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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

2ème séance du jeudi 11 janvier 2007

Séance de 15 heures
48ème jour de séance, 109ème séance

Présidence de Mme Hélène Mignon
Vice-Présidente

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La séance est ouverte à quinze heures.

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ADAPTATION AU DROIT COMMUNAUTAIRE
DANS LE domaine du médicament (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d’urgence, du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine du médicament.

ART. 5 (suite)

M. Yves Bur – Suite à la discussion de ce matin, je propose donc un amendement 84 rectifié afin de supprimer la question du rapport bénéfice-risque.

Mme Cécile Gallez, rapporteure de la commission des affaires culturelles – A titre personnel, avis favorable.

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités Même avis.

L'amendement 84 rectifié, mis aux voix, est adopté.

Mme Martine Billard – L’amendement 75 vise à remédier à une situation bien connue qui consiste à multiplier des spécialités reprenant des médicaments existants sous des formes à peine différentes, ce qui permet de prolonger les mises sur le marché précédentes sans que les laboratoires aient à prouver à nouveau l’utilité du médicament. Le nouveau médicament étant plus cher que le premier, cela permet aux laboratoires de profiter de rentes de situation. Pour éviter ces dérives, je propose d’imposer des essais cliniques comparatifs évaluant les avantages, les risques et les contraintes et permettant de démontrer l’efficacité du nouveau médicament. Mme la rapporteure, en commission, a argué de l’inexistence de ce dispositif dans le droit européen, ce qui soulèverait un problème de concurrence. Je répète que les problèmes sont néanmoins bien réels et pour les patients, à qui l’on fait parfois croire en l’existence de remèdes miracles, et pour l’assurance maladie à qui cela coûte cher.

Mme la Rapporteure – Avis défavorable. La définition du contenu du dossier présenté pour une demande d’AMM ne relève pas de la loi mais du décret, et la directive instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain ne prévoit pas que des essais cliniques comparatifs y figurent.

M. le Ministre – Avis défavorable également. C’est au niveau communautaire qu’il faut porter ce débat et j’ai déjà eu l’occasion de dire que je souhaitais une étude réalisée par rapport à des comparants et non à des placebos, comme c’est le cas aujourd’hui.

L'amendement 75, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Martine Billard – L’amendement 76 vise à rendre obligatoire pour tout nouveau médicament la demande, par les laboratoires pharmaceutiques, de l’inscription sur la liste des spécialités remboursables. Ceux-ci, en effet, mettent parfois sur le marché de nouveaux produits à des prix très élevés puis attendent plusieurs mois pour introduire la demande d’inscription, afin de créer un rapport de forces favorable dans la négociation du prix remboursable avec les pouvoirs publics. Il faut que la mise sur le marché et la demande d’inscription soient concomitantes.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable, le laboratoire ayant tout de même intérêt à ce que le médicament soit remboursé.

M. le Ministre – Défavorable également : ce ne sont pas les mêmes critères qui s’imposent à l’une et à l’autre.

L'amendement 76, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme la Rapporteure – L’amendement 55, qui vise à supprimer des dispositions figurant à l’article L. 5121-8 du code de la santé, est de coordination avec l’amendement 58 à l’article 6, prévoyant que l’AMM est suspendue ou retirée lorsque le rapport bénéfice-risque n’est pas considéré comme favorable.

L'amendement 55, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Luc Préel - L’amendement 41 vise à supprimer l’alinéa 7 de cet article, lequel remplace « ou » par « et », ce qui implique automatiquement un cumul de responsabilités entre le fabricant et le titulaire de l’AMM, alors qu’il revient au juge de trancher sur la répartition des responsabilités.

Mme la Rapporteure – Avis défavorable, le projet reprenant très précisément les termes de la directive.

L'amendement 41, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n’est pas adopté.

M. Jean-Luc Préel – A l’inverse de mon amendement précédent, celui-ci veille à reprendre précisément les termes de la directive ! Vous ne pouvez donc qu’y être favorables ! (Sourires)

Mme la Rapporteure - Avis défavorable ! (Sourires)

M. Jean-Luc Préel - Sur le fondement de quel argument ?

M. Claude Evin - L’argument contraire ! (Rires)

M. le Ministre – Étant donné la clarté de nos débats, le Gouvernement ne peut que s’en remettre à la sagesse de l’Assemblée ! (Sourires) L’expression « périodes de protection », que M. Préel souhaite substituer au mot « durées », peut en effet viser aussi bien la protection des données administratives - du domaine réglementaire – que la protection de marché – du domaine législatif. Je crains que la transposition mot pour mot de la directive ne crée en l’occurrence des ambiguïtés.

M. Claude Evin – Il ne faudrait pas que, à gauche comme à droite de cet hémicycle, nous reprochions à Bruxelles de réduire notre initiative parlementaire tout en proposant des amendements visant à être le plus fidèles possible aux directives !

L'amendement 42, mis aux voix, n'est pas adopté.
L'article 5 modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 6

Mme la Rapporteure – L’amendement 56 précise le rapport bénéfice-risque et subordonne la délivrance de l’AMM à l’évaluation des effets thérapeutiques positifs d’un médicament au regard des risques pour la santé du patient ou la santé publique.

L'amendement 56, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Claude Evin - Le projet prévoit une reformulation du rapport bénéfice-risque au moment de l’AMM. En revanche, rien n’est formellement écrit sur le sujet lorsqu’il s’agit de retirer l’AMM. Notre amendement 33 tend à introduire cette précision, mais je le retire au bénéfice de l’amendement 58 de la commission, qui reprend l’idée.

L'amendement 33 est retiré.

Mme la Rapporteure - L’amendement 57 est rédactionnel.

L'amendement 57, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme la Rapporteure – L’amendement 58 vise à compléter le code de la santé publique afin de préciser les principaux critères de suspension ou de retrait de l’AMM. Il prévoit en particulier la suspension ou le retrait de celle-ci s’il apparaît que le rapport bénéfice-risque est défavorable.

Mme Martine Billard - L’amendement 77 précise lui aussi les conditions de retrait d’une AMM, mais il est satisfait par l’amendement 58 de la commission.

L'amendement 77 est retiré.
L'amendement 58, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.
L'article 6 modifié, mis aux voix, est adopté.

Art. 7

Mme la Rapporteure - L’amendement 59 supprime cet article, inutile puisqu’il figure déjà dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007.

L'amendement 59, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté, et l'article 7 est ainsi supprimé.

Art. 8

Mme la Rapporteure - L’amendement 60 répare une erreur matérielle.

L'amendement 60, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Luc Préel - Mon amendement 43 vise à ce que le titulaire de l’AMM du générique informe le titulaire de l’AMM de la spécialité princeps en même temps que le directeur général de l’AFSSAPS. C’est d’autant plus nécessaire que l’AFSSAPS n’est pas chargée de la vérification au fond des droits de propriété intellectuelle.

M. Pierre-Louis Fagniez - L’amendement 101 que j’ai cosigné avec M. Morange, et que je vais défendre à sa place, vise lui aussi à ce qu’avant la commercialisation d’un générique, le titulaire de l’AMM de ce générique informe le titulaire de l’AMM du princeps afin qu’il puisse, le cas échéant, faire valoir ses droits de propriété intellectuelle. Une procédure similaire existe d’ailleurs en matière d’importation parallèle. Ce système permettrait d’éviter des contentieux aux génériqueurs, comme l’expérience étrangère nous a appris qu’il pouvait y en avoir.

Mme la Rapporteure - La commission a repoussé ces amendements qui pourraient placer l’AFSSAPS dans une situation difficile et freineraient le développement du marché des génériques.

M. le Ministre – Même avis pour les mêmes raisons.

M. Jean-Luc Préel - L’AFSSAPS n’étant pas en mesure de juger des droits de propriété intellectuelle, il serait logique que le titulaire du brevet de la molécule princeps soit averti en même temps, de façon à pouvoir, le cas échéant, faire valoir ses droits.

M. Yves Bur – Rediscuter ainsi, pour la énième fois, de la protection des brevets sur les molécules princeps, c’est subrepticement essayer de remettre en question la politique des génériques. Je peux comprendre les inquiétudes des laboratoires pharmaceutiques qui voient tomber un nombre croissant de leurs molécules dans le domaine public. Ils doivent néanmoins savoir que la protection des princeps en France est l’une des plus sévères en Europe, sinon au monde, si bien que quasiment jamais aucune infraction n’a été relevée.

Nous avons déjà eu ce débat à l’occasion de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale et souligné la nécessité de transposer dès à présent dans le code de la santé publique une partie de la directive sur la propriété intellectuelle et les brevets. La Chancellerie a confirmé que très peu d’actions avaient été engagées et que la justice avait toujours répondu sans délai.

Nous n’avons jamais cherché à promouvoir les génériques que dans le respect absolu des droits de propriété sur les princeps et ne tolérerons aucune infraction. Mais que nos laboratoires ne se plaignent pas car le pourcentage de génériques vendus en France est très inférieur à ce qu’il est dans le reste du monde ! Il est normal qu’une molécule tombée dans le domaine public puisse être génériquée, les économies ainsi réalisées ne profitant pas seulement à l’assurance maladie mais étant réinvesties dans une politique du médicament au service de l’innovation.

Trêve donc d’hypocrisie ! Ne faisons pas semblant, d’un côté, de favoriser le développement des génériques pour de l’autre, dès que l’occasion s’en présente, tenter de le freiner. Faisons le pari, plus intelligent, de permettre à la fois à l’assurance maladie de maîtriser ses dépenses et aux laboratoires de développer des molécules innovantes – ce qui ne passe pas seulement par une politique de prix et de volumes, mais aussi de recherche.

M. Claude Evin - S’il y a consensus sur l’utilité de développer les génériques afin d’atteindre certains objectifs économiques, on ne peut invoquer ceux-ci pour faire fi du droit de la propriété intellectuelle…

M. Yves Bur – Ai-je dit cela ?

M. Claude Evin - Non. Mais pourquoi refuser d’informer le titulaire du brevet d’un princeps qu’un générique va être commercialisé ?

M. Yves Bur – C’est toujours un secret de polichinelle.

M. Claude Evin - Il s’agit simplement de lui permettre de faire valoir ses droits. Alors même, Monsieur Bur, que présidant le groupe d’études parlementaire sur le médicament, vous êtes parfaitement au fait de la question, votre raisonnement présente quelques faiblesses. S’il faut poursuivre l’objectif d’économies par le développement des génériques, notamment pour que les sommes économisées permettent la mise au point de médicaments innovants, il ne faut pas rejeter a priori la proposition faite dans ces deux amendements.

M. Pierre-Louis Fagniez – J’ai l’impression d’avoir très mal défendu l’amendement de notre collègue Morange, si j’ai pu laisser penser qu’il était hostile au développement des génériques. Je n’aurais d’ailleurs jamais cosigné son amendement si j’avais un instant pensé qu’il pût être interprété de la sorte, ou je l’aurais retiré. Mais comment une information plus transparente pourrait-elle nuire aux génériques ? Notre collègue souhaitait seulement souligner la nécessité d’une bonne entente entre laboratoires de princeps et génériqueurs. Je maintiens donc cet amendement.

M. Gérard Bapt – Notre débat est, me semble-t-il, un peu vain. Le laboratoire du princeps est déjà informé à deux reprises de la commercialisation du générique. Fussent-ils superfétatoires, ces amendements ne sauraient en tout cas être interprétés comme un frein au développement des génériques. Mais il faut comprendre aussi les inquiétudes des laboratoires qui consentent d’énormes investissements de recherche. Il suffit de voir ce qui est arrivé à Sanofi outre-Atlantique, où la commercialisation d’un générique par un laboratoire canadien a fait chuter de 70 % ses ventes de Plavix, dont le brevet n’expirait pourtant qu’en 2011.

M. le Ministre – Les différents points de vue ne me semblent pas inconciliables, car il existe déjà un accord cadre sur ce sujet. Un amendement du Gouvernement à l’article 29 nous permettra, je l’espère, de nous rapprocher.

M. Jean-Marie Le Guen – Sur cette question de la propriété intellectuelle, une directive européenne est en instance de transposition. C’est un sujet essentiel, et pourtant nous passons à côté : l’évoquer par le truchement d’amendements ne suffit pas. Nous avons en effet du mal à savoir où nous en sommes…

Les amendement 43 et 101, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.
L'article 8 ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 9

M. Yves Bur – En application de la directive européenne, l’article 9 permet à l’Agence européenne des médicaments ou à l’AFSSAPS de prolonger d’un an la durée de protection d’un médicament princeps si, au cours des huit premières années d’autorisation du produit, le titulaire de l’AMM fait la preuve de nouvelles indications thérapeutiques apportant un avantage clinique. L’amendement 85 tend à rappeler que l’appréciation d’un progrès médicamenteux est une mission relevant en France de la Haute autorité de santé et de la commission de la transparence.

Sans remettre en cause les décisions de l’EMEA, cet amendement permettrait ainsi de prolonger la protection d’une molécule en l’absence de décision au niveau européen. Par ce simple rappel, nous éviterons toute confusion des compétences.

Mme la Rapporteure - La commission a repoussé cet amendement car il est impossible de prévoir des régimes différents pour les AMM nationales et les AMM communautaires en soumettant les premières à la HAS.

M. le Ministre – Ce sujet est plus complexe qu’il n’y paraît. Si la précision apportée par l’amendement est absente de la directive, c’est que les homologues de la HAS ne sont pas reconnus au niveau communautaire. Il me semble toutefois souhaitable d’introduire votre proposition dans le droit national, tout en veillant à ne pas confondre pour autant AMM et remboursement.

L’exposé des motifs m’inquiète plus que l’amendement lui-même car il ne faudrait pas provoquer un allongement des délais ! Sous cette réserve, je suis favorable à l’amendement.

M. Jean-Marie Le Guen - Il ne s’agit pas de produits innovants, Monsieur le ministre, mais d’une nouvelle application thérapeutique d’un produit existant. Relativisons donc la question des délais !

Je m’inquiéterais a contrario que le renouvellement d’un brevet ne conduise pas à une nouvelle saisine de la commission de la transparence : il est indispensable d’évaluer à nouveau le rôle du médicament et son coût ; la question des délais est subsidiaire.

M. Yves Bur – Il n’était pas question, dans mon esprit, d’allonger les délais. La commission de la transparence a d’ailleurs parfaitement respecté le délai de 90 jours inscrit dans la loi. Ce que je propose n’a rien de dilatoire : il faut seulement évaluer la valeur thérapeutique avant toute décision.

L'amendement 85, mis aux voix, est adopté.

Mme la Rapporteure – L’amendement 61 est rédactionnel.

L'amendement 61, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.
L'article 9 modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 9

Mme la Rapporteure – Sans remettre en cause le strict encadrement de l’utilisation de sang issu d’un prélèvement rémunéré – permis dans d’autres pays –, l’amendement 98 tend à porter de deux à trois ans la durée d’une autorisation de mise sur le marché de médicament dérivé du sang délivrée dans ce cadre, afin d’éviter les risques de pénurie.

L'amendement 98, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

ART. 10

L'article 10 mis aux voix, est adopté.

ART. 11

Mme la Rapporteure - L’amendement 62 est rédactionnel.

L'amendement 62, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.
L'article 11 ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 12 à 14

Les articles 12, 13 et 14, successivement mis aux voix, sont adoptés

ART. 15

Mme Martine Billard - Je m’étonne que le projet ne reprenne pas l’une des principales avancées de la directive européenne. L’amendement 78 vise à la transposer en prévoyant que le dossier de demande d’AMM comporte une « évaluation de l’impact environnemental des médicaments et des produits de santé et les solutions et précautions pour y remédier ». Mme la rapporteure nous a répondu en commission que cette disposition relevait du domaine réglementaire. Peut-être, mais il est étrange qu’un pays qui a été le premier à reconnaître l’importance des enjeux environnementaux dans sa Constitution ne la fasse pas apparaître dans sa transposition de la directive. On peut le faire ailleurs qu’à l’article 15, mais il faut que cet élément apparaisse.

Mme la Rapporteure – La commission a repoussé cet amendement. Je comprends le souci de Mme Billard, mais cela relève en effet du domaine réglementaire.

M. le Ministre – Défavorable. Je puis en revanche vous assurer que les arrêtés qui seront pris reprendront cette disposition.

L'amendement 78, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme la Rapporteure - L’amendement 63 est rédactionnel.

L'amendement 63, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.
L'article 15 ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

après l’art. 15

M. Yves Bur – L’amendement 86 comble un vide juridique en permettant aux agents français des douanes de contrôler l’importation et l’exportation des micro-organismes pathogènes et des toxines, dont l’emploi serait de nature à présenter un risque pour la santé publique notamment en cas d’utilisation à des fins de bioterrorisme.

L'amendement 86, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme la Rapporteure - Le code de la sécurité sociale prévoit que la Haute autorité de santé établit le référentiel de certification des logiciels d’aide à la prescription, cette certification étant assurée par des entreprises. L’objet de l’amendement 5 est de s’assurer que ces logiciels permettent de prescrire directement en dénomination commune internationale.

M. le Ministre – Avis favorable.

Mme Martine Billard – Je me félicite de cet amendement, que j’ai moi-même déposé sans succès à plusieurs reprises sous cette législature. La persévérance paye !

M. le Ministre – J’écoute et j’entends ! (Sourires)

M. Claude Evin – Cela implique d’enseigner la DCI dans les facultés de médecine…

M. le Ministre – Entre autres nouveaux enseignements !

L'amendement 5, mis aux voix, est adopté.

Art.16

L'article 16, mis aux voix, est adopté.

art. 17

Mme la Rapporteure - Je laisse à M. Evin le soin de défendre l’amendement 6.

M. Claude Evin – Le dernier alinéa de l’article L. 5122-6 dispose que « la publicité auprès du public pour un médicament est nécessairement accompagnée d’un message de prudence et de renvoi à la consultation d’un médecin en cas de persistance des symptômes. » Il ne nous paraît pas opportun de le supprimer comme le prévoit l’alinéa 8 de cet article.

M. le Ministre – Avis défavorable, la disposition en question relevant du domaine réglementaire.

M. Claude Evin – Sans doute, mais elle figure déjà dans la loi. Et il y a tout lieu de penser que les contraintes de calendrier ne vous permettront pas de signer vous-même tous les décrets d’application de ce texte…

L'amendement 6, mis aux voix, est adopté.
L'article 17 ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

art. 18

Mme la Rapporteure - L’amendement 64 est rédactionnel.

L'amendement 64,accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.
L'article 18 ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

art. 19

L'article 19, mis aux voix, est adopté.

art. 20

Mme la Rapporteure - L’amendement 65 vise à soumettre les médicaments homéopathiques aux mêmes obligations que les médicaments allopathiques s’agissant de la transmission des dates de commercialisation à l’AFSSAPS.

L'amendement 65, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.
L'article 20 ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

art. 21

Mme la Rapporteure - L’amendement 66 est rédactionnel.

L'amendement 66, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.
L'article 21 ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

art. 22

Mme la Rapporteure - L’amendement 67 vise à supprimer cet article, dont les dispositions ont déjà été adoptées lors de la discussion de la loi de financement de la sécurité sociale.

L'amendement 67, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté, et l’article 22 est ainsi supprimé.

art. 23 et 24

Les articles 23 et 24, successivement mis aux voix, sont adoptés.

art. 25

Mme la Rapporteure - L’amendement 68 rectifié vise tout d’abord à réduire le plafond de la taxe perçue par l’AFSSAPS lorsqu’elle diligente une inspection, en le faisant passer de 10 000 à 7 500 euros. Les autres modifications proposées permettent de se conformer à l’article 34 de la Constitution.

M. le Ministre – Je demande une suspension de séance.

La séance, suspendue à 15 heures 55, est reprise à 16 heures.

M. le Ministre – Le Gouvernement propose de modifier l’amendement 68 rectifié pour porter à 10 000 euros – au lieu de 7 500 euros – le plafond du droit versé à l’AFSSAPS.

Mme la Rapporteure - D’accord.

L'amendement 68, deuxième rectification, mis aux voix, est adopté.
L'article 25 ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 26

M. Yves Bur – Mon amendement 87 vise à compléter cet article, relatif à la transparence et dont la rédaction actuelle nous semble trop succincte. En effet, l’article 21 du code communautaire prévoit que les États membres doivent mettre à la disposition du public un rapport d’évaluation pour chaque produit donnant lieu à la délivrance d’une nouvelle AMM. En vue de transposer fidèlement la directive, nous proposons, par cet amendement d’ordre rédactionnel, de substituer à la notion de « synthèse des dossiers d’autorisation » celle de « rapport de synthèse de l’évaluation effectuée », manifestement plus conforme à la nature des rapports d’évaluation de l’AFSSAPS, l’Agence ayant fait des progrès exemplaires dans le sens de la transparence. Un décret précisera qu’elle rend publique les décisions d’AMM délivrées, assorties du résumé des caractéristiques du produit – le RCP – correspondant et d’un rapport de synthèse de l’évaluation effectuée comprenant, pour chaque indication thérapeutique revendiquée, les motifs justifiant la décision, à l’exclusion de toute information présentant un caractère de confidentialité industrielle ou commerciale.

Mme Martine Billard - Notre amendement 79 vise aussi à transposer la directive dans ses termes originels, le projet de loi cédant à l’habitude française d’introduire un tiers entre les pouvoirs publics et les assurés sociaux, comme si ceux-ci n’étaient pas doués d’assez de discernement pour accéder directement à l’information. Nous nous opposons à la toute-puissance des experts et demandons, avec toutes les associations concernées, que nos concitoyens puissent accéder directement à toutes les informations relatives aux AMM. 

Mme la Rapporteure - Je retire mon amendement 8 au profit du 87 de M. Bur. Avis défavorable à l’amendement de Mme Billard, car il est moins précis.

Mme Martine Billard - C’est très subjectif !

M. le Ministre – En toute transparence (Sourires), le Gouvernement préfère aussi l’amendement de M. Bur !

L'amendement 87, mis aux voix, est adopté.
L'amendement 79, mis aux voix, n'est pas adopté.
L'article 26 modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 27

L'article 27, mis aux voix, est adopté.

ART. 28

Mme la Rapporteure - L’amendement 69 est rédactionnel.

L'amendement 69, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.
L’article 28 ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 28

M. Yves Bur – Mon amendement 88 rectifié demande que les entreprises pharmaceutiques rendent publique la liste des associations de malades qu’elles subventionnent et le montant des aides versées. Il est à mes yeux tout à fait normal que les laboratoires aient des liens avec les associations, mais cela doit se faire en toute transparence.

M. Claude Evin - Mon amendement 35 a le même objet et j’ai la faiblesse de penser que sa rédaction est meilleure, puisqu’elle vise aussi les subventions indirectes – au-delà des aides financières – que les entreprises pharmaceutiques peuvent accorder aux associations de patients. Mais je crois savoir que le ministre va nous indiquer qu’un dispositif d’information existe déjà, et je suis donc impatient d’entendre ses précisions.

Mme la Rapporteure - La commission a repoussé l’amendement 88 rectifié au profit de l’amendement 35 de M. Evin, qu’elle juge plus complet. (Sourires et murmures sur les bancs du groupe UMP)

M. le Ministre – En effet, Monsieur le ministre Evin, l’article R. 5124-66 du code de la santé publique dispose déjà que les entreprises pharmaceutiques sont autorisées à faire des dons aux personnes morales, sous réserve de les déclarer à l’autorité publique. Votre préoccupation est donc satisfaite, puisqu’il est parfaitement concevable que les dons aux associations de patients entrent dans ce cadre. Toutefois, dans la mesure où votre commission s’est déclarée favorable à votre amendement, le Gouvernement ne s’y oppose pas.

L'amendement 88 rectifié, mis aux voix, est adopté.

Mme Martine Billard – Peut-on être sûr que le décret paraîtra ? Je rappelle que nous avons vu tout à l’heure que certains décrets annoncés en 2002 n’ont toujours pas été pris.

M. le Ministre – En l’espèce, la disposition existe déjà et a même été codifiée. Du reste, je veille toujours à ce que les décrets afférents aux textes dont j’ai la charge soient pris en temps et en heure.

M. Jean-Marie Le Guen - Comme celui sur les psychothérapeutes ?

M. Claude Evin – M. le ministre fait référence à un article de la partie réglementaire du code, qui, malheureusement, ne répond pas pleinement à la préoccupation que nous avons exprimée avec M. Bur…

M. le Ministre – Et c’est pour cela que j’ai accepté votre amendement.

M. Yves Bur – Le mien ayant été adopté, celui de M. Evin ne peut plus l’être.

M. Claude Evin – L’article R. 5124-66 du code de la santé publique dispose expressément que les entreprises pharmaceutiques doivent rendre publics les dons effectués aux personnes morales en vue de favoriser la recherche ou la formation des professionnels de santé. Quid des dons ayant une autre finalité ? Nous demandons pour notre part qu’une liste de l’ensemble des dons aux personnes morales soit publiée.

M. le Ministre – S’agissant de la redistribution à des fins humanitaires des médicaments non utilisés, un rapport de l’IGAS a soulevé un certain nombre d’interrogations : la qualité et la traçabilité ne sont pas assurées ; les médicaments s’avèrent peu adaptés aux besoins des populations concernées ; la distribution perturbe les politiques pharmaceutiques locales. L'OMS, le HCR, la Banque mondiale, les ONG, le ministère des affaires étrangères, l'ordre des pharmaciens et l'Académie nationale de pharmacie sont donc attachés à ce que la France abandonne, comme les autres pays européens, ce système. Tel est l’objet de l’amendement 46 rectifié. Néanmoins, il prévoit un délai de dix-huit mois, afin de permettre aux organismes concernés de trouver de nouvelles sources d’approvisionnement – dons de l’industrie pharmaceutiques ou financements publics.

M. Gérard Cherpion - Les pharmacies d’hôpitaux ou de maisons de retraite doivent être insérées dans ce dispositif, car elles participent à la collecte. C’est l’objet du sous-amendement 106. Malgré les scandales et les risques de contrefaçon, je regrette que cette filière de récupération soit supprimée et que les médicaments en viennent à être détruits.

Le sous-amendement 107 apporte des précisions quant aux modalités de la destruction et propose que son financement soit prévu dans le décret.

Mme la Rapporteure - La commission a donné un avis favorable à l’amendement 46 rectifié. Elle n’a pas examiné les sous-amendements, mais à titre personnel j’y suis favorable.

M. le Ministre – Avis défavorable au sous-amendement 106, favorable au sous-amendement 107. Je précise que nous ne mettons pas un terme à la collecte, mais à l’utilisation à des fins humanitaires de 5 % des médicaments non utilisés. L’ordre des pharmaciens y est favorable et, en marge du rapport de l’IGAS, de nombreuses concertations ont eu lieu avec les ONG, auprès desquelles je me suis engagé à trouver de nouvelles sources d’approvisionnement, plus conformes aux besoins des pays concernés.

M. Jean-Marie Le Guen – Nous gardons tous en mémoire les affaires qui ont justifié des condamnations. Mais cela ne suffit pas à fonder ma conviction, non plus que le rapport de l’IGAS. Je suis choqué que l’on ne trouve pas une alternative à la destruction de produits actifs. Pourquoi n’améliorerait-on pas le système ? M. le ministre nous indique que l’industrie pharmaceutique – soudainement philanthrope – et la puissance publique vont être mises à contribution. Mais je me souviens que lors du tsunami, le ministre de la santé s’était envolé à bord d’un avion bourré de médicaments…

M. Jean-Luc Préel - Lui, ce n’était pas avec des sacs de riz !

M. Jean-Marie Le Guen – Ne m’obligez pas à polémiquer.

Un tel système avait l’avantage de motiver les Français. Certes, le Conseil de l’ordre des pharmaciens s’est trouvé ébranlé par les affaires, mais je regrette qu’on ne nous propose pas d’autre solution que la destruction.

Mme Martine Billard – Certes, il faut collecter les médicaments non utilisables pour les détruire dans des conditions protégeant l’environnement. Mais l’idée que des boîtes complètes de médicaments non périmés puissent être détruites – alors qu’elles pourraient dépanner des personnes modestes sur notre propre territoire – me laisse perplexe. Avez-vous des études qui montrent qu’un système capable de gérer des médicaments utilisables est réellement impossible à mettre en oeuvre ? Si c’est le cas, alors je me dis que nous vivons dans une société de gaspillage.

M. Richard Mallié - Je suis d’accord.

M. Yves Bur – Notre premier réflexe, en effet, a été de nous dire : « Quel gâchis ! ». Mais les arguments du ministre sont convaincants… N’allez pas penser, Monsieur Le Guen, que l’inspection de l’IGAS a été déclenchée suite au comportement délictuel de certains pharmaciens…

M. Jean-Marie Le Guen – L’IGAS aime bien faire des commentaires a posteriori.

M. Yves Bur – La gabegie vient de ce que la France est un pays de gros prescripteurs, de gros consommateurs et de gros « jeteurs » de médicaments. Nous nous donnons bonne conscience, à peu de frais, en destinant les médicaments que nous n’utilisons pas aux pays pauvres. Mais, à notre grand regret, cela n’est pas efficace : dans le cas du tsunami, ces médicaments n’ont même pas été distribués.

À notre grand regret, il faut mettre fin à ce système. Dans les pays autrefois considérés comme en voie de développement, les génériqueurs sont implantés et ils peuvent alimenter, pour peu qu’on les soutienne, des chaînes de distribution accessibles.

M. Gérard Bapt - Le ministre suggère de donner un délai de dix-huit mois. Ne pourrait-on pas réfléchir à une solution permettant d’utiliser les médicaments dont la date de péremption est éloignée ? Ils pourraient être confiés à des ONG médicales, dignes de confiance… Le choix de détruire ces médicaments n’empêchera pas les faits délictueux de se reproduire, car une boîte pleine pourra toujours être remise en vente sitôt collectée !

M. le Ministre – Sachez d’abord que trois quarts des boîtes de médicaments ouvertes ne sont jamais terminées, et qu’un cinquième ne sont même pas ouvertes ! Le conditionnement doit être mieux adapté et en la matière, les choses n’avancent pas assez vite à mon goût. Par ailleurs, l’observance du traitement doit être davantage respectée.

S’agissant de la destination des médicaments après collecte, nous avons recherché toutes les solutions possibles depuis la parution du rapport de l’IGAS. Il n’a pas été simple de trouver des partenaires.

Les modes de collecte actuels ne permettent pas de reprendre une boîte après qu’elle a été déposée dans le réceptacle, et le Conseil de l’ordre est habilité à en vérifier le respect. Il vaut mieux ramener les médicaments non utilisés en pharmacie, plutôt que de les jeter n’importe où.

S’il n’est pas idéal, ce dispositif n’en est pas moins préférable à la situation existante. Le problème est complexe et les solutions rares. J’ai donc cherché, depuis deux ans, à répondre au mieux aux exigences du terrain.

M. Richard Mallié - Je m’étonne que l’on remette en cause tout un système parce qu’une poignée d’individus ont commis des erreurs. Cyclamed fonctionnait bien, d’après mes souvenirs d’élu local : n’y changeons rien.

M. le Ministre – Que proposez-vous donc ?

M. Jean-Marie Le Guen – Même si l’on optimise la prescription et l’observance, il restera toujours des médicaments non utilisés. M. Bur nous dit qu’il ne faut pas intervenir dans les marchés pharmaceutiques du Sud, au risque de les déstabiliser. L’idée est intéressante en théorie. On sait, en effet, que la distribution massive de produits alimentaires occidentaux ruine les économies locales. Pourtant, le contexte n’est pas le même, et les médicaments en question n’auront que peu d’impact sur les économies locales, sauf peut-être pour les filières locales de laboratoires occidentaux. La distribution en Afrique de médicaments non utilisés en Europe ne gênera donc qu’un commerce marginal, archaïque et inadapté aux besoins locaux.

Mme Martine Billard - Faut-il vraiment trancher aujourd’hui ? La destruction des médicaments inutilisés suppose de faire campagne auprès de nos concitoyens pour qu’ils les ramènent en pharmacie. Quant à leur utilisation, elle semble cantonnée à l’exportation.

M. le Ministre – Non : les associations locales sont concernées.

Mme Martine Billard - L’exposé des motifs ne donne pas cette impression. En tout état de cause, il faudrait peut-être approfondir la réflexion.

Les sous-amendements 106 et 107, successivement mis aux voix, sont adoptés.
L'amendement 46 deuxième rectification, ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

M. Richard Mallié – Certains m’objecteront que l’amendement 99 n’a rien à voir avec le médicament. Si je le présente dans ce texte, c’est parce que l’Assemblée l’avait adopté lors de l’examen du texte sur les professions de santé, mais le Sénat l’a définitivement rejeté.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable.

M. le Ministre – Même avis, pour des raisons de méthode : nous avons engagé une négociation au terme de laquelle le ministère établira un référentiel de métiers et un autre de formations. L’inscription de la profession d’assistant dentaire au code de la santé publique – à laquelle je ne suis naturellement pas opposé sur le fond – ne peut avoir lieu qu’une fois cette étape franchie.

M. Yves Bur – Je comprends que, comme chacun d’entre nous l’a déjà fait, M. Mallié use ici de pure technique parlementaire.

M. Jean-Marie Le Guen - Dites plutôt de fantaisie !

M. Yves Bur – Néanmoins, cet amendement est ambigu. Les assistantes dentaires sont en fait des secrétaires et des instrumentistes, titulaires du BEPC et d’un CAP. Or, les professionnelss que vous évoquez ici sont des hygiénistes qui interviennent « en bouche » pour des actes non invasifs, préparatoires ou préventifs. Appelons un chat un chat ! Il faut certainement créer des délégations de compétences et de nouveaux métiers, de même que la formation des secrétaires instrumentistes doit relever du ministère de la santé plutôt que des chambres de commerce. Quoi qu’il en soit, le problème que vous soulevez relève des hygiénistes plus que des assistantes dentaires. Peut-être aussi manque-t-il la création d’un ordre à votre amendement, pour boucler la boucle…

M. Claude Evin - Quelle provocation !

M. Yves Bur – Parlons vrai : concentrons-nous d’abord sur la définition des métiers, avant de leur accorder reconnaissance, et ne mélangeons pas deux professions bien différentes, au risque d’empêcher les titulaires d’un BEPC d’accéder à la profession d’assistante dentaire.

M. Jean-Luc Préel - Puisque cet amendement adopté en première lecture a été retoqué au Sénat, il eût été logique d’en rediscuter tout à l’heure, lors de la deuxième lecture du texte sur les professions de santé ; hélas, le Gouvernement souhaite un vote conforme sur ce texte. M. Mallié a donc astucieusement placé son amendement dans le présent texte, même s’il n’ont qu’un rapport lointain.

M. Bur l’a dit : ne confondons pas les assistants dentaires avec les hygiénistes. Certes, leur profession doit être mieux reconnue et leur formation plus adaptée, mais la négociation est en cours. Cet amendement n’a donc pas sa place dans ce texte.

M. Jean-Marie Le Guen - En effet, cet amendement est un implant dans le texte et n’a pas fait l’objet des soins préalables nécessaires (Sourires sur divers bancs). Sur la forme, c’est stupéfiant. Sur le fond, le problème existe, mais nous n’avons pas encore anticipé les besoins à venir des professions tels que les docteurs en chirurgie dentaire…

M. Pierre-Louis Fagniez – Dites plutôt les dentistes, pour ne pas faire d’amalgame ! (Rires sur divers bancs)

M. Jean-Marie Le Guen - Bref, les besoins des professionnels, quelle que soit leur extraction (Même mouvement). Or, il faudra développer de nouvelles professions qui ne seront pas seulement liées à un diplôme, mais à la valorisation des parcours professionnels. On ne pourra pas répondre à la demande de santé des Français si les futurs hygiénistes ou assistants dentaires ne peuvent être recrutés que sur la base d’une formation initiale.

Il ne me semblait donc pas inintéressant que cet amendement figurât dans le texte dont nous allons discuter, si M. Mallié avait eu le courage de l’y déposer. Dans ce cas-là, nous l’aurions voté.

M. Richard Mallié – Règlementairement, il n’est pas possible de réintroduire un amendement portant article additionnel en deuxième lecture à l’Assemblée nationale alors qu’il a été supprimé en première lecture au Sénat.

En outre, si des ambulanciers ou des aides-soignants sont considérés comme faisant partie des professionnels de santé, pourquoi pas les assistants dentaires ? Cela est choquant, y compris pour l’ordre des chirurgiens-dentistes.

Monsieur Bur, il n’est pas seulement question de secrétaires ou d’hygiénistes : j’ai autrefois recruté une jeune femme dont j’ai assuré la formation alors qu’elle n’avait même pas le BEPC. In fine, elle travaillait avec moi « à quatre mains », en véritable assistante dentaire.

S’agissant des hygiénistes, il est vrai que nous sommes confrontés à un problème de démographie médicale et il serait sans doute utile d’agir dans le cadre des transferts ou des délégations de tâches.

La création d’un ordre, enfin, est en l’occurrence inutile puisqu’il n’existe pas de professionnels libéraux dans ce secteur.

Compte tenu de notre débat et des propos de M. le ministre, je retire mon amendement.

L'amendement 99 est retiré.

M. Yves Bur – Une ambiguïté demeure sur le prix applicable aux ventes de médicaments destinés à l’exportation. L’amendement 89 vise à apporter une clarification permettant de ne pas lier ces prix à l’exportation aux prix administrés pour les médicaments prescrits et consommés en France.

Mme la Rapporteure - Avis favorable.

M. le Ministre – Avis défavorable : cet amendement introduirait une distorsion de concurrence entre les grossistes répartiteurs exerçant sur le territoire national, qui pourraient donc acheter aux prix administrés, et les grossistes exportateurs qui ne pourraient acheter qu’à des prix libres et donc plus élevés. Cela constituerait en outre une entrave au principe de libre circulation au sein de l’Union européenne.

M. Yves Bur – Je retire mon amendement.

L'amendement 89 est retiré.

M. Pierre-Louis Fagniez – L’amendement 102 que j’ai déposé avec M. Wauquiez concerne la question de la propriété intellectuelle. Toutefois M. le ministre ayant assuré vouloir proposer une solution consensuelle et Mme la rapporteure m’ayant fait remarquer que le troisième paragraphe de cet amendement était difficilement recevable, je me permets de le retirer au bénéfice de l’amendement gouvernemental.

L'amendement 102 est retiré.

M. le Ministre – Il me semble en effet que notre amendement 47 permet à la fois d’assurer la sécurité des titulaires de brevets de médicaments princeps mais aussi la fluidité de la mise sur le marché des médicaments génériques.

Mme la Rapporteure - Avis favorable.

M. Claude Evin – D’un point de vue rédactionnel, il me semble préférable de substituer au terme « laboratoires », qui n’apparaît pas dans l’article 162-17-4, celui d’« entreprises ».

M. le Ministre – J’accepte cette rectification.

M. Claude Evin – Renvoyer en l’occurrence à un accord entre le CEPS et les entreprises pharmaceutiques ne règle en rien le problème. La rédaction de l’amendement ne permet pas en outre de savoir si l’accord avec le CEPS concerne l’entreprise qui exploite le médicament princeps ou celle qui exploite le générique. Des règles de protection des brevets existent et c’est sur ce plan-là qu’il aurait fallu travailler.

M. Pierre-Louis Fagniez - C’est vrai.

M. Yves Bur – Nous sommes d’accord sur l’objectif. Une telle disposition avait été adoptée au Sénat dans le cadre du PLFSS, et nous y revenons : elle traduisait sur le plan législatif un accord intervenu entre le CEPS et le LEEM qui permettra au CEPS de donner toutes les informations nécessaires aux laboratoires et, ainsi, de les rassurer quant à la protection des brevets concernant les molécules.

M. Jean-Luc Préel – M. Bur s’est tout à l’heure montré très virulent en reprochant à tous ceux qui essayaient d’obtenir une protection des brevets d’être opposés aux génériques. Le problème n’est pas là : outre que le développement des génériques suit son cours, ceux-ci n’ont jamais rien apporté sur le plan de la santé publique ; ils permettent simplement de faire des économies.

M. le Ministre – Et donc d’investir.

M. Jean-Luc Préel – Il s’agit de savoir si ces économies serviront à financer la recherche, indispensable pour trouver de nouvelles molécules. L’équilibre n’est en l’occurrence pas assuré.

Reste le problème de la protection effective du brevet et de la propriété intellectuelle. Dans le cadre du débat sur le PLFSS, nous aurions souhaité qu’elle soit inscrite dans la loi ; vous avez préféré que cela relève du domaine conventionnel. Vous avez assuré que tout serait réglé dans le cadre des discussions avec le CEPS. Dès lors, pourquoi ne pas inscrire dans la loi la protection de la propriété intellectuelle ? L’amendement gouvernemental est loin de résoudre tous les problèmes qui se posent.

M. le Ministre – Il convient également de tenir compte, dans notre débat, de la directive contre la contrefaçon qui apportera des garanties supplémentaires. Dans le cadre du PLFSS, Monsieur Préel, j’ait dit que nous attendions un accord cadre. S’il a été signé, c’est qu’il satisfait également l’industrie propriétaire des princeps, me semble-t-il ! Dès lors, j’ai indiqué que nous pouvions lui donner une valeur législative et l’élever dans la hiérarchie des normes. C’est le sens de cet amendement.

L'amendement 47 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. le Ministre – Sommes-nous capables de favoriser le développement de la recherche-développement en Europe ? Oui, mais seulement 20 % des nouvelles molécules mises sur le marché depuis cinq ans en sont issues contre près de 50 % qui proviennent des États-Unis. L’amendement 50 rectifié propose d’instaurer un abattement de la taxe sur le chiffre d’affaires proportionnellement aux efforts de l’entreprise en R&D. Les firmes qui en bénéficieront seront éligibles au crédit d’impôt recherche en France. Cet abattement sera calculé à la fois sur le volume et la croissance de la masse salariale dédiée à la R&D. Nous adressons ainsi un message clair à l’industrie : investissez dans la R&D en Europe et vous bénéficierez en France d’un crédit d’impôt recherche renforcé !

Cette mesure représente un investissement de 50 millions d’euros pour la recherche pharmaceutique et entrera en vigueur dès 2007.

Mme la Rapporteure - Avis favorable.

M. Yves Bur – Je souhaiterais ici relayer une demande des laboratoires pharmaceutiques. Qu’est-il advenu du Comité stratégique des industries de santé qui devait aussi traiter du médicament ?

M. le Ministre – Sa prochaine réunion aura lieu le 5 février prochain.

M. Yves Bur – Je m’en félicite. Sa création était un excellent signal donné aux laboratoires par le gouvernement Raffarin. Cet amendement en est un autre. Nous souhaitons tous en France une industrie du médicament dynamique et offensive, qui ait des perspectives. Il est important qu’elle sache que le pays la soutient, même si nous avons, légitimement, des exigences fortes à son égard.

L'amendement 50 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. le Ministre – Le Gouvernement n’a déposé un amendement 109 que suite au dépôt des amendements 104 et 105 de la commission. Il ne souhaitait pas initialement faire de proposition sur le sujet, car tout d’abord, ce n’était pas convenable sur le plan formel…

M. Jean-Marie Le Guen - Dites-vous cela pour le Conseil constitutionnel ?

M. le Ministre – L’amendement 109 précise les modalités d’inscription sur les listes départementales de psychothérapeutes pour les professionnels non inscrits de droit visés au troisième alinéa de l’article 52 de la loi du 9 août 2004, mais justifiant d’une expérience professionnelle d’au moins trois ans en qualité de psychothérapeute, à temps plein ou équivalent temps plein, à la date de la publication de la présente loi. Une commission régionale déterminera, compte tenu de l’expérience du professionnel, la formation adaptée exigée pour user de plein droit du titre de psychothérapeute. En attendant qu’il ait accompli cette formation, le professionnel sera inscrit temporairement sur la liste départementale. Les recours contre les décisions des commissions régionales seront portés devant une commission nationale.

Le projet de décret relatif à l’application de l’article 52 de la loi du 9 août 2004 vient d’être transmis au Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche et le sera très prochainement au Conseil d’État. Il prévoit les modalités de la formation théorique et pratique des psychothérapeutes susvisés et précise que cette formation sera assurée par l’université. Je sais combien M. Accoyer, auteur de l’amendement qui a donné lieu à cet article 52, attend avec impatience ce décret. J’avais déjà répondu lors des questions au Gouvernement à une question de M. Fenech sur le sujet. Et, comme je m’y étais engagé, j’ai donné une traduction réglementaire à cet article 52, après avoir tenu beaucoup de réunions et tenté de rapprocher au maximum les points de vue.

Mme la Rapporteure – L’amendement 104 prévoit que pour s’inscrire sur la liste départementale, les professionnels justifiant d’au moins trois années d’exercice sous la dénomination de psychothérapeute, à la date de promulgation de la présente loi, doivent préalablement obtenir l’autorisation d’une commission régionale, composée à parité de titulaires d’un diplôme en médecine et de personnes autorisées à faire usage du titre de psychologue.

M. le Ministre – Si le Gouvernement a déposé l’amendement 109, c’est que le 104 ne lui paraissait pas satisfaisant. Tout d’abord, il n’était pas assez clair, ne précisant pas si ses dispositions s’appliquaient à tous les psychothérapeutes ou seulement à ceux non inscrits de droit. Ensuite, aucune voie de recours n’était prévue. Enfin, la composition de la commission relève du domaine réglementaire. J’invite donc l’Assemblée à adopter l’amendement 109.

M. Claude Evin - Il n’est pas normal que vienne en discussion un amendement relatif à l’exercice de la profession de psychothérapeute dans un projet de loi sur le médicament. C’est bel et bien un cavalier législatif, d’ailleurs étonnant sur le fond puisqu’en général l’approche médicamenteuse et l’approche psychothérapeutique sont antinomiques dans le traitement de la souffrance psychique !

Je ne reviens pas sur l’article 52 de la loi du 9 août 2004. Il y aurait pourtant beaucoup à dire, notamment sur ce troisième alinéa qui permet à des personnes n’ayant reçu aucune formation en psychothérapie de bénéficier du titre de psychothérapeute. La loi ayant été votée, il est normal que le décret d’application soit pris. Les deux amendements 104 et 105 étaient particulièrement inacceptables, et je comprends que le Gouvernement ait déposé le 109 – comme M. Accoyer le lui a demandé.

Sur le fond, pourquoi pas une commission régionale ? Cela paraît en effet un échelon plus pertinent que le département. L’appréciation de la formation requise se fera au vu de l’expérience antérieure du professionnel et sera donc multi-critères, ce qui est louable. Les voies de recours contre la décision de la commission régionale ont été précisées. Bien que largement préférable aux deux autres, cet amendement ne se justifie pas pour autant : il suffit de publier le décret. La moindre des choses eût de toute façon été d’attendre la fin de la concertation avec les organisations professionnelles.

M. Bernard Accoyer - Je remercie le ministre de l’attention qu’il porte à un problème qui touche aux droits mêmes des personnes. L’article 52 de la loi du 9 août 2004 représente une avancée considérable pour la sécurité des malades en souffrance psychique. Il est à l’honneur du Parlement et du Gouvernement d’avoir cherché à combler un vide juridique particulièrement dangereux. Vingt-neuf mois après la promulgation de la loi d’août 2004, le décret d’application, bien qu’annoncé pour très bientôt, n’a toujours pas été publié. Le vide juridique susmentionné a permis que longtemps n’importe qui puisse s’autoproclamer psychothérapeute et en apposer la plaque sur la porte de son cabinet. Cela a fait et continue de faire d’innombrables victimes. Nous devons nous assurer que la personne en souffrance psychique puisse s’adresser à un diplômé ayant suivi une véritable formation universitaire garantie par l’État, c’est-à-dire à un professionnel compétent. Tel est l’objet des amendements 104 et 105.

Je ne peux approuver la rédaction imprécise de l’amendement du Gouvernement. Nous proposons, par l’amendement 104, que les commissions régionales chargées d’octroyer la qualité de psychothérapeute ne soient composées que de diplômés de l’enseignement supérieur. Chacun connaît en effet la force des lobbys… N’ouvrons pas la porte à des officines qui gagnent beaucoup d’argent en dispensant des titres ronflants, mais dépourvus de toute garantie.

Voilà pourquoi je vous invite à repousser l’amendement 109 au profit des amendements 104 et 105. Sans contrarier en rien la prochaine publication d’un décret, nous mettrons enfin un terme à l’attente de nos concitoyens, qui n’a que trop duré. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP)

M. Jean-Marie Le Guen – Dans la plus grande discrétion, car vos textes n’auront guère de publicité en cette période agitée, vous tentez de régler des problèmes de santé publique restés sans solution tout au long de cette législature, qu’il s’agisse des dispositions sur le médicament ou bien de la création d’un secteur optionnel, qui remet en cause les fondements de notre assurance-maladie.

Nul ne met en cause les motivations réelles de Bernard Accoyer, certains psychothérapeutes autoproclamés étant effectivement les représentants de sectes, mais je croyais que nous avions une police : la notion de dérive sectaire figure dans notre droit pénal et la sécurité des personnes est censée être au cœur des préoccupations de ce gouvernement… Ce dont nous parlons relève du code pénal, et non de la sécurité sanitaire ! Il existe bien des problèmes, personne ne peut le nier, mais il faudrait plutôt s’adresser au ministre de l’intérieur…

M. Richard Mallié - C’est facile !

M. Jean-Marie Le Guen – Légiférer sur ce sujet n’est pas simple, car il s’agit d’un domaine qui s’est émancipé de la démarche médicale traditionnelle : la psychiatrie s’est libérée de la neurologie, puis la psychanalyse de la psychiatrie… Si ces évolutions ont été positives sur certains plans, d’autres effets demeurent problématiques.

Sans faire de procès d’intention à Bernard Accoyer, ni le soupçonner de vouloir s’en prendre à la psychanalyse, certains professionnels ont eu l’impression qu’il s’en prenait à des écoles de pensée extra-universitaires au motif de lutter contre les sectes. Pis encore, les amendements qui nous sont proposés tournent autour d’un décret dont nous n’avons pas eu connaissance. Et que font de telles dispositions dans un texte sur le médicament, alors que nous allons débattre tout à l’heure d’un texte portant sur les professions de santé ?

Mais le Gouvernement veut faire adopter au plus vite un second texte : voilà pourquoi ces dispositions se retrouvent ici. Chacun imagine pourtant sans peine les vagues que susciteront nos débats. Cette proposition, surgie d’un hoquet gouvernemental, ne fait que décrire un décret que nous n’avons pas, en invoquant une concertation qui n’est guère présente dans cet hémicycle.

M. Jean-Luc Préel – On peut s’interroger sur ces amendements, qui surgissent à brûle-pourpoint : quelle est la place de la psychothérapie dans un texte transposant une directive européenne sur les médicaments ? Nous aurions besoin d’une véritable loi portant diverses mesures d’ordre social. Faute de quoi nous avons eu une loi de financement de sécurité sociale gigantesque, dont le Conseil constitutionnel a supprimé vingt articles… Et le texte sur les professions de santé, que nous allons bientôt examiner, comporte lui aussi bien des articles dépourvus de tout rapport avec le sujet de fond.

Afin de régler des problèmes en suspens depuis trop longtemps, c’est d’un texte relatif à l’ensemble de la politique de santé de notre pays que nous avions besoin. Nous aurions pu, par exemple, élargir notre discussion aux assistants dentaires et aux ostéopathes…

Mme Martine Billard - Très juste !

M. Jean-Luc Préel – Dans l’intérêt des patients, il serait souhaitable de mener une évaluation des formations et des pratiques, sujets sur lesquels le décret en cours de parution ne satisfait pas tous les intéressés. Quant à la psychothérapie, c’est un sujet important, car elle agit au plus profond de l’être… Nous devons donc veiller à ce que la formation soit adaptée. On peut se demander avec Claude Evin si l’on est compétent en matière de psychothérapie du seul fait d’être docteur en médecine, par exemple...

M. Claude Evin - C’est malheureusement ce que prévoit la loi…

M. Jean-Luc Préel - Est-ce qu’avoir un peu étudié la psychologie suffit ? On peut en douter. Et qu’en est-il de la psychanalyse ? Bien des questions se posent donc.

S’agissant du décret annoncé, j’ai cru comprendre que vous en étiez à sa quatrième version, Monsieur le ministre : concerter, c’est bien, mais il faudrait enfin conclure. L’amendement 109 ne résout pas tout, car un autre décret est prévu, ainsi qu’un arrêté : il faudra donc attendre encore. À quoi servirait donc d’adopter cet amendement, ou bien les 104 et 105 ? Retirons-les tous les trois, et attendons le décret…

M. Bernard Accoyer - Les différents projets de décret s’étant retrouvés sur des sites internet, chacun a pu s’informer…. Je rappellerai seulement que l’inscription sur les listes départementales est de droit pour les professionnels ayant bénéficié d’une formation universitaire incontestable, qu’il s’agisse des médecins, des psychologues ou des psychanalystes…

M. Jean-Marie Le Guen - Il n’y a pas d’université pour les psychanalystes !

M. Bernard Accoyer – Les écoles de psychanalystes apportent des garanties satisfaisantes grâce à leur autodiscipline. En repoussant à nouveau ces dispositions, vous feriez triompher ces charlatans dont la manipulation est la spécialité.

La solution que nous proposons permet de faire droit, avec l’accord de la communauté médicale, psychologique, psychiatrique et psychanalytique – à l’exception bien sûr de quelques individualités médiatiques – et sans entraver la démarche du Gouvernement, à un droit élémentaire, le droit à la sécurité des personnes en souffrance et des malades. Je voterai donc contre l’amendement 109, et pour les amendements 104 et 105.

M. Claude Evin - Il est particulièrement désagréable de voir M. Accoyer s’ériger en unique défenseur des libertés…

M. Bernard Accoyer - C’est le cas !

M. Claude Evin - Mais non ! Il y a simplement dans cet hémicycle des appréciations différentes quant à la manière dont ce problème doit être réglé. Nul ne conteste la nécessité de reconnaître le titre de psychothérapeute – bien d’autres pratiques de médecine parallèle appellent d’ailleurs un renforcement de l’encadrement à cet égard. Notre seul désaccord porte sur la procédure que vous avez souhaité retenir pour établir cette reconnaissance. Le Gouvernement a engagé une concertation sur le sujet. Elle est certainement trop longue, mais la responsabilité en revient à l’article 52 de la loi d’août 2004. Si vous aviez suivi nos propositions – qui apportaient les mêmes garanties, mais avec une procédure plus simple – le problème serait déjà réglé. Mais dès lors qu’une concertation a été engagée, il n’est pas acceptable que vous reveniez sur le sujet dans le cadre du présent texte. Que simplement le Gouvernement publie au plus vite le décret.

L'amendement 109, mis aux voix, n'est pas adopté.
L'amendement 104, mis aux voix, est adopté.

Mme la Rapporteure - L’amendement 105 a été défendu.

L'amendement 105, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

art. 29

M. Jean-Luc Préel - Nous en arrivons à l’article qui pose problème. Il porte sur un sujet essentiel, l’observance, qui concerne surtout les maladies chroniques.

Les médicaments efficaces ont tous des effets pervers. Suivre chaque jour un traitement est une contrainte difficile à accepter. Il est donc important d’obtenir l’adhésion et la confiance du patient. C’est au médecin d’expliquer les raisons du traitement, la stratégie thérapeutique et ses éventuels effets pervers.

Se pose ensuite le problème de l’accompagnement du patient au long du traitement. Pharmaciens, infirmières et associations de malades jouent là un rôle irremplaçable. Mais c’est d’abord aux professionnels d’assurer l’information et le suivi du patient. L’industrie pharmaceutique souhaite devenir leur partenaire. Elle intervient déjà dans la formation continue des professionnels, participe à l’information des médecins, soutient la presse médicale et les associations de malades. Je ne mets pas en doute les intentions altruistes et solidaires de l’industrie pharmaceutique ; mais le but d’une entreprise est d’abord de vendre ses produits. Il ne faut pas se voiler la face : l’accompagnement des patients par l’industrie pharmaceutique existe déjà. Il n’est pas possible de donner un blanc-seing au Gouvernement en lui permettant de légiférer par ordonnance dans ce domaine difficile. Ce sujet mérite un vrai débat. L’amendement de la rapporteure ne nous rassure pas totalement, puisqu’il ne s’applique pas au texte de l’ordonnance. Il y a d’ailleurs fort à parier qu’il n’y aura pas de loi de ratification : nous n’en reparlerons donc pas. C’est pourquoi j’ai déposé un amendement de suppression de cet article, qui porte le numéro 44.

M. Gérard Bapt - Je rejoins l’analyse de M. Préel sur le choix de l’ordonnance. On peut toujours en sourire et dire que cela va de soi s’agissant du médicament. Mais les discussions que nous avons eues lors de la réforme de l’assurance maladie et les réflexions que nous menons avec les responsables de l’UNCAM ou de la CNAM sur le suivi des maladies chroniques et la définition des affections de longue durée – sur laquelle travaille aussi la Haute autorité de santé – ne vont pas dans le sens que vous nous proposez. Il est dommage que les dispositions en question n’aient pas été abordées au moment du PLFSS.

Voyons ce qui se passe chez nos voisins européens. En Grande-Bretagne, ce ne sont pas les firmes pharmaceutiques qui jouent le rôle de levier en matière d’observance et de maladies chroniques, mais le National Health System et les médecins traitants. En Allemagne, ce sont les caisses maladie. Mais là encore, le système est organisé autour du médecin généraliste. La distinction entre ce qui relève du système de santé et l’intervention des firmes pharmaceutiques est donc très nette et précisément codifiée. Dans notre cas, ce sont les réseaux et le médecin traitant qu’il faut promouvoir. Pouvons-nous le faire en quelques minutes ? Mme la rapporteure et M. le ministre ont entendu les inquiétudes qui s’expriment, puisqu’ils ont eux-mêmes déposé des amendements. Il ne s’agit pas seulement de réactions corporatistes : l’intervention des laboratoires pharmaceutiques n’est que trop prégnante dans notre pays.

Nous préférerions donc que ce problème du suivi des maladies chroniques et des réseaux soit abordé dans le cadre de la prochaine législature – ou d’un débat électoral. Il faut faire en sorte que l’information nourrisse les réseaux, non qu’elle les évite.

M. Claude Evin - Je défends dès maintenant mon amendement de suppression 36, qui se justifie par la procédure choisie par le Gouvernement. Ce sujet requiert en effet un examen précis et des réponses adaptées. Or le choix de l’ordonnance ne va pas de soi. Le Gouvernement aurait pu nous proposer quelques articles dans le cadre de ce texte. C’était possible, puisque M. le ministre a déposé un amendement, qu’il se dit prêt à donner au Sénat plus d’informations sur le contenu de l’ordonnance. Pour notre part, nous en sommes réduits à un débat général sur les actions d’accompagnement. Nous ne refusons certes pas d’en débattre, mais nous souhaitons qu’il y ait un certain nombre de garanties. Il est certain que la question des actions d’accompagnement est désormais posée et nous étions les premiers à souhaiter que le débat ait lieu. Tel n’est pas le choix du Gouvernement, même s’il semble que son amendement contienne plus de dispositions que n’en recélait le projet de loi au départ…

À ce stade du débat, ce dont nous sommes absolument sûrs, c’est que le choix du Gouvernement de recourir aux ordonnances pour traiter d’une question aussi sensible est inacceptable.

Mme la Présidente - Sur le vote des amendements de suppression de l’article 29, je suis saisie par le groupe UDF d’une demande de scrutin public.

M. Jean-Marie Le Guen - J’insiste sur le fait que l’on touche là, par un biais presque anecdotique, à un élément essentiel pour l’avenir de l’organisation de notre système de santé. Il s’agit en effet, au-delà de la question du médicament, de la gestion des relations entre les malades chroniques et l’offre de soins. Le Gouvernement n’ayant pas de vision d’ensemble de la question, l’industrie pharmaceutique s’est engouffrée dans la brèche, en considérant que les pouvoirs publics laissaient le champ libre à toutes leurs initiatives. Moralité, ce sont désormais les laboratoires qui assurent une bonne partie de l’information médicale et de la formation continue des professionnels de santé, cependant que la France est surconsommatrice de médicaments, payés trop cher et souvent mal utilisés, toutes les études montrant que l’observance des prescriptions n’est pas satisfaisante.

Mme Martine Billard - Mon amendement 80 vise également à supprimer cet article. Au plan formel, il est pour le moins surprenant, à quelques semaines de la fin de la législature, d’avoir formé le projet de prendre une ordonnance sur ce sujet, après que le Parlement européen a très massivement rejeté la possibilité que les laboratoires interviennent directement auprès des malades atteints de maladies chroniques. Autre motif de stupeur : dans le fond, votre proposition revient sur tout ce que vous aviez défendu jusqu’alors au sujet de la cohérence du parcours de soins, du rôle du médecin traitant et de l’intérêt du dossier médical partagé. À quoi bon tenter de coordonner les prescriptions, si, au final, on laisse la main aux laboratoires ? Enfin, s’il s’agit de former à des gestes techniques tout à fait nouveaux, je ne vois toujours pas l’intérêt de ne pas impliquer les médecins et les infirmières. Pourquoi les déresponsabiliser alors qu’ils sont les interlocuteurs habituels des patients ?

Les dispositions de cet article sont donc inopportunes, et même dangereuses. Il ne fait aucun doute – et peut-on du reste le leur reprocher ? – que les laboratoires feront tout pour essayer de justifier les traitements innovants, ce qui ne manquera pas d’entraîner une dérive publicitaire, commerciale, et peut-être sanitaire.

Mme la Rapporteure – S’agissant des programmes d’accompagnement, nous sommes évidemment déterminés à prévenir les excès qui ont pu être constatés aux États-Unis et nous avons voulu, comme nous y invite l’IGAS dans son rapport de septembre dernier, encadrer leur développement plutôt que de laisser subsister un vide juridique. C’est pourquoi nous nous félicitons des garanties supplémentaires que va apporter l’amendement du Gouvernement. La commission a donc repoussé les amendements de suppression de l’article.

M. le Ministre – Nous nous sommes déjà expliqués longuement sur cette question. Si cet article était supprimé…

M. Claude Evin - Attention à ne pas nous entraîner dans un raisonnement par l’absurde. Assumez vos erreurs !

M. le Ministre – Ce que je veux dire, si vous me laissez poursuivre, c’est que si cet article est supprimé, les programmes, eux, se poursuivront…

M. Jean-Marie Le Guen - Vous pouvez les interdire !

M. Claude Evin - Si nous avons déposé un amendement de suppression, c’est d’abord parce que nous vous reprochons d’avoir choisi cette procédure.

M. le Ministre – Dois-je comprendre que c’est un amendement d’appel ?

M. Claude Evin - Soyons clair : nous ne sommes pas aux responsabilités, vous, oui ! Vous vous êtes mis dans une situation que vous ne pouvez pas assumer.

M. le Ministre – Je joue, comme toujours, la transparence, et j’essaie de poser un raisonnement cohérent. Nous sommes d’accord sur l’idée que les actions en cours se déroulent hors de tout cadre juridique…

M. Claude Evin - Alors, elles sont illégales.

M. le Ministre – Non, car l’AMM européenne les autorise. Il ne s’agit pas d’actions publicitaires…

M. Claude Evin - D’accord sur ce point.

M. le Ministre – …et le cadre juridique actuel ne trouve donc pas à s’appliquer. C’est pourquoi nous préférons légiférer plutôt que de laisser subsister l’insécurité liée à un vide juridique.

M. Claude Evin - Je peux comprendre que le Gouvernement et l’administration aient été obligés d’admettre que pouvaient exister de tels programmes malgré l’absence de fondement légal ou réglementaire. Mais, de votre côté, vous devez comprendre que nous ne puissions admettre que des sujets aussi sensibles soient renvoyés à des ordonnances de fin de législature.

M. le Ministre – Monsieur le ministre Evin, je vous ai déjà entendu présenter des démonstrations mieux étayées. Quelques précisions complémentaires : d’abord, nous sommes bien d’accord qu’il ne s’agit pas d’actions publicitaires ; ensuite, c’est bien l’AMM européenne qui permet de mener ce type d’opérations. Dans la mesure où elles existent, je choisis, moi, de ne pas détourner le regard (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP). Le raisonnement que j’ai tenu aux associations est le suivant : admettons que l’on veuille les interdire…

M. Claude Evin - Ce n’est pas ce que nous demandons.

M. le Ministre – Laissez-moi poursuivre. L’idée de les interdire sans rechercher les voies d’une concertation ne tenant pas la route, nous avons imaginé d’autres solutions. Mais nous n’allons pas nous en tenir à une ordonnance et l’encadrement de ces opérations va être assuré dans la loi. Je vous donne une indication de nos intentions et vous y reviendrez en CMP. Je joue la transparence, comme je l’ai toujours fait.

M. Claude Evin – Nous aussi. Mais nous ne discutons pas encore de votre amendement.

M. le Ministre – J’en ai parlé dans la discussion générale et je sais que vous êtes toujours extrêmement attentif. Je tiens encore une fois à préciser que jamais une relation directe entre la firme et le patient ne sera possible. Nous sommes unanimes là-dessus.

Je comprends vos propositions de suppression. Mais cela ne nous fera guère avancer. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement a déposé cet amendement.

À la majorité de 17 voix contre 6 sur 23 votants et 23 suffrages exprimés, les amendements 36, 44 et 80 ne sont pas adoptés.

M. Claude Evin - Enfin, nous allons pouvoir débattre du fond !

Mme la Rapporteure - L’amendement 70 est rédactionnel.

L'amendement 70, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Ministre – L’article 29 donne habilitation au Gouvernement pour adopter des sanctions administratives. Nous devons en effet harmoniser les sanctions pénales applicables aux produits de santé, pour l’instant très disparates : à titre d’exemple, la commercialisation d’un médicament destiné à l’homme sans AMM est punie de 3 750 euros d’amende, tandis que celle d’un médicament vétérinaire sans AMM est punie de 30 000 euros d’amende et de deux ans de prison ! D’où l’amendement 48.

Mme la Rapporteure - Avis favorable.

L'amendement 48, mis aux voix, est adopté.

M. Claude Évin - J’ai indiqué tout à l’heure pourquoi nous avons déposé l’amendement 37, visant à supprimer l’alinéa 10. Mais j’ai entendu M. le ministre et, fort de l’assurance d’avoir un débat de fond sur l’amendement 103, je le retire.

L’amendement 37 est retiré.

M. le Ministre – Nous en arrivons donc à l’amendement 103, qui énonce les principes sur lesquels seront établis les articles de loi qui remplaceront cet article d’habilitation. Chaque programme sera soumis à une autorisation préalable de l’AFSSAPS, celle-ci devant se prononcer sur l’opportunité du programme et son contenu. Des critères permettront de garantir que le programme vise réellement et uniquement à renforcer le bon usage du médicament – conformité aux recommandations ; conception en cohérence avec les actions prévues par les autorités sanitaires ; avis des associations compétentes. Le médecin devra prescrire le programme et le patient, qui aura à l’accepter, pourra s’en retirer à tout moment. Aucun contact direct entre le patient et le laboratoire ne sera autorisé.

Les programmes devront obligatoirement faire appel à des professionnels de santé et respecter les bonnes pratiques édictées par la Haute autorité de santé, voire être certifiés. Cette nouvelle procédure fera l’objet d’une évaluation. L’autorisation de l’AFSSAPS pourra aussi prévoir une évaluation externe, à la charge de l’entreprise. En cas de dérive, le programme sera aussitôt suspendu. Tel est l’esprit de l’amendement 103.

Mme la Rapporteure - Avis favorable.

M. Claude Evin - L’amendement 103 ne traite que d’une partie des problèmes de la question du bon usage du médicament. Il nous reste donc encore à travailler sur la prise en charge des maladies chroniques, ce qui renvoie à la coordination nécessaire des soins, à l’éducation thérapeutique, à l’organisation de réseaux de santé et à des modalités d’encadrement du type « disease management ».

L’amendement 103 institue un nouveau cadre : il précise que les actions d’accompagnements sont « financées » plutôt que « conduites » par les établissements pharmaceutiques. C’est une avancée intéressante, tout comme l’obligation d’une autorisation préalable.

Il faut encore que nous approfondissions notre réflexion sur le consentement du patient. J’ai été le rapporteur de la loi du 4 mars 2002, qui a consacré l’obligation d’informer le patient et de s’assurer de son consentement, tout au long de sa prise en charge, et j’estime que toutes les garanties sont contenues dans le code de la santé. À trop vouloir rappeler cette obligation, des difficultés sont à craindre : si l’AMM a été accordée, assujettir encore l’entrée dans les procédures d’accompagnement au consentement du patient pourrait en effet compliquer les choses. Une concertation avec les associations de patients me semble nécessaire sur ce point.

M. Yves Bur – L’amendement 90 vise lui aussi à clarifier le débat. Il ne faut pas confondre l’« accompagnement thérapeutique » et le « disease management », les actions de soutien au traitement des maladies chroniques. Nous sommes tous d’accord pour dire que les industries du médicament n’ont pas à intervenir dans l’accompagnement thérapeutique global.

S’agissant de l’apprentissage de la technique d’administration d’un médicament, il revient bien au laboratoire de faire des propositions, validées par l’AFSSAPS au moment de la délivrance de l’AMM. Mais s’agissant du soutien à l’observance d’un traitement, ce sont les autorités sanitaires qui doivent décider des modalités. À cet égard, il serait bon de permettre à la Haute autorité de santé et à sa commission de transparence, voire à l’assurance maladie, d’autoriser de telles actions. Puisque vous vous engagez à réécrire, notamemnt, l’article 12 de l’ordonnance du 14 décembre 2005, pouvez-vous nous préciser si ce sera le cas ?

M. le Ministre – Oui, je suis favorable à l’intervention de la Haute autorité et je souhaite encourager la complémentarité dont vous parlez. Vous aurez toujours la possibilité de corriger le texte en commission mixte paritaire si sa rédaction ne vous satisfait pas pleinement.

M. Yves Bur – Compte tenu de ces engagements, je retire mon amendement.

L'amendement 90 est retiré.
L'amendement 103, mis aux voix, est adopté.

M. le Ministre – L’amendement 49 vise à corriger les distorsions qui existent entre différents codes quant à la classification des substances et préparations chimiques.

Mme la Rapporteure - Avis favorable.

L'amendement 49, mis aux voix, est adopté.
L'article 29 modifié, mis aux voix, est adopté.

Art. 30

Mme la Rapporteure - L’amendement 71 corrige une erreur de référence.

L'amendement 71, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.
L'article 30 ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

M. Gérard Bapt - Sur le vote de l’ensemble, le groupe socialiste s’abstiendra.

L'ensemble du projet de loi, mis aux voix, est adopté.

M. le Ministre – Je tiens à remercier Mme la rapporteure pour l’excellence de son travail préparatoire, et l’ensemble des parlementaires – dont le Gouvernement sollicite la confiance afin de poursuivre la discussion sur l’article 29 – pour la qualité du débat qu’ils ont mené, montrant que ce texte était loin d’être simplement technique (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

La séance, suspendue à 18 heures 20, est reprise à 18 heures 25 sous la présidence de M. Bur.
PRÉSIDENCE de M. Yves BUR
vice-président

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organisation de certaines professions de santé -deuxième lecture-

L'ordre du jour appelle la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi ratifiant l’ordonnance du 26 août 2005 relative à l’organisation de certaines professions de santé.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille - Le texte que j’ai l’honneur de vous présenter aujourd’hui améliore l’organisation des professions de santé en en simplifiant les conditions d’exercice. Il homogénéise les règles de fonctionnement des différents ordres et renforce les garanties procédurales en réorganisant la procédure de conciliation et en prévoyant explicitement les incompatibilités entre chambres de première instance et chambres d’appel. Il simplifie les procédures administratives en préparant la mise en œuvre, dès le mois de mars, du répertoire des professions de santé, qui unifiera les démarches d’enregistrement. Il facilite les remplacements en allégeant les procédures, en particulier grâce à la suppression du régime des autorisations préalables. Il sanctionne plus sévèrement l’usurpation de titres et l’exercice illégal d’une profession et rétablit une hiérarchie cohérente des peines. Il institue enfin un statut de profession de santé très attendu, au bénéfice des diététiciens : leur titre était reconnu par la loi, mais l’exercice de leur profession n’était pas encadré. Ce texte vient donc à point nommé, alors même que nous prenons toute la mesure des maladies liées à l’obésité.

Enfin, certaines dispositions de la loi sur la prévention de la délinquance avaient semé le doute parmi les psychiatres et les associations quant à la nécessité d’adopter une approche globale et cohérente sur les soins sous contrainte. C’est pourquoi vous aviez adopté, dans le projet relatif à la prévention de la délinquance, un dispositif habilitant le Gouvernement à réviser par ordonnance les dispositions de la loi de 1990 modifiant la loi de 1938 sur les hospitalisations d’office ou à la demande d’un tiers. Nous avons voulu qu’un véritable volet sanitaire soit examiné dans un cadre plus propice, d’où l’introduction de ces dispositions dans le présent texte.

Le projet a été amélioré afin d’assurer un meilleur accès aux soins à tarifs opposables et pour compléter le cadre légal du dossier médical personnel. D’apparence technique, il est en fait très concret et améliore sensiblement l’exercice des professions de santé. L’Assemblée avait déjà accompli un travail très important en première lecture ; le Sénat a enrichi ce texte tout en maintenant la plupart des dispositions que vous aviez adoptées.

M. Pascal Ménage, rapporteur de la commission des affaires culturelles - Ce texte, qui peut en effet paraître technique au premier abord, contient des dispositions très importantes pour améliorer concrètement l’exercice des professions de santé, grâce notamment à de nombreuses mesures de simplification.

Alors que le projet comportait initialement dix articles, il en comptait dix-neuf après son adoption par l'Assemblée nationale en première lecture. Suite aux modifications apportées par le Sénat, il est désormais constitué de vingt-six articles.

M. Jean-Marie Le Guen - Et on prétend lutter contre l’obésité ! (Sourires)

M. le Rapporteur - Quinze amendements ont en effet été adoptés par les sénateurs, dont deux à l'initiative du Gouvernement. Seize articles ont été votés dans les mêmes termes par les deux assemblées. Parmi les plus emblématiques : la ratification de l'ordonnance du 26 août 2005 ; la définition d'un cadre légal pour le statut des diététiciens ; l'habilitation du Gouvernement à modifier par ordonnance les dispositions relatives aux soins psychiatriques sans consentement, l'intitulé du projet ayant été complété en conséquence par un amendement de mon homologue.

Dix articles restent donc en discussion : sept articles additionnels insérés par le Sénat et trois de ceux que nous avions adoptés en première lecture. Parmi ceux-ci, deux n’ont fait l'objet que de modifications mineures : le Sénat a ainsi souhaité qu'un décret en Conseil d'État encadre les modalités selon lesquelles la commission de conciliation instituée au sein des conseils départementaux des ordres des professions médicales peut se réunir en formation restreinte, ce qui permet de concilier l'aménagement des règles de procédure préconisé par les instances ordinales des professions médicales avec une sécurité juridique optimale. En second lieu, la Haute assemblée a introduit des dispositions de coordination afin de tirer toutes les conséquences de la suppression du conseil des professionnels paramédicaux libéraux par la loi portant création d'un ordre national des infirmiers. La seule divergence de fond entre les deux assemblées tient à la suppression de l'article 11, inséré par l'Assemblée nationale en première lecture à l'initiative de M. Richard Mallié, et dont l'objectif était de faire évoluer le statut des assistants dentaires.

En revanche, plusieurs articles additionnels ont été introduits par le Sénat afin notamment de permettre l’application de réformes majeures. Deux comportent des ajustements techniques visant, d'une part, à mieux réprimer l'usurpation du titre de pédicure-podologue, de pédicure ou de podologue et, d'autre part, à améliorer le fonctionnement des chambres disciplinaires des ordres des médecins, des chirurgiens-dentistes et des sages-femmes. Cinq reprennent les dispositions du PLFSS pour 2007 qui ont été déclarées contraires à la Constitution par le Conseil constitutionnel au regard, soit du domaine des lois de financement de la sécurité sociale, soit de la règle selon laquelle le Gouvernement doit soumettre par priorité à l'Assemblée nationale les mesures contenues dans une loi financière.

Le Sénat a ainsi repris le texte de l'article 45, issu d'un amendement déposé en première lecture au Sénat, qui modifie les règles de cumuls d'emplois applicables aux directeurs et directeurs adjoints de laboratoires d'analyses de biologie médicale afin de permettre à ceux qui sont médecins biologistes de réaliser des prescriptions ou de pratiquer des consultations, ce qui leur était jusqu'ici interdit ; il a également repris le texte de l'article 96 issu d'un amendement du Gouvernement, qui a pour objet la création au sein de la CNAM d'un fonds des actions conventionnelles destiné à regrouper des ressources et missions aujourd'hui dispersées ; il a de même repris le texte de l'article 68, également issu d'un amendement du Gouvernement, qui institue des règles nouvelles pour la transmission des données des assureurs en matière de responsabilité civile médicale et qui étend les missions de l'Observatoire des risques médicaux en clarifiant son champ de compétence afin de mieux appréhender les accidents médicaux.

Par ailleurs, à l'initiative du Gouvernement, les deux derniers articles de ce projet donnent d'une part la possibilité au ministre de la santé de mettre en oeuvre, par arrêté, un secteur optionnel ouvert aux médecins ayant les titres requis pour accéder au secteur 2 et permettant une pratique de dépassements encadrés, à défaut de conclusion d'un avenant conventionnel ; d'autre part, aménagent les modalités de mise en œuvre du dossier médical personnel afin d'en assurer le déploiement dans les meilleures conditions, s'agissant notamment de sa bonne utilisation par les patients et par l'ensemble des acteurs impliqués dans sa gestion opérationnelle.

Compte tenu de l'ensemble de ces apports et de la nécessité d'engager sans tarder la réforme du régime d'hospitalisation sans consentement, je souhaite que notre discussion permette d’adopter ce projet tel qu'il l’a été par le Sénat en première lecture. Il relève de notre responsabilité d'assurer le plus rapidement possible la mise en œuvre de ces mesures sociales qui bénéficieront à l'ensemble des Français !

Appliquons donc ce vieux proverbe chinois selon lequel, si le bavardage est l'écume de l'eau, l'action est une goutte d'or !

M. Jean-Marie Le Guen - Excellent ! (Sourires)

EXCEPTION D’irrecevabilité

M. le Président – J’ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste une exception d’irrecevabilité déposée en application de l’article 91, alinéa 4, du Règlement.

Nous verrons si M. Le Guen aura lui aussi recours à des proverbes chinois (Sourires).

M. Jean-Marie Le Guen – Ce n’est pas sans gravitude (Sourires) que j’évoquerai des sujets aussi importants pour notre système de santé.

Ce texte était à l’origine un peu étriqué et marqué par une vision corporatiste mais il contenait des éléments positifs, en particulier s’agissant de l’exercice de la profession de nutritionniste. Après une série d’« accidents industriels » et le « retoquage » du PLFSS par le Conseil Constitutionnel, le Gouvernement n’a cessé de multiplier les amendements au Sénat tout comme il a introduit dans ce texte la possibilité de légiférer par ordonnance s’agissant de l’hospitalisation d’office, ce qui a par ailleurs été discuté dans une autre loi. Bref, le processus parlementaire a été singulièrement mis à mal.

Je souligne tout d’abord le caractère particulièrement dangereux de l’adoption de l’amendement relatif au dossier médical personnel : il aura pour effet de radicaliser l’opposition des associations de patients à ce dossier. M. Bapt devant en traiter, je n’insiste pas par ailleurs sur la question de l’hospitalisation d’office en psychiatrie : les contradictions sont profondes entre les dispositions de la loi sur la prévention de la délinquance et les aspirations des associations et des professionnels.

Votre amendement de raccroc sur le secteur optionnel est quant à lui dramatique pour l’avenir de l’assurance maladie puisqu’il sonne la fin des honoraires opposables. Les organismes d’assurance complémentaires se prêteront-ils à ce jeu ? Sans doute y verront-ils un nouveau champ d’intervention, mais est-il raisonnable, pour la santé publique et la maîtrise des dépenses de santé, de s’engager dans cette voie ?

La généralisation du secteur optionnel a souvent été présentée comme une nécessité, notamment dans le secteur de la chirurgie, même si un certain nombre d’acteurs souhaitent l’étendre à l’ensemble des spécialités médicales. Cependant, un article consacré à l’avenir de la chirurgie est paru dans Le Figaro à la fin du mois de décembre et les positions défendues là me semblent les seules de nature à remédier à la crise de ce secteur, l’augmentation des tarifs ne faisant, elle, qu’aggraver la situation. La solution passe par une réforme profonde de la pratique chirurgicale, ce qui requiert une véritable volonté politique et les chirurgiens signataires de cet article sont à l’avant-garde de cette évolution, à l’avant-garde même de l’évolution nécessaire de l’ensemble des pratiques médicales.

Si les pouvoirs publics avaient souhaité ouvrir des enveloppes supplémentaires au sein de l’ONDAM pour engager une réforme structurelle de la chirurgie, nous les aurions bien volontiers votées. Le secteur optionnel n’a rien à voir avec cela. C’est le seul résultat d’une nouvelle fuite en avant corporatiste d’une majorité qui, en fin de législature, consent des largesses financières à certaines catégories socio-professionnelles, qui traditionnellement la soutiennent mais ont toutes raisons de n’être pas satisfaites de la politique conduite à leur égard depuis cinq ans. Nous n’avons eu qu’une réforme médiocre de l’assurance maladie et notre système de santé n’a pas pu évoluer.

Voilà pourquoi nous sommes totalement opposés à ce texte et saisirons le Conseil constitutionnel si cette exception d’irrecevabilité n’est pas adoptée (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. le Ministre délégué – Le Gouvernement invite l’Assemblée à rejeter cette motion qui n’est soutenue par aucun argument tendant à démontre l’anticonstitutionnalité du texte.

L'exception d’irrecevabilité, mise aux voix, n'est pas adoptée.

question préalable

M. le Président - J’ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste une question préalable déposée en application de l’article 91, alinéa 4, du Règlement.

M. Gérard Bapt – Cette question préalable, tout en me donnant l’occasion de compléter l’argumentation développée par M. Le Guen sur l’article 13, portera sur les articles 12 et 14 qui, de diverses provenances, ont été introduits à la dernière minute dans le patchwork qu’est devenu ce texte.

L’article 12 doit son existence à un amendement déposé par le Gouvernement en première lecture. Ses dispositions, conformes à celles du volet « santé mentale » du projet de loi sur la délinquance, actuellement en discussion au Sénat et prises sans concertation, assimilent les malades psychiques à des délinquants.

M. le Ministre délégué – Non.

M. Gérard Bapt - C’est en tout cas ce que nous ont dit les associations de malades.

M. le Ministre délégué – Elles sont d’accord.

M. Gérard Bapt - D’accord pour que ces dispositions soient sorties du projet de loi relatif à la prévention de la délinquance.

M. le Ministre délégué – C’est chose faite.

M. Gérard Bapt - Certes, mais très tardivement.

Vous avez vous-même dû faire en sorte que certaines dispositions relatives à la petite enfance, lesquelles avaient alarmé les associations, ne figurent pas dans le projet de loi relatif à la délinquance. C’est la preuve que le ministre de la santé et le ministre délégué à la sécurité sociale sont plus sensibles au sentiment de la société que le ministre de l’intérieur. Cela laisse-t-il présager certains clivages, dimanche prochain, au congrès de l’UMP ?

M. Pierre-Louis Fagniez – Cessez ces extrapolations, qui n’ont rien à voir avec le sujet qui nous occupe !

M. Gérard Bapt - Vous pouvez bien, Monsieur Fagniez, me permettre cette incidente alors que M. Le Guen vient de décerner un satisfecit à votre collègue et confrère M. Domergue pour l’excellent texte qu’il a écrit, avec d’autres chirurgiens, sur l’article 13 (Sourires).

Devant l'indignation des professionnels de la santé, des associations de malades et des familles, la majorité a cherché à faire machine arrière sans froisser le ministre de l'intérieur, en jugeant « préférable » de retirer le volet santé mentale du projet de loi sur la délinquance. Le Gouvernement a toutefois décidé, par précaution législative et constitutionnelle, que les dispositions seraient maintenues et votées dans le cadre du projet de loi sur la délinquance, ce qui conduit à un édifice pour le moins baroque, puisqu’elles feront aussi l'objet d'une ordonnance. En les faisant voter deux fois, au moins est-t-on sûr qu’elles seront bien adoptées !

Cet article 12, qui touche aux libertés individuelles, est sans rapport avec le présent projet de loi qui traite de la diététique, des pédicures, des podologues ou bien encore de la création d'un conseil régional de l'ordre en Corse. Et pour masquer ce cavalier législatif, vous complétez l'intitulé initial par les mots : « et habilitant le Gouvernement à modifier les dispositions relatives aux soins psychiatriques. » Quel mépris du Parlement et de votre propre majorité !

Cet article n’aborde qu'un aspect du problème de la santé mentale, et de manière fort dangereuse. Après les immigrés, les demandeurs d'asile, les jeunes de banlieue, voire les très jeunes enfants, voilà les malades mentaux présentés comme des fauteurs de troubles ! L'humanisme n'est ni de droite ni de gauche. Depuis deux siècles, il a permis de dissocier la psychiatrie de l'image de l'enfermement. En réduisant comme vous le faites, quoi que vous en disiez, le sujet à un débat sécuritaire, au nom du danger potentiel que représentent les malades mentaux, qu’on est loin des travaux de Battaglia sur l’ouverture ou de Bettelheim sur la névrose institutionnelle. Ce danger existe certes, mais les malades se retournent le plus souvent contre eux-mêmes ! 15 % des Français souffrent ainsi d'une tendance suicidaire et le suicide est l’une des deux premières causes de mortalité prématurée dans notre pays, qui détient ainsi un triste record européen.

Tous les professionnels des prisons soulignent combien les besoins de soins psychiatriques y sont importants. Les professionnels de la psychiatrie, pour leur part, disent que certains malades sont trop dangereux pour le système sanitaire. Que faire pour rompre ce cercle vicieux prison-rue-hôpital ? En cas de conduite déviante, on hésite entre prendre en charge ces malades à l'hôpital ou les renvoyer en prison où ils posent d'énormes problèmes à l'administration, aux surveillants, et à leurs codétenus, qui en sont les premières victimes, comme un drame récent l’a, hélas, rappelé. Avec quels moyens humains et financiers faire face à la situation ? Une actualité tragique témoigne que le cri d'alarme lancé par les professionnels et certains parlementaires était justifié. La dernière expertise psychiatrique du détenu qui a tué son codétenu et s’est livré sur lui à des actes de cannibalisme mentionnait sa schizophrénie et son avocat lui-même avait demandé qu’il soit placé seul en cellule, ce qu’avait accepté le juge d'instruction. Cette demande n’a, hélas, pas été entendue.

S’agissant du traitement national des données relatives aux hospitalisations d'office, tous les représentants du secteur psychiatrique ont dit qu’ils ne l’accepteraient pas dans un contexte sécuritaire aussi affirmé. C’est une confusion entre dangerosité et maladie mentale qui sous-tend la création de ce traitement. Déterminer les patients relevant d'une hospitalisation d’office ne répondra pas à la préoccupation du ministre de l'intérieur de mieux gérer les demandes d'autorisation des armes à feu.

Enfermer quelqu'un contre son gré pour des raisons non judiciaires est un acte très délicat. À un avis circonstancié, vous substituez un avis médical beaucoup plus flou, faisant à Paris, passer la compétence de droit commun du préfet au commissaire de police. Dans la capitale, l’infirmerie psychiatrique de la préfecture de police, survivance du XIXe siècle, est une véritable prison psychiatrique, où s'accumulent depuis deux cents ans des fiches, désormais informatisées, sur des millions de personnes, sans aucun contrôle de la CNIL, ni du juge des libertés. C'est un lieu secret, interdit à toute personne extérieure. Seul le tribunal administratif de Paris en imposant à la préfecture de police que chaque personne internée à l'IPPP puisse voir un avocat, a ouvert une légère brèche. Dernier bastion sans statut juridique pour interner des personnes qui troubleraient l'ordre public, cette infirmerie n’est ni un établissement de santé ni un local de garde à vue. Pourtant en 2005, 2 056 personnes y ont été retenues, dont 1 055 seulement ont fait l'objet d'un placement d'office – ce qui signifie que mille ont été retenues en plein Paris contre leur gré !

Le maire, que vous placez au premier rang, doit être un médiateur. La loi de 1990 avait veillé à ne pas lui confier une responsabilité pour laquelle il serait beaucoup plus exposé que l'administration aux pressions des familles. Imaginez le maire d'une petite commune ayant à prendre une décision d'internement ! La proposition de confier au maire une compétence de droit commun en matière d’hospitalisation d’office est unanimement rejetée par les associations d’élus. Celles-ci sont favorables au maintien du dispositif actuel qui donne la possibilité au maire de prendre, en cas d’urgence, des mesures provisoires, la décision sur demande de l'autorité publique étant prise par le préfet.

Il ne saurait être de politique de santé publique sans politique de santé mentale, alors que 12 % de la population souffrent de troubles anxieux, 3 % de syndromes psychotiques et 15 % de tendances suicidaires. Si demain, un suicidaire ne va pas consulter parce qu'il a peur d'être fiché, nous n'aurons pas fait notre travail qui est de protéger les plus faibles dans notre République.

Il faut combattre les préjugés sur la maladie mentale, notamment sur son caractère dangereux et incurable, et poursuivre le travail engagé en ce sens depuis la Libération. En confondant justice et psychiatrie, prison et hôpital, enfermement et soin, vous éloignez la psychiatrie de la médecine et réédifiez les murs de l'asile. La personne fragile est à la fois le symptôme d’un malaise social et sa victime. Cette vision se retrouve aussi bien dans la pensée progressiste que dans le personnalisme de Mounier. Elle est aujourd’hui supplantée par la vision d'une société plus dure, qui soigne, certes, les plus faibles, mais les tient à l'écart du reste de la société. Notre pays a besoin de solidarité, tant dans le cadre familial que dans la sphère publique, et les droits de l'homme sont inaliénables, même en cas de troubles psychiques. Voilà pourquoi nous voterons résolument contre ce projet de loi.

Un mot, maintenant, sur l’article 14. Le dossier médical personnel devrait fonctionner avec un numéro d’identifiant qui serait le NIR, c’est-à-dire le numéro de sécurité sociale. Pour tenir compte de l’avis du Conseil constitutionnel, nous dit-on, il ne serait plus demandé que l’avis de la CNIL, et non son avis conforme.

Le DMP, institué pour permettre aux malades d’être mieux soignés, doit être totalement sécurisé et la protection absolue des données personnelles de santé garantie. Or, le recours au NIR comporte un risque accru d'atteinte à la protection des libertés individuelles.

L'amendement à l'origine de cet article, adopté par les sénateurs à la demande du Gouvernement, prévoit diverses mesures pour la mise en place du DMP. Il dispose notamment qu'un décret fixera le choix de l’identifiant. Nous craignons pour le succès du DMP si c’est le numéro de sécurité sociale qui est retenu. En effet, celui-ci, contrairement au numéro d'identification santé initialement prévu, est facile à reconstruire à partir de simples informations, portant par exemple sur la date et le lieu de naissance d'une personne. C'est pourquoi son usage a été jusqu'à présent très limité et encadré par les pouvoirs publics et la CNIL, car il constitue l'outil idéal pour croiser des données et interconnecter des fichiers sur une même personne. Dans un contexte où des progrès restent nécessaires en matière de sécurité des données de santé informatisées, toujours convoitées, il convient de prévenir tout risque d'usurpation ou d'accès non autorisé à ces données. L'usage du numéro de sécurité sociale risquerait au contraire d’accroître ce risque.

D’autres identifiants pourraient être utilisés, comme le font déjà l’INVS ou les hôpitaux. En effet, des données aussi intimes que les antécédents psychiatriques, une éventuelle infection par le VIH ou les IVG subies ne doivent pas être banalisées. Nul doute que la CNIL émettra un avis négatif – j’entendais encore hier soir son président s’inquiéter, sur un plateau de télévision, de l’interconnexion croissante des fichiers.

En raison donc des trois derniers articles de ce projet, le groupe socialiste votera contre ce texte.

M. le Ministre délégué – Par la richesse même de son argumentation, M. Bapt a démontré qu’il y avait lieu de débattre. Le Gouvernement recommande donc le rejet de cette motion.

La question préalable, mise aux voix, n'est pas adoptée.

M. le Président – Nous entamons la discussion générale.

M. Pierre-Louis Fagniez – Loin de se contenter de ratifier l’ordonnance du 25 août 2005, ce texte comporte de grandes avancées pour les professions médicales, tout en renforçant la protection des droits des patients et en facilitant leur accès aux soins.

Les articles 7 et 8 permettent tout d’abord une reconnaissance pleine et entière de la profession de diététicien, replacée au cœur des missions de prévention, d’éducation et de prise en charge des pathologies liées à une mauvaise nutrition. Je me félicite également que le Sénat ait introduit dans ce texte des dispositions relatives aux personnes hospitalisées pour des troubles mentaux et qu’il ait modifié en ce sens le titre du projet de loi.

Cette seconde lecture a pour enjeu l’introduction de certaines dispositions issues du projet de loi de financement de la sécurité sociale et censurées pour de purs motifs de procédure par le Conseil constitutionnel. Ces mesures constituant des avancées notables pour les praticiens et les patients, le Sénat a en effet souhaité qu’elles soient adoptées dans les meilleurs délais.

Parmi ces avancées, figurent l'article 10 bis relatif aux médecins biologistes, l'article 11 bis, qui instaure un fonds pour les actions conventionnelles, et enfin les articles 11 quinquies, 13 et 14, portant respectivement sur la responsabilité civile médicale, le secteur optionnel et le dossier médical personnel.

Ce texte tend en outre à mieux protéger les droits des patients et à améliorer l’accès aux soins. Après le travail considérable accompli en amont au sein des commissions, la question sensible des soins psychiatriques sans consentement, inscrite à l’ordre du jour depuis des mois, trouvera en effet une issue juste et équilibrée, répondant aux exigences de sécurité, de contrôle, d’efficacité et de qualité des soins.

Quant aux différentes dispositions initialement adoptées à l’occasion du projet de loi de financement de la sécurité sociale, le travail accompli a été tout aussi sérieux – je peux en témoigner pour avoir été le rapporteur de ce texte –, et les articles que nous allons discuter reprennent fidèlement les travaux menés depuis de nombreux mois.

J’en viens à l’article 13, qui donne au ministre de la santé la possibilité d’instaurer un secteur optionnel pour les spécialistes si aucun avenant conventionnel n’a été adopté avant le 31 janvier 2007. Cette mesure répond à un besoin urgent de nombreux professionnels, notamment les chirurgiens, qui éprouvent depuis plusieurs années de graves difficultés financières. Celles-ci engendrent un tarissement des vocations, alors que les besoins sont loin de diminuer…

En accord avec le Parlement, le Gouvernement propose ainsi de créer un secteur optionnel combinant les avantages du secteur 1 – tarifs opposables et prise en charge satisfaisante des frais médicaux – et ceux du secteur 2 : les honoraires complémentaires devront en effet rester dans des limites convenues, et convenables pour les patients. On peut d’ailleurs imaginer que le secteur 2 s’effacera un jour au profit du secteur optionnel, solution de compromis conciliant la nécessité d’améliorer les conditions de vie de certains spécialistes et l’impératif d’un égal accès aux soins.

Un mot enfin sur le dossier médical personnalisé : loin d’être l’échec industriel décrit par certains, celui-ci n’en est qu’au stade expérimental. Nous continuons en effet à réfléchir à son amélioration en intégrant les enseignements du terrain. C’est pourquoi l’article 14 n’a pas pour vocation de parachever la réforme du DMP, mais seulement de consacrer les leçons tirées de l’expérience, car nous comptons procéder par petite touches afin d’aboutir à une réforme pragmatique et efficace. Il est ainsi proposé de commencer par les pharmaciens, qui possèdent déjà une bonne expérience des procédés informatiques nécessaires.

Sur ce texte qui n’a rien d’étriqué ni de corporatiste, mais qui est tout simplement nécessaire, le groupe UMP apportera tout son soutien au Gouvernement (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean-Luc Préel – Il est curieux que le Gouvernement demande la ratification d'une ordonnance qui ne suscitait aucune difficulté particulière, quand le simple dépôt d’un projet de loi vaut ratification. Il s’agit en réalité de trouver un véhicule législatif pour tenter de réparer une maladresse : celle d'avoir inséré dans le texte sur la prévention de la délinquance des mesures concernant les malades relevant de soins psychiatriques, notamment les demandes d'hospitalisation à la demande d'un tiers, au risque d’assimiler ces malades à des délinquants.

Pis encore, vous avez demandé – et obtenu – l’autorisation de légiférer par ordonnance sur un sujet touchant les libertés publiques, privant une nouvelle fois le Parlement de possibilités de discuter et d'amender le texte. Nous attendons maintenant cette ordonnance et son projet de loi de ratification.

Ce dont nous aurions besoin, c’est d’une véritable loi portant diverses mesures d’ordre social afin de régler les nombreux problèmes qui affectent l'organisation de notre système de soins et de nombreuses professions – les psychothérapeutes, les assistants dentaires ou encore les ostéopathes. À la place de ce DMOS, votre texte comportait initialement de nombreuses dispositions dépourvues de tout rapport avec la ratification de l’ordonnance de 2005 : formation et mode d'exercice des diététiciens, création des ordres de masseurs-kinésithérapeutes et de pédicures-podologues, abrogation de l'obligation de s'inscrire au conseil interprofessionnel, élection par vote électronique des conseillers départementaux de l'ordre des médecins…

J’ajoute que vous avez utilisé la loi de financement de la sécurité sociale pour faire adopter divers cavaliers, dont une vingtaine a été annulée par le Conseil constitutionnel. Parmi ces mesures censurées, vous avez choisi d’en réintroduire un certain nombre dans le présent texte, notamment le DMP et le secteur optionnel.

Sur ce dernier point, je m’étonne que le ministre souhaite s’emparer des commandes alors que le sujet relève manifestement du domaine conventionnel et que la réforme de l’assurance maladie a créé l’UNCAM, l’UNOCAM et l’Union des professions de santé, toutes instances qui devraient normalement se saisir de la création d’un nouveau secteur optionnel. Or, nous devrions maintenant adresser un ultimatum aux acteurs conventionnels…

Si les professionnels souhaitent pouvoir pratiquer des dépassements d’honoraires, il est important d’assurer l’égalité d’accès aux soins et le remboursement des patients. Le Gouvernement s’était engagé en 2004 à créer un secteur optionnel : deux ans plus tard, celui-ci n’est toujours pas opérationnel.

Puisque vous êtes prêt à court-circuiter les négociations conventionnelles en décidant vous-même, Monsieur le ministre, vous pourrez certainement me répondre. Le secteur optionnel sera-t-il réservé aux chirurgiens ou ouvert à tous les spécialistes ? Le sera-t-il pour tout ou partie de leur activité ? Sera-t-on admis définitivement en secteur optionnel ? Les organismes complémentaires devront-ils rembourser les dépassements d’honoraires ? Quelles contreparties prévoyez-vous en termes de qualité des soins et de formation ? Quel avenir envisagez-vous pour le secteur 2 ?

Vous le voyez, il serait utile que notre assemblée tienne, au moins une fois par an, un vrai débat sur les politiques de santé. Il n’est pas normal que nous ne discutions que de l’ONDAM – c’est-à-dire des dépenses remboursables par le régime de base – sans évoquer l’égal accès aux soins, la solvabilisation des dépenses, les remboursements, la prévention et l’éducation à la santé.

Outre la régionalisation qui lui tient à cœur, l’UDF demande un vrai débat sur la politique de santé.

Vous réintroduisez dans le texte les dispositions de la loi de financement de la sécurité sociale relatives au dossier médical personnel et au dossier pharmaceutique. Le premier a vocation à améliorer la qualité des soins. Selon Philippe Douste-Blazy, il devait permettre de réaliser 3,5 milliards d’économies en 2007. Nous en sommes loin ! Il a connu quelques vicissitudes dans le choix des hébergeurs – avec un nouvel appel d’offres – et l’expérimentation. Des problèmes subsistent, en particulier celui du double masquage, qui pourrait le rendre inopérant.

Il reste que ce texte progresse sur ceux points importants, l’identifiant unique et le dossier pharmaceutique. Espérons que le DMP permettra rapidement d’améliorer la qualité des soins.

Ce texte de ratification est devenu un « mini-DMOS ». Dommage que vous n’en ayez pas présenté un vrai ! Il résout cependant quelques problèmes.

La discussion générale est close.

M. le Ministre délégué – Je remercie M. Fagniez du soutien qu’il a apporté, au nom du groupe UMP, à ce texte important. Il a rappelé à juste titre que les dispositions de la loi de financement de la sécurité sociale qui ont été annulées par le Conseil constitutionnel l’ont été pour des raisons de procédure, et non de fond.

Comme le souligne M. Ménage dans son excellent rapport, ce texte est porteur de réelles avancées en matière d’organisation des soins comme en faveur des patients : prévention de l’obésité, avec le statut des diététiciens, soins aux malades psychiatriques, dispositions relatives à la responsabilité civile médicale, qui contribueront à modérer la hausse des primes d’assurance, ou au dossier médical personnel, qui garantiront la sécurité et la confidentialité des données qui sont les conditions de son succès… Quant au secteur optionnel, comme M. Fagniez l’a montré, c’est un secteur d’équilibre. Il s’agit en effet de renforcer l’accès des patients à des soins entièrement pris en charge, tout en assurant aux professionnels une rémunération à la hauteur de leurs compétences. Nous avons besoin pour cela du concours de l’assurance maladie, des organismes complémentaires et des professionnels, qui ont commencé à négocier hier. Cependant, si le Gouvernement fait le pari de la négociation, il n’entend pas se priver des moyens d’agir.

Je partage votre objectif d’améliorer l’accès aux soins des assurés sociaux, Monsieur Préel. C’est l’objet même du secteur optionnel : nous refusons que l’aspiration des spécialistes par le secteur 2 prive les patients de tout autre choix. Cinq groupes de travail ont été mis en place hier. Vous comprendrez dès lors que je ne puisse vous répondre, Monsieur Préel : laissons d’abord se dérouler la négociation !

M. le Président – J’appelle maintenant dans le texte du Sénat les articles du projet de loi sur lesquels les deux assemblées du Parlement n’ont pu parvenir à un texte identique.

article premier ter

L'article premier ter, mis aux voix, est adopté.

art. 6 bis

L'article 6 bis, mis aux voix, est adopté.

art. 10 bis

L'article 10 bis, mis aux voix, est adopté.

art. 11 bis à 11 quinquies

Les articles 11 bis, 11 ter, 11 quater et 11 quinquies, successivement mis aux voix, sont adoptés.

art. 13

M. Gérard Bapt - L’amendement 3 vise à supprimer cet article.

Vous nous dites que la négociation a commencé hier, Monsieur le ministre. Il serait temps !

M. le Ministre délégué – En effet.

M. Gérard Bapt – Heureusement que le Conseil constitutionnel est intervenu : nous risquions d’arriver au terme avant même le début de la négociation ! Je ne suis pas sûr qu’il soit de votre intérêt, en cette période pré-électorale, de mettre en place ce secteur optionnel.

Je regrette que M. Fagniez se soit contenté de répondre par la polémique. La page « Débats » du Figaro du 27 décembre, signée par un certain nombre de vos confrères chirurgiens – dont l’un de vos collègues du groupe UMP – ouvre d’autres pistes que le secteur optionnel. Il y est par exemple question d’« expérimenter le principe d’une rémunération globale, qui ne soit pas à l’acte mais forfaitaire, et tenant compte du temps passé à l’évaluation, aux plages de formation, à l’évolution de la carrière ». Voilà de quoi occuper la prochaine législature !

Nous verrons bien dans quel sens statuera le Conseil constitutionnel si par mégarde, l’Assemblée ne votait pas notre amendement… (Sourires)

M. le Rapporteur – La commission a repoussé cet amendement. Que M. Bapt ne voie pas le mal partout : il n’y a aucune remise en cause de l’accès aux soins.

L'amendement 3, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.
L'article 13, mis aux voix, est adopté.

art. 14

M. Gérard Bapt - L’amendement 4 vise à supprimer cet article. Les certitudes inébranlables de M. le ministre donnent d’autant plus le vertige qu’en ce qui concerne la protection des données personnelles et intimes, nous sommes loin de la perfection. L’inviolabilité des données est en effet tributaire du niveau de sécurité des émetteurs – notamment des cabinets médicaux et des hôpitaux. Les contrôles effectués par la CNIL ont mis en évidence de sérieux défauts de sécurisation des systèmes informatiques. Les expérimentations relatives au DMP ont même montré que les hébergeurs ne pouvaient garantir l’inviolabilité des données ! Chez l’un d’entre eux, une faille majeure a concerné plus du quart des dossiers. Les techniques d’identification des professionnels de santé posent également problème. Ce risque d’aller vers un Big Brother interdit de retenir le numéro de sécurité sociale comme identifiant des données personnelles.

M. le Rapporteur – La commission a repoussé cet amendement : il y va de la mise en œuvre du DMP.

L'amendement 4, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.
L'article 14, mis aux voix, est adopté.
L'ensemble du projet de loi, mis aux voix, est adopté.
Prochaine séance mardi 16 janvier à 9 heures 30.
La séance est levée à 19 heures 30.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

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