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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale

Compte rendu
intégral

Troisième séance du mardi 9 janvier 2007

105e séance de la session ordinaire 2006-2007


PRÉSIDENCE DE M. JEAN-CHRISTOPHE LAGARDE,
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

protection de l’enfance

Suite de la discussion d’un projet de loi adopté par le Sénat

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, réformant la protection de l’enfance (nos 3184, 3256).

Discussion des articles

M. le président. J’appelle les articles du projet de loi dans le texte du Sénat.

Avant l’article 1er

M. le président. Je suis saisi d’un amendement no 39 portant article additionnel avant l’article 1er.

La parole est à Mme Patricia Adam, pour le soutenir.

Mme Patricia Adam. Cet amendement, qui a été repoussé par la commission, vise à opérer des modifications terminologiques. En effet, le mot « placement » est difficile à entendre pour les familles. Or ce texte de loi laisse plus de place à la contractualisation avec les familles et à des mandats administratifs. D’où l’importance de ne pas utiliser des mots qui peuvent, à juste titre, faire peur aux familles.

Cet amendement vise donc à remplacer le mot « placement » par le mot « accueil », le mot « placé » par le mot « confié », et les mots « aide éducative en milieu ouvert » par les mots « soutien éducatif à la famille ». Cela répond au souci, que nous partageons sur tous ces bancs, d’apporter un soutien aux familles le plus possible au plan administratif et le moins possible au niveau juridictionnel.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Mme Valérie Pecresse, rapporteure de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Avis défavorable, non pas que nous n’ayons pas compris ou que nous n’approuvions pas l’objectif visé par Mme Adam, car le mot « placement » est en effet très connoté et beaucoup moins beau que le mot « accueil », ce qui vaut aussi pour le mot « placé » par rapport au mot « confié ». Il est vrai aussi que l’« aide éducative en milieu ouvert » est devenue en jargon administratif l’AEMO. Cela dit, le « soutien éducatif à la famille » pourrait rapidement devenir le SEF !

Nous partageons le souhait de Mme Adam, mais une expertise réalisée par les services du ministère a montré que le mot « accueil » était très utilisé, notamment dans des contextes non juridiques, par exemple pour la garde des jeunes enfants. C’est un mot qui n’a pas la connotation juridique du mot « placement ». Avant de procéder à une telle substitution, il faudrait donc confier un travail de très longue haleine à une véritable commission de réécriture du code de l’action sociale. C’est très lourd et cela peut difficilement se faire au détour d’un simple amendement à un projet de loi.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Même avis que la commission, pour les mêmes raisons et avec la même ouverture d’esprit sur le fond. Lorsque je parle de l’accueil des enfants qui sont confiés à des établissements, je n’utilise jamais le mot « placement ». Nous devons procéder à un toilettage des textes. Je m’engage à le mettre en chantier, car je crois qu’il est nécessaire.

M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. Je partage les propos de Mme Adam et de Mme la rapporteure. On « place » un objet, mais on « accueille » un enfant. Ce n’est pas pareil. Comme je l’ai dit dans la discussion générale, certains parents ont du mal à s’adresser aux services d’aide à l’enfance, dans les services sociaux, car ils craignent qu’on leur retire leur enfant. Or, le mot « placement » se situe un peu dans ce contexte. Je souhaite que M. le ministre engage la réflexion dont il a parlé car le mot « accueil » correspond à ce que nous souhaitons tous. L’accueil, c’est plus convivial, plus éducatif que le placement. Il est dommage que la commission et le Gouvernement ne soient pas favorables à cet amendement, mais j’espère que nous pourrons rapidement trouver un terrain d’entente sur cette question.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement no 39.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Nous en venons à l’article 1er.

Article 1er

M. le président. Je suis saisi d’un amendement no 166.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour le soutenir.

Mme Muguette Jacquaint. J’ai exprimé une inquiétude, que partagent d’autres parlementaires, s’agissant des dispositions concernant la décentralisation, et vous avez répondu sur ce point, monsieur le ministre. Loin de moi l’idée de remettre en cause la décentralisation, mais dans certains domaines, notamment la protection maternelle et infantile, de nombreux départements ont déjà fait beaucoup de choses depuis longtemps, et vous l’avez dit vous-même en répondant aux orateurs qui sont intervenus lors de la discussion générale. Même si tout n’est pas parfait, je me félicite ainsi que celui de la Seine-Saint-Denis ait fait beaucoup pour la PMI avec toutes les mesures d’accompagnement prises pour les familles et pour la protection des enfants.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. C’est vrai !

Mme Muguette Jacquaint. Nous sommes en quelque sorte une « locomotive », selon votre propre terme, et nous entraînerons sans doute les autres, mais il ne faudrait pas que ces locomotives, qui ont pris des dispositions plus vite que d’autres parce qu’elles ont fait un choix politique, ne soient pas récompensées de leurs efforts. Cela signifierait que ceux qui ont fait ce choix auront moins de moyens que les autres, et cela serait injuste.

Cet amendement vise donc à réaffirmer l’importance du rôle de l’État dans le domaine de la protection de l’enfance et son engagement dans la mise en œuvre des soins psychiques à destination des mineurs vulnérables, l’accueil des familles sans domicile, l’assistance éducative – il y a beaucoup à faire de ce point de vue au sein de l’éducation nationale – et tout ce qui concerne les enfants handicapés.

Par cet amendement, je souhaite rappeler que, si des responsabilités sont confiées aux départements, le besoin de financement par l’État demeure et que celui-ci conserve une responsabilité première dans toutes les situations.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. La commission est défavorable à l’amendement, alors même que je partage pleinement l’état d’esprit qui le motive. Je considère en effet que l’État doit être le garant d’une politique uniforme, sur l’ensemble du territoire, de protection de l’enfance et qu’il doit permettre l’harmonisation des pratiques. Toutefois, la rédaction de l’amendement me semble vague. En outre, elle risque de contrevenir au principe de libre administration des collectivités locales. « L’État demeure au cœur des dispositifs de protection de l’enfance » me semble une formule trop vague et légèrement contradictoire avec le fait que l’on confie cette protection aux départements.

Quant à la question du financement, qui importe – à juste titre – à Mme Jacquaint, elle est traitée à l’article 17 du projet de loi, qui envisage la compensation des charges nouvelles que la réforme imposera aux départements.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, dont la portée normative pourrait d’ailleurs être discutée. Toutefois, il est d’accord avec la motivation de l’amendement, qui est de faire en sorte que l’État ne se désengage pas de la protection de l’enfance. C’est en effet un point important.

À travers la justice, l’éducation nationale, les affaires sanitaires et sociales, et la santé, l’État a un grand rôle à jouer. Il continuera à l’assumer grâce à toutes les règles d’application de cette réforme. Je pense notamment aux références aux bonnes pratiques, qui sont en cours d’élaboration.

Puisque vous avez soulevé la question, madame Jacquaint, je sais que les locomotives ont besoin d’énergie. Pour répartir le combustible qui permettra à cette réforme d’avancer, il sera tenu compte, dans les critères d’attribution, qui seront définis par décret, de l’effort déjà consenti par certains départements. Je présenterai d’ailleurs un amendement dans ce sens quand nous examinerons l’article 17.

M. le président. La parole est à M. Lilian Zanchi.

M. Lilian Zanchi. Entre autres propositions, j’ai indiqué au cours de mon intervention qu’il était important que le comité interministériel de prévention de la délinquance devienne le comité interministériel de prévention de la délinquance et à la protection de l’enfance, afin de coordonner la totalité des politiques menées autour de l’enfance, en matière de prévention comme de protection.

Vous-même, madame la rapporteure, indiquez à la onzième page de votre rapport : « Il faut que la puissance publique ne parle que d’une seule voix, et ce quel que soit le point de vue d’où elle s’exprime. » Vous rappelez le rôle de pivot du conseil général et celui du juge des enfants, qui est de faire respecter la loi. Vous faites donc l’articulation entre décentralisation et centralisation.

Le rapport de l’OND, l’Observatoire national de la délinquance, insiste sur la nécessaire cohérence des interventions de l’État et propose la constitution d’un comité interministériel afin de mieux coordonner les initiatives législatives et réglementaires des différents ministères concernés par la protection de l’enfance, de façon à ce que le pilotage par l’État des politiques largement décentralisées garde toute sa cohérence.

L’amendement rappelle que l’État, au-delà du fait qu’il doit demeurer au cœur des dispositifs, « impulse, coordonne et évalue », ce qui est conforme tant à votre rapport qu’à celui de l’OND. Il me semble donc que l’amendement soit en parfaite cohérence avec eux. L’approuver irait dans le sens de vos propositions et de celles que le ministre a faites en présentant son texte.

M. le président. C’est votre avis, mais je rappelle que l’amendement a reçu un avis défavorable de la commission et du Gouvernement.

Je mets aux voix l'amendement no 166.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement no 243.

La parole est à Mme Henriette Martinez, pour le soutenir.

Mme Henriette Martinez. Cet amendement vise à mentionner dans la première phrase du deuxième alinéa, avant même les risques auxquels peuvent être confrontés les parents, ceux auxquels les enfants peuvent être confrontés. Ceux-ci, dans un texte relatif à la protection de l’enfance, ne doivent-ils pas être au cœur du dispositif ?

Il ne s’agit pas d’opposer leur intérêt à celui des parents, mais de rappeler le but premier du texte. En effet, la maltraitance a souvent lieu, malheureusement, dans la famille et, si l’on ne parle que de prévenir les difficultés des parents, on risque d’oublier que ce sont les enfants qui en sont les victimes. Dans ce projet de loi sur la protection de l’enfance, il importe que les risques auxquels ils peuvent être confrontés soient mentionnés très clairement au début de l’article 1er.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Une fois encore, je comprends l’esprit dans lequel l’amendement a été déposé. Je connais en effet le combat d’Henriette Martinez en faveur de la protection de l’enfance. Je sais qu’elle souhaite, à juste titre, que l’intérêt de l’enfant soit toujours rappelé comme fil directeur de tous nos textes.

La commission a toutefois émis un avis défavorable, car l’objet de l’article 1er est de rappeler que l’intervention publique, en matière de protection de l’enfance, est vraiment subsidiaire. Ce sont les parents qui ont la responsabilité de s’occuper en premier lieu de leurs enfants. C’est pourquoi l’article 1er a été rédigé ainsi : « La protection de l'enfance a pour but de prévenir les difficultés auxquelles les parents peuvent être confrontés dans l'exercice de leurs responsabilités éducatives, d'accompagner les familles et d'assurer, le cas échéant, selon des modalités adaptées à leurs besoins, une prise en charge partielle ou totale des mineurs. »

Si l’enfant n’est mentionné qu’ensuite, c’est que le but de la protection de l’enfance est de permettre d’abord aux familles d’assumer correctement leurs responsabilités éducatives.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Le Gouvernement comprend très bien l’objectif de l’amendement. Il partage l’intention de son auteur, mais, pour les raisons qui viennent d’être exposées par Mme Pecresse, il ne l’a pas retenu parmi les amendements auxquels il pouvait donner un avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement no 243.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement no 224.

La parole est à Mme Patricia Adam, pour le soutenir.

Mme Patricia Adam. Cet amendement propose d’ajouter, à la fin du deuxième alinéa, la phrase suivante : « La protection de l’enfance a également pour but de prévenir les difficultés que peuvent rencontrer les mineurs privés temporairement ou définitivement de la protection de leur famille et d’assurer leur prise en charge. »

Nous pensons particulièrement aux enfants qui arrivent seuls sur le sol français et nous nous interrogeons sur leur prise en charge. Aux termes de cette proposition, c’est aux départements qu’il reviendrait d’assurer leur protection, ainsi que les fonctions de service gardien, dans l’attente de toute autre décision.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. La commission a émis un avis favorable à cet amendement, en le reliant à celui d’Henriette Martinez. Il permet en effet de mentionner les difficultés que peuvent rencontrer temporairement ou définitivement les mineurs. Cette mention ferait toutefois l’objet d’un alinéa supplémentaire, qui viendrait après la phrase relative aux parents.

Par ailleurs, même si la rédaction proposée ne l’indique pas explicitement, l’amendement apporte également une première réponse de principe à la question des mineurs étrangers isolés. En effet, tous « les mineurs privés temporairement ou définitivement de la protection de leur famille » relèvent du domaine de la protection de l’enfance.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement no 224.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 188 et 49, pouvant être soumis à une discussion commune.

M. le président. La parole est à M. Claude Leteurtre, pour soutenir l’amendement no 188.

M. Claude Leteurtre. Tout d’abord, monsieur le président, je salue votre présence au perchoir, puisque c’est la première fois que j’interviens sous votre autorité bienveillante.

Cet amendement est le fruit d’une expérience personnelle. Pendant neuf ans, j’ai présidé la commission des affaires sociales d’un département et j’ai piloté un schéma de l’enfance et un projet de l’enfance, menant une vraie politique de protection, grâce à l’intervention de tous les partenaires.

Le but de l’amendement est de préciser que le conseil général, qui est le pilote reconnu, ne doit pas agir seul. Il faut formaliser les relations amicales, bienveillantes et entretenues dans un but d’efficacité avec tous les partenaires. Par cet amendement, je fais par conséquent acte de reconnaissance.

M. le président. La parole est à Mme Patricia Adam, pour soutenir l’amendement no 49.

Mme Patricia Adam. Je fais mienne l’argumentation de M. Leteurtre.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. La commission a émis un avis défavorable. L’amendement n’est pas totalement normatif, car l’énumération des personnes pouvant apporter leur concours à la politique de protection de l’enfance ne saurait être complète. Elle sera toujours en deçà de la réalité.

De plus, on pourrait citer les associations et les autres personnes morales de droit public ou privé à propos de toutes les politiques publiques. Il ne me semble donc pas utile d’alourdir le texte, bien que je comprenne fort bien le rôle des associations et de toutes les personnes morales de droit public et privé.

M. Claude Leteurtre. Il est parfois utile de rappeler des certaines évidences !

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Les associations pourraient figurer dans presque tous les articles du texte. D’ailleurs, elles le souhaiteraient certainement.

M. Claude Leteurtre. Il est justifié de les mentionner : on doit reconnaître les partenaires et contractualiser avec eux.

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Certes, mais cela vaut pour toutes les politiques publiques.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement dont la portée normative est très discutable. La manière dont ce projet de loi a été préparé, dans le cadre d’une concertation que, je crois, tout le monde reconnaît, prouve à quel point ce que cet amendement dispose est déjà une réalité dans la pratique. J’ajoute que si l’on se lance dans une énumération, celle-ci risque d’être longue.

Par conséquent, je dois vous indiquer que, pour des raisons juridiques, le Gouvernement est défavorable à l’amendement et réaffirmer en même temps la nécessité que les associations et les professionnels soient pleinement associés à la politique de protection de l’enfance.

M. le président. La parole est à Mme Patricia Adam.

Mme Patricia Adam. Je peux comprendre la position du Gouvernement mais, sur le principe, je rejoins M. Leteurtre. Il est en effet important de rappeler que, sans les associations, les conseils généraux ne pourraient pas exercer les responsabilités qui leur sont confiées.

Si vous en étiez d’accord, monsieur le ministre, une telle précision pourrait figurer dans un décret. C’est déjà le cas, par exemple, pour le conseil de famille ou d’autres conseils pour l’agrément des familles adoptives. Pour ce type de précision, le recours au décret est habituel.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement no 188.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement no 49.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements, nos 48 rectifié, 40 rectifié, 165 et 1, pouvant être soumis à une discussion commune. Les amendements nos 40 rectifié et 165 sont identiques.

La parole est à Mme Patricia Adam, pour soutenir l’amendement no 48 rectifié.

Mme Patricia Adam. À mes yeux, cet amendement est fondamental, parce qu’il précise, définit le texte de loi et lui donne un sens.

Il fournirait aux professionnels – juges ou travailleurs sociaux – un véritable guide des pratiques, en particulier pour ce qui est des intérêts supérieurs de l’enfant. Nous en avons parlé et nous les avons fait voter dans cet hémicycle. Mais il importe de les préciser. Les définitions sont parfois difficiles quand on touche à l’humain.

Nous avons eu bien des discussions entre nous sur tous les bancs. Il est essentiel de définir l’intérêt supérieur de l’enfant, ainsi que l’attachement et l’importance de cette relation pour déterminer des mesures de protection. De même, il est essentiel de définir l’importance d’un projet de vie élaboré pour chaque enfant avant toute décision le concernant. En effet, nous connaissons tous, dans nos fonctions de députés ou d’élus locaux, des enfants ou des familles pour lesquels les définitions que je souhaite introduire dans ce texte ne sont pas respecté.

On m’a rapporté récemment qu’avaient été réunis dans le bureau d’un juge pour enfants trois enfants d’une même fratrie, placés dans trois lieux différents, leur mère convalescente et une dizaine de travailleurs sociaux. Comment peut-on faire vivre ce type de situation à des enfants ?

Il est essentiel de donner une éthique à l’ensemble des professionnels, et c’est le rôle du Parlement. On pourra proposer tous les amendements possibles : si l’on ne définit pas l’intérêt supérieur de l’enfant, en insistant notamment sur l’importance de l’attachement parental, des situations intolérables de ce type perdureront.

M. le président. Pouvez-vous défendre maintenant l’amendement no 40 rectifié ?

Mme Patricia Adam. Cet amendement, plus succinct, va dans le même sens que le précédent – ce dernier ayant ma préférence – et vise à préciser que, conformément à la convention internationale des droits de l’enfant, l’intérêt de l’enfant, la prise en compte de ses besoins et le respect de ses droits doivent guider toute décision le concernant.

Nous savons en effet que la convention internationale des droits de l’enfant, que nous avons ratifiée, n’est respectée – et c’est inadmissible – ni par les tribunaux, en tout cas par certaines juridictions, ni par les professionnels. Il me paraît donc très important que cette convention soit mentionnée dans le texte de loi.

M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour soutenir l’amendement no 165.

Mme Muguette Jacquaint. Comme l’a dit Mme Adam, il est important que, dans ce texte relatif à la protection de l’enfance, nous fassions référence à la convention internationale des droits de l’enfant, que la France a adoptée en 1989 et qu’elle a ratifiée en 1990. Il ne suffit pas, monsieur le ministre, madame la rapporteure, de signer et de ratifier des conventions. Encore faut-il qu’elles soient respectées en droit français. Je rappelle que la convention internationale des droits de l’enfant vise à protéger celui-ci contre toutes les formes de violence, d’exploitation et d’abandon et qu’elle prévoit une aide supplémentaire, notamment pour les enfants de réfugiés, en matière de soins et de droit à la santé.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l’amendement no 1.

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. La commission a été sensible aux arguments développés par Mme Adam et Mme Jacquaint. Nous estimons en effet que l’intérêt de l’enfant, la prise en compte de ses besoins et le respect de ses droits doivent guider toutes les décisions qui le concernent et que ces notions doivent donc figurer dans l’alinéa 2 de l’article 1er. En revanche, au plan purement rédactionnel, on ne peut citer une convention internationale dans un texte de loi, même si celui-ci en prévoit l’application : cela ne se fait pas. On ne peut donc retenir la rédaction proposée par nos collègues, en dépit de la puissance symbolique de cette référence.

S’agissant de l’amendement no 48 rectifié, qui vise à définir l’intérêt supérieur de l’enfant, tous les membres de la mission d’information savent combien il nous a été difficile de dresser une liste exhaustive des grandes catégories que recouvre cette notion. Vous parlez, madame Adam, d’un « bon développement physique, intellectuel, affectif et social », mais n’oubliez-vous pas, par exemple, la dimension psychologique ? En mentionnant « l’assurance d’une relation d’attachement parentale permettant de se construire », ne tombe-t-on pas dans le tout parental ? Mieux vaut que nous en restions à la notion d’intérêt supérieur de l’enfant, qui sera définie au fil de la jurisprudence et des décisions.

La commission est donc défavorable aux amendements nos 48 rectifié, 40 rectifié et 165, qui me semblent satisfaits par l’amendement no 1.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements en discussion ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Même avis que la commission, dont nous partageons la préoccupation : n’enfermons pas dans une définition juridique ce que doit être l’intérêt de l’enfant, qui doit nous guider dans les actions de protection de l’enfance. Dans ce domaine, si nous voulons couvrir toutes les situations, il vaut bien mieux faire référence à des recommandations de bonnes pratiques professionnelles qui, elles, auront davantage de chance d’être exhaustives. Contrairement à Mme Adam, il me semble que ces recommandations, qui figureront dans les guides que nous sommes en train d’élaborer et qui permettent d’apporter à chaque situation des réponses en fonction de l’expérience des uns et des autres, sont plus opérationnelles qu’une définition juridique.

Le Gouvernement est donc défavorable aux amendements nos 48 rectifié, 40 rectifié et 165 et favorable à l’amendement no 1 de la commission.

M. le président. Puisque Mme Martinez était impatiente d’avoir la parole, je rappelle que, dans le cadre d’une discussion commune, s’expriment d’abord les auteurs des amendements, puis la commission et le Gouvernement.

Vous avez la parole, madame Martinez.

Mme Henriette Martinez. Merci de ce rappel, monsieur le président, mais vous me permettrez de penser que les quatre amendements ne sont pas identiques et que nous aurions pu les examiner indépendamment les uns des autres.

M. le président. Seuls deux des quatre amendements sont identiques, madame Martinez, mais ils font tous l’objet d’une discussion commune.

Mme Henriette Martinez. L’amendement de Mme Adam définit l’intérêt supérieur de l’enfant, alors que les autres portent sur des notions beaucoup plus vagues et font notamment référence à la convention internationale des droits de l’enfant. Si je respecte infiniment cette convention et le cadre qu’elle impose aux États parties, force est de constater qu’il s’agit uniquement d’un cadre. Pour avoir participé à plusieurs conférences internationales sur les droits de l’enfant, je sais que tous les États ne l’interprètent pas de la même manière. Ainsi, lorsque la convention internationale dispose que tout enfant a droit à avoir un nom, cela nous paraît évident, à nous, mais, en Afrique, seul un enfant sur trois est déclaré à l’état civil. Les termes de la convention ne recouvrent pas la même réalité selon les pays Il convient donc de préciser ce cadre par la loi.

C’est pourquoi il est indispensable de définir l’intérêt supérieur de l’enfant, ainsi que le propose Mme Adam. Oui, nous avons déjà eu ce débat dans le cadre de la mission d’information, madame la rapporteure, mais la définition qui englobe la satisfaction des besoins physiques, intellectuels, affectifs et sociaux de l’enfant me paraît suffisante. Au reste, elle a été adoptée par de nombreux États et elle donne satisfaction. Je ne prétends pas savoir quelle doit être cette définition, mais elle me semble d’autant plus nécessaire que, en écoutant nos collègues intervenir dans la discussion générale cet après-midi, j’ai constaté que chacun peut se faire une idée bien différente de l’intérêt de l’enfant.

Madame Adam, lorsque nous avons introduit ensemble, dans la loi Jacob du 2 janvier 2004, la notion d’intérêt supérieur de l’enfant, qui doit guider toutes les décisions qui le concernent, nous pensions faire œuvre utile. Or nous avons tous constaté que l’intérêt supérieur de l’enfant est interprété de façon différente selon les jugements. Il reste, même s’il est mentionné dans la loi, une notion extrêmement subjective et sujette à interprétation et, tant qu’on ne le définira pas, on ne placera pas l’enfant au cœur de la problématique de la protection de l’enfance. Nous ne cherchons pas à protéger un objet. Il ne suffit pas de dire que l’intérêt de l’enfant est supérieur : il faut préciser en quoi il consiste et ce dont un enfant a besoin pour se développer sur le plan physique, affectif, intellectuel et social. Il reviendra ensuite aux travailleurs sociaux et aux juges d’apprécier la situation de l’enfant en fonction de ces quatre notions.

Je souhaite donc vraiment que l’on introduise cette définition dans le projet de loi. J’émettrai néanmoins une petite réserve, madame Adam. Vous mentionnez en effet « l’assurance d’un contexte familial ». Je comprends votre intention, mais je ne souhaite pas que cela puisse être interprété comme l’assurance du maintien dans le contexte familial, car celui-ci – et tel est l’esprit de votre proposition – n’est pas forcément celui de la famille biologique. Par ailleurs, la notion de « relation d’attachement parentale » – et je salue votre volonté d’introduire l’attachement dans la loi – peut poser problème en cas de carences très graves. L’attachement peut ne pas être parental, mais concerner une personne de référence : celle qui élève l’enfant. Peut-être pourrions-nous proposer un sous-amendement afin de supprimer le mot « parentale », pour ne garder que la notion d’attachement. À cette réserve près, je suis tout à fait disposée à voter votre amendement, que je trouve excellent.

M. le président. La parole est à M. Georges Fenech.

M. Georges Fenech. Je suis très sensible aux arguments présentés par Mme Adam, Mme Jacquaint et Mme Martinez, et je reste sur ma faim lorsque Mme la rapporteure nous dit que cela ne se fait pas de se référer à une convention internationale dans la loi.

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Sur un plan purement rédactionnel !

M. Georges Fenech. J’entends bien, madame la rapporteure, mais je me demande ce qui interdirait d’introduire une telle référence dans la loi. On parle à juste titre de l’applicabilité d’une convention internationale dans notre droit interne. Quand on examine la jurisprudence, on constate que la Cour de cassation l’a intégrée dans le droit interne, mais je ne suis pas certain que le Conseil d’État ait fait de même. En tout état de cause, il convient de lever toute ambiguïté. Faire référence à la convention internationale sur les droits de l’enfant, que la France a ratifiée, dans un texte relatif à la protection de l’enfance, c’est lui donner une force particulière.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Je ne veux pas qu’il y ait de malentendu, monsieur Fenech. Nous devons inscrire le contenu de la convention internationale sur les droits de l’enfant, notamment la notion d’intérêt de l’enfant, dans notre loi.

Je voulais juste faire remarquer que sur le plan rédactionnel, il ne paraît pas opportun d’indiquer la provenance de cette définition de l’intérêt de l’enfant. Quand une convention internationale fixe des principes, on intègre ces principes dans notre droit sans citer la convention dont ils sont issus. En revanche, le principe directeur de cette convention internationale des droits de l’enfant, à savoir l’intérêt de l’enfant, me semble devoir être intégré à la loi, comme le souhaitent Mmes Jacquaint, Adam et Martinez.

Pour le reste, mon expérience juridictionnelle me conduit à penser qu’il est préférable de définir l’intérêt de l’enfant simplement comme « la prise en compte de ses besoins et le respect de ses droits », ce qui englobe les besoins et les droits de toutes sortes. Je crains en effet qu’à vouloir dresser une liste exhaustive de ces droits et besoins, on n’en oublie certains.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Il ne sert à rien de dire, dans une loi sur la protection de l’enfance, que la convention internationale sur les droits de l’enfant est applicable, pour la bonne et simple raison que vous avez déjà voté la loi autorisant la ratification de cette convention, qui est par conséquent pleinement en vigueur.

Le travail législatif consiste à poser des règles. En l’occurrence, ces règles existent déjà et il n’est pas nécessaire de les répéter à l’occasion de l’examen d’un nouveau texte. À l’aune de l’utilité juridique, l’adoption de ces amendements ne présente pas d’intérêt, puisqu’ils n’apportent rien par rapport au droit actuellement appliqué par les tribunaux judiciaires et administratifs, mais aussi par les responsables de l’aide sociale à l’enfance. Je partage l’avis de Mme la rapporteure : ce qui importe, dans l’intérêt même de l’enfant, c’est de prendre en considération l’ensemble de ses besoins sans les restreindre par une définition législative qui risquerait, par son aspect limitatif, de se retourner contre l’objectif recherché. Une formulation générale me paraît de meilleure méthode législative et plus conforme à ce que préconisent le Conseil constitutionnel et la présidence de votre assemblée.

M. le président. La parole est à Mme Patricia Adam.

Mme Patricia Adam. Pour répondre à Mme Martinez, je précise que la notion d’attachement parental ne fait pas forcément référence aux parents : il s’agit, comme vous l’aurez compris, d’un attachement « de type parental ». J’ignore quelle modification vous avez proposée, mais il me semble que l’on peut trouver un accord sur ce point.

Mme Henriette Martinez. J’ai proposé de supprimer le terme « parental » !

Mme Patricia Adam. Par ailleurs, quand Mme Pecresse nous dit qu’à vouloir préciser la définition de l’intérêt supérieur de l’enfant, on risque d’oublier certains de ses aspects, il me semble que l’absence de toute précision présente le même risque. Cette définition relève de la compétence du législateur…

Mme Henriette Martinez. Tout à fait !

Mme Patricia Adam. …et je ne pense pas qu’il soit bon de la laisser à la libre appréciation des milliers de travailleurs sociaux et juges. C’est notre responsabilité de législateur que d’élaborer cette définition, car c’est à nous de définir l’éthique. Alors que notre société est en perte de sens, de repères, de valeurs – ce que nous disons souvent ici même –, il me paraît essentiel de laisser aux politiques le soin de définir l’éthique, les droits et les valeurs de notre pays.

Je suis disposée à sous-amender cet amendement si c’est vraiment nécessaire, mais une fois que nous avons évoqué le bon développement physique, intellectuel, affectif et social de l’enfant, je ne vois franchement pas ce qui pourrait manquer à cette définition. Comme vous, Mme Pecresse, j’ai beaucoup lu sur ce thème et, dans le cadre de la mission d’information sur la famille, j’ai étudié ce que prévoient les législations d’autres pays. La définition proposée n’a pas été rédigée ex nihilo, mais fait référence à celles que l’on retrouve dans plusieurs pays proches du nôtre sur le plan juridique, notamment le Québec, la Belgique, les Pays-Bas ou encore la Grande-Bretagne. Je ne crois pas que dans ces pays, l’intérêt supérieur de l’enfant soit différent de ce qu’il est chez nous.

Par ailleurs, si la convention internationale des droits de l'enfant a été ratifiée, nous savons tous qu’elle n’est pas appliquée.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Le sera-t-elle davantage en la reproduisant dans toutes les lois ?

Mme Patricia Adam. Comme vous le savez, monsieur le ministre, la pédagogie est l’art de répéter.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Vous faites la loi, madame ! Pour les définitions, il suffit d’ouvrir un dictionnaire !

Mme Patricia Adam. Faire la loi, c’est faire acte de pédagogie, et il ne me paraît pas inutile de répéter certains points, surtout de cette importance.

Mme Marylise Lebranchu. Tout à fait !

M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. J’ai bien entendu les arguments qui ont été avancés par Mme la rapporteure et M. le ministre au sujet de la convention sur les droits de l’enfant. Celle-ci a effectivement été ratifiée. Mais combien de lois que nous avions votées n’ont jamais été appliquées ? On me rétorquera qu’il est inutile de faire figurer des dispositions dans une loi si celle-ci n’est pas appliquée. Il me semble tout de même que l’intégration par la France des dispositions de la convention dans une loi nationale conférerait à celles-ci une force particulière.

Pour ce qui est de la définition de l’intérêt supérieur de l’enfant, je partage tout à fait l’avis de Mme Adam et de Mme Martinez et je ne vois pas ce qu’il peut y avoir de gênant à faire figurer dans un texte de loi notre conception, en tant que législateurs, de l’intérêt supérieur de l’enfant et de la prise en compte de ses besoins. Les lois donnent souvent lieu à interprétation quand leur contenu n’est pas suffisamment clair. Ce n’est pas ce que nous recherchons, c’est pourquoi je soutiendrai la proposition de Mme Adam et de Mme Martinez.

M. le président. La parole est à Mme Henriette Martinez.

Mme Henriette Martinez. Monsieur le président, je m’étonne de ne pas voir figurer à l’article 1er l’amendement n°242 que j’ai déposé, visant à préciser l’intérêt de l’enfant.

M. le président. Je vous répondrai dans un instant sur ce point, madame Martinez. Veuillez poursuivre, je vous prie.

Mme Henriette Martinez. En ce qui concerne les besoins de l’enfant, le fait de ne pas les définir donnera forcément lieu à des interprétations de la part des juges et des travailleurs sociaux, en fonction de leurs idéologies, de leurs expériences personnelles, de leur subjectivité – au demeurant légitime. Ainsi, alors que les besoins de l’enfant consisteront, selon les uns, à rester dans une famille en dépit de carences graves, selon les autres, il sera préférable de le retirer de cette famille. Les besoins de l’enfant pourront donc, en toute bonne foi et en toute conscience, être appréciés de deux façons diamétralement opposées. Il me semble par conséquent qu’il convient de définir ces besoins, ce qui permet en outre de réfléchir à la satisfaction de ceux-ci, donc d’engager une évaluation de l’état de l’enfant – non seulement sur le plan physique, mais également sur le plan psychique, intellectuel et relationnel. Ces quatre critères permettront une véritable évaluation de l’enfant par les personnes chargées de son suivi, afin de vérifier s’il se développe normalement. Ne pas le faire reviendrait à refuser une approche scientifique de la protection de l’enfance, alors que les pédopsychiatres et les magistrats qui travaillent sur ce thème ont besoin, quelle que soit leur compétence, de référentiels pour se guider.

Je ne comprends pas en quoi il serait gênant de reprendre une définition déjà utilisée par de nombreux autres pays. Si nous ne sommes pas, nous aussi, capables de définir l’intérêt de l’enfant, alors ce texte n’aura aucun sens.

M. le président. La parole est à M. Lilian Zanchi.

M. Lilian Zanchi. Monsieur le ministre, si nous ne pouvons qu’être d’accord avec vous quand vous affirmez qu’il nous appartient de faire la loi, nous ne saurions vous suivre quand vous ajoutez qu’il suffit de se référer au dictionnaire pour connaître la définition de l’intérêt de l’enfant. Il ne paraît pas concevable de renvoyer les juges et les travailleurs sociaux au dictionnaire pour pouvoir disposer de cette définition – où elle ne se trouve d’ailleurs probablement pas.

Vous-même et Mme la rapporteure avez, tout à l’heure, souhaité définir la protection de l’enfance afin de préciser le champ d’intervention de la loi. Pourquoi en irait-il autrement quand il s’agit de l’intérêt de l’enfant ?

Mme Muguette Jacquaint. Tout à fait !

M. Lilian Zanchi. Dans un autre domaine, l’imprécision de la loi reconnaissant le génocide arménien a amené la justice – en l’occurrence la dix-septième chambre correctionnelle du tribunal de grande instance de Paris – à refuser de condamner des propos négationnistes relatifs au génocide arménien. Le groupe socialiste a dû déposer une proposition de loi visant à préciser les choses.

Une loi insuffisamment précise ou trop restrictive a pour conséquence la rédaction de circulaires administratives, ce qui revient à priver le Parlement de son pouvoir d’expression.

Je conclurai par deux remarques, monsieur le ministre. Premièrement, si vous considérez qu’il n’est pas nécessaire de faire référence à une convention internationale déjà ratifiée, pouvez-vous m’expliquer pourquoi le président de la République souhaite qu’un projet de loi prévoyant l’abolition de la peine de mort soit approuvé par le Congrès du Parlement, alors même qu’une loi a déjà été votée ? À quoi cela sert-il ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. À interdire le rétablissement de la peine de mort !

M. Lilian Zanchi. Deuxièmement, vous avez affirmé souhaiter que nous aboutissions à un texte pratiquement conforme à celui du Sénat pour qu’il puisse être adopté avant la fin de la session parlementaire. Il est, dès lors, inutile de chercher une autre justification aux avis défavorables que vous donnez à tous nos amendements !

M. le président. Monsieur Zanchi, j’attire votre attention sur le fait que la décision d’incorporer une disposition législative à la Constitution donne à cette disposition une signification particulière.

Madame Martinez, vous avez en effet déposé un amendement qui a le même objet que ceux dont nous discutons. Il s’applique cependant, non pas au code de l’action sociale et des familles, mais au code civil. C’est la raison pour laquelle il viendra en discussion à l’article 6.

La parole est à M. Claude Leteurtre.

M. Claude Leteurtre. L’intervention de M. le ministre m’a quelque peu surpris. Il est toujours utile, en effet, de rappeler les choses. Le Sénat a choisi de définir l’intérêt de l’enfant a contrario, en mettant en évidence l’insuffisance et la carence éducatives – d’ailleurs non précisées – des parents. Or cela me semble gênant. Dans ce cadre-là, il me paraît absolument nécessaire de définir l’intérêt supérieur de l’enfant. C’est le sens même de ce texte. Peu importe qu’il y ait risque de redondance. Comme l’ont souligné Mme Adam et Mme Martinez, réaffirmer ce principe revient à donner un signe supplémentaire au juge et aux travailleurs sociaux, et c’est une bonne chose.

Madame la rapporteure, définir l’intérêt supérieur de l’enfant en prévoyant qu’il doit permettre un bon développement physique, intellectuel, psychique et social me paraît par ailleurs suffisamment large tout en étant très cadré. Je ne vois donc pas où est la difficulté.

Monsieur le ministre, vous nous avez expliqué qu’il fallait être normatif pour bien définir l’intérêt de l’enfant. Sans entrer totalement dans ce cadre, que j’ai personnellement du mal à adopter, pourquoi cependant ne pas accepter cet amendement qui constitue un élément de clarification évident ?

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Entendant sur tous ces bancs monter une demande de précision de l’intérêt de l’enfant sous l’angle des besoins de l’enfant, je propose, à partir de l’amendement de Mme Martinez, une rédaction qui pourrait faire consensus. Elle répondrait notamment aux observations de M. Leteurtre : « L’intérêt de l’enfant, la prise en compte de ses besoins fondamentaux, physiques intellectuels, sociaux et affectifs, ainsi que le respect de ses droits doivent guider toutes décisions le concernant. » C’est, me semble-t-il, une bonne synthèse.

Madame Adam, la référence à l’attachement parental peut poser un problème. Henriette Martinez, pour sa part, a proposé une rédaction radicalement inverse de la vôtre puisqu’elle fait allusion au besoin de sécurité émotionnelle et à la possibilité de s’attacher de manière stable à un adulte attentif. Il faut éviter d’entrer dans un débat entre parents et famille d’accueil. Mieux vaut s’en ternir aux besoins fondamentaux, physiques, intellectuels, sociaux et affectifs. Je proposerai de compléter mon amendement n° 1 en ce sens.

Monsieur le président, mesdames, messieurs, comme on dit dans les jeux télévisés, c’est mon dernier mot (Sourires), ou, en tout cas, le dernier mot de la commission.

M. le président. Je vais donner la parole à M. le ministre, puis nous suspendrons la séance pour que l’amendement n° 1 rectifié puisse être définitivement rédigé et distribué. Vous avez la parole, monsieur le ministre.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. L’ouverture proposée par Mme la rapporteure me semble intéressante. Je le confirme, l’amendement défendu par Mme Adam me gêne. En effet, je ne vois pas trop ce que recouvre « l’assurance de la protection de la sécurité personnelle et affective ». De même, je ne comprends pas bien que ce que signifie « l’assurance d’une relation d’attachement parentale permettant de se construire ». Si l’objectif est de faciliter l’intervention de ceux qui seront au contact des familles, je crains fort que le résultat recherché ne soit pas atteint avec de telles formules. C’est la raison pour laquelle je confirme mon opposition à ces amendements, qui me semblent en dire trop ou pas assez.

Pour ma part, j’ai le sentiment qu’au contact des familles et des enfants, les professionnels, qui seront notamment aidés par les guides de bonne pratique, auront une capacité d’appréciation. À partir du moment où on entre dans des considérations d’ordre professionnel, et non pas juridique ou législatif, on court, je le répète, le risque d’en dire trop ou trop peu et, en tout cas, d’utiliser des formules, qui loin de clarifier les choses, seront sujettes à controverse.

Cela étant, j’admets tout à fait, et comme le fait d’ailleurs le texte à l’article 6, qu’il faille évoquer les dimensions affectives, physiques, intellectuelles et sociales de l’enfant car il s’agit là de termes suffisamment généraux. En revanche, accumuler des critères apparemment précis, mais en réalité très flous, ne favorisera pas la prise en charge des enfants en difficulté et ne permettra pas d’atteindre l’intérêt supérieur de l’enfant.

Voilà pourquoi je confirme l’avis que j’ai déjà émis et j’approuve l’amendement n° 1 rectifié par Mme la rapporteure. Le débat qui a eu lieu aura été très utile pour mieux comprendre les choses.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-deux heures quarante, est reprise à vingt-deux heures cinquante.)

M. le président. La séance est reprise.

Nous examinions avant la suspension quatre amendements soumis à une discussion commune, nos 48 rectifié, 40 rectifié, 165 et 1.

Je vous propose d’y joindre l’amendement n° 242 deuxième rectification de Mme Martinez, initialement déposé sur l’article 6.

Mme la rapporteure ayant proposé une nouvelle rédaction de l’amendement n° 1 de la commission, je vais maintenant demander aux auteurs des amendements nos 48 rectifié, 40 rectifié, 165 et 242 deuxième rectification s’ils souhaitent maintenir leur amendement ou le retirer, au bénéfice de l’amendement n° 1 rectifié de la commission.

Madame Adam, maintenez-vous l’amendement n° 48 rectifié ?

Mme Patricia Adam. Je le retire et je souhaite cosigner l’amendement n° 1 rectifié.

M. le président. Il en est de même pour l’amendement n° 40 rectifié ?

Mme Patricia Adam. En effet !

M. le président. Les amendements nos 48 rectifié et 40 rectifié sont retirés.

Madame Jacquaint, souhaitez-vous maintenir l’amendement n° 165 ?

Mme Muguette Jacquaint. Compte tenu des réponses qui nous ont été faites et de la nouvelle rédaction de l’amendement de Mme la rapporteure, je retire mon amendement pour cosigner le sien.

M. le président. L’amendement n° 165 est retiré.

La parole est à Mme Henriette Martinez, pour soutenir l’amendement n° 242 deuxième rectification.

Mme Henriette Martinez. Je vous remercie, monsieur le président, d’avoir bien voulu déplacer cet amendement, car il a le même objet que ceux que nous examinons.

Je remercie Mme la rapporteure d’avoir intégré dans le nouvel amendement les besoins fondamentaux, physiques, intellectuels, sociaux et affectifs de l’enfant. Je regrette cependant qu’elle n’ait pas conservé la mention des besoins de sécurité émotionnelle et de la possibilité de s’attacher de manière stable à un adulte attentif. J’aurais aimé que l’on rétablisse la notion de l’attachement contenue dans l’amendement de Mme Adam, car l’attachement du petit enfant est un autre élément très important de la protection de l’enfance : éviter de ballotter un petit enfant d’un foyer à l’autre est fondamental pour sa stabilité affective. Je regrette que cette notion ne figure pas dans cet article, et je souhaite maintenir mon amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1 rectifié.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l’amendement n° 242 deuxième rectification tombe.

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 41 rectifié et 205.

La parole est à Mme Patricia Adam, pour soutenir l’amendement n° 41 rectifié.

Mme Patricia Adam. C’est un amendement important qui porte sur l’organisation des services du conseil général, en particulier ceux de la PMI. Je vous proposerai d’ailleurs un amendement n° 42 qui a le même objectif.

M. le président. Je vous invite à le défendre dès maintenant.

Mme Patricia Adam. Merci, monsieur le président. Il s’agit de modifier l’article L. 2112-1 du code de la santé publique, car la répartition des responsabilités de la PMI peut paraître ambiguë. En effet, alors que le premier alinéa définit la PMI comme un service non personnalisé du département et place les compétences qu’elle exerce sous l’autorité du président du conseil général, comme c’est le cas pour tous les autres services, son deuxième alinéa mentionne que ce service est placé sous la responsabilité d’un médecin.

Cette ambiguïté n’a pas manqué de donner lieu à contestation dans des différends qui ont opposé des médecins de PMI à des présidents de conseil général quant à l’organisation et la territorialisation de leurs services, en particulier de la PMI. La jurisprudence administrative saisie d’un litige à l’autorité responsable des services de la PMI – tribunal administratif de Rennes, le 9 février 2000, confirmé le 4 décembre 2003 – en a attribué la responsabilité au médecin-chef. Suite à la requête de plusieurs médecins, un arrêté du président du conseil général mentionnant que les fonctionnaires territoriaux affectés à la PMI demeuraient sous l’autorité du conseil général a été annulé. Les requérants contestaient le bien-fondé de cet arrêté, l’estimant contraire à la législation en vigueur selon laquelle les personnels du conseil général affectés à la PMI devaient être placés sous l’autorité du médecin-chef de ce service et non sous celle du président du conseil général. C’est en quelque sorte un État dans l’État…

Je ne conteste pas les décisions qui ont été prises par le tribunal – elles sont conformes aux textes existants – mais je propose par ces amendements d’éviter à l’avenir ce type d’ambiguïté en plaçant les services de la PMI sous la responsabilité et l’autorité du président du conseil général.

M. le président. La parole est à M. Claude Leteurtre, pour soutenir l’amendement n° 205.

M. Claude Leteurtre. Comme Mme Adam, je pense qu’il est nécessaire de clarifier la situation actuelle. C’est pourquoi il faut mentionner « sous l’autorité et la responsabilité » du président du conseil général. Je suis moi-même médecin et je suis très jaloux de mon indépendance, mais, en l’occurrence, je ne vois pas pourquoi le médecin-chef d’une PMI n’est pas clairement sous l’autorité administrative du président du conseil général.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Au mois de juillet, la commission avait repoussé ces deux amendements, mais faute d’avoir pu procéder aux consultations nécessaires des médecins de PMI et des présidents de conseil général, je me suis, à titre personnel, ralliée à cette proposition.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 41 rectifié et 205.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président. Je constate que le vote est acquis à l’unanimité.

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 42 et 206.

L’amendement n° 42 a déjà été défendu.

Monsieur Leteurtre, l’amendement n° 206 est-il soutenu ?

M. Claude Leteurtre. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 42 et 206.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président. Je constate que le vote est acquis à l’unanimité.

Je suis saisi d’un amendement rédactionnel, n° 270, de la commission.

Le Gouvernement y est favorable.

Je le mets aux voix.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 169.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour le soutenir.

Mme Muguette Jacquaint. Cet amendement vise à préciser l’une des compétences du service de protection maternelle et infantile. En effet, celui-ci devrait pouvoir organiser des actions de promotion de la santé familiale et infantile, dans une approche globale de la santé et du bien-être de l’enfant.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Cet amendement a été repoussé par la commission. Il serait certes souhaitable que la PMI puisse organiser des actions de promotion de la santé, mais il vaut mieux ne pas multiplier ses nouvelles attributions et insister sur la mission que lui confère ce texte, qui est une mission de prévention.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Les textes actuels satisfont déjà à cet amendement. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 169.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 2 rectifié.

La parole est à Mme la rapporteure, pour le soutenir.

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Il s’agit de préciser l’article amendé par le Sénat. Les services de la protection maternelle et infantile ne réaliseront pas nécessairement eux-mêmes tous les examens médicaux et les entretiens psychosociaux prévus au quatrième mois de grossesse, mais interviendront si des difficultés particulières ont été détectées dans la situation médicosociale de la future mère. Un travail de réseau devra être mis en place entre les maternités, les médecins libéraux, les services de la PMI pour organiser ce suivi des femmes enceintes, comme le prévoit le plan « périnatalité » 2005-2007.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 2 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 3 et 43.

La parole est à Mme Patricia Adam.

Mme Patricia Adam. Défendus.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Acceptés par la commission.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 3 et 43.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 44 et 167.

La parole est à Mme Patricia Adam, pour soutenir l’amendement n° 44.

Mme Patricia Adam. Cet amendement vise à insérer dans l’alinéa 10 de l’article, après les mots « pour les pères », les mots : « ainsi que pour toute autre personne liée à la mère de l’enfant par un pacte civil de solidarité ou vivant avec celle-ci en concubinage depuis deux ans dont la preuve peut être apportée par tout moyen ».

En effet, la préparation, les questionnements autour des capacités éducatives concernent autant le père que la mère, ou la personne qui vit avec la mère et participe dans les faits à l’éducation et l’entretien de l’enfant.

M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour soutenir l’amendement n° 167.

Mme Muguette Jacquaint. Nous l’avons tous souligné, la famille s’est profondément modifiée. Une famille sur cinq échappe désormais au schéma traditionnel du couple marié élevant des enfants. On peut le regretter, mais la situation est ainsi.

Nous devons comprendre que la pluriparentalité est une réalité indiscutable de l’évolution complexe de la famille contemporaine. Les questionnements autour des capacités éducatives doivent donc concerner autant le père que la mère, ou la personne qui vit avec la mère et participe à l’éducation et aux soins apportés à l’enfant.

Tel est le sens de notre amendement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Ces amendements ont été repoussés par la commission parce qu’ils sont satisfaits par l’amendement n° 3 précédemment adopté, qui mentionne les parents. Le statut juridique des parents, que ce soit le pacs, le concubinage ou autre, importe finalement peu.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 44 et 167.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 207 et 262.

La parole est à M. Claude Leteurtre, pour défendre l’amendement n° 207.

M. Claude Leteurtre. Il s’agit de réaffirmer le rôle du président du conseil général et de le conforter dans sa mission de protection de l’enfance. Cet amendement vise donc à lui attribuer nominativement l’organisation des services de la PMI, placés sous sa responsabilité.

M. le président. La parole est à Mme Patricia Adam, pour soutenir l’amendement n° 262.

Mme Patricia Adam. Il est défendu.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. La commission a adopté ces amendements par cohérence avec l’amendement précédent.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 207 et 262.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 170.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour le soutenir.

Mme Muguette Jacquaint. La disposition de l’alinéa 13 de l’article 1er devait initialement être intégrée au plan de prévention de la délinquance qui prône notamment une détection très précoce des « troubles comportementaux » chez l’enfant, censés annoncer un parcours vers la délinquance. Elle s’appuie sur une corrélation abusive faite par l’INSERM entre les difficultés psychiques de l’enfant et une évolution vers la délinquance.

De nombreuses associations se sont élevées contre les risques de dérive et d’amalgame des pratiques de soins, notamment psychiques, vers des fins normatives et de contrôle social. Avec elles, nous refusons la médicalisation ou la psychiatrisation de toute manifestation du mal-être social. Nous voulons préserver dans les pratiques professionnelles et sociales la pluralité des approches dans les domaines médical, psychologique, social et éducatif vis-à-vis des difficultés des enfants, en prenant en compte la singularité de chacun au sein de son environnement.

De surcroît, lors d’un colloque de l’INSERM le 14 novembre 2006, devant le ministre de la santé et le directeur de cet institut, c’est à une contre-expertise collective sur la question du dépistage des troubles de conduite de l’enfant que se sont livrés tous les grands noms de la pédopsychiatrie française, ainsi que des pédiatres, des psychologues, des sociologiques et des épidémiologistes.

Il convient donc de supprimer cet alinéa car il est inefficace et potentiellement dangereux pour les libertés individuelles.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Je souhaiterais que cet amendement soit examiné avec mon amendement suivant, n° 233, et l’amendement n° 4 de la commission, ces trois amendements s’inscrivant dans une même discussion.

M. le président. Madame la rapporteure, si l’amendement n° 170 était adopté, il ferait tomber les amendements nos 233, 4 et 5.

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Je réponds donc sur l’amendement n° 170.

Il a été repoussé par la commission. Il faut vraiment en finir avec ce soupçon à l’endroit du Gouvernement qui souhaiterait organiser une détection précoce des troubles comportementaux chez l’enfant. Ce n’est pas du tout l’objet de l’article qui vise, au contraire, à définir les missions de la PMI en mentionnant les « actions de prévention et de dépistage précoce des troubles » – non pas des comportements – « d’ordre physique, psychologique, sensoriel et de l’apprentissage. » Il s’agit purement et simplement d’une disposition de prévention et de suivi sanitaire du jeune enfant.

L’amendement n° 4 de la commission qui vient après propose de supprimer le mot « précoce » de l’alinéa 13 – la question du dépistage précoce ayant fait couler beaucoup d’encre –, afin que le projet indique simplement que la PMI fait de la prévention et du dépistage des troubles.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l’amendement n° 170 ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Même avis que la commission.

M. le président. Retirez-vous votre amendement, madame Jacquaint ?

Mme Muguette Jacquaint. J’avais souligné notre inquiétude lors de la discussion générale, car certaines déclarations nous faisaient craindre un amalgame sur ce sujet.

Cela étant dit, compte tenu des précisions et des garanties apportées par Mme la rapporteure, je retire mon amendement.

M. le président. L’amendement n° 170 est retiré.

Je suis saisi d'un amendement n° 233.

La parole est à M. Lilian Zanchi, pour le soutenir. Je vous propose de donner également votre opinion sur l’amendement n° 4 de Mme la rapporteure, monsieur Zanchi.

M. Lilian Zanchi. Ces amendements précisent en effet les choses.

Madame la rapporteure, admettez que nous étions fondés à avoir des doutes sur le but de ce projet, car des débats, des rapports parlementaires, des rapports de l’INSERM et autres ont suscité chez les professionnels un trouble, c’est le cas de le dire.

Mme Muguette Jacquaint. Tout à fait !

M. Lilian Zanchi. Nous devons lever ce trouble en étant précis dans la loi, afin de ne pas laisser libre cours à l’interprétation. Pour ce faire, il est en effet nécessaire de retirer le mot « précoce » du texte.

Madame la rapporteure, nous retirons l’amendement n° 233 pour nous rallier à votre amendement n° 4.

Mme Muguette Jacquaint. Le groupe des députés communistes et républicains également !

M. le président. L’amendement n° 233 est retiré.

Quel est l'avis du Gouvernement sur l’amendement n° 4 qui a déjà été présenté par Mme la rapporteure ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 4.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je constate que le vote est acquis à l’unanimité.

Je suis saisi d'un amendement n° 5.

La parole est à Mme la rapporteure, pour le soutenir.

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Il s’agit, après les mots « structures spécialisées », de supprimer la fin de la deuxième phrase de l’alinéa 13 de l’article 1er.

Ainsi, l’alinéa énoncerait que le service de la PMI « oriente l’enfant vers les professionnels de santé et les structures spécialisées ». La mention « notamment les centres d’action médico-sociale précoce mentionnés à l’article L. 2132-4 » doit être supprimée car, malgré l’efficacité des CAMS, il ne nous paraît pas justifié qu’ils soient les seuls cités dans ce texte car d’autres structures spécialisées existent.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 5.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 168.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour le soutenir.

Mme Muguette Jacquaint. Cet amendement précise que l’intitulé du chapitre II du titre premier du livre premier de la deuxième partie du code de la santé publique est ainsi rédigé « Service de la prévention et de la protection de l’enfance ».

Bien sûr, notre volonté de protéger les enfants ne saurait être séparée de celle visant à prévenir les différentes sources et formes de danger qui affectent leur sécurité physique, psychique, éducative et sociale. Cette protection et cette prévention sont l’affaire de tous, décideurs politiques, acteurs professionnels et associatifs, mais aussi parents et enfants eux-mêmes dont les droits à la sécurité doivent trouver, dans les droits à l’expression et à la participation, les moyens de leur renforcement.

Aujourd’hui, en France, une telle conception coopérative et solidaire de la protection de l’enfance comme bien commun et comme promesse d’avenir reste difficile à mettre en œuvre. L’argument avancé pour rejeter notre proposition de rédaction est qu’il faudrait modifier tous les codes qui évoquent l’aide sociale à l’enfance. Or cet argument ne me paraît pas recevable quand il s’agit de définir les orientations de la protection de l’enfance pour les prochaines années.

Tel est le sens de notre amendement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Cet amendement a été repoussé par la commission.

Il aurait sans doute été judicieux d’appeler, dès le départ, la protection maternelle et infantile « service de la prévention et de la protection de l’enfance ». Cependant, changez l’appellation de la PMI, qui est aujourd’hui bien connue des familles et particulièrement de celles qui sont en situation de précarité, ne nous semble pas souhaitable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Même avis.

M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. Je tiens à dire que nous avons tous, y compris le ministre et vous-même, madame la rapporteure, beaucoup insisté sur l’importance de la prévention dans ce texte. Je veux bien qu’on me réponde que tout le monde est habitué à l’appellation « PMI », mais, pour ma part, je me sens capable d’expliquer à nos concitoyens l’importance que prend aujourd’hui la prévention dans le domaine de la protection de l’enfance et je ne vois donc pas en quoi ils seraient gênés de voir la PMI devenir « service de la prévention et de la protection de l’enfance ».

Il me semble, que, jusque-là, sur tous les bancs de l’Assemblée, on avait la volonté que le texte réponde aux besoins actuels en matière de protection. Et c’est pourquoi je suis surprise qu’on refuse d’ajouter le mot « prévention » dans l’intitulé du chapitre II.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement no 168.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement no 6 rectifié.

La parole est à Mme la rapporteure, pour le soutenir.

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. À ma grande satisfaction, cet amendement très important a été cosigné par tous les groupes de cette assemblée − UMP, UDF, socialiste et communiste. Il vise à renforcer la prévention sanitaire sous le contrôle de la médecine scolaire. Il est proposé d’organiser régulièrement des visites médicales obligatoires pour améliorer le suivi médical des élèves au cours de la scolarité, en accordant une attention particulière au diagnostic de certaines difficultés, comme les troubles du langage, de l’apprentissage, les souffrances psychologiques et les conduites à risques pour les adolescents.

Une attention particulière sera également consacrée par l’ensemble de la communauté éducative aux réponses qui doivent être trouvées lorsque des problèmes de santé sont détectés.

La généralisation de ces visites obligatoires se fera progressivement. L’objectif affiché est que tous les enfants de la classe d’âge des douze et quinze ans puissent bénéficier de ces examens obligatoires dans un délai de six ans. Le passage du curatif au préventif répond vraiment à une nécessité de santé publique, les adolescents et les enfants de certaines familles défavorisées se trouvant face à un véritable vide en matière sanitaire.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Favorable.

M. le président. La parole est à M. Alain Néri.

M. Alain Néri. Je constate avec un vif plaisir que tous les groupes ont cosigné cet amendement qui constitue une remarquable avancée dans le domaine de la prévention, tout au long de la scolarité des enfants. Permettez-moi cependant d’espérer qu’il ne sera pas un simple vœu pieux. Dans leur grande sagesse, nos collègues ont prévu un délai de six ans pour sa mise en œuvre, car, à l’évidence, il nécessitera un important engagement financier. Dans la mesure où tous les groupes sont favorables à cet amendement, j’espère que, dès l’automne prochain, quels que soient ceux qui seront aux responsabilités, le budget comportera une action concrète pour engager ce processus.

M. le président. La parole est à M. Claude Leteurtre.

M. Claude Leteurtre. Comment ne pas s’associer à cet amendement que tout le monde a cosigné ? Nous en sommes aux bonnes intentions, mais, je l’espère, pas aux vœux pieux. Quand on connaît l’état dans lequel se trouve la médecine scolaire, quand on sait que seuls les trois quarts des enfants bénéficient de la simple visite de la sixième année, on voit mal comment on va pouvoir passer à la vitesse supérieure. Tout le monde approuve les déclarations d’intention, mais comment les mettre en œuvre concrètement ?

Monsieur le ministre, si l’on voulait vraiment se donner les moyens de la prévention, une mesure s’imposerait : faire dépendre la médecine scolaire des conseils généraux. Pour que le système fonctionne, il faut dégager des blocs de compétences. On se gargarise de bons mots et de bonnes intentions, mais on ne dit pas ce qu’on va faire et qui va payer. On compte aujourd’hui 2 650 médecins scolaires en équivalents temps plein, mais, dans certains secteurs, les enfants n’ont droit à aucune visite médicale. On va se faire plaisir en proclamant qu’il en faut une tous les trois ans, mais pourquoi ne pas commencer par l’essentiel, par garantir cette visite avant l’âge de six ou sept ans, moment où la personnalité est définitivement structurée ? En France, la médecine scolaire est un parent pauvre, mais, globalement, les conseils généraux assument bien leur mission − et c’est tout à leur honneur. Si on ne met pas la médecine scolaire au rang de leurs compétences, je ne vois pas comment la mesure proposée par cet amendement − que, bien sûr, je voterai − pourra être appliquée.

M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. Permettez-moi de revenir un instant sur mon amendement précédent, qui proposait d’inscrire avec plus de force dans le texte le mot « prévention ». Qui ne voterait pas l’amendement no 6 rectifié, que nous examinons à présent et qui va dans le sens de l’intérêt de l’enfant et de sa protection ? Mais, mes collègues ont raison, si les intentions sont bonnes, on peut se demander quels moyens seront ensuite donnés pour les appliquer. C’est pourquoi j’insistais tant sur la prévention. On peut, tout au long de ce texte, parler de prévention, mais si, dans le même temps, l’État ne donne pas de moyens à la médecine scolaire qui est dans un état…

Plusieurs députés du groupe socialiste. Pitoyable !

Mme Muguette Jacquaint. …pitoyable, cet amendement risque de n’être qu’une bonne intention non suivie d’effet. Je n’entendais pas participer à l’inflation langagière en ajoutant dans le texte une mention de la prévention, car, à mes yeux, elle doit en être une composante essentielle. On aura beau répéter : « Prévention ! Prévention ! Prévention ! », si on ne se donne pas les moyens d’y parvenir, on aura toujours autant de mal à apaiser l’inquiétude qui s’exprime sur tous les bancs. Pour protéger les enfants, il faut des actes.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Dupont.

M. Jean-Pierre Dupont. Monsieur le président, je voudrais simplement rappeler un point d’histoire. Dans l’acte II de la décentralisation, quand il s’était agi de savoir ce qu’il adviendrait des assistantes sociales et des médecins scolaires, les conseils généraux avaient souhaité les intégrer dans leurs services, au même titre que les TOS. Cela ne leur a pas été accordé et ils se trouvent aujourd’hui dans une situation paradoxale : ils assurent le matériel dans les collèges et dans tous les centres d’enseignement, mais n’ont pas la compétence en matière de service social intégré au collège. Il eût été bon que cela figurât dans l’acte II de la décentralisation : le problème du financement ne se serait pas posé, puisqu’un transfert des moyens aurait automatiquement été prévu. Certes, les moyens que mettait l’État n’étaient pas suffisants, mais ils auraient pu faire l’objet d’une réévaluation. Dans la situation actuelle, il est devenu très difficile de dire que les conseils généraux doivent prendre en charge ces services, car on n’a pas souhaité le faire dans l’acte II de la décentralisation.

M. le président. Chers collègues, je précise que, au dernier alinéa de l’amendement no 6 rectifié, il conviendrait de substituer aux mots « publication de la présente loi » les mots « publication de la loi no          du                  , réformant la protection de l’enfance ». Dans la mesure où il s’agit d’un texte codifié, on ne peut en effet maintenir cette mention.

Je mets aux voix l’amendement no 6 rectifié, ainsi corrigé.

(L’amendement, ainsi corrigé, est adopté.)

M. le président. En conséquence, les amendements nos 145, 239, 45 rectifié et 146 tombent.

M. Georges Fenech. Êtes-vous sûr que l’amendement no 145 tombe, monsieur le président ?

M. le président. C’est en tout cas ce qu’indique le service de la séance, qui, en général, est très pointu sur le sujet. Les alinéas 15 à 18 ont été rédigés par l’amendement no 6 rectifié. Or l’amendement no 146 proposait d’insérer une phrase après l’alinéa 18 qui a été supprimé. Il aurait fallu que vous sous-amendiez l’amendement qui vient d’être adopté.

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Ne puis-je reprendre l’amendement de M. Fenech ?

M. le président. Sans doute aurait-il été préférable que le Gouvernement dépose un amendement reprenant le texte de celui de M. Fenech, puisqu’il en a à tout moment la faculté. Mais cela n’est pas possible. Je propose donc que le Gouvernement demande une seconde délibération, à la fin de l’examen du texte : ainsi, nous pourrons intégrer la rédaction de M. Fenech.

Je suis saisi d’un amendement no 47.

La parole est à Mme Patricia Adam, pour le soutenir.

Mme Patricia Adam. Cet amendement vise à donner un fondement législatif à la notion de protection de l’enfance dans le respect de la convention de New York de 1979 relative aux droits de l’enfant. Il clarifie le rôle de la PMI en matière de prévention dans sa mission de protection de l’enfance.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Elle a repoussé cet amendement, pour les raisons qui avaient conduit, tout à l’heure, au rejet de l’amendement de Mme Jacquaint.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement no 47.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 1er, modifié par les amendements adoptés.

(L’article 1er, ainsi modifié, est adopté.)

Après l’article 1er

M. le président. Je suis saisi d’un amendement no 285, tendant à insérer un article additionnel après l’article 1er.

La parole est à Mme la rapporteure, pour le soutenir.

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement no 285.

(L’amendement est adopté.)

Article 2

M. le président. Sur l’article 2, je suis saisi d’un amendement no 7.

La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir cet amendement.

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement no 7.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 8 et 50.

La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l’amendement no 8.

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Il s’agit d’un problème que j’ai évoqué dans mon rapport. Le service de l’aide sociale à l’enfance doit être en mesure d’accueillir des jeunes majeurs, même s’ils n’ont pas été suivis par ce service au cours de leur minorité.

Mme Muguette Jacquaint. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Patricia Adam, pour soutenir l’amendement no 50.

Mme Patricia Adam. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 8 et 50.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement no 51.

La parole est à Mme Patricia Adam, pour le défendre.

Mme Patricia Adam. Cet amendement revient sur la notion d’« informations préoccupantes » dont nos discussions ont montré tout le flou qui pouvait l’entourer. Faute de définition satisfaisante, nous proposons de la remplacer par celle d’« informations relatives aux mineurs en danger ou présentant un risque de danger ». Cette précision nous semble importante, car elle devrait éviter d’être soumis en permanence à interprétation.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Cet amendement a été rejeté par la commission, car le terme « préoccupant » est celui qui est ressorti des concertations qui ont été menées sur le terrain comme étant le plus clair et le plus pertinent.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Même avis !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement no 51.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 54 et 244, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à Mme Patricia Adam, pour soutenir l’amendement no 54.

Mme Patricia Adam. L’amendement 54, qui se justifie par son texte même, est en cohérence avec l’amendement no 1 rectifié que Mme la rapporteure a précédemment proposé et que nous avons voté sur l’ensemble des bancs.

M. le président. La parole est à Mme Henriette Martinez, pour défendre l’amendement no 244.

Mme Henriette Martinez. Cet amendement tend à rétablir la notion de développement affectif, intellectuel et social de l’enfant telle qu’elle avait été adoptée par le Sénat en première lecture au quatrième alinéa de l’article 2. Son insertion dans les mêmes termes au sein de l’alinéa 5 serait de pure cohérence.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ?

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. La commission les a rejetés, car ils sont satisfaits par l’amendement no 7 qui, adopté à l’alinéa précédent, a ajouté l’adjectif « physique » à la notion de développement affectif, intellectuel et social figurant déjà dans le texte.

Il ne semble pas utile de répéter à chaque fois une telle énumération.

M. le président. Maintenez-vous votre amendement, madame Adam ?

Mme Patricia Adam. Je le retire, monsieur le président.

M. le président. Retirez-vous également le vôtre, madame martinez ?

Mme Henriette Martinez. Oui, monsieur le président.

M. le président. Les amendements nos 54 et 244 sont retirés.

Je suis saisi d’un amendement no 53.

La parole est à Mme Patricia Adam, pour le défendre.

Mme Patricia Adam. Nous proposons par cet amendement d’ajouter un sixième alinéa à l’article 2, ainsi rédigé : « Veiller à ce que les liens d’attachement » – terme qui nous tient particulièrement à cœur – « noués par l’enfant avec d’autres personnes que ses parents, soient maintenus, voire développés, dans son intérêt supérieur. » Souligner le maintien de ces liens d’attachement nous semble en effet nécessaire.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Cet amendement, même si son objectif a été bien compris, a été repoussé par la commission, car la formule « autres personnes » est trop vague.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Même avis !

M. le président. La parole est à M. Claude Leteurtre.

M. Claude Leteurtre. Je tiens à faire part de mon expérience à ce sujet afin de souligner toute l’importance de cet amendement. Trop de décisions prétendument prises dans l’intérêt de l’enfant brisent en fait sa continuité affective.

Peut-être un problème rédactionnel se pose-t-il, mais il n’en reste pas moins que cet amendement est très important et qu’il nous faut parvenir à l’intégrer dans le texte. On ne peut sans arrêt provoquer des ruptures affectives pour des raisons qui ne correspondent pas toujours à l’intérêt de l’enfant – je puis vous assurer que je parle d’expérience.

M. le président. La parole est à Mme Henriette Martinez.

Mme Henriette Martinez. Je soutiens également cet amendement, qui me paraît très important puisqu’il nous renvoie à la question de l’attachement dont nous avons déjà débattu. J’avais d’ailleurs déposé un amendement no 261 qui n’a pas été pris en compte, et qui allait dans le même sens, à savoir que toute décision sur l’avenir de l’enfant doit prendre en compte son âge et son développement psychoaffectif, en particulier son besoin de stabilité. Je visais plus particulièrement la première année de sa vie, car elle est fondamentale, mais, plus généralement, nous sommes tous témoins de situations scandaleuses où les enfants sont ballottés de foyer d’accueil en foyer d’accueil au gré de l’errance de leurs parents.

M. Alain Néri et Mme Patricia Adam. Parfaitement !

Mme Henriette Martinez. En effet, le morcellement de l’intervention des départements en matière d’aide sociale conduit à ce que, dès que le parent quitte un département, l’enfant le suit avec les bagages, c’est-à-dire qu’il est immédiatement déplacé comme un cageot, bien qu’il n’ait souvent plus aucun lien avec ce parent. Il est ainsi enlevé à une famille d’accueil qui l’aime et au sein de laquelle il se construit et s’épanouit pour être placé, simplement parce que le parent change de département, dans une autre famille, certes tout aussi aimante, mais au prix d’une grande instabilité. Imaginons qu’une mère change dix fois de département en trois années seulement : l’enfant changera également de département dix fois en trois ans, quel que soit son âge, ce qui ne peut être que catastrophique.

Un enfant n’est pas un objet. Il a besoin de s’attacher et de se construire par rapport à la figure de référence que peut représenter un adulte. L’idéal est que ce dernier soit le parent, mais si tel ne peut être le cas, la personne chez qui l’enfant est aimé et éduqué est alors fondamentale dans la construction de la personnalité de celui-ci.

Si on les enlève à ces personnes, il ne faut pas s’étonner ensuite que des enfants aient des parcours chaotiques voire déviants car on ne leur aura pas donné ce à quoi ils étaient en droit de prétendre dans leur petite enfance, c’est-à-dire un appui sur un adulte de référence auquel ils peuvent s’attacher. Voilà pourquoi j’espère que nous voterons tous l’amendement de Mme Adam.

M. Alain Néri. C’est ce que nous ferons pour notre part !

M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. Je souscris complètement aux interventions qui viennent d’avoir lieu dont celles de Mme Adam et, particulièrement, de Mme Martinez. Nous avons trop d’exemples d’enfants ballottés de famille d’accueil en famille d’accueil, ce qui conduit d’ailleurs très fréquemment des enfants en manque d’affectivité à fuguer et cela dès le plus jeune âge.

Pour qu’un enfant s’épanouisse et se construise, il faut qu’il ait des repères, et à cet égard, l’amour et l’affectivité sont essentiels. Nous souhaitons tous bien sûr que ce soient ses parents qui lui donnent ces repères. À défaut, ne brisons pas le lien que l’enfant aura créé avec d’autres personnes auxquelles il s’est attaché et dont il reçoit de l’affection et de l’amour. C’est l’intérêt supérieur de l’enfant que nous devons toujours avoir à l’esprit, et c’est ce que nous devons mentionner dans le texte.

M. le président. La parole est à Mme Patricia Adam.

Mme Patricia Adam. Si je reprends la parole, c’est parce que cet amendement est en effet essentiel. Ainsi que mes collègues ont pu le souligner, nous sommes tous témoins – en qualité, pour ma part, de vice-présidente d’un conseil général – de cas d’enfants ballottés de placement en placement, sans qu’à aucun moment l’on n’ait pris la peine de vérifier s’il ne se trouve personne dans leur entourage – je parle de l’entourage familial, c’est-à-dire d’une tante, d’un oncle, d’un parrain ou d’une marraine, par exemple – pour les accueillir et pour les élever comme les leurs.

M. Claude Leteurtre. Parfaitement !

Mme Henriette Martinez. On en refuse même certains à leurs propres grands-parents !

Mme Patricia Adam. Or la question de l’existence d’un entourage familial ne se pose jamais, et ce n’est pourtant pas faute d’interventions de ma part. C’est inadmissible !

M. Claude Leteurtre. Tout à fait !

Mme Patricia Adam. L’idéal bien sûr serait que les parents s’occupent de leurs enfants. Cependant, si nous parlons de protection de l’enfance, c’est parce que certains parents présentent des carences dans l’éducation de leurs enfants. C’est bien de ces parents-là que nous parlons, et pas d’autres !

M. Pierre-Louis Fagniez. Tout à fait.

Mme Patricia Adam. Dans ce cas, il nous semble essentiel que les professionnels vérifient s’il ne se trouve pas dans l’entourage de l’enfant un tiers digne de confiance – puisque tel est le nom que portent les personnes qui pourraient le recueillir. Une fois ce tiers identifié, le juge pourra prendre sa décision en toute connaissance de cause.

M. Pierre-Louis Fagniez. Oui, c’est très important !

Mme Patricia Adam. Je citerai dans mon propre département l’exemple – mais je pourrais en donner de nombreux autres – d’une fratrie dont les membres, faute de pouvoir être gardés ensemble, avaient été séparés et placés dans des familles d’accueil différentes. Pourtant, ces enfants avaient un oncle et une tante. Or à aucun moment les services du conseil général n’ont pris la peine de faire cette simple vérification.

Mme Muguette Jacquaint. On peut toujours s’étonner après que les enfants aient des problèmes psychologiques !

Mme Patricia Adam. Aujourd’hui que ces enfants sont élevés par leur oncle et leur tante – cela fait même déjà quelques années –, ils ne posent plus de problème ou, en tout cas – car un enfant pose toujours des problèmes ! , ils vont bien.

M. Pierre-Louis Fagniez. C’est un bon exemple !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Mais ce n’est qu’un exemple !

Mme Patricia Adam. C’est une question de simple bon sens, et je ne crois pas par là m’opposer à Mme Pecresse ou à M. le ministre.

Il semble malheureusement que dans les services de protection de l’enfance on considère de façon quelque peu automatique qu’il n’existe pour placer un enfant que l’assistante familiale ou le foyer. Eh bien, tel n’est pas le cas : il existe d’autres solutions de placement, en particulier auprès des tiers dignes de confiance.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Toutes les préoccupations tendant à assurer la continuité de l’accueil, l’attachement de l’enfant à sa famille d’accueil, sa stabilité et son suivi, sont prises en compte à l’alinéa 5 de l’article 11, qui dispose que « le président du conseil général veille à assurer le suivi et [...] la continuité des interventions mises en œuvre pour un enfant et sa famille au titre de la protection de l’enfance ». En outre, plusieurs amendements déposés à l’article 13 portent précisément sur les décisions du président du conseil général relatives à l’accueil.

C’est plutôt à l’occasion de l’examen de ces articles, qui portent de façon très concrète sur l’intervention du président du conseil général, que l’on trouvera matière à amélioration. La disposition proposée est en effet trop générale pour être acceptée.

M. le président. Je donne encore la parole à M. Leteurtre puis à M. Dupont, ce qui est une lecture large du règlement, mais au moins pourrons-nous alors considérer que l’Assemblée est suffisamment informée.

La parole est à M. Claude Leteurtre.

M. Claude Leteurtre. On a parlé de l’intérêt supérieur de l’enfant : avec cet amendement, on met en œuvre concrètement la notion de continuité grâce au maintien du lien affectif.

Mme Martinez, Mme Adam ainsi que Mme Jacquaint l’ont rappelé, les enfants sont ballottés de famille en famille. C’est la vérité !

On ne peut prétendre voter un texte de protection de l’enfance et de prévention sans réaffirmer avec force la nécessité de maintenir le lien affectif, car telle n’est pas la réalité dans les faits. Vraiment, je ne vois pas ce qui pourrait nous empêcher de le faire ici.

Mme Muguette Jacquaint. Surtout sachant les dégâts psychologiques que la rupture d’un tel lien peut entraîner !

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Dupont.

M. Jean-Pierre Dupont. Je suis surpris d’entendre que l’avenir de l’enfant dépende entièrement des travailleurs sociaux – qui, par ailleurs, font très bien leur travail.

M. Claude Leteurtre. C’est vrai !

M. Jean-Pierre Dupont. En effet, je ne l’apprendrai à personne, c’est le juge qui décide de placer l’enfant en établissement ou en famille.

M. Claude Leteurtre. Oui, mais qui choisit la famille d’accueil ?

M. Jean-Pierre Dupont. Il n’y a pas, je le répète, que des placements en famille d’accueil. Il y a aussi des placements en établissement. C’est le juge qui décide. Or, pour être depuis douze ans président de conseil général, je puis témoigner que cette décision n’est pas toujours adéquate – au point qu’il nous a parfois fallu porter plainte !

Je vous ai entendu, madame Adam, donner l’exemple de travailleurs sociaux qui ne s’étaient pas préoccupés de savoir s’il y avait un entourage familial. C’est peut-être vrai, mais le juge doit également s’en soucier, car c’est lui qui prend la décision.

M. Lilian Zanchi. Il n’y a pas que lui !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. À l’issue de la discussion qui vient d’avoir lieu sur cet amendement, je veux apporter quelques précisions.

Les services de l’action sociale ont l’obligation de veiller à ce que les liens d’attachement noués par l’enfant avec d’autres personnes que ses parents soient maintenus, voire développés dans son intérêt supérieur, car ce n’est pas toujours le cas.

Par ailleurs, qui sont ces « autres personnes que ses parents », ces personnes indéterminées, cette catégorie dans laquelle on pourrait faire entrer n’importe qui ? Car, des liens d’attachement, nous en formons avec beaucoup de personnes. S’il s’agit de permettre le maintien des liens avec une famille d’accueil, autant le dire plutôt que de proposer une disposition qui, de par son caractère général, sera source de controverses et de difficultés. J’ajoute qu’il peut y avoir d’excellentes raisons de séparer un enfant d’une famille d’accueil.

Il n’est pas de bonne méthode d’introduire à cet endroit du texte une disposition aussi peu claire alors que d’autres, beaucoup plus précises, comme l’a rappelé tout à l’heure Mme la rapporteure, font obligation de prendre en compte ce type de paramètres au moment de la décision de confier l’enfant à une autre famille d’accueil.

On le voit à travers des anecdotes qui sont souvent source de souffrance pour des enfants, en voulant apporter des solutions on crée parfois d’autres problèmes.

Il me semble donc souhaitable de repousser cet amendement et de traiter la question que vous avez soulevée de manière précise et concrète dans les articles adéquats.

M. Alain Néri. Monsieur le président, je demande la parole, pour répondre au ministre.

M. le président. Monsieur Néri, le règlement ne prévoit pas que vous puissiez répondre au ministre. J’ai autorisé plus de neuf interventions, alors que j’aurais dû les limiter à deux. Si vous jugez devoir faire un rappel au règlement pour intervenir, c’est votre droit, mais comprenez que nous devons passer au vote.

Tout à l’heure, Mme Adam s’est exprimée deux fois sur un amendement qui avait été défendu par Mme Jacquaint. Je n’aurais pas dû lui redonner la parole. Dorénavant, j’appliquerai le règlement à la lettre.

Je vous donne donc la parole pour un rappel au règlement.

Rappel au règlement

M. Alain Néri. Monsieur le président, ne vous mettez pas en colère ! Nous avons encore un peu de temps devant nous étant donné qu’il n’est que vingt-trois heures cinquante. Et s’il y a eu neuf interventions, c’est que l’amendement pose un problème fondamental.

Monsieur le ministre, les décisions de placement ne se font pas sur un coup de tête. Elles résultent d’une enquête sociale sérieuse réalisée par les travailleurs sociaux du conseil général. Le bon sens voudrait que l’on se rallie aux arguments qui ont été développés par nos collègues sur l’ensemble de ces bancs. Cet amendement correspond à une réalité que nous pouvons vivre nous-mêmes dans nos conseils généraux. J’en appelle donc à la responsabilité de mes collègues, dans l’intérêt supérieur de ces enfants, pour adopter cet amendement.

M. Lilian Zanchi. Très bien !

Reprise de la discussion

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 53.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 171.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour le soutenir.

Mme Muguette Jacquaint. Comme je l’ai demandé dans la discussion générale, j’aurais souhaité que Mme la rapporteure et M. le ministre précisent ce que l’on entend par « informations préoccupantes ».

Tout à l’heure, j’ai donné l’exemple des enfants dont les parents sont expulsés. Est-ce une information « préoccupante » pour le développement ? Je le pense. Et le fait qu’un enfant n’ait pas toujours été suivi en matière de santé, est-ce aussi une information préoccupante ? Il me semble que le terme « préoccupantes » est un peu arbitraire. Si j’obtiens des précisions sur ce terme, alors je retirerai mon amendement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. La commission est défavorable à cet amendement. Le terme « informations préoccupantes » est le bon terme.

Mme Muguette Jacquaint. Voilà une réponse de Normand !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 171.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 52.

La parole est à Mme Patricia Adam, pour le soutenir.

Mme Patricia Adam. Il est défendu.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 52.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 2, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 2, ainsi modifié, est adopté.)

Après l’article 2

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 172, portant article additionnel après l’article 2.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour soutenir cet amendement.

Mme Muguette Jacquaint. Je veux revenir sur le cas des enfants nés dans les pays de droit coranique. Ces enfants ne peuvent pas être adoptés par des candidats de nationalité française, mais peuvent être accueillis par des couples français dans le cadre d’une kafala judiciaire – qui permet légalement de recueillir des enfants abandonnés ou dont les parents s’avèrent incapables d’assurer l’éducation.

L’objet de l’amendement n° 172 est de mettre fin à ce que j’appelle une discrimination et de permettre à l’enfant abandonné qui a fait l’objet d’une mesure de protection par kafala judiciaire d’avoir accès à une véritable protection dans notre pays, de bénéficier des dispositions relatives au regroupement familial, conformément à la jurisprudence du Conseil d’État et d’acquérir la nationalité française sans être soumis à la condition de résidence en France de cinq ou trois ans pour l’enfant recueilli par un service de l’aide sociale à l’enfance, afin d’avoir un lien de filiation avec ses parents de cœur et ses parents pour la vie. Il en va de l’intérêt de ces enfants.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. La commission a repoussé cet amendement, mais en a proposé un autre qui traite de la kafala et qui viendra ultérieurement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. Dans l’attente de celui de la commission, je retire l’amendement n° 172.

M. le président. L’amendement n° 172 est retiré.

Article 3

M. le président. Sur l’article 3, je suis saisi d’un amendement n° 284.

La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir cet amendement.

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Il s’agit de la dispense de l’obligation alimentaire qui a été introduite par la loi du 2 janvier 2004 relative à l’accueil et à la protection de l’enfance, cette dispense étant de droit pour les enfants qui ont fait l’objet d’un retrait judiciaire de longue durée de leur milieu familial alors qu’auparavant seule une décision judiciaire pouvait en décider.

Ce changement était évidemment indispensable, tant pour des motifs d’équité que pour des raisons pratiques. Jusqu’à cette réforme, le président du conseil général était en effet contraint de saisir le juge aux affaires familiales pour qu’il prononce la décharge, et, selon une jurisprudence constante, le juge exonérait systématiquement les obligés alimentaires lorsque le créancier d’aliment avait commis des manquements graves envers ses enfants. Cette dispense de droit a donc permis de désengorger les tribunaux et de simplifier le traitement administratif des dossiers d’aide sociale dont l’instruction était suspendue dans l’attente d’une décision du juge aux affaires familiales.

La décharge de plein droit répondait également à des considérations éthiques : il paraissait en effet injuste de demander à des enfants victimes de devoir justifier leur demande auprès du juge des affaires familiales et de leur imposer, ce faisant, de revivre des événements douloureux.

Depuis son entrée en vigueur, cette mesure a donné pleinement satisfaction. C’est pourquoi le présent article propose d’assouplir les conditions de la décharge de plein droit en l’autorisant dès lors que le retrait du domicile familial a été supérieur à vingt-quatre mois, consécutifs ou non, contre trente-six mois actuellement, cette durée étant appréciée en tenant compte des seize premières années de la vie de l’enfant au lieu des douze premières années aujourd’hui. Il me semble excessif d’aller jusqu’à cet assouplissement. Un placement de vingt-quatre mois peut avoir été décidé dans des cas de difficultés psychologiques par exemple, mais chaque parent a le droit de s’amender et de retrouver ses responsabilités parentales. L’amendement n° 284 propose donc de rétablir la rédaction de la loi de 2004.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Ce n’était pas le texte initial du Gouvernement, mais, au bénéfice des explications que vient de donner Mme la rapporteure, le Gouvernement se rallie à cet amendement tout en précisant que les personnes qui ne bénéficieront pas de l’extension de la décharge d’obligation alimentaire automatique pourront toujours demander au juge d’être dispensées de cette obligation alimentaire…

M. Pierre-Louis Fagniez. Bien sûr !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. …même d’ailleurs pour des mauvais traitements subis sur des périodes beaucoup plus courtes.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 284.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 3, modifié par l'amendement n° 284.

(L'article 3, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président. Nous passons aux amendements portant articles additionnels après l’article 3.

Après l’article 3

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 173.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour le soutenir.

Mme Muguette Jacquaint. Des enfants et adolescents scolarisés en France quelquefois depuis plusieurs années, dont les parents sont en situation irrégulière, peuvent se retrouver confrontés subitement à une menace d’expulsion. Dans de tels cas, et on l’a vu encore récemment, leurs camarades de classe, les parents et les professeurs ont du mal à comprendre cette injustice et cette agression insupportable. Dans ma ville, on est malheureusement venu chercher des enfants de quatre ou cinq ans, nés en France, à la sortie de l’école !

Il serait souhaitable de régulariser ces familles qui vivent dans la clandestinité et la précarité, sous la menace permanente d’un contrôle de police. Cet amendement vise donc à accorder aux jeunes étrangers scolarisés une protection qui n’est pas spécifiquement prévue par les textes en vigueur. Les conditions dans lesquelles ils peuvent se voir octroyer la nationalité française ou une carte de séjour temporaire doivent être assouplies, afin de stabiliser leur situation et, à plus long terme, leur avenir sur notre territoire.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. La commission a rejeté cet amendement, ne souhaitant pas revenir sur les délais introduits par la loi du 26 novembre 2003 relative au contrôle de l’immigration.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 173.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 204.

La parole est à Mme Michèle Tabarot, pour le soutenir.

Mme Michèle Tabarot. Cet amendement permettra au président du conseil général, sur la base du rapport annuel sur la situation de l’enfant, de saisir le tribunal de grande instance pour obtenir un prononcé d’abandon.

La sacralisation du lien biologique place notre pays dans une situation particulière. L’on hésite à prononcer l’abandon, refusant ainsi une deuxième chance à des enfants qui ont déjà souffert et qui passent de famille d’accueil en famille d’accueil.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Le souci de Mme Tabarot est tout à fait justifié, mais l’amendement, tel qu’il est rédigé, se superposerait à une disposition du code qui précise que « la demande en déclaration d’abandon est obligatoirement transmise par le particulier, l’établissement ou le service de l’aide sociale à l’enfance qui a recueilli l’enfant, à l’expiration du délai d’un an, dès lors que les parents se sont manifestement désintéressés de l’enfant ». Ainsi, le président du conseil général et le service de l’aide sociale à l’enfance risqueraient de se retrouver en concurrence, ce qui ne serait pas très heureux. La commission a donc repoussé l’amendement pour des raisons rédactionnelles et faute de temps pour pouvoir le réécrire.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Madame la députée, je vous demanderai de bien vouloir retirer votre amendement. Il ressort des dispositions actuelles qu’une déclaration judiciaire d’abandon peut déjà être demandée par le président du conseil général, puisque les services de l’aide sociale à l’enfance ne peuvent prendre une telle initiative que par délégation de sa part : il est leur patron en quelque sorte. Votre amendement est donc satisfait, et, s’il était mal interprété, il risquerait de retarder encore la déclaration d’abandon en laissant supposer que l’aide sociale à l’enfance ne pourrait plus agir et qu’il faudrait une intervention particulière de l’autorité hiérarchique dans la procédure.

C’est pourquoi je vous prie de retirer votre amendement, sachant que je vous donne l’assurance que le président du conseil général détient déjà cette compétence, par le biais précisément du service de l’aide sociale à l’enfance.

M. le président. La parole est à Mme Michèle Tabarot.

Mme Michèle Tabarot. Je précise qu’il n’était pas question, dans mon esprit, de supprimer des possibilités d’action, mais d’en créer de nouvelles. Les services d’aide à l’enfance peuvent certes intervenir au nom du président du conseil général, mais la mission d’information a mis en évidence le décalage qu’il y a entre les quelques dizaines de prononcés d’abandon de la France et les 3 500 du Royaume-Uni, voire les plus de 1 600 de l’Italie. Je veux bien retirer mon amendement, mais il faut absolument alerter les présidents de conseil général et les services pour éviter les blocages préjudiciables à l’intérêt supérieur de l’enfant, et leur demander de faire preuve de beaucoup de détermination et de volonté.

M. le président. L’amendement n° 204 est retiré.

Je suis saisi d’un amendement n° 56.

La parole est à Mme Patricia Adam, pour le soutenir.

Mme Patricia Adam. Cet amendement prévoit que l’obligation de fournir des aliments à ses père et mère cesse, pour l’adopté, dès lors qu’il a été admis en qualité de pupille de l’État ou pris en charge dans les délais prescrits par l’article du code de l’action sociale et des familles. Cette précision me semble particulièrement nécessaire.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. La commission a adopté cet amendement, en cohérence avec la règle générale de l’obligation alimentaire envers son père et sa mère.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 56.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 174.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour le soutenir.

Mme Muguette Jacquaint. Cet amendement traite le cas, dont nous avons longuement discuté, des enfants étrangers isolés, qui sont maintenus dans les zones d’attente où les conditions de vie sont à la fois précaires et traumatisantes. La désignation d’un administrateur ad hoc nous paraît insuffisante pour assurer la protection de ces enfants. Un placement rapide au sein des services de l’aide sociale à l’enfance serait pour eux la meilleure solution.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. La commission a repoussé cet amendement. Il est vrai que les enfants étrangers isolés et maintenus en zone d’attente sont en situation d’extrême précarité, sur le plan à la fois matériel et juridique. Néanmoins, le Gouvernement est en train de réfléchir au partage des responsabilités entre les conseils généraux et l’État. Le cas est particulièrement complexe, sachant que les filières d’immigration sont implantées dans tous les départements, et plus seulement dans les départements frontaliers ou proches de Roissy, comme la Seine-Saint-Denis, que Mme Jacquaint connaît bien. Ce projet de loi ne peut régler la question, car la concertation n’est pas assez avancée.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 174.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 55.

La parole est à Mme Patricia Adam, pour le soutenir.

Mme Patricia Adam. Cet amendement vise à accorder une protection aux enfants scolarisés ainsi qu’à leurs parents, afin de respecter le droit constitutionnel de vivre en famille, de même qu’aux jeunes étrangers confiés au service de l’aide sociale à l’enfance. Ils ne pourront plus faire l’objet d’une reconduite à la frontière dès l’instant où ces jeunes seront connus du service de l’aide sociale à l’enfance.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Avis défavorable. La commission ne souhaite pas rouvrir la question du droit des étrangers à l’occasion de l’examen du projet de loi relatif à la protection de l’enfance.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 55.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 175.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour le soutenir.

Mme Muguette Jacquaint. Cet amendement va dans le même sens puisqu’il concerne les mineurs de dix-huit ans qui sont placés en centre de rétention administrative. Pour avoir eu l’autorisation d’y entrer, nous savons de quoi il retourne et comment les enfants y sont « accueillis ». Le surpeuplement et les conditions de surveillance ne sont pas dignes de la France. L’amendement vise donc à compléter le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile en posant le principe de l’interdiction du placement des mineurs en centre de rétention administrative.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. La commission a repoussé cet amendement. S’agissant de l’accueil des mineurs étrangers isolés, des dispositions nouvelles doivent être prises, mais les discussions n’ont pas encore abouti et toute décision serait prématurée.

M. le président. Le Gouvernement est-il également défavorable à cet amendement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Oui, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 175.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 9 rectifié.

La parole est à Mme la rapporteure, pour le défendre.

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Initialement présenté par notre collègue Bernard Perrut, cet amendement a été réécrit. Il propose d’interdire « l’installation, à moins de deux cents mètres d’un établissement d’enseignement, d’un établissement dont l’activité est la vente ou la mise à disposition du public d’objets à caractère pornographique ».

M. Serge Blisko et Mme Muguette Jacquaint. Très bien !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 9 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 286.

La parole est à Mme la rapporteure, pour le soutenir.

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Si vous n’y voyez pas d’inconvénient, monsieur le président, je défendrai en même temps l’amendement n° 283, même si son objet est différent.

Dans les deux cas, il s’agit de renforcer les pouvoirs du défenseur des enfants. L’amendement n° 286 vise à ce qu’il soit saisi pour avis par les membres du Gouvernement sur tout projet de loi ou de règlement comportant une incidence sur les droits de l’enfant. L’amendement n° 283 prévoit, quant à lui, que le défenseur des enfants puisse être saisi, notamment à l’initiative des familles des mineurs, des associations, des services médicaux et sociaux et du Parlement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Le Gouvernement est très attentif aux recommandations du défenseur des enfants, qui est maintenant une institution bien installée dans notre paysage administratif. Il remet chaque année un rapport dont le Gouvernement et le Parlement s’inspirent pour leurs travaux.

Toutefois, cet amendement soulève une question : aussi utile qu’il soit d’associer des autorités administratives indépendantes au processus législatif, faut-il pour autant prévoir une obligation de consultation, laquelle constitue une contrainte juridique forte ? Le Parlement est souverain et il doit pouvoir légiférer sans s’imposer de nouvelles obligations qui pèseraient sur la procédure législative. De plus, je rappelle qu’il s’agit d’une institution administrative indépendante et je m’interroge sur le bien-fondé de rendre systématique l’intervention des nombreuses institutions de ce type dans le processus législatif. Ce n’est pas forcément le gage de l’efficacité. Les relations de confiance qui se sont établies entre elles, le Gouvernement et le Parlement permettent de faire un travail d’aussi bonne qualité.

Je demande donc à la commission de bien vouloir retirer l’amendement n° 286. Sinon, j’y donnerais un avis défavorable.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Je suis sensible à la demande du ministre de ne pas multiplier les avis préalables à tous les projets de loi. Toutefois, je souhaiterais que le Gouvernement prenne l’engagement de mieux associer le défenseur des enfants aux travaux en matière de protection de l’enfance. En effet, il est avéré qu’il n’a pas été, à plusieurs reprises, associé, ce qui est absolument regrettable, du fait que cette institution a prouvé au fil des ans son utilité en portant un regard neuf et complémentaire de celui de l’administration sur la protection de l’enfance.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. C’est un engagement que je prends d’autant plus volontiers qu’il correspond à la pratique du Gouvernement.

M. le président. Madame la rapporteure, retirez-vous l’amendement n° 286 ?

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Oui, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 286 est retiré.

Madame la rapporteure, maintenez-vous l’amendement n° 283, que vous avez déjà défendu ?

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Oui, monsieur le président.

L’objet de cet amendement, qui vise à élargir les cas de saisine du défenseur des enfants, conserve en effet toute sa pertinence.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 283.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Nous passons aux amendements portant articles additionnels avant l’article 4.

Avant l’article 4

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 228.

La parole est à Mme Geneviève Levy, pour le soutenir.

Mme Geneviève Levy. Cet amendement vise à réformer le droit de visite des grands-parents puisque, en application de l’article 371-4 du code civil, l’enfant est placé au cœur du système alors même que le droit français ne reconnaît à un mineur aucune capacité à agir en justice. Or, l’intérêt que peuvent représenter pour l’enfant sur le plan social et pour son développement ses rapports avec ses grands-parents est reconnu, à condition bien sûr que ces rapports soient encadrés et surveillés.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Défavorable.

Si Geneviève Levy a tout à fait raison de rappeler que les droits en la matière doivent être réciproques, toutefois il a semblé à la commission que cette réciprocité allait de soi.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 228.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 10.

La parole est à Mme la rapporteure, pour le soutenir.

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Cet amendement va dans le sens des préoccupations de Geneviève Levy.

En effet, aujourd'hui, seuls des motifs graves peuvent faire obstacle au droit de l’enfant d’entretenir des relations personnelles avec ses ascendants, ce qui peut conduire les familles à constituer des dossiers à charge contre les grands-parents pour prévenir les rencontres entre ces derniers et leurs petits-enfants.

La rédaction actuelle du code civil accentue donc, me semble-t-il, les conflits intrafamiliaux. Telle est la raison pour laquelle la mission sur la famille et les droits de l’enfant a proposé de soumettre les relations entre les grands-parents et leurs petits-enfants au seul intérêt de l’enfant. Cet amendement vise donc à prévoir que seul l’intérêt de l’enfant peut faire obstacle à l’exercice de son droit à entretenir des relations avec ses grands-parents.

C’est également la notion d’intérêt de l’enfant qui est prise en compte par le juge pour attribuer un droit de visite à un tiers, parent ou non.

L’adoption de cet amendement permettra donc d’éviter ce à quoi nous avons assisté dans la pratique du divorce pour faute, à savoir la constitution de dossiers à charge, et donc l’aggravation des conflits au sein même des familles.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 10.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 229.

La parole est à Mme Geneviève Levy, pour le soutenir.

Mme Geneviève Levy. Il est retiré, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 229 est retiré.

Article 4

M. le président. Sur l’article 4, je suis saisi d’un amendement n° 247.

La parole est à Mme Henriette Martinez, pour soutenir cet amendement.

Mme Henriette Martinez. Cet amendement concerne la notion de discernement. En droit français, l’enfant « capable de discernement » est entendu par le juge – et le sera dans de meilleures conditions encore après l’adoption du projet de loi. Toutefois, la notion même de discernement est délicate à définir : telle est la raison pour laquelle je propose de la retirer.

En effet, comment peut-on juger du discernement d’un enfant avant de l’avoir entendu ? C’est un présupposé.

Mme Muguette Jacquaint. C’est vrai.

Mme Henriette Martinez. Un enfant ne saurait être a priori jugé capable ou non de discernement : c’est après son audition qu’un juge, un psychologue ou un pédopsychiatre peuvent évaluer s’il est effectivement capable de discernement ou non.

Mme Muguette Jacquaint. Tout à fait.

Mme Henriette Martinez. Il me semble donc que poser le discernement de l’enfant en préalable est discriminatoire. Le discernement d’un enfant est fonction à la fois de son âge et de sa maturité. Un enfant de sept ans peut être très éveillé tandis qu’un enfant sujet à des troubles ou handicapé ne sera pas capable du même discernement et aura davantage besoin d’être assisté et pris en charge pour faire valoir ses droits. La notion « capable de discernement » ne saurait donc constituer un préalable. Je le répète : cette capacité ne peut être évaluée qu’à la suite de l’audition de l’enfant. C’est pourquoi je pense que le juge doit entendre l’enfant quand il le demande, sans que la notion de discernement apparaisse en préalable. C’est seulement après que l’adulte pourra juger si la demande de l’enfant était fondée ou non.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Défavorable.

La suppression de la notion de discernement permettrait en effet à un tout petit enfant d’être entendu par le juge, ce qui est contraire à l’objectif du projet de loi, qui prévoit que l’enfant ne pourra pas être entendu avant un certain âge.

Souvent critiquée, à juste titre parfois, parce que floue, par les professionnels de l’enfance, la notion de « discernement » est cependant celle qu’utilise la Convention internationale des droits de l’enfant, parce que, comme l’a fort bien dit Henriette Martinez, selon l’âge des enfants, la maturité n’est pas le même. Il faut donc que le juge puisse entendre un enfant suffisamment mûr, et non un enfant immature, qui aurait pu être soumis aux pressions de l’un ou l’autre des deux parents ou qui n’aurait pas la capacité de répondre aux questions du juge.

Mme Muguette Jacquaint. C’est un risque, en effet.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Défavorable également.

Je comprends fort bien le souci de Mme Martinez, qui est de ne pas empêcher un enfant qui en fait la demande d’être entendu par le juge. Mais supprimer l’exigence de discernement de l’enfant aurait pour conséquence de permettre à tout enfant, quel que soit son âge, même s’il a à peine acquis les rudiments du langage, de demander à être entendu, sans que le juge puisse s’y opposer. On risque d’arriver à une situation pire que celle à laquelle vous voulez porter remède.

Certes, l’évaluation du discernement d’un enfant ne va pas de soi ; elle demeure sujette à caution, d’autant qu’elle dépend également du niveau d’exigence de l’adulte. Toutefois, cette notion a l’avantage de nous dispenser d’un critère d’âge, lequel serait encore plus faux, si j’ose dire, que celui du discernement. Au fond, poser l’exigence du discernement de l’enfant, c’est poser une exigence de bon sens, celle que l’enfant ne puisse être entendu que si l’on est en droit de supposer qu’il peut s’exprimer avec un minimum de jugement et d’autonomie – seuls critères permettant d’asseoir la validité de son audition.

De plus, il convient de rappeler que l’audition d’un enfant par le juge, même dans son cabinet, et non dans le prétoire d’un tribunal, reste pour lui une épreuve : l’enfant face à un adulte qu’il ne connaît pas mais qui n’en est pas moins revêtu d’autorité est dans une situation psychologiquement difficile, même si l’adulte a la formation requise et les compétences nécessaires pour l’accueillir dans les meilleures conditions.

De plus, la notion de discernement ayant donné lieu depuis très longtemps à une importante pratique du fait que, présente dans notre code civil, elle fonde également un certain nombre de droits procéduraux dans la Convention internationale des droits de l’enfant, il s’agit de la conserver.

C’est pourquoi, madame Martinez, je souhaite que vous retiriez cet amendement. À défaut, l’avis du Gouvernement serait défavorable.

M. le président. Madame Martinez, retirez-vous votre amendement ?

Mme Henriette Martinez. Monsieur le ministre, je veux bien retirer mon amendement, mais je ne me satisfais pas de cette solution – vous le comprendrez – parce que nous restons sur des présupposés. Dans d’autres pays, au Canada notamment – nous sommes allés au Québec –, les enfants qui en font la demande sont entendus. Du reste, être capable pour un enfant de formuler une telle demande, n’est-ce pas déjà faire preuve de sa part d’un certain discernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Assurément.

Mme Henriette Martinez. Lui refuser alors d’être entendu en considérant, avant même de lui avoir donné la parole, qu’il n’a pas de discernement, c’est véritablement le placer dans une situation d’autant plus difficile qu’il est délicat pour un enfant de dire : « Je veux parler à un juge. » Sans doute faudra-t-il adapter nos prétoires à ce type d’audience, comme nous l’avons vu à Montréal, où la barre est mise au niveau des enfants, afin qu’ils ne se sentent pas écrasés par l’adulte mais qu’au contraire, se sentant en sécurité, ils soient mis en confiance. Je le répète, il est à mon sens discriminatoire de refuser à un enfant, qui le demande, de parler à un juge en lui signifiant qu’il ne sait pas ce qu’il dit. L’enfant sera alors placé dans une difficulté plus grande encore parce qu’il se sentira dévalorisé, voire méprisé.

Monsieur le ministre, si le retrait des mots « capable de discernement » ne vous paraît pas envisageable, je souhaite néanmoins qu’on réfléchisse vraiment à cette question, en vue de trouver une solution permettant à tout enfant qui le demande de pouvoir être entendu, avec, compte tenu de la situation difficile dans laquelle il se trouve, l’assistance d’un avocat. C’est fondamental pour faire avancer les droits de l’enfant.

M. le président. L'amendement n° 247 est retiré.

Je suis saisi d’un amendement n° 57.

La parole est à Mme Patricia Adam, pour le soutenir.

Mme Patricia Adam. L’amendement n° 57 vise à substituer, dans l’alinéa 2 de l’article 4, à la notion trop vague d’« intérêt » de l’enfant celle, plus précise et plus concrète, de « sécurité ».

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Défavorable.

Comme l’a rappelé Mme Adam elle-même au début de la discussion du projet de loi, l’intérêt de l’enfant va au-delà de sa sécurité.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 57.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 246.

La parole est à Mme Henriette Martinez, pour le soutenir.

Mme Henriette Martinez. L’amendement n° 246 vise à insérer à l’alinéa 4 de l’article, après le mot « droit », les mots « et sans délai devant les juridictions civiles et pénales ainsi que les autorités administratives ».

Un enfant qui demande à être entendu doit l’être sans délai si l’on veut le soustraire aux éventuelles pressions qu’il subira, si le délai est trop long, de la part des personnes de son entourage en vue de le faire changer d’avis. Rappelons en effet que les enfants n’ont pas la même notion du temps que les adultes. Je le répète : si l’enfant demande à être entendu par un juge, c’est qu’il a véritablement quelque chose à lui dire à ce moment-là. Il doit donc être entendu, quelles que soient les juridictions – civiles, administratives ou pénales – dont relèvent les cas de maltraitance.

Il me paraît donc important de préciser la rédaction de l’alinéa 4 de cet article à la fois en matière de délai et de pluralité des juridictions susceptibles d’entendre l’enfant.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Défavorable.

Henriette Martinez a raison, assurément, mais le législateur doit avoir pour souci d’adopter des lois qui peuvent être respectées. Or, faute de prévoir des sanctions en cas de non-respect du délai, cet amendement est dépourvu de portée réelle.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. L’audition des enfants par des autorités administratives ou par des juridictions civiles et pénales est une matière particulièrement sensible. Il ne s’agit pas là simplement d’une audition par un juge mais bien d’une audition par une juridiction.

Je vous mets donc en garde : autant il importe que la parole de l’enfant puisse être recueillie, autant elle doit l’être dans les conditions psychologiques les moins traumatisantes possibles afin que la vérité apparaisse nettement. Vous savez que, dans un certain nombre de procédures judiciaires récentes, des enfants se sont trouvés dans le bureau du juge lui-même pour éviter les pressions de parents éventuellement maltraitants ; mais nous avons aussi constaté des pressions involontaires – je ne veux pas croire qu’il puisse en être autrement – de juges vis-à-vis d’enfants dont ils voulaient recueillir le témoignage.

Aussi convient-il de mener une importante réflexion sur les conditions du recueil de la parole de l’enfant. Il s’agit de dépasser le cadre du simple témoignage dans la mesure où, dans le cas de sévices sexuels ou psychiques, aucun examen objectif ne peut authentifier leur réalité et la parole de l’enfant est non seulement un témoignage mais elle est constitutive de la reconnaissance des faits eux-mêmes. C’est la raison pour laquelle cette question me semble mériter un débat en soi.

Au nom du Gouvernement, je suis tout à fait partisan du développement de cette expérience réussie que sont les unités médico-judiciaires. Il s’agit, dans un service adapté, avec le concours d’un pédopsychiatre, d’organiser l’accueil de l’enfant et de recueillir une parole qu’on ne lui demandera pas de répéter lors de nouvelles auditions, lors de nouveaux interrogatoires ; il s’agit de ne pas remettre en cause la parole de l’enfant.

On a vu en effet, dans des procès qui ont duré plusieurs années, des enfants revenir sur leur parole sans qu’on sache à quel moment ils avaient dit la vérité. On a vu aussi des enfants venir de loin, acheminés en autocar depuis leur domicile d’où ils étaient partis à cinq heures du matin, pour participer, en tant que témoins, à un jugement mettant en cause la vie d’adultes et attendre pendant des heures entières dans une salle de témoins, en compagnie d’adultes, sans même, en fin de compte, avoir été entendus, le déroulement du procès n’ayant pas permis leur audition. Rentrés chez eux au milieu de la nuit, il leur a fallu repartir à cinq heures du matin ! Nous devons donc, dans notre démocratie, demeurer attentifs au recueil de la parole de l’enfant qui ne peut pas se limiter à la reconnaissance du droit d’être entendu dans les conditions les plus larges. Il importe d’organiser ce recueil, et beaucoup de travail reste à accomplir en la matière dans notre législation.

Cependant, dans la situation actuelle, cet amendement ne règle pas les problèmes auxquels nous sommes confrontés, et le Gouvernement y est donc, comme la commission, tout à fait défavorable.

M. le président. La parole est à M. Lilian Zanchi.

M. Lilian Zanchi. Je partage votre analyse, monsieur le ministre, sur la difficulté des enfants à être entendus. Les interventions précédentes sur le discernement de l’enfant ainsi que vos propos évoquent, à mon sens, la notion d’autorité parentale. En effet, dans nos mairies, on informe un couple qu’on marie de ce qu’est la notion d’autorité parentale, qui consiste à assurer la santé, la sécurité et la moralité des enfants. On rappelle alors que les parents doivent associer les enfants aux décisions qui les concernent selon leur âge et leur degré de maturité. Or la difficulté que nous éprouvons est bien de pouvoir définir l’âge et le degré de maturité auxquels un juge ou un personnel administratif pourra associer un enfant à une décision qui le concerne, et pourra considérer que la parole de l’enfant fait écho à une réalité et non à une invention.

Quant à l’amendement, il prévoit bien de supprimer les délais de l’audition, ce que le Gouvernement refuse alors que, lors du débat sur le projet de loi relatif à la prévention de la délinquance, il souhaitait supprimer les délais de comparution, arguant qu’un mineur ayant commis un acte de délinquance, supposé conscient de ses devoirs, devait pouvoir être présenté au juge en comparution immédiate. Ainsi, c’est respecter le droit de l’enfant que de faire en sorte qu’il soit écouté sans délai devant une juridiction, afin de réduire ce laps de temps pendant lequel, vous l’avez dit, monsieur le ministre, les médias se livrent à des interprétations et exercent une pression qu’il faut éviter à l’enfant. Cet amendement semble donc pertinent.

Le juge n’en garde pas moins, c’est évident, la faculté de savoir si l’enfant, quand il s’exprime, fait montre de discernement ou pas, c’est-à-dire – le juge exerçant une sorte d’autorité sur l’enfant – la faculté de savoir si ce dernier a l’âge et le degré de maturité suffisants en regard des propos qu’il tient. Cet amendement me semble donc devoir être retenu puisqu’il relève d’une logique judicieuse, qu’on ait affaire à une loi de protection de l’enfance ou à une loi de prévention de la délinquance.

Mme Muguette Jacquaint. Très bien !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement no 246.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement no 11 rectifié.

La parole est à Mme la rapporteure, pour le soutenir.

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Le projet dispose que l’audition de l’enfant par le juge est de droit lorsqu’il en fait la demande, mais le respect des droits de l’enfant exige tout autant qu’il puisse refuser d’être entendu – ce que la procédure civile ne permet pas à un adulte. C’est pour cette raison que, pour ne pas aller à l’encontre des grands principes de la procédure civile tout en permettant aux mineurs d’être entendus, nous proposons la rédaction de compromis suivante : « Lorsque le mineur refuse d’être entendu, le juge apprécie le bien fondé de ce refus. »

Cette disposition permet donc au juge d’entendre éventuellement un mineur, même si celui-ci refuse d’être entendu…

M. Lilian Zanchi. C’est donc bien, une nouvelle fois, du degré de maturité qu’il s’agit !

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Pas forcément, monsieur Zanchi ! Cela peut aussi être une question de nécessité, compte tenu, par exemple, du degré de conflit entre les parents. Le juge peut dès lors estimer que l’audition de l’enfant est absolument nécessaire, même si celui-ci refuse.

Mme Muguette Jacquaint. Voilà !

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. De même si le juge craint que l’un des deux parents ne manipule l’enfant, notamment en cas de dérive sectaire, comme le soulignait notre collègue Fenech.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement no 11 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je constate que le vote est acquis à l’unanimité.

Je suis saisi d’un amendement no 267.

La parole est à M. le ministre, pour le soutenir.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Il s’agit de revenir au texte initial du Gouvernement. En effet, la rédaction du Sénat permet à tout professionnel prétendant connaître l’enfant de saisir le juge aux affaires familiales pour solliciter l’audition du mineur.

Cette disposition peut poser problème parce que le projet de loi garantit d’ores et déjà au mineur qui le souhaite l’exercice de son droit à être entendu, et aussi parce que la mission du juge aux affaires familiales est de trancher des litiges entre les titulaires de l’autorité parentale et, dans certains cas, entre ces derniers et des tiers qui ont un lien personnel avec l’enfant, par exemple des grands-parents. Or leur rôle n’est pas de permettre à une personne étrangère à ce litige de former une demande dans une procédure qu’elle ne connaît pas réellement, puisque les débats ne sont pas publics. C’est la raison d’être de cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. La commission a adopté cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 267.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 60 rectifié et 245.

La parole est à Mme Patricia Adam, pour soutenir l’amendement n° 60 rectifié.

Mme Patricia Adam. Cet amendement s’inscrit dans la logique de ce qui s’est dit précédemment. Il prévoit que l’enfant puisse être entendu par le juge à un moment distinct de celui où ses parents le sont. Cette disposition est importante parce que certains magistrats reçoivent parents et enfants ensemble dans leur bureau. Ce peut être parfois une bonne pratique mais qui oblitère de manière importante la liberté de parole des enfants, surtout quand les parents présentent des pathologies complexes qui relèvent de la psychiatrie.

Cette situation se produit régulièrement et les enfants sont ainsi jetés dans des situations épouvantables. Il leur est très difficile d’exprimer devant leurs parents le souhait, par exemple, de ne plus vivre avec eux parce qu’ils se sentent en insécurité et qu’ils ont peur. Du reste, ce n’est pas à eux de le dire. Il est très important que le juge respecte et protège l’enfant pour les auditions particulièrement sensibles.

M. le président. La parole est à Mme Henriette Martinez, pour défendre l’amendement n° 245.

Mme Henriette Martinez. Ces deux amendements sont en effet identiques et pourraient être fondus dans un amendement Adam-Martinez si Mme Adam en est d’accord, puisque nous avons le même souci que l’enfant garde toute son autonomie de pensée et ne soit pas influencé par les paroles, par les actes ou, tout simplement, par la présence de parents qu’il ne rencontre parfois que lors des visites médiatisées.

L’enfant n’est pas habitué à rester ainsi seul, assis sur un banc, parfois un très long temps, dans le couloir d’un tribunal, attendant l’audition. Les enfants sont ainsi soumis à de telles pressions qu’ils ont pu admettre que leurs pensées s’étaient embrouillées…

M. Pierre-Louis Fagniez. C’est sûr !

Mme Henriette Martinez. …et qu’au moment d’entrer dans le bureau du juge, ils ne savaient plus ce qu’ils allaient dire.

Il est très important de protéger la vulnérabilité, la fragilité de l’enfant, son courage aussi, quand il se retrouve dans des situations terribles comme celle de devoir témoigner contre ses parents ou comme celle de devoir se trouver assis à côté d’eux alors qu’ils sont mis en cause dans l’audition qu’il va avoir à subir. On ne peut pas imposer tout cela à un enfant !

Mme Muguette Jacquaint. Voilà ! Tout à fait !

Mme Henriette Martinez. Or certains juges le comprennent très bien et font attendre les enfants dans des lieux séparés, quand d’autres juges imposent aux enfants d’attendre, j’insiste, à côté de leurs parents – attitude inadmissible. On ne peut pas demander ensuite aux enfants d’avoir une parole digne de foi si on les place dans des situations qui les déstabilisent totalement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. La commission a repoussé ces amendements. Les situations décrites par Patricia Adam et par Henriette Martinez sont réelles, vécues et tout à fait condamnables, bien entendu. Néanmoins, je ne crois pas que ce soit en ajoutant au texte toute une série de contraintes en matière d’auditions qu’on répondra aux problèmes en suspens.

Mme Henriette Martinez. Si !

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. En effet, on peut concevoir un grand nombre de situations.

Vous évoquez les dysfonctionnements actuels, comme l’audition d’enfants en même temps que leurs parents dans un contexte extraordinairement conflictuel. Il peut cependant exister une foule d’autres situations…

M. Pierre-Louis Fagniez. Bien sûr !

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. …dans lesquelles l’audition de l’enfant pourra, par exemple, se dérouler au même moment que celle de ses parents afin qu’il confirme ce qu’ils disent.

Je crois donc que ces amendements partent d’un présupposé de méfiance vis-à-vis des juges !

M. Georges Fenech. Bien sûr ! C’est au juge d’apprécier !

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Les cas de figure du droit de la famille sont si multiples et si différents ! Il s’agit ici de procédures civiles, pas d’enfants maltraités. En toute logique, il serait donc vraiment judicieux de laisser au juge apprécier l’intérêt de l’enfant compte tenu de la situation de la famille, compte tenu de la nature du conflit familial.

J’ajoute que la commission souhaite introduire dans le texte une disposition qui devrait vous satisfaire toutes deux : il s’agit de prévoir une formation spécifique des juges aux problématiques de la protection de l’enfance et de l’audition de l’enfant. L’enjeu est en effet bien plus de former que de recenser dans la loi tous les cas de figure distincts et imposer des contraintes procédurales qui se retourneront contre nous, dans la mesure où, dans certaines situations, l’audition à des moments distincts sera inutile et compliquera au contraire les choses. À introduire des mesures législatives ultraprotectrices pour couvrir les cas où le dispositif ne fonctionne pas, on finit par faire peser sur les juridictions des contraintes insurmontables. Cela ne m’empêche pas d’être tout à fait d’accord avec Henriette Martinez et Patricia Adam pour considérer que, parfois, les pratiques de certaines juridictions ne sont pas compatibles avec l’intérêt de l’enfant. Mais la réponse me semble résider dans la formation des juges.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Comme la commission, le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements.

M. le président. La parole est à Mme Martine Aurillac.

Mme Martine Aurillac. Je suis très sensible à l’argumentation de Mmes Adam et Martinez. Ne pourrait-on envisager, comme semble nous y inviter Mme Pecresse, de rectifier les amendements en spécifiant : « s’il y a lieu » ou « si nécessaire » ? Ainsi, nous donnerions au juge la possibilité de procéder à des auditions distinctes pour épargner les enfants, mais sans l’y contraindre.

M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. Je comprends bien l’argumentation de Mme Aurillac, mais je suis également sensible à la nécessité de mieux former et informer les juges. Qui, sinon eux, peut déterminer les cas où « il y a lieu » ?

Les amendements de Mmes Adam et Martinez sont pertinents en ce qu’ils mettent en évidence les situations où il est nécessaire que le juge n’entende pas l’enfant en même temps que les parents. Ceux-ci peuvent en effet exercer des pressions qui empêcheront l’enfant de dire ce qu’il souhaite dire.

Mme Martine Aurillac. C’est parfois le cas, hélas !

M. Pierre-Louis Fagniez. Mais j’ai bien peur que nous ne répondions pas à la question posée…

Mme Muguette Jacquaint. Reste que nous ne sommes pas dans le cas où l’enfant serait contraint de faire face à ses bourreaux – car tel est bien le mot qu’il faut employer pour désigner des parents qui tabassent leur enfant du matin au soir !

En dehors de ces situations, les choses sont toujours compliquées. La seule personne à même de déterminer si l’enfant doit être entendu avec ses parents ou non, c’est le juge. Il est donc très important qu’il reçoive une formation adaptée.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. En relisant l’article 388-1 du code civil, sur lequel porte l’article 4 du projet de loi, je crains que nous ne nous posions beaucoup de problèmes pour peu de chose : il est en effet précisé que le mineur « peut être entendu seul ». Que l’on ajoute « à un moment distinct de celui où ses parents sont entendus » ou non, le juge aura toujours le choix. Les amendements n’apportent donc, à mon sens, aucune précision.

Mme Martine Aurillac et M. Georges Fenech. Tout à fait !

M. Pierre-Louis Fagniez. Le cas est donc déjà prévu.

M. le président. La parole est à Mme Henriette Martinez.

Mme Henriette Martinez. « Être entendu seul » et « être entendu à un moment distinct », cela ne signifie pas du tout la même chose, madame la rapporteure !

Mme Patricia Adam. Bien sûr !

Mme Henriette Martinez. Dans le premier cas, l’enfant est seul face au juge dans son bureau, mais l’enfant et les parents peuvent se retrouver ensemble dans la salle des pas perdus ou dans les couloirs du tribunal.

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Ils le seront forcément : l’enfant ne va pas venir tout seul !

Mme Henriette Martinez. C’est dans ce moment qui précède l’entretien que les pressions vont s’exercer. On ne peut en faire reproche au juge, qui s’occupe de ce qui se passe dans son bureau. Mais c’est lorsque les parents et l’enfant sont convoqués à la même heure ou à un quart d’heure d’intervalle et qu’ils se retrouvent ensemble en train d’attendre que beaucoup de choses peuvent se passer. C’est un fait attesté par les professionnels de l’enfance. Un enfant qui ne vit plus avec ses parents et ne les voit plus que dans des visites médiatisées peut tout à coup se retrouver pendant une ou deux heures seul avec eux, et cela juste avant l’audition. Des retards dans l’organisation peuvent conduire à une telle situation, dont nul ne peut en être rendu responsable. Voilà pourquoi l’enfant et les parents doivent être convoqués à des jours différents.

M. le président. La parole est à M. Claude Leteurtre.

M. Claude Leteurtre. Je suis sensible aux propos de Mme Martinez et surpris par ceux de Mme la rapporteure. Au nom du groupe UDF, j’avais déposé avec M. Hunault et Mme Comparini un amendement visant à intégrer dans la formation des juges un module relatif à l’audition et au recueil de la parole de l’enfant.

Mme Muguette Jacquaint et M. Serge Blisko. C’est bien cela qui est nécessaire !

M. Claude Leteurtre. Vous semblez indiquer que c’est possible, madame la rapporteure, mais on nous a expliqué en commission que cela ne pouvait se faire que dans le cadre d’une loi organique. Or il ne s’agit que de bon sens ! Si les magistrats étaient à même de bien recueillir la parole de l’enfant, les questions que nous soulevons ne se poseraient pas. Nous sommes actuellement confrontés à un dysfonctionnement dont nous devons tenir compte. Comment peut-on, en l’état, introduire un tel module de formation ?

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. En écoutant Henriette Martinez, je m’aperçois que nous ne parlons pas de la même chose : je prends en compte, pour ma part, l’ensemble des procédures civiles, donc les dizaines de milliers de divorces qui sont prononcés chaque année. Ce sont dans ce cas les parents qui amènent l’enfant au tribunal. Si celui-ci est victime de manipulations parentales, il le sera avant, pendant et après l’audition. Henriette Martinez et Patricia Adam, elles, font état de situations d’enfants en danger, maltraités ou placés. Or nous ne parlons pas ici de procédures pénales. Nous sommes dans le cadre de procédures civiles, c’est-à-dire, en grande majorité, de procédures de divorce et d’exercice de l’autorité parentale, toutes situations où l’enfant, je le répète, habite chez ses parents et est amené par eux au tribunal, qu’il soit ou non auditionné à un moment distinct.

Je crains donc que nous ne nous focalisions sur des mesures de protection de l’enfance relevant du pénal, alors que l’article porte sur le code civil.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Je souscris aux propos de Mme la rapporteure. L’article 4 du projet de loi vise à modifier l’article 388-1 du code civil. Il ne s’agit donc pas d’affaires pénales dans lesquelles un enfant en danger pourrait être amené à témoigner contre ses parents à propos de maltraitance, de sévices physiques, psychiques ou sexuels, mais, par exemple, de situations liées à des procédures de divorce. Nous ne sommes pas dans le cas où un enfant a été placé parce que ses parents représentent pour lui un danger : à aucun moment il ne peut être question qu’il soit confronté, ne serait-ce qu’au regard de ses parents maltraitants, dans l’antichambre du juge !

Dès lors, il me semble que ces amendements ne répondent pas à l’intention qu’ont exprimée leurs auteurs et que je partage pleinement : on ne saurait faire supporter à l’enfant, en plus du poids de l’audition proprement dite, le poids de la confrontation avec ses parents ou de leur seul regard alors qu’il en est séparé pour des motifs qui tiennent à sa sécurité.

Au total, mesdames les députées, je me permets d’insister pour que vous retiriez vos amendements au bénéfice de ces explications, étant entendu que le débat qu’ils ont suscité aura permis d’approfondir notre réflexion, notamment sur le plan juridique.

M. le président. La parole est à M. Georges Fenech.

M. Georges Fenech. Je me vois contraint d’intervenir pour déplorer le manque de confiance à l’égard des magistrats dont témoigne ce débat. Se rend-on bien compte de ce que l’on dit ? Il faudrait donc tenir la main du juge aux affaires familiales pour déterminer dans quelles conditions il doit entendre l’enfant ? Je ne puis laisser dire qu’il n’y a pas de formation : il y a tout de même l’École nationale de la magistrature, puis un an de stage dans un tribunal, puis une pré-affectaction !

À vous entendre, les juges auraient besoin d’être cadrés au millimètre près pour déterminer s’ils doivent entendre l’enfant en présence des parents ou non, à un moment distinct ou non… De grâce, ressaisissons-nous ! On n’inscrit pas des choses pareilles dans la loi ! Il faut laisser au juge, guidé par l’intérêt supérieur de l’enfant, le pouvoir d’apprécier in concreto les conditions de son audition. N’oublions pas que nous sommes au civil ! Je comprends votre intention, mais faisons confiance au juge, qui est le mieux à même d’instruire son dossier. Je partage donc pleinement l’avis de Mme la rapporteure et de M. le ministre.

M. le président. La parole est à Mme Patricia Adam.

Mme Patricia Adam. Je retire mon amendement.

M. le président. L'amendement n° 60 rectifié est retiré.

En va-t-il de même pour l’amendement n° 245, madame Martinez ?

Mme Henriette Martinez. Oui, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 245 est retiré.

Je suis saisi d’un amendement n° 12 rectifié.

La parole est à Mme la rapporteure, pour le soutenir.

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Cet amendement, qui répond aussi à une préoccupation exprimée par Mme Adam, tend à préciser que « le juge s’assure que le mineur a été informé de son droit à être entendu et à être assisté par un avocat ». Cette rédaction dispense le juge d’écrire à tous les mineurs susceptibles d’être entendus, ce qui, outre la charge matérielle supplémentaire qui en résulterait, n’est pas toujours possible. Il suffit au juge de passer par les parents, le tuteur ou le représentant du service à qui l'enfant a été confié.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 12 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 4, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 4, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président. Nous en arrivons à plusieurs amendements portant articles additionnels après l’article 4.

Après l’article 4

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 222.

La parole est à Mme Patricia Adam, pour le soutenir.

Mme Patricia Adam. L’article 365 du code civil détermine les conséquences de l’adoption simple sur l’attribution et l’exercice de l’autorité parentale. Le principe est que l’adoption simple induit le transfert de l’autorité parentale sur l’adopté des parents d’origine à ses parents adoptifs.

Toutefois, un aménagement à cette règle est prévu lorsque l’adoptant est marié avec le père ou la mère de l’adopté. Dans ce cas, l’adoptant et son conjoint détiennent en commun l’autorité, mais l’exercice en est réservé au parent d’origine, sauf déclaration conjointe aux fins d’un exercice commun devant le greffier en chef du tribunal de grande instance. Cet aménagement doit être étendu au Pacs et harmonisé avec la réforme de l’autorité parentale de 2002.

Tout d’abord, il conviendrait d’étendre au Pacs la règle de dévolution de l’autorité parentale prévue en cas de mariage. Ainsi, en cas d’adoption simple d’un enfant par le partenaire pacsé de son père ou de sa mère, celui-ci détiendra l’autorité parentale avec le père ou la mère d’origine de l’adopté. Cette proposition répond aux nombreuses situations évoquées dans la discussion générale et simplifiera considérablement la vie familiale des couples pacsés.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. La commission a rejeté cet amendement. En l’état actuel du droit, la dévolution de l’autorité parentale n’est prévue qu’en cas de mariage entre l’adoptant et le parent de l’adopté.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 222.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 13 rectifié.

La parole est à Mme la rapporteure, pour le soutenir.

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Il s’agit d’un amendement très spécifique en matière de conditions d’exercice de l’autorité parentale, pour les cas où les parents ne souhaitent pas remettre en cause l’accord trouvé devant le juge, alors même qu’il peut causer à l’enfant de grandes souffrances. Nous pensons notamment aux situations de résidence alternée où l’enfant souffrirait énormément d’être ballotté d’un parent à l’autre. Comme cela existe pour l’action éducative, nous proposons, de manière très dérogatoire, que, de la même manière qu’un enfant accueilli, un enfant souhaitant contester les modalités d’exercice de l’autorité parentale puisse saisir directement le juge aux affaires familiales. Ce dernier apprécie si cette saisine est conforme à l’intérêt de l’enfant, c’est-à-dire s’il doit l’entendre pour revoir ces modalités.

D’emblée, je réponds à la critique de l’instrumentalisation de l’enfant par l’un de ses deux parents contre l’autre : le droit existant prévoit que tout parent peut saisir le juge, avec son enfant, d’une demande de révision des modalités de l’autorité parentale. Il s’agit vraiment ici de permettre à l’enfant de le saisir seul, quand aucun des deux parents ne souhaite rouvrir le dossier, alors même qu’il souffre des conditions dans lesquelles il vit.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Cet amendement pose des problèmes délicats. Nous sommes dans des situations où les parents sont séparés et où le juge aux affaires familiales a pris la décision de confier l’enfant à la garde de sa mère ou de son père ou aux deux, en résidence alternée. L’enfant insatisfait se verrait donner la possibilité de remettre en cause la décision du juge. Dans un certain nombre de cas, cette disposition contribuerait certes à résoudre des problèmes. Mais il faut voir qu’on fait ainsi peser sur l’enfant une responsabilité très lourde : on lui demande de s’opposer à une décision du juge et à la manière dont cette décision est exercée par le parent à qui il a été confié, d’en appeler au juge contre l’un de ses parents.

Plus que le risque d’instrumentalisation de l’enfant par un parent – puisque l’adulte est habilité à faire cette démarche lui-même –, je crains que l’enfant ne se trouve en situation de s’opposer au parent qui exerce l’autorité parentale. Souffrant déjà de la séparation de ses parents, de ne pas les voir exercer ensemble au quotidien l’autorité parentale, même s’ils en sont investis à égalité, il peut aussi n’être pas content de son orientation scolaire, de l’organisation de ses loisirs, du montant de son argent de poche, ou traverser simplement une période de relations conflictuelles avec le parent auquel il a été confié. Il risquerait d’abuser de cette disposition qui l’habilite à saisir le juge et les excès pourraient être très nombreux compte tenu du nombre d’enfants qui vivent ces situations dans notre pays.

Ce poids me paraît trop lourd pour l’enfant. Dans des situations où l’exercice de l’autorité parentale est déjà compliqué, j’ai peur que la difficulté ne soit aggravée par cette disposition. C’est pourquoi, madame le rapporteur, compte tenu de ces explications, je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement.

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Je le retire.

M. le président. L'amendement n° 13 rectifié est retiré.

Je suis saisi d'un amendement n° 125, faisant l’objet d’un sous-amendement n° 273.

La parole est à M. Georges Fenech, pour soutenir cet amendement.

M. Georges Fenech. Il est défendu.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir le sous-amendement n° 273.

Mme Valérie Pecresse, rapporteure. Il est défendu également. J’ajoute qu’il convient de corriger une erreur matérielle dans la rédaction de l’amendement de M. Fenech. Il faut lire « Art. 706-51-2 » et non pas « Art. 706-51-1 », car celui-ci existe déjà.

M. le président. L’amendement n° 125 est ainsi corrigé.

Quel est l'avis du Gouvernement sur le sous-amendement n° 273 et l’amendement n° 125 corrigé ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Le Gouvernement est défavorable aussi bien au sous-amendement qu’à l’amendement.

M. le président. La parole est à M. Serge Blisko.

M. Serge Blisko. Soutenant l’amendement de MM. Fenech et Vuilque, j’avoue ne pas comprendre le refus du Gouvernement.

Il est extrêmement important de prendre en considération les difficultés de ces enfants ou adolescents qui se trouvent sous emprise sectaire, notion introduite par la loi About-Picard. Quand ils sont en situation d’essayer de se libérer de cette emprise, ces jeunes se retrouvent totalement isolés. Ils ont été élevés dans la secte, certains y sont même nés. Dès lors qu’ils commencent à avoir des contacts avec une association de défense contre les mouvements sectaires, leurs parents et les autres membres de la secte tentent de les retenir en menaçant de couper les ponts. Nous avons bien vu l’extrême solitude de ces enfants, qui ne savent rien de nos règles de vie communes et n’ont ni moyens matériels ni adresse ou connaissance qui puisse les aider. Quand ils arrivent à ouvrir la porte de leur prison, il faut absolument qu’un avocat soit commis d’office et à titre gratuit pour les guider dans les méandres de la justice et de la société. Il convient d’organiser un système qui protège ces gamins qui demandent protection et à qui les parents ne veulent plus jamais parler, voire pire.

Nous devons envoyer des signes à tous ces jeunes, qui sont parfois physiquement éloignés de grands centres urbains, de juridictions administratives ou de tribunaux, et qui attendent des pouvoirs publics une écoute et un accompagnement dans la reconquête de leur autonomie et de leur indépendance. S’ils font l’effort – loin d’être évident – de rompre avec leur famille et que personne n’est là pour les aider, ils sombrent dans le désespoir. D’ailleurs, plusieurs d’entre eux nous ont dit se sentir si seuls que l’idée du suicide leur traversait bien souvent l’esprit. Ils étaient en proie à de telles contradictions entre ce que leur disaient leurs parents, ce que leur montrait la société et leurs aspirations propres, qu’ils ne voyaient pas d’autre issue que de se supprimer.

Je souhaite que M. le ministre revienne sur sa position et que nous regardions de près cet amendement, car le refuser, ce serait refuser de protéger des jeunes en très grande difficulté.

M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. Je soutiens pleinement cet amendement, qui reprend une proposition adoptée par la commission d’enquête relative à l’influence des mouvements à caractère sectaire. Au nom de la liberté, on ne peut pas s’accommoder de la situation d’enfants en danger et ne rien faire. Pour moi, il n’y a pas plusieurs catégories d’enfants : qu’ils soient en danger ou qu’ils subissent des maltraitances, quand ils veulent essayer de s’en sortir, on doit leur en donner les moyens. On peut reconnaître qu’il existe plusieurs façons de vivre dans ce pays sans pour autant laisser la liberté à certains de ne pas soigner leurs gosses, de ne pas les éduquer ou de les enfermer. Cet amendement répond bien aux préoccupations des membres de la commission d’enquête et je le soutiens.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Je crois utile d’expliciter la position que je viens de prendre. Je l’ai dit à la fin de la discussion générale, le Gouvernement donnera un avis favorable à un grand nombre de propositions formulées dans le rapport de la commission d’enquête relative à l’influence des mouvements à caractère sectaire sur la santé des mineurs, que présidait M. Fenech et à laquelle un certain nombre d’entre vous ont activement participé.

Si j’ai émis une réserve importante sur cet amendement c’est parce que – comme vous le savez d’ailleurs –, le dispositif législatif actuel garantit d’ores et déjà qu’un mineur puisse librement exprimer ses sentiments lors de son audition.

En ce qui concerne la procédure devant le juge aux affaires familiales, le mineur, lorsqu’il est entendu, peut demander à être assisté d’un avocat ou de la personne de son choix, en application de l’article 388-1 du code civil. Sur ce point, nous sommes déjà pourvus. S’il estime que le choix du mineur n’est pas conforme à son intérêt, le juge peut procéder à la désignation d’une autre personne. C’est le cas lorsque le mineur est accompagné d’un parent suspecté de faire pression sur lui. M. Fenech disait tout à l’heure : « Faisons un peu confiance au magistrat ! » Il dispose déjà dans notre code civil de dispositions qui lui permettent de s’assurer que le mineur qu’il veut entendre pourra être soustrait à l’influence d’un parent suspecté de faire pression sur lui.

Le juge peut déjà, c’est également dans le texte, décider de faire recueillir la parole du mineur par une personne qualifiée – un expert en psychiatrie ou un psychologue –, notamment en présence d’un risque de manipulation de l’enfant.

Le Gouvernement a décidé que le décret d’application de l’article 388-1 précisera que l’enfant ne doit pas être entendu en présence de ses parents.

À côté de la procédure devant le juge aux affaires familiales, il y a la procédure devant le juge des enfants. Là, le mineur peut déjà, en toute hypothèse, être assisté d’un avocat. Lorsqu’il est dépourvu de discernement – nous avons évoqué ce point tout à l’heure –, le juge des enfants a la faculté de faire désigner un administrateur ad hoc, personne chargée de représenter ses intérêts, dès lors qu’ils apparaissent en contradiction avec ceux de ses parents. Il est donc tout à fait possible, et même souhaitable, d’appliquer cette disposition dans le cas d’un mineur dont les parents pourraient être engagés dans une secte.

Je désire ajouter une précision importante, en relation avec les propos tenus tout à l’heure par Mme Jacquaint. Cet amendement introduirait une certaine différence de traitement entre les victimes. Certains mineurs victimes d’actes tout aussi graves, sinon plus graves, de crimes, comme le viol par exemple, ne bénéficient pas, dans notre droit, de la désignation systématique d’un avocat. Avant d’adopter ce type de disposition, il faut bien mesurer actuellement la réalité des pouvoirs du juge et savoir que nous ouvririons une possibilité pour une partie des enfants et non pour d’autres qui pourraient être victimes d’agressions plus lourdes encore, si c’est possible – sans vouloir établir une hiérarchisation.

C’est la raison pour laquelle je demande à M. Fenech de bien vouloir retirer son amendement.

M. le président. La parole est à M. Georges Fenech.

M. Georges Fenech. M. le ministre a émis un avis défavorable, car cette disposition était déjà satisfaite par ailleurs. Compte tenu des explications fournies, je retire l’amendement.

M. le président. L'amendement n° 125 corrigé est retiré.

Article 4 bis

M. le président. L’article 4 bis ne fait l’objet d’aucun amendement.

Je le mets aux voix.

(L'article 4 bis est adopté.)

M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Ordre du jour des
prochaines séances

M. le président. Aujourd’hui, mercredi 10 janvier, à quinze heures, première séance publique :

Questions au Gouvernement(1) ;

Suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, réformant la protection de l'enfance, n° 3184 :

Rapport, n° 3256 de Mme Valérie Pecresse, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

À vingt et une heures trente, deuxième séance publique :

Suite de l'ordre du jour de la première séance.

La séance est levée.

(La séance est levée, le mercredi 10 janvier, à une heure vingt.)

1 () Les quatre premières questions porteront sur des thèmes européens.