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Edition J.O. - débats de la séance

Assemblée nationale

Compte rendu
intégral

Première séance du mardi 17 janvier 2006

113e séance de la session ordinaire 2005-2006

PRÉSIDENCE DE M. MAURICE LEROY,
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

Questions orales sans débat

M. le président. L’ordre du jour appelle les questions orales sans débat.

Le texte de ces questions a été publié au Journal officiel (Débats parlementaires, questions du 17 janvier 2006)

suppression d'emplois à l'entreprise Trémois au Cateau dans le Nord

M. le président. La parole est à M. Christian Bataille, pour exposer sa question, n° 1363, relative à la suppression d'emplois à l'entreprise Trémois au Cateau dans le Nord.

M. Christian Bataille. Monsieur le président, madame la ministre déléguée au commerce extérieur, ma question s’adresse à M. le ministre délégué à l’industrie et concerne l’entreprise Trémois, du groupe Trèves, implantée au Cateau.

La direction de cette entreprise vient d’annoncer la suppression de 250 emplois. Cette annonce intervient d’une manière inattendue pour la population, et même pour le monde économique, trois ans seulement après que cette entreprise a bénéficié des aides de l’État, de la région, du conseil général du Nord et des collectivités locales pour se réinstaller sur un nouveau site performant, hors du centre ville.

Ces fonds représentaient une somme considérable – qu’on peut estimer à environ douze millions d’euros –, la plus grande part ayant été engagée lors de la réunion du comité interministériel d’aménagement du territoire de Limoges en 2001.

Pourtant, il y a deux ans, l’entreprise sollicitait encore l’État et la région pour obtenir des fonds complémentaires, abusant ainsi de la bonne foi de votre serviteur, soucieux d’aider une entreprise en plein développement, et de celle des élus et de l’administration. Les dirigeants de l’entreprise entendaient sans doute ainsi jouer avec les familles, l’emploi, ce que rien au monde ne peut justifier.

On peut s’interroger sur l’appréciation floue et mal justifiée fournie par la direction de l’entreprise sur sa situation économique et l’on ne peut que s’étonner d’apprendre son manque de rentabilité, trois ans après sa réinstallation effectuée dans un climat dynamique, pour ne pas dire euphorique. Une information vraiment laconique a en effet été apportée au personnel lors de la réunion du comité d’entreprise qui s’est déroulée à Reims, loin du Cateau et de ses employés, à savoir à plusieurs centaines de kilomètres.

Comment résumer ce comité d’entreprise ? On n’est pas sûr des perspectives, des marchés, on ne comprend pas complètement l’évolution mondiale, mais on n’est sûr que d’une chose : il faut supprimer des emplois ! Cette annonce de mise au chômage de plus de la moitié d’effectifs en général jeunes est catastrophique pour une ville moyenne comme le Cateau et pour ses environs.

Soutenue dans sa réinstallation par des fonds publics importants, le groupe Trèves, comme tout groupe dans sa situation, a des devoirs vis-à-vis de la collectivité et des citoyens.

Les salariés de l’entreprise Trémois attendent de l’État qu’il joue tout son rôle pour privilégier le développement industriel contre les profits boursiers en s’opposant au transfert des emplois locaux vers l’étranger, en l’occurrence la Slovaquie, selon la direction de Trèves, information sur laquelle nous devons rester prudents.

Ces salariés demandent au Gouvernement de bien vouloir lui indiquer les dispositions qu’il compte prendre pour répondre à leur attente et à celle de la population de ce secteur du Cambrésis et du département du Nord dont la situation de l’emploi ne cesse de se dégrader.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée au commerce extérieur.

Mme Christine Lagarde, ministre déléguée au commerce extérieur. Monsieur le député, l'usine Trémois, vous l’avez dit, fait partie du groupe familial Trèves, fondé en 1836.

Ce groupe est spécialisé dans la conception et la fabrication de composants et fonctions complètes pour l'habillage intérieur de véhicules, dont l’entreprise Trémois est un leader européen. Les difficultés du groupe et de l'unité du Cateau-Cambrésis s'inscrivent dans un contexte international difficile, dû notamment au prix des matières premières dérivées du pétrole et de l'acier. L'analyse des perspectives de marché conduit ce groupe à anticiper au maximum en termes d'emploi. Au cours du comité de groupe – et non du comité d’entreprise – du 23 novembre dernier a ainsi été annoncée la suppression de 700 postes en France entre mi-2006 et fin 2007, dont 200 à 250 pour le seul site du Cateau-Cambrésis.

L'usine Trémois au Cateau-Cambrésis est la plus importante entreprise de la ville et de son canton ; elle compte actuellement 450 salariés dont 50 intérimaires. Les perspectives de marché connues devraient assurer un plan de charge suffisant en 2006 pour les personnels sous contrat à durée indéterminée, tout en permettant à l'entreprise de se préparer à une chute brutale de la charge pour 2007.

Le site, vous l’avez rappelé, a changé d'implantation en 2002, passant du centre ville à la zone industrielle du Cateau-Cambrésis, accroissant ainsi sa superficie. Ce transfert et l'extension de l'usine ont nécessité un investissement de 14 millions d'euros et la création, à l’époque, de 60 emplois. Cette réimplantation a bénéficié, vous l’avez dit, d'un soutien général de tous les partenaires publics et d'aides publiques, en particulier de conventions FEDER, qui comprennent des clauses prévoyant leur reversement sous certaines conditions, notamment en cas de modification majeure de la nature ou des conditions de mise en œuvre de l'opération.

Croyez bien que les services de l'État vont rester extrêmement vigilants sur les engagements souscrits par les bénéficiaires et pourront, le cas échéant, appliquer ces clauses de restitution.

Le Gouvernement veillera également à ce que la culture de la concertation, comme la culture de l'information, qui ne sont pas récentes au sein du groupe Trèves, soient respectées. Au reste, le groupe a proposé aux syndicats de conclure un accord de méthode précisant le calendrier du plan de sauvegarde de l'emploi et les engagements minimum de la direction sur son contenu. Ainsi, le 6 décembre 2005, s'est tenue à Paris la première réunion de négociation dans cet esprit de concertation.

Les services de l'État sont pleinement mobilisés et veilleront à ce que les mesures d'accompagnement social proposées par le groupe Trèves aux salariés qui perdraient leur emploi soient de qualité. Ils veilleront également à ce que le groupe Trêves respecte son obligation de revitalisation des bassins d'emploi touchés par cette restructuration, en particulier celui du bassin du Cateau-Cambrésis. Enfin, en termes d'anticipation, à l'initiative du préfet de région, les services de l’État mènent actuellement une réflexion sectorielle sur la sous-traitance automobile dans ce bassin.

Les mesures d'accompagnement proportionnées seront examinées en fonction, d’une part, de l'étude d'impact lancée par le groupe Trèves sur la sous-traitance et, d’autre part, des résultats de l'étude économique régionale sur le bassin d'emploi.

M. le président. La parole est à M. Christian Bataille.

M. Christian Bataille. Madame la ministre, j’ai écouté avec beaucoup d’attention votre réponse, marquée du sceau de la bonne volonté. Mais tout ce contexte est celui du libéralisme. Ainsi va le libéralisme ! Un jour bien, et l’État paie ; un jour mal, les entreprises licencient et présentent des excuses comme des tartufes, tandis que les travailleurs et leurs familles en paient les conséquences sur leurs salaires, sur leurs carrières et sur leurs vies. C’est une répartition des rôles que nous voudrions modifier puisqu’elle implique que le monde du travail soit le jouet de politiques contradictoires et des caprices du moment, d’ailleurs pas toujours compréhensibles.

Ce n’est plus tolérable pour ceux qui veulent vivre et travailler au Cateau, dans le Catésis, que l’on appelle aussi le pays de Matisse et qui ne veut pas limiter sa spécialité à la production d’œuvres picturales immortelles.

perspectives de l'industrie du petit électroménager dans les Vosges

M. le président. La parole est à M. François Vannson, pour exposer sa question, n° 1386, relative aux perspectives de l'industrie du petit électroménager dans les Vosges.

M. François Vannson. Ma question s’adresse à M. le ministre délégué à l’industrie et concerne la situation inquiétante de l'industrie française du petit électroménager face à la concurrence asiatique.

Madame le ministre déléguée au commerce extérieur, nous trouvons régulièrement dans nos boîtes aux lettres – peut-être est-ce aussi votre cas – des prospectus publicitaires pour des appareils électroménagers à des prix défiant toute concurrence : les cafetières ou les grille-pain ne coûtent guère plus cher qu'un paquet de cigarettes et sont garantis trois ans.

Bien sûr, ces produits ne sont pas fabriqués en France mais dans les pays asiatiques, notamment en Chine où les coûts de main-d'œuvre sont dérisoirement bas. Les mêmes produits fabriqués en France coûtent quatre fois plus cher pour une garantie d’un an seulement.

Ainsi, dans ma circonscription, SEB emploie 450 personnes réparties en deux pôles : un pôle électroménager et un pôle thermique. Les estimations de chômage partiel pour 2006 sont alarmantes et font craindre aux salariés un nouveau plan social après ceux de 1997 et de 1998, qui se sont traduits par 175 suppressions d'emplois. En effet, le chômage partiel est estimé pour chaque salarié direct de production à 400 heures s'agissant du pôle électroménager et à 480 heures pour le pôle thermique, ce qui représente trois mois de travail en moins.

Madame le ministre, les Vosges et son industrie textile ont payé et continuent à payer un lourd tribut à la libéralisation des échanges. Nous sommes fiers de la réussite d'Airbus et de toutes les autres réussites industrielles. Mais depuis 1999, 14 000 emplois ont été perdus dans le secteur du textile et nous ne voulons pas que les industries qui nous restent subissent le même sort.

Ma question est simple : que compte faire le Gouvernement vis-à-vis de l’Europe et de l’OMC pour rétablir un équilibre avec les pays asiatiques et protéger ainsi nos industries et nos emplois ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée au commerce extérieur.

Mme Christine Lagarde, ministre déléguée au commerce extérieur. Monsieur le député, vous faites part de vos inquiétudes pour l’industrie française du petit électroménager, et plus particulièrement pour le groupe SEB, qui est implanté dans les Vosges.

Le secteur électroménager, au sens large, est effectivement soumis, comme la plupart des industries de biens de consommation, à une concurrence internationale très forte, en particulier de la Chine. En France, ce secteur représente encore 18 500 personnes, selon les chiffres de 2004 pour les entreprises de fabrication d’appareils domestiques.

SEB est une très belle entreprise française. Leader mondial du petit équipement domestique, elle employait, en 2004, 14 500 collaborateurs, dont un peu plus de la moitié en France, où elle dispose de treize sites de production industrielle. L’entreprise a déjà surmonté par le passé des périodes difficiles et elle a repris l’entreprise Moulinex, alors en difficulté, en faisant les choix et les ajustements nécessaires pour conserver sa compétitivité et son avance technologique.

Les services du ministre délégué à l’industrie suivent avec attention l’évolution de la situation du groupe. Le cabinet a reçu les dirigeants du groupe à plusieurs reprises. Selon l’entreprise, le comité de groupe sera informé le 24 janvier prochain des projets envisagés pour défendre son positionnement commercial et garantir ainsi la pérennité de la majorité des effectifs du groupe. M. François Loos ne manquera pas de vous tenir régulièrement et personnellement informé de l’évolution de la situation.

Votre question porte plus largement sur la politique industrielle menée pour conserver les positions françaises dans les secteurs les plus fortement exposés à la concurrence internationale, notamment celle des pays de l’Est. Dans certains cas – notamment lorsqu’il s’est agi de rétablir des quotas sur les importations de textile, ou, tout récemment encore, pour des procédures de dumping dans le secteur de la chaussure –, des mesures de protection peuvent s’appliquer, dans le respect de nos engagements internationaux tant du point de vue du droit communautaire que de celui de l’OMC. M. Loos s’est d’ailleurs personnellement impliqué sur ces dossiers en 2005 auprès de la Commission européenne, et je me suis également investie auprès de la Commission et au sein de l’Organisation mondiale du commerce.

Le protectionnisme n’est cependant pas la solution, comme l’histoire l’a clairement démontré. Aussi la politique du Gouvernement vise-t-elle d’abord à défendre ces secteurs en les aidant à s’adapter, en développant leurs efforts de recherche et de création et leur avance technologie par rapport aux pays producteurs concurrents à moindre coût de main-d’œuvre. Le renforcement du crédit d’impôt recherche en loi de finances 2006 et les pôles de compétitivité répondent à cet objectif en matière de recherche et développement.

M. Loos a également soutenu l’élargissement du crédit d’impôt en faveur de la création industrielle, qui était auparavant réservé aux seuls secteurs du textile, de l’habillement et du cuir. La loi de finances rectificative pour 2005 en a étendu le bénéfice aux industries de main-d’œuvre dont la liste, définie par arrêté, devrait inclure le secteur du petit électroménager.

M. le président. La parole est à M. François Vannson.

M. François Vannson. Je vous remercie pour cette réponse, madame la ministre. Permettez-moi néanmoins d’insister particulièrement sur les mesures de protection. S’il est vrai que défendre une réelle politique de protectionnisme est aujourd’hui dénué de sens, il n’en est pas moins important de conserver la possibilité de prendre des mesures pour faire face à la différence entre les coûts salariaux des pays émergents et ceux de nos démocraties socialement très avancées. Le déséquilibre est tel qu’on ne voit pas comment y remédier sans mettre en place un minimum de règles. J’attends donc du Gouvernement qu’il se montre très offensif dans ce domaine : il y va de l’avenir de notre industrie et de nos emplois, mais aussi de l’innovation et de la recherche, car si demain nous n’avons plus d’industrie il nous sera impossible de demeurer offensifs en matière de recherche.

avenir de la filière de récupération textile

M. le président. La parole est à M. François Rochebloine, pour exposer sa question, n° 1369, relative à l’avenir de la filière de récupération textile.

M. François Rochebloine. Monsieur le président, madame la ministre déléguée au commerce extérieur, mes chers collègues, lors de la discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2005, la représentation nationale a été amenée à débattre de l’avenir de la filière de récupération textile, dont les difficultés sont désormais notoires. À la faveur des discussions autour de l’amendement, adopté par notre assemblée puis par le Sénat, visant à instituer une « contribution environnementale textile » de quelques centimes d’euros par article, vite baptisée « taxe Emmaüs », différentes interrogations ont pu être formulées, attestant qu’il existe là un vrai sujet de préoccupation, tant d’un point de vue économique et social que d’un point de vue environnemental.

Comment enrayer en effet la crise actuelle de la filière de récupération textile ? Cette crise se traduit déjà par l’abandon, dans certaines communes, de la collecte des vieux vêtements par des organismes d’insertion spécialisés, les entreprises n’étant pas en mesure de prendre le relais, toujours pour des motifs économiques.

Aujourd’hui, au-delà du secteur de l’insertion, des collectivités locales et leurs habitants s’interrogent sur cette situation nouvelle qui est complète contradiction avec les discours sur le tri sélectif et le développement durable.

Plusieurs explications ont été avancées : la baisse de la qualité des textiles récupérés, qui limite l’intérêt du réemploi, ou encore l’augmentation des coûts de collecte, de transformation et d’élimination. Les facteurs de baisse de la rentabilité économique de cette activité, s’ils devaient perdurer, poseraient à terme la question de la survie des entreprises et des associations, et ce faisant condamneraient une filière de recyclage et de valorisation, avec pour conséquence inévitable un transfert de volume sur les ordures ménagères.

On le voit, les données du problème se compliquent. Si j’admets volontiers que ce dossier doit faire l’objet d’une concertation approfondie avec l’ensemble des acteurs concernés – producteurs industriels, représentants de la distribution, structures d’insertion, collectivités locales –, il est néanmoins essentiel de ne pas perdre trop de temps, car il y a une certaine urgence à traiter un problème qui met en jeu plusieurs milliers d’emplois.

Certes, les difficultés du secteur du textile-habillement ont largement pesé dans le retrait de l’amendement relatif à la contribution spécifique du secteur textile lors de la seconde délibération demandée par le Gouvernement. Cependant, conscient de l’importance du problème, le ministre a pris l’engagement ferme de réunir dès ce mois de janvier un groupe de travail chargé de proposer un dispositif adapté dans les six mois.

Nous ne pouvons qu’encourager une telle démarche, sachant que la contribution environnementale textile proposée par Emmaüs France s’inspirait d’autres dispositifs en vigueur ou en plein essor et qui ont d’ores et déjà permis de pérenniser le financement de filières de recyclage et de valorisation de déchets.

Aussi, considérant les engagements pris par le Gouvernement, je souhaiterais savoir, madame la ministre, dans quelle direction vous entendez conduire les réflexions et faire porter les efforts en vue de l’obtention d’un dispositif compatible avec les différents intérêts en présence. Il est indispensable de ne pas laisser se dégrader davantage la situation de ce secteur : des mesures de soutien s’imposent.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée au commerce extérieur.

Mme Christine Lagarde, ministre déléguée au commerce extérieur. Monsieur le député, vous avez appelé l’attention du Gouvernement sur le financement du recyclage des textiles usagés, notamment par des entreprises d’insertion au premier rang desquelles figure Emmaüs.

La discussion budgétaire a donné lieu à des débats denses sur ce sujet, notamment lors de l’examen des amendements visant à instituer une taxe nouvelle sur les distributeurs de textiles afin de financer la collecte des produits textiles usagés. Cependant, il n’était pas possible de prendre une décision dès le projet de loi de finances pour 2006 pour des raisons tant de forme que de fond.

Sur la forme, à aucun moment l’ensemble des acteurs concernés n’ont été réunis pour évoquer le financement du recyclage des textiles. Prétendre taxer un secteur économique entier sans jamais en avoir rencontré préalablement les acteurs pour en débattre, c’est une démarche qui n’a plus grand-chose à voir, me semble-t-il, avec le principe qui veut que, dans une démocratie moderne, tous ceux qui sont concernés soient entendus.

Sur le fond, j’appelle votre attention sur deux points.

Tout d’abord, le secteur de l’industrie textile – tout comme celui de l’électroménager, évoqué dans la question précédente –, est actuellement l’un de ceux qui se battent le plus courageusement dans le contexte d’une concurrence mondiale accrue. Nous sommes, les uns et les autres, responsables de la préservation de nos activités dans tous les secteurs économiques et sur tous les territoires : ce n’est pas vous, monsieur le député, qui me contredirez. L’argument selon lequel l’industrie ne sera pas touchée car c’est la distribution qui est taxée ne tient pas : les distributeurs risquent en effet d’en répercuter le coût directement sur les producteurs, ce qui pourrait se traduire par de nouvelles suppressions d’emplois en France.

Ensuite, dans sa décision sur le projet de loi de finances pour 2006, le Conseil constitutionnel a réaffirmé fermement les conditions très strictes permettant l’affectation d’une taxe. En effet, aux termes de l’article 2 de la LOLF – notre nouvelle constitution budgétaire –, « les impositions de toute nature ne peuvent être directement affectées à un tiers qu’à raison des missions de service public confiées à lui et sous les réserves prévues par les articles 34, 36 et 51 ». Le Conseil constitutionnel confirme donc sa décision du 25 juillet 2001, qui disposait que « la loi ne peut affecter directement à un tiers des impositions de toutes natures qu’à raison des missions de service public confiées à lui ». Ces conditions n’étaient manifestement pas réunies pour affecter directement une taxe aux mouvements de solidarité concernés.

C’est pourquoi M. Jean-François Copé – que je ne représente pas ici, puisque je vous réponds au nom de Mme Olin – a pris l’engagement dans cet hémicycle, le 21 décembre dernier, de travailler en concertation avec tous les acteurs du secteur pour trouver la meilleure formule possible. Cet engagement sera tenu : M. Copé réunira très prochainement les différents acteurs économiques de la filière textile : producteurs, distributeurs, consommateurs et récupérateurs. Des parlementaires et des représentants des collectivités territoriales seront naturellement associés à ce groupe de travail, qui tiendra ses réunions dans les délais prévus.

M. le président. La parole est à M. François Rochebloine.

M. François Rochebloine. Je vous remercie pour les précisions que vous avez bien voulu apporter, madame la ministre. Je me permets toutefois de rappeler qu’en l’occurrence il ne s’agit pas d’une taxe, mais d’une « contribution environnementale textile », ce qui est sensiblement différent. De nombreuses filières, tels le verre, les pneus, les piles, les déchets d’équipements électriques et électroniques, font l’objet d’une reconnaissance de ce type. Je prends acte de la concertation prévue par M. Jean-François Copé. J’espère qu’elle aura lieu le plus rapidement possible et qu’une solution sera trouvée. N’oublions pas qu’avec Emmaüs, ce sont 2 000 emplois qui sont en jeu !

application de la convention fiscale
franco-allemande à l’entreprise Kaiser
à Phalsbourg en Moselle

M. le président. La parole est à M. Alain Marty, pour exposer sa question, n° 1383, relative à l’application de la convention fiscale franco-allemande à l’entreprise Kaiser à Phalsbourg en Moselle.

M. Alain Marty. Je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur la situation difficile dans laquelle se trouve actuellement l’entreprise de montage Kaiser, située à Phalsbourg, dans ma circonscription, au regard de l’interprétation de la convention fiscale franco-allemande du 21 juillet 1959 et plus particulièrement de l’interprétation de la règle dite « des 183 jours ».

Cette petite entreprise exerce une partie de son activité en Allemagne, où elle intervient sur de nombreux chantiers. En conséquence, ses salariés ont été envoyés en Allemagne pendant plusieurs années, alors que toutes les taxes et charges sociales étaient payées en France.

Or, le Trésor public allemand demande à cette société le paiement de la taxe sur les revenus et de la taxe de solidarité au titre des années 1999-2002, pour un montant total de 105 000 euros. Cela reviendrait à régler deux fois les mêmes taxes et risquerait d’aboutir à la mise en liquidation de l’entreprise.

La difficulté tient à ce que l’administration allemande inclut dans son décompte les week-ends et jours fériés, que ces salariés passaient pourtant en France – Phalsbourg est en effet proche de l’Allemagne. L’administration française, quant à elle, ne prend en compte que les jours travaillés, conformément aux préconisations de l’OCDE.

J’ai saisi à deux reprises M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie pour attirer son attention sur la situation précaire dans laquelle se trouve l’entreprise. En réponse, il m’a été conseillé de demander à celle-ci l’ouverture d’une procédure de concertation entre administrations telle que prévue à l’article 25 de la convention, ce qui a été fait le 25 août 2005.

Depuis ce jour, aucune réponse définitive ne lui a été donnée. L’administration allemande vient en revanche d’informer les responsables de l’entreprise qu’une saisie allait être effectuée au début de l’année 2006.

Le différend est important. Il est donc essentiel qu'une concertation entre les administrations fiscales française et allemande intervienne rapidement, d’autant qu’une deuxième entreprise, également située à Phalsbourg, m’a saisi pour les mêmes raisons. Quelles garanties d’une issue favorable à cette situation insupportable pouvez-vous apporter à ces petites entreprises qui contribuent au développement de l’emploi ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée au commerce extérieur.

Mme Christine Lagarde, ministre déléguée au commerce extérieur. Monsieur le député, la société française Thierry Kaiser a exercé, de 1999 à 2002, une partie de son activité de montage sur les chantiers allemands. Les salariés qui sont intervenus en Allemagne ont été imposés en France compte tenu du caractère temporaire de leurs missions. Or, en 2005, les services fiscaux allemands ont exigé, en vertu de l'article 13, paragraphe 4 de la convention franco-allemande du 21 juillet 1959, le paiement de l'impôt sur le revenu et de la taxe de solidarité allemands, considérant que ces salariés avaient passé, en tenant compte des week-ends, plus de 183 jours sur le territoire allemand et satisfaisaient ainsi l’une des règles de détermination de la résidence fiscale.

Afin de remédier à cette situation de double imposition, la société Thierry Kaiser a demandé, à la fin de l'été dernier, l'ouverture d'une procédure amiable auprès des services de Jean-François Copé. Ces derniers ont informé l'autorité compétente allemande de la situation en lui demandant la justification des redressements opérés. N’ayant pas reçu de réponse à ce jour, ils vont la relancer.

Par ailleurs, bien qu'une demande ait été effectuée en ce sens, la société n'a toujours pas communiqué aux services fiscaux les éléments précis leur permettant de vérifier le nombre exact de jours passés par les salariés concernés en France et en Allemagne. Elle doit donc faire diligence et fournir ces informations le plus rapidement possible.

En attendant de pouvoir disposer de l'ensemble de ces éléments et pour éviter de pénaliser l'entreprise Kaiser, je vous informe que le service en charge des procédures d'assistance internationale au recouvrement suspendra, jusqu'au terme de la procédure amiable, l'instruction de toute éventuelle demande, fût-elle de saisie, qui serait formulée par l'Allemagne en vue d'obtenir un recouvrement forcé.

M. le président. La parole est à M. Alain Marty.

M. Alain Marty. Je vérifierai avec l’entreprise que tous les éléments ont été effectivement transmis. Je vous remercie de cette décision de suspension, car il est toujours difficile pour une petite entreprise d’être prise entre deux administrations.

réglementation de l'indemnisation chômage des agents des collectivités territoriales

M. le président. La parole est à M. Patrick Beaudouin, pour exposer sa question, n° 1372, relative à la règlementation de l'indemnisation chômage des agents des collectivités territoriales.

M. Patrick Beaudouin. Monsieur le ministre de la fonction publique, je souhaite évoquer la question des indemnisations chômage versées à certaines catégories d'anciens agents par les collectivités territoriales.

Le récent projet de loi relatif au retour à l'emploi et au développement de l'emploi a pour but la valorisation du travail à travers des mécanismes d'intéressement. Outre les mesures d'accompagnement personnalisé, il renforce les contrôles des fraudes et des abus. Il semble en effet que des failles dans le régime de chômage de certains agents publics engendrent des abus.

Les agents des collectivités locales ont droit à une allocation d'assurance chômage dans les mêmes conditions que les salariés du secteur privé ; celles-ci sont prévues par le code du travail et obéissent aux clauses de la convention nationale du 1er janvier 2004 relative à l'aide au retour à l'emploi et à l'indemnisation du chômage. Le montant de l'allocation peut aller jusqu'à 75 % de la rémunération globale, primes et heures supplémentaires incluses, et la durée d'indemnisation varie en fonction du temps passé au sein de la collectivité et de l'âge au moment de la perte d'emploi. La collectivité est liée par ces dispositions et ne peut ni refuser ni interrompre de sa propre initiative le versement des allocations. Si des doutes existent quant à la réalité de la recherche d'emploi de l'agent indemnisé, elle doit solliciter le directeur départemental du travail afin qu'il effectue les contrôles nécessaires. Mais ce contrôle est limité car complexe. C’est la première source d’abus.

Pour bénéficier du chômage, les agents doivent être inscrits comme demandeurs d'emploi, être âgés de moins de soixante ans, être à la recherche effective et permanente d'un emploi et n'avoir pas perdu volontairement le précédent. Toutefois, les agents qui refusent le renouvellement de leur contrat de travail ou qui démissionnent peuvent avoir droit aux allocations chômage dans deux situations : lorsque le contrat proposé n'est pas strictement identique au précédent, en termes d'heures de travail ou de salaire, y compris lorsque les modifications sont favorables au salarié ; lorsque la situation de chômage se prolonge au-delà de trois mois. Ces cas d'indemnisation, très « prisés » par certains agents non titulaires de la fonction publique territoriale ou par des contractuels venant à y travailler, constituent la deuxième source d’abus. Ils me semblent contestables, car même si la perte d'emploi est à l'initiative de l'agent, l'employeur se trouve obligé de supporter les conséquences financières de ce choix personnel. J'ai pu le constater dans ma commune, comme ont pu s’en étonner les maires de l’intercommunalité dont je suis le président, qui rassemble vingt communes et représente près de 800 000 personnes.

Sans remettre en cause le fondement de ces indemnisations, quelles mesures le Gouvernement pourrait-il mettre en œuvre, d'une part, pour limiter ces abus qui salissent l'image d'une fonction publique dont chacun connaît par ailleurs la valeur et, d'autre part, pour mettre en place un contrôle plus efficient par les collectivités – et pour les collectivités – de l'effectivité de la recherche d'emploi des agents indemnisés ?

M. le président. La parole est à M. le ministre de la fonction publique.

M. Christian Jacob, ministre de la fonction publique. Monsieur le député, vous l’avez rappelé, les agents publics des collectivités territoriales involontairement privés d'emploi ont droit, conformément aux dispositions de l'article L. 351-12 du code du travail, à l'indemnisation du chômage dans les conditions de droit commun. Ce sont les collectivités territoriales qui assument, selon le régime dit de l'auto-assurance, la charge financière de l'allocation de leurs anciens agents, à la différence des employeurs du secteur privé qui relèvent obligatoirement de l'Assedic.

Les situations que vous venez d’évoquer ont fait l'objet d’une jurisprudence du Conseil d'État. Ainsi, si l'agent public refuse le renouvellement de son contrat pour un motif qui n'apparaît pas légitime, l'employeur public peut refuser l’indemnisation. Si l'agent démissionne pour un emploi dans le secteur privé, qu'il perd ensuite pour une raison qui n'est pas de son fait, à condition qu'il l’ait exercé durant plus de quatre-vingt-onze jours, la charge de son indemnisation revient à la collectivité si celle-ci l'a employé durant une période plus longue que le secteur privé.

Les salariés du secteur public comme ceux du secteur privé doivent bénéficier des mêmes droits à indemnisation. Les règles de coordination ont fait l'objet de nombreuses modifications pour les rendre plus équitables, notamment à l'égard des employeurs publics.

Cela étant, je reconnais qu’il demeure des lacunes. Mes services et moi-même sommes à votre disposition pour examiner les conditions dans lesquelles le système pourrait être encore amélioré.

M. le président. La parole est à M. Patrick Beaudouin.

M. Patrick Beaudouin. Monsieur le ministre, je compte sur vous et sur le ministre délégué aux collectivités territoriales pour approfondir la réflexion dans le cadre de la préparation du projet de loi portant réforme de la fonction publique territoriale, qui devrait être présenté prochainement au Parlement. Il me semble nécessaire de responsabiliser les différents acteurs de la fonction publique. Il y va de la crédibilité de cette dernière. Ce serait, de surcroît, un pas vers la modernisation du service public, que nous appelons tous de nos vœux.

indemnité de résidence
aux fonctionnaires des zones frontalières

M. le président. La parole est à M. Claude Birraux, pour exposer sa question, n° 1373, relative à l'indemnité de résidence aux fonctionnaires des zones frontalières.

M. Claude Birraux. Monsieur le ministre de la fonction publique, ma question porte sur la situation des fonctionnaires, qu'ils soient d'État ou territoriaux, en Haute-Savoie et plus précisément dans le Genevois français.

L'application des accords bilatéraux entre la Suisse et l’Union européenne depuis juin 2002 et la libre circulation au bénéfice exclusif des Helvètes depuis juin 2004 ont aggravé les disparités sur ce territoire. Le nombre de travailleurs frontaliers a franchi récemment le cap des 50 000, contre un peu plus de 30 000 en 2004. Le département de Haute-Savoie voit sa population augmenter d’environ 8 000 habitants par an, et le nombre de résidents helvétiques qui choisissent de se loger dans ce département, tout en continuant à travailler en Suisse, a atteint 15 000 depuis l’entrée en application des accords bilatéraux.

Vue de loin, cette situation pourrait sembler avantageuse, d'autant que le taux de chômage du département demeure l’un des plus faibles de France. Mais la conséquence de ce que je viens de décrire est une hausse considérable du prix du foncier, du coût de la construction et une vie chère. Dès lors comment les personnes travaillant en France et percevant des salaires français pourraient-elles vivre ? Certaines administrations n'ont plus de personnel stable : soit les affectations sont refusées, soit les demandes de mutation sont déposées dès l'affectation. Pour ne donner qu’un exemple, le commissariat de police d'Annemasse a vu quarante-trois de ses fonctionnaires quitter le service en trois ans !

Pour la fonction publique territoriale, les avantages en nature, comme le logement, sont strictement encadrés et la Cour des comptes appliquerait strictement les règles en vigueur. S’agissant de l'indemnité de résidence, l’un de vos prédécesseurs, monsieur le ministre, m’avait indiqué : « La règle veut que les agents affectés dans une commune faisant partie d'une unité urbaine au titre de l'INSEE bénéficient du taux applicable à la commune la plus favorisée de l'ensemble ». J'avais donc interrogé l'INSEE, qui m'avait précisé les modalités d'application du décret n° 85-1148, article 9, du 24 octobre 1985. Or, toujours selon l'INSEE, le Genevois français fait bien partie d'une agglomération urbaine de plus de 200 000 habitants, l'agglomération franco-suisse de Genève en comptant plus de 500 000. C’est d’ailleurs sous ce vocable qu’elle est connue de l’INSEE ainsi que dans les documents de la DATAR.

Dès lors, monsieur le ministre, que comptez-vous faire pour que les fonctionnaires d'État et territoriaux du Genevois français puissent bénéficier de l'indemnité de résidence ?

M. le président. La parole est à M. le ministre de la fonction publique.

M. Christian Jacob, ministre de la fonction publique. L'indemnité de résidence est un supplément de traitement attribué aux agents des trois fonctions publiques et dont le montant varie en fonction du lieu d'exercice du travail, selon une classification en trois zones. Ce zonage est réalisé en partie en fonction des critères de population. Dans la fonction publique d'État, 45 % des agents perçoivent l'indemnité de résidence, ce qui représente un coût significatif de l,4 milliard d’euros !

Ce dispositif coûteux ne répond pourtant pas à toutes les difficultés rencontrées en matière de logement. C'est pourquoi j'ai proposé aux partenaires sociaux, dans le volet social en cours de discussion dans le cadre des négociations sur le pouvoir d'achat, plusieurs mesures.

D’abord, l’amélioration de l'aide à l'installation des jeunes agents. Cette aide au déménagement, aujourd'hui distribuée dans les seules régions Île-de-France et Provence-Alpes-Côte d'azur, ferait l’objet d’une revalorisation de 20 % pour ces régions et serait étendue à toutes les autres régions de France.

L’obligation de mobilité des fonctionnaires les confronte à des difficultés importantes de trésorerie en cas de déménagement. Les deux mois ou trois mois de loyer qu’ils doivent verser en dépôt de garantie représentent un budget important. Une aide au financement de ce dépôt de garantie est à l’étude, qui consisterait en un prêt à taux zéro.

Afin d’optimiser le parc de réservations de logements locatifs, des instructions seront adressées aux préfets pour améliorer le suivi du contingent de logements sociaux réservés aux fonctionnaires.

Telles sont aujourd’hui les propositions que je peux vous faire, monsieur le député. Nous continuons à travailler sur le sujet, et je reste à votre disposition pour en discuter, tout en restant attentif aux coûts engendrés.

M. le président. La parole est à M. Claude Birraux.

M. Claude Birraux. Je vous remercie, monsieur le ministre, de rester ouvert aux préoccupations des fonctionnaires.

Vous proposez une revalorisation de l’indemnité de déménagement. Permettez-moi de vous dire que vous allez la payer plusieurs fois dans le cas des fonctionnaires de Haute-Savoie car, dès qu’ils se rendent compte du coût du logement, ils n’ont qu’un souhait – repartir – et ils signent tout de suite leur feuille de mutation. Le problème est vraiment prégnant.

Quant aux logements dédiés, on compte sur les doigts d’une main les opérations menées ces dernières années. Il faut vraiment mettre en place un plan massif, quitte à réserver tout un lot d’habitations aux fonctionnaires d’État ou territoriaux, en partenariat avec les collectivités. Ce n’est qu’à ce prix qu’elles pourront conserver leurs fonctionnaires car, faute d’un pouvoir d’achat suffisant, ceux-ci s’en vont.

La proximité de la Suisse rend les loyers inabordables. Jugez-en : quel est le fonctionnaire qui peut se permettre de louer un 55 mètres carrés 850 euros par mois, hors charges ?

revalorisation des honoraires pour gardes de nuit des pharmaciens

M. le président. La parole est à M. Philippe-Armand Martin, pour exposer sa question, n° 1382, relative à la revalorisation des honoraires pour gardes de nuit des pharmaciens.

M. Philippe-Armand Martin. Ma question, monsieur le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille, porte sur la non-revalorisation, depuis de nombreuses années, des honoraires des pharmaciens effectuant des gardes de nuit,

Il importe de rappeler que le coût d'une garde de nuit a triplé entre 1993 et aujourd'hui, alors que, dans le même temps, les tarifs facturés à la sécurité sociale sont demeurés identiques, à savoir 1,98 euro par ordonnance de dix-neuf heures trente à vingt et une heures et 3,96 euros par ordonnance de vingt et une heures à huit heures.

Vous conviendrez, monsieur le ministre, que cette rémunération est infime et comprendrez, dès lors, qu’elle suscite de légitimes revendications à la hausse de la part des pharmaciens. Elle apparaît d'autant plus infime que, à l'occasion des gardes de nuit, les pharmaciens doivent rémunérer leur personnel, ce qui entraîne d’importantes charges s'élevant entre 300 et 350 euros environ. De surcroît, à ces charges de personnel, il faut encore ajouter les charges de structures, sur lesquelles je ne m'étendrai pas.

Bien entendu, les gardes de nuit constituent un élément indispensable pour la santé publique dans la mesure où elles permettent aux Françaises et aux Français de disposer de médicaments pour se soigner dans les meilleurs délais. Pour autant, je considère qu’elles ne doivent pas constituer une charge économique pour les pharmaciens, lesquels doivent être justement rémunérés de leur travail. J'ajoute qu'avec un tel niveau de rémunération, elles apparaissent de plus en plus difficiles à mettre en œuvre, notamment en milieu rural. Ainsi, dans la circonscription où je suis élu, il est arrivé à plusieurs reprises que certains secteurs géographiques soient privés de pharmacie de garde, ce qui a obligé les patients à se déplacer vers le pôle urbain le plus proche.

La demande de revalorisation des gardes de nuit apparaît dès lors légitime et pleinement justifiée.

En conséquence, monsieur 1e ministre, je vous saurais gré de bien vouloir m'indiquer les mesures que le Gouvernement entend adopter pour revaloriser les gardes de nuit effectuées par les pharmaciens et assurer ainsi l'égalité des citoyens en matière d’accès aux soins en urgence de nuit.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur le député, vous avez parfaitement raison : le régime d’indemnisation des périodes de garde pour les pharmaciens était devenu tout à fait archaïque puisque les tarifs n’avaient pas été revalorisés depuis 1984. Sachez, monsieur le député, que Xavier Bertrand et moi-même avons pleinement conscience de cette anomalie et que les tarifs vont bientôt pouvoir être revalorisés.

L'article L. 5125-22 du code de la santé publique prévoit l'organisation de services de garde et d'urgence, réglée par les organisations représentatives de la profession dans le département ou, à défaut, par un arrêté préfectoral.

Les coûts spécifiques de ces gardes de nuit sont partiellement pris en compte dans le cadre de l'article 29 du tarif pharmaceutique national – TPN. Cet article prévoit, en effet, que des honoraires pour services d'urgence sont perçus lorsque les médicaments sont délivrés en dehors des heures normales d'ouverture d'une pharmacie, dans le cadre d'un service de garde ou d'urgence.

Comme je viens de le dire à l’instant, ces tarifs, qui n’ont pas été revalorisés depuis 1984, sont insuffisants. La dépense annuelle spécifique de rémunération des gardes s'élève à environ 11 millions d'euros, soit 13 euros par nuit pour 2 300 secteurs de garde.

Le Gouvernement a souhaité, lors des débats sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006, à la fois une meilleure cohérence géographique entre les gardes des médecins et des pharmaciens, et une revalorisation des tarifs.

Nous avons, par ailleurs, invité l'UNCAM à réfléchir sur ce sujet avec les syndicats de pharmaciens. Les discussions qu’ils ont menées ont abouti, le 6 janvier dernier, à un projet de protocole d'accord national relatif à la permanence pharmaceutique des soins : ce protocole prévoit qu'à compter du 15 avril 2006, le service de garde et d'urgence effectué par les pharmacies d'officine sera indemnisé à hauteur de 75 euros par nuit de garde, dimanche ou jour férié. Il propose aussi de réfléchir à une modification de l'article 29 du TPN ainsi qu’à une seconde revalorisation de ces tarifs à l'horizon 2007.

Le protocole est, bien sûr, conditionné à la nécessaire réorganisation des gardes.

Lors des discussions menées avec les syndicats de pharmaciens en novembre 2005, il a été décidé de modifier le décret de 2005 relatif à l'organisation de la permanence de soins pour intégrer un représentant des pharmaciens dans les commissions départementales chargées de l'organisation de la permanence des soins. Cela devrait permettre, comme vous l’avez souhaité, une meilleure cohérence de l'ensemble de la permanence de soins, pharmaciens et médecins et, en particulier, d’éviter que la pharmacie de garde soit trop éloignée du cabinet du médecin de garde.

M. le président. La parole est à M. Philippe-Armand Martin.

M. Philippe-Armand Martin. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse : son contenu satisfera à n’en pas douter les pharmaciens.

Il n'en demeure pas moins qu’une interrogation subsiste concernant la facturation des prestations effectuées pour les personnes ne disposant pas d'ordonnance. II faut savoir, monsieur le ministre, qu'il n'est pas rare, lors des gardes de nuit, que les pharmaciens soient sollicités par des personnes ne disposant pas de prescriptions médicales et qui leur demandent des médicaments de confort. Dans de pareils cas, les pharmaciens seront-ils autorisés, afin d’éviter les abus, à facturer les 7 ou 8 euros d'honoraires de garde prévus par l’accord qui vient d’être conclu ?

Enfin, je vous demanderai, monsieur le ministre, de bien vouloir publier l'arrêté ministériel permettant l'application de cet important accord dans les meilleurs délais.

financement des associations de soins
à domicile

M. le président. La parole est à M. Louis Cosyns, pour exposer sa question, n° 1377, relative au financement des associations de soins à domicile.

M. Louis Cosyns. Permettez-moi, monsieur le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille, de porter à votre attention les difficultés de trésorerie que rencontrent les services de soins à domicile, lesquels relèvent souvent de la loi de 1901.

Ces services de soins à domicile offrent une alternative à l'hospitalisation ou au placement en institution médico-sociale. Leur champ d'action a été élargi par un décret du 25 juin 2004 et leur objectif est de maintenir dans leur environnement familial et personnel les personnes âgées, handicapées et celles qui nécessitent des soins lourds.

Dans une circonscription du Cher comme la mienne, où la densité de la population est de vingt-cinq habitants au kilomètre carré et où les plus de soixante ans représentent une personne sur trois, le besoin de services sanitaires à domicile est de plus en plus ressenti. Les services de soins sont appelés à intervenir de plus en plus auprès des personnes en soins palliatifs ou souffrant du diabète ou d’autres pathologies nécessitant un suivi médical lourd puisque les communes ne disposent pas de structures d'hospitalisation à domicile. Les infirmières libérales sont dès lors plus souvent sollicitées par ces associations, ce qui entraîne, de facto, un surcroît de charge.

Le forfait de soins journalier pris entièrement en charge par l'assurance maladie permet le paiement des salaires des aides soignantes, des frais de fonctionnement – loyer, véhicules, assurance, chauffage, entre autres – et d’une partie des interventions des infirmières libérales.

Compte tenu du fait que l'activité des infirmières ne peut être évaluée précisément en début d'exercice, les associations essaient d'assumer dans tous les cas leurs obligations, au risque de voir leurs comptes devenir déficitaires. Encore faudrait-il qu'elles soient rassurées et qu’elles sachent si leurs déficits seront comblés par le CPAM dans un laps de temps plus court que celui retenu, à savoir en fin d'exercice.

C'est pourquoi, j’aimerais, monsieur le ministre, que vous me précisiez les mesures que vous entendez prendre pour que les associations de soins à domicile puissent exercer leurs missions dans de meilleures conditions.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur le député, les hasards du calendrier ont fait que j’étais hier à Sancoins, commune de votre circonscription, pour inaugurer un établissement d’hébergement de personnes âgées dépendantes gérant également un service de soins infirmiers à domicile. À la suite de la réunion que nous avons tenue, j’ai d’ailleurs décidé l’ouverture de cinq places supplémentaires de services de soins à domicile gérés par cet établissement.

Les services de soins infirmiers à domicile sont, en effet – j’ai pu le mesurer sur place –, un maillon indispensable des dispositifs mis en place pour permettre le maintien à domicile, dans de bonnes conditions, des personnes âgées malades ou en perte d'autonomie.

Le plan vieillissement et solidarités pour les années 2004, 2005, 2006 et 2007 prévoit un renforcement notable des services de soins infirmiers à domicile – SSIAD –, par l'ouverture de 17 000 nouvelles places en quatre ans. Cela portera ainsi, à l'horizon 2007, le nombre de places disponibles à 100 000 sur l'ensemble du territoire.

Vous avez eu raison, monsieur le député, de soulever les problèmes de trésorerie rencontrés par ces services, en particulier les années où des places supplémentaires sont créées.

En prenant mes fonctions, j’ai constaté que les budgets de ces services, comme ceux d’ailleurs des établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes, étaient notifiés très tardivement dans l’année, ce qui ne va pas sans soulever de graves difficultés de trésorerie pour les établissements comme pour les services de soins infirmiers à domicile.

C’est la raison pour laquelle j’ai pris des dispositions pour accélérer le calendrier de notification des budgets. Dans le meilleur des cas, ces derniers étaient notifiés en juillet, mais il n’était pas rare qu’ils le soient en automne ou même en fin d’année, de sorte que les établissements et les services n’avaient aucune visibilité financière. J’ai pris l’engagement solennel que tous les budgets seront notifiés cette année le 30 avril, afin que les établissements puissent mieux planifier leur activité.

J'ai, par ailleurs, demandé au Commissariat général du Plan de bien vouloir approfondir son premier rapport de prospective sur les besoins d'hébergement en établissement pour les personnes âgées dépendantes et les besoins en services à domicile.

Je souhaite en effet, qu’il étudie un scénario équilibré – celui du libre choix – qui permet le développement harmonieux de toutes les offres de services en faveur des personnes âgées dépendantes, depuis la maison de retraite médicalisée jusqu’aux structures d’hébergement temporaire et d’accueil de jour et, bien sûr, aux services de soins infirmiers à domicile. Ce rapport me sera présenté dans les toutes prochaines semaines.

Les services de soins à domicile interviennent auprès de personnes âgées généralement très dépendantes. Les soins dispensés par ces services sont de plus en plus lourds. Il est nécessaire de revoir leurs modalités de tarification, ainsi que leur articulation avec les autres formes de service comme l’hospitalisation à domicile. Les modalités de tarification vont dont être profondément rénovées. Les moyens des services de soins à domicile seront désormais alloués dans le cadre d’une dotation globale, de sorte que les services déconcentrés de l’État pourront tarifer ces services au coût réel de leurs charges et non plus au regard d’un forfait journalier, comme cela est encore actuellement le cas.

Le décret nécessaire à cette modification est actuellement en cours d’examen au Conseil d’État et sera donc publié prochainement.

J’ai également souhaité la mise en place d’un groupe de réflexion avec les fédérations concernées, pour améliorer l’articulation entre les interventions des services de soins infirmiers à domicile et l’hospitalisation à domicile, afin que les personnes âgées puissent être prises en charge, en respectant le principe de continuité.

L’important déficit de professionnels de santé, que vous m’avez signalé dans le département du Cher, est également vrai pour d’autres parties du territoire. C’est pourquoi le Gouvernement s’est engagé dans un processus de qualification des professionnels, pour permettre notamment l’obtention du diplôme professionnel d’aide soignant par l’ouverture de ce diplôme à la validation des acquis de l’expérience. C’est possible depuis le début de l’année 2005.

Je tiens à souligner, à cet égard, que, dans le cadre d’accords avec les organismes paritaires collecteurs agréés, l’État s’est engagé à soutenir financièrement l’accompagnement de plus de 9 000 salariés sur trois ans, pour qu’ils puissent obtenir ce diplôme d’aide soignant. Cet engagement financier représente plus de 22 millions d’euros.

Vous voyez donc, monsieur Cosyns, que le maintien à domicile dans de bonnes conditions des personnes âgées malades ou en perte d’autonomie est une des grandes priorités du Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. Louis Cosyns.

M. Louis Cosyns. Je voudrais vous remercier, monsieur le ministre, d’avoir consacré votre journée d’hier à la population du Cher – vous vous êtes en effet rendu à Bourges, à Saint-Amand et à Sancoins. Le monde médical et paramédical a apprécié votre visite.

Les cinq places, que vous avez débloquées hier, constituent un encouragement pour tous ceux qui gèrent ces services, et je voulais vous en remercier. Cela correspond à un besoin réel.

Votre réponse me satisfait pleinement. J’espère que, pour les structures d’autres départements, il en ira de même que pour celles du Cher.

convention d’objectifs et de gestion entre l’État et la CNAF

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Rolland, pour exposer sa question, n° 1385, relative à la convention d’objectifs et de gestion entre l’État et la CNAF.

M. Jean-Marie Rolland. Monsieur le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille, je voudrais revenir sur la mise en œuvre de la convention d’objectifs et de gestion signée récemment entre l’État et la Caisse nationale d’allocations familiales.

Les caisses d’allocations familiales et la CAF de l’Yonne en particulier, à laquelle vous avez rendu visite le 14 octobre dernier, soutiennent les collectivités locales et départementales dans leurs actions en direction de l’enfance et de la jeunesse, notamment par l’intermédiaire du fonds d’action sociale. C’est ainsi que sont financés les crèches, les centres de loisirs, permettant d’apporter une attractivité supplémentaire aux territoires ruraux, auxquels, vous le savez, je suis attaché.

Des incertitudes subsistent encore. L’évolution des critères de sélectivité pour la répartition des crédits accordés au titre du fonds national d’action sociale et les informations circulant sur une enquête de l’IGAS et de l’IGF sur l’utilisation des fonds en 2004 et 2005 inquiètent les élus de l’Yonne, qui craignent de ne pouvoir conserver dans le temps la qualité des prestations et des services pour lesquels ils se sont engagés.

J’espère que vous pourrez nous rassurer sur tous ces points.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur Jean-Marie Rolland, nous avons eu l’occasion d’évoquer, il y a quelques semaines, lors de ma visite à la caisse d’allocations familiales du département de l’Yonne ces questions extrêmement importantes.

J’ai, en effet, conclu avec la Caisse nationale d’allocations familiales une convention d’objectifs et de gestion, qui couvre les années 2005, 2006, 2007 et 2008.

Cette convention d’objectifs et de gestion traduit l’accord politique passé entre le Gouvernement et les partenaires sociaux gestionnaires de la Caisse nationale d’allocations familiales. Cet accord consiste à prévoir pour les quatre années à venir une augmentation des budgets d’action sociale des caisses d’allocations familiales, qui sera au total de 2,4 milliards d’euros. C’est une augmentation sans précédent, en valeur absolue, pour les budgets d’action sociale des caisses d’allocations familiales.

Nous voulons consacrer l’essentiel de cette augmentation à la création de nouvelles places de crèches. Nous savons parfaitement qu’au niveau national notre équipement en places de crèches est aujourd’hui très insuffisant. Nous avons besoin tant en milieu rural, pour favoriser l’attractivité des territoires ruraux, qu’en milieu urbain de nouvelles places de crèches.

Le but de cette convention d’objectifs et de gestion est de parvenir, au terme de sa montée en régime en 2008, à 72 000 places de crèches supplémentaires par rapport à 2002. Ce qui représentera presque un tiers de places de crèches en plus.

Nous allons accomplir cet effort car nous constatons que dans notre pays, où la natalité est la plus forte d’Europe continentale et où le taux d’activité des femmes est le plus élevé – 80 % des femmes âgées de vingt-cinq à quarante- neuf ans exercent une activité professionnelle –, la garde des petits enfants est la condition même du développement des familles.

Nous constatons que le choix dominant des familles est d’avoir deux revenus dans le couple, afin de créer les conditions du développement de la famille. Or, s’il n’y a pas de mode de garde pour les petits enfants, les projets familiaux seront largement entravés.

Monsieur Rolland, je voudrais vous assurer que cette convention d’objectifs et de gestion sera pleinement appliquée. Cela signifie d’abord une augmentation forte du nombre des contrats de petite enfance, ensuite le maintien et le renouvellement de tous les contrats temps libre conclus jusqu’à maintenant et, enfin, l’augmentation du nombre de contrats temps libre, en appliquant cette fois un principe de sélectivité. En effet, face à un effort aussi important en faveur des familles, nous devons appliquer des règles nous permettant de placer nos moyens là où les besoins sont les plus importants. Sinon, nous ne parviendrons pas à réaliser notre projet de développer aussi fortement le nombre de places de crèches.

Je tiens à vous assurer que cette convention d’objectifs et de gestion sera pleinement appliquée.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Rolland.

M. Jean-Marie Rolland. Monsieur le ministre, je tiens à vous remercier de votre réponse claire, précise et rassurante.

lutte contre l’épidémie de chikungunya
à la Réunion

M. le président. La parole est à Mme Huguette Bello, pour exposer sa question, n° 1371, relative à la lutte contre l’épidémie de chikungunya à la Réunion.

Mme Huguette Bello. Je souhaite, monsieur le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille, appeler à nouveau l’attention du Gouvernement sur l’importante épidémie de chikungunya qui sévit actuellement à la Réunion et qui concerne, selon toute vraisemblance, plusieurs dizaines de milliers de personnes.

Au cours de ces dernières semaines, le nombre de personnes atteintes par cette maladie virale transmise par les moustiques s’est considérablement accru, et on peut craindre, en raison des conditions climatiques de l’été austral, une accélération de la vitesse de contamination.

Face à cette évolution, le Gouvernement devrait renforcer les moyens d’intervention jusqu’ici sous-évalués et débloquer une enveloppe d’un million d’euros. Pouvez-vous nous confirmer cette décision ?

Campagnes de communication par voie de presse et amplification de la lutte antivectorielle sont les deux grands axes de cette nouvelle phase d’intervention.

Ainsi des conseils sont-ils prodigués à la population sur les moyens de se prémunir contre les piqûres de moustiques. Cette sensibilisation sera d’autant plus efficace que les différents produits répulsifs seront plus facilement accessibles à tous. Il est donc nécessaire, d’une part, que les produits soient disponibles en quantité suffisante dans toutes les communes de l’île et, d’autre part, que leur coût ne soit pas un obstacle, surtout pour les familles les plus modestes.

L’expérience de la commune du Port qui non seulement est intervenue régulièrement sur les sites à risques, mais encore a distribué gratuitement, avec le soutien d’un distributeur privé, 130 000 spirales anti-moustiques s’est révélée, de l’avis de tous, efficace. En effet, alors qu’elle était la plus touchée au début de l’épidémie, la commune du Port a pu désormais la contenir. L’amplification des opérations de démoustication est indispensable. Mais afin de prévenir tout risque pour la santé humaine et l’environnement, on doit augmenter encore la vigilance et la transparence sur les procédés et les produits utilisés. Les précisions du Gouvernement sur les deux axes de la protection sont d’autant plus attendues que la rentrée des classes se fera d’ici deux semaines.

II n’existe malheureusement aucun vaccin ni traitement médicamenteux spécifique contre le chikungunya. La prise en charge des personnes touchées par l’infection, notamment des plus faibles d’entre elles – les personnes âgées ou malades –, doit être améliorée. Il est, en effet, difficile et parfois impossible à un organisme déjà affaibli de supporter les fortes fièvres et les douleurs articulaires et musculaires intenses provoquées par le virus.

Comme dans toute crise épidémique, la transparence la plus grande est de rigueur. C’est pourquoi nous souhaitons que le rapport de la mission diligentée conjointement par les ministères de l’outre-mer et de la santé, en décembre dernier, bénéficie de la plus large diffusion.

Monsieur le ministre, il est devenu indispensable et urgent de renforcer les moyens pour enrayer l’épidémie actuelle de chikungunya, qui signifie la maladie des os brisés.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Madame Bello, l’épidémie de chikungunya qui sévit actuellement dans l’Océan indien est, en effet, extrêmement préoccupante. En effet, 7 200 cas ont été signalés à la Réunion et les dernières données font état de 1 100 contaminations rien que pour la semaine dernière.

Vous avez indiqué tout à l’heure, madame la députée, que le chikungunya était une maladie virale transmise par les moustiques. Elle se caractérise par de la fièvre, une fatigue générale et des douleurs musculaires et articulaires intenses qui peuvent persister pendant plusieurs semaines, voire plusieurs mois, et s’avérer particulièrement invalidantes.

Il en existe également des formes inapparentes. Cette maladie est dans l’ensemble bénigne et aucun cas mortel n’a été rapporté. Néanmoins, vingt cas de complications ont été identifiés.

Afin de suivre avec le plus d’attention possible cette évolution, la direction régionale des affaires sanitaires et sociales – DRASS – a mis en place avec le soutien de la cellule interrégionale d’épidémiologie – CIRE – un dispositif de surveillance de la maladie et de ses éventuelles complications.

En ce qui concerne l’aspect préventif, aucun traitement ou vaccin, vous l’avez rappelé, n’est aujourd’hui disponible. Dès lors, les actions de lutte contre cette maladie se concentrent sur la prévention et la protection des personnes. Le préfet de la Réunion conduit actuellement avec la DRASS un important plan de lutte contre la maladie. Ce plan de gestion de crise vise notamment deux priorités absolues.

La première est de lutter systématiquement contre les moustiques et, donc, la maladie. Le préfet et la DRASS ont déployé dix équipes d’intervention sur le terrain d’une vingtaine de personnes pour démoustiquer, sensibiliser et informer la population. Le préfet a notamment recouru aux moyens de l’armée pour constituer ces équipes.

Deuxième priorité : la communication auprès de la population sur la maladie – ses conséquences, les voies de contamination, les moyens individuels de protection – mais aussi sur la prévention et la manière dont chacun peut participer à la destruction des gîtes larvaires. Un numéro vert a été mis en place à cet effet : le 0800 110 000.

Le conseil général et les communes se sont mobilisés aux côtés de l’État pour lutter contre la prolifération des moustiques et assurer l’information de la population. Certaines collectivités – vous en avez citées – ont notamment agi pour améliorer la salubrité du territoire, en particulier pour éliminer les déchets, ce qui contribue efficacement à la suppression des gîtes larvaires.

Soyez-en assurée, madame la députée, le Gouvernement est mobilisé pour répondre à cette situation. Il a décidé de débloquer d’importants moyens tant financiers que d’expertise pour appuyer les actions de lutte contre la maladie.

Xavier Bertrand, ministre de la santé, et François Baroin, ministre de l’outre-mer, ont ainsi diligenté en décembre dernier une mission d’expertise technique commune de l’Institut de veille sanitaire, de l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail et de l’Institut de recherche pour le développement. Cette mission est coordonnée par un membre de l’Inspection générale des affaires sociales. Elle a procédé, sur place, durant la troisième semaine de décembre à une évaluation approfondie de la situation. Elle analyse actuellement les éventuelles mesures complémentaires qui s’avéreraient utiles et elle remettra son rapport fin janvier 2006.

Le Gouvernement avait déjà par deux fois accru les moyens du service de lutte antivectorielle de la DRASS en octobre et décembre derniers. Il a décidé en janvier de déléguer de nouveaux moyens pour acheter du matériel complémentaire et lancer de nouvelles opérations de communication en direction de la population. Ce sont ainsi 600 000 euros supplémentaires qui sont d’ores et déjà disponibles. Les personnels d’encadrement du service de lutte antivectorielle seront également renforcés avant la fin du mois. Les moyens de l’armée ont été mobilisés pour venir en aide aux équipes sur le terrain.

Par ailleurs le Gouvernement a mobilisé les meilleures capacités d’expertise publique. C’est ainsi que l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé a été associé au plan de communication à l’intention de la population. Un de ses experts nationaux est actuellement sur place cette semaine pour cela.

De plus, l’Institut de veille sanitaire publiera dans les jours qui viennent un document spécial de synthèse des connaissances et des observations les plus récentes sur la maladie, les voies de contamination et les moyens de protection. Ce document constituera un socle de référence pour toute communication sur la maladie, notamment pour ce qui est des messages à l’intention du grand public.

Le Gouvernement – et je réponds là directement à la fin de votre question, madame la députée – entend conduire son action en toute transparence envers les élus et la population. C’est ainsi que la communication se fait et se fera en toute transparence.

Face à une telle situation épidémique, la mobilisation de tous est effectivement requise dans un but commun de lutte contre la maladie. Je me félicite à cet égard de la très importante mobilisation de nombreux maires. De nombreux services municipaux se sont en effet associés aux actions de démoustication et de sensibilisation et d’information des citoyens.

M. le président. La parole est à Mme Huguette Bello.

Mme Huguette Bello. J’ai écouté avec beaucoup d’attention votre réponse, monsieur le ministre. Vous savez qu’à terme, 80 % de la population réunionnaise risque d’être atteinte par l’épidémie de chikungunya. Actuellement, la maladie représente 36 % des congés maladie. L’avenir nous dira si les moyens mis en œuvre par le Gouvernement sont à la hauteur de la gravité de la situation.

désenclavement ferroviaire, autoroutier
et routier des Alpes du Sud

M. le président. La parole est à M. Joël Giraud, pour exposer sa question, n° 1365, relative au désenclavement ferroviaire, autoroutier et routier des Alpes du Sud.

M. Joël Giraud. Monsieur le président, monsieur le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer, le comité de massif des Alpes – co-présidé par M. le préfet de région de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur et mon collègue de Savoie, Michel Bouvard – a, le 26 septembre 2005, à l’occasion du débat public sur la liaison Grenoble-Sisteron, adopté, sur ma proposition, une motion rappelant l’enclavement de la partie sud du massif et particulièrement du département des Hautes-Alpes, le seul en France classé en niveau IV d’inaccessibilité – ferroviaire, aérienne, autoroutière – par l’ex DATAR.

À l’heure actuelle, vous le savez, monsieur le ministre, deux grands projets structurants proposent d’améliorer cette accessibilité.

Le premier propose l’achèvement de l’autoroute A51 – d’un coût de 2,2 milliards d’euros dont 15 à 25 % à la charge du concessionnaire, soit 1, 6 à 1, 9 milliard d’euros à la charge des collectivités publiques – ou l’aménagement des actuelles RN 75 et 85.

Le second prévoit la réalisation d’un tunnel ferroviaire sous le Montgenèvre, d’un coût de 1,5 milliard d’euros dont 50 % de participation privée et 350 millions d’euros à la charge des collectivités de chaque État.

Le débat sur l’A51 a toujours été vif entre partisans d’un tracé ouest – col de la croix haute – et d’un tracé est – col Bayard – voire d’une solution routière, la réalisation d’un tunnel ferroviaire rassemblant de son côté un large consensus.

Aujourd’hui, et en l’absence de décision pendant des années, la situation est devenue suffisamment grave pour justifier que ce comité de massif demande qu’un plan global de désenclavement ferroviaire, autoroutier et routier des Alpes du sud soit mis en œuvre dans les délais les plus brefs.

Sur le plan ferroviaire, la ligne Grenoble-Gap ne permettant pas d’absorber des trafics lourds pour les grandes migrations touristiques et la conception de la gare TGV de Valence ne permettant pas de densifier l’accessibilité par la ligne Valence- Briançon – qui vient de surcroît de connaître des désordres considérables, les rails ayant cassé deux fois pendant les vacances de Noël –, seule la réalisation d’un tunnel ferroviaire sous le Montgenèvre peut permettre aux Hautes-Alpes d’accéder au réseau TGV, ce qui contribuerait, au passage, à la valorisation de la ligne classique de la Maurienne en Savoie par la mise en service de TGV Paris-Chambéry-Modane-Briançon-Gap. Sur le plan du trafic des marchandises, cet itinéraire sécuriserait le Lyon-Turin, dont il doit rester un axe complémentaire, en cas d’incident sur ce dernier et autoriserait le passage d’un certain nombre de trafics dédiés pour lesquels le détour par la vallée du Rhône ne se justifie pas. Le coût à la charge de la partie française – 350 millions d’euros – comme la géologie de la zone de percement rendent crédible cet ouvrage qui ne soulève aucune opposition du côté italien.

C’est pourquoi le comité de massif des Alpes demande que, conformément à la décision du sommet franco-italien de Périgueux de novembre 2001, le tunnel ferroviaire sous le Montgenèvre soit inclus dans le corridor 5 du réseau de transport européen – RTE – comme ouvrage complémentaire au Lyon-Turin et soit réalisé dans des délais rapprochés compte tenu de son faible coût.

Sur le plan autoroutier et routier, s’agissant de l’accessibilité de Paris au Briançonnais, la réalisation de la tranchée couverte sous le Montgenèvre – RN 94 – et du tunnel routier de Clavière – SS 24 en Italie – autorise une continuité autoroutière complète, sans traversée de village, entre Paris, Lyon et Briançon par l’autoroute A43, le tunnel du Fréjus et l’autoroute italienne A32.

En conséquence et conformément à la lettre que vous m’avez adressée, monsieur le ministre, le comité de massif demande la mise en place d’une signalisation autoroutière complète de la bifurcation de Coiranne – A43-A48 – à Briançon par le tunnel du Fréjus, assortie d’une information sur l’état du col du Lautaret dès cette bifurcation.

Pour autant, et compte tenu du caractère stratégique de la RN 91 – col du Lautaret – récemment départementalisée, il demande que l’État s’engage à financer au titre de la solidarité nationale le traitement des zones à risques naturels de l’itinéraire – glissement de séchilienne notamment.

S’agissant de l’accessibilité du sud de la France à cette zone, les deux projets autoroutiers de continuité de l’A51 prévoient la réalisation d’un axe La Bâtie Neuve-La Saulce entre la RN 94 et l’A51, axe concédé, qu’il soit inclus dans le tracé est ou réalisé en complément du tracé ouest. Cet axe est indispensable à l’accessibilité à la zone concentrant 70 % des lits touristiques des Hautes-Alpes et des Alpes-de-Haute-Provence et résout le problème de la traversée de Tallard et du carrefour avec la RN 85 qui génèrent des attentes de plus de trois heures en haute saison touristique. Il laisse toutefois de côté l’accès au Champsaur et au Valgaudemar depuis le sud en cas de réalisation de l’autoroute par l’ouest de Gap.

En conséquence, le comité de massif demande que soit réalisé prioritairement le prolongement de l’A51 à La Bâtie Neuve et propose que, quel que soit le tracé autoroutier retenu – décision qui vous appartient, monsieur le ministre –, cet axe soit prolongé jusqu’à la RN 85 au nord de Gap – col Bayard – afin de permettre, en plus de l’accès au Briançonnais, à l’Embrunais et à l’Ubaye, l’accès au Champsaur et au Valgaudemar depuis le sud ainsi que la continuité du réseau routier national sans traversée de la ville de Gap. Le comité de massif a aussi tenu à préciser que le gabarit de cet axe concédé peut être adapté, notamment dans la vallée de l’Avance aux contraintes environnementales des secteurs traversés.

En conclusion, le comité de massif des Alpes vous demande, monsieur le ministre, maintenant que la commission du débat public a rendu ses conclusions, et après que le Gouvernement aura fait un choix en ce qui concerne l’A51, qu’un CIACT se réunisse d’urgence sur la base de ces propositions.

D’autre part, l’essentiel des financements des infrastructures précitées faisant appel à une participation importante des collectivités territoriales, notamment de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, le comité de massif a demandé au Gouvernement de proposer à la représentation nationale la mise en place d’une taxe spéciale d’équipement, à l’instar de ce qui s’est fait en Savoie pour les Jeux Olympiques, au profit des collectivités territoriales afin de leur permettre de participer à ce financement sans grever leurs budgets.

À ce titre, je rappelle la proposition de loi déposée avec Sylvie Andrieux demandant la mise en place de cette taxe, dont le principe a été voté, y compris par l’UMP et l’UDF, au conseil régional de Provence-Alpes-Côte d’Azur, afin de financer les infrastructures ferroviaires liées au projet ITER dont la construction du tunnel ferroviaire sous le Montgenèvre – dans la mesure où le site d’ITER est traversé par la ligne SNCF Marseille–Briançon – est l’équipement prioritaire.

M. le président. La parole est à M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer.

M. Dominique Perben, ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Monsieur le député, vous avez soulevé de très nombreuses questions auxquelles je m’efforcerai de répondre en insistant sur quelques sujets qui me paraissent particulièrement importants.

Le projet d’une liaison ferroviaire reliant la région Provence-Alpes-Côte d’Azur à l’Italie, via le val de Durance et la traversée du Montgenèvre, fait l’objet d’études de trafic dans un cadre franco-italien par la commission intergouvernementale des Alpes du Sud.

Ces études prennent bien entendu en compte le projet Lyon-Turin. Vous avez à juste titre souhaité qu’il y ait une complémentarité entre ces différents projets ferroviaires. La réalisation de ce projet s’inscrit dans les réseaux transeuropéen de transports ; nous avons intérêt à nous inscrire dans une démarche qui sera soutenue par l’Union européenne.

Les premiers résultats d’un projet sous le Montgenèvre sont encore en cours de discussion mais démontrent un potentiel de trafic relativement limité tant pour les marchandises que pour les voyageurs. Mais tel est souvent le cas quand il s’agit d’apprécier l’intérêt d’un équipement qui n’existe pas encore.

À plus court terme – et cela rejoint un certain nombre de vos questions – il me paraîtrait intéressant d’améliorer les liaisons régionales et de prendre en compte les nouveaux besoins liés à l’installation d’ITER. C’est d’ailleurs un des axes de travail de RFF dans le cadre du projet de ligne nouvelle PACA, à la suite des attentes exprimées au cours du débat public. RFF lancera dès cette année des études sur ce point.

Le débat public, fort intéressant, sur la liaison entre Grenoble et Sisteron s’est achevé, vous l’avez rappelé, le 20 octobre 2005. Il a porté sur l’ensemble des scénarios d’aménagement envisageables et il a permis de décanter un certain nombre de sujets difficiles qui ont parfois donné lieu à polémique. Ce débat a été intéressant non seulement sur les perspectives autoroutières avec les deux grandes familles de tracés, mais aussi sur l’aménagement des routes existantes, la RN75 et la RN85.

Le bilan du président de la Commission nationale du débat public et le compte rendu du président de la commission particulière ont souligné à juste titre la qualité de ce débat et la richesse des arguments qui y ont été développés. Cette mobilisation importante devra être prise en compte. Le choix qui sera fait le moment venu s’appuiera sur ce matériau.

Par ailleurs, dans le cadre du contrat de plan actuel entre l’État et la région, près de 33 millions d’euros dont plus de 15 millions d’euros à la charge de l’État sont inscrits aux aménagements des routes nationales 85 et 91 dans votre département entre le volet de sécurisation des itinéraires alpins et le volet régional.

Les bilans qui pourront être réalisés à l’issue du contrat actuel devraient nous permettre assez vite d’envisager quelles infrastructures routières sont à réaliser en priorité. Il nous faut en effet refaire un travail de priorisation dans le cadre de la future génération des contrats de Plan. L’État comme la région PACA seront, je pense, disposés à s’engager dans cette voie.

Quant au système particulier de taxation que vous évoquez, je suis tout à fait prêt à y réfléchir. Mais il ne s’agit pas d’un sujet simple, vous le savez bien. Il faut nous donner la peine, les uns et les autres, d’évaluer les différentes dimensions d’une telle initiative avant d’en adopter le principe.

M. le président. La parole est à M. Joël Giraud.

M. Joël Giraud. Monsieur le ministre, je vous remercie tout d’abord pour votre réponse. Mais je tiens à préciser que les éléments dont vous disposez s’agissant du tunnel ferroviaire sous le Montgenèvre relèvent d’études anciennes, qui n’avaient pris en compte que les populations locales dans les facteurs de solvabilisation et non pas les flux touristiques. Cela pose évidemment un léger problème en termes de calcul du potentiel voyageurs. L’étude actuelle, dont le cahier des charges a été adopté, intègre ce dernier élément, ce qui peut changer totalement les choses. Je reste persuadé que l’un des éléments de solvabilisation des infrastructures dans ce pays est l’industrie touristique, surtout dans des zones frontalières comme la nôtre, où les flux sont surtout touristiques.

S’agissant de l’accès au val de Durance et ITER, il faut être bien conscient de la nécessité de globaliser l’ensemble des études et des réflexions. C’est la raison pour laquelle j’estime qu’une fois votre décision prise pour l’A 51, décision que nous respecterons quelle qu’elle soit, un CIACT s’impose pour réfléchir à un plan global de désenclavement ferroviaire, routier et autoroutier des Alpes du Sud, région qui le mérite bien tant elle est enclavée.

prolongement de l’A77 au sud de Nevers

M. le président. La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur, pour exposer sa question, n° 1366, relative au prolongement de l’A77 au sud de Nevers.

Mme Martine Carrillon-Couvreur. Monsieur le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer, depuis cinq ans, l’A77 est ouverte à la circulation entre Dordives et Nevers, ce qui a constitué pour notre département une formidable avancée et une solution à beaucoup de difficultés. Mais au sud de la préfecture de la Nièvre, il en va tout autrement : les crédits sont gelés depuis plusieurs années et les travaux sont abandonnés.

Pourtant ce tracé comporte un intérêt évident au niveau national car il permet de relier le pôle parisien au Massif central et représente une alternative face à l’accroissement du trafic sur l’axe majeur qu’est l’A6, sur laquelle le nombre d’accidents ne diminue pas. Son intérêt est aussi manifeste au niveau régional puisqu’il irrigue des bassins d’emploi importants, répartis sur trois régions – Rhône-Alpes, Auvergne, Bourgogne – et trois départements. Mais l’abandon des travaux compromet fortement le développement des activités dans ces zones. Or toutes les études démontrent que l’enclavement géographique constitue le principal frein à la dynamisation économique.

C’est la raison pour laquelle les forces politiques, économiques et citoyennes se mobilisent sur les trois départements de la Nièvre, de l’Allier et de la Loire, entre Nevers et Roanne. Elles se mobilisent car elles croient en l’avenir de leur région, idéalement située au cœur de la France, entre la métropole parisienne et le sud du pays. Toutes ces forces aujourd’hui rassemblées considèrent qu’au-delà des importantes réalisations effectuées par les collectivités territoriales – boucles à haut débit, aménagement des zones industrielles, amélioration du train, voies aériennes –, la reprise immédiate de l’aménagement de la RN7 à deux fois deux voies est aujourd’hui un impératif pour l’avenir de nos territoires.

Et cela ne doit pas se faire à l’horizon 2025, car il y a urgence, monsieur le ministre. Vos prédécesseurs l’avaient bien compris d’ailleurs, en faisant de cet axe un chantier prioritaire pour l’État. Or depuis 2002, tout a été abandonné, les crédits ont été gelés. Les travaux sur la portion d’autoroute aménagée n’ont même pas été achevés puisqu’il y a encore sur celle-ci des aires fermées par des panneaux de chantier.

Monsieur le ministre, comment comptez-vous redonner un caractère d’urgence aux travaux sur la RN7 afin qu’ils reprennent dans les mois qui viennent et puissent être achevés dans un délai raisonnable, à l’horizon 2012 ?

M. le président. La parole est à M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer.

M. Dominique Perben, ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Madame la députée, je n’ignore pas les enjeux très importants que représente l’aménagement à deux fois deux voies de l’axe constitué par la RN7 et la RN 82. Le Gouvernement a eu l’occasion de confirmer son intérêt pour ce dossier lors du CIADT de décembre 2003 et à nouveau lors du CIACT d’octobre 2005 en classant l’aménagement de la RN 82 entre la RN7 et Balbigny dans la liste des travaux prioritaires pour 2006.

Les études n’ont pas été abandonnées, bien au contraire. Pour ne pas perdre le bénéfice de la déclaration d’utilité publique, déjà ancienne, un certain nombre d’enquêtes parcellaires ont été menées pour achever les acquisitions foncières. Aujourd’hui, la maîtrise foncière de l’aménagement de la RN7 est totalement assurée.

Par ailleurs, l’Agence française pour le financement des infrastructures de transport apporte désormais les crédits nécessaires à la réalisation du programme spécifique d’accélération de l’achèvement de la RN7 : en 2005, elle a versé 35 millions d’euros, en donnant la priorité aux opérations les plus avancées. Les financements nécessaires à la réalisation de la déviation de La Pacaudière et Changy ont ainsi été mis en place dans leur quasi-totalité.

L’année 2006 devrait être marquée par une accélération de l’aménagement de cet axe. J’envisage ainsi de mettre en place les derniers financements pour la section Lapalisse-Saint-Prix, les crédits pour la poursuite des travaux sur La Pacaudière-Changy ainsi que pour la déviation nord de Moulins, les travaux ayant été engagés pour ces trois opérations.

Pour ce qui concerne l’aménagement de la RN 82 dans la Loire, 13 millions d’euros d’autorisations de programme ont été mis en place en octobre 2005 au titre du volet routier du contrat de Plan entre l’État et la région Rhône-Alpes. L’effort financier sera poursuivi en 2006 pour permettre la mise en service de la section comprise entre la RN7 et la déviation de Neulise à l’été 2006.

Le Gouvernement témoigne ainsi de sa volonté de terminer au plus vite les travaux d’amélioration de cet axe, qui, comme vous l’avez rappelé, est utile pour les régions traversées et représente une alternative à d’autres axes extrêmement engorgés.

M. le président. La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur.

Mme Martine Carrillon-Couvreur. Monsieur le ministre, je vous remercie pour votre réponse. Toutefois, les travaux que vous venez d’évoquer ne sont que la réalisation d’opérations qui auraient dû être achevées depuis longtemps et qui ont connu des retards.

Permettez-moi d’insister sur ce qu’il reste à faire : 150 kilomètres de voies doivent encore être aménagés jusqu’à Balbigny. La portion particulièrement importante à nos yeux est celle qui va de Nevers à Magny-Cours – site rassemblant plus d’un million de spectateurs à l’occasion du Grand prix de France. Ce site est fréquenté toute l’année, ce qui ne fait qu’augmenter la circulation sur cette liaison, aujourd’hui très empruntée. Il nous faut donc obtenir l’assurance que toutes les conditions de sécurité soient remplies et que toutes les industries puissent développer leurs activités, essentielles pour nos départements.

projet d’électrification de la ligne ferroviaire Paris-Troyes-Bâle

M. le président. La parole est à M. Gérard Menuel, pour exposer sa question, n° 1384, relative au projet d’électrification de la ligne ferroviaire Paris-Troyes-Bâle.

M. Gérard Menuel. Monsieur le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer, il y a cent cinquante ans, nous nous serions retrouvés pour inaugurer une nouvelle ligne internationale de voie ferrée, Paris-Troyes-Bâle. Mais aujourd’hui, ce sont les interrogations qui prévalent s’agissant de l’avenir de cette ligne. Le niveau de service semble se dégrader, en particulier en termes de régularité, et les retards, après une amélioration sensible, deviennent importants tant par leur nombre que par leur durée. L’électrification de la ligne a fait l’objet de nombreux débats, et l’État a même contractualisé avec la région Champagne-Ardenne, dans le cadre du quatrième contrat de Plan Etat-région, pour la portion champenoise. Toutefois, la mise en place du TGV-Est suscite de nombreux doutes et interrogations à propos de la qualité du service fourni, du caractère international de la ligne et de la volonté réelle de mettre en œuvre son électrification. Pour ne prendre qu’un exemple, je soulignerai que l’agglomération troyenne est le seul centre urbain de plus de 100 000 habitants du grand bassin parisien à ne pas être relié à la capitale par une desserte dont la pérennité soit assurée.

Quelles initiatives compte prendre le Gouvernement et quelles garanties entend-il apporter, dans le contexte actuel d’une offre ferroviaire en évolution dans notre région, afin de préserver le caractère international de la ligne et d’améliorer l’offre de services pour le fret et le trafic voyageurs ? Quel échéancier pouvez-vous nous donner pour la première phase d’électrification, sur la portion Gretz-Troyes ?

M. le président. La parole est à M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer.

M. Dominique Perben, ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Monsieur le député, je sais l’importance que vous attachez à juste titre à l’aménagement de la liaison Paris-Bâle. Sachez que l’électrification de la section entre Gretz et Troyes est inscrite dans le contrat de Plan que l’État a signé avec la région Champagne-Ardenne pour 2000-2006, pour un montant très important de 45 millions d’euros. S’agissant de la part de l’État, les crédits nécessaires sont mobilisés pour 2006. Les travaux préliminaires pourront donc être poursuivis à un rythme satisfaisant, sans que la contrainte financière ne vienne réduire cet engagement.

J’ai également saisi le président de la SNCF à ce sujet et je veux vous confirmer que des propositions ont été faites par cette entreprise pour qu’une solution à court terme soit apportée avec les conséquences positives que cela comporte en termes de confort, de régularité et de rapidité des trains. Il s’agit d’utiliser le plus rapidement possible un matériel bi-mode – électricité et diesel –, ce qui permettra d’obtenir une continuité des motrices sur l’ensemble de la voie et d’éviter les ruptures de charge. À brève échéance, donc, des améliorations seraient réalisées grâce à ce matériel moderne, et j’ai déjà eu l’occasion d’en parler avec vous-même, monsieur le député, ainsi qu’avec d’autres parlementaires dont les circonscriptions sont traversées par cette ligne. J’ai bon espoir que le nouveau dispositif sera mis en place rapidement.

M. le président. La parole est à M. Gérard Menuel.

M. Gérard Menuel. Monsieur le ministre, je vous remercie pour ces réponses concernant le court terme. Mais il reste à mobiliser toutes les énergies, au niveau des régions, des départements et des villes concernés, afin de disposer rapidement d’un échéancier précis des travaux d’électrification.

développement de l’usage de la bicyclette

M. le président. La parole est à M. Armand Jung, pour exposer sa question, n° 1368, relative au développement de l’usage de la bicyclette.

M. Armand Jung. Monsieur le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer, le vélo est certainement le moyen de transport le plus sous-estimé dans notre pays. Ce mode de déplacement, que l’on traite parfois avec ironie ou condescendance, présente pourtant des avantages non négligeables, tant économiques qu’écologiques, qu’il serait bon de mettre en valeur, surtout à un moment où la France est confrontée à d’importantes difficultés liées aux transports.

Les spécialistes du développement urbain et bon nombre de nos concitoyens reconnaissent bien volontiers les avantages du vélo. D’abord, c’est un moyen de transport silencieux et non polluant qui contribue à l’apaisement de nos villes, souvent trop bruyantes et embrumées par les dégagements nocifs des pots d’échappement. Ensuite, c’est un mode de déplacement peu coûteux, accessible aux budgets les plus modestes. Enfin, n’oublions pas que la pratique régulière du vélo permet de rester en forme, ce qui n’est pas rien. Or, malgré ces nombreux atouts et les efforts louables de certains départements et de certaines villes, force est de constater que la pratique du vélo stagne dans notre pays.

Dans un rapport remis au Premier ministre en février 2004, Mme Brigitte Le Brethon, députée du Calvados, a formulé diverses propositions visant à encourager le développement de la bicyclette en France. Les propositions de ma collègue rejoignent très largement celles que j’ai moi-même formulées dans une étude remise en avril 2002 à MM. Jean-Claude Gayssot et Yves Cochet, alors respectivement ministre de l’équipement, des transports et du logement et ministre de l’aménagement du territoire et de l’environnement.

L’objectif du rapport de Mme Le Brethon, tout comme le mien, était de formuler des propositions pour développer une véritable politique nationale en faveur du vélo. J’ai ainsi proposé d’affecter au vélo une partie, même infime, du budget des routes, de créer une délégation interministérielle placée sous l’autorité du Premier ministre, afin de permettre une plus grande coordination et une plus grande cohérence, ou encore d’instaurer dans notre pays une véritable culture du vélo, passant par des actions éducatives, sociales et culturelles. Je regrette, monsieur le ministre, que les gouvernements successifs soient restés sourds à mes propositions ainsi qu’à celles de Mme Le Brethon.

Du fait du peu d’intérêt de l’État pour le vélo, les villes et les départements sont amenés à suppléer son action en instaurant des stratégies de développement de ce mode de transport qui, je tiens à le souligner, portent leurs fruits. À cet égard, je citerai les exemples concluants de Strasbourg, de Grenoble ou encore de Paris, qui sont la preuve qu’en associant volonté et financements, les résultats peuvent être exemplaires.

Mais je veux aussi évoquer un problème majeur lié à la pratique du vélo, outre la météo souvent capricieuse en France comme c’est le cas aujourd’hui, celui des vols trop fréquents. Les statistiques montrent qu’il s’agit réellement d’un moyen de locomotion particulièrement facile à voler. Comme vous le savez, monsieur le ministre, plusieurs villes comme Strasbourg, Paris ou encore Toulouse ont mis en place un système de marquage qui permet de délivrer aux vélos une sorte de carte d’identité. Ainsi, en cas de vol, les vélos marqués ont davantage de chances d’être retrouvés et restitués. Néanmoins, malgré la sensibilisation citoyenne à cette démarche, il reste un problème conséquent dans la mesure où ces marquages n’ont aucune valeur juridique ou réglementaire, même s’ils constituent un faisceau d’indices en cas de différend sur la propriété.

Aussi, je vous demande, monsieur le ministre, de bien vouloir prendre un décret qui donnerait une valeur réglementaire au marquage du vélo. Un tel acte entraînerait forcément un enregistrement de tous les vélos marqués et constituerait une reconnaissance officielle de l’action exemplaire menée par les villes qui ont d’ores et déjà opté pour le marquage des vélos.

J’ai conscience que notre pays est confronté à de nombreuses difficultés sociales, économiques et environnementales. Néanmoins, relancer la politique en faveur du vélo serait un geste fort de votre part et permettrait de soutenir véritablement l’action des associations et des collectivités qui portent seules cette politique, sans aide de l’État, du moins pour le moment.

Monsieur le ministre, à un ancien Premier ministre de la République qui me demandait de lui soumettre des propositions simples, compréhensibles et peu onéreuses, j’ai répondu : « Monsieur le Premier ministre, relancez la politique en faveur du vélo ! »

M. le président. La parole est à M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer.

M. Dominique Perben, ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Monsieur le député, j’ai bien conscience de l’enjeu que représente le développement de la pratique du vélo, notamment au regard de la politique de déplacement au sein des agglomérations, qui constituera probablement l’un des sujets les plus difficiles, mais aussi les plus importants pour les politiques urbaines des dix prochaines années.

Il est bien clair que le développement des déplacements à vélo peut être un élément complémentaire d’une politique de développement judicieusement articulée. Je sais d’ailleurs que certaines agglomérations se sont résolument engagées dans cette démarche, après avoir observé d’ailleurs d’autres initiatives européennes, y compris de la partie nord de l’Europe qui, a priori, serait moins préparée, pour des raisons purement climatiques, à l’utilisation du vélo. Je pense en particulier à Munich, que j’ai connu il y a bien longtemps, et dont le centre-ville a radicalement changé aujourd’hui grâce à la mise en place d’une politique résolument ambitieuse et extrêmement dynamique dans ce domaine. Ces orientations sont tout à fait intéressantes et le rapport que Mme Le Brethon a remis au Premier ministre en mars 2004 propose un certain nombre de mesures.

Dans cette affaire, il faut bien comprendre quel peut être le rôle de l’État. Vous le savez, les politiques de développement urbain sont maintenant de l’entière compétence des autorités organisatrices ou des collectivités municipales. Pour autant, je pense que l’État peut apporter sa contribution au développement de l’usage de la bicyclette, notamment en traitant de tout ce qui freine son développement. C’est la raison pour laquelle, après en avoir discuté avec le groupe des autorités organisatrices de transport, j’ai décidé de mettre en place, comme cela avait été proposé par Mme Le Brethon, mais au sein de ma propre administration pour des raisons de simplicité, un responsable de ces questions, un « Monsieur Vélo » qui sera placé auprès du directeur général des transports et qui aura pour mission, en liaison notamment avec les collectivités territoriales, de travailler sur un certain nombre de questions.

Vous avez évoqué la protection des vélos contre le vol. On pourrait aussi parler de la nécessité d’aménager assez rapidement les voiries. Lorsqu’il y a une volonté d’aller de l’avant en matière d’utilisation de la bicyclette dans une agglomération, chacun sait que l’on bute très vite sur l’ampleur des travaux à mener en termes d’aménagement de voirie et de restructuration des réseaux. On arrive alors souvent à des solutions un peu hybrides qui n’apportent pas la sécurité nécessaire aux cyclistes.

Un autre sujet me paraît extrêmement important, celui de l’intermodalité avec les transports collectifs. Il est important de réfléchir à la possibilité de transporter un vélo dans une rame de tramway ou dans un wagon de la SNCF.

Je le répète, comme le souhaite Mme le Brethon dans son rapport, un « Monsieur Vélo » sera nommé d’ici à un mois. Il sera un pilote, un aiguillon et un interlocuteur pour tous ceux, collectivités locales mais aussi associations, qui sont très dynamiques dans ce secteur.

M. le président. La parole est à M. Armand Jung.

M. Armand Jung. Monsieur le ministre, je vous remercie pour vos précisions. Dès qu’un « Monsieur Vélo » sera nommé, je ne manquerai pas de lui soumettre des propositions extrêmement précises, d’autant qu’un consensus sur ces bancs est nécessaire sur un certain nombre de points.

application des règles de stationnement
des gens du voyage

M. le président. La parole est à Mme Geneviève Colot, pour exposer sa question, n° 1375, relative à l’application des règles de stationnement des gens du voyage.

Mme Geneviève Colot. Monsieur le ministre délégué aux collectivités territoriales, je souhaite vous interroger sur l’installation de certaines populations sur des terrains au mépris de la légalité et de toute règle d’urbanisme.

Les gens du voyage stationnent souvent sur des terrains de façon illicite et posent de graves problèmes aux municipalités. Les petites communes ne peuvent ni gérer la présence de ces personnes, ni assumer les conséquences financières de leur passage. De nombreux cas se sont produits dans ma circonscription. Les habitants sont excédés et les maires désemparés face à ce problème. La petite commune de Bouray-sur-Juine par exemple, a ainsi été envahie plus de dix semaines en 2005.

Ces mêmes populations se sédentarisent parfois sans aucun respect des lois : constructions illégales, acquisitions par ventes déguisées en donations, baux de quatre-vingt-dix-neuf ans et autres manipulations. Certes, la justice réagit, mais à son rythme, sans commune mesure avec le développement du problème et l’exécution de ces décisions se fait toujours attendre.

C’est la raison pour laquelle j’ai déposé une proposition de loi, votée ici à l’unanimité, mais à laquelle le Gouvernement s’est opposé, qui institue un droit de préemption sur des terrains en cas de donation entre personnes sans lien de parenté.

Je demande donc au Gouvernement si la commune d’Ollainville, par exemple, peut espérer voir les décisions de justice exécutées concernant ces dossiers. Plus généralement, le Gouvernement compte-t-il proposer aux élus locaux des moyens plus efficaces et réalistes pour faire respecter les lois d’urbanisme et de stationnement ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué aux collectivités territoriales.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales. Madame la députée, vous vous préoccupez de la multiplication, dans le département de l’Essonne, des occupations illicites de terrains par les gens du voyage, sujet sur lequel vous vous êtes entretenue à plusieurs reprises, tant avec Nicolas Sarkozy qu’avec moi-même.

Pour sanctionner les divers manquements au code de l’urbanisme que vous rappelez, il appartient aux maires concernés d’engager les actions en justice nécessaires afin que le tribunal prononce une condamnation de remise en état des lieux assortie d’un délai d’exécution, auquel cas le préfet accorde le concours de la force publique.

Dans votre département, le préfet apporte son soutien aux élus locaux chaque fois qu’ils sont confrontés à ce type de situation. En tout état de cause, une demande de ce type déposée par la commune d’Ollainville, comme par toute autre commune, serait étudiée avec toute l’attention requise. Il appartient ensuite au maire bénéficiaire d’une telle décision d’en assurer la mise en œuvre, au besoin avec le concours de l’État.

L’action des pouvoirs publics est cependant limitée par le développement des ventes, souvent déguisées en donations, de parcelles agricoles au profit de personnes appartenant à la communauté des gens du voyage.

Cette situation, dont on a parfaitement conscience, a conduit la SAFER à faire usage de son droit de préemption, qui ne peut toutefois suffire à éviter systématiquement un détournement de la procédure de donation.

Devant l’ampleur du phénomène, le procureur de la République a ouvert une enquête afin d’identifier les notaires qui pourraient être impliqués dans ce type de manipulations. Le résultat de ces investigations n’est pas encore connu.

Pour sa part, le ministère chargé de l’équipement s’est saisi du problème que constitue l’occupation des terrains privés au mépris de la règle qui subordonne à une autorisation du maire tout stationnement d’une caravane de plus de trois mois par an, consécutifs ou non. Les contrevenants ne peuvent cependant pas, en application de l’article 9 de la loi du 5 juillet 2000 relative à l’accueil et à l’habitat des gens du voyage, faire l’objet d’une expulsion lorsqu’ils stationnent sur des terrains qui leur appartiennent.

En revanche, la loi de mars 2003 relative à la sécurité intérieure a amélioré considérablement la procédure civile d’évacuation forcée, pour permettre aux communes et aux particuliers de lutter contre les occupations sauvages des terrains leur appartenant. La même loi a d’ailleurs créé une infraction pénale qui permet de réprimer l’installation illicite en réunion sur un terrain appartenant à autrui. Dès lors que le délit d’installation non autorisée par le propriétaire des lieux ou le titulaire du droit d’usage est caractérisé, son constat permet, sur une simple plainte, l’intervention gratuite et rapide des forces de l’ordre.

Ces mesures ne peuvent cependant pas s’appliquer au profit des communes qui n’ont pas encore réalisé leur aire d’accueil. Je tiens à souligner, madame la députée, parce que je m’en suis entretenu avec lui, toute l’attention que le préfet de l’Essonne et ses services portent aux installations sauvages des gens du voyage. Force est de constater qu’à ce jour, et en dépit de l’engagement des services de l’État pour accompagner les trente-quatre collectivités inscrites au schéma départemental d’accueil des gens du voyage, 25 % seulement des obligations ont été remplies alors que la date limite de dépôt des demandes de subvention de l’État est le 17 février 2007.

Or, vous le savez, seule la multiplication des aires pour offrir un nombre de places proche de celui fixé par le schéma départemental est susceptible de traiter très efficacement les problèmes. En outre, logiquement, la pénurie des équipements aggrave la pression exercée sur les plus petites communes qui n’ont pas la capacité de gérer les stationnements illégaux sur leur territoire et qui sont celles qui vous préoccupent. Il convient donc d’insister sur la nécessité pour les communes inscrites au schéma départemental de régulariser leur situation dans les meilleurs délais concernant notamment les terrains de grand passage, afin d’être en mesure de bénéficier de l’ensemble des dispositions que j’ai évoquées.

Exceptionnellement, faute d’avoir pu convaincre les élus d’accepter sur leur territoire la création d’une aire de grand passage, le préfet de l’Essonne a décidé, face à la nécessité, d’en installer une sur un terrain appartenant à l’État.

Pour donner sa pleine efficacité à la procédure d’évacuation forcée des résidences mobiles, il est désormais envisagé de réduire les délais d’intervention de la force publique. Le juge des référés disposerait d’un délai qui n’excède pas quarante-huit heures pour statuer sur toute demande d’évacuation présentée par un maire.

J’espère, madame la députée, que ces mesures seront de nature à répondre à vous légitimes préoccupations.

M. le président. La parole est à Mme Geneviève Colot.

Mme Geneviève Colot. Je vous remercie de ces précisions, monsieur le ministre, mais je me permets d’insister, compte tenu de l’acuité du problème posé par ces populations, comme l’a montré l’actualité récente. Malgré les avancées que vous avez soulignées, il reste beaucoup de progrès à accomplir pour régler cette question importante.

information sur les points
retirés au permis de conduire

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Hugon, pour exposer sa question, n° 1379, relative à l'information sur les points retirés au permis de conduire.

M. Jean-Yves Hugon. Monsieur le ministre, le 14 juillet 2002, le Président de la République a fait de la sécurité routière l’un des trois grands chantiers de son quinquennat. Ce combat passe certes par la prévention, mais aussi, hélas ! par la répression, même si elle est nécessaire. L'implantation sur notre territoire de 1 000 radars automatiques a été un élément particulièrement efficace de l’arsenal destiné à cette lutte.

Nombreux sont les automobilistes qui se sont vus infliger une amende pour excès de vitesse, amende le plus souvent accompagnée d'un retrait de points. Or les contrevenants connaissent de réelles difficultés – j’en ai moi-même fait l’expérience – à être informés du nombre de points qui leur sont retirés.

Monsieur le ministre, vous est-il possible de donner les instructions nécessaires aux services préfectoraux pour faciliter l’accès de nos concitoyens à une information qui les concerne personnellement ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué aux collectivités territoriales.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur le député, Nicolas Sarkozy, ministre d’État, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire, aurait vivement souhaité répondre à cette question certes personnelle, mais à résonance collective.

Vous soulignez les difficultés rencontrées par des automobilistes verbalisés pour excès de vitesse à être précisément informés du nombre de points restant sur leur permis de conduire.

Pour répondre à vos préoccupations, je vous précise que l'article 11 de l'ordonnance du 6 juin 2005 relative à la liberté d'accès aux documents administratifs et à la réutilisation des informations publiques a modifié les dispositions spécifiques du code de la route sur la communication des relevés intégraux des mentions relatives au permis de conduire enregistrées dans l'application réglementaire appelée Système national des permis de conduire, SNPC. En effet, désormais le titulaire du permis de conduire a droit à la communication d'une copie du relevé intégral des mentions le concernant. Monsieur le député, je puis vous assurer que les automobilistes sont en droit de demander la communication du relevé intégral des mentions relatives à leur permis de conduire sur lequel figure leur capital de points. Des instructions très claires relatives aux modalités de cette communication ont été données aux services préfectoraux pour répondre aux demandes qui leur seront faites.

Toutefois, et dans l'intérêt même des conducteurs concernés, des garde-fous ont été mis en place. Ainsi, la communication du relevé intégral suppose au préalable que les services des préfectures et des sous-préfectures aient pu s'assurer de l'identité du demandeur dans la mesure où il s'agit de renseignements communiqués à titre strictement personnel.

En conséquence, la communication des données repose sur trois principes.

Premièrement, aux termes de l'article L.225-4 du code de la route, le relevé intégral n'est communicable qu'au titulaire du permis, à son avocat ou à son mandataire ainsi qu'aux autorités expressément énumérées.

Deuxièmement, l’article L. 223-7 du même code dispose que « les informations relatives au nombre de points détenus par le titulaire d'un permis de conduire ne peuvent être collectées que par les autorités administratives et judiciaires qui doivent en connaître, à l'exclusion des employeurs, assureurs et toutes autres personnes physiques ou morales ». Il va de soi que l'administration qui détient ces informations, ne saurait les communiquer à d'autres personnes et autorités que celles prévues expressément par les dispositions du code de la route.

Troisièmement, l'article L. 225-8 du même code réprime de la peine prévue à l'article 781 du code de procédure pénale le fait, pour un tiers non autorisé, d'obtenir soit directement, soit indirectement, communication d'informations nominatives dont la divulgation n'est pas expressément prévue par le code de la route. Je précise que l’amende peut atteindre le montant assez dissuasif de 7 500 euros.

Je pense vous avoir apporté, monsieur le député, une réponse précise respectant le souci de transparence qui est le vôtre.

Je tiens à conclure en rappelant l'importance que le Gouvernement, et plus particulièrement le ministre d’État et le ministre de l’équipement, attache à poursuivre notre action vigoureuse en matière de sécurité routière. Les résultats particulièrement encourageants que nous enregistrons mois après mois nous incitent à ne pas relâcher nos efforts. Nos concitoyens sont eux aussi convaincus, au vu des résultats, qu’il faut persévérer.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Hugon.

M. Jean-Yves Hugon. Je vous remercie de votre réponse très précise, monsieur le ministre, qui me satisfait pleinement. Ma question était accessoirement personnelle, mais elle concerne tous nos concitoyens qui se voient infliger des retraits de point.

Les personnes qui utilisent fréquemment leur véhicule, comme les chauffeurs de taxi et les conducteurs de poids lourds, sont plus exposées que les autres et il est très important pour elles de savoir où elles en sont.

perspectives de réforme
de la coopération intercommunale

M. le président. La parole est à M. Thierry Lazaro, pour exposer sa question, n° 1381, relative aux perspectives de réforme de la coopération intercommunale.

M. Thierry Lazaro. Monsieur le ministre, le récent rapport de la Cour des Comptes, rendu public le 23 novembre dernier par son président Philippe Séguin, a mis en évidence les difficultés que nous connaissons à faire vivre l'intercommunalité en France.

Nos collègues députés, très souvent titulaires de mandats exécutifs locaux, seront d'accord pour constater en effet que nos communes adhèrent à de multiples structures intercommunales aux compétences aussi nombreuses que diverses : SIVOM, SIVU, SIRIOM pour le ramassage et l’incinération des ordures ménagères, syndicats mixtes, communautés urbaines, de communes ou d’agglomération, syndicats d’agglomération nouvelle, et j’en passe. Nous devons admettre, ce que je fais souvent en tant que maire, que les élus ont parfois du mal à appréhender le fonctionnement de la coopération intercommunal, et plus encore les administrés qui se demandent souvent en toute bonne foi qui fait quoi et dans quelles conditions.

Des avancées législatives ont pourtant eu lieu et elles ont permis d’entrevoir une intercommunalité de projet reposant sur l'affirmation d'une identité territoriale plutôt qu'une simple intercommunalité de moyens. Toutefois, le rapport de la Cour des comptes aboutit à un constat préoccupant, s’agissant de la relation que les élus locaux sont censés entretenir avec les populations mais aussi de nos institutions.

Les structures intercommunales existantes, et notamment celles qui disposent de l'autonomie financière, n'ont pu en effet intégrer la totalité des compétences gérées par les anciennes structures. Elles ne se sont pas non plus développées à l'intérieur de périmètres cohérents caractéristiques de leur identité culturelle, géographique, environnementale et correspondant à leur bassin de vie. Je n'évoquerai pas davantage les difficultés qu'elles ont à entrevoir une stratégie pour mettre en œuvre leurs compétences fiscales. Je relève enfin que le foisonnement de structures diverses, constitue, dans de nombreux cas, une source d'opacité et de coût, pour ne pas dire de surcoût.

Monsieur le ministre, le Gouvernement envisage-t-il une adaptation de notre législation pour rendre définitivement cohérent, comme c’est la cas ailleurs en Europe, notre paysage intercommunal jusqu'à présent caractérisé par un enchevêtrement de structures de coopération et une dilution des compétences ?

Le travail des élus locaux sur le terrain, leur participation aux efforts entrepris en faveur de la cohésion nationale mais aussi les aspirations de chacun à l'amélioration de notre démocratie locale exigent de nouvelles mesures. L'une des mesures phares préconisées par le rapport « Séguin » consiste à confier aux préfets le soin d'établir dans chaque département un schéma de simplification de la coopération intercommunale, soumis à la commission départementale de coopération intercommunale. Cette première mesure va assurément dans le bon sens et elle conduira à mon sens à la suppression de structures inopérantes dont les compétences pourraient être reprises par les structures à fiscalité propre.

Redéfinition des périmètres, redistribution des compétences, mais aussi nouvelle dénomination des EPCI, telles sont en effet les mesures qui peuvent être envisagées. Aux dénominations législatives de communauté de communes, d'agglomération ou de communautés urbaines, ne pourrait-on pas y substituer par exemple, quelle que soit d'ailleurs l'importance de l'entité concernée, la nouvelle dénomination de « communauté territoriale » ?

L'intercommunalité est également confrontée à un problème d'identité et de lisibilité qu'il va bien falloir prendre en compte. Je vous remercie de la réponse que vous voudrez bien nous apporter.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué aux collectivités territoriales.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur le député, vous avez évoqué un sujet d’actualité très important. Nous en avons débattu, notamment à l’occasion du congrès de l’Association des maires. Si je ne partage pas totalement votre pessimisme, je comprends et partage certaines de vos interrogations.

Le constat est clair : en quinze ans, l’intercommunalité à fiscalité propre s’est à l’évidence imposée dans le paysage administratif. À l’origine, elle paraissait très prometteuse pour parvenir à une nouvelle structuration du territoire.

Vous avez évoqué plusieurs rapports importants qui ont signalé des dysfonctionnements, notamment le rapport du Conseil économique et social, celui, tout récent, de la Cour des comptes, celui d’Hervé Mariton, et celui, plus récent encore, de Patrick Beaudouin et de Philippe Pemezec. Ces rapports ont souligné les limites ou le caractère inachevé de la mise en place de l’intercommunalité.

Plusieurs réponses ont d’ores et déjà été apportées par le ministère de l’intérieur.

Des instructions très précises, signées par le ministre d’État ou par moi-même, ont été adressées aux préfets : elles portent notamment sur quatre améliorations auxquelles procéder dans les meilleurs délais et dans le cadre d’un dialogue efficace et constructif avec les élus locaux. Ces améliorations consistent dans un effort de cohérence en matière de périmètres, dans la définition de l’intérêt communautaire – j’ai accordé un délai supplémentaire d’un an, qui s’achèvera le 18 août 2006 et n’ira pas au-delà –, dans la clarification des relations financières entre les établissements publics et les communes membres et dans des transferts de patrimoine et, j’insiste sur ce dernier point, de personnels, afin d’éviter toute redondance et de dégager des économies d’échelle. Je rappellerai que la fonction publique communale est passée, si je me souviens bien, ces trois dernières années, de 1,041 million à 1,096 million de personnes et que les personnels employés par les établissements publics sont passés durant la même période de 116 000 à 162 000 : ces chiffres révèlent un gonflement manifeste des effectifs des deux fonctions publiques communale et intercommunale, alors qu’il était légitime de s’attendre au phénomène inverse.

Les préfets élaboreront pour la fin du premier semestre 2006 un schéma d’orientation de l’intercommunalité dans leur département, schéma qui affichera les ambitions de simplification à mettre en œuvre à court terme. Je souhaite, monsieur le député, que les préfets travaillent étroitement avec les élus membres des CDCI. Pour le démontrer, je participerai moi-même à une de ces commissions dans quelques jours à Angers.

En ce qui concerne les éventuelles modifications législatives, je ne veux, là encore, aucune autocensure. Toutes les dispositions qui apparaîtront indispensables pour rationaliser le mouvement intercommunal devront être recensées – je vous remercie d’y contribuer – et évaluées afin d’alimenter, si cela se révèle nécessaire, une initiative du Gouvernement ou du Parlement dans ce domaine.

Je souhaite, pour ma part, engager plusieurs réflexions.

La première, de nature politique, vise à garantir un fonctionnement plus démocratique des EPCI à fiscalité propre. Pour ce faire, il faut tout d’abord faciliter l’accès des citoyens à l’information sur la fiscalité cumulée des communes et des EPCI lorsque ceux-ci sont à fiscalité additionnelle. Ce point n’a pas constitué un sujet de préoccupation majeur lors de débat qui a précédé les élections municipales de 2001 : je suis persuadé qu’il n’en sera pas de même en 2008 pour le citoyen usager et électeur contribuable. Il faut également mettre en place une présentation consolidée par fonction, qui apporte une vue budgétaire d’ensemble, c’est-à-dire relative à toutes les dépenses et à toutes les recettes de la communauté et des communes membres.

La deuxième réflexion, de nature institutionnelle, vise à faciliter le retrait d’une commune en cas de blocage du fonctionnement normal d’un EPCI – je pourrais vous citer un exemple dans le Puy-de-Dôme – ou à proposer de nouvelles compétences obligatoires, notamment pour les affaires scolaires – entretien des bâtiments, transports, gestion des personnels hors éducation nationale, gestion de la carte scolaire – ou encore, c’est d’actualité, pour le déneigement des routes pour les EPCI situées en zone de montagne.

Ma troisième réflexion est de nature financière : elle vise à apporter des réponses concrètes à la question des charges de centralité, ce qui pourrait nous conduire à recommander la mise en œuvre à titre expérimental d’une DGF « territoriale » – vous avez proposé le mot, monsieur le député, pour dénommer certains niveaux de collectivités –, laquelle regrouperait dans une seule enveloppe les dotations des communes membres et la dotation de fonctionnement de la communauté.

Ces réflexions ne constituent pas encore des intentions mais, si vous y êtes favorable, monsieur le député, elles pourraient préfigurer les contours des solutions à retenir à plus ou moins long terme – il convient d’être prudent.

reconnaissance
de l’état de catastrophe naturelle
de communes des Vosges

M. le président. La parole est à M. Michel Heinrich, pour exposer sa question, n° 1380, relative à la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle de communes des Vosges.

M. Michel Heinrich. Monsieur le ministre, le 22 février 2003, un séisme de forte intensité touchait les Vosges, notamment le canton de Rambervillers, situé dans ma circonscription, où de très nombreuses communes ont eu à déplorer de gros dégâts.

Le 19 juin 2003, un arrêté interministériel était pris en vue de déterminer la liste des communes reconnues en état de catastrophe naturelle.

Deux critères, semble-t-il, ont été retenus par la commission interministérielle : d’une part, la magnitude du séisme, qui devait être supérieure à 5 sur l’échelle de Richter, d’autre part l’intensité du séisme sur l’échelle EMS 98.

L’examen de cette liste nous a permis de constater de nombreuses aberrations. J’évoquerai, à titre d’exemple, la situation de deux communes mitoyennes – ayant du reste en propriété commune une salle polyvalente – : l’une figure dans l’arrêté de classement, l’autre pas. Il s’agit de la commune de Saint-Maurice-sur-Mortagne, qui a pourtant subi d’importantes dégradations aussi bien de ses bâtiments publics que chez les particuliers : elle a cependant été exclue de la liste. Les dégâts étaient tels que nous avons dû recourir à des subventions exceptionnelles afin qu’elle puisse procéder notamment à la réparation de l’église, fermée au public durant plusieurs mois, la dépense n’étant pas prise en charge par les assurances.

De plus, certaines communes très proches de l’épicentre, telles la commune de Romont ou celle de Saint-Genest, n’ont pu obtenir ce classement, en dépit d’une liste impressionnante de dégâts et du dépôt de plusieurs recours, alors que d’autres communes dans la même situation obtenaient leur classement par une révision de l’arrêté.

Ainsi, la demande de classement de Romont faisait état, lorsqu’elle a été déposée en préfecture le 27 février, de cinq déclarations, le 3 mars de vingt déclarations et de vingt-six en juillet.

Dans cette commune, les habitants sinistrés se sont d’ailleurs constitués en association. J’avais appelé l’attention du ministère de l’intérieur sur ce problème en août 2004 puis, faute de réponse, en avril 2005.

Je tiens à préciser que ce village est situé à sept kilomètres de l’épicentre, à l’intérieur de la courbe isoséiste d’intensité VI, facteur de classification en zone de catastrophe naturelle.

Il convient de remarquer à ce sujet que très peu de maires ont pu rencontrer les représentants du Bureau central sismologique français – BCSF –, alors qu’eux seuls connaissaient l’exacte étendue, la nature et la portée des dégâts survenus sur le territoire de leur commune. Cela conduit à penser que les enquêteurs n’ont pu avoir une vision éclairée de la situation.

J’ajoute que les déclarations en préfecture, devant être déposées dans un délai rapproché, n’ont pas permis de prendre en compte la totalité des sinistres, certains ayant été constatés ou déclarés plus tardivement, ou apparaissant ultérieurement.

Enfin – j’insiste sur ce point – le rapport du BCSF lui-même précisait qu’il n’avait pas été possible de déterminer les intensités macrosismiques sur toutes les communes, dont certaines proches de l’épicentre, faute de données suffisantes. C’est ainsi que des villages qui ont subi d’importants dégâts ne figurent pas dans l’arrêté de classement alors que leurs voisins, parfois mitoyens, sont classés.

J’ai appelé votre attention sur l’ensemble de la question, en juillet 2003, par le biais d’un courrier signé conjointement par Gérard Cherpion, député des Vosges, et Christian Poncelet, président du conseil général et président du Sénat. J’ai de nouveau signalé des problèmes plus spécifiques dont j’avais été informé par la suite – je viens de vous en citer quelques-uns, concernant Saint-Maurice-sur-Mortagne et Réhaincourt, en novembre 2003, Chavelot, en décembre 2003 et Romont, en 2004 et avril 2005 – : tout cela en vain.

Face à de telles injustices et à des situations aussi inégalitaires, je sollicite un réexamen de la liste des communes déclarées en état de catastrophe naturelle à la suite du séisme du 22 février 2003 et le classement des communes d’Anglomont, Arches, Archettes, La Baffe, Bayecourt, Chantraine, Chamois-l’Orgueilleux, Châtel-sur-Moselle, Chaumousey, Chavelot, Le Clerjus, Clézentaine, Damas-aux-Bois, Damieulles, Deyvillers, Dinozé, Dogneville, Domèvre-sur-Avière, Domèvre-sur-Durbion, Dommartin-aux-Bois, Domptail, Doncière, Dounoux, Epinal, Fomerey, Les Forges, Frizon, Girancourt, Girmont, Golbey, Hadigny-les-Verrières, Hadol, Igney, Longchamp, Moriville, Nomexy, Nossoncourt, Pallegney, Ortoncourt, Réhaincourt, Renauvoid, Romont, Saint-Genest, Saint-Maurice-sur-Mortagne, Saint-Pierremont, Sercoeur, Uriménil, Vaxoncourt, Vomécourt, Xaffévillers et Xertigny.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué aux collectivités territoriales.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur le député, vous avez exprimé très concrètement le souhait de voir réexaminer la situation de certaines communes du département des Vosges concernées par le séisme du 22 février 2003 et qui n’ont pas été reconnues, à ce titre, en état de catastrophe naturelle – je ne citerai pas la liste : vous l’avez fait.

Je tiens à vous rappeler que la procédure de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle est mise en œuvre sur la base d’une demande communale et que cette reconnaissance est fondée sur l’intensité anormale de l’agent naturel, conformément aux dispositions de la loi du 13 juillet 1982.

La commission interministérielle chargée d’instruire ces demandes émet un avis en s’appuyant, pour ce type d’événement, sur le rapport du Bureau central sismologique français – BCSF – qui précise la magnitude de l’événement sur l’échelle de Richter ainsi que son intensité. Cette dernière est fixée, par commune, au regard des résultats de l’enquête dite « macrosismique » qui permet, au vu de fiches complétées par les particuliers – j’y reviendrai –, de traduire les dommages occasionnés et la perception de l’événement en terme d’intensité communale, et ce, quel que soit le nombre de déclarations de sinistres reçues.

Pour des raisons de fiabilité de l’information recueillie, il était important que les observations soient collectées dans les jours qui ont immédiatement suivi le séisme. Le BCSF a pu ainsi produire dans des délais raisonnables un rapport qui a permis à la commission interministérielle de statuer sur ce phénomène.

Par ailleurs, une mission a été effectuée sur place par le BCSF, le Bureau de recherche géologique et minière – BRGM – et l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire – IRSN –, laquelle a permis de collecter des informations essentielles dans la zone des vingt kilomètres autour de l’épicentre instrumental en vue de déterminer les intensités.

En effet, comme vous l’ont rappelé les courriers qui vous ont été adressés les 7 novembre 2003 et 5 février 2004, en réponse aux deux démarches que vous avez effectuées – vous les avez évoquées –, l’examen des demandes communales se fait sur la base des critères cumulatifs suivants : magnitude du séisme sur l’échelle de Richter supérieur à 5 – le séisme des Vosges répond à ce critère, la magnitude ayant été 5,4 – et intensité des dommages déterminée sur l’échelle macrosismique européenne atteignant le niveau VI. Or, en ce qui concerne les communes que vous citez, l’intensité des dommages n’atteint pas un tel niveau, celui-ci se situant, pour chacune, entre IV et V.

Cependant, sans préjuger de l’avis qui sera émis par la commission interministérielle, un réexamen de ces communes pourrait être fondé sur une expertise bâtimentaire, établissant le lien direct entre les dommages observés et le séisme. Cette expertise, soumise à l’examen du BCSF, permettrait à ce dernier d’apprécier s’il convient ou non de modifier le niveau précédemment observé sur l’échelle EMS 98.

Le coût de production de cette expertise reste, cependant, à la charge des sinistrés – je tiens à le rappeler. À ce titre, il semble utile de suggérer aux intéressés, s’ils souhaitent faire produire ces rapports, d’assumer solidairement le financement de telles études.

Enfin, la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle ouvre un droit à l’indemnisation pour des biens assurés qui relève désormais des clauses contractuelles entre assuré et assureur – des références dans ce domaine permettraient d’illustrer cette disposition.

M. le président. La parole est à M. Michel Heinrich.

M. Michel Heinrich. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre.

Je me permets d’insister sur le fait que le BCSF a lui-même reconnu qu’il n’avait pu établir l’intensité du séisme pour certaines communes situées à trois ou quatre kilomètres de l’épicentre. J’ai constaté sur place que les dégâts subis par des communes exclues de la liste sont impressionnants et considérables. Des logements sont totalement sinistrés et des bâtiments publics fermés.

J’informerai, bien entendu, les communes concernées, voire les groupements de communes, de la possibilité de rencontrer le BCSF afin qu’il procède à une nouvelle étude sur le sujet.

convention d’objectifs de politique culturelle entre l’État et la ville
de Marseille

M. le président. La parole est à M. Roland Blum, pour exposer sa question, n° 1374, relative à la convention d’objectifs de politique culturelle entre l’État et la ville de Marseille.

M. Roland Blum. Monsieur le président, monsieur le ministre de la culture et de la communication, lors de sa séance du 20 juin 2005, le conseil municipal de la ville de Marseille a approuvé le projet de convention d’objectifs signé entre la ville et l’État pour la période 2005 – 2007. Ce document stratégique fixe les engagements de la ville et de l’État en vue de la réalisation des grands équipements culturels structurants marseillais, pour des montants respectifs de 74,916 millions d’euros et 109,481 millions d’euros. Figurent notamment dans ce document la réalisation des grands projets suivants : le Musée des civilisations européennes et méditerranéennes, l’îlot 3 de la Friche la Belle de Mai, la Cité des arts de la rue, le Château de la Buzine. L’intérêt que l’État porte à Marseille, grande métropole culturelle européenne et méditerranéenne, consacre l’effort culturel accompli depuis dix ans par cette ville. Parmi les grands projets d’équipements identifiés par cette convention, le Musée des civilisations européennes et méditerranéennes – MUCEM – est un projet de tout premier plan pour le développement de la cité phocéenne.

Aussi, la ville de Marseille est-elle disposée à contribuer à l’engagement effectif des travaux du MUCEM dès 2006 en mobilisant immédiatement l’intégralité de sa part prévue dans la convention, soit 15,1 millions d’euros. Cet effort important de la ville permettrait d’entamer dans les meilleurs délais les travaux de réalisation de ce grand musée euro-méditerranéen. Cette proposition vient de faire récemment l’objet d’un courrier adressé par le maire de Marseille à M. le Président de la République.

Incontestablement, Marseille connaît une accélération de son développement aux plans économique, social et culturel. Dans cette dynamique, l’appui de l’État reste indispensable et je me réjouis de constater qu’il soit aux côtés de la municipalité sur les dossiers structurants.

J’évoquerai ici l’équilibre du partenariat qui a été trouvé sur la plupart des grands dossiers culturels de la ville : le Mémorial de l’outre-mer, la Criée, le Ballet national de Marseille, l’École nationale supérieure de danse, le Conservatoire national de région, la Friche la Belle de Mai, le Grand Longchamp, la rénovation de l’Opéra de Marseille, pour ne citer que la plupart de ces équipements.

Pour autant, bien que figurant dans les priorités communes visées par notre convention d’objectifs, certains opérateurs pourraient faire l’objet d’une reconnaissance plus affirmée de la part de l’État. Je pense notamment au « Festival de Marseille », festival de danse de tout premier plan, tout comme aux arts plastiques à Marseille, un temps soutenus par votre ministère, qui voient aussi réduire sensiblement l’aide dont ils ont pu bénéficier par le passé.

En conclusion, nous attendons de votre ministère qu’il confirme ses engagements aux côtés de la ville et prête une attention plus marquée à des structures professionnelles d’ores et déjà internationalement reconnues ou à des chantiers significatifs pour notre histoire et notre patrimoine national.

Pour notre part, nous sommes prêts à apporter tout notre soutien à l’implantation des grands projets dont l’État est aujourd’hui le porteur pour contribuer avec lui à l’avenir de Marseille, capitale culturelle euro-méditerranéenne.

M. le président. La parole est à M. le ministre de la culture et de la communication.

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le député, vous avez raison de le souligner, la ville de Marseille, sous l’égide du sénateur-maire Jean-Claude Gaudin, connaît une forte accélération de son développement culturel, ce dont je vous félicite. Vous menez, en effet, une véritable stratégie d’attractivité, montrant ainsi l’importance du lien entre la culture et l’économie. Les exemples ne manquent pas, que ce soit en matière de patrimoine ou de spectacle vivant, notamment grâce aux activités foisonnantes des arts de la rue ou à la localisation des activités audiovisuelles. La cité phocéenne est, sans conteste, une ville emblématique où la culture a droit de cité et constitue une fierté et un atout pour son attractivité.

Face à ce développement fortement soutenu par la ville de Marseille, l’État est et restera un partenaire d’autant plus solide que vous avez voté le budget de l’État, ce qui permettra une répartition la plus juste possible ! Sur un montant total d’opérations d’investissement de 256,9 millions d’euros, la part de l’État s’élèvera à 104,4 millions d’euros pour la période 2005-2007 dans le cadre de la convention État-ville.

Comme je l’ai indiqué, lors de la présentation de mon budget pour 2006, nous poursuivrons, cette année, la réalisation du Musée des civilisations européennes et méditerranéennes, avec une nouvelle phase de réhabilitation du Fort Saint-Jean, la création d’un partenariat public-privé pour le centre des réserves et la poursuite du chantier des collections. Ainsi, la salle de 300 mètres carrés du bâtiment H sera terminée à la fin de l’année 2006 pour accueillir de nouvelles expositions jusque-là limitées à la Tour du Roi René. Par ailleurs, la relocalisation du département de recherches archéologiques, subaquatiques et sous-marines à l’Estaque connaîtra une nouvelle avancée avec le lancement des appels d’offres en ce début d’année et une fin de chantier au premier trimestre 2007.

S’agissant du festival de Marseille, celui-ci a connu une augmentation régulière de l’engagement de l’État depuis trois ans. Au titre des arts plastiques, des crédits sont clairement fléchés pour une étude de définition d’une future biennale d’art contemporain.

Enfin, le patrimoine fait également l’objet d’une attention particulière de mon département ministériel puisque ce dernier est engagé au titre de la restauration du Palais du Grand Longchamp, de la restauration du Musée des Beaux-Arts ainsi que de l’Opéra et du Château de la Buzine.

Ainsi, monsieur le député Blum, si le MUCEM tient une place importante dans la convention de développement culturel signée entre la ville et l’État, c’est un grand et magnifique projet que je soutiens personnellement. J’ai compris votre attachement. Le Gouvernement reste très attentif à l’accompagnement des attentes de la ville en matière de développement culturel dans son ensemble. C’est la combinaison fructueuse des énergies que j’appelle donc de mes vœux pour l’ensemble des relations entre l’État et les collectivités territoriales. Votre stratégie est, à juste titre, très ambitieuse. Je serai le partenaire le plus solide. Encore faut-il qu’au-delà de l’État et de la ville, la région, le département et un certain nombre de partenaires privés s’engagent également. Nous ne sommes pas dans le marginal sympathique, mais dans le développement d’une ville et d’un pays.

M. le président. La parole est à M. Roland Blum.

M. Roland Blum. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre.

Je partage, bien entendu, tout à fait votre point de vue sur l’engagement des autres collectivités territoriales qui, malheureusement, reste insuffisant. Néanmoins, je me permettrai d’insister sur le MUCEM qui est un projet très important pour Marseille, et dont la maîtrise d’ouvrage appartient à l’État. Vous venez de signaler que les travaux concernant le Fort Saint-Jean vont prochainement débuter, ce dont nous vous remercions. Toutefois, le Fort Saint-Jean reste une partie, si ce n’est mineure, en tout cas marginale, par rapport à l’ensemble du projet. Nous souhaiterions donc, monsieur le ministre, que vous pesiez de toute votre autorité pour que, dans les deux années à venir, les études soient terminées et que les travaux du MUCEM s’accélèrent.

reconstruction des équipements sportifs détruits lors de violences urbaines

M. le président. La parole est à Mme Marie-George Buffet, pour exposer sa question, n° 1388, relative à la reconstruction des équipements sportifs détruits lors de violences urbaines.

Mme Marie-George Buffet. Monsieur le président, monsieur le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative, les événements qui ont touché au mois de novembre 2005 de nombreux départements et tout particulièrement la Seine-Saint-Denis nous ont tous fortement interpellés. Leur source profonde réside dans l’accumulation des inégalités et des discriminations dans les quartiers défavorisés de ces banlieues, et qui frappe surtout les jeunes. Pour autant, le chemin emprunté par certains d’entre eux, celui de la violence, est inacceptable et sans issue. En effet, les premiers à subir les conséquences de ces actes ont été les habitants de ces quartiers, toutes générations confondues, déjà touchés par une précarité toujours accrue.

On peut, après avoir souligné le travail des forces publiques, saluer la mobilisation des élus locaux, des agents municipaux, des associations et clubs sportifs et des citoyens et citoyennes, mobilisation qui a contribué à retrouver les voies du dialogue. Toutes celles et ceux qui ont dit non à la violence et se sont mobilisés ont bien compris que les écoles, les postes, les services publics et les gymnases étaient le bien commun de tous et des outils de lien social. Hélas, de nombreux équipements publics ont été détruits ou fortement endommagés, en particulier des équipements sportifs. Ainsi, dans ma circonscription à Blanc-Mesnil, la salle spécialisée de gymnastique Charles Le Mansois, a été totalement détruite, un gymnase fortement endommagé, tandis que la salle spécialisée d’arts martiaux à Dugny a subi des dégâts majeurs. Ces événements ont provoqué une grande émotion chez les bénévoles et les pratiquants des clubs sportifs et posent au quotidien des problèmes quant à la pratique du sport et de l’EPS en milieu scolaire. Il y a donc urgence à reconstruire.

Le 15 novembre dernier devant cette assemblée, M. le Premier ministre annonçait que le Gouvernement allait « examiner avec les mutuelles les conditions d’indemnisation des biens communaux pour lesquels l’État apportera les compléments d’aide indispensables. » Les mairies ont d’ailleurs été invitées par la Direction départementale de la jeunesse et des sports à lui transmettre un état des lieux des équipements sportifs. Dans l’attente de la reconstruction, les mairies ont dû trouver des solutions provisoires, qui ont elles-mêmes un coût.

J’ai entendu à la radio, monsieur le ministre, le 9 janvier dernier, que vous étiez quotidiennement en contact avec les maires confrontés à la nécessité de reconstruire ou de remettre en état ces équipements sportifs. Si tel est le cas, qu’attend le Gouvernement pour tenir ses engagements et apporter le concours de l’État à la reconstruction de ces équipements sportifs ? Trois mois seront bientôt passés. Allez-vous, monsieur le ministre, débloquer les moyens conséquents sur les fonds propres du ministère ou du CNDS, comme cela avait été le cas après la tempête de 1999 sur les fonds de l’ancien FNDS, en complément de l’apport des assurances pour aider les villes et les départements à faire face à ces urgences ?

M. le président. La parole est à M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative.

M. Jean-François Lamour, ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Madame la députée, à chaque fois que des événements exceptionnels sont intervenus sur notre territoire, l’État a apporté aux collectivités locales les aides nécessaires pour reconstruire des équipements détruits, quels qu’ils soient. Vous avez rappelé la tempête de 1999. J’ajouterai qu’en 2002, nous avons apporté les aides financières nécessaires pour la reconstruction d’équipements sportifs détruits ou endommagés lors des inondations intervenues dans le sud de la France. Cette année encore, nous saurons apporter aux collectivités l’aide qu’elles solliciteront pour reconstruire des équipements endommagés ou détruits – ils sont un peu plus d’une dizaine dans votre département – lors des violences urbaines survenues sur notre territoire en novembre 2005. Cet engagement que nous avons pris sera tenu.

Vous n’ignorez pas que le Centre national de développement du sport, qui prend cette année la suite du Fonds national de développement du sport, est doté de moyens conséquents – 213 millions d’euros – pour financer la rénovation ou la construction d’équipements sportifs. Le décret portant création du CNDS sera publié au cours de la deuxième quinzaine de février. Il fallait peut-être, madame la députée, s’y prendre avant pour évoquer la transformation du FNDS en CNDS. J’inviterai le conseil d’administration de l’établissement à se saisir de cette question, afin de réserver immédiatement des financements pour la réfection des équipements détruits ou endommagés gravement lors des événements de novembre 2005.

Dans l’immédiat, il appartient aux collectivités locales concernées de procéder à un état des lieux précis des coûts de remise en état et d’obtenir de leurs compagnies d’assurance l’indication de leurs niveaux d’indemnisation. J’ai d’ailleurs effectivement, comme vous le souligniez tout à l’heure, en ma possession l’état des lieux qui m’a été adressé par la DDJS de Seine-Saint-Denis. Je me suis aperçu que certaines expertises n’étaient toujours pas consolidées et que le taux d’indemnisation de certaines compagnies d’assurance n’était pas encore fixé. Lorsque l’état des lieux sera établi, ces collectivités pourront alors déterminer un schéma de financement – vous connaissez la règle et le fonctionnement du CNDS et de l’ancien FNDS – et déposer une demande de subvention auprès des services déconcentrés du ministère de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Celles qui sont prêtes peuvent le faire dès maintenant auprès de la DDJS de Seine-Saint-Denis qui transmettra bien sûr ces dossiers au CNDS.

J’ajouterai par ailleurs, pour votre information, puisque vous évoquiez les associations qui joué un rôle particulièrement important aux côtés des élus pendant cette période de troubles, que 15 millions d’euros sont venus abonder, par voie d’amendement, mon budget pour 2006. Cette somme permettra de financer un plan d’action dans les quartiers sensibles visant à renforcer l’accompagnement de l’action des associations.

Il n’y a donc pas lieu, vous en conviendrez, madame la députée, d’engager une polémique sans fondement. En effet, selon la mécanique habituelle de la dotation et de la distribution du CNDS, se tiendront deux commissions de gestion : l’une en février ou mars, l’autre au mois d’octobre. Elles nous permettront, comme je viens de le souligner, de tenir les engagements de l’État en la matière.

M. le président. La parole est à Mme Marie-George Buffet.

Mme Marie-George Buffet. Je vous remercie de ces informations, monsieur le ministre.

S’il y avait polémique dans mon propos, elle était bien douce ! (Sourires.)

Cette question est très importante parce que plus les mairies seront informées sur les délais et les montants de l’aide, plus elles pourront envisager le style de reconstruction. En effet, certains équipements étaient très anciens et elles hésitent, bien sûr, aujourd’hui à faire un choix.

perspectives du projet de licence professionnelle "expertise agroenvironnementale"

M. le président. La parole est à M. Yves Coussain, pour exposer sa question, n° 1378, relative aux perspectives du projet de licence professionnelle « expertise agroenvironnementale ».

M. Yves Coussain. Monsieur le ministre délégué à l’enseignement supérieur, ma question concerne le développement de l’antenne universitaire d’Aurillac, qui comprend en particulier l’IUT de génie biologique, avec la licence option bioinformatique, et l’IUT de gestion des entreprises et des administrations, avec la licence professionnelle de gestion des ressources humaines. Ce pôle universitaire est devenu un véritable moteur de la vie culturelle et économique d’Aurillac et du Cantal avec ses 1 500 étudiants.

De nombreux doutes avaient accompagné la création de ces enseignements universitaires. Aujourd’hui, la grande diversité de l’origine géographique des étudiants, dont le recrutement s’étend à tout le territoire et même au-delà des frontières hexagonales, et le taux d’emploi des diplômés à la fin de leurs études montrent la pertinence tant des filières d’études que de leur implantation dans le Cantal à Aurillac.

Le pôle de génie biologique vient de présenter un projet de licence professionnelle « expertise agroenvironnementale et conduite de projets ». Ce projet a été accepté par l’université d’Auvergne. Il doit maintenant être validé au niveau national. Il vise un apport de compétence en matière d’agronomie et d’environnement. Il est monté en relation avec le lycée Georges-Pompidou d’Aurillac. Les métiers visés, conseiller ou expert en génie écologique et rural, intéressent les organismes professionnels agricoles, les collectivités locales, les bureaux d’études en environnement et aménagement rural ainsi que les exploitations agricoles. C’est donc une filière en forte harmonie avec l’environnement économique et humain régional, ce qui favorisera les projets tutorés et les stages.

Le conseil général et la communauté d’agglomération d’Aurillac, qui soutiennent activement ce pôle universitaire depuis sa création, sont bien sûr très favorables à l’ouverture de la licence. Le projet pourrait être opérationnel dès la rentrée 2006. Pour cela, il faudrait bien sûr qu’il soit validé au printemps prochain.

Je vous demande donc, monsieur le ministre, de bien vouloir examiner avec le plus grand intérêt ce projet qui est très important pour notre pôle, pour Aurillac et son bassin et pour le Cantal en général et de me faire part de votre position.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l’enseignement supérieur et à la recherche.

M. François Goulard, ministre délégué à l’enseignement supérieur et à la recherche. Vous m’interrogez, monsieur le député, sur un projet de licence professionnelle intitulée « expertise agroenvironnementale et conduite de projets » de l’IUT d’Aurillac, projet qui est présenté par l’université de Clermont I.

Pour ma part, et dans la droite ligne de vos propos, je crois beaucoup à ces sites universitaires décentralisés. Ils sont parfois critiqués, mais à tort, car ils ont un impact économique extrêmement positif pour la région, et vous venez de l’illustrer par vos propos. Ils accueillent des filières de formation très professionnalisées et le taux d’emploi des étudiants qui ont obtenu leur diplôme est généralement très élevé. Enfin, ils facilitent l’accès aux études supérieures pour d’assez nombreux étudiants. C’est donc, je crois, une réussite de notre enseignement supérieur, qu’il faut naturellement maintenir et développer.

Pour ce qui concerne plus précisément le projet dont vous parliez, une commission nationale d’expertise doit se réunir pour l’examiner. Elle est composée d’universitaires et de représentants des milieux professionnels et va tenter d’apprécier le projet tant sur le plan académique que sur celui des débouchés dans l’économie. Une audition des porteurs du projet est prévue au mois de février, donc très prochainement, et vous comprendrez que je ne puisse pas vous donner une décision définitive avant d’avoir l’avis de cette commission.

Néanmoins, je tiens à vous indiquer dès ce matin que ce projet me paraît extrêmement positif, pour deux raisons. La première, c’est qu’il s’inscrit dans une continuité évidente avec les formations dispensées par cet IUT de génie biologique, ce qui est l’une des premières conditions d’agrément du projet. La seconde, c’est l’adéquation entre les formations dispensées et les besoins de l’économie régionale.

Puisque le dossier, sous ces deux aspects, est très bien engagé, je ne doute pas que les avis qui ont à s’exprimer seront positifs et que je pourrai dans peu de semaines vous confirmer mon accord pour l’ouverture de cette licence professionnelle, qui viendra heureusement compléter l’ensemble des formations offertes sur le site d’Aurillac.

M. le président. La parole est à M. Yves Coussain.

M. Yves Coussain. Je vous remercie, monsieur le ministre. Votre engagement en faveur de ce projet est capital. Vous l’avez dit, les sites universitaires décentralisés rencontrent tout de même pas mal d’obstacles dans le monde universitaire, et il est difficile d’aboutir sans véritable volonté politique.

financement de la résorption
des logements insalubres

M. le président. La parole est à M. René Rouquet, pour exposer sa question, n° 1364, relative au financement de la résorption des logements insalubres.

M. René Rouquet. Monsieur le ministre délégué à la promotion de l’égalité des chances, à l’heure où les violences urbaines ont mis en évidence la nécessité de faire de la mixité sociale une priorité absolue de l’action publique et à un moment où la question du logement constitue pour nous tous une grave préoccupation, je souhaite appeler votre attention sur les moyens fournis aux collectivités territoriales par la puissance publique liés aux opérations de relogement relatives à la réhabilitation et à la résorption des logements insalubres.

Chacun le sait, il est de la responsabilité collective de tous les acteurs publics, y compris des collectivités territoriales, d’agir pour la résorption de l’habitat insalubre. Nous savons également que des dispositifs spécifiques permettent aux collectivités d’encadrer les interventions et de financer leur résorption. Un certain nombre d’outils opérationnels et financiers sont mobilisés, comme les OPAH, les RHI, les PRI, les PST et les MOUS, qui sont complétés, dans le secteur privé, par l’ANAH.

Pour mettre en œuvre de tels outils, l’obstacle majeur demeure le relogement, temporaire ou définitif, des habitants concernés par ces opérations, qui, bien souvent, occupent des squats ou des hôtels meublés. C’est sur ce point que je souhaite vous interroger, en prenant l’exemple du Val-de-Marne, département dont je suis l’élu, qui compte parmi les onze départements les plus touchés par ce problème.

Il semble évident qu’une collectivité locale ne peut absorber à elle seule la totalité des relogements à effectuer. Les élus locaux devraient avoir les moyens de mutualiser ce type d’opérations à l’échelle de territoires régionaux. Nous avons exprimé ce souhait auprès du Premier ministre, avec mes collègues maires des cinq communes associées au conseil général du Val-de-Marne, qui portent un projet commun pour le développement de Seine-Amont Nord.

Dans le cadre de la réflexion menée par l’État sur l’opération d’intérêt national, nous avons réaffirmé au chef du Gouvernement nos préoccupations, notamment celles relatives à la résorption de l’habitat insalubre, objectifs qui ne peuvent être atteints selon nous qu’en mutualisant les relogements avec toutes les villes, y compris celles qui ne respectent pas la règle des 20 % de logements sociaux.

Voilà, monsieur le ministre, les quelques pistes de réflexion que je souhaitais vous soumettre. Je vous remercie de bien vouloir donner à la représentation nationale la position du Gouvernement sur ce sujet.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la promotion de l’égalité des chances.

M. Azouz Begag, ministre délégué à la promotion de l’égalité des chances. Monsieur le député, mon collègue Jean-Louis Borloo m’a demandé de vous apporter la réponse suivante.

Vous appelez l’attention sur les moyens développés par le Gouvernement pour aider aux opérations de résorption de logements insalubres.

La lutte contre l’habitat indigne constitue une priorité de la politique mise en œuvre par mon ministère. Elle figure à ce titre, avec le développement de l’offre locative sociale, qui participe pleinement à la lutte contre l’habitat indigne, comme l’une des actions clés du plan de cohésion sociale. Le Gouvernement s’est ainsi employé à faciliter par des mesures à la fois juridiques et financières la mise en œuvre de cette politique.

Sur le plan juridique, le Président de la République a promulgué le 15 décembre 2005 une ordonnance relative à lutte contre l’habitat insalubre ou dangereux sur le fondement de la loi du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale.

Cette ordonnance a pour objectif la simplification des procédures, le traitement d’urgence des situations d’insalubrité, la préservation des droits des occupants de bonne foi et leur relogement, ainsi que la clarification des responsabilités de l’État et des collectivités territoriales en matière de travaux d’office et de relogement.

Elle prévoit ainsi l’institution d’une procédure de traitement d’urgence des situations d’insalubrité qui autorise le préfet à mettre en demeure le propriétaire d’effectuer les travaux de sécurité et de salubrité indispensables et, en cas de carence, à les effectuer d’office à la charge du propriétaire, avant même la notification de l’arrêté d’insalubrité.

Elle prévoit de faciliter l’accomplissement de travaux dans les copropriétés en péril ou insalubres. L’autorité publique ne pourra se substituer qu’aux seuls copropriétaires défaillants et non au syndicat de copropriété pour les travaux, d’où une économie de temps et de deniers publics.

Elle prévoit d’étendre les travaux prescrits par le préfet au titre de l’insalubrité à la réalisation des équipements nécessaires à la décence du logement en vue de rendre ce dernier conforme à l’usage d’habitation après travaux.

Elle prévoit de faciliter l’expropriation des immeubles insalubres interdits à l’habitation.

Elle prévoit une série de dispositifs visant l’amélioration de la protection des occupants des logements insalubres ou en péril, dont, notamment, la protection renforcée des occupants d’hôtels meublés et l’impossibilité de résilier un bail et de prononcer l’expulsion d’occupants de bonne foi à la suite d’un arrêté d’insalubrité ou de péril, sans offre effective de relogement.

Elle prévoit enfin la clarification des responsabilités entre maires et préfets pour assurer le relogement provisoire ou définitif des occupants en cas de carence des propriétaires.

Parallèlement, les pouvoirs publics ont développé les moyens financiers et renforcé les outils opérationnels de lutte contre l’habitat indigne.

À ce titre, dans le cadre de la mise en œuvre de cette priorité gouvernementale, plusieurs mesures ont été prises par l’ANAH : d’une part à destination des propriétaires bailleurs ou occupants de locaux insalubres par la majoration des subventions qui leur sont attribuées lors de la réalisation de travaux de sortie d’insalubrité ; d’autre part à destination des collectivités locales, partenaires essentiels à la réussite de la politique de lutte contre l’habitat indigne. Une majoration substantielle des assiettes et des taux des subventions aux études préopérationnelles et prestations de suivi et d’animation des dispositifs contractuels d’OPAH ou de PIG traitant de l’insalubrité a été mise en œuvre depuis le milieu de l’année 2005.

Par ailleurs, une série de dispositions réglementaires présentes dans le décret du 25 novembre 2005 relatif à l’ANAH visent à faciliter par le biais de financements de l’agence la mise en œuvre de travaux d’office par les communes et la réalisation des prescriptions des arrêtés d’insalubrité dans les copropriétés.

Enfin, sur le budget de l’État, le programme « Développement et amélioration de l’offre locative » a identifié une action « Lutte contre l’habitat indigne », dotée en 2006, sans préjudice des redéploiements futurs au sein du programme, en fonction des besoins qui pourraient apparaître, de près de 22 millions d’euros.

Ces crédits visent notamment à financer les actions de lutte contre le plomb, les travaux d’office réalisés par l’État, les mesures d’accompagnement social et d’hébergement ponctuel d’occupants de locaux interdits à l’habitation, mais aussi les opérations de résorption de l’habitat insalubre irrémédiable et les dispositifs d’ingénierie technique et sociale ayant pour objet le traitement d’insalubrités diffuses sur des échelles géographiques diverses, qu’il s’agisse de cantons, départements, quartiers, communes ou EPCI.

M. le président. La parole est à M. René Rouquet.

M. René Rouquet. Monsieur le ministre, j’ai bien entendu la réponse que M. Borloo vous a demandé de m’apporter, avec tous les éléments positifs qu’elle contient. Je voudrais tout de même insister sur le sujet qui me préoccupe et qui vient enrayer le dynamisme des communes qui veulent agir.

Au-delà, en effet, de ces éléments, nous attendons du Gouvernement un dispositif d’envergure qui permettrait d’imposer une mutualisation des actions, parce qu’il n’est pas imaginable que les relogements définitifs ou provisoires sur ce type d’opérations ne pèsent que sur la commune qui a le dynamisme d’en réaliser.

Il est de la responsabilité de l’État, me semble-t-il, d’imposer cette solidarité, particulièrement dans le cadre de l’opération d’intérêt national à laquelle je faisais référence tout à l’heure sur Seine-Amont. Pour casser les ghettos urbains, l’État et la puissance publique doivent être aux côtés des élus locaux afin que toutes les villes participent à cette solidarité territoriale. Comme l’a d’ailleurs rappelé le chef de l’État à propos de la loi SRU, on ne sortira pas de la situation actuelle si l’on ne met pas en cohérence les discours et les actes. Il est temps de mettre en cohérence le discours présidentiel et les actes gouvernementaux sur cette question précise de la mutualisation des relogements. Sinon, nous ne pourrons pas avancer à un rythme normal sur ces questions.

financement des chéquiers conseils

M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau, pour exposer sa question, n° 1367, relative au financement des chéquiers conseils.

Mme Marie-Françoise Clergeau. Monsieur le ministre délégué à la promotion de l’égalité des chances, en août 2003, était votée la loi pour l’initiative économique, qui se voulait un soutien à la création ou à la reprise d’entreprise par les publics défavorisés, et plus particulièrement les chômeurs.

L’article 37 de la loi prévoyait de prolonger de un à trois ans la délivrance des chéquiers conseils qui permettent aux demandeurs d’emploi ou aux chômeurs bénéficiaires de ce dispositif d’obtenir des conseils d’experts, dans des domaines variés comme la rédaction des statuts, les plans d’action commerciale, les études de marché, la gestion de la trésorerie, et ce dans le cadre de l’élaboration de leur projet ou lors du démarrage de leur nouvelle activité.

Or, quelques mois après le vote de cette loi, un certain nombre de directions départementales du travail et de l’emploi suspendaient la délivrance des chèques conseils aux chômeurs repreneurs ou créateurs d’entreprises.

L’incohérence de cette mesure ayant conduit un grand nombre de parlementaires à réagir, elle avait été corrigée et la délivrance des chéquiers conseils rétablie au deuxième semestre de l’année 2004, mais dans des proportions moindres : en Loire-Atlantique par exemple, nous sommes passés de dix-huit à six heures de conseil pour les créateurs ou repreneurs d’entreprises éligibles à l’ACCRE.

À nouveau, en 2005, certaines directions départementales du travail et de l’emploi ont supprimé la délivrance des chéquiers conseils car l’enveloppe financière établie par votre ministère était insuffisante pour couvrir les besoins annuels calculés par rapport aux chiffres réalisés en 2004. Une trentaine de départements, comme la Loire-Atlantique, la Charente, la Vendée, le Maine-et-Loire, les Deux-Sèvres, pour n’évoquer que ceux de l’Ouest de la France, dont les crédits pour 2005 ont été divisés par deux, ont dû arrêter de délivrer les chéquiers conseils.

Il n’est pas compréhensible qu’un dispositif dédié à l’aide à la création d’entreprise soit l’objet d’hésitations, de reculs, et entraîne les conséquences que cela génère sur le terrain économique : la perte de confiance en l’avenir, la fragilisation des nouvelles entreprises ne pouvant accéder aux conseils et, souvent, le report ou l’abandon des projets de création du fait du gel répétitif de ces crédits.

Aussi, pour que tous les demandeurs d’emplois dont le projet de création d’entreprise est en souffrance retrouvent des perspectives d’avenir, je vous demande de nous préciser quels moyens vous entendez développer pour garantir tout au long de l’année le fonctionnement de ce dispositif.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la promotion de l’égalité des chances.

M. Azouz Begag, ministre délégué à la promotion de l’égalité des chances. Madame la députée, vous avez bien voulu appeler l’attention de Jean-Louis Borloo, ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement, sur le dispositif des chéquiers conseils dont la délivrance ne serait plus effectuée dans certains départements en raison d’une enveloppe budgétaire insuffisante. En conséquence, vous désirez connaître le montant des crédits prévus pour ce dispositif en 2006, et son évolution depuis 2004.

Comme vous le rappelez, les chéquiers conseils ont pour objectifs, d’une part, avant la création de l’entreprise d’encourager la demande de conseil le plus en amont possible du projet, afin de mieux apprécier l’adéquation entre créateur et projet et la viabilité de la future entreprise, et, d’autre part, après la création de l’entreprise, de répondre aux besoins du créateur lors de la mise en place de l’entreprise ou, en cas de difficultés, de lui fournir un appui en vue du redressement de l’entreprise.

En 2004, 6 millions d’euros avaient été prévus en loi de finances initiale, mais la consommation a été finalement de 9 670 000 euros : 227 982 chèques conseils, ou heures de conseil, ont été délivrés contre seulement 190 825 en 2003, soit une augmentation de 19,5 %, auprès de 2 251 organismes de conseil.

Un montant en nette progression a donc été alloué en loi de finances initiale de 2005 : 16 132 000 euros. Toutefois, seulement 6 505 289 euros ont été consommés. Pour 2006, les crédits ont donc été maintenus à ce niveau de 16 millions d’euros.

Comme vous vous en rendez compte, de grandes variations sont constatées d’une année sur l’autre dans l’utilisation ou la non utilisation de ces chéquiers. Elles ne permettent pas aux directions départementales du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle de prévoir avec précision le montant des crédits nécessaires, ce qui, localement, peut parfois conduire à certaines tensions sur les délais d’octroi de cet outil d’aide à la création d’entreprises.

En ce qui concerne le département de la Loire-Atlantique, la direction départementale avait reçu en 2005 deux délégations de 141 125 euros, soit 282 500 euros. Une dotation complémentaire de 63 547 euros a été allouée pour faire face à une demande plus forte que prévu, ce qui a porté la consommation finale à 345 797 euros.

Pour 2006, cette même direction départementale a prévu en autorisations d’engagement et en crédits de paiement un même montant que celui prévu dans la loi de finances initiale de 2005, soit 280 000 euros.

Conscient des difficultés engendrées, le ministère de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement a donc décidé en 2006 d’enquêter auprès des organismes habilités à délivrer ces chèques conseil et auprès de leurs utilisateurs pour connaître la mesure de l’adéquation de ce dispositif aux besoins réels des créateurs d’entreprises.

Par ailleurs, et dans le cadre de la loi de responsabilité locale, le Gouvernement a prévu que les chéquiers puissent dite décentralisés aux régions dans le cadre d’une expérimentation, de même que EDEN et les autres outils d’aide et d’appui à la création d’entreprise, à l’exception de l’ACCRE. Il s’agirait alors d’une délégation de gestion confiée par l’État à la région, par convention, avec les moyens correspondants, et non d’un transfert de compétences.

Aucune convention État-région n’ayant à ce jour été signée, le dispositif continue de relever des directions départementales du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle. J’invite les régions à se saisir de cette possibilité.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau.

Mme Marie-Françoise Clergeau. Je vous remercie, monsieur le ministre, des précisions que vous m’avez apportées. Cela étant, puisque vous avez donné des chiffres, je peux aussi en donner.

On a distribué 276 000 chèques conseils en 2002 et simplement 149 000 en 2005. Le montant des crédits prévus à chaque budget est une chose, celui des crédits réellement utilisés en est une autre, car bien souvent, malheureusement, des crédits sont gelés ou même annulés, ce qui pose des problèmes pour la continuité de l’action.

Il y a aussi des disparités entre les départements puisque certains font plus de démarches que d’autres, et cela, je crois, n’est pas toujours pris en compte. En Loire-Atlantique, par exemple, 12 978 chèques ont été distribués en 2003 et simplement 9 900 en 2005, alors que le nombre de demandeurs d’emploi qui ont créé leur entreprise est passé de 1 445 à 2 100. On voit donc bien qu’il y a un sérieux problème.

Il faudrait peut-être regarder département par département et faire en sorte que les crédits réellement consacrés en début d’exercice à ces chèques conseils soient réellement attribués pour qu’il puisse y avoir une continuité et qu’on ne puisse pas empêcher certains créateurs d’entreprise qui en ont les capacités et la volonté de réellement créer des emplois.

Nous savons combien la situation économique est difficile, et je crois qu’il nous faut tout faire pour permettre à ces personnes d’évoluer professionnellement dans le bon sens.

subventions aux associations de quartiers

M. le président. La parole est à M. Gilles Artigues, pour exposer sa question, n° 1370, relative aux subventions aux associations de quartiers.

M. Gilles Artigues. Monsieur le ministre délégué à la promotion de l’égalité des chances, la terrible crise des banlieues que nous avons vécue en novembre dernier a fait apparaître la nécessité de soutenir avec force dans nos quartiers l’action des associations, et je crois que vous y êtes vous-même particulièrement sensible.

Votre gouvernement a pris conscience de cette situation et a décidé un certain nombre de mesures, dont une rallonge budgétaire de 100 millions d’euros, à répartir sur l’ensemble du territoire en subventions de fonctionnement. On ne peut que se féliciter de cette décision, même si l’on peut regretter qu’il ait fallu de tels événements pour compenser un désengagement de l’État qui avait mis en difficulté ces structures pendant trois années, ainsi que les collectivités locales, qui avaient été appelées pour compenser. Je peux en témoigner en tant qu’élu de la ville de Saint-Étienne, que vous connaissez bien. Vous y êtes venu bien avant d’entrer au gouvernement, vous y étiez encore il y a quelques semaines, et je peux vous dire que les habitants du quartier de Montreynaud sont fiers de votre présence au Gouvernement.

Cela dit, il faut bien que nous puissions aider ces structures, et je souhaiterais donc tout simplement savoir comment cette enveloppe de 100 millions d’euros supplémentaires va être répartie, en particulier pour la ville de Saint-Étienne. De quelle somme allons-nous disposer, suivant quelles priorités, pour quels territoires et dans quels délais ? Je souhaiterais également savoir si les FASILD seront concernés par cette rallonge et, d’une manière plus générale, quel est l’avenir des contrats de ville qui arrivent à échéance l’an prochain ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la promotion de l’égalité des chances.

M. Azouz Begag, ministre délégué à la promotion de l’égalité des chances. Monsieur le député, vous savez que j’ai laissé un peu de mon cœur à Montreynaud, notamment au collègue Séguin où je suis allé pendant de très nombreuses années, bien avant d’être ministre. Vous savez donc à quel point je suis sensible à la question des associations.

Les associations jouent un rôle essentiel dans les quartiers pour assurer le lien social et l’accompagnement des habitants. Elles sont en première ligne pour développer des actions de proximité, en complément, voire parfois en substitution des services publics. C’est pourquoi le Gouvernement a souhaité intensifier l’effort engagé cette année en reconnaissant et en confortant leur action.

La loi de finances pour 2006 a ainsi permis d’augmenter la dotation aux associations à hauteur de 100 millions d’euros supplémentaires, qui seront répartis de la manière suivante : 80 millions d’euros pour le fonds d’intervention pour la ville pour financer des actions locales dans le cadre des contrats de ville, dont 20 millions seront fléchés sur les six départements les plus concernés par la politique de la ville, où ont été désignés des préfets délégués à l’égalité des chances – Bouches-du-Rhône, Essonne, Nord, Rhône, Seine-Saint-Denis, Val-d’Oise ; 15 millions d’euros pour des associations œuvrant dans les domaines « jeunesse et sport », subventionnées par le budget du ministère de la jeunesse et des sports ; 5 millions d’euros pour des associations œuvrant dans le domaine de l’éducation. En outre, 4 millions d’euros ont été ouverts pour renforcer l’action des ateliers santé-ville. Ces moyens supplémentaires destinés aux associations sur le programme « Équité sociale et territoriale et soutien » portent ainsi le montant du FIV à 187 millions d’euros, 191 millions avec les ateliers santé-ville.

Au-delà des moyens du FIV, l’accent a été mis en 2005 sur la réussite éducative avec un programme de 62 millions d’euros, qui s’appuie en grande partie sur l’action des associations.

Cet effort est maintenu en 2006, avec une enveloppe de 99 millions d’euros. L’objectif est de financer 520 équipes, ERE, et quinze internats de réussite éducative supplémentaires d’ici fin 2006. Les associations bénéficieront également du doublement du nombre de postes d’adultes-relais, avec une enveloppe totale de 83 millions d’euros en 2006.

Afin de simplifier et de sécuriser l’octroi des subventions, la plus grande partie des crédits relatifs à la politique de la ville sera déléguée aux communes dès le mois de janvier 2006, après la tenue des comités de pilotage locaux habituels : ce sera le cas pour Saint-Étienne. Ces crédits devront permettre, en complément des crédits accordés au titre des autres politiques, de financer des projets relatifs aux quatre priorités suivantes : insertion et accès à l’emploi, santé, réussite éducative, prévention de la délinquance et citoyenneté. L’attribution des subventions sera aussi simplifiée par la création d’un « guichet unique », à savoir l’Agence pour la cohésion sociale et l’égalité des chances, par le projet de loi relative à l’égalité des chances, qui doit être examiné en février par l’Assemblée nationale.

De plus, la passation de conventions pluriannuelles sera favorisée autant que possible, notamment en direction des associations qui jouent un rôle d’opérateur important dans le quartier, avec pour contrepartie une exigence accrue en termes d’évaluation.

En ce qui concerne le Fonds d’action et de soutien pour l’intégration et la lutte contre les discriminations, il est prévu de reconduire les moyens attribués en 2005 par le FASILD à la ville de Saint-Étienne à hauteur de 290 000 euros. Il est probable que sera renforcé le soutien en faveur des centres sociaux qui ont fait évoluer leurs demandes et leurs projets conformément aux orientations de cet établissement public. Ce soutien se traduira, soit par une légère augmentation des subventions, soit par la réattribution de postes FONJEP qui ont été évalués en cette fin d’année. Ainsi l’expérimentation de l’opération « Un par un » à Saint-Étienne se traduit déjà par une augmentation de 12 000 euros de l’effort en faveur de ce bassin.

Concernant enfin les contrats de ville, le dispositif actuel arrive à échéance fin 2006. Les modalités du prochain dispositif de contractualisation sont en cours d’étude. Les orientations générales seront définies dans le cadre du comité interministériel à la ville qui se tiendra le 30 janvier.

Vous pourrez, monsieur le député, transmettre ces informations à nos amis de Montreynaud et d’ailleurs.

M. le président. La parole est à M. Gilles Artigues.

M. Gilles Artigues. Je vous remercie, monsieur le ministre, pour ces bonnes nouvelles, que je ne manquerai pas de transmettre. J’aurai également à cœur de vérifier sur le terrain la « traçabilité » de ces annonces nationales, dont la concrétisation est très attendue.

J’ai apprécié également que vous ayez soulevé la question du délai des versements, essentielle pour les associations, qui lancent souvent leurs actions en début d’année, et qui ont du personnel à rémunérer : elles veulent avoir l’assurance que les aides promises leur parviendront effectivement.

Monsieur le ministre, je vous souhaite d’être en 2006 toujours aussi convaincant auprès de vos collègues du Gouvernement, car nos quartiers ont besoin de votre action et de votre détermination.

application de la loi SRU
au Pontet dans le Vaucluse

M. le président. La parole est à M. Alain Cortade, pour exposer sa question, n° 1376, relative à l’application de la loi SRU au Pontet dans le Vaucluse.

M. Alain Cortade. Monsieur le ministre, notre assemblée doit commencer demain, mercredi 18 janvier, l’examen du projet de loi portant engagement national pour le logement. Ainsi, après les efforts consentis dans le cadre du plan de cohésion sociale, le Gouvernement s’est à nouveau fixé des objectifs ambitieux en matière de développement des logements sociaux.

Mon propos d’aujourd’hui n’est pas de revenir sur l’obligation faite à chaque commune par la loi SRU du 13 décembre 2000 de disposer d’au moins 20 % de logements sociaux. Beaucoup pourrait néanmoins être dit sur le caractère arbitraire de cette mesure.

J’adhère bien entendu au principe de mixité sociale dont s’inspire l’article 55 de loi SRU, mais je m’aperçois que ce dispositif présente, dans bien des domaines, de nombreux dysfonctionnements, qui pénalisent des communes pourtant pleinement mobilisées en matière de solidarité territoriale.

Ainsi, comme de nombreuses communes de France, la ville du Pontet, que j’administre, n’atteint pas l’objectif des 20 %, puisqu’elle dispose à ce jour de 15,43 % de logements sociaux, et doit s’acquitter, par l’intermédiaire de l’intercommunalité, des pénalités prévues par la loi. Son retard en matière de logements sociaux n’est pourtant qu’apparent puisque la loi n’autorise pas la prise en compte de nombreux logements dont le caractère social est pourtant évident.

En effet, engagé à partir de 1962 par la Société d’économie mixte du Pontet, dont 80 % des capitaux étaient publics, afin notamment de satisfaire les besoins de logements générés par l’arrivée de flux importants de rapatriés d’Algérie, le programme immobilier du quartier Joffre se compose aujourd’hui de 277 logements de type social. Il en comportait 402 à l’origine, mais deux tours de dix-sept étages ont dû depuis être démolies, aux frais exclusifs de la ville.

Les arguments démontrant formellement que le quartier de la cité Joffre du Pontet présente des caractéristiques urbaines, sociales et économiques d’une zone urbaine sensible, ZUS, ne manquent pourtant pas, qu’on se réfère au nombre et à la typologie de la population – qui est aujourd’hui turque, maghrébine et européenne –, au nombre de logements à caractère social, aux activités économiques, ou aux caractéristiques des établissements scolaires, qui sont classés en zone et en réseau d’éducation prioritaire, ZEP/REC. Mais parce qu’ils doivent leur origine à une structure mixte, ces logements ne font pas partie des logements qui peuvent être retenus pour la définition du parc social. Grâce au reclassement de ces 277 logements, la commune du Pontet compterait plus de 19 % de logements sociaux, se rapprochant ainsi de l’objectif fixé par le législateur en 2000.

Afin de concrétiser sur le terrain les logiques interactives du plan de cohésion sociale, ce reclassement en logements sociaux serait un signe fort envoyé aux habitants du Pontet et bien plus largement du Grand Avignon.

Comme nombre d’élus locaux, j’assume volontiers ma part de la solidarité nationale en matière de logement social, et les objectifs fixés pour la période 2002-2004 ont été largement respectés par ma commune. J’attends néanmoins que la définition du parc social disponible sur le territoire communal, qui entraîne celle des pénalités encourues, prenne en compte l’ensemble des logements de type social, quel qu’ait été leur principe de construction. Il ne s’agit donc en aucun cas d’un quelconque tour de passe-passe ou d’une manière de tourner l’esprit de la loi. Il s’agit simplement de reconnaître pleinement les efforts des élus locaux dans ce domaine.

Aussi, monsieur le ministre, je vous demande de bien vouloir m’indiquer dans quelle mesure les 277 logements du quartier Joffre pourraient, à titre dérogatoire, être reclassés en logements sociaux et ainsi pris en compte dans le calcul imposé par loi du 13 janvier 2000.

Par ailleurs, entendez-vous, à l’occasion de l’examen du projet de loi portant engagement national pour le logement, remédier aux imperfections dont souffre l’article 55 de cette loi SRU ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la promotion de l’égalité des chances.

M. Azouz Begag, ministre délégué à la promotion de l’égalité des chances. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur le député, la crise aiguë du logement qui frappe notre pays rend indispensable l’effort en matière de production de logements locatifs sociaux en France, qui doit être partagé par tous.

L’objectif des dispositions législatives en vigueur est d’assurer une offre de logements locatifs confortables accessible aux ménages disposant de ressources modestes ou moyennes, et équitablement répartie sur l’ensemble du territoire d’une agglomération. Pour que cet objectif soit atteint, l’accès à ces logements doit être soumis à des conditions de ressources et les loyers réglementés. Ces deux éléments sont garantis quand le propriétaire des logements a signé une convention avec l’État ouvrant droit à l’aide personnalisée au logement à ses locataires.

Si la société d’économie mixte du Pontet signe une telle convention, les logements qu’elle gère pourront être décomptés au titre des logements locatifs sociaux exigés par la loi.

Par ailleurs, en première lecture du projet de la loi portant engagement national sur le logement, le Sénat a demandé au Gouvernement une évaluation de l’application du dispositif actuel, afin de déterminer les améliorations qui pourraient être introduites lors de la deuxième lecture. Ces améliorations devraient préserver les objectifs du texte actuel, garantissant ainsi un meilleur équilibre de l’habitat social dans les agglomérations concernées.

M. le président. La parole est à M. Alain Cortade.

M. Alain Cortade. Je vous ai bien entendu, monsieur le ministre, et je veux préciser que les loyers en vigueur dans ces 277 logements du Pontet sont les moins chers de ma commune : ils sont donc bien destinés à un public qui a besoin d’être aidé.

En outre, étant donné que la SEM qui est à l’origine de ce parc de logements est aujourd’hui dissoute, il m’est difficile de passer une convention avec l’État.

Je veux préciser également que, grâce au travail accompli dans ma commune par trois associations, l’Avenir Saint Louisien, que vous connaissez bien pour avoir reçu ses représentants, Starting Block et ANG, tout se passe au mieux dans ce quartier. Il n’en reste pas moins que la paix sociale pourra difficilement y être maintenue sans aides supplémentaires.

licenciements à la société Nexans
à Chauny dans l’Aisne

M. le président. La parole est à M. Jacques Desallangre, pour exposer sa question, n° 1387, relative aux licenciements à la société Nexans à Chauny dans l’Aisne.

M. Jacques Desallangre. Monsieur le ministre, plus de cinquante employés de l’usine Nexans de Chauny seront licenciés dans quelques semaines. La raison officielle en serait que « la crise mondiale du cuivre affecte la rentabilité de l’entreprise et menace son avenir ». La réalité est bien différente : Nexans est le leader mondial de l’industrie des câbles et systèmes de câblage, avec 20 000 emplois, 4 900 millions d’euros de chiffre d’affaires et un bénéfice net distribuable de 73 441 090 euros. Cette année, cette entreprise a racheté une partie de ses actions au plus haut cours, pour augmenter, bien entendu, le profit de ses actionnaires. Depuis exactement trois ans, l’entreprise Nexans a multiplié par 400 % sa capitalisation boursière. Ses actionnaires ont vu leur dernier dividende multiplié par 150 %.

pourtant Nexans ; tirant les conséquences de la monstrueuse inspiration de l’arrêt de la cour de cassation du 11 janvier dernier, sera l’une des deux premières entreprises en France à pratiquer le licenciement « préventif », surfant sur le flou du nouveau concept jurisprudentiel de licenciement destiné à « prévenir les difficultés économiques à venir ». Selon cet arrêt, la réorganisation de l’entreprise n’a pas à être subordonnée à des difficultés économiques à la date du licenciement. Ainsi il n’est plus besoin pour l’employeur de prouver des difficultés économiques réelles, d’établir leur intensité ou leurs conséquences financières. Il lui suffit de prétendre qu’il se pourrait que, dans un avenir indéterminé, l’entreprise doive s’adapter aux évolutions du marché et connaisse des difficultés. Que d’incertitudes, alors que les licenciements seront, eux, bien réels.

L’objet de cette nouvelle offensive libérale est en fait de faire peser sur les salariés le risque de perdre leur emploi même si les conditions sont favorables. Ainsi, grâce à cette nouvelle contrainte, le salarié devra accepter servilement le durcissement des conditions de travail et la réduction de là masse salariale destinés à accroître encore la rentabilité du capital investi.

Monsieur le ministre, face à une telle décision, qui conforte des pratiques humainement insupportables, ma proposition de loi visant à empêcher la pratique de licenciements boursiers camouflés derrière la fallacieuse qualification de « licenciements économiques » est plus que jamais opportune. Soit on veut interdire ces licenciements boursiers, qui se moquent des difficultés de notre pays et des efforts nécessaires pour préserver l’emploi, dont vous nous assurez qu’ils sont votre priorité, soit on supporte que les détenteurs du capital, maîtres de la gouvernance économique, accumulent toujours plus de profits, sans un regard pour la misère humaine qu’engendre leur égoïsme irresponsable. Et si on veut interdire ces licenciements boursiers, on doit accepter la discussion de ma proposition de loi, exacte réplique à cet arrêt, qui abandonne encore plus le sort des salariés à l’appétit du capital ?

Le mot de justice aura-t-il encore un sens, monsieur le ministre, si personne ne se lève pour défendre, sans retard et sans faiblesse, les salariés contre la férocité des appétits financiers ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la promotion de l’égalité des chances.

M. Azouz Begag, ministre délégué à la promotion de l’égalité des chances. Monsieur le député, vous appelez l’attention du Gouvernement sur la réorganisation de l’entreprise Nexans basée à Chauny, dont le plan de sauvegarde de l’emploi envisagerait la suppression de 51 postes, sur les 208 que compte le site. Vous estimez que cette restructuration est scandaleuse, alors que Nexans réalise des profits considérables, et demandez au Gouvernement d’interdire les licenciements boursiers.

La société Nexans est spécialisée dans la production et la commercialisation des fils de cuivre nu, sur un site qu’elle partage avec son fournisseur, la société de Coulée Continue de Cuivre. Elle doit faire face aux nouvelles pressions qui s’exercent sur un marché géographiquement limité, et qui se traduisent par des prix de vente en décrue permanente et une concurrence atomisée.

Dans ce contexte, courant 2005, l’entreprise a dû recourir ponctuellement à la mise en chômage partiel de ses salariés de production.

Elle doit donc adapter sa structure à ces contraintes externes qui provoquent un effondrement de son chiffre d’affaires sans que les perspectives pour 2006 permettent d’envisager un redressement. Dans le même temps, elle doit également procéder à un redéploiement de ses activités sur de nouveaux segments de marché tout en réduisant ses frais fixes.

Ce projet a été présenté en septembre 2005 au comité d’entreprise, qui a validé en novembre le plan de sauvegarde de l’emploi. Celui-ci comprend de nombreuses mesures d’accompagnement des cinquante et un salariés touchés et facilite notamment les départs volontaires en retraite anticipée ainsi qu’en mobilité interne au groupe. La dynamique engagée par ce plan de sauvegarde a déjà permis de réduire à vingt-quatre le nombre des licenciements, dont les départs, au terme du déploiement des différentes mesures, se dérouleront jusqu’à la fin de cette année.

Comme vous le voyez, les services de l’État, en particulier la Direction départementale du travail de l’emploi et de la formation professionnelle de l’Aisne, ont suivi et continue à suivre avec grande attention ce dossier. Cette vigilance a porté sur la qualité des mesures sociales proposées, qui devaient être à la hauteur des moyens financiers du groupe.

Le Gouvernement attache la plus grande importance au respect de la responsabilité sociale d’entreprise de tels groupes. C’est ce qui l’a conduit l’été dernier à intervenir fermement auprès de la direction de la société Hewlett-Packard qui avait annoncé la suppression de 1 240 postes, chiffre ramené dernièrement à 890.

En ce qui concerne votre proposition d’interdire les licenciements boursiers, le Gouvernement, qui comme vous veut favoriser les entreprises qui emploient en France plutôt que celles qui licencient, va ouvrir prochainement, à la demande du Président de la République, le chantier du financement de la protection sociale, afin de basculer une fraction des cotisations patronales sur une cotisation assise sur l’ensemble de la valeur ajoutée des entreprises, au lieu des seuls salaires actuellement.

M. le président. La parole est à M. Jacques Desallangre.

M. Jacques Desallangre. Vous allez avoir beaucoup de mal, monsieur le ministre, car Mme Laurence Parisot vous a déjà répondu en qualifiant cette idée d’« imbécile » ou « sotte » – je ne me rappelle plus le terme exact qu’elle a employé, mais elle a jugé très durement la proposition du Président de la République.

Ma question visait à attirer votre attention sur la notion floue et très extensive de « sauvegarde de la compétitivité », que la loi ne prévoit pas. Devant un tel jugement, il est temps de rappeler le juge à la loi. Pour ce faire, nous ne disposons que de la loi.

Puisque le MEDEF déplore « l’insécurité juridique régnant autour du licenciement », je vous propose donc de lui répondre avec une loi qui brise l’arbitraire de l’interprétation extensive dont témoigne l’arrêt du 11 janvier 2006 – qui, j’en suis certain, le ravit.

À titre personnel, permettez-moi de vous dire, monsieur le ministre, que je suis peiné, car je vous admire beaucoup pour d’autres choses, de vous voir contraint de défendre un aussi mauvais dossier.

M. le président. Nous avons terminé les questions orales sans débat.

communication de M. le président

Je vous rappelle que M. José Manuel Barroso, président de la Commission européenne, sera reçu dans l’hémicycle le mardi 24 janvier à 15 heures.

saisine pour avis d’une commission

J’informe l’Assemblée que la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire a décidé de se saisir pour avis du projet de loi, adopté par le Sénat, de programme pour la recherche.

ordre du jour de l’assemblée

M. le président. L’ordre du jour des séances que l’Assemblée tiendra jusqu’au jeudi 2 février 2006 inclus a été fixé ce matin en Conférence des présidents.

Ce document sera annexé au compte rendu.

ordre du jour
des prochaines séances

M. le président. Cet après-midi, à quinze heures, deuxième séance publique :

Questions au Gouvernement.

Discussion, du projet de loi, adopté par le Sénat, n° 2332 rectifié, relatif au volontariat associatif et à l’engagement éducatif :

Rapport, n° 2759, de Mme Claude Greff, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

À vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de l’ordre du jour de la deuxième séance.

La séance est levée.

(La séance est levée à treize heures cinq.)