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Edition J.O. - débats de la séance

Assemblée nationale

Compte rendu
intégral

Deuxième séance du Mardi 18 octobre 2005

22e séance de la session ordinaire 2005-2006


PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

questions au gouvernement

M. le président. L’ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Nous commençons par une question du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

propagation en europe de la grippe aviaire

M. le président. La parole est à M. Axel Poniatowski.

M. Axel Poniatowski. Ma question s’adresse au Premier ministre, elle concerne la propagation en Europe de la grippe aviaire.

Monsieur le Premier ministre, la grippe aviaire était jusqu’à la semaine dernière aux portes de l’Europe. Cette semaine, elle y a fait son entrée en Roumanie et probablement aussi en Bulgarie et en Grèce. Le virus détecté en Roumanie est bien le H5N1, responsable de 160 cas d’infection et de soixante morts d’hommes en Asie. Il est d’un type identique et de la même source hautement pathogène, a déclaré le commissaire européen à la santé.

L’Union européenne a immédiatement interdit, à titre de précaution, l’importation de volailles en provenance de Roumanie, comme elle l’avait fait quelques jours auparavant pour l’importation de volailles en provenance de Turquie.

Des experts ont déterminé que le virus se transmettait à l’être humain par contact avec un oiseau infecté, qu’il soit vivant ou mort. En revanche, on ne pourrait attraper la grippe aviaire en consommant de la volaille puisque le virus est détruit à une température de 70°.

Le gouvernement français a cependant renforcé les contrôles tant au niveau des dépistages qu’au niveau des pratiques d’élevage sur notre territoire. Par ailleurs, vous avez pris des mesures concernant la disponibilité éventuelle de traitements antiviraux et de vaccins pandémiques. Enfin, à l’issue de la réunion interministérielle de vendredi dernier à ce sujet, vous avez déclaré que nous n’étions pas en situation de pandémie et qu’il n’y avait eu jusqu’à présent aucun cas de transmission de la grippe aviaire d’homme à homme.

Pour autant, monsieur le Premier ministre, le décalage entre l’importance de la mobilisation nationale et internationale et, semble-t-il, l’absence de risque de pandémie est mal compris par notre population. Pouvez-vous donc m’indiquer ce que nos compatriotes doivent savoir au niveau des risques éventuels de contamination dans notre pays et s’il y a des dispositions ou des précautions à prendre dès aujourd’hui à ce sujet. Comment comptez-vous tenir informée l’opinion publique de l’évolution de cette crise ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Monsieur le député, la transmission animale, c’est-à-dire l’épizootie, continue de s’étendre. Des cas ont été signalés ces derniers jours en Turquie et en Roumanie, des cas sont en cours d’investigation en Grèce et en Croatie. L’épizootie est vraisemblablement véhiculée par des oiseaux migrateurs. La France n’est donc pas à l’abri.

Face à ce risque, le Gouvernement a mobilisé tous les moyens nécessaires. Nous avons d’ores et déjà un dispositif qui est opérationnel. Nous avons nommé un délégué interministériel pour la grippe aviaire, le professeur Didier Houssin. Nous avons défini un plan de prévention et de lutte contre la pandémie grippale, qui comporte un volet d’information, un volet de prévention et un volet de protection des Français.

L’information tout d’abord. Tous les Français seront tenus au courant en temps réel de l’évolution de la situation et des différentes mesures prises par le Gouvernement. Je réunirai les représentants des groupes parlementaires la semaine prochaine afin de leur présenter les mesures et d’écouter leurs éventuelles propositions.

Deuxième exigence, la prévention de l’épizootie. Nous avons interdit d’ores et déjà toute importation de volailles en provenance des différents pays contaminés. Nous avons également décidé de renforcer la surveillance des oiseaux migrateurs et des volailles d’élevage.

La troisième exigence, c’est la protection des Français contre le risque de pandémie grippale, même si aucun cas de transmission d’homme à homme n’a encore été constaté. Cinquante millions de masques sont en cours de livraison dans les hôpitaux. Notre stock atteindra les 200 millions au début de l’année prochaine. En ce qui concerne les antiviraux, nous disposerons dès la fin de l’année des quantités nécessaires pour traiter 14 millions de patients. Quant au vaccin, nous avons réservé 40 millions de doses qui seront disponibles dès que le vaccin aura été élaboré.

Le Gouvernement s’est fixé trois règles claires face à la menace.

D’abord, une transparence constante sur l’évolution de la situation et sur les risques auxquels les Français pourraient être exposés.

Ensuite, une coordination avec l’ensemble de nos partenaires. À l’échelle nationale, le Gouvernement travaille en liaison étroite avec la communauté scientifique. À l’échelle européenne, nous sommes en contact permanent avec nos partenaires européens. À l’échelle internationale, nous étudions les mesures à prendre avec l’Organisation mondiale de la santé et les pays les moins avancés, que nous devons aider dans la prévention de la maladie.

Enfin, une gradation des mesures. À chaque étape, nous prévoyons des mesures adaptées qui devront être prises et qui seront graduées en fonction de la menace.

Vous le voyez, c’est un effort de préparation et d’anticipation que nous avons décidé de faire. Le Gouvernement veut apporter une réponse maîtrisée face à cette menace. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. J’ajoute que la mission parlementaire sur la prévention de la grippe aviaire tiendra sa première réunion demain, à dix-sept heures, salle 6550.

lutte contre la pauvreté

M. le président. La parole est à Mme Hélène Mignon, pour le groupe socialiste.

Mme Hélène Mignon. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.

Monsieur le Premier ministre, hier, des rassemblements ont eu lieu en France à l’occasion de la journée du refus de la misère pour sensibiliser l’opinion publique à la pauvreté et à la précarité. Vous avez rapidement répondu à M. Martin Hirsch, qui vous a interpellé durement, mais ce sont de nombreuses structures d’accueil, d’insertion et d’aide au logement qui sont en danger.

Vos décisions, en particulier les nouveaux contrats aidés, laissent aux associations une charge financière trop lourde. Leur rôle dans l’insertion est irremplaçable. Ne prétextez pas un prétendu recul de la pauvreté, prenez en compte le nombre croissant des bénéficiaires du RMI, plus de 200 000 depuis 2001. Les nombreuses radiations du régime d’assurance-chômage que vous avez suscitées viendront en grossir le nombre. Les Restos du cœur sont maintenant fréquentés aussi par des familles intégrées pourtant au monde du travail. La multiplication des emplois précaires conduit au développement d’une nouvelle forme d’insécurité sociale. Les femmes en sont les premières victimes. Un tiers des SDF ont un emploi. N’est-ce pas le comble de la marginalité ?

Au moment où s’ouvre la discussion budgétaire, allez-vous encore multiplier les allégements d’impôts au profit des plus favorisés et ne plus verser les primes pour l’emploi inférieures à trente euros ? Trente euros pour la prime pour l’emploi qui s’ajoutent aux vingt-cinq euros pour l’allocation logement. Évoquons aussi les impôts locaux en augmentation du fait de votre décentralisation. (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) Les 30 % de population la plus pauvre disposent d’un niveau de vie huit fois plus faible que le 1 % des plus riches.

Oui, il faut réagir vite. Qu’allez-vous nous proposer pour nos concitoyens et leurs enfants en grande difficulté ? Quelles conclusions avez-vous tiré du rapport « famille et pauvreté » de Martin Hirsch ? Au possible nous sommes tenus. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité.

Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Madame la députée, les familles en difficulté, les familles qui connaissent la misère ont avant tout besoin d’être écoutées et probablement pas d’être récupérées. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste. – Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Très concrètement, nous devons raisonnablement regarder ensemble quelles solutions nous pouvons apporter.

Il y a tout d’abord la réponse qui a été faite par le Président de la République lui-même dans le message qu’il a adressé hier dans le cadre de la journée de refus de la misère.

Pour la première fois, le 16 septembre dernier, le Premier ministre a présidé le conseil national de lutte contre l’exclusion. Il se réunira à nouveau au printemps prochain. À cette occasion, nous pourrons fixer ensemble des objectifs de réduction de la pauvreté.

Nous devons être capables de répondre rapidement aux besoins, et, dans un premier temps, faire face aux attentes pour cette campagne d’hiver avec, d’abord, un accompagnement financier. Vous citiez les Restos du cœur il y a un instant. Au total, le Gouvernement a prévu une somme de 17 millions d’euros pour accompagner cette année les financements aux associations qui versent des aides alimentaires. Pour le logement d’urgence, il y a plus de 100 000 places disponibles (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), un budget en augmentation de 9 % cette année.

Il y a les chantiers d’insertion, avec 50 000 possibilités d’embauche et d’accompagnement de nos concitoyens les plus éloignés de l’emploi.

Il faut agir, durablement, sur ce qui fonctionne aujourd’hui comme une véritable trappe à pauvreté. Je veux parler bien évidemment de la mobilisation pour l’emploi et de la réforme des minima sociaux que nous proposerons en novembre prochain à l’initiative du Premier ministre.

Il y a enfin l’engagement national pour le logement demandé par le Premier ministre, qui sera présenté dans cette assemblée en novembre prochain.

Voilà des actes, des réponses concrètes (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste),…

Mme Hélène Mignon. C’est du blabla !

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. …parce que nous devons tous être mobilisés sur le sujet de la pauvreté. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

négociations
entre l’union européenne et l’omc

M. le président. La parole est à M. Michel Hunault, pour le groupe Union pour la démocratie française.

M. Michel Hunault. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre et concerne les négociations en cours entre l’Organisation mondiale du commerce et l’Union européenne.

Monsieur le Premier ministre, les déclarations, hier, du commissaire au commerce, M. Mandelson, à un grand journal du soir ne sont pas faites pour nous rassurer. Alors que nous rentrons dans une période d’intenses négociations avant la rencontre à Hong-Kong prévue en décembre prochain qui doit relancer les négociations commerciales entamées en 2001, nous avons appris la semaine dernière qu’un accord envisagerait une baisse considérable des aides à l’agriculture en contrepartie de concessions à nos partenaires commerciaux.

Cette information a jeté la consternation et le doute parce que la politique agricole commune a été réformée il y a à peine deux ans, en juin 2003. C’est pourquoi je vous demande de nous indiquer comment vous comptez à la fois associer et informer la représentation nationale des négociations en cours. Pouvez-vous nous dire quel mandat vous avez donné réellement à Mme la ministre déléguée au commerce extérieur et à votre ministre des affaires étrangères ? Enfin, pouvez-vous nous certifier que la défense des intérêts français est au cœur du mandat des représentants du Gouvernement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.

M. Thierry Breton, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Comme vous le savez, monsieur le député, s’est tenue ce matin, à la demande du Gouvernement français et du Président de la République, une réunion spéciale des ministres des affaires étrangères dite réunion des affaires générales, à Bruxelles.

Je viens d’avoir les dernières informations (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste)

M. Yves Durand. Quelle coordination !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. ...puisque Philippe Douste-Blazy vient de me faire part de ce qui s’est passé au cours de cette réunion à laquelle assistaient quatre ministres du Gouvernement.

La France vient d’obtenir la création d’une commission mixte formée de membres de la Commission et d’experts indépendants chargée de contrôler le mandat et les engagements de M. Mandelson.

C’est un sujet prépondérant et vital pour notre pays. La PAC a en effet été renégociée en 2003. Il ne s’agit pas de la changer. Elle a été adoptée à l’unanimité des États membres. La France veillera bien évidemment à ce que ce vote soit respecté.

Il est vrai qu’il faut avoir une position offensive sur les services et sur l’industrie, mais certainement pas au détriment de la politique agricole commune.

Au moment où la sécurité alimentaire devient un sujet majeur dans le monde, je pense que tous ceux qui ont pensé un peu rapidement que le fait d’avoir une vraie politique agricole était un peu ringard reviennent maintenant sur leur position en voyant ce qui se passe. La sécurité alimentaire a un prix, c’est la politique agricole commune. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

hausse des loyers

M. le président. La parole est à M. Jacques Desallangre, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.

M. Jacques Desallangre. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. J’y associe ma collègue Janine Jambu.

Le pouvoir d’achat des Français continue de s’effondrer, le nombre de RMIstes progresse de 4 %, les effectifs des travailleurs pauvres et précaires explosent, les loyers flambent. L’ensemble des locataires ont subi ou risquent de subir une hausse de 4,8 % de leur loyer par l’application de revalorisations fondées sur l’indice du coût de la construction. Une telle augmentation de plus 300 % supérieure à l’inflation hors tabac est sans précédent dans notre pays depuis vingt ans.

Les ménages français non-propriétaires touchant moins de 50 000 euros pour un couple – soit la majorité d’entre eux, même s’ils ne sont pas votre clientèle – verront leur premier poste de dépenses s’accroître de 5 %. Comment les plus modestes pourront-ils supporter cette charge supplémentaire, si ce n’est en s’endettant toujours davantage car à certain niveau de revenus les dépenses ne sont plus compressibles. Certaines dépenses vitales ne cessent d’augmenter : GDF, depuis sa privatisation, n’a-t-il pas annoncé une hausse de 17 % de ses tarifs alors même que ses bénéfices augmentaient de 13 % ? Expliquez-nous, monsieur le ministre, comment les familles à revenus modestes ou moyens pourront supporter de telles augmentations, certes légales au regard du droit, mais illégitimes au regard de la grave détresse de ceux qu’elles vont frapper. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement.

M. Jean-Pierre Brard. Merlin l’enchanteur !

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Monsieur le député, je ne suis pas sûr que vous ayez osé aller au bout de votre question. Nous avons hérité de cette crise du logement ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Il y a cinq ans, ce pays construisait moins de 270 000 logements par an, nous en ferons 400 000 cette année.

Il y a cinq ans, ce pays…

M. Jean Glavany. Notre pays !

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. …notre pays proposait moins de 40 000 logements sociaux, nous en financerons 77 000. Par ailleurs, nous modifierons d’ici à trois semaines, l’indice du coût de la construction, afin d’y intégrer le coût de la vie, ce qui nous paraît plus juste.

M. Henri Emmanuelli. Parlez-nous de l’APL !

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Ainsi, nous pourrons suivre l’augmentation réelle du prix des logements et sortir de la très grave crise du logement que vous nous avez laissée. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.- Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Squats

M. le président. La parole est à M. Alain Suguenot, pour le groupe de l’UMP.

M. Alain Suguenot. Monsieur le ministre d’État, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire, après la série d’incendies qui a provoqué la mort de plusieurs dizaines de personnes, en particulier des enfants, certains des habitants d’immeubles insalubres ont été contraints de quitter leur domicile. Au-delà de l’émotion légitime que ces incendies ont suscitée, c’est la question de l’existence des squats qui a été posée. Vous avez d’ailleurs pris les mesures d’urgence qui s’imposaient en faisant évacuer les immeubles les plus insalubres.

Sans revenir sur les problèmes de l’immigration clandestine et sur ses conséquences parfois dramatiques, je rappelle que les consignes les plus élémentaires de sécurité s’imposent à tous. On ne peut en effet tolérer que la vie de nos concitoyens soit mise en péril parce que certains refusent d’assumer leurs responsabilités.

L’Assemblée nationale vient légitimement d’imposer la présence obligatoire de détecteurs de fumée dans tous les logements d’habitation, mais des zones de non-droit existent encore sur le territoire national.

Monsieur le ministre, quelles mesures comptez-vous prendre pour endiguer l’insécurité consécutive aux squats et à ces réquisitions d’immeubles, souvent sans respect des droits de chacun, tout en assurant la sécurité et le relogement de familles souvent en plein désarroi ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire.

M. Nicolas Sarkozy, ministre d’État, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire. Monsieur le député, entre avril et août 2005, Paris a connu trois drames qui ont fait une cinquantaine de morts, dont quinze enfants, tous d’origine africaine. Tous nous avons été bouleversés par ce qui s’est passé. Comment est-ce possible en 2005 dans la capitale de la France ?

Il existe des dizaines de squats de cette nature.

Mme Martine Billard. Ce ne sont pas des squats !

M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire. Qui peut penser que ne rien faire serait le meilleur moyen d’assurer la sécurité de ceux qui les habitent dans des conditions scandaleuses et qui sont soumis à des exploiteurs qui leur prennent le peu d’argent qu’ils ont ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Maxime Gremetz. Démago !

M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire. Ministre de l’intérieur, je ne peux tolérer de telles situations en plein Paris. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) J’ai donc demandé au préfet de police, comme à tous les préfets de France, d’évacuer tous les squats…

M. Claude Goasguen. Très bien !

Mme Martine Billard. Ce n’était pas des squats !

M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire. …afin de ne pas laisser sans suite les avis des commissions de sécurité. (Protestations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Maxime Gremetz. C’est démago !

M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire. Quand une commission de sécurité déclare un immeuble insalubre personne n’a le droit d’y résider ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Maxime Gremetz. Et à Neuilly, que faites-vous ?

M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire. Les squats doivent donc être évacués, pour ceux qui y habitent et dont la santé est en danger, pour les voisins, qui n’ont pas à accepter cela (« Neuilly ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains) et pour que la loi soit respectée.

M. Maxime Gremetz. Et Neuilly ?

M. le président. Monsieur Gremetz !

M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire. Si des propositions de relogement ont été faites à toutes les personnes évacuées, ce n’est néanmoins pas parce que l’on n’a pas de papiers et qu’on occupe un squat qu’on a le droit à un logement HLM à la place de ceux qui attendent depuis des années en respectant la loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Cela me conduit à dire que la politique d’immigration de la France doit être choisie et non plus subie. Nous ne pouvons plus accueillir sur notre territoire des femmes et des hommes à qui nous ne pouvons plus garantir la dignité à laquelle ils ont le droit. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Ceux qui ont laissé faire se sont acheté une fausse générosité sur le dos des plus pauvres et c’est inadmissible. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Levée du secret dÉfense dans l’affaire Bernard Borrel

M. le président. La parole est à Mme Bernadette Païx, pour le groupe de l’UMP.

Mme Bernadette Païx. Ma question s’adresse à Mme la ministre de la défense.

Le 19 octobre 1995, Bernard Borrel, magistrat français détaché auprès du gouvernement de Djibouti, trouvait une mort violente et dans des circonstances qui doivent encore être éclaircies.

Une information judiciaire a été ouverte au tribunal de grande instance de Paris et le magistrat saisi a procédé à de nombreuses investigations, en France et à Djibouti.

Mme Élisabeth Borrel, qui défend de manière admirable la mémoire de son mari, s’est portée partie civile et a récemment indiqué vouloir obtenir la levée du secret de la défense nationale qui s’appliquerait à divers documents établis par des services du ministère de la défense.

Madame la ministre, quelle réponse entendez-vous apporter à cette demande ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de la défense.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense. Madame la députée, la mort de notre compatriote le juge Borrel, il y a bientôt dix ans à Djibouti, est un événement tragique, et je tiens ici à exprimer à son épouse et à ses enfants la compassion du Gouvernement et la mienne.

J’ai en effet été sollicitée à deux reprises par le juge d’instruction chargé des investigations pour déclassifier des documents rédigés par les services de renseignement du ministère de la défense. La commission consultative du secret défense a donc été saisie. Cette commission indépendante, présidée par un haut magistrat et composée notamment de parlementaires, a estimé que vingt-trois documents présentaient un rapport direct avec les faits. J’ai déclassifié l’intégralité de ces documents.

De plus, le chef d’antenne de la DGSE, en poste à Djibouti au moment des faits, a pu être entendu en qualité de témoin par le magistrat instructeur.

J’ai tenu, dans ce dossier comme dans les trente-deux autres qui m’ont été soumis par l’autorité judiciaire depuis ma nomination, à apporter l’entier concours de mon ministère à la recherche de la vérité, conformément à la loi, au droit et à la légitime attente des victimes. Soyez assurée que ce sera toujours mon attitude. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Remplacement des professeURs absents

M. le président. La parole est à M. Frédéric Reiss, pour le groupe de l’UMP.

M. Frédéric Reiss. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Lors du débat sur la loi d’orientation pour l’avenir de l’école, au printemps dernier, le remplacement des absences inférieures à quinze jours dans les établissements du second degré a été largement discuté. Le nouveau dispositif, que vous mettez progressivement en place au cours de cette année scolaire, vise à assurer la continuité de l’enseignement ainsi que la qualité du service public de l’éducation.

Lors de votre récente audition par la commission des affaires culturelles, familiales et sociales à propos de la situation des maîtres d’établissements privés sous contrat, vous avez été interpellé au sujet des remplacements de courte durée, remplacements que pratiquent naturellement les établissements privés sous contrat. Vous avez expliqué votre méthode, fondée pour le moment sur le volontariat et l’incitation, en précisant que, contrairement à ce qui a pu être dit, le remplaçant exercera dans sa propre discipline.

La mobilisation que les syndicats espéraient contre ce dispositif a été faible, ce qui témoigne du sens des responsabilités des enseignants, conscients de gagner en crédibilité par une organisation plus rationnelle de l’acte d’enseigner.

Pourriez-vous, monsieur le ministre, rendre compte à la représentation nationale…

M. Christian Bataille. Allô ! Allô !

M. Frédéric Reiss. …six semaines après la rentrée, de cette mesure de bon sens, plébiscitée notamment par l’ensemble des parents d’élèves. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Michel Delebarre. Voilà une question spontanée !

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.

M. Gilles de Robien, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Je pense donner satisfaction à l’excellent rapporteur que vous avez été (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) lors de la présentation de la loi d’orientation, monsieur Reiss. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

L’application du décret sur les remplacements se met bien en place. Il ne se passe pas un jour sans que je reçoive au ministère des protocoles émanant de collèges ou de lycées, ce qui prouve que cette mise en place se fait dans les meilleures conditions possibles. J’étais hier en Haute-Loire, au collège du Monastier-sur-Gazeille, où là encore, devant une communauté éducative tout à fait responsable, j’ai constaté combien ce dispositif est appliqué dans la concertation et à la plus grande satisfaction notamment des parents d’élèves.

Reste qu’un certain nombre d’inconvénients sont parfois mis en avant.

Certains reprochent à ce dispositif de viser à assurer une simple garderie. Non seulement cette affirmation est fausse, mais de plus elle révèle un grand mépris pour les professeurs, pour ceux qui assurent des remplacements depuis des années, comme pour ceux qui s’apprêtent à le faire dans le cadre du dispositif en question.

D’autres disent qu’assurer ainsi un remplacement « au pied levé » se fait nécessairement au détriment de la qualité. je rappelle qu’il s’agit des absences prévisibles, qui représentent les deux tiers des absences. Quand l’absence d’un enseignant est prévisible, on peut s’organiser en toute sérénité pour assurer son remplacement dans de bonnes conditions. (« Très bien ! » sur quelques bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Si j’utilise ce mot de « sérénité », c’est parce qu’on m’a souvent objecté que je risquais d’instaurer un mauvais climat au sein de la communauté éducative en instituant cette obligation de remplacement. C’était précisément le défaut remplacement qui installait souvent le malaise entre les enseignants et les parents, voire les élèves. Tout au contraire notre dispositif introduira de la sérénité dans leurs relations.

On me dit enfin que ce dispositif constitue une charge insupportable. Comme vous le savez, monsieur le rapporteur, c’est pour éviter cela qu’on a plafonné cette obligation à cinq heures par semaine, à soixante heures par an ; et il s’agit d’un plafond, et non d’un objectif.

Chacun doit prendre ses responsabilités : le législateur a assumé les siennes, tout comme le ministre. Je ne doute pas un instant que les professeurs prendront leurs responsabilités, attachés qu’ils sont à la qualité du service public et à l’égalité des chances. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

réforme de la fiscalité

M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux, pour le groupe socialiste. (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le Premier ministre, votre ministre de l’intérieur se moque du monde : on dirait qu’il vient de prendre ses fonctions ! Il oublie qu’il est au Gouvernement depuis trois ans et demi !

La réponse qu’il vient de faire à ma collègue Hélène Mignon prouve à quel point la lutte contre la pauvreté et la misère est loin de vos préoccupations. Il est vrai que les vôtres sont bien différentes. (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Pierre Brard. c’est le mariage de Delphine Arnault qui préoccupe nos ministres !

M. Augustin Bonrepaux. Votre priorité est d’accorder vos faveurs aux privilégiés redevables de l’impôt sur la fortune. Pour eux, vous ne manquez pas d’imagination ! Après les allégements que votre majorité a votés en 2003, vous inventez maintenant le bouclier fiscal, pour pouvoir distribuer 250 millions d’euros aux 10 000 personnes les plus riches. (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Cela représente un cadeau fiscal de plus de 2 000 euros par mois, soit plus de 13 500 francs par mois, fait à ces privilégiés. (Même mouvement.)

Dans le même temps, vous n’accordez que 4,73 euros par mois aux 8,8 millions bénéficiaires de la prime pour l’emploi. N’avez-vous pas honte ? (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. -Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Et votre majorité veut aller encore plus loin à l’occasion du débat budgétaire, avec un amendement qui prévoit que les salariés actionnaires pourront bénéficier d’une exonération de 75 % de l’impôt sur la fortune. (Protestations et claquements de pupitres sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Nous savons tous qui sont ces salariés très peu nombreux (Claquements de pupitres sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire) : …

M. le président. Monsieur Degauchy, arrêtez de faire claquer votre pupitre !

M. Augustin Bonrepaux. …ce sont les dirigeants des grandes entreprises. (Exclamations et claquements de pupitres sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Lucien Degauchy. La question !

M. le président. Monsieur Degauchy, ça suffit !

M. Augustin Bonrepaux. M. Thierry Breton ne pouvait choisir de meilleur moment que celui de la semaine de la pauvreté…

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. La question !

M. Augustin Bonrepaux. …au moment où l’INSEE nous confirme que plus de trois millions de personnes en France vivent sous le seuil de la pauvreté.

M. Richard Cazenave. Ça ne date pas de 2002 !

M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le Premier ministre, vous qui n’avez de cesse de dire que vous comprenez le découragement et la colère des Français (« La question ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire),…

M. le président. Posez votre question, monsieur Bonrepaux !

M. Augustin Bonrepaux. …plutôt que de leur faire croire que la réforme de l’ISF n’est pas votre priorité (Claquements de pupitres sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire),…

M. Thierry Mariani. La question !

M. le président. Monsieur Mariani, taisez-vous !

M. Augustin Bonrepaux. …pouvez-vous leur dire si, oui ou non, vous soutenez un tel amendement,…

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. Oui !

M. Augustin Bonrepaux. …si oui ou non l’impôt sur la fortune va encore être révisé à la baisse ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. – Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État.

M. Jean-Pierre Brard. Il y était, au mariage de Delphine ! Les photos sont dans Paris Match !

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le député, la réforme fiscale qu’avec Thierry Breton nous allons présenter devant vous au cours de ces prochaines semaines répond à trois objectifs.

Son premier objectif est de renforcer l’attractivité et la compétitivité de la France, parce que ce sont nos emplois et nos investissements qui en dépendent. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Albert Facon. Vous dites ça à chaque fois, et elles n’en sortent jamais renforcées !

M. Augustin Bonrepaux. Pourquoi ne pas permettre aux pauvres gens de consommer ? C’est cela qui crée de l’emploi !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Son deuxième objectif est la simplicité : il faut simplifier notre système fiscal. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Son troisième objectif, le plus important, monsieur Bonrepaux, c’est la justice. (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. – Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Albert Facon. Il ose dire cela !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. En effet, cette réforme fiscale vise d’abord à abaisser l’impôt des Français modestes qui travaillent,…

M. Jean-Pierre Brard. Delphine Arnault !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. …que ce soit en doublant la prime pour l’emploi, ou en faisant d’abord bénéficier nos compatriotes qui travaillent de la baisse de l’impôt sur le revenu.

M. Augustin Bonrepaux. C’est faux !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. La justice, c’est aussi d’instaurer dans notre pays un plafonnement, comme cela se fait dans tous les pays modernes : aucun Français n’acquittera un impôt dépassant 60 % de ses revenus, tous impôts confondus, monsieur Bonrepaux, y compris les impôts locaux. Sachez que 90 % des bénéficiaires de cette mesure seront des Français modestes, dont le revenu se situe dans la première tranche du barème d’imposition.

M. Augustin Bonrepaux. Ce n’est pas vrai !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Vous, monsieur Bonrepaux, qui passez votre temps à opposer les Français les uns aux autres,…

M. Jean-Pierre Brard. Alors que Delphine Arnault les réunit par son mariage !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. …je veux vous dire que chaque Français a de la valeur.

M. Jacques Desallangre. Pas la même à vos yeux !

M. Jean-Pierre Brard. les Françaises vous attendent à leur mariage !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Celui qui aujourd’hui, par le produit de son travail, contribue au développement de notre pays…

M. Jean-Pierre Brard. Mme Bettencourt ?

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. …doit être entendu.

Je veux vous dire enfin que le temps des polémiques sur l’impôt sur le patrimoine est terminé. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Ce qui compte, c’est de s’assurer que notre fiscalité n’est en rien un frein, ni à l’emploi ni à l’investissement dans notre pays.

Et puisque vous en parlez tant, j’ai gardé le meilleur pour la fin. Un député de votre parti a écrit un jour : « l’ISF a des effets pervers qui incitent de nombreux contribuables à délocaliser leur fortune ou leur patrimoine professionnel au détriment de l’emploi : il faut agir ». Ces mots, qui sont de Didier Migaud, montrent que cette question dépasse très largement les clivages. (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Seul compte l’intérêt de la France et de son économie. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

avenir des lignes corail

M. le président. La parole est à M. Yves Deniaud, pour le groupe de l’UMP.

M. Yves Deniaud. Monsieur le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer, certains présidents de conseil général, qui ne se privent pourtant pas de dépenser hors de leur champ de compétences et de mener grand train de vie, ont organisé la contestation tapageuse d’une prétendue fermeture de grandes lignes ferroviaires, rebaptisées maladroitement, il est vrai, trains d’intérêt régional par la SNCF, telles Caen-Tours, Nantes-Lyon ou Nantes-Bordeaux. À les en croire, on aurait fermé purement et simplement ces lignes : plus aucun train n’aurait circulé et on aurait fermé les gares. Il y a une variante : on aurait chargé la mule des conseils régionaux d’un nouveau bât fiscal, pour acquitter des dépenses qui devraient être assumées par l’État.

La réalité est tout autre, et vous avez fait justice, monsieur le ministre, de tels propos. Il serait bon cependant de réaffirmer solennellement devant la représentation nationale que, bien loin d’être favorable à la fermeture de ces lignes, le Gouvernement a la volonté d’œuvrer pour leur modernisation, qu’il s’agisse de l’infrastructure ou du matériel roulant. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Jacques Desallangre. Où sont les crédits pour la SNCF ?

M. le président. La parole est à M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer.

M. Dominique Perben, ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Dans cette affaire, monsieur Deniaud, je ne suis sensible qu’à l’intérêt des usagers, et non à la polémique que, tirant parti de la période estivale, traditionnellement creuse, certains ont organisée.

La baisse continue de la fréquentation des lignes Corail pose effectivement question. Nous voulons donc que ce service soit mieux articulé avec les trains régionaux et les trains à grande vitesse. J’ai demandé à la SNCF de reprendre les discussions avec les présidents de région – ce qu’elle a fait – pour qu’on arrive à une offre de services qui satisfasse celles et ceux qui ont besoin du train pour leurs déplacements professionnels ou de loisirs.

C’est ainsi que nous sommes arrivés à ce que je crois être un accord équilibré. Aux termes de cet accord la SNCF, comme je l’ai souhaité, ne supprimera aucune ligne Corail ; deuxièmement, elle réinvestira plus de 130 millions d’euros dans l’amélioration de ce type de liaison ; troisièmement, elle mettra à la disposition de certaines régions divers matériels de trains régionaux, pour assurer le même service que précédemment, à la charge de la SNCF.

Nous sommes donc parvenus à un dispositif « gagnant-gagnant », qui a pour seul objectif de maintenir la qualité du service public fourni aux usagers. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

ouverture du capital d’EDF

M. le président. La parole est à M. François Brottes, pour le groupe socialiste.

M. François Brottes. Le suspense est insoutenable pour les Français, monsieur le Premier ministre, depuis que vous leur avez déclaré que le Père Noël ne pouvait passer tous les moyens. Je peux vous dire en confidence que ceux qui ne paient pas l’impôt sur la fortune s’en rendent compte tous les jours. C’est ce que tout à l’heure, monsieur Copé, vous appeliez sans pudeur la justice. À ce propos, monsieur Copé, rien ne vous autorise à travestir les propos de Didier Migaud, d’autant que celui-ci ne peut pas lui répondre. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Pour les Français, monsieur le Premier ministre, le suspense est insoutenable, parce qu’ils ne savent pas encore jusqu’où vous leur demanderez de remplir votre hotte. Le prix du timbre sera-t-il augmenté pour payer la soulte de la Poste à l’État ?

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. Caricature !

M. François Brottes Le tarif des autoroutes sera-t-il doublé, pour permettre aux heureux lauréats de la privatisation de payer leur acquisition ? (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Devront-ils subir l’augmentation des tarifs de l’énergie, qui va de pair avec la fin des monopoles et du service public ?

M. Richard Cazenave. Caricature !

M. François Brottes. Devront-ils acheter des actions au titre du capitalisme populaire, cette arnaque géniale qui consiste à faire payer aux Français ce qui leur appartient déjà ?

Plusieurs députés du groupe socialiste. Très juste !

M. François Brottes. Pour les Français le suspense est insoutenable, car ils ne savent pas si l’épisode douloureux de la SNCM vous donne mauvaise conscience et vous engage à renoncer à privatiser EDF ? (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Pour les Français le suspense est insoutenable, car ils savent que si c’est la seule logique du profit qui guide les pas des gestionnaires des centrales nucléaires et des barrages, c’est leur sécurité qui risque d’être mise en péril.

Monsieur le Premier ministre, vous savez que cette belle entreprise publique qu’est EDF dégage des résultats remarquables, qui lui permettent d’investir. Vous savez qu’au prétexte d’augmenter son capital en privatisant, vous allez lui demander de changer de logique.

L’énergie est vitale pour nos concitoyens et pour nos entreprises. Rien ne vous oblige, monsieur le Premier ministre, a emboîter le pas de M. Sarkozy, alors ministre de l’économie, et à imposer une ouverture du capital d’EDF strictement idéologique et financière.

Monsieur le Premier ministre, il n’y a pas que l’argent dans la vie. La sécurité des Français, leur droit à s’éclairer et se chauffer dans des conditions acceptables pour tous est un droit républicain, que l’État doit absolument garantir.

Monsieur le Premier ministre, pour les Français le suspense est insoutenable (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire) : …

M. Richard Cazenave. On a compris !

M. Lucien Degauchy. C’est lourdingue !

M. François Brottes. …aurez-vous la lucidité de renoncer à la privatisation d’EDF ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. – Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.

M. Jean-Pierre Brard. Lui aussi était au mariage de Delphine !

M. Albert Facon. Dites-nous plutôt quel ministre n’y était pas !

M. Thierry Breton, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Monsieur le député, un peu de retenue tout de même ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Je sais en effet que vous connaissez mieux que quiconque dans cette assemblée la situation de l’entreprise EDF. C’est une très belle entreprise française, comme vous l’avez rappelé à juste titre, avec huit milliards d’euros de fonds propres – ça vous rappelle sans doute quelque chose, monsieur le député ? – mais dix-neuf milliards d’euros de dettes – cela vous rappelle aussi sans doute quelque chose, car on a déjà connu ça, monsieur le député.

M. Jean Glavany. C’est un comble ! Vous êtes mal placé pour faire la leçon !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Aujourd’hui, vous le savez mieux que quiconque, cette entreprise n’a pas les moyens d’aller au-delà de ce qui est nécessaire pour la France. Il faut, comme l’a dit le Premier ministre, donner à cette entreprise les moyens de se développer et d’investir sur le territoire national, pour garantir et renforcer notre indépendance énergétique.

Vous le savez d’autant mieux que ce débat a déjà eu lieu dans cet hémicycle, mesdames et messieurs les députés, et qu’un vote est intervenu. Alors quoi ? On ne respecte plus la loi maintenant ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean Glavany. Ça vous va bien de dire ça !

M. Henri Emmanuelli. Pas vous, monsieur Breton !

M. le président. Ça suffit, monsieur Emmanuelli !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Cette loi a précisément été votée pour donner à EDF les moyens de son développement.

Comme l’a dit le Premier ministre dans son discours de politique générale, il faut absolument qu’EDF aille de l’avant. Cela suppose une augmentation de son capital : il ne s’agit pas, comme vous l’avez fait pour les autoroutes, de vendre des actions pour assurer les fins de mois ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Deux éléments restent encore à vérifier : d’abord – point très important sur lequel vous insistez à juste titre –, les délégations et les missions de service public – la vérification sera bientôt achevée ; ensuite, la capacité d’investissement d’EDF et les moyens nécessaires pour permettre à notre pays non seulement de maintenir son indépendance énergétique, mais aussi de la développer. Voilà la vérité.

M. Henri Emmanuelli. Vous n’êtes pas crédible !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Cette opération se fera lorsque les marchés le permettront. En effet, 5 milliards d’euros, voire 6 ou 7 milliards, ce sont des montants très importants.

M. Henri Emmanuelli. Bouchez donc les trous !

M. Richard Mallié. Ce sont les trous que vous avez faits !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Nous n’attendrons pas la veille pour vous prévenir, mais nous le ferons lorsque cela sera nécessaire pour l’entreprise, c’est-à-dire bientôt. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Contrat « nouvelles embauches »

M. le président. La parole est à M. Hugues Martin, pour le groupe de l’UMP.

M. Hugues Martin. Monsieur le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement, le Gouvernement est résolu à mener la bataille pour l’emploi. Pour ce faire, il a lancé un grand plan de cohésion sociale et décidé, il y a quelques mois, de mobiliser moyens et acteurs avec le plan d’urgence pour l’emploi. Ces deux grands chantiers comportent toute une série de mesures, dont le contrat « nouvelles embauches », destiné à simplifier le recrutement par les entreprises qui doivent absorber un surcroît d’activité mais hésitent à embaucher, faute d’une visibilité suffisante quant à leur potentiel de développement.

Ce contrat, qui relève d’une procédure d’embauche simple et souple, est adapté aux très petites entreprises, soit deux millions et demi de structures en France. Il s’agit d’un contrat « gagnant-gagnant », car il est pour l’entreprise une incitation à se développer et pour le salarié le gage d’une insertion durable dans l’entreprise et dans l’emploi.

Le Premier ministre a annoncé jeudi dernier que le cap des 100 000 contrats « nouvelles embauches » avait été franchi – dont de nombreux signés à Bordeaux. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Pouvez-vous, monsieur le ministre, faire le point sur le nombre de contrats « nouvelles embauches » conclus par les entreprises de moins de vingt salariés depuis la mise en place de ce dispositif et nous confirmer que celui-ci répond bien aux attentes des entreprises et des demandeurs d’emploi ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement.

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Monsieur le député, le Premier ministre avait indiqué dans son discours de politique générale sa volonté de lever tous les freins à l’emploi. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Le contrat « nouvelles embauches » et l’ensemble des incitations au retour à l’emploi vont dans ce sens. La mise en place de ce contrat a été rapide : le premier a été signé le 4 août.

À défaut de pouvoir vous indiquer la répartition géographique de ces contrats « nouvelles embauches » – combien à Bordeaux ? à Toulouse ? à Lille ? –, je puis au moins vous dire que, du 4 août au 30 septembre, un peu plus de 30 000 ont été signés et, selon l’ACOSS, 75 000 autres environ au cours du dernier mois, ce qui dépasse légèrement le chiffre de 100 000 contrats cité par le Premier ministre.

Mais le plus important, monsieur le député, c’est le phénomène de déclenchement que nous espérons provoquer en faveur de l’emploi auprès des toutes petites entreprises grâce au chèque emploi pour les très petites entreprises et à ces procédures simplifiées. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Or, il semble bien que ce déclenchement soit en train de se produire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

recouvrement
de la redevance audiovisuelle

M. le président. La parole est à M. Luc-Marie Chatel, pour le groupe de l’UMP.

M. Luc-Marie Chatel. Monsieur le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État, dans le cadre du débat budgétaire qui débute aujourd’hui, le Gouvernement va présenter une réforme fiscale majeure pour notre pays.

Plusieurs députés du groupe des député-e-s communistes et républicains. Et comment !

M. Luc-Marie Chatel. Cette réforme répond, comme vous l’avez indiqué, à un triple objectif de simplicité, de lisibilité et de justice. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Plusieurs députés du groupe socialiste. Et l’ISF ?

M. Luc-Marie Chatel. Elle s’inscrit dans la continuité de la réforme du prélèvement de la redevance audiovisuelle votée ici même l’an dernier. En effet, la redevance audiovisuelle est désormais adossée à la taxe d’habitation, ce qui a permis une rationalisation du recouvrement de ces deux taxes et un redéploiement des agents des impôts vers d’autres missions, ce qui se traduit par une baisse du coût du recouvrement de cet impôt pour le contribuable. On peut également citer parmi les avantages de cette réforme la diminution des fraudes et les économies de frais d’envoi de la redevance.

Monsieur le ministre, au moment où les Français reçoivent leur avis d’imposition pour la taxe d’habitation et la redevance audiovisuelle, pouvez-vous nous rappeler les principes de mise en œuvre de ce dispositif et répondre aux interrogations de certains de nos concitoyens qui craignent de devoir payer deux fois cette redevance en 2005 ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État.

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement. Monsieur Chatel, cette réforme est très emblématique de ce que nous voulons faire en matière de réforme de l’État.

M. Maxime Gremetz. Ah ! ça, oui !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Comme vous l’avez rappelé, cette réforme a été engagée l’an dernier par Nicolas Sarkozy et vise à remédier à une situation que nous dénonçons tous depuis très longtemps, en faisant en sorte que plusieurs services gérant des impôts puissent faire preuve d’une plus grande efficacité au service du contribuable. L’idée est simple : faire figurer sur la même feuille la taxe d’habitation et la redevance audiovisuelle.

Ce système est en place à partir de cette année. Vous soulignez très justement que, pour présenter une réforme nouvelle, il faut faire œuvre de pédagogie sur un plan très pratique. Je vous le confirme et j’ai donné des instructions pour que nos collaborateurs de la Direction générale des impôts fassent passer le message, sur le terrain, à l’ensemble des contribuables : il ne s’agit évidemment pas de payer deux fois la redevance ! Celle qui a été payée à la fin de 2004 ou au début de 2005 l’a été au titre de 2005 ; celle qui sera payée cette année en même temps que la taxe d’habitation porte sur les douze prochains mois.

Cette réforme est donc une réforme « gagnant-gagnant », qui institue un dispositif beaucoup plus simple pour le contribuable. Elle représente aussi un symbole de la modernisation de l’État, en un temps où les Français attendent précisément du Gouvernement qu’il modernise l’État au service de l’intérêt général. Nous y travaillons ensemble. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à quinze heures cinquante, est reprise à seize heures vingt.)

M. le président. La séance est reprise.

Loi d’orientation agricole

Explications de vote et vote
sur l’ensemble d’un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle les explications de vote et le vote, par scrutin public, sur l’ensemble du projet de loi d’orientation agricole.

Je rappelle qu’en application de l’article 54, alinéa 3, de notre règlement, le temps de parole ouvert aux orateurs de chaque groupe est limité à cinq minutes.

Explications de vote

M. le président. Dans les explications de vote, la parole est à M. François Sauvadet, pour le groupe UDF.

M. François Sauvadet. Je regrette que le ministre de l’agriculture et de la pêche ne soit pas là,…

M. Jean-Pierre Brard. Mais le ministre délégué aux relations avec le Parlement est présent, et il a des racines agricoles !

M. François Sauvadet. …mais il devrait nous rejoindre. C’est à lui que j’aurais aimé tout spécialement m’adresser au moment du vote de cette loi d’orientation agricole. Nous arrivons au terme de près de deux semaines de discussions. Nous avons eu des débats nourris, utiles, qui ont permis de faire évoluer ce texte, qui avait suscité au départ, il faut bien le dire, de nombreuses interrogations de notre part.

Ainsi, comme l’avaient relevé le président de la commission des affaires économiques et le rapporteur, un tiers des articles du projet de loi initial renvoyait à des ordonnances. Or vous savez la prévention que nous avons à l’égard de cette procédure, monsieur le président. Nous étions nombreux sur ces bancs à vouloir débattre de sujets aussi essentiels que les nouveaux droits du fermage, les signes de qualité, la protection sociale des non salariés, la valorisation des débouchés agricoles et forestiers, la sécurité sanitaire. Sur tous ces sujets, le ministre a accepté, comme nous le lui suggérions, de renoncer aux ordonnances et un débat est intervenu.

La déclaration d’urgence suscitait aussi de notre part beaucoup de prévention car il s’agit d’une loi destinée à établir les grandes orientations de l’agriculture pour les vingt prochaines années. Le ministre de l’agriculture a fait preuve – monsieur le ministre délégué aux relations avec le Parlement, vous le lui répéterez – d’une véritable volonté de laisser le débat très ouvert. Il a renoncé aux ordonnances et il a laissé le débat se dérouler. Ce débat a d’ailleurs été plus long que ne le prévoyait l’ordre du jour, puisqu’il s’est prolongé cette semaine, ce qui était bien nécessaire.

Parmi les avancées, il y a tout d’abord le fonds agricole et le bail cessible. Nous avions souhaité pouvoir préciser les contours fiscaux de ce fonds agricole, qui suscitait beaucoup d’interrogations de notre part. Avec Marc Le Fur et Charles Amédée de Courson, nous avons réussi à préciser les choses. Le fonds agricole est devenu optionnel – comme nous le souhaitions –, ce qui évitera des risques qui avaient été soulignés notamment dans la profession viticole.

Nous avons également eu un vrai débat sur les biocarburants. Le groupe UDF était également très engagé sur cette question, et je me réjouis de voir que nous avons inscrit dans la loi l’objectif d’introduire, à l’horizon 2015, 10 % de biocarburants dans les carburants. Je trouve que c’est une bonne mesure. Monsieur le ministre de l’agriculture et de la pêche – et je salue votre arrivée –, ce que nous souhaitons maintenant, c’est que le Gouvernement soit au rendez-vous des objectifs que nous avons fixés en matière d’introduction des biocarburants. Nous vous l’avons dit, cela ne pourra se faire sans un dispositif fiscal adapté. De ce point de vue, il faudra que le Gouvernement fasse preuve de beaucoup de cohérence.

Le groupe UDF regrette, en revanche – mais le débat sera rouvert par Jean Dionis du Séjour –, que l’utilisation des huiles végétales pures en tant que carburant n’ait pu être consacrée, même si je reconnais que nous avons avancé positivement. (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Parmi les autres avancées, je soulignerai le très bon amendement, relevé d’ailleurs par la presse, visant à interdire l’utilisation des sacs plastiques qui ne sont pas biodégradables. J’espère que le Gouvernement tiendra bon, car leur interdiction à l’horizon 2010 constituera une bonne nouvelle pour tous ceux qui, comme nous, se préoccupent des questions d’environnement.

Je mentionnerai encore deux points positifs.

En matière d’organisation de producteurs, vous avez accepté, monsieur le ministre, de prendre en compte la spécificité de l’élevage bovin, notamment de reconnaître la nécessité d’une meilleure organisation de la production face à la concentration à laquelle on assiste dans le secteur de la distribution. Vous avez ainsi adressé un signe aux associations, qui contribuent, comme vous le savez, à la transparence des marchés. C’est une avancée que nous tenions à saluer.

M. René Couanau. Très bien !

M. François Sauvadet. Enfin, concernant les signes de qualité, nous nous étions élevés contre le recours aux ordonnances sur un sujet touchant directement les consommateurs. Nous avons pu débattre de ce sujet ; là encore, cela nous paraît plutôt positif. (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Pour toutes ces raisons, monsieur le ministre, même si nous avons conscience qu’elle ne répondra pas à toutes les préoccupations des agriculteurs, particulièrement à celles qui ont trait aux négociations dans le cadre de l’OMC et à la politique agricole commune, nous voterons cette loi d’orientation agricole. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française. – Exclamations et vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Voyez-y, monsieur le ministre, comme une sorte d’encouragement pour vos collègues à laisser le débat s’organiser et à entendre l’UDF.

Mme Brigitte Barèges, rapporteure pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République. Ça dépend qui !

M. François Sauvadet. Lorsque vous nous entendez, vous voyez que cela peut marcher, monsieur le ministre.

M. le président. Monsieur Sauvadet, je vous prie de conclure.

M. François Sauvadet. Je vais terminer, monsieur le président.

Monsieur le ministre, je voudrais vous rendre extrêmement attentif à deux domaines sur lesquels nous aurons de nouveaux rendez-vous avec vous.

Le premier, c’est celui de l’enseignement agricole.

M. François Rochebloine. Ah oui !

M. François Sauvadet. Il y a une spécificité de l’enseignement agricole, au sein duquel la formation en alternance doit être soutenue puisqu’elle est facteur d’emplois.

M. François Rochebloine. Absolument !

M. François Sauvadet. Le second, c’est la recherche. Vous nous avez renvoyés à la prochaine loi sur la recherche ; nous serons présents à ce rendez-vous.

Je conclus en vous disant que sur les enjeux agricoles, nous comptons vraiment sur la détermination du Gouvernement lors des prochaines négociations internationales, particulièrement pour ce qui est de la sécurité alimentaire, qui suppose une organisation territoriale, notamment européenne. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.

M. André Chassaigne. Monsieur le président, monsieur le ministre de l’agriculture et de la pêche, chers collègues, pendant cette longue discussion, nous avons analysé, détricoté, interrogé ce projet de loi d’orientation. D’importants doutes ont été émis sur tous les bancs, mais nous n’avons pu que constater, monsieur le ministre, que vous n’en avez levé que très peu !

Ainsi, lorsque notre collègue François Guillaume a rappelé que la création du fonds agricole ne garantirait aucune séparation entre le patrimoine personnel et le capital d’exploitation, vous n’êtes pas intervenu !

Lorsque j’ai montré, avec d’autres, que la création de ce fonds alourdirait les charges financières des exploitations et donc fragiliserait l’agriculture française, vous n’avez pas démenti !

Lorsque des orateurs, issus de tous les bancs, ont dénoncé les conséquences de la valorisation de ces fonds sur l’installation des jeunes, vous n’avez rien dit, vous avez même confirmé nos craintes en acceptant des dispositions atténuant les conséquences fiscales de leur création.

Lorsque des parlementaires, de l’opposition comme de la majorité, se sont inquiétés des conséquences de la généralisation des pas-de-porte sur le maintien d’une agriculture familiale, vous êtes resté muet !

Lorsque nous avons dénoncé l’augmentation des prix du fermage, la précarisation et le risque d’expulsion de fermiers au bout de vingt-trois ans de travail, vous vous êtes tu ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Lorsque l’opposition a démontré que la remise en cause du contrôle des structures conduira à l’agrandissement sans limite des exploitations et à une concentration sauvage des terres, vous n’avez pas cherché à répondre.

Et lorsqu’il fut patent que le mélange de toutes ces mesures bloquerait le renouvellement des générations en agriculture et pousserait à la disparition de dizaines de milliers d’exploitations, vous avez levé les yeux au ciel ! (Même mouvement.)

Lorsque nous vous avons interpellé sur le revenu paysan et sur la nécessité d’une juste rémunération, lorsque nous vous avons interrogé sur l’évolution des critères d’octroi de la dotation aux jeunes agriculteurs et sur le soutien des démarches d’installation progressive ou lorsque nous vous avons demandé de faire évoluer le statut des cotisants solidaires, nous n’avons reçu aucune réponse !

Et quand il vous a été proposé de renforcer l’attractivité des métiers agricoles et d’améliorer les conditions de travail des salariés agricoles, vous leur avez retiré le droit aux 35 heures ! (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Pierre Soisson. Heureusement !

M. André Chassaigne. Nous avons revendiqué un relèvement des retraites agricoles, et vous nous avez alors promis de réunir un groupe de travail sur ce sujet… mais ce un an à peine après que le Gouvernement s’est assis sur les conclusions d’une commission réunie sur ce point.

Nous pourrions mettre tous ces silences sur le compte d’un projet de loi bâclé et d'une troublante méconnaissance des enjeux de l'agriculture d'aujourd'hui. Mais ce serait trop facile.

En effet, nous ne pouvons imaginer que la dangerosité de ce projet de loi ne soit pas volontaire. Vous avez en réalité fait le choix de soumettre ce secteur économique, comme d’autres, au capitalisme financier le plus débridé. (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Alors que les paysans de France se battent pour que leur travail soit rémunéré à sa juste valeur, vous les livrez à leurs pires ennemis : les pressions sur les prix imposés par la libéralisation du commerce international, les chantages de la grande distribution et la domination des industries agroalimentaires. Vous auriez pu chercher à protéger les agriculteurs de ces prédateurs. Vous avez préféré domestiquer notre agriculture, en la plaçant durablement sous le joug des intérêts de la finance.

Alors que 40 % des paysans ont un revenu inférieur au SMIC, et que ce revenu baisse de 2,5 % par an depuis l’an 2000,…

Plusieurs députés du groupe de l’union pour un mouvement populaire. C’est faux !

M. André Chassaigne. ...vous les obligez à ce qu’à l'avenir, leur travail rémunère en plus le capital de ceux qui auront investi dans leurs exploitations.

Dans les faits, ce que vous considérez être une adaptation de l’agriculture aux conditions économiques du moment ne sera au final qu'un enterrement de première classe. (Murmures sur les bancs du groupe l’Union pour un mouvement populaire.) Comment voulez-vous en effet que la majorité des paysans de France supportent ce choc supplémentaire, après tous ceux qui leur ont été portés depuis plus de quinze ans ?

Mais surtout, monsieur le ministre, vous avez occulté l'essentiel : cette prétendue modernisation de notre agriculture n’est qu'un jeu de dupes, une simple anticipation des prochains marchandages de l’Europe à l’OMC sur l'évolution des aides et des prix agricoles. Avec cette loi, vous préparez et cautionnez l’abandon par l’Europe, dans quelques semaines à Hong-Kong, de la préférence communautaire et de la souveraineté alimentaire.

Comment les paysans pourront-ils survivre si vous laissez se poursuivre cette baisse des prix agricoles, si vous votez aujourd’hui une hausse de 50 % du prix des fermages, si vous laissez augmenter le prix des carburants, et si vous alourdissez leurs charges financières ?

Comment des jeunes pourront-ils s’installer si le prix des exploitations augmente de façon vertigineuse, bloquant toute possibilité de reprise, et si vous désarmez la profession des outils qu’elle a mis en place pour assurer le renouvellement des générations ?

M. Jean Auclair. Vous voulez parler des kolkhozes !

M. André Chassaigne. Quel sera donc dans ces conditions le visage de notre agriculture dans dix ans ? Celui d’une agriculture sociétaire, intégrée aux circuits du capitalisme mondialisé ; celui de gigantesques fermes reposant sur l’exploitation de travailleurs salariés.

M. Jean-Charles Taugourdeau. Mais non !

M. André Chassaigne. Bref, cette vision d’abandon justifie évidemment le rejet de ce texte par les députés communistes et républicains. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et sur quelques bancs du groupe socialiste.)

M. le président. Avant de donner la parole aux derniers orateurs inscrits dans les explications de vote, je vais annoncer le scrutin public sur l’ensemble du projet de loi.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

Pour le groupe de l’UMP, la parole est à M. Michel Raison.

M. Michel Raison. Je tiens d’abord à vous féliciter, monsieur le ministre, pour votre travail exemplaire sur ce projet de loi. En amont, vous avez bien dégrossi les choses avec les organisations des professions agricoles. En aval, vous avez respecté et écouté le Parlement. Cela a permis d’enrichir le projet de loi.

Je félicite au passage notre excellent rapporteur, M. Antoine Herth, pour son impressionnant travail (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe’Union pour la démocratie française) ; Mme Brigitte Barèges, qui, outre sa vigilance sur les questions juridiques, a fait souffler un vent de liberté salutaire dans l’hémicycle (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.– Murmures sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains) ; M. Marc Le Fur, pour sa vigilance sur les questions financières et sa légendaire passion, bien bretonne (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire) ; et, bien sûr, M. le président de la commission des affaires économiques pour tout ce qu’il a apporté. (Même mouvement.)

Ce projet a ainsi été amélioré. Nous avons d’abord pu clarifier le statut du fonds agricole : il sera optionnel. Nous n’aurons pas davantage de fiscalité supplémentaire. L’amendement Ollier rendra possible la participation des salariés de l’agriculture. Grâce aux nombreux amendements de M. Jacques Le Guen, qui avait fait un rapport sur ce point, les salariés pourront aussi bénéficier d’une revalorisation de leur promotion. En ce qui concerne les biocarburants, monsieur le ministre, nous avons pu améliorer votre proposition. Insuffisamment, selon certains. Mais votre sagesse nous a freiné dans notre impatience.

L’agriculture passionne les paysans, mais aussi l’ensemble des Français et des députés. Elle est variée, par la diversité des productions et des régions. Dans quelques minutes, vous allez voter, mes chers collègues, une véritable loi d’orientation qui respecte cette diversité, tout en restant cohérente du premier au dernier article. (« Bravo ! » sur quelques bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Dans un contexte de revenus faibles, d’inquiétudes liées aux négociations de l’OMC, cette loi apporte l’oxygène nécessaire à la survie des exploitations agricoles et, en aval, à leurs organisations de commercialisation et de suivi. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. François Brottes. C’est faux !

M. Michel Raison. Ensemble, nous avons offert la possibilité à tout jeune agriculteur s’installant d’avoir un projet de carrière. Telle est la condition indispensable au renouvellement des générations, et voilà ce qui pourra redonner goût au métier.

L’exploitation familiale évoluera plus facilement vers l’entreprise. La reprise sera facilitée par des mesures fiscales. L’équilibre des lois de 60 est préservé : rien n’est disloqué. Nous avons simplement apporté de la cohérence et de l’oxygène.

Nous avons aussi créé le crédit d’impôt, qui permettra à de nombreux agriculteurs de prendre quinze jours de vacances. Au-delà de l’aspect juridique, la loi accorde plus de libertés ; elle renforce les liens entre les générations de paysans, et entre ceux-ci et le reste de la société – que ce soit d’un point de vue environnemental ou pour le domaine non alimentaire de la production.

Je fais confiance aux paysans pour utiliser ces outils. Comme l’a dit Alain, le futur n’a de sens qu’à la pointe de l’outil ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Au milieu du XVIIIe siècle, Voltaire a dit : « on a trouvé, en bonne politique, le secret de laisser mourir de faim ceux qui, en cultivant la terre, font vivre les autres ». En ce début de XXIe siècle, en adoptant cette loi, nous allons contredire Voltaire. Pour toutes ces raisons, le groupe de l’UMP votera ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Pour le groupe socialiste, la parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Cette loi était très attendue par le monde agricole. Elle avait été promise par le Président Chirac au moment de la campagne pour les présidentielles, puis a été scindée en deux textes avec la loi sur les territoires ruraux, examinée dans cet hémicycle il y a un an, et cette loi d’orientation, qui a été préparée par une commission présidée, comme chacun le sait, par un journaliste on ne peut plus libéral. Seuls ceux qui en attendaient beaucoup ont été déçus. Ce ne fut pas notre cas : nous savions, dès que nous avons appris qu’il y aurait treize ordonnances, que nous avions de bonnes raisons d’être inquiets. Certes, monsieur le ministre, vous avez, au cours du débat, soumis d’autres propositions. Mais chacun a compris qu’elles avaient été écrites dans la précipitation. (« Mais non ! » sur quelques bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) On nous distribuait parfois en séance la quatrième ou cinquième version d’un texte.

Ce projet de loi a aussi fait l’objet d’une déclaration d’urgence. C’est incompréhensible, pour un texte d’orientation en discussion depuis cinq ans.

Beaucoup d’entre nous ont malheureusement vu se confirmer leurs craintes. Quel était l’enjeu principal de cette loi ? Le renouvellement des générations. Pour ce faire, vous créez le fonds agricole, ce qui a permis de retrouver une belle unanimité sur les bancs de l’UMP ! On nous a présenté ce projet comme le moyen de faciliter l’installation des jeunes. C’est faux : cela va surtout renchérir le coût de l’installation. Dès lors que vous introduisez dans le fonds les droits à paiement unique – c’est-à-dire des droits qui, octroyés à une génération, seront, au minimum, modifiés en 2013, et ne seront donc plus revendables par ceux qui les ont acquis – vous organisez un marché de dupes !

En créant le bail cessible, en augmentant de 50 % les loyers dont les agriculteurs devront s’acquitter dans ce cadre, en démolissant le contrôle des structures agricoles, et en cautionnant des attaques contre les SAFER, vous façonnez une agriculture qui n’est pas la nôtre, une agriculture de concentration. Seuls les jeunes très argentés pourront en effet acquérir des terres ; les autres devront aller ailleurs ! La suppression du contrôle des structures profite aux exploitations déjà installées et qui ont des moyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Ce projet de loi a également été conçu pour les rentiers, dont les retraites seront améliorées grâce à la vente du fonds aux jeunes agriculteurs. Une telle amélioration pouvait être soutenue par d’autres moyens que ceux-ci, qui prévoient le financement des retraites par les jeunes qui s’installent. Même logique pour les exonérations fiscales : tout va au cédant, et rien au jeune qui veut s’installer.

On pouvait attendre des mesures pour le salariat. Il n’y en a qu’une : l’allongement de la durée du temps de travail ! Quant à la redéfinition de l’intégration, ce mal qui ronge notre agriculture, il n’en a pas été question. Pour ce qui regarde l’aménagement du territoire, seuls quelques amendements relatifs à la montagne ont été adoptés, mais le problème récurrent de la collecte du lait, par exemple, n’a pas été réglé. Vous avez renvoyé les problèmes ultramarins à une autre loi. Quand sera-t-elle examinée ? Le temps presse pour nos amis des DOM-TOM, et je doute que cette loi puisse voir le jour cette année. Surtout, avec la réforme des offices, vous consacrez le renoncement de l’État dans la régulation et la gestion des crises.

Certes, quelques mesures peuvent être intéressantes (« Ah, tout de même ! » sur quelques bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire) : l’interdiction des sacs plastiques ; le statut des autres intervenants dans l’exploitation agricole, notamment les conjoints et les aides familiales ; l’amélioration de la protection sociale ; les mesures prises en matière de biocarburants. Ce sont des avancées, mais nous attendons les actes.

Il s’agit, par conséquent, d’une loi de concentration agricole, liée à l’application de la PAC que vous avez souhaitée en France. Ceux qui bénéficient déjà d’aides en auront autant, sinon plus ; ceux qui n’en avaient pas, mieux vaut pour eux aller voir ailleurs ! L’un de mes collègues, qui n’appartient pas au groupe socialiste, a affirmé qu’il ne resterait à terme que 50 000 agriculteurs sur le territoire français. Telle est sans doute la direction que vous voulez prendre.

J’avais déclaré que ce texte était dangereux. Plusieurs amendements l’aggravent encore. Le débat ne nous a donc donné aucune raison de changer d’avis. Nous voterons résolument contre ce texte, et ce pour le bien des agriculteurs de notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.– Murmures sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Vote sur l'ensemble

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

Je vais mettre aux voix l'ensemble du projet de loi.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

…………………………………………………

M. le président. Le scrutin est ouvert.

…………………………………………………………

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

L'Assemblée nationale a adopté. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire.

M. Antoine Herth, rapporteur de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire. J’associe à ces quelques mots de remerciements mes collègues, Marc Le Fur et Brigitte Barèges, rapporteur pour avis respectivement de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan et de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, ainsi que Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, qui nous a soutenus tout au long de la phase de travail préparatoire.

Le présent texte de loi, je veux le dire, ici, haut et fort, est une œuvre collective. Il a été inspiré non seulement par les travaux du Conseil économique et social, mais aussi, ne l’oublions pas, par des rapports parlementaires : ceux de François Guillaume, Jacques Le Guen et Martial Saddier. Quant au travail toujours en cours de notre collègue Marc Bernier, je pense qu’il en poursuivra l’enrichissement.

Je veux associer à ces travaux les parlementaires qui ont suivi nos auditions : sur les bancs de l’UMP, Philippe Feneuil, Philippe-Armand Martin, Yves Simon, Jean Auclair, Michel Raison qui fut notre porte-parole, et sur les bancs de l’UDF, François Sauvadet, Jean Dionis du Séjour et Jean Lassalle. Mais je me tourne aussi vers les bancs de l’opposition pour remercier nos collègues de leur attitude constructive tout au long de cette discussion : ils ont su dépasser la simple pétition de principe – que d’ailleurs nous comprenons. Merci donc à François Brottes, Jean Gaubert et André Chassaigne qui ont tenu, eux aussi, à améliorer ce projet de loi.

Monsieur le président, nous vous remercions de votre patience : vous nous avez accordé deux séances supplémentaires qui nous auront permis d’aller au fond des choses.

Enfin, monsieur le ministre, sachez qu’avec moi, Bernard Accoyer, président du groupe de l’UMP et Patrick Ollier vous sont reconnaissants de l’esprit d’ouverture et de partenariat dont vous avez fait preuve. Nous avons noué une relation constructive tout au long de l’examen de ce texte, tant sur la question des ordonnances que sur les amendements.

Nous disposons désormais, dans l’intérêt général, d’une belle loi, d’une grande loi, d’une loi qui nous permet d’entrevoir un avenir meilleur pour notre agriculture et pour notre secteur agro-alimentaire en ce début du XXIsiècle. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de la pêche.

M. Dominique Bussereau, ministre de l’agriculture et de la pêche. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je remercie infiniment Antoine Herth pour ses propos. Il a été un rapporteur hors pair de la commission saisie sur le fond, comme l’ont été Brigitte Barèges et Marc Le Fur pour celles saisies pour avis. Quant au président Ollier, Je lui sais gré d’avoir été si présent tout au long de ces travaux.

Beaucoup de rapports, ceux de Jacques Le Guen et de Christian Ménard, entre autres, ont nourri la réflexion : je remercie leurs auteurs. Je remercie aussi l’UDF, qui fut très présente aux côtés de l’UMP dans ce débat. La majorité est donc rassemblée pour voter le texte. Je dois aussi reconnaître que les députés socialistes et communistes – M. Chassaigne, souvent bien seul mais toujours courageux, M. Gaubert et bien d’autres – ont participé de manière constructive à ce travail.

Je profite de l’occasion pour vous informer des résultats – c’est important pour la représentation nationale – du conseil des ministres extraordinaire qui s’est tenu aujourd’hui à Luxembourg, d’où j’arrive à l’instant. Il était consacré à un dossier essentiel, l’OMC. La France avait demandé ce conseil extraordinaire, élargi à l’ensemble des ministres concernés, pour recadrer la Commission européenne qui, estimait-elle, était sortie de son mandat.

À l’issue de ce conseil des ministres, auquel participait Catherine Colonna, Christine Lagarde, Philippe Douste-Blazy et moi-même, nous avons obtenu, à l’unanimité, le recadrage du mandat de la Commission et la réaffirmation de la politique agricole commune, qu’il n’est pas question de remettre en cause dans la négociation de l’OMC. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Enfin, comme les négociations reprennent demain à Genève, ce que la France avait demandé, selon les vœux du Président de la République et du Premier ministre, il a été décidé de placer en permanence un comité d’experts aux côtés de la Commission pour recadrer le mandat de celle-ci et rappeler les besoins des pays, en particulier du nôtre.

Si, bien entendu, la Commission reste « aux manettes » de la négociation, il importait de réaffirmer la souveraineté des États membres, et en premier lieu de la France. Nous avons pu exposer à nouveau très clairement nos positions à cet égard.

Je tenais à vous en informer immédiatement et à vous dire que, dans le contexte des négociations de l’OMC et de la PAC, dont nous réaffirmons l’importance pour notre pays et pour son mode de vie, la loi d’orientation devra participer à la rénovation de notre agriculture.

Bien sûr, nous allons retravailler le texte. Beaucoup de demandes ont été formulées tant sur les bancs de la majorité que de l’opposition. D’ici à la lecture au Sénat, nous allons pouvoir tenir compte de certaines des remarques exprimées.

Nous disposons là d’une loi qui correspond bien à l’agriculture française, dont je rappelle qu’elle est la première au monde pour l’exportation des produits agroalimentaires bruts et la deuxième pour la production de produits agroalimentaires transformés. C’est elle qui, par l’entretien des paysages, permet à notre pays d’être la première destination touristique au monde, qui garantit à notre alimentation traçabilité et sûreté et nous assure l’autosuffisance alimentaire.

Nous pouvons être fiers de notre agriculture, et tous ceux qui ont voté cette loi peuvent l’être de lui donner des instruments pour progresser et pour améliorer encore ses performances. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures cinquante, est reprise à dix-sept heures cinq.)

Loi de finances pour 2006

Discussion d’un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi de finances pour 2006 (nos 2540, 2568).

La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.

M. Thierry Breton, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, Jean-François Copé et moi-même sommes très heureux d’être ici pour introduire ce débat, qui s’annonce particulièrement riche, sur le projet de loi de finances pour 2006. Je voudrais, en préambule, remettre en perspective ce budget et souligner le contexte institutionnel particulier dans lequel il s’inscrit.

Cette année budgétaire est une année charnière, car le projet de loi de finances pour 2006 est le premier à être soumis à la pleine application de la loi organique du 1er août 2001. Le budget que nous vous présentons aujourd’hui, avec Jean-François Copé, est donc le premier « au format LOLF ».

Certes, le changement réside essentiellement cette année dans un énorme effort de présentation. Mais, ne nous y trompons pas, c’est bien la première étape, indispensable, d’une ambition nouvelle en matière de rationalisation de la dépense publique et de réforme de l’État.

Avec ce nouvel outil, nous disposons collectivement Gouvernement et parlementaires, des moyens d’amorcer un véritable reflux de la dépense publique, obtenu non par des économies arrachées à des budgets qui progressent inexorablement, mais grâce à un recentrage de l’État sur ses missions fondamentales, avec une qualité de service public accrue.

Il relève de notre responsabilité politique aujourd’hui, de ma responsabilité, pour redonner des marges de manœuvre à notre politique fiscale, d’être encore plus exigeant que nous ne l’avons été au cours des années précédentes sur la gestion des finances publiques, en maintenant en volume les dépenses de l’État.

C’est cette démarche nouvelle qu’avec Jean-François Copé, nous avons souhaité intégrer dans notre projection pluriannuelle des finances publiques 2007-2009, annexée à ce projet. La LOLF doit nous permettre – j’en suis convaincu –, dès 2007, d’aller plus loin et, par exemple, de converger graduellement vers une stabilisation en valeur du budget de l’État, c’est-à-dire vers une enveloppe stable des dépenses d’une année sur l’autre.

Ce n’est pas un vœu pieu, car nous avons les moyens de cette ambition. Entre 1999 et 2002, la dépense budgétaire a progressé en moyenne de près de 1 % par an en volume et, depuis 2003, elle est stabilisée. Cela paraissait impossible il y a quatre ans ; pourtant, la fameuse norme dite « zéro volume » est aujourd’hui bien ancrée dans notre paysage budgétaire.

M. Didier Migaud. Fumisterie !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. C’est la preuve que nous sommes prêts à aller plus loin.

Le budget de 2007 sera le premier à pouvoir pleinement tirer profit de l’application de la LOLF. Les indicateurs de performance auront été mesurés, les postes d’économies potentielles identifiés. Nous venons de lancer, avec Jean-François Copé, dix-sept audits dans les différentes administrations afin d’aider les ministères à faire ce travail. Je vous donne rendez-vous l’année prochaine pour prendre, sur la base de ces travaux, des décisions encore plus ambitieuses en ce sens.

Je reviens maintenant plus précisément au projet de loi de finances pour l’année 2006 que vous propose le Gouvernement. Je vous présente aujourd’hui un budget responsable, sincère et transparent. J’entends depuis quelques semaines beaucoup de choses sur ce projet. Aussi, je souhaite revenir sur différents points, en faisant à cette occasion quelques rappels pédagogiques qui me semblent indispensables en la matière.

M. Jean-Claude Sandrier. Vous en aurez besoin !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Tout d’abord, qu’est-ce qu’un budget ? Certains, manifestement, l’ignorent. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Il me semble donc utile de le rappeler.

M. Pierre Forgues. Quelle suffisance !

M. Didier Migaud. Le procédé est infamant !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Ce n’est ni un arrêté comptable ni un compte de résultat. Un budget, c’est d’abord et avant tout une prévision. C’est aussi un acte politique majeur porteur de choix forts en termes de dépenses et de fiscalité.

M. Didier Migaud. Vous pouvez sauter ce paragraphe !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. C’est enfin et surtout un engagement, celui de ne pas dépenser plus que prévu et de tenir l’objectif de déficit.

M. Didier Migaud. Y aura-t-il ensuite une interrogation écrite sur le thème : qu’est-ce qu’un budget ?

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Cela entraîne deux conséquences très claires. Élaborer un budget, c’est se projeter dans l’avenir pour définir de la manière la plus loyale et la plus transparente possible des objectifs de recettes publiques et de déficit ; c’est ensuite prendre l’engagement politique de tout faire pour tenir les objectifs de dépense et de solde, même si la réalité s’écarte des prévisions de croissance. Cet engagement, mesdames et messieurs les députés, je le prends devant vous.

Sur le premier point, je souhaite dire sereinement que la prévision des recettes publiques pour 2006 est fiable et transparente. D’aucuns ont critiqué la prévision de croissance du Gouvernement.

M. Didier Migaud. Tout le monde !

M. Augustin Bonrepaux. Bien sûr !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Je souhaite donc y revenir. Écoutez bien, monsieur Migaud !

M. Didier Migaud. Je vous écoute toujours avec attention !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Tous les signaux conjoncturels, je dis bien tous, sont au vert.

M. Didier Migaud. Vous êtes daltonien ! (Sourires.)

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. La croissance rebondit. Si certains en doutent encore, je leur donne rendez-vous dans trois semaines pour la publication des chiffres de croissance du troisième trimestre.

M. Augustin Bonrepaux. Cela fait trois ans que vous le dites !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Je mesure votre impatience, mais, vous le verrez, rien n’est caché, et je peux d’ores et déjà énumérer tous les éléments conjoncturels ou structurels qui nous ont permis, avec Jean-François Copé, de fonder notre choix sur une fourchette de croissance de 2 à 2,5 % pour 2006.

Toutes les enquêtes de conjoncture pointent vers un rebond de l’activité : le moral des chefs d’entreprise s’est raffermi dans l’industrie – selon l’INSEE et la Banque de France – et les affaires dans les services et le bâtiment se maintiennent à un niveau très élevé.

Les premiers indicateurs disponibles sur le troisième trimestre confirment pleinement ce rebond. Avec plus 1,9 % en juin, plus 1,2 % en juillet et plus 1,5 % en août, la consommation de produits manufacturés suit une tendance que nous n’avons pas connue depuis plus de cinq ans. L’inflation reste faible – autour de 2 % –, malgré la hausse du pétrole. C’est autant de pouvoir d’achat pour nos concitoyens !

Selon les industriels, 2005 sera le meilleur cru d’investissement depuis 2000 ; je compte aussi sur l’effet de levier des 7 milliards d’euros de dotations en capital à l’AFITF, à l’ANR, à l’AII, en 2005 et en 2006. Les exportations se sont redressées au deuxième trimestre à plus 4 % en rythme annualisé et les chiffres d’août sont positifs. L’emploi repart et le chômage recule ; jamais l’ANPE n’avait autant reçu autant d’offres d’emploi.

M. Didier Migaud. Si cela pouvait être vrai !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Enfin, les créations d’entreprises explosent et atteignent leur plus haut niveau jamais connu. Notre économie connaît bel et bien un retournement favorable de cycle conjoncturel.

M. Pierre Forgues. C’est la méthode Coué !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Je reviens du G 20 qui s’est réuni samedi dernier à Pékin et je peux dire que ce phénomène se constate dans l’ensemble des pays de la zone euro ainsi que dans les vingt pays les plus riches de la planète.

M. Augustin Bonrepaux. Dans quel monde vivez-vous ?

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Nous ne sommes pas les seuls, monsieur Bonrepaux, mais nous sommes comme les autres !

M. Augustin Bonrepaux. Avez-vous entendu parler des fermetures d’entreprises ?

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Je resterai bien entendu attentif à l’évolution du prix du pétrole et à son impact sur notre économie. Mais j’ai confiance dans les mesures que nous avons prises pour répondre rapidement et de manière ciblée aux situations difficiles.

Au-delà des seules tendances conjoncturelles, notre budget est d’abord la traduction de notre politique, de votre politique.

M. Jean-Pierre Brard. La Palice eût pu dire la même chose !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Vous auriez pu à bon droit nous critiquer, Jean-François Copé et moi-même, si nous nous étions « réfugiés derrière le consensus » pour définir une prévision de croissance conservatrice. Alors, nous n’aurions pas rempli notre rôle qui est de prendre loyalement en compte l’ensemble des éléments qui sont à notre disposition et, en particulier, l’effet de toutes les mesures que vous-mêmes avez adoptées, que ce soit à l’occasion du plan de cohésion sociale ou dans le cadre des ordonnances adoptées cet été pour lutter contre le chômage ! Oui, ce budget a été construit pour soutenir le rebond de l’activité. Oui, nous sommes convaincus qu’il permettra à la croissance de s’inscrire l’an prochain entre 2 et 2,5 %.

M. Jean-Pierre Brard. Anne, ma sœur Anne, ne vois-tu rien venir ? (Sourires.)

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Cela étant, je rejoins volontiers nombre des observateurs critiques de notre budget sur un point : il est vrai qu’il n’est pas facile de prévoir la croissance.

M. Jean-Pierre Brard. Si ! dans votre boule de cristal !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. J’ai d’ailleurs récapitulé depuis les dix dernières années les écarts les plus marquants entre la prévision du PLF et les réalisations observées in fine.

M. Jean-Pierre Brard. Au royaume des aveugles, les borgnes sont rois !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. En 1995, prévision 3,1 %, réalisation 2 % ; en 1996, prévision 2,8 %, réalisation 1,3 % ; en 2000…

M. Augustin Bonrepaux. Cela allait beaucoup mieux !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. …prévision 2,8 %, réalisation 3,8 %…

M. Augustin Bonrepaux. C’est vrai !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Certes, mais en 2001, prévision 3,3 %, réalisation 2,1 % ; en 2002, prévision 2,5 %, réalisation 1,2 % ; en 2003, prévision 2,5 %, réalisation 0,5 %.

M. Jean-Pierre Brard. Vous demandez pardon par anticipation ?

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Est-ce à dire que MM. Alphandéry, Arthuis, Strauss-Kahn, Fabius ou Lambert n’ont pas été des ministres responsables ou soucieux de la sincérité du PLF ? Évidemment non !

M. Jean-Pierre Brard. Bien sûr que si !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. D’ailleurs, compte tenu de la lourde charge qu’est le ministère de l’économie et des finances, j’éprouve du respect pour chacun d’entre eux.

M. Jean-Pierre Brard. C’est le club des éclopés !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Un ministre de l’économie n’est pas Madame Soleil ! Il ne prédit pas l’avenir, mais il doit l’éclairer,…

M. Jean-Pierre Brard. À la bougie !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. …l’expliquer, et faire au mieux pour le gérer le moment venu et tenir les engagements de déficit.

Cela signifie qu’il faut se tenir prêt à réagir et à adapter l’exécution du budget autant que possible afin de tenir les engagements politiques qui portent sur le niveau des dépenses et sur le solde.

C’est ce que nous faisons cette année où nous annulons près de 4 milliards d’euros de crédit pour tenir le « zéro volume »…

M. Jean-Pierre Brard. De grâce, parlez français !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. …et maintenir le solde des comptes public sous la barre des 3 %, alors même que la croissance est nettement moins forte que prévu il y a un an. En effet, estimée initialement à 2,5 %, elle sera plutôt située, comme vous le savez, entre 1,5 et 2 %. Est-ce à dire que le budget préparé par mon prédécesseur, et que j’ai aujourd’hui la charge d’exécuter, n’était pas sincère ? Certainement pas.

Plusieurs députés du groupe socialiste. Non ?

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. En revanche, il nous revient, à moi et à Jean-François Copé, de garantir que le déficit soit, à l’arrivée, conforme à ce qui avait été prévu au départ ! C’est ma responsabilité, et je l’assumerai.

Le même souci de rigueur et de transparence nous a conduits à prendre en compte diverses recettes exceptionnelles qui devraient être comptabilisées en 2006, par exemple la soulte attendue au titre de la réforme des retraites de La Poste.

Rien n’est caché, là non plus,…

M. Didier Migaud. L’aveu est pourtant bien tardif !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. …puisque ces recettes exceptionnelles font l’objet de discussions ouvertes avec les établissements en cause et seront strictement comptabilisées conformément aux règles d’Eurostat. C’est l’inverse qui eut été anormal ! Que n’aurions nous entendu en 2006 sur les « cagnottes secrètes du Gouvernement » si nous avions omis de prendre en compte, dès à présent, conformément aux règles européennes, ces versements inéluctables, effectués à la demande et dans l’intérêt des entreprises concernées.

La transparence, c’est aussi, pour la première fois et à ma demande, la mise en ligne sur le site internet du ministère de la totalité du budget, de façon à ce que tous les Français puissent y avoir accès. Rien n’est caché.

M. René Dosière. Sauf à l’Élysée !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. L’ensemble de ces éléments prouve que nous avons fait sans ambiguïté le choix de la responsabilité, celui que requiert la situation de nos finances publiques.

Il est vrai que leur évolution tendancielle nous amenait, lorsque j’ai pris mes fonctions, à un déficit de 3,6 % pour 2006. C’est ce que constataient notamment des organismes internationaux comme le FMI.

M. Jean-Pierre Brard. Mais Zorro est arrivé…

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. C’est ce problème que j’ai voulu prendre à bras-le-corps quand j’ai indiqué en juin que la France vivait au-dessus de ses moyens.

M. Jean-Pierre Brard. Certains le font, en assistant à des mariages princiers, par exemple !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Certains m’ont trouvé excessivement alarmiste. Eh bien oui, je revendique d’avoir voulu provoquer une véritable prise de conscience afin que soit corrigée la trajectoire dramatique prise par nos finances. À un moment décisif, et en plein accord avec le Premier ministre, nous avons ainsi pu dégager les marges de manœuvre dont nous avions besoin, en évitant les dépenses inutiles, et afin de concentrer nos moyens sur la croissance et l’emploi.

M. Jean-Claude Sandrier. Heureusement que vous êtes là !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Oui, je le crois, nous sommes au rendez-vous de la responsabilité.

M. Jean-Pierre Brard. Quel homme !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Ainsi, pour la première fois depuis plusieurs années, notre endettement sera stabilisé en 2006.

M. Jean-Pierre Brard. Vous y croyez vraiment ?

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. C’est la concrétisation de la reprise en main du budget de la France depuis trois ans. La poursuite de l’assainissement des finances publiques est en effet, à mes yeux, l’une des conditions nécessaires à la revitalisation durable de notre économie, à sa respiration. Je le répète, la France vit au-dessus de ses moyens !

M. Jean-Pierre Brard. Parlez pour vous et pour les privilégiés de votre espèce !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Tout en honorant les différentes lois de programmation – sécurité, justice, défense –, ce projet de loi de finances, ainsi d’ailleurs que le projet de loi de financement de la sécurité sociale que vous discuterez bientôt, permet de stabiliser le ratio d’endettement public – qui passera de 65,8 % à 66,0 % du PIB –, grâce à la réduction progressive du déficit public et à l’affectation au désendettement d’une partie significative du produit des cessions de participations. Il n’y a, certes, pas là de quoi se réjouir exagérément, mais c’est un premier pas dans la bonne direction. En faisant preuve de constance dans l’effort, nous pourrons réduire la dette publique dans les prochaines années.

M. Didier Migaud. Vous n’en prenez pas le chemin !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Cette stabilisation passe bien évidemment par une réduction du déficit public. Nous l’avons ainsi ramené, en 2004, de 4,2 % à 3,6 % du produit intérieur brut. En 2005, nous le faisons repasser sous la barre des 3 %. Notre ambition pour 2006 est de poursuivre cet effort et de limiter le déficit à 2,9 %.

Quelles sont les clefs d’une telle équation ?

D’abord, les recettes fiscales et sociales vont profiter de l’accélération de la croissance, qui devrait se situer, je le répète, entre 2 % et 2,5 %, après une croissance comprise entre 1,5 % et 2 % cette année. Pour autant, le taux de prélèvement obligatoire se stabilise : 44 % du produit intérieur brut en 2006, après 43,9 % cette année.

Ensuite, le ralentissement des dépenses publiques sera accentué. Pour l’État – je l’ai souligné en préambule –, ce projet de loi de finances prévoit, pour la quatrième année consécutive, une stabilité des dépenses en volume. S’agissant de la sécurité sociale, la montée en charge des effets de la réforme de l’assurance maladie, ainsi qu’un certain nombre de mesures complémentaires comme, par exemple, le déremboursement de certains médicaments à service médical rendu insuffisant, devraient permettre de ralentir d’un point la progression des dépenses de santé. Par ailleurs, la baisse du chômage permettrait d’améliorer la situation financière de l’Unedic, qui en a, comme vous le savez, bien besoin. Seules les dépenses locales continueront de progresser rapidement – d’environ 3 % en volume.

M. Didier Migaud. Et voilà ! C’est la faute des collectivités locales !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Si la responsabilité financière constitue le cadre de travail incontournable du Gouvernement, elle ne doit pas pour autant limiter les ambitions économiques. C’est pourquoi ce projet sert les deux grandes orientations que sont la priorité à l’emploi et la préparation de l’avenir.

Notre premier ministre l’a souvent rappelé : notre première priorité est l’emploi. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) La totalité des marges de manœuvre de ce budget – soit environ 4,5 milliards d’euros – y est ainsi consacrée. Ce budget met en musique les mesures du plan d’urgence pour l’emploi annoncées par le Premier ministre dès son arrivée : le « contrat nouvelles embauches », bien sûr, dont le succès dès son démarrage – plus de 100 000 contrats ont été signés – démontre la nécessité ; la montée en puissance des allégements de charges sociales sur les bas salaires imposée par la dernière étape de la réunification des SMIC ;…

M. Jean-Pierre Brard. Parlez-en à Pierre Méhaignerie !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. …la neutralisation des contraintes financières liées au seuil de dix salariés, que je considère comme une ouverture déterminante pour le développement des très petites entreprises ; les orientations données sur le retour au travail des seniors – à cet égard, je me réjouis que les négociations entre les partenaires sociaux ait abouti la semaine dernière ; enfin, la montée en charge des contrats d’avenir et des contrats d’accompagnement dans l’emploi.

Mais ce projet de loi de finances pour 2006 consacre surtout le deuxième acte de la stratégie du Gouvernement en faveur de l’emploi et de la croissance sociale : faire en sorte, enfin, que le travail paie plus que l’inactivité, en renforçant le pouvoir d’achat des salariés.

M. Jean-Pierre Brard. Le résultat est visible !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. C’est le sens des différentes incitations financières à la reprise d’un emploi : un crédit d’impôt de 1 000 euros pour les jeunes qui se font embaucher dans des secteurs connaissant des difficultés de recrutement ; une prime de 1 000 euros pour les titulaires de minima sociaux qui retournent au travail ; un crédit d’impôt de 1 500 euros en faveur des chômeurs qui reprennent un emploi à plus de 200 kilomètres de leur domicile.

Nous proposons également de renforcer significativement la prime pour l’emploi pour la porter, en deux ans, à un montant maximum de plus de 800 euros au niveau du SMIC, à quoi s’ajoutera un supplément de 250 euros mensuels dans le cadre de la réforme de l’intéressement.

Mais ce budget est aussi l’occasion de mettre en place la réforme fiscale d’envergure dont la France avait tant besoin.

M. Augustin Bonrepaux. Celle que vous attendiez, vous voulez dire !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Avec Jean-François Copé, nous avons proposé au Premier ministre le principe d’une réforme majeure…

M. Jean-Pierre Brard. Je croyais qu’il était à l’initiative de cette réforme !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. …de l’imposition des personnes, à travers trois dispositifs équilibrés.

Premièrement, un plafonnement du prélèvement fiscal est institué. Aucun contribuable ne pourra plus désormais être taxé au-delà de 60 % de son revenu au titre des impôts directs.

M. Jean-Pierre Brard. Arnault va pouvoir vous offrir du caviar ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean Auclair. Ça suffit, monsieur Brard !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Deuxièmement, les avantages fiscaux sont plafonnés à 8 000 euros, plus 750 euros par enfant à charge.

Troisièmement, le barème de l’impôt sur le revenu fait l’objet d’une refonte en profondeur : le nombre de tranches est réduit de sept à cinq et les taux abaissés du fait de l’intégration dans le barème de l’abattement de 20 %.

Couplée à l’amélioration de la PPE, cette refonte du barème, monsieur Brard, est une réforme juste,…

M. Jean-Pierre Brard. Ben voyons !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. …d’abord parce qu’elle récompense le travail ;…

M. Jean Auclair. Eh oui !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. …ensuite parce qu’elle soulage le fardeau fiscal pesant sur les classes moyennes : 80 % de l’effort global de baisse des impôts bénéficiera directement aux ménages moyens et modestes. Peut-être vous désintéressez-vous de leur sort, monsieur Brard, mais ils sont importants aussi.

M. Jean-Pierre Brard. Nous n’avons pas la même conception des classes moyennes ! Elles ne regroupent pas les privilégiés, les bourgeois comme vous ! (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Ce n’est pas une insulte, c’est un constat !

M. Augustin Bonrepaux. Cette mesure est un cadeau pour les plus riches !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Mais cette réforme de l’impôt sur le revenu renforce aussi la compétitivité et l’attractivité de notre territoire. Avec la mise en place d’un « plafonnement fiscal » à 60 % du revenu, la France se situe enfin au même niveau que ses partenaires ayant conservé un impôt sur la fortune. En affichant le barème réel de l’impôt sur le revenu et en simplifiant son calcul, nous permettons à notre pays d’attirer de nouveau les talents et les investisseurs privés dont nous avons tant besoin pour développer l’emploi et l’activité.

Vous l’avez compris, ce budget répond à une urgence : faire baisser le chômage et remettre la France au travail.

M. Jean Auclair. C’est ce dont la gauche ne veut surtout pas !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Les derniers chiffres de l’emploi – ceux du mois d’août – et les perspectives de poursuite de la baisse du chômage d’ici à la fin de l’année montrent que le terreau est bon. C’est le moment d’enclencher le cercle vertueux travail – consommation – croissance – travail. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Il serait toutefois irresponsable de ne pas savoir anticiper et de négliger les enjeux du futur : irruption rapide des pays émergents, mutations technologiques majeures, montée en puissance d’une économie de l’immatériel et de la connaissance. Pour qu’une baisse du chômage soit durable, nous devons donc préparer les emplois de demain en incitant nos entreprises à réinvestir dans l’avenir.

M. Jean Auclair. Très bien !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Or ce budget est aussi un budget qui prépare l’avenir. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Tel est l’enjeu du second volet de notre proposition de réforme fiscale que nous proposons dans ce projet de loi de finances pour 2006 : nous devons poursuivre l’amélioration de l’environnement fiscal de nos entreprises afin de le rendre encore plus favorable à l’investissement.

M. Henri Emmanuelli. Ben voyons !

M. Gabriel Biancheri. Ce que la gauche n’a pas été capable de faire !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. C’est bien le sens de la réforme d’importance cruciale de la taxe professionnelle, qui vient en complément de la baisse du taux de l’impôt sur les sociétés adoptée par le Parlement l’an dernier et dont la seconde tranche est financée dans ce projet de loi de finances. Pour mener à bien cette réforme ambitieuse, deux objectifs ont guidé le Gouvernement : alléger la charge fiscale des entreprises pour préserver leur compétitivité et responsabiliser les collectivités locales.

M. Henri Emmanuelli. Quel toupet !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. La réforme de la taxe professionnelle comprend deux volets : la garantie pour les entreprises qu’elles ne seront plus jamais imposées au-delà de 3,5 % de leur valeur ajoutée…

M. Jean Auclair. Très bien !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. …et l’allégement de la charge fiscale sur les investissements nouveaux, de sorte que l’investissement ne soit plus taxé avant d’avoir commencé à produire de la valeur. Une telle mesure semble aller de soi, mais encore fallait-il le décider.

M. Henri Emmanuelli. Qui paie ?

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Mais l’État doit aussi être acteur de ce réinvestissement dans l’avenir. Le Gouvernement a fait siens les objectifs de Lisbonne, notamment celui de consacrer, à l’horizon 2010, 3 % de la richesse nationale créée annuellement à la recherche et au développement. L’État doit également jouer le rôle d’un moteur afin d’encourager les entreprises, qui investissent trop peu dans l’innovation, à relever leur contribution.

Le projet de budget pour 2006 propose que l’État contribue à ces objectifs de manière déterminante et concrète, et ce dès l’an prochain. Après avoir mis en place les outils nécessaires – pôles de compétitivité, Agence de l’innovation industrielle, Agence nationale de la recherche, AFITF –, l’État va y affecter une partie substantielle des recettes de privatisations, de façon à financer des plans ambitieux de relance des investissements publics et de la recherche.


Sur 2005 et 2006, quatre milliards d’euros seront ainsi affectés à l’AFITF pour le financement des infrastructures terrestres, deux milliards d’euros à l’Agence pour l’innovation industrielle et un milliard à l’Agence nationale pour la recherche. J’attends de ces mesures qu’elles aient un effet de levier significatif sur l’investissement privé.

Par ailleurs, le Gouvernement propose de renforcer le crédit impôt recherche, qui est le principal outil de soutien public à la recherche réalisée dans les entreprises. Celui-ci sera dorénavant assis plus largement sur le volume des dépenses de recherche et développement des entreprises, ce qui rendra le dispositif plus efficace en améliorant la rentabilité directe de l’investissement en recherche et développement et favorisera l’attractivité de la France pour les centres de recherche et développement.

Mesdames, messieurs les députés, le projet de loi de finances que nous vous présentons aujourd’hui, et sur lequel Jean-François Copé reviendra dans un instant, est sans conteste un budget de croissance, c’est-à-dire un budget porteur de croissance. Il est responsable financièrement, pour conforter la confiance de nos concitoyens. Il est prioritairement ciblé sur l’emploi, de manière à amorcer un enchaînement vertueux de la croissance – car c’est bien l’emploi qui crée l’emploi, comme l’activité qui crée l’activité. Il offre enfin des perspectives d’avenir, pour encourager nos entreprises à investir.

Le projet de loi de finances 2006 vise à faire évoluer le fonctionnement de notre modèle social, pour mieux le préserver. À cette fin, il privilégie des orientations politiques et des solutions fidèles aux convictions et aux valeurs de la majorité parlementaire.

M. Jean-Pierre Brard. Des valeurs cotées en bourse !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Ces valeurs, ce sont d’abord celles d’un État régalien fort pour assurer à tous sécurité et justice.

M. Jean-Pierre Brard. Vous ne savez pas de quoi vous parlez !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Notre premier devoir de solidarité – il ne faut jamais l’oublier, monsieur Brard – est d’assurer à tous nos concitoyens une France plus sûre où chacun peut faire respecter ses droits.

M. Jean-Pierre Brard. Surtout Mme Bettencourt, une copine à vous !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Cela vous échappe, monsieur Brard, mais c’est important pour nos concitoyens qui, eux, le savent.

M. Jean-Pierre Brard. Venez de l’autre côté du périphérique et nous en reparlerons !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Ce sont toujours les plus faibles qui souffrent les premiers quand l’État n’assure plus ses missions premières de maintien de l’ordre, de protection des biens et des personnes et de justice pour tous. C’est pourquoi nous assurons à l’euro près le financement intégral des engagements pris devant vous pour 2006 dans le cadre des lois de programmation pour la sécurité intérieure, pour la justice et pour notre défense nationale. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Ces valeurs, ce sont aussi celles de l’efficacité économique…

M. Didier Migaud. Pour le moment, elle n’est pas là !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. …comme fondement de la bataille pour l’emploi.

C’est, plutôt que d’engager des crédits pour un assistanat sans avenir, le choix résolu d’activer au maximum les dépenses de la politique de l’emploi, notamment avec les contrats d’avenir, la PPE, la prime de 1 000 euros pour les secteurs qui souffrent d’une pénurie de main-d’œuvre et la prime pour la mobilité géographique.

C’est enfin, et surtout, après avoir réinscrit les emplois aidés dans une logique nouvelle et indispensable de droits et de devoirs dans le cadre de parcours réellement individualisés, le choix, prioritaire pour notre gouvernement, de la croissance, de l’investissement et de la réforme du marché du travail pour faire réellement et durablement décoller l’emploi marchand.

Ces valeurs, ce sont encore celles de la baisse des impôts et de la réforme fiscale, pour que le travail paie davantage. Oui, je le dis sans état d’âme,…

M. Jean-Pierre Brard. Nous avions compris que vous n’aviez pas d’états d’âme !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. … nous croyons, comme la majorité d’entre vous, à la baisse des impôts pour dynamiser la croissance, le pouvoir d’achat et l’investissement dans notre pays.

C’est pourquoi ce projet de loi de finances, outre la stabilisation des prélèvements obligatoires, propose, pour les particuliers comme pour les entreprises, la réforme fiscale à la fois la plus juste et la plus ambitieuse depuis longtemps en faveur des classes moyennes et de la compétitivité du territoire français.

M. Augustin Bonrepaux. Que sont les classes moyennes, pour vous ?

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Il apporte des réponses structurelles, comme le plafonnement fiscal ou la réforme de la taxe professionnelle, à des handicaps majeurs de notre système d’imposition.

Ces valeurs, ce sont enfin celles de la maîtrise résolue des finances publiques. Le projet de loi de finances pour 2006 poursuit, pour la quatrième année consécutive, la maîtrise intransigeante des dépenses de l’État. Conjointement avec les mesures prévues par le PLFSS, le respect des 3 % permettra pour la première fois de stopper la progression de la dette publique.

Ainsi, nous exprimerons clairement notre refus de financer plus longtemps à crédit ce modèle social auquel nous sommes tous si profondément attachés.

M. Jean-Pierre Brard. Ben voyons !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Ce faisant, nous marquerons ensemble cette conviction que je sais être la plus profonde et la plus partagée de notre majorité.

Mesdames, messieurs les députés, j’ai toute confiance – peut-être trop – dans la qualité du débat que nous allons maintenant avoir ensemble. Je serai plus que jamais à l’écoute de votre appréciation et de vos propositions, dans l’intérêt de nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Rappel au règlement

M. Jean-Pierre Brard. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour un rappel au règlement. Sur le fondement de quel article, monsieur Brard ?

M. Jean-Pierre Brard. Sur le fondement de l’article 58, alinéa 2, qui a trait au déroulement de nos travaux, monsieur le président.

Nous allons passer une semaine ensemble. Pour que celle-ci soit constructive, utile et aussi paisible que possible (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire),…

M. Jean Auclair. Avec toi, ça ne va pas être facile !

M. le président. Ne répondez pas à la provocation !

M. Jean-Pierre Brard. …il convient de ne pas tenir de propos provocateurs. (« Quel culot ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Comment pouvez-vous oser dire, monsieur le ministre, que nous vivons au-dessus de nos moyens ? C’est vrai pour vous, j’en ai la preuve ici.

M. le président. Monsieur Brard, il ne s’agit pas d’un rappel au règlement !

M. Jean-Pierre Brard. Je termine, monsieur le président. Il y a des indécences qu’il convient d’éviter. Quand tant de gens sont dans la misère, nous n’avons que faire du discours des privilégiés !

M. Jean Auclair. Allez faire un tour en Chine !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État.

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les députés, le budget que j’ai l’honneur de vous présenter aujourd’hui avec Thierry Breton a un caractère tout à fait exceptionnel puisque, pour la première fois, il est entièrement construit, discuté et voté selon le format de la nouvelle constitution budgétaire sur laquelle, depuis plusieurs années, nous avons beaucoup travaillé. Il est ainsi placé sous le signe de la modernité et de la performance de notre gestion publique. Autant dire qu’il s’agit d’une innovation majeure.

Ce budget, nous l’avons préparé avec le souci constant d’être au rendez-vous sur tous les engagements pris devant les Français. Nous avons tous en mémoire les messages qu’ils nous ont envoyés : leurs attentes, leurs impatiences et leurs inquiétudes. Nous devons y répondre en nous mobilisant totalement sans oublier personne. Le Premier ministre a fixé le cap en prenant des initiatives majeures pour fonder la croissance sociale et la confiance, que ce soit dans le domaine de l’emploi, du pouvoir d’achat ou de l’attractivité de notre territoire – les trois lignes directrices de notre feuille de route.

Le projet de loi de finances que nous vous présentons s’inscrit dans cette perspective. Nous sommes au rendez-vous de la LOLF, nous sommes au rendez-vous pour traduire budgétairement vos priorités et nous sommes au rendez-vous de la modernité fiscale et de la responsabilité budgétaire.

Être au rendez-vous de la LOLF, c’est d’abord vous présenter des documents totalement nouveaux. L’ancien bleu budgétaire a cédé la place à ce que nous appelons entre initiés des PAP, c’est-à-dire des projets annuels de performance, qui déclinent les politiques publiques par programmes avec, pour chaque programme, des objectifs et des indicateurs de performance.

Être au rendez-vous de la LOLF, c’est aussi vous garantir la transparence en vous indiquant, par exemple – je sais que vous y êtes très attachés –, les effectifs réels de la fonction publique, ministère par ministère, programme par programme, et le pourcentage des crédits destinés à être mis en réserve au cours de l’exercice.

Être au rendez-vous de la LOLF, c’est enfin mettre la performance au cœur de notre procédure budgétaire. Ce rendez-vous, nous l’avons honoré grâce à vous. À cet égard, je veux saluer le travail accompli au Parlement, notamment par la MILOLF et M. Bouvard, et dans tous les ministères. Je n’oublie pas que cet outil indispensable est l’émanation de votre travail et qu’il a été élaboré dans un esprit de consensus. En effet, la LOLF est un cadre et elle est au service de tous : ce n’est évidemment pas une politique contre une autre. C’est un outil qui peut aussi bien être mis au service d’une politique de diminution du poids de l’État que d’une politique de renforcement de la dépense publique.

M. Jean-Pierre Brard. Expliquez-le à M. Breton !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. C’est pour cette raison, et pour cette raison seulement, que Didier Migaud et Alain Lambert, l’un dans l’opposition l’autre dans la majorité, ont pu travailler main dans la main à mes côtés au service de la République. Le fait est assez rare pour être souligné.

Pour autant, tout reste à faire, car ce qui compte désormais, c’est que notre budget soit lisible pour les Français. Thierry Breton a coutume de dire que nous ne vivons pas dans une bulle, et je partage entièrement cette philosophie. Notre pays et nos compatriotes auraient en effet beaucoup à gagner à regarder ce qui se fait ailleurs.

M. Jean-Jacques Descamps et M. Hervé Novelli. Très bien !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Je fais partie de ceux qui ont l’ambition de proposer aux Français ce qui se fait de mieux à l’étranger, dans le respect, bien entendu, de nos valeurs et de notre modèle. Pour que notre pays dispose des outils les plus performants en la matière, je vous propose deux pistes de travail.

La première consiste à créer, au sein du ministère du budget et de la réforme de l’État, un pôle de référence en matière d’études comparatives internationales. Cela passe par quatre actions simples.

D’abord, il n’est pas question de créer une structure nouvelle, mais de fédérer au sein du ministère des finances toutes les structures ou organismes qui concourent aujourd’hui de manière dispersée à cette activité. Il s’agit de mener une analyse comparative internationale et de vous en soumettre régulièrement les résultats.

Deuxièmement, il nous faut encourager la coopération internationale dans le domaine de la gestion publique et favoriser les échanges de fonctionnaires. Je rêve par exemple que notre nouvelle direction générale de la modernisation de l’État, qui sera en place au 1er janvier et qui fédère des structures travaillant aujourd’hui de manière dispersée à la réforme de l’État, puisse accueillir pour quelque temps des fonctionnaires étrangers, canadiens notamment, qui ont mené, dans leur pays, des réformes de l’État exemplaires. Ce serait là une manière concrète d’étudier ce qui se passe ailleurs et d’en tirer le meilleur profit pour notre pays.

Troisièmement, il nous faut favoriser l’éclosion d’une recherche universitaire dans le domaine de la gestion publique. Puisque nous créons une nouvelle constitution budgétaire et que nous mettons en place de nouvelles pratiques, travaillons-y à tous les niveaux.

Nous pourrions créer une mission éditoriale dans le domaine des études de gestion publique comparée. Quelle plus belle ambition pour notre pays que de lui donner ce qui se fait de mieux à l’étranger !

Par ailleurs, il faut renforcer le débat démocratique sur la performance. Puisque nous avons tous fait le choix de la performance, nous devons faire en sorte que les Français soient les témoins de notre action…

M. Jean-Pierre Brard. Pour l’instant, ils en sont les victimes !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. …et qu’ils puissent participer au débat. C’est pourquoi je vais mettre en place sur Internet, à compter du 1er janvier prochain, un forum de la performance. Les Français pourront trouver sur ce site la description des politiques publiques, à travers les aspects budgétaires – combien cela coûte ? – les aspects performance – quels objectifs et quels indicateurs ? – et les aspects de réforme de l’État : comment faire mieux ?

Ils pourront ainsi avoir accès aux futurs rapports d’audit, qui seront un formidable révélateur de ce que l’on peut faire pour améliorer le fonctionnement et l’efficacité de l’État.

Ce sera l’accès aux études comparatives internationales, à la performance ministère par ministère, mission par mission. Vous l’avez compris, c’est aussi la manière de démontrer à nos compatriotes que l’État est en mouvement et que rien ne se fera sans leur contribution active.

M. Jean-Pierre Brard. Quel ministre !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Je savais que vous apprécieriez cette partie de mon propos, monsieur Brard !

M. Jean-Pierre Brard. Vous me faites penser à Louis XVI, qui faisait des clés, alors que la révolution grondait !

M. le président. Allons, monsieur Brard !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Notre budget met en œuvre les engagements pris par le Premier ministre pour fonder la croissance sociale. Je voudrais rappeler les trois points sur lesquels ce budget est particulièrement focalisé.

Le premier d’entre eux est évidemment l’emploi, priorité absolue du Gouvernement. Nous y consacrons 100 % des marges de manœuvre disponibles, pour un total de 4 milliards d’euros. Un seul exemple : la quasi-totalité des allégements d’impôts prévus pour 2006, s’élevant à 800 millions d’euros, porte sur l’emploi, avec notamment la revalorisation de la prime pour l’emploi. C’était un vœu cher au président Méhaignerie, que nous avons exaucé d’autant plus volontiers qu’il correspond à une idée que nous partageons, celle qu’il convient de récompenser le travail, en particulier pour nos compatriotes les plus modestes, et de sortir de cette aberration qui veut qu’aujourd’hui, une personne percevant les minima sociaux puisse dans certains cas perdre de l’argent si elle reprend un travail (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Cette situation est intenable dans un pays où nous parlons sans cesse de responsabilité. Bien entendu, il convient dans le même temps de veiller à faciliter l’embauche : d’où les mesures que nous proposons pour neutraliser financièrement le franchissement du seuil de 10 salariés, qui viennent concrétiser ce qu’avait annoncé sur ce point le Premier ministre, ainsi que l’achèvement de la montée en puissance des allégements de charges.

Sur ce dernier point, je sais que nous aurons des débats approfondis, et je le souhaite, car rien ne vaut un débat devant le Parlement pour crever les abcès, lever les ambiguïtés et, le cas échéant, en finir avec les tabous.

M. Michel Piron. Très bien !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Certains, parmi vous, s’interrogent sur l’opportunité de cet effort supplémentaire de 1,8 milliard d’euros pour financer l’allégement des charges pesant sur les employeurs. Ils estiment que cette somme aurait pu être affectée soit à une majoration supplémentaire de la prime pour l’emploi, soit à un allégement des cotisations salariales, afin d’améliorer encore davantage le pouvoir d’achat des bas salaires.

Le débat sur ce point me paraît pleinement légitime et a toute sa place dans la discussion générale. Mais pour nous, les choses sont claires : si les allégements de charges augmentent de 1,8 milliard, c’est tout simplement parce qu’en juillet dernier, le SMIC a de nouveau massivement augmenté, comme ce fut le cas en juillet 2003 et en juillet 2004. Comme chacun le sait, ce fut l’une des augmentations les plus importantes jamais réalisées par un gouvernement. Parallèlement, le dispositif d’allégement des charges issu de la loi de François Fillon, pour neutraliser les conséquences de cette augmentation du SMIC, a achevé sa montée en puissance. Personne n’aurait compris que l’on fasse payer cette hausse par les entreprises, à un moment où nous mettons tout en œuvre pour renouer avec la croissance et la création d’emplois.

M. Henri Emmanuelli. C’est donc l’État qui paye !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Voilà ce qui justifie cette progression de 1,8 milliard du coût du dispositif.

Encore une fois, c’est bien un supplément massif de pouvoir d’achat qui a été financé par ce biais. Notre philosophie est la même quand nous augmentons la prime pour l’emploi et quand nous augmentons le SMIC sans pénaliser les employeurs : dans l’un et l’autre cas, il s’agit de distribuer du pouvoir d’achat aux salariés modestes, sans que la compétitivité des entreprises soit altérée. Cette préoccupation est au cœur des ambitions qui fondent notre politique économique.

Revenir sur les allégements de charges, alors que l’augmentation du SMIC est effective depuis près de quatre mois, serait provoquer une rupture dans le contrat qui nous unit aux employeurs ; cela, alors que le développement de l’emploi marchand est au cœur de notre stratégie et qu’il donne désormais de bons résultats, comme l’attestent les derniers chiffres communiqués par l’INSEE ainsi que le formidable succès du contrat « nouvelle embauche » : près de 100 000 contrats conclus en seulement deux mois et demi. En une période où il est de bon ton de n’évoquer que les mauvaises nouvelles, je veux souligner que cette mesure directement orientée vers l’emploi marchand donne des résultats très encourageants pour la suite.

M. Henri Emmanuelli. Ces chiffres, ce sont les vôtres !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Cette politique n’oublie pas ceux de nos concitoyens qui, trop éloignés de l’emploi – on en voit malheureusement beaucoup dans nos permanences et nos missions locales – ont besoin de passer par un contrat aidé dans le secteur public pour accéder ensuite, une fois formés et réinsérés sur le marché du travail, à un emploi privé ou public non aidé…

M. Jean-Pierre Brard. De quelles permanences parlez-vous ?

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. De celle de la mairie de Meaux, par exemple, monsieur Brard !

M. Jean-Pierre Brard. Ah ! Je pensais qu’il s’agissait de celle de M. Breton !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Tel est le sens du développement du contrat d’avenir, destiné aux personnes titulaires d’un minimum social, ou du contrat d’accès à l’emploi.

Notre démarche se caractérise par une marque de fabrique qui tient en trois idées. D’abord, le refus d’opposer systématiquement, de manière idéologique, l’économique et le social, donc, au final, d’opposer les Français les uns aux autres.

M. Henri Emmanuelli. Nous n’opposons pas ces deux notions, bien au contraire !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Nous ne pourrons pas reconquérir la considération de nos concitoyens en passant notre temps à opposer les bons aux méchants, ceux qui ont raison à ceux qui ont tort. Je suis de ceux qui pensent que l’idéologie et l’économie doivent définitivement divorcer. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

La deuxième idée qui sous-tend notre démarche, c’est la rupture avec la logique de l’assistance, qui a si longtemps tenu lieu de politique sociale à notre pays. La troisième, enfin, c’est l’engagement d’accompagner tout le monde, aussi longtemps qu’il le faut, sur le chemin du retour à l’emploi, dans une logique de générosité mais aussi de responsabilité, de droits mais aussi de devoirs.

Car vous l’avez compris, notre philosophie consiste à replacer le travail sur la plus haute marche du podium, au cœur de notre modèle de croissance. C’est la seule façon pour notre pays de relever la tête et de mettre fin à cette insupportable ambiance de décrochage qui s’est installée. Alors que le monde bouge, notre pays doit être en première ligne pour bouger aussi ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Claude Sandrier. Qu’est-ce que vous faites depuis trois ans et demi ?

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. La deuxième priorité de ce budget, c’est la restauration de l’État régalien, réclamée par les Français tout au long des années 1990. Nous avions dans ce domaine une mission très claire : la sécurité, la justice, la défense, l’école, sont autant de domaines sur lesquels les Français attendent des moyens et des résultats…

M. Jean-Pierre Balligand. Ils attendent toujours, en effet !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. …et sur ce point, nous avons honoré à l’euro près l’ensemble des lois de programmation que vous aviez votées.

La troisième priorité consiste à préparer la France aux défis de l’avenir. Dans ce domaine, tous les engagements ont été tenus. C’est le cas pour la recherche, avec 1 milliard d’euros et 3 000 emplois nouveaux. C’est également le cas en ce qui concerne la création de pôles de compétitivité, avec 55 projets de pôles de compétitivité adoptés et 11 autres examinés en novembre prochain. Nous avions annoncé la création de l’Agence pour l’innovation industrielle : pari tenu là aussi, avec 2 milliards inscrits dans le budget. Il en va de même, enfin, de l’AFITF, pour laquelle nous prévoyons une dotation en capital de 4 milliards d’euros. Vous pouvez donc être rassurés : les contrats de plan seront honorés.

M. Henri Emmanuelli. Il devait y en avoir 7 !

M. Augustin Bonrepaux. Vous vous moquez du monde ! C’est de la provocation !

M. le président. Allons, monsieur Bonrepaux !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Nous aurons l’occasion d’en reparler.

La troisième caractéristique du projet de loi de finances que nous vous présentons, c’est qu’il marque un rendez-vous en matière de réforme fiscale. La réforme proposée correspond à une attente très forte exprimée par nos compatriotes depuis des années, pouvant se résumer en trois mots-clés : la justice, la simplicité, la compétitivité.

La justice, d’abord, maître mot de cette réforme fiscale.

M. Jean-Pierre Brard. Avec componction !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. La refonte de l’impôt sur le revenu, couplée avec l’augmentation massive de la prime pour l’emploi, va bénéficier pour l’essentiel aux Français des classes moyennes et modestes, avec un objectif : valoriser l’effort des Français qui travaillent, et faire enfin une vraie différence entre les revenus du travail et ceux de l’assistance. C’est cela, être juste ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Être juste, c’est aussi avoir le souci de cantonner les gains pour les hauts revenus. Le nouveau taux marginal de l’impôt sur le revenu est ainsi fixé à 40 %, au lieu de 38 % si l’intégration de l’abattement de 20 % avait été mécanique.

Être juste, c’est également mettre en place un mécanisme de double plafonnement.

M. Henri Emmanuelli. Ah ! Nous y voilà !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. D’une part, un plafonnement de la charge fiscale à 60 % du revenu, ce qui rapproche l’impôt dû par les Français de leurs capacités contributives. D’autre part, un plafonnement des avantages fiscaux, afin d’éviter les cumuls abusifs. Je rappelle d’ailleurs qu’il s’agit là d’une revendication ancienne de votre commission des finances.

M. Augustin Bonrepaux. Mystification que cette présentation !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. En ce qui concerne le plafonnement fiscal à 60 %, je rappellerai en premier lieu qu’il s’appliquera pour les impôts dus en 2006 sur les revenus 2005. Je suis, comme vous, attaché au respect des principes qui fondent ce plafonnement. Pour autant, je ne suis pas fermé à l’adaptation des modalités de mise en œuvre de ce dispositif que nous examinerons dans quelques semaines, pendant la discussion de la deuxième partie de ce projet de loi de finances. Hervé Mariton nous a ainsi proposé que l’État prenne seul en charge le coût du plafonnement, lorsque les impôts qu’il prélève sont, à eux seuls – donc à l’exclusion des impôts locaux – responsables du franchissement du seuil de 60 %. Je vous annonce aujourd’hui que le Gouvernement acceptera cet amendement.

M. Henri Emmanuelli. On ne le paiera pas dans les collectivités locales ! C’est de la provocation !

M. Augustin Bonrepaux. Vous tenez enfin votre revanche !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Le Gouvernement est également favorable, si l’Assemblée nationale ou le Sénat le proposent, à une mutualisation de la prise en charge, par les collectivités locales, de la part qui leur revient dans le financement du plafonnement. On peut envisager, par exemple, que la refacturation s’effectue non pas collectivité par collectivité, mais globalement, par imputation sur la dotation globale de fonctionnement. Dans le même temps, nous pourrions modifier les critères de répartition de la DGF, afin que seules les collectivités ayant exagérément augmenté leur pression fiscale subissent un prélèvement du fait du plafonnement.

M. Jean-Pierre Brard. Le vol est plus discret, mais cela reste du vol !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. La justice, enfin, c’est aussi une relation plus claire entre le contribuable et l’administration fiscale.

C’est un chantier majeur sur lequel je me suis beaucoup engagé cette année, et qui est au cœur même de l’action de l’État. C’est dans cet esprit que j’ai conçu une Charte du contribuable, disponible depuis hier sur Internet et dans tous les hôtels des impôts.

M. Henri Emmanuelli. Nous sommes sauvés !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Pour la première fois, sont ainsi gravés dans le marbre les droits et les devoirs du contribuable, avec une série d’engagements très forts de la part de l’administration fiscale, en matière de simplicité, de respect et d’équité.

Je veux citer à titre d’exemple une mesure importante et emblématique au regard de la longue histoire des relations entre le fisc et le contribuable : celle qui consiste à rompre avec une situation extrêmement choquante, qui voulait que l’on applique un taux d’intérêt différent selon que l’on avait affaire à l’État créancier – qui exigeait 9 % d’intérêts – ou à l’État débiteur – qui considérait, lui, ne devoir que 2 %. J’ai voulu mettre un terme à cette situation qui donnait l’impression qu’il y avait deux poids, deux mesures, et j’ai donc décidé de fixer un taux unique de 4,8 % pour les intérêts de retard, qu’ils soient dus par le contribuable ou par l’État. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

La simplicité est le deuxième mot-clé de cette réforme fiscale. Elle caractérise la refonte totale de l’impôt sur le revenu, avec quatre taux au lieu de six, et la suppression de l’abattement de 20 %. Mais elle est aussi à l’origine de la suppression de deux impôts dans ce projet de loi de finances, ce qui est suffisamment rare pour être souligné. Ainsi la contribution sur les revenus locatifs des particuliers et la vignette automobile sur les véhicules de société seront-elles rangées au magasin des mauvais souvenirs.

M. Henri Emmanuelli. Merci pour eux !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Je suis persuadé, monsieur Emmanuelli, que vous aurez à cœur de promouvoir la politique que nous menons.

M. Henri Emmanuelli. Vous faites tout pour le CAC 40 et rien pour le reste de la société !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Vos propos donnent un bel exemple du travers que je dénonçais il y a quelques instants, consistant à opposer les Français les uns aux autres.

L’idée de simplicité est bien évidemment présente dans la Charte du contribuable. On la retrouve dans la télédéclaration, dont l’énorme succès de l’année dernière – 3,7 millions de télédéclarants dans une ambiance d’embouteillages – m’a incité à porter la capacité d’accueil du portail à 10 millions de télédéclarants pour la prochaine campagne de déclaration.

Elle inspire aussi la déclaration préremplie, dont les tests effectués en Ille-et-Vilaine constituent une expérience très intéressante. Le président Méhaignerie y est très attentif, et j’annoncerai d’ici à la fin de l’année si cette mesure sera ou non généralisée.

Elle est, enfin, à l’origine de la simplification des pénalités. Au total, 146 articles du code général des impôts seront supprimés et 57 réécrits ou adaptés, ce qui témoigne de notre volonté d’avoir une législation aussi accessible que possible.

La compétitivité est le troisième mot-clé de la réforme. C’est un mot un peu compliqué, mais dont une simple image suffit à résumer toute l’importance, à savoir les larmes que nous versons quand nos entreprises se délocalisent, quand nos emplois quittent la France, laissant des centaines de salariés sur le carreau. C’est un drame humain pour les familles et pour les territoires qui sont touchés et, pour l’ensemble de notre nation, un véritable constat d’échec.

Le mot « compétitivité » n’appartient ni aux théoriciens, ni aux technocrates. C’est la responsabilité majeure des hommes politiques : il serait irresponsable de considérer ce sujet comme secondaire, alors qu’il doit être au cœur de toute politique économique. C’est dans cet esprit que s’inscrivent trois mesures de ce PLF visant à y répondre.

Il s’agit en premier lieu de la réforme de la taxe professionnelle. Que n’a-t-on pas dit ou écrit sur le sujet depuis l’annonce de cette réforme !

Voilà des années qu’à longueur de colloques et de rapports, chacun y va de sa contribution pour réformer cet impôt inadapté à notre réalité économique. Et, chaque année, au moment d’appuyer sur le bouton fatidique, on trouve toujours de bonnes raisons pour différer la décision. Aujourd’hui, la situation n’est plus supportable. On a d’un côté, des élus et des citoyens qui s’inquiètent, à juste titre, des risques majeurs de délocalisations, et de l’autre, un impôt dont le poids peut atteindre 10 % de la valeur ajoutée des entreprises, ce qui est évidemment intenable.

La responsabilité politique, c’est d’assumer ! Je propose donc que, désormais, plus aucune entreprise ne paye plus de 3,5 % de sa valeur ajoutée au titre de la taxe professionnelle.

M. Jean Auclair. Très bien !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Vous l’avez compris, cette réforme, elle est d’abord pour les entreprises, pour l’emploi et pour les territoires.

Nous aurons un débat approfondi sur ce sujet, …

M. René Dosière. Oh oui !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. …chacun comprenant bien qu’une réforme de cette ampleur ne sera pas sans conséquences sur les recettes des collectivités locales. Je veux dire ici d’emblée que je suis prêt à examiner des clauses de sauvegarde. Je suis ouvert à la mise en place d’un mécanisme correcteur, qui permettra aux collectivités ayant une trop forte proportion de bases plafonnées, et ayant toujours eu une politique de taux responsable, d’avoir un traitement particulier, leur garantissant leurs marges de manœuvre.

M. Henri Emmanuelli. Que faites-vous de la Constitution ?

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Nous y avons également pensé, monsieur Emmanuelli. Ayant présenté, lorsque j’étais au ministère de l’intérieur, le texte de loi organique sur l’autonomie financière, je n’ai rien oublié de ces débats.

M. Henri Emmanuelli. Vous êtes en train de violer la Constitution !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Nous verrons ! À chacun son métier, monsieur Emmanuelli !

M. Henri Emmanuelli. Vous faites mal le vôtre !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. La mise en place d’un plafonnement fiscal est le deuxième élément de la compétitivité. Nous l’avons fixé à 60 %. C’est un taux qui a été beaucoup discuté, y compris au sein de notre majorité. Notre choix a été guidé par la volonté de s’adosser à la moyenne européenne. Nous avons voulu, là encore, regarder ce qui se faisait ailleurs.

De ce point de vue, et alors que je me trouvais aux États-unis, j’ai eu un échange assez intéressant avec mes homologues américains qui se demandaient si ce taux de 60 % pouvait intéresser des investisseurs américains.

M. Jean-Pierre Brard. Ils viennent déjà !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Je leur ai fait observer qu’en France, on avait sans doute un plafonnement plus élevé qu’aux États-unis, où il est de 45 %, mais qu’on avait aussi une école gratuite, un système de soins performant accessible à tous, et une retraite garantie car relevant de la solidarité nationale. C’est là une différence majeure entre le modèle français et les autres. Cela ne doit pas pour autant nous dissuader de regarder comment être compétitifs. Adopter un plafonnement à 60 %, c’est adresser à tous un message clair, celui qui consiste à rappeler que l’impôt ne doit pas être confiscatoire et que ceux qui veulent venir en France pour développer leur talent, investir et apporter le meilleur d’eux-mêmes sont les bienvenus car notre pays est compétitif dans tous les domaines, y compris désormais sur le plan fiscal.

M. Henri Emmanuelli. Blablabla !

M. Jean-Pierre Brard. Ceux auxquels vous faites allusion sont déjà là, monsieur Copé !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. S’agissant de l’impôt sur le patrimoine, réformer l’ISF pour réformer l’ISF ne peut évidemment pas être une priorité. Cela n’aurait d’ailleurs aucun sens. En revanche, réformer l’ISF pour favoriser l’emploi et la compétitivité, ça, ça a du sens.

Nous avons tous été marqués par des exemples inquiétants d’entreprises cédées à des groupes étrangers pour des motifs liés à la fiscalité française.

M. Henri Emmanuelli. Et à vos privatisations !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. C’est aussi vrai à droite qu’à gauche de cet hémicycle. Je ne citerai, pour vous en persuader, que deux exemples : l’excellent rapport du député Michel Charzat, …

M. Henri Emmanuelli. Cela commence à dater !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. …ou encore les recommandations d’Éric Besson dans un rapport de 1999, qui souhaitait encourager les investisseurs « par le biais d’un aménagement de l’ISF en leur faveur ». On ne saurait être plus clair.

L’objectif est simple pour nous : il s’agit de mieux préserver nos emplois et notre compétitivité. C’est la feuille de route que le Premier ministre nous a fixée.

Votre commission des finances a déposé un amendement qui s’inscrit dans cette philosophie. Il est tout à fait en cohérence avec ce que nous entendons faire au service de l’emploi et de l’investissement.

Ce projet me semble donc aller dans le bon sens.

Dernier point, l’ensemble de tout cela se fait naturellement dans une logique de responsabilité du point de vue de nos finances publiques. Thierry Breton l’a rappelé à l’instant, et j’invite l’Assemblée à avoir ces données présentes à l’esprit lorsque nous débattrons sur le fond, nous avons eu à construire ce budget dans des conditions extrêmement difficiles, avec une très forte accumulation de contraintes :

Un prix du pétrole qui a doublé en six mois ;

Un ralentissement marqué de la croissance économique en Europe et en France, même si nous faisons un peu mieux que la moyenne européenne grâce au dynamisme de notre marché intérieur – M. Migaud le sait ;

M. Didier Migaud. Ce n’est pas vrai, malheureusement !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Enfin, la concurrence de plus en plus marquée des pays émergents.

Se sont ajoutées à cela des contraintes budgétaires lourdes :

Une progression spontanée moins soutenue des recettes ;

Une forte augmentation des prélèvements sur recettes au profit de l’Union européenne et des collectivités locales puisqu’il a fallu trouver 3 milliards d’euros de plus que l’année dernière ;

La perte par l’État d’une recette de 3 milliards d’euros puisque la CADES cesse ses versements au budget général, à compter du 1er janvier prochain.

Vous l’avez compris, nous avions à démarrer notre budget avec une contrainte de pratiquement 6 milliards sans compter les moindres progressions des recettes fiscales.

C’est dans ce contexte que nous avons eu à présenter notre copie qui fait apparaître qu’en dépit du contexte, le déficit budgétaire est stabilisé à 46,8 milliards d’euros, c’est-à-dire au même niveau qu’en 2005, et que les dépenses n’augmentent pas en volume pour la quatrième année consécutive.

M. Henri Emmanuelli. Personne n’y croit !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. C’est probablement ce qu’on pouvait faire de plus raisonnable, pour reprendre une expression chère à Gilles Carrez.

Alors, allez-vous me dire, ne fallait-il pas dans ce contexte aller encore plus loin dans la réduction des dépenses ? Certains d’entre vous le réclament, davantage dans les rangs de la majorité que dans ceux de l’opposition. J’ai bien entendu ces demandes. Et je voudrais prendre le temps d’y répondre, en m’attardant un peu sur cette question. Car, en matière de dépenses publiques, je peux apporter un témoignage live de ministre du budget. Je crois que nous sommes tous parfois un peu schizophrènes. Ce sont souvent les mêmes, en effet, qui clament tout haut qu’il faut réduire la dépense publique par exemple à l’école, mais qui viennent ensuite me dire tout bas : « Pas dans l’école de mon fils ou de ma circonscription ! ».

En tout état de cause, je ne crois pas que le rabot puisse être l’alpha et l’oméga d’une politique budgétaire. Cette idée que, dans l’urgence, le ministre du budget vient proposer, la mort dans l’âme, une réduction automatique au prorata de tous les budgets parce qu’il faut boucler la boucle est insupportable.

Je souhaite donc qu’on sorte de cette démarche strictement comptable qui est totalement démotivante pour tout le monde, y compris pour les fonctionnaires, et qui n’a pas d’effet durable.

En revanche, j’adhère totalement à une démarche de maîtrise des dépenses, et c’est la moindre des choses pour un ministre du budget. Je suis donc d’accord pour faire des économies complémentaires. Je sais que la commission des finances a de nombreuses idées en la matière, et je suis prêt à les examiner à la condition que les propositions d’économie soient documentées, consensuelles, bien comprises et ne conduisent pas à des blocages. D’autant que, même si je peux comprendre que ce point ne vous préoccupe pas outre mesure, certains dans les ministères pourraient penser que je suis à l’origine de manœuvres troubles que j’aurais menées avec la complicité des parlementaires de la commission des finances. (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Louis Idiart. Cela montrerait qu’ils connaissent bien leur ministre !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. C’est donc tout à fait inimaginable. Mais je sais que vous aurez à cœur de veiller à la bonne cohésion de l’équipe gouvernementale dans ce contexte…

Je souscris d’autant plus volontiers à votre préoccupation que j’ai lancé, voilà quelques jours, une vague d’audits dans tous les ministères. C’est une démarche inédite. Il s’agit de soulever le capot pour voir comment on peut améliorer l’efficacité de l’État, dans toutes les procédures conduites. Là, on documente les gains de productivité à réaliser. Et c’est sur cette voie que je veux travailler avec vous durant l’année 2006

Vous l’avez compris, ce budget est une invitation à aller plus loin dès demain : plus loin sur la forme, avec tout un travail à mener sur le meilleur parti à tirer de la LOLF ; plus loin sur le fond, en progressant pour aller de la dépense à zéro volume à zéro en valeur.

M. Jean-Pierre Brard. Parlez en français !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. C’est de l’économie, monsieur Brard !

En la matière, nous aurons un travail considérable à accomplir.

Au moment où va s’engager notre long débat budgétaire, je veux vous dire le plaisir qui est le mien de pouvoir discuter de tous ces points avec vous : soyez assurés de ma totale disponibilité pour répondre à toutes les questions qui se poseront et pour examiner sereinement tous vos amendements.

C’est dans cette voie que je veux travailler avec vous, pour un État pleinement efficace, au service de tous les Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Rappels au règlement

M. Didier Migaud. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président. La parole est à M. Didier Migaud, pour un rappel au règlement.

M. Didier Migaud. Il porte sur la suite de nos travaux. M. le ministre, que j’ai écouté avec attention, nous a expliqué que la fameuse mesure sur le bouclier fiscal s’appliquerait sur les revenus de 2005. Est-ce bien cela, monsieur Copé ?

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Oui.

M. Didier Migaud. Or, il est précisé à l’article 58 du projet de loi de finances que ce droit pourrait être exercé à partir du 1er janvier 2007 au titre des impôts payés en 2006. Qu’en est-il en réalité ? Il y a là une formidable ambiguïté et je ne vois pas comment nous pourrions poursuivre nos débats dans ces conditions. La commission des finances est partie sur l’idée que, normalement, le bouclier fiscal s’appliquait, comme les autres mesures fiscales, pour les revenus de 2006. La déclaration du ministre est donc pour le moins surprenante.

Monsieur le président, nous souhaitons en savoir davantage pour la suite de nos travaux. Cette information risque effectivement de modifier sensiblement la discussion puisque la disposition en cause figure dans la deuxième partie de la loi de finances, alors qu’elle devrait être dans la première partie.

M. Augustin Bonrepaux. Oui, c’est en première partie qu’il faudrait l’examiner !

M. le président. Monsieur Bonrepaux, ne vous énervez pas, c’est mauvais pour votre cœur !

La parole est à M. le ministre délégué au budget.

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Monsieur Migaud, c’est bien sur les revenus de 2005 et donc les impôts de 2006 que porte la mesure, mais la restitution aura lieu au début de 2007.

M. Didier Migaud. C’est scandaleux !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Je ne sais pas si c’est scandaleux, mais c’est en tout cas ainsi que c’est prévu.

M. Henri Emmanuelli. C’est impossible !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Ce qui m’étonne c’est votre étonnement, monsieur Migaud ! En effet, vous nous avez déjà posé ces questions en commission des finances et Thierry Breton et moi-même y avons largement répondu.

M. Didier Migaud. Pas du tout !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Je peux comprendre qu’à ce stade du débat, vous ayez envie de revenir dans le détail. Pour ce qui me concerne, en tout cas, j’ai toujours eu la même position. Il n’y a donc aucune ambiguïté…

M. Didier Migaud. Ce n’est pas vrai du tout !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. ...sur le fait que ces mesures doivent être présentées en seconde partie puisque la restitution aura lieu début 2007.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault.

M. Jean-Marc Ayrault. Nous sommes en pleine confusion. C’est même une première puisque ce débat fiscal est renvoyé à la deuxième partie de la loi de finances. Nous ne pouvons pas continuer de travailler dans de telles conditions.

M. Henri Emmanuelli. Nous n’avons jamais vu ça !

M. Jean-Marc Ayrault. C’est extrêmement dangereux, ne serait-ce que du point de vue de la transparence dont se réclament M. Breton et M. Copé.

Monsieur le président, je demande donc une suspension de séance, non pas pour réunir mon groupe, mais pour éclaircir cette question. Je souhaite que M. le président de la commission des finances prenne l’initiative de réunir la commission pour aller au fond des choses avant de poursuivre nos travaux.

M. le président. La suspension est de droit.

La séance est suspendue pour cinq minutes.

M. Henri Emmanuelli. Non, ce n’est pas assez ! Nous voulons une réunion de la commission des finances !

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures dix, est reprise à dix-huit heures vingt.)

M. le président. La séance est reprise.

Je vais suspendre à nouveau la séance pour permettre à la commission des finances de se réunir.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue, est reprise à dix-huit heures cinquante-cinq, sous la présidence de M. René Dosière.)

PRÉSIDENCE DE M. RENÉ DOSIÈRE,
vice-président

M. le président. La séance est reprise.

Rappel au règlement

M. Jean-Marc Ayrault. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, pour un rappel au règlement.

M. Jean-Marc Ayrault. Monsieur le président, je voudrais exprimer une satisfaction de forme. Tout le monde a enfin admis qu’il était nécessaire – et c’est un fait exceptionnel – de réunir la commission des finances avant de commencer la discussion budgétaire, après l’intervention des deux ministres, mais avant même l’intervention du rapporteur général. Cela a permis d’éclairer certains points soulevés par mon collègue Didier Migaud.

Avant que le rapporteur général et le président de la commission des finances ne s’expriment, je souhaiterais préciser un point très important. Pendant la réunion de la commission des finances, le Gouvernement a affirmé que l’Assemblée nationale allait examiner une réforme fiscale, le fameux « bouclier fiscal », mais également la réforme très importante de la taxe professionnelle qui aura des conséquences sur les finances des collectivités locales, et ce sans véritable simulation, c’est-à-dire quasiment à l’aveuglette. Or je trouve que c’est une responsabilité extrêmement grave que prennent le Gouvernement et la majorité vis-à-vis des Français concernés.

Nous prenons date parce que ce débat aura lieu pendant tout l’examen de la loi de finances, pendant la première partie, mais surtout pendant la seconde partie.

Qu’un ministre nous réponde : « Oui, nous avons un certain nombre d’informations, nous vous les donnerons au fur et à mesure et, si vous les demandez, nous vous les donnerons par territoire, on verra bien », est profondément choquant, mais surtout très lourd de conséquences ! Ce ne sont pas des petites réformes à la sauvette, des détails dont nous allons discuter. Et vu le nombre d’articles du code général des impôts visé par ce que le Gouvernement nous a annoncé, M. Coppé l’a indiqué tout à l’heure, je trouve que cette affaire est particulièrement inquiétante.

Avant de reprendre nos travaux, je tenais, au nom du groupe socialiste, à attirer solennellement l’attention de l’Assemblée nationale, mais aussi de l’opinion publique qui doit savoir dans quelles conditions le Parlement travaille, avec toutes les conséquences qui en découleront pour les Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Reprise de la discussion

M. le président. La parole est à M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan.

M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je commencerai par porter une appréciation d’ensemble sur le projet de loi de finances pour 2006.

Ce projet de budget est mieux que raisonnable. C’est un projet de budget responsable, de qualité, qui met au service de la politique de l’emploi les marges de manœuvre, certes réduites, dont nous disposons.

C’est un budget responsable parce qu’il poursuit l’assainissement de nos finances publiques dans un contexte difficile où, il faut le reconnaître, le déficit reste à un niveau élevé. Nous sommes bien conscients que seul le retour d’une croissance substantielle permettra de le réduire, comme cela a été le cas en 2004.

Mais c’est surtout un budget ambitieux, totalement consacré à la priorité pour l’emploi. Car soyons-en conscients, c’est par le biais de la réduction du chômage que nous ramènerons la confiance, et c’est en ramenant la confiance que nous retrouverons le chemin d’une croissance durable. Et cette priorité, chers collègues, est traduite dans les actes : elle est omniprésente dans ce projet de budget.

D’ailleurs, les premiers effets de cette politique, engagée depuis quelques mois, se font sentir puisque, pour le cinquième mois consécutif, nous enregistrons une baisse du chômage, ce qui ne s’était jamais vu depuis 2001 (« Tout à fait ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire), le chômage, je le rappelle, ayant commencé à progresser à la mi-2001.

M. Michel Bouvard. Il faut le rappeler !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Cette bataille pour l’emploi inspire les trois grandes séries de mesures qui figurent dans ce projet de budget.

Tout d’abord, dans le cadre de la stabilisation de la dépense, 3 milliards d’euros de crédits sont redéployés pour être consacrés à la politique de l’emploi : amélioration de l’insertion professionnelle des jeunes, contrat d’apprentissage, renforcement de l’accompagnement personnalisé, montée en charge des nouveaux contrats aidés.

Deuxième série de mesures : la dernière étape de l’allègement des charges sociales patronales, qui est consécutive à la loi du 17 janvier 2003 et à l’unification des SMIC qui s’est achevée au 1er juillet dernier. En l’espace de trois ans, le SMIC aura été augmenté de 11 %, c’est-à-dire que nous avons fait beaucoup mieux que la précédente majorité en l’espace de cinq ans. 1,8 milliard d’euros est donc dégagé pour permettre cette montée en charge et, désormais, la stabilisation de l’allègement des charges sociales patronales.

Troisième série de mesures : l’encouragement du travail et, en particulier, de la reprise d’emploi grâce à un effort substantiel sur la prime pour l’emploi – plus 500 millions en 2006 et 500 millions à nouveau en 2007. La prime pour l’emploi sera ainsi doublée pour un salarié au SMIC à mi-temps et augmentera de 50 % pour un salarié au SMIC à plein-temps.

De surcroît, cette stratégie visant à développer l’emploi et la croissance sera amplifiée en 2007, avec la réforme de l’impôt sur le revenu, qui encourage avant tout le travail, et celle de la taxe professionnelle, qui permettra d’améliorer la compétitivité des entreprises.

Après l’emploi, la priorité est à l’assainissement des finances de l’État. Il est indispensable de tout mettre en œuvre pour maîtriser les dépenses de l’État. Celles-ci sont stables, désormais, puisque, en 2006, pour la quatrième année consécutive, elles n’augmenteront qu’à hauteur de l’inflation : cela ne s’était jamais vu depuis que le budget de l’État est en déficit, c’est-à-dire depuis 1981.

M. Marc Laffineur. C’est vrai ! Bravo !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Il faut le souligner, cet effort est très important. La seule augmentation mécanique des dépenses de personnel et des pensions, et la charge de la dette consomment à elles seules la quasi-totalité des marges de manœuvre rendues disponibles par l’augmentation annuelle des dépenses de l’État à hauteur de l’inflation.

Dans ce cadre général, des dispositifs particuliers sont mis en place. On note tout d’abord la poursuite du remplacement partiel des départs en retraite de fonctionnaires. D’autre part, pour la première fois, dans le cadre de la LOLF, les règles du jeu seront fixées à l’avance puisque, en exécution, on respectera les plafonds de dépense : un taux de mise en réserve est en effet prévu, avec un montant de 5 % pour tous les crédits qui ne concernent pas les dépenses de personnel, et de 0,1 % pour les dépenses de personnel. Au total, cela donne 5,5 milliards d’euros. En 2006, ce pilotage des dépenses nous permettra de ne pas excéder l’enveloppe de dépense que nous allons voter.

Nous mettons également en place, pour chaque programme, des dotations calibrées dès le premier euro. En la matière, la tâche des rapporteurs spéciaux ou pour avis sera essentielle, puisqu’ils ne travailleront pas seulement sur des mesures nouvelles, mais pourront mettre en cause, dès le premier euro, les moyens consacrés aux objectifs prévus par rapport aux indicateurs utilisés. La responsabilisation des directeurs de programmes va de pair avec ce mouvement, puisqu’ils bénéficieront de crédits fongibles. Ils auront donc une véritable liberté de gestion : qui dit liberté et responsabilité de gestion dit économies substantielles à la clef. Mais je voudrais surtout insister sur la responsabilité qui nous incombe, à nous, députés. Le ministre disait tout à l’heure que, dès lors que nous proposerons des économies, il ne faudra pas rester au niveau des généralités. Il a raison. Les économies que nous proposerons seront précises et motivées.

Nous devons être très attentifs aux dépenses, car nos marges de manœuvre sont extrêmement limitées. Je voudrais, à ce propos, évoquer un point qui nous préoccupe, messieurs les ministres. Quand on étudie de près le projet de budget pour 2006, on s’aperçoit que, pour quelque 4 milliards d’euros, les baisses d’impôt…

M. Alain Bocquet. C’est pour les riches !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. …sont imputables à des décisions qui ont été prises avant même que nous n’abordions la discussion de cette loi de finances. Elles concernent tous les Français, toutes les entreprises, grandes, petites ou moyennes − et c’est une bonne chose −, mais elles ont été dispersées au gré de divers textes, sans unité de lieu, bien souvent en dehors des lois de finances, et sans unité de temps, puisqu’elles s’échelonnent sur plusieurs années. Cela compromet la visibilité du dispositif. Nous souhaiterions une plus grande cohérence et que l’ensemble de ces baisses d’impôt soient regroupées dans des lois de finances − c’est tout l’intérêt des lois de programmation pluriannuelle. Dès lors que, en 2006, on compte déjà près de 4 milliards d’euros de baisses d’impôt, il est évident que l’on ne peut guère envisager de mesures nouvelles, spécifiques à l’année 2006. Je voudrais souligner à quel point les propositions du Gouvernement sont, cette fois, raisonnables, puisqu’il est proposé des baisses d’impôt pour un total de 800 millions : elles profiteront essentiellement aux ménages modestes, grâce à l’augmentation de la prime pour l’emploi, mais aussi à l’ensemble des ménages, avec les mesures en matière de donations. Nous avons en effet tout intérêt à faciliter les donations entre grands-parents, parents, enfants et petits-enfants, pour réinjecter de l’argent dans les circuits économiques et soutenir la croissance.

Pour compenser ces baisses accordées aux ménages, les grandes entreprises sont sollicitées à travers la réforme de l’imposition forfaitaire annuelle, la fiscalisation des emprunts qui ont été émis il y a une quinzaine d’années sous forme de titres subordonnés à durée indéterminée, la fiscalisation en matière de plus-values ou moins-values sur les titres de participation ou les immeubles de rapport. On demande donc un effort à de grandes entreprises pour financer des mesures d’allégement qui vont en priorité aux ménages modestes par le biais de la prime pour l’emploi.

Il est vrai que les recettes non fiscales sont sollicitées, mais n’oublions pas que, pour la première fois en 2006, nous ne pouvons pas inscrire 3 milliards de remboursement de la CADES, comme nous l’avons fait les dernières années. L’essentiel de ces recettes à caractère non fiscal provient d’un prélèvement sur le Fonds de garantie de l’accession sociale, pour 1,4 milliard, de l’inscription en anticipation de leur cession des plus-values au titre des actions que détient l’établissement public Autoroutes de France dans les sociétés concessionnaires d’autoroute, pour 950 millions, et d’une sollicitation accrue de la politique de cession immobilière, en particulier en direction de Réseau ferré de France. En me fondant sur l’expérience des dernières années, je peux assurer que cette prévision de recettes non fiscales est parfaitement crédible, et je suis sûr qu’elle sera exécutée. J’ai pu lire, ici ou là, que nous prenions des risques. Je ne le crois pas.

J’en viens aux recettes fiscales proprement dites. J’ai lu qu’elles présentaient une fragilité. Je ne suis absolument pas d’accord avec cette appréciation. Les ministres ont tout à fait raison de souligner, et nul ne peut le contester, que le potentiel de croissance de notre économie est d’au moins 2 %. Il est vrai que, en 2005, l’évolution du prix du pétrole a connu un paroxysme, mais il y a peu de risques de retrouver un phénomène aussi aigu en 2006. Thierry Breton a parfaitement expliqué que le budget est construit à partir de mesures d’offres qui permettront de stimuler la croissance. C’est le cas lorsqu’on met en place des dispositifs comme le contrat nouvelles embauches − le cent millième vient d’être signé −, le dégrèvement de taxe professionnelle sur les nouveaux investissements, qui sera effectif en 2006, ou lorsque, par le biais de l’Agence de financement des infrastructures de transport, on débloque plusieurs milliards d’euros qui permettront notamment de solder les contrats de plan. L’intérêt de ces derniers investissements est tout particulier.

M. Michel Bouvard. Très bien !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. On est sûr que ces mesures auront un impact.

En outre, l’acquis de 2005 est loin d’être négligeable. En juin dernier, je lisais un peu partout les prévisions assez pessimistes de prétendus experts qui affirmaient que, à la fin de l’année, nous aurions 10 ou 12 milliards de recettes fiscales en moins. Les ministres confirment que nous aurons certes une moins-value, mais qu’elle devrait être contenue à 2 ou 3 milliards, ce qui est fort raisonnable. En matière de recettes, les prévisions sont également crédibles.

Les dépenses seront donc gérées, à l’euro près, dans le cadre de l’enveloppe votée, et la prévision des recettes me paraît très raisonnable. Pourtant, malgré des prévisions aussi sérieuses, il faut reconnaître que le déficit reste à un niveau préoccupant, autour de 45 ou 46 milliards d’euros, ce qui est trop élevé. Il est vrai que c’est le résultat d’une longue histoire : nos budgets sont entrés en déficit en 1981 et nous avons eu toutes les peines du monde à redresser la barre. Je voudrais évoquer à nouveau ce que j’appelle la règle des 10 milliards d’euros : lorsque la croissance est de l’ordre de 2 à 2,25 %, elle fournit spontanément, à structure fiscale inchangée, une recette complémentaire globale de 10 à 12 milliards d’euros. Comment les utiliser ? Dès lors que, chaque année, on actualise les dépenses à hauteur de l’inflation, on consomme ainsi 5 milliards. Il en reste donc 5 ou 6, mais, en réalité, beaucoup moins, car, chaque année, tous les concours de l’État aux collectivités locales sont indexés − cela représente la bagatelle de 60 milliards d’euros − et notre contribution au budget européen augmente, si bien que, en réalité, au bout du compte, il ne reste que 4 à 5 milliards. Il faut alors choisir : soit on diminue le déficit, soit on baisse les impôts. Dès lors que les baisses d’impôt sont supérieures à cette somme, les déficits ne peuvent que se dégrader. Comme ils le font en partant du niveau où ils se situent depuis un certain temps, l’effet boule de neige ne fait qu’augmenter. Pour l’enrayer, il faudrait que le déficit de l’État redescende autour de 35 milliards. Ce sera vraisemblablement l’une des conclusions principales de la commission Pébereau, et je suis très heureux que le ministre de l’économie l’ait mise en place, car elle nous fera prendre conscience de ce phénomène de l’endettement que nous devons tous avoir à l’esprit.

M. Didier Migaud. Il faut au moins équilibrer le solde primaire !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Nous ne devons en aucun cas relâcher l’effort en matière de dépenses. Le Premier ministre a parfaitement raison d’annoncer que, en 2007, il faudra s’efforcer de passer d’une règle de reconduction à hauteur de l’inflation à une reconduction en euros courants.

M. Alain Bocquet. Le Premier ministre a toujours raison ! (Sourires.)

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Ce sera difficile, mais il est indispensable d’amplifier la réforme de l’État. Le ministre du budget vient de nous expliquer qu’il convient de réaliser des audits systématiques. Il faut en effet, soulever le capot et regarder dans le moteur comment faire des économies.

M. Alain Rodet. Vous risquez de couler une bielle ! (Sourires.)

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Cela devra être notre principale préoccupation dans les prochains mois. Il nous faut absolument stabiliser la dépense de l’État. Nous devrons d’ailleurs en profiter pour aborder la question des effectifs dans la fonction publique et des départs en retraite.

M. Jacques Myard. Eh oui !

M. Michel Bouvard. Très bien !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Quels sont les grands thèmes de la loi de finances pour 2006 ? Le premier est la réforme de l’impôt sur le revenu, qui, avec la prime pour l’emploi, encourage le travail et profitera d’abord aux classes moyennes et aux ménages les plus modestes. C’est une bonne réforme, de justice et d’équité. Il faut, en outre, saluer sa simplicité, puisque l’on va passer de six tranches à quatre. L’éternel problème de l’abattement de 20 %, autour duquel on tourne depuis une dizaine d’années, sera enfin résolu par intégration dans les taux du barème. Ce sera, en outre, une mesure d’équité à l’égard des contribuables qui ne bénéficient pas de ces 20 %, par exemple ceux qui ont des revenus fonciers. Tout cela nous permettra d’afficher des taux réels et garantira une vraie transparence de l’impôt sur le revenu : cela nous mettra aux standards européens, voire internationaux, comme l’a dit à plusieurs reprises Jean-François Copé, en parlant du taux d’impôt marginal sur le revenu de 40 %. La France redevient un pays attractif, où l’on a envie d’investir et de travailler, plutôt que de se délocaliser.

La réflexion devra évidemment se poursuivre sur le profilage précis – nous verrons cela en deuxième partie – de ce nouveau barème de l’impôt sur le revenu. Mais je voudrais rappeler à nos collègues de gauche qu’il y a eu, entre 2000 et 2002, une baisse de l’impôt sur le revenu substantielle. À l’époque, Laurent Fabius disait que, si l’impôt n’était pas baissé, les élections seraient perdues.

M. Didier Migaud. Espérons que l’histoire bégaiera !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. L’impôt a baissé, mais pas d’une manière aussi équitable qu’elle aurait pu l’être. (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Et les élections ont été perdues ! (Rires sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Didier Migaud. Il ne s’agissait pas des mêmes baisses d’impôt.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Vous avez baissé l’impôt mais vous n’avez pas osé toucher au barème et vos baisses d’impôt étaient moins équitables que celles que nous proposons à l’horizon de 2007. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Didier Migaud. Si vous êtes sanctionnés de la même façon, ça sera très bien !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. La prime pour l’emploi va faire l’objet d’un effort très important, centré sur la notion de retour au travail. Comme le disaient les ministres à l’instant, un Français qui reprend le travail doit connaître une vraie augmentation de revenus, malgré l’évolution de tous les avantages connexes dont il peut bénéficier, qu’il s’agisse d’avantages d’État, allocations logement, CMU, ou d’avantages locaux, qui comptent également beaucoup. Il est proposé, pour un temps partiel, un doublement de la prime pour l’emploi à l’horizon de deux ans. Une telle mesure devrait constituer un réel progrès.

Mais nous avons besoin qu’une réflexion de fond soit menée sur la prime pour l’emploi parce que, cette prime augmentant, nous arrivons à la situation quelque peu paradoxale qu’un salarié qui gagne le SMIC ou un peu plus a finalement deux employeurs : l’entreprise où il travaille et l’État, qui va lui verser chaque mois, puisque ce sera mensualisé à partir de janvier prochain, un chèque en rémunération de son travail.

M. Claude Goasguen. C’est vrai !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Nous devons réfléchir à la mise en place d’un système plus sain et plus conforme à nos convictions.

Diverses pistes de réflexion doivent être explorées, notamment celle de la retenue à la source. Je sais que vous êtes, monsieur le ministre de l’économie, attaché à cette idée. Il faut relancer le débat.

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. D’accord.

M. Jacques Myard. C’est une charge pour l’entreprise !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Cela réglerait le problème des ménages imposables qui touchent la PPE. Peut-être serait-il préférable, plutôt que de verser une prime pour l’emploi, d’envisager un abattement sur les cotisations salariales. Une chose, en tout cas, est certaine : il faut que l’aide apparaisse sur la feuille de paye, au lieu de prendre la forme d’un chèque versé au nom de l’État. (« C’est vrai ! » sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Tout à fait !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je voudrais dire quelques mots sur le plafonnement de l’impôt.

C’est un principe d’une extrême importance, une véritable petite révolution. Nous espérions tous depuis des années que, soit au titre de la charte du contribuable, soit au titre d’un futur article 1er du code général des impôts, il soit enfin décidé que, dans notre pays, pas un seul ménage ne paierait en impôts plus de 60 % de son revenu, pas une seule entreprise ne paierait, sous forme de taxe professionnelle, plus de 3,5 % de sa valeur ajoutée.

Le Gouvernement proposera, en seconde partie de loi de finances, ce principe de cohérence qui concerne aussi bien les ménages que les entreprises et qui permettra enfin de plafonner l’impôt. C’est une mesure de justice fiscale, qui dans le même temps contribuera à renforcer l’attractivité de notre territoire.

M. Augustin Bonrepaux. Les ménages, ce sont eux qui vont payer !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. S’agissant des ménages, le Gouvernement a parfaitement raison d’inclure dans le calcul du plafonnement les impôts locaux.

M. Gilbert Biessy. Ben voyons ! Et l’autonomie communale ?

M. Augustin Bonrepaux. Il va falloir rembourser !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Sur les 90 000 contribuables qui seront concernés par cette mesure de plafonnement, 85 000 en bénéficieront à cause de l’impôt sur le revenu et des impôts locaux.

M. Augustin Bonrepaux. Quelles sont les familles qu’il faudra rembourser ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Nous le voyons dans nos permanences, la grande difficulté qu’éprouvent les ménages vis-à-vis de l’impôt vient souvent des impôts locaux, même si la taxe d’habitation est plafonnée. Taxe d’habitation et impôt foncier bâti représentent une vraie charge pour les ménages.

Se pose bien sûr le problème des collectivités locales.

M. Gilbert Biessy. Qu’en sera-t-il de l’autonomie communale ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je souscris totalement à la proposition que vient de faire Jean-François Copé, qui a puisé son inspiration à une source excellente, en l’occurrence notre collègue Hervé Mariton. Il faut rendre à César ce qui lui appartient.

M. Jacques Myard. Oui, mais M. Mariton n’est pas César !

M. Nicolas Perruchot. C’est plutôt Brutus !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Dès lors que la somme des impôts d’État excédera, à elle seule, 60 % du revenu, les impôts locaux ne seront pas concernés.

M. Jacques Myard. Très bien !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Pour le tout petit solde qui concernera les collectivités locales, une péréquation, pourquoi pas à travers un prélèvement sur la DGF, me paraîtrait la solution la plus équitable.

M. Hervé Mariton. Très bien !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je suis sûr que nous trouverons des solutions.

Je voudrais évoquer rapidement les deux principales mesures qui concernent les entreprises : l’allégement des charges sociales patronales d’un côté, la réforme de la taxe professionnelle de l’autre.

S’agissant des charges sociales patronales, nous pensons être arrivés à un point d’équilibre. Il a fallu tirer les conséquences de l’unification du SMIC, opérée au 1er juillet dernier, qui représentera un coût supplémentaire, en année pleine 2006, de 1,8 milliard d’euros. Mais c’est la conséquence d’une décision antérieure.

Pierre Méhaignerie et de nombreux membres de la commission des finances avaient, dès le mois de juin, appelé l’attention du Gouvernement sur le fait qu’il vaudrait peut-être mieux consacrer nos marges de manœuvre au pouvoir d’achat des salariés qui se situent dans cette zone un peu critique entre 1,2 et 1,5 SMIC, plutôt que de poursuivre une politique de baisse des charges patronales, dont nous avons beaucoup de mal à évaluer les impacts. Ce matin, à l’initiative de Louis Giscard d’Estaing, nous avons examiné un amendement qui demande une étude sur ce sujet.

M. Jacques Myard. Vous citez les bons auteurs !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Maintenant que le système est stabilisé, nous devons, un peu comme pour le barème de l’impôt sur le revenu, nous interroger sur la vérité des cotisations sociales patronales. Il s’agit, là aussi, d’un système de tuyauterie complexe. Les cotisations patronales ne sont pas de 46 points au niveau du SMIC puisque 20 ou 26 points sont remboursés par les allégements. Pourquoi alors ne pas afficher les vraies cotisations ? La politique de l’emploi serait beaucoup plus lisible.

Certains objecteront que nous risquons, ce faisant, d’afficher une progressivité des cotisations sociales patronales. Je ne le conteste pas. Mais il faut peser le pour et le contre. En tout cas, je suis persuadé qu’en matière de fiscalité, la transparence est la meilleure garantie d’efficacité.

S’agissant de la taxe professionnelle, une réforme est indispensable. Nous la préparons depuis des années. Jean-François Copé le soulignait tout à l’heure, bien d’autres avant nous ont calé devant l’obstacle. Le Gouvernement a le mérite d’aborder enfin cette réforme.

M. Augustin Bonrepaux. C’est un cataplasme sur une jambe de bois !

M. Alain Rodet. Cela fait trente ans que la taxe professionnelle a été créée, monsieur Carrez ! Et vous savez par qui !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Et il le fait, monsieur Bonrepaux, sur la base d’évaluations et de prévisions précises. Vous avez participé, comme moi, aux travaux de préparation qui ont été menés durant un an au sein de la commission Fouquet.

M. Augustin Bonrepaux. Pourquoi n’applique-t-on pas ses conclusions ? À quoi aura-t-elle servi cette commission ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Des simulations vont être disponibles. Une chose est claire…

M. Augustin Bonrepaux. C’est que le Gouvernement n’ose pas.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. …c’est que cette réforme va exiger un effort partagé de la part de l’État et des collectivités locales.

M. Augustin Bonrepaux. On va tout faire supporter aux collectivités locales !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. La compétitivité de nos entreprises, l’attractivité de nos territoires, c’est l’affaire certes de l’État, mais aussi des collectivités locales. Il est donc tout à fait légitime que la réforme associe les deux.

M. Augustin Bonrepaux. Mais ce sont les collectivités locales qui supportent tout !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Pour ma part, je m’interroge sur le taux de référence. Faut-il prendre le taux de 2004 ou bien le taux de 2005 ? Il est exact que lorsque, dans telle ou telle collectivité, on a augmenté le taux de taxe professionnelle, on a pu le faire sans savoir qu’il y aurait cette réforme. Mais il est non moins exact que certaines collectivités, je veux parler de dix-neuf des vingt régions socialistes, se sont véritablement « lâchées », de façon un peu irresponsable. (« Totalement irresponsable ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Avec une augmentation moyenne de taux de 25 % ! (« C’est scandaleux ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Nous sommes obligés de prendre en compte ce dérapage.

M. Augustin Bonrepaux. Vous voulez vous venger ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Mais le Gouvernement tient ses engagements vis-à-vis des collectivités locales. Le contrat de croissance et de solidarité permet une augmentation des crédits de 2,37 %, à comparer à l’augmentation de 1,8 % de l’ensemble des crédits de l’État. La DGF progresse, elle, de 2,72 %.

Quant aux dégrèvements, c’est-à-dire la partie immergée de l’iceberg, l’aide de l’État que personne ne voit, pour reprendre ce que ne cesse de répéter avec raison le président de la commission des finances, leur charge augmentera de près de 19 % en 2006, au profit des collectivités locales.

M. Jean-Jacques Descamps. Absolument.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Un mot sur la fiscalité du patrimoine.

Notre objectif est clair.

M. Jacques Myard. Il faut la supprimer !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Il faut assurer le maintien et le développement de l’outil de travail en France, en évitant des délocalisations, des destructions d’emplois pour des raisons purement fiscales.

M. Jean-Jacques Descamps. Tout cela est pieds et poings liés !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je salue à cet égard la politique constante que mène le Gouvernement depuis trois ans. D’une part, il a engagé cette réforme de la taxe professionnelle, qui consiste à ne pas pénaliser les investissements nouveaux en prévoyant des dégrèvements pour ceux-ci. D’autre part, des mesures ont été prises pour faciliter les transmissions d’entreprises. De nombreux chefs d’entreprise vont prendre leur retraite. Pour faciliter les transmissions, des abattements de 75 % seront opérés sur les donations, en échange d’un engagement sur six ans.

Nous avons également beaucoup progressé sur le dossier des plus-values professionnelles pour les entrepreneurs individuels, avec une exonération totale pour les entreprises de moins de 300 000 euros ou pour les entreprises dont le chiffre d’affaires est inférieur à 250 000 euros. Mais nous sommes très nombreux à attendre avec impatience le dispositif sur les plus-values professionnelles, un peu à l’image de ce que nous avons fait sur les plus-values immobilières. J’espère, peut-être allez-vous nous en donner confirmation, messieurs les ministres, qu’il figurera dans la loi de finances rectificative de 2005, même si je sais qu’il est difficile à mettre au point.

Je voudrais aborder l’ISF.

Des mesures ont déjà été prises pour éviter, là aussi, des délocalisations et des pertes d’emplois à travers l’engagement des actionnaires de conserver leurs actions sur une durée d’au moins six ans. La commission des finances proposera un amendement, vous l’avez évoqué tout à l’heure, messieurs les ministres, dont la seule finalité est d’assurer la stabilité dans la durée de l’actionnariat, pour garantir la pérennité de l’entreprise sur le territoire national. Cela jouera aussi bien pour les salariés que pour les dirigeants et les actionnaires minoritaires liés par un engagement de conservation.

M. Louis Giscard d’Estaing. Exactement !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Sur ce point également, nous avançons. Il faut absolument mettre un terme à ce véritable drame que constitue la délocalisation d’entreprises pour raisons fiscales. Nous ne pouvons plus continuer à assister à ce désastre qui se produit depuis maintenant trois ou quatre ans et qui met en jeu des dizaines de milliers d’emplois.

Quelques mots sur la dépense.

Les priorités de l’État régalien sont bien assurées, à travers les lois de programmation sur la défense, sur la justice, sur la sécurité. Mais nous ne pouvons que constater l’inertie des dépenses de personnel qui représenteront plus de 40 % du budget de 2006, avec 118 milliards d’euros, en progression de 3 %, soit une dépense supplémentaire de 3,4 milliards d’euros. Quand nous actualisons l’ensemble des dépenses du budget de l’État de 5 milliards, 70 % de ces 5 milliards sont préemptés par l’augmentation automatique des dépenses de personnels, actifs et pensions. Nous devons absolument infléchir la tendance.

Nous avons déjà commencé à le faire : 1 000 départs en retraite n’ont pas été remplacés en 2003, puis 4 500 en 2004, et jusqu’à 7 400 en 2005. En 2006, nous devrions redescendre à 5 300.

Vous me direz que l’essentiel, c’est de persévérer. Mais le rappel de quelques chiffres ne me paraît pas inutile. Si nous ne remplacions, comme nous l’avions d’ailleurs envisagé dans le cadre de notre programme en 2002, qu’une petite moitié des fonctionnaires qui partent en retraite – 60 000 à 70 000 fonctionnaires partent en retraite par an – nous réaliserions une économie de 1 milliard par an. Il faudrait donc attendre dix ans pour atteindre l’économie de 10 milliards d’euros qui nous permettrait de faire passer le déficit de 45 à 35 milliards d’euros. On voit à quel point la démarche est longue et nécessite de notre part de la ténacité.

Il ne s’agit pas bien entendu de ne remplacer automatiquement qu’un fonctionnaire sur deux dans tous les ministères. Nous savons bien que, dans certains ministères, au contraire, il faut augmenter le nombre de fonctionnaires.

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Très juste !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Mais nous savons aussi qu’il en est d’autres où des efforts doivent être accomplis. À ce propos, nous souhaiterions, messieurs les ministres, appeler votre attention sur la priorité que représente le secteur des administrations centrales. Comme on dit en anglais, il y a le front office et le back office. Nous aimerions que l’évolution des effectifs soit particulièrement rigoureuse dans toutes les administrations centrales ou établissements publics, là où les fonctionnaires ne sont pas au contact avec le public.

Pour terminer, je voudrais évoquer les principales décisions de la commission des finances qui a été d’une très grande sagesse…

M. Jacques Myard. C’est un pléonasme !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. …puisqu’elle s’est limitée à quelques amendements raisonnables. Tout d’abord, elle a souhaité que l’on revienne à l’échéancier d’augmentation de la taxe d’apprentissage que nous avions voté l’an dernier. C’était un échéancier sur trois ans et nous souhaitons qu’il reste sur trois ans parce que nous accordons la plus grande importance au respect de la parole de l’État. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Ensuite, nous avons souhaité, à l’initiative de notre collègue Philippe Auberger, abaisser le prélèvement sur le Fonds de garantie de l’accession sociale de 1,4 milliard d’euros à 965 millions d’euros. Le FGAS doit selon nous être maintenu et doté à un niveau suffisant pour continuer de garantir l’accession sociale à la propriété qui reste, ne l’oublions pas, la priorité de notre majorité.

M. Jacques Myard. Bravo !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Nous avons ensuite supprimé l’article 48, qui créait une société de valorisation des biens immobiliers de RFF. Messieurs les ministres, nous sommes certes d’accord avec votre souhait de mieux exploiter les biens immobilier en « jachère », de RFF et nous n’avons donc pas d’objections de fond mais, réservés à l’égard de la création de nouvelles structures, nous souhaitons être sûrs que la création de cet organisme supplémentaire garantira véritablement une plus grande efficacité dans la valorisation des biens immobiliers de RFF. Cela est cohérent avec deux amendements que nous avons voté à l’unanimité des commissaires et qui obligent l’État à vendre des terrains conformément à la lettre écrite par le Premier ministre Pierre Bérégovoy en septembre 1992 et à celle rédigée dans les mêmes termes, quatre ans plus tard, par le Premier ministre Alain Juppé. Or depuis, il ne s’est toujours rien passé.

Concernant l’article 51, c’est-à-dire l’article d’équilibre, nous avons adopté, comme un signal, un amendement visant à diminuer la dépense globale de 500 millions d’euros. C’est un très gros effort, nous en sommes conscients, d’autant qu’il faut loger dans ces 500 millions le manque à gagner au titre de la taxe d’apprentissage. Mais nous entendons bien opérer, euros par euros s’il le faut, la traduction de cette disposition dans les différentes missions, les différents programmes que nous examinerons dans le cadre de la deuxième partie du budget: nous en prenons l’engagement.

Pour terminer, je voudrais remercier le président de la commission des finances, Pierre Méhaignerie, et mes collègues de la commission, avec qui nous sommes arrivés, à force de travail, à une quasi-unanimité des députés de la majorité sur le souci de maîtriser la dépense…

M. Alain Rodet. Si on vous dérange, on peut vous laisser entre vous

M. Gilles Carrez, rapporteur général. …et la volonté de poser les vrais débats, notamment sur l’allègement des cotisations sociales patronales. Cela a débouché sur des propositions de qualité.

M. Alain Rodet. Vous disiez la même chose le 20 octobre 2004 !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je voudrais également remercier le Gouvernement, avec lequel nous avons accompli, au cours de ces dernières semaines, un travail extrêmement constructif…

M. Alain Rodet. On ne sait jamais, dans l’hypothèse d’un remaniement prochain !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Le ministre de l’économie et le ministre délégué au budget, en particulier, nous ont écoutés et ils nous ont entendus. Nous avons réfléchi ensemble au service des Français.

Pour toutes ces raisons, la commission des finances vous appelle, chers collègues, à voter ce projet de loi de finances pour 2006. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État.

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Si je l’ai fait en commission, je réalise que je n’ai pas répondu en séance à M. Jean-Marc Ayrault, et je voudrais lever toute ambiguïté sur deux points en particulier.

Le premier concerne le plafonnement et les dates d’entrée en vigueur. Même si ont peut les contester, les choses sont désormais clarifiées. Le dispositif est mis en deuxième partie parce qu’il n’a aucun effet sur l’article d’équilibre. C’est la raison pour laquelle il n’est pas positionné en première partie.

En deuxième lieu, je ne peux pas laisser dire, surtout sur un ton polémique, que le Gouvernement ne travaille pas dans la transparence sur la réforme de la taxe professionnelle, comme sur le reste d’ailleurs. J’ai confirmé en commission des finances, et je le redis en séance, que nous donnerons aux parlementaires les simulations qu’ils souhaitent.

M. Didier Migaud. Nous n’avons pas de simulations !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Cela relève d’une exigence normale de transparence, et je veux remercier sur ce point le rapporteur général d’avoir rappelé que ce gouvernement était celui qui assumait une réforme de la taxe professionnelle. Sur ce sujet difficile, nous assumerons nos responsabilités comme il se doit. Il s’agit d’un débat important et passionnant que nous mènerons dans toute la transparence requise, c’est notre mission.

M. le président. La parole est à M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances, de l’économie générale et du plan.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Monsieur le président, messieurs les ministres, la commission des finances a la chance d’avoir un excellent rapporteur général. Le président n’a donc plus qu’à ajouter quelques mots. Je ne reviendrai pas sur les qualités de ce budget, même si Jean-François Copé aurait aimé que j’y insiste de nouveau. Je préfère mettre l’accent sur les efforts qui nous restent à accomplir cette année et me limiterai à quatre points : les déficits, l’allègement des charges, la réforme fiscale et les relations avec les collectivités locales.

Sur le premier point, la croissance de 2005 n’a pas permis d’opérer une réduction du déficit aussi importante que les 11 milliards d’euros réalisés l’an dernier, ce qui n’empêche pas d’espérer que l’objectif de réduction à 35 milliards d’euros soit atteint au plus vite. C’est pourquoi la maîtrise mieux assurée des dépenses publiques est pour nous au cœur de ce débat budgétaire et justifie l’amendement de baisse de la dépense publique que plusieurs d’entre nous ont signé pour 500 millions d’euros. Je remercie le Gouvernement de l’avoir acceptée.

La France, dit le ministre de l’économie, vit au-dessus de ses moyens.

M. Pierre Goldberg. Les érémistes apprécieront !

M. Pierre Méhaignerie, de la commission des finances. Je préfère préciser la formule et dire : l’État, les collectivités et les systèmes publics peuvent et doivent mieux gérer leurs dépenses et dégager des marges de manœuvre permettant de réduire les déficits et, selon l’expression d’André Bergeron, de donner du grain à moudre pour l’amélioration du pouvoir d’achat de nos compatriotes.

Je suis convaincu qu’il existe des marges de productivité. Il y a en France plusieurs centaines de SNCM qui doivent être corrigées. A la lumière de ce qui a été fait chez nos voisins européens, un nouvel arbitrage doit être trouvé entre les dépenses publiques et le pouvoir d’achat des Français. Cela vaut également pour les collectivités locales.

La Suède, souvent citée comme une référence, a réduit en quelques années ses dépenses publiques de façon draconienne parce qu’elle est persuadée qu’il existe, au-delà d’un certain seuil, une relation directe entre le niveau élevé de dépenses publiques et le taux de chômage. Les expériences européennes nous enseignent par ailleurs que si elle veut créer des emplois, la France ne peut pas rester presque championne des prélèvements obligatoires – nous sommes au deuxième rang – ni championne des contraintes réglementaires. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement souhaite lancer des audits. Nous l’approuvons, mais le Parlement doit l’aider, et je me tourne pour cela vers les autres commissions et leurs rapporteurs. Face à chacun des 132 programmes de la LOLF cette année, il faudra se demander, comme les gouvernements canadien, suédois ou danois, s’il sert l’intérêt général, s’il complique la vie des Français et des entreprises et doit être abandonné, s’il peut être produit à moindre coût – les programmes sont souvent produits à des coûts surestimés, au détriment du pouvoir d’achat ou de la réduction de l’endettement.

Il faudra aussi se demander si ces programmes pourraient être réalisés par d’autres administrations : il n’est qu’à prendre la gestion de l’eau et l’exemple qu’elle fournit d’un empilement de structures administratives pour comprendre l’effort de restructuration qui s’impose dans l’ensemble du service public. Enfin, n’ayons pas peur de poser la question : certains programmes ne pourraient-ils pas être réalisés dans de meilleures conditions par le secteur privé ? Je suis convaincu qu’à la lumière de ces audits et de ces analyses nous pourrons, comme d’autres pays, dégager des milliards d’euros d’économies.

Voilà notre première ambition. Nous devons la mener ensemble, avec le Gouvernement.

A côté de la réforme de l’Etat, trois dossiers méritent un débat, celui de l’allègement des charges sociales, celui de la réforme fiscale et celui de la relation entre l’Etat et les collectivités territoriales.

S’agissant, tout d’abord, de l’allégement des charges sociales, les membres de la commission des finances se sont posé, en juin, la question suivante : n’aurait-il pas été plus judicieux de stabiliser le régime de ces allégements, de fixer des barèmes définitifs pour sécuriser les entreprises et de consacrer la somme de 1,8 milliard d’euros à l’amélioration de la prime pour l’emploi ? Vous avez décidé, à juste titre, messieurs les ministres, d’augmenter la prime pour l’emploi de 500 millions d’euros, mais cette augmentation profitera essentiellement aux personnes qui gagnent aujourd’hui entre 0,5 et 1 SMIC. Qu’en sera-t-il de celles qui touchent entre 1 et 1,5 SMIC ?

M. Pascal Terrasse. Elles n’auront rien ! Zéro !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. N’est-ce pas à ce niveau de salaire que l’attente est la plus forte et les conséquences sur la consommation et la croissance les plus significatives ? Il y a là un débat de fond, car si le Gouvernement, avec l’appui de sa majorité, a augmenté substantiellement le SMIC, il a donné en même temps à certains salariés le sentiment de se rapprocher du SMIC et de subir un certain déclassement. J’appelle donc l’attention du Gouvernement sur la situation de ces salariés qui gagnent entre 1 et 1,5 SMIC.

Dans le même temps, l’effet de seuil est de plus en plus lourd pour les entreprises. Je vais vous donner un exemple. L’employeur d’un salarié payé à 1,5 SMIC bénéficie de vingt-quatre points d’allégements de cotisations sociales, contre huit points seulement pour un salarié rémunéré à 1,4 SMIC. L’employeur qui passe un salarié de 1,1 à 1,4 SMIC rencontre donc deux obstacles : l’augmentation du salaire, bien entendu, et la perte d’un nombre important de points d’allégements de charges sociales. C’est pourquoi si cette politique d’allégement a été positive, nul ne le conteste, il faut sans doute s’arrêter là aujourd’hui et sécuriser le dispositif en fixant des barèmes. Tel est le débat que nous avons eu, et que nous allons encore avoir, sur les limites de l’efficacité de l’allégement des charges sociales.

Sur la réforme fiscale, nous entendrons certainement beaucoup de propos caricaturaux. Toute réforme fiscale doit répondre à trois exigences : renforcer le dynamisme économique, rendre notre fiscalité plus lisible à l’étranger,…

M. Jacques Myard. Et aussi en France !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. …et tendre à une plus grande justice. Si les deux premiers points ne sont pas contestés, le troisième le sera. Pourtant, cette réforme est positive si l’on tient compte à la fois du barème, de l’amélioration de la prime pour l’emploi et du plafonnement des niches fiscales, que nous avions demandé ensemble.

Je terminerai sur un point qui sera au cœur du débat. En France, les parlementaires sont souvent aussi des élus locaux,…

M. Jacques Myard. C’est très bien !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. …ce qui n’est pas le cas dans beaucoup d’autres pays. Nous allons donc avoir un débat sur les relations entre l’État et les collectivités locales. Pour ma part, j’attends avec impatience la conférence annuelle, car une mise à plat est nécessaire. Le malentendu est de part et d’autre. Je suis d’autant mieux placé pour en parler que mon propos était le même lorsque j’étais dans l’opposition, qui critiquait la majorité d’alors. Cela fait des semaines que l’on entend dire que, par la décentralisation, l’État se décharge sur les collectivités locales de ce qu’il ne peut plus financer. (« C’est faux ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Gilbert Biessy. C’est vrai !

M. Jacques Brunhes. De ce qu’il ne veut plus financer !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Cela a été vrai pour les lycées et les collèges. Cela le sera probablement aussi pour les routes et la prise en charge du handicap.

M. Pascal Terrasse. D’ailleurs, le décret est sorti aujourd’hui !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Mais, dans le même temps – et c’est là qu’est le malentendu –, aucun élu local ici ne sait ce que représentent aujourd’hui, pour sa propre collectivité, les dégrèvements et allégements pris en charge par l’État. Je rappelle un chiffre : entre 1995 et 2005, les dégrèvements et exonérations pris en charge par l’État ont augmenté de 11 milliards d’euros. Et je reprends ce qu’avait écrit, avec beaucoup de clarté, le président Dosière,…

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Très bien !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. …dans un article que j’ai conservé : « Si l’État n’avait pas pris en charge 40 % des dégrèvements de taxe professionnelle et près de 35 % de ceux de la taxe d’habitation, il y aurait eu une révolte des contribuables locaux. »

M. le président. Vous avez de bonnes lectures, monsieur le président ! (Sourires.)

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Lorsque l’on critique l’État,…

M. Jacques Myard. L’État, c’est nous !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. …il faut donc aussi lui savoir gré d’avoir pris en charge une partie extrêmement importante des impôts locaux. Le malheur, messieurs les ministres, c’est que personne, aucune collectivité, ne connaît le poids des dégrèvements pris en charge. Nous avons là un point important à négocier. Il faudrait peut-être donner un coefficient de majoration de 3 % à 5 % à la base 2004, qui sera prise en compte, pour séparer le bon grain de l’ivraie et ne pas récompenser les collectivités régionales qui ont augmenté leurs impôts locaux de 50 % ou 70 % ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Augustin Bonrepaux. Et voilà ! C’est la revanche ! Vous n’encaissez pas votre défaite !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Nous avons donc là un débat important et juste.

En conclusion, je reprendrai les propos de M. le rapporteur général. J’ai le sentiment que le Parlement et la majorité ont été entendus. La majorité sera donc très sensible aux arguments du Gouvernement pendant tout ce débat budgétaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Ordre du jour
de LA prochaine séance

M. le président. Ce soir, à vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Discussion générale et discussion des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2006 (n° 2540) :

Rapport, n° 2568, de M. Gilles Carrez, rapporteur général, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures cinquante.)