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Edition J.O. - débats de la séance

Assemblée nationale

Compte rendu
intégral

Première séance du mercredi 26 octobre 2005

36e séance de la session ordinaire 2005-2006


PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

questions au gouvernement

M. le président. L’ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Nous commençons par une question du groupe communiste.

expulsion des enfants sans-papiers
scolarisés en france

M. le président. La parole est à M. Frédéric Dutoit, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.

M. Frédéric Dutoit. Monsieur le Premier ministre, l’actualité met une nouvelle fois en avant votre politique de reconduite massive aux frontières des immigrés sans-papiers. (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Même les gamins, les « minots », comme on dit à Marseille, sont dans votre collimateur.

À cause de cette politique de stigmatisation des immigrés, j’ai parfois honte d’être Français (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire), honte de la traque d’enfants et d’adolescents scolarisés dans nos écoles, collèges et lycées. Mais heureusement la société française, dans sa diversité, refuse l’intolérable et le dit, comme on l’a vu récemment en banlieue parisienne, en Loire-Atlantique ou dans l’Yonne dernièrement. Heureusement, des élèves, des enseignants, des parents, mais aussi de simples citoyens révoltés par votre politique d’un autre temps se mobilisent.

Une nouvelle fois, les jeunes sont au rendez-vous de la fraternité et de la solidarité. C’est une formidable leçon qu’ils nous donnent : ils sont la France, cette France du respect des libertés et des droits de l’homme, cette France réconciliée avec l’humanité, avec sa propre histoire, cette France solidaire de ces jeunes élèves étrangers pourchassés qui se cachent pour apprendre et vivent dans la peur d’être expulsés. (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Thierry Mariani. Caricature !

M. Frédéric Dutoit. Trop, c'est trop, monsieur le Premier ministre ! Mettez un terme à ces persécutions, à cet acharnement, arrêtez cette chasse à l’enfant !

Face aux mobilisations, parfois spontanées, vous semblez accepter de ne pas expulser en cours d’année scolaire les élèves sans-papiers. Est-ce un simple recul tactique ? Pouvez-vous prendre devant nous l’engagement d’interdire les arrêtés de reconduite à la frontière qui frappent les jeunes étrangers scolarisés en France et leurs parents ?

Je vous demande de leur accorder des titres de séjour pour étudier et vivre normalement dans notre pays. Je vous demande de mettre à profit les vacances scolaires de la Toussaint pour rescolariser les enfants expulsés de leur école, de leur collège ou de leur lycée ? Êtes-vous prêt à tendre la main à ces minots, monsieur le Premier ministre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et sur quelques bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué aux collectivités territoriales.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur Dutoit, M. Nicolas Sarkozy, ministre d’Etat, m’a demandé de répondre à votre question car il assiste en ce moment aux obsèques de M. Colpart, gendarme grièvement blessé le 31 août dernier alors qu’il tentait de porter secours à une personne qui s’immolait, dans le département de l’Orne, pour lui rendre l’hommage de la République auquel il a droit, et je suis sûr que vous vous y associez.

J’en viens maintenant à votre question sur les enfants scolarisés des familles d’étrangers en situation irrégulière.

La politique d’immigration conduite par Nicolas Sarkozy, sous l’autorité du Premier ministre, repose sur deux piliers clairement identifiés : la fermeté et la justice. Pas l’un sans l’autre : l’un et l’autre. Cela signifie tout simplement que nous devons faire preuve de fermeté à l’égard de ceux qui ne respectent pas les règles et de ceux qui détournent les procédures. Mais, simultanément, nous devons faire preuve de justice à l’égard de ceux qui sont en réalité les victimes d’un phénomène qui les dépasse.

Non, monsieur le député, les étrangers en situation irrégulière n’ont pas vocation à rester sur notre territoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Faut-il le rappeler, c’est la loi qui l’impose. La loi le prévoit, et dans un régime républicain, la loi s’impose à tous : elle n’est pas faite pour être bafouée.

Cela signifie concrètement que nous devons continuer à augmenter le nombre d’expulsion d’étrangers en situation irrégulière : 8 000 en 2002, 12 000 en 2003, 15 000 en 2004 et sans doute 22 000 ou 23 000 en 2005.

M. Charles Cova. Très bien !

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Mais, dans le même temps, nous devons prendre en considération les situations humainement les plus difficiles et délicates. C’est pourquoi Nicolas Sarkozy a décidé que les enfants scolarisés depuis plusieurs mois en France pourront y terminer leur année scolaire. Mais à la fin de l’année scolaire, avec leurs parents en situation irrégulière, ils auront vocation à retourner dans leur pays d’origine. La règle est donc simple, lisible et compréhensible.

Mesdames, messieurs les députés, ne doutez pas une seule seconde de l’entière détermination du Gouvernement à appliquer cette politique et ce, pour une raison évidente : les Français nous le demandent, nous devons répondre à leur attente et je vous le dis, mesdames, messieurs les députés : nous serons au rendez-vous. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

crise du logement

M. le président. La parole est à M. François Scellier, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. François Scellier. Monsieur le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement, la France connaît depuis de nombreuses années une crise profonde du logement. Depuis 2002, le Gouvernement en a pris la juste mesure et s’est attaqué à tous les aspects du problème : relance de la construction, accès à la propriété facilité, extension du prêt à taux zéro, sécurité des habitats, soutien au secteur locatif, réhabilitation des quartiers.

Mais le déséquilibre persiste entre l’offre et la demande de logement, tant au niveau de l’achat que de la location, en raison des retards accumulés par rapport aux besoins, du manque de mesures spécifiques pour développer l’offre locative et peut-être de mesures d’incitation fortes pour développer l’accession à la propriété et surtout l’accession sociale à la propriété.

Le plan de cohésion sociale que nous avons adopté a apporté des réponses essentielles pour résorber cette pénurie de logement par la réalisation en cinq ans de 500 000 logements locatifs, par l’accession à la propriété, en particulier grâce au prêt à taux zéro ainsi que par l’aide à l’investissement locatif privé avec le dispositif Robien.

Monsieur le ministre, pouvez-vous me dire comment vous entendez poursuivre la dynamique engagée ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement.

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, après une décennie de crise et de pénurie, la France a repris goût à la construction de logements. Le chiffre publié hier en témoigne : 390 000 mises en chantier sont recensées à ce jour, ce qui nous permettra de parvenir à 400 000 pour l’année 2005. C’est un niveau qui n’avait pas été atteint depuis le plan de relance de Jacques Chirac, il y a près de trente ans.

M. Augustin Bonrepaux. Quelles catégories de logements sont concernées ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Néanmoins, la crise est là et le Premier ministre a souhaité que nous allions plus loin, plus vite et plus fort : baisse des taux de prêt au locatif social, allongement de la durée des crédits, application du taux réduit de TVA à 5,5 % aux opérations d’accession sociale à la propriété. L’État lui-même s’est mis en ordre de marche et veut montrer l’exemple : un programme de 135 opérations sur l’ensemble de la France, dont les deux tiers en Ile-de-France, comprenant la construction de 20 000 logements, est mis en place dans le cadre de la délégation interministérielle placée auprès du Premier ministre, dont l’installation s’est faite la semaine dernière.

L’effort en matière de logement, dont résulte une hausse de 70 % pour le logement social depuis 2002, doit continuer à s’amplifier à la fois à travers le projet de loi qui vous sera présenté prochainement et grâce aux mesures financières, fiscales et administratives que le Premier ministre a souhaité voir figurer dans le pacte national pour le logement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

coupures d'électricité et d’eau
pour factures impayées

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Kucheida, pour le groupe socialiste.

M. Jean-Pierre Kucheida. Monsieur le président, mes chers collègues, ma question concerne les coupures d’énergie et d’eau infligées aux personnes en grande détresse financière.

J’ai été très sensible, monsieur le Premier ministre, à vos récents propos rapportés dans les minutes du Conseil national des économies locales : « Il n’est pas acceptable que des familles se voient couper l’électricité pendant l’hiver parce qu’elles n’ont pas les moyens de payer leur facture EDF. Les dispositions législatives appropriées seront prises ».

Je constate avec plaisir que les grands esprits se rencontrent et que vous nous rejoignez dans ce combat qu’avec de nombreux collègues, surtout issus du Nord-Pas-de-Calais, nous avons engagé depuis plus d’un an. Votre fibre nationale vous honore, à moins que cela ne soit qu’une tactique pour gêner les ultra-libéraux à l’intérieur de votre gouvernement.

En tout état de cause, au nom des familles qui n’ont plus les moyens de se chauffer, de s’éclairer ou de vivre dans des conditions d’hygiène normales, je me réjouis de cette avancée qui pourrait être définitive si vous adoptiez notre proposition de loi tendant à créer une couverture universelle pour l’énergie et l’eau.

Encore faudrait-il savoir qui va payer. Au Royaume-Uni, ce sont les électriciens. Alors, de grâce, cessons d’accabler les CCAS et les fonds de solidarité des conseils généraux et reportons cette charge sur l’entreprise électrique EDF, qui donne à l’État chaque année 9 milliards d’euros, ou encore sur l’État lui-même, au nom de la solidarité nationale, qui doit prendre un minimum de risques.

Quelles sont donc vos intentions en la matière, monsieur le Premier ministre ? Reprendrez-vous les propositions de loi du groupe socialiste ( « Non ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire) que votre majorité a rejetées hier avec mépris ? Pouvons-nous d’ores et déjà, dans nos permanences, rassurer nos concitoyens les plus démunis lorsqu’ils s’inquiètent de l’arrivée de l’hiver ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l’industrie.

M. François Loos, ministre délégué à l’industrie. Monsieur le député, vous posez une question importante à laquelle le Gouvernement est attentif. L’année dernière déjà, il a pris un décret qui permet d’utiliser le Fonds de solidarité logement dans les meilleures conditions pour faire en sorte qu’aucune coupure n’intervienne avant l’octroi d’une aide financière. (« Qui paie ? » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Le Premier ministre, comme vous l’avez rappelé à juste titre, s’est déjà exprimé à ce sujet, notamment au Conseil national de lutte contre l’exclusion, le 15 septembre dernier. Avant-hier, lors de la signature du contrat de service public entre l’État et EDF, il a demandé que des mesures législatives soient prises immédiatement et que les moyens nécessaires soient apportés en complément par EDF pour interdire les coupures d’électricité pendant l’hiver pour les personnes défavorisées. Ce matin, Jean-Louis Borloo a présenté au conseil des ministres le projet de loi portant engagement national pour le logement, qui comprend un article interdisant les coupures d’électricité pendant la trêve hivernale pour les personnes en difficulté. (« Qui paie ? » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Augustin Bonrepaux. Quand est-ce que ce sera effectif ?

M. le ministre délégué à l’industrie. Vous le voyez, monsieur le député, nous avons pris les mesures qui s’imposent sur ce sujet majeur. Et c’est nous qui avons pris le décret d’application de la loi de 2000, que vos amis n’avaient pas osé prendre. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

situation au cachemire après le séisme

M. le président. La parole est à M. Jean Lassalle, pour le groupe Union pour la démocratie française. (« Une chanson ! Une chanson ! » sur bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean Lassalle. Chers collègues, ma question ne prête, hélas ! pas au chant.

Monsieur le ministre des affaires étrangères, le 8 octobre dernier, le Cachemire pakistanais a été frappé par un séisme qualifié d’historique d’une magnitude de 7,6 sur l’échelle de Richter, ravageant une zone de 28 000 kilomètres carrés, dévastant les habitations de 3,3 millions de personnes. Le bilan officiel s’élève à 53 000 morts, 75 000 blessés et 800 000 personnes sans abri.

De nombreux glissements de terrain sont à craindre, amplifiant la catastrophe et rendant encore plus difficiles les opérations de secours, déjà qualifiées par l’ONU de « pire cauchemar ». Le temps presse : il reste moins de trois semaines avant que les routes ne ferment et que les villages éloignés ne se trouvent prisonniers de la neige. En outre, 10 % à 20 % des zones touchées n’ont toujours pas pu être secourues.

La précarité de l’hébergement, l’absence de nourriture et de soins médicaux font craindre une véritable épidémie. Ce matin, un cas de fièvre hémorragique a été découvert. Si des distributions d’aides logistiques et de médicaments ne sont pas organisées, le nombre des victimes risque d’être encore plus important après le séisme.

L’aide internationale s’est mobilisée dans les meilleurs délais. Un grand courant de solidarité s’est manifesté, même si celui-ci est moins important que pour le tsunami. Cela a permis notamment un réchauffement des relations entre l’Inde et le Pakistan qui, tous deux, prennent des dispositions pour ouvrir en plusieurs points la ligne de démarcation.

Comme beaucoup de Français, je suis très préoccupé par ce drame, d’autant plus que, montagnard et président de l’association des populations de montagne du monde, je sais combien la montagne peut être un univers hostile.

À l’heure où nous nous réunissons, la conférence des donateurs qui s’est ouverte ce matin à Genève, sous l’égide de l’ONU et avec la participation des ONG, doit prendre les dispositions nécessaires pour apporter l’aide la mieux adaptée aux populations victimes de la catastrophe. L’aide internationale devrait atteindre 549 millions de dollars.

Au nom de l’UDF, je vous demande, monsieur le ministre, de faire connaître à la représentation nationale les dispositions que vous avez prises et que vous comptez prendre pour que la France soit présente, comme elle l’a toujours été lors de drames d’une telle ampleur. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur de nombreux bancs.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères. Monsieur le député, comme vous l’avez dit, un séisme d’une magnitude de 7,6 sur l’échelle de Richter a frappé l’Asie centrale, et en particulier le Cachemire. Les chiffres sont effrayants puisqu’on parle de 54 000 morts et 78 000 blessés au Pakistan et de 1 300 morts et 3 000 blessés en Inde.

Nous sommes confrontés à quatre problèmes essentiels.

Premièrement, comme certaines agglomérations ont été presque entièrement détruites, 3 millions de personnes se retrouvent sans abri.

Deuxièmement, les conditions météorologiques se sont dégradées et, comme vous l’avez dit, les premières neiges commenceront à tomber dans trois semaines.

Troisièmement, des infrastructures et des hôpitaux ont été détruits. Ainsi, l’aide humaine ne peut être ni acheminée ni distribuée.

Quatrièmement, il existe de réels risques d’épidémie.

Le jour de la catastrophe, la France a dépêché une équipe de sécurité qui a évalué les besoins et désincarcéré de nombreux corps. Le lendemain, quatre avions sont partis, le premier avec des médecins urgentistes du service de santé des armées, mais aussi quarante-huit médecins urgentistes des hôpitaux publics auxquels je veux rendre hommage, ainsi qu’aux organisations non gouvernementales, en particulier françaises, qui oeuvrent sur le terrain. Les trois autres avions ont emporté 85 à 100 tonnes de fret humanitaire.

La France participe actuellement à hauteur de 17 % au projet humanitaire européen d’ECHO. Ce soir, à Genève, le secrétaire général des nations unies, Kofi Annan, réunira les donateurs. La France, qui a déjà donné entre 5 et 6 millions d’euros, annoncera une contribution supplémentaire de 5 millions d’euros. Elle livrera également du matériel chirurgical et des tentes et participera à la vaccination des enfants et des personnes âgées. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

scolarisation des enfants handicapés

M. le président. La parole est à M. Guy Geoffroy, pour le groupe UMP.

M. Guy Geoffroy. Monsieur le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, deux grandes lois sont venues, en 2005, marquer la forte volonté de notre nation de permettre et garantir la réussite de tous ses enfants.

Tout d’abord, la loi d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école, que vous avez commencé à appliquer de manière pragmatique dès cette rentrée 2005, est l’un des éléments clés de la réussite de l’accueil de l’ensemble de nos élèves dans de meilleures conditions. Grâce au budget 2006 et au travail préparatoire accompli par vous-même et vos services, cette loi entrera en vigueur dans toutes ses dimensions, et nous ne pouvons que vous en remercier.

Ensuite, l’article 19 de la loi du 11 février dernier pose un principe nouveau, fondamental et fort, celui de l’inscription de tout enfant handicapé dans l’école de son quartier qui devient école de référence.

Vous avez commencé, au sein de votre ministère et en étroite relation avec le ministre délégué chargé des personnes handicapées, à mettre en œuvre cette loi dès cette rentrée et vous vous préparez, pour 2006 et les années suivantes, à assurer la montée en charge de l’ensemble des dispositifs qui doivent permettre de scolariser le plus possible en milieu ordinaire tous les enfants porteurs d’une différence.

Monsieur le ministre, pouvez-vous dresser devant la représentation nationale le bilan de cette rentrée 2005-2006 en matière de scolarisation des enfants porteurs de handicaps et nous décrire les perspectives, pour 2006 et les années suivantes, en particulier dans deux domaines très importants, la formation des accompagnants et les relations de l’éducation nationale avec le monde médico-social ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.

M. Gilles de Robien, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le député, comme l’ont confirmé à Philippe Bas et à moi-même les quarante associations du comité d’entente, la rentrée scolaire des enfants handicapés s’est globalement bien passée. Néanmoins, quelques cas douloureux subsistent, comme celui de cette petite fille trisomique qui ne peut pas être accueillie en CE 1.

Si nous rencontrons encore quelques difficultés, c’est parce que le recrutement des auxiliaires de vie scolaire s’avère un peu compliqué. Vous le savez, 800 emplois supplémentaires d’auxiliaires de vie sont prévus. J’espère que nous pourrons remplir ce contrat d’ici à la fin de l’année.

En attendant, les emplois vie scolaire, c’est-à-dire les contrats aidés que M. le Premier ministre m’a autorisé à embaucher au cours de l’été, apportent une fluidité dans le dispositif d’accueil, notamment en faveur des enfants moins handicapés que d’autres, et j’ai bien retenu la proposition du président Accoyer visant à donner une vraie formation à ces emplois vie scolaire afin qu’ils soient capables de bien accueillir les enfants handicapés ou faiblement handicapés.

Mais notre défi, c’est la rentrée 2006, défi qui consiste à faire travailler ensemble le milieu socio-éducatif, le milieu médico-social et l’éducation nationale. Voilà pourquoi j’ai demandé au délégué interministériel aux personnes handicapées de mettre en place un groupe de travail dès le début novembre. Il s’inspirera très largement des propositions du rapport que vous me remettrez dans quelques jours, monsieur le député.

Après ce travail en commun avec les services de Philippe Bas, le deuxième défi consistera à travailler en pleine synergie avec les collectivités locales. Elles sont motivées. Nous avons une belle mission commune avec les collectivités locales, le milieu médico-social et l’éducation nationale, et nous allons la réussir. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

grève à la régie des transports de marseille

M. le président. La parole est à M. Bruno Gilles, pour le groupe UMP.

M. Bruno Gilles. Monsieur le président, j’associe à ma question, qui s’adresse à M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer, mes amis députés marseillais Roland Blum, Jean Roatta, Guy Teissier et Dominique Tian.

Depuis plus de trois semaines maintenant, la Régie des transports de Marseille connaît une grève totalement injustifiée, engagée à la suite de la remise du dossier de candidature dans le cadre de la délégation de service public pour l’exploitation du futur réseau de tramway de Marseille. Cette grève est sans raison et sans fondement. En effet, y a-t-il des risques pour le statut des salariés de la RTM ? Aucun ! Y a-t-il des risques que la régie soit privatisée ? Aucun ! Y a-t-il des raisons pour bloquer Marseille et prendre en otages les Marseillais ? Aucune ! Pourtant, le conflit mené par certains syndicats, et plus particulièrement la CGT, se durcit fortement. (Huées sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

De nombreux agents de la RTM, qui souhaitent continuer à travailler, sont malheureusement terrorisés par certains grévistes qui n’hésitent pas à les menacer jusque dans leur vie familiale. (Huées sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Par crainte de représailles, ces personnes n’oseront jamais porter plainte. Il est inconcevable que 200 syndicalistes jusqu’au-boutistes empêchent une société qui compte plus de 3 000 agents de fonctionner.

Monsieur le ministre, aujourd’hui, il existe à Marseille une vraie discrimination entre ceux qui font grève et ceux qui veulent travailler. Jean-Claude Gaudin et Renaud Muselier viennent de mettre en place un service de bus de substitution protégés par la police. À ce propos, je souhaite ici rendre hommage au préfet de région et au préfet de police qui, lors des différents conflits touchant la ville de Marseille, ont fait preuve d’un grand professionnalisme.

M. le président. Monsieur Gilles, auriez-vous l’obligeance de poser votre question ?

M. Bruno Gilles. J’y arrive, monsieur le président !

Plusieurs solutions se profilent pour sortir du conflit : réquisition des chauffeurs ou vote à bulletins secrets sur la reprise ou non du travail.

Monsieur le ministre, pouvez-vous confirmer devant la représentation nationale que tout sera mis en place pour que ceux qui le souhaitent puissent travailler librement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer.

M. Dominique Perben, ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Monsieur Gilles, vous avez souligné la gravité de la situation générée par cette grève par laquelle une minorité de grévistes bloque la troisième agglomération de France.

Vous avez raison de rappeler que la collectivité locale a le droit de définir, dans le cadre d’une délégation de service public, les modalités de mise en œuvre du service public. Il n’y a aucun motif profond à ce si long mouvement de grève.

Il faut respecter à la fois le droit de grève et la liberté du travail. Voilà pourquoi il est indispensable d’organiser le plus rapidement possible un vote à bulletins secrets sur la poursuite ou non de la grève.

M. Yves Bur. Il faut instaurer le service minimum !

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Si la direction de la société le souhaite, l’inspection du travail des transports sera disponible pour assurer les conditions de mise en œuvre de cette décision qui me paraît la seule respectant à la fois le droit de grève et la liberté de travail.

Au-delà de ce conflit qui, je l’espère, se réglera le plus rapidement possible, je veux rappeler que l’expérience faite en Île-de-France et en Alsace a montré qu’il était possible de mettre en place un service garanti de qualité. Je souhaite qu’il en soit de même le plus rapidement possible dans l’ensemble des grandes villes de France. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

vote des étrangers

M. le président. La parole est à M. Pierre Cohen, pour le groupe socialiste.

M. Pierre Cohen. Monsieur le Premier ministre, le 3 mai 2000, l’Assemblée nationale adoptait une proposition de loi sur le droit de vote et l’éligibilité aux élections municipales des étrangers non ressortissants de l’Union européenne résidant en France.

À l’heure où notre pays se doit de revisiter son passé colonial et de reconnaître ce que nous avons fait subir à ces peuples (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire), à l’heure où la mondialisation crée des situations inadmissibles pour des populations candidates à vivre et à travailler dans nos pays riches en instaurant sur nos propres territoires une nouvelle version du colonialisme…

M. Jean-Michel Ferrand. Caricature !

M. Thierry Mariani. Tournez la page !

M. le président. Monsieur Ferrand ! Monsieur Mariani !

M. Pierre Cohen. …à l’heure où la lutte contre la discrimination devrait constituer le pilier d’une véritable cohésion sociale, il est temps de se poser sérieusement la question du statut et de la place des étrangers non européens dans notre société. Cela vaut pour vous comme pour nous. Aussi, par l’intermédiaire de Jean-Pierre Bel, président du groupe socialiste au Sénat, a été déposée une proposition de loi qui a été votée majoritairement par la gauche le 3 mai 2000 à l’Assemblée nationale.

Nous avons entendu un membre du Gouvernement, en la personne même du ministre de l’intérieur proposer…

M. Charles Cova. À titre personnel !

M. Pierre Cohen. …des avancées significatives dans ce sens. Prise de conscience ou instrumentalisation ? Nous devons en avoir le cœur net.

Monsieur le Premier ministre, allez-vous faire passer ces intentions dans les actes ? Comptez-vous inscrire à l’ordre du jour prioritaire du Sénat cette proposition de loi ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Monsieur le député, nous tous qui sommes ici, nous avons un point commun :…

M. Jean-Marc Ayrault. Vous avez surtout un problème dans votre Gouvernement ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le Premier ministre. …nous sommes tous des démocrates.

C’est dire que, quelles que soient nos opinions, nous sommes capables de nous parler, de nous écouter avec respect et tolérance. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Marc Ayrault. Qui est le chef ?

M. le Premier ministre. Qu’il y ait un débat de fond dans notre démocratie, quoi de plus normal ? Nicolas Sarkozy s’est exprimé sur le droit de vote des immigrés aux élections locales.

M. Bernard Derosier. Il est président de l’UMP !

M. le Premier ministre. Je rappelle qu’il l’a fait, comme il l’a dit lui-même, à titre personnel. (Exclamations et rires sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Jean-Paul Bacquet. Et vous, à titre personnel, qu’en pensez-vous ?

M. le Premier ministre. Vous connaissez la position du Gouvernement et la mienne.

Pour l’unité de notre pays, le lien entre citoyenneté et nationalité est essentiel. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Seule la pleine appartenance à notre nation peut donner au droit de vote toute sa portée...

M. Jean-Marie Le Guen et M. Bruno Le Roux. Et l’Europe ?

M. le Premier ministre. ...car l’appartenance à la nation l’emporte sur toute autre forme d’appartenance...

M. Julien Dray. Non !

M. le Premier ministre. ...à une communauté, d’origine ou encore de religion. (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Jean-Marie Le Guen et M. Bruno Le Roux. Et l’Europe ?

M. le président. Taisez-vous !

M. le Premier ministre. La République, monsieur le député, ne reconnaît qu’un seul peuple, qui exerce la citoyenneté : tel est le fondement même de notre Constitution.

M. Patrick Bloche. C’est faux !

M. le Premier ministre. La République est généreuse et accueillante. (« Trop ! » sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Le peuple français s’est enrichi constamment des apports de l’immigration. Oui, la France est riche de sa diversité. Oui, la France est généreuse. Je rappelle que l’accès à la nationalité française fait de notre pays l’un des plus ouverts au monde. Ils sont ainsi 140 000 à devenir français chaque année.

M. Jean-Christophe Lagarde. Il suffit d’attendre cinq ans !

M. le Premier ministre. Acquérir la nationalité relève d’une démarche volontaire qui est au cœur de notre pacte républicain. C’est un choix partagé, et c’est l’honneur de notre République ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

avenir de la pêche

M. le président. La parole est à M. Christophe Priou.

M. Christophe Priou. Monsieur le ministre de l’agriculture et de la pêche, depuis le mois de juillet 2005, le secteur de la pêche traverse une crise grave consécutive à l’interdiction brutale de la pêche à l’anchois dans le golfe de Gascogne. Les ports de La Turballe en Loire-Atlantique et de Saint-Gilles-Croix-de-Vie en Vendée sont particulièrement touchés. Toute la filière se trouve fragilisée et les répercussions économiques à terre sont considérables.

La décision des instances européennes a eu pour conséquence un report d’activité sur d’autres pêches, notamment au thon blanc, qui a engendré un déséquilibre du marché. Les bateaux et les équipages se trouvent dans une situation économique alarmante qui ne peut perdurer. Les ministres de l’agriculture et de la pêche de l’Union européenne se réuniront en décembre pour statuer sur les quotas de pêche pour 2006 et envisager d’éventuelles dates de réouverture de la pêche à l’anchois. L’enjeu est capital et le conseil des ministres doit impérativement apporter des réponses à la profession, d’autant que cette crise vient s’ajouter à des conditions de travail difficiles et intervient dans un contexte où l’augmentation régulière du prix du gazole met en péril l’équilibre comptable des armements de pêche.

Vous avez, monsieur le ministre, convoqué récemment à Nantes une table ronde sur ce sujet, au cours de laquelle une question essentielle a été abordée. Je souhaite à mon tour vous la poser : quel avenir aujourd’hui pour la pêche en France ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de la pêche.

M. Dominique Bussereau, ministre de l’agriculture et de la pêche. Monsieur le député, vous le savez, la France a fermement combattu la fermeture de la pêche à l’anchois et nous avons pris, pendant cette période difficile pour les marins du littoral de l’Atlantique, toutes les mesures qui s’imposaient, dont les mesures de fermeture biologique. Nous allons au cours du conseil des ministres de fin d’année demander la réouverture de la pêche et j’espère que, cette fois, nous serons entendus. Nous agissons d’ailleurs pour l’obtenir avec tous les parlementaires du littoral.

Mais, comme le Premier ministre l’avait demandé à Rennes, il faut aller plus loin et élaborer un plan d’avenir pour la pêche. Nous sommes en train de le préparer, afin de mieux gérer la ressource et d’éviter les fermetures pour quotas anticipés. Consommer différemment les quotas, proposer un plan de sortie de flotte pour ceux qui le souhaitent, réformer les droits à produire, prolonger les mesures sur le gazole que nous avons prises par l’intermédiaire du FPAP, le Fonds de prévention des aléas de la pêche, réfléchir à de nouvelles dispositions pour l’année prochaine, améliorer la mise sur le marché, créer un statut des entreprises de pêche, renforcer la sécurité – car trop nombreux ont été les accidents de pêche ces dernières années –, et la formation des jeunes, telles sont nos propositions qui concernent à la fois la France métropolitaine et l’outre-mer. Ces mesures à la préparation desquelles vous collaborez seront prêtes en fin d’année et, si le Premier ministre l’accepte, elles pourront être regroupées dans un grand projet de loi pour la pêche qui sera soumis au Parlement en 2006. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

télévision numérique terrestre

M. le président. La parole est à M. Patrice Martin-Lalande.

M. Patrice Martin-Lalande. Le Gouvernement vient d’annoncer que la télévision numérique terrestre sera accessible à 85 % de la population française dès le printemps 2007. Il s’agit d’un nouveau progrès pour les téléspectateurs qui gagneront six mois par rapport au calendrier initial, mais il devient d’autant plus urgent de régler le problème des 15 % restants qui ne peuvent recevoir la TNT pour des raisons techniques.

Dans mes rapports budgétaires antérieurs, j’ai demandé au Gouvernement quelles solutions seraient mises en œuvre pour permettre à ces 9 millions de téléspectateurs de bénéficier des avantages de la télévision numérique. Le Gouvernement vient de recevoir le rapport qu’il avait commandé sur le sujet. Peut-il nous préciser ses intentions sur les technologies qui seront retenues et nous indiquer si elles permettront aussi d’améliorer dans ces zones inaccessibles à l’ADSL la desserte en Internet haut débit et en téléphonie mobile de troisième génération ? Il faut mutualiser ces investissements coûteux dans les zones les moins favorisées.

Par ailleurs, quel sera le calendrier arrêté, pour ne pas faire attendre 9 millions de téléspectateurs et pour libérer les fréquences bloquées par l’actuelle diffusion analogique ?

Enfin, pour financer les investissements nécessaires, monsieur le ministre de la culture et de la communication, le Gouvernement utilisera-t-il une partie du produit supplémentaire de la redevance perçu grâce à la réforme en cours ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de la culture et de la communication.

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le député, vous qui êtes un grand spécialiste de l’audiovisuel, me posez une question très importante car la TNT n’est pas un slogan barbare, mais une offre qui doit concerner chaque Française et chaque Français.

M. Maurice Leroy. Très bien !

M. Jean-Marie Le Guen. C’est un service public !

M. le ministre de la culture et de la communication. Elle est synonyme d’une qualité de son et d’image et d’une multiplication par trois du nombre de chaînes gratuites.

Il faut, mesdames et messieurs les députés, que l’ensemble de nos concitoyens sachent que, sur cette question, le gouvernement de Dominique de Villepin, comme celui de Jean-Pierre Raffarin, forme une équipe qui tient ses engagements ! Lors de la mise en service de quinze nouveaux émetteurs destinés à couvrir l’ensemble du territoire national, le Premier ministre a fixé lui-même plusieurs engagements assortis de délais très précis.

Si 85 % des Français doivent recevoir la TNT au printemps 2007, vous avez raison de vous préoccuper de ceux qui n’y auront pas accès à ce moment-là. La solution technologique se présentera sous la forme d’une offre de satellite gratuite permettant d’assurer la réception partout sur le territoire national. Il n’est pas question de changer de poste de télévision ou d’antenne, il suffira d’acheter un adaptateur.

Reste le problème complexe des zones frontalières...

M. Michel Bouvard. Eh oui !

M. le ministre de la culture et de la communication. ...que plusieurs ministres – communication, industrie, aménagement du territoire – ont été chargés de résoudre par le Premier ministre. Notre feuille de route est simple : au 31 décembre 2007, toute la population française devra recevoir la TNT.

Pour ce faire, des moyens ont été dégagés avec la création, à l’initiative du Premier ministre, d’un fonds d’accompagnement pour le numérique qui sera doté, pour l’année 2006, de 15 millions d’euros. L’argent ne sera pas prélevé sur le soutien aux programmes et les moyens de fonctionnement de l’audiovisuel public. C’est une décision prise par le Premier ministre pour que cette innovation se concrétise vite.

Ainsi, l’ensemble des Français devraient recevoir la TNT. Mais elle ne constituera un progrès que si l’offre de programmes est au rendez-vous. Je compte donc sur les journalistes, les producteurs et les créateurs pour en faire un grand succès populaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

persones âgées dépendantes

M. le président. La parole est à M. François Dosé.

M. François Dosé. Monsieur le Premier ministre, qui dit vrai ? L’Agence nationale des services à la personne assure que le Gouvernement favorise le développement des services à la personne. Or certaines caisses régionales d’assurance maladie, certaines mutuelles et les grands réseaux associatifs engagés dans les services de proximité nous alertent tous, d’où que nous soyons, sur la réduction drastique des heures attribuées, notamment aux personnes âgées à domicile.

M. Daniel Paul. C’est vrai !

M. Maxime Gremetz. Il n’y a plus un sou !

M. François Dosé. Ainsi, en région Lorraine, le déficit des heures financées par la CRAM du Nord-Est sera de 119 000 heures à la fin de 2005 par rapport à 2004. Elle en tire d’ailleurs les conséquences : « Le décalage constaté entre les besoins en aide, grandissants, et la paupérisation des crédits ne permet plus de juguler l’enveloppe d’aide à domicile. Cette compensation horaire ne se fera donc pas, sauf à envisager un effort exceptionnel des conseils généraux. »

Qui dit vrai, monsieur le Premier ministre ? Vous, chef du Gouvernement, prétendez réduire la fracture sociale et votre ministre, M. Borloo, prétend lui créer 500 000 emplois en trois ans dans les services de proximité. Or les CCAS à l’échelon municipal, les services de proximité constatent sur le terrain l’affaiblissement du caractère social des prestations au profit des personnes âgées ayant les moyens de les financer totalement. Les acteurs engagés au quotidien envisagent dans certains départements soit de réduire les emplois, soit plus souvent de réduire les heures par poste de travail, déjà très partielles.

Je ne nie pas les transferts vers le chèque emploi service, mais le compte n’y est pas, monsieur le Premier ministre : l’exigence de formation, la volonté de professionnalisation, les interventions de prévention en pâtissent.

Financièrement, économiquement, socialement, pouvez-vous nous préciser les mesures et les échéances qui, conformément à vos engagements, assureront enfin à toutes les personnes âgées les moyens nécessaires pour leur maintien, aussi longtemps que possible, à leur domicile ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur le député, l’aide aux personnes âgées dépendantes ne doit pas donner lieu à des polémiques ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Tous les crédits ont été délégués aux caisses régionales d’assurance maladie, (« Zéro ! » sur de nombreux bancs du groupe socialiste) pour que les heures d’aide ménagère soient cette année au même niveau que l’an dernier.

J’ajoute que jamais la nation n’a consenti un tel effort en faveur des personnes âgées. (Huées sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Pour rattraper le retard accumulé dans les années récentes, la Caisse nationale de solidarité a été créée et elle est dotée de 2,2 milliards d’euros. Les crédits d’assurance maladie pour les maisons de retraite médicalisées et les services de soins infirmiers à domicile vont augmenter l’an prochain de 9 %. (« Zéro ! » sur de nombreux bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) L’État fait sa part du chemin, lui aussi, avec le programme « Dépendance » qui augmentera de 6,4 % en 2006.

Voilà la vérité ! (Huées et claquements de pupitre sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Et je comprends qu’elle vous gêne car, en cinq ans, vous n’avez rien fait pour les personnes âgées (Mêmes mouvements sur les bancs du groupe socialiste) et, quand vous avez créé l’allocation personnalisée d’autonomie, vous n’avez pas prévu les financements nécessaires. C’est nous qui avons dû les trouver ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire – Huées sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

filière fruits et légumes

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Barèges, pour le groupe UMP.

Mme Brigitte Barèges. Monsieur le ministre de l’agriculture et de la pêche, la filière des fruits et légumes traverse depuis de trop nombreuses années de grandes difficultés.

Nos arboriculteurs méritent-ils d’être plus maltraités que les marins corses ou que le gouffre du parc de loisir Cap Découverte, creusé par M. Paul Quilès ? Je ne le pense pas.

La crise que vivent les arboriculteurs est due depuis de trop nombreuses années à la mévente et aux prix trop bas en raison des effets conjugués de la concurrence sauvage des pays tiers à l’Europe et du quasi-monopole de la grande distribution.

M. André Chassaigne. Qu’attend le Gouvernement pour s’attaquer à la grande distribution ?

Mme Brigitte Barèges. À ces causes structurelles s’ajoutent, hélas, des causes conjoncturelles, comme dans mon département du Tarn-et-Garonne, où d’importants orages de grêle ont détruit la production de près des deux tiers des exploitations sur quatre-vingts communes. La DDA chiffre les dégâts à 11 millions d’euros et ce sont 1 000 emplois directs et 2 000 emplois indirects qui sont concernés.

Après avoir rencontré l’ensemble des acteurs et sur la base des attentes formulées par les professionnels, vous avez, monsieur le ministre, annoncé un plan de soutien en faveur de la filière des fruits et légumes. Pourriez-vous nous préciser sa teneur et nous indiquer ce que peuvent espérer, particulièrement dans le Tarn-et-Garonne, ceux des arboriculteurs qui sont en très grande difficulté ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de la pêche.

M. Dominique Bussereau, ministre de l’agriculture et de la pêche. Madame la députée, vous avez raison d’insister, comme de nombreux parlementaires de cette assemblée, sur la gravité de la crise que traverse, dans différentes régions, la filière des fruits et légumes.

Les événements météorologiques que vous avez rappelés ont suivi de très mauvais étés, ce qui a rendu nécessaire l’élaboration d’un véritable plan de soutien composé de mesures conjoncturelles, structurelles et de suivi du marché.

Nous avons d’ores et déjà mobilisé 15 millions d’euros de crédits exceptionnels ainsi que 25 millions d’euros de prêts de consolidation à taux bonifiés. Nous avons également décidé d’accompagner directement les producteurs les plus en difficulté en les aidant à moderniser leurs vergers, à structurer leur offre et à dynamiser le marché.

Il conviendra, enfin, de travailler avec tous les parlementaires à un grand plan d’adaptation structurelle du verger.

M. Maxime Gremetz et M. André Chassaigne. Et les coefficients multiplicateurs ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Un grand nombre de parlementaires ont, comme vous, évoqué les difficultés liées à l’Europe : nous devons effectivement mieux assurer la surveillance des importations (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire) car, cet été, nous avons dû faire face à des importations incontrôlées qui ont déstabilisé les marchés. Nous ne pouvons pas accepter une telle situation. Nous avons donc demandé – je l’ai rappelé hier au conseil des ministres de l’agriculture – le déclenchement d’une clause de sauvegarde sur les pommes et une limitation, dans le calendrier, des importations autorisées afin de ne pas rencontrer les mêmes difficultés l’an prochain. De plus, la France a demandé avec insistance que l’Union européenne mette en place un dispositif de gestion de crise nous permettant de nous affranchir des règles de la concurrence et d’avoir les outils nationaux pour agir.

M. Maxime Gremetz. Et les coefficients multiplicateurs ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Nous pourrons ainsi répondre aux besoins d'une profession en grande difficulté et lui témoigner notre solidarité. Nous travaillerons avec vous, madame Barèges, sur des mesures adaptées à votre département, comme nous le ferons pour tous les départements concernés. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

classes de découverte

M. le président. La parole est à Mme Béatrice Pavy, pour le groupe UMP.

Mme Béatrice Pavy. Monsieur le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, en octobre 2003 j’interrogeais le ministre délégué à l’enseignement scolaire afin de connaître les intentions du Gouvernement pour redynamiser les classes de découverte, puisque 10 % seulement des élèves du primaire en bénéficient. Pourtant, chacun s’accorde à reconnaître qu’en contribuant à donner une dimension concrète aux apprentissages des élèves tout en renforçant la cohésion de la classe et les liens avec les enseignants, elles constituent un apport pédagogique indiscutable.

Parallèlement à la création d’un groupe de travail sur ce thème, le Premier ministre me confiait une mission parlementaire sur les conditions d’organisation de ces classes hors les murs de l’école. J’ai rendu mon rapport en juin 2004 : celui-ci comportait un grand nombre de propositions, dont plusieurs ont été retenues dans le cadre d’une directive ministérielle en janvier 2005. Cette directive a le mérite de remettre à l’honneur les classes de découverte et de fixer clairement les objectifs et les recommandations pour l’organisation des séjours. Toutefois, monsieur le ministre, pouvez-vous nous préciser quand le répertoire des hébergements agréés par l’Éducation nationale, outil indispensable à la recherche et à la préparation des séjours par les enseignants, sera mis en ligne sur Éduscol ? De même, quel outil statistique permanent pensez-vous mettre en place pour l’évaluation tant quantitative que qualitative de ces séjours ? À quand un document commun à toutes les inspections académiques pour la préparation des séjours, permettant d’éviter une surenchère administrative ?

L’objectif de la mission était de revivifier le réseau afin de permettre à chaque enfant de partir au moins une fois dans sa scolarité. Or, je viens d’apprendre avec stupeur que les voyages de 3 000 collégiens du département du Cher sont remis en cause suite à un avis de la Cour des comptes repris dans un courrier du recteur de l’académie d’Orléans-Tours. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) On ne peut décemment demander aux enseignants de financer les frais afférents à leurs propres séjours, compte tenu de leur investissement personnel dans la préparation et l’encadrement de ces classes, où ils sont responsables des élèves vingt-quatre heures sur vingt-quatre.

Monsieur le ministre, pouvez-vous préciser la règle applicable à chaque établissement pour éviter toute interprétation fâcheuse du document, laquelle se révélerait préjudiciable aux élèves privés d’une telle expérience ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.

M. Gilles de Robien, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Madame la députée, je suis, comme vous, très favorable aux classes de découvertes, en raison non seulement de leur vertu pédagogique, mais également de l’état d’esprit qu’elles suscitent à l’intérieur de la classe, contribuant à l’épanouissement des relations entre les professeurs et les élèves. J’en suis un ferme partisan et souhaite favoriser leur essor.

Chacun reconnaît qu’un voyage à l’étranger avec sa classe décuple l’intérêt d’un élève pour l’apprentissage d’une langue, ou qu’un séjour en pleine nature…

M. Maxime Gremetz et M. Daniel Paul. La réponse !

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. …avec son professeur le sensibilisera aux problèmes d’environnement ou d’effets de serre. Les classes de découverte permettent de jeter les bases de l’écologie de demain. (« Qui paie ? » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Madame la députée, la circulaire qui a été prise il y a quelques mois s’inspire très largement de vos propositions. Le site sera ouvert d’ici à la fin de l’année.

Le rapport de la Cour des comptes, quant à lui, ne saurait en aucun cas conduire à une remise en cause de la gratuité des déplacements pour celles et ceux qui accompagnent les enfants en classes de découvertes – je le répète, en aucun cas !

Mesdames et messieurs les députés, je suis certain que vous vous joindrez à moi pour exprimer notre gratitude à toutes celles et à tous ceux qui assurent la réussite des classes de découverte : chefs d’établissements, enseignants et parents. Ensemble, nous pouvons leur dire merci ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – « Mais qui paie ? » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à quinze heures cinquante-cinq, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de Mme Paulette Guinchard.)

PRÉSIDENCE DE MME PAULETTE GUINCHARD,
vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

Loi de financement
de la sécurité sociale pour 2006

Discussion d’un projet de loi

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 (nos 2575, 2609).

Hier soir, l’Assemblée a commencé d’entendre les orateurs inscrits dans la discussion générale.

Rappels au règlement

M. Claude Évin. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

Mme la présidente. Au titre de quel article, mon cher collègue ?

M. Claude Évin. Au titre des articles 92 et 98, madame la présidente.

Un certain nombre de nos collègues et moi-même avions déposé un amendement à ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, enregistré sous le n° 294. Cet amendement tendait à la création d’un conseil de modération et de prévention de l’alcoolisme. Il nous semblait en effet qu’il y avait un lien direct avec l’examen de la loi de financement de la sécurité sociale. Personne ne peut nier que l’alcoolisme a des effets sur l’évolution des dépenses de santé et donc sur l’évolution des dépenses d’assurance maladie. Il nous paraissait en outre nécessaire que ce conseil de prévention de l’alcoolisme, afin de répondre avant tout à des préoccupations de santé publique, soit composé de manière équilibrée : une part importante aurait été donnée aux professionnels de santé, représentant la moitié des membres, et d’autre part, aux représentants des associations, tandis que les représentants nommés par le ministre de l’agriculture n’auraient représenté qu’un huitième de ce comité, proportion identique à celle des parlementaires.

Or, nous venons d’apprendre que cet amendement, au motif qu’il constituerait un cavalier n’ayant rien à voir avec notre débat sur le financement de l’assurance maladie, a été refusé par M. le président de la commission des finances. Je voudrais, madame la présidente, que vous demandiez à M. le président de la commission des finances de venir expliquer devant l’Assemblée les raisons qui l’ont conduit à refuser que nous examinions cet amendement.

J’en profite pour vous interpeller, monsieur le ministre délégué à la sécurité sociale, afin que vous nous informiez sur les intentions du Gouvernement à propos d’un amendement portant sur le même sujet et qui aurait été, nous dit-on, adopté lors de l’examen d’une loi d’orientation sur l’agriculture. J’observe qu’il s’agit peut-être également d’un cavalier, n’obéissant sans doute pas aux mêmes règles que pour les lois de financement, mais dont le Conseil constitutionnel aura peut-être l’occasion d’apprécier le caractère de cavalier dans la loi d’orientation agricole.

Je souhaite en tous cas protester contre ce refus de M. le président de la commission des finances, car le dépôt de cet amendement est bel et bien lié au financement de l’assurance maladie. Aussi aimerais-je que M. le président de la commission des finances soit convoqué devant notre assemblée. Le paradoxe serait que ce soit M. Bur, membre de la commission, qui réponde. En effet, monsieur Bur, l’attachement que vous manifestez pour les questions de santé publique vous amènera à examiner mon rappel au règlement avec la plus grande attention. Je ne vous crois tout de même pas schizophrène, et espère donc que vous ne vous contredirez pas - je pense au combat que vous menez sur d’autres sujets de santé publique comme le tabac.

Nous allons vous entendre, monsieur Bur, mais demandez au président de la commission des finances de venir s’expliquer, demandez, en tous cas, au Gouvernement de s’engager à ce que le conseil de modération donne la priorité à la santé publique, ce qui est au cœur de nos préoccupations, nous qui suivons la loi de financement de la sécurité sociale.

Mme la présidente. Monsieur Évin, je n’ai pas le pouvoir de convoquer M. le président de la commission des finances, mais M. Bur souhaite vous répondre.

La parole est donc à M. Bur, rapporteur pour avis de la commission des finances.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis de la commission des finances. Madame la présidente, monsieur Évin, il s’agit, en effet, d’éviter toute confusion entre nos objectifs de santé publique et les questions de procédure.

M. Claude Évin. Ce n’est pas facile pour vous !

M. Yves Bur, rapporteur pour avis de la commission des finances. M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances, m'a demandé de vous préciser les conditions dans lesquelles il a été amené à appliquer l'article 40 de la Constitution aux plus de 350 amendements qui ont été déposés sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006. Trois cent cinquante amendements, c'est 100 de plus que l'année dernière, alors même qu'il n'y a plus de rapport annexé à amender !

De manière tout à fait traditionnelle, depuis la décision du Conseil constitutionnel de 1961, tout amendement prévoyant une dépense supplémentaire pour un régime de sécurité sociale est irrecevable, car créateur d'une nouvelle charge publique pour ces régimes qui sont dans le champ de l'article 40.

M. Claude Évin. Et l’alcoolisme, n’est pas cause d’une dépense supplémentaire ?

M. Yves Bur, rapporteur pour avis de la commission des finances. À ce titre, le président de la commission des finances a dû refuser le dépôt de tout amendement augmentant les remboursements à la charge de l'assurance maladie, ou élargissant le champ des bénéficiaires potentiels de prestations familiales, même à enveloppe constante.

M. Jean-Marie Le Guen. Excellent ! Très bien ! Continuez donc !

M. Yves Bur, rapporteur pour avis de la commission des finances. Je vous rappelle, en me tournant vers M. le ministre, que le Gouvernement peut toujours décider de reprendre à son compte les amendements irrecevables, s'il les estime fondés.

L'autre motif d'irrecevabilité concerne les cavaliers sociaux. Très traditionnellement aussi, conformément à une jurisprudence assez stricte du Conseil constitutionnel en la matière, le président Pierre Méhaignerie a dû déclarer irrecevables tous les amendements qui n'ont pas d'impact financier significatif sur les recettes ou les dépenses de la sécurité sociale.

M. Jean-Marie Le Guen. Ce n’est pas son travail !

M. Yves Bur, rapporteur pour avis de la commission des finances. Il s'agit ainsi d'éviter que le PLFSS se transforme en DMOS ou en nouvelle loi de santé publique. De même, il faut que l'amendement concerne les régimes qui sont dans le champ du PLFSS, ce qui n'est pas le cas des régimes complémentaires, ni de l'aide sociale, concernant l’APA. Seule la CMU peut désormais aussi se rattacher au PLFSS, compte tenu de l'évolution de son mode de financement.

M. Claude Évin. Vous êtes hors sujet !

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. En revanche, des ouvertures sont permises par la nouvelle loi organique du 2 août 2005 qui prévoit un nouveau critère de recevabilité : la gestion du risque – et je ne suis pas étranger à cette innovation. À ce titre, le président Pierre Méhaignerie a déclaré recevables tous les amendements non coûteux concernant les relations conventionnelles entre les médecins et les caisses, les dépassements d'honoraires compris, car il s'agit d'inciter les professionnels de santé à une meilleure prise en compte des réalités de l'assurance maladie.

En revanche, de simples procédures d'information, ou la création d'observatoires, ne peuvent être considérées comme ayant un lien direct avec la gestion du risque des régimes de sécurité sociale.

M. Jean-Marie Le Guen. Ce n’est pas au président de la commission des finances d’en décider !

M. Yves Bur, rapporteur pour avis de la commission des finances. Après avoir fourni ces précisions au nom du président Pierre Méhaignerie, je vous invite, mes chers collègues, à poursuivre le débat. Si cette situation n’est pas satisfaisante pour vous, monsieur Évin, elle ne l’est pas forcément non plus pour moi, mais pour d’autres raisons. Peut-être le Gouvernement acceptera-t-il de débattre de cette question, mais la responsabilité lui en revient.

M. Jean-Marie Le Guen. Je demande la parole, pour un rappel au règlement.

Mme la présidente. Sur la base de quel article, mon cher collègue ?

M. Jean-Marie Le Guen. Je pourrais invoquer l’article 98, madame la présidente. En tout état de cause, je vais vous demander également une suspension de séance afin de donner à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille le temps de consulter M. le ministre de la santé et des solidarités, qui n’est pas parmi nous, sur les objectifs de la politique de santé publique. Nous n’accepterons pas une absence d’engagement du Gouvernement sur cette grave question. Nous exigeons une réponse de sa part et demandons qu’il reprenne cet amendement.

En outre, si nous ne contestons pas les attributions du président de la commission des finances quant à la recevabilité des amendements au titre de l’article 40 de la Constitution, nous estimons que les considérations sur ce qui doit ou ne doit pas figurer dans un texte ne sont nullement de son ressort : en l’occurrence, il s’arroge un pouvoir qui n’est pas le sien !

Pour le reste, nous sommes à la disposition du Gouvernement et attendons sa réponse.

Suspension et reprise de la séance

Mme la présidente. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures trente, est reprise à seize heures quarante.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

La parole est à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur Évin, vous m’informez que la commission des finances a jugé irrecevable un amendement que vous aviez déposé avec plusieurs de vos collègues et qui vise à modifier la composition d’un futur Conseil de la modération et de la prévention. Je vous rappelle que l’Assemblée a adopté il y a quelques jours, lors de la discussion du projet de loi d’orientation agricole, une disposition concernant cette instance.

M. Claude Évin. C’est bien le problème !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Le débat n’est pas terminé, puisque ce texte reviendra devant l’Assemblée après avoir été examiné par le Sénat. Les occasions de le modifier ne manqueront donc pas.

M. Jean-Marie Le Guen. Vous êtes mal informé, monsieur le ministre !

M. Claude Évin. De toute façon, il faut en discuter dans le cadre d’un débat de santé publique !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Dans ces conditions, et étant donné que la décision de la commission des finances n’est pas contestée sur le plan juridique, le Gouvernement ne peut proposer la discussion de cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Vos informations sont incomplètes, monsieur le ministre : l’urgence ayant été déclarée sur le projet de loi d’orientation agricole, il n’y aura pas de deuxième examen à l’Assemblée nationale. Il s’agit d’un véritable détournement, puisque, à la faveur d’un débat qui n’avait rien à voir avec la santé publique, on a proposé une profonde altération des principes mêmes de la santé publique dans notre pays, lesquels font pourtant l’objet d’un consensus dépassant les clivages partisans.

Le texte va donc arriver en discussion au Sénat. Si le Gouvernement ne s’y oppose pas et si la majorité sénatoriale, dont on connaît les penchants en la matière (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire), approuve la disposition votée par une majorité de circonstance à l’Assemblée nationale, le projet sera adopté et plus aucune campagne d’information et de lutte contre l’alcoolisme ne pourra être lancée sans l’approbation des milieux de l’industrie et du commerce des alcools ! Ce serait là une régression qui nous ferait revenir, sur le plan de la santé publique, trente ou quarante ans en arrière.

Votre insensibilité sur ce sujet nous pousse à nous interroger, monsieur le ministre. Pas plus que l’argument du retour en discussion à l’Assemblée, nous ne pouvons accepter que le Gouvernement, qui nous fait la leçon et fait valoir ses engagements en matière de santé publique – nous serions parfois tentés, d’ailleurs, de le prendre au mot et de le suivre sur ce terrain – entame un débat consacré à ce sujet sans dire un mot pour confirmer au pays le maintien des principes de la politique de santé publique dans la lutte contre l’alcoolisme. Je le répète, c’est du jamais vu depuis trente ans !

Nous ne pouvons poursuivre le débat sans que le Gouvernement s’engage solennellement sur la politique de santé publique.

Réfléchissez, monsieur le ministre !

Discussion générale (suite)

Mme la présidente. Dans la discussion générale, la parole est à M.Bruno Gilles. (« Enfin ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Bruno Gilles. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, il n'est pas coutume, lors de l'examen d'un projet de loi de financement de la sécurité sociale, de manifester de l'optimisme, même mesuré. Toutefois, certains indicateurs permettent de constater que la bataille commencée l'an passé pour la réforme de l'assurance maladie est en train de porter ses fruits.

Ainsi, on peut estimer que les économies résultant de la maîtrise médicalisée des dépenses d'assurance maladie s’élèveront à 675 millions d'euros à la fin de l'année. Certes, les habitudes ne se changent pas du jour au lendemain et nous n'atteindrons pas les 998 millions escomptés, mais les choses vont plutôt dans la bonne direction.

L’objectif en matière d’arrêts de travail a été de loin dépassé. Ainsi, les indemnités journalières ont chuté, de janvier à août 2005, de 2,6 % par rapport à l’année précédente à la même période.

Dans le même temps, la part de marché des médicaments génériques progresse, les dépenses de remboursement des antibiotiques et des anti-cholestérol diminuent, de même que celles des anxiolytiques. Même les statines, malgré les difficultés engendrées par le manque de clarté des recommandations en la matière, connaissent une ébauche de décélération. Ainsi, en un an, l’évolution des prescriptions est passée de 12,5 à 8,2 %. Les résultats du programme de la Caisse nationale d’assurance maladie sur le bon usage des antibiotiques ont été présentés le 18 octobre dernier. Bien que la France reste championne européenne dans ce domaine, la consommation de ces médicaments a, en trois ans, diminué de 12,8 %. Au total, 11,6 millions de traitements inutiles ont ainsi été évités, pour une économie de 375 millions d’euros.

Mme Catherine Génisson. Au lieu de parler gros sous, raisonnez en termes de santé publique !

M. Bruno Gilles. L’objectif est d’atteindre une diminution de 25 % d’ici à 2008. Il est intéressant de souligner que la baisse la plus significative est enregistrée chez les enfants : moins 14,8 % jusqu’à cinq ans et moins 26,1 % entre six ans et quinze ans. Une nouvelle campagne télévisuelle est diffusée en ce moment et jusqu’au 10 novembre pour venir à bout des idées reçues et des confusions. Nous ne pouvons que l’approuver.

Par ailleurs, la CNAM souhaite obtenir des médecins hospitaliers les mêmes efforts que de leurs confrères libéraux en matière d’arrêts de travail, de respect de l’ordonnancier bizone et de prescriptions d’antibiotiques. Un accord de bon usage des soins est en préparation dans ce domaine. Il serait utile de dresser le bilan de toutes ces mesures dans un an afin d’apprécier les efforts de chacun.

Il est cependant des domaines où d’énormes progrès restent à faire. Une étude IPSOS Santé montre que la France détient le triste record d’Europe de l’excessive consommation de médicaments.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Eh oui !

M. Bruno Gilles. Dans notre pays, neuf consultations sur dix se concluent par une ordonnance de médicaments contre un peu plus d’une sur deux aux Pays-Bas. Cette étude révèle aussi que 46 % des médecins français « déclarent faire l’objet d’une pression de la part de leurs patients ». Pourtant, dans le même temps, les patients se disent prêts à « faire évoluer leurs comportements » dans 83 % des cas. Pour 78 % des personnes interrogées, la priorité dans une consultation réside dans les explications données par le praticien.

Une des mesures susceptible de modifier le comportement des patients est le conditionnement pour trois mois des médicaments utilisés dans le traitement de certaines affections de longue durée, comme le prévoit la loi relative à l’assurance maladie du 13 août 2004. Une telle disposition devrait permettre d’économiser 180 millions d’euros d’ici à 2007. Pour l’instant, un seul médicament est disponible en conditionnement de trois mois dans les pharmacies. Mais les demandes de modification d’autorisation de mise sur le marché pour les médicaments concernés sont nombreuses à l’AFSSAPS, car, dès janvier 2006, les laboratoires qui n’auront pas mis en place ces gros conditionnements pour les ALD ciblées devront appliquer une décote sur le prix de vente de leurs conditionnements mensuels. Par ailleurs, la commission de la transparence a fait savoir qu’elle ne s’opposerait pas à l’étude de l’extension de cette mesure à d’autres médicaments si les laboratoires qui les fabriquent le proposent.

Toujours à propos des médicaments, j’ai déposé un amendement pour proposer la création d’un taux de remboursement à 0 % pour les médicaments à service médical rendu insuffisant, qui seront déremboursés au 1er mars prochain. Il me semble que ce nouveau taux permettrait de maintenir des prix administrés sur ces produits et éviterait qu’ils ne soient libres sur le marché. De plus, cela pourrait apporter provisoirement une réponse thérapeutique aux patients.

Monsieur le ministre, l’action sur les comportements des patients comme sur ceux du corps médical est au cœur de la réforme de l’assurance maladie. Elle commence déjà à faire sentir ses premiers effets. C’est pourquoi je soutiens le texte que vous nous présentez, qui confortera et approfondira ces changements. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Terrasse.

M. Pascal Terrasse. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je pourrais, comme une grande partie de mes collègues hier soir, dire combien le budget qui nous est présenté est socialement inacceptable et médicalement très discutable. Cette appréciation est, je crois, très largement partagée par l’ensemble des opérateurs du secteur sanitaire, médical et médico-social. En tant que membre du conseil de surveillance de l’ACOSS et de la caisse nationale d’assurance vieillesse, je concentrerai plutôt mes questions sur les aspects financiers du secteur du handicap et de la dépendance des personnes âgées.

J’avais été, avec mes collègues socialistes, l’un des rares à dire que la réforme Fillon, qui n’était pas financée, aurait des conséquences très lourdes sur les équilibres budgétaires de la branche vieillesse. Nous étions des visionnaires puisque nous constatons aujourd’hui qu’après avoir été excédentaire jusqu’en 2004, le budget 2005 est déficitaire de 2 milliards d’euros, auxquels viennent s’ajouter les 2 milliards du fonds social vieillesse.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Pourriez-vous nous dire pourquoi ?

M. Pascal Terrasse. La question est intéressante, en effet. Tout simplement parce que les mesures en faveur des carrières longues n’étaient pas financées.

M. Denis Jacquat. Nous avons tous demandé ces mesures !

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Elles ont été prises !

M. Pascal Terrasse. Et elles se sont révélées très coûteuses pour la CNAV.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Cela vous gêne parce que c’est une vraie mesure sociale !

M. Pascal Terrasse. Si l’on veut financer correctement nos retraites, il faut trouver des ressources. Or, depuis maintenant trois ans, vous n’en avez apporté aucune à l’équilibre budgétaire de la CNAV. Pour 2006, vous prévoyez 0,2 % d’augmentation des cotisations, ce qui, vous le savez, sera très insuffisant. Comme vous allez mettre en place par arrêté le dispositif de financement, nous sommes inquiets de savoir comment seront réparties la participation des salariés et celle des entreprises.

Quant à l’évaluation des dépenses de la branche vieillesse pour 2006 à hauteur de 161 milliards, c’est une vaste tromperie ! Ce montant n’est absolument pas sérieux. Vous savez parfaitement que la dépense se rapprochera plus certainement de 164 milliards ou 165 milliards. Dès lors, il y a fort à craindre que le budget soit encore plus déséquilibré l’an prochain, tout simplement parce que les ressources ne sont pas là.

Ma deuxième question porte sur la CNSA, la fameuse caisse issue de la suppression du lundi de Pentecôte. Je constate que les crédits qui y ont été affectés en 2005 ne sont pas ceux que l’on espérait. On aurait pu s’attendre à un rendement beaucoup plus important que les 500 millions que vous avez présentés. Contrairement à ce que vous avez indiqué tout à l’heure, la CNSA dispose de crédits importants qui sont aujourd’hui non utilisés, alors même que les conseils généraux ont du mal à boucler les équilibres budgétaires liés à l’allocation personnalisée d’autonomie. Où est donc passé l’argent du lundi de Pentecôte ?

M. Gérard Bapt. Rendez l’argent !

M. Pascal Terrasse. À quoi vont servir les 600 millions qui sont aujourd’hui gelés ? Vous avez pérennisé le fameux crédit de 400 millions d’euros au profit des départements. Mais depuis, plus rien, alors même que le nombre de personnes âgées dépendantes dans les départements augmente fortement. On a la fâcheuse impression que le lundi de Pentecôte va connaître le même sort que la fameuse vignette pour les personnes âgées.

M. Denis Jacquat. Oh !

M. Pascal Terrasse. On s’en est servi un peu au début, puis on a détourné l’argent. Je vous démontrerai d’ailleurs comment, à travers toute une série d’articles du projet de loi, la CNSA finance aujourd’hui une partie des besoins sanitaires. Ma collègue Danièle Hoffman-Rispal, quant à elle, vous expliquera que la réforme des unités de soins de longue durée, qui relèvent du champ sanitaire, va être financée indirectement par les conseils généraux et partiellement par le lundi de Pentecôte, autrement dit par le secteur médico-social. Le mécanisme de transfert est assez clair mais pas très sérieux.

L’article 32 sur la réforme de la tarification est, à cet égard, exemplaire. Vous la repoussez pour la troisième fois. Voulez-vous, oui ou non, monsieur le ministre, que les établissements hospitaliers qui accueillent des personnes âgées disposent des ressources nécessaires ? Moins de 300 conventions ont été signées depuis le début de l’année, bien loin des 1 500 annoncées par votre prédécesseur. Voilà qui n’est encore pas sérieux. D’ailleurs, la commission des finances a adopté un amendement sur ce point.

Mme la présidente. Voudriez-vous conclure, monsieur Terrasse ?

M. Pascal Terrasse. À travers les orientations, que M. Jacquat connaît bien, notamment du contrat d’objectifs et de gestion, ce sont encore près de 2 milliards de francs qui disparaîtront progressivement du budget de la CNAV pour les aides ménagères. Vous ne nous avez pas répondu, monsieur le ministre : comment, dès lors, seront-elles financées ?

M. Denis Jacquat. On dit « aides à domicile » !

M. Pascal Terrasse. C’est vrai. Il n’empêche qu’elles ne sont pas financées. C’est la réalité, monsieur le ministre, sortez de Paris, voyez ce qui se passe sur le terrain : la caisse nationale d’assurance vieillesse n’a plus les moyens de financer l’action sociale.

Mme Catherine Génisson. Même à Paris, d’ailleurs !

M. Pascal Terrasse. Je suis sûr que de nombreuses associations d’aide à domicile seraient prêtes à signer une pétition dans les départements.

Mme la présidente. Je vous demande de terminer, monsieur Terrasse.

M. Gérard Bapt. C’est intéressant ce qu’il dit !

M. Pascal Terrasse. La sortie du dispositif Aubry au profit du dispositif Fillon d’allégement des cotisations sociales aura, pour les institutions médico-sociales, un coût de 250 millions. Vous avez prévu 50 millions d’euros. Comment financerez-vous le reste ?

Lors de la discussion du projet de loi sur le handicap, le Gouvernement nous avait juré qu’un dispositif spécifique de rémunération des travailleurs handicapés serait mis en place. Non seulement il n’est pas mis en place, mais il est reporté sine die. Nous le regrettons.

Sous couvert de simplification, vous allez prendre une ordonnance concernant les évaluations, interne et externe, des établissements sociaux et médico-sociaux. Je trouve scandaleux de recourir à une telle procédure alors que ces évaluations sont indispensables pour connaître la qualité de nos établissements.

J’aurai encore bien d’autres questions, mais je les poserai au cours de la discussion des articles. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Rappel au règlement

M. Jean-Marie Le Guen. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour un rappel au règlement.

M. Jean-Marie Le Guen. J’ai l’impression que le Gouvernement souffre de dysfonctionnement. Comme le ministre de la santé n’est pas ici, nous ne pouvons pas obtenir la réponse que nous attendons.

M. Denis Jacquat. Il va arriver !

M. Jean-Marie Le Guen. Personne ne peut penser une seconde que le vote intervenu lundi dernier n’ait pas d’importance pour la santé publique. Les réactions ne se sont pas fait attendre. Outre les très nombreux articles de presse, j’ai moi-même reçu, comme vous, je le pense, de très nombreux télégrammes de la part de personnes se plaignant d’un retour en arrière caricatural et invraisemblable. Il faut absolument que le ministre de la santé s’exprime clairement sur le sujet à l’occasion de ce débat. Mais comme – étonnamment – il n’est pas là, je demande une suspension de séance d’une heure pour l’attendre. (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Mme la présidente. La suspension est de droit, mais auparavant, je donne la parole à M. le ministre.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. M. Xavier Bertrand est actuellement à l’hôtel Matignon, où il participe, avec les représentants de tous les groupes parlementaires, à une réunion consacrée à la grippe aviaire.

M. Pascal Terrasse. C’est l’argument marketing du moment !

M. Jean-Marie Le Guen. C’est un problème de gestion d’emploi du temps. Nous aussi, nous avions d’autres occupations ailleurs !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Il m’a chargé de l’excuser de ne pas pouvoir répondre plus directement à vos questions. Il y répondra volontiers dès qu’il le pourra. Pour ma part, je vous ai déjà dit que le débat sur ce sujet n’est pas clos, qu’il se poursuit actuellement au Sénat et qu’il reviendra devant l’Assemblée.

M. Claude Évin. Reprenez l’amendement !

Mme la présidente. Monsieur Le Guen, je vous accorde cinq minutes de suspension.

M. Jean-Marie Le Guen. C’est insuffisant ! Nous en demanderons une autre !

Suspension et reprise de la séance

Mme la présidente. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures, est reprise à dix-sept heures dix.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

M. Claude Évin. Où est le ministre de la santé ?

M. Jean-Pierre Door, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales pour les recettes et l’équilibre général. A Matignon, avec les présidents des groupes parlementaires !

Reprise de la discussion

Mme la présidente. Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Dominique Paillé.

M. Dominique Paillé. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaite, dans le peu de temps qui m’est imparti, mettre l’accent sur un problème qu’un grand nombre d’entre nous connaissent de près, celui de la démographie médicale, et je m’intéresserai plus particulièrement aux zones rurales.

Un certain nombre de dispositions ont été prises à l’occasion de lois récentes – je pense tout particulièrement à celle relative au développement des territoires ruraux – mais le dispositif se révèle insuffisant. Vous le complétez dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale par les articles 27, 29 et 30, en le fondant toujours sur l’incitation, qui, je l’espère, portera ses fruits.

Vous annoncez également, monsieur le ministre, un plan démographique pour la fin de l’année ou le tout début de l’année prochaine. Nous l’attendons avec impatience car il est aujourd’hui évident que, si les mesures incitatives ne produisent pas de résultats tangibles, il faudra sans doute étudier des dispositions un peu plus contraignantes comme celles qui, depuis de nombreuses années, ont fait leurs preuves pour d’autres professions, y compris de santé.

Quoi qu’il en soit, il me semblerait opportun d’utiliser les crédits du FAQSV, le fonds d’aide à l’amélioration de la qualité des soins de ville, que vous avez abondés, pour mettre en place, dans les meilleurs délais et en privilégiant les territoires qui se porteront candidats, des maisons médicales – quelle que soit l’appellation retenue –, où les libéraux puissent, entre autres, trouver des services administratifs ou de secrétariat pouvant les décharger des tâches qu’ils assument aujourd’hui souvent seuls et avec beaucoup de difficultés.

Je vous demande, monsieur le ministre, de bien retenir cette proposition car elle me semble de nature à apaiser sur le terrain certaines craintes…

M. Jean-Pierre Door, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Exact !

M. Dominique Paillé. …éprouvées non seulement par les élus locaux, mais également par la population.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Tout à fait !

M. Dominique Paillé. Le problème de la démographie médicale en milieu rural ne s’arrête pas aux libéraux ; il concerne également les hôpitaux généraux.

J’ai mené récemment avec d’autres collègues parlementaires une sorte de combat pour tenter d’obtenir que les étrangers travaillant dans nos établissements, dès lors que leur compétence peut être unanimement reconnue, soient dans les meilleurs délais et fort justement intégrés dans le corps médical comme praticiens à part entière.

Il existe deux types de personnes relevant de ces situations : des Français à diplômes extracommunautaire et des étrangers détenteurs des mêmes diplômes.

Je me suis longuement entretenu de cette question avec le ministre de la santé. Il recherche actuellement les moyens de résoudre les difficultés rencontrées par ceux qui sont en poste. Il me semble nécessaire de résorber, dans les années qui viennent, le stock – pardonnez-moi d’utiliser cette expression peu élégante – de ces praticiens qui justifient une intégration. J’appelle cependant votre attention sur le fait qu’il faudra vraisemblablement essayer d’endiguer les flux, car la régulation, nécessaire, du stock peut entraîner un appel d’air préjudiciable au règlement rapide de la situation de ceux qui sont en place. C’est pourquoi je me permets d’insister sur cette question fondamentale pour un grand nombre d’hôpitaux généraux et d’hôpitaux spécialisés, notamment en psychiatrie, qui ne pourraient pas aujourd’hui fonctionner convenablement sans ces personnels.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Exact !

M. Dominique Paillé. J’ai débordé, monsieur le ministre, du cadre du PLFSS. Mais je ne doute pas que vous serez attentif à ces demandes et que vous saurez dans de prochains textes – législatifs ou réglementaires – apporter des solutions à ces différentes questions. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Danièle Hoffman-Rispal.

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, cette mesure des « 18 euros » laissés à la charge des assurés sociaux sur les actes médicaux dont le montant dépasse 91 euros, si elle est maintenue, restera emblématique de votre projet de loi de financement de la sécurité sociale. Par son ampleur, ce nouveau déremboursement va frapper durement les patients les plus modestes. Ne voyez-vous pas que vous fragilisez surtout la prévention et le dépistage ? Croyez-vous vraiment que les Français subissent des examens médicaux par plaisir ?

Mon propos concernera essentiellement les personnes âgées et le secteur médico-social. J'avais déjà exprimé, l'an dernier, nos inquiétudes sur le démantèlement de l'assurance maladie qu'impliquait la création de la Caisse nationale pour l'autonomie et la solidarité. Votre projet de loi montre qu'elles étaient fondées. Une fraction des soins, dont bénéficient les personnes âgées, est sortie du champ de la sécurité sociale, aux dépens du principe d'universalité de l'assurance maladie. Les crédits autrefois votés par le Parlement dans le cadre de l'objectif national des dépenses d'assurance maladie relèvent désormais, en grande partie, de la CNSA. Il devient ainsi très difficile de contrôler l'effort réalisé en faveur de nos aînés qui subissent une perte d'autonomie.

L'article 31 de votre projet de loi relève de cette même démarche, que nous désapprouvons. Il reprend des dispositions que vous avez récemment essayé de faire passer en force par voie d'ordonnance. Vous souhaitez transférer les dépenses des unités de soins de longue durée, gérées par l'assurance maladie, vers les maisons de retraites financées par la CNSA. Les premières accueillent pourtant 95 % de personnes très fragilisées, alors que ce chiffre n'est que de 65 % pour les maisons de retraite.

Nous sommes convaincus que le social doit s'implanter à l'hôpital en long séjour. Mais le médical doit être plus important en établissement d'accueil des personnes âgées. Le référentiel qui déterminera de quel type de prise en charge relèvent les patients est peut-être nécessaire, mais il sera pris par arrêté. De ce fait, ni le Parlement, ni les conseils généraux n'auront droit à la parole. Or, cette décision aura des implications financières lourdes, notamment pour les départements.

Mme Claude Greff. N’importe quoi !

Mme Danièle Hoffman-Rispal. La permanence des soins est insuffisante dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées.

Mme Claude Greff. Qu’avez-vous fait ?

Mme Danièle Hoffman-Rispal. En effet, assurer un vrai suivi médical des malades atteints de polypathologies requiert des soins importants. Nos maisons de retraite sont insuffisamment dotées par ce que l’on appelle la « Dominic + 35 » avec 0,21 agent soignant par lit, alors que les patients concernés sont, au moment de leur entrée en établissement, de plus en plus âgés et de plus en plus dépendants. Il est donc urgent de mieux médicaliser ces établissements.

Vous annoncez des enveloppes financières pour les soins visant à médicaliser les maisons de retraite, les centres d'accueil de jour et les hébergements temporaires. Cela pourrait paraître très bien. Mais ces deux derniers exemples – surtout les centres d’accueil de jour – illustrent bien que vous ne mesurez pas l'étendue du problème.

Mme Claude Greff. Si ! Justement ! On l’a mesurée !

Mme Danièle Hoffman-Rispal. En effet, le coût facturé aux usagers admis dans ces structures est prohibitif. Le prix d’hébergement peut atteindre, dans un centre d’accueil de jour, en milieu urbain, jusqu'à 60 euros par jour. Comment pouvez-vous imaginer que la plupart des personnes âgées puissent payer une telle somme ? C'est en partie ce qui explique que les crédits « soins » disponibles ne soient pas tous consommés.

En 2001, Paris disposait d’un centre d'accueil de jour ; nous en aurons six à la fin de l’année. Les personnes à revenus modestes ne pouvaient y accéder par manque de moyens, car l'allocation personnalisée d'autonomie, qui sert à rémunérer quelques heures d’aide à domicile, ne peut suffire à solvabiliser ces centres d’accueil de jour. Nous avons donc créé à Paris – peut-être sommes-nous les seuls en France – une aide extralégale pour solvabiliser les personnes accueillies. La création de centres est importante ; encore faut-il qu’ils soient ouverts à tous, et surtout aux plus modestes. Il s’agit là d’une responsabilité à part entière de l'État, qui fait malheureusement défaut.

Vous semblez ignorer la réalité des établissements d'hébergement. L’essentiel des besoins se situe au niveau des investissements.

Je poserai à cet égard, quelques questions simples.

Qu'en est-il des aides de l'État en matière d'investissement ? Actuellement, l’effort repose beaucoup trop sur les collectivités locales et les départements.

Qu'en est-il également de la répercussion de l'amortissement des travaux, y compris de sécurité, dans les prix de journée ? C’est un sujet qu’a évoqué hier Mme la rapporteure Cécile Gallez. Ils pèsent lourdement – chaque année, j’évoque cette question – dans les prix de journée. Les personnes âgées et leurs familles ne peuvent acquitter ces sommes, et les budgets d'aide sociale légale des départements sont en augmentation constante.

Monsieur le ministre, je vais conclure et je ne veux pas polémiquer. Mais nous voyons, sur le terrain, que la situation est beaucoup moins idyllique, que ne le laissaient croire les chiffres que vous nous exposiez hier. Nous attendons que vous preniez vos responsabilités sur les différents points que j’ai évoqués. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

(M. Yves Bur remplace Mme Paulette Guinchard au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. YVES BUR,
vice-président

M. le président. La parole est à M. Michel Heinrich,

M. Michel Heinrich. Je tiens d'abord, monsieur le ministre, à saluer les résultats obtenus pour l'exercice 2005 grâce à la mise en place des premières mesures de la réforme de l'assurance maladie que nous avons entreprise en 2004 afin de sauvegarder et de pérenniser notre système de protection sociale. Certes, pour 2005, le déficit de l'ensemble des branches du régime général reste stationnaire, mais des économies substantielles ont été réalisées sur l’assurance maladie. Le déficit est, en effet, passé de 11,6 milliards d'euros à 8,3 milliards. En 2005, l’ONDAM sera, pour la première fois depuis des années, respecté. Ces économies sont le signe que la réforme de 2004, qui se met progressivement en place, commence à porter ses fruits.

L'année 2005 a ainsi vu la mise en oeuvre du dispositif du médecin traitant. Autres piliers de la réforme, le dossier médical personnalisé et la mise en circulation de la nouvelle carte vitale, prévue pour 2006, permettront, j’en suis sûr, des économies supplémentaires.

Outre les économies déjà réalisées, je tiens à saluer l'exercice difficile que constitue ce nouveau PLFSS, qui contient de nouvelles mesures permettant de rationaliser nos dépenses de santé. Toutefois, certaines mesures de ce PLFSS ne sont pas en cohérence avec les objectifs du Gouvernement et me semblent même aller à l’encontre de ceux-ci.

Tel est le cas de l’article 13 du PLFSS. Un des objectifs majeurs définis par notre majorité pour la réforme de l'assurance maladie était de ne pas nuire à l'activité économique. Or, le poids des transferts sociaux et des déficits accumulés grève considérablement la compétitivité de notre économie. L’article 13 prévoit des mesures rétroactives qui risquent de nuire aux entreprises en accroissant leurs charges sociales. L’application de cet article créerait de nouvelles charges pour les entreprises et modifierait une situation juridique passée, au mépris du principe essentiel de sécurité juridique. Cette mesure me semble tout à fait inopportune, particulièrement dans le contexte économique actuel, alors même que le Gouvernement a fait de la compétitivité économique et de la lutte contre les délocalisations ses priorités.

Dans le souci de préserver la compétitivité de nos entreprises, je voterai l’amendement proposé par notre rapporteur Jean-Pierre Door.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Merci !

M. Michel Heinrich. L’article 30 du PLFSS prévoit de modifier les critères de convergence des établissements de santé dans le cadre de la tarification à l'activité. La T2A constitue une des clés de voûte de la réforme.

Les principes de la T2A, ainsi que son calendrier d'application, avaient été votés par le Parlement. Or, le présent article 30 va à l’encontre des dispositions adoptées par notre assemblée l'an dernier. Il propose, ni plus ni moins, de revenir sur le cap de 50 % de tarification à l'activité en 2008 fixé par le Parlement.

D’une part cette disposition est de nature à brouiller la lisibilité de la réforme et elle ne va pas dans le sens d'une bonne gestion de l'argent public. D’autre part, elle risque de nuire à l'objectif de justice entre établissements et entre territoires qui avait présidé à cette réforme. Ce n'est pas acceptable.

M. René Couanau. Vous avez raison !

M. Michel Heinrich. Je terminerai mon propos en traitant brièvement de la politique du médicament.

Vous avez annoncé, monsieur le ministre, que les mesures prises concernant le médicament devraient permettre une économie de 1,7 milliard d’euros en 2006. Certaines de ces mesures appellent, à mes yeux, quelques remarques.

Le projet de loi prévoit le déremboursement de 156 médicaments à service médical rendu insuffisant. Pourtant, je tiens à rappeler à cette assemblée que les mesures de déremboursement de médicaments prises depuis vingt-cinq ans n'ont jamais permis de réaliser les économies escomptées. Dès lors, il est permis de s'interroger sur l'opportunité de ces nouveaux déremboursements.

Si les mesures de déremboursement successives n'ont pas rencontré le succès attendu et si elles ont même pu, parfois, se révéler contre-productives, c'est qu'elles témoignent d'une compréhension trop superficielle des pratiques de prescription, comme des attentes des assurés sociaux.

Le déremboursement d'un produit ne signifie en rien la suppression de l'affection dont ce médicament constituait le traitement privilégié. Le public attend que ces maladies soient traitées. Les médecins, dans l'intérêt de leurs patients, y substituent d'autres traitements. Or, cette substitution tend très souvent à être accomplie au bénéfice de produits remboursés qui se révèlent souvent bien plus chers que le médicament déremboursé, ce qui entraîne un surcroît de dépenses, parfois considérable pour la sécurité sociale.

Permettez-moi ainsi de douter de l'efficacité de ces déremboursements quant à la diminution de la dépense. Il faudra entendre les laboratoires français de taille petite ou moyenne, particulièrement touchés par ces déremboursements. Ils vivront des moments difficiles et douloureux, les produits déremboursés représentant pour certains d’entre eux plus de 50 % du chiffre d'affaires.

Outre cette mesure, la politique du médicament définie par ce PLFSS repose aussi sur la promotion des médicaments génériques. La généralisation de ces derniers permet des économies substantielles, tout en fournissant aux assurés des services identiques.

Mme Claude Greff. Ils sont aussi efficaces !

M. Michel Heinrich. Il convient cependant de veiller aux conséquences parfois pernicieuses de certaines mesures de promotion des génériques. Ainsi, le PLFSS prévoit l'application du tarif forfaitaire de responsabilité vingt-quatre mois après la mise sur le marché d'un générique. Cette mesure relevait d'une forte volonté d'économie de la part du Gouvernement. Mais la réduction du TFR à vingt-quatre mois pourrait se révéler contre- productive. Il faudra, en tout état de cause, étudier avec vigilance l'effet de cette mesure dans le temps. En effet, l'application du TFR entraîne une baisse de prix des laboratoires fabriquant le médicament princeps, car ils cherchent à limiter la substitution d'un générique à leur produit. Or, le nouveau délai de vingt-quatre mois risquerait de décourager les producteurs de générique et donc de nuire aux objectifs qui ont été fixés à la politique du médicament, à savoir la promotion des génériques et la recherche d'économies pour l'assurance sociale. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Sous réserve de la modification de l’article 13 telle que proposée par notre collègue Jean-Pierre Door et sous réserve du respect des échéances de la mise en place de la TAA, je voterai le PLFSS pour 2006. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. René Couanau. Parfait !

M. le président. La parole est à Mme Paulette Guinchard.

Mme Paulette Guinchard. Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, je souhaiterais faire quelques remarques préalables. La première concerne, et je ne suis sûrement pas la seule à m’interroger, le déséquilibre entre le PLF et le PLFSS : plus d’un mois pour le projet de loi de finances, quelques jours pour le projet de loi de financement de la sécurité sociale, alors que les enjeux sont comparables. Il nous faudra sans doute consacrer plus de temps à ce sujet dans l’avenir et revoir les modalités du débat concernant la sécurité sociale, d’autant que l’absence de débat démocratique dans ce domaine n’est pas sans rapport avec le pouvoir conféré au directeur de l’assurance maladie par la réforme de M. Douste-Blazy. Toujours est-il que ce déséquilibre m’inquiète et je souhaitais le dire en préambule.

Ma deuxième remarque préliminaire, monsieur le ministre, concerne la réponse que vous avez apportée à M. François Dosé, cet après-midi dans le cadre des questions au Gouvernement. Je pense comme vous que le dossier des personnes âgées dépendantes ne doit pas donner lieu à des polémiques. En revanche, nous avons tous un devoir de vérité. Les propos qui ont été tenus en 2002 et 2003 sur le prétendu non-financement de l’APA sont inacceptables. Vous savez fort bien, monsieur le ministre, que les crédits de l’APA étaient abondés à hauteur 800 à 850 millions d’euros ! Je reconnais cependant volontiers que nous n’avions pas anticipé la montée en charge très rapide du dispositif et que nous n’avions pas pris toute la mesure de la souffrance des personnes âgées et de leurs familles. Là aussi, tenons un discours de vérité.

Quant au financement des maisons de retraite – ce que nous appelons dans notre jargon de spécialistes la réforme de la tarification –, je connais aussi fort bien, pour avoir contribué à le préparer, le montant des crédits inscrits au budget de 2002. Et je sais qu’ils ont diminué en 2002 et 2003, et qu’il a fallu l’épisode de la canicule pour que l’on se rende compte de la nécessaire médicalisation des établissements.

À un moment donné, il y a eu une volonté politique, puis un recul. Il faudrait se poser la question de savoir – M. Terrasse en a parlé – pourquoi si peu de conventions tripartites ont été signées. Les DDASS manquent-elles de moyens ? Les conseils généraux sont-ils en désaccord ? Ou cela a-t-il trait à des problèmes existant au sein des établissements ? Là encore, le devoir de vérité s’impose pour faire taire les polémiques partisanes.

François Dosé a posé une question précise sur la diminution des heures des aides ménagères. On ne peut nier que les fonds d’aide sociale de la CNAV diminuent parce que ces fonds financent d’autres projets. Mais ce qui m’inquiète surtout, c’est l’absence de lien entre la réforme de l’assurance maladie et les dispositifs d’aide à domicile existant. Nous nous étions battus, aussi bien à droite qu’à gauche,…

M. Jean-Luc Préel. Et au centre aussi !

M. René Couanau. Il n’y a pas de centre, il n’y a que la gauche !

Mme Paulette Guinchard. …et du centre en effet, monsieur Préel, pour que les services d’aide à domicile relèvent du champ des institutions médico-sociales. Il conviendrait de regarder si la création du CESU, le chèque emploi-service universel, et la déréglementation du dispositif d’agrément ne sont pas à l’origine des difficultés que connaissent les associations d’aide à domicile.

Permettez-moi, avant d’aborder le fond, de vous poser quelques brèves questions, monsieur le ministre. Vous avez annoncé la création de places dans le cadre du plan handicap, mais tel n’est pas le cas sur le terrain. J’ai du reste interrogé le préfet de région sur ce point. J’aimerais savoir pourquoi. Sans toute des crédits sont-ils délégués.

M. Gérard Bapt. Une toute petite partie.

Mme Paulette Guinchard. En tout cas, l’argent n’arrive pas. Est-ce en raison d’une trop grande complexité du dispositif ? Est-ce dû à l’utilisation d’autres crédits ? Nous devons impérativement mettre en place un dispositif d’évaluation. Nous ne pouvons plus continuer ainsi…

M. Pascal Terrasse. Absolument !

Mme Paulette Guinchard. …car il y va de la crédibilité de l’action publique.

S’agissant de l’article 14, j’aimerais savoir si les hôpitaux et l’ensemble des régimes des collectivités locales seront soumis à la C3S. C’est ma deuxième question.

Ma troisième question concerne la carte Sésame Vitale. Qu’a fait le GIE Sésame Vitale pour lutter contre la fraude ?

Il importe également, car nous avons tous été sollicités par l’ensemble des professionnels, de résoudre les questions liées aux retraites des personnels médicaux et paramédicaux – il s’agit de l’article 47.

Nous avons eu cet été un débat, Pascal Terrasse et Danièle Hoffman-Rispal l’ont rappelé, sur les longs séjours. Il existe différentes formules. Le Gouvernement fait un certain nombre de propositions dans le cadre de ce projet de loi. Mais j’aimerais qu’il entende ce qui se dit sur le terrain quant au manque criant de places. Manifestement, la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie n’utilise pas l’ensemble des crédits qui proviennent de la suppression du jour férié. Vous nous proposez, monsieur le ministre, de les affecter à la construction de maisons de retraite, mais vous ne donnez aucun montant précis. Or la CNSA dispose de plus de 283 millions d’euros. Cela permettrait de répondre aux besoins sur le terrain.

Nous savons fort bien que toute décision aura des effets sur l’organisation territoriale de la santé, M. Bur en a parlé. Le choix qui seront faits en matière de longs séjours auront des conséquences importantes, aussi bien pour les hôpitaux de proximité, que pour l’organisation sur le terrain de la prise en charge des personnes âgées.

Toutes les maisons de retraite disent que les personnes qui arrivent aujourd’hui souffrent de handicaps de plus en plus lourds. Les besoins de prise en charge en termes de soins ont profondément évolué en deux ans. Peut-être est-ce le résultat de l’évolution profonde de la société. Les personnes qui arrivent en maisons de retraite ont besoin d’un accompagnement humain et médical important. Or le dispositif mis en place ne répond pas à cette évolution. Je le dis clairement : c’est désormais au problème de la qualité de la prise en charge de la fin de vie que nous sommes confrontés.

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Très juste.

Mme Paulette Guinchard. Nous avons une responsabilité politique immense si nous ne voulons pas que les inégalités se multiplient. Il y aura des départements qui sauront se battre avec les ARH pour la mise en place de moyens séjours, pour ouvrir les soins palliatifs dans les hôpitaux. Il y aura ceux qui se battront pour l’hospitalisation à domicile. Et il y a ceux qui poursuivront en direction des maisons de retraite. Dans un cas, les personnes seront prises en charge médicalement et financièrement par l’assurance maladie, et dans l’autre cas, les personnes elles-mêmes paieront, et seule une toute petite partie proviendra de l’assurance maladie. C’est une source d’inégalités. Si nous ne réfléchissons pas aux problèmes posés par les longs séjours, nous risquons de faire éclater le dispositif.

C’est dans ce cadre que se situe le débat sur la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie. J’ai rencontré M. Cordier et M. Piveteau à ce sujet. Vous connaissez le danger qu’il y a à séparer les domaines sanitaire et médico-social.

Et que faisons-nous ? Nous mettons en place des plans régionaux d’organisation territoriale de la santé. Mais la solution réside moins dans les dispositifs de financement que dans les changements de comportements. Il est évident que pour faire le lien entre le médico-social et le sanitaire, notre dispositif institutionnel n’est pas au point. Il est inacceptable que les personnes âgées doivent s’acquitter de 1300 euros en maison de retraite quand leur revenu moyen est de 1200 euros. Force est de constater que les dispositifs ne fonctionnent plus. Et sans volonté politique forte, je peux vous assurer que les inégalités se creuseront. Vous avez tort de vouloir réformer l’assurance maladie sur un plan uniquement financier quand il conviendrait bien plutôt de mettre en place une réforme médicale.

J’aurais aussi pu vous interroger sur votre politique en matière de santé mentale, car nous ne disposons d’aucun élément, mais j’aurais l’occasion d’y revenir dans le cadre du débat. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme Christine Boutin.

Mme Christine Boutin. Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, que ce soit pour assurer le renouvellement des générations ou pour dynamiser notre croissance économique, une natalité soutenue est un impératif.

Si les Français, avec un taux de fécondité de 1,9 enfant par femme, semblent l’avoir compris, cela n’est pas encore suffisant – ni pour notre pays, ni pour les familles. En effet, si nous sommes heureux de voir la France bien placée au niveau européen en termes de démographie, notre pays n’assure pas le renouvellement des générations, tandis que, selon les statisticiens, chaque femme a 0,7 enfant de moins qu’elle n’en souhaiterait.

Or le choix de vie des familles ne peut être que positif pour l’ensemble de notre société. Il est de notre devoir de l’encourager, ce à quoi vous vous employez, monsieur le ministre, et dont je vous remercie.

Le cadre de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale est une occasion qu’il nous faut saisir. S’il faut saluer le réaménagement prévu de la prestation d’accueil pour le jeune enfant – qu’il conviendrait d’étendre à toute personne sans condition d’activité professionnelle antérieure minimale afin d’en faire bénéficier les étudiantes, les jeunes mères et les femmes privées d’emploi –, il faudrait rendre possible le cumul de la prestation pour chaque enfant afin d’éviter un espacement trop important entre les naissances et un éloignement trop long de la vie professionnelle.

Monsieur le ministre, quand va-t-on rétablir la justice élémentaire consistant à créer un droit personnel à la retraite, droit universel et reconnu sans condition de ressources accordé au parent qui choisit de ne pas travailler pour élever son enfant ? Finissons-en avec cette fausse pudeur en reconnaissant, sur le plan sociétal et sur le plan financier, l’immense service rendu par ces parents à la société tout entière.

Mais je tiens surtout aujourd’hui à attirer votre attention sur un phénomène intolérable : la paupérisation des familles nombreuses, aggravée par une fiscalité inadaptée, ignorant les réelles capacités contributives du foyer, contrairement à ce qu’exige notre constitution en son préambule.

La CSG a de très nombreuses qualités mais, du point de vue de l’équité familiale, il convient de la réformer. On ne peut continuer d’augmenter la CSG, qui représente 120 % des recettes de l’impôt sur le revenu, sans se préoccuper des conséquences que cela aura sur le niveau de vie des familles avec enfants.

En effet, toutes les études prouvent que le niveau de vie des familles diminue avec le nombre d’enfants et que celles-ci se trouvent submergées par un impôt qui ignore cette réalité que plus personne ne conteste aujourd’hui. On ne peut plus verser des larmes sur notre démographie insuffisante tout en accablant fiscalement les familles qui ont plusieurs enfants.

Je propose donc de « familialiser » la CSG, c’est-à-dire d’intégrer dans son calcul un quotient familial permettant de prendre en compte les réelles capacités contributives de chaque ménage et de rétablir ainsi un juste équilibre entre l’impôt sur le revenu et la CSG.

Il ne s’agit pas là de remettre en cause la CSG, dont le taux unique et proportionnel resterait inchangé. Il s’agit en revanche d’un autre mode de calcul des revenus concernés, selon le nombre d’enfants, avec un coefficient qui pourrait être de 0,5 par enfant, comme pour l’impôt sur le revenu. Avec des avantages fiscaux supplémentaires pour le troisième enfant, la venue d’un enfant serait perçue comme un « bonus » pour l’ensemble de la société.

Ce signal serait perçu positivement par nos concitoyens, comme un signe d’optimisme pour l’avenir lancé par les politiques dans une société très morose.

Selon le rapport de M. Michel Godet et de Mme Évelyne Sullerot, membres du Conseil d’analyse économique, le niveau de vie d’une famille ouvrière est, avec trois et quatre enfants, respectivement inférieur de 29 % et 39 % à celui d’un couple sans enfant de la même catégorie sociale. Certaines de ces familles paient jusqu’à deux fois plus de CSG que d’impôt sur le revenu ! Cela n’est plus tolérable.

Parce que fonder une famille ne doit pas être la porte d’entrée de la précarité, mais au contraire une promesse de croissance économique, il est temps de mettre en place des politiques familiales positives, reconnaissantes et volontaristes, avec la préoccupation forte d’une redistribution juste, seul gage de confiance dans l’avenir.

Je sais bien que cette proposition de familialisation de la CSG ne sera pas adoptée aujourd’hui, mais il est urgent de réfléchir à une meilleure prise en compte de la famille dans notre système fiscal.

J’invite donc le Gouvernement à lancer un grand chantier à ce sujet : pourquoi ne pas penser la famille comme source de prospérité ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Denis Jacquat.

M. Denis Jacquat. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, au lendemain des douzièmes Journées parlementaires sur la longévité, qui avaient cette année pour thème : « Longévité au féminin », je vous livrerai quelques réflexions, dont certaines demanderont des analyses complémentaires et des décisions à prendre dans les années à venir.

La situation des femmes pendant leur retraite est largement marquée par les conséquences de leur situation sur le marché du travail.

Leur situation relative par rapport aux hommes durant cette période de leur vie est caractérisée par deux particularités : les femmes vivent plus longtemps que les hommes et les pensions de réversion jouent pour elles un rôle particulièrement important.

Si l’âge de liquidation de la retraite est plus tardif, l’âge moyen de cessation d’activité calculé pour les personnes encore en activité à cinquante ans est le même, voire légèrement inférieur, accroissant ainsi pour les femmes la durée de la période sans emploi avant le départ à la retraite.

Le statut durant cette période diffère également selon le sexe. Plus de la moitié des hommes et des femmes n’ont pas d’emploi lorsqu’ils demandent la liquidation de leur retraite, mais alors que les hommes sont plus nombreux à connaître des passages par la préretraite, qui concerne 32 % d’entre eux contre 21 % des femmes, ces dernières sont davantage en situation d’inactivité, à hauteur de 19 % contre 9 % pour les hommes, cette inactivité relevant pour moitié de l’invalidité et, pour partie, du chômage – à hauteur de 18 %, contre 13 % pour les hommes.

Les pensions de retraite propres aux femmes sont largement inférieures à celles des hommes. Elles sont moins importantes de moitié pour l’ensemble des femmes, y compris celles qui n’ont pas une carrière complète, avec 666 euros par mois contre 1 372 euros pour les hommes. Elles sont inférieures de 30 % pour les femmes ayant eu une carrière complète, avec 950 euros par mois contre 1 453 euros pour les hommes.

Les inégalités sur le marché du travail ne sont donc que partiellement compensées par les bonifications pour enfant et les avantages retraite accordés aux mères de famille qui s’arrêtent pour élever leurs enfants. Ces bonifications entraînent cependant des questions nouvelles, relatives aux différences entre les régimes et à la conformité à la législation européenne.

Les pensions de réversion bénéficient particulièrement aux femmes et les inégalités devraient s’atténuer à l’avenir – sans pour autant disparaître, car certains éléments fragilisent à terme la situation des femmes.

En effet, la hausse du taux des divorces et le développement massif de la communauté de vie sans mariage, qui – on l’oublie souvent ! – ne permet pas d’acquérir une pension de réversion, pénalisent particulièrement les femmes qui arrêtent de travailler ou acceptent des carrières moins bonnes que celles des hommes à cause de la présence d’enfants.

L’écart d’espérance de vie entre les femmes et les hommes est plus élevé à la naissance qu’à soixante ans. Il demeure, à cet âge, de plus de cinq ans. Les hommes bénéficient davantage aujourd’hui de l’augmentation d’espérance de vie, en raison de pathologies nouvelles chez les femmes, telles que les cancers pulmonaires.

Enfin, la dépendance touche les femmes à un double titre. D’une part, en effet, elles sont souvent les aidants de leur mari en cas de dépendance et, d’autre part, elles sont elles-mêmes plus souvent en situation de perte d’autonomie, par le cumul de deux facteurs : tout d’abord, elles sont plus nombreuses à atteindre des âges élevés et, à partir de soixante-quinze ans, leur dépendance augmente plus vite que celle des hommes ; en second lieu, elles sont ainsi très majoritaires dans les institutions.

Or, cela a un coût et, malgré l’APA, le maintien à domicile et, surtout, la prise en charge institutionnelle apparaissent à tous de plus en plus coûteux.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, il faut démentir au plus vite la célèbre formule de La Rochefoucauld affirmant que « l’enfer des femmes, c’est la vieillesse ». (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

(Mme Paulette Guinchard remplace M. Yves Bur au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE MME PAULETTE GUINCHARD,
vice-présidente

Mme la présidente. La parole est à M. Émile Blessig.

M. Émile Blessig. Madame la présidente, monsieur le ministre, dans le cadre de la discussion générale sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale, j’aborderai deux problématiques : l’accès aux soins des personnes âgées et les incidences de la réforme de la tarification à l’activité sur les établissements hospitaliers de taille moyenne.

Sur l’accès aux soins des personnes âgées, je tiens à évoquer la situation difficile dans laquelle se trouvent les services de soins infirmiers à domicile, qui connaissent des difficultés financières compromettant à court terme leurs fonds de roulement et se révélant inquiétantes à long terme pour la pérennité de ces services.

Alors que l’évolution du niveau de dépendance des patients pèse sur les charges, le niveau de ressources fixé par l’État sous forme de forfait de soins annuel ne permet plus d’assurer l’équilibre de gestion. L’augmentation des besoins de soins est liée à plusieurs facteurs structurels bien connus : la demande croissante de maintien à domicile, le vieillissement de la population et la saturation des institutions sanitaires de court séjour et de soins de suite, ainsi que des établissements d’hébergement pour personnes âgées.

Les effets sont tels que le degré de dépendance des patients maintenus à domicile, exprimé en valeur moyenne selon les grilles d’évaluation reconnues, atteint des niveaux presque identiques à celui des unités de soins de longue durée.

Cette progression des soins infirmiers rend leur prise en charge de plus en plus délicate au regard des effectifs autorisés. Devant cette évolution structurelle, qui s’amplifie et continuera de le faire dans les années qui viennent, les moyens ne permettent plus de répondre aux besoins.

Face à ce constat, quelles sont les mesures que vous envisagez de prendre afin de permettre la pérennisation de ces services, qui sont l’un des piliers de la politique de maintien à domicile ?

Ma deuxième interrogation porte sur le projet de réforme, évoqué début du mois de septembre, visant à supprimer les unités de soins longue durée. Ayant été saisi, comme bon nombre de mes collègues, par les professionnels de la gériatrie, je souhaiterais obtenir plus de précisions sur le projet d’ordonnance.

Les unités de soins de longue durée accueillent des personnes présentant une dépendance très lourde, qui nécessite des soins permanents, et l’encadrement médical y est plus important que dans les EHPAD, bien que, comme le souligne dans son rapport notre collègue Cécile Gallez, 63 % des places en maison de retraite étaient médicalisées à la fin de 2003.

Veut-on intégrer dans les EHPAD des lits fortement médicalisés ? N’oublions pas que ces établissements hébergeant des personnes âgées doivent rester des lieux de vie, dont les soins sont l’une des dimensions d’accompagnement. Ce projet de réforme a-t-il un lien avec les chiffres cités par notre collègue Cécile Gallez, qui indique qu’entre 1996 et 2003 le nombre de places a augmenté de 7 % en maison de retraite et diminué de 3 % en unité de soins de longue durée ?

L’autre problématique qui me tient à cœur concerne les incidences de la réforme de la tarification à l’activité – la T2A – sur les établissements hospitaliers de taille moyenne.

La rémunération des établissements hospitaliers est désormais fixée à l’activité, à hauteur de 25 %. Comment concilier une augmentation d’activité avec des enveloppes de dépenses limitatives votées dans le cadre de l’ONDAM ? Se pose ici le problème des moyens prévus pour l’amélioration de l’informatique médicale à chaque niveau d’organisation sanitaire. Il est clair que les hôpitaux doivent connaître, pratiquement au jour le jour, les pathologies traitées et leur tarification.

Au niveau d’un établissement, une augmentation d’activité ne correspond pas nécessairement diminution des coûts, notamment en cancérologie ou pour les pathologies lourdes liées à l’augmentation de la durée de vie. Comment, dans ces conditions, améliorer la lisibilité de la réforme – car il n’existe pas dans les hôpitaux de variable d’ajustement ? D’où deux inquiétudes quant aux variables d’ajustement de substitution – l’une administrative et nationale : la baisse des tarifs des groupes homogènes de séjour ; l’autre locale et relevant du non-dit : l’ajustement par la politique des ressources humaines. Dans les deux cas, un problème se pose.

Cette réforme de la T2A est certainement utile et nécessaire, dans la mesure où elle clarifie les modalités de financement des hôpitaux et rend ce financement plus juste. Certains problèmes ne s’en posent pas moins, comme l’incompatibilité entre la tarification à l’activité et les mises aux normes en matière de personnel médical dans les hôpitaux de taille moyenne.

Si tous les hôpitaux sont actuellement confrontés à une crise sans précédent de la démographie médicale, cela est particulièrement vrai des hôpitaux de taille moyenne, dont les équipes médicales sont numériquement plus réduites et qui sont dans l’impossibilité de financer les obligations de mise aux normes par le seul moyen de recettes supplémentaires liées à l’augmentation de l’activité.

L’hôpital de Saverne, par exemple, bénéficie d’un service d’anesthésie et de réanimation employant six praticiens hospitaliers. L’un deux vient de prendre sa retraite et les nouvelles normes imposent désormais l’organisation de deux colonnes de garde, l’une pour la réanimation, l’autre pour l’anesthésie. La question qui se pose pour cet hôpital de taille moyenne est la suivante : comment recruter quatre praticiens hospitaliers, sachant qu’ils ne pourront pas être rémunérés sur les recettes supplémentaires tirées de l’activité ?

M. Gérard Bapt. Ce sont des vérités, c’est bien de les dire !

M. Émile Blessig. À travers cet exemple, c’est tout le problème de l’aménagement hospitalier du territoire que je souhaite soulever : il faut permettre aux hôpitaux de taille moyenne efficaces et sécurisés d’exister aux côtés des centres hospitaliers régionaux. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Gérard Bapt. Ce sont des vérités que le Gouvernement ne veut pas entendre !

Mme la présidente. La parole est à M. Yves Censi.

M. Yves Censi. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, avant d’évoquer la situation et l’avenir du régime agricole, je ne veux pas manquer de dire combien ce PLFSS pour 2006 mérite d’être soutenu pour sa cohérence et pour l’esprit d’équité qui a guidé le Gouvernement dans son élaboration, comme il nous a tous guidés au moment de la réforme de l’assurance maladie. Je salue ici la continuité des objectifs de solidarité depuis 1945, qui s’applique au financement de chacune des branches de la sécurité sociale et qui caractérise notre système français de protection sociale, sans équivalent dans le monde, auquel nous sommes si attachés.

La même volonté doit animer le financement du régime agricole. Plus précisément, réhabiliter l’examen des comptes du régime agricole devant le Parlement était un enjeu important depuis la création du FFIPSA ; c’est aujourd’hui chose faite avec la loi organique des lois de financement de la sécurité sociale. Le ministre de la santé, Xavier Bertrand, y a pris toute sa part, et je l’en remercie. Le débat devant le Parlement n’avait pas eu lieu depuis la disparition du BAPSA. Alors que le FFIPSA était présenté comme la continuité pure et simple du BAPSA au moment de sa création il y a deux ans, c’est aujourd’hui que nous nous acheminons enfin vers un dispositif plus finalisé. Le fonds de financement des prestations sociales agricoles pèse 15 milliards d’euros dans l’ensemble de la sécurité sociale, et, pour les années à venir, l’Assemblée nationale s’honorerait à consacrer un temps de débat sur le FFIPSA en rapport avec la valeur des sommes en jeu. Une juste mesure doit pouvoir être trouvée entre cinq minutes dans la discussion générale du PLFSS et une vraie séance, comme cela existait auparavant avec le BAPSA.

Cela dit, je consacrerai mon intervention à deux points essentiels.

J’ai pris note avec une très grande satisfaction, en tant que président du comité de surveillance du FFIPSA, des engagements pris par Jean-François Copé, au nom du Gouvernement, lors de la discussion générale du PLF pour 2006. Je le remercie d’autant plus vivement que ces engagements s’inspirent des trois préconisations du comité de surveillance du FFIPSA : en premier lieu, une prise en charge partielle par l’État de la créance de 3,2 milliards d’euros figurant au bilan d’ouverture du FFIPSA ; ensuite, une recherche de diversification des ressources pour le financement du FFIPSA en 2006, qui devra trouver sa traduction avant la fin des discussions budgétaires ; enfin, rendez-vous est pris pour avancer sur la réforme des règles de compensation démographique dans le sens d’une plus juste solidarité entre les régimes.

Le premier point est d’importance : il s’agit du sens et des perspectives ouvertes aux femmes et aux hommes relevant du régime agricole, bien au-delà des mesures budgétaires qui pourraient être adoptées dans les tout prochains jours. Avec la décision particulièrement volontariste du Gouvernement, la question du financement pérenne du FFIPSA s’inscrit définitivement dans la logique de la diversification des ressources. Cette logique vaut pour 2006, mais aussi pour les années suivantes. Cette sécurisation financière permettra aux différents acteurs du régime agricole de se mobiliser non plus sur le seul volet du financement de la protection sociale agricole, mais enfin sur ce qui a toujours fait sa valeur et son exemplarité : les solidarités à développer en faveur du monde agricole et rural. Je pense, en premier lieu, aux retraites agricoles, mais aussi aux actions innovantes à développer dans les domaines des réseaux et filières de soins.

Le second point, c’est le lancement de la réforme des règles de compensation démographique, que je crois nécessaire. J’entends ici ou là que la réforme de la compensation démographique mettrait à contribution le seul régime général des salariés du privé au profit du seul régime agricole. Nous serions donc dans un affrontement corporatiste des exploitants agricoles contre les salariés du secteur privé. Il est essentiel de dépassionner ce débat. Pour ce faire, le comité de surveillance du FFIPSA avance deux suggestions de bon sens et d’équité.

La compensation démographique maladie repose aujourd’hui sur un principe selon lequel un jeune homme de trente-cinq ans et une personne de quatre-vingts ans auraient exactement le même profil de consommation médicale. Or chacun sait, et depuis maintenant quelques années, que les dépenses de santé se concentrent aux premières et aux dernières années de la vie. La réforme défendue par le comité de surveillance consiste ni plus ni moins à intégrer dans le calcul de la compensation démographique maladie une prestation de référence par tranche d’âge en tenant ainsi compte des écarts de consommation médicale existant aux différents âges de la vie.

En ce qui concerne la compensation démographique vieillesse, un retraité compte pour une unité dans un régime, quelle que soit sa durée de cotisation dans ce régime. L’équité commande de tenir compte du véritable poids financier de chaque retraité dans chaque régime. Pour ce faire, il convient de tenir compte des durées moyennes de carrière cotisées dans le calcul des effectifs des retraités. Là encore, cette évolution n’est pas extravagante et s’appuie sur le seul principe d’équité.

Je vous remercie, monsieur le ministre, de confirmer ces perspectives aux hommes et aux femmes du monde agricole et du rural afin de parfaire ce que je considère comme étant l’excellence du PLFSS pour 2006. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Mme la présidente. La discussion générale est close.

La parole est à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Madame la présidente, monsieur le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, messieurs les rapporteurs, madame la rapporteure, mesdames, messieurs les députés, je tiens tout d’abord à remercier tous les orateurs de leurs prises de position, et aussi de leurs questions auxquelles je vais essayer de répondre. Le nombre et la qualité de leurs interventions montrent à quel point la représentation nationale, et à travers elle tous nos compatriotes, est attachée à notre système de sécurité sociale.

Parmi les orateurs qui se sont succédé à la tribune, beaucoup se sont félicités de ce que la loi de financement pour 2006 soit présentée dans le nouveau format issu de la loi organique du 2 août 2005, dont nous avons eu l’occasion de discuter ensemble il y a quelques mois. Beaucoup ont salué aussi les avancées notables que permet cette nouvelle présentation, en particulier le vote de tableaux d’équilibre – que citait Jean-Luc Préel – ou la déclinaison de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie en sous-objectifs, évoquée notamment par Jacques Domergue.

Je remercie en particulier Jean-Pierre Door d’avoir souligné la rapidité avec laquelle la loi organique, promulguée le 2 août dernier seulement, a trouvé à s’appliquer dès ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. C’est un engagement que Xavier Bertrand et moi-même avions pris devant vous, mesdames, messieurs les députés. Il est donc tenu. Jean-Pierre Door a cependant pointé, à juste titre, quelques problèmes de présentation, notamment d’articulation des annexes du projet de loi de financement de la sécurité sociale avec la loi de finances. Quelles que soient les explications qui peuvent être données à ces décalages, je m’engage, monsieur le rapporteur pour les recettes et l’équilibre général, à y mettre fin, avec mes collègues du Gouvernement compétents, pour la présentation des textes de l’année prochaine.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour les recettes et l’équilibre général. Très bien !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Je remercie également tous ceux d’entre vous qui ont salué le redressement réel des comptes de l’assurance maladie, notamment MM. les rapporteurs Door, Domergue, Gallez et Bur.

Quant à tous ceux qui ont exprimé au moins des doutes sur les résultats de la réforme de l’assurance maladie, qu’il me soit permis de tenter une nouvelle fois de leur ouvrir les yeux sur la réalité des chiffres. Ce n’est pas moi qui la décris, c’est la commission des comptes de la sécurité sociale elle-même : en 2004, la prévision était de 14 milliards, le résultat a été de 11,6 milliards ; pour 2005, sans réforme, les prévisions tablaient sur un déficit de 16 milliards, il sera contenu à 8,3 milliards comme nous nous y étions engagés. C’est cela la vérité des chiffres.

M. Pascal Terrasse. Ça, ce n’est pas un argument ! Plus de 8 milliards de déficit, et vous êtes content !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Pour la première fois depuis des années, l’ONDAM voté sera respecté, comme l’a justement souligné M. Domergue.

M. Jean-Marie Le Guen. C’est complètement faux !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Cette réduction de déficit, monsieur Préel, n’a pas été obtenue avant tout par des recettes complémentaires. Celles-ci n’y ont contribué que pour moitié, et encore faut-il tenir compte du fait qu’en raison de la croissance en 2005, les recettes ont progressé de 1,2 milliard de moins que prévu.

M. Pascal Terrasse. La faute à qui ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Ces résultats sont donc surtout dus à l’inflexion des dépenses, qui se confirme et s’accentue depuis la fin de 2004. Sur les neuf premiers mois de l’année, la progression des soins de ville est de 2,2 % par rapport à la même période en 2005,…

M. Jean-Marie Le Guen. C’est faux !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. …alors que le rythme de progression de ce poste – je tiens à le rappeler pour ceux qui n’auraient pas gardé en mémoire ces chiffres, pour des raisons que je comprends très bien – était de 6 % à 8 % par an jusqu’en 2003.

M. Pascal Terrasse. Mais nous, nous équilibrions !

M. Jean-Pierre Door, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Avec un peu de chance, monsieur Terrasse !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Cette progression des dépenses portait en germe les déficits que nous avons constatés. La réforme de l’assurance maladie, on le voit, porte indéniablement ses fruits.

Mme Génisson voudrait nous faire croire qu’il ne s’agit pas d’une réforme structurelle, alors que le gouvernement socialiste avait laissé, sans réagir, déraper les dépenses d’assurance maladie à des rythmes déraisonnables de 1997 à 2002, avec des ONDAM de 6 % à 7 %.

M. Bruno Gilles. Très juste !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Je voudrais qu’on m’explique ce qu’est la mise en place du médecin traitant, sinon une réforme structurelle. A l’heure actuelle, 32 millions de Français ont choisi leur médecin traitant. Le parcours de soins est une réforme importante, qui fait appel à la responsabilité de tous nos compatriotes, car le maître-mot de la réforme de l’assurance maladie, c’est la responsabilité, et son objectif, c’est le changement des comportements. Non seulement il s’agit d’une réforme structurelle qui porte ses fruits,…

M. Jean-Marie Le Guen. Qui a dit qu’en politique on pouvait mentir ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. …mais c’est une réforme qui prouve que les comportements peuvent évoluer dans notre pays. Je me souviens que certains estimaient qu’atteindre le chiffre de 10 millions de Français désignant leur médecin traitant était un objectif irréaliste. Or ce sont 32 millions de français, même plus encore,…

Mme Hélène Mignon. C’est la loi !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. …qui, très naturellement, comme ils consultaient naguère leur médecin de campagne ou leur médecin de famille, ont choisi leur médecin traitant,…

M. Jean-Marie Le Guen. Vous rêvez !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. …avec la volonté de s’inscrire désormais dans le parcours de soins. Celui-ci leur permettra à la fois d’améliorer leur santé et de gaspiller moins en renonçant à des analyses redondantes ou à des consultations anarchiques de spécialistes.

M. Jean-Marie Le Guen. Comme le Gouvernement l’avait prévu, il a fait jour aujourd’hui à midi !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. J’ajoute que les médecins eux-mêmes se sont engagés sans réticence dans ce processus (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), puisque 99 % des médecins généralistes ont déjà accepté d’être médecins traitants. (Mêmes mouvements.)

M. Jean-Marie Le Guen. Mais 70 % des médecins sont contre !

M. Denis Jacquat. Laissez parler M. le ministre, monsieur Le Guen !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Toujours à propos du parcours de soins, Mme Génisson a évoqué l’article 29 du projet de loi, qui aménage les règles de ce parcours. Sur ce sujet comme sur les autres, nous avons une approche pragmatique et nous sommes attentifs à ce qui remonte du terrain.

M. Denis Jacquat. Très bien !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Et qu’entendons-nous remonter du terrain ? Que certains médecins ont une pratique d’exercice en groupe parfois très aboutie, avec des formes de partage de l’information médicale et de coordination des soins qu’ils souhaitent maintenir et qui satisfont les patients. Pourquoi revenir sur ces pratiques, qui sont bénéfiques ? Nous entendons également les jeunes médecins, qui craignent que le parcours de soins n’accroisse la difficulté de s’installer en libéral. Ce n’est pas le refus du parcours de soins. Les étudiants et les jeunes médecins y sont, au contraire, massivement favorables. Il s’agit de prendre en compte leur difficulté, et de la résoudre pour favoriser cette installation et consolider le parcours de soins.

En ce qui concerne les médecins possédant des diplômes étrangers, je rappelle à M. Paillé que la loi prévoit une nouvelle procédure, qui leur ouvre la voie à une activité de plein exercice. Cette procédure consiste en un concours d’évaluation des connaissances par spécialité. Une large concertation avec les médecins étrangers titulaires de ces diplômes a été mise en place depuis un an, afin d’améliorer ce concours. Nous sommes favorables à ce que tous les médecins exerçant sur le territoire français aient les mêmes droits. M. Xavier Bertrand a ainsi décidé cet été d’aligner la rémunération de leurs gardes sur celles de leurs collègues titulaires des diplômes nationaux.

M. Pierre-Louis Fagniez. C’était une mesure très attendue.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. En revanche, nous voulons éviter de créer un nouvel « appel d’air » pour l’installation de médecins titulaires de diplômes étrangers : il existe d’autres réponses au problème de la démographie médicale. Nous y reviendrons au cours du débat sur ce projet de loi, notamment grâce aux initiatives que M. Xavier Bertrand vous a annoncées.

Beaucoup d’entre vous, tels M. Le Guen, Mme Fraysse et Mme Génisson, se sont exprimés sur la participation forfaitaire de 18 euros pour les actes supérieurs à 91 euros. Cette mesure est apparemment mal comprise : je voudrais la clarifier.

M. Gaëtan Gorce. C’est d’abord un problème politique !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Aujourd’hui, monsieur Le Guen, les complémentaires prennent en charge le ticket modérateur de 20 % sur les actes inférieurs à 90 euros. Le Gouvernement propose de transférer ce même ticket modérateur aux actes supérieurs à 91 euros, sur la base, non d’un quotient de 20 %, mais d’un forfait plafonné à 18 euros. Selon vous, le Gouvernement préparerait un désengagement de l’assurance maladie obligatoire de base, au détriment des organismes complémentaires et des ménages. Vous allez jusqu’à parler de privatisation de la sécurité sociale !

M. Jean-Marie Le Guen. Eh oui !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Mme Fraysse évoque même – le concept est novateur – une démarche simultanée d’étatisation et de privatisation ! Ce n’est pas sérieux. Cette mesure, qui ne mérite sans doute pas un excès d’honneurs, ne mérite pas davantage cet excès d’indignité. Pourquoi serait-il possible de payer 20 % d’une intervention chirurgicale de 90 euros – soit 18 euros – et impossible d’acquitter la même somme quand l’intervention est supérieure à 91 euros ?

M. Pascal Terrasse. Il y va d’une certaine conception de la solidarité, monsieur Bas ! Nous n’avons pas les mêmes valeurs !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. En outre, les dépenses hospitalières sont prises en charge à 92,5 % par la sécurité sociale : cet effort représentera 55 milliards d’euros en 2005. La mesure que nous proposons ne va transférer que 100 millions d’euros vers les complémentaires. L’hospitalisation restera prise en charge par la sécurité sociale à plus de 92 %. Si nous voulons que les Français comprennent nos débats, il faut raison garder : n’agitons pas des épouvantails ! Si l’on appelle privatisation une prise en charge socialisée à 97 %, comment nommer les systèmes proposant une prise en charge très inférieure ?

M. Jean-Marie Le Guen. Un projet UMP abouti, voilà comment nous appelons votre système !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. M. Préel, Mme Jacquaint, Mme Génisson, M. Clayes et M. Renucci ont fait part de leurs inquiétudes sur la situation financière des hôpitaux. Je veux les rassurer.

L’hôpital est pour nous une priorité essentielle.

M. Jean-Marie Le Guen. Parmi une centaine d’autres !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Au sujet des difficultés de la campagne budgétaire de 2005 évoquées par M. Préel, je tiens à souligner l’effort exceptionnel décidé par le Gouvernement. Nous venons de déléguer 450 millions de crédits supplémentaires au titre de cette campagne. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale intègre surtout 625 millions de crédits supplémentaires. Ainsi, 2,5 milliards d’euros auront été injectés cette année dans notre système hospitalier.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Voilà qui n’est pas négligeable !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Cet effort est d’autant plus significatif qu’il porte sur des crédits pérennes. Le Gouvernement avait déjà décidé d’accorder une rallonge de 400 millions d’euros, mais non reconductible. Les nouveaux crédits, définitivement acquis aux hôpitaux, nous permettront d’envisager l’année 2006 avec davantage de sérénité.

Pour 2006, l’objectif de dépense maladie pour l’hôpital – public et privé – devrait progresser de 3,44 %. Contrairement à ce que vous suggérez, monsieur Préel, ce taux est significatif. M. Vitel a justement souligné l’effort qu’il représentait pour la collectivité. Ce taux doit en effet être associé à la remise à niveau que j’évoquais pour la campagne budgétaire de 2005. Il donnera de la marge aux établissements dynamiques et encouragera les réorganisations, que ce soit à l’échelle interne où à celle des territoires de santé.

Pour les établissement confrontés à des difficultés de gestion, ces crédits doivent être une invitation à la responsabilité et un encouragement à consentir des efforts à la hauteur de ceux que la nation consent elle-même. Notre credo est simple : oui à une augmentation des moyens pour les hôpitaux, mais à condition que chaque euro dépensé le soit à bon escient et entièrement voué à la prise en charge des patients.

M. Philippe Vitel. Très bien !

M. Pierre-Louis Fagniez. Voilà exactement le discours qu’il faut tenir.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. En ce qui concerne la réorganisation de l’hôpital, nous poursuivons les réformes contenues dans le plan « Hôpital 2007 ». La tarification à l’activité est une mesure juste et équitable. Elle permet une répartition des crédits en fonction des besoins réels des patients.

M. Pascal Terrasse. Ce n’est pas ce qu’a dit M. Blessig ! Vous n’avez pas écouté !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Ce système de tarification sera donc poursuivi. Le taux de 2006 sera arrêté dès la fin des concertations en cours.

Plusieurs d’entre vous, dont M. le rapporteur Domergue, se sont par ailleurs exprimés sur la convergence. Dans le secteur public, celle-ci se poursuit, justement grâce à la progression de la part financée par la nouvelle tarification à l’activité. Cette convergence sera achevée en 2012, et aura atteint le palier de 50 % en 2008.

M. Philippe Vitel. Bravo !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. La convergence entre les établissements privés est quant à elle assurée par l’application d’un coefficient de transition, qui permet d’assurer la progressivité de cette convergence ; cette dernière sera également achevée en 2012.

Enfin, la convergence entre les secteurs public et privé devra bien sûr tenir compte des écarts justifiés par des différences dans la nature des charges couvertes par les tarifs. Cette convergence se heurte à une difficulté pratique : l’absence d’étude suffisante sur la comparaison des coûts entre les deux secteurs. Cette étude sera lancée au début de l’année 2006 ; ses résultats seront disponibles à l’automne 2007. Mais l’IGAS remettra dès la fin de cette année des éléments de méthodologie sur les écarts de coûts et leurs justifications. Il faut en effet définir les objectifs de convergence. Dans ces conditions, le palier de 50 % en 2008 nous paraît difficile à atteindre.

Le problème de la démographie médicale et de la permanence des soins soulevé par MM. Perrut, Paillé et Renucci, est une préoccupation largement partagée dans cet hémicycle. J’indique à M. Perrut que nous voulons que les Maisons médicales de garde soient effectivement financées. Elles jouent un rôle essentiel dans l’organisation de la permanence des soins. Notre projet de financement apporte de nouvelles garanties, puisqu’il pérennise le fonds d’amélioration de la qualité des soins en ville. L’un des articles du projet que nous allons discuter donne en effet à ce fonds la mission explicite de financer les Maisons médicales de garde. Il lui donne aussi compétence, je le signale à M. Paillé, pour financer des maisons de santé, au besoin interprofessionnelles, dans des zones déficitaires.

Vous prétendez, monsieur Renucci, que la permanence des soins est inorganisée.

M. Simon Renucci. C’est le cas !

M. Pascal Terrasse. M. Renucci sait de quoi il parle, lui !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Elle a au contraire été remise sur pied. Chacun devrait faire un effort de mémoire : il y a trois ou quatre ans, avec la grève des gardes, la permanence des soins était dans un état de délitement complet. (Murmures sur les bancs du groupe socialiste.) C’était la catastrophe ! À la faveur d’une première réforme menée avec énergie et efficacité par Jean-François Mattei en 2003, puis par de nouvelles mesures cette année, le Gouvernement a redressé le système.

M. Gérard Bapt. On voit que vous n’êtes pas sur le terrain !

M. Jean-Marie Le Guen. Il n’y a toujours pas de permanence de soins dans la moitié des départements français !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Le Gouvernement entend promouvoir le volontariat : la communauté médicale doit s’organiser, même si la responsabilité ultime incombe naturellement à l’État. Ce dernier a en effet vocation à financer des projets facilitant une juste répartition des professionnels sur le territoire.

Telles sont les premières dispositions d’un plan plus vaste, qui sera enrichi et prochainement présenté par Xavier Bertrand.

MM. Vitel, Perrut et Gilles ont évoqué le problème du médicament et salué les mesures déjà prises par le Gouvernement.

Nous demandons cette année, c’est vrai, beaucoup d’efforts à la filière du médicament. Mais il n’est pas moins vrai que les remboursements et le chiffre d’affaires de l’industrie et des officinaux ont progressé à un rythme de 5 à 7 % depuis cinq ans : c’est une progression supérieure à celle de 1 % pour laquelle la filière s’était engagée. Nous devons par conséquent aller au-delà du plan « Médicament » contenu dans la loi du 13 août 2004 relative à la réforme de l’assurance maladie. Cette dernière doit payer le médicament au juste prix. C’est d’ailleurs l’un des objectifs du plan « Médicament » pour la période 2004-2007. Nous devons aussi ajuster les prix des génériques français à ceux de nos voisins européens : il est anormal que, pour les trente groupes génériques les plus consommés, nous constations encore des écarts de 10 à 15 points entre les premiers et les seconds. Le Gouvernement a donc décidé d’appliquer une baisse de 13 % sur l’ensemble des produits génériquables.

M. Gérard Bapt. Enfin !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Les économies réalisées grâce aux génériques doivent être plus importantes, et le prix de ces derniers doit servir de référence pour les remboursements de l’assurance maladie.

Ces économies doivent bien entendu être équitablement réparties entre l’assurance maladie, les organismes complémentaires, les producteurs de génériques – à qui profite un marché en forte croissance – et les pharmaciens, qui, pour beaucoup, se sont engagés avec enthousiasme et efficacité dans la substitution.

Enfin, les industriels ayant dépassé le taux de progression de leur chiffre d’affaires pour lequel ils s’étaient engagés – 5 % contre une modération prévue à 1 % –, le Gouvernement a décidé une mesure de taxation exceptionnelle de 1,96 % sur ce chiffre d’affaires.


Il nous faut aussi éviter les dépenses inutiles…

M. Gaëtan Gorce. Et les paroles inutiles !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. …que la Cour des comptes évalue entre 6 et 8 milliards d’euros. Pour cette raison, nous avons décidé de suivre l’avis de la Haute autorité de santé et de radier du remboursement 156 médicaments dont le service médical rendu a été jugé insuffisant. De la même façon, nous avons inscrit les veinotoniques sur la liste des médicaments remboursables jusqu’en 2008 au taux de 15 %.

Il s’agit de se donner deux ans, monsieur Gilles, pour permettre aux Français de changer leurs habitudes et aux laboratoires de s’adapter à la nouvelle donne.

Bien sûr, il nous faut poursuivre, dans le cadre de la maîtrise médicalisée, dans la voie des accords de bon usage concernant la prescription des diverses classes de médicaments, comme les antibiotiques, sur lesquels vous avez, à juste titre, insisté, monsieur le député.

Grâce à ces mesures, nous pourrons continuer à prendre en charge les véritables innovations thérapeutiques pour tous les Français, en fonction de leurs besoins et non de leurs moyens. C’est d’ailleurs ce que nous faisons puisque, je le rappelais hier, 196 nouvelles spécialités, inscrites sur la liste des médicaments remboursables en 2004, seront remboursées en 2006. Il est normal, en matière de médicaments, qu’il y ait des « sorties » si nous voulons pouvoir prendre en charge les « entrées » que nous jugeons nécessaires, dans l’intérêt du progrès médical pour tous.

Chaque année, c’est près d’un milliard d’euros de plus que l’assurance maladie consacre au remboursement de nouveaux médicaments, très onéreux, destinés au traitement du cancer, du sida, du diabète, de la polyarthrite rhumatoïde ou des maladies orphelines.

En ce qui concerne la branche vieillesse, je tiens à remercier tout particulièrement Mme Cécile Gallez, rapporteure pour l’assurance vieillesse, d’avoir rappelé l’ensemble des avancées sociales permises par la réforme des retraites d’août 2003, qui a à la fois sauvegardé notre régime par répartition et assuré une plus grande équité.

Le succès des départs anticipés – nous serons à 300 000 à la fin de l’année 2006 – marque ainsi l’équilibre de cette réforme. C’est une mesure dont il y a lieu d’être fier, monsieur Terrasse, même si dans un premier temps, elle a un impact, évidemment, sur les dépenses.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 poursuit l’effort d’assainissement des comptes entrepris avec la réforme des retraites.

M. Gaëtan Gorce. Ça ne se voit guère !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Malgré la montée en charge des départs anticipés, le déficit sera ramené de 2 milliards à 1,4 milliard, grâce notamment à une hausse de cotisation de 0,2 point, prévue dès 2003 et conforme à la montée en charge de la réforme.

M. Pascal Terrasse. Sur qui portera-t-elle ? Sur les salariés ou sur les entreprises ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Elle sera, naturellement, partagée équitablement entre la part patronale et la part salariale, à l’issue d’une concertation approfondie.

M. Pascal Terrasse. Oh ! là ! là ! Mais qu’est-ce que l’équité pour vous ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 prolonge également l’assainissement, avec le fonds de solidarité vieillesse.

M. Pascal Terrasse. Deux milliards de déficit !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Je tiens à vous confirmer, ainsi qu’à MM. les rapporteurs, Jean-Pierre Door et Yves Bur, que le Gouvernement s’attaque au problème et que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 sera un levier de son action. Nous proposons des mesures tant en matière de recettes que de dépenses.

S’agissant des recettes, l’élargissement de la contribution familièrement appelée la C3S aux entreprises publiques procurera au FSV plus de 200 millions de ressources nouvelles …

M. Pascal Terrasse. Et les offices ? Et les régies ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. …auxquels s’ajouteront les prélèvements sur les plans d’épargne-logement effectués chaque année et non plus seulement au bout de dix ans.

En ce qui concerne les dépenses, le projet de loi de financement de la sécurité sociale suit une recommandation essentielle de la Cour des comptes, qui préconisait d’harmoniser les règles d’attribution du minimum vieillesse sur celles en vigueur pour d’autres prestations sociales, comme le RMI, l’AAH ou l’API.

M. Gaëtan Gorce. D’autres choix étaient possibles !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Il n’est pas acceptable que des travailleurs saisonniers, ayant passé quelques mois en France,…

Mme Hélène Mignon. Ce ne sont pas seulement quelques mois !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. …puissent bénéficier dans leur pays, parfois trente ans plus tard, d’un minimum vieillesse d’autant plus élevé qu’ils auront travaillé peu de temps en France. Les minima sociaux doivent être réservés à ceux qui résident sur le territoire national ; ils ne doivent pas être exportés. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

À ces deux mesures, il faut ajouter d’autres facteurs décisifs de redressement : la baisse du chômage et la progression du pouvoir d’achat résultant des décisions prises par le gouvernement de Dominique de Villepin…

M. Pascal Terrasse. C’est un peu romantique !

M. Bruno Gilles. Non, c’est réaliste !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. …viennent naturellement faire progresser les recettes du FSV, tout en réduisant ses dépenses.

Et pour ceux qui ne suivent pas l’actualité, je tiens à rappeler que le nombre de demandeurs d’emplois a déjà diminué de 80 000 depuis le mois de juin dernier. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Lorsque le Gouvernement lutte pour l’emploi et pour le niveau de vie, il travaille aussi au redressement des comptes de la sécurité sociale. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Marie Le Guen. Si vos ambitions sont à la hauteur de ces résultats, vous ne visez pas bien haut !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Madame Gallez et monsieur Bur, vous m’avez interrogé sur le rythme des versements après 2020 des sommes accumulées sur le fonds de réserve des retraites. Je tiens tout d’abord à rappeler le contexte dans lequel il a été créé, en 1999. Cette création est le fruit de ce que je n’ose pas appeler « la fuite » du gouvernement de l’époque devant une réforme des retraites, toujours différée et que, finalement nous avons, nous, accomplie.

M. Pascal Terrasse. Avec quels résultats ! Deux milliards d’euros de déficit !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Et avec les résultats que vous connaissez : 300 000 départs anticipés à la retraite pour des gens qui ont commencé à travailler très jeunes…

M. Jean-Marie Le Guen. Si le but de la réforme, c’était de faire partir les gens plus tôt, il fallait le dire aux Français ! Ce n’est pas ce qu’ils ont compris !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. …et des perspectives enfin rassurantes sur l’avenir de l’équilibre financier de l’assurance vieillesse.

M. Jean-Marie Le Guen. Ne nous parlez pas de ce gadget que vous n’avez même pas financé ! Parlez-nous de la vraie réforme ! Parlez-nous de l’emploi des seniors, par exemple !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Enfin, dans un objectif de renforcement des moyens du fonds de réserve, l’Assemblée nationale vient de modifier, lors de l’examen du projet de loi de finances, le champ d’intervention du compte d’affectation spéciale de l’État, relatif à ses cessions de participations. L’État pourra désormais abonder le fonds de réserve des retraites.

C’est vrai, monsieur Jacquat, pour ce qui concerne le niveau des retraites, les femmes sont dans une situation plus défavorable que les hommes. Mais, heureusement, la loi portant réforme des retraites a amélioré notablement le dispositif des pensions de réversion. Mais la retraite personnelle des femmes a également beaucoup augmenté. Ainsi, la pension de retraite personnelle moyenne d’une femme âgée de soixante ans est supérieure à 900 euros, tandis que celle d’une femme âgée de quatre-vingt-cinq ans et plus est de 500 euros.

Mais c’est surtout par le développement de l’activité professionnelle des femmes, et donc l’amélioration de leurs droits personnels, que nous pourrons continuer à améliorer le niveau de retraite des femmes.

S’agissant, enfin, de la famille, madame Clergeau, je vous rappellerai simplement que ce nouveau projet de loi de financement de la sécurité sociale introduit le congé d’un an rémunéré 750 euros,…

Mme Hélène Mignon. Il n’y aura plus de chômeuses !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. …finance la montée en puissance de la prestation d’accueil du jeune enfant et assume le financement des engagements de l’État vis-à-vis de la Caisse nationale d’allocations familiales, c’est-à-dire 7,5 % par an de dépenses supplémentaires d’action sociale pour créer des crèches. Nous aurons ainsi créé 72 000 places de crèches entre 2002 et 2008, ce qui représente un effort sans précédent, qui augmente d’un tiers notre équipement dans ce domaine.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour la famille. Et le contrat temps libre, où en est-il ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Sans doute n’ai-je pas pu répondre à toutes les questions qui m’ont été posées,…

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure pour la famille. Vous n’avez répondu à aucune des questions de l’opposition !

M. Pascal Terrasse. Quelle arrogance ! Ni Mattei, ni Douste-Blazy n’auraient osé se comporter ainsi !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. …mais je suis sûr qu’à la faveur de la discussion des articles et des amendements, nous pourrons approfondir le débat.

Avant de conclure, je tiens à souligner l’effort considérable qui est fait, dans ce budget de l’assurance maladie, en faveur du médico-social. Cette année, les maisons de retraite médicalisées et les services de soins infirmiers à domicile bénéficieront d’une augmentation de crédits de 9 %, en réalité un peu plus de 13 % en comptant l’apport de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie.

M. Pascal Terrasse. Ce sera comme la vignette automobile ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Et pour les personnes handicapées, c’est un effort de 5 % que consentira le budget de l’assurance maladie, auquel s’ajoutera une contribution de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie.

Pour ce qui est de la situation du budget social agricole, monsieur Censi, je tiens à vous redire que le système des prestations sociales agricoles est au cœur du pacte conclu entre la République et ses agriculteurs depuis plus de quarante ans…

M. Pascal Terrasse. Ce n’est pas la réponse qu’ils attendent !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. …et que, naturellement, l’État assumera ses responsabilités vis-à-vis d’eux. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Yves Censi. N’oublions pas les agriculteurs !

Motion de renvoi en commission

Mme la présidente. J’ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste une motion de renvoi en commission, déposée en application de l’article 91, alinéa 7, du règlement.

Je vous rappelle que la conférence des présidents a fixé à une heure la durée maximale de l’intervention.

La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Que M. le ministre n’ait répondu à aucune des questions posées par les membres de l’opposition, notamment ceux du groupe socialiste, légitime encore plus notre motion de renvoi en commission, qui avait déjà beaucoup de justifications. Je suis satisfait que le président de la commission des affaires culturelles soit présent puisque c’est sous sa conduite avisée que je souhaite que la commission puisse à nouveau travailler.

Ce qui nous oblige à renvoyer ce projet de loi en commission, mes chers collègues, c’est d’abord l’insincérité des prévisions ; il nous faut réétudier certaines recettes qui ne sont que des artifices comptables, lourds de menaces pour l’avenir. C’est encore une politique du médicament inadaptée à la réalité d’aujourd’hui et un ONDAM discutable dans ses différentes composantes. Enfin, il y a l’accroissement des inégalités, en particulier pour ce qui concerne la couverture médicale universelle complémentaire. Quant aux dépassements d’honoraires ou aux économies de maîtrise médicalisée que vous prévoyez à nouveau en 2006, ils vont rendre plus difficile encore l’accès aux soins pour le plus grand nombre.

Parlant de la sécurité sociale, comment pourrait-on ne pas évoquer les déficits « abyssaux » – ainsi que les avait qualifiés un de vos prédécesseurs, monsieur le ministre ? En 2004, le déficit du régime général s’élevait à 11,9 milliards d’euros. En 2005, la situation est identique, mais, pour la première fois, toutes les branches sont dans le rouge. Depuis 2002, les déficits cumulés du régime général atteignent 37,5 milliards d’euros, alors que le régime général était excédentaire en 2001, pour la troisième année consécutive.

Dans son rapport publié le 14 septembre dernier, la Cour des comptes fait état d’un déficit « sans précédent » dans l’histoire de la sécurité sociale, qui a pourtant un certain âge : soixante ans !

En prenant en compte la situation de tous les régimes obligatoires de base, les déficits se sont établis à 11,5 milliards d’euros en 2004 et à 12,9 milliards d’euros en 2005 et, si l’on s’en tient aux prévisions du Gouvernement, le déficit devrait s’élever à 10,1 milliards d’euros en 2006.

Ces déficits abyssaux marquent le double échec du Gouvernement : celui de sa politique économique et sociale, qui assèche les ressources de la sécurité sociale et celui de la loi sur l’assurance maladie de l’été 2004.

Le Gouvernement a laissé filer les déficits, renoncé à toute politique de soutien de la croissance et de l’emploi, et reporté le poids des déficits passés, présents et à venir sur les générations futures. Il se targue d’avoir sauvé l’assurance maladie grâce à la loi de 2004 : le déficit serait passé de 11,6 milliards d’euros en 2004 à 8,3 milliards d’euros en 2005 et il ne serait plus, toujours selon ses prévisions, que de 6,1 milliards d’euros en 2006.

Toutefois, cette baisse affichée des déficits est purement fictive. Ce n’est pas le déficit de l’assurance maladie qui baisse, mais les prélèvements qui augmentent et les remboursements qui diminuent.

M. Jean-Marie Le Guen. Eh oui !

M. Gérard Bapt. L’entrée en vigueur anticipée du prélèvement au profit de l’assurance maladie sur les intérêts des plans épargne logement illustre parfaitement cette volonté d’afficher coûte que coûte une réduction des déficits et, dès 2005, les assurés sociaux ont dû supporter une franchise fixée pour l’instant à un euro sur les consultations et les actes, une hausse d’un euro du forfait hospitalier et l’augmentation de la CSG et de la CRDS.

En 2006, ils subiront un moindre remboursement s’ils ne font pas le choix du médecin traitant, la liberté tarifaire pour les spécialistes s’ils ne sont pas adressés par le médecin traitant, puis la liberté tarifaire sauvage que pratiquent de plus en plus un certain nombre de médecins dans ce pays, une nouvelle hausse du forfait hospitalier, le forfait de 18 euros pour les actes de plus de 91 euros et la diminution de 1,9 % du taux des indemnités journalières pour les arrêts maladie de plus de six mois.

Progressivement, un système de médecine à deux vitesses s’installe dans notre pays. La loi de 2004 n’a apporté aucune réponse aux préoccupations des Français sur la qualité et l’organisation de l’offre de soins sur tout le territoire.

M. Jacques Domergue, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour l’assurance maladie et les accidents du travail. C’est faux !

M. Gérard Bapt. Elle a seulement permis d’engager un processus de privatisation, et le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 vient accentuer le passage d’un système où chacun contribue selon ses moyens et reçoit selon ses besoins à un système où seuls ceux qui ont les moyens obtiennent des soins de qualité et où tous les autres ne bénéficient que d’une protection minimale et doivent patienter dans les files d’attente pour obtenir une consultation hospitalière.

La droite tente de rendre ce mouvement irréversible malgré l’opposition des partenaires sociaux et, plus généralement, des assurés. Il convient de souligner que ce projet a été rejeté par trois des quatre institutions de la sécurité sociale consultées pour avis : l’ACOSS, la CNAMTS et la CNAVTS ; la CNAF a pour sa part émis un avis partagé. Les syndicats et la mutualité française ont fortement dénoncé l’annonce faite presque en catimini de l’instauration d’une franchise pour les actes supérieurs à K 50.

Conformément à la loi organique, l’article 9 prévoit l’approbation par le Parlement d’un rapport figurant en annexe B décrivant l’évolution pluriannuelle du financement de la sécurité sociale pour les quatre années à venir, 2006-2009. Les scénarios proposés s’appuient sur les hypothèses moyennes suivantes, pour la période 2007-2009 : une hausse du PIB de 2,6 % en volume, une progression de la masse salariale du secteur privé de 4,45 %, une évolution de 2,2 % des dépenses entrant dans le champ de l’ONDAM et une inflation hors tabac de 1,8 %. Compte tenu de ces hypothèses, le déficit des régimes obligatoires de base s’améliorerait chaque année.

Mais ces prévisions pluriannuelles ne sont crédibles pour personne. Les partenaires sociaux se sont ainsi interrogés sur « la pertinence des hypothèses, pour le moins optimistes, ayant présidé à l’élaboration des prévisions de recettes et dépenses sur la période 2007-2009 et donc sur les termes du retour à l’équilibre affiché pour 2009 dans le projet de loi ». Il s’agit d’un communiqué du président de la CNAM, Michel Régereau, orfèvre en la matière.

Les prévisions économiques sur la croissance et sur l’évolution de la masse salariale sont largement surestimées au regard de l’existence d’un niveau de chômage élevé et durable dans notre pays, malgré les artifices comptables auxquels vous vous êtes livré tout à l’heure, monsieur le ministre délégué, pour démontrer qu’il baissait. Ce n’est pas ce que nous constatons dans nos permanences ni ce que constatent les agences locales pour l’emploi.

Vos prévisions sur les dépenses de santé ne reposent sur aucun véritable instrument de maîtrise, le principal effet de la réforme du médecin traitant étant de donner aux spécialistes une plus grande facilité de pratiquer des dépassements d’honoraires.

Par ailleurs, la branche vieillesse devra faire face à d’importants chocs démographiques, alors que le Gouvernement a refusé et continue de refuser d’alimenter suffisamment le fonds de réserve pour les retraites.

Le caractère insincère des prévisions, telle est donc la première justification de notre motion de renvoi en commission.

La deuxième réside dans la nécessité de réétudier certaines recettes qui ne sont que des artifices comptables. Après avoir fortement augmenté les prélèvements sociaux qui pèsent sur les assurés, le Gouvernement met en œuvre cette année des mesures de financement en apparence plus équilibrées, notamment l’affectation à la sécurité sociale du produit de nombreux prélèvements pour assurer la prise en charge des allégements de cotisations sociales. Le transfert est très lourd de conséquences pour la pérennité des recettes.

L’anticipation sur l’assujettissement aux prélèvements sociaux des intérêts des plans d’épargne logement de dix ans ou plus n’est qu’une recette de poche, et non renouvelable. Jusqu’à présent, les prélèvements sur les revenus de l’épargne logement étaient opérés à la clôture du plan. Ils seront dorénavant perçus à partir de la dixième année. Cette mesure permet d’anticiper le prélèvement sur le stock des revenus des plans ayant dépassé dix ans et devrait se traduire par une recette exceptionnelle de l’ordre de 1 milliard d’euros en 2006 dont 717 millions directement au régime général. Cette recette est par définition non reconductible. Il s’agit donc d’un artifice comptable. Pour améliorer la présentation des comptes de 2006, le Gouvernement réduit en fait les ressources futures de la sécurité sociale et repousse les dettes.

En ce qui concerne la compensation des exonérations des cotisations sociales patronales, l’article 16 vient compléter le dispositif prévu par l’article 41 du projet de loi de finances pour 2006 qui affecte aux organismes de sécurité sociale confrontés à des pertes de recettes massives et croissantes du fait de la politique d’allégement de cotisations sociales mise en œuvre par le Gouvernement ces dernières années, notamment 95 % du produit de la taxe sur les salaires, les droits sur les bières et boissons non alcoolisées, le droit de circulation des vins, le droit de consommation sur les produits intermédiaires, sur les alcools, la taxe sur les contributions patronales au financement de la prévoyance complémentaire et la taxe sur les primes d’assurance automobile. La sécurité sociale recevra une recette estimée à 18,3 milliards d’euros au titre des allégements prévus pour l’année 2006.

Mais ce transfert revient à intégrer directement dans le barème des cotisations sociales les allégements décidés par l’État au nom de sa politique pour l’emploi, laquelle a été contestée la semaine dernière par le rapporteur général et le président de la commission des finances. Ce dernier a d’ailleurs émis l’hypothèse de transformer l’augmentation de ces allégements en crédits pour augmenter la prime pour l’emploi. L’État substitue à une dépense budgétaire une moindre recette, ce qui lui permet d’afficher une moindre progression des dépenses.

L’écart inévitable entre la recette transférée et les besoins effectifs de la sécurité sociale sera constaté avec retard et ne sera pas nécessairement compensé. À cet égard, chat échaudé craint l’eau froide ! La démarche est identique à celle du transfert aux départements du financement du RMI. Au mieux, faute de recettes, la sécurité sociale servira de trésorerie pour les entreprises pendant deux ans.

Troisième raison de renvoyer ce texte en commission : la politique du médicament. Nous vous rendons hommage, monsieur le ministre, car vous rompez avec le laisser-faire de vos prédécesseurs et vous vous décidez à agir ! Certains efforts bienvenus, quoiqu’encore insuffisants, ont été réalisés par la CNAM. On connaît en effet la consommation pharmaceutique dans notre pays : trop de médicaments prescrits et une dépense inégalée en Europe. Des résultats ont été obtenus pour les antibiotiques, mais peu pour les statines et les psychotropes.

Aujourd’hui, vous agissez sans discernement, pour des raisons financières et sans rechercher un effet structurel. Au lieu d’alléger la pression commerciale sur la prescription médicale, au lieu d’encourager les pharmaciens à la substitution, vous agissez de manière brutale. Nous ne sommes pas favorables pour notre part à l’usage du TFR – le tarif forfaitaire de responsabilité – qui fait, au final, reposer sur l’assuré le surcoût du princeps. Et vous triplez la taxe sur le chiffre d’affaires des laboratoires pharmaceutiques, en cumulant tous les inconvénients : la sécurité sociale et, par conséquent, les mutuelles, ne bénéficient pas des économies qu’elles auraient pu espérer de la baisse des prix ; les industriels n’ont pas de visibilité ; enfin, les assurés n’ont pas une garantie absolue de l’efficience des médicaments prescrits.

Quatrième motif de renvoi en commission : un ONDAM très discutable. L’ONDAM pour 2006 est en progression de 2,7 %, à périmètre constant 2005, il est de 138,2 milliards d’euros. L’impact des modifications du périmètre est de 2,5 milliards. Son évolution semble aller dans le sens d’une modération de l’augmentation annuelle.

Mais cette tendance est le fruit d’artifices qui faussent les résultats. En 2006, l’ONDAM est fondé sur des prévisions discutables. Il n’intègre pas les reports de charges des hôpitaux de 2005 sur 2006 et méconnaît les dépassements que subiront les cliniques. En outre, il ne tient pas compte des recommandations de la Caisse nationale d’assurance maladie sur le manque d’efficacité de la maîtrise médicalisée des dépenses.

Pour ce qui est de l’ONDAM pour 2006, le chiffre de 140,7 milliards d’euros est obtenu par l’agrégation de six sous-objectifs, qui constituent un progrès en matière de présentation. Mais la lecture de ces données fait apparaître une contradiction avec le discours tenu par Xavier Bertrand en réponse à une de mes questions le 11 juillet 2005. À cette date, il affirmait : « S’agissant de l’ONDAM, il y a tout lieu de se féliciter qu’il puisse être désormais décliné en au moins cinq sous-objectifs : soins de suite, hospitalisation publique, hospitalisation privée, personnes âgées, personnes handicapées ». Malheureusement, les sous-objectifs retenus ne font pas la distinction entre l’hôpital public et le privé.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Heureusement !

M. Gérard Bapt. Cela est notamment critiqué par la Fédération hospitalière de France.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. On sait pourquoi.

M. Gérard Bapt. L’invisibilité des répartitions rend difficile toute analyse lorsqu’il n’y a pas séparation entre la part publique et la part privée. La difficulté s’accroît du fait de la problématique de la convergence tarifaire public-privé dans le cadre de la tarification à l’activité. Il n’est donc pas étonnant que, dans ce contexte, le Gouvernement recule la date de cette convergence de deux ans. Ce qui lui vaut, cette fois, les critiques de l’hospitalisation privée. Dans ce cadre, il conviendrait de scinder la tarification à l’activité pour avoir d’un côté une tarification publique, de l’autre une tarification privée.

M. Jacques Domergue, rapporteur pour l’assurance maladie et les accidents du travail. C’est impossible !

M. Philippe Vitel. Cela ne servirait à rien !

M. Gérard Bapt. Si ! Il y aurait ensuite une régulation d’ensemble dans le cadre d’une politique de l’hospitalisation.

Par ailleurs, le rapporteur de la commission des affaires sociales, Jacques Domergue, déplore dans son rapport que la possibilité de définir et de soumettre à l’approbation du Parlement des sous-objectifs de branche, innovation introduite par la loi organique du 2 août dernier, n’ait pas été utilisée par le Gouvernement.

Cinquième raison de renvoyer ce projet en commission : l’accroissement des inégalités devant l’accès aux soins et la difficulté de trouver le soin adapté dans un délai raisonnable. (M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, rejoint le banc du Gouvernement.)

Nous sommes heureux, monsieur le ministre de la santé, que vous nous rejoigniez, après avoir, nous a-t-on dit, travaillé sur la grippe aviaire…

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités. Avec votre président de groupe, Jean-Marc Ayrault !

M. Gérard Bapt. Avec Jean-Marie Le Guen, nous avons beaucoup regretté votre absence.

La couverture médicale universelle complémentaire concerne 4,7 millions de personnes dont les ressources sont inférieures à 587 euros pour une personne seule et à 1 233 euros pour un couple avec deux enfants, c’est-à-dire des ménages très modestes. Aussi la mesure d’alignement du forfait logement sur le régime du RMI nous semble-t-elle très choquante. Présentée comme une augmentation de ressources, cette mesure permet une économie de 21 millions d’euros en excluant 60 000 familles du bénéfice de la CMU complémentaire ! Décidément, ce gouvernement est dur avec les pauvres et doux avec les riches.

De même, la promesse faite en 2004 d’accorder à 300 000 enfants supplémentaires le bénéfice de la CMU complémentaire n’a vécu que le temps d’une propagande.

Par ailleurs, le projet de loi prévoit de revaloriser le montant de l’aide à l’acquisition d’une complémentaire santé pour les personnes dont les revenus excèdent de moins de 15 % le plafond de la CMU.

M. Jacques Domergue, rapporteur pour l’assurance maladie et les accidents du travail. N’est-ce pas une bonne mesure ?

M. Gérard Bapt. Sur le principe, monsieur le ministre, je ne peux que m’en réjouir – ne vous avais-je pas démontré en juillet, lors de la discussion du projet de loi organique, l’insuffisance notoire de cette aide ? – même si vous n’êtes pas allé jusqu’à retenir ma proposition d’en tripler le montant et de prévoir une dégressivité en trois tranches afin d’éliminer les effets de seuil.

Reste que cette mesure ne coûtera rien au budget, étant financée par le fonds d’action sociale des caisses et par la majoration de la taxe sur les mutuelles. Elle permettra même de faire des économies sur le budget de l’État, dont le désengagement massif, s’agissant d’une action de solidarité nationale, doit être dénoncé. Ainsi, dans les crédits de la mission « solidarité », le financement de la CMU complémentaire passe de 986 millions d’euros en 2004 à 660 millions d’euros en 2005 puis à 323 millions d’euros en 2006. Tout se passe donc comme si l’État cherchait à réaliser des économies en transférant des charges sur les mutuelles et les organismes complémentaires. La sélection par l’argent est à l’œuvre, favorisée par ailleurs par l’anarchie tarifaire découlant de votre réforme et de la convention qui a suivi.

La pratique, de plus en plus sauvage, des dépassements d’honoraires, dont vous avez semblé négliger l’ampleur pendant la discussion générale, tend à se généraliser. Elle a désormais un effet réellement dissuasif pour les assurés modestes. Je songe à un cas dont j’ai pris connaissance samedi matin en assurant ma permanence dans ma petite mairie : un cheminot retraité, disposant pourtant d’une mutuelle solide, s’est vu infliger, pour une cataracte, un dépassement d’honoraires global, pour l’examen et pour l’intervention, de 160 euros – une dépense majeure à l’échelle de son budget.

Encore s’agissait-il d’un dépassement « raisonnable »,…

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. En effet !

M. Gérard Bapt. …entre guillemets, si on le compare à ceux récemment dénoncés par le quotidien Aujourd’hui en France sous le titre : « Consultations, interventions : les tarifs médicaux s’envolent ». Je vous invite à consulter ces deux pages et à lire notamment les propos du « Monsieur santé » de l’assureur AGF, en poste depuis 2003.

M. Jean-Luc Préel. Que faisait-il avant de l’occuper ?

M. Gérard Bapt. Peu importe, il est compétent.

M. Jean-Luc Préel. C’est indéniable !

M. Gérard Bapt. On peut donc écouter ce qu’il a à dire.

Lorsqu’on lui demande sa réaction face à cette flambée des dépassements, il répond que, depuis janvier, les AGF ne les remboursent plus quand ils sont supérieurs à 2 000 euros par acte.

M. Jean-Luc Préel. Est-ce possible ?

M. Gérard Bapt. Vous pensez sans doute que de tels dépassements sont peu nombreux, monsieur Préel ?

M. Jean-Luc Préel. Exceptionnels, même !

M. Gérard Bapt. Pourtant cette seule mesure a permis aux AGF de gagner 1 million d’euros en huit mois.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Vous avez de drôles de lectures !

M. Gérard Bapt. On peut donc parler non seulement d’une généralisation des dépassements,…

M. Jacques Domergue, rapporteur pour l’assurance maladie et les accidents du travail. Cinq cents actes !

M. Gérard Bapt. …mais même d’une enflure très alarmante.

Les quotidiens nationaux ne sont d’ailleurs pas les seuls à s’en inquiéter. Prenons le quotidien de ma région, la Dépêche du Midi. Il décrit la situation de femmes enceintes incapables de prendre en charge les dépassements facturés dans une clinique – d’ailleurs clairement affichés : de 50 à 150 euros de supplément d’honoraires, s’ajoutant au prix de la chambre individuelle – et orientées systématiquement vers l’hôpital public,…

Mme Hélène Mignon. C’est vrai !

M. Gérard Bapt. …dont la capacité en nombre de lits est aujourd’hui insuffisante, d’autant plus qu’étant de niveau trois, il se doit de prendre en charge toutes les grossesses à risques de la région.

Mme Hélène Mignon. M. Douste-Blazy connaît parfaitement le problème  !

M. Gérard Bapt. Ce même quotidien a également dressé le bilan des dépassements d’honoraires pour des consultations effectuées à l’hôpital public, et relevé la différence de délais d’attente pour une consultation de spécialiste selon qu’elle relève du public ou du privé. Dans les deux cas, les chiffres sont révélateurs.

M. Jean-Luc Préel. Le parcours de soins va remédier à tout cela !

M. Gérard Bapt. Extrêmement inquiets devant cette aggravation accélérée de l’inégalité d’accès aux soins, qui ne concerne pas seulement les zones sous-médicalisées et les territoires ruraux, nous ne pouvons donc que nous réjouir de l’avis favorable donné par la commission à notre amendement réclamant un rapport de l’IGAS sur les pratiques de dépassement d’honoraires médicaux en secteur hospitalier.

Autre facteur d’inégalités : les assurés sont pratiquement les seuls à supporter la maîtrise médicalisée. Pour 2005, on estimait les économies devant être réalisées à près d’un milliard d’euros. Or, selon la CNAM, cet objectif ne sera atteint qu’aux deux tiers – soit 660 millions d’euros. Et les deux tiers de cette somme proviennent de la diminution en valeur absolue des indemnités journalières pour arrêt de travail.

M. Jean-Marie Le Guen. Eh oui !

M. Gérard Bapt. En 2006, vous évaluez le montant des économies réalisées grâce à la maîtrise médicalisée à environ 880 millions d’euros, un chiffre à nouveau surestimé. Les prévisions d’économies sur les indemnités journalières ayant été dépassées en 2005, il est en effet logique de penser que leur augmentation va ralentir et atteindre un palier en 2006. Dès lors, l’essentiel des économies portera sur le remboursement des soins liés aux affections de longue durée et sur l’utilisation de l’ordonnancier bizone, et donc sur le transfert de certaines charges de l’assurance maladie vers le patient et, le cas échéant, vers sa mutuelle.

Qu’en est-il pour les familles ? Le rapport de Martin Hirsch intitulé « familles, vulnérabilité, pauvreté » a été remis en avril 2005 au Gouvernement pour préparer le rendez-vous annuel de la conférence de la famille. Mais en septembre, le thème des familles « fragiles et pauvres », initialement inscrit, a été évacué de la conférence.

De même, les mesures annoncées lors de cette conférence ne prennent pas en compte les difficultés et les aspirations des familles les plus défavorisées, alors qu’en France plus d’un million d’enfants – deux millions si l’on retient les critères de calcul de l’Union européenne – vivent dans des familles pauvres.

S’agissant des retraités, depuis la loi de 2003 sur les retraites, le Parlement n’est plus saisi de la question de la revalorisation des pensions. Elle est fixée par décret et limitée à l’évolution des prix.

M. le ministre de la santé et des solidarités. Elle est garantie, maintenant. Merci de l’avoir rappelé !

M. Gérard Bapt. Cette revalorisation sera fixée à 1,8 % le 1er janvier 2006.

Par la voix de leurs syndicats, les retraités ont dénoncé le 17 octobre la dégradation de leur pouvoir d’achat. En effet, si leurs ressources sont désormais calées sur l’évolution de l’inflation, elles ne suivent pas celle des charges fixes, en particulier liées au logement et au chauffage. Près de 600 000 d’entre eux vivent aujourd’hui dans la pauvreté. Nombreux sont ceux qui ne peuvent plus se payer une mutuelle et sont donc frappés de plein fouet par les mesures de déremboursement décidées par le Gouvernement.

S’agissant enfin des personnes handicapées et dépendantes, trois arguments plaident en faveur du renvoi de ce texte en commission.

Le premier est lié à la sortie des dispositifs Aubry et à l’application du dispositif Fillon aux associations gérant des établissements et services pour les personnes handicapées, personnes dépendantes et vulnérables.

Pour la branche sociale et médico-sociale, la sortie des dispositifs Aubry représente une baisse des ressources associatives de l’ordre de 250 millions d’euros, chiffre d’ailleurs non contesté par l’administration. Face à cela, le Gouvernement propose une enveloppe de 50 millions d’euros, destinée aux associations dont les difficultés structurelles seraient les plus importantes, que ces difficultés soient liées aux 35 heures ou à d’autres problèmes. Nous sommes donc très loin du compte. La sortie des dispositifs Aubry pourrait donc se traduire par la perte de 11 000 emplois pour les associations œuvrant dans ce secteur !

Notons que, parallèlement, les associations sont soumises à une forte pression des préfets pour embaucher dans le cadre des dispositifs Borloo. Mais comment voulez-vous qu’elles recrutent alors qu’on leur refuse déjà les moyens de maintenir les effectifs actuels ?

Une deuxième illustration de vos incohérences, à notre sens encore plus grave dans le principe, est le report annoncé de la mise en place du nouveau système de rémunération des travailleurs handicapés en CAT, devenus ESAT. Le système, tel que défini dans la loi du 11 février 2005, était censé clarifier et simplifier le mode de rémunération des travailleurs handicapés, tout en offrant un revenu du travail garant de leur dignité. La fin des différences de rémunération liées au niveau de handicap devait ainsi encourager et motiver l’ensemble des travailleurs handicapés. Le coût de la mesure était de 41 millions d’euros, mais les financements n’étant pas au rendez-vous, la réforme serait repoussée. Ainsi seraient bafoués les nouveaux droits des travailleurs handicapés, l’année même où ils étaient reconnus ! Les personnes handicapées et leurs familles, à qui l’on a promis une politique généreuse et une amélioration de leur situation, ne comprendront pas.

Troisièmement, enfin, nous ne disposons d’aucune estimation fiable du nombre réel de places créées par le plan 2003-2007 sur lequel le Gouvernement communique année après année – il en a encore fait la publicité jeudi dernier après le conseil des ministres. Dans le communiqué que j’ai sous les yeux, on nous annonce 9 000 places dans les CAT et 15 000 en établissements médico-sociaux. Or, sur le terrain, nous voyons bien que des places demandées n’ont pas été créées et que des sommes ont été allouées à d’autres financements. Il reste cependant impossible d’obtenir de l’administration un état des lieux fiable.

La nouvelle procédure budgétaire, applicable à l’ensemble du budget 2006, est basée sur des missions et des programmes, dont un programme « Handicap et dépendance », et comporte pour chaque programme des objectifs et des indicateurs de résultat. Qu’attend le Gouvernement pour nous fournir une base d’information fiable ? Comment, faute de chiffres fiables, pourrons-nous apprécier les réponses apportées aux besoins des personnes handicapées ?

Mes chers collègues, il y aurait encore beaucoup de raisons de renvoyer ce texte en commission, ne serait-ce que pour supprimer l’article créant une franchise de 18 euros – dans un premier temps – sur les actes en coûtant plus de 91. La situation d’incertitude dans laquelle nous sommes et les mesures injustes ou inadaptées contenues dans ce projet de loi ne peuvent que vous convaincre de travailler à nouveau, sous la direction du président de la commission des affaires sociales, sur toutes ces questions importantes. J’invite donc mes collègues, au nom du groupe socialiste, à adopter cette motion de renvoi en commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la santé et des solidarités. Monsieur Bapt, j’ai tout lieu de penser, pour nombre de raisons que je vais tenter d’expliquer brièvement, qu’il n’y a pas lieu de renvoyer ce PLFSS en commission, où je l’ai d’ailleurs présenté avec Philippe Bas.

Je rependrai certains points pour vous prouver l’intérêt de passer à la discussion des articles.

En ce qui concerne les déficits, monsieur Bapt, vous dites que toutes les branches sont dans le rouge. Il est vrai qu’elles sont déficitaires, nous en avons expliqué les raisons dans nos interventions liminaires. Mais regrettez-vous, s’agissant de la branche famille, la création de la PAJE et sa montée en charge ? Nous pensons, quant à nous, que cette mesure profite aux Françaises et aux Français et qu’il convient d’être au rendez-vous de sa montée en charge.

M. Jean-Marie Le Guen. Tout le monde peut faire de la politique sociale sur les déficits !

M. le ministre de la santé et des solidarités. Parole d’expert !

Quant à la branche vieillesse, la montée en charge des départs anticipés et les carrières longues, monsieur Bapt, je vous laisse avoir, si vous le souhaitez, la foi du repenti. Nous avons mis en place ce dispositif des carrières longues pour les Françaises et les Français qui ont commencé à travailler à quatorze, quinze ou seize ans, afin qu’ils puissent partir à la retraite avant soixante ans (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire), ce dont je me félicite non parce que j’étais le rapporteur de ce texte en 2003, mais parce que je pense, effectivement, qu’il fait honneur à la représentation nationale. Cette mesure de justice sociale était attendue. Vous aviez, à l’époque, refusé de la mettre en place, alors qu’elle était réclamée par le groupe communiste ! Grâce à ce dispositif, nous sommes aussi au rendez-vous de la santé au travail dont nous parlons souvent.

M. Gérard Bapt. Acceptez de reconnaître qu’il n’est pas financé !

M. le ministre de la santé et des solidarités. Nous avons reconnu que, conjoncturellement, il risquait d’y avoir un décalage budgétaire, mais ce n’est pas pour autant que nous devrions regretter d’avoir pris une telle mesure.

On peut jongler avec les chiffres de la branche maladie. Je sais que j’ai à faire à des experts, mais la réalité est là. Même si ce déficit est encore très important, il diminue, puisqu’il sera de 8,3 milliards d’euros.

M. Jean-Marie Le Guen. Mais non !

M. le ministre de la santé et des solidarités. Les uns et les autres qui êtes présents dans cet hémicycle connaissez suffisamment cette matière pour savoir que, sans la réforme, il atteindrait 16 milliards d’euros !

Monsieur Le Guen, vous connaissez par cœur le tendanciel naturel des dépenses d’assurance maladie.

M. Jean-Marie Le Guen. Le tendanciel Mattei n’est pas une référence !

M. le ministre de la santé et des solidarités. Je n’ai donc pas besoin de vous expliquer qu’il se justifie – et j’espère que vous et moi en profiterons – par l’allongement de la durée de l’espérance de vie et par les progrès médicaux.

M. Jean-Marie Le Guen. Tout cela est faux !

M. le ministre de la santé et des solidarités. Vous êtes membre du Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie. Dites, lors de la prochaine séance officielle du Haut Conseil…

M. Jean-Marie Le Guen. Je le dis et je l’ai même écrit !

M. le ministre de la santé et des solidarités. …que le vieillissement de la population et les progrès médicaux, dont je souhaite qu’ils profitent à chacun sur tout le territoire, n’occasionnent aucune augmentation des dépenses de santé !

M. Jean-Marie Le Guen. Nous aurons ce débat !

M. le ministre de la santé et des solidarités. Le déficit est aujourd’hui de 8,3 milliards, et nous continuerons à le réduire.

Pour ce qui est de l’affectation des recettes, il est vrai, monsieur Bapt, que vous pouvez avoir en permanence à l’esprit le financement des 35 heures par le FOREC, et que vous pouvez le regretter. Mais ne vous inquiétez pas, nous ne travaillons pas, comme vous, nous n’agissons pas de la même façon. C’est le sens de l’article 70 de la réforme de l’assurance maladie. Nous avons également traité cette question tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat dans le cadre de la loi organique. J’aimerais donc pouvoir vous apaiser : nous ne prendrons pas les voies détournées empruntées à une époque !

M. Gérard Bapt. Les errements passés ne justifient pas ceux d’aujourd’hui !

M. le ministre de la santé et des solidarités. Vous avez évoqué la complémentaire. L’accroissement des montants de l’aide à la complémentaire est, à mon avis, indispensable, car cette mesure a rencontré un succès, même s’il n’est pas à la hauteur de ce que j’espérais pour ma part.

M. Gérard Bapt. Vous avez raison !

M. le ministre de la santé et des solidarités. Au début du mois d’octobre, 250 000 personnes seulement ont profité de ce dispositif alors que deux millions auraient pu en bénéficier. Il doit être plus attractif, mais surtout mieux expliqué et promu par les complémentaires santé, comme l’assurance maladie. Je rappelle qu’il ne bénéficie pas seulement à celles et ceux qui ne disposent pas de complémentaire santé et qui voudraient en prendre une, mais également à celles et ceux qui en ont une en fonction de leur seuil de CMU, ce qui représente deux millions de personnes.

Le débat sur l’ONDAM est vaste ! Je vous renvoie aux discussions de l’an dernier. Quand je disais que cet ONDAM était réaliste et qu’il serait atteint, vous ne me croyiez pas.

M. Jean-Marie Le Guen. Il ne l’est pas !

M. le ministre de la santé et des solidarités. Il le sera d’ici à la fin de l’année, puisqu’il semble que vous ne vouliez pas m’accorder aujourd’hui ce crédit !

M. Jean-Marie Le Guen. Ah oui ?

M. le ministre de la santé et des solidarités. Vous serez toujours là dans deux mois !

M. Jean-Marie Le Guen. Qui a dit que c’était faux, voici un mois ?

M. le ministre de la santé et des solidarités. Personne n’a dit que c’était faux ! Tout le monde s’accorde à dire que cet ONDAM sera atteint. Vous êtes suffisamment expert en la matière pour le reconnaître !

M. Jean-Marie Le Guen. Il sera non seulement atteint, mais dépassé !

M. le ministre de la santé et des solidarités. Je comprends que le fait que cet ONDAM soit atteint pour la première fois cette année vous dérange, mais c’est la stricte réalité !

Dans son intervention, Philippe Vitel a évoqué un ONDAM rigoureux et réaliste, comme celui de l’an dernier, et nous serons au rendez-vous puisque c’est également nécessaire au rétablissement des comptes de l’assurance maladie.

Sur la question des dépassements, je me suis entretenu avec les syndicats signataires de la convention.

M. Jean-Marie Le Guen. Ils ne représentent rien !

M. le ministre de la santé et des solidarités. Je leur ai alors précisé que tous les dépassements, notamment pour le secteur 1, étaient illégaux. Je tiens à le préciser parce que je l’ai notamment dit à M. Le Guen lors d’une émission qu’il a tenu à rappeler hier…

M. Jean-Marie Le Guen. Que l’on rappellera également demain !

M. le ministre de la santé et des solidarités. Ne vous inquiétez pas, cela ne m’a laissé aucun mauvais souvenir, monsieur Le Guen !

Ce caractère illégal était effectivement inacceptable. D’après les études menées par la Caisse nationale d’assurance maladie, cela concerne très peu de cas : environ 1 % des généralistes et 2,6 % des spécialistes, mais c’est encore trop. Donc, des procédures conventionnelles existent aujourd’hui et elles doivent être appliquées. J’y veillerai personnellement. Il revient, en effet, à l’assurance maladie et aux médecins d’y mettre bon ordre. Je l’ai précisé aux syndicats de médecins. Toutes les instances seront saisies pour faire respecter ces points. Je voudrais également ramener les choses à leur juste proportion. Gardons-nous de tout amalgame : les cas dont nous parlons ne représentent qu’un infime pourcentage.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Tout à fait !

M. le ministre de la santé et des solidarités. Nous aurons l’occasion d’évoquer ces points lors de l’examen des articles et des amendements. Je souhaite donc que cette motion de renvoi en commission ne soit pas adoptée parce qu’elle n’est pas justifiée. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelle, familiales et sociales. Monsieur Bapt, le ministre a répondu très précisément à toutes les questions que vous avez posées…

M. Jean-Marie Le Guen. Ce n’était pas des questions, mais des réponses !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. …et qui l’avaient déjà été d’ailleurs par d’autres – à cet égard, je vous renvoie à l’intervention de M. Gremetz.

Je suis, quant à moi, dans une phase où prédomine l’imaginaire. J’ai eu, hier, l’occasion de vous faire part du cauchemar que je faisais souvent, monsieur Bapt : notre système de sécurité sociale basculait dans le précipice de la privatisation ou s’enlisait dans le marais de l’étatisation !

J’ai maintenant envie de vous parler d’un rêve plus doux que j’ai eu l’occasion de faire à plusieurs reprises !

M. Jean-Marie Le Guen. Est-ce que vous faites, par hasard, une analyse des rêves, monsieur Dubernard ? Le marais et le précipice font penser à bien des choses ! (Sourires.)

Mme la présidente. Monsieur Le Guen !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Dans ce rêve beaucoup plus doux, je relisais les brillantes interventions des orateurs de l’opposition à propos de ce PLFSS, mais aussi à propos des précédents.

M. Yves Censi. Et quelle n’était pas la surprise !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Dans ce rêve, j’analysais ces interventions, je les disséquais…

M. Gérard Bapt. Je ne savais pas que vous étiez médecin légiste ! (Sourires.)

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. …et trouvais leurs lignes de force. À un autre moment, je me répétais les interventions que moi et mes collègues de la majorité avons eu l’occasion de faire lorsque nous étions dans l’opposition.

M. Gérard Bapt. Tout s’explique !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Je me suis aperçu, mes chers collègues, qu’en la matière, nos points de vue n’étaient pas très éloignés. Je pense même que, sur le fond, nous sommes très proches les uns des autres. Ce soir, bien réveillé, après avoir entendu l’intervention de M. Bapt, me remémorant celle de Maxime Gremetz, hier, et celles des rapporteurs, je me suis fait la même réflexion.

J’ai pensé aussi à ce qui se passe en Allemagne.

M. Jean-Marie Le Guen. Oh ! là ! là ! La fusion ! (Sourires.)

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Vous vous situez dans l’instant présent où l’on peut effectivement parler de fusion !

Souvenons-nous des trois ou quatre rencontres que nous avons eues depuis le début de cette législature au sein de la commission des affaires culturelles avec nos homologues du Bundestag. Souvenons-nous des conversations et des débats que nous avons pu avoir avec Mme Ulla Schmidt. Souvenons-nous que le SPD était alors au pouvoir et qu’il y avait eu un consensus avec la CDU et la CSU sur une réforme votée à l’unanimité par le Bundestag. La CSU et la CDU avaient pris l’engagement de ne pas y revenir en cas d’alternance. Nous devrions y réfléchir parce que si nous nous retrouvions en la matière, nous donnerions une autre image de la politique, ce qui nous honorerait. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Ce PLFSS a fait l’objet de cinq réunions en commission, dont une au cours de laquelle nous avons entendu les ministres pendant plus de trois heures. Nous avons tenu, au total, plus de dix heures de réunions. Nous avons étudié 260 amendements sur les cinquante-huit articles que compte ce projet. Nous en avons adopté soixante-dix-sept, dont soixante-trois des rapporteurs et six de Mme Clergeau dont je salue le travail – ses amendements concernant la branche famille ont été votés parce qu’ils étaient excellents.

M. Maxime Gremetz. Vous n’avez accepté aucun amendement du groupe communiste !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Les communistes n’étaient pas présents,…

M. Maxime Gremetz. Comment ? Retirez ces propos !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. …tout comme les socialistes pendant la moitié de ces séances !

M. Maxime Gremetz. Vous dormiez, monsieur le président Dubernard !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Vous n’étiez présents, monsieur Gremetz, que lors de la première séance, vous n’étiez là ni hier ni aujourd’hui, alors que nous nous étions réunis au titre de l’article 88 !

M. Maxime Gremetz. Je comprends que vous rêviez parce que vous dormiez, monsieur le président ! J’ai défendu toute une série d’amendements en commission !

Mme la présidente. Monsieur Gremetz, vous pourrez vous expliquer tout à l’heure !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Monsieur Gremetz, nous savons ce que vous pensez !

N’oublions pas non plus le travail important des rapporteurs qui ont auditionné un grand nombre de personnes.

Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, je serais blessé au fond du cœur si nous devions retourner en commission pour examiner à nouveau ce texte !

Mme la présidente. Dans les explications de vote, la parole est à M. Philippe Vitel, pour le groupe de l’UMP.

M. Philippe Vitel. Non, monsieur Bapt, vous ne nous avez pas convaincus de retourner en commission. Je vous connaissais plus percutant. Ce soir, à l’heure de l’apéritif, vous m’avez semblé assez light.

M. Gaëtan Gorce. On parle de santé publique !

M. Philippe Vitel. Vos propos manquaient un peu de piquant, de kémia ! Toujours la même litanie, aucune prospective, aucune proposition, et, surtout, aucune cohérence.

L’ONDAM serait discutable ? Pour nous, il est rigoureux, réaliste et cohérent, comme celui de 2005.

La politique du médicament serait inadaptée ? En être à six boîtes de génériques sur dix boîtes de médicaments, c’est plutôt une bonne nouvelle. Vous avez souligné les bons résultats pour les antibiotiques. Poursuivons l’effort pour les autres classes, le résultat sera au bout.

Les déficits seraient abyssaux ? Vous avez toujours cette manie d’entretenir la confusion entre le déficit de l’assurance maladie et celui des quatre branches. M. Bertrand vient d’expliquer que l’on ne pouvait pas discuter aujourd’hui du déficit de la branche retraite,…

M. Jean-Marie Le Guen. Il y aurait des déficits vertueux ?

M. le ministre de la santé et des solidarités. Justifiés !

M. Philippe Vitel. …qui est dû à des mesures très appréciées par ceux qui se sentaient jusqu’à présent floués. Cela vous permet d’ignorer les bons résultats obtenus par la branche assurance maladie. Je crois donc que nous sommes sur la bonne voie.

Les prévisions seraient insincères ? Dans toute prévision, il y a une part d’inconnu. Si vous avez une boule de cristal, pourquoi ne l’avez-vous pas utilisée en 2001 et en 2002 ? (« Très bien ! » sur divers bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Le Gouvernement serait dur avec les pauvres et doux avec les riches ? Ça vous plaît de nous le ressortir à chaque discussion, mais l’aide à l’acquisition d’une couverture complémentaire est vraiment une très bonne nouvelle pour ceux qui ne peuvent pas se la payer.

M. Jean-Marie Le Guen. C’est surtout l’aide à l’ISF qui est intéressante !

M. Philippe Vitel. Quatre millions de Français sont heureux, je crois, de l’aide que nous leur apportons.

Ce que j’ai un peu moins apprécié, monsieur Bapt, ce sont les critiques envers vos confrères. C’est assez laid pour le médecin praticien que je connais, que j’apprécie, et qui, comme moi, je pense, a vu leurs difficultés. Pendant huit ans, leurs honoraires ont été totalement gelés (« Tout à fait ! » sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire), et ils ont très mal vécu les augmentations de charges qu’à profusion vous leur avez imposées pendant les cinq années malheureuses où vous étiez au pouvoir. Peut-être étiez-vous le seul vertueux. Vous avez beaucoup de chance de n’avoir pas souffert, mais je pense que vous êtes un cas assez unique.

En ce qui concerne les objectifs d’ONDAM et le parallèle entre public et privé, vous m’avez rappelé la vision que M. Gremetz a développée hier soir. Qu’il s’agisse de la tarification à l’activité ou du rôle des MIGAC et du fonds de modernisation des établissements publics et privés, vous ne faites malheureusement pas la part des choses. Vous restez dans vos imprécisions, dans vos mythes, et vous n’arrivez pas à nous convaincre.

Par conséquent, en dépit de tout le plaisir que nous avons à travailler en commission, nous n’avons absolument pas envie d’y retourner et nous ne voterons pas cette motion de procédure. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Préel, pour le groupe UDF.

M. Jean-Luc Préel. Ce débat est très attendu par tous nos concitoyens. Ce projet de loi sert en effet à financer la politique familiale, les retraites et la santé. Il est donc important d’en débattre.

Monsieur le ministre, j’ai été assez critique hier envers votre projet de loi, et j’ai regretté que vous n’ayez pas été là tout à l’heure pour répondre vous-même aux différentes questions que j’ai posées. La situation est effectivement un peu difficile. Les recettes prévues pour 2006 me semblent surestimées, les dépenses sous-estimées, et le déficit sera sans doute supérieur à ce qui est indiqué dans le texte.

J’ai entendu différents collègues expliquer qu’il ne fallait pas faire de confusion entre les branches. Le déficit de 11,9 milliards en 2004 a été qualifié d’historique, et tout le monde constate aujourd’hui que le déficit sera de 12,9 milliards en 2005 pour l’ensemble des branches. Le déficit de l’assurance maladie a été réduit d’à peine 3 milliards, avec des recettes nouvelles de 4,6 milliards – l’exploit n’est pas considérable, mais nous en prenons acte.

Vous n’avez pas répondu non plus sur le taux de T2A dans les hôpitaux en 2006, mais nous aurons sans doute l’occasion d’y revenir d’ici à vendredi, ni sur la prise en compte des reports de charges pour les établissements. Qu’en sera-t-il de la convergence entre les établissements publics et les établissements privés, de la prise en compte des honoraires des médecins dans les cliniques et de la revalorisation des salaires des personnels ?

Sur le FFIPSA, M. Censi a expliqué qu’il avait eu des apaisements, pas nous. À sa création, le déficit était de l’ordre de 3,2 milliards. En 2005, il est de l’ordre de 2 milliards, et, pour 2006, on prévoit la même chose. On a donc besoin d’un financement de 7 milliards, et nous aimerions savoir comment il sera abondé par l’État. C’est un vrai problème, et, pour l’instant, nous ne sommes pas vraiment rassurés.

M. Yves Censi. Vous n’avez pas travaillé votre sujet !

M. Jean-Luc Préel. Il est prévu effectivement une avance de trésorerie de 7 milliards, mais comment les emprunts seront-ils financés.

M. Yves Censi. Nous vous l’avons expliqué !

M. Jean-Luc Préel. Non, je n’ai pas eu d’explication sur cette avance de trésorerie, et j’espère que nous en aurons une au cours des débats.

(M. Yves Bur remplace Mme Paulette Guinchard au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. YVES BUR,
vice-président

M. Jean-Luc Préel. S’agissant de l’aide au financement des complémentaires, vous nous avez dit il y a quelques instants, monsieur le ministre, que vous n’étiez pas satisfait du nombre de personnes qui en avaient bénéficié.

M. le ministre de la santé et des solidarités. J’ai dit qu’on devait faire mieux !

M. Jean-Luc Préel. Vous n’avez pas suivi la bonne méthode. Du temps où nous étions dans l’opposition, RPR et UDF associés, avec notamment Bernard Accoyer et Pierre Morange, nous proposions une aide personnalisée à la santé pour lisser l’effet de seuil. Le Gouvernement n’a pas choisi cette solution, et je le regrette, car une aide personnalisée à la santé, comme l’aide personnalisée au logement, inversement proportionnelle au revenu, permet ce lissage.

Quant aux retraites, une revalorisation de 1,8 % ne correspond pas à l’inflation, qui est de 2,2 % pour les douze derniers mois. Je n’ai pas eu de réponse sur ce point.

Dernier problème, auquel sera très sensible le rapporteur pour avis de la commission des finances, les soultes des régimes spéciaux. Quand vous reviendrez à votre banc, monsieur Bur, vous m’expliquerez comment seront financées les soultes. Est-on sur une bonne pente ? N’aurait-il pas été préférable de mettre les régimes spéciaux en extinction pour assurer l’avenir ?

Il n’est pas nécessaire de retourner en commission. Nous aurons l’occasion dans les prochains jours de discuter de tous ces problèmes, et, je l’espère, d’avoir du ministre et des rapporteurs les précisions nécessaires.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour le groupe socialiste.

M. Jean-Marie Le Guen. La présentation des comptes dans les premiers articles du projet de loi est une innovation bienvenue de la loi organique. Nous avons indiscutablement les moyens de travailler, à condition de le vouloir politiquement et de demander des explications au Gouvernement. Ces explications, aujourd’hui, nous ne les avons pas.

Nous connaissons les chiffres de 2004, nous sommes déjà dans une grande incertitude pour 2005. Pour 2006, les comptes qui nous sont présentés, que ce soient les ONDAM ou les comptes d’équilibre, sont très largement insatisfaisants du point de vue de la seule rigueur intellectuelle et, sur d’autres comptes comme le FFIPSA ou le FSV, nous ne savons rien. Alors qu’il s’agit tout de même de chiffres fondamentaux, nous ne savons pas quelles sont les intentions du Gouvernement.

Si nous avions la volonté d’exercer pleinement nos prérogatives – cela vaut pour la majorité aujourd’hui, cela peut valoir pour d’autres demain –, si notre travail était à la hauteur des quelques instruments sur lesquels nous avons progressé, je parle de la LOLF, nous aurions des exigences beaucoup plus grandes et cela suffirait à justifier un retour en commission.

Justifierait également un retour en commission la question des 18 euros. Nous n’avons pas de réponses, et l’argument du ticket modérateur n’est pas de nature à nous satisfaire.

Je voudrais le dire de façon assez simple mais en même temps assez solennelle, monsieur le ministre, Jean-François Mattei n’était pas un ministre d’un gouvernement de gauche, et c’est votre majorité – vous étiez peut-être parlementaire à l’époque – qui a voté les ONDAM de 2002, 2003, et 2004, avec les résultats financiers que nous allons sanctionner. Les fameuses courbes dont vous parlez ne sont pas naturelles, c’étaient les courbes des envolées lyriques des premières années Mattei, des premières années du gouvernement Raffarin, au moment où le credo, en matière de relations avec les médecins, était : « allons-y largement sans plus discuter ». En 2002, vous avez donné plus de 700 millions d’euros aux médecins généralistes sans poser par exemple le problème de la permanence des gardes. Vous pensiez que ce serait largement compensé par le recours aux génériques. La Cour des comptes a montré que cela a rapporté 50 millions à l’époque. En 2003, ce fut l’année des spécialistes. On a dépensé larga manu 500 millions d’euros, sans avancer par exemple sur la maîtrise des dépassements. Pour les médicaments, vous disiez à l’époque : innovons, libérons, déréglementons, faisons confiance, il faut faire rentrer cette innovation technique qu’est le médicament à l’intérieur de notre système de santé et nous aurons des résultats sanitaires et économiques de plus grande qualité. Aujourd’hui, vous êtes obligés de revenir sur cette politique, pour des raisons financières d’abord, mais aussi parce que, à l’évidence, elle ne correspondait pas à la réalité. Elle a été sanctionnée.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Vous faisiez pareil !

M. Jean-Marie Le Guen. Non,…

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Presque !

M. Jean-Marie Le Guen. Certes, la dernière année, nous avons instauré une taxe, mais chacun d’entre nous, y compris ceux qui l’avaient votée, considérait que c’était une mauvaise manière. Ce n’est pas ainsi que nous gérerons les relations avec l’industrie du médicament.

Lors du débat sur la loi d’août 2004, j’ai demandé au Gouvernement de traiter avec courage la question du médicament dans la dépense de santé, de mettre en œuvre une politique structurante plutôt que de recourir à la taxe qui est la plus mauvaise des mesures.

Enfin, je souhaite demander solennellement à M. le ministre de ne pas accepter que dorénavant les messages sanitaires concernant la lutte contre l’alcoolisme soient rédigés avec l’aval des distributeurs. La santé publique ne peut pas être à ce point bafouée ! C’est une question fondamentale. Il y va de la crédibilité de la politique de santé publique de notre pays, et peut-être même de celle du Gouvernement.

M. Richard Mallié. Comment va-t-il voter ?

M. Jean-Marie Le Guen. C’est un préalable à notre discussion. Le Gouvernement aura besoin de toute son autorité parce que ce ne sera pas facile au Sénat – je vous rappelle qu’il n’y aura qu’une lecture. La position que le Gouvernement adoptera sera par conséquent tout à fait décisive.

C’est la raison pour laquelle, en attendant de connaître la position du Gouvernement, je demande que ce texte soit renvoyé en commission et j’appuie la motion défendue par M. Gérard Bapt.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.

M. Maxime Gremetz. Monsieur le ministre, on vous a sans doute rapporté les critiques et les propositions que j’ai formulées en défendant une motion de procédure.

J’ignore si vous avez lu les Échos,

M. le ministre de la santé et des solidarités. Vos lectures sont toujours inattendues !

M. Maxime Gremetz. …mais une page entière de ce journal – page dont je vous conseille la lecture – est consacrée à plusieurs avis défavorables à votre projet.

Selon ce journal, la Mutualité française, qui représente 98 % des mutuelles, a appelé les députés à « ne pas prendre la responsabilité d’amorcer ce désengagement profond de l’assurance maladie » et les caisses nationales d’assurance maladie et vieillesse – CNAM et CNAV – et l’ACOSS – la banque de la sécurité sociale – ont également émis un avis défavorable sur le texte.

Vous pensez peut-être que nous sommes opposés à ce texte parce que nous sommes dans l’opposition. Mais eux, ils n’y sont pas et pourtant ils donnent un avis défavorable !

Lorsque autant de professionnels de la sécurité sociale critiquent ce budget, la moindre des choses serait de renvoyer le texte en commission et de les entendre pour connaître leur avis.

M. Jacques Domergue, rapporteur pour l’assurance maladie et les accidents du travail. Nous n’avons pas la même analyse !

M. Maxime Gremetz. Pourtant, tous ces gens, plus nous, ça fait du monde ! Sans oublier les 75 % de Françaises et de Français qui ne croient pas au succès de la réforme ! C’est comme pour le vote du 29 mai, je vous l’avais dit, et vous n’avez pas voulu le croire !

Toujours dans les Échos, on peut lire que seul un médecin sur trois croit à l’efficacité de la réforme. Ce n’est pas nous qui le disons ! Vous devriez vous interroger !

Vous dites que la réforme n’a de chance d’aboutir que si la majorité des Françaises et des Français est partie prenante et souhaite sa réussite et que les professionnels sont convaincus que c’est la bonne voie. Mais un tiers d’entre eux seulement croit au succès de la réforme ! Dois-je continuer ? Selon les Échos, toujours, les pharmaciens demandent au Gouvernement de revoir sa copie.

M. Jean-Marc Roubaud. Ils ont raison ! (Sourires sur les bancs de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Maxime Gremetz. Alors retournons en commission !

Si tous, médecins, pharmaciens, organisations syndicales…

M. Jean-Marc Roubaud. Parti communiste !

M. Maxime Gremetz. Évidemment, mais pas seulement. Je le mets en dernier parce que nous, nous écoutons !

Si tout le monde demande au Gouvernement de revoir sa copie, il devrait le faire et revoir sa réforme. Certes il faut une réforme – nous l’avons dit et nous vous avons fait des propositions – ,mais pas celle qu’on nous propose.

Enfin, contrairement à ce qu’a dit le ministre hier – je tiens les données à sa disposition – au début des années 80, la prise en charge par la couverture de base était bien de 80 % ; elle était tombée à 76,1 % en 1990 et n’atteignait plus que 75,8 % en 2003.

Les déremboursements ou le forfait hospitalier portent atteinte au principe de base de la sécurité sociale selon lequel l’accès aux soins doit être le même pour tous. (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Ce n’est pas du blabla ! Tout ce que je dis est vérifiable. Mais, comme tous les faibles, faute d’arguments à opposer, vous vociférez. Quand vous allez devoir vous colleter avec vos électeurs, je vous souhaite bien du plaisir !

Qui disait que la baisse du taux de remboursement est un non-sens tant cela s’apparente à un simple transfert entre gestionnaires de l’assurance maladie de base vers les organismes complémentaires, l’assuré étant prié de payer des cotisations toujours plus élevées ? Xavier Bertrand, le 29 juin 2004.

M. le président. Monsieur Gremetz, il faut conclure.

M. Maxime Gremetz. Avec les 18 euros, vous rompez définitivement avec le principe de la sécurité sociale car les affections de longue durée ont toujours été remboursées à 100 % !

M. le ministre de la santé et des solidarités. C’est toujours le cas !

M. Maxime Gremetz. Nous y reviendrons avec l’examen des amendements.

En tout cas, il n’est toujours pas question de nouveaux financements de la sécurité sociale, car vous ne voulez pas aborder cette question.

M. le président. Je mets aux voix la motion de renvoi en commission.

(La motion de renvoi en commission n’est pas adoptée.)

Rappel au règlement

M. Maxime Gremetz. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz, pour un rappel au règlement.

M. Maxime Gremetz. Monsieur le président de la commission des affaires culturelles,…

M. Richard Mallié. Sur quel article ?

M. Maxime Gremetz. Si vous voulez perdre du temps, nous en perdrons cette nuit. Je suis en très bonne forme et nous pourrons aller très tard !

M. le ministre de la santé et des solidarités. Vous êtes en effet en bonne santé !

M. Maxime Gremetz. Oui, parce que je ne vois jamais un médecin !

M. le ministre de la santé et des solidarités. Avez-vous choisi un médecin traitant ?

M. Maxime Gremetz. Oui, bien sûr, M. Douste-Blazy,…

M. le ministre de la santé et des solidarités. Alors vous êtes entre de bonnes mains !

M. Maxime Gremetz. …mais il a refusé ! Tant pis ! J’en ai choisi un autre, excellent : Mme Guiral !

M. le président. Monsieur Gremetz, revenez à votre rappel au règlement !

M. Maxime Gremetz. M. le ministre m’interpelle !

M. le président. Ne l’écoutez pas !

M. Maxime Gremetz. Je dois écouter un ministre de la République ! C’est mon rôle !

M. le président. Poursuivez.

M. Maxime Gremetz. Monsieur le président de la commission des affaires culturelles, comme pouvez-vous dire que nous n’étions pas en commission alors que nous avons défendu tous nos amendements ?

M. Jacques Domergue, rapporteur pour l’assurance maladie et les accidents du travail. Pas aujourd’hui !

M. Maxime Gremetz. Quoi, aujourd’hui ?...

En commission ?....

M. Paul-Henri Cugnenc. Faites des phrases simples, avec un sujet, un verbe, un complément, sinon on ne vous comprend pas !

M. Jacques Domergue, rapporteur pour l’assurance maladie et les accidents du travail. Vous n’étiez pas présent, monsieur Gremetz, lors des réunions de la commission convoquées en vertu de l’article 88 !

M. Maxime Gremetz. Monsieur le président de la commission, comment pouvez-vous dire que nous n’étions pas en commission, alors que nous avons défendu nos amendements, porté des jugements – le compte rendu des travaux le montrera – et expliqué clairement notre vote sur tous les articles.

Par ailleurs, nous ne déposons pas d’amendements à la dernière minute. Si certains le font, c’est pour présenter des amendements opportunistes ! Nous travaillons bien en amont, nous ne griffonnons pas des amendements sur un coin de table, pour faire bien. Dans ces conditions, je ne vois pas pourquoi je me déplacerai pour assister à des réunions convoquées au titre de l’article 88 !

Monsieur Dubernard, je vous demande donc de rappeler le travail que Mme Fraysse et moi-même avons fait en commission. Certes, vous dormiez à ce moment-là, mais ce n’est pas pour autant une raison pour dire des bêtises. (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Vous savez, monsieur Gremetz, toute l’estime et tout le respect que je vous porte. Je suis désolé si mes propos ont dépassé mes pensées et ont pu vous blesser, vous et surtout Mme Fraysse que j’estime plus encore plus.

M. Maxime Gremetz. Moi aussi !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Je me souviens que vous étiez absent aujourd’hui à la réunion qui s’est tenue en vertu de l’article 88, ainsi qu’à celle d’hier – mais vous avez expliqué pourquoi.

M. Maxime Gremetz. Hier ?

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. La commission s’est également réunie hier en vertu de l’article 88 ! Auparavant, nous avons eu trois autres réunions de commission. Des membres du groupe des député-e-s communistes et républicains pour qui j’ai la plus profonde estime m’ont indiqué que vous étiez assurément présent aux deux premières réunions, et vraisemblablement aussi à la troisième.

Je vais demander au secrétariat de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales de me fournir toutes les informations nécessaires. Si je me suis trompé, monsieur Gremetz, je vous demanderai de me pardonner.

M. Maxime Gremetz. C’est surtout pour Mme Fraysse !

M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Déclaration de l’urgence
d’un projet de loi

M. le président. J’ai reçu de M. le Premier ministre une lettre m’informant que le Gouvernement déclare l’urgence du projet de loi relatif à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers.

Acte est donné de cette communication.

Ordre du jour
de LA prochaine séance

M. le président. Ce soir, à vingt et une heures trente, deuxième séance publique :

Suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006, n° 2575 :

Rapport, n° 2609, tomes I à V, de MM. Jean-Pierre Door, Jacques Domergue, Mmes Cécile Gallez et Marie-Françoise Clergeau, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales,

Avis, n° 2610, de M. Yves Bur, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures.)