DÉLÉGATION POUR L'UNION EUROPÉENNE

COMPTE RENDU N° 15

Réunion du mercredi 6 novembre 2002 à 16 heures 30

Présidence de M. Pierre Lequiller, Président

I. Désignation d'un Vice-président en remplacement de Mme Anne-Marie Idrac

Le Président Pierre Lequiller a indiqué qu'à la suite de la démission de
Mme Anne-Marie Idrac, il y avait lieu de désigner un Vice-président pour la remplacer. Rappelant que ce poste revenait à un représentant du groupe UDF, il a été saisi de la candidature de M. Jean-Pierre Abelin, qui a été désigné vice-président de la Délégation.

II. Communication de M. René André sur les relations entre l'Union européenne et la Russie

M. René André a présenté une communication sur les relations entre l'Union européenne et la Russie, au moment où se pose la question de la libre circulation entre Kaliningrad et la Russie continentale dont elle est séparée par la Lituanie.

Kaliningrad - l'ancienne Koenigsberg, devenue soviétique en 1945 et siège de la flotte russe de la mer Baltique - deviendra en effet, à la suite de l'élargissement, une enclave russe dans le territoire de l'Union européenne. Si aucune mesure particulière n'est envisagée, les règles de l'espace Schengen s'appliqueront aux voyageurs russes qui devront être munis de visas. La Russie rejette cette évolution annoncée, au nom de sa continuité territoriale et du droit de ses citoyens à se déplacer librement d'un point à l'autre du territoire national, principes soutenus par la France lors de la visite du Président de la République à Moscou en juillet 2002.

Depuis l'été, tant la Russie que l'Union européenne ont présenté des propositions afin de trouver une solution mutuellement acceptable à cette situation très particulière. La Russie accepte que les citoyens russes transitant par la Pologne soient munis d'un visa, quel que soit leur moyen de transport. Elle refuse par contre que les voyageurs par train ou autocars de ligne, utilisant des itinéraires précis via la Lituanie, soient soumis à cette obligation. Elle se prononce pour la suppression des visas avec l'Union européenne d'ici la fin de la décennie. L'Union européenne envisage, quant à elle, de délivrer aux citoyens russes un «document facilitant le transit »  (FTD) , d'étudier la mise en place d'un TGV entre Kaliningrad et le reste de la Russie, et d'engager des discussions sur l'objectif à long terme d'exemption de visa.

Après des premières réactions assez vives de la Russie qui considère que le document de transit s'apparente de fait à un visa, le Conseil européen, reconnaissant que la situation de la région de Kaliningrad est unique, a convenu de consentir un effort particulier pour répondre aux intérêts de toutes les parties concernées et souligné la nécessité de respecter pleinement le droit souverain de tout Etat de protéger la sécurité de ses citoyens et d'instaurer un régime de visas, y compris pour le transit. Ce débat pourrait être tranché le 11 novembre, lors du Sommet Union européenne - Russie.

Puis M. René André a commenté les débats récents auxquels il a participé à Moscou sur l'avenir des relations entre l'Union européenne et la Russie.

Des perspectives nouvelles apparaissent, tant du fait de l'évolution de la situation internationale, que du prochain élargissement de l'Union européenne. La solidarité immédiate et entière manifestée par la Russie envers les Etats Unis après le 11 septembre 2001 a modifié profondément le contexte des relations Est-Ouest, et plus précisément celui des relations américano-russes, ce qui n'est pas sans impact sur les relations entre la Russie et l'Union européenne. Dans ce nouveau contexte, la Russie se retrouve face aux interrogations qui l'ont marquée parfois depuis plusieurs décennies : est-elle vraiment une puissance européenne, ou au contraire une puissance eurasiatique dont les intérêts sont par définition différents de ceux de l'Europe ? Ne doit-elle pas davantage coopérer avec les Etats Unis ? Le développement de la Chine ne modifie-t-il pas ses intérêts? Par ailleurs, la mondialisation ne modifie-t-elle pas les relations traditionnelles qu'elle entretenait avec l'Europe en donnant à tous les problèmes une dimension planétaire, appelant des réponses non pas régionales, mais globales ?

Ces questions devront être débattues avec l'Union élargie. La Russie ne conteste pas cet élargissement, ses réserves ne concernant que l'élargissement de l'OTAN. Elle souhaite rechercher des formules d'association particulières avec l'Union européenne permettant des coopérations beaucoup plus développées qu'actuellement.

Certaines de ses craintes devront être dissipées, qu'il s'agisse d'une évolution défavorable de ses flux commerciaux avec les pays candidats, ou d'une baisse de ses exportations d'acier et de produits agricoles. L'optimisme l'emporte cependant sur le pessimisme, du fait de l'évolution de la Russie et de sa perspective d'adhésion à l'OMC. Les incompréhensions ou les difficultés qui pourraient naître de l'élargissement devront donc être dépassées.

M. Daniel Garrigue a demandé à M. René André si la Russie concevait ses relations diplomatiques avec l'Europe comme des relations avec l'Union européenne
elle-même ou plutôt avec certains de ses Etats membres, comme l'Allemagne.

M. René André a estimé que si la Russie avait des rapports privilégiés avec l'Allemagne, l'Union européenne était considérée par la Russie comme un interlocuteur à part entière.

III. Informations sur la réunion de la XXVIIe COSAC à Copenhague

M. Christian Philip a présenté à la délégation les conclusions de la XXVIIe Conférence des Organes Spécialisés dans les Affaires Communautaires (COSAC) qui s'est déroulée à Copenhague, sous présidence danoise, du 16 au 18 octobre, et à laquelle il a participé avec MM. Patrick Hoguet et Louis-Joseph Manscour.

Il a indiqué que la présidence danoise avait souhaité faire précéder cette COSAC d'une réunion avec les représentants des Parlements des pays candidats, au cours de laquelle M. Verheugen, commissaire chargé de l'élargissement, a été auditionné. Puis, il a souligné le contexte particulier dans lequel s'est déroulée cette COSAC puisque la Convention européenne débat actuellement de l'avenir des parlements nationaux dans la future architecture institutionnelle de l'Union. Mme Gisela Stuart a d'ailleurs présenté devant la COSAC les conclusions du groupe de travail qu'elle préside sur ce sujet au sein de la Convention.

M. Christian Philip a indiqué que la COSAC avait exclusivement débattu de sa réforme, la précédente COSAC de Madrid ayant chargé la présidence danoise d'établir des propositions dans ce sens. Il a mentionné la réunion préparatoire des présidents de la COSAC du 16 septembre sur ces propositions danoises qui visent essentiellement à doter la COSAC d'un secrétariat permanent et à lui permettre d'adopter des contributions à la majorité, et non plus à l'unanimité.

M. Christian Philip a fait part de l'opposition exprimée par la délégation du Parlement européen - soutenu par les délégations allemande et italienne - sur le principe même d'un renforcement de la COSAC. Si la délégation française (Assemblée nationale et Sénat) a parlé d'une seule voix pour appuyer la présidence danoise, cela n'a pas toutefois pas permis l'adoption d'une réforme qui n'est possible qu'à l'unanimité. M. Christian Philip s'est étonné de la position du Parlement européen qui prône le maintien de la règle de l'unanimité à la COSAC tandis qu'il revendique l'extension du champ de la majorité qualifiée au sein des institutions européennes.

La COSAC a finalement adopté une contribution prévoyant la création d'un groupe de travail qui a notamment pour mandat « d'élaborer des propositions sur la manière de modifier le règlement de la COSAC quant au recours aux décisions à la majorité » et « d'élaborer des propositions sur la manière d'établir un secrétariat pour la COSAC qui assure la continuité nécessaire des travaux de cette dernière ». La première réunion de ce groupe est prévue à Copenhague les 17 et 18 novembre, et une réunion extraordinaire de la COSAC pourrait être convoquée en janvier 2003 pour débattre des conclusions du groupe de travail.

M. Christian Philip a souligné l'impossibilité pour une institution de
s'auto-réformer, et a regretté que depuis trop longtemps la COSAC ne débatte d'autres sujets que de sa propre réforme. Il a insisté sur le rôle de la Convention pour imaginer de nouvelles formes d'association des parlements nationaux à la construction européenne, et à mentionné l'idée d'un Congrès réunissant des représentants du Parlement européen et des parlements nationaux. Cette XXVIIe COSAC s'est positionnée en net retrait par rapport aux ambitions initiales de la présidence danoise et a apporté la démonstration de son incapacité à évoluer. M. Christian Philip a insisté sur les efforts déployés par la délégation française pour parvenir à un accord, qui n'a finalement pas été possible et qui renforce la pertinence de solutions alternatives de coopération interparlementaire.

Le Président Pierre Lequiller a réagi à l'exposé de M. Christian Philip en faisant part de la crispation des parlementaires européens qu'il observe actuellement au sein de la Convention. Il a déploré une réaction corporatiste qui vise à freiner toute évolution permettant une meilleure association des parlements nationaux, et a souligné que ceux qui s'opposent à un renforcement de la COSAC se prononcent contre la création d'un Congrès.

M. Patrick Hoguet s'est déclaré préoccupé de constater que la COSAC ne parvient pas à évoluer, en raison de l'opposition du Parlement européen à toute proposition de réforme. Il a alors rappelé qu'en 1997, ce n'est pas vers la COSAC mais vers les gouvernements que s'étaient tournés les parlements nationaux pour obtenir l'adoption du Protocole sur le rôle des parlements nationaux annexé au traité d'Amsterdam. Il n'a pas exclu qu'il faille en faire de même à l'avenir, tout en indiquant que les parlements nationaux pourraient également préférer se réunir seuls, sans le Parlement européen, sans pour autant exclure des formes de coopération.

IV. Examen du rapport d'information de M. Didier Quentin sur la politique commune de la pêche

M. Didier Quentin, rapporteur d'information, a rappelé qu'avec 6,7 millions de tonnes de captures par an, l'Union européenne est la deuxième puissance de pêche mondiale, derrière la Chine.

Pourtant, la pêche et l'aquaculture contribuent pour une part modeste au PIB communautaire (à peine 1 %), mais le secteur constitue pour de nombreuses zones côtières (notamment sur la façade atlantique de la France, de l'Espagne et du Portugal ainsi qu'en Italie et en Ecosse) une source de revenus et d'emplois importante. La filière emploie 500 000 personnes, dont 30 % en Espagne, et 25 % en Italie. La flotte de pêche s'établit à 100 000 navires.

De plus, chaque emploi en mer génère d'autres emplois dans les terres et des revenus indirects liés aux activités de la pêche. La population concernée se concentre dans les régions littorales, dont l'économie, malgré l'essor touristique, dépend encore fortement de la pêche.

La politique commune de la pêche (PCP), qui constitue la politique communautaire la plus intégrée, est cependant peu coûteuse, surtout si on la compare à la politique agricole commune : elle ne représentait que 0,84 % du budget communautaire en 2001 et encore moins dans les budgets nationaux.

Dix ans après un premier réexamen de la PCP, le conseil des ministres de la pêche devra statuer, avant le 31 décembre 2002, sur une réforme de cette politique commune préparée par la Commission et présentée par le commissaire Franz Fischler.

Cette échéance déterminante pour l'avenir de la PCP survient au moment où l'Union européenne réfléchit à la pérennisation de ses politiques communes, dans la perspective de futurs élargissements et alors que l'hypothèse d'une raréfaction de la ressource halieutique relance le débat sur la validité du système communautaire de gestion des pêcheries.

Le rapporteur a estimé que les inquiétudes sur l'avenir de la ressource mises en avant par M. Fischler ne sont pas toujours justifiées.

Le plan Fischler entend proclamer une évidence scientifique sur laquelle les scientifiques eux-mêmes sont partagés.

Comme l'a souligné M. Jean-François Minster, président directeur général de l'Ifremer, la Commission commet une erreur d'approche. Il n'y a de problèmes de diminution des captures que pour 8 espèces sur 150 (dont la morue, le cabillaud, le merlu, la sole, la langoustine et les espèces profondes). Malgré les généralités alarmistes avancées par la Commission, il n'y aurait pas de menace globale sur la ressource. Bien plus, pour certaines des espèces considérées comme en danger, comme la sole ou la langoustine, les observations des pêcheurs vont parfois à l'encontre des constatations faites par l'Ifremer. Ainsi, après deux années de diminution des captures, le tonnage mensuel de langoustines pêchées par les 19 chalutiers côtiers de la Cotinière (île d'Oléron) a fortement augmenté en 2001 et surtout en 2002, ce qui est le signe d'une permanence de la ressource.

L'amélioration des avis scientifiques est, en tout état de cause, une préoccupation majeure des professionnels, qui insistent pour que la recherche soit considérablement intensifiée et coordonnée, en fonction de critères homogènes au sein des différents Etats membres. Ils souhaitent aussi que l'on améliore le modèle biologique qui sous-tend l'avis sur les taux admissibles de captures (TAC), et que l'on se donne les moyens humains et financiers d'y parvenir.

Dans le domaine de la gestion de la pêche, la Commission considère comme nécessaire une réduction de 30 à 60 % selon les espèces, des quotas de captures.

Le rapporteur a jugé inacceptable l'extension à toutes les espèces des contraintes figurant dans les plans de gestion, actuellement instaurés pour les seules espèces menacées. Cette attitude de la Commission est excessive, bureaucratique, et ne repose sur aucune analyse scientifique fiable. La superposition des instruments qui est envisagée dans ces plans va à l'encontre du besoin de simplicité et d'efficacité de la PCP. En particulier, il convient de s'opposer à l'introduction d'une gestion par l'effort de pêche dans ces plans. Une distinction très nette devrait être effectuée entre les plans de restauration pour les stocks réellement en difficulté et la fixation pluriannuelle des TAC et des quotas. Il est souhaitable de procéder à la mise sous TAC et quotas de l'ensemble des stocks halieutiques pour lesquels ceci est justifié scientifiquement et techniquement.

Le transfert des compétences à la Commission dans des domaines aussi importants que la fixation des TAC, la mise en place des mesures techniques ou le pouvoir de sanction ne peut pas non plus être accepté.

En revanche, certaines orientations vont dans le bon sens, notamment en matière d'accès aux ressources (respect du principe de la stabilité relative et de l'accès à la zone des 6 à 12 miles). Le régime d'accès aux eaux doit en effet être empreint de stabilité, qu'il s'agisse de stabilité pour les pêcheurs côtiers qui exploitent les ressources à quelques miles de leur port d'attache, ou de stabilité pour les Etats membres en ce qui concerne les allocations de droits de pêche. L'idée d'une possible remise à plat de la stabilité relative doit donc être écartée.

La pêche minotière a été curieusement oubliée dans la réforme proposée par la Commission. Par pêche minotière, on entend la pêche au moyen de filets à petites mailles, dont les captures sont destinées à la production industrielle de farine et d'huile de poisson. Elle prend chaque année à son compte quelque 30 % des captures totales effectuées dans le monde. Les espèces cibles sont celles qui ne sont pas utilisées directement - ou qui le sont dans une moindre mesure - aux fins de la consommation humaine.

Avec environ 50 % de la production, le Pérou et le Chili sont les deux plus grands producteurs mondiaux de farine de poisson. Dans l'Union européenne, le Danemark, notamment, est un important producteur de farine de poisson (6 % du marché mondial). La farine de poisson sert à hauteur de 75 % d'aliment pour les volailles et les porcs, le reste
- 25 % - étant utilisé dans l'aquaculture. La plus grande partie de cette huile (70 %) est utilisée dans l'industrie alimentaire où elle constitue un additif intervenant dans la fabrication de la margarine et des graisses de cuisson.

La Commission donne souvent le sentiment de soutenir la pêche minotière, car elle considère qu'elle est bien encadrée, ce qui est parfois exact. Il faut cependant souligner que la pêche minotière détruit le fourrage d'espèces prédatrices et casse la chaîne alimentaire. La pêche minotière procède à des captures accessoires de poissons de consommation n'ayant pas atteint la majorité de reproduction, qui sont définitivement perdus pour les stocks des espèces en question, sans avoir pu contribuer à leur préservation. Pratiquement aucune limitation des prises n'est imposée à la pêche minotière.

Or, une réforme de la PCP devrait comprendre des dispositions visant à soumettre la pêche minotière à un système de contrôle rigoureux, et à une limitation des prises et des captures accessoires, reposant sur des avis scientifiques. Il convient de contrôler attentivement les incidences de la pêche minotière sur toutes les espèces. Il faut élaborer pour la pêche minotière un plan de gestion impliquant l'identification de signaux d'alarme et la délimitation de zones de protection régionale. Il est enfin nécessaire de réduire la part des captures accessoires autorisées.

Comme l'a souligné le ministre Hervé Gaymard à plusieurs reprises, le succès de la réforme de la PCP passera moins par l'adoption de nouveaux règlements que par une application rigoureuse et harmonisée des règles existantes. A cet égard, la Commission semble vouloir faire des efforts pour renforcer l'équité du contrôle et harmoniser les sanctions pour les infractions les plus graves. Elle prévoit des pénalités plus lourdes.

L'efficacité des contrôles sera améliorée en favorisant les échanges d'inspecteurs d'un Etat membre à l'autre, en constituant des équipes d'inspecteurs mixtes et en encourageant une plus grande implication de la Commission dans l'accomplissement de ses missions de contrôle.

A terme, il serait souhaitable d'aller vers une communautarisation complète des sanctions et des contrôles, avec la création d'une agence communautaire. Cela soulève toutefois des difficultés juridiques qui dépassent le cadre de la réforme de la PCP.

En tout état de cause, il convient de rétablir la crédibilité de la politique de contrôle, et la confiance entre Etats membres. Or, à l'heure actuelle, les Etats qui, comme la France, disposent d'un système transparent de contrôle et qui se conforment aux règles, seront plus facilement punis, s'ils ne les respectent pas, que ceux qui n'ont pas de système de contrôle bien établi et transparent.

Une très forte réduction de la flotte communautaire (soit le retrait de 8 600 navires conduisant à la disparition de 28 000 emplois) serait la conséquence directe de plusieurs des mesures préconisées par la Commission.

La suppression des aides publiques à la construction de navires de pêche au 1er janvier 2003 est une provocation pour les pêcheurs et les régions concernés. Cela conduira à une concentration des armements, au détriment de la fonction socio-économique de la pêche dans les zones du littoral.

La pêche est un secteur qui présente un grand nombre d'accidents de travail, d'où un taux de mortalité élevé (plus de 30 morts par an en France). Du fait que cette activité s'exerce loin de la terre ferme, dans l'équilibre précaire d'un navire, à la merci d'un milieu hostile et de conditions de travail difficiles, où l'application des normes de sécurité est très relative, la pêche peut être définie comme un métier très dangereux.

Contrairement à ce que prétend la Commission, les aides publiques ne peuvent pas être tenues pour responsables de la surcapacité. Elles forment au contraire l'élément indispensable au maintien d'une flotte de pêche communautaire, diversifiée et modernisée.

La Commission semble proposer un modèle de gestion adapté uniquement aux contraintes des flottes industrielles monospécifiques, mais qui ne tient pas compte des préoccupations socio-économiques des Etats qui souhaitent maintenir une pêche artisanale. Dans le cas précis de la France, le niveau de capitalisation financière de ce secteur est tel que l'on ne peut envisager des renouvellements, voire des modernisations, dans le cas de la petite pêche côtière et de la pêche hauturière artisanale, sans un accompagnement financier des pouvoirs publics. La suppression brutale de ces aides conduirait inévitablement à un vieillissement des flottilles et donc à une mise en danger accrue des pêcheurs. Ces mesures freineraient l'amélioration des conditions de travail des marins, alors qu'il existe déjà des difficultés de recrutement.

Bien au contraire, le dispositif d'aides à la modernisation et au renouvellement des navires devrait s'appliquer globalement, et de manière identique, à l'ensemble de la flotte communautaire sans distinguer selon la longueur des bateaux.

En revanche, il serait effectivement envisageable que ces aides soient, selon les cas, différenciées : GIE fiscal pour les gros bateaux, aides directes pour les petits.

Le plan Fischler comprend un plan d'action contre la pêche illicite, dans le cadre d'une coopération internationale renforcée, ainsi qu'une stratégie de partenariat avec les pays tiers.

La Commission veut modifier la répartition actuelle du coût des accords de pêche entre l'armement à la pêche et la Communauté, ce qui risque d'affecter la compétitivité des flottes concernées. En prétendant que les accords de pêche avec des pays tiers devront être réorientés dans une optique de développement durable, la Commission semble donner du crédit à la thèse selon laquelle ces accords de pêche menaceraient les stocks des pays en voie de développement.

Or, il convient de réaffirmer l'importance capitale de ces accords de pêche, d'abord parce qu'ils constituent un apport financier vital pour certains pays africains, une part de l'aide étant obligatoirement affectée au développement de la pêche artisanale locale, et ensuite parce que l'accès à ces ressources halieutiques est essentiel pour la France et l'Espagne et fait vivre des centaines de pêcheurs de ces deux Etats.

En revanche, la stratégie proposée par la Commission en matière d'éradication de la pêche illicite recueille a priori l'assentiment des professionnels qui, sous réserve d'un examen approfondi de la Communication de la Commission sur un plan d'action communautaire en la matière, estiment qu'il faut poursuivre les efforts engagés tendant à l'identification directe ou indirecte des navires illégaux, l'interdiction de leurs débarquements et l'entrée de leurs captures dans les ports et sur les marchés communautaires.

Pour toutes ces raisons, le rapporteur a proposé d'appuyer la position du Gouvernement français devant le Conseil Pêche, qui, le 27 novembre prochain, devrait se prononcer sur l'adoption du « paquet Fischler » et d'adopter la proposition de résolution annexée à son rapport.

M. Guy Lengagne a souligné l'importance des accords de pêche avec les pays tiers, indiquant que le port de Boulogne traitait actuellement de 300 000 à 360 000 tonnes de poisson, alors que la totalité de la production française représentait environ 265 000 tonnes. Il a jugé que c'était toute une partie du secteur de l'agroalimentaire qui était ainsi concernée. Il a précisé que la balance commerciale française accusait un déficit de 1 à 1,5 milliard d'euros dans ce secteur. Il a considéré que la pêche minotière constituait un problème ancien auquel jusqu'à présent personne n'avait eu le courage de réellement s'attaquer. La flotte minotière du Danemark pêche de façon très importante, au large du Jütland, tous types de poisson confondus, l'ensemble de la pêche étant destiné à être broyé sans distinction d'espèces ou de tailles.

Il a estimé que le développement de l'aquaculture ne pouvait être considéré comme la solution absolue, précisant que pour produire 1 kilo de poissons d'élevage, il fallait 8 kilos de poissons sauvages. Il a considéré que la transformation en farine, pour l'alimentation de poissons d'élevage, d'espèces sauvages consommables par l'homme, constituait une absurdité économique et écologique. Tout en jugeant que la raréfaction de la ressource halieutique au niveau mondial était une réalité qu'il fallait sérieusement prendre en compte, il a critiqué la récente décision d'interdiction totale de la pêche au cabillaud. Il a considéré que de telles mesures d'interdiction risquaient de provoquer des réactions de blocage de la part des professionnels, ce qui serait négatif pour l'ensemble de l'économie du pays, évoquant le blocage des ports français de 1980.

M. Patrick Hoguet a souhaité que le point 8 du projet de résolution précise que les aides visées par le texte sont les aides « structurelles » et que l'on évoque l'intérêt, non seulement de la sécurité des marins, mais aussi de l'équilibre du secteur et des zones concernées.

M. Jérôme Lambert a souhaité savoir si le projet de budget 2003 pour la pêche, discuté en séance publique la veille, anticipait ou non sur l'application des mesures proposées par la Commission européenne et contestées par le projet de résolution.

M. Didier Quentin a indiqué que le projet de budget n'anticipait pas sur l'application des mesures contestées.

M. Alfred Almont a évoqué la pêche dans les régions ultra périphériques et son fort potentiel de développement. Il a regretté que les propositions de la Commission ne contiennent aucune mesure spécifique à ce propos, contrairement aux dispositions de l'article 299 paragraphe 2 du traité instituant la Communauté européenne, et a considéré que le prochain Conseil « Pêche » constituait une opportunité pour faire des propositions en ce sens.

M. Didier Quentin a indiqué que le projet de rapport intégrait la nécessité de prendre en compte les spécificités de la pêche outre-mer. Il a noté que la pêche s'était notamment développée très rapidement à la Réunion depuis quelques années, du fait en particulier de l'augmentation de la pêche dans les zones australes.

M. René-Paul Victoria a souligné que le développement de la pêche à la Réunion, dont l'importance dans l'économie de l'île allait bientôt dépasser celle du tourisme, représentait un potentiel très important.

A l'issue de la discussion, la Délégation a adopté le projet de résolution dans le texte suivant :

« L'Assemblée nationale,

- Vu l'article 88-4 de la Constitution,

- Vu la proposition de règlement du Conseil relatif à la conservation et à l'exploitation durable des ressources halieutiques dans le cadre de la politique commune de la pêche (E 2039),

- Vu la proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 2792/1999 définissant les modalités et conditions des actions structurelles de la Communauté dans le secteur de la pêche (E 2040)

- Vu la proposition de règlement du Conseil relatif à l'établissement d'une mesure d'urgence communautaire pour la démolition des navires de pêche (E 2041),

- Vu la communication de la Commission relative au plan d'action communautaire, en vue d'éradiquer la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (E 2044),

- Vu la communication de la Commission relative à la réforme de la politique commune de la pêche (calendrier de mise en œuvre) (E 2045),

- Vu la communication de la Commission définissant un plan d'action communautaire pour l'intégration des exigences de la protection de l'environnement dans la politique commune de la pêche (E 2046),

- Vu la lettre rectificative n° 1 à l'avant-projet de budget 2003 (E 2075),

Considérant que l'Union européenne est, avec 6,7 millions de tonnes de captures par an, la deuxième puissance de pêche mondiale ;

Considérant que le secteur de la pêche et de l'aquaculture constitue pour de nombreuses zones côtières, et notamment pour la façade atlantique de la France, une source de revenus et d'emplois importante ;

Considérant que chaque emploi en mer génère d'autres emplois dans les terres et des revenus indirects liés aux activités de la pêche ;

Considérant que l'économie des régions littorales dépend encore fortement de la pêche ;

Considérant que la politique commune de la pêche est particulièrement peu coûteuse pour les finances publiques, en ne représentant que 0,84 % du budget communautaire ;

Considérant que, dix ans après l'adoption du règlement instituant un régime communautaire de la pêche, le Conseil des ministres européens de la pêche, présenté par le commissaire Fischler, devra statuer, avant le 31 décembre 2002, sur le projet de réforme préparé par la Commission ;

1. Apporte son soutien au Gouvernement français dans son opposition au projet de réforme de la politique commune de la pêche, et approuve la démarche du groupe des « Amis de la pêche », réuni à l'initiative de la France ;

2. Réaffirme la nécessité de respecter le principe de la stabilité relative et de l'accès à la zone des douze milles marins ;

3. Regrette que la Commission justifie ses propositions par des menaces globales sur l'avenir de la ressource, alors que seules quelques espèces sont réellement en danger ;

4. Souhaite que la Commission se fonde sur des avis scientifiques plus sérieux et plus fiables, pour fixer les taux admissibles de captures (TAC) espèces par espèces et zone par zone, et que les professionnels soient plus étroitement associés à l'évaluation de la ressource et à la gestion de la pêche ;

5. Demande que la gestion des ressources continue d'être fondée sur le système des TAC et des quotas, mais que celui-ci soit amélioré afin d'encadrer les variations d'une année sur l'autre ;

6. Forme le vœu que la pêche minotière, curieusement oubliée par la réforme de la politique commune de la pêche, soit soumise à un système de contrôle très strict et à une limitation des prises et des captures accessoires ;

7. Se prononce avec insistance pour la constitution d'un régime de contrôle intégré, reposant sur un corps d'inspecteurs communautaires aux pouvoirs renforcés et sur des sanctions dissuasives, qui seul paraît susceptible de permettre l'application effective et égalitaire de la politique commune de la pêche ;

8. Insiste pour que le régime des aides structurelles à la pêche soit maintenu et renforcé, afin d'assurer le maintien d'une flotte communautaire diversifiée et modernisée, dans l'intérêt de la sécurité des marins, de l'équilibre de ce secteur et des régions concernées ;

9. Est convaincue que la politique commune de la pêche doit se concevoir dans le cadre d'une coopération internationale renforcée, grâce à un réseau d'accords de pêche, conclus avec des pays tiers et mutuellement profitables, qui assurent la présence extérieure de la Communauté et contribuent à une gestion durable des ressources mondiales de poissons. »

V. Examen de textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution

Sur le rapport du Président Pierre Lequiller, la Délégation a examiné des textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution.

Point A

Aucune observation n'ayant été formulée, la Délégation a levé la réserve d'examen parlementaire sur les cinq textes suivants :

¬ Education

- proposition de décision du Parlement européen et du Conseil modifiant la décision n° 253/2000/CE établissant la deuxième phase du programme d'action communautaire en matière d'éducation Socrates (document E 2021).

¬ Espace de liberté, de sécurité et de justice

- communication du Royaume de Danemark. Initiative du Royaume du Danemark en vue de l'adoption par le Conseil d'un projet de décision-cadre relative à l'exécution dans l'Union européenne des décisions de confiscation (document E 2059).

¬ PESC et relations extérieures

- proposition de décision du Conseil concernant la signature et la conclusion d'un accord entre la Communauté européenne et la Turquie relatif aux précurseurs et aux substances chimiques utilisés fréquemment pour la fabrication illicite de drogues ou de substances psychotropes (document E 2105) ;

- proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 1268/1999 relatif à une aide communautaire à des mesures de préadhésion en faveur de l'agriculture et du développement rural dans les pays candidats d'Europe centrale et orientale, au cours de la période de préadhésion (document E 2119).

¬ Politique régionale

- proposition de règlement du Conseil concernant la contribution financière de la Communauté au Fonds international pour l'Irlande (2003-2006) (document E 2104).

Point B

¬ Agriculture

- proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux mouvements transfrontières des organismes génétiquement modifiés (document E 1958).

Le Président Pierre Lequiller a rappelé que ce texte a pour objet de mettre en œuvre le protocole qui vise à assurer un degré adéquat de protection pour le transfert, la manipulation et l'utilisation des organismes génétiquement modifiés susceptibles d'avoir des effets défavorables sur la diversité biologique et la santé humaine. La proposition vise essentiellement les exportations vers les pays tiers et les mouvements transfrontières non intentionnels. Les dispositions essentielles portent sur les OGM utilisés directement comme denrées alimentaires ou comme aliments pour animaux.

Il s'agit largement d'une réglementation par anticipation. Le Conseil a en effet dégagé un accord sur les futures règles d'exportation d'OGM alors que l'Union n'en exporte encore aucun. Une partie des règles prévues ne se comprennent que par référence à la future législation communautaire concernant la traçabilité, l'étiquetage et l'identification des OGM. La proposition fixe cependant déjà le régime juridique d'exportation des OGM qui comprend trois éléments principaux relatifs au consentement du pays importateur, au statut juridique communautaire de l'OGM considéré, enfin aux procédures d'identification et de traçabilité qui lui sont applicables. La proposition porte sur une question qui rencontre un fort écho dans l'opinion publique européenne, mais elle reste d'une portée limitée et ne préjuge pas des règles communautaires qui seront applicables en matière d'étiquetage et d'identification des organismes génétiquement modifiés.

La Délégation a levé la réserve d'examen parlementaire sur ce texte.

¬ Commerce extérieur

- proposition de décision du Conseil relative à la signature et à la conclusion au nom de la Communauté européenne de l'Accord international sur le cacao de 2001 (document E 2097).

Les objectifs de ce sixième accord sur le cacao sont de promouvoir la coopération internationale dans les secteurs de l'économie cacaoyère mondiale, de soutenir le développement des économies des pays producteurs, de faciliter l'échange de statistiques sur la production et la consommation mondiales de cacao et de favoriser la promotion et la qualité de ce produit.

L'accord institue, pour une durée de cinq années, une Organisation internationale du cacao, qui comprend deux catégories de membres, les membres exportateurs (41 pays d'Afrique et d'Amérique centrale et du Sud) et les membres importateurs (52 pays en développement et développés dont les Etats-Unis), ainsi qu'un Conseil international du cacao, chargé d'appliquer les dispositions de l'accord.

La Délégation a levé la réserve d'examen parlementaire sur ce texte.

¬ Education

- proposition de décision du Parlement européen et du Conseil établissant un programme pour améliorer la qualité de l'enseignement supérieur et promouvoir la compréhension interculturelle au travers de la coopération avec les pays tiers (Erasmus World) (2004-2008) (document E 2074).

Le Président Pierre Lequiller a rappelé que, lancé en 1987, Erasmus fut le premier programme de coopération européenne en matière d'enseignement supérieur et que plus d'un million d'étudiants européens en ont bénéficié depuis quinze ans, en effectuant une partie de leurs études dans un pays autre que leurs pays de résidence.

Forte de ce succès, la Commission propose une nouvelle initiative qui vise à adapter et à étendre Erasmus au niveau mondial, afin d'attirer les jeunes élites africaines, asiatiques et américaines en leur permettant d'effectuer des « masters » dans des Universités européennes et en leur offrant des bourses adéquates.

Couvrant la période 2004-2008, le programme Erasmus World est doté d'un budget de 200 millions d'euros et propose la création de 250 masters inter-universitaires avec le label et le soutien de l'Union européenne. Pour être éligibles au label « UE », ces masters devront impliquer au minimum trois universités de trois Etats membres différents et prévoir pour leurs étudiants des périodes d'études reconnues dans au moins deux de ces trois universités. Le programme prévoit la délivrance de bourses « Erasmus world » d'un montant de 1 600 euros par mois pour 4 200 étudiants de pays tiers vers l'Europe. Parallèlement, les « masters UE » accueilleront des professeurs invités venant d'universités du monde entier, pour des missions d'enseignement et/ou de recherche d'une durée moyenne de trois mois. D'ici 2008, Erasmus World soutiendra la venue de plus de 1 000 professeurs invités des pays tiers vers l'Europe, avec une allocation moyenne de 13 000 euros pour leur séjour.

Les partenariats entre les « masters UE » et les universités d'autres continents seront favorisés sous la forme de conduite de projets communs sur une durée maximum de trois ans. Près de 4 000 étudiants et environ 800 professeurs européens invités originaires de l'Union européenne devraient bénéficier d'Erasmus World d'ici 2008.

Par ailleurs, Erasmus world apportera un soutien financier à des actions de promotion internationale de l'offre universitaire en Europe et la création de services facilitant l'accès d'étudiants de pays tiers aux universités européennes.

La France a réservé un accueil favorable à ce projet, en formulant cependant un certain nombre d'observations, notamment sur le nom du programme « Erasmus world », qui devrait être traduit dans toutes les langues ainsi que sur la dénomination « Master UE » qui devrait être modifiée en « Cours de troisième cycle européen ».

M. Patrick Hoguet a observé que la dénomination d'« Erasmus world », conduira les pays tiers à penser que le programme sera financé par les Etats-Unis et non par l'Europe et que sa traduction dans toutes les langues ne sera qu'un vœu pieux, alors que le terme Erasmus se suffit à lui-même.

M. Daniel Garrigue a proposé d'intituler le programme « Erasmus international », afin d'éviter sa traduction et toute ambiguïté sur l'origine des fonds.

M. René-Paul Victoria s'est déclaré très favorable au projet et à cette nouvelle proposition de dénomination, tout en souhaitant qu'il concerne l'ensemble des universités européennes continentales et insulaires. L'université de la Réunion est en pleine croissance et compte attirer avec ses pôles d'excellence 20 % d'étudiants étrangers dans les cinq prochaines années, dans la perspective du développement de la francophonie et de l'interculturalité du monde de demain.

Le Président Pierre Lequiller a levé la réserve d'examen parlementaire sur ce texte, en demandant que ce programme soit intitulé « Erasmus international » et qu'il s'applique à toutes les universités de l'Union européenne, y compris celles d'outre-mer.

¬ Justice et affaires intérieures

La Délégation a ensuite levé la réserve d'examen parlementaire sur :

- la proposition de directive du Conseil visant à améliorer l'accès à la justice dans les affaires transfrontalières, par l'établissement de règles minimales communes relatives à l'aide judiciaire et à d'autres aspects financiers des procédures civiles (document E 1935).

Cette proposition a pour objet d'établir des normes minimales garantissant un niveau approprié d'aide juridique pour les affaires transfrontalières dans l'Union, afin de garantir un accès effectif à la justice pour tous les citoyens. Le projet vise toute procédure en matière civile, et cette aide comprend l'assistance effective d'un avocat, l'exonération ou la prise en charge des frais de justice et les frais supplémentaires directement liés au caractère transfrontalier du litige. Le Président Pierre Lequiller a souligné les difficultés suscitées par ce texte au regard des principes de subsidiarité et de proportionnalité, compte tenu de son champ d'application et de son coût financier. Ces réserves ont entraîné des modifications substantielles de la proposition initiale, dont le champ d'application a été restreint aux litiges transfrontaliers.

- l'initiative du Royaume de Belgique, du Grand-Duché de Luxembourg et du Royaume des Pays-Bas en vue de l'adoption de l'acte du Conseil modifiant le statut du personnel d'Europol (document E 2037).

Ce texte précise notamment la procédure de sélection du directeur d'Europol.

- La Délégation a examiné l'initiative du Royaume du Danemark en vue de l'adoption d'un projet de décision-cadre relative à la confiscation des produits, des instruments et des biens du crime (E 2060).

Ce projet de la Présidence danoise vise à renforcer la réglementation en matière de confiscation des produits du crime. A cette fin, il impose aux Etats membres d'adopter les mesures nécessaires pour permettre la confiscation des produits provenant d'infractions pénales passibles d'une peine de liberté d'une durée supérieure à un an, et prévoit des pouvoirs de confiscation élargis quand l'infraction est de nature à générer un produit important et si elle est passible d'une peine privative de liberté maximale de six ans. Dans cette hypothèse, le projet prévoit qu'il n'y a pas de corrélation à établir entre l'infraction commise et les biens confisqués, que la charge de la preuve est inversée et que les biens du conjoint ou du partenaire de la personne concernée ou les biens détenus par une personne morale sur laquelle la personne concernée exerce une influence déterminante peuvent être saisis. Le Président Pierre Lequiller a souligné les critiques suscitées par ce texte de la part de la Commission comme des Etats membres. De nombreuses délégations ont en effet émis des réserves concernant les pouvoirs de confiscation élargis, certaines invoquant des problèmes d'ordre constitutionnel. Plusieurs Etats membres ont insisté sur la nécessité de limiter les pouvoirs de confiscation à certaines infractions directement liées à la criminalité organisée, et préconisé un simple assouplissement de la charge de la preuve. La plupart se sont, en outre, opposés à ce qu'il soit possible de saisir les biens du conjoint en l'absence d'une condamnation pénale de celui-ci. La présidence danoise s'est engagée, compte tenu de ces réserves, à élaborer de nouvelles propositions, conformes aux dispositions de la Convention européenne des droits de l'homme et aux traditions constitutionnelles des Etats membres.

M. Jérôme Lambert a souhaité, compte tenu des difficultés d'ordre constitutionnel suscitées par cette proposition, au regard notamment de la présomption d'innocence et du droit de propriété, que la réserve d'examen parlementaire soit maintenue sur ce texte, dans l'attente de la transmission de la version révisée annoncée par la Présidence danoise.

La Délégation a décidé de maintenir la réserve d'examen parlementaire sur le document E 2060.

- initiative du Royaume du Danemark relative à l'adoption par le Conseil d'un projet de décision du Conseil concernant les enquêtes et les poursuites pénales relatives aux crimes de guerre et aux crimes contre l'humanité (document E 2071).

Ce texte vise à renforcer l'efficacité des enquêtes et des poursuites contre les personnes qui ont participé ou contribué à la commission de crimes de génocide, de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre. Il prévoit, à cette fin, une coopération entre les services répressifs et les autorités chargées de l'immigration, dans le cadre du traitement des demandes de permis de séjour. Le Président Pierre Lequiller a souligné les modifications apportées à ce texte, compte tenu des réserves émises par certains Etats membres et par la Commission. Son champ d'application a en effet été restreint, des dispositions ont été ajoutées en ce qui concerne la protection des données, et l'obligation d'instruire ces crimes a été transférée au sein des considérants.

La Délégation a levé la réserve d'examen parlementaire sur ce texte.

Puis, elle a levé la réserve d'examen parlementaire sur les textes suivants :

¬ Marché intérieur

- la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de fournitures, de services et de travaux (document E 1500) ;

- la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil portant coordination des procédures de passation des marchés dans les secteurs de l'eau, de l'énergie et des transports (document E 1501).

¬ PESC et relations extérieures

- la proposition de décision du Conseil relative à la signature et à l'application provisoire de certaines dispositions d'un accord d'association conclu entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et la République du Chili, d'autre part. Proposition de décision du Conseil relative à la conclusion d'un accord d'association entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et la République du Chili, d'autre part (document E 2116).

Le Président Pierre Lequiller a rappelé que cet accord d'association visait à renforcer le dialogue politique, la coopération ainsi que le commerce entre l'Union européenne et le Chili. Le volet commercial de l'accord est le plus novateur et ambitieux puisque c'est la première fois en effet que l'Union européenne conclut avec un pays tiers un accord de type « OMC plus ». Il convient d'adopter au plus vite cet accord car les Etats-Unis prévoient d'achever avant la fin de cette année les négociations en cours pour un accord de libre-échange avec le Chili s'insérant dans le cadre d'une zone de libre-échange couvrant tout le continent américain, dont la mise en place est prévue pour le 1er janvier 2005. La présente proposition comporte deux volets principaux, l'un relatif à la libéralisation progressive et réciproque du commerce des marchandises, comportant des clauses d'urgence pour les produits agricoles et excluant les produits agricoles relevant d'OCM « sensibles », l'autre instaurant des règles de régulation du commerce.

¬ Politique sociale

- la communication de la Commission. Le dialogue social européen, force de modernisation et de changement. Proposition de décision du Conseil créant un sommet social tripartite pour la croissance et l'emploi (document E 2057).

Le Président Pierre Lequiller a estimé que ces deux textes, qui ont pour objet de promouvoir et de renforcer la place du dialogue social dans la politique économique et sociale de l'Union européenne allaient dans le bon sens. Il a jugé souhaitable que les ministres des affaires sociales des Etats membres puissent également participer à ce sommet.

¬ Propriété intellectuelle

- la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant la brevetabilité des inventions mises en œuvre par ordinateur (document E 1965).

Le Président Pierre Lequiller a rappelé que cette proposition de directive avait pour objet d'harmoniser les droits nationaux des brevets en ce qui concerne la brevetabilité des inventions mises en œuvre par ordinateur. La réaction française au texte initial a été très négative et s'est traduite par un courrier de Monsieur Christian Pierret, ministre délégué à l'industrie, aux PME, au commerce, à l'artisanat et à la consommation au sein du précédent Gouvernement, adressé à la Commission européenne le 1er mars 2002. Une nouvelle version du texte a été établie et le Gouvernement français y est plus favorable, tout en souhaitant cependant qu'une disposition imposant la divulgation des codes sources soit ajoutée.

M. Jérôme Lambert a observé que ce document faisait manifestement encore débat et s'est demandé s'il ne visait pas à favoriser les éditeurs de logiciels.

¬ Questions fiscales

- la proposition de directive du Conseil visant à garantir une imposition effective, à l'intérieur de la Communauté, des revenus de l'épargne sous forme de paiement d'intérêts (document E 1798).

Le Président Pierre Lequiller a rappelé que cette proposition constitue la deuxième version d'un texte présenté en 1998 qui reprend les orientations dégagées par le Conseil européen de Santa Maria de Feira de juin 2000. La proposition prévoit qu'après une période transitoire de sept ans, tous les Etats membres appliqueront le système d'échanges d'informations sur les bénéficiaires des paiements d'intérêt. Si la Belgique, l'Autriche et le Luxembourg pourront appliquer la retenue à la source pendant cette période transitoire, ces trois Etats devront en compensation transférer 75 % de la recette fiscale correspondante à la retenue à la source de l'Etat de membre de résidence des investisseurs. La principale réserve, exprimée notamment par le Luxembourg, consiste à arguer de ce que les discussions avec les Etats tiers ne sont pas assez avancées (surtout en ce qui concerne la Suisse) pour mettre en œuvre la directive.

La Délégation a vivement recommandé qu'avant la mise en œuvre de ce texte, des progrès significatifs soient enregistrés dans les négociations avec les Etats tiers et qu'une évaluation précise de ses effets - notamment en termes de risque de délocalisation des capitaux - soit effectuée et transmise à la représentation nationale.

- la proposition de directive du Conseil modifiant la directive 77/388/CEE en vue de proroger la faculté d'autoriser les Etats membres à appliquer des taux réduits de TVA pour certains services à forte intensité de main d'œuvre (document E 2101) ;

- la proposition de décision du Conseil qui proroge la durée d'application de la décision 2000/185/CE autorisant les Etats membres à appliquer un taux réduit de TVA sur certains services à forte intensité de main-d'œuvre conformément à la procédure prévue à l'article 28, paragraphe 6, de la directive 77/388/CEE (document E 2102) ;

A cette occasion, la Délégation a tenu à rappeler son souhait de disposer au plus tôt des rapports d'évaluation prévus de ces dispositifs, afin de mesurer de façon précise leur portée et l'utilité de leur donner un caractère définitif. Ces rapports ne doivent pas se limiter à l'évaluation des mesures existantes, mais doivent aussi examiner les effets escomptés des réductions de taux dans d'autres domaines, comme celui de la restauration ;

- la proposition de décision du Conseil modifiant la décision 89/688/CEE du Conseil du 22 décembre 1989 relative au régime de l'octroi de mer dans les départements français d'outre mer (document E 2094). Cette prorogation se fait pour une année à compter du 1er janvier 2003.

VI. Informations relatives à la Délégation

Le Président Pierre Lequiller, rappelant qu'il avait saisi le Président de l'Assemblée nationale dès le début de la législature de la nécessité de renforcer la place du débat européen au sein de l'Assemblée, a informé la Délégation des décisions prises à ce propos par la Conférence des présidents lors de sa dernière réunion, le 5 novembre 2002.

La Conférence des présidents a décidé qu'un débat en séance publique serait organisé fin novembre ou début décembre sur les travaux de la Convention sur l'avenir de l'Europe. Le Président Valéry Giscard d'Estaing, Président de la Convention, et le Premier ministre participeront à ce débat dont l'organisation prévoira par ailleurs l'intervention des groupes. Elle a annoncé la réunion conjointe de l'Assemblée nationale et du Bundestag le 22 janvier prochain à Versailles à l'occasion du 40ème anniversaire du traité de l'Elysée. Le Président Pierre Lequiller a informé la Délégation qu'il avait saisi la commission des affaires européennes du Bundestag en vue de la tenue d'une réunion conjointe avec la Délégation à cette occasion.

Enfin, la Conférence des présidents a décidé qu'une séance de questions au Gouvernement serait chaque mois consacrée aux questions européennes, selon des modalités à préciser.