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Première séance du mardi 11 mai 2004

213e séance de la session ordinaire 2003-2004


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PRÉSIDENCE DE MME HÉLÈNE MIGNON,

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1

FIN DES MISSIONS DE DEUX DÉPUTÉS

Mme la présidente. Par lettre du 29 avril 2004, M. le Premier ministre m'a informée que les missions temporaires précédemment confiées à M. Yves Bur, député du Bas-Rhin, et M. Lionnel Luca, député des Alpes-Maritimes, avaient pris fin le 9 mai 2004.

2

RESPONSABILITÉ INDIVIDUELLE
DES DIRIGEANTS DE SOCIETES ANONYMES

Discussion d'une proposition de loi

Mme la présidente. L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de M. Christophe Caresche et plusieurs de ses collègues relative au renforcement de la responsabilité individuelle des dirigeants et mandataires sociaux dans les sociétés anonymes ainsi qu'à la transparence et au contrôle de leur rémunération dans les sociétés cotées (nos 1304, 1585).

La parole est à M. le rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

M. Christophe Caresche, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. Madame la présidente, madame la secrétaire d'Etat, chers collègues, la proposition de loi que j'ai l'honneur de présenter devant notre assemblée résulte des conclusions que nous avons tirées, au sein du groupe socialiste, de la mission d'information sur le gouvernement d'entreprise.

Je veux ici rendre hommage à cette mission créée à l'initiative du président de la commission des lois et de la majorité. Cette mission a permis, me semble-t-il, de dresser un constat objectif qui rassemble sur bien des points l'ensemble des députés qui y ont participé.

Je regrette d'autant plus que M. le président de la commission des lois n'ait pas souhaité joindre à notre discussion de ce matin ses propres conclusions, puisque lui-même et ses amis ont également déposé une proposition de loi. Vous savez en effet qu'il est de coutume, dans le cadre des niches parlementaires, comme on les appelle, de joindre à la discussion l'ensemble des propositions de loi se rapportant au sujet traité.

Cela n'a pas été souhaité, et la question qui se pose est de savoir si la majorité a vraiment l'intention de légiférer sur cette question, ou si la proposition de loi qu'elle a déposée en conclusion de la mission n'est pas en réalité un texte destiné à rester sur les étagères de l'Assemblée nationale. La majorité démontre ce matin qu'elle reste pieds et poings liés aux intérêts du système et de ses représentants qu'elle prétend par ailleurs dénoncer.

Notre proposition de loi vise à apporter une réponse législative aux abus, aux dérives, aux malversations et aux scandales qui marquent depuis plusieurs années la vie des grandes entreprises dans notre pays et dans le monde et qui, à juste titre, choquent l'opinion.

Nous avons tous en mémoire la faillite frauduleuse d'Enron, les comptes truqués de Worldcom et de Parmalat, mais aussi les acquisitions effrénées de Vivendi et de France Télécom.

S'il ne s'agit pas de jeter l'opprobre sur toutes les entreprises et leurs dirigeants, force est de reconnaître que ces scandales ont suscité une véritable crise de confiance. « Ils minent le contrat social » selon l'expression même du rapport de la mission d'information sur la gouvernance d'entreprise.

Les racines de cette crise ne sont pas à rechercher dans l'amertume d'actionnaires ayant subi d'importantes pertes, mais dans la mise au jour de pratiques contestables par des dirigeants d'entreprises, notamment les plus grandes d'entre elles.

Ces pratiques concernent en premier lieu les rémunérations : leur flambée récente mais aussi leur disproportion avec les responsabilités effectivement assumées. Comme le dit Elie Cohen, chercheur au CNRS, auditionné dans le cadre de la mission d'information, les dirigeants sociaux « ont voulu mettre en place un jeu où ils gagnaient à tous les coups » en matière de rémunération. Cela se vérifie aujourd'hui, avec la publication récente des rémunérations des chefs d'entreprise.

Comment comprendre les pratiques de golden hello ou de golden parachute ? Comment comprendre qu'un chef d'entreprise ayant amené son entreprise au bord de la faillite ou au point d'être absorbée par une autre entreprise, se voit gratifié d'une indemnité considérable pour son départ ?

La fusion Sanofi-Aventis est l'occasion de constater que ces pratiques perdurent. Elles se généralisent même, malgré les réprobations. Sait-on qu'entre 1997 et 2002, selon Thomas Picketty, les cinq plus grosses rémunérations des entreprises françaises publiées dans les rapports annuels, ont augmenté de 50 % ? Sait-on que, selon les données fournies par Proxinvest, cabinet de conseil aux investisseurs, également auditionné par la mission d'information, la rémunération individuelle moyenne de chaque patron du CAC 40 a été de 4,5 millions d'euros en 2002, soit 375 fois la rémunération annuelle d'un salarié au SMIC ? Et cela, sans rapport évident avec les résultats des entreprises puisque, toujours en 2002, pendant que le CAC 40 perdait 33 %, la rémunération des patrons des grands groupes progressait en moyenne de 13 %.

Ces rémunérations se justifient, nous dit-on, par la nécessité de rémunérer les dirigeants d'entreprise au prix du marché international,. Curieux argument : le marché international des dirigeants sociaux est sans doute le seul où la mise en concurrence favorise la hausse des rémunérations, contrairement aux règles qui prévalent pour les salariés, au nom desquelles les dirigeants d'entreprise justifient les délocalisations !

Face à ce constat, le moment est venu de poser la question de la coïncidence effective entre intérêt social et intérêt personnel de certains dirigeants. L'intérêt social est en effet le pilier de notre droit des sociétés : il protège associés, actionnaires et salariés, fonctionnant comme un rempart contre toute gestion exclusivement patrimoniale et à courte vue de nos entreprises.

Contre des pratiques de management qui tendent à servir, sinon à faire prévaloir, l'intérêt personnel des dirigeants au détriment de l'intérêt social, il est aujourd'hui nécessaire de conforter les mécanismes protecteurs de cet intérêt. C'est notre intention avec cette proposition de loi.

Nous voulons d'abord affirmer un principe clair, celui de la responsabilité.

On peut comprendre que dans une économie ouverte, mondialisée, mais aussi financiarisée, les dirigeants d'entreprises aient besoin de liberté. Nous ne sommes pas dans une économie administrée ; les décisions doivent être prises rapidement, et la capacité d'anticipation, la réactivité sont des atouts essentiels qu'il n'est pas question de remettre en cause.

Mais la liberté suppose la responsabilité. La liberté ne saurait autoriser les pratiques douteuses, les fautes intentionnelles, les visées personnelles qui n'ont rien à voir avec l'intérêt de l'entreprise. La responsabilité est l'autre principe, l'autre fondement du pacte social qui unit les acteurs de l'entreprise.

Or cette responsabilité est aujourd'hui, dans notre droit, largement fictive. Elle existe bien sûr sur le plan pénal, avec l'abus de bien social, mais elle est de fait inexistante sur le plan civil.

En effet, le code du commerce, dans son article L225-251, dispose que « les mandataires sociaux sont responsables individuellement ou solidairement, selon le cas, envers la société ou envers les tiers, soit des infractions aux dispositions législatives ou réglementaires applicables aux sociétés anonymes, soit des violations des statuts, soit des fautes commises dans leur gestion ».

Cet article prévoit bien la responsabilité civile des dirigeants d'entreprise pour les fautes commises dans leur gestion. Mais dans la réalité, cette disposition n'est pas appliquée. La jurisprudence de la Cour de cassation rend pratiquement impossible la mise en cause de cette responsabilité.

M. Pascal Clément, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. Absolument !

M. Christophe Caresche, rapporteur. Elle subordonne en effet, depuis 1991, la mise en jeu de la responsabilité personnelle des mandataires sociaux par les actionnaires ou les tiers, à la condition que la faute commise par le mandataire social soit détachable de sa fonction. En pratique, cette démonstration est quasiment impossible ...

M. Pascal Clément, président de la commission des lois. Très bien !

M. Christophe Caresche, rapporteur. ... sauf cas exceptionnel - essentiellement la faillite -, le juge retenant une conception extrêmement étroite de la faute détachable.

M. Pascal Clément, président de la commission des lois. Très bien !

M. Christophe Caresche, rapporteur. Les apports jurisprudentiels de la Cour de cassation ont donc fait de la société anonyme un bouclier inexpugnable derrière lequel se réfugient tous les mandataires sociaux dès que leur responsabilité est, individuellement ou collégialement, engagée.

Nous ne sommes pas les seuls à le déplorer. Mme Colette Neuville, présidente de l'association de défense des actionnaires minoritaires, que j'ai auditionnée dans le cadre de ce rapport, estime que « la mise en cause de la responsabilité personnelle des dirigeants est impossible en France ».

De même M. Jean-François Burgelin, procureur général près la Cour de cassation, a-t-il déclaré récemment : « Il faudra sans doute, tôt ou tard, que l'on puisse mettre en cause la responsabilité personnelle des administrateurs et qu'ils aient à participer à l'indemnisation des victimes. Ce serait la manière la plus efficace de les responsabiliser ».

C'est précisément l'objet de notre proposition de loi.

Premièrement, nous proposons de faire sauter les verrous posés par la jurisprudence de la Cour de cassation sur la mise en œuvre de la responsabilité civile des mandataires sociaux, concernant notamment la notion de « faute détachable ». De même, nous proposons d'ouvrir la procédure dite d' « action sociale en responsabilité » par la prise en charge des frais de procédure et la possibilité de nommer un administrateur ad hoc.

Il ne s'agit pas, cependant, d'ouvrir une procédure de class action à la française.

M. Arnaud Montebourg. Très bien !

M. Christophe Caresche, rapporteur. Nous ne proposons pas, comme le fait M. Clément dans sa proposition de loi, et comme M. Houillon l'avait fait avant lui, d'intégrer la notion de préjudice indirect qui permettrait à un actionnaire de mettre en cause la gestion d'un responsable d'entreprise sur la seule variation du cours de la bourse. Cette conception patrimoniale de l'entreprise n'est pas la nôtre, et c'est ce qui distingue fondamentalement notre proposition de loi de celle déposée par la majorité.

Deuxièmement, nous proposons que le dirigeant ou l'administrateur dont la responsabilité personnelle aura été judiciairement reconnue supporte sur ses propres deniers une partie des dommages et intérêts. Il existe en effet aujourd'hui des assurances qui couvrent le risque en responsabilité civile, de manière assez curieuse d'ailleurs, puisque ce risque est quasi nul compte tenu de la jurisprudence actuelle. Ce marché est quand même évalué à 300 millions d'euros - 300 millions d'euros pour une responsabilité introuvable !

Mme la présidente. Il va falloir conclure, monsieur le rapporteur.

M. Christophe Caresche, rapporteur. J'ai presque terminé, madame la présidente.

Si demain, cette responsabilité était effective, il nous semble qu'elle devrait logiquement être assumée par le responsable lui-même, qui doit supporter les conséquences de ses actes.

Tel est le cœur de la proposition que nous vous soumettons. Mais celle-ci ne se limite pas à la question de la responsabilité. Elle vise aussi à compléter notre législation sur certains points, que je vais évoquer rapidement, car mon collègue Arnaud Montebourg y reviendra.

Nous proposons tout d'abord de renforcer la transparence en matière de rémunération. Nous proposons également de donner le pouvoir à l'assemblée des actionnaires de voter annuellement une délibération présentée par le conseil d'administration ou le directoire, qui fixe et délimite pour l'exercice à venir le rapport entre, d'une part, la plus haute rémunération, et, d'autre part, la rémunération minimale versée à un salarié employé à temps plein dans l'entreprise.

S'agissant des pouvoirs de l'actionnaire, nous proposons de remettre en cause la pratique du « pouvoir en blanc », déresponsabilisante et désuète au regard du développement des nouvelles technologies.

Enfin, il nous semble indispensable de développer l'information en direction des salariés de l'entreprise et de leurs représentants.

Pour conclure, je voudrais souligner que cette proposition de loi n'est pas une proposition de circonstance, dictée par l'air du temps. Elle est le résultat d'un travail long et sérieux, qui vise certes à sanctionner les abus et les dérives d'un système économique qui, à bien des égards, ne répond plus aux exigences sociales. Mais nous voulons aussi redonner confiance dans nos entreprises ; d'abord à celles et ceux qui en font la richesse, à savoir les actionnaires et les salariés, mais aussi aux Français qui assistent, effarés, à la mise au jour de comportements inadmissibles.

Ne croyez pas - je m'adresse aux représentants de la majorité présents dans cet hémicycle - que l'autorégulation et l'autodiscipline permettront de rétablir cette confiance.

Sur ce point, les chiffres qui viennent de paraître sont éloquents. Pour l'année 2003, les patrons du CAC 40 se sont octroyé une hausse moyenne de leurs rémunérations de 11,4 %, quand les salariés bénéficiaient pour la même période d'une hausse de 2,5 %. Certains voient leur rémunération progresser de plus de 50 %, voire de plus de 100 %, alors que les difficultés économiques et sociales s'accumulent.

L'autorégulation, c'est surtout le paravent derrière lequel les excès, les pratiques les plus douteuses continuent.

C'est pourquoi le législateur doit prendre ses responsabilités. Lui seul peut définir un cadre qui changera demain les comportements. C'est ce que nous vous invitons à faire. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat aux droits des victimes.

Mme Nicole Guedj, secrétaire d'Etat aux droits des victimes. Madame la présidente, messieurs les députés, permettez-moi tout d'abord d'excuser auprès de vous M. le garde des sceaux, Dominique Perben, qui ne peut prendre part à ce débat, car il se trouve aujourd'hui aux Etats-Unis pour participer à la réunion des ministres de l'intérieur et de la justice du G8.

Comme vous le savez, les fondements législatifs des règles de la gouvernance d'entreprise, inscrits dans le code de commerce, ont fait l'objet d'une attention particulière de sa part depuis deux ans.

Il regrette donc de ne pouvoir être présent pour en débattre à nouveau avec vous, et m'a chargée de le représenter en cette circonstance. C'est un devoir dont il m'est particulièrement agréable de m'acquitter.

Tout d'abord, il me paraît utile de souligner que la proposition de loi qui vous est présentée par M. Caresche et les membres du groupe socialiste est explicitement motivée par la réaction à certains scandales qui ont émaillé la vie des entreprises et des marchés financiers au cours des dernières années.


Le dispositif proposé tend cependant à enserrer le fonctionnement des entreprises dans de nouvelles normes relatives à la rémunération des dirigeants, à leur responsabilité ou à la relation entre l'entreprise et ses actionnaires.

Selon M. Caresche et ses collègues, ces règles, une fois inscrites dans la loi, suffiraient à résoudre les difficultés révélées par des affaires particulières et à « ouvrir la voie à un partage transparent de la richesse créée par l'entreprise ».

Je voudrais aujourd'hui vous dire que la conviction du Gouvernement est tout autre. Elle s'inspire en fait de trois observations fondamentales.

Tout d'abord, si le Gouvernement connaît bien les problèmes soulevés par les auteurs de cette proposition, il estime qu'ils appellent, par leur nature même, une réponse plus élaborée. Celle-ci ne peut en effet se réduire à des mesures législatives supplémentaires.

Au demeurant, la priorité du Gouvernement est de développer la croissance et l'emploi. La réalisation de cet objectif lui paraît incompatible avec l'alourdissement du fonctionnement des sociétés par des règles qui semblent en réalité inopportunes.

M. Jacques Desallangre. La messe est dite !

Mme la secrétaire d'Etat aux droits des victimes. A contrario, le Gouvernement constate que la qualité du droit applicable aux entreprises conditionne largement l'attractivité de notre économie. Il est à cet égard convaincu que l'élaboration de dispositions législatives pertinentes revêt une importance primordiale.

Je vais donc développer devant vous ces trois convictions, desquelles je conclurai qu'il n'est pas nécessaire, ni utile, ni opportun, en l'état actuel des choses, d'envisager la mise en œuvre de la proposition de loi qui vous est soumise.

En premier lieu, le Gouvernement constate que la loi ne peut suffire, à elle seule, à redonner confiance aux investisseurs.

Il est vrai que des événements très regrettables ont marqué les esprits. C'est d'ailleurs à juste titre que les auteurs de la proposition de loi y font référence. En outre, la période récente n'a pas été favorable aux investisseurs opérant sur les marchés d'actions, même si la tendance s'améliore depuis deux ans.

Il me faut néanmoins être claire sur ce sujet. Le Gouvernement attache la plus haute importance à ce que le contexte juridique et institutionnel en place dans notre pays contribue à la confiance que les actionnaires des entreprises françaises - qu'ils soient petits porteurs ou actionnaires individuels - sont en droit d'en attendre. Une telle confiance est indispensable au bon fonctionnement de l'économie et à l'attractivité du territoire français.

Pour en créer les conditions, le Gouvernement a adopté une démarche volontariste et pragmatique. Vous vous souvenez d'ailleurs que le débat qui nous réunit aujourd'hui s'est déjà tenu ici même, l'an passé, quand vous avez examiné le titre III de la loi de sécurité financière, adoptée définitivement le 1er août dernier.

Vous le savez, cette loi a réformé le contrôle légal des comptes, dont certaines défaillances ont été, dans des pays étrangers, à l'origine des scandales souvent cités : Enron, Worldcom, Parmalat. La fiabilité de l'information financière disponible sur les entreprises françaises s'en trouvera grandement améliorée.

Ce n'est donc pas à vous qu'il est nécessaire de rappeler qu'en matière de gouvernement d'entreprise, nous avions ensemble reconnu que la transparence était le moyen le plus efficace pour apporter, au niveau législatif, une solution crédible aux problèmes rencontrés.

Je reste persuadée aujourd'hui, comme vous ne pouvez manquer de le confirmer, que la transparence est l'outil essentiel de la modification souhaitable des comportements. Il est d'ailleurs utile de rappeler que le garde des sceaux avait choisi de lui consacrer un chapitre entier de la loi de sécurité financière.

Prenons un seul exemple, si vous le voulez bien : l'obligation faite aux sociétés de présenter un rapport annuel sur le contrôle interne. Ce dernier constitue le gage de la transparence nouvellement exigée des entreprises. Je sais d'ailleurs que son établissement représente un effort considérable pour nombre d'entre elles, que je salue aujourd'hui car il va entraîner une amélioration significative de l'information des actionnaires.

En conclusion sur ce point, je veux souligner que la confiance dans l'économie dépend de la transparence de l'information dispensée sur la situation des entreprises et combien l'une et l'autre supposent une évolution des mentalités que, précisément, l'obligation de transparence favorisera.

Je m'autorise à déduire de ce constat de bon sens que si la loi a pour mission d'instaurer les règles de base, elle a aussi - et peut être surtout, en la matière - vocation à créer une dynamique, à laquelle elle invite les entreprises et leurs partenaires à adhérer pour parvenir effectivement au résultat attendu.

Nous sommes en train d'y parvenir, dans un processus où la prise de conscience et le débat contribuent à faire évoluer les mentalités et les pratiques dans la bonne direction.

La mise en œuvre, par les entreprises, des recommandations établies dans les rapports Viénot et Bouton constituent ainsi des progrès concrets dans le sens fixé par la loi.

J'observe surtout que votre commission des lois a pris l'initiative de créer une mission d'information sur la réforme du droit des sociétés, dont les premiers travaux ont porté, en particulier, sur la gouvernance d'entreprise. Cette mission s'est attachée, dans ses travaux et dans le cadre de ses auditions, à déterminer les questions qui peuvent encore rester en suspens. Je la remercie de ce travail important, qui permet de favoriser la prise de conscience, de maintenir ouverte la réflexion et d'entretenir la dynamique que je viens d'évoquer.

Aussi, les propositions faites par votre rapporteur sur la publicité de la rémunération des dirigeants ne me paraissent pas nécessaires aujourd'hui.

Plus précisément, je voudrais rappeler que la loi oblige actuellement les assemblées générales des actionnaires à voter, chaque année, le montant global de l'enveloppe des rémunérations allouées aux administrateurs. Dans les sociétés anonymes dotées d'un directoire, la rémunération des membres de celui-ci est fixée par le conseil de surveillance.

De même, la loi de sécurité financière a prévu des mesures particulières pour les groupes de sociétés comprenant une société cotée. Les rémunérations et avantages de toute nature alloués aux mandataires sociaux y font l'objet d'une publication dans un rapport destiné à l'assemblée générale mais adressé préalablement au comité d'entreprise.

L'encre de cette réforme, dont nous avons ensemble pesé l'équilibre, est à peine sèche. Nous devons, à présent, la mettre en œuvre et non la remettre en cause.

Je note, enfin, qu'un des objectifs de la proposition de loi en discussion est de mettre fin aux primes d'arrivée ou de départ dites golden hello ou golden parachute. Pour autant, le texte envisagé ne permettrait pas d'atteindre cet objectif puisque la disposition n'aurait d'effet que sur la durée du mandat social alors que ces avantages peuvent être liés, par exemple, à un contrat de travail préexistant.

Sur un plan plus général, je voudrais insister en second lieu sur le fait que le Gouvernement souhaite simplifier le droit applicable aux entreprises plutôt que de multiplier les règles auxquelles elles sont soumises.

La priorité du Gouvernement, je le répète, est de développer la croissance et l'emploi. Il me semble que nul ne peut souhaiter alourdir le fonctionnement des sociétés par des règles inopportunes.

À cet égard, la simplification du droit a fait l'objet de mesures importantes au cours des derniers mois, en particulier par voie d'ordonnance. C'est ainsi que le garde des sceaux a présenté en conseil des ministres, le 24 mars dernier une ordonnance portant simplification du droit et des formalités pour les entreprises. Ce texte illustre la volonté du Gouvernement d'alléger les contraintes pesant sur les entreprises, en particulier les SARL, en supprimant des règles et formalités inutiles ou entravant le bon fonctionnement de l'économie.

Concernant les « pouvoirs en blanc » pour les votes en assemblée générale, la proposition de loi pousse sa logique jusqu'à supprimer de fait cette faculté pour les actionnaires. Je ne pense pas, contrairement à ce qui est avancé par votre rapporteur, qu'une telle disposition aboutirait à renforcer la démocratie au sein de la société.

Je rappelle, en effet, que l'actionnariat des entreprises françaises est le plus souvent dispersé. Le dispositif actuel permet donc aux actionnaires, s'ils ne souhaitent pas assister aux réunions, de s'en remettre à la direction. Il s'agit en fait de leur offrir la possibilité d'exprimer de façon très simple un vote de confiance.

On voit d'autant moins de raisons de les priver à jamais de cette faculté qu'en pratique, la nouvelle règle proposée risquerait de diminuer sensiblement la représentativité des assemblées. En effet, des décisions telles que la modification des statuts ou des droits d'une catégorie particulière d'actionnaires pourraient, dans le cadre proposé, être votées par moins du tiers ou de la moitié des actionnaires, par simple application des règles de quorums.

Je voudrais enfin rappeler que la loi de sécurité financière est déjà intervenue dans ce sens, de façon pertinente, afin de renforcer la participation des sociétés de gestion de portefeuilles aux assemblées générales, les parts de nombreux petits actionnaires étant portées par le biais d'OPCVM.

C'est ainsi que l'article L. 533-4 du code monétaire et financier prévoit que ces sociétés doivent exercer les droits attachés, dont le droit de vote, aux titres détenus par les OPCVM qu'elles gèrent, dans l'intérêt exclusif des actionnaires. De plus, ces sociétés doivent rendre compte de leurs pratiques en matière d'exercice des droits de vote et, lorsqu'elles n'exercent pas ces droits, elles doivent en rendre compte aux porteurs de parts des OPCVM.

Il me semble au total conforme à la volonté commune exprimée par l'Assemblée nationale et le Gouvernement que nous mettions en œuvre ce que vous avez décidé plutôt que de le modifier déjà.

Pour terminer, je souhaite insister sur le fait que la qualité du droit applicable aux entreprises est une condition majeure de l'attractivité de notre économie. Sa réalisation passe par l'élaboration de dispositions législatives pertinentes.

Or la méthode d'élaboration de la règle est un point crucial à cet égard. Je suis certaine que vous conviendrez avec moi que le processus suivi doit permettre, en permanence, de concilier qualité juridique de la norme et concertation avec les parties prenantes.

C'est cette méthode qu'a suivie le garde des sceaux pour l'élaboration de la loi de sécurité financière ou le projet de loi de sauvegarde des entreprises qu'il présentera demain en conseil des ministres.

Chacun s'accorde à considérer que le droit économique, pour faire l'objet d'un processus politique d'approbation efficace, doit être à la fois bien compris par les acteurs et bien élaboré.

A cet égard, le dispositif de renforcement de la responsabilité des dirigeants d'entreprise établi dans la proposition de loi ne paraît pas acceptable. Il repose, en effet, sur trois moyens qui doivent être exclus.

Le premier consiste à affirmer la nécessité d'une faute commise par le dirigeant dans l'exercice de ses fonctions pour que sa responsabilité puisse être engagée.

Le ministère de la justice estime que cela n'apporte rien en fait au mécanisme de responsabilité actuel car la jurisprudence de la Cour de cassation va globalement dans ce sens.

Au total, la proposition crée surtout un risque de confusion pour les actionnaires.

Par ailleurs, votre rapporteur suggère d'interdire aux entreprises de prendre en charge les contrats d'assurance responsabilité civile de leurs dirigeants.

Je partage évidemment les interrogations sur les effets de la généralisation de ce mécanisme. Mais il me semble que l'évolution proposée remettrait radicalement en cause l'équilibre actuel entre la liberté d'entreprendre, avec les responsabilités individuelles et collectives qui s'y attachent, et le droit des victimes à une réparation satisfaisante des préjudices subis. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Arnaud Montebourg. Oh là là ! (Sourires.) Qui a donc écrit ce discours ?

Mme la secrétaire d'Etat aux droits des victimes. Par ailleurs, il est suggéré de faire prendre en charge par les entreprises certains frais de justice des actionnaires dans la procédure en responsabilité à l'encontre des dirigeants.

Cette disposition conduirait rapidement à multiplier les actions en responsabilité, de façon irrationnelle.

Il n'est pas envisageable que les entreprises supportent les coûts liés à une procédure judiciaire en cas de condamnation des dirigeants, à l'inverse de ce que les règles de procédure civile prévoient, à savoir, le plus souvent, le remboursement des frais par le perdant.

Enfin, la proposition de loi prévoit la désignation d'un mandataire ad hoc pour représenter la société dans la procédure en responsabilité à l'encontre des dirigeants.

Je comprends l'objectif de cette proposition. Mais les mécanismes actuels de procédure civile permettent déjà de désigner un mandataire en cas de conflit d'intérêt. Cette faculté est utilisée par exemple quand le dirigeant dont la responsabilité est recherchée est l'unique représentant légal de la société appelée dans la procédure.

En conclusion, les dispositions contenues dans cette proposition de loi paraissent de nature à engendrer soit des redondances soit des grandes confusions dans les équilibres qui régissent aujourd'hui la gouvernance d'entreprise. Juridiquement, elles ne me semblent donc pas suffisamment élaborées pour être satisfaisantes.

Vous comprendrez donc que le Gouvernement considère que le temps n'est pas venu de prendre des dispositions législatives nouvelles sur la gouvernance d'entreprise, moins d'un an après le vote de la loi de sécurité financière.

M. Michel Delebarre. Ce n'est jamais le moment !

Mme la secrétaire d'Etat aux droits des victimes. En conséquence, je demande à l'Assemblée nationale de rejeter cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)


Discussion générale

Mme la présidente. Dans la discussion générale, la parole est à M. Arnaud Montebourg.

M. Arnaud Montebourg. Madame la présidente, madame la secrétaire d'Etat, monsieur le rapporteur, mes chers collègues et amis, nous avons pris le taureau par les cornes en décidant de présenter des propositions. Celles-ci sont issues d'une réflexion que vous venez de louer et de nous présenter comme une réflexion utile, qui devrait nous permettre de faire évoluer les comportements.

Le consensus existe sur ce point. La Commission européenne, les instances de surveillance, la mission Clément, dont nous partageons le diagnostic, et enfin les rapports Viénot et Bouton, tous font le même constat : les rémunérations des plus hauts salaires des entreprises cotées ont explosé et l'écart entre les salaires s'est considérablement accru : le ratio, de 1 à 20 il y a vingt ans, est aujourd'hui de 1 à 500.

C'est une rupture de contrat entre les actionnaires et les salariés, qui participent au processus de production et de fabrication de la richesse collective, une rupture de contrat entre l'intérêt social et l'intérêt personnel du dirigeant.

Sincèrement, madame la secrétaire d'Etat, est-ce acceptable pour nos concitoyens, alors que les conditions de travail sont de plus en plus difficiles, que la compétition économique exige chaque jour davantage des salariés dans les usines, les ateliers, les entreprises - nous connaissons bien ces salariés, ce sont nos électeurs - que les rémunérations soient frappées du sceau de la modération et fassent l'objet de négociations âpres et rarement favorables ?

Vous entendre parler d'autorégulation est décevant pour qui attendait de vous une prise de conscience, inacceptable pour qui attendait une solution. Or, nous ne pouvons plus nous en remettre à l'autorégulation.

M. Jean-Pierre Balligand. Le problème est là !

M. Arnaud Montebourg. Car l'autorégulation, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, c'est une auto-augmentation sans limite des salaires. Dans un article paru hier dans un grand journal du soir, on peut lire que M. Michelin, au nom de l'autorégulation, a augmenté ses émoluments - directs, indirects, avantages inclus - de 146 %. On y lit également que M. Bouton qui, dans son fameux rapport, semblait déplorer l'attitude des dirigeants en matière de rémunérations et de gouvernance, a augmenté lui-même sa propre rémunération à la tête de la Société générale de plus de 55 %.

L'autorégulation n'existe pas et nos concitoyens doivent savoir qu'il n'existe pas de règles organisant la rémunération des dirigeants de nos entreprises. Et, en l'absence de règles, tout est possible.

Devant un tel constat, qui est partagé, deux attitudes sont possibles : agir ou ne rien faire. Nous pensions que la majorité de cet hémicycle voulait faire évoluer le droit. Or, nous notons que le Gouvernement ne veut pas toucher aux intérêts des dirigeants ni à l'organisation du capitalisme, en dépit des nombreux problèmes que cela pose.

Dire que les dirigeants de nos entreprises ne sont pas responsables est une réalité que nous connaissons tous. Ainsi, l'affaire Vivendi a conduit M. Messier devant les tribunaux américains et non devant les juridictions françaises, et au pénal, ce qui ne nous paraît pas le meilleur terrain, pour des raisons que chacun peut comprendre. Défendre l'intérêt social, et c'est l'objet de ce texte, consiste à organiser le débat interne afin que les actionnaires et les salariés puissent élaborer leurs propres règles concernant les rémunérations et le fonctionnement de leur entreprise.

Pour nous, ce n'est pas au législateur de fixer les rémunérations des dirigeants de façon unilatérale, autoritaire et universelle, mais à l'assemblée générale de fixer l'écart entre les salaires.

M. Michel Delebarre. Très bien !

M. Arnaud Montebourg. La loi « Nouvelles régulations économiques » a fait un pas en ce sens. Ne peut-on au moins discuter de la question de la répartition des richesses, qui préoccupe nos concitoyens ?

C'est l'un des saints patrons des fonds de pension américains, M. Warren Buffet, qui disait que les conseils d'administration étaient des assemblées peuplées de chihuahuas sous sédatifs ! Les chihuahuas, madame la secrétaire d'Etat, sont ces petits chiens décoratifs qui n'aboient jamais. (Rires.) Qu'ils soient, selon l'auteur, sous l'emprise d'un sédatif montre bien que même pour quelqu'un qui défend des intérêts patrimoniaux - ce qui n'est pas l'objet de cette proposition de loi - il y a fort à faire pour organiser la responsabilité des dirigeants.

Notre proposition de loi ne vise qu'à introduire une régulation. Comprenez-le bien, madame la secrétaire d'Etat, tous ceux qui ont pris conscience de ce problème inhérent au capitalisme français ne sont pas des bolcheviques, le couteau entre les dents. Ce n'est le cas ni de Mme Neuville ni de M. Clément ! Et pourtant, ils dénoncent l'irresponsabilité de fait des dirigeants français.

Pour qu'une entreprise fonctionne bien, il est préférable de pouvoir se débarrasser d'un dirigeant qui la met en faillite ou en banqueroute. Or, aujourd'hui, ce n'est pas possible. Les conseils d'administration sont peuplés de potiches irresponsables qui ne veulent jamais prendre leurs responsabilités. C'est exactement ce qui s'est passé dans quelques faillites douloureuses. Les dirigeants utilisent parfois les moyens parfaitement décrits par Christophe Caresche, s'abritant derrière un bouclier pour éviter la mise en cause de leur responsabilité. Et lorsque le drame survient, il est trop tard. Or ce sont des outils de travail qui disparaissent. Le législateur et le Gouvernement doivent réagir à cela.

Vous ne voulez pas, madame la secrétaire d'Etat, « alourdir » les règles touchant les entreprises. En quoi cela serait-il un alourdissement ? Nous entendons simplement que la régulation se fasse à l'intérieur de l'entreprise plutôt que devant le tribunal de commerce et qu'elle soit prévue dans le fonctionnement de la société cotée.

Vous nous dites que la transparence est le moyen de faire évoluer les comportements. Mais la transparence existe, depuis 2000, bien que votre texte sur la sécurité financière l'ait affaiblie. C'est à cette transparence que nous devons de savoir que, chaque année, les rémunérations les plus hautes augmentent, quels que soient les résultats de l'entreprise. Ceux qui défendent les intérêts des entreprises ont beaucoup de travail.

Madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, il faut que la loi confie aux organes naturels de l'entreprise le soin de discuter des rémunérations et de mettre en place des mécanismes de responsabilité, afin de réguler un capitalisme qui malheureusement est archaïque et tient les salariés soigneusement à l'écart.

Les articles 11 et 12 de notre proposition de loi disposent que les sections syndicales d'organisations représentatives du personnel bénéficieront, comme les membres du conseil d'administration et les actionnaires au sein des assemblées générales, des informations relatives aux rémunérations de toute nature. Cette mesure me paraît naturelle dans une économie comme la nôtre. Une négociation annuelle avec les salariés est prévue ; elle doit porter sur l'ensemble des salaires.

M. Jean-Pierre Balligand. Bien sûr !

M. Arnaud Montebourg. Concernant l'obligation de transparence, madame la secrétaire d'Etat, je vous fais observer que les règles applicables au titre de l'article L. 225-102-1 du code de commerce, qui organisait la transparence dans la loi « Nouvelles régulations économiques », ont un peu « rétréci au lavage » dans la loi sur la sécurité financière. Toutefois, cette obligation de transparence a amené un certain nombre d'entreprises à publier des rapports sur les différents avantages en nature accordés à leurs dirigeants. Mais ces rapports ne contiennent pas toutes les informations, parce que le non-respect de l'article L. 225-102-1 n'entraîne aucune sanction. La loi ne donne pas la possibilité à l'assemblée générale de se saisir de la rémunération.

Nous proposons donc d'aller plus loin et d'organiser la régulation. Vous parlez de transparence pour les avantages en nature, ceux liés à la retraite ou accordés en cas de rupture de contrat ou de démission, sans oublier les avantages fiscaux, mais l'argent illégalement entreposé dans ces territoires non coopératifs que sont les paradis fiscaux sera désormais couvert par l'amnistie !

M. Jean-Pierre Balligand. Eh oui !

M. Arnaud Montebourg. Les mafieux qui ont confié leurs fonds à des banques luxembourgeoises ou monégasques vont recevoir l'imprimatur de la République française pour blanchir de l'argent peut-être illégalement acquis. C'est une politique scandaleuse !

M. Daniel Vaillant. Très juste !

M. Arnaud Montebourg. Vouloir contrôler la manière dont certains dirigeants utilisent les paradis fiscaux, ce n'est pas du bolchevisme, monsieur le président de la commission des lois, c'est vouloir une République qui se tient debout et tend les mains à tous ceux qui lui font encore confiance. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jacques Desallangre. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Gilles Artigues, pour le groupe Union pour la démocratie française.

M. Gilles Artigues. Madame la présidente, monsieur le président de la commission des lois, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, en lisant le procès-verbal des auditions menées par la mission d'information relative à la réforme du droit des sociétés, présidée par Pascal Clément, en lisant la presse du jour, nous ressentons la fâcheuse impression de ne pas évoluer dans le même monde que certains dirigeants d'entreprise, tant l'échelle de grandeur des chiffres avancés est disproportionnée.

Je ne reviendrai pas sur les déclarations des PDG des plus grandes entreprises françaises, mais le malaise et une certaine défiance se sont emparés de nous devant quelques chiffres. Je ne citerai que les plus significatifs : la moyenne des rémunérations des patrons du CAC 40 se situait en 2003 à 2 millions d'euros, ce qui représente une augmentation moyenne de 11,4 %, tandis que l'augmentation moyenne des salaires était de 2,5 %.

Quant à la lecture de la grille des salaires, si elle nous donne le vertige, elle nous renseigne également sur la gestion de ces entreprises. Quand l'action d'une société perd 10 %, comment justifier que son PDG s'augmente de 4,6 % et touche 1 million d'euros de stock options, dont il a garanti le cours par la souscription d'un contrat d'assurance ?

M. Pierre Cardo. C'est vrai !

M. Gilles Artigues. Seuls 10 % des dirigeants ont baissé leur salaire en raison des performances de leur entreprise. Nos dirigeants avancent sur les talons des dirigeants américains, dont on connaît la démesure en la matière.

A titre informatif, le PDG de Colgate-Palmolive a gagné en 2003 la bagatelle de 119 millions d'euros. Rémunérations, stock options, golden parachutes, golden hello et autres bonus : autant de termes qui nous sont aussi familiers qu'inconnus. Familiers, car ils ponctuent l'actualité de manière récurrente. Les rémunérations des dirigeants des entreprises sont les marronniers des médias, pare-soleil d'une réalité beaucoup plus complexe. Inconnus, car les mécanismes restent très obscurs et réservés aux initiés.


Peu d'entre nous en effet sont en mesure d'expliquer tout ce système. Tout ce que retient le grand public, ce sont, à l'occasion de la publication annuelle des rémunérations ou des indemnités de licenciement des PDG, les millions d'euros qui leur sont versés. Ajoutons à cela la quasi-impunité dont ces derniers bénéficient, et l'on comprend aisément ce qui motive la proposition de loi de notre collègue Christophe Caresche. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Arnaud Montebourg. L'UDF va voter le texte !

M. Gilles Artigues. Attendez que nous vous ayons dit ce que nous, au groupe UDF, nous avons compris de ce texte.

Premièrement, ce texte prévoit de renforcer l'action en responsabilité contre les administrateurs, en la rendant plus accessible aux actionnaires ou salariés ayant subi un préjudice personnel. Le code de commerce le prévoit déjà, mais la jurisprudence restrictive de la Cour de cassation a strictement encadré cette action en distinguant le préjudice propre du préjudice social. Comme nous l'ont expliqué nos collègues, cette interprétation stricte de la chambre commerciale restreint le champ de l'action en responsabilité civile. Il est donc proposé de revenir à l'esprit de la loi du 24 juillet 1966.

Le deuxième point principal de ce texte touche à la rémunération des dirigeants et mandataires sociaux. Le souhait unanimement exprimé de plus d'encadrement et de transparence témoigne de la volonté qu'on n'évolue plus dans des sphères obscures où une minorité détient la majorité des capitaux. Il ne s'agit pas de sombrer dans un manichéisme simpliste, qui opposerait les méchants chefs d'entreprise aux gentils salariés, mais simplement de dresser un constat qui permettra de rétablir un équilibre.

De plus, il paraît anormal de prime abord que des dirigeants, dont la rémunération dépend en partie des résultats de la société, puissent se garantir contre d'éventuelles baisses de son activité et de sa rentabilité, se mettant ainsi à l'abri des conséquences de leur mauvaise gestion, dont les principales victimes seraient les salariés. Voilà, en quelques mots, ce que nous semble être l'objet de ce texte.

Si les motivations sont louables - elles résultent d'ailleurs en partie des conclusions de la mission d'information - cette démarche ne vise que la partie émergée de l'iceberg. Car au-delà des dispositions techniques et juridiques, c'est à une véritable réforme de l'esprit du droit des sociétés que l'on s'attaque. Surtout, ce texte pose en filigrane le véritable problème du capitalisme à la française.

En effet, à l'heure où de nombreux pays, notamment les Etats-Unis, optent pour un interventionnisme croissant du législateur, notre droit des sociétés conserve ses principes d'autorégulation et d'autodiscipline. Le groupe UDF reste attaché à cet esprit de responsabilisation : la loi ne peut ni ne doit tout résoudre. Il faut laisser aux acteurs le soin de se discipliner, et un encadrement trop strict n'est pas le gage d'une prise de conscience et de responsabilités.

Malheureusement, et cela a déjà été dit, les dérives sont beaucoup trop nombreuses, et les propositions de la mission d'information tendent à résoudre ces problèmes. Mais comment voter cet encadrement législatif sans remettre en cause l'intégralité du droit des sociétés ? A la difficulté de cette équation, s'ajoute le risque de nourrir la judiciarisation excessive qui commence à toucher la société française. Ce renforcement de la responsabilité aura pour corollaire une multiplication des actions judiciaires. Une telle solution ne semble pas la meilleure à l'heure où les tribunaux sont de plus en plus encombrés, et où les actionnaires ou les salariés risquent de ne pas voir leur démarche aboutir avant de nombreuses années. Ce problème doit se traiter beaucoup plus en amont, dans le cadre d'une refonte globale.

M. Arnaud Montebourg. Surtout ne rien faire !

M. Gilles Artigues. Même si nous approuvons l'esprit de cette démarche, nous ne pouvons cautionner sans réserve la multiplication des litiges qui en découlera nécessairement.

Enfin, ces dispositions rencontreront un deuxième écueil, celui de la délocalisation. Jamais la préoccupation de nos concitoyens ne s'est focalisée à ce point sur les délocalisations, aussi bien en Asie que vers les pays de l'Est. Pour le moment, elle se « limite » , si l'on peut employer ce terme, à la main d'œuvre et aux unités de production, ce qui a déjà suscité une crise profonde et inquiétante pour les Français. Le durcissement des règles de responsabilisation et du droit des sociétés risque de conduire à une délocalisation des sièges sociaux. Je ne crois pas que le contexte actuel se prête à de tels risques. Il conviendrait plutôt d'inventer des mécanismes susceptibles de faire cesser cette fuite.

S'agissant des rémunérations, un seul chiffre suffit à justifier les dispositions de ce texte : 375 %, soit le rapport entre le salaire minimum et la rémunération patronale moyenne. Alors, quand on nous propose que soit fixé par délibération le rapport entre la rémunération la plus élevée et la rémunération minimale dans l'entreprise, nous ne pouvons qu'y souscrire philosophiquement. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Jean-Pierre Balligand. Philosophiquement, mais pas pratiquement !

M. Gilles Artigues. Une telle règle semble cependant aller à rencontre de l'esprit qui préside au fonctionnement des sociétés anonymes. Il n'en reste pas moins qu'il nous faut réfléchir sur l'opportunité de ces grilles de salaires qui flirtent avec l'indécence. Gerhard Schröder lui-même affirmait récemment, alors que cette année les salaires des dirigeants allemands ont battu des records, que « ces pratiques étaient conformes au droit et à la loi, mais pas à la morale et à la décence. »

Encadrement, régulation, plafonnement, autant de mots que nous avons toujours refusé d'employer, parce qu'ils ne correspondent pas à l'esprit des lois qui ont forgé notre droit des sociétés. En revanche, il serait tout à fait utile de réfléchir aux exemples de nos voisins les plus proches. Je pense notamment à la législation en vigueur en Grande Bretagne, qui ne passe pas pour être un modèle d'anti-libéralisme : elle impose pourtant aux sociétés de soumettre au vote de leurs actionnaires les rémunérations de leurs principaux dirigeants.

Il est fort dommage que le Parlement ne puisse pas consacrer plus de quelques heures à un tel sujet, dont l'importance mériterait un véritable débat de fond. Même si nous approuvons, dans leur esprit, les conclusions auxquelles sont arrivés nos collègues, pour autant les moyens qu'ils souhaitent mettre en œuvre ne nous semblent pas être les plus appropriés à l'heure actuelle, et nous le regrettons sincèrement.

Le groupe UDF, que je représente à cette tribune, s'abstiendra donc, afin de montrer qu'il faut agir en la matière, mais que le sujet mérite un débat plus important.

M. Michel Delebarre. C'est un pas, certes hésitant, mais c'est un pas quand même.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Desallangre, pour le groupe des députés communistes et républicains.

M. Jacques Desallangre. Madame la présidente, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, souvenons-nous d'abord quelle fut la première mesure du gouvernement Raffarin I : il n'a rien eu de plus urgent que de revenir sur la disposition de la loi sur les nouvelles régulations économiques qui introduisait une légère limitation du cumul des mandats sociaux. Voilà la réforme dont la France avait tant besoin ! Dès ses premiers pas le Gouvernement avait choisi son camp : celui du MEDEF, dont on se souvient qu'il réclamait un droit d'ingérence dans la détermination de la politique économique. Le Gouvernement a immédiatement accédé à sa demande, et s'est empressé d'assouplir les règles encadrant le cumul des mandats des patrons, lesquels déploraient de ne plus pouvoir cumuler jetons de présence et émoluments souvent vertigineux.

Pourtant la loi sur les nouvelles régulations économiques n'avait pas cherché à bouleverser le capitalisme français, et l'insuffisance de ses ambitions en la matière m'avait d'ailleurs conduit à ne pas la voter. Néanmoins l'un de ses articles visait à limiter la consanguinité du capitalisme français. Rappelons-nous la situation qui prévalait avant 2001 : 196 personnes se partageaient 958 postes de direction, 1 653 postes d'administrateur, 943 postes de représentant permanent et 280 autres fonctions, soit un total de près de 3 800 postes importants, c'est-à-dire une moyenne de plus de dix-neuf postes par individu. Il faut, pour soutenir de telles responsabilités, une santé insolente, et de l'appétit !

En 2000, les 53 présidents des sociétés du CAC 40, soit 12 % des mandataires de ces sociétés, détenaient au total 135 mandats au sein de ce même CAC 40 : outre leurs 53 mandats de président, ils détenaient donc 82 mandats dans une autre société. On voit qu'il convenait de réhabiliter ce qu'un prix Nobel d'économie a appelé le « capitalisme de copains », qui obéit au principe selon lequel « tu m'invites à ton conseil d'administration, je t'invite au mien. » Se hâter ainsi de céder à une des revendications majeures du MEDEF ne manquait pas d'audace, au moment où une vague de scandales à grande échelle faisait suite à l'explosion de la bulle boursière : faillite d'Enron, découverte des malversations des dirigeants de WorldCom, ou encore du détournement de 600 millions de dollars des caisses de Tyco. L'Europe n'était pas épargnée : avec les scandales frappant Vivendi Universal et Ahold, l'image du monde des affaires s'est trouvée entachée par des dirigeants dont on découvrait qu'ils n'hésitaient pas à se servir dans les caisses pour satisfaire leurs intérêts personnels.

A l'opposé du laxisme des autorités françaises, le Congrès américain - aussi surprenant que cela paraisse - lançait, sous la pression de petits porteurs ruinés, une opération de salubrité publique : décidé à laver le capitalisme de tout soupçon - vaste programme ! - il entérinait une grande réforme de la législation boursière. Inspirons-nous, pour une fois à bon escient, de l'exemple américain. Même les plus libéraux se sont en effet aperçus que pour sauver le capitalisme il fallait restaurer la confiance et réguler l'économie. Mais pour cela il ne suffit pas de s'en remettre au marché, à la bonne volonté ou à « l'éthique » des dirigeants d'entreprise ; il faut une vraie réforme législative, ce que vous refusez aujourd'hui, madame la secrétaire d'Etat.

À la suite de ces événements, le Parlement a adopté, au cours du premier semestre 2003, la loi de sécurité financière. Cette loi avait pour objet, entre autres, de renforcer les pouvoirs et les moyens de la Commission des opérations de bourse, devenue l'Autorité des marchés financiers, et d'assurer l'indépendance des cabinets d'audit comptable. Cependant, et c'est là le nœud du problème, il n'était prévu aucun accroissement de la responsabilité des dirigeants d'entreprise ; les sanctions civiles et pénales contre la criminalité en col blanc n'étaient pas davantage renforcées. Pis, sous couvert de moderniser notre législation, cette loi de sécurité financière supprimait certaines incriminations pénales prévues par le code de commerce.

Une nouvelle polémique commença à enfler quand la presse pointa les excès des rémunérations des PDG. Selon le magazine Challenges, la rémunération moyenne des cent PDG les mieux payés de France a progressé de 15 % par rapport au « cru » 2001, alors que parallèlement les résultats nets de leurs entreprises étaient en recul de 13 %. Ces cent patrons gagnent en un an ce que 250 smicards ne gagneront jamais de toute leur vie. Cela n'a pas l'air de vous intéresser beaucoup, madame la secrétaire d'Etat, que cent patrons gagnent en un an plus que ce que 250 smicards tireraient d'une vie de travail.

Si on en croit l'European Corporate Governance Institute, les patrons français sont désormais les dirigeants les mieux payés d'Europe. Leur salaire annuel est plus élevé de 16 % que celui de leurs homologues britanniques. Dans un contexte de rigueur, où le Gouvernement cherche partout à réaliser des économies, jusqu'à s'en prendre aux mécanismes d'indemnisation du chômage ; dans un contexte marqué aussi par la modération salariale, la multiplication de plans sociaux et des licenciements boursiers, découvrir la réalité de la rémunération des dirigeants, qui évolue de façon parfaitement indépendante des résultats de leur société, s'est avérée absolument intolérable.

Cette dérive s'est incarnée en deux hommes : Jean-Marie Messier, deuxième salaire de France quand il a mené Vivendi à la faillite, et de nombreux actionnaires à la ruine ; Pierre Bilger, ex-PDG d'Alstom, qui s'est senti obligé - il fut le seul - de rembourser une partie des cinq millions d'euros qu'il avait reçus à titre d'indemnités de départ, sous la pression d'une opinion choquée par le montant d'un tel golden parachute.

Même dans vos rangs, mes chers collègues de la majorité, certains ont fini par considérer que c'en était trop ! Ainsi Alain Marsaud faisait remarquer que « quelques-uns ont multiplié par six leur rémunération, alors que la valeur de leur entreprise était divisée par dix, et qu'en plus ils procédaient à des licenciements économiques. II faut stopper ces abus au moment où l'on demande à tous les Français de travailler plus longtemps pour toucher une retraite plus faible. » Ce dernier se voyait donc confié, à l'automne 2003, le soin de diriger les travaux d'une mission d'information sur la réforme du droit des sociétés et la rémunération des grands patrons. On en tremblait ! Las ! La montagne a accouché d'une souris.

La mesure phare issue de ces travaux, qui prévoit la consultation des actionnaires en assemblée générale sur la rémunération des mandataires sociaux, - mesure qui n'a aucune résonance bolchevique puisqu'elle existe déjà, entre autres, au Royaume-Uni, aux Pays-Bas et en Suisse - a été abandonnée, suite aux pressions du MEDEF et de l'Association française des entreprises privées.

La proposition d'encadrer et de limiter les très avantageux golden parachute subit le même sort. A ce titre, l'épopée de Jean-Marie Messier est significative : entendu dans le cadre de la mission d'information sur le droit des sociétés, il annonça sans vergogne qu'il allait continuer à se battre pour toucher son indemnité de départ d'un montant de 20,55 millions d'euros.

Le lendemain était examiné un amendement déposé à la fois par notre groupe et par notre collègue Rudy Salles. Il visait à supprimer une niche fiscale en vertu de laquelle les ″ parachutes dorés ″ sont exonérés d'impôts jusqu'à un plafond de 360 000 euros. La majorité a repoussé cette proposition, au motif absolument ″ abracadabrantesque ″ que « fiscaliser ces indemnités pourrait conduire à les légitimer. » En guise de conclusion peu glorieuse, monsieur Pascal Clément, vous tendiez la main au MEDEF : « Nous attendons qu'il fasse des recommandations claires aux entreprises. Nous ne souhaitons pas légiférer, car la loi fait fuir les investisseurs, mais il faut que les choses s'améliorent. » Ces propos manifestent combien vous êtes en phase avec Mme la secrétaire d'Etat.

Notre appréciation est bien différente car le constat est accablant : aucune réponse n'a été apportée à l'indignation collective, au moment où le chômage et le nombre des délocalisations augmentent inexorablement.

C'est pourquoi la proposition de loi du groupe socialiste est bienvenue. Un certain nombre de ses dispositions semblent susceptibles, en mettant fin à l'impunité, de moraliser la vie des entreprises. Prévoir que l'actionnaire ou le salarié peut engager la responsabilité personnelle du dirigeant ou de l'administrateur dont l'action ou l'inaction fautive est à l'origine de son préjudice est assurément un progrès.


Mais il aurait été souhaitable d'aller plus loin en imposant aux entreprises et à leurs dirigeants d'assurer financièrement tous les coûts qu'ils font peser aujourd'hui encore sur la société, notamment en procédant à des licenciements boursiers. Il faut étendre l'application du principe de responsabilité. Ainsi ne serait plus transférée à la collectivité nationale la charge de la solidarité, alors que, dans le même temps, les actionnaires empochent les bénéfices et les dirigeants s'empiffrent d'indemnités astronomiques !

Il en est de même des articles qui visent à assurer l'information de l'assemblée générale des actionnaires, mais aussi du comité d'entreprise.

L'un des moyens pour éviter les dérives et délits en tous genres est d'améliorer la transparence. Voilà au moins un point sur lequel nous sommes d'accord. Inspirons-nous de l'ancien ministre des finances qui osait affirmer que le différentiel exorbitant de salaire entre le simple employé et le patron est légitime et représente la différence de plus-value apportée par chacun à l'entreprise.

M. Arnaud Montebourg. Très bien !

M. Jacques Desallangre. Je vous propose donc que chaque année la rémunération totale des dirigeants - golden hello, golden parachute, golden retraite, golden salaire, golden stock options - soit votée en assemblée générale et exprimée en nombre de fois le plus bas salaire à temps plein pratiqué par l'entreprise. Le ratio déterminant la rémunération des dirigeants exprimera ainsi combien ils estiment être plus productifs pour leur entreprise que le simple salarié.

Tout le monde saura ainsi qu'une journée de travail de M. de Lacharrière, président de Fimalac, dont les comptes sont au rouge, vaut un an de salaire de l'employé le moins payé.

Voilà une des multiples propositions que nous aurions pu défendre pour améliorer le texte si nous avions eu la liberté d'en discuter. Car je suppose - votre discours nous a éclairés, madame la secrétaire d'Etat - qu'encore une fois le Gouvernement va refuser toute discussion au fond. Pourtant, ce texte pourrait être voté par l'UMP car il reste inscrit dans la logique capitaliste où le pouvoir de décider est lié à la détention des titres de propriété.

Il est donc remarquable que nos collègues de l'UMP refusent de débattre d'un texte qu'ils devraient pourtant applaudir et voter. Cela prouve que leur indignation n'est que de façade. Le fond est inchangé : l'inaction la plus totale contre la criminalité en col blanc demeure le credo des champions autoproclamés de la lutte contre la délinquance.

Rien que pour cette raison, nous souhaitons le passage à la discussion des articles de cette proposition de loi. Cela permettrait enfin à chacun d'assumer ses responsabilités et ses convictions. Et ne nous dites pas, madame, que pour faire mieux demain, vous ne voulez rien faire aujourd'hui. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Balligand, pour le groupe socialiste.

M. Jean-Pierre Balligand. Madame la présidente, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, avec notre proposition de loi, nous ne sommes pas au « Grand Soir du capitalisme », mais simplement « au tout petit matin de la bonne gouvernance d'entreprise ».

M. Pascal Clément, président de la commission. Un tout petit matin brumeux !

M. Jean-Pierre Balligand. Non, pas brumeux ! C'est de la mauvaise foi, monsieur le président de la commission.

En effet, la gestion d'une entreprise n'est ni de droite, ni de gauche.

Le texte dont nous espérons débattre aujourd'hui - même si, madame la secrétaire d'Etat, on peut douter d'une écoute favorable du Gouvernement - s'inscrit au nombre des tentatives régulières de ceux que la gouvernance entrepreneuriale ne laisse pas indifférents, sur tous les bancs de cette assemblée, pour contenir les dérives observées depuis maintenant plusieurs années dans le fonctionnement du capitalisme de marché.

Nous nous intéressons ici à des dysfonctionnements de la gouvernance d'entreprise que les précédentes étapes législatives - loi sur les nouvelles régulations économiques de mai 2001 et loi de sécurité financière d'août 2003 - ont insuffisamment ou pas du tout traités.

Le contexte est connu de tous.

Ce qui était vrai l'an dernier, lorsque je défendais ici même la position du groupe socialiste dans le débat sur la loi de sécurité financière - à savoir l'ombre des dérèglements internationaux majeurs intervenus en 2002 : Enron, Worldcom, Vivendi - est malheureusement toujours instructif aujourd'hui, alors que le monde industriel et financier n'a sans doute pas fini de connaître d'autres réveils difficiles, et je pense ici en particulier à l'affaire Parmalat.

Je défends toujours l'idée que le politique doit continuer de se saisir de ces questions. J'ai encore à l'esprit ce qu'écrivait en 2002 l'économiste Anton Brender, dans son livre Face aux marchés la politique : « Plus on aura besoin des marchés, plus il faudra encadrer leur jeu par des règles prudentielles solides, une surveillance sérieuse et des réglages macroéconomiques précis ».

Une réflexion très critique sur la gouvernance d'entreprise a été, à vrai dire, ouverte et entretenue par le mouvement patronal lui-même - mon collègue Arnaud Montebourg l'a rappelé il y a quelques instants -,...

M. Michel Delebarre. Très bien, d'ailleurs !

M. Jean-Pierre Balligand. ...depuis Marc Viénot, par deux fois, en 1995 et en 1999, jusqu'à Claude Bébéar en 2003, en passant par Daniel Bouton en 2002. Depuis, le droit des affaires a tenté plusieurs fois de se réformer à la lumière de principes d'inspiration anglo-américaine, aujourd'hui bien connus des juristes et qui semblent, en théorie toutefois, faire l'objet d'un quasi-consensus. Parmi ces principes, la transparence et la responsabilité des acteurs apparaissent comme des objectifs majeurs à atteindre pour assurer la plus grande sécurité des investisseurs, mais aussi des salariés et, partant, de la société tout entière.

C'est encore dans cet esprit que le groupe socialiste, après avoir initié en 2001 le volet législatif de cette prise de conscience, soumet aujourd'hui au Parlement un certain nombre de propositions qui, en vérité, auraient dû avoir toute leur place dans la loi de sécurité financière.

Nous vous disions déjà il y a un an que votre réforme n'était complètement à la mesure ni des véritables questions posées par le fonctionnement des entreprises et des marchés dans notre pays, ni des réponses apportées outre-Atlantique par la loi Sarbanes-Oxley, votée à l'été 2002 aux Etats-Unis. Et vous n'aviez pas daigné alors prendre en compte les propositions d'améliorations qui étaient les nôtres, notamment dans le sens d'un meilleur contrôle de l'actionnariat.

Nous en sommes d'ailleurs arrivés à une situation relativement paradoxale, où c'est l'approche américaine qui impose des règles, des normes, une documentation et des sanctions très lourdes - ce sont les Américains qui font cela ! -, notamment des sanctions pénales, pour les dirigeants en cas d'infraction aux règles édictées, alors que l'approche française parie davantage sur la prise de conscience. Mais n'est-ce pas un vœu pieu en matière économique ?

Madame la secrétaire d'Etat, pour avoir présidé la caisse des dépôts pendant plusieurs années, permettez-moi de vous dire, sans esprit de polémique, que je n'aime pas l'agressivité sur ces questions. Vous venez de dire dans votre discours : nous sommes d'accord sur le diagnostic. Puis on débouche sur l'autorégulation. Or on le constate bien : l'autorégulation ne fonctionne pas ! S'agissant de la règle des bonnes pratiques, quand on connaît le nombre des sociétés cotées, les recommandations faites par le MEDEF en mai 2003 et ce qui est réellement publié en matière de rémunérations par exemple, on constate que le MEDEF, de toute évidence, n'est pas suivi par les principales sociétés cotées de ce pays. On a donc un problème : l'autorégulation ne fonctionne pas. Il faut l'admettre. Votre réponse est sympathique, mais si ce dispositif n'est pas correctement encadré en s'inscrivant dans le sens de nos propositions très concrètes, nous ne déboucherons sur aucune avancée réelle susceptible de faire évoluer modestement le dispositif.

J'avoue tenir particulièrement, dans cette proposition de loi, aux aspects qui touchent à la transparence des rémunérations.

La question de la rémunération des dirigeants a été officiellement soulevée en 1999 dans le rapport Viénot II « sur le gouvernement d'entreprise », qui recommandait que la politique de rémunération de l'équipe dirigeante soit rendue publique afin d'être plus lisible. Il précisait que le conseil d'administration de toute société cotée devait consacrer un chapitre spécifique de son rapport annuel à l'information des actionnaires sur les rémunérations perçues par ses dirigeants.

Dans ce domaine, la loi NRE n'a donc pas fait autre chose que mettre en forme les propres recommandations du MEDEF, en allant même parfois moins loin qu'elles, comme le prouve la suggestion patronale, que nous n'avions pas suivie à l'époque, d'une publication des dix salaires individuels les plus élevés de l'entreprise !

Alors que le code de commerce disposait jusque-là que le conseil d'administration était seul compétent pour décider de la rémunération du président, du directeur général et des directeurs généraux délégués, l'article 116 de la nouvelle loi impose ainsi de faire figurer dans le rapport de gestion, à compter du 1er janvier 2001, « la rémunération totale et les avantages de toutes natures versés, durant l'exercice, à chaque mandataire social ». Dans ces conditions, l'information devient enfin accessible aux tiers et est communiquée en tant que telle au comité d'entreprise.

Mais cette obligation de publier annuellement le montant des rémunérations allouées aux dirigeants de sociétés anonymes semble avoir été - à tort - mal perçue par la plupart des chefs d'entreprise. En outre, il a été constaté que l'application de cette règle était très inégale.

C'est dans ces conditions que la loi de sécurité financière du 1er août 2003 est revenue sur ce point, moins de deux ans après l'entrée en vigueur de la loi NRE. Tentée un moment - cela apparaissait dans l'avant-projet de loi - de lever totalement l'obligation de transparence en matière de rémunérations, la nouvelle majorité a finalement décidé d'opérer une restriction et, partant, une distinction. Désormais, l'établissement du rapport annuel détaillant le montant individuel des rémunérations de chaque mandataire social n'est plus obligatoire dans les sociétés non cotées.

Les scandales ébruités dans la presse à propos des rémunérations de tel ou tel chef d'entreprise tendent pourtant à prouver la pertinence et la persistance de l'actualité de cette question d'un meilleur contrôle des salaires des dirigeants, sur laquelle tout recul pourrait à juste titre être considéré comme suspect.

Le cadre légal est censé diminuer l'asymétrie d'information et améliorer les moyens de contrôle des actionnaires. Mais est-ce vraiment bien le cas, lorsque l'on sait que seul un tiers des 250 premières capitalisations à la Bourse de Paris ont adopté un comité des rémunérations ?

Des progrès restent donc à faire dans ce domaine et les moyens de contrôle doivent également s'élargir à d'autres outils que la seule rémunération. Il est naturel que tous les partenaires, internes ou externes, de l'entreprise se posent des questions quant aux sommes versées à ses dirigeants, surtout si cette entreprise connaît par ailleurs des difficultés économiques. Les dirigeants sont-ils vraiment récompensés du fruit de leur effort ou bien doivent-ils simplement à leur statut d'imposer le niveau de rémunération qu'ils souhaitent ? Une véritable question éthique est sous-entendue par ce débat.

C'est précisément l'objet des différents articles que notre proposition de loi consacre à cette question : ne pas baisser les bras face aux réticences de la place, d'autant que les investisseurs et les actionnaires eux-mêmes - et pas seulement, comme on voudrait le laisser penser, les salariés et les syndicats - sont préoccupés par les niveaux de rémunération excessifs versés à certains états-majors. Il est donc important que des mesures continuent d'être prises afin de déterminer au mieux ces montants, en incluant les sommes qui constituent un intéressement aux résultats ou autant de mécanismes exceptionnels d'arrivée ou de départ, dits golden hello ou golden parachute.

Il est aussi plus que jamais nécessaire d'appliquer davantage de transparence aux méthodes de fixation utilisées et aux montants distribués, pour, le cas échéant, être pleinement capables de les justifier ensuite. C'est le sens d'une fixation en assemblée générale d'un rapport maximum entre la rémunération la plus haute et la rémunération la plus basse dans l'entreprise : créer des rapports salariaux - et donc sociaux - plus transparents, de manière à mettre un terme à des excès qui ne laissent pas d'agacer, de scandaliser ou de démotiver, signes finalement d'une forme de capitalisme distant, déconnecté, presque déshumanisé, que le législateur a le devoir de remettre dans le droit chemin. C'était d'ailleurs le sens d'une proposition que j'avais faite avec Jean-Baptiste de Foucault sur l'épargne salariale : que la distribution de stock options dans une entreprise ne puisse avoir lieu en l'absence d'un accord d'intéressement. C'était le moins que l'on pouvait faire. Or, aujourd'hui, ce point n'a toujours pas de cadre légal.


C'était d'ailleurs le sens d'une des propositions sur l'épargne salariale que j'avais faites avec Jean-Baptiste de Foucauld, et qui prévoyait que, lorsqu'une entreprise distribue des stocks options, elle doit obligatoirement mettre en place un accord d'intéressement : c'était le moins que l'on pouvait faire, mais, dans notre bon pays, cette pratique n'est toujours pas encadrée.

Au regard des différents thèmes qui constituent le débat sur la gouvernance des entreprises, de nombreux facteurs restent en tout état de cause à améliorer.

La présente proposition de loi explore certaines pistes non dénuées d'intérêt, qui touchent autant à la responsabilité des mandataires sociaux qu'au déroulement des assemblées générales d'actionnaires. Cependant, elle ne fait souvent qu'exprimer l'influence du modèle anglo-saxon d'investissement, qui impose au gouvernement des grandes sociétés européennes la démocratisation à marche forcée qui se développe outre-Atlantique.

Certes, en France, les évolutions du cadre légal se font toujours avec réticence et lenteur : le rapport Marini de 1996 ne suggérait-il pas déjà d'« améliorer les conditions de l'expression du droit de vote lors des assemblées générales » et de « restreindre les limitations statutaires à l'exercice des droits de vote » ? Mais c'est en remettant régulièrement notre ouvrage sur le métier que nous parviendrons à faire changer les mentalités et à imposer enfin l'idée qu'une gouvernance d'entreprise plus juste est avant tout une meilleure gouvernance. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Clément, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

M. Pascal Clément. Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, je voudrais d'abord remercier très sincèrement le groupe socialiste, qui, à la suite des travaux de la mission d'information sur la réforme du droit des sociétés, a souhaité m'aider à faire avancer certaines idées. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Christophe Caresche, rapporteur. Vous en avez bien besoin !

M. Arnaud Montebourg. Vous avez le Gouvernement contre vous !

Mme la présidente. S'il vous plaît, laissez M. Clément s'exprimer !

M. Pascal Clément. Comme vous êtes aimable, madame la présidente !

Mme la présidente. Je remplis simplement mon rôle de présidente.

M. Jean-Pierre Balligand. Il n'a pas encore polémiqué, il n'a fait qu'ironiser !

M. Pascal Clément. Je suppose que, puisque vous acceptez cet hommage, vous accepterez également celui que je voudrais adresser à l'autre partie de l'hémicycle, où siège l'UMP.

M. Michel Delebarre. Il va falloir faire preuve d'imagination !

M. Pascal Clément. S'il est vraiment aussi urgent de voter cette proposition de loi, pouvez-vous m'expliquer pourquoi, pendant les cinq ans où vous avez été au gouvernement, aucun d'entre vous n'a eu cette idée de bon sens ?

M. Michel Delebarre. C'est que nous n'avions pas encore le rapport Clément !

M. Pascal Clément. Merci, mon cher collègue : c'est ce que − dans un rêve fou, il est vrai − je souhaitais entendre. (Sourires.)

Sans faire d'autosatisfaction, je dois avouer − et ce sera probablement par ces mots que je conclurai −...

M. Jean-Pierre Balligand. Déjà ?

M. Pascal Clément. ...que cette idée est cohérente avec la conception que l'UMP a de l'économie. Il est incontestable que, de ce point de vue, vous avez fait un pas en avant. Mais le comble, c'est que vous finissez par contredire vous-mêmes ce que vous avez l'air de promouvoir, et que ma proposition va beaucoup plus loin que la vôtre.

M. Arnaud Montebourg. Dans ce cas, pourquoi votre proposition ne vient-elle pas en discussion ? Où est-elle passée ?

M. Pascal Clément. Nous y viendrons, monsieur Montebourg. Pour le moment, essayez déjà de comprendre que vous dites une chose et son contraire, et que nous sommes donc contraints de discuter pour savoir si nous nous sommes bien compris. Il me semble que ce n'est pas le cas.

Pour notre part, nous avons voulu une mission sur la gouvernance, non point pour nous occuper des rémunérations des dirigeants sociaux, mais parce que, après les trois rapports de place, qui semblaient souvent un peu attentistes − avec le rapport Viénot 2, on craignait la loi sur les nouvelles régulations économiques, et, avec le rapport Bouton, une loi de l'UMP −, un dialogue enrichissant pouvait se nouer entre les rapports de place et le législateur, qui commençait à s'intéresser au sujet. Je suis convaincu que, ce faisant, nous ne perdons pas notre temps. Nombreux sont les mandataires sociaux qui seront à l'écoute de nos débats, et cela nous incitera à continuer de faire avancer les choses.

L'une des différences essentielles entre les deux côtés de l'hémicycle, c'est que l'opposition croit toujours à l'obligation législative, et que nous croyons encore à la réforme des comportements. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Arnaud Montebourg. Vous croyez à l'autorégulation, à l'autoaugmentation, c'est-à-dire à rien ! Vous préférez ne rien faire ! Vous croyez à l'inaction !

M. Pascal Clément. Soit l'on croit en l'homme, et l'on pense qu'il peut s'amender, s'améliorer, viser l'intérêt général...

M. Jacques Desallangre. Quand cet homme est un patron, vous devez être déçus !

M. Pascal Clément. ...soit on est profondément pessimiste, on considère que, de toute façon, l'homme n'est mû que par un motif, l'argent ou le pouvoir, qu'il ne peut s'amender en aucune façon, et l'on essaie de légiférer au maximum. Telle est la différence entre vous et nous : acceptez-la.

M. Arnaud Montebourg. Nous l'acceptons !

M. Pascal Clément. Vous ne croyez guère que l'homme puisse s'amender. Nous croyons, sans être pour autant rousseauistes, que l'homme peut être bon. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Jean-Pierre Balligand. L'homme est naturellement bon ! Mais si, c'est rousseauiste !

M. Jacques Desallangre. Ne nous prenez pas pour des enfants ! Ce sont des contes pour enfants !

M. Pascal Clément. Me permettez-vous de poursuivre ?

Mme la présidente. S'il vous plaît, un peu de calme, pour que M. Clément puisse continuer.

M. Pascal Clément. Mon cher collègue, je vous ai écouté même quand vous disiez des choses désagréables. Moi, je vous dis des choses plutôt agréables : raison de plus pour m'écouter !

Avec cette mission d'information, nous avons voulu faire en sorte que la gouvernance à la française englobe les trois pouvoirs de l'entreprise. Le premier est l'exécutif, qui, en France, dans la pratique, est très fortement sacralisé. Le deuxième est le conseil d'administration : grâce aux rapports de place, il commence à exister vraiment, différents comités se mettant en place, même si c'est un peu lentement et, bien souvent, sous la surveillance de l'exécutif, comme le comité des rémunérations. C'est à propos du troisième pouvoir, l'assemblée générale des actionnaires, que nous avons une divergence de fond, car c'est le point faible de votre proposition que, pour cette raison, je ne peux pas voter. La question est de savoir qui est propriétaire de l'entreprise. Est-ce le conseil d'administration, le dirigeant social ou l'actionnaire ? La devinette n'est pas nouvelle, tout le monde connaît la réponse, mais personne n'en tire les mêmes conséquences.

M. Jacques Desallangre. Il manque un quatrième pouvoir : les ouvriers, les salariés !

M. Pascal Clément. Monsieur Balligand, le rapport de la mission d'information entendait réhabiliter le rôle de l'actionnaire. C'était d'ailleurs le titre que j'avais donné à l'un de ses chapitres.

M. Arnaud Montebourg. M. Clément, c'est la monarchie de Juillet : « Enrichissez-vous » !

M. Pascal Clément. Monsieur Montebourg, puisque, tout à coup, vous vous réveillez, je rappelle que vous avez eu des mots définitifs après la publication du rapport de notre mission, dont vous avez dit que c'était « une fourmi sans pattes ». Il est étonnant que cette fourmi donne aujourd'hui lieu à ce débat.

M. Arnaud Montebourg. J'avais dit que la montagne accouchait d'une fourmi sans pattes !

M. Pascal Clément. Vous aviez dit que la montagne accouchait d'une souris, ce qui est plus fréquent que d'une fourmi. M. Montebourg, qui n'a jamais peur de l'exagération, s'associe aujourd'hui à la proposition de M. Caresche en disant que c'est un sujet intéressant.

M. Christophe Caresche, rapporteur. Non, ça ne s'est pas passé comme ça !

M. Pascal Clément. Il est tout de même étonnant qu'une « fourmi sans pattes » donne naissance à une proposition de loi. Je laisse à M. Montebourg la responsabilité d'un commentaire manifestement excessif.

M. Arnaud Montebourg. Guizot a la parole !

Mme la présidente. Monsieur Montebourg !

M. Pascal Clément. Il nous faut donc savoir quel est le rôle de l'actionnaire. Peut-il y avoir mise en cause du dirigeant social au nom de sa responsabilité civile ? L'excellent rapport de Christophe Caresche rappelle que, tant la loi de 1966 que le code du commerce prévoient la responsabilité civile des mandataires sociaux. Que s'est-il donc passé pour que cela ne s'applique pas ? Il y a sans doute eu un désaccord avec la chancellerie, qui a tendance à répéter ce que dit la Cour de cassation, laquelle contredit la loi. Au cours du débat sur la loi de sécurité financière, qui a créé l'Autorité des marchés financiers, mon collègue Philippe Houillon avait déjà défendu cet amendement, mais les membres de la commission des finances − vos collègues, monsieur Balligand − s'y étaient opposés.

M. Jean-Pierre Balligand. Mes collègues de droite !

M. Pascal Clément. Nous avons repris cette idée, qui est fondamentale : il faut pouvoir invoquer la responsabilité civile d'un dirigeant social. Aujourd'hui, comme la jurisprudence de la Cour de cassation l'interdit, on fait du pénal, alors qu'il s'agit d'une question civile. Cela coûte moins cher − il n'y a pas d'expertises − et ça ne débouche sur rien. Mais, comme le dit M. Burgelin, procureur général de la Cour de cassation, ça finit par déconsidérer la justice : après des années de procédure, tout se termine soit par un non-lieu, soit par une relaxe.

M. Arnaud Montebourg. Et M. Burgelin lui-même, d'ailleurs !

M. Pascal Clément. Il est vrai que vous aimez les procès contre les personnes, monsieur Montebourg, mais, si vous le voulez bien, nous en resterons au niveau des idées.

M. Christophe Caresche, rapporteur. Ce n'est pas un procès, là, pour le coup !

M. Pascal Clément. En lisant l'excellent exposé des motifs de la proposition de loi Caresche, j'ai cru un moment que nous étions d'accord. Il n'y a qu'un malheur, comme disait Me Floriot, c'est que, en conclusion, M. Caresche fait une pirouette finale que j'ai beaucoup de mal à comprendre.

M. Christophe Caresche, rapporteur. Je vais vous expliquer !

M. Pascal Clément. Nous sommes donc en présence de deux textes : la proposition de loi qui porte mon nom et qui est cosignée par 118 collègues, et celle du groupe socialiste sur la responsabilité individuelle des mandataires sociaux en cas de manquements graves dans la gestion de l'entreprise.

M. Pierre Cardo. C'est vrai !

M. Pascal Clément. Ce dernier texte considère que cette responsabilité ne doit pas être invoquée quand elle a des conséquences sur le patrimoine du propriétaire de l'entreprise, c'est-à-dire de l'actionnaire.

M. Arnaud Montebourg. Bien sûr !

M. Pascal Clément. Autrement dit, s'il y a faute, c'est l'entreprise qui en fera − et qui en fait déjà − les frais. Bref, on tourne en rond, on ne change rien, on en reste à la jurisprudence de la Cour de cassation. À quoi bon avoir parcouru tout ce chemin si c'était pour rester au même endroit ?

M. Arnaud Montebourg. C'est inexact !

M. Pascal Clément. Ma proposition de loi va plus loin, qui souhaite qu'on reconnaisse la responsabilité civile des mandataires sociaux. Faut-il rappeler, d'ailleurs, que, dans sa jurisprudence, la Cour de cassation formule deux conditions ? D'une part, le salarié doit prouver que la faute du mandataire social à l'origine du préjudice qu'il a subi est détachable de sa fonction : en pratique, on n'arrive jamais à établir ce qui est détachable.

M. Christophe Caresche, rapporteur. Comme pour le Président de la République !

M. Pascal Clément. D'autre part, l'actionnaire qui intente l'action en responsabilité doit avoir subi un préjudice « direct et certain » : or, là encore, la Cour de cassation considère systématiquement que le préjudice n'est ni direct ni certain, même dans les cas d'abus de biens sociaux ayant entraîné une dépréciation des titres.

Devant un tel niveau de protection des mandataires sociaux, on ne peut que rester interdit. Si l'opposition s'accordait avec moi pour faire évoluer cette situation, je m'en féliciterais, mais elle est moins progressiste que moi : c'est un comble !

M. Arnaud Montebourg. Argument irrecevable !

M. Pascal Clément. M. Montebourg, qui a un côté extrêmement social − que je respecte −, a répété qu'il ne voulait pas traiter du problème patrimonial de l'actionnaire. Mais, monsieur Montebourg, l'entreprise appartient à l'actionnaire, l'actionnaire a un patrimoine. Nous devons tâcher − et, à cet égard, je suis d'accord avec M. Caresche − de trouver un moyen terme entre le système à l'américaine de la « class action », qui judiciarise à l'extrême, et le système français qui protège totalement les mandataires sociaux. Nous devons créer un droit de la responsabilité qui protège le seul propriétaire de l'entreprise, l'actionnaire.

Dans ce débat, nous n'avons probablement pas les mêmes arrière-pensées. (Sourires.) Si, pour ma part, je souhaite qu'il ait lieu, c'est parce que je crois que le système libéral est le seul qui permette d'être social, puisque c'est le seul qui permette l'accumulation et la création de richesses.

M. Arnaud Montebourg. Pour les dirigeants !

Mme la présidente. Monsieur Montebourg, laissez parler M. Clément.

M. Pascal Clément. Si vous me laissiez finir, vous éviteriez de dire des sottises.

Vous ne croyez pas au système libéral, car, je le disais en commençant, vous ne croyez pas en l'homme. Nous, nous y croyons. Nous pensons qu'il peut être bon ou méchant, juste ou injuste, mais qu'il peut s'amender. Un système libéral n'est bon que s'il est encadré par des règles. Or, il y en a. Faut-il en mettre davantage ? Je le pense, mais pas celle-là, qui dit une chose et son contraire. Aussi, il serait inconséquent d'aller au-delà de la discussion générale.

Ce qu'il nous faut, ce ne sont pas seulement des règles, mais aussi le partage de la richesse produite par l'entreprise. Je suis choqué de voir que les stocks options sont aujourd'hui réservés à quelques dirigeants, alors que tous les salariés de l'entreprise devraient en bénéficier. Telle est la grande évolution qu'il nous faut favoriser demain. Or, un libéralisme producteur de richesses ne pourra permettre la distribution de revenus aux membres de l'entreprise, c'est-à-dire à tous les salariés, si les mandataires sociaux n'ont pas une grande responsabilité civile à l'égard des détenteurs du patrimoine. Et c'est d'autant plus nécessaire que, demain, grâce à la modification que l'UMP et ceux qui ont bien voulu la voter ont introduite dans la réforme des retraites, nombre de salariés vont investir dans des actions pour compléter leur retraite. (« Avec quoi ? » sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jacques Desallangre. Avec quel salaire ?

M. Pascal Clément. Il est donc indispensable que des règles et la transparence fassent en sorte que les Français soient intéressés par la marche de leur entreprise. Cela vaudra mieux que de prétendre distribuer des richesses qui n'existent plus. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.


M. Christophe Caresche
, rapporteur. Le débat d'aujourd'hui aura au moins montré une chose : c'est que le Gouvernement n'entend pas proposer de modification législative sur ces questions. Hier ont été publiés les montants des rémunérations des principaux dirigeants d'entreprise et leur évolution faramineuse ces dernières années.

M. Jean-Pierre Balligand. C'est scandaleux !

M. Pierre Cardo. Le scandale existait déjà du temps où vous étiez au gouvernement !

M. Christophe Caresche, rapporteur. La réponse du Gouvernement est claire : il n'entend ni proposer de loi ou de modification législative, ni imposer de cadre juridique permettant de mettre un frein à ce qui est considéré par tous comme une dérive condamnable.

Nous aurons l'occasion de reparler de ces questions lors de la discussion que nous aurons prochainement sur les défaillances d'entreprise.

Quelques mots pour répondre à M. Clément, qui a une position quelque peu difficile à comprendre. D'un côté, il fait l'éloge de l'autorégulation et, de l'autre, il reproche aux auteurs de la proposition de loi de ne pas aller assez loin. J'y vois un paradoxe. Soit vous êtes d'accord, monsieur Clément, avec la position du Gouvernement - qui est cohérente - de ne pas légiférer, soit vous êtes favorable à une loi.

M. Pascal Clément, président de la commission. Je veux la modification de la responsabilité civile, et vous, non !

M. Christophe Caresche, rapporteur. Notre proposition de loi est équilibrée.

M. Jean-Pierre Balligand. Exactement !

M. Pascal Clément, président de la commission. Non !

M. Christophe Caresche, rapporteur. Ce qui nous distingue, c'est que nous ne voulons pas importer un mécanisme de class action à l'américaine...

M. Pascal Clément, président de la commission. Nous n'en sommes pas là !

M. Christophe Caresche, rapporteur. ...qui signifie l'ouverture de très nombreuses procédures judiciaires, au risque de déstabiliser des entreprises, pour protéger le seul intérêt patrimonial des actionnaires.

Ce que nous proposons, pour notre part, c'est de défendre l'intérêt social de l'entreprise,c'est-à-dire le pacte social qui unit les différents acteurs au sein de celle-ci.

M. Pascal Clément, président de la commission. C'est déjà le cas !

M. Christophe Caresche, rapporteur. Notre but n'est pas de défendre les actionnaires qui ont perdu de l'argent à la suite d'une chute des cours de la Bourse. C'est pourquoi nous incluons les salariés - ce qui n'est pas le cas dans votre proposition - dans le cadre de la défense de l'intérêt social de l'entreprise.

M. Jean-Pierre Balligand. Très bien !

M. Christophe Caresche, rapporteur. Le passage à la discussion des articles aurait permis d'éclairer le débat. Je regrette que le Gouvernement et la majorité ne le permettent pas. Ce débat était opportun et parfaitement justifié, surtout après les informations données hier.

M. Michel Delebarre. Très juste !

Mme la présidente. La discussion générale est close.

Vote sur le passage
à la discussion des articles

Mme la présidente. La commission des lois n'ayant pas présenté de conclusions, l'Assemblée, conformément à l'article 94, alinéa 3, du règlement, est appelée à statuer sur le passage à la discussion des articles du texte initial de la proposition de loi.

Conformément aux dispositions du même article du règlement, si l'Assemblée vote contre le passage à la discussion des articles, la proposition de loi ne sera pas adoptée.

Je vous informe que, sur le vote du passage à la discussion des articles de la proposition de loi, je suis saisie par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Nous en arrivons aux explications de vote.

La parole est à M. Pierre Cardo, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

M. Pierre Cardo. La proposition de loi qui nous est soumise aujourd'hui m'avait paru, à première vue, apporter des éléments positifs permettant de répondre aux problèmes de gouvernance d'entreprise auxquels nous sommes confrontés. Mais, pour avoir vécu de près la mise en œuvre de la loi sur les nouvelles régulations économiques élaborée et adoptée par les auteurs mêmes de cette proposition de loi, celle-ci m'apparaît, après analyse et même si je suis favorable à certains de ses articles, à la fois insuffisante, quelque peu opportuniste et, à certains égards, dangereuses.

Elle est tout d'abord insuffisante. Je ne prendrai qu'un seul exemple : la pratique des pouvoirs en blanc. C'est une procédure complètement inadaptée et mieux vaut, bien évidemment, la supprimer. Mais vous êtes-vous préoccupés des difficultés rencontrées par un actionnaire quand il veut voter ? Pour avoir expérimenté l'affaire il n'y a pas longtemps, je puis vous dire que c'est un véritable parcours du combattant et que des améliorations s'imposent car ils sont un grand nombre à ne pouvoir s'exprimer pour des raisons diverses. Le débat d'aujourd'hui ne me paraît pas suffisant pour apporter des réponses concrètes.

Certaines dispositions prises pour renforcer la responsabilité des dirigeants d'entreprise sont dangereuses. Je comprends parfaitement qu'il faille aller plus loin dans ce domaine, mais est-on obligé d'aller jusqu'à supprimer les assurances ? Il me semble, par ailleurs, important de prévoir quelques garde-fous pour éviter des condamnations pour des actes considérés comme allant à l'encontre de l'intérêt de l'entreprise alors qu'il s'agit de fautes.

Enfin, la proposition de loi qui nous est soumise a un côté opportuniste. J'avais demandé que soit créée une mission d'information sur un grand groupe connu, dont la constitution a été voulue par l'Etat français et même par d'autres Etats. Or, sur les 120 parlementaires qui ont signé avec moi la demande de création de cette mission d'information, qui devait approfondir notamment la question des rémunérations des dirigeants et leurs responsabilités dans certains domaines, il n'y a pas eu un seul député socialiste ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Vous comprendrez donc ma position quant au passage à la discussion des articles de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Pierre Balligand. M. Cardo est juge et partie !

M. Pierre Cardo. Ce sont des faits, monsieur Balligand !

M. Jean-Pierre Balligand. Cela s'appelle un mandat impératif, monsieur Cardo !

Mme la présidente. Monsieur Balligand, les dialogues entre députés sont interdits.

La parole est à M. Jacques Desallangre, pour le groupe des députés communistes et républicains.

M. Jacques Desallangre. Je ne vais pas reprendre tous les arguments que j'ai développés dans la discussion générale.

Toute la matinée, le Gouvernement s'est payé de mots. L'essentiel que l'on doit retenir est qu'il rechigne à intervenir. Il considère que la législation est mauvaise pour l'entreprise mais, en fait, c'est parce qu'il la trouve contraignante pour ceux qui puisent sans vergogne dans les richesses de leur entreprise tout en continuant à culpabiliser, sans aucune honte, les salariés les plus modestes.

Le Gouvernement et sa majorité confondent à dessein l'intérêt de l'entreprise et celui de ses plus hauts dirigeants. Leurs intentions sont dévoilées ! Mais en était-il encore besoin ?

Nous voterons le passage à la discussion des articles de la proposition de loi. Elle avait le mérite de poser de bonnes questions et aurait sans doute permis d'en poser d'autres tout aussi embarrassantes pour la majorité si le Gouvernement n'avais pas battu en retraite. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Montebourg, pour le groupe socialiste.

M. Arnaud Montebourg. Tout a été dit dans la discussion générale.

J'ai été un peu surpris, je dois le dire, par l'intervention du président de la commission des lois, M. Clément. Elle m'a semblée inspirée de l'esprit de la monarchie de Juillet ! Elle se résumait en substance à ceci : « Enrichissez-vous et peut-être redistribuera-t-on... Nous verrons cela entre nous ! ».

Les arguments avancés étant irrecevables, nous appelons nos collègues à voter le passage à la discussion des articles.

Mme la présidente. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

Je mets aux voix le passage à la discussion des articles.

Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.

Le scrutin est ouvert.

..................................................................

Mme la présidente. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

          Nombre de votants 120

          Nombre de suffrages exprimés 119

          Majorité absolue 60

      Pour l'adoption 56

      Contre 63

(L'Assemblée décide de ne pas passer à la discussion des articles.)

Mme la présidente. L'Assemblée ayant décidé de ne pas passer à la discussion des articles, la proposition de loi n'est pas adoptée.

3

ORDRE DU JOUR DE L'ASSEMBLÉE

Mme la présidente. L'ordre du jour des séances que l'Assemblée tiendra jusqu'au jeudi 3 juin inclus a été fixé ce matin en conférence des présidents.

Cet ordre du jour sera annexé au compte rendu.

Par ailleurs, la conférence des présidents a fixé la date de trois votes solennels :

- le mardi 18 mai, sur le projet de loi organique relatif à l'autonomie financière des collectivités territoriales,

- le mardi 25 mai, sur le projet de loi d'orientation sur l'énergie,

- et le mardi 1er juin, sur le projet de loi constitutionnelle relatif à la Charte de l'environnement.

4

ORDRE DU JOUR DES PROCHAINE SÉANCES

Mme la présidente. Cet après-midi, à quinze heures, deuxième séance publique :

Questions au Gouvernement ;

Explications de vote et vote, par scrutin public, sur l'ensemble du projet de loi, n° 1350, relatif à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées.

Discussion du projet de loi, n° 1510, autorisant l'approbation du protocole à la convention du 27 novembre 1992 portant création d'un fonds international d'indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures (1) :

M. Hervé de Charrette, rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères (rapport n° 1584) ;

Discussion du projet de loi, n° 557, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement du Canada, les Gouvernements d'Etats membres de l'Agence spatiale européenne, le Gouvernement du Japon, le Gouvernement de la Fédération de Russie et le Gouvernement des Etats-Unis d'Amérique sur la coopération relative à la station spatiale internationale civile (ensemble une annexe) :

M. Jacques Remiller, rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères (rapport n° 1368) ;

(Procédure d'examen simplifié ; art. 106 du règlement).

Discussion :

du projet de loi, n° 958, autorisant la ratification de la convention civile sur la corruption,

du projet de loi, n ° 959, autorisant la ratification de la convention pénale sur la corruption :

M. Marc Reymann, rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères (rapport n° 1424) ;

(Procédure d'examen simplifiée ; art. 106 du règlement).

(Discussion générale commune).

Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, n° 1420, autorisant la ratification de l'accord établissant une association entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et la République du Chili, d'autre part :

M. Guy Lengagne, rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères (rapport n° 1582) ;

(Procédure d'examen simplifiée ; art. 106 du règlement).

Projet de loi, adopté par le Sénat, n° 1418, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République populaire de Chine sur la création et les statuts des centres culturels :

M. Gilbert Gantier, rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères (rapport n° 1516) ;

(Procédure d'examen simplifiée ; art. 107 du règlement).

Projet de loi, adopté par le Sénat, n° 1419, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Slovénie relatif au statut et au fonctionnement des centres culturels :

M. Gilbert Gantier, rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères (rapport n° 1516) ;

(Procédure d'examen simplifiée ; art. 107 du règlement).

Projet de loi, n° 1365, autorisant l'approbation de l'accord entre la France et la Russie relatif à la coopération en matière de sécurité intérieure et de lutte contre la criminalité :

M. Loïc Bouvard, rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères (rapport n° 1583) ;

(Procédure d'examen simplifiée ; art. 107 du règlement).

Projet de loi, adopté par le Sénat, n° 1417, autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l'Ukraine relatif à la coopération policière (ensemble un échange de lettres) :

M. Loïc Bouvard, rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères (rapport n° 1583) ;

(Procédure d'examen simplifiée ; art. 107 du règlement).

Discussion de la proposition de résolution, n° 1478, de M. Thierry Mariani sur la proposition de règlement du Conseil portant création d'une Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des Etats membres de l'Union européenne (COM [2003] 687 FINAL/E 2447) :

M. Thierry Mariani, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport n° 1545).

A vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.

La séance est levée.

(La séance est levée à onze heures quinze.)

      Le Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

      jean pinchot


(1) Lettre de M. le ministre délégué aux relations avec le Parlement en date du lundi 10 mai 2004.