Accueil > Archives de la XIIe législature > Les comptes rendus > Les comptes rendus intégraux (session ordinaire 2006-2007) |
(La séance est ouverte à quinze heures.)
Nous commençons par une question du groupe des député-e-s du groupe communiste et républicain.
Le récent rapport du CERC met en lumière « la vie difficile des Français » alors que les cadeaux aux grandes entreprises – 65 milliards en un an – pleuvent sur le MEDEF et le subventionnent grassement.
Les retraités pauvres existent et 600 000 d’entre eux sont réduits au « minimum vieillesse », soit à 600 euros par mois pour vivre. Contrairement à ce que l’on veut faire croire aux Français, les lois Balladur et Fillon de 1993 et 2003 ont échoué et les retraités ne sont pas des nantis. Les générations futures de retraités vont très vite s’en apercevoir, dès 2008.
Même le rapport du Conseil d’orientation des retraites est accablant pour la politique de votre Gouvernement : la loi Fillon a entraîné une dégradation importante du niveau des retraites, sans pour autant résoudre les problèmes de financement à long terme. Le pouvoir d’achat a baissé de 12 % en dix ans ! Quant à la revalorisation de 1,8 % des pensions, elle correspond strictement à l’inflation, laquelle ne reflète pas l’évolution, bien plus élevée, du coût de la vie.
Monsieur le Premier ministre, dans son bilan législatif, votre gouvernement ne pourra s’enorgueillir que d’une seule chose : avoir été une machine à fabriquer des pauvres, à accroître la précarité et la misère. (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Tous les rapports, sans exception, sont accablants. La pauvreté, notamment celle des femmes retraitées, ne cesse d’augmenter dans un pays où du côté de la Bourse, l’heure est à la fête. Les profits du CAC 40 atteignent, en effet, des sommets. En un an, les profits d’AXA ont progressé de 20 %, ceux de la BNP de 23 %, ceux de Danone de 103 %, ceux de Schneider de 46 % et ceux de Total de 13 % !
Monsieur le Premier ministre, ne restez pas dans l’histoire de notre pays comme celui qui aura appauvri les retraités ! Allez-vous enfin rattraper le retard du pouvoir d’achat des retraités, indexer les pensions sur l’évolution des salaires et revenir aux dix meilleures années travaillées pour calculer le montant des pensions à l’avenir ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
Grâce à la réforme des retraites, nous avons fait en sorte que chaque retraité ayant une carrière complète bénéficie d’un revenu égal au moins à 85 % du SMIC.
Cette grande conquête sociale, c’est nous qui l’avons réalisée grâce à la réforme, que vous n’avez cessé d’éluder ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Monsieur le ministre, comme nous le savons tous, le développement durable est plus qu’une question d’actualité ou un slogan de campagne : c’est un véritable enjeu vital pour l’humanité, l’avenir de nos enfants et de leurs propres enfants. Il en va, pour tout dire, de la survie de notre planète.
Toutes les directives, aussi efficaces soient-elles, ne suffiront jamais à modifier certaines de nos habitudes, dont les conséquences sont pourtant potentiellement si graves, voire irrémédiables. Il est nécessaire que chacun adopte des comportements responsables et vertueux.
Cette prise de conscience et ces nouveaux réflexes doivent être encouragés dès le plus jeune âge. Je ne vois pas, monsieur le ministre, de cadre plus privilégié que celui de l’école pour apprendre à nos enfants la meilleure façon d’agir afin de préserver notre planète.
Monsieur le ministre, quelle est votre politique pour que tous les jeunes Français soient profondément sensibilisés aux enjeux du développement durable, afin que, demain, quand ils seront adultes, leur comportement soit naturellement respectueux de notre chère planète ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Nous devons bien sûr poursuivre notre réflexion dans ce domaine, et ainsi aboutir à des actions concrètes. Comme vous l’avez fort justement suggéré, c’est à travers l’apprentissage et l’éducation que nous y parviendrons.
Dans le cadre de la réforme des IUFM, j’ai inclus une formation au développement durable destinée aux futurs enseignants. Je rappelle que 250 établissements, collèges et lycées, mènent déjà des actions remarquables en faveur de la préservation de la planète – gestion des déchets, énergies, eau. Je souhaite que ce type d’actions soit généralisé à tous les établissements.
Enfin, tous les jeunes de France doivent avoir une réelle éducation au développement durable. C’est chose faite grâce au socle commun des connaissances et compétences, avec les piliers 2, 3 et 7. Je suis persuadé que les jeunes, comme dans le cas de la sécurité routière, donneront l’exemple aux adultes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Vous êtes à l’Assemblée nationale, chers collègues. Cessez ce vacarme !
Monsieur Montebourg, vous avez la parole.
Monsieur le garde des sceaux, vos dernières attaques et votre travail méthodique de déstabilisation du juge Van Ruymbeke (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire), juge qui enquête avec beaucoup de difficultés sur la corruption internationale et l’argent sale des paradis fiscaux, ont justifié qu’il s’exprime lui-même publiquement en évoquant son lynchage par le pouvoir que vous représentez, et ce malgré le soutien de sa hiérarchie judiciaire.
Ces attaques sont les mêmes que celles, permanentes, répétitives et inquiétantes, que M. Sarkozy lui-même (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire) lance en exerçant des pressions contre les magistrats de l’ordre judiciaire, de l’ordre administratif et contre toutes les autorités indépendantes qui, dans ce pays, disent le droit, même lorsque celui-ci vous déplaît.
La Commission nationale de déontologie de la sécurité, autorité chargée d’enquêter sur les bavures policières, s’est vu couper ses crédits pour qu’elle ne travaille plus.
La Commission nationale de l’informatique et des libertés, qui s’inquiète des abus du fichage par le ministre de l’intérieur, fait l’objet de pressions intolérables (Vives protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire), d’ailleurs dénoncées par son propre président, qui est membre de votre parti politique. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe socialiste.)
La colonisation systématique des amis de M. Sarkozy à la tête de la police judiciaire (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire), des parquets, des parquets généraux, bloque désormais toutes les enquêtes embarrassantes pour le pouvoir.
Je m’en réjouis !
Je le déplore parce qu’il s’agit de choses trop sérieuses, et la France mérite mieux que ces basses polémiques s’agissant de la magistrature. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Tout le monde a rendu hommage au professionnalisme de M. Van Ruymbeke.
Pour autant, compte tenu du trouble suscité par les révélations parues dans la presse, à savoir que le juge d’instruction chargé du dossier des frégates de Taïwan avait rencontré un certain nombre de personnes, à commencer par M. Gergorin, à l’époque vice-président d’EADS,…
Puisque vous vitupérez et que vous ne voulez pas m’écouter, je vais baisser la voix. (Mêmes mouvements.)
L’Inspection générale des services judiciaires a d’abord fait remarquer qu’il n’est pas prévu qu’un juge chargé d’un dossier rencontre à ce titre une personne hors procédure et sans que cette rencontre donne lieu à un procès-verbal.
Enfin, l’Inspection générale des services judiciaires a observé qu’une pièce de l’instruction, à savoir un CD-Rom, avait été transmise pour expertise à un tiers à l’instruction.
Ces trois faits sont considérés par l’Inspection comme des fautes déontologiques. Comment imaginer que le garde des sceaux, alors que le débat sur la responsabilité des magistrats est ouvert, puisse considérer qu’il ne faudrait pas saisir le Conseil supérieur de la magistrature, qui est le juge des juges ? Aujourd’hui, ce n’est pas à moi de juger, ni à vous, monsieur Montebourg, ni d’ailleurs à M. Van Ruymbeke, mais au Conseil supérieur de la magistrature. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Dans cette affaire, il est clair que ceux qui parlent de l’indépendance des juges feraient mieux de respecter la procédure de jugement des juges, qui passe par leur renvoi devant le Conseil supérieur de la magistrature, présidé, je le rappelle, par le premier président de la Cour de cassation, puisqu’il s’agit d’un juge du siège. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Mesdames, messieurs les députés, arrêtons de politiser les affaires de justice ! Et puis, monsieur Montebourg, tout ce qui est excessif est insuffisant. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Des rumeurs persistantes font état de la vente de sites industriels français et allemands. L’absence de démentis clairs génère beaucoup d’angoisse chez les salariés et fait réagir de nombreux responsables politiques, locaux et nationaux. En Allemagne, par exemple, la chancelière Angela Merkel et son ministre de l’économie ont vivement réagi pour défendre les sites allemands et ont demandé à rencontrer au plus vite Louis Gallois. Le gouvernement britannique, pour défendre son tissu industriel, a, quant à lui, purement et simplement menacé EADS de représailles commerciales. Même si je sais que vous suivez de près ce dossier, je peux vous assurer, monsieur le Premier ministre, que les salariés ne comprennent pas le silence de l’État français, d’autant qu’il est actionnaire d’EADS.
Ma question est très simple : quand le Gouvernement va-t-il…
Les maîtres mots de cette réforme ont donc été anticipation et prévention, avant le stade de la cessation de paiements. Elle a entièrement rénové le droit des procédures collectives, qui souffrait de l’absence de mécanismes juridiques d’anticipation des difficultés des entreprises.
Grâce à cette loi, la société Eurotunnel, dont le plan de sauvegarde a été validé par le tribunal de commerce de Paris le 15 janvier dernier, a ainsi pu être sauvée de la faillite. Il s’agit du premier feu vert donné à un plan de sauvegarde pour une entreprise d’une telle ampleur. Mais ce dispositif bénéficie aussi à des petites entreprises, puisque la moitié des sauvegardes concerne des entreprises de moins de dix salariés.
Après un an d’application, pouvez-vous, monsieur le garde des sceaux, dresser un premier bilan de la loi de sauvegarde des entreprises et nous indiquer quelles en sont les conséquences sur l’emploi ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Cette loi, comme l’indique son beau nom, entend sauvegarder les entreprises, et elle y parvient. Elle oblige à un changement culturel. Auparavant, on attendait la cessation de paiements pour aller voir le président du tribunal de commerce ; aujourd’hui, on peut aller le voir dès les premières difficultés et se mettre en situation de sauvegarde. C’est le chef d’entreprise qui le décide, et personne d’autre. De leur côté, les créanciers s’organisent en comités et peuvent aller plus loin qu’avant dans la remise de dettes et dans l’aide apportée aux entreprises.
À ce jour, nous avons sauvé quelque 11 000 emplois grâce à cette procédure de sauvegarde. Vous avez donné l’excellent exemple d’Eurotunnel, qui a demandé à bénéficier de cette procédure, ce qui a permis de sauver dix-sept filiales. Sont actuellement en cours 700 procédures de sauvegarde, décidées par 70 % des tribunaux de commerce français. C’est une excellente nouvelle pour l’économie, c’est une excellente nouvelle pour la France. Voilà qui montre qu’il y a une mentalité nouvelle, qui consiste à anticiper les difficultés plutôt que de courir après une fois qu’il est trop tard. Merci, monsieur Favennec, d’avoir rappelé que la loi de sauvegarde est l’une des fiertés de notre majorité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Mandatée par mes collègues membres de la commission de la défense nationale et des forces armées, j’ai remis, le 24 janvier, un rapport sur une éventuelle filière de déconstruction des navires de guerre. Ce travail de longue haleine m’a permis de dresser un état des lieux que j’espère être le plus complet possible. Il m’autorise à évoquer des pistes, tant pour les navires militaires, objet de mon rapport, que pour la flotte civile, sur laquelle j’ai également réfléchi. Je suis bien consciente que la suite à donner à mes conclusions, ainsi qu’à celles de la mission interministérielle sur le démantèlement des navires, dont vous aurez bientôt connaissance, dépendra de choix politiques. Aussi aimerais-je savoir si l’État, comme je le préconise, est prêt à assumer le coût de la déconstruction de navires de guerre.
Second sujet que je souhaite aborder : les frégates multi-missions. Ce programme, le plus gros contrat jamais signé en la matière, doit conforter notre flotte militaire du fait de la construction de vingt-sept bâtiments, dont dix-sept français. Il constituera un plan de charge important pour nos industries de défense. Mais force est de constater que le bassin brestois est, à ce jour, peu doté dans ce programme.
DCN, entreprise privée, à capitaux appartenant majoritairement à l’État, se doit de renforcer son plan de charge sur le site brestois, qui, reconnaissons-le, a reçu depuis quelques années, par le biais des marchés de maintien en conditions opérationnelles, entre autres, des contrats importants.
Je vous remercie, madame la ministre, des réponses que vous voudrez bien m’apporter. (Applaudissement sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Sachez que l’État a toujours assumé le coût des opérations qu’il a décidées. Aujourd’hui, ce que nous voulons, c’est créer une filière et un processus qui, tout à la fois, garantissent la santé des salariés qui interviendront, préservent l’environnement et assurent une viabilité sur le plan économique.
Une filière de déconstruction européenne est possible, une implantation nationale l’est aussi. Pour autant, Brest, comme d’autres ports, même si elle a des atouts en la matière, ne semble pas très investie dans ce domaine et paraît plutôt privilégier les constructions neuves et l’entretien des navires commerciaux.
En ce qui concerne les frégates multi-missions, il n’est pas envisagé de transférer des personnels de DCN-Brest vers DCN-Lorient. En revanche, l’établissement DCN de Brest devrait apporter un renfort ponctuel à la réalisation des sous-ensembles complets. De plus, ses équipes seront certainement associées au programme FREMM dès la construction du prototype pour l’intégration et la mise en œuvre des équipements.
Comme vous l’avez dit, à partir de 2010, Brest sera très fortement mobilisée puisqu’elle sera à la pointe de l’adaptation M 51 des sous-marins lanceurs d’engins, qui représente un contrat de 2 milliards d’euros. Cela induira donc une activité très importante dans tous les secteurs concernés, à Brest en particulier. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Avez-vous conscience qu’en procédant de la sorte vous autorisez la poursuite des « petites arnaques », qui, multipliées, finissent par enrichir certains gros distributeurs ou fournisseurs de services ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
Ou bien peut-être ne souhaitiez-vous pas que nous saisissions l’occasion de l’examen de ce projet pour faire le bilan de l’action « baisse des prix » menée par M. Sarkozy (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe socialiste),…
J’aurais pu aussi évoquer la pseudo-baisse des carburants, dont nos concitoyens subissent les conséquences. Voilà les résultats de votre politique !
Autre explication : peut-être vouliez-vous couper court au débat initié par le candidat Sarkozy sur l’ouverture des commerces le dimanche, dont vous savez qu’elle est refusée par les syndicats de salariés mais aussi par les associations familiales et de consommateurs, ainsi que par les syndicats représentatifs du petit commerce et de l’artisanat.
Monsieur le Premier ministre, nous attendons vos réponses. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
Vous savez également qu’une quinzaine d’heures de séance publique étaient prévues pour son examen. Or, le nombre très élevé d’amendements déposés ou en préparation rendait matériellement impossible la discussion de ce texte en si peu de temps. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Quoi qu’il en soit, ce travail existe et c’est l’honneur de ce gouvernement de l’avoir mené à son terme. (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Il appartiendra évidemment à la prochaine majorité de s’en inspirer.
Cela dit, monsieur le député, vous avez tort de négliger d’autres aspects dont les consommateurs ont profité, comme les marges arrière ou la transparence, avec le chariot-type,…
Comme en matière de sécurité routière, les Français sont capables de changer leur comportement pour sauver des vies. Ce succès témoigne de leur sens de la responsabilité et de leur désir de se respecter les uns les autres.
Comment interprétez-vous, monsieur le ministre, cette réussite, qui est une victoire pour la santé publique…
Comme vous l’avez indiqué, la date du 1er février marque un succès formidable pour la santé des Français. Elle montre que la société française n’est pas une société bloquée et que la volonté de faire en sorte que l’interdiction de fumer dans les lieux publics devienne réalité a été comprise par les Français.
Je veux aussi saluer la compréhension des fumeurs, tout comme la mobilisation des non-fumeurs sur cette question.
Voilà comment nous allons pouvoir sauver des vies, comme en matière de lutte contre l’insécurité routière, conformément à la volonté du Président de la République. Je rappelle que le tabac est responsable de 66 000 décès chaque année dans notre pays et que 5 000 personnes meurent victimes de la fumée des autres. Désormais, il n’y aura plus de fatalité, d’autant que, parallèlement à cette interdiction de fumer dans les lieux publics, il est prévu d’aider les fumeurs à s’arrêter de fumer. La semaine dernière, je me suis rendu, avec le Premier ministre, à l’hôpital de Bondy, où nous avons pu voir que le doublement des consultations de tabacologie et la prise en charge financière de l’aide à l’arrêt peuvent permettre de sauver des vies. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Élaboré depuis maintenant trois ans et évalué régulièrement, le plan pandémie du Gouvernement français est considéré par les experts comme l’un des meilleurs sur le plan international. Mais le virus H5N1, hautement pathogène, interdit à tous – dirigeants politiques, instances de sécurité sanitaire ou encore éleveurs avicoles – le moindre relâchement. Vous le savez, monsieur le ministre, la mission d’information présidée par Jean-Marie Le Guen et dont je suis le rapporteur poursuit ses travaux régulièrement.
Comptez-vous adopter d’autres mesures dans les jours qui viennent en fonction de l’évolution de la situation et quelle sera l’implication de la délégation interministérielle de lutte contre la grippe aviaire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Le Premier ministre a réuni ce matin les ministres concernés, dont le ministre de la santé et moi-même, pour dresser le bilan de la situation. Pour l’instant, on ignore la cause de ce qui s’est passé en Angleterre – on espère le savoir –, mais les autorités britanniques ont pris toutes les mesures de précaution nécessaires.
En respectant strictement le conseil de l’AFSSA, nous avons adopté des mesures de précaution : interdiction des appelants – mais la chasse est fermée depuis le 31 janvier – et de certains types de lâchers de pigeon, et nous avons demandé à tout le réseau sanitaire de se mobiliser et de procéder à une surveillance. Je lance donc ici, relayant les propos du Premier ministre ce matin, un appel à tous les éleveurs, à tous les partenaires du système vétérinaire, mais aussi aux chasseurs, aux promeneurs, à tous ceux qui sont dans la nature pour signaler tout ce qui pourrait s’avérer suspect.
Si nous sommes vigilants, comme nous l’avons été l’an passé, nous devrions éviter pour notre pays, sauf aléas, le phénomène de la grippe aviaire. En tout cas, cela passe par la mobilisation de tous, des éleveurs, des vétérinaires et des pouvoirs publics.
Je vous remercie, monsieur Door, de m’avoir permis d’appeler à la mobilisation de chacun, mais il n’y a pas de raison de s’affoler pour l’instant. Nous sommes dans une période d’observation et de prévention. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
De surcroît, l'entreprise EADS est confrontée à la volonté de désengagement des deux actionnaires privés, Daimler-Chrysler du côté allemand, et Lagardère du côté français, dont le président revendique sa proximité avec votre ministre de l'intérieur, absent une fois de plus pour cause de campagne électorale.
Quelle est la réponse du Gouvernement pour que la France recouvre la maîtrise de la participation nationale dans le capital d'EADS ?
D'une manière plus générale, concernant une entreprise stratégique dont l'État est l’un des principaux actionnaires, nous ne pourrions accepter que le développement se fasse désormais sur la base de délocalisations vers des pays à bas salaires.
Au-delà de l'incantation pour le patriotisme économique, quelle est l'action du Gouvernement pour qu'Airbus dispose des moyens suffisants au développement de l'A 350 et de l'A 380 sur les quatre sites français ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
Mais quelle est votre question ? Si vous voulez connaître le contenu du plan que le président Gallois dévoilera le 20 février, je ne peux pas vous le donner avant cette date !
Si vous voulez que je rappelle l’importance et l’utilité du plan industriel, je peux le faire ! Ce plan est un élément clé, qui permettra de lancer l’A 350 et de compléter toute la gamme des Airbus.
Airbus est une entreprise solide, dont nous pouvons être fiers. Elle doit absolument adapter ses fabrications et continuer à innover pour développer l’A 350. Mobilisons-nous ensemble derrière cette ambition ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Ne pouvant laisser subsister pareil vide juridique, le Parlement a adopté, sur proposition du groupe UMP, un amendement au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 rétablissant les 39 heures dans la restauration, dans l’attente d’un nouvel accord de branche.
Ce régime transitoire a pris fin le 31 janvier dernier. Hier, les organisations patronales, les principaux syndicats de l’hôtellerie-restauration ont conclu un accord sur les heures supplémentaires au-delà des 35 heures. Pourriez-vous, monsieur le ministre, nous en donner la teneur et nous préciser s’il clarifie bien la situation dans laquelle se trouvent les restaurateurs depuis la décision du Conseil d’État ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Les partenaires sociaux, puissamment soutenus par la direction générale du travail, se sont mis autour de la table et ont conclu un accord qui est ouvert à la signature jusqu’à vendredi. Je voudrais leur rendre hommage pour avoir surmonté les difficultés qu’ils ont rencontrées au cours de ces dernières années et pour avoir abouti à un accord sur le temps de travail.
Cet accord met fin au système des « heures d’équivalence ». Les heures supplémentaires seront majorées de 10 % entre 36 heures et 39 heures ; de 20 % entre 40 heures et 43 heures ; et, au-delà, de 50 %. Nous sommes même allés plus loin en adaptant le régime de travail aux spécificités du secteur : les temps de repos ont été aménagés, et, plus important encore, la classification et les grilles salariales révisées, pour rendre le secteur plus attractif. Les salariés sont gagnants, les entreprises sont gagnantes et l’attractivité des métiers, qui occupent plus de 800 000 salariés, est confortée dans ce secteur fortement créateur d’emplois.
Un bonheur ne venant jamais seul, l’industrie chimique a signé hier un accord salarial, alors qu’il n’y avait pas eu de négociations pendant sept ans ! Et, ce matin même, les partenaires sociaux nous ont fait savoir qu’ils étaient d’accord, en application de la loi de modernisation du dialogue social, pour ouvrir une négociation interprofessionnelle sur l’assurance complémentaire santé. À ceux qui nous accusent de ne pas avoir privilégié le dialogue social, je déclare que le dialogue social est en marche et que c’est à cette aune qu’il faut mesurer l’action du Gouvernement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Cependant – et je vous l’avais dit, monsieur le ministre de l’aménagement du territoire, quand vous êtes venu dans l’Orne il y a un peu plus d’un an et demi –, certaines communes restent complètement à l’écart tant de la téléphonie mobile que de l’accès à Internet – c’est ce que l’on appelle les « zones blanches ». Pire encore, il y a des communes qui, si l’on se fie aux dépliants des grands opérateurs, sont desservies, mais qui, en réalité, ne le sont pas ou qui, quand elles le sont, sont très régulièrement victimes de dysfonctionnements se traduisant par des interruptions de service.
Pouvez-vous ensuite nous dire quelles initiatives prendre vis-à-vis des opérateurs, dont certains conviennent officieusement qu’ils ne pourront pas équiper certaines communes faute de rentabilité ? De tels propos sont inacceptables et je pense que l’ensemble de mes collègues s’associent à moi pour demander avec fermeté que l’équilibre entre territoires soit rétabli. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
En juin 2005, il restait 3 000 communes en zone blanche, s’agissant de la téléphonie mobile. Nous avons décidé d’affecter 44 millions d’euros du fonds national d’aménagement du territoire et de consentir une exonération de TVA de 20 millions d’euros. Des collectivités, comme les régions et les départements, ont apporté un complément, si bien que, sur ces 3 000 communes, nous en avons couvert près de 1 700. J’ai veillé à convoquer tous les mois les opérateurs pour m’assurer que le rythme mensuel de quatre-vingt-dix communes rurales était respecté. Toutes les communes restantes seront couvertes d’ici à la fin de l’année, conformément à l’accord que nous avons passé avec elles.
Vous avez eu raison de le souligner, monsieur Lenoir, dans l’Orne, cinquante et une communes sur les cinquante-sept répertoriées sont couvertes à ce jour. J’ai demandé au préfet de dresser un relevé de celles qui restent et qui n’ont pas été identifiées en zone blanche, afin qu’aucune d’entre elles ne soit oubliée.
Je précise que je dois signer une convention avec les opérateurs d’ici à la fin du mois, afin que tous les grands itinéraires nationaux – routiers et ferroviaires – soient équipés en téléphonie mobile.
Enfin, s’agissant du haut débit, alors que le taux d’équipement des foyers était de 75 % en juin 2005, il est passé aujourd’hui à 95 %. Avec François Loos, nous avons accordé en juillet dernier deux licences WiMax pour desservir les zones blanches dans chacune des régions. D’ici au mois de juin 2007, l’ensemble des zones blanches seront desservies ! La France pourra alors revendiquer un taux de couverture de 100 % en téléphonie mobile, de 100 % en Internet à haut débit.
(La séance, suspendue à quinze heures cinquante-cinq, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de M. Yves Bur.)
La parole est à Mme Cécile Gallez, rapporteure de la commission mixte paritaire.
J’observe du reste que la plupart des dispositions du texte n’ont pas suscité d’oppositions majeures au cours de son examen en première lecture par notre assemblée. Il en a été de même au Sénat. Les débats parlementaires ont donc été très constructifs, même s’ils ont parfois porté sur des dispositions qui relèvent plus du règlement que de la loi.
Ce projet de loi comportait initialement trente articles, auxquels notre assemblée avait ajouté dix articles additionnels lors de son examen en première lecture le 11 janvier 2007. Sur ces quarante articles, le Sénat en a adopté vingt-neuf conformes, soit près des trois quarts. Il a par ailleurs inséré trois nouveaux articles au cours de sa séance du mercredi 24 janvier 2007. Quatorze articles du projet de loi restaient donc en discussion. La commission mixte paritaire, qui s’est réunie le 31 janvier dernier, est parvenue à un accord équilibré sur chacun d’entre eux. En voici les principaux points.
La plupart des modifications apportées par le Sénat ont été approuvées par la CMP, car elles permettent d’améliorer le texte. Elles concernent principalement le renforcement de la sécurité sanitaire, l’amélioration de la transparence et la suppression des dispositions relatives aux programmes d’accompagnement des patients.
En ce qui concerne le renforcement de la sécurité sanitaire, le Sénat, à l’article 4, a adopté un amendement de la commission des affaires sociales qui renforce le contrôle sur la sous-traitance des préparations magistrales entre pharmaciens, en prévoyant une autorisation préalable délivrée par le préfet, après avis du DRASS. Cette disposition bienvenue fait suite à un accident survenu récemment dans une pharmacie à Paris.
Les dispositions introduites par le Sénat à l’article 15 bis permettront par ailleurs de renforcer le contrôle des importations et exportations des micro-organismes pathogènes et des toxines.
À l’article 21, les délais de notification à l’AFSSAPS de toute action tendant à suspendre ou à retirer un médicament du marché ou de tout risque de rupture de stock ont été modifiés. Le code de la santé publique continuera donc à disposer que, pour « tout risque de rupture de stock sur un médicament ou produit sans alternative thérapeutique disponible ou en raison d’un accroissement significatif et imprévisible de la demande », les délais de notification à l’AFSSAPS sont immédiats. Toutefois, des délais plus précis sont prévus à l’article 4 de la proposition de loi relative à la préparation du système de santé à des menaces sanitaires de grande ampleur, qui devrait être examinée très prochainement par notre assemblée.
Enfin, le Sénat a introduit deux articles additionnels en vue de préciser les conditions de délivrance et de renouvellement de l’autorisation d’ouverture d’un établissement pharmaceutique et d’encadrer les règles relatives à la fabrication des médicaments radiopharmaceutiques.
La commission mixte paritaire a également adopté une série de dispositions introduites par le Sénat afin d’améliorer la transparence.
À l’article 15 ter, le Sénat a adopté un amendement prévoyant que les logiciels d’aide à la prescription, qui, grâce à un amendement adopté par l’Assemblée, doivent permettre de prescrire en DCI, comportent une information relative à leur concepteur et à la nature de leur financement. Cette disposition est de nature réglementaire et son application sera difficile, mais l’esprit qui l’anime va dans le sens du renforcement de la transparence.
À l’article 28 bis, le Sénat a également renforcé et précisé l’obligation de transparence du financement des associations de patients par les laboratoires.
Aux articles 26 et 26 bis, le Sénat a considérablement renforcé la transparence des travaux de l’AFSSAPS et a étendu cette obligation à la commission de la transparence de la Haute Autorité de santé. L’objectif est louable, assurément. Il appelle toutefois deux observations : d’une part, ces dispositions relèvent du pouvoir réglementaire ; d’autre part, elles nécessitent des moyens supplémentaires.
En ce qui concerne la suppression des programmes d’observance, le Sénat a adopté à l’article 29, avec l’accord du Gouvernement, un amendement du rapporteur supprimant du champ de l’habilitation les programmes d’observance. L’Assemblée nationale, consciente des dangers potentiels de cette disposition, avait adopté des amendements visant à préciser strictement le champ de l’habilitation dans un sens favorable aux patients et à la sécurité sanitaire. Au Sénat, le Gouvernement a pris acte de la forte opposition que suscite son projet, à la fois sur le fond et sur la forme. L’habilitation a donc été supprimée. De fait, si, sur le fond, les programmes d’observance ne méritent pas l’opposition systématique qu’ils provoquent, il était peut-être maladroit de proposer au Parlement de se dessaisir de sa compétence sur ce sujet très sensible, sans que l’urgence le justifiât. C’est pourquoi la commission mixte paritaire a maintenu la suppression de cette disposition.
Enfin, à l’article 29, le périmètre de l’habilitation accordée au Gouvernement a été réduit. Sa durée a été ramenée de huit à trois mois en ce qui concerne les ordonnances qui n’ont pas pour objet la transposition des directives européennes. En effet, pour celles-ci, le Sénat n’a pas souhaité accorder au Gouvernement une habilitation qui irait au-delà du terme de la présente législature. La CMP a approuvé cette modification.
La commission mixte paritaire est parvenue à un accord sur les autres dispositions du projet qui faisaient l’objet de divergences entre les deux assemblées. Outre divers amendements rédactionnels, la CMP a traité différents problèmes de fond.
S’agissant des médicaments dérivés du sang, j’ai bien compris les motivations du Sénat, qui a supprimé l’article 9 bis, introduit à l’Assemblée nationale à mon initiative. Il n’en reste pas moins que, si les impératifs déontologiques et éthiques sont essentiels, je pense qu’il faut tout faire pour éviter à l’avenir une éventuelle pénurie. Ces médicaments sont en effet indispensables au traitement de maladies rares et graves, telles que l’hémophilie ou les déficits immunitaires. C’est pourquoi la prolongation, strictement encadrée, de deux à trois ans de la durée d’autorisation de mise sur le marché des médicaments dérivés du sang issu de prélèvements rémunérés ne me paraissait pas remettre en cause les grands principes éthiques sur lesquels notre système sanitaire a été bâti. La suppression de cet article 9 bis a néanmoins été maintenue par la CMP.
À l’article 15, le Sénat a adopté un amendement qui pourrait se traduire par l’obligation pour le titulaire d’une AMM délivrée par l’AFSSAPS de tenir à disposition, sur demande, des notices et étiquetages particuliers à destination des personnes handicapées. Or cette obligation, non prévue par la directive, ferait peser sur les titulaires d’AMM délivrées par l’Agence une contrainte supplémentaire par rapport aux titulaires d’AMM délivrées dans un autre État membre ou d’AMM communautaires. De plus, il paraît difficile aux industriels de mettre à disposition une information dans des formats adaptés à tout handicap.
Enfin, rien n’empêche une collaboration dans ce sens entre industriels et associations. À mon initiative, la CMP a donc supprimé cette disposition.
À l’article 26, j’ai proposé à la CMP d’adopter un amendement visant à ne pas imposer à l’AFSSAPS l’obligation de publier immédiatement le rapport de synthèse de l’évaluation effectuée pour tout nouveau médicament, ni l’obligation de publier le compte rendu de ses travaux. Une publication sans délai de ces documents serait en pratique difficilement applicable ; de plus, il est préférable de disposer d’informations fiables, fût-ce après un certain délai. La CMP a adopté mon amendement.
Le problème qui a le plus divisé les membres de la CMP a été celui de l’usage du titre de psychothérapeute. En effet, le Sénat a supprimé les amendements introduits à l’Assemblée nationale à l’initiative de MM. Accoyer et Dubernard et de moi-même : le premier permettait de pallier les dangers de la reconnaissance « de fait » des personnes utilisant actuellement le titre de psychothérapeute sans aucune formation ; le second précisait que la formation des professionnels serait assurée dans le cadre universitaire.
Les membres de la CMP ont été convaincus par les arguments du président Accoyer. Ils ont adopté deux amendements à l’article 52 de la loi relative à la politique de santé publique : le premier, déposé notamment par les présidents Dubernard et Accoyer et par moi-même, dispose que, pour s’inscrire sur la liste départementale du registre de psychothérapeute, les professionnels ne bénéficiant pas d’une inscription de droit mais justifiant d’au moins trois ans d’expérience professionnelle en qualité de psychothérapeute doivent obtenir l’autorisation d’une commission régionale. Cette commission détermine, compte tenu de l’expérience du professionnel, le niveau de formation adapté et autorise le professionnel à s'inscrire sur la liste départementale à l’issue de la réalisation de cette formation. Le second amendement, proposé par le sénateur Alain Vasselle, dispose que les formations prévues à l’article 52 soient assurées sous l’autorité d’un établissement d’enseignement supérieur ou d’un organisme agréé par l’État.
Cette démarche s’inscrit dans la logique de cet article 52 et ne s’oppose pas à l’adoption des décrets d’application avant la fin de la législature. À mon avis, ces dispositions trouvent bien leur place dans le présent texte. Il s’agit bien de combler un vide juridique, et l’urgence commande l’adoption de ces dispositions.
Mes chers collègues, la CMP a réussi à trouver un accord sur un texte équilibré qui permet d’assurer la transposition législative du « paquet médicament » adopté en 2004, transposition qui n’a que trop tardé. Je vous demande donc d’adopter ses conclusions. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Comme vient de le souligner notre excellente rapporteure Cécile Gallez, ce texte vise à transposer une directive du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 modifiant une directive de 2001 instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain. Il habilite également le Gouvernement à transposer par voie d’ordonnance cinq autres directives relevant du même domaine. Au-delà de dispositions souvent techniques, ce projet parachève l’harmonisation européenne dans le domaine du médicament, plus de quarante ans après la première directive et après la création, en 1995, de l’Agence européenne du médicament.
Il est particulièrement bienvenu que le Gouvernement ait déclaré l’urgence sur ce texte afin que nous puissions transposer sans délai ces directives européennes, et que nous continuions ainsi de tenir notre engagement à rattraper notre retard en matière de transposition. C’est particulièrement vrai au moment où la Commission européenne vient de saluer les efforts entrepris dans ce domaine par les membres de l’Union européenne en général et par la France en particulier.
Ainsi que l’a indiqué notre rapporteure, ce projet comporte plusieurs avancées, sur lesquelles je ne reviendrai pas en détail. Je tiens seulement à revenir rapidement sur quelques points qui recueillent un large consensus.
Ce texte permettra de renforcer la sécurité sanitaire en cas de menace grave, sujet sur lequel nous devons en permanence rester vigilants – comme c’est le cas en ce qui concerne la grippe aviaire. Il a aussi introduit la notion de « traçabilité » des médicaments, notion à laquelle je suis, vous le savez, monsieur le ministre, très attaché.
Ce projet modifie par ailleurs le régime juridique des autorisations de mise sur le marché en accroissant les exigences de sécurité sanitaire des médicaments. Il comprend ainsi des mesures visant à faciliter et à accélérer la mise sur le marché des médicaments génériques, notamment en favorisant la prescription en dénomination commune internationale, la fameuse DCI.
Enfin, ce texte permettra de renforcer l’indépendance de l’expertise et la transparence des travaux menés par les agences sanitaires, en particulier par l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, laquelle devra notamment rendre accessible au public un rapport d’information sur l’autorisation de tout nouveau médicament, ainsi que les motivations de la décision qu’elle aura prise.
Au cours de la procédure parlementaire, ce projet a été enrichi de plusieurs dispositions importantes, sur lesquelles je tiens à dire quelques mots.
Commençons par l’extinction du dispositif de recyclage des médicaments inutilisés, notamment à travers le réseau Cyclamed. Celui-ci, bien que généreux dans ses principes, a montré plusieurs effets néfastes. Cette extinction suscite certaines inquiétudes de la part des organisations non gouvernementales qui œuvrent auprès des populations les plus pauvres, comme l’Ordre de Malte. Je sais, monsieur le ministre, que vous avez engagé avec elles ainsi qu’avec les entreprises du médicament, des négociations afin de trouver de nouvelles solutions. J’espère que vous allez nous faire part de l’avancement de ces discussions.
Une autre avancée concerne l’instauration d’un abattement sur la contribution sur le chiffre d’affaires pour les dépenses de recherche et développement des laboratoires pharmaceutiques éligibles au crédit d’impôt recherche. Cette disposition, qui figurait dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, avait été censurée par le Conseil constitutionnel pour des raisons de procédure. Il est heureux qu’elle ait pu être réintroduite dans ce texte. En effet, cette mesure, attendue depuis longtemps par les entreprises du médicament, permettra de soutenir la recherche privée en France. À cet égard, la réunion du conseil stratégique des industries de santé, qui s’est tenue hier, constitue un signal fort. Je crois même savoir – et vous nous le confirmerez peut-être, monsieur le ministre – qu’un accord important pour la recherche dans le domaine pharmaceutique a été finalisé hier même.
Lors de sa réunion du 31 janvier dernier, la commission mixte paritaire est parvenue, me semble-t-il, à un point d’équilibre sur trois dispositions importantes, ainsi que l’a rappelé Mme la rapporteure.
La première concerne la question des médicaments dérivés du sang. Je sais, madame Gallez, que vous étiez attachée à cette disposition prévue à l’article 9 bis, qui visait à porter de deux à trois ans la durée des autorisations de mise sur le marché délivrées à titre exceptionnel pour les médicaments préparés à partir de sang rémunéré. Comme vous le savez, cela a suscité les craintes des donneurs bénévoles, qui redoutaient une remise en cause du principe de gratuité du don.
Ensuite, la suppression, confirmée par la commission mixte paritaire, de la disposition prévue à l’article 29 relative aux programmes d’accompagnement des patients financés par les établissements pharmaceutiques – les « programmes d’observance » – constitue une solution de sagesse.
Comme vous le savez, monsieur le ministre, cette mesure, portant sur un sujet sensible, avait suscité de vives réserves de la part des députés, tant sur le fond que sur la forme. Malgré les garanties que vous aviez apportées à l’Assemblée nationale et malgré la nécessité d’une observance qui doit être respectée de la part des patients, il faut reconnaître que le débat n’est peut-être pas suffisamment mûr et qu’il conviendra de poursuivre la concertation en y associant étroitement le Parlement. Aussi, je souhaite, monsieur le ministre, que vous puissiez tenir la représentation nationale informée des démarches que vous avez engagées sur ce dossier, et notamment des résultats de l’enquête diligentée auprès de l’Inspection générale des affaires sociales.
J’en viens enfin aux dispositions relatives à l’usage du titre professionnel de psychothérapeute. Je serai assez bref sur ce point important, qui a déjà été longuement évoqué dans cet hémicycle. Il s’agit, vous le savez, d’un sujet auquel le président de notre groupe, Bernard Accoyer, est à juste titre très attaché.
La commission mixte paritaire, s’appuyant notamment sur les propositions du sénateur Alain Vasselle, a trouvé une solution de compromis qui satisfait les usagers, beaucoup d’organisations professionnelles, les associations de victimes et des institutions éminentes telles que l’Académie de médecine ou la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires. Le travail intense de notre collègue Bernard Accoyer trouve là sa conclusion légitime et le cadre législatif attendu. Le vide juridique concernant le statut des psychothérapeutes se trouve ainsi comblé.
Pour l’ensemble de ces raisons, le groupe UMP votera ce texte qui s’est enrichi, au cours de nos débats, de dispositions importantes et attendues visant à encourager la recherche et le développement dans notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Cette fin de législature est en effet pour le moins chaotique quand on considère les textes qui nous sont proposés en matière de santé publique. Ainsi, après le projet de loi de financement de la sécurité sociale,…
Que pouvons-nous retenir de ce texte ? Il aurait pu, au départ, se révéler assez consensuel et assez anodin – simple transposition dans notre droit interne de réglementations européennes. Toutefois, au cours de la première lecture, le Gouvernement a jugé bon d’introduire un amendement prévoyant le financement des programmes d’accompagnement des patients – les « programmes d’observance » – par des laboratoires pharmaceutiques. Nous avons alors exprimé nos plus vives réserves sur cet amendement ajouté un peu à la va-vite par le Gouvernement, sans véritable concertation avec les acteurs de santé, et nous avons pointé le danger de légiférer dans la précipitation sur l’évolution du disease management – la gestion des malades chroniques – en établissant un lien direct avec les laboratoires pharmaceutiques. Il était en effet pour le moins singulier d’aborder pour la première fois cette question dans notre code de santé publique à travers l’action des laboratoires pharmaceutiques.
Après quelques semaines de débats au sein de la société, le Gouvernement a bien voulu écouter les observations de l’opposition, dont la majorité avait malheureusement si peu tenu compte. Ainsi, au Sénat, a-t-il décidé de retirer cet amendement le plus controversé en première lecture.
D’un certain point de vue, nous nous félicitons de cet abandon, dans lequel nous voyons le résultat du travail de l’opposition parlementaire en faveur d’un respect plus strict des impératifs de santé publique dans l’organisation de notre système de soins. En même temps, nous ne pouvons que regretter l’insuffisance de l’écoute, y compris au sein de cette assemblée.
Nous nous retrouvons donc avec un amendement de la majorité tout à fait singulier : en théorie, il aurait dû être ajouté à un texte voté il y a quelque temps, celui qui traitait des professions de santé, mais nos collègues ont trouvé utile, d’abord à l’Assemblée et au Sénat, puis en CMP – et non sans quelques évolutions –, d’ajouter un article sur l’organisation de la profession de psychothérapeute. Tout le monde connaît l’histoire : le sujet, abordé dès 2002, a été mis en exergue en 2004 lors de la discussion de la loi relative à la politique de santé publique. Un amendement avait été adopté qui avait déjà suscité un débat, non seulement entre nous, mais également parmi les acteurs de santé concernés. Non que nous contestions la nécessité de bien mieux organiser la psychothérapie et d’y introduire de la clarté,…
M. Accoyer nous l’a répété en CMP : d’après ce qu’il sait, lui, de ce décret – car nous autres parlementaires de l’opposition n’en avons pas connaissance…
Certains collègues de la majorité nous disent donc que ce décret ne leur convient absolument pas, qu’il ne prévoit pas de période intermédiaire, etc. Que n’en parlent-ils avec le ministre de la santé, qui, si j’ai bien compris, a par ailleurs un rôle politique éminent dans l’organisation actuelle de la majorité ! J’avais imaginé qu’un dialogue fructueux aurait pu s’instaurer et que la majorité de cette assemblée aurait été à même de se faire entendre d’un ministre investi de telles responsabilités – un « porte-parole », en quelque sorte… (Sourires.)
Or pas du tout ! Au contraire, ce projet de loi est le moyen de nous solliciter pour intervenir – par le biais d’un morceau d’amendement à un texte qui n’a rien à voir avec le sujet – pour régler la période intermédiaire avec la publication d’un décret qui n’a toujours pas été pris par le Gouvernement. Franchement, la construction juridique – pour ne rien dire du fond – et la construction politique du débat démocratique sont totalement surréalistes ! Nous ne pouvons accepter un tel dévoiement de la procédure parlementaire. Nous vous demandons donc de rejeter ce texte, et en particulier l’amendement adopté en CMP. Il sera intéressant d’entendre le Gouvernement s’exprimer : dira-t-il ce qu’il pense d’un décret non encore publié à l’heure actuelle mais critiqué par la majorité qui fait voter un article de loi pour en limiter les effets négatifs ?
Quand nous en aurons fini avec ce texte, soyez de toute façon assurés que, si nous ne sommes pas suivis, nous saisirons le Conseil constitutionnel. Peut-être même attendez-vous cela de l’opposition, monsieur le ministre, et tenez-vous le raisonnement suivant : « Finalement, ce que je ne pourrai pas expliquer à mes amis de la majorité, je vais m’arranger pour ce soit le Conseil constitutionnel qui le censure : il fera ainsi le travail à ma place ! » Voilà où nous en sommes !
Le Gouvernement n’a décidément pas beaucoup de chance avec les dispositions touchant à la santé mentale. M. le ministre a-t-il l’intention de dire quelque chose sur les articles 18 à 24 du projet de loi relatif à la prévention de la délinquance, lesquels – peut-être l’ignorez-vous, mes chers collègues – tendent à organiser la santé mentale dans notre pays ? C’est drôle, tout de même, cette manière de traiter certaines questions avec des textes qui n’ont rien à voir ! Au point où vous en êtes, vous auriez pu intégrer ces articles au présent texte, puisque celui-ci nous fait passer du médicament aux problèmes de santé mentale et reprend l’amendement Accoyer. En tout état de cause, il est scandaleux qu’ils demeurent dans le texte relatif à la prévention de la délinquance alors que le Gouvernement avait juré qu’ils seraient retirés, au motif que les dispositions seraient prises par ordonnance. Mais, là aussi – quel manque de chance ! –, le Conseil constitutionnel est intervenu et a balayé votre tentative, monsieur le ministre.
Lorsque je dénonce ce chaos législatif, cette incohérence complète tant dans la procédure que sur le fond, j’ai l’impression d’être encore en deçà de la réalité. Voilà pourquoi nous appelons à voter contre ce projet, à moins que l’on ne revoie le texte de la CMP. Pourtant, certaines dispositions recueillaient notre agrément.
S’agissant du médicament, après que plusieurs amendements ont été discutés et adoptés à l’Assemblée, puis au Sénat, le texte définitif ne pose pas de problème. Le médicament n’est pas un produit comme un autre. Il a pour vocation de soigner, si possible de guérir et, mieux encore, de prévenir des pathologies plus ou moins invalidantes. Des progrès considérables ont été réalisés dans le traitement de nombreuses maladies. Certaines ont quasiment disparu, d’autres ont vu leurs conséquences diminuer, si bien que des économies non quantifiées en termes de mortalité mais aussi de durée d’hospitalisation et d’arrêt de travail ont pu être réalisées. Je pense notamment à la poliomyélite, au tétanos, aux ulcères digestifs, aux leucémies de l’enfant... Il me semble que, lorsque l’on parle de médicaments, on oublie à tort ce volet important.
Des progrès restent toutefois indispensables pour certaines maladies fréquentes et invalidantes dans nos pays développés, ainsi que pour les maladies orphelines. Surtout, nous sommes en attente pour les maladies dites tropicales : paludisme, maladies du sommeil, bilharziose, leishmaniose, etc., qui touchent des millions de personnes chaque année. Il est donc nécessaire de développer la recherche, de favoriser les coopérations publiques et privées, de permettre à l’industrie pharmaceutique de disposer de moyens pour financer la recherche et le développement de molécules innovantes comme de thérapies géniques, hélas de plus en plus coûteuses.
Vous souhaitez, monsieur le ministre, le développement du générique, dont l’unique intérêt est d’être moins coûteux que le princeps. Le générique n’apporte aucune amélioration en termes de santé publique et de qualité de soins. Il est équivalent au princeps. Sa fabrication est aujourd’hui, pour l’essentiel, européenne, mais les fabricants de génériques ne participent en aucune manière à la recherche. Ce ne sont pas eux qui découvriront les molécules innovantes que nous attendons. Il faut donc s’employer dans le même temps à protéger l’industrie qui cherche et innove en veillant à la protection des brevets et en fixant un prix suffisamment rémunérateur aux molécules réellement innovantes.
J’ai longtemps soutenu que l’idéal serait que l’on abaisse le prix du princeps au moment où le brevet tombe dans le domaine public, pour permettre les économies souhaitées tout en garantissant la qualité du produit, puisque le laboratoire a la maîtrise du process de production. Quoi qu’il en soit, puisque nous sommes engagés dans une politique de développement du générique, souhaitons que les économies réalisées permettent par ailleurs de mieux financer la recherche et les molécules innovantes. C’est, je crois, votre souhait, monsieur le ministre : encore faut-il le mettre en œuvre.
L’industrie pharmaceutique est un partenaire qui doit être reconnu comme tel. Cela ne signifie pas pour autant qu’il n’est pas judicieux de contrôler les actions de publicité et de démarche marketing.
Aujourd’hui, nous disposons de molécules efficaces qui ont des effets bénéfiques mais aussi des effets pervers. Dans ce domaine, le risque zéro n’existe pas : le critère à prendre en compte est le rapport bénéfice-risque, qui doit être évalué lors de la mise sur le marché puis actualisé très régulièrement, de manière à être le plus juste possible. En effet, malgré toutes les précautions prises initialement, malgré la qualité et l’indépendance – parfois très relative – des experts, ce n’est souvent qu’après la mise sur le marché et l’utilisation par de nombreux patients conjointement avec d’autres produits qu’apparaissent les complications, par exemple par induction enzymatique. C’est pourquoi le renforcement de la pharmacovigilance et les études post-AMM sont indispensables.
L’article 15 prévoit à juste titre que le signalement incombe aux professionnels de santé et aux entreprises, auxquelles obligation est faite d’enregistrer tous les effets indésirables et de les transmettre aux agences sanitaires. Il s’agit d’une priorité de santé publique pour protéger au mieux les patients. La protection du patient demeure donc une obligation, d’où le rôle essentiel des agences, conforté par ce texte.
L’industrie pharmaceutique se veut un partenaire de la santé, au service des professionnels et des patients. Elle joue effectivement un rôle important dans la formation continue des professionnels et intervient de plus en plus en soutien des associations de malades. Je ne mets pas en doute les intentions altruistes et solidaires, et je reconnais l’intérêt de ce partenariat, mais il ne faut pas être naïf : n’oublions pas qu’une entreprise cherche d’abord à vendre son produit !
Ce texte comporte de nombreuses mesures qui doivent permettre une meilleure organisation de la chaîne du médicament, afin d’en renforcer la sécurité et la qualité. Nous nous réjouissons de ces dispositions qui concourent à une meilleure protection du patient.
Dans le texte d’origine, l’article 29 posait un réel problème : d’abord, il tendait à habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnance, disposition toujours fort désagréable pour un parlementaire ; ensuite, son troisième paragraphe, relatif à l’observance, était inapproprié. La question de l’observance se pose surtout pour les maladies chroniques. Mais, de mon point de vue, le premier temps doit être l’établissement d’une relation de confiance entre le médecin et son patient. Il faut que le médecin fasse preuve de pédagogie et prenne le temps d’expliquer le diagnostic, la stratégie thérapeutique, les effets pervers du traitement, la nécessité de le suivre cependant. Le suivi de l’observance, de l’adhésion au traitement, doit encore être de la compétence du médecin, ainsi que du pharmacien et de l’infirmière. Selon moi, ce n’est pas à l’industrie, ni directement ni indirectement, d’intervenir auprès des patients, même si je comprends parfaitement les raisons économiques d’une telle démarche.
Ce paragraphe a été supprimé par le Sénat, puis confirmé par la CMP. Le problème sera donc revu, mais il nous faut demeurer vigilants. À chacun sa place : l’industrie doit s’occuper de la recherche, du développement, de la fabrication et de la vente, pas de l’observance.
Un cavalier est par ailleurs apparu, concernant les psychothérapeutes, sujet important et sérieux puisqu’il touche par définition à l’intimité de la personne. Il est assurément nécessaire que les psychothérapeutes bénéficient d’une formation initiale et continue de qualité et que les pratiques soient évaluées. Protéger les patients en veillant à la qualité des intervenants et de leurs pratiques, tel était l’objet de la loi de 2002. La question devrait donc être réglée depuis longtemps. Or, quatre ans plus tard, les décrets, qui étaient presque prêts, nous a dit M. Bertrand lors de la première lecture, ne satisfaisaient pas tout le monde.
Nous avons donc vu apparaître deux amendements, sans aucun lien avec le médicament, qui devraient résoudre le problème. A priori, ils ne sont pas choquants, si ce n’est qu’ils n’ont pas fait l’objet de concertation. Après avoir été votés à l’Assemblée, ils ont été supprimés par le Sénat, pour réapparaître, quelque peu modifiés, en CMP. Ces amendements risquent d’être supprimés par le Conseil constitutionnel. Le problème resterait alors entier.
Comme je vous l’ai dit à plusieurs reprises, monsieur le ministre, nous aurions eu besoin d’un vrai DMOS, car de nombreux problèmes demeurent en suspens concernant la plupart des professions de santé, ainsi que les établissements de santé. Il est dommage que vous ne l’ayez pas présenté.
En conclusion, le groupe UDF approuve le texte de transposition, qui constitue un réel progrès pour le médicament. Il émet toutefois des réserves sur l’habilitation à légiférer à nouveau par ordonnance et sur les deux amendements relatifs aux psychothérapeutes, car ce sont des « cavaliers ».
Si nous notons avec satisfaction certains engagements, d’heureuses suppressions d’articles, notamment sur les programmes d’observance, nous restons insatisfaits par le déséquilibre qui demeure et que vous n’avez pas voulu corriger en renforçant le principe de pharmacovigilance en contrepartie de l’allégement des procédures d’AMM. Nous continuons de contester certaines dispositions du texte, qu’il était pourtant possible de faire évoluer, s’agissant notamment de la politique du générique, de la recherche – qui peut être encouragée autrement que par de nouveaux abattements fiscaux –, de la procédure d’AMM ou encore de l’impact environnemental. Nous aurions également apprécié que des mesures soient prises pour lutter efficacement contre la propagation des « me-too » en lieu et place de molécules vraiment innovantes.
Je note d’ailleurs que votre texte n’a pas reçu l’unanimité espérée au Sénat, puisque deux parlementaires de votre majorité n’ont pas voté votre projet, dont Mme Hermange, rapporteure de la mission d’information sur le médicament. Ce n’est pas dénué de sens et je comprends leur position.
Nous voulions, nous aussi, tenir compte du travail sérieux de cette mission du Sénat, dont plusieurs de nos amendements reprenaient les recommandations. Malheureusement, malgré leur importance, ils ont été rejetés, à l’exception de quelques-uns, de portée bien moindre. Je pense en particulier à ceux qui préconisaient des études comparatives lors de la délivrance de l’AMM, à ceux qui faisaient référence à la notion de valeur thérapeutique ajoutée ou encore à ceux qui traitaient de la transparence qui devrait guider les décisions de l’AFSSAPS et des moyens de cette agence.
Ces propositions présentaient le double avantage de poursuivre le développement nécessaire du générique tout en clarifiant la politique du médicament dans notre pays. Vous connaissez notre approche de cette question : soit un médicament est efficace, et alors il doit être remboursé intégralement en maîtrisant son prix de vente ; soit il est inefficace ou dépassé, et, dans ce cas, ce n’est plus un médicament, il n’est plus prescrit et il peut être déremboursé. Mais il n’est pas acceptable que des médicaments ne soient plus remboursés ou ne soient que remboursés partiellement alors qu’ils s’inscrivent dans un protocole thérapeutique, qu’ils ont une utilité et que les professionnels de santé continuent de les prescrire.
Si l’on avait introduit, comme nous le demandions, les notions d’études comparatives et d’apport thérapeutique ajouté, nous aurions pu bannir toutes les fausses nouveautés qui permettent à l’industrie pharmaceutique de renouveler la protection de ses brevets. Nous aurions aussi incité à la recherche de thérapies nouvelles plutôt qu’à la multiplication de médicaments pour des pathologies courantes, donc solvables, dans des domaines où il existe déjà de nombreux traitements.
Une étude de l’assurance maladie révèle en effet que « parmi les 499 présentations inscrites au remboursement en 2004, 50 seulement correspondent à de nouveaux principes actifs, dont 19 molécules. Sur ces 19 molécules nouvelles, on ne compte aucune amélioration majeure du service médical rendu, une ASMR importante et 8 ASMR modestes », le reste étant insuffisant. Le Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie, dans son rapport de juillet dernier, confirme cette tendance : « Entre 2000 et 2005, 70 % des nouveaux produits mis sur le marché eurent un niveau 5 d’ASMR » !
Nous regrettons donc sincèrement de ne pas avoir été suivis sur cette question alors qu’est reconnue la nécessité impérative de corriger la situation. D’autant que, lorsque les médicaments sont déremboursés mais continuent d’être prescrits, la charge en revient aux assurés sociaux. Et quelle charge ! Une étude de 60 millions de consommateurs montre que les prix de ces médicaments déremboursés ont augmenté en moyenne de 85 %, dans une fourchette allant de 25 % à 350 % selon la spécialité. Ce n’est vraiment pas acceptable !
Ce texte est également insuffisant sur la question de la collecte des médicaments, qu’il ne règle pas. Nous comprenons, monsieur le ministre, que des décisions devaient être prises et que l’on ne pouvait plus tolérer des agissements frauduleux. Mais il nous semble que la position arrêtée par le Gouvernement est trop radicale et risque d’aboutir à l’effet contraire de celui escompté. Nous avons été sollicités par plusieurs organisations sérieuses et reconnues œuvrant dans ce domaine. Elles s’inquiètent à juste titre des conséquences de ce texte. Il est encore temps d’ouvrir des discussions pour, dans un même mouvement, poursuivre votre action de clarification du milieu de la collecte sans pénaliser celles et ceux qui y sont engagés avec dévouement et honnêteté. Ne ruinez pas des années d’engagement en faveur des populations menacées ! La fourniture de médicaments par la collecte aux malades et aux personnes en situation de précarité sanitaire est un moyen essentiel pour lutter contre la mortalité infantile, contre les pandémies et en faveur de la santé maternelle et infantile. Cette solidarité doit être préservée et saluée, et les pouvoirs publics doivent en prendre toute la mesure. Je crains que la disposition proposée ne décourage ceux qui s’impliquent dans ce domaine.
Enfin, parmi les points d’insatisfaction concernant ce texte, je tiens à souligner les articles 29 et 30, qui renvoient aux ordonnances toute une série de dispositions liées à la transposition. Le recours à l’ordonnance n’est jamais acceptable à nos yeux et il l’est d’autant moins quand il s’agit du champ de la santé publique et du médicament.
Nous désapprouvons également le rétablissement en CMP des dispositions relatives aux psychothérapeutes. Ces articles, qui n’ont rien à voir avec le projet de loi et qui ont été introduits au forcing par le président du groupe UMP, vont encore accentuer les tensions dans le secteur. Décidément, nous ne serons jamais parvenus à avoir un débat serein et responsable sur le sujet !
Tout cela est fort dommage, car bien des aspects du texte sont positifs, il faut le reconnaître. J’ai évoqué l’attitude du Sénat – une fois n’est pas coutume – sur les programmes d’observance. C’est une victoire du mouvement médical et associatif, qui a su sensibiliser, alerter efficacement et de façon argumentée sur cette importante question. Je me réjouis également du maintien de la suppression de l’article 9 bis, qui pouvait remettre en cause sournoisement la gratuité des dons du sang et, par conséquent, un principe éthique fondamental selon lequel il ne peut y avoir ni commerce ni marchandisation dans ce domaine.
Si certaines inquiétudes ont été levées, nous considérons globalement qu’un rendez-vous a été manqué. Nous aurions pu en effet donner une autre dimension à notre politique du médicament à l’occasion de cette transposition. Ce n’est pas le cas, c’est bien dommage. C’est la raison qui nous conduit à maintenir notre abstention sur ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
La parole est à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.
Vous avez ajouté d’autres dispositions, qui visent, elles aussi, à améliorer la sécurité sanitaire. Le Gouvernement vous en est reconnaissant. Je pense notamment aux amendements qui instituent une traçabilité des médicaments jusqu’à l’officine, qui organisent la sous-traitance entre officines pour améliorer la qualité des préparations magistrales, ainsi qu’à ceux qui clarifient les motifs de retrait de l’autorisation de mise sur le marché d’un médicament.
D’autres mesures améliorent l’économie du secteur d’activité pharmaceutique. Le Gouvernement a souhaité en introduire une qui prévoit d’informer les laboratoires titulaires des brevets de la commercialisation imminente d’un générique pour leur permettre, le cas échéant, de réagir s’ils estiment que leurs droits risquent d’être mis en cause. Par ailleurs, afin de favoriser les efforts de recherche et de développement des industries pharmaceutiques en Europe, le Gouvernement propose un abattement proportionnel à ces efforts sur la taxe sur le chiffre d’affaires. M. Door a souligné l’importance de cette mesure, unanimement saluée par les industriels lors de la réunion du comité de l’industrie de santé qui s’est tenue hier à Bercy.
En ce qui concerne les programmes d’accompagnement des patients prenant des traitements médicamenteux, le ministère de la santé et des solidarités a entamé une concertation, comme M. Xavier Bertrand s’y était engagé devant vous. J’ai constaté que le sujet n’était pas encore suffisamment clair et n’avait pas assez mûri dans l’esprit de chacun d’entre vous, puisque la rédaction d’un texte n’a pu être finalisée. Le Gouvernement en a pris acte et a renoncé à vous demander l’autorisation de légiférer sur ce point par ordonnance. Je souligne que M. About, président de la commission des affaires sociales du Sénat, s’est engagé à déposer une proposition de loi lors de la rentrée 2007 sur cette question.
Le Gouvernement souhaite bien sûr encadrer les programmes d’accompagnement des patients prenant des médicaments, en accordant toutes les garanties nécessaires, afin de s’assurer que cette aide au bon usage du médicament n’entraînera aucune dérive.
Par ailleurs, j’ai confié une mission spécifique à l’IGAS. Elle permettra de clarifier les tenants et les aboutissants de ce dossier et de préciser clairement le rôle de chacun.
Je souhaite également que l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé puisse continuer à examiner ces programmes quand elle l’estimera nécessaire, voire indispensable.
Le Gouvernement est également satisfait que l’amendement visant à mettre fin à la collecte et à l’utilisation des médicaments non consommés ait été adopté par les deux assemblées. Il faudra être très attentif à l’application de ces dispositions. L’objectif n’est naturellement pas de priver les pays en développement d’une aide précieuse pour soigner leurs malades, mais de substituer à un dispositif – qui avait ses limites et qui comportait un certain nombre d’inconvénients, notamment en ce qui concerne l’utilisation de médicaments qui pouvaient être frappés de péremption – un autre dispositif, élaboré avec l’industrie pharmaceutique et les organisations non gouvernementales. Ces dernières doivent pouvoir formaliser leurs besoins et être en mesure de trouver d’autres sources d’approvisionnement – des dons, des achats de génériques, l’obtention de subventions permettant de se procurer des médicaments de qualité dans des conditions d’usage pharmaceutique tout à fait satisfaisantes.
Monsieur Le Guen, vous m’avez interrogé sur l’élaboration du décret d’application de l’article 52 de la loi d’août 2004. Je ne vois pas de raison de faire compliqué lorsqu’on peut faire simple. Le Gouvernement, comme c’est son devoir et même juridiquement son obligation vis-à-vis du législateur, tirera, dans la rédaction de ce décret, les conséquences des dispositions qu’il vous est proposé d’adopter aujourd’hui, conformément aux conclusions de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
(L’ensemble du projet de loi est adopté.)
La parole est M. le ministre délégué aux anciens combattants.
En effet, la mise en place de cette politique conduit l’Union européenne à détenir des documents contenant des informations hautement confidentielles sur les questions de sécurité et de défense.
La divulgation de celles-ci pourrait avoir de graves conséquences, chacun peut le comprendre. Afin d’assurer leur protection, le Conseil de l’Union européenne a adopté le 19 mars 2001 son règlement de sécurité. Ce règlement prévoit que toute personne dont la responsabilité est engagée pour une compromission d’informations classifiées de l’Union européenne est passible de sanctions disciplinaires et pénales.
Ainsi, un fonctionnaire français soupçonné d’avoir porté atteinte à un secret de l’Union ou détenu par l’Union doit pouvoir être poursuivi en France sur la base du droit pénal français.
Par ailleurs, les vingt-sept accords de sécurité conclus par la France prévoient qu’en cas de compromission d’informations classifiées par un ressortissant français, les autorités françaises doivent prendre toutes les mesures appropriées, conformément à la loi.
Actuellement, seules les atteintes au secret relevant de l’accord conclu avec la Suède, en 1973, peuvent être poursuivies sur le fondement des dispositions du code pénal.
La modification des articles 414-8 et 414-9 du code pénal répond à ces exigences induites par le développement de la politique européenne de sécurité et de défense.
Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, avec ce projet de loi, nous disposerons des instruments juridiques adéquats pour protéger les informations détenues dans le cadre de la politique de défense de la France. C’est pourquoi j’ai l’honneur de vous demander de bien vouloir l’adopter. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Il s’agit, en effet, d’un texte technique éminemment bref. Il comporte seulement deux articles ayant pour objet de modifier deux articles du code pénal dont la rédaction mérite une actualisation. Le sujet n’est pas pour autant anodin, puisqu’il s’agit d’assurer une meilleure protection pénale aux informations secrètes transmises à la France par des États étrangers ou des organisations internationales.
Le partage des informations entre services de différents États tend à prendre une importance déterminante dans le domaine du renseignement. Le caractère transnational des menaces, tout particulièrement en matière de terrorisme, fait qu’aucun État européen ne peut envisager d’y répondre efficacement de manière isolée.
La confiance entre services a toujours été un élément clé de la qualité des échanges en la matière. Si une telle relation ne se décrète pas, elle suppose toutefois au minimum l’appui de dispositions garantissant aux États étrangers que leurs secrets bénéficieront du même degré de protection pénale que les secrets nationaux. De ce point de vue, le code pénal dans sa rédaction actuelle comprend des dispositions insuffisantes. En effet, ses articles 414-8 et 414-9 protègent seulement les puissances signataires du traité de l’Atlantique Nord et les informations échangées dans le cadre de l’accord franco-suédois du 22 octobre 1973.
L’intensification des échanges d’informations, qui s’est traduite pas la signature de nombreux accords bilatéraux, l’évolution du rôle de l’OTAN et la prise en compte croissante des nécessités de confidentialité au sein de l’Union européenne conduisent à proposer une nouvelle rédaction de ces articles, convenant davantage aux réalités présentes.
L’article 1er du projet a ainsi pour objet d’étendre à l’OTAN en tant que personne morale la protection dont bénéficient déjà les puissances signataires du traité de l’Atlantique Nord contre les actes de trahison et d’espionnage ainsi que les atteintes au secret de la défense nationale. Le champ de ces infractions n’est pas modifié. Il s’agit de tenir compte de l’évolution du rôle de l’Alliance, notamment en matière de lutte contre le terrorisme, qui la conduit à mettre davantage l’accent sur le renseignement et son analyse.
L’article 2 du projet vise à modifier l’article 414-9 du code pénal, qui, dans sa rédaction actuelle, a un objet des plus limités : il se borne à assurer la protection pénale des informations faisant l’objet de l’accord de sécurité relatif à certains échanges d’informations à caractère secret entre la République française et le Royaume de Suède, signé le 22 octobre 1973. Il est donc proposé d’étendre considérablement la portée de cet article.
D’une part, en visant de manière générale les accords de sécurité conclus avec un ou des États étrangers ou une organisation internationale, tels que les accords avec l’Union de l’Europe occidentale, l’Agence spatiale européenne ou l’OCCAR, par exemple. Depuis la signature de l’accord de Stockholm précité, de nombreux accords bilatéraux de sécurité relatifs à la protection d’informations classifiées ont été conclus. Il importe d’accorder une protection pénale vis-à-vis des atteintes qui pourraient être portées au secret de ces informations. De ce point de vue, je rappelle que bénéficieront de cette protection seulement les accords régulièrement ratifiés et publiés. Or, si, depuis le dépôt du projet de loi, un effort de rattrapage est intervenu s’agissant de la publication d’accords de sécurité, une dizaine d’entre eux doivent encore l’être. Il convient donc de poursuivre le mouvement engagé.
La deuxième innovation de l’article 2 concerne la protection offerte aux informations classifiées échangées entre la France et une institution ou un organe de l’Union européenne, sous réserve que ces informations aient été classifiées en vertu des règlements de sécurité de ces derniers publiés au Journal officiel de l’Union européenne. Cette mesure est d’autant plus nécessaire qu’après les attentats de Madrid, l’une des priorités de l’Union est l’intensification des échanges d’informations en vue de lutter contre la menace terroriste. Outre l’échange d’informations provenant des services nationaux, l’Union dispose en propre de plusieurs outils pour renforcer la coopération opérationnelle entre États membres : l’office européen de police, l’unité de coopération judiciaire, les équipes communes d’enquête et, depuis le 1er mai 2005, l’Agence européenne pour la gestion des frontières extérieures.
L’adoption de cette disposition est également importante pour les entreprises françaises souhaitant répondre aux appels d’offres, et donc accéder aux données protégées, concernant les projets Galileo et le programme européen de recherche pour la sécurité.
Compte tenu de tous ces éléments, la commission a adopté le projet de loi sans modification et demande à l’Assemblée de faire de même. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Il étend la protection pénale contre les compromissions et les divulgations d’informations échangées entre les pays signataires du traité de l’Atlantique Nord aux actes commis au préjudice de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord en tant que personne morale.
Il permet également de poursuivre les atteintes aux informations secrètes échangées en vertu d’accords bilatéraux ou dans le cadre de l’Union européenne.
Il s’agit d’un texte court, mais d’une importance capitale, tant pour la prévention et la lutte contre le terrorisme que pour nos industriels.
Cette évolution s’impose du fait de l’intensification des échanges d’informations classifiées entre la France et les instances du renseignement de l’OTAN et de l’Union européenne, afin de prévenir et de lutter contre le terrorisme.
En effet, pour mener à bien ses missions, l’OTAN dispose d’une division du renseignement qui remplit un rôle essentiel au sein de l’état-major international et occupe une place prépondérante dans la lutte contre le terrorisme. L’OTAN a, en effet, placé la lutte contre le terrorisme au rang de mission prioritaire.
Elle a défini, au sommet de Prague en 2002, un concept militaire de lutte contre le terrorisme comprenant des mesures défensives – l’antiterrorisme – et offensives – le contre-terrorisme –, la gestion des conséquences d’une attaque terroriste ainsi que la coopération militaire.
Au sommet d’Istanbul du 8 juin 2004, les États membres de l’OTAN ont décidé de renforcer encore les mesures de lutte contre le terrorisme. Ils ont ainsi proposé d’améliorer le partage des informations entre les alliés par le biais de l’unité de renseignement sur la menace terroriste. Le récent sommet de Riga des 28 et 29 novembre 2006 a confirmé l’importance du renforcement des échanges de données pour lutter efficacement contre le terrorisme.
S’agissant de l’Union européenne, à la suite des attentats du 11 septembre 2001, le Conseil européen, réuni en session extraordinaire le 21 septembre 2001, a érigé la lutte contre le terrorisme au rang de priorité. Après les attentats de Madrid du 11 mars 2004, le Conseil européen du 25 mars 2004 a adopté un plan d’action contre le terrorisme qui prévoit, d’une part, l’intensification des échanges d’informations entre les États membres et, d’autre part, l’amélioration de la capacité des organes de l’Union européenne en matière de renseignement. La décision du Conseil européen « Justice et affaires intérieures » du 13 juillet 2005 prise à la suite des attentats de Londres du 7 juillet a accéléré la mise en œuvre des mesures de coopération entre les États membres en matière de lutte contre le terrorisme. Enfin, les 15 et 16 décembre 2005, le Conseil européen a adopté une stratégie commune et a créé un poste de coordinateur de la lutte contre le terrorisme, qui a pour mission d’assurer la cohérence de l’action de l’Union européenne en matière de terrorisme.
La coopération dans le domaine du renseignement est donc renforcée. À ce titre, le rôle du service de renseignement du Centre de situation de l’Union doit être accru et la coopération entre l’Union européenne et l’OTAN doit se développer.
Dans le même temps, au sein de l’Union européenne, la protection des informations sensibles a fait l’objet de règlements de sécurité précisant les conditions de confidentialité, les degrés de classification et les règles applicables. La France doit donc se mettre en conformité avec les exigences requises par l’Union européenne. La modification du code pénal qui nous est proposée s’inscrit parfaitement dans cette démarche.
Pour que l’information circule, il est essentiel que nos partenaires européens, nos alliés, les organisations, telles l’OTAN et l’Union européenne, aient toute confiance. Ils doivent savoir que nous protégerons leurs informations classifiées de la même manière que nos secrets nationaux. C’est le sens même de ce projet de loi.
Par ailleurs, le renforcement de la protection des échanges de documents classifiés européens est important pour nos industriels, qui souhaitent répondre aux appels d’offres dans le cadre de projets tels que Galileo ou du programme européen de recherche pour la sécurité. À défaut d’une telle modification, nous serions pénalisés dans un domaine – celui de la défense et de la sécurité – dans lequel la France entend jouer un rôle moteur.
Pour toutes ces raisons, le groupe UMP votera ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
En revanche, la question du secret de la défense est éminemment politique, et son utilisation soulève de nombreuses interrogations. Je vais donc développer ce point.
Après la mort du roi du Maroc Hassan II, la France a décidé de lever le secret défense qui couvrait certaines pièces du dossier de la mort de Mehdi Ben Barka détenues par la direction générale des services extérieurs. Ce fut une avancée importante. Pour autant, le débat sur les bases législatives qui permettent au pouvoir exécutif français de couvrir une « affaire » par un interdit juridique ne doit pas être occulté.
Deux grands domaines sont concernés : le secret d’État en matière de politique étrangère et de défense et celui, plus classique, de l’action administrative, dite « secret bureaucratique ». C’est le second qui fait l’objet des réformes les plus fréquentes, alors que le premier est encore trop souvent un sujet tabou.
Je rappelle, mes chers collègues, que l’ordonnance du 4 février 1960 prévoyait la peine de mort pour tout Français qui se serait rendu coupable de trahison en « livrant à une puissance étrangère un renseignement qui doit être secret dans l’intérêt de la défense nationale », ou même en « s’assurant la possession d’un tel renseignement en vue de le livrer à une puissance étrangère ». La nature du « renseignement » était laissée à l’appréciation du juge militaire, et l’histoire a retenu le procès étonnant de Mata Hari en 1917, dont on ne peut toujours pas dire aujourd’hui quel terrible secret elle aurait livré.
La philosophie générale des textes n’a pas changé depuis la première loi du 18 avril 1886. Les différents règlements qui se sont succédé depuis n’ont fait qu’élargir les pouvoirs de l’administration en matière de classification, sans jamais définir précisément la nature des documents et des informations concernés. Aucun texte législatif ou réglementaire n’a eu pour objet de définir les documents devant être protégés en fonction de la sensibilité de leur contenu. Ainsi, ces textes posent un principe de droit au secret pour l’exécutif par le moyen de la classification, quels que soient la nature et le contenu du document, et surtout la motivation de l’autorité. Le dispositif destiné à protéger le secret défense a donc progressivement servi à protéger le secret d’État.
Toutefois, le texte de loi relatif à la classification des documents administratifs, adopté le 8 juillet 1998, a marqué un incontestable progrès en tentant de définir la nature des textes concernés. Le nouveau code pénal précise, pour sa part, la notion de « secret de la défense nationale ».
La loi de juillet 1998 a aussi instauré une commission indépendante chargée de décider si un juge a le droit ou non de prendre connaissance d’un document classifié. Le pouvoir discrétionnaire de l’exécutif y trouve une première limite. Mais le changement n’est pas une révolution. La commission consultative du secret de la défense nationale est composée de trois fonctionnaires – un du Conseil d’État, un de la Cour des comptes, un de la Cour de cassation – et de deux parlementaires – un député et un sénateur. Se trouvent ainsi confortées dans les rôles de censeur deux instances, le Conseil d’État et la Cour de cassation, qui ont largement contribué par leurs décisions à la définition extensive du secret défense au bénéfice de l’exécutif contre le juge.
D’autre part, le secret défense peut couvrir des domaines aussi variés que l’urbanisme, le contrôle parlementaire, les procédures d’expropriation, les marchés publics, l’obligation de motivation des actes administratifs ou l’allongement du délai de consultation des archives de cinquante à soixante ans.
Le code pénal a également défini séparément le « secret de défense », strictement limité, et un nouveau concept large et ambitieux, celui des « intérêts fondamentaux de la nation », dont la protection justifie l’application de lourdes peines, et qui recouvre les secteurs engagés dans la concurrence internationale – économie, technologie, culture ou environnement. À la différence de l’ancienne architecture, le secret défense est devenu un « satellite » subsidiaire du dispositif principal dédié à la protection des intérêts fondamentaux. Le secret d’État se mue ainsi en secret de la nation : il ne s’agit plus d’un secret étatique mais d’un véritable secret qui naît et se développe dans les différents espaces de la vie nationale. On en arrive donc à un secret de la nation, dont la protection serait déléguée à l’État.
L’autre aspect du problème concerne le secret bureaucratique. Les délibérations du Gouvernement sont traditionnellement soumises au régime du secret. Ce point ne prête pas à débat. En revanche, la résistance de l’appareil administratif à la transparence voulue par les administrés est plus contestable. Le secret bureaucratique a fait l’objet de réglementations, comme la loi du 17 juillet 1978 sur l’accès aux documents administratifs et la création de la CNIL – Commission nationale de l’informatique et des libertés –, qui assurent un certain droit de regard des administrés sur les actes qui les concernent.
Cependant, en matière de secret, les fonctionnaires français se trouvent dans une position pour le moins ambiguë. Ils sont expressément tenus au secret et ne peuvent être déliés de cette obligation que par décision expresse de l’autorité dont ils dépendent. D’autre part, aux termes de l’article 40 du code pénal, ils sont soumis à une obligation de dénonciation de tout crime ou délit connu. Enfin, une obligation de discrétion pèse aussi sur eux.
Le statut général des militaires les autorise à refuser d’exécuter un ordre dit « manifestement illégal », mais ils doivent cependant en référer à leur hiérarchie d’où ce même ordre peut provenir. Cela explique le choix plus fréquent d’un recours à la presse, qui protège l’agent de l’État et lui permet de parler.
Les « polices secrètes » et les « secrets de police » ont été d’usage fréquent au début de la Ve République. Depuis, la transparence a progressé, en particulier avec l’interdiction du fameux SAC – service d’action civique – en 1982. La double subordination à laquelle sont tenus les fonctionnaires de police – à leur hiérarchie d’abord, aux autorités judiciaires ensuite – exclut normalement tout repli vers un fonctionnement secret. Celui-ci reste toutefois une tentation. La coutume du secret des sources peut être regardée, selon les termes d’un rapport du Conseil d’État de 1985, comme une « inévitable survivance d’un monde qui n’est ni innocent, ni par conséquent fait pour la transparence, à tout le moins où tout n’est pas avouable, où toutes les relations sociales ne peuvent être gérées au grand jour ».
La situation française se caractérise ainsi par une grande étendue du champ du secret légal, dont la compétence relève presque entièrement de l’exécutif et de l’administratif. Système majoritaire aidant, le contrôle parlementaire est resté pratiquement inexistant, surtout si on le compare à celui des États-Unis ou d’autres États démocratiques.
Mais le Parlement français a-t-il la volonté de jouer pleinement son rôle ? Il a pris l’habitude, depuis ces deux dernières législatures, de multiplier les missions d’information et les commissions d’enquête. C’est positif. Mais il faut, à mon sens, aller plus loin.
Le juge français, dès lors que l’administration lui refuse l’accès au contenu du secret, est juridiquement empêché d’opérer un contrôle. Toutes les grandes démocraties n’ont pas la même réticence à l’égard de la justice. Les juges britanniques et américains reconnaissent à l’administration un privilège de classification, et donc de rétention d’informations, mais ils en contrôlent l’utilisation. Depuis 1968, par exemple, la justice britannique arbitre entre l’intérêt public – mis en avant par le ministre pour refuser la communication d’un document – et l’intérêt de la justice. Dans l’affaire Matrix Churchill de trafic d’armes avec l’Irak, le Gouvernement britannique s’est engagé à n’opposer l’immunité que lorsque la diffusion de documents confidentiels causerait un « réel tort ». En Allemagne, le juge peut passer outre à un refus du Gouvernement et réquisitionner les documents. Si l’exécutif confirme son refus, il doit en informer le Parlement.
Comme on le voit, avec la loi du 8 juillet 1998, la France a agi tardivement et timidement par rapport aux autres grandes démocraties. La route est donc encore longue. Il est en effet regrettable de constater en France l’étendue des pouvoirs de secret ouverts aux pouvoirs exécutif et administratif, ce qui donne parfois prise à toutes les conjectures et à tous les fantasmes – je reviendrai sur ce point tout à l’heure, lors de la discussion du projet de loi n° 3275.
S’agissant du présent texte, nous estimons n’avoir aucune raison de nous y opposer, et ne le ferons donc pas. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Je le mets aux voix.
(L’article 1er est adopté.)
Je le mets aux voix.
(L’article 2 est adopté.)
(L’ensemble du projet de loi est adopté.)
La parole est à M. le ministre délégué aux anciens combattants.
Dans les deux cas, ce projet de loi illustre notre volonté de nous rapprocher autant que possible du droit commun. Il vise donc, en premier lieu, à adapter la justice militaire aux exigences de l'État de droit. Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, l'article 84 de la loi du 9 décembre 2004 de simplification du droit a autorisé le Gouvernement à procéder par ordonnance à la refonte du code de justice militaire. Cette refonte s'est faite à droit constant. Il convient aujourd'hui que cette ordonnance soit ratifiée. C'est l'objet de l'article 1er de ce projet de loi.
Il est, en effet, nécessaire de prévoir, dès le temps de paix, l'existence d'une justice militaire pour le temps de guerre. Il s'agit d'éviter toute improvisation, le plus souvent génératrice de désordres, à l'occasion d'une crise nationale grave résultant d'une guerre étrangère ou d'un événement intérieur de première importance.
Le Gouvernement vous propose également de prendre en compte certaines évolutions, ce qui ne pouvait être fait dans le cadre de l'habilitation législative.
Tout d'abord, il nous faut moderniser certaines dispositions relatives au temps de paix devenues obsolètes. Ces dispositions concernent le tribunal aux armées de Paris, qui est compétent pour juger les infractions de toute nature commises par des militaires français hors du territoire national.
Les modifications permettent d'aligner certaines dispositions sur celles du droit commun. Elles concernent l'habilitation des officiers de police judiciaire des forces armées ; la représentation du ministère public devant la chambre de l'instruction par le procureur près la cour d'appel ; la désignation en matière criminelle de la juridiction d'appel par la chambre criminelle de la Cour de cassation.
Mesdames et messieurs les députés, le projet de loi modernise également les dispositions applicables en temps de guerre, en renforçant les droits de la défense : il autorise un défenseur à représenter son client défaillant, comme cela a été rendu possible dans le droit commun par la loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité.
Dans le même esprit, le texte qui vous est proposé encadre les perquisitions et les interceptions téléphoniques visant certaines professions. Il en sera ainsi, en temps de guerre, des perquisitions dans les locaux d'une entreprise de presse ou de communication audiovisuelle. Bénéficieront aussi de ces règles le cabinet d'un médecin, d'un notaire, d'un avoué ou d'un huissier. Ces perquisitions ne pourront être effectuées que par un magistrat et en présence de la personne responsable de l'organisation professionnelle ou de l'ordre auquel appartient l'intéressé ou son représentant.
Toujours en temps de guerre, les interceptions de communication sur la ligne d'un député ou d'un sénateur ne pourront être réalisées sans que le président de l'assemblée à laquelle il appartient en soit informé par le juge d'instruction. Aucune interception ne pourra non plus avoir lieu sur une ligne dépendant du cabinet d'un magistrat ou de son domicile sans que le premier président ou le procureur général du lieu où il réside en soit également informé.
Enfin, le projet de loi introduit et aménage l'appel des jugements rendus par les juridictions des forces armées en temps de guerre. En effet, il n'existait pas jusqu'à présent d'appel pour ces jugements en temps de guerre.
J'en viens maintenant au second objet du projet de loi : la modernisation du régime juridique de la protection et du contrôle des matières nucléaires.
Désormais, les matières nucléaires affectées à la défense, mais ne relevant pas de la dissuasion, seront protégées et contrôlées dans les conditions du droit commun applicables aux matières nucléaires à usage civil. En revanche, les matières nucléaires relevant de la dissuasion bénéficieront d'un régime particulier qui sera déterminé par décret en Conseil d'État. Afin de donner une base législative à ce régime particulier, l'article L. 1333-1 du code de la défense est modifié en ce sens.
Ce projet de loi constitue donc bien une étape supplémentaire dans l’évolution entamée voici maintenant cinq ans et qui vise à soumettre les personnels et activités de défense aux règles du droit commun. C'est pourquoi je souhaite qu'il recueille votre approbation. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
La refonte du code opérée par l'ordonnance de 2006 respecte la structure du code de justice militaire. Après un titre liminaire qui rappelle que la justice militaire est rendue en tous temps sous le contrôle de la Cour de cassation, quatre livres constituent ce code, relatifs à l'organisation et à la compétence de la justice militaire, à la procédure pénale militaire, aux peines applicables par les juridictions des forces armées, aux infractions militaires, aux prévôtés et aux tribunaux prévôtaux.
Qu'il me soit permis, mes chers collègues, de revenir au cœur du propos de notre texte, la justice militaire, et de mettre rapidement en perspective les évolutions de la justice militaire qui ont caractérisé le XXe siècle.
Deux axes majeurs peuvent être dégagés.
Le premier concerne la prise en compte, au sein de ce code particulier, des délits non militaires. Il a fallu attendre 1928 pour voir s'imposer la qualification des infractions militaires. Les principes qui présidèrent à l'adoption des réformes de 1928 étaient qu'il n'était plus possible de refuser aux militaires des garanties accordées aux autres citoyens et que la justice militaire devait être la même en temps de paix et en temps de guerre. Ainsi, depuis cette date, les règles de l'instruction et des tribunaux de droit commun sont appliquées dans les juridictions militaires.
Le deuxième axe concerne le pouvoir du commandement en matière de justice militaire. Jusqu'en 1928, l'autorité militaire concentrait les pouvoirs de poursuivre, d'instruire et, le cas échéant, de traduire l'accusé devant le tribunal. La frontière entre la discipline et le droit était trop souvent imprécise et, dans cette voie, les réformes de 1965 et 1982 n'ont plus laissé au commandement que ce qui peut être qualifié de « droit de regard partiel ».
Enfin, depuis la réforme de 1999, les principales différences demeurant entre la procédure civile et la procédure militaire regardent la demande d'avis du ministre de la défense avant l'ouverture de poursuites pénales, la possibilité d'écarter le jury populaire lorsqu'il existe un risque de divulgation de secrets classés « défense » et la possibilité d'ordonner le huis clos.
Désormais, toute réforme affectant la procédure pénale civile est transcrite dans le code de justice militaire. C'est ainsi que l'article 2 du projet de loi transpose à la justice militaire les dispositions du droit commun dans le domaine de la procédure d'appel en matière criminelle.
En effet, un certain nombre de mesures législatives n'ont pu être modifiées par la voie de l'ordonnance précitée. La loi du 15 juin 2000, qui introduit l'appel en matière criminelle, n'a pas étendu cette possibilité à la justice militaire. Le projet de loi précise les règles applicables pour l'appel en matière de justice militaire criminelle, que ce soit en temps de paix ou en temps de guerre.
La complète harmonisation des dispositions militaires avec le droit commun nécessite un certain nombre d'ajustements procéduraux qui concernent aussi bien la composition de la chambre de l'instruction, la qualité d'officier de police judiciaire, les modalités de certaines perquisitions ou interceptions de communication que la représentation d'un défenseur défaillant. Enfin, certaines erreurs matérielles de renvoi appellent correction.
Le troisième et dernier article du projet de loi modifie, quant à lui, des dispositions du code de la défense relatives aux matières nucléaires. Jusqu'à présent, les matières nucléaires étaient distinguées selon leur affectation à la défense ou à l'usage civil. Désormais, le critère de distinction retenu sera celui de l'affectation à la dissuasion. Les matières nucléaires affectées à la défense et ne relevant pas de la dissuasion seront désormais protégées comme les matières nucléaires à usage civil.
Lors de ses deux réunions du 31 janvier et du 6 février, la commission de la défense a adopté quelques amendements à caractère rédactionnel. L'un d'entre eux mérite toutefois d'être signalé puisqu'il rectifie le titre du projet de loi pour une meilleure conformité avec son contenu.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vous remercie de votre attention pour la présentation d'un texte qui, s'il peut sembler modeste, n'en fait pas moins œuvre utile. C’est une étape supplémentaire vers une plus grande harmonisation des procédures de droit commun entre le prévenu civil et le prévenu militaire. Il reste bien adapté à la professionnalisation de notre armée et aux opérations extérieures et prend mieux en compte les nouveaux risques liés à la sécurité nucléaire, dans un contexte de prolifération internationale et de crainte d'utilisation des armes nucléaires par des réseaux terroristes.
C'est pourquoi, mes chers collègues, je ne doute pas un instant que ce texte pourra recueillir un assentiment sur tous les bancs de l'Assemblée. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Nous sommes donc, chers collègues, les quincailliers de la République, en l'espèce plutôt les ravaudeurs du code de justice militaire, qui fut pourtant l'objet de toutes les attentions depuis 1999. On peut donc se demander comment il se fait que nous devions siéger avec un préavis, que je qualifierai poliment de court, pour légiférer dans un domaine fort balisé. Le rapport de notre excellent collègue rapporteur ne m'a pas totalement permis de bien comprendre ce qu'il en était, sauf à croire qu'une certaine forme de légèreté antérieure nous oblige à rafistoler le code à la va-vite ou qu'une gestion perfectible des dates limites de ratification d'ordonnance soit en cause, ce que je ne peux évidemment imaginer !
Mais revenons à la physique parlementaire. Traditionnellement, plusieurs paramètres déterminent la date d'arrivée d'un texte en discussion, le principal d’entre eux étant son importance politique. Elle lui confère un coefficient de masse qui accélère sa descente dans le siphon vertical qui court de la table du conseil des ministres au bureau de notre président de séance. La masse politique du ministre qui porte le texte joue aussi un rôle majeur. Enfin, l'intérêt technique du texte peut avoir une incidence sur cette vitesse de descente. Si je m'en tiens à ces trois paramètres et à la vitesse à laquelle le texte est passé des limbes parlementaires à la présente discussion, son importance ne peut être remise en cause. Ou alors, c'est à n'y rien comprendre !
Je ne vous cache pas ma perplexité, car nous examinons ce texte essentiel dans des conditions qui font frémir.
J’ai d’ailleurs une pensée émue pour notre admirable rapporteur, qui a disposé d’un très bref délai pour effectuer son travail. Il ne m’a pas échappé que ce texte était relativement court, mais tout de même ! En un mot comme en cent, une fois encore, nous sommes contraints, mes chers collègues, de marcher au tambour. Cela a beau avoir été une habitude durant cette législature, s’agissant des textes issus du ministère de la défense, je ne me résous pas à considérer ces façons de faire comme acceptables. Je proteste donc doublement, car le projet de loi n° 2277 rectifié a été traité de façon tout aussi expéditive.
L’Assemblée nationale et sa commission de la défense auraient-elles vocation à jouer le même rôle que le service d’étage d’un hôtel de luxe, dont on attend qu’il défère à toute demande, au premier claquement de doigt ? Le président de notre commission lui-même ne peut assister à nos débats, empêché par une mission prévue de longue date : cela montre à quelles extrémités nous en sommes réduits.
J’en viens maintenant au sujet qui nous occupe aujourd’hui : la justice militaire.
Comme je l’ai évoqué tout à l’heure, les préoccupations en matière de justice militaire ne sont pas récentes, puisque le précédent gouvernement et sa majorité avaient entrepris un important travail de rénovation. Pour ma part, je me suis intéressé aux différents systèmes de justice militaire en Europe.
En Allemagne, les auteurs d’infractions pénales militaires sont jugés, en temps de paix, par les juridictions pénales de droit commun. En revanche, la loi fondamentale prévoit l’institution de tribunaux pénaux militaires en temps de guerre.
En Confédération helvétique, l’armée suisse est, en 2000, presque exclusivement composée d’appelés, qui effectuent plusieurs périodes de service militaire jusqu’à l’âge de quarante-deux ou cinquante-deux ans, selon qu’ils sont officiers ou non. La justice militaire est rendue par des militaires, pendant la durée d’accomplissement de leurs périodes. Les fonctions considérées comme spécialisées, c’est-à-dire celles de président de tribunal, de procureur, de juge d’instruction et de greffier sont confiées à des militaires qui, après avoir acquis une certaine expérience de l’armée dans des unités opérationnelles, justifient de leur compétence juridique. Les juges des tribunaux militaires sont choisis parmi les officiers et les sous-officiers des unités opérationnelles et l’ensemble du système est administré par l’« auditeur en chef », placé sous l’autorité du ministère de la défense. Mais la justice militaire suisse fonctionne selon les mêmes principes que la justice pénale ordinaire. Quant à l’accusé, il peut être assisté par un avocat du barreau à tous les stades de la procédure. Lors des débats, l’assistance d’un avocat est même obligatoire.
Les justices militaires anglaise, espagnole et italienne sont plus ou moins intégrées à la justice ordinaire, mais ne fonctionnent pas nécessairement selon les mêmes principes que cette dernière. Dans les trois pays, la juridiction suprême ordinaire constitue le tribunal militaire de cassation : au Royaume-Uni, c’est la Chambre des Lords ; en Italie, depuis 1981, les recours en cassation ne sont plus attribués au Tribunal suprême militaire, mais à la Cour de cassation ; en Espagne, la loi organique de 1987, qui a réorganisé la justice militaire, a créé, au sein du Tribunal suprême, une cinquième chambre, la chambre militaire. Au Royaume-Uni, la justice militaire est, à partir du deuxième degré, rendue par des magistrats professionnels issus des juridictions ordinaires.
En revanche, en Espagne et en Italie, les juridictions militaires ne comportent pas de magistrats professionnels issus des juridictions ordinaires, car elles ont, à l’image des cours d’assises, une composition mixte. Elles comportent à la fois des magistrats militaires, c’est-à-dire des juristes spécialement recrutés pour assurer la justice militaire, et de militaires tirés au sort, tels les jurés de cour d’assises.
En Italie, où il n’existe pas de code de procédure pénale militaire, c’est le code de procédure pénale qui s’applique. En fait, l’organisation et le fonctionnement des justices militaires italienne et anglaise sont plus ou moins calqués sur ceux de la justice pénale ordinaire. En Italie, la justice militaire est organisée par un décret royal de 1941, qui a été profondément modifié par une loi de 1981. Tout comme les juridictions pénales ordinaires, les juridictions militaires italiennes se subdivisent en juridictions du premier degré, juridictions d’appel et juridiction de cassation.
Au Royaume-Uni, on observe également de grandes similitudes entre la procédure pénale militaire et la procédure pénale ordinaire, ce qui n’est pas le cas en Espagne.
Comme on le voit, autant de pays, autant de modèles, même si l’on oscille entre deux systèmes : soit il existe des tribunaux militaires aux règles spécifiques, soit les militaires sont renvoyés devant les tribunaux ordinaires ou devant des juridictions militaires fonctionnant selon les mêmes règles. Entre ces deux systèmes, toutes les déclinaisons sont possibles. Mais je ne souhaite pas développer les avantages comparés de chacun d’eux. Je rappellerai toutefois ce qu’étaient les principes de la réforme de 1998, que j’ai soutenue.
Notre collègue Jean Michel, qui fut le rapporteur du projet de 1998, aurait souhaité assister à notre débat d’aujourd’hui, mais s’étant engagé auprès de la commission à la représenter au sein de la mission avec laquelle il est parti tout à l’heure, il me permettra d’évoquer son travail.
Le projet de 1998, portant réforme du code de justice militaire, était attendu. Lors de la grande réforme de la procédure pénale, intervenue en 1993 et destinée à renforcer les garanties accordées aux justiciables, les dispositions relatives à la justice militaire n’avaient en effet pas été modifiées. L’article 229 de la loi du 4 janvier 1993 prévoyait néanmoins d’appliquer à la justice militaire les dispositions du nouveau code de procédure pénale avant le 1er janvier 1999, échéance qui, après deux reports successifs, avait été définitivement fixée par la loi du 28 octobre 1997 portant réforme du service national.
C’est en vertu de cette disposition qu’intervint le projet de loi de 1998, qui visait à mettre fin à l’écart entre la procédure suivie devant les juridictions relevant du code de justice militaire et celle définie par le code de procédure pénale. En outre, en faisant de ce texte un pan de la réforme de la justice, les pouvoirs publics renforcèrent la cohérence du système judiciaire. Car, hors circonstances exceptionnelles, la justice est une, en dépit des différentes épithètes qui peuvent lui être adjointes. « Si, dans le passé, la notion même de justice militaire a pu faire sourire, force est de constater qu’aujourd’hui, les boutades qu’elle a pu susciter appartiennent à l’histoire », affirmait Jean Michel.
En déclinant le principe selon lequel le justiciable militaire est avant tout un justiciable, le projet de loi de 1998 a contribué à redéfinir le lien entre l’armée et la nation. Il étendait les garanties des justiciables au-delà même de ce que disposait la réforme de 1993. Et, dépassant le cadre de la justice militaire stricto sensu, il modifia, sur des points importants, les dispositions de la réforme de 1982 qui avait généralisé le principe selon lequel le droit commun s’applique sur le territoire de la République.
Longtemps irréductibles l’une à l’autre, justice militaire et justice de droit commun ont vu les frontières qui les séparent devenir peu à peu moins étanches en temps de paix. Le projet de loi de 1998 a atténué, sur certains points, les spécificités de la justice militaire en temps de paix. Il me semble, sans oublier les étapes intermédiaires, que le projet de loi que nous examinons aujourd’hui s’inscrit dans cette lignée, et j’en donne volontiers acte.
Revenons maintenant sur l’application de la justice militaire en temps de paix.
L’histoire de la justice militaire est marquée par une restriction toujours plus importante du champ d’application de la notion. Nous allons donc aujourd’hui dans le sens de l’histoire.
Jusqu’en 1982, relevait de la justice militaire le jugement des infractions commises en temps de guerre et en temps de paix par les militaires et certains civils, que ce soit sur le territoire de la République ou hors des frontières nationales. Depuis 1982, le jugement des infractions commises en temps de paix sur le territoire de la République ne relève plus de la justice militaire, mais du droit commun, et donc du code de procédure pénale. Le système reste néanmoins complexe et tout ce qui va dans le sens de sa simplification est bienvenu.
L’histoire de la justice militaire est jalonnée d’un petit nombre de dates phares.
Il faut attendre 1857 pour que soit promulgué le premier code de justice militaire et 1928 pour le deuxième. Cependant, l’inadaptation de cette dernière législation sans cohérence, les armées de terre, de l’air et la marine ayant chacune leur régime propre, se fit de plus en plus sentir. C’est pourquoi le Parlement adopta en 1965 un nouveau code de justice militaire, dans le souci d’unifier la législation. Il fallut cependant attendre 1982 pour voir évoluer, sur le fond, la notion même de justice militaire. La loi du 21 juillet 1982, que j’ai votée, a supprimé les juridictions militaires établies en temps de paix sur le territoire de la République. Jusqu’à cette date, en effet, étaient compétents, en temps de paix, les fameux TPFA, les tribunaux permanents des forces armées. Les infractions qui relevaient auparavant de la compétence des TPFA sont maintenant instruites et jugées par les tribunaux ordinaires et selon les règles du code de procédure pénale.
Au total, en dépit de spécificités marquées, dont le maintien est plus ou moins justifié au regard de l’évolution de la société et du fonctionnement de la justice, les règles d’organisation, de procédure et de compétence qui régissent les infractions commises par les militaires en temps de paix sur le territoire de la République sont proches du droit commun. La volonté de traduire dans le code de justice militaire toute mesure nouvelle apparue dans le droit commun est louable.
Je veux maintenant évoquer la notion de démocratie de la défense, qui me semble indispensable, notamment dans le cadre de la revalorisation du rôle du Parlement. Je tiens à saluer ici le travail accompli par notre collègue Jean-Claude Viollet qui fut porte-parole du groupe socialiste lors du débat sur ce sujet.
Je crois profondément à la nécessité de revaloriser la place des assemblées législatives en matière de défense. Pour ce faire, on pourrait envisager que les parlementaires ne soient plus convoqués simplement pour lever le bras au commandement. On pourrait imaginer que les rapports d’information qu’ils signent ne soient pas balayés d’un revers de manche – je pense à notre rapport sur la propulsion du porte-avions. On peut aussi se pencher sur l’aberration démocratique que constitue l’article 35 de la Constitution, selon lequel « la déclaration de guerre est autorisée par le Parlement » et qui donne en pratique au Gouvernement une sorte de bon à tirer sans limite. Pour peu qu’il ait pris la précaution de ne jamais déclarer la guerre, le Gouvernement peut envoyer toutes les troupes qu’il souhaite, partout où il le désire. Il lui faudra simplement faire voter en loi de finances rectificative les crédits supplémentaires nécessaires à la couverture des surcoûts. Cela me semble anormal.
J’insisterai plus particulièrement sur la nécessité d’une délégation parlementaire au renseignement.
En Allemagne dès 1956, en Italie depuis 1977, aux États-Unis en 1976 et 1977, en Espagne en 1982 et au Royaume-Uni en 1994, des organes parlementaires de contrôle des activités de renseignement ont été créés. Ce ne sera pas encore le cas en France, au moins au premier semestre 2007. Pourquoi ce qui est possible ailleurs, c’est-à-dire le contrôle, par des organes propres au Parlement, des activités de renseignement sans porter atteinte à leur confidentialité, ne le serait-il pas dans notre pays ? Il est certain que le secret alimente les fantasmes et, sans tomber dans le voyeurisme parlementaire, il est normal que les représentants de la nation soient informés de l’usage des deniers publics, fussent-ils affectés à des opérations clandestines. Compte tenu de l’expérience des autres démocraties, j’avais en son temps déposé une proposition de loi comportant cinq articles sur la nécessité du suivi des activités de renseignement et du secret défense, mais je n’y reviendrai pas.
Comme le rapporteur, je suis rapidement passé sur l’article 3 du projet de loi. Je vous indique simplement que le groupe socialiste ne s’opposera pas aux dispositions qui y sont inscrites.
Constatant que ce texte technique répare quelques oublis et tend à un alignement de la justice militaire sur les dispositifs de droit commun, les députés du groupe socialiste ne s’opposeront pas à son adoption. Mme la ministre de la défense se félicitera sans doute de l’esprit de consensus qui aura présidé à l’adoption de ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. – « Très bien ! » et applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Au demeurant, ce projet n’est pas à droit constant, comme le note le rapporteur au sujet du troisième alinéa de l’article 3, qui reconnaît la qualité d’officier de police judiciaire aux gendarmes affectés dans les prévôtés.
Le deuxième aspect du projet concerne la modification du code de la défense et vise à préciser que les matières nucléaires affectées à la défense, mais ne relevant pas de la dissuasion, seront protégées comme les matières nucléaires à usage civil. J’avoue ne pas comprendre la portée de cette distinction et je souhaite, monsieur le ministre, quelques éclaircissements.
Le troisième volet du texte concerne la transposition à la justice militaire des dispositions du droit commun dans le domaine de la procédure d’appel en matière criminelle. Nous ne pouvons qu’en approuver le principe. Le rapprochement entre la justice militaire et le droit commun s’est fait très lentement et à abouti en 1982 à une première réforme, très incomplète. La loi du 10 novembre 1999, portant réforme du code de justice militaire et de la procédure pénale, a marqué une étape importante. Elle a notamment permis d’étendre au code de justice militaire les nouvelles garanties introduites depuis 1993 dans le code de procédure pénale. Mais elle s’est arrêtée à mi-chemin. Comme le relevait, à l’époque, son rapporteur, « il aurait été préférable de regrouper les dispositions applicables en temps de paix aux justiciables militaires et assimilés directement dans le code de procédure pénale, ce qui aurait davantage marqué l’unicité des règles applicables, et de réserver ainsi le code de justice militaire aux dispositions spécifiques motivées par le temps de guerre. » Par ailleurs, la réforme engagée ne concernait que le temps de paix et le droit applicable en temps de guerre n’a pas été modifié. De même, il n’a pas été question de décider que toutes les infractions de droit commun relevaient de juridictions de droit commun et que seules les infractions militaires relevaient de juridictions militaires.
Malgré les avancées concernant la procédure d’appel en matière criminelle, qui se rapproche du droit commun, les insuffisances de ce texte demeurent et ne se justifient pas par les spécificités de la fonction militaire. Le groupe communiste s’abstiendra donc.
Cette procédure de ratification permet, de plus, au Parlement d’exercer son contrôle sur l’action du Gouvernement en matière de codification par ordonnance, ce qui est une bonne chose, en particulier dans le domaine de la défense nationale.
Certaines modifications visent à rectifier des erreurs matérielles dans le visa des textes. D’autres ont pour but d’introduire dans le code de justice militaire des dispositions votées postérieurement à l’élaboration de la réforme du code.
C’est le cas, à l’article 2, pour les dispositions de droit commun relatives à la procédure d’appel en matière criminelle, issues de la loi du 15 juin 2000. Cette procédure est applicable en temps de paix comme en temps de guerre. Ainsi, les jugements rendus par les juridictions des forces armées en temps de guerre pourront être susceptibles d’appel.
Il s’agit d’un point particulièrement important du projet, qui va dans le sens d’une harmonisation du code de justice militaire avec le droit commun de la procédure pénale, en particulier en temps de paix, et qui contribue au renforcement des droits de la défense, au même titre que les dispositions encadrant les perquisitions et les interceptions de communications ou permettant la représentation d’un prévenu défaillant par un défenseur.
L’article 2 apporte également des précisions sur la composition de la chambre d’instruction d’appel ainsi que sur la qualité d’officier de police judiciaire des gendarmes.
L’article 3 du projet de loi concerne, quant à lui, la protection et le contrôle des matières nucléaires. Les modifications apportées vont, là encore, dans le sens d’une harmonisation avec le droit commun et d’une simplification des procédures. Elles répondent à la volonté du Président de la République qui s’est exprimée à travers la loi du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire. En instaurant un véritable cadre législatif applicable aux activités nucléaires et à leur contrôle, et en assurant une plus grande transparence dans ce domaine, cette loi répondait à une attente forte de nos concitoyens. Son adoption était indispensable pour le maintien de l’activité nucléaire en France.
Les matières nucléaires civiles ou militaires doivent répondre aux mêmes exigences. Elles seront donc protégées et contrôlées dans les conditions du droit commun, à l’exception des matières nucléaires relevant de la dissuasion. Cette exception n’est pas choquante, la défense et la sécurité de notre pays dépendant en grande partie de la dissuasion. Les matières nucléaires affectées à la dissuasion, telles que les armes nucléaires ou les éléments combustibles de propulsion nucléaire, devront cependant répondre à des règles spécifiques fixées par un décret en Conseil d’État. Par souci de transparence à l’égard de nos concitoyens, pouvez-vous, monsieur le ministre, nous préciser quel est ce régime spécifique de contrôle et dans quel délai le décret sera publié ?
Au terme de la réforme, il n’y aura donc plus de distinction entre les matières nucléaires « civiles » et celles « affectées à la défense », mais uniquement une distinction entre les matières nucléaires affectées et celles qui ne sont pas affectées à la dissuasion.
Tels sont donc les points forts de ce texte : harmonisation de la justice militaire avec le droit commun de la procédure pénale, renforcement des droits de la défense, harmonisation avec le droit commun du régime de contrôle des matières nucléaires. Monsieur le ministre, le groupe UMP soutiendra ces propositions.
Nous pouvons tirer de ce texte très court – trois articles seulement – un enseignement très intéressant sur la place prise aujourd’hui par la défense nationale. Cette institution, composante à part entière de notre société, démontre que ses propres règles ne sont pas opaques et qu’elle applique celles du droit commun chaque fois que possible. C’est le sens de l’action menée par le ministère de la défense au cours de cette législature et nous mesurons toute la part que Mme Alliot-Marie et vous-même, monsieur le ministre, avez prise dans cette parfaite intégration.
Le bilan du Gouvernement, en effet, est positif. À l’occasion du dernier texte de la législature en matière de défense, permettez-moi de revenir quelques instants sur les cinq années de votre action.
Vous avez mené à bien trois grandes réformes : une loi de programmation militaire 2003-2008 intégralement respectée, ce qui n’avait pas été le cas depuis longtemps ; un système de réserve profondément rénové ; une rénovation du statut général des militaires, ainsi qu’une réforme des statuts particuliers et l’élaboration d’un plan de reconnaissance du personnel civil.
La défense nationale s’est modernisée et participe, comme l’ensemble des ministères, à l’effort de réduction des dépenses publiques : 568 millions d’euros d’économies ont été réalisées sans préjudice pour la capacité opérationnelle de nos armées.
La défense s’est affirmée comme un acteur majeur de l’économie française : premier acheteur, premier investisseur, premier recruteur et deuxième employeur de l’État, elle donne du travail à environ 10 000 entreprises, soit près de 2 millions de salariés. Elle s’est fortement investie pour la formation et l’emploi des jeunes, dont elle est le premier recruteur. La défense engage chaque année près de 35 000 jeunes, dont 7 000 sont sans diplôme, et est à l’initiative du programme « Défense deuxième chance ». Nos collègues Françoise Branget et Gilbert Meyer ont rendu récemment, sur ce sujet, un premier rapport d’étape.
Enfin, le ministère de la défense a œuvré activement en faveur de la construction de l’Europe de la défense.
Le groupe UMP est fier de ce qui a été entrepris au cours de cette législature. Je tenais donc à saluer l’action de Mme la ministre de la défense ainsi que la vôtre, monsieur le ministre, en faveur du monde combattant. Nous sommes favorables aux amendements déposés par le rapporteur, et nous voterons avec enthousiasme ce projet de loi ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Dans ce domaine, il n’existe pas, en Europe, de norme susceptible d’être suivie : la situation est très différente selon les pays. Mais il existe un cadre, un mouvement général qu’il était important d’analyser pour mieux s’y inscrire.
Bien entendu, ce texte se situe dans une certaine continuité, notamment par rapport à ceux votés en 1982 et 1998. En effet, de même qu’il n’y a qu’une république, il ne peut y avoir qu’une justice. Mais celle-ci doit tenir compte de la spécificité liée au statut et aux missions des militaires. La mise en concordance entre justices civile et militaire ne doit pas nous conduire à une « civilisation » de l’armée ni à une remise en cause des droits et devoirs qui sont associés au statut militaire. Le rapprochement du code de la justice militaire et des dispositions de droit commun va indéniablement dans la bonne direction : que, par exemple, les procédures d’appel de la seconde se rapprochent de celles de la première, ne peut que conforter l’État de droit, et nous ne pouvons que nous en féliciter.
La notion de sécurité juridique me semble également essentielle pour nos soldats effectuant des interventions extérieures comme pour ceux de la métropole : les règles auxquelles ils seront soumis seront en effet plus proches de celles en vigueur dans le civil. Élu d’une ville de garnison qui a l’honneur d’abriter le prestigieux 8e RPIMA, souvent amené à intervenir sur des théâtres extérieurs dans le cadre des OPEX, je sais à quel point ce projet était attendu.
Le texte modernise également les conditions d’habilitation des prévôts en tant qu’officiers de police judiciaire. Ne pourront être OPJ dans le cadre de la prévôté, en opération extérieure, que les gendarmes ayant cette qualification en métropole. C’est un élément essentiel, auquel le rapporteur spécial du budget pour la gendarmerie que je suis ne peut qu’être sensible. En effet, la perception de la prévôté a singulièrement évolué : il y a quelques années encore, elle était marquée par la défiance, et les prévôts pouvaient être considérés comme des « empêcheurs de combattre en rond ». Depuis, la compréhension mutuelle a progressé entre officiers de police judiciaire issus de la gendarmerie et militaires des différentes armes.
Cette plus grande compréhension est également liée à la nécessité pour nos soldats, qui interviennent sur le théâtre extérieur, de savoir que la prévôté est là pour leur assurer une certaine sécurité juridique. Nous savons, au regard de la problématique de judiciarisation globale de notre société, que le secteur militaire ne peut rester durablement à l’écart.
Enfin, ce texte modernise le régime juridique du contrôle des matières nucléaires. Dans ce cadre, tout ce qui ne relève pas de la dissuasion stricto sensu sera soumis au droit commun. On ne peut que se féliciter de cette avancée de nature à éviter que certains professionnels de l’agitation ou de l’antimilitarisme n’opposent abusivement des arguments peu favorables à notre défense, quant à la culture du secret, de situations et d’éléments d’exception.
Toutes les dispositions visant à rapprocher la procédure militaire de la procédure pénale civile vont dans le bon sens. C’est l’objectif de ce texte qu’un certain d’amendements viseront à améliorer. En tout état de cause, notre assemblée écoutera et analysera avec la grande sagesse qui la caractérise.
Le groupe UDF et apparentés votera, bien entendu, ce projet de loi, qui marque un progrès pour notre droit, pour notre justice, et donc pour notre République. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à M. le ministre.
Monsieur Beaulieu, vous m’avez interrogé, à juste titre, sur le régime juridique applicable au contrôle des matières nucléaires relevant de la dissuasion. Sachez que celui-ci fera, comme il se doit, l’objet d’un décret du Président de la République relatif à l’inspection des armements nucléaires et abrogeant, bien évidemment, celui du 29 avril 2002. Le projet de décret sera proposé à la signature de M. le Président de la République dès que le présent texte aura été voté, puis promulgué.
Sur le fond, la caractéristique de ce régime spécifique tient au fait qu’il est confié à une autorité particulière – l’Inspection des armements nucléaires – placée sous l’autorité directe du Président de la République, chef des armées, comme vous le savez.
Je le mets aux voix.
(L’article 1er est adopté.)
La parole est à M. le ministre, pour soutenir cet amendement.
En effet, l’amendement de votre commission va dans le sens d’un parallélisme des formes entre la justice de droit commun et la justice militaire en temps de paix. Toutefois, il convient, pour coordination, de renvoyer les dispositions de la justice militaire à l’article L. 111-9 du code de justice militaire.
Tel est l’objet de l’amendement n° 13.
(L’amendement est adopté.)
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
Je mets aux voix l’amendement n° 1.
(L’amendement est adopté.)
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
(L’amendement est adopté.)
La parole est à M. Dominique Caillaud, pour le soutenir.
(L’amendement est adopté.)
La parole est à M. Dominique Caillaud, pour le soutenir.
(L’amendement est adopté.)
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
(L’amendement est adopté.)
La parole est à M. Dominique Caillaud, pour le soutenir.
(L’amendement est adopté.)
La parole est à M. Dominique Caillaud, pour le soutenir.
(L’amendement est adopté.)
La parole est à M. Dominique Caillaud, pour le soutenir.
(L’amendement est adopté.)
La parole est à M. Dominique Caillaud, pour le soutenir.
(L’amendement est adopté.)
La parole est à M. Dominique Caillaud, pour le soutenir.
(L’amendement est adopté.)
(L’article 2, ainsi modifié, est adopté.)
La parole est à M. Dominique Caillaud, pour soutenir cet amendement.
(L’amendement est adopté.)
(L’article 3, ainsi modifié, est adopté.)
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir cet amendement.
(L’amendement est adopté.)
Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi.
(L’ensemble du projet de loi est adopté.)
La parole est à M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer.
Je ne reviendrai pas sur le lien très fort qui unit ce texte au plan de renouveau de La Défense, que j’ai présenté le 25 juillet dernier avec Nicolas Sarkozy. Il en est l’indispensable traduction législative. Je tiens à remercier la commission des affaires économiques et son président Patrick Ollier d’avoir procédé dans des délais très brefs à l’examen de ce texte.
Patrick Ollier, qui connaît bien les enjeux de La Défense, vous a fait, en commission, un exposé très complet de la situation. Je n’ai rien à y ajouter et je voudrais juste souligner quatre points de son propos qui structurent la position du Gouvernement.
En premier lieu, La Défense est une réussite, mais le quartier est soumis à une très forte concurrence. Deuxièmement, ses tours ont vieilli et n’attirent plus les investisseurs. Troisième élément fondamental, les sièges sociaux quittent La Défense pour Londres et non pour d’autres secteurs de l’Île-de-France. Enfin, le fonctionnement du site ne doit pas être payé par la vente de droits à construire.
La Défense est une grande réussite, chacun peut en convenir. En 1958, l’État a créé l’EPAD pour conduire la plus grande réalisation d’urbanisme du siècle sur un périmètre de 160 hectares. Près de cinquante ans après, La Défense reste le premier quartier d’affaires européen avec 1 500 sièges sociaux, plus de trois millions de mètres carrés de bureaux qui accueillent chaque jour quelque 170 000 salariés ; ce sont aussi 20 000 habitants et 200 000 mètres carrés de commerces.
Pourtant, chacun connaît aujourd’hui les enjeux du renouveau de La Défense. Les tours ont vieilli. Dix-sept tours sur les soixante et onze, soit 20 % du parc, sont aujourd’hui potentiellement « hors marché ». Ne pas procéder rapidement à leur rénovation signifierait une obsolescence accélérée de ces tours avec à la clef un risque de dégradation de l’image du quartier. Les dispositions fiscales adoptées en loi de finances rectificative devraient faciliter les opérations de démolition-reconstruction nécessaires.
Par ailleurs, comme je viens de le préciser, les grands groupes sont moins attirés par La Défense que par d’autres capitales européennes. Ce second signal justifie une action rapide. Ce sont, par exemple, les projets tels que ceux de City Life à Milan, ou encore les pôles tertiaires qui se développent rapidement à Londres, à Barcelone, à Madrid ou à Amsterdam. La concurrence à laquelle est soumise La Défense s’illustre par un chiffre : sur les dix groupes mondiaux qui y étaient implantés en 1995, sept ne l’étaient plus en 2005. Mais cette compétition, au-delà de La Défense, concerne toute la région Île-de-France : sur les cinq dernières années, Londres a attiré le quart des implantations de sièges sociaux et plates-formes tertiaires en Europe, contre seulement 5 % pour l’Île-de-France. La relance de La Défense est aujourd’hui un enjeu régional et national.
Quatrièmement, le fonctionnement de La Défense doit être pris en charge, dans des règles de droit commun, par les collectivités locales concernées.
La gouvernance actuelle de La Défense, qui repose sur un EPAD à la fois aménageur et développeur, mais aussi gestionnaire d’équipements publics, a atteint ses limites dès lors que l’EPAD ne bénéficie pas, même partiellement, des recettes fiscales générées par les activités implantées sur le site. Le conseil général des Hauts-de-Seine prend aujourd’hui en charge la moitié du déficit d’exploitation qui n’est pas couvert par les recettes d’aménagement, et les deux communes de Puteaux et de Courbevoie chacune le quart, mais cela ne constitue qu’une solution provisoire. Le texte qui vous est proposé va rendre viable et pérenne cette situation.
Chacun comprend que le Gouvernement souhaite utiliser les recettes que générera le plan de renouveau de La Défense à d’autres projets qu’à financer le seul fonctionnement du site. La Défense profitera à toute l’Île-de-France, qu’il s’agisse du prolongement d’Éole vers le Mantois et Versailles ou du financement des autres opérations d’intérêt national en Île-de-France comme Seine-amont ou Plaine de France. Pour que le renouveau de La Défense s’inscrive dans la solidarité régionale, la gestion des équipements publics de La Défense doit donc s’appuyer plus solidement sur les collectivités locales. Elles bénéficieront du transfert des équipements publics actuellement propriété de l’EPAD après leur remise à niveau, pour laquelle une enveloppe de 70 millions d’euros a été provisionnée dans les comptes de l’établissement public.
Pour répondre à ces enjeux, que propose le texte qui vous est soumis ?
Son premier objectif est de clarifier et de sécuriser les règles d’urbanisme applicables dans le périmètre de La Défense. Le plan de renouveau de La Défense se traduira par des opérations de démolition-reconstruction et aussi par de nouvelles constructions. Certains projets sont d’ores et déjà connus. La clarification des règles d’urbanisme est donc nécessaire et urgente. C’est l’objet de deux dispositions de la proposition de loi.
La première qualifie le projet d’intérêt national, ce qui donne une assise législative aux arrêtés que le préfet prendra au titre du dispositif bien connu de projet d’intérêt général – PIG. Ainsi, nous renforçons la sécurité juridique de ces actes.
La seconde consolide la base juridique des permis de construire qui devront être délivrés. Vous le savez, une partie de La Défense n’est pas couverte par des documents d’urbanisme, et c’est le droit commun du code de l’urbanisme qui s’applique, le fameux règlement national d’urbanisme, le RNU. Or, si le RNU est tout à fait adapté dans des communes rurales, il n’est pas concevable de continuer la construction de tours avec les mêmes règles. Les permis de construire délivrés sont en effet très fragiles, et nous avons tous en tête le coût du contentieux sur Cœur Défense.
La disposition proposée, qui revient à faire un document d’urbanisme par décret en Conseil d’État, est provisoire et disparaîtra dès que les procédures d’élaboration des PLU s’achèveront, mais le plan de relance ne peut pas attendre et ce décret donnera une base juridique solide pour délivrer les permis de construire. Dès que les communes auront pu matériellement rendre opposables leurs PLU, le droit commun reprendra bien entendu sa place.
Le second objectif de ce texte est de permettre la séparation des fonctions d’aménagement et de développement de celles de gestion des équipements publics.
De ce point de vue, force est de constater que le droit commun des grandes opérations d’urbanisme, qui prévoit que les équipements publics réalisés par les établissements publics d’aménagement ont vocation à être repris par les collectivités, n’est pas adapté à la situation de La Défense. En particulier, il ne permet pas de garantir une gestion unifiée du site de La Défense, seule à même d’apporter une réponse durable et cohérente aux enjeux de ce site sans équivalent. En outre, il ne permettrait pas au département des Hauts-de-Seine de continuer à s’impliquer, y compris financièrement, dans la gestion du site, et ferait reposer cette charge sur les seules communes.
Quelle est la solution proposée par le texte ?
Parce que l’unité de La Défense constitue un objectif d’intérêt général, comme en atteste la qualification d’opération d’intérêt national de La Défense depuis 1958, la proposition repose sur la création par la loi d’un établissement public ad hoc.
Parce que la gestion des équipements publics résultant des opérations d’aménagement est, dans le droit commun, une compétence des collectivités locales, la proposition retient l’option d’un établissement public local. Seules les collectivités membres pourront fixer le budget de l’établissement et modifier la répartition de leurs contributions respectives.
Enfin, parce que les enjeux de La Défense dépassent le cadre des deux communes de Puteaux et de Courbevoie, elle pérennise la participation du département des Hauts-de-Seine, qui devra assurer la part principale des charges résultant de la création de cet établissement, comme il a commencé à le faire dans le cadre actuel.
J’ajouterai une remarque : la région Île-de-France ne gère pas d’espaces publics urbains comme le font les communes ou les départements, et c’est pourquoi il ne nous semble pas légitime qu’elle participe à la structure de gestion ainsi créée. Par contre, et, là-dessus, rien ne change avec la situation actuelle, elle était, elle est et elle demeure membre de l’EPAD, c’est-à-dire qu’elle continue à piloter l’aménagement et le développement de La Défense. Cela nous semble naturel car elle se doit de participer pleinement à la gouvernance de cet équipement majeur pour le rayonnement de l’Île-de-France.
Je terminerai, mesdames, messieurs les députés, par trois observations.
Premièrement, les utilisateurs de La Défense, qu’il s’agisse des entreprises qui y sont implantées ou des habitants du quartier, ont manifesté de longue date leur souhait d’être associés aux grandes décisions qui engagent l’avenir de La Défense. Le Gouvernement a souhaité répondre à cette demande en prévoyant la création d’un comité consultatif que le nouvel établissement public devra consulter.
Deuxièmement, je voudrais apporter quelques précisions à propos de l’exonération de redevance bureaux pour les démolitions-reconstructions qui a été votée en décembre.
Tout d’abord, l’exonération ne porte que sur la redevance bureaux qui est acquittée une fois pour toutes lors de la construction des bureaux. Naturellement, la taxe bureaux qui est due annuellement n’est pas modifiée.
Ensuite, ne sont exonérés que les mètres carrés existants qui sont démolis et reconstruits. Les mètres carrés supplémentaires, neufs, restent soumis à la redevance bureaux. Il s’agit tout simplement de ne pas taxer deux fois le même objet.
Enfin, cette mesure porte sur l’ensemble de l’Île-de-France et permettra la modernisation des bureaux anciens et obsolètes dans tous les territoires en mutation. C’est une mesure de dynamisation de l’économie régionale.
Voilà, mesdames, messieurs les députés, quels sont les enjeux du texte qui vous est soumis. Je remercie une fois de plus le président Ollier et la commission des affaires économiques d’avoir permis de leur apporter une réponse rapide. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Une telle mobilisation, monsieur le ministre, est liée à l’intérêt de ce texte. Vous avez parfaitement développé les détails qui justifient le dépôt et le vote de cette proposition de loi. C’est vrai que la commission a fait vite pour l’étudier…
Inauguré par le général de Gaulle le 13 septembre 1958 sur le territoire des communes de Puteaux, Courbevoie et Nanterre, le quartier d’affaires de La Défense s’étend sur 31 hectares et représente aujourd’hui le plus grand centre de ce type en Europe. Vous avez raison, cela risque de ne plus être le cas demain si nous ne prenons pas rapidement les dispositions qui s’imposent.
Chaque jour, 170 000 personnes vont y travailler, en empruntant essentiellement des transports en commun. Nous avons dans les Hauts-de-Seine un vrai débat sur le maillage des transports en commun de la région parisienne, certes, mais surtout de notre département des Hauts-de-Seine, par rapport à l’enjeu de La Défense, et ce débat sera probablement soutenu par les dispositions qui viennent d’être prises. Pour nous aussi, élus des Hauts-de-Seine, il y a urgence.
Y sont situés les sièges sociaux de 1 500 entreprises, dont quatorze des vingt premières entreprises françaises, et quinze des cinquante plus grandes entreprises mondiales. La Défense, ce sont également 3 millions de mètres carrés de bureaux, 600 000 mètres carrés de logements et 200 000 mètres carrés de commerces, dont le centre commercial des Quatre-Temps, qui était, lors de sa création, le plus grand d’Europe, avec 100 000 mètres carrés, ce qui est considérable.
La Défense, c’est donc le quartier de tous les superlatifs. Pourtant, ce centre d’affaires voit sa compétitivité menacée, dans un secteur qui est de plus en plus concurrentiel. Les constructions connaissent un vieillissement certain, ce qui suppose d’importants travaux de rénovation, ou même de démolition-reconstruction. Nous avons des concurrents qui, sur le plan européen, que ce soit en Angleterre, en Italie ou en Allemagne, montrent le bout du nez et risquent de prendre cette première place que nous souhaitons conserver.
Trente et un immeubles comportent des plateaux de moins de 1 200 mètres carrés, vingt ont une surface utile de moins de 40 000 mètres carrés, et un immeuble sur six a été construit avant 1985 sans avoir fait l’objet d’aucune réhabilitation. Enfin et surtout, dix-sept tours représentant environ 650 000 mètres carrés sont aujourd’hui « hors marché » en raison de leur vieillissement.
Outre la question de l’obsolescence, se pose aussi la question de la gouvernance du quartier d’affaires de la Défense, qui est aujourd’hui largement inadaptée. Créé par un décret du 9 septembre 1958 pour une durée de trente ans, puis prolongé dans ses fonctions à différentes reprises, parce qu’on n’a pas trouvé à l’époque de solution définitive, l’établissement public d’aménagement de La Défense, l’EPAD, actuellement présidé par notre collègue et ami Jacques Gautier, premier vice-président du conseil général et maire de Garches, a pour vocation d’aménager le site de La Défense pour le compte de l’État et des collectivités locales concernées. Établissement public à caractère industriel et commercial, il doit effectuer les études préliminaires d’urbanisme, réaliser au fur et à mesure de l’évolution du site les travaux d’infrastructure indispensables, puis vendre aux investisseurs un droit de construire, qui constitue sa principale ressource financière. Il fallait effectivement revoir cette gouvernance et revoir l’organisation des pouvoirs à travers des organismes mieux adaptés à cette gestion.
En plus de cette mission première d’aménagement, l’EPAD assure également, en pratique, d’autres fonctions parmi lesquelles la gestion quotidienne du site et son animation, en collaboration étroite avec les collectivités locales concernées. L’établissement est régi par un conseil d’administration paritaire, composé à la fois de représentants des ministères de tutelle et de représentants des collectivités locales, dont la région Île-de-France et Paris.
Ainsi, l’EPAD est à la fois aménageur, développeur et gestionnaire des équipements publics du quartier. Or l’établissement ne bénéficie pas des recettes fiscales générées par les activités implantées sur le site, alors même qu’il doit assumer les charges d’exploitation des équipements publics. En conséquence, il doit faire face à un déficit d’exploitation de l’ordre de 15 millions d’euros par an, qui obère d’autant sa propre capacité de développement et sa contribution à d’autres opérations, notamment les opérations d’intérêt national en Île-de-France, le prolongement d’Éole à La Défense et, au-delà, vers le Mantois et Versailles.
Une solution ponctuelle a été apportée en 2006 puisque les collectivités territoriales ont pris en charge une partie de ce déficit en apportant, à titre exceptionnel, une contribution de 4 millions d’euros, 50 % venant du département des Hauts-de-Seine, présidé par M. Nicolas Sarkozy, et 25 % de chacune des communes de Puteaux et de Courbevoie.
La présente proposition de loi a donc pour objet d’apporter une solution efficace à ces deux problèmes.
L’obsolescence du bâti peut avoir des conséquences très importantes : risque économique et financier pour les propriétaires, risque d’abandon du quartier, comme cela est déjà arrivé dans plusieurs métropoles américaines. Rappelons en outre que la concurrence des autres quartiers d’affaires européens est elle aussi importante : sur les dix groupes mondiaux implantés à La Défense en 1995, sept ne le sont plus en 2006.
Entre 2000 et 2006, Londres a attiré le quart des implantations de sièges sociaux en Europe, contre seulement 5 % en Île-de-France. Le danger est là.
Afin de relancer le quartier, le directeur général de l’EPAD a proposé au conseil d’administration de l’établissement, le 2 décembre 2005, le projet « La Défense 2015 », prévoyant la construction de 850 000 mètres carrés de bureaux, 100 000 mètres carrés de nouveaux logements, l’édification de deux tours de plus de 300 mètres de haut. D’autres propositions ont été faites. Le 25 juillet 2006, le Gouvernement a présenté à son tour ses perspectives pour la période 2007-2013 dans un « plan de renouveau de La Défense ». Les idées fusent, les projets s’élaborent, il faut maintenant trancher.
La première priorité du plan consiste à rénover, d’ici à 2013, au moins la moitié des immeubles prioritaires, ce qui devrait permettre la construction d’au moins 150 000 mètres carrés de surfaces nouvelles par le biais d’agrandissements. Par ailleurs, le plan prévoit la construction de nouvelles tours, ce qui rendra disponibles 300 000 mètres carrés de surface d’ici à 2013.
Dans le domaine de la gouvernance, il semble par ailleurs nécessaire de disjoindre les fonctions d’aménageur de celles de gestionnaire des équipements publics, qui répondent à des logiques totalement différentes. Il faut en outre apporter une solution durable à la question du financement de l’EPAD. À cette fin, la présente proposition de loi contient plusieurs articles dont je voudrais souligner l’importance et les enjeux pour notre économie. En tant que rapporteur, j’ai souhaité que ces articles soient adoptés sans modification et je remercie la commission de m’avoir suivi.
L’article 1er souligne l’intérêt général attaché à la modernisation et au développement de La Défense. Monsieur le ministre, vous avez longuement détaillé les modalités en matière l’urbanisme, et je n’y reviendrai pas. Cet article renvoie au pouvoir réglementaire, sous le contrôle du Conseil d’État, le soin de déterminer les orientations générales d’urbanisme applicables dans le périmètre. L’opération devient une opération d’intérêt national, ce qui est extrêmement important. Les constructions, travaux ou installations nécessaires dans ce périmètre peuvent en outre être qualifiées de projets d’intérêt général, ce qui permet de garantir l’efficacité et la célérité des opérations.
L’article 1er bis, souhaité par le Gouvernement, crée un établissement public local à caractère industriel et commercial, dénommé Établissement public de gestion du quartier d’affaires de La Défense – le sigle sera un peu plus compliqué que celui d’EPAD (Sourires.) Cet établissement a pour mission de gérer les ouvrages et espaces publics, ainsi que les services d’intérêt général situés dans le périmètre, soit qui lui appartiennent, soit qui appartiennent à d’autres collectivités mais qui lui sont mis à disposition. Il assure la mise en valeur et l’amélioration du site.
Pour l’exercice de ces missions, les ouvrages publics sont soit transférés en pleine propriété, soit mis à disposition par la collectivité propriétaire. Les transferts de propriété sont réalisés à titre gratuit, sans versement d’honoraires ou d’indemnités.
Cet article prévoit en outre les modalités de mise à disposition des ouvrages publics entre le nouvel établissement public et l’EPAD, qui existe déjà. Il comporte ensuite une disposition particulièrement importante sur laquelle je voudrais attirer votre attention : il dispose que les statuts du nouvel établissement « prévoient les conditions dans lesquelles un comité consultatif représentant les personnes physiques et morales utilisatrices régulières des équipements et espaces publics gérés par l’établissement est consulté sur les orientations retenues par l’établissement public pour l’exercice de ses compétences ». Je souhaiterais – et la commission a retenu cette idée – que ce comité consultatif prenne la forme d’un GIP, un groupement d’intérêt public. Cela permettrait d’associer utilement les différents partenaires, y compris les chambres consulaires de telle sorte que cette animation indispensable s’organise à travers ce GIP et vienne en soutien à l’établissement que nous allons créer. C’est un métier différent, qui doit être mis en œuvre par les personnes compétentes.
Ce GIP me paraît essentiel dans la mesure où il doit permettre de rapprocher les entreprises et les décideurs publics, afin qu’ils se concertent sur l’orientation à donner à l’aménagement du site de La Défense. C’est une demande forte – et, je crois, parfaitement fondée – des entreprises présentes à La Défense.
Enfin, l’article 1er bis prévoit par ailleurs la composition du conseil d’administration du nouvel établissement public, regroupant à 50 % des représentants du département, et à 50 % des représentants des communes de Courbevoie et de Puteaux. Ce conseil d’administration détermine l’orientation de la politique à suivre, vote son budget et nomme son directeur. Cet article prévoit enfin les ressources de l’établissement public : elles seront composées des concours financiers des collectivités territoriales, des produits du domaine, des sommes perçues en contrepartie de services rendus, du produit des dons et legs, des versements au titre du fonds de compensation pour la TVA, etc. Ainsi, le problème de financement sera réglé : le financement sera durable. Le contrôle des actes de l’établissement est opéré par le préfet des Hauts-de-Seine.
Le dernier article du projet de loi prévoit enfin que, jusqu’en 2014, les dépendances du domaine public routier de l’État situées dans le périmètre de La Défense sont apportées à titre gratuit à l’établissement.
Ce texte est important car il donne au quartier de La Défense de nouveaux atouts pour faire face à cette concurrence dont nous avons parlé, M. le ministre et moi-même, au niveau européen. Ce texte est souhaité, par Nicolas Sarkozy, le président du conseil général des Hauts-de-Seine…
Telle est donc l’économie générale de cette proposition de loi qui devrait permettre de poser un socle juridique préalable à la modernisation du quartier de La Défense. Elle n’a fait l’objet d’aucune proposition d’amendement en commission. Je vous propose donc, mes chers collègues, de l’adopter conforme. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Concernant la gestion de La Défense, il nous est proposé de créer un établissement public chargé d’en gérer les équipements. Il était temps en effet de clarifier la situation de l’EPAD, dont le déficit chronique ne pouvait plus continuer à être comblé par la vente de droits à bâtir. Sur un plan strictement technique, on pourrait donc considérer que cette clarification est plutôt une bonne chose. Mais en y regardant de près, sur le plan de l’équité, c’est pour le moins discutable. Cette proposition de loi donne en effet la désagréable impression d’avoir été savamment concoctée entre M. Karoutchi et ses amis – nos collègues maires de Puteaux et Courbevoie, ainsi que le président du conseil général. Les premiers vont certes devoir enfin mettre, un peu, la main à la poche, après avoir perçu pendant tant d’années les taxes versées par les multinationales de La Défense implantées sur leurs territoires. Mais, pour boucler le financement, M. Sarkozy, lorsqu’il était président de l’EPAD, a obtenu du conseil général des Hauts-de-Seine – qu’il présidait également – qu’il accepte de financer à hauteur de 50 % ce nouvel établissement de gestion, en lieu et place des premiers.
Tout d’abord, on peut légitimement s’interroger sur les raisons pour lesquelles ce texte est déposé par M. Karoutchi, et non par le Gouvernement. On peut aussi se demander si les deux députés concernés, ceux de Puteaux – Mme Ceccaldi-Raynaud – et de Courbevoie – M. Kossowski – ont été un peu plus consultés que moi, qui ne l’ai pas été du tout. Je me pose ces questions d’autant plus que la municipalité de Nanterre, troisième commune concernée par l’opération d’intérêt national de La Défense, a été totalement ignorée et n’a fait l’objet d’aucune proposition de participation financière de la part du conseil général aux dépenses d’entretien des 90 hectares de son territoire aménagés par l’EPAD, et que la ville de Nanterre prend en charge depuis maintenant plusieurs années !
Pourquoi M. Karoutchi, qui affiche par ailleurs un souci marqué, particulièrement dans la dernière période, pour les intérêts de la ville de Nanterre, n’a-t-il pas demandé pour Nanterre une aide du conseil général aussi généreuse que pour Puteaux et Courbevoie, deux communes déjà fort riches et qui ont – hasard ou nécessité – la même couleur politique que lui et que de l’assemblée départementale ?
Nous sommes bien là, c’est clair, dans les petits arrangements entre amis, au détriment du débat démocratique, de la transparence et de l’équité dans l’utilisation de l’argent public.
L’autre aspect de ce texte, qui concerne la modification des règles d’urbanisme, s’inscrit dans la droite ligne des décisions prises lors des derniers conseils d’administration de l’EPAD. Il s’agit de mettre en œuvre un plan de renouveau de La Défense, afin d’en définir l’avenir à l’horizon 2015, avec l’objectif de créer 300 000 mètres carrés de bureaux supplémentaires pour accueillir 50 000 salariés de plus. Pour ce faire, ce texte modifie les règles d’urbanisme et envisage d’appliquer aux nouvelles constructions des dispositions proches de celles qui prévalent pour les opérations d’intérêt public – par exemple les lycées. Comme si la construction de bureaux n’était pas en soi déjà suffisamment rentable ! Une fois de plus, les élus de droite s’apprêtent à utiliser l’argent public pour financer des intérêts privés.
Pour le ministre délégué aux collectivités territoriales, cette proposition de loi constitue « l’indispensable traduction législative » du renouveau de La Défense. Permettez donc qu’en examinant ce texte, nous discutions également de ce fameux renouveau programmé de La Défense. Car il soulève pour l’avenir de nombreuses questions, tant sur la méthode employée, que sur les modèles de développement qu’il induit. En effet, votre vision de l’avenir de La Défense ne nous semble ni cohérente, au regard de l’aménagement du territoire de l’Île-de-France, ni durable pour l’environnement, malgré l’application de la norme « haute qualité environnementale » aux nouvelles constructions, ni même efficace d’un point de vue économique. Ce n’est d’ailleurs pas surprenant puisque ce renouveau de La Défense a été décidé sans aucune concertation avec l’établissement public d’aménagement Seine-Arche – avec lequel l’EPAD devrait pourtant travailler en étroite collaboration – et le conseil régional.
Cette méthode, pour le moins abrupte, tranche singulièrement avec la vaste concertation, toujours en cours, mise en œuvre pour l’élaboration du schéma directeur régional d’Île-de-France. Là encore, nous avons la désagréable impression que la direction de l’EPAD a manœuvré pour prendre le conseil régional de vitesse. On ne s’en étonnera guère, tant le modèle de développement que l’EPAD s’est choisi est en contradiction avec celui que la région tente de construire.
Le schéma directeur régional d’Île-de-France s’est notamment fixé comme objectif de rééquilibrer le développement économique à l’est de la région afin, par exemple, de réduire la pression foncière et de limiter le nombre de déplacements. C’est exactement l’inverse de ce qui est mis en œuvre dans ce renouveau programmé de La Défense, d’où la méthode employée, opaque et faisant fi des échanges démocratiques. Il faut reconnaître que la démocratie prend du temps, beaucoup plus de temps, que les arrangements entre amis, en catimini. Elle exige aussi de développer des arguments et de mettre dans le débat public les objectifs poursuivis. Manifestement, le président du conseil général des Hauts-de-Seine, candidat à la présidentielle, et ses amis, n’y tiennent pas.
J’ajoute qu’aucun travail en amont n’a été réalisé pour que les 50 000 emplois nouveaux bénéficient aux habitants des communes avoisinantes : aucun travail de formation ou de conventionnement avec les maisons de l’emploi existantes comme celles de Nanterre, de Puteaux ou de Courbevoie. Ces nouveaux salariés viendront donc de plus loin : il faudra soit les transporter, soit les loger s’ils veulent s’installer à proximité de La Défense.
Les transporter, comment ? Sur des réseaux de transport en commun saturés et déjà utilisés par 86 % de ceux qui travaillent à La Défense. Comment allez-vous ajouter en l’état 50 000 voyageurs de plus ? Où ces questions sont-elles étudiées, débattues ?
Les loger, comment ? La demande de logements à proximité de La Défense est déjà très nettement supérieure à l’offre, alors que les jeunes de Suresnes, Puteaux et Courbevoie, ont déjà tant de mal à se loger. Certes, le projet de renouveau concocté par l’EPAD a royalement prévu 1 400 nouveaux logements, soit une moyenne d’environ 36 nouveaux employés par logement, ce qui ne les changera guère de la promiscuité qui règne déjà dans le RER A le matin pour se rendre au travail !
Décidément, rien de tout cela n’est réfléchi ni élaboré en concertation avec les citoyens, ni donc pour eux.
Le développement économique est un tout. On ne peut pas dissocier la construction de nouveaux bureaux de l’offre d’infrastructures, logements, transports en commun, crèches, écoles, etc. Les grands groupes trouveraient d’ailleurs un plus grand intérêt à ces infrastructures qu’aux exonérations de taxes et autres charges patronales que le Gouvernement leur propose. C’est pourquoi ce prétendu « renouveau de La Défense », dont cette proposition de loi se veut la traduction législative, est en réalité le contraire d’une avancée, tant sur le plan économique que sur le plan social. De surcroît, ses conséquences environnementales sont loin d’être à la hauteur du Pacte écologique qu’a pourtant signé le président du conseil général des Hauts-de-Seine et candidat à l’élection présidentielle.
Il est impossible de développer des perspectives audacieuses pour ce beau site, remarquablement situé aux portes de Paris, sans les acteurs concernés, au détour d’un texte arrivant soudainement en fin de législature. Il y a effectivement matière à un développement économique au service des hommes, des femmes et des jeunes de notre région. Mais comment osez-vous réfléchir à leur place et disposer de leur argent, sans concertation avec les communes concernées, les élus du conseil général et du conseil régional, la Ville de Paris et même la chambre de commerce et d’industrie ?
Face à une telle démarche, les députés communistes et républicains ne peuvent que voter contre ce texte.
Traduction législative du plan de renouveau pour la période 2007-2013, que vous avez lancé, monsieur le ministre, cette proposition de loi vise à nous doter des moyens juridiques de moderniser ce site exceptionnel, qui concourt au développement économique de l’Île-de-France et de notre pays dans son ensemble. En effet, il s’agit de redéfinir les règles applicables au périmètre de La Défense et de créer un établissement public de gestion en charge du quartier d’affaires.
Comme vous l’avez souligné, monsieur le président de la commission, le dispositif proposé s’inscrit dans la continuité d’un long processus qui a débuté en 1958 lorsque l’État décide, sous l’autorité du général de Gaulle, la création d’un établissement public pour l’aménagement de La Défense, l’EPAD, dont il fixe par décret le périmètre d’intervention et les moyens de mener à bien sa mission. La tâche est gigantesque, le rond-point de La Défense se limitant à l’époque à des pavillons vétustes et de petites usines à proximité des bidonvilles. L’EPAD doit donc acquérir des terrains et mener à bien expropriations et relogements.
Le projet prend forme en 1964, avec l’adoption du premier plan masse pour le quartier d’affaires, qui prévoit la création de 850 000 mètres carrés de bureaux et d’immeubles de taille identique, l’ensemble devant donner sur une vaste esplanade. Une activité commerciale de proximité est aussi prévue. Cette année 1964 voit l’édification du premier immeuble de La Défense, réalisé à la demande de la société Esso. Celle-ci était d’ailleurs la seule à être propriétaire du terrain, dont le rachat nous a coûté fort cher, comme vous l’avez rappelé, monsieur le ministre.
La période 1965-1969 voit la construction des premières tours Nobel et Aquitaine ainsi que des premières infrastructures de transport, notamment celles du futur RER – cela prouve que les transports n’ont pas été oubliés. L’ampleur du succès et le boom des demandes de surfaces de plus en plus importantes rendent nécessaires l’adoption d’un nouveau plan masse, l’ancien s’avérant dépassé par ces nouveaux défis.
À partir de 1970, ce nouveau plan masse permet la réalisation des tours de deuxième génération, dont les plus importantes ont une superficie de 65 000 à 90 000 mètres carrés. Autre avancée essentielle, le RER relie La Défense à l’Étoile en moins de cinq minutes.
Malheureusement, le quartier va connaître en 1973 une grave crise consécutive à la saturation du marché des bureaux. Il faudra attendre le début des années quatre-vingt pour qu’émergent à nouveau de très grands projets composés de plusieurs immeubles, qui relancent la construction.
Des tours de troisième génération, moins larges et moins hautes, selon un modèle plus économique, font leur apparition, comme les tours Pascal, Voltaire et celles du quartier Michelet. De nombreuses chaînes hôtelières décident d’installer des établissements sur le site. C’est aussi à cette période que le Président Mitterrand lance la réalisation de La Grande Arche. Le remodelage du CNIT, la création d’Infomart et du Dôme Imax vont renouveler l’offre en matière d’expositions et de salons.
On assiste alors à la montée en puissance de ce quartier, que traduit l’augmentation du nombre d’emplois, passé d’environ 51 000 en 1982 à plus de 104 000 en 1990, et qui confirme la place de La Défense comme leader européen des centres d’affaires.
Nous avons certes connu une nouvelle crise immobilière en 1993 mais elle fut elle aussi conjoncturelle. Loin de sombrer dans le pessimisme ambiant, l’EPAD s’est attaché à développer l’accès aux nouvelles technologies, faisant entrer de plain-pied le quartier de La Défense dans l’économie numérique. Les entreprises du site ont été très rapidement raccordées aux premières autoroutes de l’information par un câblage Internet haut débit et sécurisé. Parallèlement, la qualité des équipements proposés a attiré sur le site des entreprises innovantes et a permis le développement de nouveaux métiers.
Ce bref historique montre que le quartier de La Défense a toujours surmonté les différentes crises qu’il a traversées, grâce notamment à la réactivité de l’EPAD, son aménageur, ainsi qu’à l’engagement de l’État et des différentes collectivités locales.
Comme le rappelait en juillet 2006 Nicolas Sarkozy, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire et président du conseil général des Hauts-de-Seine, ce site est une « réussite exceptionnelle » qui dispose d’atouts conséquents, déjà exposés par M. le président de la commission. Mais le ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire soulignait également que ces atouts ne devaient pas nous faire oublier « les signes de fragilité » de La Défense.
En effet, trois facteurs négatifs menacent la compétitivité du quartier d’affaires et imposent au législateur une adaptation juridique en matière d’urbanisme et de gestion : un bâti vieillissant, une concurrence accrue au niveau européen et une gouvernance obsolète.
En ce qui concerne le bâti, un audit réalisé sur 71 tours a mis en lumière les faiblesses du parc immobilier actuel au regard des normes internationales. Ce sont 20 % de ces tours qui sont considérés comme potentiellement « hors marché ». Si rien n’était entrepris, les incidences sur l’homogénéité et l’image du quartier pourraient être désastreuses. Nous risquons ce que certains observateurs appellent une « rupture urbanistique ».
Pour éviter cette rupture, la loi de finances rectificative pour 2006 comporte des dispositions fiscales en faveur des opérations de démolition- reconstruction. Le groupe UMP se félicite que ces opérations bénéficient, comme vous l’avez rappelé, monsieur le ministre, d’une exonération d’agrément dans la limite d’une extension de leur surface de 40 000 mètres carrés. Elles seront également exonérées de la redevance sur la création de bureaux à concurrence de cette surface. Seules devront être taxées les surfaces supplémentaires ajoutées par la reconstruction.
Il est prévu d’autre part, de 2007 à 2013, 300 000 mètres carrés de constructions nouvelles en surface hors œuvre nette. En outre, conformément à ce que vous avez annoncé, monsieur le ministre, la construction de la tour Phare constituera le symbole d’une « nouvelle période de l’histoire de La Défense ». Par sa consommation énergétique réduite, elle engagera l’ensemble du site dans un véritable processus de développement durable, dont elle est la première réalisation. Il est en effet impératif que la conception et la réalisation immobilières tiennent compte du facteur préoccupant que constitue le réchauffement climatique sans précédent que nous connaissons.
Ce contexte de rénovation rend d’autant plus nécessaire la sécurisation des règles d’urbanisme prévue par l’article 1er de la proposition de loi.
La concurrence accrue au niveau européen est le deuxième facteur négatif susceptible de peser sur la compétitivité de La Défense. Nous avons l’obligation d’intégrer la réalité d’un monde désormais ouvert sur le plan économique. Signe de la sévérité de cette concurrence, il ne reste aujourd’hui que trois des dix grands groupes internationaux qui étaient encore présents à La Défense en 1995. Il nous faut affronter de nombreux rivaux, tels que les villes que vous avez citées, qui n’hésitent pas à investir.
Le système de gouvernance obsolète est le troisième facteur négatif qu’il convient de traiter. Comme je l’ai souligné dans la partie historique de mon propos, l’EPAD a été créé en 1958 pour assurer une triple mission d’aménageur, de développeur et de gestionnaire des équipements publics. Mais l’ampleur des charges financières à venir lui enlève la possibilité de continuer à assumer l’ensemble de ces tâches. En 2006, le conseil général des Hauts-de-Seine, la municipalité de Puteaux et celle de Courbevoie, dont je suis le maire, ont dû prendre en charge respectivement 50 %, 25 % et 25 % du déficit d’exploitation non couvert par les recettes d’aménagement. Une telle solution ne pouvait être que transitoire.
L’article 2 de la proposition de loi que nous étudions aujourd’hui a précisément pour finalité de réorganiser et de structurer la gouvernance, en séparant notamment les fonctions d’aménagement et de développement. Le développement de La Défense continuera d’être assuré par l’EPAD, tandis que la gestion du quartier et des établissements publics sera confiée à un établissement public de coopération intercommunale regroupant le département des Hauts-de-Seine, la ville de Puteaux et ma commune de Courbevoie.
Grâce à ce nouveau mode de gouvernance, les recettes dégagées par l’EPAD pendant la période du plan de relance contribueront à financer les nouvelles opérations d’intérêt national en Île-de-France décidées par le Gouvernement en mars 2006, sur le plateau de Saclay, le territoire de Seine-amont et le secteur de Seine-aval.
De plus, nous nous félicitons que les entreprises et les habitants du quartier soient associés aux grandes décisions futures par le biais d’un comité que l’EPCI devra consulter une fois par an.
Au nom de mon groupe, je vous invite, mes chers collègues, pour toutes les raisons que je viens de développer devant vous, à soutenir cette proposition de loi. Je tiens à rappeler, loin de toutes considérations partisanes, que le quartier de La Défense présente un caractère d’opération d’intérêt national. En effet, le renouveau de ce grand pôle d’affaires, certes essentiel pour la vitalité et le dynamisme de toute la région Île-de-France, l’est tout autant pour l’image internationale et européenne de la France.
Il me semble important que la représentation nationale, par un vote favorable, apporte sa contribution à ce renouveau voulue par l’ensemble des acteurs publics. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
La proposition de loi issue de la majorité sénatoriale dont nous débutons la discussion est en effet un véritable scandale juridique et politique, un symbole de la République clientéliste, celle qui fabrique des lois sur mesure pour les amis, au nom de la « gouvernance obsolète » que vous venez d’évoquer, monsieur le maire. Que deviendra l’établissement public d’aménagement ? Quelles seront les missions de l’établissement public de gestion ? Quelles seront les relations entre l’un et l’autre ? Le texte ouvre un vaste champ de possibilités en la matière.
Pourquoi une telle précipitation à mettre en place, dans les deux mois suivant le vote de ce texte, un nouveau dispositif « abracadabrantesque », alors qu’on aurait pu simplement autoriser chacune des communes concernées, dont les vôtres, chers collègues, à conduire une opération d’intérêt national sur son territoire ?
Disons le tout net : cette proposition de loi tire prétexte de la nécessité de relancer le quartier d’affaire de La Défense pour pérenniser un état de fait, à savoir les erreurs et l’iniquité qui entachent la gestion de ce quartier d’affaires, au bénéfice de certaines collectivités, dont le département des Hauts-de-Seine, présidé – faut-il le rappeler ? – par M. Sarkozy, au prix de graves dérogations aux règles essentielles du droit constitutionnel et parlementaire, du droit des collectivités locales et du droit de l’urbanisme –. rien que ça ! – et au terme d’un incroyable parcours rendu possible par la confusion des rôles et des pouvoirs que concentre en ses mains celui qui est tout à la fois ministre et numéro deux du Gouvernement, président de l’UMP et président du conseil général des Hauts-de-Seine – le souffle me manque !
Permettez-moi de commencer par ce point. Présenté comme une simple adaptation technique aux problèmes soulevés par l’évolution du quartier de La Défense, géré par un établissement public que présidait le même Nicolas Sarkozy jusqu’en juillet dernier, ce texte a été largement préparé par et pour le président du conseil général des Hauts-de-Seine. Vous nous l’avez d’ailleurs avoué vous-même, monsieur Ollier !
Ce texte a en fait deux objectifs principaux.
Il s’agit d’abord de récompenser deux communes UMP amies, Puteaux et Courbevoie, en leur permettant de continuer à percevoir les recettes fiscales générées par La Défense, sans participer aux dépenses d’entretien, imputées quant à elles à l’établissement public d’aménagement de La Défense.
Son second objectif est d’assurer à ces deux communes, associées au conseil général des Hauts-de-Seine, la mainmise sur la gestion de ce site à travers le nouvel EPIC qui exclue totalement le conseil régional d’Île-de-France, dont le grand tort est de ne pas être dirigé par des amis de M. Sarkozy. Je pourrais également citer, après ma collègue Jacqueline Fraysse, le cas de la ville de Nanterre.
L’objectif affiché – à savoir l’intérêt général bien compris, consistant à redynamiser un atout économique dont je reconnais l’importance majeure non seulement pour Paris et l’Île-de-France, mais également pour l’ensemble du pays – peut certes paraître séduisant et susciter l’abstention ou l’adhésion. Cependant, si tel était réellement l’objectif recherché, pourquoi le Gouvernement ne s’en est-il pas soucié en déposant lui-même un projet de loi ?
Tout simplement parce que l’objectif est autre et que le dépôt d’un projet de loi aurait nécessité le passage sous les fourches caudines du Conseil d’État, qui n’aurait certainement pas épargné toutes les dérogations que comporte ce texte aux règles de gestion des ouvrages, des espaces publics et des services d’intérêt général, ou à celles de la domanialité publique et du droit de l’urbanisme.
J’en viens ainsi à la deuxième illustration du « petit arrangement entre amis » qu’a évoqué Mme Fraysse : M. le ministre Sarkozy, comprenant bien qu’un projet de loi, véhicule classique d’une telle réforme, était voué à l’échec, l’a fait porter par son ami le sénateur Karoutchi – par ailleurs chargé, me semble-t-il, de l’organisation de son atelier de campagne, ce qui n’a bien sûr rien à voir – sous la forme d’une proposition de loi déposée le 20 décembre dernier, soit à Noël. Ayant coiffé au préalable sa casquette de numéro deux du Gouvernement, il avait également fait adopter un premier volet de son plan dans la loi de finances rectificative en exonérant de la redevance la création de bureaux dans le quartier de La Défense – c’était du moins l’intention initiale, qui précédait une extension de la mesure à toute l’Île-de-France –, privant au passage la région d’environ 40 millions d’euros de recettes alors même que des programmes particulièrement ambitieux doivent être menés pour toute l’Île-de-France au titre du développement des transports collectifs et de la politique du logement.
Toutes affaires cessantes, une semaine après la reprise des travaux parlementaires de janvier et en toute fin de législature, le Sénat a adopté cette proposition de loi, après un invraisemblable tour de passe-passe entre la majorité UMP et le Gouvernement, représenté par M. le ministre Hortefeux.
En effet, je le rappelle, les articles 2 à 9 de cette proposition de loi tombant sous le coup de l’article 40 de la Constitution – raison pour laquelle ils auraient dû être intégrés dans un projet de loi, et non dans une proposition de loi – ont été supprimés en commission pour être, comme par hasard, immédiatement réintroduits par M. Hortefeux sous forme d’amendement du Gouvernement.
Monsieur le ministre, chacun a le droit d’avoir des amis de talent et je tiens à saluer ce travail d’artiste législatif. Vous pourrez transmettre mes félicitations à M. Hortefeux.
Enfin, malgré l’encombrement de nos travaux à deux semaines de leur interruption, cette proposition de loi est inscrite à l’ordre du jour prioritaire de notre assemblée, où la majorité UMP, dans un nouvel exercice de dévotion à l’égard de son président – celui de l’UMP, bien sûr – s’apprête à la voter dans l’urgence et à la voter conforme, à l’invitation de M. Ollier. À Sarkoland, la passion autorise tous les sacrifices !
Combien nous aurions aimé, chers collègues, être témoins d’un tel zèle sur des textes en souffrance, comme ceux qui portent sur les OGM ou sur les actions de groupe – les class actions – et qui resteront finalement dans les tiroirs d’une législature finissante !
Ainsi, cette proposition de loi, qui va de pair avec l’exonération du secteur de La Défense des contraintes générées par l’esprit du schéma directeur, est contraire à l’objectif de rééquilibrage des activités tertiaires à l’Est et au Nord de l’Île-de-France défini entre l’État et la région.
En outre, et ce n’est pas la moindre des critiques, le conseil régional d’Île-de-France n’a pas davantage été consulté – et pour cause ! – sur la création de ce nouvel établissement public que lorsqu’il s’est agi de lui faire subir l’exonération de la redevance sur les bureaux.
Enfin, ce texte piétine allègrement les règles essentielles du droit de l’urbanisme et de l’objectif politique affiché de création de logements.
Le dispositif dérogatoire aux règles d’urbanisme sur le périmètre de cette opération d’intérêt national accroît le déséquilibre entre l’habitat et l’emploi et contredit ainsi la qualification en opération d’intérêt national, au regard notamment des objectifs fixés par les articles L. 110 et L. 121-1 du code de l’urbanisme.
Or le rééquilibrage au profit du logement sur le site ou à proximité immédiate est une nécessité, sous peine d’accroître aussi les problèmes d’accès et de transport déjà importants dans la situation actuelle.
En exonérant d’agrément les opérations de démolition-reconstruction, vous travestissez les règles d’urbanisme. En assimilant la construction de bureaux, généralement très rentable pour les promoteurs, à la construction de lycées ou d’infrastructures de transport, qui sont des opérations d’intérêt public sans but lucratif, vous qualifiez d’utilité publique des opérations qui ne le sont pas et ne mettez pas en œuvre, en contrepartie, les logements nécessaires, puisque ce plan de relance ne vise la construction que de 1 400 logements pour 40 000 emplois, au moment même où, des trémolos dans la voix, vous découvrez le droit opposable au logement après l’avoir combattu à maintes reprises lorsque nous le proposions – souvenez-vous en, monsieur le président de la commission.
En fait, vous instaurez avec ce texte, dans les Hauts-de-Seine, le droit opposé au logement !
Le groupe socialiste, vous l’avez compris,…
Peut-être rêve-t-on, lorsqu’on est porté par l’appel du viaduc de Millau, de réaliser à Neuilly le tunnel routier le plus cher de France, mais vous aviez ici le devoir, sur un sujet majeur d’aménagement du territoire, d’organiser un débat sérieux et serein, en y associant tous les acteurs et toutes les parties prenantes.
On ne peut se prévaloir de redynamiser un territoire, même si le besoin est réel, en excluant le conseil régional, en favorisant la spéculation immobilière, en aggravant le déficit de logements et en supprimant les recettes nécessaires à l’amélioration des transports en commun.
Nous voterons contre cette mascarade clientéliste, contre ce déni des valeurs républicaines, contre un texte qui méprise la démarche concertée d’élaboration du schéma directeur de la région Île-de-France.
Peut-être pourriez-vous donc, monsieur Brottes, prendre sur cette question un peu de hauteur.
La proposition de loi qui nous est soumise aujourd’hui vise en effet à assurer durablement l’attractivité de l’un des premiers quartiers d’affaires européens et, au-delà, à faire de La Défense la locomotive du développement économique de toute l’Île-de-France.
Le quartier d’affaires de La Défense, ce sont aujourd’hui 1 500 sièges sociaux et plus de 3 millions de mètres carrés de bureaux, qui accueillent chaque jour quelque 170 000 salariés. Ce sont aussi 20 000 habitants et 200 000 mètres carrés de commerces. Le site de La Défense est engagé dans la compétition entre grands quartiers d’affaires mondiaux.
Or force est de constater qu’au cours des dernières années l’attractivité de ce site a périclité et que sa situation s’est fragilisée. Chacun connaît le problème du vieillissement du bâti, la faiblesse du parc immobilier et le risque d’abandon de certains quartiers de La Défense. On sait aussi que ce quartier doit faire face à une concurrence accrue, et que certaines métropoles européennes mettent tout en œuvre pour attirer chez elles les entreprises les plus importantes du monde.
La France, dont l’attractivité est souvent mise à rude épreuve par une fiscalité décourageante que vous avez mise en place et un droit social qui est également votre œuvre et qui est le plus souvent obsolète, ne peut se permettre de voir les sièges sociaux de ses grandes entreprises quitter ce quartier d’affaires.
La nécessaire relance de La Défense relève donc aujourd’hui d’une stratégie économique urgente, tant pour l’Île-de-France que pour notre pays. Cependant, ce quartier ne dispose plus d’outils adaptés. Son bâti, je le répète, ne satisfait plus aux normes internationales.
Face à ce constat, on ne peut que se féliciter de l’action de l’État et des collectivités locales concernées, qui ont préparé en son temps un plan de renouveau du quartier d’affaires de La Défense pour 2007-2013. Ce plan, que vous a présenté M. le ministre en compagnie du ministre d’État Nicolas Sarkozy en juillet 2006, tend à faciliter les opérations de démolition-reconstruction des tours obsolescentes. L’objectif poursuivi est de susciter la modernisation et la régénération d’ici à 2013 de la moitié des immeubles concernés et de prévoir la création de 150 000 mètres carrés de surfaces supplémentaires.
Pour que le renouveau du quartier d’affaires de La Défense s’inscrive dans la solidarité régionale, la gestion de ses équipements publics doit s’appuyer plus solidement sur les collectivités locales. En tant qu’ancien vice-président du conseil général des Hauts-de-Seine, je ne puis, bien sûr, que m’en féliciter.
Comme cela a été dit tout à l’heure, ce texte permettra de clarifier et de sécuriser les règles d’urbanisme applicables dans ce périmètre. Le plan de renouveau se traduira par des démolitions-reconstructions, mais aussi par de nouvelles constructions. Certains projets sont déjà connus. La clarification des règles d’urbanisme est donc nécessaire et, surtout, elle devient urgente.
Cette volonté du Gouvernement ne peut donc qu’être saluée par les parlementaires de la majorité.
Dans la compétition internationale entre les grands centres d’affaires, le quartier d’affaires de La Défense doit être la locomotive de tous les quartiers économiques d’Île-de-France. Il est nécessaire, à terme, de rassembler tous les acteurs – collectivités, chambre de commerce, établissement public et entreprises – pour qu’ils assurent de façon coordonnée l’attractivité non seulement de la région, mais de la France.
Compte tenu de tous ces arguments, monsieur le ministre, mes chers collègues, je soutiens avec une vigueur particulière cette proposition de loi qui vise à rendre à notre région un quartier d’affaires attractif et leader. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Je rappelle qu’a eu lieu au mois de juin un conseil d’administration exceptionnel sur ce sujet, auquel ne participaient, madame Fraysse, ni le représentant de Nanterre, ni la conseillère régionale. On ne peut donc se plaindre aujourd’hui de n’avoir pas assez participé au travail sur ce point.
Cette opération d’intérêt national occupe une part non négligeable des communes de Puteaux et de Courbevoie, dont les compétences s’exercent notamment par l’intermédiaire de leurs PLU respectifs, qui doivent intégrer l’urbanisme très particulier de ce quartier d’affaires. Les compétences doivent être renforcées et je souhaiterais qu’au sein du conseil d’administration du nouvel établissement public soient désignés, aux côtés du directeur, les représentants des communes concernées.
Je vous renouvelle, monsieur le ministre, mes remerciements. Nous réussirons ce plan, et je voterai, bien sûr, cette proposition de loi. La Défense doit demeurer le premier quartier d’affaires européen et contribuer au rayonnement de notre territoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Je le mets aux voix.
(L’article 1er est adopté.)
Je le mets aux voix.
(L’article 1er bis est adopté.)
Je le mets aux voix
(L’article 2 est adopté.)
(L’ensemble de la proposition de loi est adopté.)
Discussion du projet de loi, n° 3407, relatif à la Commission nationale consultative des droits de l’homme :
Rapport, n° 3647, de Mme Liliane Vaginay, au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République.
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-neuf heures quarante-cinq.)
Le Directeur du service du compte rendu intégral
de l’Assemblée nationale,
Jean-Pierre Carton