysse – Je veux dire d’abord notre indignation quant au traitement réservé à notre Assemblée. Il n’est pas acceptable que le Gouvernement joue ainsi avec l'ordre du jour du Parlement au mépris de la représentation nationale. Quand il ne dépose pas en dernière minute des amendements sans rapport avec le texte en discussion et n’ayant fait l’objet d’aucune concertation, il modifie les travaux du Parlement à sa guise. Ces procédés nuisent fortement à la qualité de nos débats, et je regrette que le président de la commission n'ait pas davantage résisté aux pressions du Gouvernement insistant pour que ce projet soit discuté en commission hier et ce matin en séance publique. Comment pourrions-nous travailler sérieusement à l'élaboration de la loi quand on nous apprend le vendredi que la commission examinera le mercredi suivant un texte de dix articles ratifiant une ordonnance de vingt-cinq pages ? Nous n'avons eu le temps ni d'auditionner les organisations syndicales, ni de prendre connaissance du rapport dans le détail. Ce n'est pas parce que nous sommes en fin de législature que vous pouvez agir sans foi ni loi.

Tous ces artifices de procédure ne visent en fait qu'à sortir le Gouvernement – et en particulier le ministre de l’intérieur – d'une mauvaise passe. Ce n'est pas le contenu de ce projet qui justifie son inscription précipitée à l'ordre du jour, mais l'opportunité qu'il offre au Gouvernement et à M. Sarkozy de mettre fin à la fronde légitime soulevée par les articles 18 à 24 de son projet sur la prévention de la délinquance, qui font un inadmissible amalgame entre santé mentale et délinquance. Il s'agit donc de rétablir ces articles par un amendement au présent texte autorisant le Gouvernement à légiférer par ordonnance.

Oui, il faut réformer la loi du 27 juin 1990 relative aux soins psychiatriques et aux hospitalisations sous contrainte – et je suis bien placée pour le savoir –, mais certainement pas dans le projet de loi sur la prévention de la délinquance : cela revient à mettre en cause le long processus de déstigmatisation des maladies mentales. Cette méthode a d’ailleurs été critiquée par les professionnels, comme le reconnaît l'exposé des motifs de l'amendement.

Le recours à l’ordonnance n'est pas davantage acceptable. Ce sujet sensible et complexe mérite un vrai débat, dans le cadre d'un projet de loi spécifique et d’une réforme globale des soins psychiatriques, élaborée avec les professionnels, les structures et les associations, mais aussi les familles concernées, qui l’attendent depuis dix ans.

Ce qui est en train de se passer est peu glorieux. À quoi rime notre discussion de ce matin, alors que se poursuit l'examen du texte de M. Sarkozy, notamment de ses articles 18 à 24 ? Outre le temps perdu, on peut s'interroger sur ce qu’il adviendra de ces articles.

La question des moyens devra être posée. Revoir la loi est une nécessité, mais donner des moyens à la psychiatrie, notamment pour suivre les patients après leur sortie de l’hôpital, est tout aussi urgent. Un vrai débat et un vrai texte auraient permis d'aborder ces questions de manière plus efficace que le projet de loi du ministre de l'intérieur et plus pertinente que la manoeuvre acrobatique à laquelle vous vous livrez.

Les objectifs du texte que nous examinons sont au nombre de trois : la ratification de l'ordonnance du 25 août 2005, le toilettage et l'harmonisation du fonctionnement des différents ordres, et la création d'un diplôme d'État de diététicien.

Le recours à l'ordonnance est un déni du droit des parlementaires. Il est certes autorisé par notre Constitution, mais ne devrait être utilisé que de façon exceptionnelle, la marge de manœuvre du Parlement étant déjà limitée.

Nous soutenons toutes les initiatives raisonnables qui permettent de contrôler et de mieux sanctionner ceux qui se proclament détenteurs d'un titre alors qu’ils ne le sont pas. Un peu plus de temps nous aurait cependant permis de mieux apprécier l'ampleur du phénomène et les mesures proposées.

Le texte apporte également des modifications au fonctionnement des ordres régissant les professions médicales. Nous ne sommes pas favorables aux ordres professionnels et ne souhaitons pas étendre leurs compétences. Cette opinion vaut également pour le texte que nous aurions dû examiner ce matin concernant la création d'un ordre infirmier. Nous ne voterons donc pas les articles premier à 6, qui visent à renforcer la légitimité des ordres. Nous aurions préféré un vrai débat sur les conditions d'exercice, d'installation, de formation des professionnels de santé, afin de répondre aux problèmes de la démographie médicale, notamment dans certaines régions, de réformer les études médicales, d’aller vers l'encadrement et la reconnaissance de pratiques comme l'ostéopathie ou la chiropractie.

Mais nous devons nous contenter de dispositions sur le fonctionnement des structures ordinales. Le seul point positif concerne, à l'article 7, la profession de diététicien, dont le rôle devient essentiel dans la prévention, et même le traitement afin d’éviter l’excès de médicaments.

Il fallait donc préciser la place et la formation des diététiciens. Les représentants de la profession sont satisfaits des propositions faites pour en sécuriser l’exercice et leur accorder un statut à part entière d’experts de l'éducation nutritionnelle. On pourra ainsi lutter contre les pratiques de personnes sans qualification. Nous soutiendrons donc sans réserve cette disposition.

Mais je regrette que le projet qui permet cette avancée soit pollué par la manœuvre du Gouvernement en raison de l’inconfort que ressent le ministre de l'intérieur. Par ailleurs nous n'acceptons pas le recours abusif aux ordonnances pour légiférer. Nous voterons donc contre l’ensemble du texte (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste).

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modification de l’ordre du jour prioritaire

M. le Président – M. le ministre délégué aux relations avec le Parlement m’informe que l’ordre du jour prioritaire est modifié pour inscrire la suite de la discussion du projet de loi ratifiant l’organisation de certaines professions de santé cet après-midi, avant la suite de la discussion du projet de loi relatif à la délinquance.

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Organisation de certaines professions de santé (suite)

M. Philippe Vitel – Ce projet de loi est le bienvenu, d’une part parce qu’il permet de ratifier une ordonnance qui simplifie le droit relatif à certaines professions de santé et donne aux diététiciens un statut qu’ils attendaient, d’autre part parce qu’il permet d’engager la réforme de la loi du 27 juin 1990, très attendue également par les professionnels de la santé mentale.

S’agissant de l’ordonnance, elle simplifie l’organisation et le fonctionnement de certains ordres, ainsi que les dispositions réprimant l’exercice illégal et l’usurpation de titre, les procédures d’enregistrement pour les psychologues et assistants de service social, le remplacement des professionnels de santé et la création ou le changement d’exploitant des pharmacies.

Surtout, le projet répond à une attente forte et ancienne des diététiciens en définissant l’exercice de leur profession et en créant un diplôme d’État. C’est une bonne chose dans l’optique du second programme nutrition-santé 2006-2010 visant l’obésité, véritable fléau qui touche un enfant sur six contre un sur vingt en 1980. À cet égard, j’ai plaisir à dire combien j’aime travailler avec M. Le Guen au sein de notre groupe d’études sur le sujet. Il existe aussi un lien avec la lutte contre le cancer, chantier prioritaire voulu par le Président de la République : plus d’un cancer sur trois pourrait être évité grâce à une meilleure hygiène de vie.

Je souhaiterais vous interroger sur un autre problème de santé publique, la protection des personnes suivant une psychothérapie. L’article 52 de la loi du 9 août 2004 encadre l’usage du titre de psychothérapeute. Mais nous attendons toujours le décret d’application. Pouvez-vous vous engager à le publier rapidement ?

M. le Ministre – Si la concertation était rapide…

M. Philippe Vitel – J’en viens à la réforme de la loi du 27 juin 1990. La commission des affaires sociales a adopté hier un amendement qui habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance, dans le délai de deux mois, des dispositions relatives aux soins psychiatriques.

Le cheminement qui a conduit à aborder ce sujet essentiel peut paraître sinueux. Mais nous devons nous réjouir que la réforme de la santé mentale vienne devant l’Assemblée. Le groupe UMP n’a d’ailleurs pas hésité à céder au Gouvernement sa séance d’initiative parlementaire.

M. Gérard Bapt – C’est le monde à l’envers.

M. Philippe Vitel – Et il est heureux que la prise en charge des personnes présentant des troubles mentaux soit évoquée, sereinement, dans un texte relatif à la santé publique et pas seulement dans un texte sur la délinquance. La demande des professionnels et des familles a ainsi été entendue.

M. Gérard Bapt – Elle l’a été trop tard !

M. Philippe Vitel – J’espère que vous nous confirmerez que le volet santé mentale du texte sur la délinquance sera bien supprimé en CMP, comme l’indique l’exposé des motifs de l’amendement du Gouvernement. Les parlementaires sont en général réservés sur la procédure par ordonnance. Mais, compte tenu de l’encombrement du calendrier parlementaire, nous pouvons en comprendre l’intérêt. C’était la seule façon de garantir aux professionnels que la réforme serait menée à terme avant la fin de la législature. Or, elle est urgente, comme les professionnels, les familles, mais aussi les rapports de l’IGA et des inspections générales de la police nationale et de la gendarmerie l’ont souligné. On sait en effet que le nombre des hospitalisations non consenties a augmenté.

Avec l’amendement du Gouvernement adopté par la commission, les dispositions qui figurent dans le texte sur la délinquance, et font globalement l’unanimité, entreront dans le champ de l’habilitation et une réforme globale de la loi de 1990 pourra être engagée. Sa réussite passe par la concertation. Vous avez engagé celle-ci depuis plusieurs mois avec les professionnels et les associations de patients. Pouvez-vous faire un point à ce sujet ?

Ce projet offre une chance, la dernière de la législature, de faire aboutir la réforme de la loi de 1990. Le groupe UMP la soutiendra et il vous fait confiance pour la mener à bien, selon la feuille de route que vous avez annoncée et dans le calendrier serré qui est le nôtre. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Gérard Bapt – Il est parfois difficile d’être ministre ! C’est assurément votre cas aujourd’hui, alors que le groupe majoritaire offre son créneau d’initiative parlementaire au Gouvernement, pour que celui-ci demande au Parlement de renoncer à son pouvoir de légiférer… Voilà qui est pour le moins original. Souhaitons que ce ne soit pas un précédent.

M. Éric Raoult – C’est par souci d’efficacité.

M. Gérard Bapt – C’est surtout la frénésie d’intervenir en fin de législature…

M. Philippe Vitel – Nous apportons une réponse rapide à un problème grave.

M. Gérard Bapt – …ou plutôt la pré-campagne présidentielle.

Cette frénésie apparaissait déjà lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale, qui, pour un projet de continuité, a réservé bien des surprises lors de son passage au Parlement. À l’Assemblée, il y a eu un bras de fer avec la majorité, au sujet de l’ONDAM des soins de ville. Au Sénat a fait irruption le secteur optionnel, qui a bouleversé le paysage conventionnel,…

M. le Ministre – Allons, allons !

M. Gérard Bapt – Le Sénat a aussi, parce que le résultat des élections aux URML ne satisfaisait pas, remis en cause la représentativité syndicale. Mais tout cela ressort encore de voies parlementaires classiques.

Il en va bien autrement aujourd’hui : le ministre a été victime d’une injonction, non pas thérapeutique, mais sécuritaire – encore que cela se confonde de plus en plus. Son ministre délégué, M. Bas y a échappé, s’agissant du dépistage des troubles du comportement chez le jeune enfant, sur la base d’un rapport de l’INSERM, qui aurait pu donner à la place Beauvau l’occasion d’une nouvelle intervention sécuritaire. Du reste, l’INSERM a fait son autocritique et est revenue sur ses premières conclusions.

M. le Ministre – Vous y assistiez ?

M. Gérard Bapt – Non, mais j’ai lu la presse, elle est faite pour ça.

Le problème est que, par cette procédure curieuse, le ministre se retrouve à défendre des articles du projet de loi sur la prévention de la délinquance dont la démarche contredit celle de son plan de santé mentale – dont j’espère avoir, à cette occasion, un premier rapport d’étape.

M. le Ministre – Le rapport d’étape a été publié en juin.

M. Gérard Bapt – Un des piliers du plan de santé mentale, comme l’ont montré les intervenants du colloque que j’ai organisé à ce sujet dans ma commune, est la lutte contre la discrimination à l’encontre des malades mentaux – une démarche qui est recommandée par l’OMS, mais qui répond aussi aux préoccupations de l’Association des maires de France. En mars 2005, ces instances, mais aussi les représentants des familles et la fédération nationale de la psychiatrie, ont lancé une campagne contre les préjugés en matière de troubles psychiques. Ainsi que l’a montré l’enquête nationale du Centre collaborateur de l’OMS, 30 % des Français sont concernés par des troubles psychiques, 37 % ont déjà pris des médicaments psychotropes et les troubles psychiques sont la deuxième cause d’arrêt de travail. Personne n’est donc à l’abri d’un problème de santé mentale, et chacun peut en rencontrer autour de lui.

Depuis quelques années, le regard porté par la société change, grâce notamment aux médias qui évoquent régulièrement la dépression ou les troubles alimentaires. Mais les préjugés ont la vie dure, et l’image de la psychiatrie est complexe. Les professionnels ont du mal à travailler avec leurs partenaires dans la cité, et les élus restent souvent perplexes. Chaque fait divers relance la dramatisation autour des troubles psychiques et révèle des réflexes d’exclusion. M. Hortefeux, dans une interview au Bulletin national de l’Observatoire des pratiques de santé mentale, a voulu vaincre les réticences exprimées par le monde de la psychiatrie et les familles de malades – qui ont hélas été moins entendues que pour la petite enfance – en disant qu’il n’y avait rien de choquant à inclure les hospitalisations d’office dans un projet de loi qui vise à prévenir les comportements délinquants, et plus largement les troubles à l’ordre public, et que cela ne voulait pas dire que vous confondiez les malades et les délinquants. Pourtant, nul ne peut nier que le même projet confond des dispositions concernant la psychiatrie et la délinquance : le message ainsi donné est très négatif et justifie l’opposition des milieux de la psychiatrie. Confondre délinquance et maladie est une régression profonde.

M. Philippe Vitel – Il n’y a que vous qui régressiez !

M. Gérard Bapt – Les dispositions concernant la petite enfance ont été retirées avant la discussion du texte, mais certains députés ne s’en sont pas rendu compte : Mme Martinez ne se félicitait-elle pas hier encore que le maire, gérant l’ensemble des services aux familles, puisse d’emblée repérer les enfants à problèmes ? Mais cette partie du texte a déjà été enlevée !

M. Jean-Marc Roubaud – Caricature !

M. Gérard Bapt – Si même des députés confondent encore le dépistage des troubles de comportement avec des comportements délinquants, que dire de l’opinion publique !

On a reproché à la législature précédente de n’avoir rien fait, mais la loi du 4 mars 2002 a réalisé des avancées importantes en affirmant les droits individuels et collectifs des personnes souffrant de troubles mentaux et astreintes à des mesures privatives de liberté, indépendamment de leur pathologie.

M. Éric Raoult – Qu’a-t-elle fait pour Georges Frêche ? Vous avez une émotion à géographie variable !

M. Gérard Bapt – Ces premières dispositions en annonçaient d’autres. Nous réaffirmons que l’amalgame entre malades et délinquants est dangereux, et nous demandons donc le retrait de ces dispositions, pour sortir de la confusion actuelle et permettre à la santé mentale de faire enfin l’objet d’une véritable concertation. Les problèmes sociaux qui sont souvent révélés par les problèmes psychologiques doivent être traités par l’ensemble de la société.

M. Jean-Luc Préel – Lorsqu'on m'a demandé d'intervenir aujourd’hui sur ce texte, j'ai d'abord cru à un gag. Cette matinée devait être en effet consacrée à la création de l’ordre des infirmiers, sujet qui tient particulièrement à cœur de certains d’entre nous. En outre, c'est bien une des premières fois que le Parlement ratifie une ordonnance ! Celles-ci permettent en effet au Gouvernement de dessaisir le Parlement de son droit de discuter et surtout d'amender. Certes, la Constitution obligeant le Gouvernement à déposer un projet de loi de ratification, beaucoup croient qu'à cette occasion les droits du Parlement sont rétablis. Mais en réalité, il suffit au Gouvernement de déposer le projet de loi de ratification pour que celle-ci soit tenue pour acquise sans débat. C’est pourquoi les gouvernements, et singulièrement celui-ci, apprécient cette procédure – il serait d’ailleurs intéressant de savoir combien de fois elle a été utilisée depuis cinq ans, alors que tous les partis demandent un rééquilibrage des pouvoirs entre le législatif et l’exécutif.

Dès lors, pourquoi demander la ratification de cette ordonnance ? Le sujet est-il si fondamental ? Certainement, puisque l'ordonnance du 26 août 2005 est relative à l'organisation de certaines professions de santé et à la répression de l'usurpation des titres et de l'exercice illégal. Mais elle date de quinze mois, alors que la ratification est prévue dans les trois mois suivant la promulgation… C’est une grossesse prolongée ! (Sourires) Il est vrai que vous profitez de ce projet de loi pour compléter ou rectifier certaines dispositions très importantes. En particulier, pour permettre l'élection des conseillers départementaux par voie électronique, sujet fondamental s’il en est…

M. Philippe Vitel – C’est vrai ! C’est absolument fondamental !

M. Jean-Luc Préel – Monsieur Vitel, en tant que parlementaire et que chirurgien, vous devriez savoir garder votre calme. (M. Vitel proteste, ainsi que M. Mallié)

M. le Président – Je vous en prie, chers collègues.

M. Jean-Luc Préel – Le projet permettra aussi la participation du conseil national aux délibérations du conseil régional dont il est issu, la nomination d’un conseiller national supplémentaire, la rectification d’erreurs matérielles concernant Mayotte et Wallis-et-Futuna…

M. Philippe Vitel – Très bien ! Et n’oublions pas la Corse !

M. Jean-Luc Préel – …ainsi que l’abrogation de l’inscription obligatoire au conseil interprofessionnel grâce à la création des ordres de masseurs kinésithérapeutes et de pédicures podologues et, enfin, l’amélioration de la formation et de l’exercice des diététiciens.

Toutes ces mesures auraient eu leur place dans une loi portant diverses mesures d’ordre social, voire dans la loi de financement de la sécurité sociale, telle que vous la concevez cette année, truffée de cavaliers.

Quoi qu’il en soit, bien des questions demeurent en matière de qualité de soins, de démographie médicale, de transfert des tâches entre professions, de formation initiale et continue ou encore de rémunération des professionnels. De même, il faudrait revoir le rôle et la formation des psychothérapeutes et des ostéopathes.

M. Philippe Vitel – C’est vrai !

M. le Ministre – La situation de ces deux professions progresse. Si les choses étaient simples, cela se saurait.

M. Jean-Luc Préel – Mais au fond, si nous discutons de ce texte aujourd’hui, ce n’est que pour permettre au Gouvernement de légiférer par ordonnance sur certains articles d’un autre projet de loi.

Sur la forme, je m’étonne que l’on profite d’un texte de ratification d’ordonnance pour autoriser de nouvelles ordonnances qui, de surcroît, porteront sur des articles en cours de discussion ! Il faudrait au moins adopter des amendements de suppression de ces mêmes articles dans le projet en question. En outre, une ordonnance doit être ratifiée par le Parlement.

M. le Ministre – Cela ne nous a pas échappé.

M. Jean-Luc Préel – Cette ratification pourra-t-elle avoir lieu avant le terme de la législature ? Sinon, il y aura de graves difficultés juridiques.

Sur le fond, vous commettez l’erreur d’inclure dans un projet de loi sur la délinquance des mesures portant sur l’hospitalisation psychiatrique sous contrainte. L’assimilation des malades psychiatriques à des délinquants a suscité une vive émotion chez les professionnels, les patients et leurs familles. Le président de la commission des affaires sociales a heureusement donné son avis sur les articles, mais le Gouvernement aurait dû les retirer et en faire un projet de loi spécifique. Or, la loi de prévention de la délinquance va poursuivre son cheminement législatif, les articles incriminés vont être votés…

M. le Président de la commission – Non, ils seront retirés.

M. Jean-Luc Préel – …et le risque d’assimilation perdurera !

M. Jean-Marc Roubaud – Désinformation !

M. Jean-Luc Préel – Non, puisque les articles seront votés !

Plus grave encore : le Parlement est dessaisi de ses pouvoirs de discussion et d’amendement sur une question de liberté publique. Certes, il faut améliorer la loi de 1990 et les dispositions relatives à l’hospitalisation d’office ou à la demande d’un tiers, mais ce sont là des questions essentielles qui touchent à la liberté de l’individu. Je n’accuse pas le Gouvernement de vouloir y attenter, mais on ne peut en la matière légiférer par ordonnance. Au contraire : il faut légiférer avec prudence, dans la concertation…

M. Jean-Marc Roubaud – C’est fait !

M. Jean-Luc Préel – Pas du tout – vous dites vraiment n’importe quoi ! En tout état de cause, ne comptez pas sur le groupe UDF pour vous suivre dans cette voie ! (« Très bien » et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Jean-Marie Le Guen – Très bien.

M. Bernard Schreiner – Mon propos se limitera à l’utile amendement gouvernemental visant à disjoindre du projet de loi sur la prévention de la délinquance les articles 18 à 24. Amendement nécessaire en effet, car il permettra l’indispensable révision de la loi de 1990 sur les hospitalisations sans consentement.

Je n’interviens pas en tant que médecin, mais en tant qu’élu, maire depuis 24 ans d’une ville où se trouve le principal centre psychiatrique du Bas-Rhin et président depuis 15 ans de son conseil d’administration. On parlait jadis d’asiles d’aliénés et l’on considérait ces établissements comme des centres d’internement, malgré le travail remarquable qu’y effectuaient les praticiens. Heureusement, les temps ont changé : ils sont aujourd’hui devenus de véritables hôpitaux comme les autres, où l’on accueille les malades non pour les isoler, mais pour les guérir. La loi de 1838 limitait déjà les internements abusifs de manière satisfaisante, et la loi 1990, qui l’actualise, prévoit des procédures complexes et efficaces de protection du malade.

L’amendement du Gouvernement permettra de les simplifier, d’améliorer l’information des maires afin d’éviter toute trahison du secret médical – le maire, en effet, est en droit de connaître la date de sortie d’un patient dont il a demandé l’hospitalisation d’office – et d’éviter les récidives de troubles à l’ordre public en favorisant la protection du malade et de ses proches. C’est pourquoi il faut créer un système national de croisement des informations, dûment contrôlé et d’accès restreint.

Cet amendement permettra d’éviter un rapprochement dangereux entre délinquance et maladie mentale.

M. Gérard Bapt – Rapprochement dangereux, en effet !

M. Bernard Schreiner – Il contribuera aussi à améliorer l’image de marque des centres psychiatriques, encore trop souvent mésestimés par nos concitoyens. Par ailleurs, il faut poursuivre l’implantation des SMPR dans les maisons d’arrêt, où l’action des équipes soignantes est toujours remarquable.

Je salue le travail des médecins et de leurs équipes. Leur dévouement est admirable, bien qu’ils travaillent dans des conditions souvent difficiles, voire dangereuses. Ce texte les aidera à travailler dans la sérénité afin que les efforts portent tous leurs fruits en faveur des malades qu’ils doivent traiter (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Mme Marylise Lebranchu – L’ensemble de ce texte ne soulèverait pas de difficulté majeure s’il n’y avait ce volet surprise sur la santé mentale. J’y insiste, ce ne sont pas les techniques d’enfermement qui sont à revoir en urgence. Il y a, dehors, non hospitalisées, des personnes qui meurent faute de soins. Nous devons réaliser un énorme effort pour permettre à ces personnes de comprendre que leur souffrance est liée à la maladie et qu’on peut y apporter une réponse médicale. Elles meurent faute de soins et faute de places : après une tentative de suicide et le passage aux urgences hospitalières, les places doivent être libérées très vite, d’où un important risque de rechute. Des associations se forment pour soutenir ces personnes. L’urgence est là, dans le soutien aux familles qui, souvent, ne savent pas gérer ces problèmes. Tous les élus ont rencontré des familles qui viennent leur demander une hospitalisation d’urgence pour leurs enfants en souffrance.

C’est aussi la question de la démographie médicale qui est posée. Quand on demande à une agence régionale de l’hospitalisation quel a été le fait générateur de telle ou telle décision concernant l’affectation des postes, le maintien ou la suppression de certaines activités, on nous répond que c’est la démographie médicale. Des services sont supprimés, non pas parce qu’il n’y aurait pas de besoins, mais parce qu’il n’y a pas de médecins pour les faire fonctionner.

On ajoute encore des injonctions thérapeutiques, pour les violences conjugales, les violences intrafamiliales, les addictions. Or, les médecins se retrouvent déjà en face de personnes qui viennent parce qu’elles sont obligées, mais qui leur disent qu’elles ne suivront pas de traitement. Les généralistes sont dépassés par ces situations, sans parler des agressions qu’ils subissent parfois. Il est bon de prévoir des injonctions thérapeutiques, à condition de pouvoir les réaliser.

Enfin, le texte dit que tous les fichiers seront contrôlés. Dont acte. Mais un élu hésitera à prendre une mesure d’hospitalisation d’office en sachant que la personne sera fichée pendant plusieurs années…

M. Jean-Marie Le Guen – Eh oui !

Mme Marylise Lebranchu –…de sorte que des hospitalisations nécessaires n’auront pas lieu. Le mieux est l’ennemi du bien, et nous allons en fait décourager les élus et compromettre vos dispositifs pour la santé mentale, Monsieur le ministre.

Je vous demande donc de prendre cette ordonnance pour les points que nous avons cités tout à l’heure, mais sans jouer ce jeu sur les articles 18 à 24. Dès lors, vous trouverez beaucoup de gens pour travailler avec vous sur ce sujet difficile (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

M. Richard Mallié – En tant que président du groupe d’études sur les professions de santé, j’attache une importance particulière à ces questions, et la ratification de la présente ordonnance me semble importante à double titre.

Je me félicite, tout d’abord, de la simplification du fonctionnement des ordres des professions médicales. Appartenant moi-même à un ordre, je sais à quel point ces machines sont complexes. En outre, l’autorisation du vote électronique pour l’élection des conseillers départementaux apportera la preuve que ces instances ne sont pas d’un autre âge. Avec Mme Briot, nous avons essuyé, lorsque nous avons proposé en juin une loi créant un ordre infirmier, de nombreux quolibets sur le caractère « dépassé » des instances ordinales. Je ne doute pas que l’examen du texte en seconde lecture sera l’occasion pour nos détracteurs de s’en donner à cœur joie. La ratification de l’ordonnance démontre pourtant qu’un toilettage législatif du texte permet à ces structures de s’adapter. Et contrairement à ce que dit notre collègue Préel, les ordonnances doivent, selon la Constitution, être ratifiées par le Parlement.

L’encadrement de la profession de diététicien, ensuite, était très attendu, et je me réjouis de la création d’un diplôme d’État. Les questions relatives à la diététique, dans une société de plus en plus confrontée à l’obésité, occupent une place croissante dans le paysage de la santé. Dans ce domaine comme dans d’autres, nos concitoyens sont menacés par des charlatans qui exploitent la faiblesse et la naïveté des moins informés. La mise en place d’un diplôme d’État, avec l’adoption nécessaire d’un cadre réglementaire plus strict, apportera une réponse aux abus.

J’évoquerai, pour finir, l’amendement que j’ai déposé avec mes collègues MM. Bernier, Dubourg, Thomas et Ueberschlag, tous chirurgiens-dentistes. Il s’agit de reconnaître les assistants dentaires comme des professionnels de la santé.

M. Jean-Marie Le Guen – Créez un ordre !

M. Richard Mallié – Il y a trente ans, une assistante dentaire effectuait essentiellement des tâches logistiques. Elles interviennent aujourd’hui dans des domaines requérant des compétences de plus en plus spécialisées, sans que cette évolution ait été reconnue, puisque leur formation continue de relever, non du ministère de la santé, mais du ministère du travail. Nous proposons donc de les intégrer au code de la santé publique.

M. Jean-Marie Le Guen – Allez plus loin !

M. Richard Mallié – Je soumettrai deux autres amendements, dont l’un est de précision, et l’autre, qui devrait réjouir notre Président Jean-Louis Debré, supprime une disposition à caractère réglementaire. Je souhaite donc la ratification de l’ordonnance enrichie de ces propositions (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

La discussion générale est close.

M. le Ministre – Quelques mots de réponse. Monsieur le rapporteur, vous avez eu raison de souligner que ce texte s’inscrit dans un vaste mouvement de simplification. Nous avons, en particulier dans le domaine de la santé, le devoir de rendre plus lisibles les règles de droit.

En ce qui concerne les psychothérapeutes, le décret organisant une formation de qualité, qui fait actuellement l’objet d’une concertation avec les professionnels, sera transmis au Conseil d’État avant la fin de l’année, comme je m’y étais engagé.

M. Mallié a insisté sur la reconnaissance de la profession de diététicien, dont il n’a pas été beaucoup question ce matin. C’était une disposition attendue depuis longtemps, et je prends acte du soutien de Mme Fraysse.

Pour les assistants dentaires, je partage votre souci de revalorisation, pour lequel je vous proposerai toutefois une voie différente de celle de votre amendement.

M. Préel reproche au Gouvernement de soumettre la ratification de l’ordonnance de 2005 au Parlement, mais c’est pourtant ce que prévoit la Constitution. S’agissant de l’ordonnance qui modifiera la loi de 1990, elle sera prise dans un délai de deux mois, puis un projet de loi de ratification sera déposé dans les deux mois suivants (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu, cet après-midi, à 15 heures.
La séance est levée à 13 heures.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne deux heures après la fin de séance.
Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.
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