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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

1ère séance du mercredi 24 janvier 2007

Séance de 15 heures
53ème jour de séance, 121ème séance

Présidence de M. Jean-Louis Debré

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La séance est ouverte à quinze heures.

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QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

apprentissage

M. Jean Ueberschlag – Monsieur le ministre de l’emploi,…

M. Patrick Roy – Et de la montée du RMI ! (Exclamations)

M. Jean Ueberschlag - …l’apprentissage, filière trop longtemps négligée, représente une voie importante pour l’insertion professionnelle des jeunes, alors que 120 000 d’entre eux quittent le système éducatif sans aucun diplôme. Aujourd’hui, 80 % des apprentis obtiennent un contrat à durée indéterminée à l’issue de leur formation. C’est pourquoi le Gouvernement s’est mobilisé pour développer cette voie d’excellence, notamment dans la loi de cohésion sociale. En juin 2005, vous avez confié à M. Lachmann une mission de valorisation de l’apprentissage, à l’issue de laquelle 1300 entreprises ont signé la charte de l’apprentissage.

Il serait souhaitable qu’une telle démarche soit à présent lancée dans la fonction publique, où l’apprentissage n’a toujours pas la place qui lui revient, malgré le dispositif incitatif que nous avons adopté il y a quelques années. Il y a quelques jours, vous annonciez, pour 2007, quatre nouvelles actions visant à renforcer le plan de développement de l’apprentissage. Au reste, nul n’est besoin d’augmenter les moyens financiers puisque la taxe d’apprentissage – pour peu qu’elle soit bien employée par les collecteurs – permet de couvrir les besoins. Ce dont nous avons besoin, c’est de nouvelles places en apprentissage.

Monsieur le ministre, pouvez-vous présenter ces quatre mesures et dresser un bilan global de votre action en faveur de l’apprentissage ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Gérard Larcher, ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes - Grâce à la loi de cohésion sociale et à la loi pour l’égalité des chances, l’apprentissage a crû de manière significative au cours des deux dernières années : 400 000 jeunes sont aujourd’hui formés sous ce mode, soit 10 % de plus qu’il y a deux ans. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) Parmi eux, 63 000 sont des étudiants titulaires d’un baccalauréat, ce qui montre que du CAP à bac + 1, l’apprentissage est bien devenu la voie d’excellence vers l’emploi que nous avions souhaité soutenir.

Avec les régions, nous avons prévu, dans les contrats d’objectifs et de moyens, que l’apprentissage concernerait 1 % de l’effectif salarié en alternance en 2006, 2 % cette année et 3 % l’année prochaine. Parmi les quatre mesures que vous avez évoquées figurent un effort significatif en faveur de l’orientation en apprentissage – en liaison avec l’Éducation nationale et la délégation interministérielle à l’orientation -, une augmentation sensible du nombre de places en CFA – dans la mesure où il y a aujourd’hui plus de demandes que d’offres - et une simplification du dispositif d’accès à l’apprentissage via la mise en place d’un guichet unique d’enregistrement.

Vous le voyez, en cinq ans, nous avons beaucoup fait pour consacrer l’apprentissage comme une grande voie de formation vers l’emploi. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

chiffres du chômage

M. Gaëtan Gorce – Messieurs les ministres de l’économie et de l’emploi, à trois mois de l’élection présidentielle, vous avez un devoir de vérité sur les chiffres du chômage. Régulièrement contestés, en raison notamment de l’augmentation du nombre de chômeurs radiés, ces chiffres sont vérifiés et validés chaque année par l’INSEE, conformément aux règles du BIT. Or, vous avez décidé que, cette année, les chiffres de l’INSEE seraient publiés non pas en février, mais à l’automne, soit bien après les échéances électorales ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) Cette décision est grave. En effet, l’administration doit, en toute occasion, rester au service de l’intérêt général. A ce titre, les données qu’elle détient doivent être rendues publiques, en vue de parfaire l’information de l’opinion et de la rendre plus objective. En décidant de différer la publication du bilan réel du chômage, le Gouvernement procède à une véritable dissimulation de données, sans aucun doute parce qu’elles ne lui sont pas favorables et que le ministre candidat ne pourra pas s’en prévaloir.

Messieurs les ministres, pouvez-vous nier que – comme chaque année – l’étude de l’INSEE vise à recalculer les chiffres du chômage fournis par le Gouvernement ? Pouvez-vous contester que cette étude vous a forcés, l’an dernier, à recalculer à la hausse « vos » chiffres du chômage pour 2005 ? Pouvez-vous réfuter que la date de publication de l’étude de l’INSEE n’avait pas bougé depuis 1950 ? Pouvez-vous démentir que les chiffres que l’Institut s’apprêtait à publier vous auraient obligés à revoir à la hausse les résultats du chômage pour 2006 ?

Dans l’intérêt du débat démocratique et par respect du citoyen, la vérité, pour une fois, nous obligerait ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Gérard Larcher, ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes - Vraiment, vous avez une vision de la vérité comme des Pyrénées, et vous passez sans vergogne d’un côté à l’autre… (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) Au reste, je vous avais déjà entendu, lorsque le taux de chômage était de 10,2 % de la population active, discuter de la qualité du thermomètre ! Décidément, cela vous ennuie vraiment que nous ayons réduit de 360 000 le nombre des demandeurs d’emploi en 21 mois ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains – applaudissements sur les bancs du groupe UMP) Avec Jean-Louis Borloo et l’ensemble du Gouvernement, nous luttons sans relâche contre le chômage… (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. le Président – Calmez-vous !

M. le Ministre délégué – Et je n’accepte pas que l’on remette en cause le baromètre mensuel transmis par l’ANPE et la DARES…

Plusieurs députés socialistes – Tricheur !

M. le Ministre délégué – Eh bien, oui : le taux de chômage est passé de 10,1 % à 8,7 % à la fin novembre 2006. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) Cette baisse est bien réelle… (« Non ! » sur les bancs du groupe socialiste) et le chômage continuera à reculer dans les temps qui viennent. Ce qui compte pour nous, c’est, quelles que soient les échéances électorales, que les Françaises et les Français qui en sont privés retrouvent au plus vite un emploi ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

dossier médical personnel

M. Jean-Luc Préel – En 2004, notre brillant et très médiatique ministre de la santé défendait la réforme de l’assurance maladie. Nous l’avions critiquée, car elle créait une médecine à deux vitesses et léguait le déficit à nos enfants, mais elle comportait tout de même un élément intéressant : le dossier médical personnel, qui retrace l’histoire médicale de chacun. Dès sa naissance hélas, le péché originel fut commis : M. Douste-Blazy nous disait alors qu’il permettrait de faire 3,5 milliards d’économies. On en est loin ! Sa mise en œuvre, longue et coûteuse, est une fois de plus reportée. Choix de l’hébergeur, numéro d’identification, masquage des informations, mise en conformité du matériel informatique ou encore formation des professionnels : aucune de ces questions n’est à ce jour résolue. Quand le dossier médical sera-t-il opérationnel ? Faute de prendre le temps pour la faire aboutir, n’allez-vous pas tuer cette bonne idée dans l’œuf ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF)

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités Le dossier médical personnel, très attendu, permettra d’améliorer la qualité des soins. Vous l’avez d’ailleurs soutenu avec constance, car vous savez comme nous combien les Français et les professionnels de santé y sont attachés. Il existe d’ailleurs déjà : le dossier communiquant en cancérologie ou l’informatisation de nombreux cabinets en sont les premiers pas. Il faut désormais harmoniser l’ensemble des systèmes informatiques.

Nous n’avons pas attendu ce dossier pour réussir la maîtrise médicalisée des dépenses : l’an dernier, pour la première fois depuis dix ans, les dépenses de santé n’ont augmenté que de 2,4 %. La réforme que vous avez votée est donc en marche, et nous a permis de sauvegarder notre système de santé (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; interruptions sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

Revenons au DMP : conformément à la loi Kouchner de 2002, les données pourront être masquées. Quant au masquage du masquage – qui existe déjà, puisque les patients ne sont pas tenus de communiquer la nature de leur pathologie au médecin – les professionnels de santé s’inquiètent d’une possible mise en cause de leur responsabilité civile. J’ai chargé M. Fagniez de me remettre des propositions en la matière d’ici à la fin du mois. Enfin, l’appel d’offres pour l’hébergeur de référence sera lancé en février.

Je comprends que vous souhaitiez prendre le temps de la préparation, afin de garantir le succès du DMP. Le portail sera donc ouvert en juillet, et le DMP verra le jour cette année : c’est un souhait que nous partageons avec l’ensemble des Français ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

industrie textile

M. François Liberti - Notre industrie textile connaît une crise sans précédent. L’accord multifibres de 1975 a pris fin en 2005 ; depuis, la filière n’a cessé de perdre des emplois. Les fermetures catastrophiques qu’annoncent Arena, Well, Aubade, Eminence et Dim coûteront un million d’emplois. Hier, vous avez pourtant rejeté sans hésiter notre proposition de loi visant à lutter contre les délocalisations.

M. Maxime Gremetz - Honte à vous !

M. François Liberti - Après avoir implanté certaines de ses productions en Italie et en Ukraine, la célèbre entreprise Well a annoncé sa délocalisation en Asie. Au Vigan, 300 postes seront supprimés et les 138 salariés restant jetés dans la précarité. Qu’importe : seul l’intérêt à court terme compte pour l’actionnaire Natexis. Pire encore : l’entreprise va embaucher 40 intérimaires pour satisfaire un carnet de commandes bien rempli ! Monsieur le ministre, laisserez-vous disparaître ce fleuron de l’industrie française ?

M. Maxime Gremetz - Oui !

M. François Liberti - Laisserez-vous détruire un bassin d’emploi déjà en difficulté ?

M. Maxime Gremetz - Oui !

M. François Liberti - Créerez-vous enfin, comme le réclament les députés communistes et républicains, une commission d’enquête parlementaire sur le rôle des fonds d’investissement ?

Plusieurs députés UMP - Non !

M. François Liberti - Le Gouvernement est-il prêt à tout faire pour sauver notre industrie textile, en demandant notamment à la Banque centrale européenne d’utiliser son pouvoir de création monétaire pour financer un véritable plan de sauvegarde en coopération avec les pays du bassin méditerranéen ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains)

M. Gérard Larcher, ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes Vous évoquez la situation de notre industrie textile, et notamment celle de l’entreprise Well, dans le bassin du Vigan. Avec l’aide de votre collègue M. Lecout, les ministères de l’industrie et de l’emploi, se sont emparés de ce dossier depuis plusieurs mois afin de rétablir le dialogue social avant tout (Interruptions sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains). Il fallait s’assurer que l’on pouvait maintenir l’entreprise sur ce site.

M. Jacques Desallangre - C’était parfaitement possible !

M. le Ministre délégué – Nous recevrons une étude sur cette question dès la fin du mois. À la demande du Premier ministre, nous avons exigé des mesures de revitalisation du territoire, qui s’élèvent à 1,5 million.

M. Jacques Desallangre - Ils n’ont qu’à rester !

M. le Ministre délégué – La qualité du plan social et de la revitalisation du bassin du Vigan sont notre priorité (Protestations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains) ! Au-delà des mots, c’est sur le terrain que nous travaillons avec Well, Aubade ou encore Arena, afin de redonner des perspectives aux bassins d’emploi touchés par les restructurations ! (Vives protestations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains ; applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jacques Desallangre - C’est scandaleux !

baisse des impôts et de la dette

M. Jean-Michel Fourgous – Monsieur le ministre de l’économie et des finances, vous nous avez fait part récemment d’une nouvelle inespérée : le déficit budgétaire de 2006, au lieu des 46 milliards prévus, a été de 36 milliards. Quelle leçon ! (Exclamations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste) Il est donc possible, tout en baissant les impôts, de réduire le déficit. Une baisse des impôts redonne du pouvoir d’achat, stimule la croissance et procure ainsi de nouvelles recettes qui permettent à leur tour de réduire encore le déficit. (Même mouvement) C’est une logique qui n’est pas encore comprise par tous, même sur les bancs de cette Assemblée.

M. Richard Mallié - Surtout à gauche !

M. Jean-Michel Fourgous - Beaucoup pensent sincèrement que, pour augmenter le pouvoir d’achat des Français, il n’y a qu’à augmenter les impôts sur le capital, selon cette vieille idée que le capital serait l’ennemi du travail et vivrait sur le dos des salariés.

C’est une double erreur. Contrairement à ce qui est répété à longueur de journée, la part des profits dans la valeur ajoutée loin d’augmenter depuis 2002, a même diminué ! (Exclamations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste)

M. Maxime Gremetz - Arrêtez !

M. Jean-Michel Fourgous - De même, selon Eurostat, la France a la taxation des capitaux la plus élevée d’Europe…

M. Maxime Gremetz - Et alors ?

M. Jean-Michel Fourgous - …avec un taux de 37 %, contre 29 % pour la moyenne européenne.

M. Julien Dray affirmait hier à la télévision que l’imposition sur le patrimoine était plus dure en Allemagne qu’en France. Nouvelle boulette, Monsieur Dray ! L’Allemagne a supprimé l’ISF, et sa taxation du patrimoine est de 0,8 %, contre 3 % en France, selon l’OCDE. Nous ne doutons pas de la bonne foi de nos amis socialistes ; il semblerait plutôt que ce soit un problème de compétence économique (Même mouvement).

Alors que tous les pays se battent pour attirer les capitaux et les talents, comment peut-on encore prêcher l’augmentation des impôts ? (Exclamations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste) Monsieur le ministre, pouvez-vous nous aider à être un petit peu pédagogiques pour nos amis socialistes, à partir de vos bons résultats ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Maxime Gremetz - C’est scandaleux !

M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l’industrie Effectivement, les résultats sont là (Exclamations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste), avec le chiffre le plus bas du déficit budgétaire depuis quatorze ans. Je vous remercie de l’avoir rappelé, Monsieur le député. Conséquence immédiate : une dette qui diminue de 760 millions en 2006, soit plus de 2 % du PIB.

Un député socialiste – Et par rapport à 2001 ?

M. le Ministre – Ceci est l’axe majeur de la politique économique du Gouvernement. La France aura cette année moins recours à son banquier pour se refinancer, puisque l’Agence France Trésor émettra 102,5 milliards de dette au lieu des 105 milliards prévus.

Ceci s’accomplit parallèlement à la plus grande réforme fiscale de ces vingt-cinq dernières années, laquelle se traduit dès cette année par une baisse de l’imposition des Français…

M. Jacques Desallangre - Quels Français ?

M. le Ministre - … et une redistribution de plus de quatre milliards. Tout cela a été possible depuis quatre ans grâce au contrôle des dépenses et parce que la baisse de la dette et des impôts amène le retour de la confiance, donc de la croissance (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains), qui s’élève aujourd’hui à 2 %. Ainsi, plus de dix milliards d’excédents ont été générés par la bonne santé économique de la France…

M. Maxime Gremetz – Pour les seuls actionnaires !

M. le Ministre - …et entièrement réaffectés au désendettement de la nation. C’est vrai que la gauche souhaite plus de déficit et plus de dette (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains). Mais les Français commencent à y voir clair, et c’est une très bonne nouvelle pour la France ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

commémoration de la shoah dans les écoles

M. Claude Gaillard - Ma question s’adresse au ministre de l’éducation nationale. Aux moments les plus sombres de notre histoire, il y toujours eu des femmes et des hommes au comportement exemplaire. À trois jours de la date anniversaire de la libération des camps de la mort, le 27 janvier, date arrêtée par la France et l’Allemagne, nous nous souvenons des rafles, de la déportation, des camps d’extermination dont les noms continuent de résonner douloureusement à nos oreilles : Dachau, Treblinka, Auschwitz…, mais aussi de celles et ceux qui ont su, au péril de leur vie, sauver des juifs, enfants et adultes. Nous sommes reconnaissants au Président de la République de leur avoir rendu hommage au Panthéon au nom de la France tout entière ; les Justes de France étaient des gens ordinaires, qui ont eu un comportement extraordinaire.

Monsieur le ministre, vous qui avez contribué à une diminution significative des actes racistes et antisémites, avez-vous prévu cette année des actions particulières dans les écoles en faveur de ces Justes de France ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF)

M. Gilles de Robien, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche - Monsieur le député, merci d’avoir rappelé la baisse extraordinaire, même si leur nombre reste trop élevé, des actes racistes et antisémites à l’école. Nous en sommes tous responsables, à un titre ou à un autre : le Gouvernement, extrêmement volontariste, les responsables politiques, les milieux associatifs, les enseignants et la communauté éducative, dont la mobilisation a permis une baisse de 20 à 40 % de ces actes. Les enseignants sont particulièrement mobilisés pour inculquer le respect des autres, de la diversité, des différences culturelles, cultuelles et ethniques.

Le 27 janvier, jour anniversaire de la libération d’Auschwitz, sera dans toutes les écoles de France une journée consacrée à la mémoire de la Shoah et de tous les autres génocides. J’ai voulu que soit, cette année, honorée la mémoire des Justes, qui, en prenant de très grands risques, n’ont écouté que leurs sentiments humains pour protéger des femmes et des hommes et beaucoup d’enfants. À l’appel du Président de la République, qui a, aux côtés de Simone Veil, la semaine dernière, apposé une plaque dans la crypte du Panthéon pour leur rendre hommage, le 27 janvier et les jours suivants seront consacrés dans les écoles à la mémoire des Justes. C’est cela, l’école de la France ; c’est cela, la République (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

industrie textile

M. William Dumas - Tout d’abord, permettez-moi de faire remarquer que le ministre du travail n’a pas répondu à la question très précise que lui a posée Gaëtan Gorce (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). Ensuite, je voudrais adresser ma question au Premier ministre, pour lui rappeler certes la situation de l’entreprise Well au Vigan, mais surtout pour l’interroger sur la situation d’ensemble du secteur du textile. Les annonces de suppressions d'emplois et de délocalisations se multiplient : 300 emplois chez Well, 450 chez Dim et 180 chez Aubade. Elles confirment les difficultés que nous éprouvons face à une concurrence asiatique à prix cassés.

Entre 1995 et 2005, les effectifs de l'industrie textile ont été réduits de 40 % par des plans sociaux successifs qui ont supprimé au total plus de 54 600 emplois. Depuis la levée des quotas du textile, le 1er janvier 2005, les importations dans l’Union européenne de sous-vêtements produits en Chine ont bondi de plus 40 % et entraîné une baisse des prix insoutenable pour les entreprises françaises. Face à cette situation dramatique, face à ces salariés venus aujourd'hui en masse manifester leur désarroi devant l'Assemblée nationale, vous ne pouvez, Monsieur le Premier ministre, rester muet. Vous avez récemment promis au secteur automobile 150 000 millions sur trois ans pour la formation et la reconversion des salariés et 400 millions pour la recherche et l'innovation. Une telle aide d’urgence ne pourrait-elle être proposée à l'industrie textile ? Elle permettrait à la fois de respecter l'article 76 de la loi de programmation pour la cohésion sociale du 19 janvier 2005 et de maintenir dans le secteur des unités de fabrications à forte valeur ajoutée, réduisant ainsi la casse sociale. Par quelles dispositions comptez-vous aider l'industrie textile, et plus particulièrement le secteur de la lingerie et des sous-vêtements ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Gérard Larcher, ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes - Face aux salariés des Vosges, face à ceux du Vigan ou de Bourgogne, …

M. Jean-Pierre Brard - On n’est pas face à eux, mais avec eux !

M. le Ministre délégué – …ne croyez pas que nous ne soyons pas conscients de la dimension humaine de chaque dossier. Je peux vous assurer que Jean-Louis Borloo et moi n’oublions jamais que les plans de sauvegarde de l’emploi cachent des hommes et des femmes (Exclamations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains). Avec le député Max Roustan, nous avons beaucoup travaillé sur le dossier Well et considéré les situations individuelles de chacun.

M. Augustin Bonrepaux - Mais que faites-vous ?

M. le Ministre délégué – Dans le secteur du textile, le Gouvernement a engagé dès 2006,…

Plusieurs députés socialistes – Il était temps !

M. le Ministre délégué - …avec l’ensemble des partenaires sociaux, un plan de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences prévoyant une formation pour 6 500 personnes, dont 3 000 sont déjà entrées en formation. Le Premier ministre nous a autorisés à préparer un plan complémentaire, qui devrait être signé le mois prochain (Exclamations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains).

En ce qui concerne la garantie financière, un sujet que nous avons notamment abordé avec Robert Lecou, la garantie Oseo a été doublée pour faire face aux réalités, puisque les moyens antérieurs étaient insuffisants. Les deux pôles de compétitivité pour l’industrie textile et les nouvelles techniques engendrent par ailleurs des relocalisations et le développement d’un certain nombre de secteurs d’activité. Enfin, j’ai eu l’occasion de dire au conseil informel des ministres de l’emploi à Berlin, la semaine dernière, que les accords commerciaux que l’Europe aura à réexaminer d’ici à dix-huit mois devront prendre en compte la norme du travail décent présentée par la Commission, car c’est ainsi que nous pourrons éviter le dumping social (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; protestations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains).

M. Jacques Desallangre - Empêchez les délocalisations !

tgv-est

M. François Vannson – La ligne du TGV-Est constitue un élément essentiel de l’aménagement du territoire. Elle présente une double dimension stratégique, à la fois nationale, puisqu’elle permettra d’assurer la desserte à grande vitesse de tout le quart nord-est du pays, et européenne, en reliant les bassins vosgien, rhénan et suisse à l’Île-de-France. Cette infrastructure représente un atout essentiel pour le développement économique, touristique et social des régions françaises. Les habitants des Vosges ainsi que de l'ensemble des régions traversées sont impatients de voir aboutir ce projet. Le développement de leurs lieux de vie et de leurs bassins d'emploi est fondamentalement lié à la réalisation de cet axe majeur qui irriguera l'est de la France et rapprochera les métropoles européennes de la capitale française. Tous les habitants de l'est de la France attendent depuis de nombreuses années une ligne ferroviaire à grande vitesse. Vous avez lancé avec succès, en juillet, les travaux de la ligne à grande vitesse Rhin-Rhône. Qu'en est-il aujourd'hui du financement de la ligne à grande vitesse est-européenne, et quel est le calendrier des travaux ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Dominique Perben, ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer  La première phase du TGV-est est pratiquement terminée : elle est en cours de test et sera ouverte au trafic commercial en juin. Elle s’arrête à Baudrecourt et permet déjà de gagner beaucoup de temps dans les liaisons avec Strasbourg et les villes de Champagne-Ardenne et de Lorraine. Le problème était ensuite d’enclencher le plus vite possible la deuxième phase, entre Baudrecourt et Strasbourg, bien sûr pour rapprocher encore Strasbourg de la région parisienne, mais aussi pour relier Paris, la Champagne-Ardenne et l’Alsace à Francfort d’un côté et Munich de l’autre, ce qui représente une nouvelle capacité de développement économique.

Ce matin, avec quinze collectivités territoriales, dont les trois régions Champagne-Ardenne, Lorraine et Alsace, nous nous sommes mis d’accord sur une convention de financement qui permet de poursuivre les études et travaux préparatoires pour 94 millions, avec un financement paritaire entre l’État et les collectivités territoriales – sans compter les efforts propres de RFF. Ensuite, il faudra négocier la répartition des crédits – 1,7 milliard – de la deuxième phase proprement dite, de manière à engager les travaux avant 2010. Nous aurons ainsi pu réaliser sans discontinuité cette opération qui représente un atout économique considérable, d’autant qu’en même temps va se réaliser la liaison ferroviaire Rhin-Rhône qui rapprochera également l’Allemagne de l’est et du sud-est de la France. Ce gouvernement aura ainsi montré la priorité qu’il donne au développement ferroviaire et à l’aménagement du territoire (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

fonction publique

M. Jacques-Alain Bénisti – Hier, le Parlement a définitivement adopté le projet de loi relatif à la modernisation de la fonction publique.

M. Maxime Gremetz - Seule la majorité l’a voté !

M. Jacques-Alain Bénisti - Une ère nouvelle vient de s’ouvrir pour cinq millions et demi de fonctionnaires (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains). Un dépoussiérage des textes, dont certains dataient de 1919, a permis de remédier à certaines disparités, certaines incohérences et certains dysfonctionnements. Ce texte ouvre également à chaque fonctionnaire le droit individuel à la formation et permet la reconnaissance de l’expérience professionnelle. De même, il assouplit les règles de mise à disposition afin de faciliter la mobilité entre les trois fonctions publiques. Malgré ces évolutions statutaires, attendues depuis des décennies et propres à redynamiser les carrières de l’ensemble des fonctionnaires, l’une des principales préoccupations de ceux-ci demeure leur pouvoir d’achat.

Le 25 janvier 2006, vous avez, Monsieur le ministre, signé avec les syndicats de la fonction publique un accord visant à l’amélioration des carrières et comportant diverses mesures d’accompagnement social. Le 17 janvier dernier, vous avez encore annoncé d’autres mesures, après négociation avec la CFDT, la CFTC et la CGC. En dépit des revalorisations salariales, ainsi que des mesures sociales et statutaires, en dépit des centaines d’heures que vous avez consacrées à auditionner et consulter les partenaires, cinq syndicats de fonctionnaires appellent prochainement à la grève. Même s’il est de tradition, en période pré-électorale, que chacun fasse entendre ses revendications, pourriez-vous faire le point sur l’application des accords signés et le contenu des mesures prises, notamment en matière de pouvoir d’achat ? (« Allô ? Allô ? » sur les bancs du groupe socialiste ; applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Christian Jacob, ministre de la fonction publique – J’entends des « Allô » moqueurs sur les bancs de la gauche mais nous sommes, nous, à l’écoute des fonctionnaires, ce qui n’était pas votre cas lorsque vous étiez aux affaires ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

L’accord du 25 janvier 2006, le premier signé depuis dix ans dans la fonction publique, a permis d’avancer sur le volet statutaire, notamment les grilles de catégorie C, sur le volet social et le volet indiciaire, trois augmentations ayant été programmées, une de 0,5 % au 1er juillet dernier, une de 0,2 % au 1er novembre et enfin une de 0,5 % au 1er février 2007. Grâce aux économies de gestion, dont le Premier ministre s’était engagé à affecter aux ressources humaines la moitié de leur montant, nous sommes en mesure d’accorder au 1er février une augmentation, non pas de 0,5 %, mais de 0,8 % (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

Par ailleurs, le chèque emploi service universel abondé par l’employeur pour la garde des jeunes enfants, jusqu’alors réservé à la garde des enfants de 0 à 3 ans, a été étendu à celle des enfants de 3 à 6 ans. Nous avons également avancé sur deux autres sujets importants avec la prise en charge de 2 500 places de crèche supplémentaires pour les fonctionnaires et la réservation d’un millier de logements supplémentaires pour les fonctionnaires en mobilité.

Vous le voyez, grâce à une gestion rigoureuse (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) – ce qui n’était pas votre fort, Messieurs, et ne l’est toujours pas –, nous sommes en mesure d’améliorer la situation des fonctionnaires. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

éducation nationale

M. Yves Durand – Monsieur le ministre de l’éducation nationale…

M. Patrick Roy - De la grammaire et du calcul mental !

M. Yves Durand - …depuis que vous êtes à la tête de votre ministère, vous vous gargarisez de déclarations d’autosatisfaction, hélas toutes démenties par les faits. Vous déclarez œuvrer pour l’égalité des chances, mais depuis cinq ans, les inégalités n’ont cessé de se creuser, notamment avec l’apprentissage junior qui exclut du système scolaire dès l’âge de 14 ans les élèves les plus en difficulté (« Faux !» sur les bancs du groupe UMP). Alors que l’école maternelle est l’un des plus puissants facteurs de lutte contre les inégalités, la scolarisation des enfants de 2 à 3 ans est tombée de 37 % à 25 % depuis 2003. L’éducation prioritaire recule, vos collèges dits « ambition réussite » étant dotés au détriment de centaines de ZEP, ce qui replonge de nombreux établissements dans des difficultés qu’ils n’avaient surmontées que grâce au dispositif des ZEP. Les violences contre les personnes à l’école n’ont cessé d’augmenter, au point que le climat s’est dégradé à l’école élémentaire elle-même, comme l’a démontré une récente enquête de la MGEN.

Votre échec est la conséquence directe du plus grand plan de licenciements jamais infligé à l’éducation nationale, avec plus de 26 000 postes d’enseignants supprimés depuis 2003, sans compter ni les aides-éducateurs ni les surveillants. Face à cette saignée, votre sempiternel argument de la baisse des effectifs est fallacieux : vous supprimez en effet un poste dès qu’il y a huit élèves en moins, alors que vous attendez qu’il y en ait quarante-cinq en plus pour en créer un ! (Interruptions sur les bancs du groupe UMP) Et pour racler les fonds de tiroir, vous allez jusqu’à remettre en question les heures de décharge pour des tâches pédagogiques, réellement effectuées, contraignant les enseignants à choisir entre l’alourdissement de leur charge de travail ou l’amputation de leur pouvoir d’achat, déjà en régression depuis cinq ans, comme celui de l’ensemble des fonctionnaires.

Face à ce bilan catastrophique et à la légitime colère des enseignants, il est temps d’assumer enfin les conséquences sur l’école de vos choix politiques et fiscaux en faveur des plus riches. Quand allez-vous enfin, Monsieur le ministre, dire la vérité sur l’état dans lequel vous avez plongé l’éducation nationale ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste ; protestations sur les bancs du groupe UMP)

M. Gilles de Robien, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche - Dans votre question formulée de façon aussi acerbe et me visant si directement, je sens chez vous de l’amertume de n’être pas ministre de l’éducation (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) mais, vu la façon dont vous abordez les problèmes éducatifs, j’espère que vous ne le serez jamais (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; protestations sur les bancs du groupe socialiste). Votre éducation nationale, que vous souhaiteriez gérer, calculette à la main, n’est pas la mienne. Pour moi, ce n’est pas une question quantitative, mais qualitative. Et sur ce point, je rends hommage à la communauté éducative pour le travail de très grande qualité qu’elle mène depuis fort longtemps, et depuis maintenant deux ans, sous mon autorité.

Oui, la maîtrise des fondamentaux est indispensable pour bien commencer ses études, qu’il s’agisse de la lecture, de l’écriture, de la grammaire, qui conditionnent la maîtrise de la langue française, ou du calcul, et en effet du calcul mental. Cela vous gêne car vous êtes l’un des tenants du « pédagogisme » qui a enfoncé dans l’ignorance des générations entières ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Pour ce qui est de l’éducation prioritaire, c’est certes la gauche qui en a lancé l’idée, mais elle en est restée à ce stade ! Lorsqu’il a fallu relancer le dispositif, nous vous avons attendus en vain, et c’est ce gouvernement qui, grâce aux collèges « ambition réussite », a fait en sorte que les moyens soient affectés là où on en avait le plus besoin.

Enfin, je ne vous autorise pas, Monsieur Durand, à traiter de la violence à l’école. En des termes beaucoup plus mesurés et responsables, Claude Gaillard vient, à l’instant, de rappeler que les actes racistes et antisémites y avaient fortement diminué. Rendons-en hommage à toute la communauté éducative qui s’est fortement mobilisée. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

coopération franco-allemande

M. Manuel Aeschlimann - Le traité de l’Élysée sur la coopération franco-allemande, signé en 1963 par le Chancelier Adenauer et le général de Gaulle, constitue l’un des piliers fondateurs de l’Europe. Son objectif était triple : sceller la réconciliation franco-allemande, lier d’amitié les deux peuples et favoriser par là même la construction européenne.

La célébration de la signature de ce traité a été hier l’occasion de rappeler l’intensité et la diversité de la coopération franco-allemande depuis plus de quarante ans, sur le plan politique, commercial, éducatif et culturel. Le couple franco-allemand s’est noué au fil des ans, chacune des étapes de cette relation approfondissant la construction européenne.

Au moment où débute la présidence allemande de l’Union européenne, quelle importance revêt, selon vous, le dynamisme du couple franco-allemand ? Quel sera, Madame la ministre, son rôle dans la relance de la dynamique européenne ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Plusieurs députés socialistes – Allô ? Allô ?

Mme Catherine Colonna, ministre déléguée aux affaires européennes - La relation franco-allemande est effectivement particulière, et elle le restera. C’est notre histoire qui le veut, de même que notre responsabilité propre dans la construction européenne et notre proximité, la France et l’Allemagne étant chacune le principal partenaire commercial de l’autre. À cela s’ajoute notre volonté commune de bâtir une Europe politique, destinée à tirer le meilleur parti de nos atouts et à nous protéger en cas de besoin.

Depuis quatre ans, le 22 janvier a été institué « journée franco-allemande » dans les écoles – et partout ailleurs. Il s’agit de montrer que notre relation, bien vivante, touche de nombreux aspects de notre vie économique et sociale, de notre culture et de l’éducation. Je me suis ainsi rendue hier, avec mon homologue allemand, Günter Gloser, dans un lycée et dans une entreprise accueillant de jeunes élèves. Nous avons également lancé le nouveau site internet franco-allemand, puis nous avons rendu public, en compagnie avec Maria Bohmer et Azouz Begag, le rapport franco-allemand sur l’intégration et l’égalité des chances.

En Allemagne, ce sont plusieurs centaines d’élus et de responsables politiques, à commencer par la chancelière fédérale, Mme Angela Merkel, qui se sont rendus à cette occasion dans les écoles, les entreprises et les associations. J’y vois le signe que l’Allemagne est aussi attachée que nous le sommes à la qualité de notre relation. En matière d’énergie, d’environnement et d’immigration, mais aussi en ce qui concerne les institutions, nous travaillerons main dans la main avec la présidence allemande, avec l’objectif de relancer le processus communautaire.

Si vous le permettez, Monsieur le Président, je voudrais enfin évoquer la mémoire de Jean-François Deniau. Celui qui vient de nous quitter était un homme d’engagement et de conviction, mais aussi et surtout un grand Européen. (Applaudissements sur tous les bancs)

délais de paiement dans la filière automobile

M. Jean-Marie Binetruy – Monsieur le ministre délégué à l’industrie, ma question porte sur les difficultés traversées par la filière automobile, en particulier les équipementiers et les sous-traitants. Ils ont pourtant fait des efforts pour innover, notamment en participant aux pôles de compétitivité – vous avez pu le constater à l’occasion de votre récent déplacement à Sochaux, où vous avez été suivi par M. Larcher, ministre délégué à l’emploi et au travail.

Afin d’aider ces entreprises, nous devons résoudre la question des délais de paiement, particulièrement longs dans notre pays puisqu’ils atteignent 90 jours « fin de mois », soit en réalité 105 jours en moyenne. À la demande de Thierry Breton, vous avez donc créé, voilà un an, un groupe de travail, qui a débouché sur la signature d’un code de bonnes pratiques. De nombreuses difficultés pratiques ont ainsi été réglées, mais la question des délais de paiement reste en suspens, alors que la situation financière des PME en dépend.

Vous avez alors demandé à notre collègue Saddier, député de Haute-Savoie, département où le poids de la sous-traitance est notable, de poursuivre la concertation et de vous faire des propositions. Son rapport, remis le 19 décembre dernier, contenait de nombreuses pistes concrètes, en particulier une proposition de loi. Vous avez ensuite imparti un délai aux fédérations professionnelles – la mi-janvier – pour trouver un accord.

Pouvez-vous nous indiquer où nous en sommes, Monsieur le ministre ? Les acteurs de la filière automobile sont-ils parvenus à un accord ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. François Loos, ministre délégué à l’industrie  Nous avons abouti à un accord sur la réduction des délais de paiement, Monsieur Binetruy : je viens même d’assister à la signature des principales fédérations professionnelles.

Sur cette question, véritable serpent de mer depuis des années, nous avons obtenu un résultat (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP). Nous le devons au dépôt d’une très bonne proposition de loi de Martial Saddier (Mêmes mouvements), mais aussi à la volonté du Premier ministre de fixer un délai très clair, au-delà duquel la loi devait intervenir.

Cet accord porte sur un milliard d’euros de trésorerie, qui reviendra aux équipementiers. Vous imaginez sans peine leur satisfaction… (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

La séance, suspendue à 15 heures 55, est reprise à 16 heures 15, sous la présidence de M. Warsmann.
PRÉSIDENCE de M. Jean-Luc WARSMANN
vice-président

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loi organique statut de l’outre-mer (suite)
dispositions relatives à l’outre-mer (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d’urgence, du projet de loi organique et du projet de loi, adoptés par le Sénat, portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l’outre-mer.

Mme Gabrielle Louis-Carabin – Depuis plus de vingt ans, la question du statut se pose aux Antilles. En 1998, Philippe Chaulet avait déposé une proposition de loi dotant Saint-Barthélemy d’un statut particulier. La majorité précédente avait relancé la question, mais sans faire la réforme constitutionnelle nécessaire. C’est le 28 mars 2003 qu’elle fut entreprise, créant les collectivités d’outre-mer, régies par l’article 74 de la Constitution.

Ces deux projets sont l’aboutissement d’un processus mené avec courage et détermination par notre majorité, conformément aux engagements du Président de la République, pour donner à l’outre-mer la maîtrise de son développement. Comme l’exige la Constitution révisée, ils ont été soumis préalablement au vote populaire, le 7 décembre 2003. Les électeurs de la Martinique et de la Guadeloupe ont alors préféré maintenir le statu quo ; ceux de Saint-Martin et Saint-Barthélemy ont massivement approuvé la modification statutaire profonde proposée par leurs élus.

Je suis choquée d’entendre aujourd’hui ceux qui voulaient imposer un changement institutionnel de manière dictatoriale, mépriser cette décision populaire. Et ceux qui disent parler en leur nom personnel me semblent surtout refléter l’opinion d’un groupe de démagogues. Si c’était la gauche qui présentait ce projet, elle ne serait pas en train de faire des comptes d’apothicaire pour critiquer le Gouvernement.

M. Joël Beaugendre – Très bien !

Mme Gabrielle Louis-Carabin – L’élaboration de ces projets a certes pris du temps. Mais ils respectent le choix démocratique des électeurs. C’est mieux que la démocratie participative !

Dans le cadre institutionnel nouveau, Saint-Martin et Saint-Barthélemy auront plus d’autonomie, et il appartiendra à leurs élus de prendre leurs responsabilités pour relever les défis économiques et sociaux.

Deux postes de sénateurs ayant été créés, il serait normal que Saint-Martin et Saint-Barthélemy bénéficient chacune d’un mandat de député, pour défendre avec la légitimité de l’élu au suffrage universel les intérêts de leur collectivité.

Ces projets contiennent également des dispositions importantes pour préciser, conformément à l’article 73 de la Constitution, les conditions dans lesquelles les assemblées délibérantes des départements et régions d’outre-mer seront habilitées à adapter elles-mêmes les lois et règlements et à fixer les règles applicables sur leur territoire dans des domaines précis, relevant de la loi, et pour lesquels elles pourront ainsi faire du « sur mesure ». Une telle logique aurait pu être utilisée pour réorganiser le transport interurbain de voyageurs en Guadeloupe.

La loi ordinaire contient également certaines dispositions que je tiens à souligner. D’abord, la ratification de l’ordonnance du 1er août 2003 confirmant le libre choix de l’allocataire des prestations familiales dans les DOM, comme je le souhaitais dès 2003, rétablit l’égalité avec la métropole. Ensuite, on accordera une aide pour le transport aérien à nos compatriotes vivant en métropole qui ne peuvent assumer ces frais lors du décès d’un proche parent. J’espère que la dotation de continuité territoriale sera abondée. Enfin comme nous le demandions avec Joël Beaugendre dans une proposition de loi déposée en août 2002 pour la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane et Saint-Pierre-et-Miquelon, les législatives et les présidentielles auront lieu le samedi, veille du jour de scrutin en métropole, afin de limiter les conséquences du décalage horaire. Connaître de façon anticipée les résultats du scrutin en métropole influence en effet fortement le vote des électeurs.

Madame Taubira défendra un amendement créant un droit additionnel à l’octroi de mer au profit des villes centres des DOM. Le refusant pour la Guadeloupe, je ne le voterai pas.

Ces deux projets importants vont nous permettre d’adapter la loi à nos caractéristiques. Je les soutiendrai. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Alfred Marie-Jeanne - Ces projets ont des aspects pour le moins contrastés. D’un côté, Saint-Barthélemy et Saint-Martin accèdent à une autonomie prometteuse – trop large même selon certains. Nous saluons cette évolution et leur souhaitons bonne chance. Mais de l’autre, on maintient la Martinique dans l’immobilisme. On ne fait que retoucher les compétences existantes, sans lui attribuer de réels pouvoirs. Pour la moindre demande d’habilitation, la procédure devient encore plus compliquée, et toute possibilité d’agir est encadrée de façon étouffante. Est-ce cela, l’évolution ? On nous enserre dans un carcan étroit.

À l’avenir, tout véritable changement passera par la suppression de cette anomalie que constitue l’existence de deux collectivités, donc deux assemblées, sur un territoire restreint. Doublons, émiettement, enchevêtrement, coût excessif, autant d’effets pervers qui ont rendu la gestion parfois impossible, y compris pour les services de l’État. Chacun en est réduit à des expédients pour régler ses petits problèmes.

La Martinique est comme un gommier ivre, dont la trajectoire fluctue au gré d’initiatives qui s’annulent les unes les autres. Où est la lisibilité, si souvent réclamée par les ministres, sous tous les gouvernements ? Ce n’est que confusion et gaspillage, et ce qu’on nous propose n’y portera pas remède, puisque la logique multicéphale est renforcée. Pour prendre un exemple, la Martinique ne parvient pas à régler le problème du transport maritime faute d’une autorité organisatrice dans ce domaine. Seule l’unité institutionnelle permettrait de rationaliser l’action administrative et les politiques publiques. Elle est donc plus nécessaire que jamais. À la place, on nous propose un pouvoir d’adapter les lois encadré au millimètre. Étant donné les contraintes à surmonter, l’exercer sera un vrai parcours du combattant. En réalité, loin de libérer l’initiative locale, on va la ligoter encore plus.

Aussi faut-il rétablir un fonctionnement rationnel des institutions afin d’en finir avec un enchevêtrement de compétences qui nourrit les conflits, le trop-plein institutionnel sans pouvoirs substantiels, la déstabilisation des finances publiques des collectivités au détour d’amendements déposés sans leur avis – comme dans le cas, flagrant, du droit additionnel à l’octroi de mer en faveur des villes capitales.

Je conclus en citant les Cahiers de l’Institut de la décentralisation, dans leur livraison de décembre dernier, revue où s’expriment toutes les philosophies politiques. Les auteurs, parlant de la France, déplorent : trop de niveaux de pouvoirs publics, trop de collectivités locales, souvent trop petites, trop peu de lisibilité des responsabilités politiques pour les citoyens, trop d’emprise étatique. Et les Cahiers d’ajouter : « Le pouvoir central ne peut continuer à légiférer sur tout et à tout réglementer ». L’Institut de la décentralisation préconise aussi une réaffectation plus équitable des produits fiscaux, lesquels bénéficient surtout à l’État actuellement. Je vous laisse juge de ce qui se passe à 7 000 kilomètres d’ici !

Les auteurs considèrent que deux réformes doivent donc être sérieusement envisagées. La première consisterait à supprimer les départements dans les zones fortement agglomérées comme l’Île-de-France ou Rhône-Alpes. La seconde tendrait à revenir sur l’idée de fusionner le conseil général et le conseil régional dans l’outre-mer, où la superposition géographique et institutionnelle de ces deux niveaux de collectivités est tout à la fois pure et parfaite géographiquement, et confondante institutionnellement.

Que révèle cette double démarche contradictoire ? D’un côté, pour la métropole, déverrouillage et autonomie régionale renforcée ; de l’autre, pour la Martinique, enfermement délétère maintenu, et même renforcé. Une telle situation ne peut perdurer car elle est contre-productive, alors que nous vivons dans un monde où l’évolution et l’adaptation permanentes sont devenues la norme. Mieux vaut donc les accompagner plutôt que les entraver. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Mansour Kamardine – Permettez-moi d’abord de saluer le rapporteur, M.  Quentin, et de lui dire combien nous apprécions son travail remarquable chaque fois que lui est donnée l’occasion de s’occuper de Mayotte. Je sais, Monsieur le rapporteur, que vous portez Mayotte dans votre cœur, comme je la porte moi-même dans mes tripes.

Le présent projet s’inscrit dans la continuité de l’immense travail accompli au cours de la législature : loi constitutionnelle relative à la République décentralisée – laquelle a vu nos collectivités inscrites dans la Constitution, et vous imaginez ce que cela représente pour Mayotte quand on sait qu’elle fait l’objet d’une contestation internationale – ; loi de programme pour l’outre-mer, qui s’est traduite par plusieurs avancées considérables pour nos territoires lointains.

Le projet tire surtout les conséquences de la première de ces deux lois. Il donnera un nouveau souffle aux débats démocratiques locaux, avec l’extension du référendum local et du droit de pétition. Il franchit aussi une étape supplémentaire dans l'intégration de Mayotte à la République, puisqu’il prévoit une application de plein droit de l'ensemble des dispositions législatives et réglementaires, à l'exclusion des six matières que je propose de faire évoluer par la voie de l'habilitation.

L'adoption du régime législatif d'assimilation est sans nul doute la mesure phare du texte pour ce qui concerne Mayotte, car elle prend résolument le chemin de la départementalisation juridique. Fort de cette heureuse évolution, l'ensemble de la classe politique mahoraise avait souhaité franchir l'ultime étape, la consultation de la population en vue de l'accession de l'île au statut de DOM. Les leaders historiques de ce combat, Younoussa Bamana, Marcel Henry et Zoubert Adinani, les parlementaires de Mayotte, le conseil général, les conseils municipaux ainsi que l'ensemble des formations politiques locales avaient saisi le Président de la République d'une requête en ce sens.

Nous avons regretté qu'une fois encore, la République n'ait pas souhaité nous accompagner. Dans cet esprit, et considérant que rien ne s'oppose désormais à une telle évolution, j'avais espéré pouvoir défendre un amendement tendant à rapprocher l'échéance de ladite consultation. Malheureusement, les intégristes de l'article 40 ne l'ont pas accepté, comme ils ont rejeté plusieurs autres amendements importants. Nous aurons certainement l'occasion d'y revenir.

Je ne doute pas de votre soutien, Monsieur le ministre, ni de celui de l'ensemble de la représentation nationale, pour reprendre ces amendements. Et je ne doute pas non plus que vous nous accompagnerez tout au long de ce débat, pour conforter l'ultime étape que nous sommes en train d'écrire. Tel est le sens des amendements liés à la modernisation du fonds intercommunal de péréquation au profit des communes mahoraises, à l'éligibilité des communes à la dotation de premier adressage, à l'extension juridique du partenariat entre le public et le privé, enfin à la définition d'une politique de gestion plus rationnelle de la partie urbanisée de la zone des pas géométriques. Vous voyez, Monsieur le ministre, que Mayotte représente un vaste chantier législatif !

Depuis juin 2002 la majorité a résolument – et définitivement – engagé notre collectivité dans la modernité. Que de chantiers législatifs ouverts et réalisés ! À cette heure, je pense, non sans émotion, à cette législature qui va bientôt s'achever et à tout le travail accompli. Je pense à la tâche que je m'étais assignée il y a presque cinq ans, telle que l’exprimait mon slogan de ma campagne : « Faire entendre la voix de Mayotte ».

M. Éric Raoult - Très bien !

M. Mansour Kamardine - Pour bien comprendre les enjeux et le chemin parcouru, il faut se remettre dans le contexte d'il y a cinq ans. Qu'avons-nous réalisé depuis lors ? L’inscription de l'île dans la Constitution, en dépit de la revendication internationale qui pèse sur nos têtes ; l’extension des trois fonctions publiques ; l’extension de la sécurité sociale ; la création des trois chambres consulaires ; l’adaptation de la politique de l'immigration clandestine aux contingences locales ; la modernisation du centre hospitalier… Sur ces différents fronts, nous avons rattrapé plusieurs décennies de retard et engagé le territoire dans la voie du développement durable.

Le débat ouvert dans le cadre de cette loi organique doit nous permettre de franchir la dernière étape, attendue par les Mahorais depuis près d'un demi-siècle. C'est en effet le 12 décembre 1958 que MM. Soufou Sabili, Ahmed Sabili, Abdou Raquib et Marcel Henry, conseillers à l'assemblée territoriale des Comores, ont déposé la première résolution tendant à faire accéder notre île au statut de département d'outre-mer. Cinquante ans au cours desquels la République a feint d'ignorer la pertinence et la légitimité de notre revendication ; cinquante ans au cours desquels certains ont même espéré que la jeunesse mahoraise trahisse la cause des anciens ; cinquante ans de déception, et, fort heureusement, en même temps, de ténacité, d'engagement et d'espérance.

Mes chers collègues, à ceux d'entre vous qui ne connaissent pas encore Mayotte, je voudrais rappeler les humiliations de toutes sortes dont nous avons été l'objet pendant ces trente dernières années pour avoir revendiqué le droit d'être Français ! Brimades allant jusqu'à contester notre liberté de choisir notre destin dans la République et à mettre en doute notre capacité à l’exprimer de manière éclairée. Humiliation publique allant jusqu'à chasser des conférences régionales sur le sida, à Maurice, la délégation mahoraise, comme si cette pandémie choisissait ses victimes entre les nationalités et les frontières. Humiliation allant jusqu'à refuser la participation de notre jeunesse aux Jeux des îles de l'océan Indien…

Tout a été fait, parfois avec le regard complice de la France, pour nous détourner de notre objectif. Trente années nous séparent de ces agressions qui n'ont pas terni notre détermination et notre foi républicaine. Plus que jamais nous croyons à la République, et, du reste, comment pourrait il en être autrement, alors que depuis près de 170 ans, elle nous berce de ses valeurs de liberté, d'égalité et de fraternité.

Aujourd'hui, plus qu'un sillon, c'est une route de la départementalisation que nous avons ouverte. Oui, chers collègues, en acceptant les efforts de modernisation du statut civil de droit local, la société mahoraise a démontré à nouveau à la face du monde qu'elle avait fait le choix irrévocable de la République. Vous comprendrez donc, Monsieur le ministre, que les Mahorais attendent de vous que vous leur parliez des ambitions de la France sur leurs revendications institutionnelles.

Qu’il s’agisse de la départementalisation ou de l'accession au statut de région ultra-périphérique, il est de l'intérêt de notre collectivité de sortir enfin du « provisoire permanent ». Le général de Gaulle nous a appris que rien de grand ne se construit ni ne dure sans des institutions fortes. Les questions institutionnelles sont donc au cœur de notre pacte républicain. À plusieurs reprises, vous avez souhaité que nos collectivités ultramarines construisent leur avenir dans la France, au rythme décidé par ses populations. S'agissant de Mayotte, la population a fait les choix politiques et institutionnels que je viens de vous décrire. Elle a aussi engagé son développement économique pour favoriser durablement l'emploi. J’espère que le contrat de projet en cours de discussion répondra à cette exigence de développement durable.

Monsieur le ministre, la législature s'achève. Elle restera comme celle qui a posé le principe de justice sociale, avec une augmentation continue du SMIC, la modernisation de la santé et de la sécurité sociale ou le déplafonnement des allocations familiales. La prochaine législature devra être celle de l'égalité sociale, pour permettre à chacun d'avoir foi en son avenir, à Mayotte même. Je pense notamment à ceux qui travaillent 39 heures par semaine et qui exigent l'égalité salariale. Je pense aux femmes qui sont contraintes de s'expatrier faute d'un développement rationnel des minima sociaux. Je pense à ceux qui ont travaillé plusieurs décennies et ne perçoivent pourtant qu’une pension de misère – à peine 250 euros. À Mayotte comme dans le reste du territoire, les besoins élémentaires d'un enfant sont les mêmes, quelles que soient la couleur de sa peau ou la religion de ses parents. Il a notamment besoin d’être nourri, et c’est à la grande surface du coin – où les prix sont de 40 % supérieurs à ceux pratiqués en métropole – que les parents s'approvisionnent le plus souvent. Je pense aussi au fait que lorsque nos salariés perdent leur emploi, ils ne bénéficient d'aucune aide sociale.

La législature qui vient doit se fixer l'objectif du rattrapage des salaires et des minima sociaux, et celui de l’intervention des ASSEDIC dans notre territoire. J’entends déjà les cris consternés qui ne manqueront pas de s’élever pour chercher à justifier l'injustifiable : la discrimination que nous subissons serait liée au fait que nous ne cotisons pas aux mêmes niveaux que les autres ! Permettez-moi de répondre par anticipation que discrimination et République n’ont jamais fait bon ménage. L'exigence morale d'une égalité de traitement de tous les enfants de la République devant les charges publiques nous oblige, afin que tous les Mahorais se sentent fiers d’être pleinement Français.

Oui, les Mahorais sont prêts à assumer les mêmes devoirs que les autres, en contrepartie des mêmes droits. La République de nos rêves est celle qui transcende les origines et les religions. Elle est économique et sociale. Elle est celle de l'égalité devant les charges publiques. Surtout, je souhaite qu’elle porte enfin un nouveau regard sur les Mahorais, qu’elle a accueillis en son sein. Mayotte a besoin d’une politique de développement social où les grands travaux créeront des emplois et où la précarité sera contenue, afin que tous ses citoyens aient confiance en l’avenir et ne soient pas contraints à l’émigration.

Le présent projet de loi fait partie intégrante de la feuille de route fixée par le Président de la République en 2002 ; il consacre le travail de modernisation de l’outre-mer entamé par votre prédécesseur. L’hommage que vous avez rendu, Monsieur le ministre, à mon engagement en faveur de la départementalisation de cette si belle île m’a profondément touché : c’est non seulement l’attachement de toute la population mahoraise à la France que vous reconnaissez ainsi, mais aussi l’action de mes aïeux et des anciens qui ont, à cette même tribune, porté à la face du monde une revendication qui nous est chère. C’est aussi un geste à la mémoire de toutes les victimes de la répression comorienne comme Zakia Madi, tuée pour avoir clamé son attachement à la France.

Grâce à votre courage, le Gouvernement a pris la mesure de l’immigration clandestine : les Mahorais vous en remercient. Je remercie également vos proches collaborateurs ainsi que la DAPAF et la DAESC qui ont contribué à l’intégration de Mayotte dans la République. J’ai foi en l’avenir de cette île, parce que j’ai foi dans la République et dans la France éternelle ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Philippe Edmond-Mariette - Mieux vaut tard que jamais ! C’est en toute fin de législature que nous abordons un débat essentiel, notamment pour Mayotte, Saint-Martin et Saint-Barthélemy. Je salue le remarquable travail de notre rapporteur, et consacrerai mon intervention à formuler quelques observations.

Tout d’abord, l’obtention de l’habilitation législative reste un véritable chemin de croix pour les collectivités ultramarines, malgré la réécriture de l’article 73 de la Constitution. Outre la saisine de deux chambres, le soutien gouvernemental reste indispensable. Quant au délai de deux ans, adopté par le Sénat, il n’a aucun sens : le Gouvernement doit légiférer par ordonnance pour l’allonger et surtout préciser si, une fois expiré, nécessité fait loi.

Deuxièmement, si la volonté populaire doit être respectée à Saint-Martin et Saint-Barthélemy et les faits consacrés dans le droit, je regrette l’absence d’un plan d’accompagnement financier et de développement économique, comme pour la Corse par exemple. Rappelons que le terminal de croisière, l’aéroport international et une vingtaine de casinos se trouvent dans la partie néerlandaise ; la partie française, elle, doit gérer la précarité. La loi d’orientation pour l’outre-mer de 2000 prévoyait la création d’un observatoire du coût de la vie et des prix : comme souvent, les décrets n’ont pas été publiés, et il n’existe toujours pas ! Il est de votre responsabilité, Monsieur le ministre, d’y remédier avant la fin de cette législature.

D’autre part, la création de deux postes de sénateurs pour Saint-Martin et Saint-Barthélemy répond à une logique constitutionnelle. Pour autant, ne béatifions pas M. Lurel, qui serait député de trois collectivités (« Trois voix pour un député ! » sur divers bancs).

M. Jean-Pierre Brard - Il y a le précédent de la Sainte Trinité ! (Sourires)

M. Philippe Edmond-Mariette - Rien ne vaut la présence réelle ! C’est au Gouvernement d’amender le texte, de sorte que cette création ne soit pas différée. Comme en Lozère ou à Saint-Pierre-et-Miquelon, il n’y a en effet aucun obstacle démographique.

Ensuite, je vous demande de déposer un amendement visant à créer un syndicat mixte des transports maritimes. Il y a quelques jours, le Premier ministre a dû agir d’urgence pour désengorger le réseau routier à la Réunion. Dans le même temps, la Martinique se meurt : il faut donc une solution alternative. Je propose la création par la région, le département et les EPSI d’un service de bus maritimes. Et n’ayons pas pour cela recours à l’article 73 : c’est maintenant qu’il faut agir ! J’ajoute que cela doit se faire dans la concertation, ce qui sera une nouveauté : elle n’a jamais eu lieu. C’est à se demander qui est le député du centre de la Martinique…

Enfin, cette législature nous a permis de renforcer le droit de l’outre-mer, mais trop de promesses restent vaines : pas de crédits pour le logement social ou pour l’indemnisation des victimes du chlodécone.

M. Joël Beaugendre - C’est fait !

M. Philippe Edmond-Mariette - Tordons le cou aux idées préconçues. Les départements d’outre-mer n’ont jamais été des danseuses, et ne sont plus des terres d’évangélisation ou de civilisation. Elles s’intègrent parfaitement dans la République, pourvu que celle-ci ne soit pas jacobine et respecte ses élus. J’espère que la XIIIe législature sera l’occasion de débattre d’une Martinique devenue région autonome !

M. Gérard Grignon - Je tiens à relever le remarquable travail de M. Quentin qui, avec les administrateurs de la commission des lois, a abouti à un texte positif, reprenant pour l’essentiel les dispositions de la proposition de loi organique que j’avais déposée en novembre 2004 concernant le statut de Saint-Pierre-et-Miquelon. Datant de 1985, le statut devait être modernisé afin d’assurer une meilleure répartition des pouvoirs au sein de la collectivité et une association plus étroite des populations aux décisions prises par le Conseil.

Ainsi, le texte met en conformité le statut de l’archipel avec la réforme constitutionnelle de 2003. Le statut de 1985 disposait que la loi était applicable de plein droit, hormis dans les compétences propres du Conseil territorial. Or, la réforme de 2003 intégrait Saint-Pierre-et-Miquelon au régime de spécialité législative défini à l’article 74 de la Constitution. L’applicabilité de plein droit pouvait donc poser un problème. Le présent texte met fin à toute ambiguïté en établissant clairement ce principe. En outre, inscrit expressément dans la Constitution, l’archipel ne peut plus désormais quitter la République sans une modification de la loi fondamentale.

La loi est également adaptable aux caractéristiques du territoire sur demande d’habilitation. C’est là une avancée importante, pour autant que des moyens juridiques adéquats la rendent effective. À ce propos, j’estime que la rédaction de l’article L.O. 6454-1 est réductrice, car la mise à disposition des services de l’État auprès de la collectivité était permanente dans le statut de 1985, mais ambiguë, laissant croire que cette mise à disposition ne concernerait que la rédaction des délibérations du Conseil. Le Sénat a partiellement corrigé ce défaut, mais la vie d’une collectivité ne se limite pas aux délibérations du Conseil territorial. Il faut donc établir clairement que la mise à disposition est permanente et concerne l’ensemble des missions de la collectivité. C’est l’objet de l’un de mes amendements. Aujourd’hui, seul un cadre A et un cadre C sont à la disposition du conseil territorial : c’est bien peu, alors que tant de compétences ont été transférées ! À cette pénurie de moyens techniques et humains s’ajoute la faiblesse des enveloppes budgétaires, notamment en matière d’aide sociale.

Autre avancée : le transfert de compétence en matière de délivrance et de gestion des titres miniers portant sur le fond de la mer et de son sous-sol. Ce sujet est fondamental, la richesse en hydrocarbures offshore dans la région devenant de jour en jour plus manifeste, et les provinces canadiennes de Terre-Neuve et de la Nouvelle-Écosse en tirant déjà d’importants bénéfices. Or, si la zone économique exclusive française est située en plein cœur de la zone considérée la plus riche par les ingénieurs, j’ai le sentiment que la France ne prend pas très au sérieux ces potentialités de développement.

Le transfert de compétence en matière d’attribution des titres miniers est complété par l’affirmation que le conseil territorial est compétent pour fixer l’assiette et le taux de la redevance sur les exploitations d’hydrocarbures offshore. Cette disposition, qui figurait déjà dans la loi de finances de 1998, suite à un amendement que j’avais déposé, représente une exception, puisque cette redevance a été supprimée partout ailleurs, sur le territoire français, en 1993.

La loi organique réaffirme la compétence du conseil territorial en matière de fiscalité directe et indirecte, conformément au statut de 1985. En matière d’urbanisme, nous considérons comme une avancée la possibilité accordée au président du conseil territorial de transférer les compétences d’urbanisme aux communes, sujet sur lequel la population a été consultée. Les responsabilités seront mieux réparties sur l’archipel.

Autre avancée notable : la modification du mode d’élection des conseillers généraux dans le cadre d’une circonscription unique. Les électeurs de Saint-Pierre-et-Miquelon ne voteront plus pour deux listes distinctes, l’une à Saint-Pierre et l’autre à Miquelon. Cette disposition, sur laquelle la population a également été consultée, est conforme à notre conception d’un archipel uni. Cependant, alors que personne ne le demandait, le Sénat a modifié le mode de répartition des sièges au conseil territorial, au risque de fragiliser la majorité et de rendre la collectivité difficilement gouvernable. Nous aurons l’occasion d’en discuter lors de l’examen des amendements.

L’introduction du référendum décisionnel local, du processus de consultation, du droit de pétition et de l’expérimentation est également positive en ce qu’elle permettra à nos concitoyens de participer plus activement à la vie démocratique.

Toutes ces dispositions font de ce projet un texte moderne et de progrès. Mais le statut le plus parfait restera vain si, d’une part, des mesures spécifiques ne sont pas prises pour permettre à la collectivité de sortir du marasme économique dans lequel elle est plongée depuis 1992 et si, d’autre part, notre pays n’affirme pas ses droits souverains dans la région.

L’échec de la France dans l’arbitrage des frontières maritimes avec le Canada, suivi de l’arrêt quasi-total de la pêche à la morue et des activités de transformation, a laissé l’archipel exsangue. Le contrat de projet que nous espérons signer bientôt avec l’État ne suffira pas à rendre à l’archipel sa capacité d’entreprendre. L’accompagnement de l’État devrait passer par un fonds de développement compensant les conséquences du marasme économique, et nous sortant de la logique humiliante des subventions, tout en allégeant le poids de la dette et en rendant à la collectivité son autonomie financière. Un tel dispositif répond bien aux principes posés dans le projet de loi de finances pour 2007 concernant l’outre-mer. J’ai déposé deux amendements en ce sens, l’un créant ce fonds, l’autre créant un fonds intercommunal de péréquation : comme ils tombent sous le coup de l’article 40, je souhaite vivement qu’ils soient repris par le Gouvernement.

Enfin, l’inaction de la France par rapport à ses droits de juridiction sur le plateau continental me laisse perplexe. En 1992, le tribunal de New York a statué sur les frontières maritimes en prenant pour ligne de base le cap Canso et en excluant l’Île de Sable. Quatre ans plus tard, le Canada, en promulguant une loi sur les océans qui s’appuie sur l’Île de Sable, a unilatéralement placé sous sa juridiction les zones du plateau continental au sud du couloir français, en violation de l’arrêt de 1992. La France n’a émis à ce jour aucune protestation ni réserve.

Or, cette décision unilatérale n’a pas privé la France de ses droits, car la Convention des Nations unies sur le droit de la mer distingue bien la colonne d’eau, c’est-à-dire la zone économique exclusive et le socle, du sous-sol marin, c’est-à-dire du plateau continental, sur lequel les droits existent sans qu’il soit besoin de les proclamer et ne sont donc pas anéantis par la simple revendication d’un autre État.

En 2002, l’arbitrage canadien entre les provinces de Terre-Neuve et de la Nouvelle-Écosse, dans le cadre de la répartition des ressources d’hydrocarbures offshore, statue sur le plateau continental de la France de façon bien plus restrictive que l’arrêt de 1992. Là encore, nulle réaction du gouvernement français face à la tentative d’un pays étranger de s’accaparer la part du plateau continental qui revient de droit à la France. Saisie par la division du droit de la mer des Nations unies sur ses intentions, la France n’a même pas répondu. Malgré quelques timides annonces, rien n’a encore été fait et le programme Extraplac ne mentionne pas Saint-Pierre-et-Miquelon.

La France a jusqu’en mai 2009 pour déposer son dossier à la Commission des limites du plateau continental. Rien ne lui interdit d’annoncer dès maintenant ses intentions, ce qui conduirait le Canada à négocier avec elle. Je vous demande, Monsieur le ministre, de prendre vos dispositions pour que la France invite le Canada à une fixation concertée de la limite du plateau continental. Passé mai 2009, le Canada, qui a en jusqu’en 2013 pour déposer son dossier, aura toutes les cartes en main pour anéantir les droits souverains de notre pays, sans que ceux-ci aient été défendus. Ce n’est pas la première fois que j’interviens ici sur ce dossier : si la France ne change pas d’attitude, je ne donne pas cher de la présence française dans les vingt ans. Les dispositions du statut visant à une meilleure intégration de l’archipel dans la région n’auraient plus guère de sens.

En revanche, il me paraît essentiel d’associer le président du conseil général non seulement à ce qui touche la ZEE française, mais aussi aux négociations sur le plateau continental. Tel est le sens d’un amendement que je présenterai.

Monsieur le ministre, vous nous présentez un beau projet de loi organique, que je voterai, mais sa portée risque d’être très affaiblie si l’accompagnement de l’État fait défaut et si notre pays n’affirme pas ses droits, condition d’une coopération équilibrée avec le Canada et d’un maintien de notre présence dans cette partie du monde.

M. Joël Beaugendre - Le 7 décembre 2003, au référendum local sur la création d’une collectivité d’outre-mer régie par l’article 74 de la Constitution, les électeurs de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy ont massivement répondu par l’affirmative.

Notre collègue Dosière a affirmé hier que sa motion n’engageait que lui. Or, si je me réfère au Règlement, il a parlé au nom du groupe socialiste.

M. Victorin Lurel - Non !

M. Joël Beaugendre - Demander l’irrecevabilité, c’est dire que l’on n’a pas le droit de légiférer sur la loi organique. Or, notre collègue a parlé en fait de problèmes économiques et démographiques ! Pour en traiter, ne fallait-il pas justement ouvrir le débat ?

Mais nous avons démasqué les faux-semblants : au temps du programme commun, l’outre-mer était tenu pour l’étranger !

M. Éric Raoult - Eh oui ! Cela relevait de la politique étrangère.

M. Joël Beaugendre – Quand j’entends aujourd’hui parler du revenu des élus locaux, est-ce de la jalousie ? Que l’on dépose plutôt des amendements pour corriger ce qui semble exagéré !

Notre majorité a permis aux populations de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy, grâce à la révision constitutionnelle, d’accéder à l’autodétermination.

M. Mansour Kamardine - Nous pouvons en être fiers !

M. Joël Beaugendre - Ces populations ont clairement manifesté leur souhait de bénéficier du statut de collectivité d’outre-mer créé par la loi constitutionnelle du 28 mars 2003. C’est dans ce cadre, attendu depuis plus de vingt ans, que Saint-Martin et Saint-Barthélemy évolueront désormais. Nous abordons à présent l’ultime étape, en fixant leur statut dans une loi organique. Je souhaite néanmoins appeler votre attention sur les conséquences de ce changement de statut. L'octroi de mer, par exemple, était versé à Saint-Martin et Saint-Barthélemy, communes de Guadeloupe, alors que leurs habitants ne le payaient pas : leur nouveau statut de collectivité d'outre-mer entraînera-t-il la redistribution aux autres communes de Guadeloupe de la partie de l’octroi de mer qui leur revenait ? Se pose aussi la question de la création de deux circonscriptions législatives : à mon sens, le nouveau statut justifie pleinement l'existence de députés pour Saint-Martin et Saint-Barthélemy. La première a 29 112 habitants, la seconde en compte 6 852, ce qui se compare aux 6 519 habitants de Saint-Pierre-et-Miquelon, aux 14 944 de Wallis-et-Futuna ou à la population des deux circonscriptions de la Lozère. Il ne serait d’ailleurs pas satisfaisant qu'un même député représente des collectivités de statuts différents.

Le projet de loi organique permet aussi aux assemblées délibérantes des départements et régions d'outre-mer, après habilitation par la loi, d'adapter localement lois et décrets, et de fixer des règles dans certaines matières relevant du domaine de la loi. Je salue cette initiative, qui permet de coller au plus près de réalités bien différentes de celles de la métropole. À ce propos, je vous ai interpellé, lors des questions d’actualité du 16 mai 2006, au sujet des 450 exploitants qui assurent, sans subvention, le service public du transport non urbain en Guadeloupe, dans le cadre de conventions passées avec le conseil général et arrivant à terme le 1er juin. La réorganisation du service de transport interurbain est attendue tant par les usagers que par les professionnels. Mme Louis-Carabin et moi vous avions demandé de proroger les conventions actuelles jusqu'au 31 décembre 2007, afin de mener cette réorganisation sans risque, juridique ou économique, pour les professionnels qui assurent ce service public essentiel. Au vu des circonstances exceptionnelles, vous aviez accepté, Monsieur le ministre, de proroger les conventions. Le conseil général avait estimé, à l'époque, que six mois suffiraient à mettre en place le nouveau système, mais rien n’a encore été fait. Il serait sans doute judicieux que l'assemblée délibérante du département de la Guadeloupe demande à être habilitée, dans le cadre du nouvel article 73 de la Constitution, à adapter une loi qui ne convient pas aux réalités locales du transport.

Plusieurs questions ont fait, durant cette législature, l'objet d'une attention soutenue. Je commencerai par l'aide au passage aérien des personnes résidant en métropole en cas d'événement grave survenant à un membre de leur famille outre-mer : j’y vois avec satisfaction la concrétisation d'une des propositions de mon rapport, tendant à créer un billet social pour événement familial. Les parlementaires sont souvent sollicités par des compatriotes vivant en France métropolitaine et qui, désireux de se rendre à un enterrement, ne bénéficient que rarement d'une tarification particulière. Il convient de les rendre prioritaires. Je regrette toutefois que cette mesure ne soit pas accompagnée d’un effort significatif des compagnies aériennes.

M. Jean-Pierre Brard - Très bien !

M. Joël Beaugendre - Autre satisfaction : l'organisation du scrutin le samedi, pour les élections législatives, en Guadeloupe, Guyane, Martinique et à Saint-Barthélemy et Saint-Martin. Mme Louis-Carabin et moi avions déposé des propositions de lois à ce sujet. Le bon déroulement des élections nationales est en effet essentiel. Or, avec les moyens de communication actuels et compte tenu du décalage horaire, les résultats de la métropole sont connus avant le scrutin et influencent fortement le vote des électeurs d’outre-mer. Enfin, en ce qui concerne la répartition des sièges des représentants d’outre-mer au Parlement européen, les trois nouvelles sections proposées sont, à mon sens, plus satisfaisantes que celles votées en 2003. Elles permettent une représentativité plus adaptée aux réalités de chacune de nos régions d'outre-mer.

Ces deux projets de lois constituent donc des avancées d’une ampleur exceptionnelle, et ils doivent être votés (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Mme Béatrice Vernaudon – La loi organique que nous examinons ne devait pas concerner la Polynésie. Pourtant l'actualité politique locale est tournée vers l'amendement que les deux députés polynésiens vont défendre, et qui a été repris par la commission des lois. Il vise à en revenir au mode d'élection des représentants à l'Assemblée de Polynésie française antérieur à la loi organique du 27 février 2004. En effet, après la révision constitutionnelle de mars 2003, une loi organique renforçant le statut d'autonomie de la Polynésie a porté le nombre des membres de l'assemblée de Polynésie de 49 à 57, et partagé la circonscription des Tuamotu en deux circonscriptions ; surtout, elle a introduit une prime majoritaire du tiers des sièges au profit de la liste ayant recueilli la majorité des suffrages dans chaque circonscription. Les élections de mai 2004 ont démontré que cette prime ne parvenait pas à assurer une majorité stable : obtenue par des listes différentes selon les circonscriptions, ses effets se sont annulés. Ainsi, le parti arrivé en tête n'a eu la majorité que d'une voix sur 57. Cinq mois plus tard, en octobre 2004, le vote d'une première motion de censure remettait en cause le résultats des élections. II y en a eu deux autres depuis. La Polynésie en est à son quatrième gouvernement en moins de deux ans. De l'avis de tous, cette instabilité trouve sa cause dans le système de la prime majoritaire.

La présente loi organique était donc une opportunité à saisir pour modifier le système et contribuer à l'apaisement de la situation en Polynésie. J'avais, en octobre, déposé une proposition de loi dans ce sens, et je remercie les 34 collègues qui l'avaient cosignée. J'espérais alors que l'assemblée de Polynésie serait consultée pour avis, cette consultation étant un préalable à tout examen de la question par le Parlement. Je regrette que cela n’ait pas été le cas. Le débat a eu lieu au Conseil économique, social et culturel, saisi pour avis. Une majorité de conseillers se sont montrés favorables au second volet de ma proposition, relatif au redécoupage de la grande circonscription des Îles du Vent. Cependant, le Conseil a conclu que l'urgence était le retour à la stabilité politique, et il s’est prononcé pour la proposition de loi organique de MM. Lagarde et Morin, qui ne visait que la suppression de la prime majoritaire et le relèvement du seuil de répartition des sièges. Le Conseil a également souhaité un retour rapide aux urnes et recommandé une révision plus globale du statut de 2004.

J'admets, Monsieur le ministre, qu'une modification du mode de scrutin des représentants à l'assemblée de Polynésie opérée par amendement, dans une loi organique qui ne lui est pas consacrée, doive se limiter à la suppression de la prime majoritaire et ne s’étende pas à la division d'une des six circonscriptions. Vous admettrez pour votre part que ce redécoupage présenterait à de multiples égards un progrès démocratique et qu'il reviendra sans doute en son temps devant le Parlement. Pour l’heure, Michel Buillard et moi avons donc défendu cet amendement tendant au retrait de la prime majoritaire, qui a été repris par la commission des lois. Je souhaite que vous le votiez pour contribuer à l’apaisement de la vie politique locale et pour mieux garantir le pluralisme politique au sein de l’assemblée de Polynésie.

M. Mansour Kamardine - Nous le voterons !

Mme Béatrice Vernaudon - Merci !

Dans le projet de loi ordinaire qui complète la loi organique, quatre articles intéressent la Polynésie française. À l'article 4, le Sénat a modifié le mode de scrutin pour les élections européennes en créant deux circonscriptions. Trois des huit circonscriptions seront attribuées à l'outre-mer afin que chaque région – océan Indien, Caraïbes et Pacifique – puisse disposer d’un député. Aujourd'hui en effet, pour des raisons démographiques, les trois députés européens représentant les collectivités françaises d’outre-mer sont originaires de la seule île de la Réunion. Or, tant la nature des relations avec l'Europe que les questions à traiter diffèrent selon les régions. Cette répartition permettra, en espérant qu’elle passera le filtre du Conseil constitutionnel, une meilleure représentation des intérêts ultramarins. Elle permettra en tout cas aux collectivités du Pacifique de négocier une autre place dans l’Union et une meilleure intégration dans les programmes européens, notamment dans les domaines de l’environnement, des énergies renouvelables et de l’éducation.

À l'article 9, je salue l'initiative du Gouvernement tendant à ce que la dotation de continuité territoriale puisse financer une aide au passage aérien des personnes résidant en métropole en cas d'événement grave survenant à un membre de leur famille outre-mer. Cette ouverture, dans le sens métropole-outre-mer, était réclamée par plusieurs associations. Les « tomiens » notamment, contrairement aux domiens, n'ont pas la chance de bénéficier des congés bonifiés lorsqu'ils travaillent dans l'une des trois fonctions publiques. Cependant, la limitation aux « événements graves » paraît bien restrictive. Le prochain pas en avant sera la prise en compte de critères sociaux par les collectivités qui le souhaitent, et ce à enveloppe constante.

À l'article 10, le Gouvernement est autorisé à prendre des mesures par ordonnance pour étendre et adapter une partie des lois concernant les compétences de l’État, adoptées sous cette législature, voire antérieurement. Ainsi en ira-t-il en matière de bioéthique, pour rendre possibles de futures greffes de reins à Papeete. S'agissant de l'hospitalisation des personnes sans leur consentement, relayant la demande récurrente des personnels de l'hôpital psychiatrique, j'insiste, Monsieur le ministre, pour que le nouveau texte, qui doit se substituer à celui de 1913 encore en vigueur en Polynésie, soit très rapidement publié.

À l'article 11, il nous est proposé de ratifier plusieurs ordonnances prises dans les conditions prévues aux articles 38 ou 74 de la Constitution, dont l’une, en date du 4 janvier 2005, porte statut général des fonctionnaires des communes et groupements de communes de la Polynésie française. La ratification de cette ordonnance marquera une étape importante dans la modernisation de nos communes, dont le cadre juridique actuel correspond à celui des communes de métropole avant 1982. Elle donnera aux 4 000 agents communaux de Polynésie le statut de fonctionnaire : ceux-ci auront désormais les mêmes garanties, les mêmes droits et les mêmes devoirs que l’ensemble des fonctionnaires. Jusqu'à sa ratification, cette ordonnance a été adaptée pour tenir compte des spécificités de la Polynésie française. Je tiens à rendre ici hommage à tous ceux qui ont travaillé à ce grand chantier – élus communaux, autorités du pays et de l'État, organisations syndicales.

Une seconde ordonnance sera publiée dans quelques semaines pour étendre, en l'adaptant, le champ d’application du code général des collectivités territoriales à la Polynésie française. Après la loi organique de février 2004 qui renforce les compétences des communes, ces deux ordonnances définissent le cadre juridique de la décentralisation de la Polynésie et de la modernisation de ses communes.

Pour un territoire morcelé sur une surface aussi vaste que l'Europe, ce nouveau contexte offre d’intéressantes perspectives en matière de développement démocratique, économique et social. Le succès de la réforme repose sur les relations de confiance et le partenariat que les autorités de l'État et du pays sauront entretenir entre elles, ainsi qu’avec les élus communaux. Vous êtes attaché, Monsieur le ministre, à ce succès dont vous avez compris l'importance en nous rendant visite sur place il y a un an.

Vous nous avez assuré du concours financier de l'État car cette réforme aura un coût. Je souhaite, pour ma part, que l’on retienne en priorité le projet de réalisation d'un espace institutionnel partagé qui abriterait le centre de gestion et de formation ainsi que le syndicat pour la promotion des communes, d'autres syndicats intercommunaux, des services du pays et de l'État concourant à la formation de l'ensemble des agents publics de Polynésie. Un tel espace permettrait de sceller des partenariats forts et de réaliser des économies d'échelle. Il symboliserait la volonté d'agir ensemble et de manière complémentaire. Il marquerait la priorité accordée à la performance des services publics et à la formation de leurs agents, indispensables au développement économique, social et culturel durable de la Polynésie.

Ces lois sont de bonnes lois pour l'outre-mer, pour la Polynésie en particulier. Je les voterai donc (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Michel Buillard - Ces deux projets de loi, organique et ordinaire, intéressent la Polynésie française à double titre. Le premier nous donne l’opportunité de revenir sur le mode actuel d’élection des représentants de la Polynésie française. Le second nous invite à ratifier l’ordonnance portant statut de la fonction publique communale de la Polynésie française.

Le mode actuel d’élection des représentants de la Polynésie française, en vigueur depuis l’adoption du statut d’autonomie de 2004, qui prévoit l’octroi d’une prime majoritaire du tiers des sièges dans chacune des six circonscriptions, a conduit à des bouleversements majeurs et à l’instabilité politique de notre territoire. On avait ici reproché à ce mode de scrutin, inspiré de celui de 1999 pour les conseillers régionaux, de favoriser un seul parti et de museler l’opposition au sein de l’assemblée locale. En réalité, les primes majoritaires accordées dans chacune des six circonscriptions de Polynésie se sont neutralisées, du fait de votes contraires. Si la majorité est aujourd’hui assez large, elle n’a été en 2004 et 2005 que d’une seule voix – 29 contre 28. Le nouveau mode de scrutin a accentué la bipolarisation de la vie politique entre autonomistes et indépendantistes, écarté les partis de moindre importance et conduit à une grande instabilité politique. Ainsi quatre motions de censure ont-elles été déposées depuis avril 2004 contre différents gouvernements alors que jusque là, seules deux l’avaient été en un demi-siècle.

Pour surmonter l’obstacle de la prime majoritaire, les partis ont dû nouer des alliances. C’est ainsi qu’est née en 2004 l’Union pour la démocratie – UPLD –, rassemblement de partis autour du principal parti indépendantiste, le Tavini Huiraatira’a. Depuis lors, cette union s’est effritée, plusieurs élus étant excédés par les propos racistes et xénophobes du président Oscar Temaru, par ses carences dans la gestion du pays, son manque de collaboration avec l’État, ses voyages toujours infructueux, ainsi que par la dégradation de la situation économique et sociale du pays. Le gouvernement indépendantiste a fini par être censuré, et l’UPLD a perdu le pouvoir au profit d’une coalition autonomiste.

Celle-ci représente la véritable majorité du pays car les Polynésiens, dans leur très grande majorité, ne sont pas indépendantistes. Ils sont autonomistes, soucieux du respect de l’identité politique et culturelle de leur peuple, mais fermement attachés à son maintien au sein de la République française. Cette coalition regroupe en réalité tous les républicains de Polynésie. Après les excès et les dérapages de l’ancien président, qui ne se rendait pas à ses rendez-vous avec le Président de la République, qui tenait un discours anti-français lors des sommets internationaux et des propos racistes en Polynésie, un sursaut républicain s’imposait en effet.

Aujourd’hui, une nouvelle dynamique est enclenchée, qui inaugure une nouvelle gouvernance, dans un esprit de rassemblement, de pluralisme, de respect des institutions et de la parole donnée, en faveur d’un développement dynamique, mais toujours équilibré. La majorité, qui regroupe les partis autonomistes représentés à l’assemblée territoriale – le Aia Api, le Fetia Api, le Rautahi et le Tahoera’a Huiraatira’a –, s’est constituée autour de l’engagement pris par le nouveau président, Gaston Tong Sang, de revenir à l’ancien mode de scrutin, afin de mettre un terme à l’instabilité politique. Divers partis non représentés à l’assemblée territoriale sont également favorables à ce retour.

Une importante délégation de tous ces partis, conduite par le président de la Polynésie française, a été reçue la semaine dernière à l’Élysée, au ministère de l’outre-mer ainsi qu’à l’Assemblée et au Sénat. Chacun a pu mesurer leur détermination. L’assemblée territoriale, consultée, s’est prononcée majoritairement en faveur de ce projet, de même que le conseil économique, social et culturel, qui a été quasi-unanime. Je ne reviens pas sur les péripéties qui ont émaillé le parcours. Je tiens seulement à remercier le rapporteur d’avoir compris notre démarche, et saisi l’occasion de ce projet de loi pour déposer un amendement en ce sens.

Quant au projet de loi ordinaire, il vise notamment à ratifier l’ordonnance créant une fonction publique communale en Polynésie. Cela représente une avancée importante, attendue par les personnels. J’espère que l’Assemblée l’adoptera.

J’évoquerai en conclusion les objectifs que le président Tong Sang a assignés à son gouvernement, et qui vont bien au-delà de la réforme du mode de scrutin. Nous sommes venus la semaine dernière renouer le dialogue avec l’État, et retisser les liens rompus par le gouvernement indépendantiste. Nous sommes venus poser les bases d’un développement économique et social harmonieux de la Polynésie dans un cadre politique apaisé. Notre premier objectif est la lutte contre l’exclusion. Avec l’aide de l’État, nous entendons lancer un plan de résorption de l’habitat insalubre, un plan de construction de logements sociaux, un plan pour les établissements scolaires, et garantir à notre population la meilleure couverture sociale et sanitaire possible. Tout cela appellerait d’ailleurs un nouveau contrat de projet État-territoire, voire même, je l’espère, une nouvelle loi d’orientation.

En cette fin de législature, où nous nous trouvons réunis, députés d’outre-mer mais aussi quelques députés de métropole, je voudrais vous souhaiter à tous bonne chance pour la suite. J’espère que le message de chacun aura été entendu et compris dans vos communes, vos départements et vos circonscriptions. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; quelques exclamations)

M. Jean-Pierre Brard - Très bien ! Mais ce vœu ne concerne que les présents…

M. Éric Raoult – Nos débats sur l’outre-mer, quelle que soit leur nature, se révèlent toujours d’une intensité et d’une sincérité à nulle autre pareilles. Comme après une ondée tropicale, voilà une accalmie, un apaisement autour des valeurs de la République.

Nous avons tous apprécié, Monsieur Quentin, la qualité de vos travaux, si fouillés et si documentés qu’aucun rapporteur n’avait sans doute autant mérité que vous le qualificatif d’« excellent » (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP). J’ai moins goûté en revanche la motion de procédure défendue par M. Dosière, inutile et décalée, mais je pardonne à son auteur, dont nous connaissons les difficultés au sein de son parti et de sa circonscription.

M. Jean-Pierre Brard - C’est le baiser qui tue !

M. Éric Raoult - Au cours de nos débats, bien souvent éclairants, l’opposition s’est dispersée, se ralliant parfois à nos positions. Vous avez ainsi reconnu, Monsieur Brard que vous connaissiez mal les dossiers de l’outre-mer, et que vous avez changé d’avis après vous être rendu sur place – le compte rendu analytique en fait foi.

Souvenez-vous que le parti communiste plaçait autrefois les représentants de la Réunion, de la Guadeloupe et de la Martinique parmi les délégations étrangères…

M. Jean-Pierre Brard – À leur demande ! Et au nom du principe d’autodétermination !

M. Éric Raoult - Représentant d’une circonscription où vivent et travaillent de très nombreux compatriotes ultramarins, je suis très heureux que nous examinions ces deux textes, qui témoignent de notre attachement et de notre attention à l’outre-mer. Il a certes fallu du temps pour que la réflexion mûrisse, mais il est inexact d’affirmer que nous avons trop tardé : nous préparons ces textes depuis trois ans.

Il s’agit en effet de tirer les conséquences de la révision constitutionnelle de 2003 et de mettre à profit les nouvelles possibilités qu’elle a ouvertes pour développer de nouveaux outils de démocratie locale et rapprocher les statuts des dispositions applicables en métropole. Afin de moderniser et d’harmoniser les nombreuses dispositions en vigueur, les collectivités d’outre-mer pourront également adapter les lois et règlements aux particularités locales, en application de l’article 73 de la Constitution et dans le respect du principe de l’identité législative.

À cela s’ajoute l’accession de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin au statut de collectivité d’outre-mer. Vous avez évoqué les casinos, Monsieur Brard, mais il faudrait également se souvenir des dégâts causés par le cyclone Marylin, voilà douze ans. Pour m’être rendu sur place à cette époque, c’est-à-dire bien avant vous, je me rappelle les toits effondrés, les écoles dévastées et les personnes sans abri. Les auteurs des critiques sans fondement que nous avons entendues feraient bien d’y songer. Être maire à Saint-Martin ou à Saint-Barthélemy, de 1995 à 1997, cela relevait de l’humanitaire, non du fiduciaire !

M. Jean-Pierre Brard - Ce qui ne justifie en rien les violences et le meurtre.

M. Éric Raoult – Ces deux textes visent également à améliorer le fonctionnement des institutions ultramarines : Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Martin et Saint-Barthélemy seront dotés de « conseils territoriaux », et la Chambre haute a prévu de doter chacune de ces deux dernières collectivités d’un siège de sénateur, mesure qui permettrait effectivement d’améliorer la représentation de l’outre-mer.

Les deux projets de loi dont nous débattons démontrent tout l’attachement du Président de la République à l’outre-mer, qui aura été au centre de l’action menée par ce gouvernement et par celui qui l’a précédé – grâce à vous, Monsieur le ministre, mais aussi grâce à Mme Girardin, sans oublier le ministre de l’intérieur, car les problèmes qui affectent l’outre-mer, immigration, sécurité, relèvent largement de sa compétence. Grâce à notre action, nous avons su donner un autre visage à l’outre-mer. Nos collègues ultramarins ont également su apporter leur chaleur et leur humanité dans le traitement de certains dossiers, souvent abordés différemment par nos collègues de la commission des finances.

M. Jean-Pierre Brard – Quel lyrisme !

M. Éric Raoult - Quand un élu de gauche s’émouvait il y a quelques semaines de la présence de joueurs ultramarins dans nos équipes de football, vous adressiez des signes d’amitié et de fraternité à nos compatriotes.

Alors que certains visitent les Antilles après la Chine ou la Palestine, vous avez su assurer l’avenir de l’outre-mer, Monsieur le ministre. Vous en connaissez les réalités quand d’autres se contentent d’en discourir, ou de préparer les voyages d’une candidate.

M. Jean-Pierre Brard – Et que faites-vous des génuflexions d’un autre candidat aux Etats-Unis ?

M. Éric Raoult – Ces textes, je le répète, sont le fruit d’une longue préparation ; ils répondent aux attentes de nos concitoyens ultramarins en simplifiant le fonctionnement de leurs institutions et donnent plus de liberté à la gestion locale.

Avec la commission Baroin–Debré, vous aviez déjà attaché votre nom à la question de la laïcité, Monsieur le ministre ; vous allez aujourd’hui imprimer de votre nom, avec ces lois Baroin que nous examinons, la promotion de la diversité, richesse si essentielle pour notre pays. Il y a des sujets qui appellent une rupture, mais d’autres un passage de témoin. Tel est le cas de l’outre-mer

M. Jean-Pierre Brard – C’est surtout la schizophrénie chiraco-sarkozienne !

M. Éric Raoult - Vous avez à choisir entre Buffet et Bové… Pour notre part, nous avons choisi Sarkozy, qui a déclaré que l’outre-mer était une chance pour notre pays et une chance à libérer.

Le groupe UMP soutiendra fermement ces deux projets de lois qui donnent à l’outre-mer de nouveaux outils pour son développement durable. Dans l’outre-mer aussi, il faut que tout devienne possible. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Christophe Lagarde – Ces deux pavés législatifs sont la conséquence directe de la révision constitutionnelle de 2003, mais aussi du référendum organisé le 7 décembre de la même année en Guadeloupe.

Sur ce point, je rappelle que le groupe UDF s’était opposé à ce que la question du statut de la Guadeloupe soit liée à celle de Saint-Martin et Saint-Barthélemy, qui deviendront des collectivités autonomes en application de ces deux projets de loi et bénéficieront de plus larges capacités d’adaptation normatives sous le contrôle du Parlement. De telles évolutions me paraissent souhaitables compte tenu de la diversité de l’outre mer, et il me semble légitime que ces deux collectivités puissent saisir le Conseil constitutionnel afin de défendre leurs compétences.

S’agissant de l’autonomie fiscale, je rappelle que son existence n’a rien de nouveau, même si certains semblent la découvrir. Toutes les collectivités d’outre-mer, hormis les anciens DOM, en bénéficient également… J’ajoute que le droit national continue à s’applique en matière pénale, bancaire et en ce qui concerne les assurances et les sociétés.

En outre, contrairement à ce que prétend M. Brard, rien ne s’oppose à l’évolution prévue pour Saint-Barthélemy. Cette collectivité est certes devenue l’une des plus riches de France grâce à l’implantation de gens très fortunés, mais elle assume depuis longtemps des charges qui reviennent normalement à d’autres collectivités. Les collèges y sont ainsi financés en large partie par les communes. Sans doute faudrait-il revoir les dotations attribuées à Saint-Martin, dans un souci d’une meilleure péréquation, mais ce n’est pas la question : il s’agit seulement d’attribuer plus d’autonomie aux habitants de Saint-Barthélemy, conformément à leurs souhaits. Nous devons respecter le choix des électeurs.

Les habitants de Saint-Martin ont fait le même choix, mais il me semble nécessaire de prévoir un délai d’adaptation, cette collectivité rencontrant des difficultés particulières. C’est pourquoi je regrette que le Sénat ait supprimé ce délai. Nous n’arriverons à maîtriser l’immigration sans la collaboration des Pays-Bas. Sans cela, point d’équilibre !

Actuellement, on rentre par la partie hollandaise pour se faire soigner en France, les casinos sont dans la partie hollandaise et les écoles en France… Tant qu’il n’y aura pas des règles communes, la nouvelle collectivité aura du mal à fonctionner. De plus, avant de lui donner les clés, il faudrait consentir un effort de rattrapage pour l’équipement, comme cela s’est fait ailleurs.

S’agissant de Mayotte, le projet est un pas de plus vers la départementalisation, à laquelle l’UDF a toujours été favorable. Aux noms cités par M. Kamardine, j’ajouterai celui de son prédécesseur, Henry Jean-Baptiste…

M. Mansour Kamardine - Je n’ai pas cité de députés.

M. Jean-Christophe Lagarde - Il me paraît légitime de le faire, car vous partagiez au moins ce combat, ainsi que le sénateur UDF Adrien Giraud. Avec constance, nos concitoyens de Mayotte demandent à être pleinement français, c’est donc une évolution positive. Elle est progressive, ce qui est nécessaire. Elle devra se poursuivre, pour parvenir au statut de DOM, mais Mayotte s’en rapproche – si ce n’est que le conseil général aura des attributions habituellement dévolues au conseil régional. Pour ce qui est de Saint-Pierre-et-Miquelon, les extensions de compétences nous conviennent.

J’en viens à la Polynésie française. Le projet de loi organique offre la possibilité de revenir à un mode de scrutin que l’UDF est seule à avoir toujours défendu, et qui était en vigueur avant le coup de force de M. Flosse pour obtenir du Parlement, contre l’avis de toutes les formations politiques de Polynésie française, un mode de scrutin censé le favoriser. Avoir perdu le pouvoir semble l’avoir ramené à la raison : il trouve désormais que le mode de scrutin précédent n’était pas si mal. Il avait en tout cas garanti la stabilité et la représentativité, alors qu’en forçant des gens de bords contraires à se mettre ensemble pour bénéficier d’une prime électorale, on avait créé l’instabilité à l’assemblée de Polynésie. Je ne suis pas convaincu que le nouveau gouvernement issu d’une motion de censure tienne très longtemps. La réforme du mode de scrutin est toujours aussi urgente, et mieux vaudrait un retour aux urnes, après une longue crise politique. Hervé Morin et moi-même avions déposé une proposition de loi à ce sujet, et lors de sa dernière visite en Polynésie, François Bayrou avait demandé cette clarification. Sur ce texte, j’ai déposé des amendements. M. Buillard fait la même proposition, je m’en réjouis. Les manœuvres à l’assemblée de Polynésie, et ici même en commission, visaient à ce que ce soit un amendement Buillard–Vernaudon qui soit voté, plutôt qu’un amendement Lagarde ; si cela peut faire réélire M. Buillard, je ne ferai pas de procès en paternité. Ce sera en tout état de cause un retour à la sagesse. Je regrette que l’UMP ait prêté la main à l’époque à ce changement de mode de scrutin, et je ne comprends pas, Monsieur Dosière, que ceux qui s’étaient battus contre ce mauvais coup fomenté par le sénateur Flosse, présent ici même dans les tribunes, développent aujourd’hui des arguties pour maintenir le mode de scrutin actuel.

M. René Dosière - Je n’ai pas encore dit un mot sur le mode de scrutin !

M. Jean-Christophe Lagarde - C’est suivre M. Temaru, qui voudrait finalement garder ce mode de scrutin qu’il espère plus avantageux pour lui. Pour nous, un mode de scrutin n’est pas un instrument pour gagner les élections, mais un moyen permettant tout à la fois aux citoyens de s’exprimer et à une majorité de se former pour gouverner.

Avec Mme Vernaudon, nous déposerons des amendements sur la continuité territoriale. J’interviens toujours sur ce sujet lors des débats sur l’outre-mer, car c’est l’un des plus importants, et il n’aura pas été traité au cours de cette législature. Sauf ceux de Saint-Barthélemy peut-être, dont M. Brard dirait qu’ils peuvent se payer le voyage, nos compatriotes qui vivent outre-mer, et les centaines de milliers d’ultramarins qui vivent en métropole ne pourront mener une vie familiale normale tant que la continuité territoriale, par la voie aérienne, ne sera pas mieux assurée. Ils ne peuvent assister à un mariage, un enterrement, ils ne peuvent même pas retourner chez eux pendant des années, pour ceux de Polynésie. Au moins – à charge constante puisque la Constitution nous y oblige – autorisons les collectivités locales à les aider en fonction de leur situation sociale. Sur le statut, on les a interrogés par référendum ; si on le faisait sur la continuité territoriale, ils seraient unanimes ! Nous aidons vingt fois plus les Corses, alors que la distance et le coût n’ont rien de comparable. Pourquoi déverser des millions dans un cas et saupoudrer quelques centaines de milliers d’euros dans l’autre ? J’espère que l’amendement que je présente avec Mme Vernaudon pour permettre aux collectivités d’aider des familles à payer les billets d’avion sera adopté.

Outre la mise en œuvre de la Constitution révisée, ces projets comportent un effort de codification louable. Nous les voterons, sauf si l’on ne modifiait pas le mode de scrutin en Polynésie ou si, malgré les rejets successifs de notre assemblée, on faisait n’importe quoi sur l’octroi de mer. Deux problèmes se posent en effet. D’abord, comment gérer la période de transition pour Saint-Barthélemy et Saint-Martin si on supprime des recettes avant qu’il y en ait de nouvelles ?

M. Victorin Lurel - Il y aura un dispositif de transition.

M. Jean-Christophe Lagarde - Ensuite, qu’on nous explique en quoi il est légitime de modifier l’octroi de mer pour financer les villes centres.

Pour me résumer, nous soutiendrons votre effort, pour ce qui concerne Saint-Barthélemy – pour Saint-Martin nous espérons que sortira de la navette un calendrier raisonnable. Pour la Polynésie française, il faut modifier le mode de scrutin. Enfin, Mayotte est en bonne voie vers la départementalisation. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

La discussion générale est close.
La séance, suspendue à 18 heures 10, est reprise à 18 heures 20.

M. François Baroin, ministre de l’outre-mer – Je remercie les différents orateurs qui sont intervenus dans la discussion générale pour préciser les enjeux de ce texte important, qui concrétise les engagements pris au cours de la législature.

M. Dosière, pour ne pas le nommer, s’est beaucoup investi dans la préparation de sa motion. Cependant, il a tenu des propos pour le moins audacieux, et je ne doute pas une seconde qu’en de multiples occasions, ses mots ont dépassé sa pensée. Il m’appartient à présent de rectifier certains points, pour éviter que ne se propagent quelques fausses informations. Ainsi, la création des collectivités d’outre-mer de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy est démocratiquement légitime, puisque les populations concernées l’ont approuvée par référendum. Elle est également justifiée d’un point de vue géographique et administratif…

M. Jean-Pierre Brard - Que dire alors des Marquises ?

M. le Ministre - …tant ces deux îles ont commencé à résoudre leur éloignement avec le reste de l’archipel guadeloupéen. Au final, cette création ne constitue donc pas la découverte de je ne sais quel enfant trouvé, mais bien plutôt la reconnaissance d’un processus soutenu de longue date par l’ensemble des élus guadeloupéens, toutes sensibilités politiques confondues. Le nouveau statut vise aussi à permettre de régler enfin la délicate – et très ancienne – question fiscale. L’autonomie qui sera accordée n’est pas exceptionnelle en outre-mer : toutes les COM de l’article 74 – ainsi que la Nouvelle-Calédonie – disposent en effet du droit de déterminer leur régime fiscal et douanier. Et j’ai précisé dans mon discours liminaire qu’il n’y aura pas, à Saint-Barthélemy ou à Saint-Martin, de paradis fiscaux, puisque l’État conservera ses compétences en matière de droits pénal, bancaire ou des sociétés. Au surplus, tous les engagements internationaux de la France en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux seront applicables de plein droit dans les deux îles, de même que la réglementation communautaire afférente…

M. Jean-Pierre Brard - Très bien ! Et espérons que l’on ne violentera plus les fonctionnaires !

M. le Ministre - Monsieur Brard, nous nous connaissons depuis si longtemps que je ne relève rien de ce que vous avez dit, par respect pour vos convictions, que je sais profondément républicaines.

Il n’y aura pas non plus de risque d’évasion fiscale au détriment de la métropole, puisque le droit fiscal d’État continuera de s’appliquer aux personnes qui ne résident pas sur place depuis au moins cinq ans. Monsieur le rapporteur, nous souhaitons absolument maintenir cette disposition, car elle est au cœur du dispositif approuvé par les électeurs. Nous voulons apporter la garantie que l’État sera plus présent encore, qu’il exercera ses missions régaliennes sans faiblesse et que les principes républicains seront strictement respectés.

S’agissant de la création de sièges de député, j’ai bien entendu la demande du rapporteur et du président Lurel, et j’ai écouté avec beaucoup d’attention les propos de M. Beaugendre, de Mme Louis-Carabin et de M. Edmond-Mariette : il est patent que, sur l’ensemble de l’échiquier politique, les positions convergent, et qu’il ne s’agit donc pas d’un accord à visée électorale entre formations politiques mais d’une position de principe, liée à une analyse rigoureuse de la jurisprudence du Conseil constitutionnel. La création d’une collectivité pose toujours la question de sa représentation à l'Assemblée nationale. C’est donc tout naturellement que je déposerai un amendement en ce sens, pour que l’article 40 soit respecté.

MM. Edmond-Mariette et Marie-Jeanne m’ont à nouveau interrogé sur les transports publics en Martinique. J’ai le plaisir de leur confirmer que j’intégrerai dans les amendements que je vais défendre une disposition autorisant le Gouvernement à créer par ordonnance – ce qui constitue la meilleure voie juridique – une autorité organisatrice unique de transports routiers et maritimes de voyageurs. Évidemment, ma réponse à la question d’actualité d’hier de M. Marie-Jeanne sur le même sujet reste valable pour ce qui concerne les autres adaptations législatives.

S’agissant, Monsieur Grignon, de Saint-Pierre-et-Miquelon et d’Extraplac, je précise que le projet de relevés concernant l’extension du plateau continental de Saint-Pierre-et-Miquelon fait toujours l’objet d’une programmation par le comité de pilotage d’Extraplac. Cette campagne d’exploration devra se faire en concertation avec le gouvernement canadien. Nous en avons du reste déjà parlé lors d’une séance de questions au Gouvernement : la position française n’a pas varié, le Quai d’Orsay est mobilisé et le ministère de l’outre-mer est à vos côtés pour soutenir ces légitimes revendications !

Monsieur Kamardine, je suis heureux de vous confirmer que le Gouvernement reprendra à son compte votre proposition d’amendement avançant à 2008 la perspective de la consultation populaire à Mayotte, ainsi que celle sur le fonds intercommunal de péréquation.

S’agissant du mode de scrutin en Polynésie française, j’avais la volonté d’aboutir à un consensus polynésien. L’on peut être fondé, à quelques semaines d’échéances électorales de premier plan, à s’interroger sur l’opportunité de s’engager sur un tel terrain ; mais il est singulier, voire cocasse que les mêmes personnes s’opposent à une chose puis à son exact contraire… Après avoir été contre le mode de scrutin précédemment adopté, peut-on refuser l’avènement de celui que l’on prônait ?

M. René Dosière - Nous nous en expliquerons tout à l’heure !

M. le Ministre – Gide écrivait que « choisir c’est renoncer » : soit vous renoncez à la prime majoritaire, soit vous renoncez au mode de scrutin antérieur, mais, « non plus non », cela ne fait pas une position politique !

En conscience, tout en étant toujours favorable au consensus, on ne peut pas ne pas tenir compte de ce qui s’est passé en Polynésie à la fin de l’année dernière : changement de présidence, débat à l’Assemblée territoriale et au CES, débat public, sollicitations de la nouvelle majorité auprès du Président de la République, du Premier ministre et de moi-même… La représentation polynésienne s’est prononcée et elle a alerté la représentation nationale. Le Gouvernement s’en remettra à la sagesse de votre assemblée : c’est vous qui choisirez de modifier ou non le mode de scrutin.

Sur tous les autres points, notamment sur les différentes questions soulevées par M. Lagarde, j’indiquerai la position du Gouvernement au fil de la discussion. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

LOI ORGANIQUE relative à L’outre-mer

M. le Président – J’appelle en premier lieu, dans le texte du Sénat, les articles du projet de loi organique portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l’outre-mer.

M. Victorin Lurel - Rappel au Règlement pour faire une suggestion : dans la mesure où nous avons plus de six cents amendements à examiner et où 80 % d’entre eux sont des amendements formels – de précision, rédactionnels, de coordination ou de correction –, ne serait-il pas possible de les regrouper et de les appeler par ordre d’importance, de manière à traiter en priorité ceux qui posent des questions de fond ?

M. le Président – Merci de votre remarque, mais je suis obligé d’appeler les amendements dans l’ordre pour que le débat reste cohérent. En revanche, je propose de les mettre aux voix « automatiquement », sauf si leurs auteurs veulent les défendre. C’est donc vous-mêmes qui distinguerez les amendements nécessitant un débat de ceux qui sont purement formels. (Assentiment)

ARTICLE PREMIER

M. Didier Quentin, rapporteur de la commission des lois - Les amendements 21 à 23 sont défendus.

Les amendements 21 à 23, acceptés par le Gouvernement, sont adoptés.
Les amendements 339 de M. Quentin, 24 de la commission, 340 de M. Quentin, 25 et 26 de la commission, 341 à 343 de M. Quentin, 27 de la commission et 344 de M. Quentin, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.
L'article premier modifié, mis aux voix, est adopté.

M. le Président – À la demande du Gouvernement, l’article 2 est réservé jusqu’après la discussion de l’article 6.

ART. 3

M. Mansour Kamardine - Je voudrais m’élever contre ce que j’appelle une interprétation « intégriste » de l’article 40 de la Constitution, lequel vise à se prémunir contre un dérapage des finances de l’État.

L’amendement que j’ai déposé pour ramener la date de la consultation des Mahorais sur l’avenir de leur statut de 2011 à 2008 a été retoqué ; mon amendement sur la zone des pas géométriques, habitée mais peu valorisée, a subi le même sort. Je pourrais multiplier les exemples : sur le fondement de l’article 40, on réduit notre droit d’amendement comme peau de chagrin. Voilà qui condamne peu à peu la représentation nationale à ne devenir qu’une simple chambre d’enregistrement.

M. le Président – Quoi qu’il en soit, la véritable paternité de l’amendement 469 vous revient, Monsieur Kamardine.

M. Mansour Kamardine - Je m’en soucie bien moins que du bien-être des Mahorais !

L'amendement 469 du Gouvernement, mis aux voix, est adopté.
L’amendement 29 de la commission, accepté par le Gouvernement, est adopté.
Les amendements 30 de la commission et 426 de M. Kamardine, acceptés par le Gouvernement, sont adoptés.
Les amendements 31 à 38 et 40 de la commission, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.
L'amendement 467 rectifié de M. Kamardine, accepté par la commission et par le Gouvernement, est adopté.
L’amendement 41 de la commission, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. le Rapporteur – J’avais déposé un sous-amendement 465 à l’amendement 406 de M. Kamardine, mais le plus simple serait d’adopter l’amendement 456 du Gouvernement, auquel je me rallie.

M. Mansour Kamardine - Ayant déjà six enfants, je renonce volontiers à la paternité de cet amendement (Sourires).

L'amendement 406 est retiré.
L'amendement 456, mis aux voix, est adopté.
Les amendements 42 et 43 de la commission, 296 de M. Quentin, 44 à 55 de la commission, 348 et 407 de M. Quentin, 57 à 59 de la commission, 410 de M. Quentin, 60 de la commission, 411 de M. Quentin, 61 rectifié, et 62 à 64 de la commission, 352 de M. Quentin, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.
L'amendement 457 du Gouvernement, accepté par la commission, est adopté.
Les amendements 70 de la commission, 413 et 354 de M. Quentin, 65 de la commission et 415 rectifié de M. Quentin, accepté par le Gouvernement, sont successivement adoptés.
Le sous-amendement 455 du Gouvernement, accepté par la commission, est adopté.
L'amendement 66 de la commission ainsi sous-amendé, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’amendement 67 de la commission, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'amendement 408 de M. Kamardine, accepté par la commission et par le Gouvernement, est adopté.
L'amendement 68 de la commission, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'amendement 409 de M. Kamardine, accepté par la commission et par le Gouvernement, est adopté.

M. Jean-Pierre Brard - Je veux bien que nous allions vite, mais ne nous réduisez pas à une simple machine à enregistrer ! Le Gouvernement a pris la peine, pour l’amendement suivant, de rédiger un exposé des motifs assez fourni. Pourrait-il nous donner quelques explications ?

M. le Ministre – Le report de l’applicabilité à Mayotte du code des douanes est nécessaire au calendrier de la départementalisation. Tel est l’objet de l’amendement 458.

L'amendement 458, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur – L’amendement 69 est défendu.

M. le Ministre – Favorable.

M. Jean-Pierre Brard - Jusqu’à nouvel ordre la France n’est pas un État multilingue : la langue de la République est le français. Parler de « renforcement » de l’apprentissage de la langue française à Mayotte est choquant, car c’est reconnaître la première place à une autre langue. Il faut apprendre la langue française, un point c’est tout. Sauf explications convaincantes du ministre, je voterai contre cet amendement.

M. le Ministre – Il faut aller sur place pour comprendre que cet amendement vise un état de fait. À Mayotte, 60 % de la population parle d’abord mahorais, et pas ou peu français. C’est l’honneur de la République que d’apprendre aux jeunes Mahorais l’usage de sa langue ! La résolution de la crise du chikungunya à la Réunion s’est en partie heurtée au fait que près d’un tiers des habitants ne parlaient que créole. C’est précisément au nom de l’unité républicaine que vous devriez voter cet amendement qui renforce notre dispositif éducatif sur le terrain. C’est comme cela que les instituteurs de Maripasoula pourront continuer d’enseigner notre langue aux jeunes Indiens du Maroni sans les éloigner de leurs racines.

M. Jean-Christophe Lagarde – On paie ici des décennies de négligence et de mépris à l’égard de Mayotte. Si tant de nos concitoyens n’y parlent pas le français, c’est parce qu’il ne leur a pas été enseigné ! Le premier collège de l’île a été ouvert en 1963. Plusieurs générations sont concernées ! Il faut corriger cette situation, notamment au moyen de supports audiovisuels ; le dispositif est voué à disparaître, mais nous devons pour l’instant tirer les conséquences de cet état de fait.

M. Jean-Pierre Brard - Je suis d’accord. Je remarque toutefois que M. le ministre n’a pas utilisé le verbe « renforcer » dans sa réponse. On renforce l’apprentissage d’une langue étrangère, comme le prévoit la loi Fillon pour l’allemand, mais pour le français, l’objectif doit être de l’apprendre sans pour autant marginaliser les langues locales.

M. Mansour Kamardine - Je voudrais essayer de convaincre notre collègue Brard de la nécessité d’un vote unanime sur cet amendement. Plusieurs générations de Mahorais n’ont pas eu la chance d’aller à l’école et ne savent pas bien s’exprimer en français. Aujourd’hui, seulement 15 % d’une tranche d’âge arrive au baccalauréat : on ne peut pas dire qu’on ait fait de grands progrès ! Il faut que les mères de famille puissent s’exprimer dans la langue de Molière pour que les enfants réussissent mieux à l’école. La République y gagnera.

M. le Rapporteur – Je propose de rectifier l’amendement en supprimant les mots « le renforcement de ».

L'amendement 69 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur – L’amendement 356 est défendu.

L'amendement 356 de M. Quentin, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur – L’amendement 71, deuxième rectification, de la commission répare une omission. Il maintient à Mayotte le droit actuellement applicable, s’agissant du plan d’aménagement et de développement durable.

M. Mansour Kamardine - Je me rallie à la proposition du rapporteur.

L'amendement 428 est retiré.
L'amendement 71, deuxième rectification, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'amendement 357 de M. Quentin, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’amendement 468 de M. Kamardine, accepté par la commission et par le Gouvernement, est adopté.
Les amendements 72 de la commission, 418 de M. Quentin, 73 à 80 de la commission, 419 de M. Quentin, et 81 de la commission, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.
L'amendement 472 du Gouvernement, accepté par la commission, est adopté.
Les amendements 82 et 83 de la commission, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.
L'article 3 modifié, mis aux voix, est adopté.

Art. 4

Les amendements 84 à 87, 88 rectifié et 89 rectifié de la commission, acceptés par le Gouvernement, sont adoptés.

M. le Ministre – L’amendement 477 est défendu.

M. le Rapporteur – Avis favorable.

M. Jean-Pierre Brard – Si je comprends bien cet amendement, le pouvoir de décision reste dans les mains du Gouvernement : l’on ne fait que consulter la collectivité de Saint-Barthélemy. Si ce n’était pas le Gouvernement qui contrôlait l’application de la légalité républicaine, les portes seraient ouvertes aux pires turpitudes.

L'amendement 477, mis aux voix, est adopté.
L'amendement 90 de la commission, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'amendement 459 du Gouvernement, accepté par la commission, est adopté.
Les amendements 91 à 94 de la commission, 297 de M. Quentin, 95 à 106 et 107, deuxième rectification de la commission, 300 de M. Quentin, 108, 109, deuxième rectification, et 110 rectifié de la commission, 301, 303 et 302 de M. Quentin 112, 113 et 114 rectifié de la commission, 304 de M. Quentin, 115 de la commission, 305 de M. Quentin, 116 à 118 de la commission, 306 de M. Quentin, 119 de la commission, 307 et 308 de M. Quentin, 120 de la commission, 309 de M. Quentin, 121 de la commission, 310 et 311 de M. Quentin, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.
L'amendement 460 du Gouvernement, accepté par la commission, est adopté.
Les amendements 122 à 124 de la commission et 313 à 317 de M. Quentin, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.
L'article 4 modifié, mis aux voix, est adopté.

Art. 5

Les amendements 125 à 130 de la commission, acceptés par le Gouvernement, sont adoptés.
Les amendements 476 et 461 du Gouvernement, acceptés par la commission, sont adoptés.
L'amendement 131 de la commission, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'amendement 462 du Gouvernement, accepté par la commission, est adopté.
Les amendements 132 à 135 de la commission, 298 de M. Quentin, 136 à 153 de la commission, 318 de M. Quentin, 154, deuxième rectification, de la commission, 319 de M. Quentin, 155, 156, deuxième rectification et 157 rectifié de la commission, 320 et 321 de M. Quentin, 158 rectifié, 159 et 160, deuxième rectification de la commission, 322 et 323 de M. Quentin, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.

M. Victorin Lurel - L’amendement 448 est défendu.

M. le Rapporteur – La commission ne l’a pas examiné, mais la convention de mise à disposition des services de l’État et de la Guadeloupe n’est peut-être pas le cadre approprié pour définir un plan de formation des élus et des agents publics de Saint-Martin.

L'amendement 448, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.
Les amendements 161 de la commission, 324 de M. Quentin, 162 et 163 de la commission, 325 de M. Quentin, 164 de la commission, 326 rectifié et 327 de M. Quentin, 165 et 166 de la commission, 328 et 329 de M. Quentin, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.
L'amendement 463 du Gouvernement, accepté par la commission, est adopté.
Les amendements 167 à 169 de la commission, 331 à 333, 337, 334 à 336 et 338 de M. Quentin, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.
L'article 5 modifié, mis aux voix, est adopté.

Art. 6

Les amendements 170, 171 et 173 de la commission, acceptés par le Gouvernement, sont adoptés.

M. Gérard Grignon - L’amendement 292 est de précision.

L'amendement 292, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Gérard Grignon - L’amendement 293 est défendu.

L'amendement 293, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.
Les amendements 175 et 176 de la commission, acceptés par le Gouvernement, sont adoptés.

M. Gérard Grignon - L’amendement 441 est défendu.

L'amendement 441, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Ministre - L’amendement 449 est relatif à l’exécution du service postal à Saint-Pierre-et-Miquelon.

Le sous-amendement 466 de M. Quentin, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. Gérard Grignon - L’amendement 449 n’a pas été examiné en commission. On connaît les difficultés de l’exécution du service postal à Saint-Pierre-et-Miquelon, du fait notamment de son éloignement. Pour ma part, à partir du moment où le service postal est réalisé par une collectivité, je considère comme absolument nécessaire qu’une convention soit signée avec l’État sur les modalités de son exécution. Je ne connais pas toutes les implications de cet amendement, mais je ne voudrais pas qu’on crée des difficultés supplémentaires alors que l’exécution de ce service à Saint-Pierre-et-Miquelon est déjà assez compliquée comme cela. Je tiens donc à ce que la convention avec l’État demeure obligatoire.

M. le Ministre – Il ne s’agit que d’un amendement de précision sur les compétences respectives de l’État et de la collectivité, qui pourront conclure une convention permettant de définir qui fait quoi. En l’état, le Conseil d’État ne nous permettrait pas de faire fonctionner ce service postal.

L'amendement 449, sous-amendé, accepté par la commission, est adopté.
Les amendements 177 à 183 de la commission, 299 de M. Quentin, 184 à 201, 202 rectifié et 203 à 206 de la commission, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.

M. Gérard Grignon - L’amendement 5 est défendu.

M. le Rapporteur - Avis défavorable.

M. le Ministre - De même.

L’amendement 5 est retiré.
Les amendements 207 et 208 de la commission, 360 de M. Quentin, 209, 210 rectifié, 211 à 214, 215 rectifié, 216, 217, 219 rectifié et 220 à 225 de la commission, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.
L'amendement 452 du Gouvernement, accepté par la commission, est adopté.
Les amendements 226 à 228 de la commission, 361 de M. Quentin, 229 de la commission, 362 et 363 de M. Quentin et 230 de la commission, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.

M. Gérard Grignon - L’amendement 440 est défendu.

M. le Rapporteur - Avis défavorable.

M. le Ministre - De même.

M. Gérard Grignon - Je ne comprends pas cette position. Contrairement à ce qui a été dit hier en commission, la proposition n’est pas nouvelle : il s’agit de la mise en place à Saint-Pierre-et-Miquelon d’un observatoire de la fonction publique, qui avait été prévu par la loi d’orientation sur l’outre-mer et ne fonctionne pas encore. Il a pour but de mieux coordonner les relations des services de l’État avec la collectivité territoriale et de dresser une cartographie de l’administration locale, service par service, pour planifier à moyen et long terme les emplois à pourvoir du fait de créations de poste, départs à la retraite ou mutations de fonctionnaires métropolitains par exemple. La collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon assume seule la charge de ses étudiants boursiers en France métropolitaine. Ils reviennent avec des formations supérieures de très haut niveau et ne trouvent pas leur place dans la fonction publique territoriale faute de ces prévisions. Cette mesure compléterait donc utilement le présent projet de loi organique.

M. le Ministre – Le fond n’est pas en cause, mais cela relève du décret.

M. Gérard Grignon – Avant que cette disposition ne soit inscrite dans la loi d’orientation sur l’outre-mer, on nous faisait la même réponse, mais maintenant qu’elle l’est, elle n’est toujours pas appliquée… Il me semble donc nécessaire de l’inscrire dans la loi organique.

M. le Ministre – Ce projet de loi a été l’occasion d’un important travail de codification, qui a permis d’éliminer toute une série de dispositions afin de rendre les textes plus lisibles. Il ne serait pas opportun d’ajouter une mesure qu’on sait être réglementaire et qui sera prise par décret.

Mme Christiane Taubira - Sans vouloir soutenir outre mesure mon collègue Grignon, qui n’en a certes pas besoin, je rappelle que nous avons été confrontés pendant des années à une situation analogue. Le ministre pourrait sans doute satisfaire M. Grignon en prenant l’engagement que cette mesure sera prise par décret.

M. le Ministre – Je suis ravi que Mme Taubira me prenne par la main sur le chemin sur lequel je suis déjà engagé...

Mme Christiane Taubira - Monsieur le ministre, le rythme de cette séance fait davantage penser à un test de quotient intellectuel qu’à un débat parlementaire et malgré tous mes efforts, je ne l’ai pas réussi. J’ai fait le maximum pour tout suivre en même temps – les interventions, les amendements et le texte même – mais à l’évidence, je n’ai pas les capacités napoléoniennes de certains ici. J’ai voulu apporter ma contribution. Elle était inutile,…

M. le Président – Certainement pas !

Mme Christiane Taubira - …mais je vous annonce très officiellement que je vous revaudrai cet humour facile, Monsieur le ministre.

M. Gérard Grignon - Je remercie ma collègue de son intervention. Il est difficile de rassembler ses idées au rythme où nous allons. La disposition que je proposais est déjà inscrite dans une loi et j’aurais aimé qu’on lui donne un poids plus important, mais je comprends les arguments du Gouvernement et j’entends son engagement.

L’amendement 440 est retiré.

M. Jean-Christophe Lagarde - Il est vrai que nombre des amendements qui nous sont présentés ne contiennent que des dispositions de coordination ou de correction d’erreurs matérielles, mais au milieu, puisqu’il faut bien les examiner dans l’ordre, se trouvent des amendements de fond. Je suggère que ceux-là soient effectivement exposés. Je ne suis pas convaincu que nous ne venions pas de laisser passer des bêtises sans nous en rendre compte : c’est dans ce type de circonstances qu’on se retrouve avec une apologie du colonialisme dans la loi ! Je propose donc que seuls les amendements de pure forme soient votés sans présentation aucune.

M. le Président – J’appelle les amendements un par un et je vérifie à chaque fois que personne ne souhaite s’exprimer. Si c’est le cas, je lui donne la parole immédiatement.

M. Jean-Pierre Brard – Nous qui ne sommes pas de l’outre-mer ne sommes pas aussi bien informés que nos collègues. Lorsqu’un amendement n’est pas de pure forme, nous devons savoir de quoi il s’agit avant de voter. Pour le reste, que nous corrigions les nombreuses imperfections du travail sénatorial sans ouvrir la discussion me semble tout à fait légitime.

M. le Président – C’est grâce à votre intervention, Monsieur Brard, qu’un amendement de la commission tout à l’heure a été rectifié, et adopté à l’unanimité !

M. Philippe Houillon, président de la commission des lois - Il me semble que c’est le moment de demander une suspension de séance.

La séance, suspendue à 19 heures 15, est reprise à 19 heures 35.
L'amendement 231 de la commission, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. le Rapporteur – La commission, sensible aux arguments économiques de M. Grignon, a adopté un amendement 232 identique au sien, le 3 rectifié. Je suis néanmoins, à titre personnel, réservé pour des raisons juridiques. Le transfert d’une telle compétence au conseil territorial pourrait en effet être inconstitutionnel.

M. le Ministre – Avis défavorable.

M. le Rapporteur – Je retire l’amendement 232.

M. Gérard Grignon - Je maintiens le 3 rectifié. J’ai toujours été opposé à l’implantation de casinos à Saint-Pierre-et-Miquelon, mais force est de constater qu’Internet a bouleversé la pratique des jeux. À Saint-Pierre-et-Miquelon, comme ailleurs, les joueurs en ligne sont de plus en plus nombreux, alors même que cette activité ne fait l’objet d’aucun contrôle, ce qui ouvre la porte à toutes les fraudes et au blanchiment d’argent. Or, un groupe de casinos français, tout à fait sérieux, a pris contact avec nous. Étant donné les difficultés budgétaires de l’archipel, son implantation serait bienvenue. Cela permettrait de créer des emplois, de mieux contrôler la pratique des jeux et, accessoirement, de faire en sorte qu’un casino français s’implante en territoire français plutôt qu’à Gibraltar ou je ne sais où…

Le Gouvernement souhaite sans doute protéger la Française des jeux, mais il n’y parviendra pas, notamment parce qu’Internet a totalement bouleversé la donne. Cela me rappelle ce projet absurde, mis en œuvre il y a quelques années, de placer une cage de Faraday au-dessus de l’antenne émettrice de télévision de Saint-Pierre-et-Miquelon, pour empêcher les images françaises d’être reçues au Canada. Quel obscurantisme technologique ! Ne retombons pas dans les mêmes erreurs avec les jeux en ligne ! Je maintiens donc cet amendement qui permettrait à la collectivité de Saint-Pierre-et-Miquelon de les autoriser à partir de son territoire.

M. Jean-Christophe Lagarde – M. Grignon soulève un problème sérieux, qui ne concerne pas seulement Saint-Pierre-et-Miquelon, mais bien l’ensemble de notre pays. Pourquoi accorderait-on à la collectivité de Saint-Pierre-et-Miquelon seule le droit d’autoriser les jeux en ligne à partir de son territoire ? On ne peut tout de même pas modifier la loi parce qu’un casino souhaite s’implanter en quelque endroit ! On ne légifère pas sous la pression d’un lobby. Et si l’on accepte les jeux en ligne par l’entremise d’autres sociétés que la Française des jeux à Saint-Pierre-et-Miquelon, pourquoi pas à Drancy et partout ailleurs ? Il ne s’agit pas là d’un débat sur l’outre-mer, mais sur l’organisation générale des jeux en France.

L'amendement 3 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté.
L’amendement 364 de M. Quentin, l’amendement 233 de la commission et l’amendement 365 de M. Quentin, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.
L’amendement 453 du Gouvernement, accepté par la commission, et l’amendement 234 de la commission, accepté par le Gouvernement, sont successivement adoptés.

M. le Rapporteur – L’amendement 235 de la commission est identique au 9 de M. Grignon. Nous le retirerons si le Gouvernement s’engage à associer plus systématiquement le président du conseil territorial de Saint-Pierre-et-Miquelon aux négociations d’accords avec des États ou territoires situés dans l’Atlantique Nord ou avec des organismes régionaux de cette zone géographique.

M. le Ministre – Le Gouvernement s’y engage.

L'amendement 235 est retiré.

M. Gérard Grignon - Le Gouvernement souhaite intégrer davantage Saint-Pierre-et-Miquelon dans son environnement régional. Il est normal que le président de la collectivité soit associé aux négociations des accords concernant l’Atlantique Nord. Cela étant dit, je suis prêt à retirer l’amendement 9 au bénéfice de l’engagement du ministre. J’aimerais d’ailleurs que celui-ci nous explique pourquoi le Gouvernement n’invite pas officiellement le Canada à négocier sur la question du plateau continental car il s’agit d’intérêts vitaux pour l’archipel.

M. le Ministre – S’il est naturel d’informer et d’associer pleinement le président du conseil territorial, il est tout aussi légitime de prévoir des protections dans l’exercice des missions régaliennes, dont font partie les relations diplomatiques. Mais soyez assuré, Monsieur Grignon, que l’exécutif sera à très brève échéance associé aux négociations futures.

L'amendement 9 est retiré.
Les amendement 366 de M. Quentin, 236 de la commission, 367 de M. Quentin, 237 à 242, et 243 rectifié de la commission, 368 de M. Quentin et 244 de la commission, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.

M. Gérard Grignon - Je retire mon amendement 13 rectifié au bénéfice de l’amendement 245 rectifié de la commission.

L'amendement 245 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.
L'article 6 modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 2 (précédemment réservé)

L'amendement 470 du Gouvernement, accepté par la commission, est adopté.
L'amendement 28 de la commission, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 2 modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 7

Mme Béatrice Vernaudon – J’avais déposé en octobre dernier une proposition de loi relative au mode de scrutin en Polynésie, cosignée par 37 de nos collègues. Si une partie de cette proposition de loi a été reprise par la commission, qui a déposé un amendement tendant à supprimer la prime majoritaire, je vous proposerai un article additionnel reprenant l’autre partie, à savoir le redécoupage de la circonscription des Îles du Vent.

D’un point de vue démographique, cette circonscription concentre en effet trois fois plus de population que l’ensemble des autres circonscriptions. Sociologiquement, les intérêts des circonscriptions de « Tahiti rural » et de « Moorea » diffèrent en outre de ceux de « Tahiti urbain ». À cela s’ajoute l’annulation, en 2004, des opérations électorales dans les Îles du Vent, qui avait privé l’Assemblée de Polynésie de plus de la moitié de ses membres. Imaginez seulement que notre Chambre fonctionne avec 200 députés sur 577… C’est ce qui s’est passé en Polynésie pendant quatre mois.

M. René Dosière – L’instabilité politique en Polynésie n’est pas seulement liée au mode de scrutin, et le changement de celui-ci n’est pas de nature à y mettre un terme. Elle résulte en effet de trois facteurs. D’abord l’attirance de certains élus pour l’argent et les avantages matériels au détriment de l’intérêt général. Or, le nouveau statut ne fera que renforcer les dérives clientélistes, déjà favorisées par une exception troublante : l’assemblée de Polynésie est en effet la seule à voter elle-même le niveau de rémunération de ses membres… Si Oscar Temaru s’est trouvé en difficulté, c’est sans doute qu’il n’a pas su rivaliser avec Gaston Flosse dans le maniement des hommes et de l’argent. (Exclamations sur certains bancs du groupe UMP)

Deuxième facteur d’explication, l’attitude des adversaires de l’UPLD, qui n’ont pas cessé de mettre en cause le gouvernement légitime en recourant au GIP : cette milice a occupé des locaux, lancé des grèves et organisé des manifestations… Aujourd’hui condamné par la chambre régionale des comptes, le GIP a pourtant été toléré par l’État.

Enfin, le gouvernement français a contribué à l’instabilité politique de la Polynésie en exprimant de manière subtile ses réserves à l’égard du nouveau gouvernement de Polynésie : les crédits sont arrivés plus difficilement, les négociations se sont embourbées, il a fallu six mois pour que les autorités métropolitaines reçoivent M. Temaru, contre seulement huit jours pour M. Tong Sang – je pense au Président de la République et au Premier ministre, pas à vous, Monsieur Baroin : vous avez été d’une parfaite rectitude républicaine.

Face à toutes ces difficultés, le gouvernement Temaru a sans doute manqué d’expérience, sans doute aussi a-t-il commis des erreurs, mais cela regarde les seuls Polynésiens.

Le gouvernement actuel dispose certes d’une majorité, mais elle reste très fluctuante, certains élus risquant de céder à la tentation de susciter une dissolution afin de provoquer une confusion entre les élections locales et les élections législatives et présidentielle. Un changement du mode de scrutin n’apaisera donc pas la Polynésie. Il aggravera plutôt l’instabilité.

M. Jean-Christophe Lagarde – Sur le mode de scrutin en Polynésie – sur lequel le débat est engagé bien que ce ne soit pas l’objet de l’article 7 –, la position de l’UDF n’a pas changé : en 2004, nous dénoncions déjà l’instauration d’une prime majoritaire, coup de force de M. Flosse, que notre collègue Dosière avait à l’époque également dénoncé.

Ce système conduit en effet des candidats dont les opinions divergent à se présenter ensemble. Ce n’est pas le Gouvernement métropolitain qui est responsable des difficultés de M. Temaru : ses alliés l’ont quitté parce qu’il n’a pas respecté ses engagements électoraux.

Nous devons permettre aux électeurs de choisir. Ne les contraignons pas à voter pour M. Temaru au motif qu’ils ne veulent plus de M. Flosse ! Nous devons en outre permettre à une majorité de gouverner conformément aux souhaits des électeurs.

En revenant sur le mode de scrutin actuel, nous n’aurons certes pas tout réglé, mais nous pourrons renouer avec les forces politiques en présence, tout en prémunissant la Polynésie contre de nouvelles crises. Ce territoire, qui souffre d’une grave crise économique et sociale, a besoin de retrouver les moyens de se gouverner.

M. Michel Buillard - Pour information de l’Assemblée, le redécoupage proposé n’a pas été soumis à l’assemblée de Polynésie, ni au conseil économique, social et culturel.

Mme Béatrice Vernaudon - Au conseil, si.

M. Michel Buillard - Il était favorable au principe, pas à la proposition précise. Moi-même, je n’ai pas été associé à cette démarche. S’il faut procéder à un redécoupage, il convient de consulter largement la population et la représentation territoriale. Enfin, le recensement sera effectué l’an prochain. Attendons les résultats.

D’autre part, M. Dosière, qui nous dit sacrifier à sa vieille passion pour la Polynésie, obéit plutôt, selon moi, à son obsession qui est de salir la représentation territoriale. Je m’inscris en faux contre ses propos. Certes, le milieu politique a ses pratiques. Mais il faut savoir que le Président Chirac a vainement attendu M. Temaru, lequel est resté dans sa chambre d’hôtel. M. Brard parlait de racisme. Monsieur Dosière, abandonnez un instant votre vision partisane. Vous savez très bien quels propos M. Temaru utilise à l’endroit des Français de métropole. De tels propos me font mal. Comme l’a dit M. Lagarde, M. Temaru est tombé de lui-même, en raison de ses erreurs, de son incapacité à gérer, de son mépris pour son peuple.

M. le Président – Je suis saisi par le groupe UDF d’une demande de scrutin public sur le vote de l’amendement 474 rectifié.

M. Victorin Lurel - Je dois le dire solennellement, nous ne pouvons nous associer au changement de mode de scrutin en Polynésie tel qu’il nous est proposé. Comment parler de consensus quand 29 personnes sur 57 ont voté en faveur de cette mesure ? On nous dit aussi que le consensus s’est fait dans le cercle des autonomistes républicains. Mais que je sache, M. Temaru est un élu. On n’a pas à l’écarter. Un mode de scrutin nécessite un large consensus. Les conditions ne sont pas réunies pour cela. Comment accepter de changer deux fois le mode de scrutin en trois ans, à la demande de la même formation politique ? Et le faire quand la législature se termine n’est vraiment pas opportun. La sagesse serait de retirer cette disposition.

Les amendements 369 de M. Quentin, 246 rectifié et 247 de la commission, 370 de M. Quentin, 248 rectifié de la commission, 371 de M. Quentin, 249 rectifié, 250 et 251 de la commission, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.

M. le Ministre - L’amendement 474 rectifié crée un siège de député pour Saint-Barthélemy. Il y a eu un quasi consensus des groupes politiques à l’Assemblée pour créer la collectivité territoriale. Le Sénat s’est prononcé à l’unanimité également pour la création de deux postes de sénateurs…

M. Jean-Christophe Lagarde - Au Sénat, dès qu’il s’agit de se créer des postes !

M. le Ministre - …ce qui est normal, puisque la Haute assemblée représente les collectivités territoriales.

La collectivité de Wallis-et-Futuna a un député pour 15 000 habitants, Saint-Pierre-et-Miquelon un député pour 6 500 habitants. La logique veut que les deux nouvelles collectivités en aient chacune un, d’autant que la majorité des formations politiques y sont favorables. Cependant, cela ne peut s’appliquer pour le scrutin de juin 2007. D’une part, le Conseil constitutionnel souhaite un redécoupage, qui ne peut intervenir avant cette date. D’autre part, une fois ce redécoupage effectué, il appartiendra au nouveau gouvernement, sous la législature suivante, de définir un calendrier. Cet amendement évite de tomber sous le coup de l’article 40.

M. le Rapporteur - Le Sénat a créé deux sièges de sénateurs, dans la mesure où l’article 24 de la Constitution lui donne un rôle de représentation des collectivités territoriales de la République. Par courtoisie, il a laissé à l’Assemblée nationale toute latitude de créer ou non des sièges de députés. Plusieurs raisons le justifient. D’abord, pour assurer un lien étroit avec les électeurs, il est normal que chaque collectivité ait au moins un siège de député, comme chaque département en a au moins deux. Ensuite, aux termes de l’article 74 de la Constitution, les collectivités d’outre-mer ont un statut qui tient compte des intérêts propres de chacune d’elles au sein de la République. Un député contribuera à les défendre. D’autre part, le député de la 4e circonscription de la Guadeloupe risque de faire désormais partie de trois collèges sénatoriaux. Enfin, la population locale attend ces créations. Je suis donc favorable aux amendements du Gouvernement créant un siège de député pour Saint-Barthélemy et un pour Saint-Martin, à pourvoir lors du renouvellement général suivant celui de 2007.

M. Victorin Lurel - Au nom du groupe socialiste, je demande à l’Assemblée d’adopter cet amendement. Reporter l’élection au renouvellement suivant celui de 2007 paraît plus prudent pour éviter tout risque juridique.

M. Jean-Christophe Lagarde – On nous donne l’exemple du Sénat, qui représente effectivement les collectivités territoriales. Précisons cependant qu’au cours de cette législature, il s’est ajouté une vingtaine de sièges, a réussi à adopter un mandat de dix ans pour un tiers de ses membres, et, si le Président de l'Assemblée nationale n’était pas intervenu, aurait voté une augmentation des indemnités parlementaires. On comprendra la considération que je lui porte dès qu’il s’agit de sièges et d’avantages.

Cela dit, même si l’on admet la création de deux sièges de sénateurs, je ne vois pas en quoi l’article 24 de la Constitution oblige à créer deux sièges de députés. Quant à l’argument technique – un même député voterait dans trois collèges sénatoriaux – il est possible de légiférer pour qu’il ne vote que dans l’un des trois. On nous dit aussi qu’un même député ne peut représenter trois collectivités territoriales différentes. Mais ils sont deux pour représenter les trois provinces de Nouvelle-Calédonie. Si l’on tient compte de la population et de l’éloignement, il en faudrait un troisième pour les Îles Loyauté. (Exclamations sur certains bancs du groupe UMP)

J’en viens à l’argument démographique : deux députés pour une population aussi restreinte, cela crée à l’évidence une difficulté. Je sais bien que cela existe en métropole, à Wallis-et-Futuna et à Saint-Pierre-et-Miquelon. Mais soyons sérieux ! Les distances entre Wallis-et-Futuna ou Saint-Pierre-et-Miquelon et le premier territoire français sont telles que l’on ne peut pas faire autrement. Un même député ne serait pas en mesure de couvrir une circonscription aussi étendue. Tel n’est pas le cas pour ce qui concerne Saint-Barthélemy et Saint-Martin, puisque notre collègue Lurel parvient aujourd’hui à représenter ces territoires en effectuant les trajets nécessaires. L’argument de la distance ne tient donc pas plus que celui de la population.

Je découvre du reste dans les explications du ministre que la réforme ne s’appliquerait pas au renouvellement de 2007 : dès lors, c’est la prochaine législature qui déciderait si elle concerne le renouvellement de 2012.

Je ne voterai donc pas une disposition qui n’est ni nécessaire, ni légitime, ni juridiquement utile. (« Très bien ! » sur divers bancs)

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances - L’on serait surpris que le président de la commission des finances n’explique pas pourquoi il a déclaré irrecevables tous les amendements, même gagés, qui auraient pour effet de créer deux nouveaux sièges de députés, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin. Ce faisant, je me conforme à la lettre du Conseil constitutionnel, qui, le 24 juillet 2003, a très clairement indiqué que l’augmentation du nombre de parlementaires a une incidence directe et certaine sur les dépenses de l'Assemblée nationale, lesquelles font partie des charges de l’État. On peut me rétorquer que le Sénat a, de lui-même, créé deux sièges de sénateurs. Mais cela est dû à l’absence de contrôle systématique et effectif de la recevabilité des amendements dès leur dépôt au Sénat…

M. Michel Bouvard - Absence fort regrettable !

M. le Président de la commission des finances – Je ne peux en effet que regretter cette absence de contrôle systématique de la recevabilité financière des amendements au Palais du Luxembourg. Toutefois, le Conseil constitutionnel a sanctionné cette décision, dans sa décision du 14 décembre dernier, postérieure – je le reconnais bien volontiers – à l’adoption de l’amendement relatif aux sièges de sénateurs.

Aucun principe constitutionnel ne permet de déroger à l’article 40 de notre Constitution. C’est la loi organique qui fixe le nombre des parlementaires et leurs indemnités, et la loi organique doit respecter la Constitution.

Si l’article 24 de la Constitution prévoit la représentation parlementaire des collectivités territoriales de la République, le Conseil constitutionnel a précisé, en 1991, que la norme suprême n’exige pas que chaque catégorie de collectivité dispose d’une représentation propre. L’article 25 de la Constitution – qui traduit le principe de la séparation des pouvoirs – n’empêche pas le Parlement de modifier, sur son initiative, son propre régime électoral, mais à condition qu’une telle réforme d’ensemble n’ait pas pour objet direct d’augmenter le nombre de parlementaires.

M. Jean-Christophe Lagarde - Tout ceci est bien intéressant. Merci de ces rappels !

M. le Président de la commission des finances – Enfin, le respect de l’exigence constitutionnelle d’équilibre démographique dans la répartition des sièges de parlementaires ne semble pas atteint en l’espèce. Bien au contraire, puisque ces nouvelles circonscriptions comporteraient 6 850 habitants à Saint-Barthélemy et 29 112 à Saint-Martin, cependant que la 4e circonscription de la Guadeloupe – ainsi amputée – ne compterait plus que 63 000 habitants, contre 105 000 pour la population moyenne d’une circonscription guadeloupéenne.

En tout état de cause, bien que le Gouvernement ait pris sa décision, l’article 40 est applicable. Par ailleurs comme l’a rappelé mon homologue du Sénat, M. Jean Arthuis, une telle augmentation des charges publiques est-elle opportune dans le contexte actuel ? J’entends les arguments du ministre de l’outre-mer, que je salue. Mais j’aurais préféré qu’une telle décision soit prise postérieurement et qu’on en tire les conclusions pour le découpage électoral (« Très bien ! » et applaudissements sur plusieurs bancs), ne serait-ce qu’en diminuant d’autant le nombre de députés de la métropole. Si nous voulons – et je comprends les députés d’outre-mer – que soient représentés spécifiquement ces deux territoires, c’est vers ce type de solution qu’il faudrait s’orienter.

M. René Dosière et M. Michel Bouvard - Très bien !

M. le Ministre – Rappelons quelques règles démocratiques inattaquables : en modifiant la Constitution en 2003, la représentation nationale a voulu – en complétant l’article 74 – reconnaître la faculté des COM d’adapter nos politiques publiques aux contraintes de leurs territoires. Peut-être cette révision de notre loi fondamentale n’a-t-elle pas eu un grand retentissement ; elle est pourtant essentielle pour bien comprendre l’effort d’adaptation auquel doit se plier tout gouvernement pour répondre aux attentes des populations concernées et de leurs représentants. C’est dans cet esprit que, sur d’autres sujets, nous avons été conduits à prendre des mesures tout à fait dérogatoires au droit commun, et, en même temps, parfaitement conformes à la Constitution.

Conformément à l’esprit de la révision constitutionnelle de 2003, les populations ont été consultées par la voie référendaire : on ne peut pas, après avoir convoqué les électrices et les électeurs, s’asseoir sur leur vote ! C’est une question de respect démocratique. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP)

M. Victorin Lurel et M. Philippe Edmond-Mariette - Bravo !

M. le Ministre – J’en viens aux arguments concernant la démographie. Vu de métropole, on a coutume de considérer qu’il faut un député pour 110 000 ou 120 000 habitants. Mais il y a un député pour Wallis-et-Futuna – 15 000 habitants – et un député pour les 6 500 habitants de Saint-Pierre-et-Miquelon. C’est aussi la richesse de la France que d’avoir des territoires où les valeurs de la République trouvent à s’exprimer quelle que soit l’importance de la population. Si la vitalité démocratique et républicaine ne s’appréciait qu’à l’aune de la démographie, il n’y aurait pas de politique publique dans ces territoires et la France s’en serait sans doute détournée depuis longtemps. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs)

Monsieur le Président de la commission des finances, au-delà de la création de ces sièges, vous savez bien que cette controverse oppose souvent les commissions des finances des deux assemblées du Parlement et le ministre chargé de l’outre-mer. Ainsi, il y a dix-huit mois, nous avons eu un très fort débat dans le cadre de la LOPOM. Dès lors que l’on traite de l’outre-mer, il faut toujours appréhender la nécessaire dérogation au droit commun, y compris dans le domaine fiscal. S’il n’y avait pas d’exonérations – dérogatoires – des charges sociales, tout développement économique serait impossible. Cher Pierre Méhaignerie, je respecte la position de votre commission des finances. En même temps, je comprends la demande des populations, des élus et du président de la région Guadeloupe. Puisque nous décidons de créer des collectivités, autant que l’enfant soit bien né ! (Applaudissements sur divers bancs)

M. le Président de la commission des lois – Un bref rappel juridico-historique pour contribuer à éclairer le débat. C’est le Conseil constitutionnel qui a créé un précédent, jamais démenti depuis lors. En effet, le 29 juillet 1961, une loi organique crée un député pour Wallis-et-Futuna. Appelé à statuer, le Conseil constitutionnel invite expressément le Parlement à organiser la représentation de Wallis-et-Futuna, à la suite de leur récente accession au statut de TOM. Par la suite, les mêmes dispositions vont trouver à s’appliquer sans discontinuité, en 1976 avec la création d’un siège de député pour Mayotte, et en 1985 avec la création d’un siège de député pour Saint-Pierre-et-Miquelon. Alors que nous sommes en train de créer des COM, l’on ne comprendrait pas pourquoi nous ne nous conformerions pas à la même doctrine.

De plus, le Gouvernement présente une proposition équilibrée, en tenant compte du fait que nous sommes à la veille d’élections majeures et qu’il ne serait pas raisonnable de changer la règle du jeu juste avant, sans même être certains que la loi serait promulguée dans des délais suffisants pour que les candidats puissent faire campagne normalement : les dispositions ne s’appliqueront donc que lors du renouvellement suivant celui de 2007.

Enfin, le Conseil constitutionnel a rendu une décision aux termes de laquelle il faudra procéder à un redécoupage des circonscriptions électorales au plus tard après les échéances de 2007.

M. Michel Bouvard - Ce n’est qu’une recommandation.

M. le Président de la commission des lois – À partir du moment où on ne le ferait pas, les élections suivantes – celles devant avoir lieu en 2012 pour la XIVe législature – risqueraient de susciter des recours pouvant aboutir à l’annulation de telle ou telle élection.

M. Jean-Christophe Lagarde - C’est une menace qui a déjà été brandie !

M. le Président de la commission des lois – Le Conseil constitutionnel s’est agacé à de nombreuses reprises du maintien en l’état de la carte des circonscriptions, mais il n’avait jamais formulé une recommandation aussi précise.

Le redécoupage sera rééxaminé, mais le principe général demeure selon lequel la démographie prévaut. Le Conseil constitutionnel a précisé, néanmoins, que le législateur peut en atténuer modérément le caractère impératif s’il traite d’une question d’intérêt général comportant des objectifs précis. C’est le cas ici, avec la répétition de la représentation à chaque création de collectivité.

M. Philippe Edmond-Mariette - Je serai bref, tant M. le président de la commission vient de faire preuve de maestria dans son exposé. Le texte-clef, en l’occurrence, n’est ni l’article 74, ni l’amendement du Sénat. C’est l’alinéa 3 de la Constitution : « la souveraineté nationale appartient au peuple, qui l’exprime par la voix de ses représentants élus ».Voilà qui justifie pleinement la création de ces postes. Le Conseil constitutionnel, en effet, n’a jamais dit que le critère démographique était seul à valoir.

M. Michel Bouvard - La différence de régimes fiscaux entre métropole et outre-mer se justifie dans bien des cas, mais l’égalité républicaine doit s’imposer au traitement des parlementaires. Depuis l’entrée en vigueur de la session unique, les députés doivent passer la moitié de l’année plus un jour en métropole. La questure s’occupe de régler la question des déplacements de nos collègues ultramarins. Pour le reste, la logique veut que tous les parlementaires soient soumis à l’impôt sur le revenu. Tel est l’objet de l’amendement 478 rectifié.

M. le Président de la commission – Il faut cependant rectifier l’amendement pour écrire « celle des autres parlementaires » ?

M. Michel Bouvard - Tout à fait d’accord.

M. le Président de la commission – Sur le fond, je ne suis pas défavorable à cet amendement : les indemnités parlementaires doivent être soumises à l’impôt sur le revenu.

M. le Ministre - Ce sous-amendement – sur lequel je suis d’accord par ailleurs – n’a pas sa place dans une loi organique, et le Conseil constitutionnel ne manquera pas de vous le rappeler. Il vaudrait mieux le glisser dans une loi ordinaire.

M. Michel Bouvard - Peut-être, mais c’est une affaire urgente ! Je consens à retirer mon amendement si le Gouvernement – et ceux qui lui succèderont – s’engage à assujettir les parlementaires nouvellement élus aux même règles d’imposition.

M. le Président de la commission – Ce sera d’autant plus simple que le prélèvement sera effectué à la source !

M. le Ministre – En cas d’adoption de l’amendement gouvernemental, la question ne se posera pas avant la loi de finances pour 2008.

M. Michel Bouvard - Je retire mon amendement, mais je ne suis toujours pas convaincu qu’il n’ait pas sa place dans une loi organique.

M. Mansour Kamardine - Il est déjà satisfait !

Le sous-amendement 478 rectifié est retiré.
À la majorité de 31 voix contre 4 sur 35 votants et 35 suffrages exprimés, l’amendement 474 rectifié est adopté.
L'amendement 252 de la commission, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Victorin Lurel - L’amendement 444 vise à aligner la prime majoritaire à Saint-Barthélemy sur le droit commun.

M. le Rapporteur – La commission n’a pas examiné cet amendement. J’y suis favorable à titre personnel.

M. le Ministre – Sagesse.

M. Jean-Christophe Lagarde - Le groupe UDF y est opposé, car le droit commun lamine l’opposition des collectivités territoriales. Nul besoin d’une prime de 50% pour détenir la majorité dans un conseil municipal. Une prime de 33 % suffit amplement : il ne faut en fait pour cela que récolter 18 % des voix environ. N’est-ce pas exagéré de donner une prime de 50 % à une liste n’ayant pas atteint ce résultat ?

L'amendement 444, mis aux voix, est adopté.
L'amendement 253 de la commission, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.
Les amendements 372, 374, 374 et 375 de M. Quentin, acceptés par la commission et par le Gouvernement, sont successivement adoptés.
L'amendement 254 de la commission, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'amendement 376 de M. Quentin, accepté par la commission et par le Gouvernement, est adopté.
L'amendement 255 rectifié de la commission, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'amendement 377 de M. Quentin, accepté par la commission et par le Gouvernement, est adopté.
L'amendement 256 rectifié de la commission, accepté par le Gouvernement, est adopté.
Les amendements 378, 379 et 380 rectifié de M. Quentin, acceptés par la commission et par le Gouvernement, sont successivement adoptés.
L'amendement 257 de la commission, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'amendement 381 de M. Quentin, accepté par la commission et par le Gouvernement, est adopté.
L'amendement 450 du Gouvernement, accepté par la commission, est adopté.

M. le Président – Je suis saisi par le groupe UDF d’une demande de scrutin public sur l’amendement 475 rectifié du Gouvernement, accepté par la commission.

À la majorité de 24 voix contre 3 sur 27 votants et 27 suffrages exprimés, l’amendement 475 rectifié est adopté.
L'amendement 258 de la commission, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.
L'amendement 447 de M. Lurel, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.
Les amendements 259 de la commission, 382, 383, 384, 385 de M. Quentin, 260 rectifié de la commission, 386 de M. Quentin, 261 rectifié de la commission, 387 de M. Quentin, 262 rectifié de la commission, 388, 389, 390 rectifié et 391 de M. Quentin, 263 de la commission, acceptés par le Gouvernement, sont adoptés.
L'amendement 451 du Gouvernement, accepté par la commission, est adopté.
Les amendements 392 de M. Quentin, 264 de la commission, 265 de la commission et 2 de M. Grignon identiques, 266 rectifié de la commission, 393, 394 et 395 de M. Quentin, 267 rectifié de la commission, 396 de M. Quentin, 268 rectifié de la commission, 397 de M. Quentin, 269 rectifié de la commission, acceptés par le Gouvernement, sont adoptés.
L'article 7 modifié, mis aux voix, est adopté.

après l'Art. 7

M. le Président – Nous en venons à l’amendement 11, qui a été présenté tout à l’heure par Mme Vernaudon.

M. le Rapporteur – Avis défavorable. Cet amendement propose une division en trois de la circonscription des Îles du Vent pour les élections de l’Assemblée de la Polynésie française. Un tel redécoupage peut sembler pertinent pour rééquilibrer le poids respectif des différentes circonscriptions dans la composition de cette assemblée. Toutefois, je dois appeler votre attention sur deux points. D’abord, est-il opportun de procéder à ce redécoupage, alors que les acteurs ne semblent pas avoir été consultés ? Ensuite, on peut remédier plus utilement à l’actuelle instabilité politique de la Polynésie française en modifiant le mode de scrutin. C’est pourquoi j’invite ses auteurs à retirer leur amendement.

M. le Ministre – Même avis. Il serait préférable de voter l’amendement 270 de la commission.

M. René Dosière - Je voudrais dire tout l’intérêt que présente cet amendement de Mme Vernaudon, dont on connaît l’indépendance d’esprit et le sens de l’intérêt général.

Mme Christiane Taubira - C’est vrai !

M. René Dosière - Avec le découpage actuel, ou « découpage Flosse », l’île de Tahiti pèse d’un poids considérable. À partir du moment où le scrutin a été annulé et où les conseillers territoriaux de Tahiti n’ont plus été élus, l’assemblée est devenue une assemblée croupion – ce qui ne l’a pas empêchée de voter un budget –, à cause de ce découpage aberrant. Même avec un autre mode de scrutin, si les élections à Tahiti étaient de nouveau annulées, ce qui arrive d’ailleurs fréquemment, on se retrouverait dans la même situation surréaliste.

C’est donc un amendement de bon sens. Pourtant, je ne le voterai pas, ni celui de la commission, car je ne pense pas que l’on puisse modifier un mode de scrutin par un amendement déposé en séance, que le Sénat n’a pas examiné, et sur lequel le Conseil d’État ne s’est pas prononcé. Le droit d’amendement du Parlement ne l’autorise pas à procéder à des changements de cette nature. Enfin, je suis étonné que l’assemblée de la Polynésie française n’ait pas examiné l’amendement de Mme Vernaudon, députée de la Polynésie. Mais cela, ce sont les mœurs locales.

M. Jean-Christophe Lagarde - Je ne vois en quoi le fait que l’amendement n’ait pas été soumis au Sénat empêcherait celui-ci de l’être à l’Assemblée.

M. René Dosière - Parce qu’il s’agit du mode de scrutin !

M. Jean-Christophe Lagarde - Même dans ce cas. En cette fin de législature, on légifère à toute vitesse, et on nous demande des votes conformes. Si, de surcroît, on ne peut plus déposer d’amendements sous prétexte que le Sénat ne les aurait pas déposés lui-même, autant dire que la Haute assemblée serait le seul législateur !

C’est vrai que le découpage actuel en Polynésie française n’est pas satisfaisant. Pour autant, nous devons rechercher le consensus le plus large possible ; or, actuellement, les différents partis polynésiens sont peut-être d’accord sur le principe d’un redécoupage, mais nullement sur ses modalités.

Contrairement à ce que dit M. Dosière, l’assemblée de la Polynésie française a adopté une motion permettant de modifier son mode de scrutin, tout en nous laissant une certaine latitude pour le détail. N’abusons pas de cette souplesse. Je m’étonne, au passage, que Mme Vernaudon n’ait pas rappelé qu’elle était à l’époque, tout comme moi, opposée au découpage en deux des Tuamotu, qui affaiblissait la proportionnelle. Je ne voterai pas cet amendement, tout en comprenant qu’il faudra y revenir un jour.

M. Michel Buillard - Il n’y a pas eu de concertation sur place, ni à l’assemblée, ni au Conseil économique, social et culturel. Ce dernier s’est prononcé sur le principe du redécoupage, mais pas de manière aussi détaillée que l’amendement. Je voterai contre.

Mme Béatrice Vernaudon - Le CESC a examiné une proposition de loi que je lui ai soumise, et que reprend l’exposé des motifs de mon amendement. Je remercie ceux de nos collègues qui se sont exprimés. Je retire l’amendement, car le Conseil constitutionnel pourrait le censurer. J’espère que la représentation nationale réexaminera la question (Applaudissements sur plusieurs bancs).

L'amendement 11 est retiré.

M. Jean-Christophe Lagarde - L’amendement 12 rétablit le mode de scrutin en vigueur avant la loi organique du 27 février 2004, qui permettait aux citoyens de se prononcer en connaissance de cause, sans être obligés de voter sur des listes pour des gens qui ne partagent pas tous les mêmes idées. Si dans une assemblée, sans parler des mœurs que M. Dosière juge inadaptées à la démocratie, il doit y avoir des changements de majorité, ceux-ci ne doivent pas résulter de ce qu’on a mis des gens très différents sur la même liste pour courir après la prime majoritaire, mais de modifications politiques.

M. le Président – Merci…

M. Jean-Christophe Lagarde – Monsieur le président, si vous tenez à vous y prendre comme cela, je peux aussi demander à m’exprimer sur tous les amendements. Il me semble que je n’ai pas abusé du temps de parole et qu’on devrait pouvoir intervenir sur des sujets aussi importants, sur lesquels l’expression de l’Assemblée devrait pouvoir être connue.

La stabilité sera donc mieux assurée par le mode de scrutin que nous souhaitons rétablir. Je trouve regrettable, à ce propos, que ceux qui contestaient hier la loi de 2004, que ce soit en Polynésie française ou au parti socialiste, s’opposent aujourd’hui au retour à l’ancien système. Vous nous reprochez, Monsieur Lurel, de changer de mode de scrutin tous les trois ans, mais c’est vous qui changez d’avis tous les trois ans ! J’ai le sentiment que sur certains bancs, l’on considère qu’un mode de scrutin sert à faire élire les copains, pas à assurer la représentation de la population et la gestion d’une collectivité. Ce sont pourtant les règles du jeu de la République.

M. le Rapporteur - L’amendement 270 propose la suppression de la prime majoritaire, ainsi que le relèvement de 3 à 5 % du pourcentage de voix nécessaire pour participer à l’attribution des sièges. L’élection à l’assemblée de la Polynésie française se fait actuellement au scrutin de liste à un seul tour. La liste qui recueille la majorité des suffrages exprimés dans une circonscription, obtient une prime correspondant au tiers des sièges de cette circonscription. Ce principe, qui devrait permettre d’obtenir une majorité stable, est contrarié par l’existence de six circonscriptions et par un système à un seul tour. L’admission à la répartition des sièges de toutes les listes ayant obtenu au moins 3 % des voix renforce encore la fragmentation.

Dans la mesure où personne ne pense à unifier les circonscriptions, qui correspondent à des espaces géographiques très différents et parfois éloignés de plusieurs milliers de kilomètres, deux solutions demeurent : passer à une élection à deux tours, en n’admettant au second tour que les listes ayant obtenu plus d’un certain pourcentage de suffrages, ou revenir à l’ancien système, sans prime majoritaire et en ne distribuant les sièges qu’entre les listes ayant dépassé 5 % des suffrages. Notre amendement retient cette dernière solution, qui semble techniquement satisfaisante et est souhaitée par les principaux partis de l’assemblée de Polynésie. Il précise en outre que ces dispositions entreront en vigueur à compter du prochain renouvellement général de l’assemblée. La commission est donc défavorable à l’amendement 12.

Mme Béatrice Vernaudon - Je retire l’amendement 10.

M. le Ministre – De nombreux arguments ont été développés ici. À la lumière des événements de cette fin d’année, du changement de président, de l’évolution de la majorité et du fait que la demande ait été formulée, après un débat de l’assemblée territoriale et du conseil économique et social, par la délégation conduite par le nouveau président Tong Sang, et qu’elle ait donné lieu à un débat ici-même devant la représentation nationale, le Gouvernement s’en remet à la sagesse de l’Assemblée.

M. Jean-Christophe Lagarde - Je voudrais que le rapporteur m’explique la différence entre les amendements 12 et 270, puisqu’il est défavorable au 12.

M. le Rapporteur – Il s’agit de la précision sur l’entrée en vigueur des dispositions !

M. René Dosière – M’entendre accuser d’avoir changé d’avis depuis le vote de la loi organique ne peut que me faire sourire. Pour gagner du temps, je ne citerai pas toutes les déclarations entendues à l’époque : je rappellerai simplement que c’est le mode de scrutin que vous proposez aujourd’hui qui était prévu alors dans le texte initial du Gouvernement, et que c’est un amendement du sénateur de la Polynésie qui a créé le système actuel – système condamné aujourd’hui par tous, mais qui à l’époque ne l’était ni par le Gouvernement, ni par l’UMP, ni par le rapporteur du texte, Jérôme Bignon ! Pour ma part, j’ai eu l’occasion de dire à l’époque tout le mal que je pensais de ce mode de scrutin. Je n’ai donc pas changé d’avis.

On connaît aujourd’hui les conséquences de ce mode de scrutin, dont le Conseil constitutionnel, au passage, avait estimé qu’il permettrait de créer des majorités stables et homogènes. La conclusion est qu’à l’évidence, on ne peut légiférer dans un tel domaine qu’avec prudence, et certes pas au moyen d’amendements déposés à la sauvette. À ce propos, si le mode de scrutin dénoncé aujourd’hui a certes des effets néfastes, il n’y a pas que lui ! Il y a beaucoup d’autres éléments regrettables dans le statut de la Polynésie, élaboré à la demande de M. Flosse dans l’unique but de le faire réélire – opération qui, heureusement, s’est retournée contre lui. Tout devrait donc nous inciter à la prudence au moment de proposer un nouveau mode de scrutin par amendement car il ne s’agit pas de « revenir » au mode de scrutin précédent : la représentation proportionnelle reste, sans doute, mais le découpage a été modifié, ainsi que le nombre de conseillers territoriaux. Par conséquent, c’est un nouveau système qu’on nous propose. On ne change pas quelque chose qui a des conséquences aussi importantes qu’un mode de scrutin électoral sans examen approfondi, sans simulations et sans débats.

Nous risquons fort, du reste, de rencontrer les mêmes difficultés qu’aujourd’hui. Je note que certains, en Polynésie, souhaitent des élections générales. D’autres non. Or, nous allons entrer dans la période des législatives et des présidentielles, et il ne faudrait pas que les élections territoriales soient polluées par ce débat national. Pourtant, comme l’amendement de la commission prévoit que le nouveau mode de scrutin ne s’appliquera que lorsqu’il y aura un renouvellement général, cela veut dire qu’en cas de dissolution, il y aurait renouvellement général. Or, certains ne demandent que la dissolution ! Soyons prudents.

Cet amendement excède le droit d’amendement des parlementaires, dans la mesure où le Conseil d’État n’a pas été amené à se prononcer sur ce sujet lourd de conséquences – ce qu’il aurait fait si le Gouvernement avait introduit la modification dans son projet de loi. La deuxième assemblée n’a pas eu non plus l’occasion de l’examiner et n’en débattra jamais, compte tenu de la déclaration d’urgence. Vous le savez, la commission mixte paritaire ne débat pas, elle se contente de choisir entre les deux textes en présence. Le Conseil constitutionnel aura à examiner nos travaux, puisqu’il s’agit d’une loi organique, et je pense que nous prenons un risque d’inconstitutionnalité avec cet amendement qui ne se limite pas au retour à l’ancien système.

Le mode de scrutin de la Polynésie doit viser deux buts. D’abord, permettre la représentation de toutes les expressions politiques en Polynésie, ce qui suppose une dimension proportionnelle : le nombre des partis est très important en Polynésie, et ils correspondent à des réalités et à des sensibilités très différentes, qui doivent pouvoir s’exprimer. Mais le scrutin doit aussi permettre de dégager une majorité, ce qui n’est pas systématique avec la seule représentation proportionnelle. Il nous semble donc – et vous voyez ainsi que nous ne sommes pas hostiles à toute modification du mode de scrutin – que le système le plus souhaitable serait un scrutin à deux tours, sous réserve bien sûr que l’ensemble des forces politiques aient pu en débattre – car, en adoptant cet amendement, vous passez sur le fait qu’une force politique importante en Polynésie n’a pas eu l’occasion de se prononcer. Le mode de scrutin régional tel qu’il existe actuellement, adapté à la Polynésie, aurait beaucoup d’intérêt : si le premier tour permet l’expression de chaque sensibilité politique, le second oblige à créer une majorité, mais qui se forme devant l’électeur, pas en retournant sa veste une fois que l’élection est passée ! Voilà pourquoi le groupe socialiste votera contre cet amendement.

M. Jean-Christophe Lagarde - Je maintiens qu’il est curieux, pour la commission, de déposer un amendement qui n’est différent du mien que parce qu’il précise qu’il entrera en vigueur lors du prochain renouvellement général : jusqu’à preuve du contraire, la loi, une fois promulguée, s’applique ! Il s’agit donc d’une précision superfétatoire, qui a pour seule utilité de faire que ce ne sera pas notre amendement qui aura été adopté. Je n’ai pas de problème de paternité, mais il faut que cela soit dit : on nous donne raison, même s’il ne faut pas que cela se sache ! Mais après tout, au final, l’important c’est que le travail soit fait.

Il n’est pas vrai que l’instabilité permanente et les accords passés dans le dos des électeurs aient déstabilisé la Polynésie. C’est parce qu’avec le nouveau mode de scrutin, on a contraint des électeurs qui ne voulaient pas de M. Flosse à la tête de la Polynésie française, sans pour autant souhaiter l’indépendance de la Polynésie, à rejoindre la liste du Tavini, rebaptisé pour l’occasion UPLD, que la majorité a éclaté – ce qui était prévisible dès lors qu’on avait obligé à s’allier des personnes ne partageant pas les mêmes idées. Certains partis, qui récusaient le Tahoeera de M. Flosse, ont été obligés de se jeter dans les bras de M. Temaru. C’est d’ailleurs pourquoi ce mode de scrutin a été dénoncé par l’ensemble des forces politiques polynésiennes. L’élection des représentants de l’assemblée territoriale à la proportionnelle apporterait plus de clarté, les candidats puis les élus pouvant expliquer clairement leurs choix devant les électeurs.

Enfin, Monsieur Dosière, quand vous prétendez qu’on ne revient pas au même mode de scrutin, vous vous trompez. La seule différence réside dans le nombre d’élus parce qu’une circonscription a été découpée en deux.

M. René Dosière - Le résultat est le même !

M. Jean-Christophe Lagarde - Redécouper les circonscriptions et modifier le mode de scrutin, ce n’est pas la même chose.

M. le Rapporteur – Monsieur Lagarde, la précision apportée au II de l’amendement 270 n’est pas superfétatoire. Il pourrait y avoir entre-temps des élections partielles.

M. Jean-Christophe Lagarde - Il ne peut y avoir de dissolution partielle !

L'amendement 12, mis aux voix, n'est pas adopté.
L'amendement 270, mis aux voix, est adopté.

Art. 8

L'article 8, mis aux voix, est adopté.

Art. 9

M. Mansour Kamardine – À Mayotte, les bulletins des candidats ou des listes aux élections législatives, cantonales et municipales sont imprimés sur du papier de couleurs différentes. Dès lors que l’île compte maintenant de nombreux partis, il n’est pas toujours facile pour le représentant de l’État de disposer d’une palette de couleurs suffisamment distinctes les unes des autres. L’amendement 430 vise à ce que, comme cela se fait pour l’élection présidentielle, tous les bulletins soient dorénavant de couleur blanche.

M. le Rapporteur – Cet amendement est satisfait par le 271 de la commission.

L'amendement 430 est retiré.
L'amendement 271, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 9 ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

Art. 10

Les amendements 272 à 280 rectifié de la commission, l’amendement 399 de M. Quentin ainsi que les amendements 281 à 286 de la commission, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.
L'article 10 modifié, mis aux voix, est adopté.

Art. 11

L'amendement 287, deuxième rectification de la commission, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 11 ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

Art. 11 bis

L'article 11 bis, mis aux voix, est adopté.

Art. 12

Les amendements 400 et 401 de M. Quentin, ainsi que l’amendement 288 de la commission, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.
L'article 12, modifié, mis aux voix, est adopté.

Art. 13

L'article 13, mis aux voix, est adopté.

après l'Art. 13

M. le Ministre – L’amendement 464 est de nature technique.

M. le Rapporteur – La commission ne l’a pas examiné, mais j’y suis, à titre personnel, favorable.

L'amendement 464 est adopté.

Art. 14

L'amendement 289 de la commission ainsi que les amendements 345 et 346 de M. Quentin, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.

M. le Rapporteur – À l’amendement 290 rectifié, il convient de corriger une erreur et de lire « 24 à 39 », et non « 24 à 32 ».

L'amendement 290, deuxième rectification, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'amendement 471 du Gouvernement, accepté par la commission, est adopté.
L'article 14, modifié, mis aux voix, est adopté.

Art. 15

L'amendement 402 de M. Quentin, l’amendement 291 de la commission ainsi que L’amendement 403 de M. Quentin, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.
L'article 15, modifié, mis aux voix, est adopté.

Art. 16

L'amendement 347 rectifié de M. Quentin, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 16 ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

Art. 17

L'amendement 404 de M. Quentin, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 17 ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

après l'Art. 17

L'amendement 454 du Gouvernement, accepté par la commission, est adopté.
L'ensemble du projet de loi organique, mis aux voix, est adopté.
La suite de la discussion du projet de loi ordinaire est renvoyée à la prochaine séance qui aura lieu, ce soir, à 22 heures 15.
La séance est levée à 21 heures 25.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

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