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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale

Compte rendu
intégral

Deuxième séance du mercredi 6 décembre 2006

82e séance de la session ordinaire 2006-2007


PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

Questions au gouvernement

M. le président. L’ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Comme il est de tradition chaque premier mercredi du mois, les quatre premières questions devraient en principe porter sur des sujets européens…

lutte contre l’obésité des jeunes

M. le président. La parole est à M. Olivier Jardé, pour le groupe Union pour la démocratie française.

M. Olivier Jardé. Monsieur le président, ma question, à laquelle j’associe mes collègues Préel et Leteurtre, s’adresse à M. le ministre de la santé et des solidarités.

Toutes les études, en Europe et en France, démontrent une augmentation importante de l’obésité, certains parlent même d’épidémie. En 2005, 20 % de nos enfants étaient obèses à huit ans. Pis, au sein de la population nationale, la proportion d’obèses augmente de 5,7 %. Or, vous le savez, 90 % des produits alimentaires dont on fait la publicité aux enfants sont très sucrés ou contiennent de nombreux corps gras. Vous tous, mes chers collègues, savez qu’il existe aussi une incidence socioprofessionnelle. Un quart des enfants qui vivent dans les milieux défavorisés sont obèses, contre seulement 10 % dans les familles de cadres.

L’obésité est une véritable maladie qui entraîne l’échec scolaire, les troubles professionnels et les risques cardiovasculaires. Faut-il aller jusqu’à interdire les sodas comme on le fait pour le tabac ? Je ne le pense pas. Des actions ont déjà été menées, monsieur le ministre. Quelles en ont été les répercussions ? Cette situation est tout à fait alarmante. Qu’envisagez-vous en matière de prévention et de soin pour éviter que nos enfants ne deviennent obèses ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. Comme je l’avais pressenti, c’est une question « européenne » ! (Sourires.) Je tiens à le préciser parce que le groupe UDF m’a demandé de bien veiller à ce que, chaque premier mercredi du mois, les quatre premières questions portent sur des thèmes européens !

La parole est à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur le député Jardé, je réponds au nom du ministre de la santé et des solidarités, qui se trouve aujourd’hui à l’hôpital psychiatrique de Pau. (Rires sur les bancs du groupe socialiste.)

La France a été la première en Europe à mettre en œuvre en 2001 un programme national nutrition santé, lequel a été suivi par la loi relative à la politique de santé publique en 2004 et par le nouveau programme national nutrition santé de septembre 2006. L’obésité est, en effet, devenue un phénomène majeur de santé publique, surtout pour les enfants – vous avez eu raison de le souligner, monsieur le député. On sait, par exemple, que, dans les années 1980, un enfant sur vingt était atteint d’obésité, aujourd’hui, c’est un enfant sur six. Le diabète touche deux millions de Français. Dans le nouveau plan national nutrition santé de septembre 2006, le ministre de la santé a cherché à obtenir l’engagement des industries agricoles et alimentaires. Ce plan s’adressera en priorité aux populations défavorisées. En 2007, les crédits de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé seront accrus de 10 millions d’euros – c’est essentiel. De plus, à partir du 1er février 2007, nous demanderons aux industriels d’apposer un bandeau sur leurs publicités alertant sur les dangers de l’obésité. S’ils manquent à cette obligation, ils devront payer une taxe de 1,5 % sur le montant de ces publicités. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Vous voyez que le Gouvernement est pleinement conscient de la nécessité de franchir de nouvelles étapes dans la lutte contre l’obésité, qui est aujourd’hui une grande cause de santé publique. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

crise de l’industrie automobile

M. le président. La parole est à M. François Asensi, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.

J’espère que cette question aura une connotation européenne ! (Sourires.)

Plusieurs députés du groupe des député-e-s communistes et républicains. Tout à fait, monsieur le président !

M. le président. Je m’en félicite !

Vous avez la parole, monsieur Asensi.

M. François Asensi. Monsieur le Premier ministre, l'industrie automobile est dans la tourmente. Nous sommes au début d'une crise dont l'ampleur dépassera celle de la sidérurgie. En Europe, ce secteur représente dix millions d'emplois, et un million et demi d'emplois, directs et indirects en France. Pour faire jouer le moins-disant social et faute d'harmonisation fiscale et sociale, les entreprises délocalisent massivement vers les pays de main-d'œuvre à bas coût. Les équipementiers, comme Delphi ou Valeo, suivent ce mouvement. Des dizaines de sites sont menacés dans toute la France. En un an, 8 400 emplois dans ce secteur ont été détruits.

Le coût de la main-d'œuvre ouvrière ne compte que pour 7 % du prix d'une voiture, alors que la valeur ajoutée par salarié dans ce secteur n'a cessé d'augmenter. L'absence de croissance constatée au troisième trimestre va accélérer la suppression d'emplois industriels et des pans entiers sont menacés tels que le câblage électrique, les fonderies, le décolletage, la serrurerie... Face à ces difficultés, vous avez annoncé une aide de 400 millions d'euros. Mais quels résultats, en termes d'emplois, avez-vous obtenus avec les aides publiques déjà attribuées aux cinq pôles de compétitivité de la filière ?

Le Gouvernement doit aujourd'hui stopper la saignée et, s'il le faut, ester en justice contre toute procédure de licenciement collectif dans l'industrie automobile.

Tous les bassins d'emplois traditionnels, en France, en Allemagne, en Angleterre, en Italie, sont confrontés à cette même crise.

Monsieur le Premier ministre, quelles mesures envisagez-vous de prendre pour sauvegarder l'emploi industriel et l'ingénierie, en concertation avec nos partenaires européens ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l’industrie.

M. François Loos, ministre délégué à l’industrie. Monsieur le député Asensi, cette question a effectivement une dimension européenne, le problème touchant l’ensemble de l’Union, qui occupe une position très importante, puisque son industrie automobile représente 40 % de l’industrie mondiale…

M. Maxime Gremetz. C’est mal barré !

M. le ministre délégué à l’industrie. … contre 20 % pour les États-Unis et 40 % pour l’Asie. La France est le deuxième producteur européen, PSA occupant le deuxième rang, derrière Volkswagen, et Renault, le quatrième.

Depuis le début de l’année, la croissance du secteur automobile en Europe n’a été que de 0, 4 % en nombre d’immatriculations. Par conséquent, des mesures d’ajustement sont nécessaires. Le Premier ministre les a annoncées la semaine dernière, et je les évoquerai en réponse à une question qui va m’être posée. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Notre politique industrielle est au diapason de la politique européenne menée dans ce domaine. Elle a été mise en place par un groupe de travail auprès du vice-président de la Commission européenne, M. Verheugen, avec lequel nous œuvrons aussi bien en faveur de la recherche européenne dans l’ensemble de la filière qu’au service de la protection de l’environnement, avec la mise en commun des normes évidemment fondamentales pour l’évolution et le choix des nouveaux modèles, alors que nous mettons en place une politique des biocarburants.

M. Maxime Gremetz. Expliquez-nous Valeo !

M. le ministre délégué à l’industrie. Nous avons donc pris des mesures annoncées par le Premier ministre la semaine dernière. La France participe à cette construction européenne de la filière automobile, ainsi qu’à sa défense au plan international. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Merci, monsieur le ministre, d’avoir deviné la teneur d’une question qui n’avait pas encore été posée ! (Sourires.)

partenariat euro-méditerranéen

M. le président. La parole est à M. Bernard Deflesselles, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Bernard Deflesselles. Monsieur le président, ma question s’adresse à M. le ministre des affaires étrangères.

«J’allais vers l’Orient compliqué avec des idées simples » (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste),…

M. Jean Glavany. C’est M. Douste-Blazy qui va répondre !

M. Bernard Deflesselles. …disait le général de Gaulle, qui ajoutait que ces idées, à l’évidence, ne devaient pas être simplistes. Aujourd’hui, à l’heure où certains s’essaient, avec le bonheur que l’on sait, à la diplomatie participative (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste)

M. Albert Facon. Cela vous ennuie !

M. Bernard Deflesselles. … – nouveau concept –, la France continue heureusement de porter une parole juste, et non pas juste une parole ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Un député du groupe socialiste. Ridicule !

M. Bernard Deflesselles. Aussi, monsieur le ministre, il y a dix ans, les représentants de l’Union européenne des dix pays de la rive sud de la Méditerranée se sont engagés à Barcelone dans un processus de partenariat privilégié. Parallèlement à la construction de l’Union européenne, cette dynamique entre les deux rives de la Méditerranée s’est fixé des objectifs ambitieux : démocratisation, bonne gouvernance, dialogue entre les cultures et libéralisation économique. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Aujourd’hui, ce processus de rapprochement entre l’Europe et les pays de la Méditerranée semble ne pas avancer à la mesure de ses objectifs. C’est d’ailleurs le constat que dressent depuis deux ans les 240 parlementaires de ces trente-cinq pays de l’Union européenne et du bassin méditerranéen siégeant au sein de l’Assemblée parlementaire euro-méditerranéenne. Ce projet fondamental, monsieur le ministre, a aujourd’hui besoin d’une réelle volonté politique pour avancer. La France peut et doit y prendre une part prépondérante.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous dire, sans que nous ne puissions faire une mauvaise interprétation, quelles initiatives la France compte prendre pour relancer le processus euro-méditerranéen ? Quelles ont été les propositions de notre pays lors du dernier sommet à Tampere ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Henri Emmanuelli. Aucune !

M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères. Monsieur Deflesselles, les 27 et 28 novembre se sont en effet retrouvés à Tampere en Finlande, non seulement les ministres des affaires étrangères des vingt-cinq pays européens, mais aussi ceux des pays de la rive sud de la Méditerranée qui participent au processus euro-méditerranéen.

Les trente-cinq pays ont apporté leur soutien aux deux grandes avancées récentes dans la crise du Proche-Orient : le cessez-le-feu décidé le 27 novembre suite à l’accord entre les Israéliens et les principaux mouvements palestiniens, mais aussi la proposition de dialogue du Premier ministre Ehud Olmert, la première depuis cinq mois d’impasse militaire et d’affrontements, seule solution pour régler le conflit israélo-palestinien.

Pour la première fois, les trente-cinq pays ont décidé de lancer de nouvelles coopérations en matière d’éducation et d’enseignement supérieur, de santé, mais aussi de nouvelles ressources énergétiques et de migration, élément peut-être le plus important.

Enfin, monsieur Deflesselles, le processus euro-méditerranéen est aujourd’hui le seul cadre où Israël et les pays arabes peuvent se parler. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Livret A

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Balligand, pour le groupe socialiste.

M. Jean-Pierre Balligand. Monsieur le président, ma question s’adresse à M. le Premier ministre.

Il y a quelques semaines, un député UMP interrogeait M. Jean-Louis Borloo sur l'avenir du Livret A. La question est effectivement très importante pour notre pays, mais les vrais problèmes n'ont pas été abordés.

Distribué par la Banque postale et l'Écureuil, le Livret A est détenu par quarante-six millions de Français. C'est un outil majeur d'épargne populaire, d'intégration bancaire et de financement du logement social, notamment, mais pas seulement, parce que cette épargne est centralisée par la Caisse des dépôts, puis prêtée à faible taux aux organismes HLM.

L'avenir du Livret A est aujourd'hui menacé. Mais rétablissons la vérité : ce sont les banquiers français – et non la Commission européenne – qui ont lancé les premiers une procédure pour contester le monopole de sa distribution !

M. Jean-Pierre Soisson. Absolument !

M. Jean-Pierre Balligand. Votre tentative de faire porter sur l'Europe toute la responsabilité du problème élude par conséquent certaines questions, comme par exemple l'alliance contradictoire célébrée entre les Banques populaires, principal opposant au monopole du Livret A, et les caisses d'épargne, principal défenseur et bénéficiaire de ce monopole. La véritable interrogation est la suivante. Pourquoi votre gouvernement a-t-il suggéré à Bruxelles de repousser l'annonce de sa décision après les prochaines échéances électorales, s'il ne pressentait pas une réponse défavorable de la Commission européenne ? N'est-ce pas une manière de mentir aux Français et de les priver d'un débat qui les concerne, au moment le plus propice, à savoir l'élection présidentielle ?

Monsieur le Premier ministre, au vu des dangers que représente la banalisation du Livret A, si vous tenez à l'épargne populaire, si vous voulez vraiment répondre à la crise du logement et si vous croyez en l'avenir de la Caisse des dépôts et consignations, pourquoi n'engagez-vous pas dès aujourd'hui un débat le plus large possible sur l'avenir de l'épargne réglementée à la française ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement.

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le député, il existe, me semble-t-il, suffisamment de sujets sur lesquels la gauche et la droite s’opposent pour que nous puissions nous retrouver sur le Livret A.

Le Livret A, c’est l’un des très grands symboles de l’épargne des Français. Près de 50 millions de Français en détiennent un (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe socialiste), et un grand nombre d’entre eux l’utilisent comme un compte bancaire.

Il bénéficie d’une organisation spécifique, depuis de nombreuses années, à la grande satisfaction des Français. Il est distribué par les caisses d’épargne, le Crédit mutuel et La Poste, et c’est l’élément clé du financement du logement social.

Vous savez pertinemment que nous sommes les uns et les autres profondément attachés au maintien de ce système. Il n’y a donc aucune arrière-pensée, ni de notre part, ni de celle de la Commission européenne, qui est dans son rôle lorsqu’elle interroge la France sur cette spécificité française, et nous sommes dans notre rôle en répondant point par point, de manière extrêmement argumentée, à tous les niveaux. Le Président de la République lui-même s’en est d’ailleurs expliqué avec le président de la Commission européenne.

C’est un sujet sur lequel il faut éviter polémiques et procès d’intention. Je sais que vous êtes membre de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts, mais nous sommes les uns et les autres attachés à ce dispositif. Il s’agit simplement de l’expliquer de manière claire, précise, pédagogique et simple. Parce que nous parlons la même langue, nous serons, vous le verrez, très convaincants. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

réforme des tutelles

M. le président. La parole est à M. Laurent Wauquiez, pour le groupe UMP.

M. Laurent Wauquiez. Ma question s’adresse à M. le garde des sceaux. Elle porte sur un sujet très attendu par de nombreuses familles et depuis trop longtemps méconnu, la réforme des tutelles.

La protection des majeurs vulnérables est fondée sur deux lois anciennes de 1966 et 1968. Près de 700 000 personnes sont aujourd’hui en France placées sous tutelle ou curatelle. Avec le redoutable défi que représentent le grand âge, le handicap physique et la maladie d’Alzheimer, il s’agit de protéger les plus vulnérables de nos concitoyens.

Il faut avoir le courage de le reconnaître, notre régime juridique est à la fois inhumain, inefficace et dangereux.

Il est inhumain parce que le placement en tutelle sonne trop souvent comme une petite mort civile. La famille n’est pas toujours associée, et on donne peu la parole à la personne vulnérable.

Il est inefficace car, alors que les associations et les gérants privés de tutelle font un travail de terrain remarquable, ils sont de plus en plus submergés par les dossiers. De plus, il y a un vrai problème de reconnaissance de leur travail.

Il est dangereux, enfin, parce que le système ne permet pas de se garantir contre d’éventuels scandales ou fraudes.

La réforme a été trop longtemps repoussée. Annoncée en 1997, elle avait été ensuite enterrée sous une pile de rapports. Nous avons été nombreux sur les rangs de cet hémicycle à réclamer cette avancée, notamment les présidents Houillon et Dubernard, ainsi que M. Blessig. Vous avez manifesté la volonté, monsieur le garde des sceaux, de faire avancer ce projet. Il a été présenté la semaine dernière en conseil des ministres. Pourriez-vous nous en donner les grandes lignes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Plusieurs députés du groupe socialiste. Allô ! Allô !

M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.

M. Pascal Clément, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le député, vous soulevez un problème qui touche de près ou de loin la quasi-totalité des familles françaises, celui des tutelles, et qui concerne souvent des personnes âgées. Avec Philippe Bas, j’ai proposé au conseil des ministres une réforme importante de ce régime de protection juridique.

Ce sont 700 000 personnes qui sont aujourd’hui concernées, et il y en aura un million en 2010. C’est trop pour que l’on puisse traiter le problème correctement. La plupart d’entre elles ne relèvent pas de la protection juridique mais relèvent d’une protection sociale.

Première idée de la réforme : ne seront concernées par la tutelle que les personnes dont les facultés mentales sont atteintes. Les autres, qui ont par exemple des problèmes de pauvreté ou d’alcoolisme, relèveront des conseils généraux, qui, par leurs compétences, doivent s’occuper des personnes âgées.

On élargit ainsi la protection. En plus de la protection juridique dont s’occupent les curateurs et les tuteurs, il y aura une protection personnelle et sociale qui donne plus de place à la personne. Aujourd’hui, on ne demande pas toujours l’avis d’une personne qu’on met en maison de retraite. Demain, on lui demandera son avis, tant pour les problèmes de santé que pour les problèmes de logement. On fera preuve d’un plus grand respect. On ne s’occupera pas seulement du patrimoine mais aussi de la personne elle-même.

Enfin, il y aura un contrôle des curateurs et des tuteurs, et nous vérifierons tous les cinq ans s’il faut maintenir quelqu’un sous tutelle ou sous curatelle.

Ainsi, nous aurons une loi équilibrée, qui, je l’espère, fera l’unanimité du Parlement. C’est un problème aigu dans notre société. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

politique des transports
dans la vallée du rhône
et l’arc languedocien

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton, pour le groupe UMP.

M. Hervé Mariton. Ma question s’adresse au ministre de l’équipement.

Le débat public sur la politique des transports dans la vallée du Rhône et l’arc languedocien est clos depuis quelques semaines. Chacun dans le pays a conscience de l’importance d’un tel débat, de ses enjeux pour la compétitivité économique, la qualité de vie et la liberté de mouvement.

Il en est ressorti une exigence forte pour les questions d’environnement, le refus très clair du tout routier et l’attente d’alternatives modales : ferroutage, voies fluviales.

Il conviendrait, monsieur le ministre, que ce ne soient plus des vœux pieux. À cette question qui concerne tous les Français et bien des Européens, nous attendons une réponse opérationnelle. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’équipement, des transports, du tourisme et de la mer.

M. Dominique Perben, ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Monsieur le député, vous avez raison de souligner l’importance du débat public qui s’est déroulé dans la vallée du Rhône et l’arc languedocien. C’est la première fois qu’un débat public portait non pas sur un projet d’infrastructure mais sur l’avenir de cette région et la capacité des réseaux de transport à absorber le trafic dans le respect de l’environnement et de la tranquillité de la population.

Avec Mme Nelly Olin, nous avons fait le point sur le débat public, et nous avons pris ensemble un certain nombre de décisions.

Pour les alternatives modales, il s’agit de faire avancer des projets ferroviaires et fluviaux, et nous avons annoncé il y a quelques jours à Lyon des éléments très concrets.

Sur le plan ferroviaire, il y a le contournement de Lyon, qu’il faut accélérer, le contournement de Nîmes et de Montpellier, le lancement du débat public pour la nouvelle ligne ferroviaire Perpignan-Montpellier, et la réalisation d’une gare intermédiaire dans la Drôme, à Allan, de façon que le TGV puisse desservir la population de la vallée du Rhône.

Sur le plan fluvial, le Rhône est canalisé et équipé, mais il faut renforcer l’équipement des ports fluviaux, et c’est ce qui est prévu en particulier dans le plan Rhône.

S’agissant de la route, nous avons décidé de ne pas élargir l’A7 et l’A9 et de faire le point dans cinq ans de manière à évaluer l’efficacité des mesures que je viens d’évoquer.

Par contre, nous avons décidé de mettre en place sur ces liaisons routières un certain nombre de techniques de gestion du flux comme la modulation des péages en fonction des horaires et du trafic, et un certain nombre d’interdictions de doubler pour les poids lourds, qui seront décidées bien sûr en concertation avec la profession, pour éviter des encombrements extraordinairement difficiles à certaines heures.

En matière routière, il nous faut également développer des solutions alternatives. Je pense à l’axe A46-A51 et aux routes qui traversent le Massif Central et qui peuvent alléger l’axe rhodanien.

Voilà, brièvement, les décisions concrètes que nous avons prises pour tenir compte du débat public, qui a été d’excellente qualité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

refus de soins à des bénéficiaires de la cmu

M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Bacquet, pour le groupe socialiste.

M. Jean-Paul Bacquet. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.

Monsieur le Premier ministre, votre majorité a institué la semaine dernière, en adoptant un amendement du Sénat dont le Gouvernement avait pris l’initiative, un secteur optionnel permettant aux médecins de pratiquer des dépassements d’honoraires alors que plus de 30 % d’entre eux le font déjà. C’est une nouvelle atteinte au libre accès aux soins.

Dans le même temps, une étude du ministère de la santé et un rapport de la Cour des comptes révèlent que 10 à 15 % des professionnels de santé refusent de dispenser des soins aux bénéficiaires de la couverture maladie universelle.

Cette pratique discriminatoire prive les plus faibles d’un accès aux soins et va à l’encontre de l’égal accès aux soins pour tous qu’avait voulu le gouvernement de gauche en créant la couverture maladie universelle.

Cette dérive inacceptable se produit sans aucune réaction de votre gouvernement, mises à part quelques timides admonestations du ministre de la santé, alors qu’elles suscitent l’indignation des plus hautes autorités morales de notre pays – je pense au professeur Didier Sicard, président du Comité consultatif national d’éthique, et à la HALDE, la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité.

Monsieur le Premier ministre, il n’est plus tolérable qu’une partie de la population, sous prétexte qu’elle a des revenus insuffisants, soit privée de soins, pire, que vous aggraviez cette situation avec la mise en place du secteur optionnel. Allez-vous enfin faire cesser toute forme de discrimination et rétablir le suivi de la mise en place de la CMU que la gauche avait institué pour vérifier la bonne application de cette mesure de solidarité ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur le député, il ne vous aura pas échappé que la loi de financement de la sécurité sociale permet d’aider les Français qui n’en ont pas les moyens à acquérir une mutuelle. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Ce sont près d’un million de personnes qui pourront ainsi s’en offrir une.

Pour répondre à la question que vous posez (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste), sachez que le Gouvernement ne vous a pas attendu pour réagir comme il se doit face à ces refus de soins opposés à des bénéficiaires de la CMU.

M. Augustin Bonrepaux. Qu’est-ce que vous faites ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. De tels refus sont inacceptables, rien ne peut les excuser ni les justifier. Il s’agit purement et simplement de discrimination sociale. Au nom des principes de la République, de la loi et de la déontologie des médecins, nous ne pouvons les tolérer.

Dès la publication d’une enquête révélant ces pratiques dans un département de la région parisienne, le ministre de la santé a aussitôt réagi en saisissant l’ordre des médecins ainsi que les caisses de sécurité sociale. Il a également demandé un rapport, qui vient d’être remis et qui sera rendu public, permettant de comprendre les causes de ce phénomène, d’en mesurer l’ampleur et de faire les propositions nécessaires pour y remédier.

Ce rapport est entre nos mains. D’ores et déjà, nous avons fait pression sur les ordres professionnels de médecins et de chirurgiens-dentistes et les caisses de sécurité sociale pour qu’ils engagent les poursuites qui relèvent de leur responsabilité et qu’ils identifient tous les professionnels ayant un comportement discriminatoire.

Le Gouvernement fait prendre toutes les sanctions qui s’imposent. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Darfour

M. le président. La parole est à M. Michel Diefenbacher, pour le groupe UMP.

M. Michel Diefenbacher. À ma question, qui s’adresse à M. le ministre des affaires étrangères,…

Un député du groupe socialiste. Le voyageur !

M. Michel Diefenbacher. …je souhaite associer mon collègue Jacques Remiller, président groupe d’amitié France-Tchad.

Trois cent mille morts, 2,5 millions de personnes déplacées, 3,5 millions de personnes dépendantes de l’aide alimentaire, 250 000 personnes livrées à elles-mêmes dans des conditions sanitaires épouvantables, c’est le terrible bilan de quatre ans d’horreurs au Darfour. Cette région est en effet le théâtre d’une guerre civile sanglante où violations massives des droits de l’homme et exactions inqualifiables sont commises chaque jour par les milices armées Janjawid, soutenues par les autorités de Khartoum.

La situation humanitaire est aggravée par les difficultés que rencontrent dans leur travail les organisations non gouvernementales : embuscades, pillages, vols de matériels, de vivres, de médicaments sont le lot quotidien, quand il ne s’agit pas de l’assassinat des travailleurs humanitaires.

Par sa gravité, ses risques de contagion, cette situation n’est pas sans conséquences diplomatiques. L’installation de camps de réfugiés aux frontières du Tchad et de la République Centrafricaine, le vivier qu’ils constituent pour les rébellions tchadienne et soudanaise, les attaques dont ils sont de plus en plus souvent la cible, sans aucun respect pour les lignes-frontières, constituent un risque majeur de déstabilisation pour toute la région.

Après l’échec des initiatives de paix engagées depuis plus de deux ans, l’Union africaine a demandé, fin août, au Conseil de sécurité de l’ONU d’intervenir. L’envoi de 17 000 Casques bleus a été décidé, mais leur déploiement s’est jusqu’ici heurté au refus du gouvernement soudanais. Il semble toutefois que sa position soit en train d’évoluer.

Monsieur le ministre, vous étiez au Soudan voici quelques jours, et le Premier ministre s’est lui-même rendu au Tchad. Ma question est simple : pouvez-vous nous dire s’il existe aujourd’hui une lueur d’espoir pour le Darfour et pour la stabilité politique de la région ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères. Monsieur le député, sans aucun doute la crise du Darfour est la plus inquiétante de toutes celles qui touchent le continent africain. Le risque est triple. Humanitaire tout d’abord, vous l’avez dit : 300 000 morts, 2,5 millions de personnes déplacées, 300 000 personnes qui ne peuvent avoir accès à l’aide humanitaire. Politique ensuite – il devient de plus en plus fort –, avec un risque de partition du Soudan et la remise en cause des accords du Sud-Soudan qui sont intervenus, je le rappelle, en janvier 2004 après vingt ans de guerre civile. Le troisième risque, qui est le plus grave, est l’extension de la crise du Darfour à l’ensemble de la région. Le Soudan est en effet le plus grand pays d’Afrique, avec neuf pays voisins, dont le Tchad et la République Centrafricaine.

La première urgence consiste à stabiliser l’action que nous menons au Darfour. L’Union africaine a ainsi décidé, à Abuja, le 30 novembre, de prolonger de six mois le mandat de sa force de maintien de la paix. Nous avons obtenu du président soudanais Bachir qu’il accepte une force internationale hybride, composée de forces de l’Union africaine sur le terrain, avec un soutien logistique des Nations unies.

La seconde urgence est de prévenir l’extension du conflit, en particulier au Tchad et en République Centrafricaine. C’est la raison pour laquelle la France a proposé une présence internationale aux frontières du Tchad, du Soudan et de la République Centrafricaine. Le président Déby en a accepté le principe à la suite de la visite du Premier ministre au Tchad.

Pour autant, rien ne sera possible au Darfour sans application de l’accord politique d’« Abuja plus », que les groupes rebelles doivent signer avec le gouvernement soudanais. La France y travaille activement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

incinération des ordures ménagères

M. le président. La parole est à Mme Hélène Tanguy, pour le groupe UMP.

Mme Hélène Tanguy. Ma question s’adresse à Mme le ministre de l’écologie et du développement durable.

M. Augustin Bonrepaux. …et des ours !

Mme Hélène Tanguy. La France possède le plus important parc d’usines d’incinération d’ordures ménagères d’Europe, même si leur nombre a été divisé par trois depuis 1998. Cette réduction s’est accompagnée de la mise en conformité d’installations existantes et de la fermeture d’un grand nombre d’installations anciennes au profit de neuves. Les rejets ont ainsi beaucoup diminué.

Toutefois, des questions sont régulièrement posées par les populations riveraines sur l’incidence de ces installations sur la santé. Ces interrogations sont liées, d’une part, à la persistance de certains composés chimiques émis dans l’environnement, notamment les dioxines, et, d’autre part, à la présence ponctuellement constatée de ces substances à des teneurs élevées dans des aliments tels que le lait de vache produit à proximité d’incinérateurs.

Des études réalisées à l’étranger ont estimé, à l’aide d’indicateurs biologiques, les imprégnations possibles par les dioxines. Elles concluent que résider autour d’une usine d’incinération d’ordures ménagères a peu de conséquences. Toutefois, ces travaux étaient incomplets. En 2004, l’Institut de veille sanitaire a lancé, en collaboration avec l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments, une étude nationale, financée dans le cadre du Plan cancer. Cette étude se distingue de toutes les autres études internationales déjà menées sur le sujet par son ampleur et la spécificité de son approche très détaillée. Elle établit un lien statistique entre le niveau d’exposition aux effluents des incinérateurs dans les années 1970 à 1980 et l’augmentation de la fréquence de certains types de cancers au cours des années 1990 à 1999. Beaucoup d’entre nous, élus, sommes concernés. Quel choix avons-nous ? Nous savons aussi que le compostage et les centres d’enfouissements techniques ne sont pas la panacée ; ils polluent parfois la nappe phréatique. Force est de constater qu’en matière d’ordures ménagères aucune solution de traitement n’est parfaite.

Madame la ministre, pouvez-vous nous dire si les incinérateurs présentent ou non un risque sanitaire ? Quelles instructions pensez-vous donner concernant le parc actuel en France ? Quels investissements faut-il réaliser pour préserver les riverains de tout danger chimique provenant des rejets ? D’une manière plus générale, quelle est la politique du Gouvernement en matière de maîtrise et d’élimination des déchets domestiques et industriels ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’écologie et du développement durable.

Mme Nelly Olin, ministre de l’écologie et du développement durable. Madame la députée, qu’on le veuille ou non, l’incinération est un outil indispensable à la politique de traitement des déchets. En 2002, trente-six incinérateurs ne répondaient pas aux normes : voilà le bilan du gouvernement Jospin. (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Voilà quelles étaient les préoccupations des socialistes en matière d’environnement et d’écologie ! (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste. – Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Albert Facon. Vous dites n’importe quoi !

Mme la ministre de l’écologie et du développement durable. Dès 2002 – nous n’avons pas attendu un jour – les normes ont été durcies et j’ai fermé d’autorité l’incinérateur de Poitiers, qui n’y répondait pas. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Plusieurs députés du groupe socialiste. N’importe quoi !

Mme la ministre de l’écologie et du développement durable. Nous avons veillé, madame la députée, à ce que l’ensemble des incinérateurs respectent les règles les plus strictes, et, aujourd’hui, nous pouvons garantir qu’ils sont aux normes, avec une haute protection de l’environnement et de la santé. La santé ne préoccupait pas non plus beaucoup les socialistes… (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

La vérité vous gêne, mais c’est comme ça ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Entre 1995 et 2005, les émissions de dioxine ont été divisées par dix et à nouveau par dix cette année grâce à l’action du gouvernement de Dominique de Villepin. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

Aujourd’hui, les émissions totales de dioxine issues des incinérateurs en France sont de dix grammes, soit trois fois moins que celles dues à la combustion du bois.

Bien entendu, toutes les installations font l’objet de contrôles réguliers et inopinés. Par ailleurs, depuis 2002, 250 postes supplémentaires de contrôleur ont été créés – ce qui n’avait pas été fait auparavant.

Madame la députée, les études de l’INVS confortent l’action engagée par ce gouvernement et démontrent que les incinérateurs répondent aux normes et ne présentent donc pas de risques sanitaires.

M. Albert Facon. Voilà ! Tout va bien !

Mme la ministre de l’écologie et du développement durable. Un bon déchet, c’est un déchet qui n’est pas produit. C’est pourquoi nous avons élaboré, avec Dominique de Villepin (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), une réponse sur la réduction des volumes, l’augmentation des quantités et le strict respect des normes.

Vous pouvez donc, madame la députée, rassurer les riverains : ce gouvernement a pris ses responsabilités car il ne transige pas, lui, avec la santé publique ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

mines antipersonnel

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Dufau, pour le groupe socialiste.

M. Jean-Pierre Dufau. Monsieur le président, je crains que Mme la ministre de l’écologie ne prenne des risques en pensant que tous les problèmes de déchets seront désormais résolus grâce à elle ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Ma question s’adresse à M. le Premier ministre et porte sur l’action de la France en matière de désarmement.

À l’initiative d’une proposition de loi du groupe socialiste, la France a adhéré en juillet 1998 à la convention d’Ottawa et a éliminé les mines antipersonnel de son arsenal. Malheureusement, trop peu de pays l’ont suivie dans cette voie. Le 29 octobre dernier, notre pays a décidé de ratifier le protocole V de la convention de 1980. Ce protocole porte sur les restes de guerre et marque le premier accord international exigeant des parties à un conflit armé qu’elles procèdent à l’enlèvement de toutes les munitions non explosées – obus, roquettes, grenades, sous-munitions – qui menacent des vies, notamment celles des enfants, tuent les civils, les membres des forces du maintien de la paix et le personnel humanitaire.

Si la France, l’Allemagne et une vingtaine de pays ont pris cette décision, les États-Unis, la Chine, la Russie et les États du Moyen-Orient, notamment, ne l’ont pas fait, ce qui limite la portée de cette décision.

Aujourd’hui, la situation du Liban souligne toute l’acuité du problème et les pays du Sud-Est asiatique attendent depuis vingt-cinq ans qu’on les débarrasse de munitions explosives.

Monsieur le Premier ministre, la France préside actuellement la conférence internationale sur le désarmement. Quelles initiatives fortes le Gouvernement entend-il prendre pour pousser d’autres grands pays à limiter, voire interdire, l’utilisation de munitions qui menacent les populations civiles et à dépolluer les sites touchés après les conflits ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de la défense.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense. Monsieur le député, il est vrai que les mines antipersonnel et les bombes à sous-munitions sont une préoccupation, essentiellement parce qu’elles visent des populations civiles après la fin des conflits.

Comme vous l’avez rappelé, la France a toujours été à l’initiative de la rédaction et de la ratification de toutes les conventions qui tendent à éliminer les mines antipersonnel et à limiter l’impact et le nombre des bombes à sous-munitions. Nous le faisons sur le plan des textes, mais nous le faisons également sur le plan de l’action. Nous aidons dans le monde entier des pays à déminer. Récemment encore, un de nos militaires a perdu la vie au cours d’une de ces actions.

C’est la raison pour laquelle nous essayons aussi, en particulier en ce qui concerne les bombes à sous-munitions, d’agir sur le plan technique pour mettre au point des mécanismes qui rendraient de moins en moins dangereuses les bombes à sous-munitions qui n’ont pas explosé.

M. François Rochebloine. C’est théorique.

Mme la ministre de la défense. C’est le but de notre action concrète. Dans le même temps, nous essayons de convaincre un nombre toujours plus grand de pays de nous rejoindre et d’appliquer les conventions sur l’interdiction, sur l’obligation de dépollution et sur la recherche des moyens de limiter les effets nuisibles de ces armements après la fin des conflits. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Taux réduit de tva
pour les travaux dans le bâtiment

M. le président. La parole est à M. Ghislain Bray, pour le groupe UMP.

M. Ghislain Bray. Ma question s’adresse à M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État.

En février 2006, le Gouvernement a obtenu, à la suite de négociations très difficiles avec nos partenaires européens, la reconduction jusqu’au 31 décembre 2010 du taux réduit de TVA pour les travaux dans le secteur du bâtiment.

M. Maxime Gremetz. Et à qui pensez-vous en posant cette question ?

M. Ghislain Bray. Évidemment, les effets de cette mesure sont importants en termes d’emploi et de lutte contre le travail au noir. Cependant, depuis quelques jours, les professionnels du bâtiment s’inquiètent. On a en effet pu lire ici ou là que, à la suite à un décret paru en août dernier, l’administration chercherait à restreindre le champ de ce taux réduit.

Une telle initiative pénaliserait bien sûr à la fois les artisans et leurs clients, des artisans qui craignent également d’avoir à subir des procédures administratives lourdes et fastidieuses en raison des attestations diverses demandées pour la réalisation de travaux de rénovation.

Pourriez-vous, monsieur le ministre, nous préciser ce qu’il en est sur ces deux points, afin de rassurer, non seulement les professionnels du bâtiment, mais aussi les nombreux particuliers qui souhaitent rénover leur logement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement.

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement. Votre question est d’autant plus utile, monsieur le député, qu’elle me permet de répondre à un article qui a semé le trouble là où il n’avait pas lieu d’être, provoquant, selon l’expression consacrée, une tempête dans un verre d’eau.

Ma réponse sera très simple : il n’a jamais été question de « raboter », pour reprendre le jeu de mots qui servait d’intitulé à l’article, le régime de TVA à 5,5 dans le bâtiment, mais au contraire de le conforter en fixant une règle du jeu. C’est très exactement l’objet du décret publié au mois d’août dernier, en concertation avec les professionnels et de la manière la plus transparente. Nous avons voulu par ce décret fixer une règle du jeu suffisamment claire pour mettre les professionnels à l’abri de tout risque de contentieux fiscal. Le décret ne fait que distinguer les travaux qui relèvent de la construction neuve, qui ne sont pas soumis au taux réduit de 5,5, des travaux de rénovation d’appartements ou de maisons. La frontière est désormais parfaitement claire et précise.

Nous avons par ailleurs simplifié les formulaires destinés aux professionnels, afin qu’ils ne soient plus source de confusions et de perte de temps pour les artisans. Je compte d’ailleurs en envoyer un exemplaire à chacune et chacun d’entre vous, pour que vous preniez vous-mêmes la mesure de la simplification. Ils seront tous mis en ligne la semaine prochaine. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

soutien à la filière automobile

M. le président. La parole est à M. Michel Heinrich, pour le groupe UMP.

M. Michel Heinrich. Monsieur le ministre délégué à l’industrie, l’industrie automobile est un des piliers de notre économie, avec une activité de plus de neuf milliards d’euros et six millions de véhicules produits par an par les constructeurs français. Les enjeux de cette filière sont majeurs, en termes d’emplois, puisqu’elle compte plus d’un million et demi de salariés, mais aussi en termes d’innovation, étant donné les défis environnementaux et énergétiques que nous devons relever.

Il faut donc défendre cette filière industrielle, et répondre aux attentes des équipementiers français, confrontés à de graves difficultés, notamment à une baisse de 7,6 % de leurs ventes au premier semestre. C’est pourquoi le Premier ministre a présenté la semaine dernière un plan de soutien au secteur automobile destiné notamment à encourager l’innovation.

Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous préciser la teneur de ce plan et rappeler les enjeux de cette industrie pour notre pays ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l’industrie.

M. François Loos, ministre délégué à l’industrie. Je vous remercie, monsieur Heinrich, de poser cette question importante sur l’industrie automobile,…

M. Philippe Vuilque. Et inattendue !

M. le ministre délégué à l’industrie. …dont la réponse est attendue sur tous les bancs.

Le secteur automobile traverse effectivement une période difficile. Alors qu’en Europe, le nombre des immatriculations ne fait que se maintenir, il baisse en France, ce qui se traduit par des difficultés notamment pour les équipementiers.

Ceci étant dit, j’ai pu constater la semaine dernière, en inaugurant à Tulle le site d’un équipementier américain en pleine croissance, qu’un sous-traitant innovant – en l’occurrence, dans le domaine de l’automatisation et de l’utilisation du diesel – n’est pas dépendant de l’activité des constructeurs et est capable d’anticiper l’évolution des marchés. Cet exemple m’a conforté dans l’idée que c’est en soutenant l’innovation que nous permettrons aux constructeurs et à leurs sous-traitants de préparer au mieux l’avenir.

C’est pourquoi le Premier ministre a présenté la semaine dernière un ensemble de mesures d’importance en faveur de l’industrie automobile, qui vise notamment à soutenir la compétitivité du secteur. En 2006 et 2007, 250 millions d’euros de crédits seront débloqués en faveur du soutien à l’innovation via les cinq pôles de compétitivité automobile et l’Agence de l’innovation industrielle, contre vingt millions en 2004, afin de permettre à cette industrie d’aller plus vite et plus loin dans la conquête de nouveaux marchés.

Par ailleurs, le doublement du plafond du crédit d’impôt recherche doit inciter les constructeurs à investir davantage dans la recherche. Ce plafond, qui est actuellement de huit millions d’euros, passera à seize millions d’euros, soit un accroissement de l’aide estimé à 120 millions d’euros supplémentaires.

En outre 150 millions d’euros seront consacrés à un plan de formation et de reconversion de 20 000 salariés du secteur, dans le cadre d’un plan général d’accompagnement, notamment par la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, qui sera mis en place sous l’égide de Gérard Larcher.

En ce qui concerne les délais de paiement pratiqués par les constructeurs, dont la longueur est une des plaies de l’industrie automobile française, nous avons déjà avancé dans la résolution de ce problème puisque tous les acteurs de la filière automobile, constructeurs et sous-traitants, équipementiers de premier, deuxième, troisième, quatrième rang, ont signé il y a quelques mois un code de bonnes pratiques, qui impose aux constructeurs d’aller le plus loin possible dans la voie de la réduction des délais de paiement. Nous avons lancé un ultimatum aux acteurs de la filière : si d’ici le 15 janvier ils ne sont pas parvenus à se mettre d’accord sur une réduction des délais de paiement, la négociation devra laisser la place à la voie législative : Martial Saddier travaille depuis plusieurs mois à une proposition de loi visant à obliger les constructeurs automobiles à payer leurs sous-traitants dans des délais raisonnables.

Comme vous le voyez, nous mettons en place toute une palette de réponses propres à donner à notre industrie automobile et à tous ses sous-traitants les meilleures chances de construire leur avenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à quinze heures cinquante, est reprise à seize heures quinze, sous la présidence de Mme Hélène Mignon.)

PRÉSIDENCE DE MME HÉLÈNE MIGNON,
vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

MODERNISATION DU DIALOGUE SOCIAL

Suite de la discussion,
après déclaration d’urgence,
d’un projet de loi

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d’urgence, du projet de loi de modernisation du dialogue social (nos 3456, 3465).

Discussion des articles (suite)

M. le président. Nous en venons à l’article 1er.

Article 1er

Mme la présidente. La parole est à M. Francis Vercamer, inscrit sur l’article.

M. Francis Vercamer. Ce premier des deux articles que comporte le projet de loi que nous examinons est essentiel. Il est regrettable qu’à propos d’un texte consacré précisément à promouvoir le dialogue social, c’est-à-dire à faire précéder chaque modification du code du travail par une négociation entre les partenaires sociaux, plusieurs amendements cavaliers aient été déposés de part et d’autre de l’hémicycle, et en particulier par les groupes socialiste et communiste, visant à modifier le code du travail sans passer par la voie du dialogue social.

Si essentiel soit-il, l’article 1er n’est somme toute qu’un engagement, même s’il est un peu plus solennel que celui qu’a pris François Fillon, alors ministre des affaires sociales, dans l’exposé des motifs de la loi de 2004.

Alors que cette loi n’a jamais été appliquée durant toute la législature, le Gouvernement nous présente aujourd’hui une loi ordinaire, qui ne l’engagera pas plus, puisqu’elle ne pourrait être appliquée que sous la législature suivante et qu’on sait bien qu’une loi ordinaire suffit à en modifier une autre, de sorte que le prochain gouvernement ne sera pas tenu d’appliquer cette disposition. Cela est d’autant plus vrai que le Gouvernement a inséré dans le texte un alinéa qui lui permet, en cas d’urgence déclarée, de se dispenser de la voie du dialogue social, qui fait le fond du dispositif, comme il l’a d’ailleurs fait durant toute la législature.

Le groupe UDF est donc très perplexe. Nous souhaitions en effet que ces dispositions revêtent plutôt le caractère d’une loi organique, afin que les gouvernements futurs soient tenus de passer par la voie du dialogue social avant de légiférer pour modifier le code du travail.

Sur l’article 1er, notre groupe a déposé plusieurs amendements. Le premier d’entre eux vise à supprimer le dispositif de déclaration d’urgence permettant au Gouvernement de déroger à l’obligation du dialogue social, comme il l’a fait, je le répète, pour presque tous les textes sociaux.

Nous avons également déposé un amendement de repli, que je présenterai en temps utile et qui, je l’espère, sera accepté par le Gouvernement.

Mme la présidente. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. L’article 1er de ce projet de loi n’est qu’une étape d’une réforme globale. Le Gouvernement n’envisage cette réforme que sous l’angle de la concertation préalable avant toute délibération législative. C’est bien peu.

Nous ne nous opposons certes pas à cet article, car une meilleure concertation est un impératif dans le domaine social. Je soulignais d’ailleurs, lors de la discussion générale, que la situation est très symbolique : une majorité qui, depuis cinq ans, a ignoré à ce point les principes de ces relations avec les partenaires sociaux ne pouvait présenter qu’un tel texte.

Vous avez multiplié les initiatives législatives visant à priver les salariés de leur droit d’expression et de consultation – je pense notamment aux réformes du décompte des effectifs, qui empêchent la mise en place d’institutions représentatives, et aux cavaliers législatifs que vous avez enchaînés sans concertation – surtout en cette dernière période – tels que l’amendement 35 heures dans l’hôtellerie-restauration, la réforme du temps de travail pour les salariés agricoles ou l’amendement transport, qui sont autant de mesures dont les conséquences sont importantes et qui ont été imposées en catimini.

Quant à l’échec du CPE, s’il est un échec pour le Gouvernement, il est un succès pour le mouvement social. J’avais d’ailleurs annoncé au Premier ministre, à l’époque de ce vote, que ce dispositif n’était pas près d’être accepté dans notre pays. Cet épisode a bien illustré le mépris de ce gouvernement pour la jeunesse et le monde du travail. Cet amendement de cinq pages porteur à lui seul d’une véritable réforme législative, déposé la veille de la discussion du projet de loi pour l’égalité des chances, sans concertation, constituait à lui seul un déni de dialogue social. L’histoire qui a suivi n’est pas plus glorieuse.

Toutes ces péripéties vous conduisent à justifier aujourd’hui une réforme du dialogue social qui est bien peu révolutionnaire. Ce que vous nous proposez là n’est, somme toute, que la reprise des amendements que nous avons proposés sur différents textes et que vous avez rejetés. C’est là, ni plus ni moins, ce que devrait être la pratique normale d’un gouvernement envers les partenaires sociaux. Enfin, vous ne faites que tenir un engagement pris par votre prédécesseur au ministère de l’emploi, M. Fillon.

Cette réforme suppose encore certains aménagements, car des zones d’ombre subsistent quant à sa mise en œuvre. Je pense notamment aux conditions de déclenchement de la négociation – comment se décidera-t-elle ? –, au moment où elle aura lieu et aux thèmes concernés, qui devront inclure la protection sociale.

J’espère enfin que le Gouvernement acceptera l’amendement du rapporteur, que nous avons cosigné, sur la motivation de l’urgence.

Ces éléments donneront un peu plus de relief à votre projet de loi, qui fait bien pâle figure face aux attentes exprimées par le monde du travail. D’une façon générale, si nous n’avons pas lieu de nous plaindre de ce qui nous est proposé aujourd’hui, nous pouvons regretter qu’il ait fallu attendre jusqu’à la fin de la législature pour examiner ce projet de loi et que celui-ci se limite aux dispositions prévues par l’article 1er.

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, nos 1 et 46 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.

L’amendement n° 1 fait l’objet d’un sous-amendement n° 16.

La parole est à M. Bernard Perrut, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour soutenir l’amendement n° 1.

M. Bernard Perrut, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. L’amendement n° 1 est essentiel, car il rejoint l’esprit même du texte, qui, pour la première fois, inscrit le dialogue social dans le marbre, à la première page du code du travail.

La commission a souhaité, sur ma proposition, faire suivre le terme de dialogue social d’une définition, ou tout au moins d’un complément justificatif, qui n’est que l’évocation des trois points forts de ce texte que sont les procédures de concertation, de consultation et d’information.

La rédaction retenue présente l’avantage de la clarté et de la simplicité – il est utile de le souligner, compte tenu du sous-amendement n° 16 et de l’amendement n° 46 rectifié, déposés par des collègues sensibles eux aussi à cette question.

La modification proposée vise à désigner de la manière la plus simple et la plus précise possible les trois procédures proposées aujourd’hui, conformément d’ailleurs à la présentation qui a été faite par le ministre en commission et en séance publique. Je rappellerai d’un mot la philosophie du texte qui nous est soumis.

Tout d’abord, l’article L. 101-1 prévoit une procédure de concertation. Le Gouvernement engagera avec les partenaires sociaux une procédure de concertation préalable, qui se présente comme une sorte d’aller-retour. Le Gouvernement mettra un document d’orientation à la disposition des partenaires sociaux, qui décideront alors d’engager une négociation ou de ne pas l’engager. L’éventuelle négociation conduira alors – ou non – à l’adoption d’un accord, à la suite de quoi le Gouvernement reprendra l’initiative.

Je tiens donc à préciser, à la lumière du débat que nous avons eu sur ce point en commission, que la négociation est, dans ce cadre, une composante de la concertation, car elle n’a lieu que si les partenaires le souhaitent. Voilà donc pourquoi l’amendement n° 1 propose simplement d’évoquer dans l’article 1er les « procédures de concertation, de consultation et d’information ».

D’autre part, l’article L. 101-2 met en place une procédure de consultation, que vous connaissez bien, par laquelle le Gouvernement soumet des projets de textes législatifs et réglementaires.

Enfin, l’article L. 101-3 prévoit une procédure d’échange d’informations. Il me semble important, conformément au souhait de la commission, de viser chacune de ces trois procédures avec le plus de précision et de concision possible. Il ne s’agit pas, je le répète, de proposer une conception abstraite du dialogue social, mais bien de renvoyer avec précision aux trois procédures clairement identifiées par le texte.

Mme la présidente. La parole est à M. Maxime Gremetz, pour soutenir le sous-amendement n° 16.

M. Maxime Gremetz. Nous avons déjà eu ce débat. Vous relevez à juste titre, monsieur le rapporteur, que le chapitre unique que le projet de loi prévoit de créer dans le code du travail ne comporte pas d’intitulé, et que votre amendement n° 1 « vise à combler cette lacune en proposant un intitulé rendant compte des trois procédures prévues par le projet de loi ».

Toute notre discussion montre cependant que les procédures de concertation, de consultation et d’information existent déjà. Il faut, certes, favoriser le dialogue social, et c’est l’esprit dans lequel vous présentez ce projet de loi, mais si le dialogue social se limite à s’écouter mutuellement, puis de se séparer sans rien de plus, on ne résoudra pas les problèmes.

Mieux vaudrait donc, même dans cet esprit, montrer clairement qu’information, consultation, concertation et négociation vont de pair et s’inscrivent dans un même processus. Il n’y a pas de négociation sans consultation, sans concertation et sans information.

Veut-on, oui ou non, favoriser la négociation ? En ne la rendant pas obligatoire, vous limitez la portée de ce qui se met en place avec votre projet de loi. Cela est d’autant plus vrai que le texte prévoit expressément que les partenaires sociaux, MEDEF compris, peuvent demander l’ouverture de la négociation. C’est là une occasion manquée.

Certes, je n’en mourrai pas, et nous savons bien que la négociation n’aura pas toujours lieu. Toujours est-il que, sur le plan symbolique, il serait bon d’indiquer vers quoi nous devons tendre.

Le sous-amendement proposé par le groupe des député-e-s communistes et républicains n’a donc pas vocation philosophique ou politique et ne vise pas à modifier le dispositif : il ne porte, je le répète, que sur l’intitulé du chapitre que vous créez, et propose seulement d’y indiquer l’horizon de la démarche que vous engagez.

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard, pour soutenir l’amendement n° 46 rectifié.

Mme Martine Billard. Monsieur le ministre, le Gouvernement a décidé de toiletter le code du travail pour éviter des divergences dans les définitions liées à des périodes d’écriture différentes. Il est donc important de garder cette préoccupation à l’esprit dans nos travaux actuels et futurs, et d’essayer, lorsqu’une définition a été introduite dans un article, de la reprendre de la même manière dans l’ensemble du code. C’est pourquoi je pense que ce n’est pas uniquement un débat de sémantique. C’est un débat de cohérence dans le cadre du code du travail, et aussi par rapport à certains symboles.

M. Maxime Gremetz. Oui !

Mme Martine Billard. L’Organisation internationale du travail a donné une définition du dialogue social, reprise dans le rapport du Conseil économique et social, « incluant tous les types de négociation, de consultation ou simplement d’échange d’informations entre les représentants des gouvernements, des employeurs et des travailleurs sur des questions présentant un intérêt commun relatives à la politique économique et sociale ». L’OIT emploie donc bien le terme « négociation ».

Dans votre intervention devant la Commission nationale de la négociation collective, à propos de l’article 2 de ce projet de loi, qui modifie l’alinéa 2 de l’article L. 136-2 du code du travail, la question de la négociation collective avait disparu ; la CGT s’en est émue, et vous l’avez réintroduite. Il me semble donc que, pour ce nouveau chapitre, il serait utile de conserver cette cohérence en la faisant apparaître dans les termes utilisés.

J’ajoute qu’à terme, il faudra que ce chapitre intègre les articles concernant la représentativité syndicale, à défaut de quoi il ne contiendrait en fait qu’une définition du dialogue social, les autres articles s’y rapportant étant placés ailleurs dans le code du travail, ce qui serait regrettable.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement no 46 rectifié ?

M. Bernard Perrut, rapporteur. Madame Billard, vous dites qu’il faut de la cohérence, donc reprendre dans l’intitulé le contenu de l’article. Mais dans le titre proposé par votre amendement disparaît un mot pourtant essentiel : « concertation ». Dès lors, vous oubliez tout le sens de la réforme puisque c’est bien le mot « concertation » qui donne au texte toute sa dimension. Et vous le faites disparaître. Nous sommes en ce cas très loin du texte. Vous éliminez totalement la concertation, d’où découle justement la négociation : votre amendement va à l’encontre du contenu repris un peu plus loin dans son exposé sommaire. Je ne peux donc qu’émettre un avis défavorable.

M. Maxime Gremetz. Ce n’est pas un argument !

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes, pour donner l’avis du Gouvernement sur les amendements et le sous-amendement en discussion.

M. Gérard Larcher, ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. J’ai eu l’occasion de le dire lors de la discussion générale, je crois que l’amendement no 1 de la commission permet de créer un intitulé au chapitre : concertation, consultation, information, telles sont les procédures du dialogue social. De plus, la concertation recouvre la possibilité d’ouvrir ou non des négociations. Je rappelle que les partenaires sociaux devront, dans ce cadre, nous apporter leur réponse et nous indiquer le délai dont ils ont besoin s’ils entendent négocier. L’avis du Gouvernement est donc favorable à l’amendement présenté par le rapporteur.

S’agissant du sous-amendement, j’ai bien compris, monsieur Gremetz, que vous n’en faisiez pas un sujet majeur, et que votre souhait était d’apporter de la précision. Je tiens à vous préciser que, derrière la concertation, il y a bien la possibilité ouverte à la négociation si les partenaires sociaux le souhaitent. Je vous demande donc de retirer votre sous-amendement.

Madame Billard, comme vous avez évoqué la recodification en cours, j’en profite pour informer la représentation nationale du point où nous en sommes dans le chantier de la recodification à droit constant du code du travail.

Les travaux sont terminés au niveau administratif, au niveau des différents groupes et commissions qui avaient été créés. Je vous renvoie d’ailleurs au rapport du président de la commission supérieure de codification, qui vient d’être publié. Il a salué, dans son rapport, le caractère exemplaire du travail mené, et je remercie tous ceux qui y ont contribué, notamment le directeur général du travail. C’est une tâche complexe, qui a été menée dans le dialogue avec les partenaires sociaux ; en matière de normes, on ne peut pas faire les choses autrement que d’une manière parfaitement carrée, parfaitement raisonnée, construite, parce que l’ordre public social – j’ai eu l’occasion de l’évoquer hier devant une grande organisation professionnelle – a un sens, et ne saurait être approximatif.

Nous allons maintenant saisir le Conseil d’État, et l’ordonnance devrait pouvoir être publiée au cours du premier trimestre, sans doute au mois de mars de l’année 2007. Le législateur avait prolongé le délai qui nous était imparti, et nos travaux sont aujourd’hui achevés, à la fin de l’année comme nous l’avions dit.

Pour les mêmes motifs que pour le sous-amendement, et en soulignant que mon objectif n’est pas de réduire d’un mot l’intitulé que vous proposez, je vous demande de retirer votre amendement n° 46 rectifié, parce que nous pensons que l’ensemble du dispositif est bien contenu dans l’intitulé proposé par l’amendement du rapporteur, auquel nous donnons un avis favorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Soisson.

M. Jean-Pierre Soisson. C’est un débat important, un peu technique.

M. Maxime Gremetz. Non, pas technique !

M. Jean-Pierre Soisson. Je me rallie à la proposition du rapporteur. Mais je dis aussi à Mme Billard qu’elle a raison : il existe, à l’heure actuelle, du dialogue social une seule définition : celle de l’Organisation internationale du travail. Ce n’est pas d’ailleurs une définition juridique, mais plutôt une définition des champs de compétences que le dialogue social pourrait recouvrir. Dans la précision qu’apporte l’OIT, le terme de négociation apparaît, et au premier rang. C’est un problème technique que le Gouvernement doit régler avec le rapporteur, mais aussi avec la Commission nationale de la négociation collective, le Conseil d’État et tous les organismes concernés. On pourra d’ailleurs corriger l’intitulé entre les deux lectures.

Mais, pour la première fois dans le code du travail, je le fais remarquer à ceux qui connaissant bien ce texte – je pense notamment à vous, monsieur Vidalies –, va apparaître dans un intitulé ce qui est une définition du dialogue social. M. Perrut, avec son triptyque concertation-consultation-information, passera sans doute à la postérité du code du travail.

M. Maxime Gremetz. Non !

M. Jean-Pierre Soisson. Certes par la petite porte ; mais vous entrez par l’intitulé, monsieur le rapporteur, et vous ressortirez peut-être un jour avec un ou deux articles entiers. (Sourires.)

De grâce, n’allons pas nous battre plus longtemps là-dessus !

Madame Billard, la concertation implique la négociation. Pourquoi ne pas reprendre le mot « négociation » ? C’est parce que toute concertation ne se conclut pas obligatoirement par une négociation. Si l’on insérait le mot « négociation », nous préjugerions donc du résultat de la concertation.

M. Bernard Perrut, rapporteur. Tout à fait !

M. Jean-Pierre Soisson. C’est pourquoi, juridiquement, je préfère la formulation de la commission.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Vidalies.

M. Alain Vidalies. La difficulté est de savoir si l’on est en train de débattre de questions de nature littéraire ou s’il y a des conséquences juridiques à attendre de l’absence de cette précision dans le titre du chapitre.

M. Bernard Perrut, rapporteur. On ne va pas y passer la soirée !

M. Alain Vidalies. Le problème, monsieur le rapporteur, c’est que votre amendement reprend au fond tous les points qui sont visés dans l’article 1er – la concertation correspond au premier alinéa du nouvel article L. 101-1, la consultation au nouvel article L. 101-2 –, sauf la négociation, qui est mentionnée pourtant à plusieurs reprises, comme au troisième alinéa du nouvel article L. 101-1 : « lorsqu’elles font connaître leur intention d’engager une telle négociation ». Exclure uniquement le concept de négociation dans le titre du chapitre, soit c’est un oubli, soit ce sera interprété comme ayant un sens par rapport au problème que cet alinéa pose : comment les organisations syndicales feront connaître leur intention ? Cela pourrait conduire à sortir des procédures habituelles de négociation qui existent dans le code du travail, notamment celles relatives à la constitution d’une majorité. Je ne pense pas que ce soit l’objectif de votre amendement que d’entraîner vers de telles interprétations, monsieur le rapporteur ; mais à partir du moment où M. le ministre dit que, bien évidemment, l’idée de négociation est incluse dans la démarche, on prend plus de risques à ne pas inscrire le mot « négociation » dans le titre qu’à l’y mettre. Cette précision éviterait évidemment une interprétation erronée de l’objectif réel de votre amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Monsieur le rapporteur, je ne peux pas suivre votre argumentation parce qu’elle ne tient pas : en réponse à l’amendement de notre collègue Martine Billard, vous dites qu’elle ne propose que trois termes en excluant le mot « concertation ». Mais moi, c’est différent : j’ajoute « négociation », je n’enlève rien !

M. Alain Vidalies. Eh oui !

M. Maxime Gremetz. Monsieur le rapporteur, vous avez tout faux pour mon sous-amendement. Vous n’y avez pas répondu.

M. Bernard Perrut, rapporteur. J’ai répondu.

M. Maxime Gremetz. D’abord, je rappelle qu’on nous dit que nous discutons d’un grand projet qui fait faire des pas en avant considérables dans le domaine du dialogue social, de la négociation sociale, etc., ce qui manque beaucoup dans ce pays – c’est le moins qu’on puisse dire. Or vous amputez vous-même votre projet de loi, vous l’affaiblissez en ne mentionnant pas la négociation dans l’intitulé. Pourtant, tout au long de l’article – mon collègue Alain Vidalies l’a rappelé –, vous parlez de négociation. Vous êtes dogmatique. Sinon, comment pourriez-vous différencier concertation, consultation, information, et oublier la négociation ? Si l’on se parle, si l’on se concerte, si l’on se consulte sur le sexe des anges, ça ne sert pas à grand-chose pour résoudre les problèmes ! Dès l’entrée en matière, le nouvel article L. 101-1 n’indique-t-il pas que tout projet de réforme du Gouvernement fait l’objet d’une concertation préalable en vue de l’ouverture éventuelle d’une négociation ?

Si l’on se concerte, c’est bien pour créer les conditions d’une négociation !

Je ne vais pas insister, mais vous vous rendriez service en adoptant mon amendement. Libre à vous de ne pas saisir la perche que je vous tend : je ne vais pas m’évertuer à vous convaincre que votre position vous dessert. En vous contentant des traditionnelles « procédures de concertation, de consultation et d’information », vous faites en tout cas preuve de frilosité.

Comme on ne manquera pas de vous le dire, les procédures prévues existent déjà, et elles n’aboutissent pas forcément à des négociations. Elles ne permettent donc pas de régler les problèmes puisque, au bout du compte, c’est toujours la direction des entreprises qui décide.

Mme Martine Billard. Je retire l’amendement n° 46 rectifié au profit du sous-amendement n° 16 défendu par M. Gremetz.

Mme la présidente. L’amendement n° 46 rectifié est retiré.

Je mets aux voix le sous-amendement n° 16.

(Le sous-amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 1.

(L’amendement est adopté.)

M. Maxime Gremetz. Je suis favorable à cet amendement, mais il reste insuffisant ! Je ne suis pas un tenant du « tout ou rien », c’est bien connu…

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 48.

La parole est à Mme Martine Billard, pour le soutenir.

Mme Martine Billard. L’amendement vise à insérer, après le mot « emploi », les mots : « , les garanties sociales » dans l’article L. 101-1 du code du travail.

Nous avons eu ce débat avec vous en commission, monsieur le ministre. Il est inquiétant que vous refusiez d’ajouter cette précision sur les garanties sociales : un certain nombre de syndicats s’interrogent d’ailleurs à ce sujet.

Le titre III du code du travail s’intitule en effet : « Conventions et accords collectifs de travail ». Il comporte l’article L. 131-1, lequel indique que « le présent titre est relatif à la détermination des relations collectives entre employeurs et salariés ; il définit les règles suivant lesquelles s’exerce le droit des salariés à la négociation collective de l’ensemble de leurs conditions d’emploi, de formation professionnelle et de travail et de leurs garanties sociales ».

Or la notion de négociation collective s’inscrit bien dans le texte dont nous discutons, puisque l’article 2 prévoit que la commission nationale de la négociation collective émettra un avis sur les projets de loi, d’ordonnance et de décret présentés par le Gouvernement. N’est-il pas étrange que cette commission puisse se saisir de questions ayant trait aux garanties sociales, mais que les « procédures de concertation, de consultation et d’information » ne puissent s’appliquer aux projets de réforme intéressant les garanties sociales ?

Contre toute cohérence, il y a donc deux conceptions de la négociation collective. Suite aux observations de la CGT, vous avez en effet réintroduit, monsieur le ministre, la négociation collective dans le champ de l’avis émis par la commission nationale de la négociation collective. Mais il est étrange, je le répète, que la question des garanties sociales ne figure pas dans l’article 1er du projet de loi, ce qui permettrait à l’ensemble des partenaires sociaux d’être consultés sur un sujet dont je doute qu’il puisse être traité par d’autres instances collectives de négociation.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Bernard Perrut, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement : la question du champ des négociations a fait l’objet de longues concertations avec les partenaires sociaux, eux-mêmes s’étant mis d’accord sur le sujet. Il est donc difficile pour les parlementaires que nous sommes d’aller contre l’accord qui a pu être trouvé.

Les domaines visés par le projet de loi, je le rappelle, sont les relations individuelles et collectives du travail, l’emploi et la formation professionnelle : ils sont donc clairement identifiés. Ils constituent d’ailleurs le cœur du code du travail et ne correspondent en effet que partiellement, madame Billard, au champ actuel de la négociation collective tel qu’il est défini par l’article L. 131-1 du code du travail.

Au reste, si d’autres thèmes – comme les retraites de base ou l’assurance maladie – ne relèvent pas davantage du champ visé par le projet de loi, ils font l’objet de concertations dans des instances adaptées : la concertation existe donc bien.

En outre, nous devons tenir compte de la volonté fortement exprimée par l’ensemble des acteurs ayant participé à l’élaboration du présent texte d’inscrire la concertation dans un champ où elle peut véritablement être menée et accompagnée : celui des réformes traditionnellement mises en œuvre par le ministère de l’emploi. En la matière, il est en effet inutile de compliquer la concertation par l’intervention d’autres acteurs, comme le ministère de la santé ou le ministère de l’économie, par exemple.

Bref, c’est une volonté de clarté et d’identification des domaines concernés qui s’est exprimée : c’est pourquoi la commission juge préférable de respecter l’esprit du projet de loi et des souhaits émis par les acteurs qui ont participé à sa préparation.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Fruit d’une longue concertation engagée par le rapport de Dominique-Jean Chertier et menée notamment au sein de la commission nationale de la négociation collective, ce texte est un compromis équilibré, qui s’en tient au champ de compétences du ministère du travail.

Il est vrai que certains partenaires ont pu souhaiter inclure d’autres sujets, comme la protection sociale et l’assurance maladie. Mais le texte dont nous discutons porte sur les relations du travail, et nous devons nous y tenir. Le Gouvernement comme le Parlement doivent bien sûr garder toute la liberté que leur octroie la Constitution – je pense à ce que déclarait hier Jean-Pierre Soisson. Mais nous devons aussi respecter ce qui est le fruit d’une longue concertation : le rapporteur a tout dit sur ce sujet.

Au nom du principe et de l’esprit du dialogue social, je ne puis donc qu’être défavorable à l’amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Cet amendement pose le problème des cavaliers législatifs, que j’évoquais déjà hier.

On a vu que le Sénat avait introduit dans le texte relatif à la participation et à l’actionnariat salarié certaines dispositions, avec l’assentiment du Gouvernement, ce qui a considérablement modifié le code du travail, y compris dans le domaine des relations paritaires – je pense notamment aux articles concernant le conseil des prud’hommes, organisme paritaire par excellence.

M. Maxime Gremetz. Tout à fait !

M. Francis Vercamer. M. le ministre affirme qu’il ne se sent pas engagé par le texte, puisque la Constitution lui permettrait d’aller au-delà. Mais que pense-t-il de ce genre de cavaliers ? Le Gouvernement peut toujours s’obliger à organiser le dialogue social, mais, s’il détourne la loi par le biais de cavaliers déposés par le groupe de l’UMP, celle-ci n’aura été qu’un coup d’épée dans l’eau !

M. Maxime Gremetz. Et ce sont des cavaliers boiteux !

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Ce qui importe, c’est que les chevaux ne le soient pas ! (Sourires.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Soisson.

M. Jean-Pierre Soisson. L’Assemblée a intérêt à suivre l’avis de la commission et du Gouvernement et à rester dans le cœur des compétences du ministère du travail.

Ce n’est pas parce que l’on a péché en d’autres temps et sur d’autres sujets, monsieur Vercamer, que l’on continue à le faire avec ce texte.

M. Francis Vercamer. Vous avez continué à le faire pas plus tard que la semaine dernière ! (Sourires.)

M. Jean-Pierre Soisson. Restons-en à une définition stricto sensu du code du travail.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Vidalies.

M. Alain Vidalies. M. Soisson affirme que, si le Gouvernement a beaucoup péché jusqu’à hier, maintenant, c’est fini ! (Sourires.) Nous avons en effet voté hier un texte comportant trois cavaliers qui remettent en cause les droits des salariés, sans qu’aucune concertation n’ait été organisée en amont. Je prends néanmoins bonne note de votre repentance !

Il reste que vous persistez dans vos erreurs – pas nécessairement à votre initiative, monsieur Larcher, mais le Gouvernement forme un tout ! Au-delà de nos savants débats, certains s’inquiètent du sort réservé, par exemple, au comité d’entreprise de la Banque de France : des amendements au texte examiné au Sénat viennent en effet de remettre en cause ses droits.

M. Maxime Gremetz. Tout à fait ! Ça vient de partout !

M. Alain Vidalies. Passez aux actes et cessez avec ces pratiques dont Jean-Pierre Soisson a affirmé qu’elles appartenaient au passé. Je suppose que le Gouvernement va nous indiquer qu’il s’engage à écarter toute disposition incompatible avec le texte que nous allons voter.

M. Maxime Gremetz. Je propose de reconnaître par un vote ce principe : « c’est fini », vous ne recommencerez plus ! (Sourires.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 48.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 17.

La parole est à M. Maxime Gremetz, pour le soutenir.

M. Bernard Perrut, rapporteur. C’est la même chose que l’amendement précédent !

M. Maxime Gremetz. Pas du tout, monsieur le rapporteur : lisez attentivement les amendements ! J’ai voté l’amendement n° 48, mais celui-ci est très différent.

Vous nous demandez de nous en tenir au champ du travail, mais il faudrait être très fort pour savoir exactement de quoi il retourne : les cadences, les accidents du travail et les maladies professionnelles, par exemple, relèvent-elles du champ du travail ? Si j’ai été amianté, ça n’entrerait pas dans le champ du code du travail ? Évitons les définitions trop restrictives !

Avec cet amendement, élaboré en concertation avec les organisations syndicales que nous avons rencontrées, nous proposons d’élargir à la protection sociale la concertation prévue par l’article 1er. Ce dernier précise en effet les sujets qui peuvent donner lieu à une négociation au niveau national. Il faudrait être soit moins précis dans la rédaction de cet article, soit au contraire exhaustif, de façon à répondre à toutes les attentes : voilà la vraie difficulté. Parmi tous les thèmes sur lesquels une négociation sociale doit avoir lieu, celui de la protection sociale, au sens le plus large du terme, est essentiel.

Les partenaires sociaux sont parfaitement habilités à négocier sur des sujets attachés au statut des salariés. De ce point de vue, nous considérons que les droits à l’assurance chômage, à l’assurance maladie, à la retraite, à la prévention des maladies professionnelles et des accidents du travail, ainsi qu’à la réparation de ces derniers, sont autant de sujets qui relèvent du statut du salarié.

En effet, on ne peut pas – mais, là encore, cela exige une révolution des mentalités – considérer aujourd’hui le salarié uniquement comme celui qui va au travail et fait marcher la machine, point à la ligne. Le salarié, c’est aussi un citoyen, et il le reste encore dans l’usine.

En raison des cotisations sociales qu’il paie et du salaire différé que ces droits représentent – je rappelle, en effet, que la protection sociale est financée par du salaire différé, c’est-à-dire par le travail des salariés –,…

M. Paul-Henri Cugnenc. Vous connaissez beaucoup de choses qui ne sont pas financées par le travail ?

M. Maxime Gremetz. …il apparaît légitime que les projets de réforme en la matière obéissent au principe d’information, de consultation, de concertation et de négociation préalables.

Les réformes de l’assurance maladie et des retraites ont donné lieu à discussions et à négociations. Pourquoi ne serait-il pas possible dès lors d’inscrire dans la loi, pour le sacraliser, ce principe de concertation préalable ? La sécurité sociale et l’assurance chômage appartiennent aux salariés. Sans leurs cotisations, le système de protection sociale n’existe pas.

M. Paul-Henri Cugnenc. Elles appartiennent à tous les Français, pas à un clan !

M. Maxime Gremetz. Puisque les salariés sont représentés dans différentes caisses, il est logique que la protection sociale soit soumise à la procédure proposée par cet article, et qu’on n’abandonne pas sa gestion à quelques spécialistes – même pas élus dans le cas de la sécurité sociale, puisque il n’y a plus d’administrateur élu depuis 1983. La protection sociale doit être appréhendée globalement, comme un problème concernant l’ensemble de l’entreprise, et non dans cette optique centralisatrice et bureaucratique. C’est la raison pour laquelle nous proposons qu’elle soit intégrée au champ des réformes faisant l’objet d’une concertation préalable.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Bernard Perrut, rapporteur. Je conviens que, sur un plan formel, cet amendement et le précédent ne sont pas identiques, encore que nous eussions pu engager le débat, si nous en avions eu le temps, sur la distinction entre protection sociale et garanties sociales, car les deux termes sont proches, y compris d’un point de vue juridique.

Toujours est-il que ces deux amendements, qu’ils parlent de protection ou de garanties sociales, ont le même but : modifier le champ des réformes soumises à concertation. Par conséquent, je vous ferai la même réponse que précédemment : la commission a rejeté cet amendement.

M. Maxime Gremetz. Il arrive qu’on change d’avis !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement ?

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Mon avis est identique à celui du rapporteur. Cela étant, je tiens à apporter deux précisions.

La première concerne la santé au travail. La prévention relève des compétences du ministère du travail, et le plan santé au travail comme son suivi participent du dialogue social. La réparation, en revanche, relève du code de la sécurité sociale.

Concernant les accidents du travail et les maladies professionnelles, une négociation interprofessionnelle est en cours, ce qui montre bien que la prévention, champ d’action prioritaire à nos yeux, est concernée par ce texte.

Je voudrais, en second lieu, évoquer la question des prud’hommes. Après le rapport du procureur général Desclaux, se sont tenus deux conseils supérieurs de la prud’homie ; le dernier a eu lieu fin octobre et a permis de trouver un compromis sur le temps de rédaction et le taux de vacation. Le projet de loi ne remet d’ailleurs pas en cause les concertations dans les instances existantes. Il était important de le préciser, pour éclairer du mieux possible la représentation nationale, même si cela m’a obligé à revenir en arrière dans les débats.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Vidalies.

M. Alain Vidalies. Merci, monsieur le ministre, de m’avoir répondu sur cette question. L’ensemble des organisation syndicales et des conseillers prud’homaux salariés sont, en effet, extrêmement inquiets moins du texte de loi, qui, en lui-même, n’a pas de conséquence, que du décret auquel il renvoie.

Il est à peu près certain que, si le Gouvernement n’apaise pas cette inquiétude, ce n’est pas au-devant de difficultés que nous allons – elles existent déjà – mais au-devant d’un conflit, qui n’a jusqu’alors été évité que parce que faire la grève de l’audience pour des conseillers prud’homaux salariés a des conséquences terribles : en effet, ce sont les salariés les premiers pénalisés.

C’est un risque réel dans les semaines qui viennent si vous n’êtes pas en mesure d’apporter des solutions. C’est de votre responsabilité, puisque l’Assemblée a voté un texte qui renvoie à un décret. Dans ces conditions, ce n’est pas l’article de loi qui sera incriminé.

Nous sommes, comme la plupart de nos collègues, saisis directement par tous les conseils de prud’hommes. Le mouvement s’étend, et il importe que vous répondiez par des éléments positifs aux inquiétudes que suscitent le décret. Une trop forte mobilisation aurait des conséquences néfastes pour le fonctionnement des juridictions. Or, quand il s’agit des juridictions prud’homales, on sait qui est lésé.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué à l’emploi.

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Si ce dossier relève du garde de sceaux, celui-ci le traite en liaison avec le ministère du travail. J’étais présent lors de la remise de son rapport par le procureur général Desclaux, ce qui témoigne de l’intérêt que je porte à un sujet directement lié au dialogue professionnel.

Je vous rappelle qu’en matière d’indemnisation des conseillers prud’homaux, rien n’avait été fait jusqu’alors et que tout reposait sur des circulaires considérées comme illégales. Ce gouvernement remet les choses en ordre. J’ai bien entendu ce que vous me dites sur le décret, et j’ai moi-même l’occasion de rencontrer des conseillers, salariés et patronaux, puisque, comme j’aime à le répéter, le ministère du travail est à la fois le ministère des salariés et celui des entreprises, ce qui en fait un lieu de dialogue et de rencontre entre les uns et les autres.

Nous ne pouvions cependant pas continuer sous le régime de circulaires illégales, qui pouvaient notamment déboucher sur des procédures en récupération d’indemnités illégalement données. Mon sens de l’apaisement m’amène dès lors à penser que des solutions existent, si nous avons le courage de prendre un certain nombre de décisions.

Mme la présidente. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Il y a en effet un projet de loi, mais l’inquiétude provient de ce qu’on ignore le contenu du décret, ce qui pèse sur la motivation des conseillers. Attention, donc, à éviter le pire ! Cela est possible si l’on apporte toutes les précisions nécessaires, sans remettre en cause le statut des conseillers prud’homaux.

La seconde chose sur laquelle je veux attirer votre attention, c’est la rémunération dérisoire, honteuse, des conseillers qui doivent quitter leur travail pour aller défendre d’autres salariés. Il faut faire droit à leurs revendications en la matière si l’on veut que les prud’hommes jouent véritablement leur rôle. C’est une originalité française, qui n’existe nulle part ailleurs et qu’il faut préserver. Pour cela, il faut redéfinir ce que l’on attend des conseillers et leur donner les moyens de jouer leur rôle. Sans cela, la crise est inévitable.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Soisson.

M. Jean-Pierre Soisson. L’opposition joue son rôle en utilisant ce texte pour traiter un certain nombre de dossiers connexes touchant au code du travail ou à divers problèmes sociaux. C’est l’occasion pour eux de parler et de s’expliquer. Notre rôle à nous, c’est de nous en tenir au texte, tel qu’il a été approuvé par la commission, sans nous laisser entraîner à certains débordements. (Protestations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.)

Mme Martine Billard. Vous ne voterez donc plus jamais aucun cavalier ?

M. Maxime Gremetz. « Cause toujours… », nous dit M. Soisson !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 17.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisi d’un amendement n° 2, qui devrait, je pense, faire l’unanimité… (Sourires.)

Monsieur le rapporteur, vous avez la parole pour le soutenir.

M. Bernard Perrut, rapporteur. Il fait certes l’unanimité, madame la présidente, ce qui n’empêche pas d’expliquer pourquoi. Ce texte de loi sur la modernisation du dialogue social est important, et j’ai souhaité que la commission puisse garantir et renforcer l’effectivité de ce dialogue. Les parlementaires, dont c’est le rôle, ont montré qu’en l’amendant il était possible d’améliorer ce projet.

Notre amendement vise donc à mieux encadrer le recours à la procédure de concertation. Selon les termes du projet de loi, ce recours ne devait concerner que les matières « susceptibles de donner lieu à une négociation nationale et interprofessionnelle ». Or cette formulation ouvrait sur des interprétations subjectives de la loi en laissant penser qu’il pouvait exister une marge d’appréciation dans le choix des projets de réforme soumis à concertation, ce qui ne correspond pas à l’esprit du projet. Cette précision avait en réalité pour but d’exclure du champ des négociations préalables les thèmes purement sectoriels qui n’ont pas vocation à faire l’objet de telles négociations.

Afin de lever toute ambiguïté, la commission, à l’unanimité des présents, a adopté cet amendement, qui propose une formulation claire et plus objective, en se référant aux matières « qui relèvent de la négociation nationale et interprofessionnelle ».

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Cette précision est importante, et elle n’est pas purement formelle. La procédure de concertation vise les réformes générales – seules concernées par les négociations interprofessionnelles – et non les réformes sectorielles. Nous sommes favorables à cet amendement présenté par la commission, car il va dans le sens d’une plus grande précision et est conforme à l’esprit de notre texte.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Soisson.

M. Jean-Pierre Soisson. « Être susceptible de » n’est pas un terme juridique, et il est par ailleurs impropre de le faire suivre d’un infinitif. « Être susceptible » impose un participe passé. « Relever de » est beaucoup plus clair.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 2.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisi d’un amendement n° 38.

La parole est à M. Yves Censi, pour le soutenir.

M. Yves Censi. Cet amendement est plus qu’un amendement de précision, comme je le laissais entendre dans l’exposé des motifs. En effet, la notion de négociation et d’ « organisations nationales et interprofessionnelles » peut prêter à confusion, dans la mesure où la négociation nationale strictement « interprofessionnelle » concerne uniquement les branches couvertes par le MEDEF, la CGPME et l’UPA.

Or, même s’il est très attendu et novateur, ce texte ne permet pas de couvrir totalement le champ du débat, puisque les professions agricoles et les professions libérales ne sont pas concernées par l’« interprofession ».

Vous avez certes indiqué que la commission nationale de la négociation collective intégrerait les organisations syndicales agricoles et celles des professions libérales. Mais ne donnons pas l’impression qu’il existerait en quelque sorte de grands syndicats, susceptibles de négocier pour les autres, et des syndicats mineurs, notamment ceux de l’agriculture et des professions libérales, qui n’interviendraient qu’en second et n’auraient plus alors qu’à s’adapter aux positions des premiers. La spécificité de ces deux secteurs ne signifie pas qu’ils doivent être traités à part dans la négociation collective nationale. Il importe donc d’ouvrir le champ de la concertation aux syndicats intersectoriels, tant dans le secteur de l’agriculture que dans celui des professions libérales, ce qui ne signifie pas pour autant que toutes les professions seront consultées – je pense, par exemple, aux vignerons.

Un pas en avant a été fait en intégrant les organisations agricoles et celles des professions libérales à la commission nationale de la négociation collective, mais ce dispositif ne correspond pas tout à fait à la structure des organisations syndicales dans notre pays. D’où l’amendement visant à introduire après les mots « négociation nationale et interprofessionnelle » les mots « ou au niveau intersectoriel des professions agricoles et libérales ». Il serait en effet dommage que, à défaut d’organisations représentées au niveau pertinent, apparaissent une fois de plus des coordinations et des collectifs.

Tel est l’objet de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Bernard Perrut, rapporteur. Cet amendement n’est pas de simple précision, mais de fond. Nous savons combien M. Censi, de par ses responsabilités et son attachement au milieu rural, est attentif à l’organisation et à la représentation du monde agricole. Vous-même, monsieur le ministre, êtes venu il y a quelques jours inaugurer la maison de l’emploi à Villefranche, en Beaujolais, où vous avez pu évoquer ce sujet avec les organisations professionnelles.

J’ai le regret de vous dire, monsieur Censi, que votre amendement n’est pas conforme à l’esprit du texte proposé. Le champ de négociation auquel ouvre la phase de concertation prévue à l’article L. 101-1 du code du travail a été très clairement défini depuis le début de la préparation du projet de loi, dans le cadre des négociations menées par M. le ministre. L’enjeu est de permettre aux organisations syndicales de salariés et d’employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel, et à elles seules, de négocier sur tous les projets de réforme du droit du travail. Mais, comme l’a précisé le ministre devant la commission, ce texte est suffisamment souple pour pouvoir s’appliquer aussi le jour où les règles de représentativité, et donc la définition des organisations représentatives, auront été modifiées.

Ce projet, faut-il le rappeler, n’est qu’une étape, fût-elle décisive. Pour l’instant, les organisations d’employeurs représentatives sont au nombre de trois. L’argument selon lequel d’autres organisations participent aux réunions de la commission nationale de la négociation collective ne peut être retenu en l’état. Il montre, au contraire, que lesdites organisations, même aujourd’hui non représentatives au sens du code du travail, pourront être impliquées dans certaines des phases de mise en œuvre du dialogue social. Siégeant à la commission nationale de la négociation collective, qui sera consultée sur les avant-projets de texte de loi, elles seront de fait impliquées dans les nouvelles procédures. M. le ministre pourra sans doute vous apporter des éléments d’information complémentaires qui, je l’espère, vous rassureront.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Répondant sur l’amendement précédent, j’ai parlé du niveau interprofessionnel. Vous évoquez, monsieur Censi, le niveau intersectoriel.

Hier, nous avons débattu de l’étape que constitue ce texte sur le dialogue social et de l’équilibre que nous nous sommes efforcés de trouver – qui n’allait pas de soi. La commission nationale de la négociation collective examine les projets de réforme envisagés par le Gouvernement, lesquels font l’objet d’une concertation préalable avec les partenaires sociaux. Ceux-ci peuvent aussi évoquer les sujets sur lesquels ils souhaiteraient que s’ouvre une négociation. Il y a donc la CNNC et les organisations syndicales agricoles et des professions libérales.

J’y insiste, votre amendement, monsieur Censi, n’est pas technique : il remettrait en question l’équilibre que nous nous sommes efforcés de trouver. Nous allons, Jean-Louis Borloo et moi-même – comme nous l’avons fait lors de la préparation de ce projet –, rencontrer les représentants des organisations agricoles comme ceux des professions libérales. Le sujet est en vérité le caractère intersectoriel, que vous avez souligné, et donc la place de ces deux organisations dans la concertation mise en place dans le projet de loi. Elles sont présentes dans le cadre de la commission nationale de la négociation collective. Aujourd’hui, la négociation nationale et interprofessionnelle est portée par trois organisations patronales – MEDEF, UPA, CGPME – et cinq organisations de salariés.

À la suite du rapport du Conseil économique et social, le Premier ministre nous a demandé d’entamer une négociation sur la représentativité, à laquelle seront naturellement associés aussi bien les représentants des organisations agricoles que ceux des professions libérales. D’ailleurs, siégeant à la CNNC, ceux-ci seront présents lors de la prochaine conférence emplois-revenus.

Je comprends vos préoccupations, monsieur Censi, car cette question ne relève pas seulement du ministère de l’agriculture. Je ne sous-estime en rien le poids de la filière agricole et agro-alimentaire, qui représente 12 % des emplois dans notre pays. Nous sommes d’ailleurs, à cet égard, le premier exportateur mondial. Mais, sincèrement, au nom même de l’équilibre auquel nous sommes parvenus hier, au terme d’un long débat, je vous invite à retirer votre amendement, sachant que nous aurons l’occasion de faire le point très prochainement avec ces organisations.

Mme la présidente. La parole est à M. Yves Censi.

M. Yves Censi. Je suis sensible à la qualité de votre écoute, monsieur le ministre, mais je n’ai pas trouvé dans vos arguments d’éléments qui pourraient me conduire à retirer cet amendement.

Il s’agit bien d’un amendement de fond. S’agissant de la représentativité et notamment des modes d’élection, je ne pense pas que nous puissions revenir sur une vision structurante, et c’est notre rôle de parlementaires d’agir, par le biais de la loi, sur cette structuration du dialogue social.

Vous évoquez l’équilibre auquel vous êtes parvenu lors de discussions avec les partenaires sociaux, mais j’estime pour ma part que l’équilibre auquel nous devons tendre doit représenter l’ensemble des organisations qui participeront aux négociations. Il ne s’agit pas d’élaborer un système idéal, mais de se conformer à la réalité. En parlant de « négociation nationale et interprofessionnelle », vous excluez bel et bien les secteurs agricole et des professions libérales.

Je ne retire donc pas mon amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué à l’emploi.

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Au nom du Gouvernement, au nom du président de la CNNC, je vous présente un texte qui est le fruit d’une longue concertation et d’un savant équilibre. Cela m’a d’ailleurs conduit à refuser nombre d’amendements proposés par la majorité. Je comprends vos préoccupations, monsieur Censi, mais le Premier ministre m’a invité hier, à la suite du rapport du Conseil économique et social, à ouvrir une réflexion sur la représentativité avec l’ensemble des partenaires sociaux – et pas seulement avec les syndicats de salariés. Si vous mainteniez cet amendement, je ne pourrais, au nom même de l’équilibre auquel nous sommes parvenus, y être favorable, car il changerait radicalement la donne.

Mme la présidente. Maintenez-vous l’amendement, monsieur Censi ?

M. Yves Censi. Oui.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Raison.

M. Michel Raison. J’ai demandé la parole, non seulement pour soutenir l’amendement de M. Censi, mais aussi pour rassurer M. le ministre quant aux déséquilibres que pourrait provoquer l’adoption de cet amendement. Au contraire, le fait de faire asseoir autour de la table de la CNNC les représentants de toutes les organisations d’employeurs…

M. Alain Vidalies. Il n’y a pas que les employeurs !

M. Michel Raison. …garantit l’équilibre et la sécurité dans la façon dont seront discutés les dossiers. La CNNC devra examiner des projets de loi, ainsi que des dossiers relevant du domaine réglementaire, et nous ne pourrons même plus en débattre ici.

Je prends l’exemple du syndicat d’employeurs agricoles, qui regroupe 150 000 employeurs, un million de CDD, quelque 150 000 CDI. Je laisse de côté le secteur agro-alimentaire, qui est en partie représenté à la CGPME et au MEDEF. Il serait vraiment dommage de se priver des compétences spécifiques d’un syndicat d’employeurs agricoles sur des sujets aussi importants que l’emploi ou la formation professionnelle, d’autant qu’il a déjà l’habitude de travailler avec le MEDEF pour la formation des conseillers prud’homaux par exemple. L’équilibre est garanti, ainsi que la pérennité des décisions qu’ils auront prises.

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Je soutiens l’amendement de notre collègue Yves Censi. Il s’agit d’un débat majeur, et ce pour trois raisons.

D’abord, il n’y a pas qu’une seule organisation patronale dans notre pays. Or certains employeurs du monde agricole ne se reconnaissent nullement dans les organisations patronales traditionnelles, telles que le MEDEF.

M. Maxime Gremetz. Alors, organisez des élections pour mesurer la représentativité des organisations patronales !

M. Marc Le Fur. Le MEDEF ne peut les représenter, comme d’ailleurs il ne peut représenter les professions libérales.

De plus, dans notre tradition sociale, le monde agricole bénéficie depuis plus d’un siècle d’une certaine autonomie dans le monde social : il a sa propre protection sociale, gérée par la MSA, un système particulier d’inspection du travail, etc. À certains égards, le monde libéral est dans la même situation. Nous devons tenir compte de cette spécificité.

Enfin, monsieur le ministre, votre réponse m’inquiète un peu. Vous affirmez être parvenu à un équilibre qu’il ne faut pas remettre en cause. Mais, une fois le projet adopté, c’est un argument que l’on risque de nous opposer systématiquement. Et le pouvoir d’amendement du Parlement en sera réduit d’autant !

M. Gérard Charasse. C’est bien la première fois que vous le défendez !

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Vidalies.

M. Alain Vidalies. Le moment est grave. Si cet amendement était adopté dans cette rédaction, le groupe socialiste, qui avait décidé de s’abstenir sur le projet de loi, serait amené à modifier sa position.

Le problème est que vous avancez un argument qui ne correspond pas au texte. Vous affirmez que l’amendement concerne la représentation de certaines associations d’employeurs, dans l’agriculture ou les professions libérales,…

M. Yves Censi. Pas seulement des employeurs ! Il n’y a pas que des patrons dans l’agriculture !

M. Alain Vidalies. …qui siègent d’ailleurs à la Commission nationale de la négociation collective. Mais en réalité, votre amendement remet fondamentalement en cause le droit de la négociation collective et de la représentation des salariés et va ainsi à l’encontre de toute notre histoire sociale. Le texte évoque la notion, nouvelle dans notre droit du travail, de négociation intersectorielle. On peut débattre de ses conséquences sur la représentation des employeurs : la question se pose depuis des années. Mais l’amendement s’applique aussi aux salariés.

En déterminant quelles sont les organisations représentatives au niveau national, le décret de 1966 conditionne la façon dont se déroule la négociation collective. Or, en mettant en concurrence niveau intersectoriel et niveau interprofessionnel, votre amendement provoquerait une véritable révolution.

M. Yves Censi. Il vise les professions agricoles et libérales !

M. Alain Vidalies. Aujourd’hui, oui, mais demain ? D’ailleurs, votre amendement modifie le droit qui s’applique à tous. L’article L. 131-2 du code du travail, qui définit le champ de la négociation collective depuis des décennies, cite les « professions industrielles et commerciales », « les professions agricoles qui utilisent les services des salariés définis par l'article L. 722-20 du code rural », les « professions libérales », etc.

Alors que le Gouvernement renvoie à plus tard ce qui concerne la représentativité des organisations de salariés, vous n’hésitez pas à créer une nouvelle catégorie de convention collective et à exclure une partie des salariés du champ de la négociation nationale. L’événement est donc d’une gravité exceptionnelle.

La disposition que vous proposez n’a été négociée avec personne. Elle remet en cause tout ce qui a été dit depuis le début de cette discussion. Une telle régression pourrait conduire certaines organisations syndicales, qui soutiennent le projet du Gouvernement au point de vouloir qu’aucun des groupes de l’Assemblée ne s’y oppose, à changer d’avis.

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. L’amendement est en effet loin d’être anodin. Certes, nous entendons, depuis quelques années, des voix s’élever depuis le secteur des professions libérales pour réclamer une législation spécifique. C’était moins vrai pour les professions agricoles, mais si l’amendement est adopté, la même demande sera exprimée pour l’artisanat, et ainsi de suite, jusqu’à créer un droit morcelé, secteur par secteur. Certains, dans vos rangs, le souhaitent.

M. Marc Le Fur. Il existe déjà des inspecteurs du travail différents ! Des protections sociales différentes !

Mme Martine Billard. À terme, le droit collectif laisserait la place au contrat individuel : on passerait du droit du travail au droit civil. Par l’idéologie qui le sous-tend, et que certains d’entre vous défendent depuis plus de quatre ans, cet amendement ouvrirait, en cas d’adoption définitive, une brèche dans l’unité de notre législation du travail.

D’autre part, on peut se demander comment mesurer la représentativité dans un secteur. Le problème n’est pas mince. Hier, on a nous a expliqué que l’équilibre auquel on était parvenu interdisait de remettre en cause l’arrêté de 1966. L’amendement est pourtant l’occasion de revenir sur le sujet par la fenêtre, puisqu’il remet en question la représentativité des organisations patronales.

Il est vrai que trois organisations syndicales de salariés bien implantées dans les entreprises, l’UNSA, la FSU et le G10-Solidaires, ne sont aujourd’hui pas reconnues par l’arrêté de 1966. De même, certaines organisations patronales, notamment dans le secteur encore méconnu de l’économie sociale et solidaire, ne sont jamais parties prenantes à la négociation. Il faut donc avancer sur ce sujet.

M. Yves Censi. Vous vous contredisez !

Mme Martine Billard. Il faut, certes, améliorer la représentativité, mais celle des salariés autant que celle des employeurs, faute de quoi l’équilibre de l’ensemble du système serait compromis. Ou alors, il ne faut toucher à rien. C’est pourquoi, si l’amendement est adopté, je voterai, au nom des députés Verts, contre le projet de loi.

Mme la présidente. La parole est à M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Le problème, on le voit bien, ne concerne pas seulement les organisations de salariés, mais aussi les organisations patronales. Nous avons donc eu raison, hier, de repousser les tentatives de la gauche de légiférer hâtivement sur la représentativité. Mieux vaut travailler sur le long terme, et après un minimum de réflexion.

Je comprends bien que M. Censi veuille introduire dans le champ de la négociation collective les organisations qui s’en sentent écartées. Il faut effectivement travailler sur la représentativité. Mais une consultation nationale ne suffirait pas à la mesurer ou, du moins, il ne faudrait pas se contenter de ce seul critère, car cela conduirait à écarter toutes les organisations agricoles. Que pèsent en effet des entreprises agricoles de moins en moins nombreuses face aux 4 millions d’entreprises que compte notre pays ?

M. Maxime Gremetz. Vous seriez donc favorable à la dictature du prolétariat agricole ?

M. Francis Vercamer. On ne peut donc utiliser la même méthode pour mesurer la représentativité dans tous les secteurs.

En revanche, M. Vidalies et Mme Billard ont tout à fait raison de penser que l’adoption de l’amendement entraînerait un bouleversement du code du travail. Il me paraît donc plus sage d’attendre l’aboutissement du travail engagé par le Gouvernement sur la question de la représentativité. S’il est vrai que le plus grand nombre d’organisations professionnelles doivent avoir leur mot à dire dans la négociation, il n’en reste pas moins que cette disposition conduirait à déséquilibrer le texte. Les inconvénients l’emporteraient sur les avantages. À la réflexion, je ne peux donc voter cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Yves Censi.

M. Yves Censi. Je suis un peu étonné de la tournure que prend le débat. C’est un amendement de fond, et vous ne pouvez donc pas m’accuser, madame Billard, de vouloir passer « par la fenêtre » sur le sujet de la représentativité. Que faites-vous du droit d’amendement ? Nous sommes dans notre rôle en suggérant des modifications au projet de loi.

M. Maxime Gremetz. C’est un amendement corporatiste !

M. Yves Censi. De même, on ne saurait refuser au législateur le droit d’amendement au prétexte que le sujet est trop sérieux et au nom d’un équilibre qui aurait été difficile à obtenir. Par principe, un tel argument est inacceptable.

Ensuite, et le même problème s’est posé en ce qui concerne la protection sociale, il semble qu’on ne soit pas capable de faire place à la diversité. Mais ce n’est pas parce que la réalité déborde du cadre que veut lui assigner le dogme que ce n’est pas elle qui doive l’emporter. Il est naturel que chacun cherche à défendre ce qui lui tient à cœur, mais on ne peut pas me refuser la représentation du monde agricole sous prétexte que celui de l’économie solidaire n’est pas représenté non plus, madame Billard. Vous n’aviez qu’à proposer qu’il le soit !

Je maintiens mon amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. M. Censi n’a sans doute pas participé au débat depuis le début. S’il avait suivi les discussions de fond que nous avons eues, il aurait compris la direction dans laquelle nous voulons aller, et il se rendrait compte que son amendement a un esprit corporatiste.

La question n’est pas de savoir si l’on écarte le monde agricole. Avec cet amendement, c’est une petite bombe que notre collègue veut introduire dans le projet de loi.

Mme Martine Billard. Tel qu’il est rédigé, en effet !

M. Michel Raison. Arrêtez de nous faire peur !

M. Maxime Gremetz. Qu’on le vote, et je m’en vais, car je n’ai pas de temps à perdre !

M. Michel Raison. Cela nous ferait des vacances !

M. Maxime Gremetz. Tout ce que nous considérons comme une avancée serait en effet remis en cause.

Or, les notions de représentativité et de majorité sont importantes et liées entre elles. Vous dites vouloir une représentation équilibrée, mais en fonction de quoi ? Dans quelle catégorie mettez-vous les salariés agricoles, monsieur Censi ? Dans une catégorie spéciale ? Vous pensez sans doute que ce ne sont pas des salariés comme les autres et qu’ils ne produisent pas de plus-value ? La représentativité des salariés doit être assurée, comme celle des employeurs. Il nous appartient d’organiser cette représentativité. Et vous, vous arrivez avec un petit amendement qui remet en cause tout l’esprit du texte. Ce n’est pas sérieux, compte tenu de l’importance du débat ! Ce n’est pas la société que nous voulons !

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué à l’emploi.

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Ce débat est tout à fait légitime et il a sa place ici. C’est donc bien volontiers que j’y participe.

Je rappelle à M. Raison que les représentants des professions agricoles comme ceux de la Confédération nationale de la mutualité agricole et de la Coopération des crédits agricoles sont présents à la Commission nationale de la négociation collective. Et si, dans cet équilibre, nous avons souhaité que la CNNC soit le haut lieu du rendez-vous annuel, c’est bien pour qu’ils soient présents, avec les professions libérales.

Je prendrai l’exemple de l’accord récent sur l’emploi des seniors. Si la FNSEA, que je rencontre régulièrement et avec qui j’entretiens des rapports positifs et constructifs, n’a pas souhaité s’y associer, c’est qu’elle est une organisation sectorielle, alors que cet accord est interprofessionnel.

Le débat se situe bien là où le rapporteur l’a situé : entre interprofessionnel et sectoriel. Je ne dis pas qu’il ne faille pas faire évoluer la négociation sectorielle, mais ce texte traite du dialogue social interprofessionnel. Je le dis très simplement, et ensuite l’Assemblée fera ce qu’elle voudra : il est très important de distinguer l’interprofessionnel et le sectoriel.

Mme la présidente. Sur le vote de l’amendement no 38, je suis saisie par le groupe socialiste et par le groupe des député-e-s communistes et républicains d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à M. Jean-Pierre Soisson.

M. Jean-Pierre Soisson. Madame la présidente, pouvez-vous, avant le vote, nous accorder une suspension de séance car nous sommes face à un problème grave, qui nous divise ?

Mme la présidente. Elle est de droit (Protestations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains) mais, le scrutin ayant été annoncé, monsieur Soisson, je vous l’accorderai après le vote.

…………………………………………………………

Mme la présidente. Nous allons maintenant procéder au scrutin, précédemment annoncé, sur l’amendement no 38.

(Il est procédé au scrutin.)

Mme la présidente. Voici le résultat du scrutin :

L’Assemblée nationale a adopté.

La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Madame la présidente, compte tenu de ce vote, nous ne participerons plus à la discussion et nous ne voterons pas le texte. Cet amendement change en effet toute la philosophie du projet. Puisque vous cédez aux pressions corporatistes, mes chers collègues, je me retire du débat !

M. Yves Censi. M. Gremetz dérape !

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Vidalies.

M. Alain Vidalies. Comme je l’ai dit, je crains que l’on ne mesure pas la gravité de cette disposition. Nous nous retirons donc également du débat. Les organisations syndicales s’estimeront trahies par cet amendement, qui est l’un des plus mauvais coups portés depuis longtemps au code du travail.

Mardi prochain, lors des explications de vote, nous expliquerons pourquoi nous nous sommes retirés, mais je pense que, d’ici là, cette disposition aura la célébrité qu’elle mérite. Franchement, je le regrette. Nous sommes entrés dans ce débat avec un esprit constructif, mais ce qui vient de se passer est très grave pour la démocratie sociale ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Maxime Gremetz. Nous étions bien partis, mais cet amendement est une bombe !

Mme la présidente. Je vais suspendre la séance.

Suspension et reprise de la séance

Mme la présidente. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures cinquante-cinq, est reprise à dix-huit heures vingt.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

La parole est à M. le ministre délégué à l’emploi.

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Nous venons d’avoir un débat important et très intéressant sur un thème qui n’est pas mineur : la représentation du secteur agricole et des professions libérales. Ce faisant, nous avons pu échanger nos points de vue et éclairer l’Assemblée.

Néanmoins, notre sujet étant la négociation interprofessionnelle, le Gouvernement souhaite une seconde délibération visant à supprimer les mots qui ont été insérés à l’article 1er par l’amendement no 38, à savoir : « ou intersectorielle des professions agricoles et libérales » et « ou au niveau intersectoriel des professions agricoles et libérales ». Pardonnez-moi, madame la présidente, de ne pas avoir encore fait rédiger d’amendement : je n’en ai pas eu le temps, mais il vous sera naturellement communiqué.

Je tenais d’ores et déjà informer la représentation nationale de cette demande du Gouvernement, et je renouvelle tout ce que j’ai dit, notamment en termes de dialogue avec les organisations représentant le secteur agricole comme les professions libérales. Il s’agit de secteurs d’activité extrêmement importants, mais c’est la dimension interprofessionnelle qui prévaut aujourd’hui.

À M. Censi et à ceux qui ont voté l’amendement no 38, je voudrais dire que j’ai le plus grand respect pour le Parlement et les parlementaires, mais que le Gouvernement veut cette seconde délibération. Madame la présidente, je vous remercie de nous avoir accordé du temps grâce à la suspension de séance.

Mme la présidente. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Je continue à penser que cet amendement est explosif. Je vous remercie donc de votre démarche, monsieur le ministre, mais nous demandons que nous soit communiqué le texte écrit pour pouvoir nous décider.

Mme la présidente. C’est normal, monsieur Gremetz. Dès qu’il nous sera communiqué par le ministre, l’amendement sera distribué à l’ensemble des députés présents.

La parole est à M. Yves Censi.

M. Yves Censi. D’abord, dans ce débat de fond, je maintiens ma position sur la défense d’une vision qui ne correspond absolument pas à celle décrite par nos collègues socialistes et communistes – je crois que personne ne s’en étonnera ni ne s’en offusquera.

Il ne sert à rien, comme vous l’avez fait, chers collègues, de faire preuve de ce que je pense être une certaine forme de sectarisme, tout au moins pour une partie de ce que j’ai entendu tout à l’heure : sectarisme vis-à-vis de populations qui se sont organisées au sein du monde agricole, mais pas du tout de façon corporatiste. À aucun moment, je n’ai évoqué quelque syndicat que ce soit, de telle ou telle obédience, au sein du monde agricole. C’est pourquoi j’avais aussi fait référence à la capacité d’organisation de ces populations dans le champ syndical, mais aussi dans celui de la protection sociale, par exemple. On connaît non seulement les spécificités et la capacité de ces populations à s’exprimer dans le cadre d’un dialogue social et d’une démocratie sociale absolument unique, mais également leur volonté d’être totalement intégrées à la politique nationale et d’être parties prenantes d’une vision de la France et d’une cohésion nationale renforcée. Tout cela n’est absolument pas contradictoire.

Ensuite…

Mme la présidente. Monsieur Censi, nous n’allons pas recommencer le débat sur un amendement qui a été voté !

M. Yves Censi. Je pense que c’est un sujet très important.

Ensuite, disais-je, je regrette l’attitude de nos collègues socialistes et communistes, qui refusent le débat dès lors qu’un amendement qui ne correspond pas à leur opinion a été voté.

Enfin, je prends acte de la volonté du ministre.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Vidalies.

M. Alain Vidalies. Sur le plan idéologique, nous voyons probablement émerger un nouveau groupe : « Libéralisme et ruralité » pourrait être son nom ! Franchement, monsieur Censi, vous venez ici, dans ce débat, faire voter un amendement qui remet en cause cinquante ans d’histoire sociale, et vous nous traitez de sectaires ? Notre travail, à nous, opposition, est de vous dire : prenez vos responsabilités !

M. Yves Censi. Vous remettez en cause le droit d’amendement ?

M. Alain Vidalies. Le Gouvernement, que nous ne soutenons pas, a engagé des négociations avec toutes les organisations syndicales. Certaines sont d’accord avec le texte, d’autres pas. Vous venez ici…

M. Yves Censi. Je viens ici parce que je suis un élu, cher collègue, comme vous !

M. Alain Vidalies. …pour faire un coup en catimini, avec les amis que vous avez rassemblés. Vous aller entrer dans l’Histoire comme le démolisseur du code du travail ! Si c’est votre objectif, assumez-le ! Pour notre part, notre responsabilité est d’attirer l’attention sur ce qui est en train de se passer, pas simplement parce qu’il n’y a pas beaucoup de députés présents…

M. Yves Censi. Vous contestez le droit d’amendement ?

M. Alain Vidalies. Non, mais assumez ce que vous êtes en train de faire et ne nous traitez pas de sectaires ! Si vous voulez faire revenir la France au temps de l’atomisation du droit du travail, avec la ruralité qui devenait la référence, assumez ce que vous êtes !

M. Yves Censi. J’assume ! La preuve, mon amendement a été voté !

M. Alain Vidalies. Contrairement à vous, cette France-là, nous n’en voulons pas ! Elle n’est pas la France du XXIe siècle, mais celle du XIXe siècle sur le plan social.

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement no 18.

La parole est à M. Maxime Gremetz, pour le soutenir.

M. Maxime Gremetz. Nous avons beaucoup débattu de cet amendement en commission, et le président Dubernard avait souligné la nécessité de réfléchir à la question qu’il soulève.

Le fait est que, souvent, des décisions sont prises sans que l’on en anticipe les conséquences. On s’aperçoit alors plus tard que, si l’on avait essayé d’en anticiper les retombées, positives ou négatives, on aurait sans doute pu optimiser ces décisions.

M. Dubernard a été très intéressé et a admis que ce principe pourrait éviter des erreurs parfois dommageables. Par contre, il a été gêné par la notion d’étude d’impact. Je propose donc une évaluation, la meilleure possible, des conséquences des décisions qui sont prises.

Le Gouvernement prévoit de transmettre un diagnostic, les objectifs et les différentes options et modalités envisagées. Je propose simplement de préciser qu’il faut essayer de voir quelles conséquences, immédiates ou collatérales, cela peut avoir. Une décision peut en effet avoir des effets imprévus qu’on est ensuite obligé de corriger avec des lois rectificatives, des amendements, voire des cavaliers législatifs.

Cette idée était soutenue par M. Dubernard, même s’il n’était pas entièrement satisfait de la formulation.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Bernard Perrut, rapporteur. La commission s’est en effet penchée sur le sujet. Il est bien légitime que les partenaires soient éclairés sur les orientations du Gouvernement. Le débat a eu lieu et, au fil des mois, de longues discussions ont abouti à un accord sur la présente rédaction : « le Gouvernement leur communique un document d’orientation présentant des éléments de diagnostic, les objectifs poursuivis et les principales options ».

La référence aux modalités de mise en œuvre du projet de réforme, qui, vous le savez, avait été un temps envisagée, a finalement été abandonnée, car jugée trop restrictive. En effet, le document d’orientation doit permettre aux partenaires de disposer d’éléments assez précis sur l’initiative gouvernementale − ce que prévoit le texte −, mais, dans le même temps, cette initiative étant, par définition, ouverte à la concertation, elle ne peut pas être trop formalisée : les partenaires sociaux doivent rester libres dans la négociation éventuelle d’un accord. Or, pour avoir un sens, la présentation d’une étude d’impact nécessite une bonne connaissance des modalités de mise en œuvre des réformes. À ce stade, elle n’est donc pas possible.

En revanche, il est indispensable d’en revenir à la pratique des études d’impact au moment du dépôt des projets de loi. Les parlementaires doivent être très vigilants sur ce point : lorsqu’un texte de loi vient en discussion, le Gouvernement doit nous fournir cette étude pour que la démocratie représentative puisse pleinement jouer son rôle en se fondant sur une analyse claire des implications du texte qu’on lui soumet.

Cependant, je crois que M. le ministre peut nous rassurer, car, par leur importance, les « éléments de diagnostic, les objectifs poursuivis et les principales options » permettent d’entrevoir l’orientation qui sera donnée et dont les partenaires sociaux auront à se saisir.

Je ne doute pas, monsieur le ministre, que vous vous ne contenterez pas de noter quelques mots sur une feuille blanche, mais que les éléments de diagnostic seront clairement exposés, de même que les objectifs et, surtout, les principales options, puisque ce sont elles que M. Gremetz cherche à connaître à travers son amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Je voudrais dire, tant à l’auteur de l’amendement qu’au rapporteur, que le « document d’orientation présentant des éléments de diagnostic, les objectifs poursuivis et les principales options » englobe toutes les informations utiles.

Je rappellerai brièvement la manière dont nous avons travaillé sur ce texte.

Nous avons envoyé aux partenaires sociaux des fiches d’orientation qui ont servi de base aux discussions lors des réunions bilatérales, puis lors des réunions de la Commission nationale de la négociation collective, et qui nous ont permis de bâtir un avant-projet. La référence à une étude d’impact supposerait que le projet soit au préalable très clairement défini, alors que nous voulons laisser au dialogue social le soin de préciser les choses. À la limite, par sa trop grande précision, une étude d’impact nuirait à la richesse du dialogue social.

Monsieur Gremetz, je comprends bien le souci que vous exprimez à travers votre amendement : vous ne voudriez pas que ces documents se limitent à quatre lignes jetées sur un papier. Je ne peux pourtant y être favorable pour des raisons liées à la qualité du dialogue social. Aujourd’hui, nous souhaitons privilégier une autre façon de travailler, dont la pratique des fiches d’orientation est un exemple. Le Gouvernement, porteur d’un projet de réforme des relations du travail, adresse aux partenaires sociaux un document d’orientation, et ceux-ci font savoir s’ils souhaitent ou non négocier, et de quels délais ils souhaitent disposer.

Mme la présidente. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. C’est l’expression « étude d’impact » qui posait problème à M. Dubernard. C’est toujours pareil : avant de prendre une décision, il faut se familiariser avec le dossier, avec les réalités, réfléchir à ce que l’on veut faire et anticiper, ne serait-ce qu’un peu, imaginer l’effet que cela peut produire. L’étude d’impact ne répond pas à ce souci, car on ne peut mesurer des impacts qui n’ont pas encore eu lieu. J’en ai parlé avec les organisations syndicales que nous avons reçues et qui se sont déclarées favorables à ce qu’il serait peut-être préférable d’appeler « une première évaluation sur leurs impacts ». Les députés savent combien de fois il faut revenir sur telle ou telle loi pour la préciser ou pour annuler une disposition à la lumière de l’expérience, parce que, dans le cadre du dialogue social ou des relations des parlementaires avec les partenaires sociaux, on n’en avait pas bien mesuré les conséquences. Le président Dubernard a considéré que cette réflexion préliminaire serait intéressante parce qu’elle nous permettrait de faire beaucoup moins de bêtises. Mon amendement traduit simplement le langage de M. Dubernard en français plus conventionnel. Je propose donc de sous-amender mon amendement.

Mme la présidente. Monsieur Gremetz, le règlement vous interdit de sous-amender votre propre amendement.

La parole est à M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. M. Gremetz pose une question qui mérite qu’on s’y arrête un instant. Lorsque le Gouvernement présente un document d’orientation aux organisations syndicales, il serait judicieux qu’il leur fasse connaître en même temps les conséquences de ses options, faute de quoi l’avis risque de n’être pas parfaitement éclairé. Tout en étant d’accord sur le fond avec cet amendement, je reconnais que le terme « étude d’impact » est un peu fort et c’est pourquoi je m’abstiendrai.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 18.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 9.

La parole est à M. Francis Vercamer, pour le soutenir.

M. Francis Vercamer. Cet amendement fixe aux organisations représentatives un délai de deux mois pour faire connaître leur intention d’engager une négociation. Cela permet d’avoir un délai précis pour la réponse.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Bernard Perrut, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement : il convient de conserver la souplesse indispensable au dialogue, à la concertation.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 9.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 24.

La parole est à M. Maxime Gremetz, pour le soutenir.

M. Maxime Gremetz. Les organisations syndicales unanimes ont approuvé cet amendement qui vise à préciser qui prend l’initiative des négociations et à quel moment il peut le faire. Le texte prévoit un délai, mais ne parle pas des conditions d’ouverture de la négociation. Certaines grèves sont déclenchées pour demander l’ouverture de négociations, ce qui est assez extraordinaire.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Bernard Perrut, rapporteur. J’avoue ne pas très bien voir ce qu’apporte cet amendement. La question du « moment choisi » ne se pose pas, puisque, lorsque les organisations sont informées de l’initiative par le Gouvernement, elles font savoir si elles veulent négocier : le délai qui leur est alors imparti comporte nécessairement un début et une durée. Je ne vois pas ce que peut apporter l’ajout des mots « moment choisi ».

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Défavorable. Nous souhaitons de la souplesse, je l’ai dit en commission et le répète devant l’Assemblée.

Mme la présidente. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Toutes les organisations syndicales consultées se sont demandé quand commenceraient les négociations : dans deux mois, dans six mois, dans un an ? Personne ne le sait, et c’est pourquoi on fait parfois grève pour demander l’ouverture de négociations. Qui prend l’initiative de cette ouverture ? Et que faire si l’un des acteurs s’y oppose ? Sans doute, il faut de la souplesse, mais les gens ne veulent pas négocier pour le plaisir de négocier ! C’est que des problèmes se posent et qu’ils veulent les résoudre. Comment engager la négociation ? Quand ? On ne peut laisser cela au bon plaisir d’on ne sait qui.

Je ne suis pas pour tout corseter, je suis partisan de la souplesse, mais lorsqu’une négociation s’ouvre sur un sujet donné, les partenaires doivent définir ensemble sa durée, faire le point au terme du délai et, le cas échéant, continuer. Il faut de la souplesse, peut-être, mais pas trop pour les patrons !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 24.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 49.

La parole est à Mme Martine Billard, pour le défendre.

Mme Martine Billard. Cet amendement porte toujours sur l’alinéa 7 de l’article 1er.

Il convient, certes, de maintenir de la souplesse, mais encore faut-il que celle-ci ne se transforme pas en flou absolu, rendant par là même difficile de mettre en pratique cet alinéa. L’avenir nous dira si des précisions étaient nécessaires, mais, en tout état de cause, notre amendement prévoit qu’un décret en Conseil d’État fixe plus précisément les conditions d’application de cet alinéa. Je n’en ferai cependant pas un casus belli.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Bernard Perrut, rapporteur. Avis défavorable. Cet amendement conduirait à contraindre les partenaires sociaux.

M. Maxime Gremetz. Oh !

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Nous n’avons pas souhaité enserrer la négociation des partenaires sociaux dans un délai trop strict, ainsi que je le soulignais dans la discussion générale. L’avis du Gouvernement est donc défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 49.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 7 et 50.

La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement n° 7.

M. Francis Vercamer. Cet amendement tend à supprimer l’alinéa 8 de l’article 1er, qui fait référence à l’« urgence déclarée ».

Si l’article 34 de la Constitution dispose que « la loi détermine les principes fondamentaux [...] du droit du travail », de tels principes n’ont jamais à être posés dans l’urgence. Il est vrai que les gouvernements successifs ont eu tendance à déclarer l’urgence sur tous les textes relatifs au code du travail. Néanmoins, cela ne me paraît pas sain.

Je propose donc de supprimer la référence à l’« urgence déclarée » afin que, chaque fois qu’un texte modifie l’article L. 101-1 du code du travail, l’obligation de négociation avec les partenaires sociaux demeure.

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard, pour défendre l’amendement n° 50.

Mme Martine Billard. Le débat en commission a abouti à un accord sur la question de l’urgence, ce qui explique que j’aie cosigné l’amendement suivant qui sera proposé par le rapporteur. Si vraiment cette question de l’urgence doit être prise en compte, elle doit en effet être précisée. Le projet de loi soulèverait sinon de nombreux problèmes, ce qui explique d’ailleurs mon amendement.

Le débat a porté sur la question de savoir s’il fallait vraiment préciser cette notion d’urgence dans un texte de loi. Soit il s’agit, en l’occurrence, de la déclaration d’urgence, et cette prérogative constitutionnelle du Gouvernement ne saurait être interdite. Soit il s’agit d’une situation d’urgence, et celle-ci pourrait alors justifier l’absence de concertation préalable à l’examen d’un texte portant sur des matières relevant du code du travail. Une ambiguïté existe entre l’urgence, procédure constitutionnelle, et l’urgence, simple question d’appréciation de la situation.

On pourrait donc se contenter de ne rien mettre dans le texte qui fasse référence à l’urgence, ce qui renverrait simplement, sans autre précision, à la procédure d’urgence prévue par la Constitution. S’il faut vraiment y faire référence, je voterai dans ce cas-là l’amendement de la commission.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur les deux amendements identiques ?

M. Bernard Perrut, rapporteur. Il s’agit là d’un sujet important puisqu’il a suscité un débat entre ceux qui veulent supprimer l’urgence et ceux pour qui il convient de modifier le texte afin de bien préciser la notion d’urgence. La commission s’est ralliée à cette dernière position, qui a réuni une quasi-unanimité.

Il ne faut pas confondre la notion de déclaration d’urgence qui, d’un point de vue juridique, est une prérogative du Gouvernement dès lors qu’un projet de loi est déposé, et la simple notion d’urgence, au sens où le Gouvernement considérerait qu’une situation est urgente, comme cela peut survenir tous les jours dans la vie courante. Certains ont pu ainsi parler de déclaration d’urgence alors que ce n’est pas de cela qu’il s’agit – je crois, madame Billard, que vous l’avez compris. On ne peut en tout cas ignorer cette notion d’urgence, monsieur Vercamer : en tenir compte est une nécessité.

Une telle innovation implique, comme c’est le plus souvent le cas en droit positif, de prévoir une possibilité d’exception de manière à prendre en considération certaines situations d’urgence – elles existent, hélas, dans la vie quotidienne. D’une certaine façon, il en va de la fiabilité du présent texte, de son application réelle. Cet élément doit à mon sens être regardé comme une véritable « soupape », qui garantit l’équilibre général du dispositif et qui constitue un gage de bonne foi pour son applicabilité. Le rapport qui a été rédigé par M. Dominique-Jean Chertier faisait d’ailleurs état de la nécessité de prévoir une telle disposition.

Cette pratique est constante en droit public français. Le principe a été posé par la commissaire du gouvernement dans ses conclusions à l’occasion d’un arrêt du Conseil d’État du 2 décembre 2002 : « Il est de l’essence même du rôle de l’administration d’agir immédiatement, sans délai ni procédure lorsque l’intérêt de la conservation publique l’exige ».

Appliquant ce principe, la plupart des textes de procédure prévoient une dérogation pour des motifs tenant à l’urgence, monsieur Vercamer. Ainsi, l’article 24 de la loi du 12 avril 2000, relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, institue une procédure contradictoire, sauf « cas d’urgence ». De même, la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs organise la procédure applicable « lorsque l’urgence absolue a empêché qu’une décision soit motivée ». L’urgence est donc bien de nature à justifier des mécanismes dérogatoires dans la plupart des procédures administratives, budgétaires, juridictionnelles, parlementaires – je pourrais citer à cet égard nombre d’exemples.

S’agissant plus précisément du présent projet de loi, la constitutionnalité du dispositif lui-même implique que le pouvoir d’initiative des lois, reconnu au Gouvernement par l’article 39 de la Constitution, ne soit pas directement affecté par la procédure mise en place. C’est également dans ce contexte que la référence à l’urgence apporte une souplesse supplémentaire au Gouvernement dans l’exercice de ses prérogatives, celles qui lui sont reconnues par la Constitution, au respect de laquelle nous sommes attachés.

Pour l’ensemble de ces raisons, il a paru nécessaire de prévoir ce cas d’urgence. Pour autant, cela ne signifie pas que ce recours à l’urgence ne soit pas encadré. C’est la raison pour laquelle je proposerai dans un instant un amendement adopté à la quasi-unanimité de la commission afin de mieux encadrer ce cas d’urgence et, surtout, d’en connaître la motivation par écrit de la part du Gouvernement avant l’engagement de toute procédure.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement sur les deux amendements en discussion ?

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. La question de l’urgence est une préoccupation que nous partageons et elle a d’ailleurs fait l’objet d’un échange, si je puis m’exprimer ainsi, avec le Conseil d’État. J’ai eu l’occasion d’évoquer ce sujet hier lors de la discussion générale en indiquant que le Gouvernement donnerait un avis très favorable à l’équilibre trouvé par le rapporteur au nom de la commission. Voilà pourquoi nous ne sommes pas favorables à ces deux amendements.

Pour Jean-Louis Borloo et moi-même, l’urgence « déclarée » – nous avions également pensé à la qualifier d’« avérée » ou encore de « motivée » – n’est pas un moyen de biaiser. Notre idée est que l’urgence doit rester exceptionnelle et coïncider avec les cas évoqués par le rapporteur.

Mme la présidente. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Chacun était prêt à déposer des amendements sur cette question de l’urgence, car c’est là un sujet de grande préoccupation pour les organisations syndicales. On nous parle de concertation, mais le projet ne fait pas moins référence à l’urgence. Aussi, notre idée était qu’il fallait au moins motiver les cas d’urgence.

En tout cas, si la Constitution nous empêche d’interdire le recours à l’urgence, nous devons au moins l’encadrer. Voilà pourquoi j’ai cosigné l’amendement de la commission, qui contribuera à rassurer les organisations syndicales. L’objectif sera ainsi atteint.

Mme la présidente. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 7 et 50.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 3.

Cet amendement fait l’objet d’un sous-amendement n° 52.

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n° 3.

M. Bernard Perrut, rapporteur. Je crois avoir déjà expliqué, en répondant à mes collègues, les raisons pour lesquelles nous avions souhaité modifier l’alinéa 8 de l’article 1er.

Afin d’éviter tout recours abusif à cette procédure de la part d’un quelconque gouvernement, la commission a souhaité préciser qu’avant de prendre toute mesure nécessitée par l’urgence, le Gouvernement devra faire connaître sa décision aux partenaires sociaux en la motivant par écrit. Cette procédure claire et précise évite toute ambiguïté et crée le climat de confiance que vous souhaitiez, monsieur Borloo.

Mme la présidente. La parole est à M. Francis Vercamer, pour défendre le sous-amendement n° 52.

M. Francis Vercamer. L’amendement du rapporteur est effectivement très intéressant, mais j’avais indiqué en commission que je me réservais la possibilité d’en faire une étude plus approfondie. Or, à le relire, je m’aperçois que la modernisation du dialogue social se traduit par de l’écrit : le dialogue ne se fera que par écrit ! Je préfère pour ma part qu’il se fasse oralement. Voilà pourquoi mon sous-amendement n° 52 précise que le Gouvernement réunit les partenaires sociaux pour les informer de sa décision – donc autrement que par un courrier –, ce qui permettra des échanges sur l’urgence prétendument avérée et, éventuellement, des explications complémentaires.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement ?

M. Bernard Perrut, rapporteur. Mon cher collègue, n’alourdissons pas trop la procédure ! Ce qui est écrit est écrit.

Vous voulez que ce qui est écrit soit signifié également oralement, dans le cadre d’une réunion entre les partenaires. Le texte que je propose me semble répondre aux attentes des uns et des autres. Tenons-nous-en là !

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement, pour donner l'avis du Gouvernement sur l’amendement et le sous-amendement en discussion.

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Le travail de réflexion et de conciliation mené par la commission a permis d’aboutir à un équilibre satisfaisant. Sur le plan méthodologique, l’écrit permet la plus grande précision. Le reproche souvent fait à l’oral est en effet de pouvoir être interprété.

M. Maxime Gremetz. C’est bien pourquoi on préfère l’écrit : on peut reprocher ensuite aux ministres de ne pas tenir ce qu’ils ont promis ! (Sourires.)

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Par ailleurs, rien n’empêche que des échanges oraux – qu’ils soient bilatéraux ou plus larges – aient lieu en parallèle. Voilà pourquoi je suis favorable au bon équilibre proposé par la commission dans l’amendement n° 3 et défavorable au sous-amendement n° 52.

Mme la présidente. La parole est à M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Je ne demande pas de supprimer le document écrit : je demande simplement qu’il soit remis à l’occasion d’une réunion avec les partenaires sociaux. Je maintiens donc mon sous-amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 52.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 3.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 20.

La parole est à M. Maxime Gremetz, pour le soutenir.

M. Maxime Gremetz. Cet amendement vise à définir ce qui pourrait être le « temps du Parlement ». Je ne prétends pas que mon dispositif soit parfait, mais il tend au moins à éviter que les organisations syndicales ne mènent seules les négociations, tandis que le Parlement serait laissé de côté, sans jamais donner son avis sauf lorsqu’une traduction législative de la négociation serait nécessaire.

Il est préférable, en effet, d’imaginer un va-et-vient entre le Parlement et les organisations syndicales, et de valoriser celles-ci en les faisant recevoir officiellement par les commissions parlementaires à l’occasion de chaque accord collectif majoritaire afin que chacun puisse expliquer sa position – ceux qui ont signé ce dernier comme ceux qui ne l’ont pas signé.

C’est une piste que j’ouvre et qui intéresse fortement les organisations syndicales, même s’il nous faudra continuer à chercher la bonne solution.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Bernard Perrut, rapporteur. La réflexion engagée par M. Gremetz me semble tout à fait intéressante. Elle est au cœur du grand débat qui a été engagé sur la place de la démocratie sociale et de la démocratie représentative (Sourires), et sur la nature du lien qui peut exister entre les deux, dans le respect de chacun. Il a en tout cas raison de s’interroger sur le moyen de faire en sorte que chacun soit informé. C’est une bonne question, et je comprends tout à fait l’inspiration de son amendement.

Je suis moi-même sensible, comme nombre de mes collègues, à la question de la place qui revient au Parlement au sein de la nouvelle procédure. On ne peut d’ailleurs que partager l’inspiration qui sous-tend le premier alinéa de cet amendement qui prévoit l’audition des différentes organisations syndicales par les commissions saisies au fond. Toutefois, monsieur Gremetz, pourquoi rigidifier les pratiques existantes ? Tout rapporteur, comme je l’ai fait moi-même, auditionne les différentes organisations syndicales préalablement à la réunion en commission. C’est en effet à un travail de fond auquel procède la plupart des rapporteurs – vous le savez bien pour l’avoir été vous-même.

Que l’on veuille accroître encore la place du rapporteur à l’occasion de la nouvelle procédure, me paraît être une bonne chose. Toutefois, cela ne relève-t-il pas de la mission dévolue au rapporteur, voire, à la limite, du règlement de l’Assemblée nationale ?

La suite de l’amendement me paraît plus contestable encore, car elle me semble rigidifier beaucoup la procédure et ce au détriment, d’une certaine manière, des partenaires sociaux puisque le débat en séance publique de toute façon leur sera, par définition, fermé.

Sensible toutefois à la nécessité d’une information exhaustive du Parlement sur la mise en œuvre de ces nouvelles procédures, j’ai moi-même déposé un amendement qui prévoit le dépôt par le Gouvernement d’un rapport annuel au Parlement, cela me semble essentiel, sur l’ensemble des procédures de concertation et de consultation mises en œuvre pendant l’année. Ainsi informé, le Parlement pourra alors mener à loisir un vrai travail d’échange avec les partenaires sociaux. Un tel dispositif présente l’avantage d’être plus souple et de donner des moyens aux parlementaires.

Le présent texte est inspiré par la recherche d’une nouvelle culture, par la volonté de donner une nouvelle dimension au dialogue social. Or les différents modèles des pays étrangers, dont le présent texte s’inspire, ne rigidifient pas et n’accumulent pas les procédures. Il me semble que c’est aussi la force de ce texte, monsieur le ministre, que d’être, parce que vous l’avez voulu ainsi, court, précis et efficace.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Le Gouvernement est, comme la commission, défavorable à cet amendement.

Ce point a fait l’objet de très longues discussions, comme vous pouvez l’imaginer, monsieur Gremetz, parce qu’il est crucial. Personne ne souhaitait l’automaticité, mais personne ne souhaitait non plus l’éloignement et les positions de départ étaient assez divergentes, vous le savez. Il fallait trouver le meilleur des compromis possibles. C’est ce à quoi nous sommes parvenus, au terme de longs échanges, avec la proposition qui vous est faite. Je ne me vois pas modifier dans son essence un texte qui a recueilli l’accord le plus large. D’ailleurs, je ne doute pas que la pratique parlementaire sera celle que vous décrivez dans la première partie de votre amendement.

J’ajoute, mais vous le savez sans doute puisque vous disiez vous-même que ce n’était qu’une piste, qu’il faudrait voter une loi organique pour modifier cet élément. Il reste que l’état d’esprit doit être celui que vous évoquez, bien entendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Monsieur le rapporteur, j’entends bien vos arguments, mais j’ai l’impression de me retrouver dans la même situation qu’il y a vingt ans, lorsque je proposais de mesurer la représentativité par l’élection. À l’époque, on me reprochait d’être trop en avance. Aujourd’hui, je crains que nous ne prenions du retard. Cela fait très longtemps que nous défendons les accords majoritaires.

Je voudrais vous faire une proposition qui pourrait constituer un pas en avant. Elle concerne le travail du rapporteur et est dictée par le souci que j’ai de valoriser les organisations syndicales. Ma longue expérience dans cette maison me permet de dire que chaque rapporteur a sa méthode de travail et que certains n’ont pas beaucoup de temps. Pourquoi ne pas envisager – je ne vous demande pas de décider dès ce soir, mais au moins d’y réfléchir – qu’au terme de la négociation, toutes les organisations syndicales, qu’elles aient ou non signé l’accord, soient officiellement reçues par la commission compétente de l’Assemblée nationale, celle des affaires culturelles ou celle des affaires économiques ? Ainsi, chacune pourrait expliquer son opinion et éclairer le débat car le rapporteur de la commission saisie au fond se ferait le traducteur devant le Parlement de ces diverses opinions. Ce serait un moyen de valoriser le rôle des organisations syndicales, qui seraient reçues officiellement au Parlement, et cela nourrirait la réflexion des parlementaires et les éclairerait dans leur prise de décision.

Mme la présidente. La parole est à M. Léonce Deprez.

M. Léonce Deprez. Nous faisons confiance au rapporteur et nous intervenons très peu dans ce débat, mais je tiens à souligner que la démocratie participative dont nous parlons beaucoup, nous allons la vivre si nous appliquons le projet de loi qui est proposé. En fait, c’est une nouvelle ère du dialogue social qui s’ouvre et je suis très heureux que M. Gremetz lui-même participe à ce débat.

M. Maxime Gremetz. Oh ! Vous retardez !

M. Léonce Deprez. Le dialogue social sera ouvert aux parlementaires, à partir de l’action du Gouvernement et du travail de la commission qui aura pour mission d’être en relation avec les syndicats. Nous sentons vraiment le changement d’esprit qui anime le Gouvernement en la personne de Jean-Louis Borloo. Nous devons encourager cette évolution parce que la démocratie participative, c’est d’abord la participation des élus de la nation à l’évolution des esprits et à la mise au point d’un dialogue social qui doit se perpétuer et s’officialiser de plus en plus dans les années à venir.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement no 20.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement no 10.

La parole est à M. Francis Vercamer, pour le soutenir.

M. Francis Vercamer. Cet amendement vise à modifier l’alinéa 9 de l’article 1eren indiquant qu’il n’est pas forcément obligatoire de légiférer après une négociation. On peut très bien imaginer que les partenaires sociaux estiment qu’un accord interprofessionnel suffit.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Bernard Perrut, rapporteur. Je ne reviendrai pas sur l’argumentation que j’ai déjà développée relative à la nécessité de ne pas encadrer de manière excessive les procédures. Le dispositif proposé pourrait, en rendant un délai impératif pour le Gouvernement, ne pas être exempt de tout reproche d’ordre constitutionnel.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement no 10.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement no 21.

La parole est à M. maxime Gremetz, pour le soutenir.

M. Maxime Gremetz. L’amendement no 21 est rédactionnel.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Bernard Perrut, rapporteur. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement no 21.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement no 51.

La parole est à Mme Martine Billard, pour le soutenir.

Mme Martine Billard. C’est un amendement de cohérence.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Bernard Perrut, rapporteur. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement no 51.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement no 4.

La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.

M. Bernard Perrut, rapporteur. C’est un amendement que je présente au nom de la commission et d’un certain nombre de collègues.

Dans le droit fil des échanges préalables à l’élaboration du présent texte entre le Gouvernement et les partenaires sociaux, nous avons souhaité conférer au rendez-vous annuel devant la Commission nationale de la négociation collective toute son importance et garantir la publicité des échanges qui ont lieu à cette occasion. C’est ainsi qu’un document formalisé pourra servir de référence pour la conduite des négociations en cours ou à venir. Nous renforçons en quelque sorte la qualité des échanges en en faisant le compte rendu dans un document qui servira de référence.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Avis favorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Madame la présidente, je m’étonne que vous n’ayez pas appelé l’amendement no 11 de M. Marie-Jeanne.

Mme la présidente. Je ne l’ai pas appelé parce qu’il n’y avait personne pour le défendre. Quand un amendement n’a qu’un seul auteur et que cet auteur n’est pas présent, il n’est pas défendu.

M. Maxime Gremetz. Je tenais simplement à préciser que j’avais défendu cet amendement en commission.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement no 4.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement no 5.

La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.

M. Bernard Perrut, rapporteur. Nous savons que les débats préalables à l’élaboration du projet de loi ont conduit à l’abandon d’un mécanisme qui a été jugé excessivement rigide, celui d’une commission mixte rassemblant les parlementaires et les partenaires sociaux. Je crois bien sûr, comme vous, qu’il faut laisser place à la souplesse et la respecter.

Le respect des prérogatives de la représentation nationale est essentiel et il est nécessaire de laisser ensuite au Parlement la possibilité de mettre en œuvre les missions qui sont les siennes aux termes de la Constitution. Le Parlement doit aussi être pleinement conscient des enjeux qui ont sous-tendu la négociation et, de manière générale, de l’intégralité des procédures de concertation ou de consultation.

C’est pourquoi la commission a adopté, à l’unanimité, cet amendement que je proposais qui prévoit, parallèlement au rendez-vous annuel entre le Gouvernement et les partenaires sociaux qui est institué par le projet de loi, la remise d’un rapport par le Gouvernement au Parlement sur l’état de l’ensemble des procédures de concertation et de consultation mises en œuvre pendant l’année écoulée.

Un tel document ne rigidifie pas la procédure : il me paraît au contraire traduire une préoccupation aussi bien des parlementaires, exprimée à l’instant par M. Deprez et par M. Gremetz, que des partenaires sociaux, il faut le reconnaître. Ces derniers ont le souci légitime de ne pas voir déformés les axes principaux des négociations et de pouvoir s’en expliquer. À cet égard, le rôle du rapporteur de la commission saisie au fond sera central et devra être consacré comme tel. Des explications doivent pouvoir être apportées au cours des échanges qu’il aura avec les partenaires sociaux, comme cela est déjà en partie le cas aujourd’hui, mais d’une manière peut-être encore plus systématique, plus forte, de façon à avoir connaissance de tous les éléments des négociations et des raisons pour lesquelles certaines décisions auront été prises.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement no 5.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 1er, modifié par les amendements adoptés.

(L’article 1er, ainsi modifié, est adopté.)

Mme la présidente. Nous en venons aux amendements portant articles additionnels après l’article 8.

Après l’article 8

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement no 8.

La parole est à M. Francis Vercamer, pour le soutenir.

M. Francis Vercamer. Avec cet amendement, je reviens, j’en suis désolé, sur un sujet qui a été longuement débattu la nuit dernière.

Certains voulaient instaurer, par amendement, une élection nationale pour asseoir les règles de représentativité. Comme le Gouvernement et un certain nombre de députés dans cet hémicycle, j’ai souhaité le rejet de cet amendement parce qu’il ne me paraissait pas opportun de légiférer dans l’urgence pour modifier les règles de représentativité.

L’amendement no 8 fait suite à l’article 1er que nous venons de voter. Il propose que le Gouvernement élabore un document d’orientation sur la réforme des règles de représentativité des organisations syndicales, mais également professionnelles parce que, et ce n’est pas M. Censi qui me contredira, la partie professionnelle est également touchée par les règles de représentativité.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Bernard Perrut, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement, tout en lui reconnaissant un intérêt, en tout cas dans son esprit.

Il prouve en effet que la question de la modification des règles de représentativité des organisations professionnelles et syndicales est appelée à faire l’objet des procédures de dialogue social telles qu’elles sont prévues dans le présent projet de loi. Cela dit, cet amendement souffre du même travers que les précédents amendements, qui enferment ces différentes procédures dans des délais trop stricts.

La logique de cet amendement voudrait que toute mise en œuvre de la concertation soit d’une certaine manière subordonnée à une incitation législative, forme de préalable à la procédure. Non seulement ce procédé est à mon sens rigide et complexe, mais il va à rebours de la démarche proposée avec le présent projet de loi, qui implique une intervention de la loi après et non avant la concertation.

J’ajouterai que cet amendement est en quelque sorte satisfait par l’annonce qui a été faite hier par le Premier ministre d’un travail avec l’ensemble des partenaires sociaux sur les questions qui restent ouvertes, travail qui sera mené sous l’autorité de M. Borloo et de M. Larcher.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Même avis que la commission. Je comprends votre impatience, monsieur Vercamer, mais vous savez qu’après avoir demandé un premier rapport sur cette question au président Hadas-Lebel, le Gouvernement a saisi le Conseil économique et social. M. Dermagne a assuré la présidence de la commission ad hoc dont le rapport a fait l’objet de longs débats et d’un vote. C’est un sujet essentiel pour l’avenir de la représentation sociale dans notre pays et, au-delà même, pour celui de notre modèle social. Le dialogue au sein de la commission paraissait extraordinairement difficile, mais le président Dermagne a pris le dossier en main et la concertation a manifestement permis d’avancer sur beaucoup de points, même si un consensus général n’a pu être trouvé.

Notre détermination à aller de l’avant est totale. Nous procéderons de la façon prévue par ce texte relatif à la modernisation du dialogue social en élaborant un document d’orientation, puis un avant-projet, le tout en concertation avec les partenaires sociaux sur un sujet vaste et délicat, qui n’est d’ailleurs pas intégralement couvert par le rapport du Conseil économique et social. Je ne sais si nous pourrons aboutir dans un délai de trois mois, mais le Premier ministre nous ayant confié hier, à Gérard Larcher et à moi-même, le soin de mener à bien cette mission, vous pouvez compter sur nous.

M. Léonce Deprez. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Je ne doute pas de la détermination du Gouvernement. Je demande simplement, par cet amendement, qu’il élabore le document d’orientation sur la réforme des règles de représentativité qu’il s’est engagé à élaborer. C’est ce que nous venons de voter ! Si le délai de trois mois ne convient pas, je suis prêt à accepter que le Gouvernement dépose un sous-amendement avec la durée qui lui convient. Mais je m’inquiéterais si cet amendement devait être refusé.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de l’emploi.

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. C’est précisément parce que nous avons voté la façon de procéder qu’il ne nous paraît pas utile de le répéter ici. Nous votons la méthodologie ; je vous propose tout simplement de l’appliquer !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 8.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 40.

La parole est à M. Alain Vidalies, pour le soutenir.

M. Alain Vidalies. Cet amendement est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Bernard Perrut, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement. En effet, il aurait un effet restrictif et n’est donc pas utile.

M. Jean-Pierre Soisson. Cela n’a rien à voir avec le texte !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 40.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 41.

La parole est à M. Alain Vidalies, pour le soutenir.

M. Alain Vidalies. Défendu !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Bernard Perrut, rapporteur. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 41.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 42.

La parole est à M. Alain Vidalies, pour le soutenir.

M. Alain Vidalies. Défendu !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Bernard Perrut, rapporteur. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 42.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 43.

La parole est à M. Alain Vidalies, pour le soutenir.

M. Alain Vidalies. Défendu !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Bernard Perrut, rapporteur. Défavorable. Il ne convient pas de traiter de ce sujet dans le cadre de ce projet de loi.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 43.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 44.

La parole est à M. Alain Vidalies, pour le soutenir.

M. Alain Vidalies. Il s’agit là d’une affaire grave dont nous avons parlé régulièrement, qui a fait l’objet de questions d’actualité, de nombreux articles de presse, et qui reste pour nous très largement incompréhensible.

L’accord exemplaire conclu le 12 décembre 2001 entre les cinq organisations syndicales de salariés et l’Union professionnelle artisanale représentant 800 000 entreprises, relatif au développement du dialogue social dans le secteur de l’artisanat, a été attaqué par la CGPME et le MEDEF, à la pression desquels le Gouvernement n’a pas su résister, puisqu’il a jusqu’à présent toujours refusé l’extension de cet accord. La CGPME et le MEDEF craignaient une contagion de cet accord. Il est grave que le Gouvernement ne puisse pas passer outre à une injonction de leur part ! L’Union professionnelle artisanale nous rappelle régulièrement cette difficulté. Par cet amendement, nous demandons simplement que le Gouvernement transmette au Parlement un rapport expliquant pourquoi il s’est comporté de la sorte pendant cinq ans.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Bernard Perrut, rapporteur. L’accord du 12 décembre 2001, dont l’intérêt est certain pour le développement du dialogue dans le secteur de l’artisanat, ouvre la voie à une représentation des salariés sous une forme mutualisée entre les entreprises. On ne peut que souhaiter vivement que les organisations, dont les positions sont encore divergentes à ce sujet, parviennent à un consensus constructif, de façon à favoriser le dialogue social dans les plus petites entreprises. Je demande donc au ministre quelles sont ses intentions sur cette question importante du financement des organisations syndicales, dont on peut se demander si elle a fait l’objet de toute la concertation préalable requise.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. C’est un vrai sujet, car le financement dont vous faites état est indispensable, mais il traite un problème plus général de mutualisation. Nous espérons aboutir prochainement sur un accord intermédiaire de financement – je m’y suis en tout cas engagé devant le président de l’UPA.

D’une manière plus générale, le rapport du Conseil économique et social aborde ce sujet. Nous le traiterons donc dans le cadre général évoqué ci-dessus, le plus rapidement possible pour faire plaisir à M. Vercamer. (Sourires.)

Avis défavorable à l’amendement, mais nous vous rendrons compte de l’évolution du dossier.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Vidalies.

M. Alain Vidalies. Cela fait quatre ans et demi que j’essaie d’obtenir une réponse du Gouvernement sur les raisons de la non-extension de cet accord. J’étais plein d’espoir, mais je suis une nouvelle fois déçu. Nous en débattrons devant les Français.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 44.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Article 2

Mme la présidente. Sur l’article 2, je suis saisie d’un amendement n° 6.

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir cet amendement.

M. Bernard Perrut, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 6.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 2, modifié par l’amendement n° 6.

(L’article 2, ainsi modifié, est adopté.)

Après l’article 2

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 22, portant article additionnel après l’article 2.

La parole est à Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, pour soutenir cet amendement.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet. Cet amendement vise à rendre plus effective la participation des associations de protection de l’environnement au dialogue préalable à toute décision en matière d’environnement. Cette participation est expressément prévue par le code de l’environnement – article L. 141-2 –, le droit communautaire – directive n° 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil – et la Charte de l’environnement dont l’article 7 précise : « Toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d’accéder aux informations relatives à l’environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l’élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement. »

Le code de l’environnement donne d’ores et déjà la possibilité aux associations de protection de l’environnement agréées de se porter partie civile. Il impose au préfet de faire cesser toute infraction lorsqu’une association agréée en fait la demande. Néanmoins, ses dispositions sont encore imparfaites s’agissant de la participation des associations aux décisions – je pense notamment à celles concernant la publicité, qui dénaturent et agressent la qualité de l’environnement, notamment à l’entrée des villes. Des associations environnementales nationales se voient régulièrement refuser la possibilité de participer à des discussions de charte environnementale locale lorsqu’il s’agit de préserver une entrée de ville ou de définir les conditions dans lesquelles la publicité y serait autorisée.

Cet amendement vise donc à compléter le dispositif et à rendre effective et plus systématique la participation des associations environnementales au dialogue préalable à la conclusion d’accords sur la protection de l’environnement.

(M. René Dosière remplace Mme Hélène Mignon au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. RENÉ DOSIÈRE,
vice-président

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 22 ?

M. Bernard Perrut, rapporteur. Le sujet est digne d’intérêt, et nous connaissons l’engagement de Mme Kosciusko-Morizet dans le domaine de la protection de l’environnement, mais cette importante question relève davantage du ministère de Mme Olin que de celui de M. Borloo. La commission a donc repoussé cet amendement, qui n’aurait pas sa place dans le texte en discussion.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Même avis que la commission. Chacun connaît les engagements de Mme Kosciusko-Morizet en faveur de l’environnement et son combat permanent. Mais nous traitons dans ce texte de la négociation sociale interprofessionnelle, ce qui est déjà un sujet immense !

M. Léonce Deprez. C’est vrai !

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Il est quantité d’autres sujets où le dialogue est nécessaire, mais nous ne pouvons en traiter dans le cadre de ce texte.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. La couleur verte de la veste de Mme Kosciusko-Morizet témoigne bien de son engagement en matière d’environnement. Je pourrais, quant à moi, m’habiller en rouge. En tout cas, en la voyant, j’ai tout de suite su pourquoi elle venait ! (Sourires.) Félicitations, il n’y a pas de doute possible !

Cela dit, on nous a expliqué à maintes reprises qu’il fallait que nos propositions restent dans le cadre des missions du ministère du travail. Pour ma part, je considère que la santé au travail et la protection sociale sont du domaine du dialogue social. En outre, nous avons reconnu avoir utilisé, dans le passé, la technique des cavaliers et nous nous sommes engagés à ne plus le faire.

C’est du moins ce qui a été dit, vous en êtes témoins, mes chers collègues. Mais je ne sais pas, madame, si vous avez vous-même assisté à nos débats…

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet. Oui.

M. Maxime Gremetz. Nous avons refusé un tel procédé, qui revenait à tourner le dos au dialogue social. Les cavaliers, on le sait, sont mal acceptés, parce qu’ils ne font l’objet d’aucune concertation. En l’occurrence, il s’agit bien d’un cavalier, ou plutôt d’une cavalière dynamique, qui tente de faire entrer à tout prix une disposition dans un texte où elle n’a pas sa place.

Je suis, moi aussi, un défenseur de l’environnement, dont je me préoccupe, comme tout le monde. Mais tout ce que nous avons dit au cours de la séance ne servirait à rien si nous en venions, en conclusion, à accepter un amendement tel que celui-ci, qui ne correspond en rien à l’esprit du texte et remet en selle un des cavaliers que nous avions abattus.

M. Léonce Deprez. Nous trouverons un autre cadre !

M. le président. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. En tant qu’écologiste, je pourrais évidemment voter cet amendement avec plaisir. Malheureusement, il ne me semble pas à sa place dans le texte en discussion.

M. Maxime Gremetz. Il faudrait aller voir Nelly Olin !

Mme Martine Billard. Il y aurait pourtant une solution : ce serait de faire pression sur le Gouvernement pour qu’il inscrive la loi sur l’eau ou celle sur les OGM à l’ordre du jour de notre assemblée.

M. Maxime Gremetz. Pourquoi pas dès lundi prochain ?

Mme Martine Billard. L’amendement n° 22, relatif aux associations de protection de l’environnement, serait plus recevable dans le cadre d’un de ces deux textes que dans celui d’un projet de loi portant sur le code du travail et le dialogue social.

De plus, même si mon cœur me porte naturellement à le voter, je me bats trop souvent contre les cavaliers législatifs de l’UMP pour m’y résoudre.

Quoi qu’il en soit, les possibilités que Mme Kosciusko-Morizet veut ouvrir aux associations de protection de l’environnement me semblent judicieuses. Et, si elles sont présentées dans le cadre de la loi sur l’eau ou de la loi sur les OGM, je les voterai avec plaisir. J’insiste donc sur l’intérêt qu’il y aurait à examiner ces deux textes avant la fin de la législature.

Peut-être que le ministre pourrait nous donner une indication à ce sujet. Nous avons en effet entendu des informations contradictoires, ces jours derniers, et la ministre de l’écologie a indiqué hier qu’un des deux projets viendrait peut-être en discussion.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Kosciusko-Morizet.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet. Je comprends bien les réticences qui se sont exprimées. Je préférerais toutefois que M. Gremetz évite de commenter ma tenue vestimentaire, car je pourrais moi aussi commenter la sienne.

M. Maxime Gremetz. Allons voir la ministre tous les deux !

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet. Quand je leur ai soumis le problème, les services législatifs de l’Assemblée nationale m’ont indiqué que mon amendement, qu’il soit déposé sur la loi sur l’eau ou sur la loi sur les OGM, serait considéré comme un cavalier et que, même s’il était en décalage, moins pour des raisons de contenu que de titre, avec le projet de loi de modernisation du dialogue social, ce dernier texte pouvait peut-être le porter.

C’est pourquoi j’ai tenté ma chance, pensant que les objectifs de l’amendement étaient suffisamment légitimes. Mais je comprends les critiques qui ont été formulées.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 22.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Nous en arrivons à la seconde délibération.

Seconde délibération

M. le président. En application de l’article 101 du règlement, le Gouvernement a demandé qu’il soit procédé à une seconde délibération de l’article 1er du projet de loi.

La seconde délibération est de droit.

Je rappelle que le rejet des amendements vaut confirmation de la décision prise en première délibération.

Article 1er

M. le président. Sur l’article 1er, tel qu’il a été adopté en première délibération, je suis saisi d’un amendement n° 1.

La parole est à M. le ministre de l’emploi, pour soutenir cet amendement.

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. L’amendement vise à supprimer, dans l’alinéa 6 de l’article 1er, les mots : « ou intersectorielle des professions agricoles et libérales » et, en conséquence, dans le même alinéa, les mots : « ou au niveau intersectoriel des professions agricoles et libérales ».

Son sens est simple. Le projet de loi sur le dialogue social est un texte globalement interprofessionnel, qui n’a donc pas pour vocation d’assurer la représentativité de tel ou tel secteur. Par ailleurs, le choix final après concertation reviendra à la Commission nationale de la convention collective, dont sont membres les organisations concernées, qui sont, pour l’essentiel, agricoles.

Sur le principe, je considère qu’il faut rester dans l’interprofessionnel et, dans la pratique, l’expression sectorielle pourra intervenir. Si l’on devait aller plus loin, le texte sur la représentativité, qui viendra bientôt en discussion, pourrait donner lieu à certaines avancées – et pourquoi pas à celles qu’a suggérées Mme Kosciusko-Morizet ? (Sourires.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Bernard Perrut, rapporteur. J’ai déjà eu l’occasion de m’exprimer sur le sujet. Je ne reviendrai pas sur les motivations qui ont amené la commission, au cours du débat, à rejeter l’amendement de M. Censi. Compte tenu des explications qui nous ont été apportées par M. le ministre, j’invite l’Assemblée à adopter l’amendement n° 1.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime GremetzLes groupes de gauche avaient posé la question. Certes, on a toujours le droit de déposer un amendement, mais celui de M. Censi modifiait radicalement la démarche du projet de loi, en touchant à de grands principes comme la définition de la représentativité ou les accords majoritaires. En se plaçant à un niveau intersectoriel, il modifiait même toutes les bases du code de travail, ce qui représente à nos yeux une régression. Pour nous, si un tel amendement était maintenu, il serait inutile de continuer. Un retour au texte initial, comme le suggère l’amendement n°1, nous convient donc parfaitement.

M. le président. La parole est à M. Gaëtan Gorce.

M. Gaëtan Gorce. M. Vidalies a été très clair. Si nous devions maintenir les dispositions introduites par l’amendement adopté, nous changerions la nature du texte. Or, même si nous avons des désaccords sur les mécanismes de la concertation et de la représentativité, nous sommes en passe de nous accorder tous sur le fait que le projet de loi, bien que timide, permet de faire un premier pas. Laisser dans le texte une disposition d’une telle importance – je pense que nos collègues de la majorité en sont conscients – modifierait les conditions dans lesquelles il a été présenté et débattu. Le Gouvernement fait donc preuve de sagesse en présentant l’amendement n° 1.

Je suis convaincu que la majorité, qui a le souci que notre débat se termine dans de bonnes conditions, voire se prolonge, puisqu’elle nous en promet un autre sur la représentativité, souhaite, comme nous tous, que de telles questions soient abordées dans un autre contexte et que la présente discussion se conclue dans la sérénité.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Soisson.

M. Jean-Pierre Soisson. Le Gouvernement nous demande de revenir, à la faveur d’une seconde délibération, sur le texte de l’amendement qui avait été déposé par M. Censi.

Il souhaite limiter strictement la négociation collective à l’aspect interprofessionnel et le groupe UMP le suivra dans cette voie.

Je ferai néanmoins deux observations.

La première s’adresse à nos collègues socialistes et communistes.

Il existe un droit d’amendement,…

M. Maxime Gremetz. Bien sûr !

M. Jean-Pierre Soisson. …dont M. Censi a usé librement. Des critiques venues de leurs bancs ne sont donc pas acceptables. Je tiens à affirmer, au terme d’une discussion digne et constructive, que chacun, dans cet hémicycle, a le droit de déposer un amendement.

M. François Loncle. Personne n’a dit le contraire !

M. Jean-Pierre Soisson. M. Censi l’a fait en son âme et conscience. Le groupe l’a suivi dans sa majorité. À la fin de ce débat, je souhaite que les groupes socialiste et communiste reconnaissent la liberté que nous avons tous ne nous exprimer. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Maxime Gremetz. Personne ne l’a remise en cause !

M. Jean-Pierre Soisson. Ma seconde observation s’adressera au Gouvernement.

Nous voterons l’amendement n° 1, mais M. Censi a posé un problème proche des réalités du terrain. Il y a en effet une spécificité du monde rural et agricole, que M. Larcher a reconnue. Pour que le présent débat serve à quelque chose, nous aimerions que le problème soulevé par M. Censi, dont l’analyse a été partagée par la majorité de notre groupe, soit traité au niveau du Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n°1.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 1er, modifié par l'amendement n°1.

(L'article 1er, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président. Je rappelle que la Conférence des présidents a décidé que les explications de vote et le vote, par scrutin public, sur l’ensemble du projet de loi auront lieu mardi 12 décembre après le débat sur la déclaration du Gouvernement préalable au Conseil européen.

ordre du jour
de la prochaine séance

M. le président. Ce soir, à vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2006, n° 3447 :

Rapport n° 3469, de M. Gilles Carrez, rapporteur général, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du plan.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures quarante.)