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Edition J.O. - débats de la séance

Assemblée nationale

Compte rendu
intégral

Première séance du jeudi 22 juin 2006

251e séance de la session ordinaire 2005-2006


PRÉSIDENCE DE M. MAURICE LEROY,
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

Fin de la mission temporaire d’un député

M. le président. M. le Premier ministre m’a informé de l’achèvement de la mission temporaire précédemment confiée à M. Yves Fromion.

M. Jean-Pierre Brard. Je pensais qu’il s’agissait de la sienne ! (Sourires.)

M. le président. Patientez donc, monsieur Brard ! (Sourires.)

M. Jean-Pierre Brard. Combien de temps ?

débat d’orientation budgétaire et
débat sur les orientations
des finances sociales pour 2007

M. le président. L’ordre du jour appelle le débat d’orientation budgétaire et le débat sur les orientations des finances sociales pour 2007, qui font l’objet, sur décision de la conférence des présidents, d’une discussion commune.

La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.

M. Thierry Breton, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les députés, je veux d'abord vous dire combien nous sommes heureux et fiers, Xavier Bertrand, Jean-François Copé, Philippe Bas et moi-même, de vous présenter aujourd'hui les grandes orientations de nos finances publiques pour l'exercice 2007.

M. Jean-Pierre Brard. À quatre, cela va être difficile !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Nous sommes nombreux, certes, peut-être davantage que sur les bancs de cette assemblée.

M. Jean-Marie Le Guen. Vous y siégerez un jour… Après les prochaines échéances, peut-être !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Si le Gouvernement est en effet bien représenté, c’est parce que nous allons débattre de sujets très importants !

Mais rassurez-vous, monsieur le député, nous vous apportons de bonnes nouvelles pour la France !

Ce débat d'orientation budgétaire est, n'ayons pas peur des mots, monsieur Le Guen, historique, et ce à trois titres.

Plusieurs députés du groupe socialiste. En effet ! « Historique » est le mot qui convient !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. D'abord, le document d'orientation budgétaire que vous avez devant vous intègre de manière exceptionnelle l'engagement national de désendettement, que le Premier ministre avait annoncé dès le mois de janvier, à l'occasion de la Conférence nationale des finances publiques et à la suite du rapport sur la dette que j'avais demandé à Michel Pébereau.

Ensuite, comme à l'habitude, ce document présente les grandes lignes du budget 2007 de l'État, lequel est une étape essentielle de la trajectoire de désendettement, étape historique même, puisque le taux de progression de la dépense de l'État sera, l'an prochain, inférieur de 1 % à celui de l'inflation.

Vous voyez, monsieur Brard, je n’ai parlé ni de « zéro volume » ni de « zéro valeur » !

M. Jean-Pierre Brard. Vous êtes en progrès, monsieur le ministre !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Du jamais vu, monsieur Brard, depuis vingt ans !

M. Augustin Bonrepaux. On peut le dire !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Enfin, ce débat d’orientation budgétaire intègre cette année les grandes orientations de la politique de sécurité sociale et du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 qui vous sera présenté à l'automne. Je laisserai évidemment Xavier Bertrand et Philippe Bas vous les détailler. C'est là encore une grande première et un signe supplémentaire de la volonté du Gouvernement d'associer tous les acteurs de la dépense publique à l'engagement de désendettement, conformément à l'esprit de la Conférence nationale des finances publiques de janvier dernier.

C'est d'ailleurs ce que j'ai rappelé avant-hier mardi au Conseil d'orientation des finances publiques – auquel certains d’entre vous ont assisté. Cette instance d'organisation et de concertation – dont le rôle est essentiel pour la maîtrise et le contrôle de nos finances publiques – a, lors de sa première réunion de travail à Bercy, désigné comme rapporteur M. Gilles Carrez, que je remercie, en notre nom à tous, d’avoir accepté cette charge.

Rentrons sans plus attendre dans le vif du sujet.

D'abord, quelques mots sur les perspectives de croissance dans lesquelles nous envisageons la construction du projet de loi de finances et du PLFSS.

Les résultats du premier trimestre, vous le savez, sont bons : avec un solide 0,54 % de croissance, ils s’inscrivent dans la fourchette retenue par le Gouvernement – entre 2 % et 2,5 % – et confirment la tendance enregistrée au cours du second semestre 2005.

D'ailleurs, la composition de cette croissance souligne l'excellente dynamique de notre économie : la consommation des ménages, premier moteur de l'activité, a progressé très vivement de 0,9 %, soit 3,6 % en rythme annualisé – apportant une contribution de 0,5 % à la croissance !

Ensuite, autre élément important encourageant pour l’économie de notre pays, l'exportation, second moteur, qui poursuit son net redressement depuis l'été 2005, affiche une nouvelle progression de 3 % sur le premier trimestre, soit 12 % en rythme annualisé.

On ne le dit pas assez : il est vrai que dans ce pays, on aime se flageller,…

M. Jean-Pierre Brard. Parlez pour vous !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. …mais les faits sont têtus.

M. Jean-Marie Le Guen. Voilà que vous citez Karl Marx !

M. le président. Je vous en prie, monsieur Le Guen !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. La France progresse plus vite que jamais et enregistre le meilleur résultat depuis six ans ! Cela permet enfin au commerce extérieur d'apporter une contribution fortement positive à la croissance, de 0,5 %.

M. Jean-Marie Le Guen. C’est le Bourgeois gentilhomme ! Monsieur Prudhomme !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Au-delà de la contribution de plus 0,1 % de la consommation publique, la différence est constituée par un énorme déstockage – contribution de moins 0,7 % – qui traduit une très forte demande à laquelle les entreprises françaises ont été soumises au premier trimestre et qu'elles devront compenser dans les prochains mois : c'est donc une bonne nouvelle pour notre économie !

M. Augustin Bonrepaux. Que de très bonnes nouvelles en effet !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Ce n’est pas moi qui le dis, monsieur le député, mais les journaux : « Croissance, le rebond se confirme en 2006 ».

M. Jean-Marie Le Guen. Tous les journaux ne disent pas la même chose !

M. Jean-Pierre Brard. Votre spécialité, monsieur le ministre, c’est le yoyo !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Il suffit de lire les journaux : la croissance est confirmée, ce qui est, au demeurant, une bonne nouvelle !

M. Jean-Pierre Brard. Vous vous en remettez aux journaux maintenant ? Comme pour Clearstream !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Les autres indicateurs disponibles le confirment. Les enquêtes disponibles montrent une poursuite, voire une accélération de cette dynamique au deuxième trimestre : les chiffres dans l'industrie sont proches de leur plus haut depuis cinq ans – enquête de la Banque de France de la semaine dernière – et ceux des autres secteurs – services et construction notamment – sont nettement au-dessus de leur moyenne également.

L'inflation reste extrêmement bien contenue – autour de 2 % sur un an –, malgré la hausse du prix du pétrole. Contrairement à ce que certains commentateurs ont pu écrire, je ne vois donc pas d'effet de second tour dans les chiffres d'inflation. L'inflation sous jacente – c'est-à-dire hors prix volatils, comme celui du pétrole – reste très faible, à 1,1 % en mai, chiffre confirmé par l'INSEE ce matin.


Ce rythme d’inflation soutient le pouvoir d’achat et la consommation. D’ailleurs, les chiffres relatifs à la consommation manufacturée pour le mois de mai, publiés hier, montrent que les Français n’ont jamais autant consommé : plus 0,6 % !

Les taux d’intérêt, malgré l’augmentation très graduelle du taux de refinancement de la BCE, restent à des niveaux historiquement bas, favorisant l’investissement des entreprises ainsi que l’investissement immobilier des ménages.

La conjoncture chez nos principaux partenaires commerciaux est très favorable. Le moral des industriels allemands, par exemple, renoue avec les niveaux d’avant la réunification, ce qui est important, bien évidemment, compte tenu du rôle joué par l’Allemagne en tant que partenaire commercial.

Enfin et surtout, la situation de l’emploi ne cesse de s’améliorer : le taux de chômage est passé à 9,3 % à la fin du mois d’avril. Depuis un an, il y a eu 210 000 demandeurs d’emploi en moins !

Vous le voyez, la phase de reprise conjoncturelle qu’a connue l’économie française au second semestre de l’an dernier est bel et bien derrière nous : notre économie est désormais installée sur une tendance de 2 % à 2,5 % de croissance, soit la fourchette retenue dans le projet de loi de finances pour 2006.

Par ailleurs, la note de conjoncture de l’INSEE, publiée ce matin même, accrédite le scénario du Gouvernement : les prévisions de croissance, traditionnellement marquées par la prudence, se situent dans notre fourchette, avec un minimum de 2 % pour cette année et des progressions de 0,6 % pour les trimestres à venir, soit 2,4 % sur l’année.

M. Jean-Pierre Brard. C’est très bien la fourchette, mais l’important, c’est ce qu’il y a dans l’assiette !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Là aussi, pardonnez-moi de le dire, c’est ce que le Gouvernement – avec les équipes de mon ministère, à qui je rends hommage – ne cesse de répéter.

L’INSEE table en outre sur un chômage revenu à 9 % en fin d’année, amélioration alimentée par près de 200 000 créations d’emplois, et sur des gains de pouvoir d’achat près de deux fois supérieurs à ceux de 2005, de l’ordre de 2,4 %, qui expliquent la bonne tenue de la consommation.

Comme quoi, le scénario que je défends depuis plusieurs mois avec mes équipes n’était pas aussi irréaliste que certains ont bien voulu le dire !

Pour 2007 et les années suivantes, je suis confiant, comme l’INSEE, dans la capacité de notre économie à conserver un rythme de croissance situé entre 2 % et 2,5 % et à absorber les chocs du type hausse du prix du pétrole ou appréciation de l’euro, comme ceux que nous avons connus ces dernières semaines et qui se sont nettement tassés depuis quelques jours.

Mais je considère que cette hypothèse est une hypothèse prudente. Vous le savez, mon ambition pour notre économie, c’est une croissance entre 3 % et 4 %. Je suis convaincu – c’est notre combat – que l’économie française doit et peut faire mieux. C’est pourquoi j’ai voulu envisager dans ce débat d’orientation budgétaire un scénario fondé sur un taux de 3 % de croissance, qui nous permettrait d’atteindre plus rapidement nos objectifs de finances publiques, c’est-à-dire avant 2010, tout en améliorant le niveau de vie de nos concitoyens.

J’en viens maintenant au cœur de ce débat avec l’engagement national de désendettement. Celui-ci doit nous permettre, conformément au scénario présenté par le Gouvernement à la Conférence nationale des finances publiques en janvier dernier, de parvenir à l’équilibre des comptes publics et de ramener notre endettement en deçà de 60 % du PIB, en 2010 au plus tard.

Nous avons construit cette trajectoire de désendettement en quatre étapes essentielles, qui constituent autant d’engagements. J’ai d’ailleurs souhaité que chacun de ces engagements fasse l’objet de résultats chiffrés, mesurables, sur lesquels nous pourrons être jugés. Nous leur associons des moyens précis pour y parvenir, que je vais décliner dans un instant. Chacun d’entre eux s’inscrit dans la stratégie globale de désendettement, qui repose sur les trois piliers que je ne cesse de rappeler.

Il s’agit d’abord du relèvement de notre croissance : avec la réforme fiscale et, bien sûr, celle du marché du travail, la priorité donnée à la recherche et développement ainsi que la politique de développement des PME. Toutes ces mesures s’inscrivent parfaitement dans la contribution française à la stratégie européenne de Lisbonne, que je reprends volontiers à mon compte pour la France.

Il s’agit ensuite la maîtrise de la dépense : la dépense de l’État n’aura pas progressé plus vite que l’inflation pendant quatre ans !

Il s’agit enfin des cessions d’actifs non stratégiques et, plus généralement, de la recherche systématique de tous les leviers de désendettement : plus de 15 milliards d’euros auront ainsi été affectés au désendettement sur les années 2005-2006.

Je reviens rapidement sur notre premier engagement pour 2005, qui consistait à ramener le déficit sous la barre des 3 %. Cet engagement, que j’avais pris devant vous il y a un an en présentant mes objectifs de finances publiques, Jean-François Copé et moi-même, nous l’avons tenu, et même au-delà de l’objectif fixé.

M. Jean-Pierre Brard. Oui, en vendant les bijoux de famille !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Il n’y a eu aucune ambiguïté, malgré les pronostics négatifs ou ironiques que j’ai pu entendre, en particulier dans cet hémicycle. Nous sommes parvenus à une réduction de 2,88 % exactement ! Je précise que la Commission européenne nous a même donné quitus par la bouche du commissaire Almunia.

M. Jean-Pierre Brard. Ça fera bien sur votre futur CV !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Je note d’ailleurs que nous sommes le seul des quatre grands pays européens, que sont la France, l’Allemagne, la Grande-Bretagne et l’Italie, à être revenu sous le seuil des 3 %.

Certes – vous avez eu raison de me le dire à l’époque – la partie n’était pas gagnée d’avance, notamment avec un budget bâti sur une croissance à 2,5 %, alors que l’activité aura finalement été plus faible de plus d’un point.

M. Jean-Marie Le Guen. Et par qui a-t-il été bâti, ce budget ?

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Mais, comme je vous l’ai dit à l’automne dernier, mon rôle, avec Jean-François Copé, est d’exécuter le budget qui a été voté par le Parlement, sans aucune dérive. Ce résultat, il tient aux mesures qui ont été prises dès le printemps – gels puis annulations de crédits, adaptation des acomptes de l’impôt sur les sociétés. Il tient aussi à l’amélioration des comptes sociaux, bien sûr.

Notre deuxième engagement porte sur 2006 : nous entendons réduire l’endettement, dès cette année, d’au moins 2 % du PIB.

M. Jean-Pierre Brard. Vous avez vu la une du Figaro !

M. Jean-Marie Le Guen. « Croissance : la France peut mieux faire » !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Tous les journaux saluent le retour de la croissance, et je suis d’accord avec ce titre du Figaro : nous devons pouvoir mieux faire !

M. Jean-Jacques Descamps. Ce ne sera pas avec l’aide des socialistes !

M. Augustin Bonrepaux. Ça fait quatre ans que vous faites mal les choses !

M. Jean-Pierre Brard. Vous descendez à la prochaine station !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. La France a un potentiel qui doit lui permettre d’aller plus loin, mais encore fallait-il la remettre sur les rails, étant donné la situation dont nous avons hérité. Les résultats sont là, soulignés par la presse dans son ensemble. Nous avons désormais une ambition, qui est celle d’aller plus loin.

M. Jean-Marie Le Guen. Il y a du Domenech dans cet homme-là ! (Sourires.)

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Je prends l’engagement de réduire de deux points l’endettement, pour le faire passer de 66,6 % à moins de 64,6 % du PIB d’ici à la fin de cette année. Cela montrera à nos compatriotes que l’effort de désendettement, qui, par nature, doit s’inscrire dans la durée, peut aussi porter ses premiers fruits rapidement.

Comment ? Par la mise sous tension systématique de l’ensemble des leviers disponibles de désendettement. J’ai ainsi pris la décision d’actionner le plus vite possible trois leviers.

D’abord, les recettes de cessions d’actifs seront prioritairement affectées au désendettement. L’affectation du produit des cessions des concessions autoroutières représente déjà 10 milliards d’euros. En outre, la vente des titres d’Alstom et d’ADP représente plus de 2 milliards d’euros supplémentaires.

M. Jean-Pierre Brard. C’est ça : on liquide et on s’en va !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Au total, entre le 1er janvier et le 31 mai 2006, l’agence France Trésor a déjà racheté 8,6 milliards d’euros de dette, pour l’essentiel grâce aux recettes de cessions.

Ensuite, le pilotage de la trésorerie de l’État va être profondément infléchi. J’ai décidé dès cette année d’un principe très simple : pas un euro d’endettement de plus que le strict nécessaire pour faire face à la gestion courante ! Par conséquent, l’agence France Trésor va se doter de nouveaux outils, tels qu’un bon du Trésor français à très court terme, pour réduire au minimum son matelas de sécurité.

M. Jean-Pierre Brard. On va finir sur les ressorts !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Nous veillerons toutefois à ce que sa capacité à disposer de la trésorerie dont l’État a besoin reste intacte. Elle bénéficiera également d’une amélioration radicale des remontées d’information de la part des administrations dépensières, dans le cadre d’une opération exemplaire de réforme de l’État. J’ai demandé en particulier à l’agence de limiter les émissions de dette à court terme aux stricts besoins de la gestion courante. Ainsi, l’encours de bons du Trésor à court terme a été réduit de près de 11,3 milliards d’euros entre le 31 décembre 2005 et le 31 mai 2006. La seule gestion de la trésorerie de l’État devrait donc permettre de dégager, dès cette année, plus de 20 milliards d’euros de ressources, qui contribueront au désendettement de l’État.

Enfin, cet effort d’optimisation de la trésorerie doit être partagé par l’ensemble des acteurs publics : État, organismes sociaux, collectivités locales, mais aussi des structures comme la CADES, le FSV ou le FFIPSA. C’est dans cet esprit que j’ai annoncé avant-hier, lors du Conseil d’orientation des finances publiques, la création du comité interministériel de la trésorerie des administrations publiques.

M. Gérard Bapt. Ouf ! On est sauvés !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Par ailleurs, si des surplus de recettes fiscales étaient constatés, ils ne seraient pas gaspillés comme ce fut le cas à la fin des années quatre-vingt-dix, mais viendraient réduire encore notre déficit public. Tout le monde se souvient de l’immobilisme tragique…

M. Philippe Auberger. Tragique, c’est bien le mot !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. …qui a conduit la France, entre 1997 et 2002, à ne pas utiliser les ressources exceptionnelles qui étaient les siennes pour se désendetter, alors que tous les autres pays européens le faisaient. Certains ont rappelé quel laxisme prévalait alors. Souvenons-nous de la cagnotte.

M. Jean-Marie Le Guen. Mais la cagnotte, c’est Jacques Chirac qui a voulu la dépenser !

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Et vous l’avez cassée !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Heureusement, nous avons repris en main le destin économique de la France.

En même temps que nous réduirons de manière substantielle l’endettement, nous poursuivrons cette année nos efforts de réduction du déficit public, qui passera de 2,9 % à 2,8 %, malgré le contrecoup lié à la soulte des industries électriques et gazières, qui représente, je le rappelle, un demi-point de PIB.

D’abord, l’exécution du budget 2006 sera tenue de manière rigoureuse, à l’euro près. Nous avons, vous le savez, mis en réserve 6 milliards d’euros, dès le début de l’année, aux termes de la LOLF, dont 4 milliards sont aujourd’hui mobilisables : ils permettront de faire face aux impondérables, sans pour autant dépenser un seul euro de plus que ne nous y autorise le Parlement.

S’agissant des comptes sociaux, nous sommes globalement dans les limites de ce qui était prévu au moment de la loi de financement de la sécurité sociale. Xavier Bertrand et Philippe Bas y reviendront.

Notre troisième engagement est de ramener, pour 2007, le déficit public sous le seuil du déficit stabilisant.

M. Jean-Pierre Brard. Mais qu’est-ce que c’est que ça ?

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. C’est en effet la condition pour rendre pérenne la dynamique du désendettement amorcée cette année. Je sais que cette notion est chère au rapporteur général, elle tient aussi un rôle clef dans notre stratégie de désendettement. Le déficit stabilisant, monsieur Brard, c’est le niveau de déficit pour lequel le ratio dette sur PIB se stabilise, en l’absence de tout mouvement d’actifs ou de passifs.

M. Gérard Bapt. Mais nous le savons déjà !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. M. Brard m’a demandé des explications !

M. Jean-Pierre Brard. Vous manquez de talents pédagogiques !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. En d’autres termes, dès que ce déficit est atteint, toute amélioration nouvelle du déficit contribue automatiquement à réduire la dette. Avec une croissance de l’ordre de 2,25 %, ce déficit stabilisant se situe environ à 2,5 %,…

M. Charles de Courson. Mais non !

M. Gérard Bapt. Il se situe à 1,7 % !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. …et c’est bien l’objectif que nous nous fixons pour 2007. Voilà la situation assainie que nous laisserons à nos successeurs.

M. Jean-Marie Le Guen. Merci d’avance !

M. Jean-Pierre Brard. Après, vous irez plutôt à Suez ou plutôt à GDF, monsieur le ministre ?

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Et ce n’est pas celle que nous avons trouvée en arrivant, il y a quatre ans, tout le monde le sait !

Permettez-moi, encore une fois, de rappeler dans quelle situation paradoxale se trouvait la France entre 1997 et 2002 : alors que le taux de croissance européen était de plus de 3 %, tous les pays d’Europe se sont désendettés, sauf le nôtre, dont la dette a augmenté de 170 milliards d’euros. Et il a fallu quatre ans pour remettre la France à l’endroit ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Augustin Bonrepaux. Mais vous marchez sur la tête !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Le résultat est là : voyez les chiffres annoncés ce matin.

Comment parvenir à cet objectif ? Comme Jean-François Copé reviendra dans un instant sur le projet de loi de finances pour 2007, je me contenterai de trois remarques.

D’abord, la dépense de l’État, l’année prochaine, progressera de 1 % moins vite que l’inflation. C’est le fameux « moins un volume » cher à M. Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Je sais bien que vous n’êtes pas candidat à l’Académie française, mais tout de même !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. L’État perdra de son pouvoir d’achat pour la première fois depuis très longtemps ! Je souhaite que le ministère dont j’ai plus directement la charge soit la vitrine de la réforme de l’État et du désendettement, et, pour cela, nous nous appliquerons à nous-mêmes, dès l’année prochaine, la règle du « zéro valeur », …

M. Jean-Pierre Brard. Je ne comprends que le français !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. …c’est-à-dire une stabilisation de nos dépenses en euros courants !

Ensuite, je vous rappelle que ce PLF va permettre de financer, par la baisse de la dépense budgétaire, la réforme fiscale la plus ambitieuse de ces vingt-cinq dernières années, faisant enfin de la France un pays normal en Europe !

Enfin, comme le Premier ministre l’a annoncé, la baisse des effectifs sera de 15 032 précisément ; pour Bercy seul, de 2 988.


Notre quatrième engagement consiste à mettre en œuvre, dès aujourd'hui, les outils de gouvernance de l'ensemble de nos finances publiques, indispensables pour atteindre l’équilibre des comptes au plus tard en 2010 et passer sous le seuil des 60 % d'endettement.

Pour atteindre ces objectifs, l'effort devra être poursuivi à partir de 2008 et cela ne sera possible qu'en associant encore mieux l'ensemble des acteurs. C'est tout l'enjeu du Conseil d'orientation des finances publiques que nous avons mis sur les rails mardi dernier. Si ces objectifs sont ambitieux, ils sont aussi parfaitement crédibles. Sous l’hypothèse d’une maîtrise collective maintenue de la dépense publique, l’objectif sera atteint en 2009 avec 3 % de croissance par an. Mais même avec une hypothèse plus prudente de 2,25 % qui est la croissance potentielle de la France, l’objectif sera atteint en 2010.

L'enjeu est donc de maîtriser l’ensemble des dépenses publiques. Celles de l'État d'abord, qui doivent rejoindre progressivement le « zéro valeur »,…

M. Jean-Pierre Brard. Parlez donc Français !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. …celles des dépenses sociales ensuite dont il faudra limiter la progression à 1 % en volume sur la période, celles des dépenses locales enfin qu'il faudra aussi maîtriser, voire faire tendre vers le « zéro volume », dans le respect, bien évidemment, de l'autonomie financière des collectivités locales, pour ne pas risquer une augmentation préjudiciable des prélèvements obligatoires.

L'outil de cette réduction ordonnée et maîtrisée des dépenses publiques, c'est une nouvelle gouvernance plus stable et plus vertueuse des finances publiques, que devrait pouvoir proposer, en toute transparence, le Conseil d'orientation des finances publiques. Je lui ai soumis avant-hier, comme premières pistes de travail, les différentes options de rénovation de la gouvernance de nos finances publiques, qui figurent dans le débat d’orientation budgétaire ou qui ont été évoquées avec les collectivités locales lors de la concertation lancée au mois de mai dernier.

La mise en œuvre de la LOLF permet d’assurer une meilleure gouvernance des finances de l'État. Les audits systématiques, pilotés par Jean-François Copé et ses équipes, ouvriront des pistes nouvelles de réforme de l'État dans le souci de dépenser mieux et moins à qualité de service public maintenu ou amélioré.

S’agissant des collectivités locales, le Gouvernement souhaite, dans le cadre du Conseil d’orientation des finances publiques, d’une part, mieux les associer aux décisions les concernant et élargir leurs marges d'initiative et d’action dans le champ des compétences qui leur ont été transférées, et, d’autre part, réfléchir aux moyens d'une meilleure maîtrise de la dépense locale. Jean-François Copé y reviendra dans un instant.

Enfin, je laisserai à Xavier Bertrand et Philippe Bas le soin de revenir plus en détail sur les questions intéressant les organismes sociaux.

Vous le voyez, mesdames, messieurs les députés, le Gouvernement vous présente aujourd'hui, par ce débat d’orientation budgétaire, un acte majeur de responsabilité politique. Ses efforts inédits de pédagogie et de sensibilisation quant aux risques d'un endettement incontrôlé sur notre société ont porté leurs fruits : chacun a pu s'approprier le sujet, et je constate que les Français considèrent aujourd’hui, à juste titre, la dette publique comme l'une de leurs cinq préoccupations majeures.

Je suis convaincu que les orientations que nous vous présentons répondent aux inquiétudes de nos concitoyens. Le programme pluriannuel de désendettement, ce n'est pas le « on verra plus tard » des socialistes,…

M. Gérard Bapt. Oh !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. …et chacun peut en juger sur pièces dès aujourd'hui ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Philippe Auberger. Excellent !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement.

M. Jean-Pierre Brard. Ah ! L’Aiglon de Meaux ! (Sourires.)

M. Philippe Auberger. Ce n’est pas une oraison funèbre !

M. Michel Bouvard. Et il est mieux portant ! (Sourires.)

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, le budget que nous vous présentons avec Thierry Breton est un rendez-vous bien particulier : c'est le dernier budget de cette législature.

M. Jean-Pierre Brard. Ça sent le requiem !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Cela nous donne une bonne occasion de faire le point sur les priorités sur lesquelles nous avons été élus en 2002 par les Français et sur lesquelles nous avons des comptes à rendre.

M. Jean-Pierre Brard. Ne vous en faites pas, nous allons vous aider à les rendre !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. C’est aussi l’occasion pour nous de prendre date et de fixer nos choix pour l'avenir, en accord avec les valeurs qui sont les nôtres.

M. Jean-Pierre Brard. Sont-elles cotées en Bourse ?

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Pour construire ce budget, et pour être à même de vous présenter nos choix budgétaires si tôt dans l'année, nous avons profité d'un contexte totalement inédit : des outils nouveaux sont désormais à notre disposition, à travers la LOLF, et le rapprochement entre le ministère du budget et la réforme de l'État nous permet d’en titrer pleinement les conséquences dans la présentation que nous vous faisons de ces orientations. Jamais, sans doute, un débat d’orientation budgétaire n’avait été aussi important en termes de contenu.

À travers ce budget, nous remplissons trois objectifs.

D’abord, nous honorons le contrat passé avec les Français en 2002.

En 2002, les Français nous ont donné mandat pour restaurer l'autorité de l'État à travers ses fonctions régaliennes. En la matière, le retard pris était colossal : l'insécurité et le sentiment d'impuissance de l'État menaçaient notre pacte social.

Nous avons beaucoup travaillé sur ces sujets et, à travers ce dernier budget de la législature, nous parachevons l'effort entrepris depuis 2002 dans ce domaine.

Vous verrez, avec les documents que vous aurez à examiner en septembre et octobre prochains, que nous sommes au rendez-vous de l’ensemble des grandes lois de programmation que vous avez votées.

La loi de programmation pour la sécurité intérieure est respectée puisque 1 787 équivalents temps plein de gendarmes et de policiers seront créés. Au total, sur l'ensemble de la législature, ce sont plus de 12 000 emplois de policiers et gendarmes qui auront été créés auxquels s'ajoutent 2 000 adjoints de sécurité.

M. Jean-Pierre Brard. Et la délinquance augmente !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. C’est dire combien le retard était grand et combien nous avons eu à cœur de le combler.

Le budget de la justice augmentera de 5 %, afin de poursuivre l'effort de renforcement des juridictions, à travers l'augmentation des effectifs de magistrats et de greffiers et la modernisation des outils informatiques.

La loi de programmation militaire est entièrement respectée pour la cinquième année consécutive. Depuis 2002, les crédits d'équipements militaires auront ainsi progressé de près de 30 %.

J'ajoute que les moyens consacrés à l'aide publique au développement atteindront, en 2007, le seuil de 0,5 % du revenu national brut.

Le projet de loi de finances pour 2007 répond également aux défis de l’avenir et est la traduction concrète des engagements que nous avons pris.

L'effort sans précédent accompli depuis deux ans en faveur de l'enseignement supérieur et la recherche est poursuivi : conformément à la loi de programme sur la recherche, un milliard d’euros de moyens supplémentaires sont dégagés en leur faveur et 1 500 emplois seront créés dans les universités et les établissements publics de recherche. Là encore, nous agissons en accord avec nos convictions et notre conception de la croissance, une croissance durable nourrie par les efforts en matière d’innovation.

Ensuite – c’est le deuxième objectif –, nous souhaitons rendre un meilleur service public aux Français.

Nous avons la conviction que ce n'est pas par toujours plus de dépense publique que l’on améliore la qualité des services publics rendus aux Français.

M. Michel Bouvard. Très bien !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Du reste, nous avons l’intention de le démontrer dans les mois qui viennent.

Ce que les Français demandent, c'est une administration qui se modernise, et c'est surtout de pouvoir disposer d'un meilleur service public à un moindre coût. Tel est notre objectif.

C'est exactement cette démarche que vous trouverez dans le projet de budget pour 2007. Nous faisons en effet la démonstration qu'il est possible d'améliorer la qualité de nos services publics, tout en réduisant la dépense. Tout sera fait pour prouver qu’on ne peut pas continuer de prétendre que l’administration marche moins bien si l’on n’augmente pas tous les ans le nombre des fonctionnaires. C’est une vision tronquée que l’ensemble des grands pays européens ont abandonnée, sauf le nôtre. Nous en ferons encore la preuve cette année.

Pour cela nous nous appuyons sur trois outils nouveaux.

D'abord, les nouvelles technologies. Il faut utiliser internet « à tous les étages ». Là encore, nous avons la chance que la couverture internet à haut débit soit quasi-totale, car c’est un levier majeur de la modernisation du service public. À ce jour, 5,3 millions de Français ont déclaré leurs impôts sur internet. Ce niveau est inédit. Et ce n’est pas fini puisque, dans certaines régions de France, il est possible de faire sa déclaration d’impôts sur internet jusqu’au 27 juin prochain.

M. Michel Bouvard. Tout à fait !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. À la clé, il y a un meilleur service rendu aux Français, une administration qui se modernise et de moindres besoins en termes d’effectifs, l’équivalent de 750 équivalents temps plein, d’après l’audit que j’ai fait réaliser.

Ensuite, il y a les audits de modernisation, qui composent une véritable boîte à outils sur laquelle les ministres pourront s’appuyer pour conduire les réformes et justifier leurs choix en matière de crédits et d'effectifs.

J'ai lancé cette semaine la quatrième vague, qui comprend trente-cinq audits. Ce seront 38 milliards d'euros de dépenses qui vont être passés au crible, sur des sujets aussi importants que l'allocation de parent isolé, la dématérialisation de la chaîne pénale, la mise en place de l'agence de délivrance des titres de l'État sécurisés, les aides de l'État accordées aux entreprises, les remboursements et dégrèvements d'impôts locaux, auxquels s'ajoutent des audits transversaux, sur l'entretien de l'immobilier de l'État ou sur la gestion administrative des personnels et de la paye, afin de moderniser la manière dont sont gérés et payés les 2,3 millions d'agents de l'État.

D’ici à la fin de l'été, nous disposerons des résultats de cent audits, couvrant 100 milliards d'euros de dépenses de l'État. C’est une démarche tout à fait inédite sur laquelle je veux appeler votre attention, car elle permettra de regarder différemment l’efficacité de la dépense publique.

J’en veux pour preuve l'audit sur les décharges de services des enseignants du second degré. Je vous rappelle qu'elles représentent l'équivalent de 28 000 postes à plein-temps et qu'elles sont régies par des textes de 1950. L'audit conclut à la possibilité de supprimer 10 000 emplois à terme. Dès cette année, Gilles de Robien a décidé d’en tirer les conséquences : 3 000 emplois seront économisés cette année, cependant que le système des décharges sera entièrement revu. Personne n'y perdra financièrement, et ce sont désormais les chefs d'établissement qui piloteront le dispositif.

Enfin, nous nous appuyons sur les outils d'intéressement à la réforme. Là encore, la démarche est innovante. II s'agit des contrats de performance que les ministres signent pour trois ans en s'engageant à moderniser leur administration, tant en matière de moyens que d'effectifs, avec un principe clé : la restitution à ces ministères d'une partie des gains de productivité réalisés dans le cadre de ces contrats.

Ainsi, le ministère des affaires étrangères s'est engagé par contrat à la rénovation de l'outil informatique, à une meilleure gestion des ressources humaines, à l’adaptation du réseau consulaire et à une politique des achats. Ces réformes permettront de réaliser des gains de productivité et des économies d'emplois très significatives. Au ministère des finances, ce sont près de 3 000 départs en retraites qui ne seront pas remplacés, ce qui représente deux départs à la retraite sur trois.

Enfin, au ministère de l'équipement, la réduction des effectifs de 1 267 équivalents temps plein s'inscrit également dans le cadre du contrat qui est en cours de finalisation. Il s'attachera notamment à réformer les services déconcentrés du ministère, après la décentralisation de la quasi-totalité du réseau routier national.

À travers ces trois leviers de modernisation, nous offrons aux Français un service public profondément modernisé et rénové, tout en contribuant à la baisse de la dépense publique et du nombre de fonctionnaires. Comme vous le savez, nous allons pouvoir le réduire de 15 000 en 2007.

J'entends bien sur ce dernier point les critiques, les interrogations et les craintes, et je veux y répondre point par point.

D’abord, il ne s'agit que de départs en retraite non remplacés, dans un contexte bien particulier puisque l'année 2007 sera celle d'un pic de départs en retraite. Il n'aurait pas été responsable de la part de notre famille politique de ne pas prendre la mesure de cette opportunité.

Ensuite, ces baisses sont totalement argumentées. Auparavant, on fixait une norme aveugle et brutale. Aujourd'hui, ces baisses sont le produit d'un diagnostic précis des besoins, secteur par secteur, ministère par ministère, politique publique par politique publique.

Enfin, elles ne compromettent en rien la qualité du service rendu aux Français.

L’exemple de celui de l'éducation nationale est certainement le plus éclairant. Il s’agit de tirer les conséquences des évolutions démographiques, en maintenant un taux d'encadrement des élèves inchangé. Dans le primaire, les effectifs des élèves augmentent, donc nous créons 600 postes. Dans le secondaire, au contraire, le nombre d'élèves diminue, nous recruterons donc moins, économisant ainsi 2 400 postes.

Dans ce processus, tout le monde est gagnant : les fonctionnaires eux-mêmes, car rien ne peut se faire sans eux – je vous confirme que la moitié des économies dégagées est restituée aux ministères pour améliorer la carrière des fonctionnaires et les inciter financièrement à la réforme ; le contribuable, qui « en a pour ses impôts » ; l'usager, à qui l'on offre un meilleur service public.

Certains pourraient nous dire que le moment n'est pas opportun puisque nous sommes en période préélectorale. Au contraire, il faut rappeler que nous n'avons pas le droit de céder à la facilité. Et puis, souvenons-nous de la dernière année de Lionel Jospin : 17 000 emplois publics créés, et 5 milliards de cadeaux distribués sans que le succès électoral n'ait été au rendez-vous. C'est le moins qu'on puisse dire !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. C’est vrai !

M. Jean-Pierre Brard. Vous, vous distribuez aux riches !


M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État.
Enfin – et c’est notre troisième objectif –, nous avons fait le choix de la responsabilité.

Ce budget marque un tournant à double titre.

Il constitue clairement la première étape de notre stratégie de désendettement, comme l’a expliqué Thierry Breton. C’est un budget qui montre le chemin.

M. Jean-Pierre Brard. Le chemin de croix !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Pour la première fois, nous allons baisser la dépense publique, tout en respectant nos priorités, en garantissant la qualité du service public et en finançant la réforme fiscale !

Ne disposant que de 2,2 milliards d’euros de marges pour les dépenses supplémentaires, il a fallu hiérarchiser les priorités. Tout le monde s’y est mis ! Certains chercheront sûrement qui sont les gagnants et les perdants, mais il faut en finir avec cette logique : nous avons négocié ce budget en veillant scrupuleusement à ce qu’il n’y ait aucun passe-droit et à ce que tous les ministères contribuent à l’effort.

En voici deux exemples. D’abord, la défense : la progression des crédits, qui avait été de 1,3 milliard en 2006, sera limitée à 800 millions.

M. Jean-Pierre Brard. D’ailleurs, M. Dassault se plaint déjà !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Ensuite, le ministère des finances : grâce à une stratégie de modernisation à tous les niveaux désormais bien ancrée, les dépenses ne progresseront pas l’an prochain. Nous tirons profit de deux chantiers transversaux : l’audit sur les achats de l’État, qui permettra d’économiser à terme 10 % du total du volume des achats, soit 1,3 milliard ; la réduction des effectifs par le non-remplacement des départs en retraite, qui se traduira par un gain de 500 à 600 millions d’euros sur la masse salariale de l’État.

Enfin, ce budget permet de prendre date face à une gauche, et en particulier un parti socialiste, qui donne le sentiment de ne pas avoir changé d’époque.

M. Didier Migaud. Ce sont les Français qui en jugeront, pas vous, monsieur le ministre !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Finalement, le choix sera simple entre, d’une part, la responsabilité, c’est-à-dire la capacité de financer les priorités politiques sur lesquelles les Français attendent des résultats, tout en maîtrisant la dépense publique et en réduisant le déficit et l’endettement – tel est le choix que nous faisons clairement avec ce budget, en plein accord avec les principes et les engagements de notre famille politique – et, d’autre part, la dépense publique supplémentaire, donc l’impôt supplémentaire et la dette, si l’on se fie au programme qui vient d’être présenté par le parti socialiste.

Comme ce dernier ne semble pas en mesure de chiffrer son propre programme,...

M. Gérard Bapt. Mais si !

M. Jean-Pierre Brard. Pas plus que vous, vos baisses d’impôt !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. ...ou qu’il tarde à le faire, je me suis livré moi-même à l’exercice il y a quelques jours, et je le refais bien volontiers.

La mise en œuvre de ce programme se traduirait par une aggravation annuelle des charges publiques de 115 milliards d’euros en 2012.

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Eh oui !

M. Didier Migaud. C’est farfelu !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Vous êtes dur avec les vôtres, monsieur Migaud !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Farfelu peut-être, mais c’est dans votre programme ! Je m’inquiète, monsieur Migaud, car vous suivez de très près les questions budgétaires et j’ai la faiblesse de penser que, parmi vos amis, vous êtes celui qui compte le moins mal !

M. Jean-Pierre Brard. M. Migaud parle de votre chiffrage !

M. Didier Migaud. Vous êtes le porte-parole du Gouvernement, pas celui du parti socialiste !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Ainsi, le contrat d’entrée dans la vie active, le fameux « RMI jeunes », que vous avez promis aux Français et qui correspond à un véritable choix de société, coûtera 15 milliards d’euros. Il s’agit de l’allocation de 3 000 euros par an que vous voulez verser à tous les jeunes soit en formation, soit en recherche d’emploi, soit en contrat précaire, soit 4,9 millions de personnes.

M. Jean-Pierre Brard. Pour les jeunes, vous préférez, vous, le CPE !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Passons à l’abrogation de la loi Fillon sur les retraites. Comme vous le savez, elle permet une économie de 19 milliards à l’horizon 2020. Vous l’avez combattue avec beaucoup de force et de constance, et, si l’on tient compte du pic de départs en retraite entre 2005 et le début des années 2010, revenir sur cette réforme coûterait 12 milliards d’euros en 2012.

Quant à la renationalisation d’EDF,...

M. Jean-Pierre Brard. Voilà une bonne idée !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. ...elle représenterait 11 milliards. Je ne doute pas que vous la voterez, monsieur Brard, avec les hausses d’impôts et l’endettement qui iront avec !

M. Jean-Marie Le Guen. Et celle de Suez, préconisée par M. Sarkozy : 55 milliards !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. C’est ce qu’il faudrait pour passer de 85 % à 100 % du capital d’une entreprise valorisée à près de 80 milliards d’euros !

M. Didier Migaud. Vous êtes le porte-parole du Gouvernement, pas celui du parti socialiste !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Monsieur Migaud, détendez-vous ! Je vais poursuivre la liste et vous m’expliquerez ensuite où je me suis trompé.

La mise en place de la « carte Vitale professionnelle » : 10 milliards d’euros !

Réactivation des emplois jeunes dans le secteur public : 5 milliards d’euros !

M. Éric Besson et M. Didier Migaud. Parlez-nous donc du budget de la France que vous préparez, plutôt que du programme socialiste !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Mise en place d’un bouclier logement : 4 milliers d’euros ! Vous avez dû être séduit par notre bouclier fiscal, et vous avez sans doute cherché à vous en inspirer, mais nous ne sommes décidément d’accord sur rien !

Je pourrais continuer. C’est d’ailleurs ce que j’ai fait et le chiffrage est à votre disposition !

Ce n’est pas tout de clamer qu’il est farfelu, encore faut-il en apporter la preuve. Monsieur Migaud, vous êtes de ceux qui, à gauche, comptent le moins mal, et il vous faudra être sûr de vous car nous aurons, vous et moi, de nombreuses occasions d’en débattre. Et vous imaginez bien que, sur ce point, je ne vous lâcherai pas.

Nous arrivons à un total de 115 milliards !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Ah !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Une addition de 115 milliards d’euros pour la nation ! Vous ne manquerez pas, dans l’opposition, de la qualifier de farfelue, comme tout le reste ! Cela fait tout de même sept points de PIB.

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Oh !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Ainsi, si la gauche arrivait un jour au pouvoir, les dépenses publiques atteindraient 61 % du PIB !

M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan. Cinq points de plus que la Suède !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Un record mondial ! Même Cuba n’a pas osé ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Didier Migaud. C’est vous qui avez augmenté les dépenses publiques et fait exploser la dette !

M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur le ministre, vous avez la légèreté de Ponia l’ancien !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Il n’y a que deux manières de financer ces mesures. La première consiste en une augmentation massive des prélèvements obligatoires, et à en juger d’après la manière dont la gauche préside les régions, la tentation d’augmenter les impôts risque d’être forte ! Et alors les prélèvements obligatoires dépasseraient le seuil de 50 % de la richesse nationale !

M. Jean-Pierre Brard. On augmentera l’impôt sur les riches !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. La seconde, c’est un triplement du déficit public, ce qui implique encore de recourir à l’endettement. Les Français pourront juger en connaissance de cause.

Dans l’un et l’autre cas, les premières victimes seraient les classes moyennes puisque c’est sur elles que reposerait l’essentiel du financement.

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Comme d’habitude !

M. Jean-Pierre Brard. Bettencourt et Forgeard font partie des classes moyennes ? On aura tout vu !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Comme vous avez été très ébranlés quand j’ai cité ces chiffres il y a quelques jours, vous avez nié en me reprochant de m’être trompé, et vous nous avez prétendu que la croissance réglerait tout.

Je sais que, en matière de promesses, la gauche ne recule jamais devant rien, mais, pour financer 115 milliards de dépenses publiques supplémentaires par an, il faudrait que les Français, par leur travail, soient capables de générer un taux de croissance de 8,5 % ! Une croissance à la chinoise !

M. Didier Migaud. Nous avons en effet la prétention de faire mieux que vous !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. C’est ça qui est farfelu, pour le coup !

M. Michel Bouvard. Magic Royal !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Chacun l’aura compris, le compte n’y est pas !

Loin de moi l’idée d’être désobligeant à votre égard – je ne voudrais pas vous mettre en colère et vous voir quitter l’hémicycle –, mais je ne vous lâcherai pas !

M. Jean-Pierre Brard. Vous préférez « lâcher » à « lâcheté » !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Sur ces sujets, il faudra bien avoir un débat de fond au sens noble du terme, car les Français doivent savoir concrètement les conséquences d’un programme de gauche ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Didier Migaud. Si vous nous parliez de vous !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Le débat que nous aurons avec vous l’automne prochain à l’occasion de la présentation de la loi de finances pour 2007 sera aussi l’occasion de tracer des perspectives d’avenir, pour permettre à chacun de faire choix qui s’impose entre la responsabilité et la démagogie, entre la modernité et l’archaïsme, entre la réforme et le conservatisme.

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. C’est parfaitement clair !

M. Didier Migaud. Quelle caricature !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Vous l’aurez compris, les temps beaucoup ont changé et les débats promettent d’être passionnants. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé et des solidarités.

M. Augustin Bonrepaux et M. Didier Migaud. Il y en a combien comme ça ? (Sourires.)

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités. Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames et messieurs les députés, le débat d'orientation sut les finances sociales qui nous réunit aujourd'hui est une première...

M. Jean-Pierre Brard. Et une dernière pour vous !

M. le ministre de la santé et des solidarités. ...et il représente une avancée importante introduite par la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale votée l'an dernier à l'initiative – je tiens à le rappeler – de votre assemblée, puisque c'est un amendement d'Yves Bur qui proposait ce nouveau rendez-vous.

M. Jean-Pierre Brard. Toute la rigueur alsacienne !

M. le ministre de la santé et des solidarités. C'est une avancée importante parce qu'il est en effet essentiel que le Parlement, au moment où le Gouvernement s'engage dans la phase d'élaboration et de préparation du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale, puisse disposer d'une présentation générale des orientations et des grands équilibres financiers.

Un tel rendez-vous de printemps existait déjà dans le cadre de la loi organique relative aux lois de finances, et c'est à juste titre que vous l’avez étendu aux finances sociales, lesquelles représentent en effet des enjeux de plus de 350 milliards d’euros par an.

Plus que jamais, une cohérence d'ensemble s'impose dans le pilotage des finances publiques. En la matière, notre stratégie ne sera efficace qu’en associant à sa définition tous les acteurs de la dépense et en prenant en compte toutes les dimensions de la dépense publique. Telle est bien notre façon de travailler avec Philippe Bas, Thierry Breton et Jean-François Copé,...

M. Jean-Pierre Brard. C’est mieux que le Onze de France !

M. le ministre de la santé et des solidarités. ...et tel est bien le but que nous poursuivons dans le prolongement de la Conférence nationale sur les finances publiques présidée par le Premier ministre le 11 janvier dernier et qui a rassemblé, outre le Gouvernement et le Parlement, le Conseil économique et social, les associations d'élus locaux, les partenaires sociaux et les représentants des organismes de protection sociale. Cette conférence a marqué une étape décisive dans le pilotage de nos finances publiques, parce que chacun a pu donner sa vision. Afin de pérenniser cette démarche, le Gouvernement a institutionnalisé par un décret du 5 mai dernier la Conférence nationale et instauré un Conseil d'orientation des finances publiques, dont la composition est calquée sur celui de la Conférence, et qui a été installé avant-hier.

Souhaitant placer notre pays sur la voie de l'équilibre des comptes publics et pour mettre en œuvre une stratégie de désendettement, le Premier ministre a assigné aux finances sociales deux objectifs : un retour à l'équilibre du régime général de la sécurité sociale au plus tard à l'horizon 2009 ; ensuite, pour tenir compte des besoins croissants dus notamment aux effets du vieillissement et du progrès médical, un objectif d'évolution des dépenses de l'ensemble des administrations de sécurité sociale de plus 1 % au-dessus de l'inflation. C'est dans ces perspectives que sera élaboré le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 qui sera discuté à l'automne prochain.

Je me concentrerai sur ce que cela signifie pour l’assurance maladie et pour les dépenses de santé.

Le retour à l’équilibre de la branche maladie du régime général suppose que les dépenses d'assurance maladie évoluent en moyenne de 2,2 % en valeur, soit 0,4 % en volume sur la base d'une hypothèse d'inflation à 1,8 %. Il faut donc que se poursuive l'inflexion de tendance déjà constatée pour les dépenses d'assurance maladie que nous enregistrons depuis 2004 et encore davantage en 2005 et 2006, grâce à la réforme de 2004. En 2003, les dépenses relevant du champ de l'ONDAM ont crû de 6,4 %. En 2004, année du vote de la loi portant réforme de l'assurance maladie, nous avons enregistré une première inflexion à la baisse, avec une croissance de l'ONDAM de 4,9 %. Et en 2005, première année de mise en œuvre de l'ensemble des dispositifs prévus par la réforme, la progression a été de 3,9 %, avec, pour la première fois depuis 1997, le respect de l'ONDAM voté par le Parlement dans la loi de financement, à 135 milliards d’euros. Pour 2006, l'objectif fixé par la loi de financement est une progression de 2,5 %. Nous sommes donc résolument sur la voie de la maîtrise des dépenses d'assurance maladie, nous avons enrayé les rythmes de croissance atteints dans le passé.

Il nous faut poursuivre dans cette voie. Les tendances qui se dégagent depuis le début de l'année 2006 confirment, mois après mois, la modération des dépenses, en particulier pour les soins de ville : de janvier à mai, la hausse n’a été que de 1,4 % par rapport à la même période de 2005.

La modération des dépenses a pour corollaire une réduction très nette du déficit de l'assurance maladie, que chacun s’accorde à reconnaître. Après avoir atteint 11,6 milliards d’euros en 2004, le déficit a été ramené 8 milliards en 2005, alors qu'il aurait été, il faut le rappeler, de 16 milliards d’euros en l'absence de réforme. En 2006, le déficit sera à nouveau significativement réduit, comme l'a confirmé la commission des comptes qui s'est réunie la semaine dernière, estimant le déficit prévisionnel pour 2006, à 6,3 milliards d’euros. Nous sommes donc bien sur la trajectoire du retour à l'équilibre...

M. Jean-Marie Le Guen. Non !

M. le ministre de la santé et des solidarités. ...et notre objectif pour 2007 est de continuer sur cette trajectoire, en visant un déficit inférieur à 4 milliards d’euros.

M. Jean-Pierre Brard. Vous ne serez plus là pour le voir ! Vous serez en train de cultiver votre jardin !

M. le ministre de la santé et des solidarités. Nous sommes partis de 16 milliards, et, dans deux ans, nous aurons divisé le déficit par quatre !

Mesdames et messieurs les députés, tout cela fait beaucoup de chiffres, ce qui est normal dans le cadre d'un débat d'orientation budgétaire. Pourtant, les chiffres ne sont pas une fin en soi : nous voulons en effet, par un retour à l'équilibre financier, sauvegarder, pour nous et pour les générations futures, notre système de sécurité sociale, en le modernisant et en l'améliorant.

C'est en cela d'ailleurs que la réforme de l'assurance maladie issue de la loi du 13 août 2004 se distingue des autres « plans de sauvetage » qui l'ont précédée. S’inspirant en effet, point par point, du rapport et de l’analyse du Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie, elle repose avant tout sur les changements de comportement en plaçant la qualité au premier plan. Le redressement financier de l’assurance maladie va de pair avec une politique de santé ambitieuse car, selon nous, la seule façon de maîtriser durablement la dépense, c’est la maîtrise médicalisée et l’évolution des comportements.

Je voudrais en effet insister sur le développement de la prévention qui constitue un véritable investissement dans l'avenir. Elle est à la fois la condition de l'amélioration de l'état de santé de notre population et de la maîtrise durable des dépenses.

Mme Claude Greff. Très bien !


M. le ministre de la santé et des solidarités.
C’est donc bien une approche qualitative et structurante sur le long terme qui nous anime.

Tout d’abord, l’essor du parcours de soins coordonné autour du médecin traitant constitue un acquis incontestable de la loi du 13 août 2004. Je me souviens des Cassandre qui affirmaient que la réforme du médecin traitant ne marcherait jamais. Or, la réalité veut qu’en un peu plus d’un an et demi, près de quarante millions d’assurés sociaux ont choisi leur médecin traitant, ce qui montre que les Français se sont bien appropriés ce dispositif.

Je précise également que 78 % des consultations s’effectuent dans le cadre du parcours de soins, et moins de 2 % seulement sont réellement « hors parcours », le patient ayant consulté directement un spécialiste alors qu’il a un médecin traitant.

En outre, la maîtrise médicalisée est d’ores et déjà un succès. Les Cassandre annonçaient qu’elle ne marcherait jamais elle non plus. Or, le rythme d’évolution des soins de ville s’est ralenti grâce à une attention plus grande des professionnels aux conditions de prescription des médicaments et des indemnités journalières.

M. Jean-Pierre Brard. Vous finirez comme Hector ou Achille !

M. le ministre de la santé et des solidarités. L’engagement de maîtrise médicalisée a produit des résultats favorables. La dynamique a non seulement été lancée, mais confirmée par l’avenant n° 12 à la convention, signé cette année, qui approfondit l’effort et l’engage dans un cadre pluriannuel en fixant de nouveaux objectifs : 800 millions d’euros pour 2006 et 600 millions d’euros pour 2007.

Grâce au parcours de soins et à la maîtrise médicalisée, nous sommes engagés dans une dynamique permettant d’améliorer la qualité des soins tout en maîtrisant les dépenses. Nous savons en effet qu’il existe encore aujourd’hui de réels gisements d’économies. Réaliser ces économies n’impliquerait en rien la diminution de la qualité des soins mais, au contraire, l’améliorerait.

La Cour des comptes souligne que les dépenses inutiles représentent un montant de 6 à 8 milliards d’euros dont environ 1 milliard d’euros pour les seuls examens inutiles – environ 15 % du total des examens. De même, s’agissant des dépenses d’indemnités journalières – qui jusqu’à ces dernières années avaient crû à des rythmes déraisonnables de l’ordre de 10 % et qui faisaient aussi l’objet d’abus –, nous avons réussi, grâce à la réforme, à inverser la tendance puisque, après une première baisse de 1 % en 2004, le rythme s’accentue pour atteindre 1,4 % en 2005. Il en va de même pour les premiers mois de 2006, où nous enregistrons de janvier à mai une diminution de 3,7 % par rapport à la même période de l’année précédente. Ces données représentent 500 millions d’euros d’économie, et cela simplement en organisant et en contrôlant mieux le système.

Le secteur du médicament contribue lui aussi significativement au redressement durable des comptes et à la réforme de l’assurance maladie. Nous privilégions des axes d’action structurants.

Grâce aux médicaments génériques, 234 millions d’euros au total ont été économisés en 2005, dont 170 millions d’euros au titre de l’augmentation de la pénétration des génériques. En 2006, une forte impulsion a été donnée à la substitution, grâce aux accords signés entre l’UNCAM, les pharmaciens et les médecins. Ces accords prévoient une progression régulière de la substitution avec un objectif de 70 % de pénétration en décembre 2006. Ces engagements sont même en passe d’être dépassés puisqu’au 15 mai, la pénétration des génériques atteignait déjà près de 67 %.

Nous avons préféré l’approche plus structurante de la substitution, au TFR initialement envisagé. Je souhaite aussi préciser que nous menons une action résolue en matière de politique de prix, qui a permis en 2005 de dégager 365 millions d’euros d’économies.

Enfin, les grands conditionnements ne répondent pas seulement à une logique de santé publique ou à un esprit de bon sens, mais il faut savoir qu’ils permettront de générer des économies. Plus de vingt médicaments sont désormais disponibles en conditionnement de trois mois. Leur délivrance produira tous ses effets à partir du deuxième semestre 2006. Nous sommes aussi en mesure de mettre un terme à cette gabegie constatée depuis des années : trois quarts des boîtes de médicaments ouvertes ne sont jamais terminées.

Au total, les mesures prises dans le secteur du médicament produisent leurs effets. Ce qui est particulièrement encourageant, et nous voulons prolonger cette tendance en 2007, c’est que l’on assiste à un infléchissement indéniable des dépenses de médicaments. Les dernières données relatives aux remboursements de la CNAMTS font en effet état d’une progression de seulement 1,8 % pour le mois de mai contre 2,2 % pour avril, ce taux étant de 3,9 % en mars, 4,6 % en février et 5,7 % en janvier.

M. Gérard Bapt. On doit compter avec l’« effet générique » !

M. le ministre de la santé et des solidarités. En ce qui concerne les établissements de santé, ils se sont engagés dans les réformes structurelles prévues par le plan « Hôpital 2007 ». La part de tarification à l’activité s’élève à 35 % en 2006 pour les établissements publics et privés participant au service public. Le Gouvernement a aussi engagé des travaux de mesure des charges spécifiques pesant sur le service public hospitalier afin de réussir une convergence entre les tarifs des établissements publics et privés.

Parallèlement, la rationalisation des achats, l’amélioration du contrôle de gestion et des systèmes d’information vont permettre au secteur hospitalier de savoir et de pouvoir toujours mieux servir la collectivité en proposant les meilleurs services et les meilleurs soins aux meilleurs coûts. Il s’agit aussi de la logique du « dépenser mieux pour soigner mieux ».

Enfin, il faut développer la prévention, une priorité non seulement pour cette année, mais qui sera prolongée et amplifiée en 2007. Comme je l’ai indiqué, la prévention est à la fois une condition pour garantir, à terme, la maîtrise durable des dépenses d’assurance maladie et une condition pour améliorer l’état de santé des Français. En complément de la dynamique instaurée par la réforme de l’assurance maladie, la majorité a en effet adopté la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique afin de préparer l’avenir. Je souhaite donner tout son essor à cette loi et à l’ensemble des dispositifs qu’elle prévoit.

Je pense qu’il faut renforcer la stratégie de prévention en la focalisant sur les risques aux différents âges de la vie ainsi que sur certaines populations cibles, afin de réduire les inégalités de santé, qu’elles soient territoriales ou sociales. J’ai annoncé un certain nombre d’initiatives dont, à partir du 1er juillet, le remboursement de l’ostéodensitométrie. Par ailleurs, à partir de la rentrée, les enfants âgés de six ans et ceux âgés de douze ans seront soumis à un examen bucco-dentaire de prévention. Enfin, vous le savez, nous avons lancé un certain nombre de plans de santé publique et de plans stratégiques.

C’est grâce à ces actions, fidèles à la logique de maîtrise médicalisée des dépenses, que nous dégageons et continuerons de dégager en 2007 les marges de manœuvre nous permettant de poursuivre l’amélioration de la qualité du système de santé et de renforcer l’accès aux soins.

En ce qui concerne l’accès aux soins, au-delà des mesures de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 revalorisant fortement le montant de l’aide à la complémentaire – notamment pour les personnes âgées de plus de soixante ans qui bénéficient désormais d’une aide de 400 euros par an –, le Président de la République vient de demander un relèvement du plafond de revenus des bénéficiaires de 15 % à 20 % au-dessus du plafond de ressources de la CMUC

Le PLFSS 2007 devra mettre en œuvre cette décision, qui fera passer le nombre de bénéficiaires potentiels de 2 millions à 2,9 millions.

La question de l’égalité d’accès aux soins est aujourd’hui fondamentale, et je tiens à vous informer que j’ai saisi M. le président du conseil de l’Ordre des médecins de l’étude que vient de publier le fonds CMU et qui montre des restrictions inacceptables à l’offre de soins. Je lui ai demandé quelles décisions il entendait prendre à l’égard des professionnels de santé qui ne respecteraient pas le principe sacré de l’égalité aux soins, et qui retarderaient la prise en charge des bénéficiaires de la CMU.

M. Jean-Pierre Brard. Vous parlez des médecins, mais il y a aussi les pharmaciens !

M. le ministre de la santé et des solidarités. Tous les professionnels de santé sans exception sont concernés, mais vous aurez compris, monsieur Brard, que le président du conseil de l’Ordre des médecins est avant tout compétent pour les médecins !

Moderniser notre système de santé, c’est aussi l’améliorer. Les économies réalisées nous permettent aujourd’hui, avec la prise en charge de traitements innovants, de pouvoir valoriser un certain nombre de points trop longtemps oubliés. Je pense à la prise en charge de la douleur, mais aussi à un certain nombre de dossiers essentiels, comme la mise en œuvre du plan de démographie médicale.

En conclusion, monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, voilà la dynamique dans laquelle nous sommes engagés. Nous sommes fidèles à la feuille de route tracée par le Président de la République en ce qui concerne le retour à l’équilibre des comptes publics et à l’équilibre des finances sociales.

Cette réforme est en marche, elle produit ses résultats. Notre objectif pour 2007 est de poursuivre et d’amplifier les dynamiques à l’œuvre en gardant la même logique d’action. Cette logique est celle de la réforme souhaitée par le Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie et instaurée par la loi du 13 août 2004.

Atteindre les objectifs ambitieux du Gouvernement nécessite un travail de longue haleine. Ainsi, cette réforme a toujours eu une vocation pluriannuelle. Mais il faut aussi assurer un suivi constant. Nous devons donc poursuivre avec persévérance la mise en œuvre de cette réforme dans toutes ses dimensions. Elle repose sur les changements de comportements des acteurs.

Voilà pourquoi j’ai décidé de réunir depuis le début du printemps un comité de suivi de la réforme de l’assurance maladie et de pilotage de l’ONDAM, qui regroupe le directeur de la sécurité sociale, le directeur des hôpitaux, le directeur général de la santé, le président du comité économique du médicament et le directeur général de l’UNCAM. Le PLFSS 2007 s’inscrira dans la même logique.

M. Jean-Marie Le Guen. L’UNCAM vous a demandé 3 milliards de recettes supplémentaires, et vous n’en avez pas dit un mot !

M. le ministre de la santé et des solidarités. Nous continuerons à travailler de la même façon, pour poursuivre le redressement de l’assurance maladie afin de sauvegarder notre système de santé mais surtout de le moderniser et de l’améliorer. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, il est important que nous puissions aujourd’hui nous réunir pour nous mobiliser tous ensemble sur le thème de l’équilibre de nos finances publiques, envisagé pour la première fois au sens le plus large, et cela au lendemain de la réunion de la Conférence nationale des finances publiques présidée par Thierry Breton avant-hier. Pour la première fois dans notre histoire économique, financière et même politique, le Gouvernement, les gestionnaires de la sécurité sociale et les responsables de toutes les collectivités territoriales de la République ont été réunis. Cela marque bien une prise de conscience importante de la nécessaire solidarité de tous face aux défis et aux contraintes de l’avenir de nos finances publiques.

Comme le disait à l’instant Xavier Bertrand, après Thierry Breton et Jean-François Copé, il est essentiel de disposer d’une vision d’ensemble de nos finances publiques pour en appréhender clairement les enjeux.

Les comptes publics, en effet, ne font qu’un dans l’esprit de nos concitoyens, qui, bien entendu, ont raison : quelle que soit la source de financement en cause – budget de l’État ou des collectivités territoriales, dépenses de sécurité sociale –, il s’agit toujours de faire fonctionner des services publics aussi importants que l’école ou l’hôpital. Que la première soit financée par l’État et par les collectivités territoriales, et le second par la sécurité sociale, est de peu d’intérêt pour nos compatriotes.

M. Gérard Bapt. Ah bon ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. En définitive, c’est toujours la collectivité qui les finance, et c’est toujours sur le même contribuable que la charge repose.

M. Didier Migaud. Sur le petit et le moyen, car le gros contribuable, vous l’avez servi !

M. Augustin Bonrepaux. C’est vrai que c’est toujours sur les mêmes que tout repose !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Ce qui importe, c’est que les services publics fonctionnent efficacement et au meilleur coût, et que la solidarité soit assurée en maintenant un haut niveau de protection sociale pour tous les Français.

Je rappelle à ce sujet que, contrairement aux idées fausses que certains se complaisent à colporter,…

M. Didier Migaud. Bien sûr, il n’y a que vous qui détenez les idées vraies !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. …le taux de couverture des dépenses de santé a progressé au cours des dix dernières années,...

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Voilà !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. …atteignant aujourd’hui 79,8 %, soit deux points de plus qu’en 1994.

La sécurité sociale, c’est le patrimoine commun de tous les Français.

M. Didier Migaud. Elle est en déficit depuis quatre ans !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. C’est pour défendre ce patrimoine qu’ils ont massivement accepté de choisir leur médecin traitant et que les médecins eux-mêmes se sont massivement engagés dans une nouvelle maîtrise de leurs prescriptions, notamment en ce qui concerne les arrêts de travail injustifiés, les prescriptions de certains médicaments, comme les antibiotiques, les antidépresseurs…

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Vous en prenez trop, messieurs de l’opposition !

M. Jean-Pierre Brard. Faire déprimer les autres, telle est votre politique ! (Sourires.)

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. …ou l’essor des génériques.

Il n’y a pas d’alternative sérieuse à cette politique. Imaginez qu’un autre gouvernement, qu’une autre majorité veuille réduire le taux de couverture des dépenses de santé par l’assurance maladie, ce serait inefficace pour réduire les déficits, puisque ceux-ci sont causés par l’augmentation des dépenses et non par les modalités de leur prise en charge.

M. Jean-Pierre Brard. Quel orateur ! On imagine Aristide Briand à la tribune et on mesure la différence !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. D’ailleurs, dans les pays dépourvus de sécurité sociale, les dépenses de santé sont beaucoup plus importantes, évoluent beaucoup plus vite, sont beaucoup moins contrôlées, comme en témoigne l’exemple américain…

Mme Jacqueline Fraysse. Le bel exemple !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. …qui prouve bien que, dans ces pays, les malades ne sont en rien mieux soignés, certains ne l’étant même pas du tout !

M. Jean-Pierre Brard. Vous venez seulement de le découvrir ?


M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.
Cette politique – et je crois savoir, en dépit de vos vociférations, que ce n’est pas celle que vous préconisez, mesdames et messieurs les députés de l’opposition – serait également coûteuse pour les Français : j’ai calculé qu’une baisse de 5 % du taux de couverture des dépenses de santé par l’assurance maladie entraînerait une hausse de 35 % des cotisations d’assurance complémentaire, soit l’équivalent de 0,75 % de CSG ! De cela, nous ne voulons pas, et c’est bien pourquoi nous réformons la sécurité sociale : l’enjeu est de maintenir un haut niveau de protection sociale financée par la solidarité.

M. Jean-Pierre Brard. M. Bas joue au bonneteau !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Vous seriez bien inspirés de soutenir cet effort. Pour leur part, les Français ont choisi de le faire. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Didier Migaud. Ça, on le verra l’année prochaine !

M. Gérard Bapt. Pur acte de foi de votre part, monsieur le ministre !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Notre débat est aussi l’occasion de faire progresser la transparence des comptes.

Les relations sont depuis longtemps très étroites entre comptes sociaux et finances publiques. Dans le long terme, elles jouent plutôt en défaveur des comptes sociaux. On sait désormais – puisque nous avons pris le parti de la transparence –…

M. Jean-Pierre Brard. La transparence à la Clearstream ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. …qu’au 31 décembre 2005, la dette de l’État à l’égard de la sécurité sociale s’établissait à 5,14 milliards d’euros, dont 3,6 milliards pour le régime général. Il ne saurait être question pour le Gouvernement de déshabiller Pierre pour habiller Paul.

M. Jean-Pierre Brard. Oh non ! Ce serait obscène !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Nous entendons mener de front la réduction des déficits de l’État et celle des déficits de la sécurité sociale, sans qu’aucun des deux serve de variable d’ajustement à l’autre.

M. Gérard Bapt. C’est pourtant à ce genre de transfert que vous vous êtes livré au Sénat pas plus tard qu’hier soir !

M. Jean-Pierre Brard. Vous n’êtes pas le bon Samaritain, monsieur Bas !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Le Premier ministre et l’ensemble du Gouvernement veulent que s’instaurent des relations transparentes entre comptes publics et comptes sociaux, afin de mesurer exactement les efforts de réforme consentis par les différents acteurs, d’en identifier les résultats et d’éviter que le solde des uns soit subordonné aux impératifs et contraintes des autres.

La modification, l’an dernier, de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale a apporté à cet égard des avancées significatives, permettant en particulier une coordination renforcée entre les finances de l’État et les finances sociales pour assurer une présentation et une maîtrise globales des finances publiques. Sont ainsi clarifiées les relations financières entre l’État et la sécurité sociale concernant la compensation des exonérations de cotisations patronales de sécurité sociale : la loi organique prévoit en effet que le montant de cette compensation – qui doit bien sûr être intégrale – doit être approuvé annuellement dans la loi de financement de la sécurité sociale. La loi organique dispose également que seule une loi de financement pourra désormais déroger au principe de non-compensation, ce qui permettra de mieux encadrer cette pratique, d’en avoir une vision plus globale et de la circonscrire. Ces dispositifs d’exonération font par ailleurs l’objet d’une présentation détaillée dans une nouvelle annexe de la loi de financement de la sécurité sociale, l’annexe 5.

Plus généralement, la loi organique a renforcé la portée et la lisibilité des lois de financement de la sécurité sociale, qui comportent désormais des tableaux d’équilibre permettant de rapprocher les objectifs de dépenses et les prévisions de recettes des différentes branches ainsi que des fonds de financement. Ainsi, le Parlement peut se prononcer sur les soldes de chacune de ces catégories d’organismes et disposer d’une vision d’ensemble du financement de la sécurité sociale.

Enfin, dans le prolongement de la démarche engagée en 1996 par les conventions d’objectif et de gestion, et en s’inspirant de la loi organique relative aux lois de finances, la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale prévoit une annexe présentant les « programmes de qualité et d’efficience » de la politique de sécurité sociale pour chacune de ses branches et pour les exercices à venir. À travers ces programmes, vous disposerez d’éléments d’information précieux pour appréhender, grâce à un petit nombre d’indicateurs précis et à un diagnostic de la situation, les objectifs et réalisations des politiques mises en œuvre. Des avant-projets de ces programmes de qualité et d’efficience viennent d’être soumis pour avis à votre commission des affaires culturelles, familiales et sociales, conformément à la loi organique.

L’ensemble de mesures ainsi constitué représente une avancée importante dans le pilotage des finances sociales.

J’en viens maintenant aux orientations des politiques de sécurité sociale concernant la vieillesse et la famille.

S’agissant de la branche vieillesse, le Gouvernement a proposé en 2003 une réforme structurelle pour la sauvegarde de notre système par répartition – lequel se trouvait en grand péril du fait, précisément, que cette réforme s’était si longtemps fait attendre ! Il existe entre les différents acteurs un consensus sur la nécessité de la mettre en œuvre dans le cadre d’un processus continu. La loi de 2003 s’est inscrite dans des réflexions de long terme, sur la base d’un diagnostic partagé résultant notamment des travaux du Conseil d’orientation des retraites. Le calendrier et les échéances fixés en 2003 seront respectés. À cet égard, le principe des rendez-vous réguliers constitue une avancée forte.

Une attention particulière sera apportée à l’évolution de certains dispositifs introduits ou modifiés par la loi de 2003, comme les départs anticipés ou les rachats de cotisations.

M. Gérard Bapt. Précisez votre pensée ! Envisagez-vous de les remettre en cause ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Il conviendra également de veiller au développement de stratégies susceptibles d’accroître le taux d’activité des seniors : c’est tout le sens du plan national d’action concertée pour l’emploi des seniors qui a été présenté par le Premier ministre.

Le dynamisme des prestations vieillesse observé en 2006 et que vient de mesurer la Commission des comptes de la sécurité sociale résulte de la montée en charge du dispositif des départs anticipés pour les salariés ayant effectué des carrières longues : ceux qui ont commencé dans la vie comme apprenti ou ouvrier, qui ont travaillé durement et à qui a été refusé ce droit élémentaire de pouvoir partir à la retraite plus tôt ! Sur certains bancs, on a pendant des années déposé en vain des amendements que le gouvernement socialiste de l’époque s’est obstiné à refuser. Comment pouvait-il faire autrement, d’ailleurs, puisqu’il refusait aussi de réformer les retraites et ne dégageait donc pas les ressources nécessaires pour répondre à cette demande sociale dont la légitimité est incontestable ? Vous l’avez refusé, mesdames et messieurs les socialistes, nous l’avons fait !

À la fin de cette année, 300 000 de nos compatriotes auront pu bénéficier de ces retraites anticipées.

Sans doute est-ce une erreur – car je m’interdis de penser qu’il puisse s’agir de légèreté – si, dans certains programmes en cours d’élaboration, on veut remettre en cause cette réforme des retraites !

M. Gérard Bapt. C’est vous qui avez fait plonger les comptes !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Comment ceux qui préconisent une telle mesure comptent-ils expliquer à ces 300 000 Français qu’il n’y a désormais plus les moyens de prendre en charge les retraites anticipées ? Faudra-t-il donc que vous invitiez chacun d’entre eux à revenir au travail ? Et quels emplois allez-vous leur trouver ?

M. Jean-Pierre Brard. Très bien, l’intonation sur la première syllabe ! Et quelle pertinence dans le haussement de sourcil !

Mme Jacqueline Fraysse. Vous faites du théâtre, monsieur le ministre !

M. Gérard Bapt. Nous sommes à la Comédie française !

M. Jean-Pierre Brard. Je dirais plutôt que M. Bas confond l’Assemblée nationale et le Caveau de la République !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. La Commission des comptes de la sécurité sociale indique que les résultats de la branche vieillesse sont légèrement dégradés par rapport à nos prévisions,…

Plusieurs députés du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. « Légèrement » ?

M. Augustin Bonrepaux. Le Gouvernement aussi est dégradé !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. …puisqu’ils vont s’établir cette année à 2,2 milliards au lieu des 1,9 prévus. Mais c’est parce que nous avons investi dans le social et dans l’avenir en permettant ces départs en retraite anticipée. Cela, mesdames, messieurs, nous l’assumons !

La réforme des retraites permettra d’améliorer très fortement les perspectives financières de la branche vieillesse, comme l’ont confirmé les récents travaux du Conseil d’orientation des retraites. Dans son rapport, celui-ci évalue à près de 50 % du besoin de financement l’impact de la réforme à l’horizon 2020. Il relève par ailleurs le rythme accéléré de la baisse du chômage depuis la prise de fonction du gouvernement de Dominique de Villepin…

M. Jean-Pierre Brard. C’est gentil pour Raffarin !

M. le président. Monsieur Brard, écoutez un peu l’orateur !

M. Jean-Pierre Brard. J’écoute et je commente, monsieur le président…

M. le président. Écoutez en silence, cela reposera l’hémicycle !

M. Gérard Bapt. Pourtant, les grands orateurs aiment que leur public réagisse !

M. le président. Ne vous croyez pas obligé de prendre le relais, monsieur Bapt !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Avec cette baisse, remarque le Conseil, le redéploiement des cotisations et des crédits consacrés aux emplois aidés permettra d’équilibrer le régime général tout en faisant face aux besoins accrus liés au vieillissement de la population, notamment dans le domaine de la santé et de la dépendance. Un niveau de chômage inférieur ou égal à 7 %...

M. Didier Migaud et M. Augustin Bonrepaux. Nous n’y sommes pas encore !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. …est suffisant pour atteindre cet équilibre à moyen terme. Nous sommes donc aujourd'hui sur la bonne voie.

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Assurément !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. La politique que le Gouvernement mène en faveur l’emploi a déjà permis de réduire le nombre de chômeurs de plus de 200 000 en un an.

M. Augustin Bonrepaux. Avec quels trucages !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Ces résultats sont certes insuffisants et il convient de les amplifier, mais ils sont sans précédent.

M. Didier Migaud. Des précédents, il y en a, et des bien meilleurs !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. C’est l’un des facteurs de redressement structurel du régime général, d’autant que la reprise du marché de l’emploi entraîne l’augmentation du produit des cotisations sociales.

La politique de la famille constitue également un volet important des dépenses de protection sociale, représentant près de 50 milliards d’euros chaque année, dont 62 % sont gérés par la branche famille du régime général de sécurité sociale. Interviennent également les collectivités locales, à travers notamment l’action sociale en direction des enfants, la branche maladie, qui prend en charge les dépenses de maternité, ou encore l’État, qui, en tant qu’employeur, assume le versement d’un supplément familial de traitement, et qui finance par exemple les bourses scolaires et universitaires.

Au cours de ces dernières années, la conciliation de la vie familiale et de la vie professionnelle a constitué un élément structurant de la réorientation de notre politique familiale. La France a cette particularité qu’elle est le seul pays d’Europe qui connaît à la fois un taux de fécondité exceptionnellement élevé – même s’il est encore insuffisant pour assurer le renouvellement des générations, c’est le plus élevé en Europe – et un taux d’activité des femmes entre vingt-cinq et cinquante ans de 80 %. Cela signifie que le travail des femmes n’est pas l’ennemi de la natalité.

M. Didier Migaud. C’est un scoop !

M. Jean-Pierre Brard. Quel gauchiste vous faites, monsieur le ministre !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Toute notre politique familiale vise donc à favoriser la garde des enfants…

M. Augustin Bonrepaux. Par des cadeaux fiscaux ! C’est une honte !

M. le président. Monsieur Bonrepaux !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Je comprends que vous protestiez, monsieur le député : vous n’avez pas voté la prestation d’accueil du jeune enfant !

M. Augustin Bonrepaux. C’est du gaspillage !

Mme Claude Greff. Ne parlez pas de ce que vous ne connaissez pas, monsieur Bonrepaux ! Occupez-vous d’abord de vos enfants ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. N’en rajoutez pas, madame Greff !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Les 250 000 familles qui profitent aujourd'hui de cette prestation ne vous remercient pas, monsieur Bonrepaux : c’est nous qu’elles remercient de ce nouveau progrès social. Cet effort, dont nous sommes fiers, pèse naturellement sur les comptes de la branche famille,…

Plusieurs députés du groupe socialiste. « Naturellement » !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. La gauche veut donc y mettre fin ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. …dont les déficit sont heureusement stabilisés, à peu de choses près, au niveau de l’année dernière.

M. Augustin Bonrepaux. Les cadeaux fiscaux ne servent à rien !

Mme Claude Greff. À gauche, vous ne savez même pas ce qu’est une politique de la famille !

M. Didier Migaud. Un peu de tenue, madame ! Vous n’avez pas le monopole de la politique familiale !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Nous consentons également un effort sans précédent pour l’ouverture de places de crèche. Je remercie la majorité de soutenir cette politique visant à concilier vie familiale et vie professionnelle. Nous la menons en veillant à la maîtrise des coûts, grâce à la mise en place d’un nouveau pilotage des dépenses d’action sociale et familiale de la Caisse nationale d’allocations familiales.

M. Jean-Pierre Brard. Dites plutôt que vous jouez à colin-maillard !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Ces dépenses avaient augmenté de 17 % en 2004 et de 15 % en 2005. Un tel rythme n’était pas soutenable à moyen terme, d’autant qu’il n’a pas toujours correspondu à une amélioration réelle des services rendus.

M. Gérard Bapt. Tiens donc !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Je me suis engagé auprès de la Caisse nationale d’allocations familiales, au nom du Gouvernement et de l’État, à assurer une progression de ses crédits de 7,5 % par an pendant quatre ans pour l’ouverture de nouvelles places de crèche. C’est un effort sans précédent en valeur, puisqu’il représente 2,4 millions d’euros en quatre ans. Il permettra de passer de 240 000 places en 2002 à 310 000 en 2008.


Dois-je vous rappeler, mesdames, messieurs les députés de l’opposition, combien de nouvelles places de crèche ont été ouvertes en 2000 par le ministre chargé de la famille, dont d’ailleurs le nom m’échappe ?

M. Jean-Pierre Brard. Tout comme on vous oubliera !

M. Gérard Bapt. Alzheimer guette !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Pour toute la France, il y en a eu 264 !

M. Augustin Bonrepaux. Vous réduisez les crédits de fonctionnement !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. L’année dernière, nous en avons ouvert – excusez du peu – 8 500 et cette année, il y en aura plus de 10 000. Ne vous engagez pas dans une mauvaise compétition sur ce terrain : la politique des crèches, c’est nous qui la conduisons, avec succès et persévérance ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Mme Jacqueline Fraysse. Vous êtes formidables !

M. Gérard Bapt. Fin de l’acte Ier, passons à l’acte II !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Je veux également préciser que le déficit de la branche famille n’est en rien structurel, mais conjoncturel, pour une simple raison mathématique : les dépenses sont indexées sur les prix,…

Mme Jacqueline Fraysse. C’est cela !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. …tandis que les recettes sont proportionnelles à l’évolution des salaires. Celles-ci progressent donc plus vite que les dépenses,…

M. Gérard Bapt. Quel acteur !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. …et nous reviendrons, toutes choses égales par ailleurs,…

M. Didier Migaud. Il fallait le dire !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. …naturellement à l’équilibre, en même temps que la branche maladie, pour laquelle nous conduisons cette réforme essentielle à la préservation d’un haut niveau de protection sociale dans notre pays.

M. Jean-Pierre Brard. C’est Alice au pays des merveilles !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Ce pays des merveilles, en tout cas, monsieur Brard, ce n’est pas vous qui le construisez ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Pierre Brard. Je suis dans le réel, moi, pas dans l’illusion !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Sur tous les points que j’ai mentionnés, les progrès de la politique sociale du Gouvernement et de cette majorité sont réels et objectifs. Je vous défie de dire le contraire !

M. Jean-Pierre Brard. Pinocchio !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Pour terminer, je souhaiterais aborder rapidement la question du renforcement de la performance de gestion des organismes de sécurité sociale, qui constitue également une orientation fondamentale de notre politique en matière de sécurité sociale. Cette dernière, vous le savez, est le service public le plus apprécié des Français : avec 85 % des usagers satisfaits, elle atteint le score le plus élevé de tous les services publics.

Les conventions d'objectifs et de gestion ont inscrit le service public de la sécurité sociale dans une dynamique d'amélioration de la qualité de service, qui porte, année après année, ses fruits. Ces conventions ont préfiguré, dès 1996, la démarche aujourd’hui engagée avec un très fort volontarisme par le Gouvernement, notamment par Jean-François Copé, dans les services de l’État eux-mêmes. Ce haut niveau de qualité de service se conjugue avec des coûts de gestion modérés, qui se comparent très favorablement avec ceux du secteur privé : le rapport du total des dépenses de gestion et des prestations servies par les organismes de sécurité sociale est de 4,13 %, soit deux à trois fois moins que les coûts de gestion des assurances complémentaires – mutuelles, institutions de prévoyance sociale et assurances privées. Vis-à-vis de l’État, la comparaison est également favorable : les cotisations sociales ont un coût de recouvrement très inférieur à celui de l'impôt.

Le Gouvernement étant très attaché au développement de la performance de gestion des organismes de sécurité sociale, il faut conforter cette dynamique. C'est la raison pour laquelle les conventions d'objectifs et de gestion signées avec les caisses nationales du régime général à partir de 2005 comportent toutes un objectif de renforcement de l'efficience des branches, notamment par des gains de productivité, en tirant parti du potentiel offert par la croissance des départs à la retraite. Dans la branche vieillesse, ces efforts se traduisent par une quasi-stabilité des effectifs dans un contexte de forte augmentation de la charge de travail liée à la réforme des retraites. Dans les autres branches, des efforts de productivité correspondant au non-remplacement de 30 % à 50 % des départs à la retraite ont été demandés. Quant à l'assurance maladie, la négociation de la nouvelle convention devra assigner à la branche des objectifs de productivité s'inscrivant dans la continuité de ceux déjà entrepris depuis 2004. Toutes ces exigences ont permis, depuis deux ans, de stabiliser les dépenses de gestion des organismes du régime général à 10 milliards par an. Cette démarche d'efficience montre toute la part que les organismes de sécurité sociale prennent au redressement de l’efficacité de l’ensemble de nos services publics.

Mesdames, messieurs les députés, le Gouvernement est déterminé à poursuivre cet effort, qui trouvera toute sa traduction dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan.

M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je suis heureux que nous abordions, dans ce débat d’orientation budgétaire, les comptes à la fois de l’État et de la sécurité sociale. De 300 milliards d’euros pour l’État et de 450 milliards d’euros pour la sécurité sociale, ces budgets représentent – il faut le garder à l’esprit – près de la moitié de la richesse produite chaque année dans notre pays. Si l’on ajoute celui des collectivités locales, ce sont 53 % de cette richesse qui sont utilisés sous forme de dépenses publiques.

J’évoquerai rapidement quelques aspects du budget de l’État qui me paraissent importants et insisterai sur les relations entre ce budget et les comptes sociaux et ceux des collectivités locales.

S’agissant du budget de l’État, les orientations que vous nous proposez, messieurs les ministres, sont excellentes et je les approuve sans réserve. Elles tendent vers une seule idée : le redressement des comptes du pays et la politique de réduction du déficit et du désendettement. Nous sommes probablement coupables de n’avoir pas suffisamment mis en évidence la dégradation extrême des comptes dont nous avons hérité en 2002.

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. C’est vrai !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Il nous aura fallu plusieurs années pour revenir à l’équilibre. Souvenons-nous que nous avons dû, dans la loi de finances rectificative de juillet 2002, réajuster les comptes de 2,5 milliards !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Oh !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. L’aide médicale d’État était financée à 40 millions alors qu’elle coûtait en réalité 400 millions. La prime de Noël avait été payée trois fois sans avoir été budgétée.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Lamentable !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Le Gouvernement, soutenu par la majorité, a fait preuve d’une détermination totale dans la maîtrise de la dépense, une maîtrise intelligente, qui consiste à dépenser mieux en dépensant moins.

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Très bien !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. M. Copé a fait état de la politique d’audit engagée par le Gouvernement. L’Assemblée l’avait précédé dans cette démarche, en créant, sous la précédente législature, une mission d’évaluation et de contrôle. Dès cette époque, celle-ci a fait du bon travail et les deux premiers audits ont porté leurs fruits avec la réforme de la redevance télévisuelle et celle de la politique immobilière de l’État.

M. Michel Bouvard. Très bien !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Excellent travail !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je pense que ce travail d’audit, pour être efficace, doit absolument conjuguer les efforts de l’exécutif et du Parlement. Tel est le message que je voudrais faire passer ce matin.

M. Michel Bouvard. Très bien !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Notre démarche en matière de maîtrise de la dépense est exemplaire, car nous avons des priorités et nous les respectons. En 2007, l’effort sera poursuivi : la loi de programmation militaire sera totalement dotée, avec un financement quasi-total des OPEX – ce qui, après quatre ans d’effort, fera plaisir à nombre d’entre nous – ;…

M. Augustin Bonrepaux. Tout cela n’est pas bien contrôlé !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. …la justice et la sécurité seront honorées.

En matière d’investissement, de gros efforts sont également consentis avec un budget en progression, même si c’est par le biais d’opérateurs tels que l’AFIT, l’Agence d’innovation industrielle ou l’Agence nationale de la recherche.

M. Augustin Bonrepaux. Somme toute, ce n’est pas brillant !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je ne conteste pas le fait que des dépenses d’investissement soient logées chez des opérateurs. Toutefois, l’action de ces opérateurs doit absolument être intégrée dans la démarche d’évaluation et de contrôle mise en place par la loi organique. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) À ce sujet, nous avons débattu la nuit dernière autour d’un amendement extrêmement important que le Gouvernement a accepté. Il faut vraiment intégrer les opérateurs dans la logique de la performance, des objectifs et du contrôle du Parlement, notamment l’Agence d’innovation industrielle ou l’Agence nationale de la recherche.

S’agissant des effectifs de la fonction publique, il ne s’agit pas de les diminuer pour le plaisir, mais de les gérer au mieux dans le souci de l’intérêt général. Certes, le plafond d’emplois général est abaissé de 15 000 sur 2,3 millions, mais, dans le même temps, 4 000 postes ont été créés dans la justice, la sécurité et l’enseignement supérieur et la recherche. Dans certains secteurs, les diminutions sont parfaitement justifiées. Ainsi, dans l’éducation nationale, des postes sont créés pour répondre aux besoins – 1 500 dans l’enseignement supérieur et la recherche, quelques centaines dans le primaire où les effectifs augmentent – tandis qu’ils diminuent de plusieurs milliers dans le secondaire parce que les effectifs diminuent. C’est cela la bonne gestion qui consiste à dépenser mieux en dépensant moins. Ce n’est pas une question de dogmatisme mais de gestion pragmatique de l’État dans l’intérêt des Français.

Côté ressources, les orientations budgétaires pour 2007 en matière de recettes fiscales doivent s’appuyer sur l’excellente réforme fiscale que nous avons votée en loi de finances pour 2006. Celle-ci comporte un premier volet, la réforme de l’impôt sur le revenu, qui permet une meilleure justice fiscale.

M. Augustin Bonrepaux. Ce n’est pas vrai ! N’importe quoi !

M. Jean-Jacques Descamps. Si !

M. Augustin Bonrepaux. Vous faites des cadeaux fiscaux aux riches !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Sur 4 milliards d’euros, 3 milliards ont été consacrés aux diminutions d’impôts pour les ménages à revenus faibles ou modestes (« Non ! » sur les bancs du groupe socialiste), à travers l’augmentation de la prime pour l’emploi et la baisse de l’impôt sur le revenu.

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie et M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Ce sont les faits !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. C’est une évidence qui s’impose à quiconque regarde cette réforme avec objectivité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Augustin Bonrepaux. Ce n’est pas parce que vous le dites que c’est vrai !

M. Gérard Bapt. Même M. Méhaignerie le dément !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. En toute objectivité, je peux vous dire qu’entre 2000 et 2002, la diminution de l’impôt sur le revenu, dite « baisse Fabius » – car, à l’époque, M. Fabius pensait que les socialistes perdraient les élections s’ils n’étaient pas capables de diminuer les impôts –,…

M. Augustin Bonrepaux. Vous, vous les perdrez parce que vous les diminuez trop !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. …cette baisse d’impôt Fabius est supérieure à celle que nous avons faite entre 2002 et aujourd’hui.

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. La baisse Fabius, c’est vous, mesdames, messieurs les socialistes !

M. Gérard Bapt. Il fallait en rester là !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. En 2007, la réforme de l’impôt sur le revenu est inspirée par un souci de justice fiscale (« Ah non ! » sur les bancs du groupe socialiste)

M. Augustin Bonrepaux. C’est un mot qui vous est étranger !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. …mais aussi d’attractivité et de compétitivité de notre territoire, avec une norme d’imposition au taux marginal de 40 %, qui nous met au même niveau que les autres pays.

Le deuxième volet important de la réforme concerne la taxe professionnelle, là encore dans un souci de compétitivité.

M. Didier Migaud. Pourquoi, depuis ce matin, n’entendons-nous que M. Coué à cette tribune ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Messieurs les ministres, si nous devons, dans le budget pour 2007, procéder à de nouveaux ajustements fiscaux, il faut absolument que ce soit par redéploiements, optimisation ou « recyclage » de dépenses ou de niches fiscales. Nos marges de manœuvre doivent en effet être consacrées à la réduction du déficit et au désendettement. En la matière, nos réalisations sont incontestables…

M. Didier Migaud. C’est sûr !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. …et nos résultats remarquables.

M. Didier Migaud. Quelle modestie !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. En 2005, nous aurons été le seul des principaux pays d’Europe à ramener notre déficit sous le seuil de 3 %, à 2,88 %.

M. Augustin Bonrepaux. Il semble que vous n’ayez pas lu le rapport de la Cour des comptes !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Et Les Échos, vous les avez lus, monsieur Bonrepaux ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Ces résultats sont validés par Eurostat !

En 2006, l’exécution du budget de l’État se déroulera dans d’excellentes conditions, les ministres l’ont dit, même si ce n’est pas tout à fait dans les mêmes termes. Je pense ne pas me tromper en affirmant que nous devrions avoir un déficit en exécution inférieur en 2006 à celui de 2005, lui-même inférieur à celui de 2004, lui-même inférieur à celui de 2003. Nous sommes donc vraiment sur le chemin du redressement…

M. Gérard Bapt. C’est un chemin de croix !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. …d’une situation très dégradée dont nous avions hérité en 2002.

M. Augustin Bonrepaux. Ce n’est pas ce que dit votre rapport ! L’avez-vous lu au moins ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Nous devons rapidement atteindre le déficit stabilisant, qui nous permettra de diminuer fortement notre dette.


Monsieur le ministre, je pense que l’objectif que vous avez fixé – deux points de PIB de moins sur la dette entre le 31 décembre 2005 et le 31 décembre 2006 – sera tenu. Nous pouvons en prendre l’engagement ici.

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Absolument !

M. Didier Migaud. Nous, nous l’avons fait !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Pendant toute la législature précédente, vous en avez été incapables, monsieur Migaud !

M. Didier Migaud. Nous avons réduit l’endettement, et vous le savez !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. C’est faux : plus 170 milliards !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je parle de l’héritage que vous nous avez laissé en 2002, monsieur Migaud. Si vous n’aviez pas gaspillé la cagnotte, vous y seriez parvenus. Mais cela n’a pas été le cas. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Je dirai maintenant quelques mots sur les relations du budget de l’État avec, d’une part, les comptes locaux, et, d’autre part, les comptes sociaux.

Concernant le budget des collectivités territoriales, je vous remercie, messieurs les ministres, d’avoir pris la décision de ne pas modifier le contrat de solidarité et de croissance en 2007.

M. Didier Migaud. Encore heureux !

M. Gérard Bapt. Il ne manquerait plus que ça !

M. Didier Migaud. La purge viendra plus tard !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Ce contrat assure, en effet, une sécurité et une visibilité aux collectivités locales.

Celles-ci représentent, à elles seules, il est vrai, 60 milliards d’euros dans le budget de l’État, c’est-à-dire un cinquième de celui-ci.

M. Charles de Courson. Plus !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Mais nous préférons de loin que vous jouiez sur l’ensemble des exonérations et des dégrèvements, ainsi que sur la réforme de la fiscalité locale, en tenant compte des vrais problèmes comme ceux qui ont été évoqués avant-hier lors de la conférence sur les finances publiques.

Les départements se trouvent en difficulté…

M. Michel Bouvard. Oh oui !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. …du fait, d’un côté, du transfert des dépenses sociales et, de l’autre, de l’évolution de la TIPP.

M. Augustin Bonrepaux. Il est temps que vous vous en rendiez compte !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Nous avons été les premiers à le dire, monsieur Bonrepaux.

Concernant le secteur social, je prendrai le relais de l’analyse faite par Philippe Bas sur les relations entre l’État et la sécurité sociale.

Vous avez insisté, monsieur le ministre, sur l’importance qu’il y a de clarifier les choses. C’est effectivement nécessaire.

M. Gérard Bapt. Cela fait un moment que vous le dites !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Il faut également écouter le point de vue du budget de l’État, si je puis m’exprimer ainsi.

Vous avez affirmé le principe de la compensation à l’euro près. Il est vrai que, en 2006, on a transféré les exonérations de charges patronales sur le budget de la sécurité sociale, tout en transférant les recettes équivalentes. Nous devons parvenir à une stabilisation du système car il ne faudrait pas que la sécurité sociale se trouve contrainte de demander à l’État des transferts de recettes supplémentaires. Le budget de l’État n’est pas en mesure de le supporter.

Par ailleurs, le budget de l’État a aujourd’hui grosso modo 4 ou 5 milliards de dettes vis-à-vis des comptes sociaux, sur différents chapitres.

M. Charles de Courson. 4,4 milliards !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je vous rappelle, monsieur de Courson, que les choses ne sont pas à sens unique : le budget de l’État a aussi une créance sur les comptes de l’UNEDIC de 1,2 milliard.

Il faut, monsieur le ministre, comme nous le disions il y a un instant en aparté, essayer de tirer parti de l’année 2006 et de la loi de finances pour 2007 pour régler ce problème de frontière et réajuster les comptes. Cela nous permettrait d’en finir avec des débats qui épuisent beaucoup trop notre énergie à chaque examen de loi de finances ou de loi de financement de la sécurité sociale.

Pour terminer, je tiens à insister à nouveau sur l’importance de cet exercice de consolidation. J’ai été très sensible, avant-hier, à la responsabilité dont ont fait preuve tous les intervenants – représentants des collectivités locales, des caisses de sécurité sociale, du budget de l’État – et à la pertinence de leurs propos. Grâce à l’action du Gouvernement et de la majorité, nous sommes vraiment entrés dans une nouvelle phase où chacun prend conscience de l’ardente obligation de redressement de nos comptes – elle avait été trop longtemps perdue de vue – et de réduction de l’endettement. Un travail comme celui que nous conduisons ce matin va assurément dans le sens de l’intérêt général. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour les recettes et l’équilibre général de la loi de financement de la sécurité sociale, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour les recettes et l’équilibre général de la loi de financement de la sécurité sociale. Monsieur le président, messieurs les ministres, le débat d’aujourd’hui sur les orientations des finances sociales est une première, a dit Xavier Bertrand. J’ajouterai : une première bienvenue.

Bien que l’organisation d’un tel débat soit facultative, la conférence des présidents a décidé la tenue de celui-ci, jointe à celle du débat d’orientation budgétaire. Je m’en réjouis. En effet, l’article 6 de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale a introduit une innovation essentielle en matière de contrôle parlementaire de l’évolution de la situation des finances sociales, puisque le Gouvernement doit désormais présenter au cours du dernier trimestre de la session ordinaire un rapport sur les orientations des finances sociales.

Ce rapport décrit les grandes orientations de la politique de sécurité sociale au regard des engagements européens de la France et rend compte de l’évaluation pluriannuelle de l’évolution des recettes et des dépenses des administrations de sécurité sociale. Étant obligatoire, il permet en effet au Gouvernement d’informer le Parlement sur la situation des finances sociales. Il est à noter néanmoins que la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale écarte l’examen de la situation financière de l’UNEDIC et des régimes complémentaires. Ce débat offre de surcroît la possibilité d’anticiper les discussions de l’automne et, le cas échéant, de présenter les mesures prises par le Gouvernement et les caisses pour que soient respectés les engagements pris dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale de l’année en cours.

Finances publiques et finances sociales méritent une approche simultanée. Beaucoup de raisons militent en ce sens : l’impact des grandes variables macro-économiques, les engagements internationaux de la France portant sur le champ des finances de l’État et celui des finances publiques, la complexité des transferts financiers existant entre les deux sphères, la nécessité de limiter les transferts de charge intergénérationnels à travers l’endettement public. Le Parlement a d’ailleurs montré la voie en prenant l’initiative de transformer le Conseil des impôts en Conseil des prélèvements obligatoires. Avec le recul, il était étrange de discuter des finances publiques sans évoquer des masses financières supérieures à celles brassées par le budget de l’État.

Comme il s’agit du premier débat d’orientation commun, il faut prendre en compte les spécificités des finances sociales, spécificités bien connues de notre collègue Bur, ancien rapporteur pour l’équilibre général et les recettes de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, mais peut-être moins familières à certains de ses collègues de la commission des finances.

En effet, la majeure partie des dépenses des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale est versée conformément à des prescriptions légales, comme l’illustre le cas du versement des pensions de retraite ou des allocations familiales, allouées respectivement à chaque pensionné et à chaque famille. Or, il est difficile de prévoir les événements individuels – naissance, départ à la retraite, maladie. De surcroît, il est impossible de ne pas verser les prestations légalement dues. D’ailleurs, la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale évoque des « objectifs » de dépenses. Sous cet angle, il me semble que la loi de finances, si elle comporte des dépenses incompressibles, comprend aussi des mesures pouvant plus facilement faire l’objet de régulation budgétaire – étalements, gels –, mesures dont l’inventivité est…

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Extrême !

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur. …régulièrement saluée par les rapports de la Cour des comptes. (Sourires.)

Elle comporte également beaucoup plus de dépenses d’investissement.

En outre, les dépenses des régimes de base de la sécurité sociale sont gérées par les partenaires sociaux. Cela constitue une différence politique fondamentale avec le budget de l’État. La structure des prélèvements alimentant les caisses de l’État et celle des prélèvements sociaux sont très différentes.

Enfin – et je ne sais pas s’il faut le regretter ! – les administrations de sécurité sociale ne peuvent vendre des actifs pour se désendetter. De même, il leur est délicat de transformer des dépenses en prélèvements sur recettes...

La situation des finances sociales est bien différente de celles des finances de l’État.

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Voilà !

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur. En effet, comme le rappellent le rapport du Gouvernement préalable à la tenue du débat d’orientation et le rapport Pébereau, 80 % de la dette publique sont le fait de l’État, tandis que 8 % relèvent des administrations de sécurité sociale.

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. C’est vrai !

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur. Le besoin de financement de l’État, d’un montant d’environ 43 milliards d’euros, se situe à environ 2,5 % du PIB, celui des administrations sociales à environ 0,2 %. Ces quelques chiffres permettent de remettre en perspective la situation financière des uns et des autres, ainsi que les efforts respectifs à fournir.

En outre, joindre les deux débats pourrait permettre une discussion fructueuse sur les allégements de charges sociales, qui est un point crucial. Le principe qui devrait tous nous guider est qu’il est hors de question de financer à crédit la politique de l’emploi par le déficit de la sécurité sociale. À ce titre, la loi de finances pour 2006 prévoit que le manque à gagner dû aux allégements généraux sur les bas salaires est compensé par le transfert d’un panier de taxes aux régimes obligatoires de la sécurité sociale. Cependant, la compensation à l’euro près n’est pas, comme vous venez de le souligner, monsieur le rapporteur général, complètement garantie. À ce stade, je souhaite relayer les remarques de la Cour des comptes sur le niveau élevé des dépenses que représentent ces allégements de charge. J’ai bien entendu vos arguments, mais il faut que vous entendiez aussi les nôtres.

Je ne saurais terminer ces développements sans saluer la mise en place d’une conférence annuelle des finances publiques et d’un Conseil d’orientation des finances publiques. Le travail de ce Conseil comme la tenue de la conférence permettront de faire œuvre de pédagogie auprès de nos concitoyens, afin que la situation de nos finances publiques et les efforts qu’elle exige soient connus de tous. À cette fin, messieurs les ministres, il serait opportun de rendre accessible sur Internet le procès-verbal des réunions de cette conférence.

J’en viens à la situation des finances sociales proprement dites en 2006. La dynamique des déficits sociaux, enrayée en 2006, ne reprendra pas en 2007. Le déficit du régime général sera un peu plus élevé que prévu, c’est vrai mais, n’en déplaise aux Cassandre, les motifs de satisfaction sont en fait nombreux : pour la première fois depuis huit ans, l’ONDAM a été respecté en 2005.

M. Jean-Marie Le Guen. Il ne le sera pas en 2006 !

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur. Il sera « dans les clous » en 2006, puisque l’alerte n’a pas été déclenchée !

S’agissant de la branche maladie, le dispositif du médecin traitant est un succès, les indemnités journalières continuent à diminuer et le générique fait – enfin ! – une percée.

Concernant les retraites, le dispositif « carrières longues » fait un tabac. Tant mieux ! C’est une disposition essentielle, et juste, de la loi de 2003, loi sur laquelle, monsieur Le Guen, votre parti, et notamment M. Strauss-Kahn, voudrait revenir ! Nous pourrons y revenir.

M. Jean-Marie Le Guen. Il faudra bien y revenir !

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur. Quant à la famille, la PAJE, réforme faite sous cette législature, aide un nombre croissant de familles, au profit à la fois des parents et des enfants. Qui s’en plaindra ?

Du point de vue des recettes, la commission des comptes de la sécurité sociale constate que la croissance de la masse salariale se place enfin sur sa tendance de long terme – aux alentours de 4 % –, après lui avoir été significativement inférieure. Tant mieux !

Enfin, la situation du FSV va s’améliorer mécaniquement avec la décrue du chômage.

Je m’arrêterai brièvement sur l’assurance maladie et, notamment, sur le calendrier de son redressement financier. En effet, malgré une croissance de la masse salariale inférieure aux prévisions, ce dernier est tenu et le déficit de l’assurance maladie ne devrait pas dépasser 4 milliards d’euros en 2007.

Certes, le fait que les quatre branches soient en déficit en 2006 est préoccupant. En effet, à ces déficits – dont l’un fera l’objet d’une reprise par la CADES – il faut ajouter celui du fonds de solidarité vieillesse et celui du FFIPSA, ces deux organismes accumulant déjà des déficits depuis plusieurs années. Cette situation appelle, il est vrai, des mesures de redressement.

Le fait que la mesure modifiant les règles de prélèvement des « vieux » PEL, qui a rapporté 2 milliards d’euros aux régimes obligatoires de la sécurité sociale en 2006, ne soit pas reconductible chaque année est tout aussi préoccupant.

Comme l’a annoncé le ministre lors de son audition par la commission, l’objectif du déficit de l’assurance maladie en 2007 sera d’environ 4 milliards d’euros, ce qui est parfaitement en ligne avec le calendrier de redressement de l’assurance maladie, même si la masse salariale a manqué de tonus par rapport aux prévisions.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 devrait être l’occasion de réaliser la réforme permettant d’élargir l’assiette de la cotisation employeur, sur laquelle les ministres pourront peut-être nous donner des précisions.

De même, le rapport du Gouvernement préalable au débat d’orientation indique, sans autres précisions, qu’un « point d’information régulier sur les finances sociales sera prochainement mis en place ». Il serait intéressant de connaître les modalités précises de ce nouveau rendez-vous.


Dernier point, la programmation pluriannuelle peut réussir si certaines conditions sont remplies.

L’impératif doit être de ne pas accroître la dette publique, qui consiste en fait, dans les conditions actuelles, à faire payer par nos enfants et nos petits-enfants nos dépenses courantes. Il s’agit de faire respecter une certaine « équité transgénérationnelle ». Ce souci justifie pleinement l’engagement solennel de désendettement pris par le Premier ministre et sur lequel beaucoup de députés devraient se réunir, notamment tous ceux qui souhaitent que la politique reconnaisse et serve mieux la jeunesse de notre pays.

Ces considérations concernent doublement la sécurité sociale. En effet, je l’ai souligné tout à l’heure, la limitation de la dette sociale est une nécessité dans la perspective d’une remontée du coût de l’argent.

En second lieu, les perspectives des régimes obligatoires de la sécurité sociale sont obérées par le vieillissement de la population et les dépenses liées à la dépendance et aux retraites.

Dans ce contexte, l’objectif annoncé par le Gouvernement est de limiter pour les prochaines années le taux de croissance des dépenses des régimes obligatoires de la sécurité sociale à l’inflation + 1 %,…

M. Jean-Marc Roubaud. Bravo !

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur. …soit, monsieur Brard, plus 1 % en volume. Cet objectif est ambitieux. Il est volontariste. Il peut être tenu.

II est conditionné à la poursuite de l’effort de maîtrise des dépenses de l’assurance maladie, à la réduction du chômage, à l’exercice par le Parlement des nouveaux pouvoirs de contrôle dont il dispose. S’agissant de l’assurance maladie, le succès de la réforme repose sur la maîtrise des trois secteurs de la dépense : la médecine de ville, le médicament et l’hôpital.

À cet égard, un moyen de suivre plus efficacement, à l’avenir, l’évolution des dépenses des différentes branches serait d’étendre le mécanisme du comité d’alerte, qui intéresse beaucoup M. Le Guen, aujourd’hui limité à l’assurance maladie, aux branches de la famille et de la vieillesse. Le prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale sera peut-être l’occasion de réaliser cette réforme relativement simple.

Enfin, monsieur le ministre délégué à la sécurité sociale, je souhaite revenir sur le souhait exprimé par la commission des affaires culturelles, familiales et sociales l’année dernière : la réunion d’un groupe de travail ad hoc consacré au financement de la sécurité sociale. Cette demande tient à cœur à de nombreux commissaires, dont mon prédécesseur, M. Jean-Pierre Door. J’espère qu’elle sera satisfaite, conformément à votre promesse, monsieur le ministre. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Pierre-Christophe Baguet. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, s’il fallait donner un qualificatif à ces orientations budgétaires, je serais tenté de dire qu’elles sont à la fois solides et sérieuses.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Très bien !

M. Didier Migaud. Encore M. Coué !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Solides et sérieuses parce qu’elles s’inscrivent d’abord dans le cadre de la stratégie de Lisbonne, adoptée par tous les gouvernements européens, quelles que soient leurs sensibilités.

Pour moi, elles s’inscrivent aussi dans une triple perspective.

La première – mais tout le monde n’en est pas encore convaincu sur ces bancs – c’est que la diminution en volume des dépenses publiques est un élément clef du retour de l’emploi et de la croissance.

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. C’est vrai !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Si on ne le croit pas, on prend le chemin inverse de toutes les capitales européennes.

Les politiques publiques en France ne souffrent pas seulement d’une insuffisance de leurs moyens budgétaires, mais d’une confusion de leurs objectifs, d’un empilement de structures et de procédures extrêmement complexes. C’est sur ce point que l’État doit renforcer son efficacité.

Enfin, pour reprendre l’expression de Gilles Carrez, qui s’inscrit dans les règles d’or que nous devrions tous nous fixer comme discipline : premièrement, zéro en volume pour la dépense publique, parce que les marges de productivité sont fantastiques ; deuxièmement, pas d’emprunt qui puisse financer des dépenses de fonctionnement ; enfin, essayer d’aller pour les dépenses sociales vers le 1 % de croissance en volume. Si nous suivons ces règles, nous sommes certains que nous pourrons rétablir la confiance dans ce pays.

Le choix du Gouvernement de supprimer 15 000 emplois publics d’État est un choix de responsabilité. Je le soutiens totalement. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

C’est un choix de responsabilité, que l’on peut parfaitement faire comprendre à l’opinion publique. D’abord, parce que nous avons été le seul pays en Europe à créer un million d’emplois publics de plus depuis vingt-cinq ans.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Voilà !

M. Michel Bouvard. Eh oui !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Ensuite, pendant que l’État va diminuer cette année, d’environ 5 000, peut-être 15 000 le nombre d’emplois publics, les collectivités locales vont créer 20 000 à 25 000 emplois de plus. Cela signifie que l’emploi public en France continue de croître.

Enfin, nous savons très bien que la lutte contre l’empilement des structures et les complexités des procédures pourraient permettre de dégager des milliers d’emplois et, par la même, rendrait la vie plus simple aux entreprises et aux citoyens. C’est la raison pour laquelle je pense que c’était une décision sage.

Au-delà de ce soutien, je formulerai maintenant deux ou trois réflexions quant à la préparation du prochain budget.

Le premier point concerne la difficulté de coopération et de pédagogie sur l’évolution risquée des finances locales. Des inquiétudes se font jour sur l’évolution des finances locales. La croissance de 3,8 % en volume ne va pas dans le sens des disciplines que l’État et les collectivités doivent se fixer. Je pense qu’il faudra mener, dans les prochains mois, un effort de pédagogie extraordinaire. Il ne faudrait pas que l’augmentation des impôts locaux, qui va peser sur le pouvoir d’achat des Français, soit perçue comme une décision du Gouvernement et non comme une décision prise par les autorités locales. Les Français sont prêts à comprendre les explications que vous leur apporterez.

Je me tourne vers vous, messieurs les ministres, et vers mes collègues pour dire que, si nous ne changons pas la structure de financement des collectivités locales – et c’est un point qui tient à cœur à Hervé Mariton –, la dépense locale continuera à augmenter à un rythme rapide.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Vous avez raison !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Je rappelle trois chiffres. Les dotations globales de l’État sont de 79 milliards, la taxe professionnelle de 25 milliards et la taxe d’habitation de 11 milliards seulement.

Quand j’entends parler de suppression de la taxe d’habitation, je m’interroge sur l’élément de responsabilité qui restera entre le citoyen et les collectivités locales.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Aucun !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Aucun, en effet !

Nous devrons avoir un débat approfondi à cet égard.

Deuxième point : si nous voulons continuer cet effort, un énorme travail de simplification et de remise en cause de l’empilement des structures doit être réalisé. Messieurs les ministres, la multiplication des projets de loi ne va pas toujours dans le sens d’une discipline des structures, d’une remise en cause et d’une recherche de simplifications. Je souhaiterais que, dans cette perspective, un travail soit réalisé en commun dans les six mois qui viennent.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Excellente remarque !

M. Michel Bouvard. Tout à fait !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. En effet, les Français le ressentent profondément.

La lisibilité des politiques publiques menées par sept niveaux différents n’est pas, à terme, tolérable. Voilà les quelques réflexions que je souhaitais faire.

Je conclurai en indiquant qu’il est nécessaire d’introduire une exigence d’évaluation de nos politiques. Il faut reconnaître que le débat sur les lois de règlement n’a soulevé l’enthousiasme ni des ministres ni du Parlement.

M. Michel Bouvard. Ni celui de certaines commissions !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. À part une !

Si la démarche d’évaluation des politiques est menée par les audits du Gouvernement, je souhaiterais, monsieur le ministre, que cette mission soit partagée par le Parlement. J’avais d’ailleurs écrit à M. le Premier ministre, non pour demander des emplois supplémentaires, mais pour souhaiter que certains membres des corps d’inspections soient mis à la disposition du Parlement et des rapporteurs.

Nous avons vu, les uns et les autres, l’efficacité de la politique menée par le Parlement sur l’immobilier ou sur la redevance de télévision. Nous pourrions, comme d’autres assemblées parlementaires européennes, envisager d’aller beaucoup plus loin.

Je voudrais que nous puissions intégrer ces quelques éléments dans notre réflexion, au cours des prochains mois.

Nous voyons aujourd’hui qu’il y a deux politiques : celle menée par le Gouvernement – je la soutiens – et celle menée par d’autres sensibilités politiques qui proposent plus d’État, plus de dépenses publiques et plus de règlements.

M. Jean-Claude Sandrier. C’est un peu caricatural !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Ces dernières propositions vont exactement à l’opposé de toutes les autres politiques européennes, en particulier de celles qui ont réussi à retrouver la croissance et l’emploi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, ce débat sur les orientations des finances sociales constitue une innovation institutionnelle très intéressante. Il réjouit les membres de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, son rapporteur, M. Fagniez, et moi-même.

Nous sommes très contents de retrouver aujourd’hui nos collègues de la commission des finances et de pouvoir travailler avec eux.

Que de chemin parcouru depuis 1996 ! Que de chemin parcouru dans la voie du contrôle parlementaire, avec deux étapes majeures : en 1996, les lois de financement de la sécurité sociale, grâce à la réforme voulue par Alain Juppé, et, en 2005, la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale.

Aujourd’hui, alors que la session parlementaire touche à son terme, ce débat nous permet d’examiner les orientations des finances sociales pour 2007 et, au-delà, de préparer dans de bonnes conditions 1’examen du PLFSS pour 2007, qui sera un temps fort de l’activité de la commission au début de la prochaine session.

Le rapporteur pour l’équilibre général et les recettes, Pierre-Louis Fagniez, a fait le point sur les orientations des finances sociales. Il a rappelé l’importance du budget de la sécurité sociale et la part relative des finances sociales dans la dette publique. C’est, je crois, un des éléments clefs de ce débat.

Pour ma part, je me concentrerai sur deux points qui me tiennent à cœur. Je voudrais indiquer que les instruments de contrôle et d’évaluation à la disposition des députés, et particulièrement des commissaires, sont nombreux en matière de finances sociales. Je consacrerai ensuite quelques développements à l’assurance maladie.

La loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale a mis en place une série de nouveaux outils destinés à améliorer le contrôle des parlementaires sur le pilotage des finances sociales. Ces outils devraient enrichir aujourd’hui nos débats sur l’orientation des finances sociales.

Depuis la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006, les parlementaires votent à la fois l’ONDAM et ses sous-objectifs – soins de ville, établissements de santé tarifés à l’activité, autres dépenses relatives aux établissements, contribution de l’assurance maladie aux dépenses en établissements et services pour personnes âgées et personnes handicapées, enfin les autres dépenses relatives aux autres modes de prise en charge.

De plus – et c’est particulièrement important aujourd’hui – le périmètre de la loi de financement de la sécurité sociale comprend désormais la dette sociale et, chaque année, le Parlement se prononce sur un objectif annuel d’amortissement de la dette sociale.

S’inscrivant dans une démarche moyens – objectifs, les programmes de qualité et d’efficience comporteront un diagnostic de la situation sanitaire et sociale, des objectifs et des indicateurs précis, ainsi que la présentation des moyens mis en œuvre pour réaliser ces objectifs et l’exposé des résultats atteints. Ils devraient progressivement aider les parlementaires à mettre en regard moyens, objectifs et résultats, dans une approche similaire à celle des programmes annuels de performance, mais en conservant toute sa spécificité.


Le Gouvernement doit communiquer régulièrement au Parlement l’état des dettes et des créances réciproques de l’État et des régimes obligatoires de la sécurité sociale. Conformément à l’article 17 de la loi organique, avant la fin des mois de janvier et de juillet de chaque année, le Gouvernement transmet au Parlement un état semestriel des sommes restant dues par l’État aux régimes obligatoires de base. Ce document montre que l’État, au 31 décembre 2005, reste débiteur de 5,14 milliards d’euros vis-à-vis des régimes obligatoires de la sécurité sociale. Je ne doute pas que la question de la compensation sera abordée aujourd’hui. J’ajoute que la loi de financement de la sécurité sociale doit désormais approuver le montant des compensations et que seule une loi de financement peut déroger au principe de compensation.

Enfin, de nouveaux outils de contrôle parlementaire sont désormais utilisés. Je me félicite que la loi relative à l’assurance maladie du 13 août 2004 ait conduit à la mise en place d’une mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale – la MECSS. Cette mission a été constituée au sein de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales au début de l’année 2005. Elle a déjà rendu deux rapports remarqués, l’un, de Jean-Pierre Door, consacré à la gestion des branches de la sécurité sociale, l’autre, de Paulette Guinchard, relatif au financement des établissements hébergeant des personnes âgées. La MECSS rendra début juillet un rapport attendu sur l’application de la tarification à l’activité dans les hôpitaux. Le succès de la formule est attesté par le fait que la commission des affaires sociales du Sénat vient de créer également une MECSS.

Je suis aussi très fier de la création, dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2003, de l’Office parlementaire d’évaluation des politiques de santé – l’OPEPS –, lequel effectue un travail remarquable selon une approche médico-économique – particulièrement rare en France. Son premier rapport, relatif au dépistage du cancer du sein et présenté par notre collègue Marc Bernier, avançait des propositions concrètes, originales, qui ont récemment connu un nouvel écho.

M. Gérard Bapt. Parlez-nous plutôt de l’INCa !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Je pense également au rapport sur la maladie d’Alzheimer de Cécile Gallez, et au prochain rapport de Maryvonne Briot sur l’utilisation des psychotropes en France. Ce rapport passionnant, sur lequel nous avons travaillé hier soir, sera présenté au Sénat dans une dizaine de jours. Il importe désormais d’observer la façon dont les préconisations de la MECSS et de l’OPEPS sont suivies. S’agissant du rapport de Jean-Pierre Door, relatif à la gestion des caisses de la sécurité sociale, la conclusion prochaine de la convention d’objectifs et de gestion avec la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés sera à cet égard un premier test, notamment pour ce qui concerne le taux de remplacement des départs à la retraite. Il ne s’agit pas de passer les effectifs au rabot, mais de poursuivre la modernisation d’une institution qui a déjà beaucoup avancé dans le service au public – je pense notamment aux plates-formes téléphoniques – et qui doit aller encore plus loin en usant des possibilités offertes par l’Internet.

J’ajouterai enfin que la commission des affaires sociales est la seule commission permanente de l’Assemblée à appliquer de manière systématique l’article 86, alinéa 8, du Règlement, relatif au contrôle de la mise en application des lois. À ce jour, vingt textes de loi ont été contrôlés et, à ce titre, elle contrôlera le mardi 27 juin prochain la mise en application de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Je m’y prépare !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Contrairement à ce qui est souvent dit, le Parlement n’est en aucun cas dépourvu de moyens d’action et de contrôle. Ces moyens existent, ainsi que les outils, et c’est aux parlementaires, particulièrement aux commissaires, de s’en saisir. Cela requiert de leur part l’assiduité aux réunions et un engagement personnel approfondi ; je sais qu’ils répondront à ces défis.

S’agissant de l’assurance maladie, je souhaite faire le point sur la réforme appliquée depuis 2004.

Bien sûr, il y a les chiffres, et pourquoi ne pas les évoquer ? Je voudrais juste souligner que la réforme de l’assurance maladie n’était pas destinée à produire tous ses effets dans les six mois. Certaines évolutions, comme le dossier médical personnel ou le médecin traitant, ne porteront leurs fruits que dans les mois ou les années à venir.

M. Jean-Marie Le Guen. Pourquoi pas au siècle prochain ?

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Et il en va de même pour la tarification à l’activité. La réforme de la gouvernance hospitalière doit s’accélérer dans l’intérêt des malades.

M. Jacques Domergue. Oui, il y a urgence !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. L’effort sans précédent déployé dans le cadre du plan Hôpital 2007, avec plus de 10 milliards d’euros d’investissements en faveur des hôpitaux publics et privés, sera prolongé par le plan Hôpital 2012.

M. Jean-Marc Roubaud. Très bien !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Je suis surpris des réactions de la Fédération hospitalière de France, qui devrait être la première à stimuler ses membres pour accélérer la modernisation alors que, curieusement, elle donne l’impression de tirer sur le frein à main… (Murmures sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Marie Le Guen. C’est obsessionnel !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Je me demande quelles échéances elle peut avoir à l’esprit…

L’application de la réforme de l’assurance maladie exige de la conviction, de la ténacité et de la continuité dans l’effort, toutes qualités dont dispose le tandem ministériel en charge de la sécurité sociale. Au reste, les résultats financiers sont « en ligne » avec les éléments du cadrage du redressement financier de l’assurance maladie. Bien sûr, l’assurance maladie reste en déficit. Cependant, la dynamique de croissance des déficits est enrayée, grâce à la responsabilisation de tous les acteurs,

Permettez-moi de m’éloigner un peu des chiffres pour faire ressortir quelques points essentiels.

Réformer l’assurance maladie, c’est d’abord promouvoir la qualité des soins. À ce titre, la création de la Haute autorité de santé, la labellisation des équipes, le parcours de soins et la rénovation du dispositif de formation des professionnels – qui mérite d’être poursuivie – permettent d’orienter notre système sur le sentier de la qualité.

Réformer l’assurance maladie, c’est aussi garantir l’égalité d’accès aux soins. L’aide à la souscription d’une assurance complémentaire a été sensiblement augmentée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006. Conformément au souhait du Président de la République, cette aide sera encore augmentée.

Réformer l’assurance maladie, c’est aussi orienter le système de soins vers la prévention et prendre en charge des traitements très coûteux. À titre d’exemple, je citerai le remboursement de l’examen de prévention bucco-dentaire chez les enfants. Les économies réalisées sur certains postes permettent de financer des traitements particulièrement coûteux, comme l’ostéodensitométrie ou les médicaments contre certains cancers – nous en avons déjà débattu il y a quelques mois.

Enfin, réformer l’assurance maladie, c’est sauvegarder un pilier de notre pacte collectif, une valeur essentielle de notre République, en vue de permettre à la solidarité entre les générations, entre malades et bien-portants, pauvres et nantis, de continuer à s’exercer, afin que la solidité de notre contrat social ne soit pas entamée.

Nous devons certes citer les chiffres, mais je souhaite avant tout que le débat sur les orientations des finances sociales qui nous réunit aujourd’hui n’occulte pas les grands principes qui doivent guider l’action du Gouvernement et de la majorité parlementaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Discussion générale

M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Je remercie Hervé Mariton de me laisser intervenir avant lui, car je dois assister à une réunion de cadres hospitaliers qui, visiblement, n’ont pas invité M. Dubernard. Cela étant, monsieur le président, le ministre sera présent et je ne doute pas qu’il reprenne vos propos concernant l’hôpital. Je remercie également Didier Migaud, qui sera le principal intervenant du groupe socialiste dans ce débat.

Après deux heures et demie de discussion, je suis le premier orateur de l’opposition…

M. Didier Migaud. Enfin !

M. Gérard Bapt. Un bol d’air !

M. Jean-Marie Le Guen. Quelle curieuse conception du débat que la vôtre !

Dans ce débat d’orientation budgétaire, j’interviendrai essentiellement sur la question des finances sociales, contrairement à certains orateurs précédents qui ont préféré parler d’examens bucco-dentaires. Il eût été préférable qu’ils se penchent sur l’ophtalmologie, pour améliorer leur capacité à lire les chiffres et à analyser les résultats qu’ils ont obtenus ! S’agissant des finances sociales, la longue litanie des déficits et des dettes cumulées ne cesse de s’allonger depuis quatre ans…

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Et vous vous y connaissez !

M. Jean-Marie Le Guen. La sécurité sociale compte une cinquième année de déficit, alors qu’auparavant, lorsque nous étions aux commandes, les comptes sociaux étaient équilibrés. Pis, pour la troisième année consécutive depuis 2002, le déficit de la sécurité sociale excède 10 milliards.

Nous avons entendu vos leçons de morale sur l’orthodoxie budgétaire, mais l’autosatisfaction dont vous avez fait preuve ce matin en nous présentant des déficits sociaux à hauteur de 10 milliards d’euros nous laisse perplexes. Quel décalage entre vos discours et vos actes ! D’autant que ces déficits ne disparaîtront pas avec votre majorité ! Ce sont les Français qui les paieront, dès 2007.

M. Jean-Marc Roubaud. Comme l’APA !

M. Jean-Marie Le Guen. Du reste, vous avez déjà transféré 35 milliards en dette sociale dans le cadre de la réforme de 2004, dont c’était le principal objectif. Selon Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales du Sénat, il faudra y ajouter 19 milliards d’euros pour tenir jusqu’en 2009. Aujourd’hui, le déficit s’élève à près de 60 milliards d’euros.

M. Jacques Domergue. À cela, il faut ajouter les 5 milliards d’euros du futur programme socialiste !

M. Jean-Marie Le Guen. Tel est le bilan de votre action.

Nous en sommes là parce que, depuis cinq ans, vous avez été mauvais en matière de croissance économique, et toujours en deçà de ce qui s’est fait dans la zone euro.

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. C’est faux !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. C’est une analyse simpliste !

M. Jean-Marie Le Guen. C’est un facteur important d’aggravation des déficits. Mais Didier Migaud y reviendra.

Et puis, vous avez fait preuve d’une véritable incurie dans la gestion des finances sociales. Non seulement vous y avez été larga manu en matière de dépenses, dans le but de flatter certains corporatismes, notamment au cours des premières années de votre mandat, mais vous avez également été peu précautionneux…

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Qui a mené à bien la réforme des retraites ?

M. Jean-Marie Le Guen.…et vos réformes ont été autant de fiascos.

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. C’est la méthode Coué !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Ou plutôt l’anti-Coué !

M. Jean-Marie Le Guen. La dette publique est composée de la dette de l’État et de la dette sociale. Je ne crois pas pour autant qu’il soit bon d’assimiler la dette publique et la dette sociale, car elles ne recouvrent ni les mêmes recettes ni les mêmes dépenses.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. C’est vrai !

M. Jean-Marie Le Guen. Pour être clair, je ne pense pas qu’il soit possible de maintenir les régimes sociaux dans une situation de dette permanente comme vous le faites depuis cinq ans. Les modifications apportées par la loi organique de financement de la sécurité sociale vont d’ailleurs en ce sens.

Vous vous êtes livrés à une véritable maltraitance des finances sociales. Parlons d’abord de la dette permanente de l’État à l’égard de la sécurité sociale. Il y a quelques jours, le vice-président de la Cour des comptes a rappelé que les impayés de l’État à la sécurité sociale représentaient plus de 6 milliards d’euros. Et toujours selon le sénateur Vasselle, le non-paiement des dettes de l’État génère près de 360 millions de coûts financiers pour l’ACOSS.

À cela s’ajoute le déficit du FFIPSA, qui dépassera 1,3 milliard pour la seule année 2006, et celui du Fonds de solidarité vieillesse. Vous n’avez pas donné la moindre précision sur la manière dont vous financerez ces dépenses – de l’ordre de 5 milliards d’euros –, pourtant impératives !


Cette situation – le FFIPSA et le FSV, non financés, pesant respectivement sur le déficit de l’État et celui de la sécurité sociale – dure depuis longtemps. Plus largement, ce sont les recettes de la sécurité sociale qui, depuis cinq ans, sont malmenées. Celles provenant de l’alcool et du tabac se sont certes améliorées, mais elles avaient fait défaut pendant les premières années de votre mandature, ce qui explique – en partie seulement – le poids du déficit et de la dette.

J’en viens maintenant à vos réformes, et notamment à celle que vous mettez le plus volontiers en avant, la réforme des retraites. Il y a encore quelques mois, vous prétendiez qu’elle serait efficace pour garantir la pérennité de notre système de retraites. Les chiffres dont nous disposons aujourd’hui, et qui indiquent une plongée dans les déficits, font toutefois surgir les doutes. C’est pourquoi vous ne vous flattez plus d’une réussite financière,…

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Mais si !

M. Jean-Marie Le Guen. …mais seulement de la générosité de la réforme – ce qui est vrai surtout pour les travailleurs ayant cotisé plus de quarante ans. Vous n’osez plus vanter le caractère durable du financement de notre système des retraites, car nous savons tous qu’il n’est pas assuré. Quelle que soit la majorité de demain – je laisse toutes les options ouvertes afin de vous rassurer –, elle devra s’attaquer à nouveau au problème. Vous n’avez donc en rien progressé en ce domaine :…

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Ce qu’il faut entendre !

M. Jean-Marie Le Guen. …le changement de vocabulaire, dans lequel la générosité remplace la rigueur, traduit simplement l’abandon des objectifs que vous vous étiez fixés.

Je n’avais pas l’intention, compte tenu de mon temps de parole, de parler de la situation financière de la branche famille, mais les propos de M. Bas m’y incitent. Lorsque l’on intervient sur le terrain de la politique, monsieur le ministre délégué, on n’est pas obligé de céder à la trivialité, pour ne pas dire à la vulgarité. Ainsi, ce n’est pas vous qui distribuez les allocations familiales aux Français,…

M. Jean-Marc Roubaud. C’est de la polémique !

M. Jean-Marie Le Guen. …mais les Français qui payent des cotisations dont vous vous limitez à assurer la répartition – équitable ou non – du produit. Vous n’êtes pas là pour accorder des prébendes, tel le représentant de l’empereur, sous l’Empire romain, distribuant des petits pains ! Ce n’est pas une façon de traiter nos concitoyens. L’électoralisme a ses limites, d’autant plus que, manié sans expérience, il devient un peu trop visible.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Il est vrai que vous, vous ne manquez pas d’expérience ! En la matière, on ne vous la contestera pas !

M. Jean-Marie Le Guen. S’agissant de l’assurance maladie, la relative diminution du déficit est due essentiellement – à plus de 80 % – à l’augmentation des recettes, grâce à des prélèvements supplémentaires opérés sur les Français – CSG, CRDS – ou à la diminution des remboursements – contribution d’un euro, franchise de 18 euros par acte médical supérieur à 91 euros, pour laquelle le décret d’application vient d’être publié. Mais ce qui est plus problématique sur le plan financier, c’est que vous vous êtes procuré des recettes en faisant certaines poches : si le budget de l’État est alimenté par les soultes gazière et électrique, la sécurité sociale, elle, bénéficie du siphonage des plans d’épargne logement : vous compromettez des recettes à venir pour donner l’apparence d’un financement équilibré.

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. La mesure a été adoptée avec le soutien des sénateurs socialistes, monsieur Le Guen : ils ont voté cette disposition avec enthousiasme !

M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur Copé, le soutien des sénateurs socialistes ne suffit pas à justifier une politique. (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Je le leur répéterai, cela leur fera plaisir !

M. Pierre-Christophe Baguet. Allô, Charasse ?

M. Jean-Marie Le Guen. Autre élément dont vous vous flattez, le respect de l’ONDAM, qui serait assuré en 2005, mais dont on sait d’ores et déjà qu’il ne le sera plus en 2006, non seulement parce que le comité d’alerte signale un dérapage de plus de 600 millions d’euros pour la seule médecine de ville – excusez du peu ! –, mais aussi parce que la situation de l’hôpital public et privé impose un financement supplémentaire.

Ce débat d’orientation sur les finances sociales, que nous souhaitions loyal et donc fondé sur la confrontation d’arguments, devient en tout état de cause surréaliste dès lors qu’aucun ministre, aucun rapporteur, aucun président de commission n’a parlé de la demande, par le directeur de l’UNCAM, de 3 milliards d’euros de recettes en plus ou de dépenses en moins.

M. Gérard Bapt. Eh oui !

M. Jean-Marie Le Guen. Alors que cette question est évoquée dans toute la presse, que le monde de l’assurance maladie ne parle que de cela, je suis le premier orateur à l’aborder ! Cela montre bien votre gêne ! Avez-vous une réponse à apporter au directeur de l’UNCAM, dont nul ne peut soupçonner qu’il soit le porte-parole de l’opposition ?

M. Gérard Bapt. Bonne question !

M. Jean-Marie Le Guen. Au risque de vous inquiéter, je note d’ailleurs que les propositions de M. Van Roekeghem sont très largement insuffisantes. Sans parler d’équilibrer les comptes en 2007, ce qui était l’objectif initial de la réforme, comment faire si nous voulons seulement feindre de croire que l’on pourrait parvenir à ce résultat en 2009 ? Les acteurs du système de santé sont en droit de le savoir ! Nos concitoyens, à qui on pourrait demander des prélèvements supplémentaires, le sont également ! Un minimum de 3 milliards d’euros, ce n’est pas rien, dans la mesure où le déficit de l’assurance maladie sera vraisemblablement, en 2006, de plus d’un milliard d’euros supplémentaires. Pour « rester dans les clous », c’est donc au moins 4 milliards d’euros qui seraient nécessaires. Et on n’en connaîtrait pas moins, en 2006, 2007 et 2009, des déficits lourdement pénalisants pour nos finances sociales.

J’adore parler de santé publique : elle est pour moi fondamentale. Or, tant que nous n’aurons pas résolu la question des finances sociales, tant que nous ne l’affronterons pas avec réalisme et courage, nous mettrons en péril la santé des Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton.

M. Hervé Mariton. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, les très bonnes orientations que l’on nous présente aujourd’hui nourrissent le dialogue avec les citoyens. Dans la déclaration du Gouvernement, il a été question de la qualité du service public, une exigence que nos concitoyens, nos électeurs ne se lassent pas d’exprimer. Il a été question de confiance en l’avenir, qu’il est notre responsabilité de construire et de justifier, et qui passe par la question centrale du désendettement.

Le ministre délégué au budget a rappelé l’exigence de qualité du service public. La méthode pour y parvenir – les audits – n’était pas extraordinairement originale dans son principe, mais elle l’est davantage par son rythme, par les résultats demandés, par ses effets. Venant après d’autres tentatives qui ont rencontré les difficultés que l’on sait, une telle démarche permet de ne pas s’enfermer dans la culture des moyens. Il est en effet de notre responsabilité, en tant que parlementaires du groupe majoritaire, d’expliquer à nos compatriotes que la qualité des services publics n’est pas uniquement, ni même principalement, affaire de moyens. Cela relève d’une pédagogie du quotidien.

Nous devons aussi mettre nos concitoyens sur le chemin de la confiance. Or il n’y aura pas de confiance en l’avenir sans désendettement, de même qu’il n’y aura pas de meilleure croissance sans confiance.

M. Gérard Bapt. C’est mal parti !

M. Hervé Mariton. Le Gouvernement nous propose un objectif ambitieux : moins deux points de PIB en 2006. Il doit en garantir le résultat.

M. Didier Migaud. Ah !

M. Hervé Mariton. Outre une méthode, on nous propose des indicateurs intéressants, mais que nous devrions manier avec toute la précaution et la rigueur nécessaires.

Le rapporteur général a très bien développé dans son rapport la notion de « déficit stabilisant ». Il ose même avancer un chiffre : 36 milliards d’euros en 2007.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Environ !

M. Hervé Mariton. Le concept prête à discussion.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Il y a beaucoup d’hypothèses.

M. Hervé Mariton. Le Gouvernement les affinera d’ici à l’automne.

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Sans langue de bois !

M. Hervé Mariton. Cette idée de « déficit stabilisant » est stimulante et engageante, mais on ne peut s’empêcher de sourire de l’expression. Elle pourrait, si on n’y prend garde, laisser croire à une certaine résignation.

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. La formule est un peu technocratique !

M. Hervé Mariton. Vous en êtes conscient ! Mais elle n’est pas non plus sans élégance. Reste que nous devons mesurer l’intérêt, mais aussi la limite du concept. S’agissant de l’objectif essentiel qu’est la réduction de l’endettement, il est important d’apprécier les étapes restant à parcourir, l’engagement que vous prenez pour 2007 et au-delà. Nous devons donc disposer d’instruments de mesure incontestés. La notion de déficit stabilisant peut être l’un d’entre eux. Nous en avons de toute façon besoin pour montrer le chemin.

La confiance que vous avez construite, monsieur le ministre, au fil de ces quatre dernières années, et que vous allez renforcer encore avec ces orientations budgétaires, puis avec le projet de loi de finances pour 2007, sera encore plus forte lorsqu’elle s’établira sur des notions, des données, des chiffres que nous pourrons tous partager. Si les choix budgétaires peuvent différer selon que l’on se trouve dans la majorité ou dans l’opposition, si même ils doivent, en bonne démocratie, être différents, justifions nos choix sur des données incontestables, en impliquant tous les partenaires. À cet égard, le président de la commission et le rapporteur général ont souligné la nécessaire implication des collectivités locales ainsi que la dimension prise par les finances sociales. Les perspectives que vous tracez – augmentation de 1 % au-dessus de l’inflation de la progression des dépenses sociales, stabilité pour les collectivités locales – sont raisonnables. Il faut se donner les moyens, par la conviction et par l’action, de faire en sorte qu’elles se traduisent concrètement.

Comme vous, monsieur le ministre, nous voulons la maîtrise de la dépense publique. Une dépense de l’État évoluant d’un point de moins que l’inflation, voilà une décision courageuse, surtout si l’on considère l’histoire de la dépense publique dans notre pays. Les tentations sont vives, en année électorale, de s’affranchir de toute exigence en la matière. Nous ne pouvons donc que vous féliciter de votre décision, qu’il importe désormais de respecter.


Cette maîtrise pour l’État doit valoir aussi pour les collectivités locales, même si nous respectons leur autonomie en matière de dépenses. Pour autant, en 2006 et dans les années qui suivront, l’État ne sera pas dispensé, dans sa propre politique de transfert, de tenir compte de leur engagement pour réduire l’endettement public, donc maîtriser la dépense publique, stratégie et objectif communs.

Les orientations budgétaires pour 2007 traduisent les priorités que nous avons retenues depuis le début de la législature, à commencer par les dépenses de souveraineté dans le domaine de la sécurité, de la justice et de la défense. Tant mieux ! Elles reconnaissent aussi l’importance des dépenses d’avenir, notamment en faveur de l’engagement pour la recherche, et j’insisterai sur ce point.

Je me trouvais, voici quelques semaines en Finlande où j’ai rencontré des responsables budgétaires. Ils ont de la notion de dépenses d’avenir une définition très restrictive, qui devrait nous inspirer. Nous ne devons en effet pas donner une acception trop large à ce thème. Depuis la rupture de l’économie soviétique, en particulier, les Finlandais se sont trouvés dans une situation budgétaire très difficile, avec la dégradation de la conjoncture économique et des comptes publics. Ils ont alors réagi simplement et avec courage en diminuant très fortement les dépenses publiques dans tous les domaines, sauf celui concernant les dépenses d’avenir. Ils ont défini avec sagesse de manière claire et unique les dépenses d’avenir qui se limitent à la recherche. C’est donc le résultat d’un calcul très simple et très rapide de ce que pouvait être le retour sur budget de dépenses dans le domaine de la recherche.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Et les infrastructures de transports ?

M. Hervé Mariton. Ils n’ont pas étendu exagérément ce concept, comme nous sommes parfois tentés de le faire. En Finlande, c’est à la seule recherche qu’est appliquée la notion de « dépenses d’avenir ».

Notre volonté de maîtriser la dépense publique, monsieur le ministre, nous conduit à mettre en garde nos collègues et nos concitoyens contre le risque de dérapage porté par le projet socialiste dont la lecture est atterrante.

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Et très chère !

M. Hervé Mariton. Nous nous prémunirons contre ces dérapages programmés !

En matière d’orientations budgétaires, nous devons rappeler le respect dû aux contribuables.

M. Jean-Pierre Brard. Aux gros contribuables !

M. Hervé Mariton. Les contribuables ont des libertés. Nous ne faisons pas partie de ceux qui veulent augmenter les prélèvements.

M. Didier Migaud. Pourtant, vous les avez augmentés !

M. Augustin Bonrepaux. Mais pas pour tout le monde !

M. Hervé Mariton. Nous ne voulons pas augmenter les impôts. Les mesures fiscales votées dans la loi de finances de 2006 trouveront naturellement leur traduction en 2007.

Je ne suis pas de ceux qui pensent qu’en matière de baisse de l’impôt, nous sommes aujourd’hui arrivés au bout du chemin. Malgré les contraintes de la discipline budgétaire, la recherche de l’équilibre et du désendettement, ce chemin difficile peut marquer des étapes, mais doit être poursuivi, car il convient de respecter les contribuables en leur offrant plus de libertés. Je rappellerai toutes les propositions d’impôts nouveaux qui figurent dans le projet socialiste pour 2007. Nombre de contribuables voudraient s’affranchir de ce concept de « réconciliation du citoyen avec l’impôt ». Ils ont d’autres priorités ! La formule est presque élégante, mais, pour le plus grand nombre, elle paraît très menaçante. Nous devons poursuivre ce dialogue avec eux. Aujourd’hui, notre discussion porte sur le budget de l’État et sur le financement de la sécurité sociale. Chacun est conscient que la question du lien entre l’un et l’autre est ouverte. Nous sommes nombreux sur ces bancs à être résolument hostiles – et nous saisissons l’occasion qui nous est offerte pour le dire –, à la fusion de l’impôt sur le revenu et de la CSG, qui ne conduirait qu’à l’augmentation des prélèvements et à l’aggravation du poids de l’impôt pour nombre de nos compatriotes.

D’autres débats sont ouverts, qu’il n’est pas facile d’éclairer, tant la matière est complexe. Je pense au financement de la protection sociale, à la part des salaires et de la valeur ajoutée. C’est essentiel pour la vie de notre économie et pour l’emploi dans le contexte de la mondialisation avec laquelle il convient de réconcilier les Français.

Nous approuvons, messieurs les ministres, ces orientations budgétaires qui vous permettront sûrement de nous présenter pour 2007 un bon projet de loi de finances et un bon projet de loi de financement de la sécurité sociale. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Ce débat sur l’évolution de l’économie nationale et sur les orientations des finances publiques sur les années 2007, 2008 et 2009 permet de faire le point sur les quatre dernières années de gestion des finances publiques et d’examiner les perspectives.

Le Gouvernement continue à retenir des hypothèses économiques trop optimistes. A-t-il fait un choix raisonnable en tablant sur une croissance du PIB comprise entre 2,25 et 3 % pour les années qui viennent ? Je tenterai de vous démontrer que la réponse est négative. Sur la période 1980-2005, le taux moyen de croissance de la France n’a été que de 2,2 % et n’a pas tout à fait atteint 2 % sur les six dernières années 2000-2005. Croire que l’on peut accélérer d’un point la croissance à moyen terme grâce aux trois leviers que sont l’assainissement des finances publiques, la politique de l’innovation et la mobilisation des ressources de main-d’œuvre n’est pas crédible, du moins dans les trois années à venir. En effet, une hypothèse de 2 % eût été plus raisonnable, quitte, si la croissance était un peu plus forte, à voir comment utiliser les plus-values en résultant. La dernière note de conjoncture de l’INSEE retient une hypothèse de 2 % pour 2006.

Plusieurs facteurs constituent de véritables freins à l’accélération de la croissance de notre pays.

Premier frein – et je suis étonné que l’on ne l’ait pas évoqué dans ce débat –, l’économie française connaît une perte de compétitivité. Les rapports du Conseil économique et social, soulignent que la part des exportations de la France dans celles de la zone euro est passée de 17,3 % en 1998 à 14,3 % en 2005 et que la balance des transactions courantes, qui était excédentaire de 3 % du PIB en 1999, a un solde négatif de 1,4 % en 2005. Cette perte de compétitivité représente une perte de 0,7 point de PIB par an en moyenne depuis six ans. L’INSEE constate, dans une note de conjoncture très intéressante parue ce matin, que le commerce extérieur a eu un effet négatif sur la croissance française, de 0, 7 % en 2004 et 1 % en 2005, et il estime la perte à 0, 2 % en 2006. Première question que l’on pourrait donc se poser : comment redresser la compétitivité de l’industrie française, notamment ?

Deuxième frein : la croissance française est actuellement soutenue par la consommation des ménages qui progresse plus vite que la croissance des revenus. La croissance de la consommation des ménages a effectivement progressé de 2,2 % en 2003, de 2,5 % en 2004 et 2,2 % en 2005, mais au prix d’un recul constant du taux d’épargne. Ainsi, le taux d’épargne financier est passé de 6,7 % en 2003 à 5,9 % en 2004 et à 4,8 % en 2005 et il semble que cette chute se poursuive légèrement encore cette année.

Nos préoccupations sont donc légitimes.

Le seul point positif concerne l’évolution du chômage. Mais analysons un peu plus finement les raisons pour lesquelles le taux de chômage français va baisser en dix-huit mois de 10,1 % à 9 %, le phénomène, bien que plus limité, se poursuivant en 2006. Les chiffres communiqués ce matin par l’INSEE sont extrêmement intéressants. Y a-t-il une augmentation de l’emploi marchand ?

M. Jean-Pierre Brard. C’est la seule question qui compte !

M. Charles de Courson. Elle est hélas très faible : 63 000 emplois supplémentaires ont été créés en 2005 pour atteindre environ 76 000 en 2006, avec un taux de croissance de 2 %. La baisse de 124 000 chômeurs en 2005 et de 179 000 en 2006 s’explique par une forte hausse de l’emploi non marchand – puisque, selon les chiffres de l’INSEE, il se serait accru de 99 000 en 2005 pour atteindre 196 000 en 2006 –, et par les départs anticipés en retraite des personnes ayant travaillé dès l’âge de quatorze ou quinze ans, résultat de la loi Fillon – plus de 100 000 par an – lesquels plombent nos comptes sociaux. Les effets se prolongeant sur trois ans, il s’agirait de 125 000 départs la première année, 105 000 la deuxième et enfin 100 000. Ne nous trompons donc pas. L’amélioration du chômage, dont tout le monde ne peut que se féliciter, n’est pas le fruit de l’amélioration de la compétitivité française et de l’augmentation de l’emploi marchand, mais celui de la relance par le Gouvernement du système des emplois non marchands en augmentation, je le rappelle, en 2005 et en 2006. Tel est le problème central.

On oublie trop le troisième frein : la politique allemande de redressement des finances publiques. Les Allemands, eux, sont courageux. Ainsi, la grande coalition mise en place représente plus des deux tiers du peuple allemand et permet de mener une politique de réformes courageuse.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Il n’y a pas de centristes pour faire barrage ! (Sourires.)

M. Charles de Courson. Or c’est le peuple allemand qui a imposé ces mesures de redressement, ce n’est pas le choix des deux partis concernés ! Nos amis allemands ont prévu d’augmenter la TVA de 3 % au 1er janvier 2007. Je ne connais aucun peuple qui ait pris des mesures aussi drastiques d’augmentation des prélèvements obligatoires sans que cela entraîne une baisse de la consommation des ménages. Or l’Allemagne est notre premier client et absorbe le tiers de nos exportations. La France risque donc d’assister en 2007 à une chute de ses exportations, essentiellement composées de bien de consommation.

Je m’étonne également que la double conséquence de la très forte hausse des taux d’intérêt n’ait quasiment pas été évoquée. La réserve fédérale s’est engagée dans une hausse continue des taux d’intérêt à court terme, les faisant passer de 1 % à probablement 5,5, voire 5,75 % avant la fin de l’année ou le début de l’année prochaine.


Les responsables des banques centrales européennes sont conscients qu’ils sont contraints d’augmenter les taux d’intérêt. Ils pensaient au début de l’année que ce serait d’au moins un point. Ils pensent maintenant que ce serait plutôt autour d’un point et demi.

Cela aura des conséquences sur un secteur qui marche très bien, le bâtiment et les travaux publics. Savez-vous, mes chers collègues, que le bâtiment crée à peu près 50 000 emplois par an ? La plupart des 76 000 emplois créés cette année dans le secteur marchand l’ont été dans le BTP. Or ce secteur a été dopé par des taux d’intérêt historiquement très bas, par la baisse de la TVA sur les réparations et par la politique du logement du Gouvernement, que l’UDF soutient. La gauche est totalement excessive sur ce sujet. Vous n’avez pas été bons, c’est le moins que l’on puisse dire, mes chers collègues, en matière de logement. Soyez donc équilibrés dans vos propos. Avec une très forte hausse des taux d’intérêt, nous aurons, hélas ! dès l’année prochaine, un fort freinage de la croissance de l’emploi et de l’activité.

Par ailleurs, nous avons réduit le coût de la dette publique en augmentant la part de la dette flottante, qui s’est beaucoup accrue, ce qui explique ce paradoxe que les intérêts de la dette française dans le budget de l’État français sont quasiment stables, alors que la dette de l’État explose. C’est fini. Dès cette année, et encore plus en 2007, le coût de la dette va fortement augmenter, et durablement, pour 2007-2008, quel que soit le Gouvernement.

M. Gérard Bapt. Eh oui !

M. Charles de Courson. Voilà pourquoi le Gouvernement a tort de faire croire qu’on peut avoir un taux de croissance de 2,25, voire 3 %, vu ces facteurs de freinage importants, du moins pour les années 2007, 2008, 2009, et qu’il faut être beaucoup plus rigoureux qu’on ne l’est.

Ma deuxième observation a trait au triple objectif que s’est fixé le Gouvernement : ne pas augmenter le taux des prélèvements obligatoires – c’est le moins que l’on puisse faire –, réduire les déficits publics dès 2007 au niveau du déficit stabilisant et de 0,7 point de PIB en 2008 puis en 2009, et, enfin, maîtriser les dépenses publiques.

Depuis 2002, messieurs les ministres, les deux gouvernements successifs ont fait une politique inverse du triple objectif que vous vous assignez aujourd’hui.

La dépense publique – État, sécurité sociale, collectivités territoriales – s’est accrue constamment depuis 2002 beaucoup plus vite que la richesse nationale : 4,2 % en 2003, 3,5 % en 2004, 4,1 % en 2005. Ainsi, la part des dépenses publiques dans le produit intérieur brut s’est constamment accrue : 52,7 % en 2002, 54,2 % en 2005, 1,5 point de plus de richesse nationale. On espère qu’elle va se stabiliser en 2006, mais on n’en est pas sûr, tout dépendra de la croissance.

Entre 2002 et 2005, les dépenses publiques se sont accrues de 134 milliards, alors que la richesse nationale s’accroissait de 206 milliards. Pendant cette période, on a donc prélevé 65 % de la richesse nationale supplémentaire pour des dépenses publiques.

Au sein de l’Union européenne, la France est devenue, depuis 2005, le numéro deux de la dépense publique derrière la Suède, avec 56,4 %, mais la Suède continue à baisser ses dépenses publiques. Au rythme actuel, nous serons numéro un en Europe avant trois ans.

On nous demande aujourd’hui de faire l’inverse de ce que vous avez fait hier. J’en prends acte, je m’en félicite, mais il faut rappeler le passé.

Les prélèvements obligatoires, eux, se sont constamment accrus entre 2002 et 2005. Le taux est passé de 43,1 % du produit intérieur brut en 2002 à 44,1 %, un point de plus. Les prélèvements obligatoires se sont accrus de 110 milliards, alors que la richesse nationale s’accroissait de 206. On a prélevé 53 % de la richesse supplémentaire pour alimenter les comptes publics.

Enfin, a-t-on au moins fortement réduit les déficits publics ? Non. La réduction est faible, car, hors mesures exceptionnelles, le déficit public est passé de 3,2 % en 2002 à 4,1 % en 2003 puis s’est réduit lentement, 3,8 % en 2004, 3,5 % en 2005. En 2006, il sera autour de 2,9 %, contre 3 %, si l’on inclut les mesures exceptionnelles, en 2005, et l’on nous dit que l’on sera à 2,5 % en 2007.

Soyons donc conscients que le Gouvernement nous propose aujourd’hui, et je m’en félicite, l’inverse de la politique qu’il a suivie pendant les trois premières années de l’actuelle mandature.

Les objectifs fixés par le Gouvernement pour 2007-2009 sont-ils bien adaptés ?

D’abord, l’objectif de revenir à un niveau de déficit public égal au déficit stabilisant n’est absolument pas tenu. Je vous renvoie au projet de loi de finances pour 2005, dans lequel il y a un excellent encadré, fait par le Gouvernement, sur le déficit stabilisant. Je vais vous démontrer en deux coups de cuiller à pot qu’il n’est absolument pas de 2,5 %. Il n’est pas plus de 1,7 ou de 1,8 %.

Le déficit stabilisant est fonction de trois paramètres : les taux d’intérêt, dont personne ne parle, la croissance en valeur du produit intérieur brut et le niveau de la dette publique. Naturellement, si vous êtes à 100 % de dette publique dans le produit intérieur brut, ce n’est pas la même chose que si vous êtes à 10 %.

Aujourd’hui, au sens du concept utilisé, il est à 0 % car, avec l’augmentation du taux d’intérêt et une croissance en valeur autour de 3,8 ou 4 % – soyons optimistes – il faut aller vers zéro. Je défie le Gouvernement de nous expliquer comment il a trouvé 2,5 %. Il ne l’explique d’ailleurs pas dans son rapport. Pour la Cour des comptes, il est de 1,7 ou 1,8 %, ce qui est à peu près la thèse de notre rapporteur général, qui parle de 35 ou 36 milliards, ce qui fait un peu moins de 2 % de produit intérieur brut. L’objectif que l’on doit donc se fixer, c’est d’aller progressivement vers zéro.

Je voudrais maintenant, très rapidement, vous dire quelques mots sur les trois volets de ce que propose le Gouvernement.

Pour les collectivités territoriales, l’objectif est totalement inadapté, monsieur le ministre. Vous proposez aux collectivités locales de ne pas accroître le volume de leurs dépenses et d’avoir en contrepartie plus de marge d’initiative, tout en indexant, semble-t-il, les concours financiers sur la croissance des dépenses de l’État, sans dire quel est le taux, puisque la croissance du budget de l’État est de 0,8 % en apparence.

L’État ne mène pas une politique cohérente à l’égard des collectivités locales. Il n’y a que deux politiques cohérentes, monsieur le ministre.

Soit vous êtes thatchérien, et vous dites : ils dépensent trop, nous allons les tenir par la recette, il faut supprimer toute autonomie fiscale locale et alimenter les collectivités territoriales par des dotations. C’est d’ailleurs ce que font les gouvernements successifs de gauche et de droite depuis quinze ans, en réduisant continûment l’autonomie fiscale locale. On peut être pour, on peut être contre, c’est cohérent.

Il y a une seconde politique, que soutient l’UDF depuis des années, en vain d’ailleurs, qui est de responsabiliser les élus locaux, de définir clairement les compétences, d’arrêter de donner des compétences multiples aux différents niveaux de collectivités territoriales,…

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Absolument !

M. Charles de Courson. …c’est-à-dire, en termes clairs, de faire une définition négative des compétences.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Exact !

M. Charles de Courson. Il ne faut pas dire simplement que les régions ont telle ou telle compétence, mais préciser aussi qu’elles n’ont pas telle ou telle autre, car, dans le système tel qu’il est, on n’arrivera jamais à contenir la croissance de la dépense locale.

Dans la logique de l’UDF, il faut réformer la fiscalité locale. Or, gouvernement après gouvernement, de gauche comme de droite, nous ne faisons que nationaliser la dépense locale, et nous incitons les élus locaux à être de plus en plus irresponsables. Plus vous avez dépensé dans le passé, plus vous êtes récompensés du point de vue de l’enveloppe des crédits de l’État.

La démocratie locale, c’est la position de l’UDF. On définit positivement et négativement les compétences, on restructure l’organisation des collectivités territoriales et on les dote d’un impôt. Vous connaissez notre thèse, le seul impôt qu’on puisse donner aux départements et aux régions en substitution des impôts sur les maisons, qui sont déjà pour partie supprimés puisqu’il n’y a plus de part de taxe d’habitation pour les régions, c’est la CSG. C’est un impôt que paieront 80 % des contribuables nationaux, c’est un impôt que l’on ne peut pas moduler et qui est impopulaire, ce qui est le moyen de réguler la dépense.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Quel optimisme !

M. Charles de Courson. Il faut un système de péréquation. On baisse le taux national et on arrête ces prétendus transferts de fiscalité d’État vers les collectivités territoriales.

Ce que vous faites échouera, monsieur le ministre, et nous souhaiterions savoir ce que vous allez faire pour les dotations aux collectivités territoriales.

Deuxième volet, que je vais rapidement développer, des objectifs peu réalistes, en l’absence de nouvelle réforme, pour les organismes de sécurité sociale.

Le déficit du régime général stagne plus ou moins depuis quatre ans, 10,2 % en 2003, 11,9 % en 2004, 11,6 % en 2005, 10,3 %, selon les dernières estimations, en 2006, 44 milliards de déficit de fonctionnement, financé par l’emprunt. On finance les prestations sociales par l’emprunt. Voilà comment on vit en France !

Ces chiffres n’intègrent pas toutes les dépenses réelles, et on pourrait longuement parler des déficits hospitaliers.

En matière de retraites, sans nouvelle réforme, les déficits s’accroissent, c’est mécanique, et nous ne pouvons pas assurer la pérennité de nos régimes.

Il est dommage, monsieur le ministre, que, tout à l’heure, le débat n’ait porté que sur le régime général. Il faut parler des régimes spéciaux et de l’extrême intérêt du dernier rapport sur quatre régimes spéciaux fait par la Cour des comptes, qui montre qu’il faut des augmentations massives de cotisations sociales si vous voulez maintenir les régimes en l’état. À l’UDF, nous sommes les seuls à avoir une position courageuse. Selon nous, il faut créer un grand régime général unique pour tous les salariés, et mettre en extinction tous les régimes spéciaux.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. C’est facile !

M. Charles de Courson. Ceux qui sont dans les régimes spéciaux y restent leur vie durant, mais les nouveaux recrutés sont au régime général, et l’on rétablit en une génération l’égalité des citoyens devant la retraite.

M. Pierre-Christophe Baguet. Très bien !

M. Charles de Courson. D’après la Cour des comptes, il faut augmenter le taux de cotisation de 16 points pour maintenir le régime de la RATP, de 9 ou 10 points pour la SNCF. Quant aux IEG, nous avons fait quelque chose de contraire à tous les principes d’égalité. Il faut augmenter massivement les prélèvements sur les usagers pour maintenir ce système et les prestations spécifiques.


S’agissant de la branche maladie, le Gouvernement a fait des efforts, même s’ils sont encore insuffisants. La croissance est en forte baisse : 7,1 % en 2002, 6,4 % en 2003, 4,9 % en 2004, 3,9 % en 2005 et 2,5 % en 2006. Ce n’est pas mal. On a réalisé une véritable économie sur les indemnités journalières : en deux ans, la moitié des abus en matière d’arrêt de travail ont été éliminés. S’agissant des médicaments, beaucoup reste encore à faire, mais nous marchons dans la bonne direction. Toutefois, nous sommes arrivés à un niveau en dessous duquel nous ne descendrons pas. En revanche, le Gouvernement n’a pas avancé sur la réforme de l’hôpital public. Je laisse à M. Baguet le soin d’évoquer la situation de la branche famille.

Quant au FFIPSA, tout reste à faire. Il faudra prendre des mesures afin de stopper sa dérive, et voilà des mois que nous le disons.

Pour le budget de l’État, je vais vous faire une proposition, monsieur le ministre. Votre objectif de 0,8 % de croissance maximale en valeur n’est pas exact. Or, comme je vous l’ai expliqué la nuit dernière lors de l’examen du projet de loi de règlement définitif du budget, si vous voulez une norme de dépense qui ait un sens, il faut que figurent dans ce budget général cinq types de dépenses.

D’abord, les dépenses fiscales. Or elles ont explosé : 51,6 milliards en 2004, 54,8 en 2005, 56,2 en 2006 et elles atteindraient 61 milliards en 2007. Vous faites de la dépense budgétaire à coup de dépenses fiscales.

Ensuite, les fonds de concours qui ont augmenté d’un milliard entre 2004 et 2005, et cela continue. Vous avouez d’ailleurs, dans le rapport du Gouvernement – que peut-être peu de gens ont lu – une forte baisse des crédits destinés aux transports qui passent de 9,5 milliards à 9 milliards. Cela s’explique par le fait que l’on finance 750 millions sur l’Agence pour le financement des infrastructures de transport. Autrement dit, on vend des actifs publics pour doter l’AFIT, et celle-ci verse des fonds de concours au ministère des transports ! Et tout cela hors plafond ! Vous rendez-vous compte où nous en sommes ? Ce n’est pas possible, il faut rajouter les fonds de concours !

Troisièmement, les dégrèvements et remboursements chers à Pierre Méhaignerie. Je vous rappelle que les dégrèvements sur impôts locaux, qui sont une dépense budgétaire, explosent : 9,4 milliards en 2004, 11,1 milliards en 2005, 12,8 milliards en 2006 et nous ne savons pas – il serait intéressant que vous nous le disiez, monsieur le ministre – quelle somme ils représenteront en 2007. C’est 1 milliard à 1,5 milliard de plus chaque année.

Quatrièmement, les prélèvements sur recettes au titre du budget européen. Les gouvernements ont une responsabilité directe dans le budget européen. Où en est-on des contributions aux collectivités locales ? Dans le rapport du Gouvernement, vous affirmez, d’une façon très nébuleuse, que ces prélèvements doivent « tendre vers le taux de croissance de la dépense nette du budget général », c’est-à-dire 0,8 %. Pourriez-vous nous expliquer comment vous envisagez les relations avec les collectivités locales. Est-ce que ce sera, comme cela a été suggéré au comité des finances locales, l’inflation plus un petit chouïa ?

Enfin, les comptes spéciaux du Trésor. Il faut arrêter de les utiliser pour donner l’illusion d’une rigueur dans la dépense nette. L’an dernier, 11 milliards ont été dépensés, à coup de subventions diverses et variées, pour faire croire qu’on était rigoureux sur la dépense nette du budget de l’État.

Le groupe UDF propose d’intégrer ces cinq postes dans le budget de l’État afin que le Parlement dispose d’une véritable photo de la croissance réelle de la dépense publique.

En conclusion, le groupe UDF, à l’instar de la Cour des comptes, considère que les gouvernements qui se sont succédé depuis 2002 ont géré avec laxisme les finances publiques. Le début d’une politique moins laxiste n’est pas encore à la hauteur du problème des finances publiques françaises pour l’avenir.

En l’absence de quatre grandes réformes structurelles : l’achèvement de la réforme des retraites – nous n’avons fait que le tiers du chemin –, une véritable réforme de l’assurance maladie qui intègre les hôpitaux publics, une réforme des collectivités locales et de leur mode de financement, une véritable réorganisation de l’État, on ne redressera pas les finances publiques françaises.

Les votes d’abstention puis d’opposition de l’UDF en matière de finances publiques traduisent l’inquiétude croissante de très nombreux Français qui commencent à comprendre qu’on ne peut pas vivre durablement aux frais de ses enfants et de ses petits-enfants. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, cette séance parlementaire, nouvelle, réservée au débat d’orientation des finances sociales, et en particulier de la sécurité sociale est la bienvenue.

Bienvenue, car elle va nous permettre de tirer, une fois de plus, la sonnette d’alarme sur le caractère inopérant des mesures prises en matière de financement de la sécurité sociale et d’apporter des propositions constructives pour l’élaboration du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Alors que nous était promis l’équilibre, c’est hélas ! le précipice qui est encore et toujours d’actualité. En effet, la prévision réactualisée des comptes du régime général pour l’année 2006 fait apparaître un déficit de 10,3 milliards au lieu des 8,9 milliards prévus. Pour l’assurance maladie le déficit prévu est de 6,3 milliards au lieu des 6,1. Telle est donc la réalité concrète, chiffrée et les chiffres sont têtus.

Deux ans après votre réforme de l’été 2004, toutes les branches sont dans le rouge pour une année supplémentaire, après 2005 ! C’est donc un échec patent.

M. Douste-Blazy, alors ministre de la santé, avait annoncé lors de son intervention générale présentant la réforme de l’assurance maladie, conjointement avec l’actuel ministre de la santé, que l’effort financier, comme les réformes, permettrait le retour progressif vers l’équilibre sur la période 2005-2007. Force est de constater que cette promesse est à classer au registre, déjà long, des promesses non tenues.

On aurait pu penser que ce constat stimulerait votre réflexion intelligente et vous conduirait à réviser votre position. Eh bien, non ! Vous continuez et vous affichez votre satisfaction.

Pourtant, deux évidences s’imposent. D’abord, on ne règle pas le financement de la protection sociale en multipliant les plans d’austérité autoritaires, en réduisant la couverture collective…

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. C’est faux !

Mme Jacqueline Fraysse. …et en augmentant la part restée à la charge des assurés, pas plus qu’en exerçant d’inacceptables pressions sur le corps médical dont les conditions d’exercice sont de plus en plus difficiles. Nous vous l’avions dit et démontré, vous ne pouvez que le vérifier avec nous aujourd’hui.

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Les communistes au secours du corps médical, c’est touchant !

Mme Jacqueline Fraysse. II n’y a pas d’autre voie que de réformer le financement, réforme qu’il est urgent de mettre en œuvre si l’on veut préserver notre système des appétits prédateurs de la privatisation !

Depuis quatre ans, restrictions et suspicions, assorties de mesures coercitives, dominent votre approche du financement de la sécurité sociale. Vous avez ainsi multiplié les déremboursements et augmenté la part restant à la charge de l’assuré avec notamment la franchise d’un euro, le forfait de dix-huit euros pour les « K50 » et l’augmentation répétée du forfait hospitalier. Des déremboursements tout aussi ahurissants qu’infondés.

Ainsi, par exemple, en pédiatrie, depuis l’arrêté ministériel de janvier 2006 annonçant une nouvelle vague de déremboursements, quasiment plus rien n’est remboursé en matière de gastro-entérite et de rhino-bronchiolite, alors que ces pathologies peuvent être graves chez le nourrisson.

Pour une rhino du nourrisson, parmi les médicaments pouvant être prescrits comme Bronchokod, Coquelusedal ou Exomuc, indispensables pour traiter la toux et les sécrétions, plus aucun n’est remboursé ! les Français, les plus vulnérables en particulier, sont de moins en moins bien couverts et doivent de plus en plus assumer le coût des soins, ce qui n’est pas inacceptable.

Ces mesures sont infondées car vous justifiez les déremboursements au prétexte de favoriser la prise en charge des médicaments nouveaux et des pathologies lourdes. Mais, depuis 1996, la part des nouveaux médicaments lancés dans le monde, par l’Europe, est passée de 55 % à 28 % malgré toutes les mesures dites de protections des brevets contre les génériques pour favoriser la recherche. En réalité ce sont les « faux nouveaux médicaments » qui arrivent sur le marché, c’est-à-dire une molécule princeps modifiée à la marge.

On ne peut pas assurer l’avenir de notre système avec ce genre de politique marquée du sceau de l’échec. Encore moins en affichant, contre vents et marées, une autosatisfaction et en ignorant le problème des recettes évident, souligné par le directeur de l’UNCAM lui-même.

Par conséquent, une véritable réforme du financement doit donc être engagée, qui permette d’augmenter les recettes, seul moyen de satisfaire l’ensemble des besoins d’aujourd’hui et de résorber le déficit, sans altérer la qualité des soins pour tous, ni leur niveau de prise en charge.

Le Président de la République, lors de ses vœux aux forces vives de la nation, a annoncé une réforme profonde du financement de la protection sociale, reconnaissant enfin l’essoufflement du dispositif actuel. Il a du même coup admis, que l’on ne pouvait pas ignorer plus longtemps une réforme des cotisations sociales patronales, en intégrant la notion de valeur ajoutée.

Depuis plus de dix ans, les parlementaires communistes exigent une telle réforme. Lors de chaque examen des projets de loi de financement de la sécurité sociale, nous avons multiplié les propositions à cet effet et sommes prêts à débattre de tous les aspects.

Refusant le choix d’une plus forte fiscalisation – type CSG – ou toute idée de TVA sociale, nous avançons un projet de refonte du mode de calcul de la cotisation sociale patronale intégrant la notion de valeur ajoutée et sa modulation pour financer la protection sociale.

Il ne s’agit pas pour nous d’un transfert de ressources, supposant l’abandon d’une partie des cotisations assise sur les salaires, ni d’imaginer cette réforme à budget constant. Il s’agit bien de réformer l’assiette pour augmenter les ressources et moderniser le financement de la protection sociale afin de conjuguer, dans la situation d’aujourd’hui, solidarité, justice sociale et développement économique en respectant les principes fondateurs du financement de la sécurité sociale.

II faut donc consolider le lien entre le financement de la protection sociale et la réalité de la production des richesses dans l’entreprise, avec le souci permanent de l’emploi et du développement des ressources humaines, comme de la nécessité de rénover la gestion des entreprises.

Mais la résorption du déficit de la sécurité sociale ne passe pas uniquement par cette réforme de l’assiette des cotisations sociales patronale et sa modulation. Elle doit s’accompagner d’une mise à contribution des revenus financiers spéculatifs et d’une remise en cause des dispositifs d’exonération de cotisations qui ont largement montré leur inefficacité en matière d’emploi et qui représente une difficulté supplémentaire pour le budget de la sécurité sociale et pour le budget de l’État.

Seule la réforme des modalités de financement permettra de répondre aux défis qui nous sont posés : défi de la démographie médicale et besoin de formation urgente de professionnels de santé ; défi de la modernisation de notre système public hospitalier bien mis à mal ces dernières années, notamment par le plan hôpital 2007 et la réforme de la T2A.

Plutôt que de commander des rapports inacceptables, comme celui du Professeur Vallencien qui prône la suppression d’unité de proximité, vous seriez mieux inspiré d’étudier rigoureusement les besoins de santé et les capacités de réponse, région par région, afin de décider, en concertation avec les professionnels, les usagers et leurs élus, au regard de la réalité concrète, quelles structures publiques doivent être maintenues et modernisées. Cette démarche exige évidemment des moyens et non pas, année après année, l’organisation d’une véritable asphyxie budgétaire.

Le prochain budget de la sécurité sociale devra tenir compte de toutes ces réalités, et notamment de la situation des hôpitaux publics. Il n’est pas sérieusement imaginable de nous voir proposer une nouvelle cure d’austérité qui, de surcroît, ne réglerait rien.

Vous ne pouvez pas vous contenter de continuer à traiter le problème du déficit de la protection sociale par un nouvel arsenal de déremboursements et autres pénalités financières pour les assurés.

Messieurs les ministres, vous vous déclarez tous attachés à notre système solidaire et universel de protection sociale. Or vous ne pouvez, comme nous, que constater l’échec de vos choix d’étatisation et de marche vers la privatisation.

Il est urgent de répartir plus équitablement les richesses créées, de prélever l’argent là où il est, pour l’orienter vers les besoins sociaux d’intérêt collectif auxquels tiennent nos concitoyens dans tous les domaines, et particulièrement dans le domaine de la santé.

C’est dans ce sens que le groupe des député-e-s communistes et républicains travaillera ce budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Ordre du jour des prochaines séances

M. le président. Cet après-midi, à quinze heures, deuxième séance publique :

Suite du débat d’orientation budgétaire pour 2007 ;

Suite du débat sur les orientations des finances sociales pour 2007.

(Discussion commune).

À vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de l’ordre du jour de la deuxième séance.

La séance est levée.

(La séance est levée à treize heures.)