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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

1ère séance du mercredi 10 janvier 2007

Séance de 15 heures
47ème jour de séance, 106ème séance

Présidence de M. Jean-Louis Debré

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La séance est ouverte à quinze heures.

M. le Président – À partir d’aujourd’hui, la diffusion de la séance des questions au Gouvernement sur Internet est accessible par l’intermédiaire de logiciels libres (Applaudissements sur tous les bancs).

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questions au gouvernement

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

M. le Président – Comme chaque premier mercredi du mois, les quatre premières questions sont réservées à des thèmes européens.

Un député socialiste – Où est le drapeau de l’Union ?

M. le Président – Nous sommes à l’Assemblée nationale !

prÉsidence allemande de l’union européenne

M. Pierre Lequiller – Alors que l’Allemagne vient de prendre la présidence de l’Union européenne, le groupe UMP souhaite que l’année 2007 soit celle de la relance de l’Europe. La crise est profonde alors que nous n’avons jamais eu autant besoin de l’Europe, comme le montre la menace que la Russie fait peser sur la sécurité énergétique.

Deux échéances majeures se profilent : la déclaration de Berlin, le 25 mars, devra définir les nouveaux objectifs de l’Union ; la réforme institutionnelle, après l’entrée de la Roumanie et de la Bulgarie, permettra de donner à l’Europe les moyens de décider et d’agir.

Comment la France travaille-t-elle avec son partenaire allemand sur cette question institutionnelle ? Quelle sera sa contribution à la déclaration de Berlin ? Comment la France compte-t-elle célébrer le cinquantième anniversaire du Traité de Rome, afin de renforcer le sentiment d’identité européenne chez nos concitoyens ?

La voix de la France est entendue et attendue, comme le prouve l’élection hier, à la tête du premier groupe parlementaire européen, de M. Joseph Daul, membre de l’UMP. Nous en sommes fiers (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). L’UMP considère que l’Europe constitue un enjeu essentiel pour la France, laquelle assumera la présidence de l’Union au deuxième semestre 2008. Madame la ministre, pouvez-vous nous éclairer sur la détermination et les initiatives du Gouvernement français, en cette période cruciale pour l’avenir de l’Europe ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme Catherine Colonna, ministre déléguée aux affaires européennes – Permettez-moi d’adresser chaleureusement des vœux de succès à l’Allemagne, car l’Europe en a besoin. La présidence allemande sera marquée par trois grands rendez-vous : le 25 mars, les dirigeants européens se retrouveront à Berlin pour commémorer le cinquantième anniversaire du traité de Rome et pour adopter une déclaration politique tournée vers l’avenir ; les 8 et 9 mars, le conseil européen, consacré aux questions économiques et sociales, portera aussi sur la politique européenne de l’énergie – dont on mesure l’importance – et le changement climatique ; en fin de présidence, il reviendra à l’Allemagne de faire des propositions afin que soit trouvé un consensus entre les 27 États membres sur la réforme institutionnelle. La présidence allemande a été préparée avec soin et pragmatisme, en étroite concertation avec la France.

Permettez-moi de saluer à mon tour l’élection de notre compatriote Joseph Daul à la présidence du groupe PPE du Parlement européen (Protestations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains). C’est la première fois qu’un Français occupe une telle fonction, qui plus est à la tête du groupe le plus important du Parlement.

Pour notre part, nous avons pris un certain nombre d’initiatives pour préparer le cinquantième anniversaire du Traité de Rome, avec Philippe Douste-Blazy et Renaud Donnedieu de Vabres. Un comité d’honneur, présidé par M. Maurice Faure – qui a négocié et signé le Traité de Rome – devrait faire des propositions. Une pièce de deux euros, dont l’une des faces portera la représentation du Traité de Rome, sera frappée et un timbre commémoratif émis. Enfin, un site Internet est consacré à l’événement et j’ai lancé un appel à propositions, afin que le Traité de Rome soit célébré comme il le mérite.

Permettez-moi de former le vœu qu’un jour, ici-même, le drapeau européen voisine avec le drapeau français. Nous faisons en effet partie de l’Europe depuis cinquante ans et il serait bon que nous nous en montrions fiers ! (Protestations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains, applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président – Il revient à l’Assemblée nationale de le décider !

diminution des gaz à effet de serre

Mme Geneviève Gaillard – La commission européenne présente aujourd'hui son plan d'action destiné à diminuer les émissions de gaz à effet de serre de 80 % d'ici à 2050. Les mesures envisagées sont de deux types : sécurisation de l'approvisionnement et du marché de l'énergie, et diminution proprement dite des gaz à effet de serre.

On estime que 30 000 décès anticipés par an environ sont liés à la pollution atmosphérique urbaine et que l’on en comptera bientôt 40 000. La prévalence des maladies allergiques respiratoires a doublé en vingt ans. Selon l'OMS, la congestion routière en France coûterait chaque année 1 % du PIB des pays européens. Enfin, le rapport Stern évalue la facture du réchauffement climatique à 5 500 milliards d'euros par an.

Jamais les annonces gouvernementales sur la diminution des émissions de gaz à effet de serre n'ont été suivies d'actes à la mesure de ces enjeux. Le dernier comité interministériel du développement durable a accouché de mesurettes. Rien de significatif n'a été voté en loi de finances, ni dans le domaine des transports, ni dans celui du logement.

La diminution des crédits de soutien au développement des transports publics a été confirmée. Les subventions aux collectivités sont distribuées au compte-gouttes, dans la plus grande opacité. La directive « eurovignette » n'est toujours pas transposée. Aujourd'hui, la tarification de l'usage des routes fait l'objet d'une seule expérimentation, alors que l'instauration de péages urbains est envisagée en France. Malgré les invitations appuyées de l'Union Européenne, vous refusez les moyens d'action aux acteurs locaux ! Vous annoncez une deuxième génération de plans de déplacements urbains, sans dégager les ressources nécessaires à leur application. Vous souhaitez développer le flex-fioul tous azimuts ; mais ce n’est que de la poudre aux yeux quand aucune évaluation économique ou environnementale n’a été effectuée !

S’agissant du logement, aucune véritable mesure d’incitation des ménages aux économies d'énergies ou à l'autoproduction n’a été prise, aucune contrainte ambitieuse n’est imposée aux logements neufs. Pourtant, la consommation énergétique domestique, outre l’émission de CO2, représente une charge de plus en plus lourde pour les ménages modestes.

Les Français ont pris conscience des enjeux ; il serait dramatique de les décevoir. La France, forte de ses centrales, prend du retard en matière d'innovation et de développement des énergies renouvelables. En outre, les privatisations d'EDF et de GDF ne sont pas une réponse aux enjeux énergétiques de demain ! Le Plan national d'affectation des quotas, retiré in extremis pour éviter la honte, a finalement été reconduit à hauteur des émissions effectives ! (« La question ! » sur les bancs du groupe UMP)

Alors que la présidence allemande s’ouvre sous les meilleurs auspices, pourquoi vous élevez-vous contre les recommandations de la Commission dans un courrier adressé aujourd’hui par M. Loos ? Quelles mesures immédiates la France compte-t-elle prendre pour que ne nous manquions pas le rendez-vous de 2020 ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Mme Nelly Olin, ministre de l’écologie et du développement durable – La Commission européenne vient d’arrêter sa politique énergétique pour les trois années à venir, conformément aux vœux que nous formions depuis plusieurs années. La France y a fortement contribué. (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste)

Nous partageons l’objectif de réduire de 20 % les émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2020, mais le Gouvernement souhaite aller bien plus loin, car notre ambition est de diviser par quatre ces émissions avant 2050 (Mêmes mouvements). Si cela ne vous intéresse pas, libre à vous de ne pas écouter ! (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste)

Un tel objectif devra naturellement être partagé par les différents États membres en fonction de leur situation énergétique, comme c’est aujourd’hui le cas pour le protocole de Kyoto. Avec une intensité de carbone de 40 %, inférieure à la moyenne de l’OCDE, la France est déjà très bien placée, et nous constatons une inflexion importante des émissions dans les secteurs du transport et du bâtiment.

Grâce à l’engagement du Gouvernement, tous les logements construits en application de l’ANRU seront d’ailleurs conformes aux normes HPE ou HQE. Mieux encore, nos émissions de gaz à effet de serre ont significativement baissé en 2005 – nous en émettons désormais 1,8 % de moins qu’en 1990. Le plan climat, lancé par le Gouvernement et actualisé récemment, porte donc ses fruits (Protestations sur les bancs du groupe socialiste).

S’agissant du PNAQ, vos remarques sont erronées, Madame Gaillard. C’est en effet le Gouvernement français qui a décidé de retirer son projet initial afin de le réexaminer, sans la moindre pression de la part de Bruxelles. La réduction des quotas prévus démontre bien la volonté du Gouvernement d’aller de l’avant…

N’oublions pas non plus le crédit d’impôt de 50 % pour les énergies nouvelles – que votre majorité n’avait pas institué –, ni la transformation du CODEVI en livret de développement durable, qui permettra de mobiliser dix milliards d’euros de prêts écologiques, ni l’étiquette « énergie », désormais obligatoire lors de la vente d’une voiture ou d’un logement, ni le développement accéléré des biocarburants, qui devront atteindre 10 % du total d’ici à 2015 : tout cela démontre l’engagement du Gouvernement, sous l’impulsion du Premier ministre et du Gouvernement.

Je veux bien recevoir des leçons, mais seulement de ceux qui sont en droit d’en donner et ce n’est pas votre cas ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

politique europÉenne de l’Énergie

M. Jean Dionis du Séjour – Avant de poser ma question, je voudrais m’associer, au nom du groupe UDF, à la proposition de la ministre de faire figurer le drapeau européen à côté du drapeau tricolore…

M. le Président – L’absence du drapeau européen n’a rien d’un symbole. Le bureau de l’Assemblée, considérant que cet hémicycle est le lieu emblématique de nos débats et de l’élaboration de la loi nationale, a décidé de n’y installer que le drapeau français. (Applaudissements sur de nombreux bancs)

M. Jean Dionis du Séjour – Le plan d’action sur l’énergie déposé par la Commission européenne sera débattu par les États membres, puis éventuellement adopté lors du Conseil européen de mars 2007. Ce plan invite l’Union à se doter d’une véritable politique commune de l’énergie et à réduire sa dépendance énergétique, sujet des plus brûlants : après les différends russo-ukrainiens de janvier 2006, la fermeture de l’oléoduc Droujba, qui délivre chaque année 83 millions de tonnes de pétrole russe à l’Union Européenne et enfin l’instabilité grandissante au Moyen-Orient, notre fragilité dans ce domaine est patente.

Jusqu’à présent, la politique énergétique communautaire se résumait pourtant à l’ouverture des marchés du gaz et de l’électricité. Toutes les familles politiques de notre assemblée avaient appelé de leurs vœux l’élaboration d’une véritable politique commune, dont la proposition de la Commission jette enfin les bases, en suggérant de réduire d’au moins 20 % les émissions de gaz à effet de serre et de porter la part des énergies renouvelables à 20 %, – contre 7 % aujourd’hui – d’ici à 2020. La faiblesse relative des énergies renouvelables à l’échelle européenne démontre bien l’écart qui sépare le discours officiel, très environnementaliste, de la réalité économique, encore dominée par les énergies fossiles.

La France est au pied du mur, Monsieur le ministre. Les événements récents exigent que nous agissions vite. La France va-t-elle enfin se donner les moyens de jouer un rôle moteur dans la nouvelle politique commune de l’énergie, notamment en matière d’énergies renouvelables ? Comment comptez-vous adapter la loi d’orientation sur l’énergie pour nous montrer exemplaires ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF)

M. François Loos, ministre délégué à l’industrie – Voilà un sujet qui nous réunit ! La Commission vient de dévoiler une communication sur sa politique énergétique. Il s’agit de propositions qu’elle compte faire en vue de nouveaux règlements et de nouvelles directives : nous en sommes donc seulement au stade de la communication…

Certains éléments sont dans le droit fil du mémorandum que nous avons présenté et des engagements pris par la France en matière d’économies d’énergie, de substitution et de sécurité d’approvisionnement. Cette communication reprend très largement les propositions que nous avons faites l’an dernier.

J’ajoute que nous ne sommes pas concernés par la fermeture de l’oléoduc russe, par lequel nous ne sommes pas approvisionnés : nous avons en effet pris soin de diversifier l’origine de notre énergie. Notre premier fournisseur de pétrole et de gaz est la Norvège, la Russie ne représentant que 11 % de nos approvisionnements.

Si la Commission reprend nombre de nos engagements, qu’il s’agisse de l’énergie stricto sensu ou de ses effets sur l’environnement, nous devrons faire entendre notre position sur d’autres sujets, s’agissant notamment du découplage entre le transport et la production. Sur ce sujet, l’Allemagne, qui détient actuellement la présidence de l’Union, est tout à fait de notre côté : l’existence de RTE, ou plus généralement d’un réseau de transport de gaz, est un outil qui fonctionne en toute indépendance. La meilleure preuve en est que les opérateurs autres qu’EDF et GDF trouvent le système actuel satisfaisant.

Autre sujet délicat, la pérennité des tarifs que la majorité a votés : la Commission a en effet demandé à seize pays européens de revoir leur copie à ce sujet. Mais nous ne sommes pas seuls et nous aurons avec la Commission les discussions qui s’imposent. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

situation de l’industrie automobile

Mme Marie-George Buffet – Après les affaires Ryton en Angleterre et Forest en Belgique, puis la suppression de milliers de contrats d’intérim en France, des milliers d’emplois ont été supprimés en Europe dans la filière automobile en quelques mois seulement.

Je me rendrai demain à Renault Sandouville, auprès d'ouvriers qui ont subi soixante jours de chômage technique l’année dernière, et sont inquiets de constater que l’année 2007 commence comme a fini 2006.

Cette situation est la conséquence directe des stratégies des grands constructeurs européens dictées par la recherche de la seule rentabilité financière et de politiques économiques qui, sous la domination de la politique monétaire de la Banque centrale européenne – BCE –, privilégient la rentabilité au détriment de l’emploi, de la recherche, de la formation et des salaires.

L’Europe, acceptant de sacrifier des pans entiers de notre patrimoine industriel, ne fait rien pour éviter que le drame de Vilvorde ne se répète. Alors même que se pose la question de son indépendance énergétique, elle ne fait rien pour encourager les constructeurs automobiles à investir massivement dans la mise au point de moteurs fonctionnant avec des substituts du pétrole. Elle ne les encourage pas non plus à coopérer pour partager les coûts de ces recherches et en mutualiser les résultats. L’Europe n’a tout simplement pas de politique industrielle. Elle n’empêche pas le dumping fiscal – auquel la France se livre elle aussi, comme en témoigne l’annonce d’une nouvelle baisse de l’impôt sur les sociétés. Elle ne se prive en revanche pas d’attaquer les droits des salariés. J’en veux pour preuve l’adoption de la directive Bolkestein, la volonté exprimée par la présidence allemande de ressusciter la Constitution européenne libérale pourtant rejetée par notre peuple, ou encore l’analyse comme un crime de lèse-majesté de toute critique de la politique monétaire de la BCE.

Monsieur le Premier ministre, devant cette crise de l’industrie automobile, qu’attendez-vous pour exiger une réorientation de la politique monétaire et des missions de la BCE, l’octroi de nouveaux crédits favorables à l’emploi et à l’activité industrielle ? Qu’attendez-vous pour arrêter cette course folle à la rentabilité et impulser une politique de relance de l’industrie automobile, riche en emplois stables et qualifiés, ainsi qu’en innovations ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains)

M. François Loos, ministre délégué à l’industrie  Nous devrions tous en être d’accord : nous avons besoin en France et en Europe d’une industrie forte. Les États et l’Union européenne aident d’ailleurs le secteur industriel à faire face aux mutations actuelles.

L’industrie automobile, que vous avez plus particulièrement évoquée, connaît une situation difficile et les constructeurs français accusent actuellement un important retard dans leurs gammes. Renault en est d’ailleurs pleinement conscient qui vient d’annoncer qu’il sortirait dix nouveaux modèles en 2007-2008 et d’une manière générale, les constructeurs ont pris les mesures correctives nécessaires.

Cela dit, il est faux de penser que l’international nuit à notre industrie automobile (Exclamations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains). Depuis six mois, le solde commercial des constructeurs français est passé de 232 à 356 millions d’euros et celui des équipementiers de 100 à 209 millions d’euros. Contrairement à ce que vous semblez pensez, l’internationalisation de l’activité de nos constructeurs profite à l’activité même en France. J’en veux pour preuve les investissements étrangers actuels dans le secteur de l’équipement automobile en France : tout récemment, Borg Warner en Corrèze, ou bien encore une entreprise américaine et une entreprise japonaise qui ont respectivement repris CF Gomma en Bretagne et la SNR en Savoie. Des investisseurs étrangers ont donc confiance dans le site France.

Cela ne suffit pas, j’en conviens. C’est d’ailleurs pourquoi le Premier ministre a élaboré un plan en faveur de l’industrie automobile, destiné notamment à y soutenir l’innovation : de 20 millions d’euros en 2005, le soutien a été porté à 250 millions en 2006-2007, le plafond du crédit d’impôt-recherche doublé et les délais de paiement améliorés. Voilà des mesures propres à aider notre industrie automobile qui profite déjà de ses activités à l’international. Il nous faut tous soutenir cette France industrielle que nous voulons forte. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

services à la personne

M. Lucien Degauchy  La lutte pour l’emploi et le développement des services à la personne, important gisement d’emplois, constituent deux priorités pour notre majorité. La loi de juillet 2005 a permis de créer de très nombreux emplois et de développer de nouveaux services aux familles, qu’il s’agisse par exemple de la garde des jeunes enfants ou de l’accompagnement des personnes âgées. En février dernier, vous avez, Monsieur le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement, désigné douze enseignes nationales de services à la personne, dont La Poste. Après une expérience de sept mois dans six cents bureaux, le président de La Poste a décidé le lancement de Genius, plate-forme de services qui couvre tout le champ des services à la personne, et ce sur l’ensemble du territoire. Elle est bien entendu accessible dans les bureaux de poste, mais aussi sur Internet et par téléphone. Pouvez-vous faire le point sur l’application de la loi relative au développement des services à la personne, notamment sur l’offre Genius de La Poste ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement  Où en sommes-nous dix-huit mois après le lancement du plan de développement des services à la personne, secteur dont chacun depuis vingt ans soulignait, vu l’étendue des besoins, l’important gisement d’emplois qu’il recèle – il suffit de se remémorer les rapports de l’ancien Commissariat général au Plan sur le sujet ? L’Agence nationale des services à la personne, excellemment présidée par votre collègue Laurent Hénart, est en place. Le nombre d’emplois créés dans le secteur en 2006 s’est élevé à 135 000 – supérieur aux prévisions. Mais pour nos concitoyens, la seule question qui vaille est de savoir comment accéder à ces services : il leur suffit de s’adresser à une association ou à une entreprise du secteur, dont 12 500 ont été agréées en six mois. Plusieurs plates-formes de services à la personne sont d’ores et déjà en place, joignables par téléphone : La Fourmi Verte, France Domicile créée par la Mutualité française, Serena créée par le groupe des Caisses d’épargne, Personia créée par le Crédit mutuel, Bien-être et assistance, Fil assistance, et depuis ce matin, la plate-forme de La Poste, Genius. Outre abonder jusqu’à 66 % le chèque emploi service universel pour les postiers, La Poste a décidé de mettre ses 13 000 agences à la disposition de nos concitoyens…

M. Christian Bataille  Et si elle est privatisée ?

M. le Ministre  …qui pourront y disposer d’une carte Genius. Pour 9,5 euros, un opérateur les écoutera, définira, avec eux, leurs besoins et les orientera vers l’association ou la société de services la plus proche de leur domicile et correspondant le mieux à leurs attentes. Et La Poste d’ajouter qu’elle remboursera le client s’il trouve moins cher ailleurs et de garantir la qualité du service, comme elle le fait du reste pour l’ensemble de ses activités. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

apprentissage du calcul mental en primaire

M. Pierre Amouroux – Monsieur le ministre de l’éducation nationale, vous avez beaucoup insisté sur la nécessité d’améliorer l’apprentissage des savoirs fondamentaux dans l’enseignement élémentaire, en particulier celui de la lecture et de la grammaire, que l’on appelle maintenant, je crois, l’ORL, c’est-à-dire l’observation raisonnée de la langue (Exclamations sur divers bancs), et vous avez entrepris des réformes courageuses et appréciées par les familles.

Elles attendent maintenant vos décisions concernant le calcul. Les parents constatent en effet que leurs enfants ont aujourd’hui du mal à raisonner avec les chiffres, à effectuer des multiplications et qu’ils ne savent plus faire les divisions, qui ne sont plus au programme ! À cause de l’utilisation abusive de la calculatrice, certains enfants font plus les opérations au hasard qu’après un réel raisonnement. Qu’allez-vous donc proposer à ces parents qui s’inquiètent pour l’avenir de leurs enfants ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Gilles de Robien, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche – L’éducation nationale évolue sous le signe du bon sens, lequel consiste en l’occurrence à permettre aux enfants de savoir le plus vite possible lire, écrire et compter. J’ai toujours beaucoup insisté aussi sur le fait que l’on devait, dès la maternelle, acquérir du vocabulaire et apprendre à vivre en société. Puisque vous avez parlé de la grammaire, Monsieur Amouroux, je vous indique que demain, en présence notamment de Bernard Pivot et d’Érik Orsenna, je signerai la circulaire « grammaire » à laquelle vous avez fait allusion.

Des études internationales montrent que l’apprentissage du calcul permet d’avoir de la rigueur dans le raisonnement. Je souscris totalement à cette idée et j’attends, le 23 janvier, un rapport de spécialistes français sur le sujet, après quoi je saisirai la commission des programmes en vue de mettre en place, pour la rentrée 2007, un apprentissage, dès l’école primaire, des quatre opérations et du calcul mental. Cela servira aux jeunes à la fois dans leur vie quotidienne et pour la suite de leurs études, tout en les préparant à se servir ensuite des technologies les plus modernes. Le calcul, c’est utile !

Donner aux jeunes de tels fondamentaux, c’est aussi renforcer l’égalité des chances ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

logement

Mme Annick Lepetit – Monsieur le Premier ministre, il y a quelques jours, vous avez annoncé que serait présenté au conseil des ministres, le 17 janvier prochain, un projet de loi sur le droit au logement opposable. Mais que signifie concrètement une telle réforme un mois avant la fin de la session parlementaire ? Un débat forcément improvisé, tronqué et surtout le risque de passer à côté de la vraie question.

Le droit au logement opposable ne va pas sans une construction massive et soutenue de véritables logements sociaux. Or, actuellement, deux tiers des ménages ne peuvent, compte tenu du coût des loyers, accéder aux constructions que vous faites et plus d'1,3 million de demandeurs de logements sont en liste d'attente.

Le droit au logement ne va pas non plus sans moyens financiers. Pourtant, cette année, les crédits de l'État pour la construction locative sociale baissent encore de 77 millions d'euros !

Votre projet de loi n'explique pas comment l'État sera bien le garant de ce nouveau droit, ni comment nos concitoyens pourront concrètement s'en emparer. Auprès des collectivités territoriales, dites-vous. Mais que se passera-t-il avec les communes qui refusent de construire au moins 20 % de logements sociaux…

Plusieurs députés socialistes – Neuilly !

Mme Annick Lepetit – …comme l'exige la loi SRU votée en 2000 ? Une loi que votre majorité ne cesse de combattre et que vous refusez de faire appliquer ! Enfin, quels logements seront concernés et surtout où seront-ils situés ?

Monsieur le Premier ministre, c'est parce que nous sommes pour un réel droit au logement que nous voulons que cette réforme ne reste pas un effet d'annonce. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement –Jusqu’à nouvel ordre, l'Assemblée nationale et le Sénat sont en activité et offrent un lieu de débat dans lequel il est encore possible de déposer des projets de loi !

Contrairement à vous qui avez évoqué un futur rapport du Conseil économique et social…

Mme Annick Lepetit – Non.

M. le Ministre – …nous avons pris connaissance du rapport du Conseil économique et social de 2003, après quoi le Premier ministre a chargé, en juin dernier, le Haut comité pour le logement des plus défavorisés, présidé par Xavier Emmanuelli, d’un travail préparatoire. Après une longue maturation, nous avons élaboré un texte, tout à fait essentiel, qui a recueilli l’avis favorable unanime dudit Haut comité, dont la composition est, comme vous le savez, plurielle. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste)

Depuis un certain temps, vous et vos amis désinformez les Français. Rétablissons donc les faits ! (Le ministre brandit un graphique, qui fait apparaître une courbe ascendante ) S’agissant des logements très sociaux, voyez : vous en étiez là, nous sommes là ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Et voyez (Le ministre montre à l’hémicycle un autre graphique) l’évolution suivie par l’ensemble de la production française pendant la même période. Cela se passe de commentaire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

signature du nouveau contrat d’avenir pour les buralistes

M. Richard Mallié – Monsieur le ministre délégué au Budget, vous nous avez donné une nouvelle fois la preuve que votre gouvernement était soucieux de tenir ses engagements (Protestations sur les bancs du groupe socialiste). En signant avec le président de la confédération des buralistes, René Le Pape, le nouveau contrat d'avenir, vous avez montré à cette profession que le Gouvernement et la majorité étaient plus que jamais déterminés à soutenir le premier réseau de proximité de France, comme il s'y était engagé. Ce nouveau contrat d'avenir, les buralistes l'attendaient depuis des mois.

Je le sais d'autant plus que la mission qui m’a été confiée sur le sujet m'a amené à rencontrer plus d'une centaine de ces professionnels dans près de quinze départements et à constater leur inquiétude. Si la majorité de la profession sait que l'interdiction de fumer dans les lieux publics poursuit un objectif louable de santé publique, elle ne pouvait toutefois accepter d'être sacrifiée. À entendre certains collègues de l'opposition, qui proposaient des mesures radicales de prohibition du tabac sans offrir parallèlement aux débitants des solutions de soutien économique, il y avait effectivement de quoi être effrayé !

Avec ce contrat d'avenir, signé pour cinq années supplémentaires, vous offrez aux buralistes la visibilité sur l'avenir qu'ils attendaient. Pouvez-vous nous en exposer les principales dispositions et nous indiquer selon quel calendrier il sera mis en œuvre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l’État – Les professionnels avaient exprimé une inquiétude légitime à l’annonce de l’interdiction de fumer dans les lieux publics, décidée par le Premier ministre pour satisfaire aux impératifs de santé publique que chacun sait. Il était indispensable de leur apporter des réponses très concrètes et c’est ce qui a été fait grâce au travail exceptionnel que vous avez accompli, Monsieur Mallié, en tant que parlementaire en mission (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF). À l’issue de cette concertation, le 21 décembre, nous avons signé avec M. Le Pape un protocole de contrat d’avenir qui va jusqu’en 2011. L’évaluation du premier contrat d’avenir, signé en 2003, montre que nous avons tenu tous nos engagements. Nous continuerons à veiller à ce que personne n’y perde, avec quelques innovations. Ainsi, l’enveloppe budgétaire reste la même, mais concentrée sur les buralistes les plus exposés, en particulier frontaliers. Par ailleurs, la rémunération des débitants de tabac va augmenter, ce qui ne s’était pas produit depuis 1976. Enfin, nous avons veillé à apporter des aides à la diversification dans les missions de service public et à la modernisation des débits de tabac, en particulier grâce au crédit d’impôt. Ce travail, malgré sa difficulté, s’est accompli dans un esprit de responsabilité et de démocratie remarquable (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

sécurité routière

M. Richard Dell'Agnola – La sécurité routière est l'un des grands chantiers du Président de la République. Avant 2002, nous avions atteint de tristes records. La France étant lanterne rouge de l'Europe, juste avant la Grèce et le Portugal. Il y avait donc urgence à ce que les autorités de l'État se mobilisent contre ce fléau, ressenti à tort comme une fatalité. Le Gouvernement et les pouvoirs publics se sont donc donné des moyens de lutte : renforcement des contrôles et sanctions, fin de la tolérance à l'égard des excès de vitesse ou de la consommation d'alcool et de drogue au volant, sensibilisation des automobilistes et surtout des jeunes… Les résultats sont là : 9 000 vies et plus de 100 000 blessés ont été épargnés. Au total, on compte 43 % de morts en moins en cinq ans. Cette politique ambitieuse a certes été perçue comme contraignante, mais les Français en recueillent aujourd'hui les fruits. Quel bilan peut-on tirer de votre action dans ce domaine prioritaire, pour 2006 et pour l’ensemble de la législature ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Dominique Perben, ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer – Cette politique, décidée par le Président de la République et menée par le Gouvernement, est en effet une réussite – celle de tous les Français et des pouvoirs publics, mais aussi des milieux associatifs, qui nous ont beaucoup aidés dans la sensibilisation de l’opinion et l’application des mesures. En 2006, il y a eu 12 % de tués en moins sur les routes par rapport à 2005, et 43 % par rapport à 2001 – avec une diminution de 30 % des blessés sur cette période de cinq ans. Cela équivaut à 10 000 vies et 100 000 blessés épargnés – autant de drames humains évités. C’est le meilleur argument pour convaincre nos concitoyens de poursuivre leur effort. Nous sommes descendus au dessous du seuil des 5 000 morts par an, mais il faut aller plus loin. En ce qui concerne les deux-roues par exemple, les résultats sont encore très loin d’être satisfaisants. Il faut faire un travail de pédagogie et de contrôle, mais aussi améliorer la situation en milieu urbain : le trafic augmente, en particulier pour les deux-roues, et il faut que les règles – vitesse, respect des feux et des stops, priorités – soient mieux respectées. Enfin, si certains départements ont obtenu d’excellents résultats, ce n’est pas le cas pour d’autres, sans que la raison en soit évidente. Nous travaillons donc avec les préfets, les responsables de l’équipement, de la police et de la gendarmerie et les associations pour améliorer les choses. Voilà le bilan remarquable de la politique menée depuis cinq ans et les perspectives d’action pour 2007 (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

fiscalitÉ locale

M. Daniel Boisserie – M. Borloo a produit des graphiques tout à l’heure, mais nous sommes plusieurs à nous demander s’ils étaient à l’endroit ou à l’envers… (Sourires sur les bancs du groupe socialiste ; exclamations sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président – À la télévision, ils étaient à l’endroit ! (Sourires)

M. Daniel Boisserie – Si l’on effectue une comparaison, en matière de foncier bâti, entre un appartement à Paris ou dans certaines communes voisines et une maison de valeur deux fois moindre dans une petite ville limousine, le taux d’imposition, ordures ménagères comprises, est de 14 % à Paris et de 57 % en province : le propriétaire parisien paye 290  euros, contre 1 900 pour le provincial.

Tant mieux pour les Parisiens, mais cette injustice intolérable choque les Français. L’association des petites villes de France et l’association des maires de France ont attiré à plusieurs reprises l’attention sur ce problème gravissime. Pourtant, on ne constate aujourd’hui aucun renforcement de la péréquation financière entre les collectivités, aucune amélioration de la DGF, principal outil de péréquation verticale, ni aucune modification significative des outils de péréquation horizontale. Le résultat est consternant. En outre, si la mondialisation frappe partout, les délocalisations touchent plus les territoires les plus pauvres, souvent ruraux. Avec des bases de taxe professionnelle en forte diminution, à cause de la réforme de 2007, comment voulez-vous que les régions, y compris celles de la majorité, n'augmentent pas fortement les taux de la fiscalité locale, ou alors ne cessent tout investissement ? La majorité, au pouvoir depuis bientôt cinq ans, n’a fait qu’aggraver la fracture territoriale. Nous, socialistes, nous engageons à une véritable réforme pour plus d'équité (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). Comment comptez-vous faire enfin cesser ces inégalités insupportables ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales – En prenant l’exemple des petites communes de votre région, vous aviez raison sur un point : la question de la fiscalité des territoires est un défi majeur. Parmi nos 36 000 communes, 77 % comptent moins de mille habitants : loin d’être un handicap, c’est un atout. Un nouvel espoir s’offre à elles, ainsi que l’a souligné le Président de la République, grâce au repeuplement qui est en cours.

Le Gouvernement a, écouté, entendu et décidé. (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. Augustin Bonrepaux – Décidé quoi ? Il n’a rien fait !

M. le Ministre délégué – Il a décidé de renouveler le contrat de croissance et de solidarité, allouant ainsi, au prix d’un effort spectaculaire, 542 millions aux communes et à leurs groupements. Il a renforcé la solidarité territoriale en augmentant la DSR. Il a inscrit, en loi de finances, trois correctifs visant à renforcer la péréquation, mettant 100 millions à la disposition du comité des finances locales. Par ailleurs, le Gouvernement a structuré le territoire en créant les pôles de compétitivité, dont l’un a été constitué dans votre département, et les pôles d’excellence rurale, dont trois sont implantés chez vous.

Mais, puisque vous m’y encouragez, je vous suggère de vous tourner vers les conseils généraux qui, depuis 2004, ont jugé bon, pour constituer une épargne de précaution, de ponctionner de deux milliards le pouvoir d’achat des Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP, exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

Retraites agricoles

M. Daniel Garrigue – Le montant des pensions agricoles révèle une injustice caractérisée. Mes collègues Yves Censi, Marc Le Fur et moi-même, vous avons fait, Monsieur le ministre de l’agriculture, des propositions de revalorisation des pensions minimes servies aux « laissés pour compte » – les conjoints des exploitants et les aides familiaux aux carrières incomplètes. Nous avons veillé à ce que les mesures alors adoptées avec l’accord du Gouvernement – abaissement de la durée minimale d’activité et réforme du coefficient de minoration – soient inscrites dans la loi de financement de la sécurité sociale, ce qui a été fait. Cependant, Monsieur le ministre, l’attente est longue pour ceux qui comptent sur cette revalorisation. Que ferez-vous pour que les mesures adoptées deviennent effectives le plus vite possible ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Dominique Bussereau, ministre de l'agriculture et de la pêche – Tous les députés des zones rurales ont vu se presser dans leur permanence des retraités de l’agriculture brandissant des avis de paiement de très faibles pensions. Beaucoup a été fait, sous la précédente législature déjà, je le reconnais, pour revaloriser les pensions les plus faibles, Pour notre part, nous avons appliqué la mensualisation attendue de longue date et institué une nouvelle mutuelle complémentaire obligatoire. S’agissant des retraités laissés pour compte des revalorisations successives, 160 millions seront consacrés, cette année, au versement, le 8 février, à quelque 300 000 bénéficiaires de « mini retraites », d’une somme comprise entre 600 et 900 euros. Ce geste, qui honore la majorité, est une nouvelle illustration de notre volonté de solidarité avec les territoires ruraux. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

politique en faveur des personnes ÂgÉes

Mme Cécile Gallez – Au cours de la prochaine décennie, le nombre de personnes âgées de plus de quatre-vingt cinq ans va doubler pour atteindre deux millions. Nous devons nous préparer à ce défi. Conscient de l’enjeu, le Gouvernement, dès 2003, a défini le plan « Vieillissement et solidarité » qui a permis de faire considérablement évoluer la prise en charge. La conférence de la famille de 2006 a reconnu le rôle des aidants familiaux et donné toute sa place au nouvel âge actif. Enfin, en juin dernier, vous avez, Monsieur le ministre délégué à la sécurité sociale, présenté les grands axes du plan « Solidarité grand âge ». Pouvez-vous dresser le bilan de son application et, plus généralement, celui de l'action menée depuis 2002 pour les personnes âgées ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille – L’espérance de vie ne cessant d’augmenter, le nombre de grands vieillards va effectivement doubler d’ici à dix ans. C’est donc un véritable tsunami auquel il faut s’attendre... (Mouvements divers sur les bancs du groupe UMP, exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains) et nous devons mobiliser tous les moyens disponibles pour venir en aide aux personnes âgées dépendantes. Déjà, les créations de places médicalisées en maisons de retraite sont passées de 45 000 entre 1998 et 2002 à 180 000 entre 2002 et 2007. Mais il fallait faire davantage et mobiliser des moyens nouveaux pour ajouter de la vie aux années. C’est la tâche que s’est assignée le Gouvernement. Je suis heureux de vous annoncer que la consultation gratuite de prévention proposée aux personnes âgées de plus de soixante-dix ans, déjà expérimentée dans trois régions, sera généralisée. Comme vous le savez, le premier ministre a déclaré la lutte contre la maladie d’Alzheimer « grande cause nationale » en 2007, et des possibilités d’accueil de ces malades devront être créées dans les maisons de retraites. Par ailleurs, le Gouvernement, souhaitant rendre effectif l’exercice du libre choix du lieu de vie des personnes âgées dépendantes, a multiplié les moyens destinés au maintien à domicile, leur consacrant une enveloppe supérieure à celle qui est prévue pour l’accueil en maisons de retraite. Pour favoriser la modernisation et l’humanisation de ces établissements, nous avons aussi abaissé à 5,5 % le taux de TVA sur ces travaux, institué un emprunt à taux zéro pour faciliter leur réalisation et défini une enveloppe de 500 millions à cette fin. Il faut enfin veiller à ce que le « reste à charge » pour les familles n’augmente pas. Tels sont les axes de notre action.

M. le Président – Nous en avons fini avec les questions au Gouvernement.

La séance, suspendue à 16 heures, est reprise à 16 heures 20 sous la présidence de Mme Mignon.
PRÉSIDENCE de Mme Hélène MIGNON
vice-présidente

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réforme de la protection de l’enfance (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, réformant la protection de l’enfance.

Mme Henriette Martinez – Rappel au Règlement. L’un de mes amendements n’a pas été appelé hier soir, alors qu’il figurait dans la liasse. J’ai saisi le service de la séance de cet oubli, et je voudrais savoir ce qu’il convient de faire pour que mon amendement puisse être appelé sur ce texte.

Mme la Présidente – Le Président a dû constater que vous n’étiez pas à votre banc au moment où l’amendement allait être appelé.

Mme Henriette Martinez – J’étais pourtant en séance.

Mme la Présidente – L’article a été voté et on ne peut pas y revenir. Je note votre réclamation, sans pouvoir la prendre en considération.

après l'Art. 4 bis

M. Patrick Delnatte – Par l’amendement 124, nous souhaitons modifier les conditions de la demande d’accès aux origines auprès du Conseil national pour l’accès aux origines personnelles. Actuellement, cette demande peut être faite par le mineur, avec l’accord de ses représentants légaux, ou bien par ces derniers eux-mêmes, sans participation du mineur. Nous considérons que ce doit être une démarche personnelle du mineur.

Mme Valérie Pecresse, rapporteure de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales – Cette modification répondant aux conclusions de la mission famille et paraissant souhaitable, avis favorable.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille – C’est une question très sensible. Il y a un peu plus de quatre ans, nous avons adopté une grande loi sur l’accès aux origines des enfants adoptés, en créant le Conseil national pour l’accès aux origines personnelles, dont la mission est de seconder de jeunes adultes qui, pour construire leur identité, souhaitent en savoir plus sur leurs parents biologiques. La loi n’a pas prévu d’écarter les parents adoptifs de la possibilité de demander l’accès aux origines des enfants qu’ils ont adoptés, de sorte qu’un certain nombre de demandes sont aujourd’hui faites par des parents pour des enfants d’un ou deux ans.

Je voudrais mieux comprendre le ressort profond de telles démarches, et mieux connaître aussi la réaction des associations à ce phénomène. Spontanément, j’aurais envie d’aller dans la même direction que vous, Monsieur Delnatte, mais peut-être que, parmi les demandes de ces parents adoptifs, il en est certaines dont nous comprendrions et approuverions la motivation. Je voudrais donc que nous menions une réflexion sur le sujet d’ici à la discussion du texte au Sénat, et je vous associerai volontiers à ce travail de concertation.

M. Patrick Delnatte – Plusieurs associations sont représentées au CNAOP, où ce problème a été évoqué. Mais puisque vous proposez de faire le point, j’accepte de retirer mon amendement.

Mme Patricia Adam – Je le reprends, car de nombreuses associations, qui connaissent bien ces questions, l’appuient. Le CNAOP fonctionne depuis maintenant trois ans, et ses procédures doivent être aménagées au vu de l’expérience. Ce Conseil a été créé pour permettre aux enfants adoptés d’accéder à leurs origines personnelles ; il est bon de le préciser.

M. Patrick Delnatte – Actuellement, la demande peut être faite par le mineur, avec l’accord de ses parents. Mais elle peut l’être aussi par ses parents, sans que le mineur en soit informé ou ait donné son accord. C’est bien cela qui pose un problème, dans la mesure où la recherche de ses origines est une démarche personnelle.

Mme Patricia Adam – C’est bien ce que j’avais compris ! Je suis tout à fait favorable à cet amendement et souhaite le reprendre. Lors de la constitution du CNAOP, nous n’avions pas pensé à cette éventualité. Il serait important de corriger aujourd’hui cette lacune.

Mme la Rapporteure – Bien qu’étant favorable à cet amendement, je voudrais soutenir la proposition du ministre de procéder à une concertation complémentaire avec les associations et le CNAOP. La notion d’« âge de discernement » demande à être précisée : 7-8 ans, est-ce le bon âge ? Ne vaudrait-il pas mieux attendre 13 ans ?

Mme Muguette Jacquaint – Ce débat ne date pas d’hier ! Certes, des problèmes peuvent se poser, mais je ferai remarquer que les mineurs adoptés ne sont pas tous concernés ! Nombreux sont ceux qui n’éprouvent pas le besoin de connaître leurs origines.

Cependant, nous devons avancer sur cette question. Les associations ont fait des propositions mûrement réfléchies. Une concertation est-elle encore nécessaire ? Il est temps de franchir un nouveau pas, afin que cesse la souffrance de ces enfants.

Mme Patricia Adam – Je comprends la volonté de dialogue du ministre, mais nous nous trouvons à la fin de la législature et j’ai bien peur que nous ne puissions modifier cette situation avant longtemps. S’agissant du « discernement », il sera toujours difficile de fixer un âge dans un texte de loi. Tout dépend des enfants et du travail psychologique qu’ils auront pu réaliser sur la recherche de leurs origines, accompagnés par un professionnel : certains feront la demande dès l’âge de 6 ans, d’autres ne le pourront qu’à 13 ans. La capacité de « discernement » est justement celle des professionnels, qui peuvent juger au cas par cas de la pertinence des demandes. C’est la raison d’être du CNAOP. Rappelons qu’il a été mis en place pour l’adopté, et non pour la famille adoptive.

Mme la Rapporteure – Je rappelle l’objet de l’amendement, qui est d’empêcher les parents adoptifs de faire une demande d’accès aux origines sans que l’enfant ait atteint l’âge de discernement et ait souhaité connaître ses origines.

M. le Ministre délégué – Chacun aura compris que le Gouvernement fait preuve d’une grande ouverture d’esprit sur cette question. Mais celle-ci est trop sensible pour que nous ne recueillions pas l’avis de l’ensemble des associations concernées.

Madame Jacquaint, cet amendement n’augmente pas les possibilités d’accès aux origines ; bien au contraire, il les diminue. Aujourd’hui, des parents peuvent, sans en informer leur enfant mineur, demander à connaître ses origines. Cet amendement vise à supprimer cette possibilité, jugée abusive lorsque l’enfant a, par exemple, moins de 2 ans et que ses parents agissent par simple curiosité. À l’inverse, il est possible qu’un adolescent adopté n’ait pas envie de demander l’accès à ses origines, mais que le pédopsychiatre conseille à ses parents de le faire, pour son bien. Pourquoi interdirions-nous alors à ces parents de faire une telle démarche ?

Il me semble donc nécessaire de travailler « dans la dentelle ». Certes, aller dans votre sens, mais prendre garde aux inconvénients possibles. C’est pourquoi j’appelle l’Assemblée à rejeter cet amendement.

Mme Henriette Martinez – J’avais cosigné l’amendement, et l’aurais volontiers repris avec Mme Adam, compte tenu du travail réalisé par les associations et du temps qui nous reste avant la fin de la législature. Cependant, je suis sensible à vos arguments, Monsieur le ministre. J’espère que le groupe de travail aboutira rapidement à des résultats. En outre, je continue de m’interroger sur la notion floue et imparfaite d’ « âge de discernement » : qui jugera si l’enfant l’a atteint ? Ses parents adoptifs ? Les personnes en charge du dossier ?

L'amendement 124, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Patricia Adam – L’amendement 217 et les suivants concernent les enfants confiés en kafala, régime en vigueur au Maroc et en Algérie. Environ 300 de ces enfants vivent aujourd’hui en France sans avoir aucun droit, ce qui pose de nombreux problèmes à leur famille.

Les tribunaux ont pris des positions différentes sur cette question. Certains avaient accepté une adoption simple, mais une décision récente de la Cour de cassation l’a rendue impossible. Il revient donc maintenant à l'Assemblée nationale de se saisir de cette question, afin qu’une solution soit trouvée. Il est en effet aberrant que des enfants ayant acquis la nationalité française ne se voient pas appliquer le droit français !

Depuis le début de nos travaux, nous insistons sur l’intérêt supérieur de l’enfant et nous rappelons les termes de la Convention internationale des droits de l’enfant, selon laquelle « chaque enfant a droit à une famille ». L’amendement 217 vise à supprimer le deuxième alinéa de l’article 370-3 du Code civil, qui crée une distinction entre les mineurs étrangers, selon qu’ils proviennent ou non d’un pays interdisant l’adoption.

Certes, des magistrats ont émis des réserves, tout comme le Quai d’Orsay. Pourtant, il ne s’agit pas d’une remise en cause de la kafala : l’Algérie, comme le Maroc, sont libres de l’appliquer sur leur territoire. Mais il nous semble impensable d’accueillir en France des enfants sans statut. Par ailleurs, la Belgique a récemment délibéré sur ce point et, à ma connaissance, le nombre d’enfants accueillis dans des familles belges n’a pas diminué. Enfin, cela ne concerne que 300 enfants.

Or, certains de ces enfants ne bénéficient même pas de la sécurité sociale, et vous imaginez sans peine tous les problèmes qui se posent au quotidien, notamment s’ils doivent sortir du territoire national… Les familles concernées ne peuvent pas mener une vie normale.

Mme la Rapporteure – La commission a rejeté l’amendement 217, le trouvant « jusqu’au-boutiste », mais elle est favorable au second amendement déposé par Mme Adam, le 218, similaire à l’amendement 274 adopté par la commission.

Aux termes de l’article 370-3 du Code civil, l’adoption d’un mineur étranger ne peut être prononcée si elle est exclue par la loi personnelle qui lui est applicable, à moins que l’enfant soit né et réside en France. Or, la loi coranique prohibe l’adoption plénière, au motif qu’elle gomme totalement l’origine des enfants concernés : toute référence aux parents biologiques devient impossible, ce que l’islam rejette – un mineur reste toujours l’enfant de ses parents biologiques même s’il est élevé par d’autres personnes.

Le principe posé par cet article du code civil résulte de nos engagements internationaux, qui nous imposent de respecter la loi personnelle des ressortissants nés dans d’autres pays. Au demeurant, la même solution est applicable à la polygamie : quand on a épousé plusieurs femmes dans son pays, on garde en France un lien avec elles, même s’il est interdit chez nous de se marier à plus d’une personne.

Nous devons donc repousser l’amendement 217, inacceptable pour les pays étrangers qui appliquent la kafala, le Maroc ou l’Algérie par exemple, puisqu’il tend à autoriser l’adoption plénière des enfants. En revanche, l’amendement de repli permettrait une adoption simple, à condition que les conditions d’abandon posées par la loi française sont remplies. Ce dernier type d’adoption sécurise la situation du mineur, qui devient juridiquement l’enfant des parents qui l’élèvent, sans gommer la filiation d’origine – le mineur garde en effet son état civil initial –, de sorte que cette solution pourrait être acceptée par les pays de droit coranique.

Il reste que cet amendement de repli pose d’autres problèmes, mais nous y viendrons bientôt…

M. le Ministre délégué – Je suis heureux que nous abordions ce sujet, mais il est étranger au texte dont nous discutons.

Mon avis défavorable est également motivé par les raisons que vient d’exposer Mme Pecresse : la France a souscrit des engagements internationaux, qu’il s’agisse de la convention internationale sur les droits de l’enfant ou de la convention internationale sur l’adoption. Ces textes ne présentent pas que des avantages, mais ils nous engagent. Ne remettons en cause la signature de la France ! Nous devons respecter nos obligations, qui sont très claires : on ne peut adopter en France des enfants que si la loi de leur pays d’origine le permet.

Je comprends le souci de clarifier la situation juridique des enfants concernés, quel que soit d’ailleurs leur nombre. Mais le Maroc et l’Algérie, qui sont de grands pays amis de la France, seraient très surpris que nous adoptions une législation contraire à nos relations diplomatiques.

Quel serait par ailleurs l’effet de cette nouvelle législation ? Si nous modifions notre loi, ces pays ne toucheront pas à la leur… Qu’il s’agisse d’une adoption simple ou plénière, nous reconnaissons une nouvelle filiation, définitive dans le premier cas, et temporaire dans le second, mais assortie des mêmes conséquences en matière de patrimoine et d’état civil. Nous nous trouverions face à des effets contraires en droit français et en droit algérien ou marocain.

Mme Patricia Adam – Et alors ?

M. le Ministre délégué – Quid de l’héritage ? des relations avec les frères et les sœurs ? Nous avons encore bien du travail à faire, et je propose de nous y atteler ensemble : même si nous n’avons pas le temps d’aboutir avant la fin de cette législature, toute avancée sera utile à ceux qui nous succéderont.

Nous devons commencer par évaluer avec exactitude les difficultés auxquelles se heurtent les familles concernées. S’agissant de la sécurité sociale, il existe déjà des réponses, Madame Adam : les organismes sociaux prennent en considération la charge effective des enfants, et toutes les instructions ont été données pour que les mineurs concernés soient couverts par la sécurité sociale.

Il me semblerait préférable d’aborder les difficultés les unes après les autres, sans adopter une législation d’ensemble qui contreviendrait à la signature de la France. N’entrons pas dans un conflit entre les lois de notre pays et celles de nos voisins, ni entre nos engagements internationaux et notre loi interne.

Par conséquent, avis défavorable sur cet amendement, mais je ne suis pas fermé à un travail commun sur cette question en vue de faciliter la vie des familles concernées.

M. Warsmann remplace Mme Mignon au fauteuil présidentiel.
PRÉSIDENCE de M. Jean-Luc WARSMANN
vice-président

Mme Muguette Jacquaint – Anticipant un peu sur ce débat, j’avais déposé hier un amendement relatif aux enfants vivant sous le régime de la kafala. Ce projet concernant l’intérêt supérieur des enfants, nous devons nous pencher aussi sur le cas de ces trois cents enfants. Ils n’ont aucun droit ! N’est-ce pas la première des violences ?

Le ministre prétend que l’adoption plénière et l’adoption simple poseraient les mêmes problèmes, mais une telle réponse est insuffisante : je doute que la situation actuelle soit dans l’intérêt des enfants… On parle beaucoup d’intégration, mais il existe des enfants de nationalité française qui n’ont aucun droit. Cela est inacceptable !

Je me rallie donc à l’amendement de repli – sans être « jusqu’au-boutiste », il apporterait une première réponse aux problèmes que nous connaissons.

Mme Patricia Adam – Je retire l’amendement 217 au profit de l’amendement de repli.

M. le ministre nous dit que cela nuirait aux relations diplomatiques de notre pays avec l’Algérie et le Maroc, mais le premier coup de canif porté à ces relations n’est-il pas d’avoir autorisé ces enfants à entrer sur le territoire français ? C’est en parfaite connaissance de notre droit que l’Algérie et le Maroc ont accepté qu’ils y soient accueillis. La Suisse permet que les enfants algériens ou marocains soient adoptés conformément à sa propre législation, et cela n’empêche en rien l’Algérie et le Maroc de continuer à confier des enfants à des familles suisses. Il en va de même en Espagne où seule existe l’adoption plénière. La Belgique elle aussi vient de modifier sa législation en ce sens.

Trêve donc des faux-semblants ! Ce n’est pas une question diplomatique. Ce qu’ont fait des pays voisins, notre pays peut le faire.

L'amendement 217 est retiré.

M. le Président – Les amendements 218 et 274 ont donc été défendus.

Mme la Rapporteure – Un mot tout de même. La kafala de droit islamique permet le placement d’un enfant dans une famille qui n’est pas la sienne par le sang mais qui s’engage à l’élever comme le sien. Elle ne crée pas de lien de filiation, même si elle permet de transmettre à l’enfant une partie des biens de la famille qui l’a recueilli, voire son nom. Dans la majorité des cas, c’est par décision de justice de l’État d’origine de l’enfant que celui-ci est confié en kafala à une famille digne de confiance, le juge vérifiant que l’enfant concerné est sans filiation ou a été abandonné par sa mère – il n’a pas à avoir été abandonné par ses deux parents, ce qui peut être source de complexité.

Les pays de droit coranique n’interdisent pas toute forme d’adoption, mais simplement de créer un lien de filiation qui ait les mêmes effets que la filiation par le sang. Si une filiation élective ne peut se substituer à la filiation biologique, celle-ci fût-elle inconnue, c’est pour assurer le respect absolu de l’interdiction de l’inceste.

Notre amendement 274 permettrait aux enfants originaires de pays de droit coranique, confiés en kafala à des ressortissants français, de faire l’objet d’une adoption simple si le juge français constate que les conditions requises pour celle-ci sont remplies. Il s’agit avant tout de donner un statut juridique de droit français à des enfants qui ne jouissent actuellement d’aucune protection dans notre pays au regard de notre droit. Les familles d’accueil de ces enfants rencontrent au quotidien de multiples difficultés avec nos administrations, qui ne reconnaissent pas la kafala et ne peuvent pas deviner que celle-ci confère l’autorité parentale et que, contrairement aux dispositifs qui en sont proches comme la tutelle ou la délégation d’autorité parentale, elle peut emporter des effets en droit civil, par exemple en matière de nom ou de succession.

La loi du 26 novembre 2003 sur l’immigration a aggravé la situation des enfants concernés, puisqu’au contraire des enfants adoptés en la forme simple, ils ne peuvent plus demander la nationalité française sauf s’ils ont été recueillis depuis cinq ans en France et élevés depuis lors par une personne de nationalité française. Je le souligne donc ici, la kafala n’est pas source d’immigration.

La solution que nous proposons permettra au juge français de vérifier si les conditions d’une adoption simple sont bien réunies – en repérant les cas éventuels où la kafala serait détournée à des fins d’immigration –, ainsi que si la famille d’accueil est en mesure d’en assurer l’éducation, comme lors des regroupements familiaux. L’adoption simple n’est contraire ni à la lettre ni à l’esprit de la loi personnelle des enfants originaires de pays de droit coranique dans la mesure où en droit français, l’adoption simple crée un lien de filiation additif, permanent mais révocable, qui ne se substitue pas à la filiation biologique.

M. le Ministre délégué – Ce qui est vrai pour l’adoption plénière vaut également pour l’adoption simple. L’adoption de ces deux amendements contreviendrait aux engagements internationaux pris par la France en matière de droits de l’enfant et d’adoption.

Votre proposition n’a rien à voir avec la loi belge. Celle-ci ne rend nullement possible l’adoption simple pour les enfants recueillis sous le régime de la kafala. Elle pose le principe d’une coopération entre la Belgique et le pays d’origine de l’enfant pour vérifier que les familles adoptives remplissent les conditions requises pour l’adoption ; que l’enfant concerné est orphelin ou judiciairement abandonné, selon les procédures prévues dans son pays d’origine ; que les candidats à l’adoption ont bien obtenu une décision de l’autorité compétente de l’État d’origine leur confiant la tutelle de l’enfant. L’apparentement de l’enfant, c’est-à-dire le choix d’une famille, s’effectue par le biais de l’autorité compétente du pays d’origine après envoi d’un rapport sur l’enfant à l’autorité centrale belge, aucun contact entre l’enfant et les candidats à son adoption n’étant autorisé. C’est une fois seulement que les autorités des deux pays ont donné leur accord par écrit, que l’enfant peut être envoyé en Belgique. La procédure passe toujours par l’accord de l’État d’origine et exige qu’aucun lien de filiation ne puisse être reconnu dans celui-ci. En l’espèce, la Belgique respecte donc parfaitement les conventions internationales qu’elle a signées. La France ne peut faire autrement.

Le Garde des Sceaux, avec qui je m’en suis entretenu, a accepté de mettre en place, dès la semaine prochaine, un groupe de travail pour élaborer les mesures – non nécessairement législatives –, qui permettraient dans l’immédiat de faciliter la vie des enfants concernés, et examiner comment transposer dans notre droit les dispositions prises par la Belgique en vue de régler le problème de ces enfants sans contrevenir à nos engagements internationaux.

Au bénéfice de cet engagement ferme du Gouvernement, j’invite les auteures de ces amendements à les retirer.

Mme Patricia Adam – Un engagement ferme de constituer un groupe de travail, soit ! Mais depuis le début de la législature, on nous répond la même chose sur cette question, déjà abordée à plusieurs reprises. Le problème est connu, de même que les positions de chacun. Il a été décortiqué au sein de la mission d’information sur la famille. Il n’y a plus besoin de concertation.

Vous avez parlé de la Belgique, Monsieur le ministre. Parlons donc de l’Espagne et de la Suisse qui appliquent tout simplement leur droit en matière d’adoption, ce qui n’empêche pas l’Algérie et le Maroc de continuer à confier des enfants à des familles espagnoles et suisses. Régler la situation de ces enfants en France n’est qu’une question de volonté politique.

Mme la Rapporteure – Nous avons beaucoup avancé sur la question de la kafala. Nous sommes tous d’accord sur la nécessité de sécuriser la situation des enfants recueillis sous ce régime, qui sont aujourd’hui sans filiation et n’ont pas la possibilité d’acquérir la nationalité française, alors même qu’ils sont élevés sur notre sol et ont vocation à y grandir.

Il est toutefois des arguments du ministre auxquels je suis sensible. Tout d’abord, la loi belge est beaucoup plus ambitieuse que notre amendement qui se voulait surtout un coup de poing sur la table. Il serait bien entendu préférable, mais c’est difficile dans les derniers mois de la législature, d’adopter une loi semblable à la loi belge, qui respecte les engagements internationaux pris par notre pays. Ensuite, il faut veiller à ce que la kafala ne se transforme pas en une voie de regroupement familial supplémentaire non souhaité. Elle est en effet plus large que l’adoption simple. Notre amendement, très direct, pourrait présenter un risque…

M. Lilian Zanchi – Il exprime une volonté politique.

Mme la Rapporteure – En effet. Pour ma part, prenant acte de l’engagement du ministre, je le retire. Je souhaite que le groupe de travail aboutisse à des propositions permettant de régler définitivement le problème. Permettez-moi de dire cependant combien je déplore que le ministère des Affaires étrangères, que nous avons interrogé à plusieurs reprises sur ces questions, ne nous ait jamais répondu. Mais je fais confiance au ministre de la famille pour sécuriser la situation de ces enfants.

L’amendement 274 est retiré.
L'amendement 218, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Patricia Adam – Il est regrettable que cet amendement ait été repoussé, à une voix près. Les familles s’en souviendront. Pourtant, un enfant est toujours un enfant, quelle que soit son origine ou sa couleur…

Mme la Rapporteure – Ce n’est pas la question.

Mme Patricia Adam – J’ai tout de même entendu des choses qui m’ont choquée.

Notre amendement 219, qui concerne les mêmes enfants, vise le cas où ceux-ci ont acquis la nationalité française. Nous demandons qu’ils aient alors les mêmes droits que n’importe quel autre enfant, ce qui n’est actuellement pas le cas.

Mme la Rapporteure – Avis défavorable, par cohérence avec le rejet du précédent amendement.

M. le Ministre délégué – Avis défavorable, car on ne doit pas pouvoir contourner les règles de l’acquisition de la nationalité française, notamment la durée de résidence de cinq ans.

Mme Patricia Adam – Ce n’est pas cela !

L'amendement 219, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Patricia Adam – Conformément à la jurisprudence du Conseil d’État, qui fait référence à la convention internationale des droits de l’enfant, notre amendement 220 tend à ce que les enfants régulièrement recueillis, selon une décision de kafala judiciaire, par des Français, bénéficient des dispositions relatives au regroupement familial.

Mme la Rapporteure – Avis défavorable par cohérence, pour que l’ensemble de la kafala soit traité dans un même texte.

M. le Ministre délégué – Je suis opposé à ce qu’une kafala entraîne automatiquement la délivrance d’un titre de séjour. Il y a en cette matière de très nombreuses fraudes. La solution actuelle qui consiste à accorder le visa ou le titre de séjour dans les cas particuliers où l’intérêt supérieur de l’enfant le commande est équilibrée et ne doit pas être remise en cause.

Mme Patricia Adam – Honteux !

M. Lilian Zanchi – Le ministre a parlé tout à l’heure de « petits problèmes » qui pourraient être réglés par ailleurs. On voit bien ici que nous ne parlons pas de petits problèmes, mais bien de questions fondamentales, telles que le regroupement familial ou l’acquisition de la nationalité française. Je constate aussi que chaque fois que nous voulons enrichir le projet de loi, le ministre nous renvoie à des groupes de travail ou des commissions... Ce projet a pourtant été précédé de plus d’une année de concertation avec les associations et les professionnels. J’ai d’ailleurs participé à l’une de ces journées, dans le Rhône. C’est mépriser le travail déjà accompli que de vouloir renvoyer à d’autres l’approfondissement de certains sujets.

L'amendement 220, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Patricia Adam – L’amendement 221 est défendu.

L'amendement 221, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Art. 5

M. François Guillaume – Cet article dit que toute information sur un mineur en danger ou risquant de l’être doit être transmise au conseil général. Pourquoi pas ? Cela se pratique déjà dans un certain nombre de départements, où le conseil général est informé en même temps que l’autorité judiciaire. Mais si cette procédure est exclusive de toute autre, je ne suis pas sûr qu’elle constitue un réel progrès. Jusqu’ici, les hôpitaux ou les établissements de l’éducation nationale, par exemple, peuvent saisir directement le Parquet. Le projet prévoit que le signalement transite désormais par une cellule opérationnelle du conseil général, ce qui risque de retarder l’intervention des institutions compétentes. Ce retard serait préjudiciable à un mineur en danger ou à des tiers qu’il mettrait en danger. Or, nous sommes tous d’accord pour insister sur la nécessité d’un délai très court entre le délit commis par un mineur et la sanction. Sans cela, la sanction perd beaucoup de sa portée pédagogique et dissuasive.

J’aimerais donc savoir si la saisine directe de l’autorité judiciaire reste possible. J’espère que oui, car une perte de temps peut entraîner des drames.

M. le Ministre délégué – Votre question me permet de clarifier les choses. Oui, cent fois oui, en cas de danger pour un enfant, il faut saisir le juge. C’est une obligation qui ne pèse pas seulement sur les professionnels, mais sur chacun d’entre nous, et qui ne concerne pas que les enfants, mais toute personne dont la sécurité et l’intégrité sont menacées. Il s’agit là d’un impératif à la fois légal et moral.

L’idée est simplement de venir au secours des professionnels quand il y a un doute. Il peut arriver qu’un professeur de sport ou un maître d’école aient l’impression qu’un enfant est en souffrance, mais sans en être totalement sûrs. Ils peuvent alors hésiter à saisir le juge et à enclencher une procédure qui pourrait se révéler tragique pour la famille ; mais ils ne veulent pas non plus rester inertes. C’est pour eux qu’est prévue cette procédure de signalement à une cellule départementale composée d’experts expérimentés, qui pourront prendre, très rapidement, la bonne décision, y compris au vu d’informations acquises auprès d’autres professionnels sociaux.

Mme Muguette Jacquaint – L’article place sur le même plan « les personnes qui apportent leur concours à la politique de protection de l’enfance » et celles « qui mettent en œuvre la politique de protection de l’enfance ». S’il paraît logique que les premiers signalent dans les meilleurs délais au conseil général toute information préoccupante, dans la mesure où l’évaluation des situations de mineurs en danger ne relève pas de leur compétence, cette obligation ne paraît pas adaptée pour les seconds. Nous proposons donc, dans l’amendement 176, une rédaction plus conforme au respect des libertés individuelles et au respect du secret professionnel.

Mme la Rapporteure – La commission a rejeté cet amendement dans la mesure où l’objet même du projet de loi est de centraliser toutes les informations, quelle que soit leur origine.

L'amendement 176, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Henriette Martinez – À l’inverse de Mme Jacquaint, je considère que toutes les personnes qui concourent à la protection de l’enfance doivent transmettre le plus rapidement possible les informations dont elles disposent. Les procédures sont déjà complexes. Le mécanisme du signalement, notamment, va encore être ralenti avec la mise en place de la cellule, et la mise en commun et la vérification des informations prennent du temps. C’est pourquoi je propose, dans l’amendement 249, de remplacer l’expression « dans les meilleurs délais » par « sans délai ». On a déjà dit, hier, que ces termes ne voulaient pas dire grand-chose tant que le délai n’était pas défini avec précision, comme c’est le cas par exemple au Canada. En France, nous préférons laisser aux personnes compétentes la possibilité d’intervenir au mieux, au cas par cas. Mais, puisqu’il s’agit d’une information préoccupante sur la situation d’un mineur en danger, je crains que la notion de « meilleur délai », qui introduit une notion d’appréciation, soit trop imprécise. Il me semble que « sans délai » convient mieux aux situations d’urgence. Il ne faut pas oublier que dans les cas les plus graves, les jours sont comptés. Pendant le délai d’inertie qui suit tout signalement, durant lequel nous nous demandons quel comportement adopter, l’enfant reste en situation de danger. C’est pourquoi le président du conseil général doit être alerté sans délai.

Mme la Rapporteure – La commission a rejeté cet amendement, bien que sa rédaction soit proche de celle du projet de loi.

M. le Ministre délégué – Les arguments et la sensibilité de Mme Martinez m’ont convaincu. Avis favorable, étant entendu que l’expression « sans délai » ne signifie pas que les professionnels doivent saisir à tout bout de champ les services de l’aide sociale à l’enfant : c’est lorsqu’on est parvenu à une certitude qu’on ne doit pas laisser passer de temps.

L'amendement 249, mis aux voix, est adopté.

Mme Patricia Adam – L’amendement 61 concerne la notion d’information préoccupante que nous avons abordée hier. Il est défendu.

Mme la Rapporteure – Avis défavorable. Nous souhaitons que toutes les informations préoccupantes soient transmises.

M. le Ministre délégué – Même avis.

L'amendement 61, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Patricia Adam – L’amendement 77 est défendu.

L'amendement 77, repoussé par la commission et par le Gouvernement, n’est pas adopté.

Mme la Rapporteure – L’amendement 290 rectifie une erreur matérielle.

L'amendement 290, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme la Rapporteure – Les amendements 287 et 288 sont rédactionnels.

M. le Ministre délégué – Avis favorable.

L'amendement 287, mis aux voix, est adopté, de même que le 288.

Mme Patricia Adam – L’amendement 79 précise que les informations doivent également être communiquées au mineur, selon ses capacités de discernement. Il est très important que les enfants concernés par des mesures de protection puissent comprendre les décisions qui seront prises à leur endroit. Cela facilitera le travail éducatif par la suite.

Mme la Rapporteure – Avis défavorable. L’article prévoit déjà que le père, la mère, toute autre personne exerçant l’autorité parentale ou le tuteur se voient préalablement communiquer l’information, selon des modalités adaptées, sauf si c’est contraire à l’intérêt de l’enfant. Il y a des situations extrêmement délicates où l’information de l’enfant n’est pas souhaitable, par exemple en cas d’alcoolisme ou de toxicomanie des parents.

L'amendement 79, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Patricia Adam – L’amendement 74 est défendu.

L'amendement 74, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Patricia Adam – Mon amendement 63 est identique à l’amendement 14.

Mme la Rapporteure – Ils visent à ce que le département centralise les informations préoccupantes pour pouvoir faire la liaison entre l’éducation nationale, les hôpitaux et toutes les institutions concernées, par le biais des ordres départementaux.

M. le Ministre délégué – Sagesse.

Les amendements 14 et 63, mis aux voix, sont adoptés.

Mme Patricia Adam – L’amendement 64 est défendu.

L'amendement 64, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Patricia Adam – L’amendement 66 vise à remplacer les mots « cellule opérationnelle » par « dispositif départemental opérationnel ». Il faut laisser les départements s’organiser comme ils le veulent pour agir au mieux. Votre objectif est de créer un endroit identifié du public. Nous sommes d’accord, mais pour être efficace, on ne peut pas imposer la même organisation à un département de trois cent mille habitants et à un autre qui en compte plusieurs millions !

Mme la Rapporteure – Avis défavorable. Les cellules seront bien sûr différentes en fonction de la taille et des caractéristiques de chaque département, mais le terme même de « cellule » est important parce qu’il évoque une idée de lieu, ce qui n’est pas le cas d’un « dispositif ». Il est important que chacun connaisse ce lieu.

L'amendement 66, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme la Rapporteure – L’amendement 289 est rédactionnel.

L'amendement 289, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme Patricia Adam – L’amendement 65 est défendu.

L'amendement 65, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Claude Leteurtre – Cette cellule est une mesure bienvenue, qui permettra de récupérer l’information de manière intelligente et professionnelle. L’amendement 192 propose de mentionner les « partenaires institutionnels concernés », afin qu’il soit clair que tout le monde y participe. On sait la difficulté, au quotidien, de faire circuler l’information. Il faut donc reconnaître le rôle de ces partenaires.

Mme la Rapporteure – Avis défavorable. Votre souhait est légitime, mais il est satisfait par l’amendement précédent.

M. le Ministre délégué – Même avis.

L’amendement 192 est retiré.

Mme Patricia Adam – Les guides du signalement, dans les départements où ils existent, facilitent grandement la transmission des informations. Mais tous les départements n’en disposent pas – de même qu’on observe de fortes différences dans leur engagement pour la protection de l’enfance. L’amendement 67 propose d’obliger chaque département à établir un guide du signalement, sachant que des référentiels sont en cours d’élaboration au niveau national et qu’il faudra de toute façon en décliner certains points au niveau départemental.

Mme la Rapporteure – Avis défavorable. Il est préférable de s’en tenir au guide national proposé par le ministre.

M. le Président – Je ne suis d’ailleurs pas sûr que cette disposition soit d’ordre législatif.

Mme Patricia Adam – Pas plus que la précédente !

M. le Ministre délégué – Le Gouvernement n’est pas non plus favorable à cet amendement. Tous les guides qui ont déjà été élaborés par certains départements profitent aux autres. Le problème sera dorénavant d’harmoniser les pratiques et de diffuser les meilleures partout en France.

L'amendement 67, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Patricia Adam – L’amendement 68 est défendu.

Mme la Rapporteure – Avis défavorable. Il est déjà satisfait dans le texte du projet.

L'amendement 68, repoussé par le Gouvernement et mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Patricia Adam – L’amendement 225 est défendu.

L'amendement 225, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Claude Leteurtre – L’amendement 193 est défendu.

Mme Patricia Adam – L’amendement 75 est défendu.

Mme la Rapporteure – Avis défavorable à ces deux amendements, au profit du 15 rectifié de la commission. Il s’agit de définir trois cas dans lesquels le président du conseil général doit saisir directement la justice. D’abord, celui du mineur se trouvant dans une situation de danger grave et manifeste à laquelle les actions sociales du conseil général ne peuvent remédier – un enfant battu par exemple. Ensuite, celui du mineur en danger moins grave, mais pour lequel les actions sociales menées par le département n’ont pas permis de remédier à la situation. Enfin, le cas de mauvaise volonté de la famille – si elle refuse l’aide sociale par exemple.

M. le Ministre délégué – Le sujet, capital, est celui de la ligne de partage entre l’intervention obligée du juge et celle du traitement social. Je suis favorable à l’amendement 15 rectifié de votre rapporteure, qui peaufine le travail réalisé au Sénat et permet de distinguer nettement dans quels cas la justice doit obligatoirement être saisie. Défavorable aux amendements 193 et 75.

Les amendements 193 et 75 sont retirés.
L'amendement 15 rectifié, mis aux voix, est adopté.

Mme Patricia Adam – Par l’amendement 76, nous proposons la suppression de l’adverbe « manifestement » qui impose une recherche de preuves. La saisine du juge en sera facilitée et la charge de la preuve allégée pour le demandeur.

Mme la Rapporteure – Avis favorable car le terme est en effet superfétatoire.

L'amendement 76, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme la Rapporteure – L’amendement 275 est rédactionnel.

L'amendement 275, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme Patricia Adam – Pour permettre aux magistrats d’intervenir opportunément, il faut préciser dans quelles situations le président du conseil général saisit le procureur de la République. Il doit le faire en cas de difficultés éducatives graves. Tel est le sens de l’amendement 78.

Mme Henriette Martinez – L’amendement 248 a le même objet. Les juges demandent avec insistance à être informés des situations très dégradées pour intervenir en temps utile, dès que le constat est fait de difficultés éducatives graves. Procéder de la sorte permet de garantir la sécurité de l’enfant pendant que l’on s’emploie à remédier aux carences familiales.

Mme la Rapporteure – La commission a repoussé les amendements, qui brouilleraient les esprits. Les trois cas de saisine obligatoire du juge sont désormais définis et il n’y a pas lieu d’aller au-delà.

M. le Ministre délégué – Je partage ce point de vue. Si l’on commence à détailler quels intérêts des enfants sont compromis, il faudra en dresser la liste exhaustive. La formulation de l’article tel qu’il vient d’être amendé suffit, d’autant que l’article 375 du code civil précise les conditions dans lesquelles des mesures d'assistance éducative peuvent être ordonnées par la justice. Compliquer la lecture du texte ne serait pas favorable à l’intérêt de l’enfant. Je comprends la préoccupation qui s’exprime, mais j’espère vous avoir rassurées, et persuadées de retirer ces amendements.

Les amendements 78 et 248 sont retirés.

Mme Henriette Martinez – L’amendement 250 est défendu.

Mme la Rapporteure – Avis défavorable.

M. le Ministre délégué – Même avis.

L’amendement 250 est retiré.

Mme Patricia Adam – L’amendement 71 est défendu.

L'amendement 71, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Patricia Adam – Par l’amendement 80, nous proposons que préalablement à tout signalement direct au procureur de la République de la situation d’un mineur en danger, l’hôpital ou l’école avise le président du conseil général afin de s’assurer que la situation n’est pas déjà prise en charge par ses services. Ainsi renforce-t-on le principe de l’intervention en premier recours du président du conseil général.

Mme la Rapporteure – Avis défavorable car il est prévu dans l’article que copie du signalement doit être adressée au président du conseil général.

M. le Ministre délégué – Même avis.

L'amendement 80, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme la Rapporteure – L’amendement 276 est rédactionnel.

L'amendement 276, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme Patricia Adam – L’amendement 69 est défendu.

Mme la Rapporteure – L’amendement 16 rectifié a pour objet de rappeler que les saisines directes du parquet ne sont prévues que dans les cas d’une particulière gravité, tout en supprimant le terme « urgence » qui figurait dans la rédaction initiale. L’article L. 375-3 du code civil relatif aux pouvoirs du procureur de la République en matière d’assistance éducative prévoit déjà son intervention directe en cas d’urgence.

M. le Ministre délégué – Avis favorable à l’amendement 16 rectifié.

L’amendement 69 est retiré.
L'amendement 16 rectifié, mis aux voix, est adopté.

Mme la Rapporteure – Une personne étrangère aux services départementaux de protection de l’enfance – par exemple un enseignant, un médecin, un voisin – qui avise le procureur de la République de la situation d’un mineur en danger doit être tenu informée de la décision prise par la justice. Tel est l’objet de l’amendement 17 rectifié.

L'amendement 17 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme Patricia Adam – L’amendement 72 rectifié fixe le délai dans lequel l’information sur les suites données à un signalement doit avoir lieu.

L'amendement 72 rectifié, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Patricia Adam – L’amendement 73 est défendu.

L'amendement 73, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.
L'article 5, modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 5

Mme Patricia Adam – L’amendement 226 tend à élargir l’action de l’État en direction des mineurs étrangers isolés, aux côtés des conseils généraux.

Mme la Rapporteure – La commission a repoussé l’amendement, non pour une question de fond mais parce que le ministre a pris l’engagement que le Gouvernement travaillerait à ce partage de compétences.

L'amendement 226, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

ART. 5 bis

Mme la Rapporteure – Les amendements 277 et 278 sont rédactionnels.

Les amendements 277 et 278, acceptés par le Gouvernement, sont adoptés.
L'article 5 bis ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 5 bis

Mme Patricia Adam – L’amendement 227 tend à régler la situation des mineurs âgés de seize ans révolus et qui ne peuvent prétendre au statut de réfugié. Actuellement, à dix-huit ans, ils ne peuvent prétendre à aucun statut particulier alors même qu’ils ont bénéficié d’une prise en charge au nom de la protection de l’enfance.

Mme la Rapporteure – C’est une question très délicate que celle des mineurs arrivés en France âgés de plus de 16 ans et passibles, à dix-huit ans, d’une mesure de reconduite à la frontière. Toutefois, la commission a exprimé un avis défavorable à l’amendement, car il ne lui a pas paru souhaitable de modifier une disposition adoptée le 24 juillet 2006.

M. le Ministre délégué – Avis défavorable.

L'amendement 227, mis aux voix, n'est pas adopté.

Art. 6

Mme la Rapporteure – L’amendement 18 est rédactionnel.

L'amendement 18, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme Muguette Jacquaint – Si les mesures d’assistance éducative peuvent être ordonnées par justice à la requête des parents, l’article 375 du code civil ne précise pas si la saisine du juge des enfants est possible pour les parents qui ne seraient plus investis de l’autorité parentale, comme, par exemple, les parents biologiques d’un enfant adopté. Nous souhaitons donc préciser, par l’amendement 148 rectifié, que la seule condition de la saisine soit que la filiation de l’enfant est établie, pour qu’un père ou une mère déchue de ses droits puisse saisir le juge. Cette proposition est conforme à l’esprit de la loi du 4 juin 1970, qui a posé le principe que l’intérêt de l’enfant domine l’institution de l’autorité parentale.

Mme la Rapporteure – Avis défavorable. L’objet de l’article n’est pas de réécrire l’article 375 du code civil, mais de renforcer la coordination des interventions du conseil général et de l’autorité judiciaire. Ce n’est pas le cadre pour traiter en détail des questions de filiation.

Mme Muguette Jacquaint – Je retire l’amendement.

L'amendement 148 rectifié est retiré.

Mme Muguette Jacquaint – L’amendement 183 rectifié étend la saisine du juge des enfants au partenaire du parent qui lui est lié par un PACS. Partageant la vie du parent, le partenaire pacsé est à même de demander qu’une mesure éducative soit prise.

Mme la Rapporteure – Avis défavorable, pour les mêmes raisons que précédemment.

L'amendement 183 rectifié, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Muguette Jacquaint – L’article 375 du code civil dispose : « Si la santé, la sécurité ou la moralité d’un mineur non émancipé sont en danger, ou si les conditions de son éducation sont gravement compromises, des mesures d’assistance éducative peuvent être ordonnées par justice à la requête des père et mère conjointement, ou de l’un d’eux, de la personne ou du service à qui l’enfant a été confié ». L’expression « personne ou service à qui l’enfant a été confié » est ambiguë. La législation antérieure l’était déjà, puisqu’elle ne se référait qu’au « gardien ». La Cour de cassation avait d’abord, par des arrêts de 1966, 1968 et 1976, donné de la notion une interprétation stricte, n’accordant à la requête du gardien de fait que la valeur d’un avis, permettant au procureur de la République de saisir le juge des enfants ou à ce dernier de se saisir lui-même. Par la suite, en 1978 et 1979, la Cour a estimé que l’article 375 n’exigeait pas que le gardien soit légalement ou judiciairement investi du droit de garde. Ce renversement de jurisprudence ayant entraîné une certaine confusion, nous proposons de préciser, avec l’amendement 147 rectifié, que la possibilité de saisine s’étend au gardien de fait : concubin, second conjoint, parents nourriciers…

Mme la Rapporteure – Que Mme Jacquaint se rassure : les gardiens de fait comme les gardiens de droit peuvent saisir le juge dans le cadre de l’article 375 du code civil. Avis défavorable.

L'amendement 147 rectifié, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Patricia Adam – L’amendement 223, qui fait suite aux travaux de la commission d’enquête parlementaire sur les sectes, permet aux grands-parents de saisir directement le juge des enfants.

M. Georges Fenech – Je regrette que l’amendement 126, qui a le même objet, ait été rejeté par la commission des affaires sociales. Il ne vise pas spécifiquement les phénomènes sectaires ; c’est un texte général, pendant de l’article 371-4 du code civil selon lequel l’enfant a le droit d’entretenir des relations avec ses ascendants. Il permet aux grands-parents de saisir directement le juge des enfants. C’est une mesure qui a été fortement suggérée à la commission d’enquête par le procureur général et le juge des enfants que nous avons entendus. Lorsque des parents, qui appartiennent à une communauté sectaire, envoient leurs enfants dans un ashram en Inde, il manque dans notre droit la possibilité pour les grands-parents d’en appeler au juge. Certes, ils peuvent saisir le procureur de la République, qui pourra, à son tour, confier l’affaire au juge ; mais pourquoi ne pas leur permettre de saisir celui-ci eux-mêmes ? Cette proposition a été citée à l’unanimité par la commission d’enquête sur les sectes.

Mme la Rapporteure – Si le but poursuivi est légitime, lorsque des parents confinent leurs enfants dans des sectes, la rédaction trop générale des amendements, qui ne mentionnent pas le motif de dérive sectaire, donnerait la possibilité à tous les grands-parents de saisir le juge, alors même que notre société se caractérise par la recrudescence des conflits intrafamiliaux et une judiciarisation croissante. La mission famille a souligné la nécessité, dans notre mission de législateur, de pacifier ces conflits. Beaucoup de recompositions familiales se passent mal, et des grands-parents accusent parfois à tort et à travers les parents de maltraitance. La règle doit rester la saisine du procureur de la République, qui peut seul apprécier le bien-fondé des plaintes.

M. le Ministre délégué – Du fait de leur généralité, ces amendements vont en effet très au-delà des intentions exprimées par leurs auteurs. Vous venez d’adopter des dispositions qui rééquilibrent les interventions entre l’autorité judiciaire et l’action sociale à l’enfance en faveur de cette dernière. S’il est indispensable d’agir lorsqu’un enfant est en danger, à cause d’une secte ou d’autre chose, rien d’empêche les grands-parents, comme d’autres membres de la famille ou même les voisins, de saisir le procureur de la République, dont le filtrage me paraît garant du bon fonctionnement de notre ordre juridictionnel. Combien de grands-parents, en conflit avec leur nouveau gendre ou leur ancienne belle-fille, ne seront-ils pas tentés de saisir le juge et de l’instrumentaliser, au fond, dans des conflits intrafamiliaux, si nous leur ouvrons cette possibilité ? Je suis pour la protection de l’enfance, mais aussi pour la paix des familles, et je vous demanderais donc de retirer ces amendements, car j’ai peur de cette possible instrumentalisation.

M. Alain Néri – On rencontre aujourd’hui des difficultés dans l’éducation des enfants, faute d’un maillon éducatif essentiel : les grands-parents. Les grands-parents, aujourd’hui, ne s’occupent plus des enfants. En effet, les familles sont éclatées, les lieux de résidence éloignés les uns des autres ou bien les grands-parents, encore jeunes, ont conservé une activité professionnelle. Bien souvent, les enfants ne bénéficient pas d’une éducation par la cellule familiale, car les grands-parents sont absents.

Ce texte est l’occasion de rappeler le rôle important que peuvent jouer les grands-parents. Mais le mieux est parfois l’ennemi du bien, et je suis sensible aux propos de Mme la rapporteure et de M. le ministre. Je propose donc à M. Fenech de sous-amender son amendement en précisant que les grands-parents peuvent saisir le juge des enfants dans le cas d’une dérive sectaire.

M. Georges Fenech – J’entends bien le souci de la commission et du ministre, mais le danger qu’ils semblent craindre existe déjà, dans la mesure où les grands-parents peuvent saisir le procureur, ou tout simplement écrire une lettre au juge des enfants, qui peut alors se saisir d’office. Peut-être craignez-vous d’ouvrir une brèche en inscrivant cette possibilité dans la loi ? Pour ma part, je ne crois pas que les grands-parents soient aussi procéduriers que vous ne le pensez.

Il faut aussi que la représentation nationale, une fois n’est pas coutume, fasse confiance aux magistrats. Le juge des enfants, saisi par des grands-parents, appréciera et pourra, en tout état de cause, classer la plainte. Prenons garde à ne pas nier le droit des grands-parents à être les protecteurs naturels de l’enfant lorsqu’il y a défaillance des parents. Compte tenu des milliers de situations créées par le phénomène sectaire, j’estime que le risque mérite d’être pris. Je ne retirerai donc pas cet amendement, adopté à l’unanimité par la commission d’enquête et suggéré par de très hauts magistrats, dont M. Viout, procureur général.

Mme la Rapporteure – L’idée qui sous-tend l’amendement de M. Fenech est bonne, dès lors que celui-ci ne concerne que les dérives sectaires. Il nous faudrait donc trouver une rédaction qui réduise sa portée. Ce serait en effet une erreur que de laisser accroire que l'Assemblée nationale souhaite que les ascendants puissent se mêler de l’exercice de l’autorité parentale.

Mme Patricia Adam – Nos collègues ont beaucoup travaillé sur cette question des sectes et cette proposition a été mûrement réfléchie. Je suggère une suspension de séance qui nous laisserait le temps de la réflexion.

Mme Henriette Martinez – Nous parlons de deux problèmes différents. Le premier est celui des relations entre grands-parents et petits-enfants. Nous avons tous été interpellés dans nos permanences par des grands-parents privés de leurs petits-enfants, par des petits-enfants réclamant leurs grands-parents, mais aussi par des parents interdisant à des grands-parents inaptes, parfois pervers, d’entretenir des relations avec leurs petits-enfants. Il faudra, pour ces affaires mettant en cause l’autorité parentale, trouver un moyen terme. Celui-ci réside à mes yeux dans la saisine du procureur de la République, que je conseille bien souvent aux grands parents, et j’ai constaté qu’ils obtiennent gain de cause. Je rends d’ailleurs hommage, cher collègue, à ces magistrats, envers lesquels je n’ai aucune attitude critique.

S’agissant des sectes, c’est plus délicat. Je voterais votre amendement s’il précisait qu’il vise les dérives sectaires. Je rappelle que nous avons voté hier une disposition très importante, qui définit l’intérêt supérieur de l’enfant comme la satisfaction, entre autres, de ses besoins sociaux. Or un enfant placé dans une secte est coupé de toute relation sociale avec le monde extérieur. Nous avons donc là un nouvel outil pour les ascendants qui voudraient sortir un enfant d’une secte.

M. Claude Leteurtre – J’avais déposé avec M. Hunault un amendement 194 qui procède de la même logique. Mme Martinez a rappelé fort justement le progrès que constitue la définition de l’intérêt supérieur de l’enfant. Cependant, il faut aussi dans ce texte de loi rappeler le rôle des grands-parents, qui ont une fonction d’alerte. Monsieur Fenech, j’ai beaucoup travaillé avec des magistrats, et loin de moi l’idée de les critiquer. Je pense qu’il faut leur faire confiance, et c’est pourquoi j’estime que cet amendement est très important.

M. Georges Fenech – Madame Martinez, je ne me situe pas dans le cadre de l’article 374, relatif à l’autorité parentale, mais dans celui de l’article 375-1, relatif à l’enfance en danger. Monsieur Néri, je comprends que vous souhaitiez un sous-amendement. Mais il faudra alors définir ce qu’est une « dérive sectaire », lorsqu’il n’existe pas – Dieu soit loué, si j’ose dire – de définition juridique de la « secte ». Le mieux serait de faire confiance aux magistrats et de faire des grands-parents un moyen d’alerte lorsqu’il y danger, en espérant que des grands-parents procéduriers ne chercheront pas à détourner ce dispositif.

Mme la Rapporteure – Lors de la suspension de séance, nous pourrions nous concerter autour d’une rédaction qui préciserait : « en cas de danger grave et manifeste pour l’enfant, lié à l’appartenance de l’un ou l’autre de ses parents à un mouvement sectaire, ses ascendants peuvent saisir directement le juge des enfants ».

M. le Ministre délégué – Nous sommes tous d’accord pour vouloir protéger les enfants victimes de l’appartenance de leurs parents à une secte. Mais quelle est la démarche la plus efficace ? Si les grands-parents saisissent le juge des enfants, celui-ci peut seulement ordonner une mesure d’assistance éducative ou le placement dans un établissement ou une famille d’accueil. Il n’a pas compétence pour déclencher une enquête en vue de constater d’éventuels crimes ou délits, car il ne peut intervenir qu’au plan civil. Le procureur de la République dispose en revanche de tout l’éventail des possibilités : en dehors des simples conflits internes aux familles – hypothèse que nous devons prendre au sérieux – il peut déclencher une action judiciaire contre les parents et décider, en présence d’un danger grave et imminent, de mesures destinées à protéger les enfants, y compris un placement auprès d’un établissement ou d’une famille d’accueil.

Par conséquent, il est préférable que ce soit le procureur qui soit saisi, et non le juge des enfants. Pour quelle raison donnerions-nous aux grands-parents une nouvelle possibilité d’action, moins efficace que celle qui leur est déjà ouverte ? Dernière question : pourquoi autoriser la saisine du juge des enfants en cas de dérive sectaire, et non en cas de viols, de sévices psychiques ou de brimades insupportables ?

Mme Patricia Adam – Parce que ces hypothèses relèvent du droit pénal…

M. le Ministre délégué – En application de l’article 375, elles peuvent conduire à un suivi des enfants et à une mesure de placement : il n’y a donc pas que la solution pénale… Sur le fond, pourquoi se limiter aux dérives sectaires ? Et je le répète : il est dans l’intérêt supérieur des mineurs d’en rester à la solution actuelle, le procureur disposant de plus de compétences que le juge des enfants.

Par conséquent, avis défavorable sur les amendements 223 et 126, mais aussi sur un éventuel sous-amendement de compromis, qui serait lui aussi insatisfaisant.

La séance, suspendue à 18 heures 35, est reprise à 18 heures 50.

Mme la Rapporteure – Je renonce à sous-amender l’amendement 126 : je ne crois pas que ce soit possible.

M. le Ministre délégué – J’ai mis à profit cette suspension de séance, opportunément demandée par le groupe socialiste (Sourires), pour m’entretenir avec le Garde des Sceaux. Le Gouvernement maintient sa position mais le Garde des Sceaux, qui reconnaît que les pratiques peuvent varier d’un TGI à l’autre, s’engage à adresser aux parquets une instruction demandant aux procureurs de saisir plus systématiquement, s’il y a lieu bien sûr, et en jouant son rôle de filtrage, le juge des enfants lorsqu’ils sont saisis par les grands-parents. Au bénéfice de cet engagement, je vous invite à retirer ces deux amendements, dont l’objectif louable est largement partagé, mais qui posent des problèmes juridiques.

M. Serge Blisko – Je prends acte de l’engagement du Garde des Sceaux d’adresser une instruction aux parquets généraux et aux procureurs. Sans être membre de la secte de ceux qui vénèrent les juges (Sourires), j’aurais préféré que l’on ne surcharge pas une nouvelle fois les parquets. Il n’est pas question d’intenter quelque procès que ce soit aux procureurs mais force est de constater qu’en l’absence de crime ou délit, il leur est difficile de pénétrer des relations familiales complexes et délicates, où chacune des générations peut être tentée par des manipulations. Si la Chancellerie s’engage à sensibiliser les parquets à ces questions, nous pouvons retirer l’amendement 223. Les meilleurs spécialistes des relations intra-familiales, surtout lorsqu’elles sont délicates, demeurent les juges des enfants. Les parquets doivent prendre l’habitude de collaborer davantage avec eux, même en l’absence de faits pénalement caractérisés.

M. Georges Fenech – Notre préoccupation était double : protéger les mineurs en danger et faire en sorte que la voix des grands-parents puisse être entendue par l’autorité judiciaire. La proposition faite y répond. Nous prenons acte de l’engagement du Garde des sceaux à adresser une instruction à tous les procureurs – lesquels peuvent d’ailleurs, en cas d’urgence, prendre des mesures d’assistance éducative en lieu et place du juge des enfants – pour qu’ils opèrent les vérifications nécessaires lorsqu’ils seront saisis par les grands-parents, en jouant bien sûr un rôle de filtre.

Les amendements 223 et 126 sont retirés.

Mme Muguette Jacquaint – Les mesures d’assistance éducative peuvent être ordonnées par la justice sur requête tant des personnes physiques exerçant l’autorité parentale, que des institutions connaissant la situation de l’enfant. Or, le directeur départemental de la solidarité et de l’action sociale, de par ses responsabilités mêmes, a à connaître de cette situation. Il est donc regrettable qu’il ne figure pas parmi les personnes susceptibles de saisir le juge des enfants pour la prise de mesures éducatives. Notre amendement 184 rectifié tend à remédier à cette lacune.

Mme la Rapporteure – Cet amendement irait à l’encontre de l’objectif du texte, qui est de confier au conseil général compétence en matière de protection de l’enfance. La commission a donc émis un avis défavorable.

M. le Ministre délégué – Même avis.

L'amendement 184 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Muguette Jacquaint – L'article 6 remet en cause ce qui fait la spécificité de la protection de l'enfance, organisée actuellement à la fois autour de l'autorité administrative et de l'autorité judiciaire. Le recours à la seconde inscrit la démarche de protection dans un cadre juridique qui garantit l'exercice des libertés individuelles, le débat contradictoire et autres. Ces garanties sont nécessaires, en particulier s'il faut envisager un aménagement de l'autorité parentale. L'autorité administrative s'inscrit quant à elle dans des actions de prévention des risques et de soutien à la parentalité qui, le plus souvent, sont menées avec le consentement des familles. Notre amendement 178 rectifié a pour objet de supprimer les alinéas 3 et 4 qui remettent en cause cet équilibre.

Mme la Rapporteure – Nous ne faisons pas la même lecture de ces alinéas. Il n’y a pas de mainmise d’une autorité sur l’autre, il s’agit simplement d’assurer un contrôle du respect des procédures suivies.

M. le Ministre délégué – Même avis.

L'amendement 178 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Henriette Martinez – Mon amendement 251 précise que les mesures d’assistance éducative doivent être décidées en prenant en compte les besoins spécifiques de l’enfant, en fonction de son âge et de sa nécessaire protection.

Mme la Rapporteure – La commission l’a repoussé, car, comme dit M. Fenech, il faut faire confiance au juge. Son rôle est précisément de prendre en compte les besoins de l’enfant.

M. le Ministre délégué – Tous les éléments que Mme Martinez souhaite voir pris en compte le seront bien. Le texte le permet. C’est pourquoi je l’invite à retirer son amendement.

Mme Henriette Martinez – Étant donné que vous avez accepté que soit défini l’intérêt de l’enfant à l’article premier, je veux bien le retirer.

L’amendement 251 est retiré.

Mme Patricia Adam – Notre amendement 81 est un peu long, mais chaque mot a son importance. Il vise les cas, rares mais néanmoins régulièrement rencontrés par les professionnels, de parents présentant une altération importante de leur capacité de discernement, du fait par exemple d’une maladie psychiatrique ou d’une déficience intellectuelle. Nous proposons qu’il soit possible dans ce cas d’ordonner une mesure de placement pour une durée supérieure à deux ans. Sinon, il y a comme une épée de Damoclès au-dessus de la tête de l’enfant, qui est convoqué avec ses parents tous les deux ans et qui pense donc qu’il peut, tous les deux ans, être rendu à son père ou à sa mère. Cela crée pour lui beaucoup d’insécurité, je dirais même que cela l’empêche complètement de se projeter dans l’avenir et d’avoir une image parentale stable.

Mme Henriette Martinez – Mon amendement 252 a le même objet et je partage totalement l’analyse de Mme Adam. Il s’agit de permettre à un enfant placé de construire un projet de vie. Un enfant qui voit son placement remis en cause tous les deux ans vit dans l’instabilité, qu’il redoute ou qu’il souhaite un retour dans sa famille biologique. Il faut donc que les placements puissent avoir une durée supérieure dans ces cas qui ne sont pas la majorité mais qui sont les plus lourds et les plus difficiles.

Prenons l’exemple d’un enfant dont les parents sont en prison pour dix ans. Pourquoi remettre en cause son placement tous les deux ans ? J’ai aussi l’exemple dans ma commune d’une jeune femme, qui souffre d’une maladie psychiatrique et dont les quatre enfants sont placés. Elle n’en est pas pour autant coupée, puisqu’ils lui rendent visite un week-end par mois, mais il est évident qu’elle ne pourra jamais assumer leur éducation. Néanmoins, tous les deux ans, elle espère qu’elle va les reprendre. Pourquoi l’entretenir dans cette illusion ?

Mme la Rapporteure – La commission a repoussé ces amendements, bien qu’elle soit sensible aux arguments de leurs auteurs et consciente que la remise en cause d’un placement tous les deux ans puisse être une souffrance tant pour l’enfant que pour ses parents d’accueil et ses parents légaux. Mais des parents présentant des difficultés relationnelles et éducatives graves, sévères et chroniques peuvent un jour en sortir. Une mère peut par exemple sortir de sa grave dépression nerveuse. Il me paraît donc gênant de parler de durée supérieure à deux ans sans fixer de limite maximale. Il faut aussi penser aux cas où les choses ne se passeraient pas très bien dans la famille d’accueil.

M. le Ministre délégué – Je salue la qualité de ce débat, qui se déroule dans un esprit de responsabilité partagé, et toujours dans l’optique de l’intérêt de l’enfant.

Il existe, en effet, des cas exceptionnels, très graves, dans lesquels l’espoir est ténu de voir les parents reprendre leur place – par exemple des affections psychiatriques très lourdes, et sans doute irréversibles. Je comprends donc très bien, dans ces situations tout à fait exceptionnelles, que vous vouliez épargner à l’enfant comme à la famille d’accueil l’incertitude, voire l’angoisse que constitue le rendez-vous obligatoire tous les deux ans. Mais je dois rappeler que cette règle des deux ans n’a pas toujours existé. Auparavant, le placement était prévu jusqu’à l’âge de la majorité, ce qui posait les difficultés exactement inverses : lorsque les parents redevenaient capables d’assumer leur place, il était très difficile de leur rendre l’enfant. Les conflits avec la famille d’accueil pouvaient être très aigus et le changement de situation pouvait entraîner des difficultés pour l’enfant et au sein de la famille d’accueil, qui considérait que le placement avait été effectué une bonne fois pour toutes.

Passer alternativement d’une de ces deux règles à l’autre ne serait pas de bonne législation. Certes, il faut tenir compte des situations exceptionnelles, mais avec suffisamment de prudence pour toujours permettre le retour de l‘enfant à ses parents. Peut-être serait-il possible non pas de supprimer entièrement le délai de deux ans, mais de l’allonger : le réexamen régulier de la situation des parents serait ainsi assuré. Vous vous focalisez sur des situations où aucune évolution n’a eu lieu, mais ce n’est pas une raison pour être sûr qu’elle ne peut pas du tout avoir lieu – d’ailleurs, vous avez vous-même précisé « en l’état actuel des connaissances », car des affections considérées comme irréversibles peuvent bel et bien, un jour, devenir guérissables ! Il ne faut donc pas prendre de mesure définitive : le juge doit continuer à s’intéresser au sort des enfants – le réexamen régulier de leur situation est d’ailleurs prévu par la convention internationale des droits de l'enfant. Pour cela, je ne me satisfais pas du seul rapport annuel : le juge doit reprendre une décision.

Dans les cas les plus extrêmes auxquels vous pensez, la meilleure formule, pour l’enfant, n’est pas celle d’un placement durable, mais l’adoption, ce qui impose de prononcer la déchéance de l’autorité parentale. Je sais combien il est difficile de trouver des parents pour ces enfants, mais c’est tout de même possible – c’est pourquoi j’ai décidé une réforme du fichier des parents adoptants, car le système actuel ne fonctionne pas. Supposons maintenant que la déchéance de l’autorité parentale n’ait pas été prononcée : dans cette situation exceptionnelle, j’admets que l’on puisse prévoir le placement pour plus de deux ans. En revanche, je refuse qu’il n’y ait pas de nouvelle décision du juge avant la majorité : ce serait revenir quinze ans en arrière. Une solution équilibrée serait de prévoir une durée de quatre ans – un délai qui couvre, au moins, la durée d’une procédure de déchéance définitive de l’autorité parentale. On disposera ainsi à la fois du rapport annuel, qui informe le juge des cas où l’accueil se fait dans de mauvaises conditions, et de l’obligation d’une décision du juge au bout de quatre ans, quitte à ce qu’elle ne fasse que maintenir le placement. Je propose donc de sous-amender l’amendement 81 et de remplacer « éventuellement jusqu’à la majorité de l’enfant » par « n’excédant pas quatre années ».

Mme la Rapporteure – Avis favorable.

Mme Henriette Martinez – Je vais donc retirer l’amendement 252 et cosigner le 81. Toutefois, si j’apprécie l’esprit d’écoute dont fait preuve le ministre sur ce sujet particulièrement délicat, j’attire son attention sur le fait qu’il ne s’agit pas de situations de déchéance d’autorité parentale. Les parents sont défaillants, certes, et pour une durée prolongée, mais ils sont présents, et peuvent même entretenir une relation avec l’enfant. Il ne s’agit pas de couper cette relation. Par ailleurs, je comprends bien votre crainte que les dossiers soient rangés au fond d’une armoire et qu’on ne s’occupe plus de l’enfant : c’est pour cela que nous avons pris la précaution d’introduire un rapport annuel. Je suis prête à renoncer aux mots « éventuellement jusqu’à la majorité de l’enfant », si c’est cela qui vous gêne : en fait, c’est au juge que nous nous en remettons, tant pour l’appréciation de la situation que pour la durée du placement, et ces mots n’étaient qu’une précision. Mais ce qu’il ne faut pas, c’est fixer une durée : prévoir quatre ans pose la même difficulté qu’en prévoir deux. Par exemple, avec votre système, un enfant placé à l’âge de treize ans va devoir revenir devant le juge juste un an avant sa majorité ! Nous préférons un peu plus de souplesse pour pouvoir répondre au mieux à toutes les situations. Je propose donc un sous-amendement à l’amendement de Mme Adam, qui vise à enlever « éventuellement jusqu’à la majorité de l’enfant ».

Mme Patricia Adam – Si tout le monde est d’accord, on devrait pouvoir arriver à une rédaction ! Il s’agit de cas très concrets. Si l’on prévoit une durée, qu’elle soit de deux ans, de quatre ou de six ne change strictement rien pour l’enfant. Si nous ne parlions que des parents, tout serait différent. Dans ces cas, il s’agit souvent de femmes seules, suivies en psychiatrie et qui parfois ne peuvent même pas être auditionnées, mais que le parent doive revenir devant le juge tous les deux ans, en soi, ne me gêne absolument pas. Mais il s’agit de l’enfant. Pour lui, le rendez-vous tous les deux ans n’est pas souhaitable, ce qui ne veut pas dire que sa situation ne doive pas être reconsidérée le cas échéant : le rapport circonstancié que nous avons prévu prévient le juge de tout élément nouveau, et il peut prendre une décision s’il le souhaite. Je suis prête, si le ministre le veut, à supprimer les termes « éventuellement jusqu’à la majorité de l’enfant », mais il ne faut pas fixer une durée à la place : c’est le juge qui estimera la durée pertinente au cas par cas.

M. Claude Leteurtre – Il s’agit effectivement de cas très concrets, et cet amendement est tout à fait pertinent. On parle peu des familles d’accueil, mais elles non plus ne doivent pas être maintenues dans l’incertitude. Il est aussi important pour ces familles, auxquelles on demande beaucoup, que pour l’enfant de savoir qu’une période de stabilité leur est accordée. C’est pourquoi l’amendement s’impose.

M. le Ministre délégué – Je retire mon sous-amendement au bénéfice du sous-amendement « Martinez-Adam ».

M. le Président – Pour la parfaite information de l’Assemblée, je précise que ce sous-amendement 305 vise à supprimer les mots « éventuellement jusqu’à la majorité de l’enfant afin de lui permettre » et de leur substituer les mots « afin de permettre à l’enfant ».

Mme la Rapporteure – Je m’en remets à la sagesse du ministre (Sourires).

L’amendement 252 est retiré.
Le sous-amendement 305, mis aux voix, est adopté.
L'amendement 81, ainsi sous-amendé, mis aux voix, est adopté.
L'article 6, modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 7

Mme Patricia Adam – L’amendement 83 est défendu.

L'amendement 83, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Patricia Adam – L’amendement 82 est défendu.

L'amendement 83, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Claude Leteurtre – L’amendement 195 est défendu.

Mme la Rapporteure – Avis défavorable. La recherche du consentement des parents risque de bloquer tout le processus.

L'amendement 195, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Muguette Jacquaint – Par l’amendement 179, nous visons à prévenir un télescopage avec d'autres textes, en particulier avec le contrat de responsabilité parentale, contre lequel nous avions voté, et qui permet aux présidents de conseils généraux de subordonner le versement des allocations familiales au comportement des enfants concernés.

Mme la Rapporteure – La commission a repoussé l’amendement, car le projet encadre très soigneusement le partage des informations, et il n’est pas question de télescopage avec les dispositions d’autres textes.

M. le Ministre délégué – Même avis.

Mme Muguette Jacquaint – Ayant entendu les assurances données par la rapporteure, je retire l’amendement.

L’amendement 179 est retiré.
L'article 7, mis aux voix, est adopté.

ART. 8

Mme la Rapporteure – L’amendement 19 est rédactionnel.

Mme Patricia Adam – L’amendement 84 est identique.

Les amendements 19 et 84, acceptés par le Gouvernement, mis aux voix, sont adoptés.

Mme la Rapporteure – L’amendement 279 est défendu.

L'amendement 279, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme Patricia Adam – Les amendements 85 et 86 sont retirés au bénéfice de l’amendement 20 de la commission.

Mme la Rapporteure – L’amendement 20 est défendu.

Les amendements 85 et 86 sont retirés.
L'amendement 20, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme la Rapporteure – L’amendement 271 est rédactionnel.

L'amendement 271, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Claude Leteurtre – L’amendement 196 est défendu.

Mme la Rapporteure – Avis défavorable. La disposition proposée n’est pas du domaine de la loi.

L'amendement 196, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Patricia Adam – L’amendement 90 est défendu.

Mme la Rapporteure – Avis défavorable. Il ne faut pas avoir à attendre la publication d’un décret pour agir.

M. le Ministre délégué – Même avis.

L'amendement 90, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Patricia Adam – Les avocats sont très présents dans les affaires familiales. Par l’amendement 89 rectifié, nous proposons que le bâtonnier de l’ordre des avocats près le tribunal de grande instance de la ville siège du conseil général, ou son délégué, soit membre de l’observatoire départemental de la protection de l’enfance.

Mme la Rapporteure – Avis défavorable de la commission. On ne peut étendre à l’infini la composition de l’observatoire.

M. le Ministre délégué – Même avis.

L'amendement 89 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Patricia Adam – L’amendement 88 est défendu.

Mme Muguette Jacquaint – L’amendement 21 rectifié, adopté par la commission, prévoit que l’observatoire départemental de la protection de l’enfance établira des statistiques qui sont portées à la connaissance de l’assemblée départementale et transmises aux représentants de l’État et de l’autorité judiciaire.

Mme la Rapporteure – La commission a fait sien cet amendement.

M. le Ministre délégué – Sagesse.

Mme Patricia Adam – Je retire l’amendement 88 au bénéfice de l’amendement 21 rectifié, que j’ai cosigné.

Mme Henriette Martinez – Il avait déjà été question, alors que j’étais rapporteure du texte de M. Jacob portant création d’un observatoire national de l’enfance en danger, de créer des observatoires départementaux. Le ministre, qui ne souhaitait pas que l’on multiplie les structures et qui voulait laisser au nouvel observatoire national le temps de se mettre en ordre de marche, s’y était opposé. À présent, l’observatoire national fonctionne bien et il est logique de créer des observatoires départementaux. Cependant, il existe déjà des commissions départementales de protection de l’enfance, placées sous l’autorité du préfet, si ce n’est qu’elles ne se réunissent presque jamais… Si l’on installe des observatoires départementaux, il faudra veiller à supprimer ces commissions.

L’amendement 88 est retiré.
L'amendement 21 rectifié, mis aux voix, est adopté.

Mme la Rapporteure – L’amendement 22 est défendu.

L'amendement 22, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.
L'article 8, modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 9

Mme Muguette Jacquaint – Si les partenaires liés par un PACS sont séparés, il peut être opportun de confier l’enfant au partenaire du parent auquel l’enfant a été retiré, avec lequel des liens affectifs, de confiance et de responsabilité quasi-parentale ont pu se nouer. Tel est l’objet de l’amendement 181.

Mme la Rapporteure – Avis défavorable, car le « tiers digne de confiance » auquel l’article fait référence peut être le partenaire d’un PACS.

M. le Ministre délégué – Même avis.

L'amendement 181, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme la Rapporteure – L’amendement 23 tend à supprimer une précision voulue par le Sénat mais superfétatoire. En effet, le dispositif repose sur le principe que le juge doit se prononcer, dans tous les cas, en stricte considération de l'intérêt de l'enfant, tout placement ne devant être envisagé que si le lieu d'accueil concerné a fait l'objet d'une réelle évaluation. Que celle-ci soit formellement mentionnée dans la loi pourrait conduire le juge à placer l’enfant en foyer pendant que l’évaluation se fait, ce que l’on veut justement éviter.

L'amendement 23, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Claude Leteurtre – L’amendement 197 est défendu.

Mme Muguette Jacquaint – Par l’amendement 182, nous proposons que les établissements accueillant les enfants à la journée ne soient pas les seuls à se voir confier les enfants retirés de leur famille, et qu’il puisse en être de même pour les établissements pratiquant toute autre modalité de prise en charge.

Mme la Rapporteure – La commission a exprimé un avis défavorable aux deux amendements, pour des raisons inverses. M. Leteurtre souhaite supprimer la notion d’accueil « à la journée », qui est pourtant une innovation à laquelle nous tenons, parce qu’elle permettra de répondre à une difficulté passagère. Quant à l’amendement de Mme Jacquaint, il ne dit pas ce qu’il faut entendre par « toute autre modalité de prise en charge ».

M. le Ministre délégué – Même avis.

Mme Henriette Martinez – Je soutiens les deux amendements. J’habite un très petit département qui ne dispose d’aucune structure capable d’accueillir des enfants à la journée mais où, dans le même temps, certains établissements vont fermer faute d’être suffisamment utilisés. Or, plusieurs magistrats de Gap m’ont dit ne savoir que faire, le week-end ou pour de courts séjours, des enfants qui leur sont adressés.

Nous n’habitons pas tous dans des grandes villes, nous n’avons pas tous des établissements spécialisés pour chaque type d’accueil. Il y a besoin de souplesse. Vouloir s’enfermer dans des situations encadrées, c’est rédiger un texte pour les milieux urbains seulement. Je connais les difficultés du milieu rural : on ne peut pas multiplier les structures, en créant des établissements à la journée qui n’accueilleraient que peu d’enfants, voire, par moments, aucun enfant. Les conseils généraux ne pourront pas payer pour ces établissements ! Essayons plutôt de rationaliser l’utilisation des moyens.

Mme la Rapporteure – Je suis sensible aux arguments de Mme Martinez. Nous pourrions donc nous accorder sur des établissements « habilités » « à la journée » – j’y tiens –, « ou suivant toute autre modalité de prise en charge », ce qui reprend donc la rédaction de Mme Jacquaint. On introduirait donc de la souplesse, tout en conservant un garde-fou, puisque les établissements seront habilités.

M. le Ministre délégué – Le débat a été très éclairant, et je donne mon accord à cette dernière solution, qui permettra des expérimentations.

M. le Président – La commission et le Gouvernement se rallient donc à l’amendement 182.

M. Claude Leteurtre – Je retire l’amendement 197.

L'amendement 197 est retiré.
L'amendement 182, mis aux voix, est adopté.
L'article 9 modifié, mis aux voix, est adopté.

Art. 10

Mme Patricia Adam – L’amendement 91 reprend l’esprit de la loi du 2 janvier 2002 concernant l’adhésion des parents et la nécessité de les informer. Chaque fois qu’un rapport est transmis au conseil général par un professionnel, il convient, dans la mesure du possible, que les parents en reçoivent communication.

Mme la Rapporteure – Avis défavorable. Si je partage le souci de Mme Adam d’associer davantage les parents, l’amendement tel qu’il est rédigé en fait détermine une obligation de communication. Or, il y a des circonstances où les rapports ne doivent pas être communiqués aux parents, dans l’intérêt de l’enfant. Votre présentation orale, Madame Adam, était d’ailleurs plus souple. L’amendement pourrait être sous-amendé.

Mme Patricia Adam – Je suis d’accord. Ajoutons donc : « dans la mesure du possible ».

Mme la Rapporteure – Cela reste un peu vague. Il s’agit de préciser que la communication ne doit pas nuire à l’intérêt de l’enfant.

Mme Patricia Adam – Dans un des articles examinés hier, il est prévu que la communication est exigée sauf dans le cas d’un danger pour l’enfant. C’est peut-être cela qu’il conviendrait de porter ici.

M. le Président – Vous proposez donc un amendement 91 rectifié ainsi rédigé : « Il en avise, sauf en cas de danger pour l’enfant, le père, la mère, toute personne exerçant l’autorité parentale ou le tuteur ».

L'amendement 91 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme Patricia Adam – L’amendement 92 est défendu.

L'amendement 92, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Muguette Jacquaint – Je me rallie à l’amendement 24 rectifié de la commission et retire donc mon amendement 149.

L'amendement 149 est retiré.

Mme la Rapporteure – L’amendement 24 rectifié est défendu.

L'amendement 24 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.
L'article 10 modifié, mis aux voix, est adopté.

Art. 11

Mme la Rapporteure – L’amendement 280 est rédactionnel.

L'amendement 280, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme la Rapporteure – L’amendement 25 remplace le mot « document », s’agissant de l’acte qui retrace les engagements réciproques de l’ASE et de la famille au sujet de la prise en charge de l’enfant, par l’expression « projet pour l’enfant ». il s’agit de trouver une dénomination qui distingue cet engagement du contrat de séjour. En outre, le mot « document » me paraît malheureux.

M. le Ministre délégué – Je suis tout à fait d’accord.

L'amendement 25, mis aux voix, est adopté.

Mme Muguette Jacquaint – Pour éviter que le contrat d’engagement soit simplement un acte administratif, il convient de prévoir un entretien préalable obligatoire avec les représentants légaux du mineur avant la signature, à la fois pour entendre leurs remarques et pour obliger l’institution à expliciter le contenu du contrat. Tel est l’objet de l’amendement 151.

Mme la Rapporteure – Avis défavorable, car cela va de soi.

L'amendement 151, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Patricia Adam – L’amendement 94 est défendu.

L'amendement 94, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Muguette Jacquaint – L’amendement 152 est défendu.

L'amendement 152, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.
L'article 11 modifié, mis aux voix, est adopté.

après l'Art. 11

Mme Patricia Adam – Les allocations familiales ne doivent pas être transformées en certificat de bonne conduite. L’amendement 95 supprime le contrat de responsabilité parentale.

Mme Muguette Jacquaint – L’amendement 153 est identique. Nous avons toujours été contre la suppression des allocations familiales, qui n’arrange rien à la situation des familles, et aggrave au contraire leurs difficultés.

Mme la Rapporteure – Avis défavorable. Le contrat de responsabilité parentale est un pilier de la loi sur l’égalité des chances.

M. le Ministre délégué – Le contrat de responsabilité parentale est destiné à éviter que le juge ne prononce la mise sous tutelle des allocations familiales. C’est une main tendue aux parents, un instrument nouveau à la disposition du président de conseil général, responsable de la protection de l’enfance.

Les amendements identiques 95 et 153, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

Art. 12

Mme Muguette Jacquaint – Si le système actuel des tutelles présente certaines faiblesses, c’est parce que, faute de moyens, les conseillers en économie sociale et familiale font cruellement défaut, comme l’a d’ailleurs reconnu la commission. Remplacer le mot « conseiller » par « délégué » ne vise qu’à un effet d’annonce, voilant la véritable intention du Gouvernement, qui est de transférer une nouvelle charge aux départements. L’amendement 154 propose de supprimer l’article 12.

Mme la Rapporteure – Avis défavorable. L’article crée un dispositif novateur d’accompagnement de l’économie sociale et familiale. C’est seulement si cette formule échoue que le juge pourra prendre des mesures plus contraignantes.

L'amendement 154, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Henriette Martinez – Les associations d’aide aux familles à domicile contribuent à l’exécution des politiques d’action sociale du conseil général dans le cadre des priorités de l’ASE, de la PMI ainsi que des politiques familiales. Il paraît donc opportun de nommer leurs missions, actuellement désignées comme « l’action d’un technicien ou d’une technicienne de l’intervention sociale et familiale ou d’une aide ménagère » dans le code de l’action sociale, « intervention d’accompagnement éducatif à domicile ». On reconnaîtrait mieux l’action de ces professionnels en identifiant leurs missions par un terme générique plutôt que par les qualifications professionnelles. Tel est l’objet de l’amendement 253.

Mme la Rapporteure – Avis défavorable. Le but du projet de loi n’est pas de réorganiser l’ensemble des prestations d’aide à domicile.

L'amendement 253, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Patricia Adam – La mission d’accompagnement en économie sociale et familiale ne parle que d’une aide à la gestion du budget familial, alors que nous savons depuis longtemps, dans le cadre des tutelles aux prestations sociales, que ces dispositifs ont aussi une dimension éducative. L’amendement 102 vise à combler cette omission.

Mme la Rapporteure – L’expression d’« aide à la gestion du budget familiale » est plus parlante. Et puis, évitons que tout ne devienne « éducatif », si nous voulons conserver un sens aux mots.

M. le Ministre délégué – Même avis

L'amendement 102, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Patricia Adam – L’amendement 100 est défendu.

Mme la Rapporteure – Avis défavorable. Nous souhaitons que les délégués aux prestations familiales puissent être non seulement des personnes morales, mais aussi des personnes physiques. Nous faisons le même choix concernant la tutelle des majeurs.

M. le Ministre délégué – Même avis.

L'amendement 100, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Patricia Adam – L’amendement 103 propose qu’un décret fixe la liste des prestations familiales concernées par le dispositif, car leur définition pose problème.

Mme la Rapporteure – Avis défavorable. Les prestations familiales sont déjà définies à l’article L. 511-1 du Code de la sécurité sociale.

M. le Ministre – Même avis.

Mme Patricia Adam – Lorsque des personnes cumulent plusieurs prestations, toutes se retrouvent sous tutelle. Or une pension d’invalidité n’est pas une prestation familiale, alors que le fonds national de solidarité en est une.

Mme la Rapporteure – Si l’on renvoie encore à un décret, la mise en application de ce dispositif sera retardée. Nous disposons d’un texte, le Code de la sécurité sociale, auquel tous les textes concernant les prestations familiales font référence. Si le ministre juge qu’il est nécessaire de le compléter, il le sera.

M. le Ministre – Même avis.

L'amendement 103, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Muguette Jacquaint – L’amendement 157 propose que le juge des enfants ait la possibilité de mettre sous tutelle les prestations familiales qui ne sont pas utilisées pour le logement. L’intervention du service de la tutelle permet, selon les situations, une médiation avec les organismes bailleurs, la négociation d’un plan d’apurement des dettes locatives, celle de paiements personnalisés pour les fournitures d’énergie, la réinscription de la famille dans un projet de pérennisation du logement. Cela permet de mettre en place de nouveaux liens sociaux, propices au développement des enfants.

Mme la Rapporteure – L’amendement 26 est identique, et bien d’actualité. Disposer d’un logement adapté à la taille de la famille nous paraît essentiel pour garantir une éducation harmonieuse des enfants. C’est la raison pour laquelle il est nécessaire d’élargir les critères justifiant le recours à la mesure judiciaire d’aide à la gestion du budget familial.

Les amendements 26 et 157, acceptés par le Gouvernement, mis aux voix, sont adoptés.

M. le Président – À l’unanimité.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu ce soir, à 21 heures 30.
La séance est levée à 20 heures 5.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

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