Version PDF
Retour vers le dossier législatif

N° 325
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DOUZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 15 octobre 2002.
PROPOSITION DE LOI

modifiant la loi n° 81-766 du 10 août 1981 relative au prix du livre visant à harmoniser le prix du livre en vue de préserver la qualité du marché et le réseau français de librairies.
(Renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE
par M. Thierry MARIANI,

Additions de signatures :
MM. Bernard Accoyer, René André, Patrick Beaudouin, Jean-Claude Beaulieu, Jean-Louis Bernard, Marc Bernier, Étienne Blanc, Bruno Bourg-Broc, Pierre Cardo, Richard Cazenave, Roland Chassain, Jean-Marc Chavanne, Louis Cosyns, François d’Aubert, Jean-Pierre Decool, Lucien Degauchy, Léonce Deprez, Éric Diard, Jean- Pierre Door, Philippe Dubourg, Gérard Dubrac, Nicolas Dupont-Aignan, Jean-Michel Ferrand, Jean- Claude Flory, Philippe Folliot, Daniel Gard, Maurice Giro, Louis Guédon, Jean-Claude Guibal, Jean- Jacques Guillet, Michel Heinrich, Pierre Hériaud, Jean- Yves Hugon, Didier Julia, Christian Kert, Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, MM. Jacques Kossowski, Patrick Labaune, Yvan Lachaud, Jean- Christophe Lagarde, Robert Lamy, Édouard Landrain, Pierre Lasbordes, Jacques Le Guen, Jean-Marc Lefranc, Lionnel Luca, Daniel Mach, Richard Mallié, Mme Muriel Marland-Militello, MM. Jean Marsaudon, Christian Ménard, Pierre Micaux, Jean-Claude Mignon, Mme Nadine Morano, MM. Jacques Pélissard, Christian Philip, Michel Piron, Mme Bérengère Poletti, MM. Daniel Prevost, Jacques Remiller, Mme Juliana Rimane, MM. Jean Roatta, Jean-Marie Rolland, André Santini, Michel Terrot, Rodolphe Thomas, Jean Tiberi, André Thien Ah Koon, Léon Vachet, Mme Catherine Vautrin et M. Philippe Vitel

 


Députés.

Presse et livres.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,
Depuis plusieurs années, les quelques 25 000 libraires et points de vente que compte la France perdent une partie importante des marchés de fourniture de livres.
En effet, l'Etat, les collectivités locales, les établissements d'enseignement, de formation professionnelle ou de recherche, les syndicats représentatifs, les comités d'entreprise, les bibliothèques accueillant du public pour la lecture ou pour les prêts ont tendance à choisir des grossistes pour l'achat de leurs livres.
A la différence des ventes au public, le prix pratiqué pour ces « acheteurs particuliers » n'est pas limité par la loi (article 3 alinéa 2 de la loi n° 81-766 du 10 août 1981 relative au prix du livre). Dès lors, les grossistes sont apparus sur ce marché lucratif. Or, les prix qu'ils proposent empêchent toute concurrence des libraires.
En effet, les grossistes proposent régulièrement des réductions de 20 % voire 25 % lorsque les libraires ne peuvent descendre, pour des raisons légales et financières, au-dessous du seuil des 15 %. Le montant important des remises pratiquées par les grossistes s'explique simplement : les éditeurs calculent leur remise en fonction - pour partie - de la quantité de livres achetés. Ainsi, les grossistes bénéficient de remises plus importantes que les libraires et peuvent, sans risque financier, proposer ces prix défiant toute concurrence.
Si les grossistes proposent un prix très intéressant aux «acheteurs particuliers» cités ci-dessus, il convient de préciser qu'ils ne fournissent pas la même qualité de service qu'un libraire sur - au moins - quatre points essentiels.
En premier lieu, le grossiste ne prodigue aucun conseil sur la qualité des ouvrages qu'il vend. Ce faisant, il ne permet pas à la collectivité locale de faire le choix le plus adapté à ses spécificités. Certes, les éditeurs - notamment d'ouvrages scolaires - aident au choix en envoyant des conseillers pédagogiques dans les établissements. Mais, par essence, ce conseil ne sera jamais objectif quant aux avantages des manuels des éditeurs concurrents.
En second lieu, l'offre du grossiste se limite à son stock. A la différence du libraire, un grossiste ne recherche pas l'ensemble des titres de tous les éditeurs dans un domaine. Ainsi, il limite son offre aux plus grosses ventes. Cette pratique qui a de faibles conséquences en matière de manuels scolaires, mettra en danger à plus ou moins long terme la littérature française et étrangère.
En troisième lieu, les grossistes pratiquent le « colisage » et le minimum de commandes, c'est-à-dire qu'ils ne fournissent les livres que par colis de 20 ouvrages et exigent un seuil minimum de commandes. Lorsqu'une classe a 23 élèves, il lui est donc nécessaire d'acheter soit 40 ouvrages, soit un colis de 20 et 3 ouvrages supplémentaires auprès d'un libraire qui, au vu de la faible quantité achetée, ne pratique pas de remise.
Enfin, et encore une fois à la différence des libraires, la plupart des grossistes n'effectuent pas de suivi des commandes des manuels ou de leurs mises à jour.
En conséquence, il convient de permettre aux libraires d'évoluer sur la marché du livre à armes égales avec les grossistes. Afin de permettre aux libraires de pouvoir continuer à obtenir les marchés des «acheteurs particuliers», il faut encadrer les remises. Dans le même esprit que la loi de 1981 pour la vente au public des livres, il convient de limiter la remise consentie aux « acheteurs particuliers » à 15 % du prix de vente fixé par l'éditeur ou l'importateur. Cette limitation de la remise permettra de respecter les trois principaux objectifs des rédacteurs de cette loi : tout d'abord l'égalité des citoyens devant le livre en pratiquant les mêmes prix sur tout le territoire national; ensuite, le maintien d'un réseau décentralisé très dense de distribution, notamment dans les zones géographiques les plus éloignées et enfin, le soutien au pluralisme dans la rédaction et l'édition et, en particulier, pour les ouvrages littéraires.
Le fait de limiter le prix du livre pour les acheteurs particuliers peut apparaître comme attentatoire à la liberté du commerce et de l'industrie imposée par nos engagements européens. Mais il est à constater que la loi n° 81-766 du 10 août 1981 relative au prix du livre n'a jamais été condamnée par les instances de l'Union européenne. De plus, il s'agit de permettre aux libraires de continuer à fournir un service de qualité en mettant fin à des pratiques de concurrence inéquitables. D'autant que le livre n'est pas et ne sera jamais un simple produit. Il est au contraire un des supports de l'apprentissage, un moyen d'expression et depuis sa naissance le plus noble mode de diffusion de la culture, diffusion à laquelle les libraires sont indispensables.
Tel est l'objet de la présente proposition de loi.

PROPOSITION DE LOI
Article 1er

Le deuxième alinéa de l'article 3 de la loi n° 81-766 relative au prix du livre est ainsi rédigé :
« Lorsque l'Etat, les collectivités locales, les établissements d'enseignement, de formation professionnelle ou de recherche, les syndicats représentatifs, les comités d'entreprise, les bibliothèques accueillant du public pour la lecture ou pour les prêts achètent des livres pour leurs besoins propres, excluant la revente, les détaillants doivent pratiquer un prix effectif de vente compris entre 85 % et 100 % du prix fixé par l'éditeur ou l'importateur. »

Article 2

I. - Les pertes de recettes pour les collectivités territoriales sont compensées à due concurrence par le relèvement de la dotation globale de fonctionnement qui leur est attribuée par l'Etat.
II. - Les pertes de recettes qui résulteraient pour l'Etat de l'application de la présente loi sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle sur les droits perçus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

N° 0325 - Proposition de loi sur le prix du livre (loi n°81-766 du 10 août 1981 (M. Thierry Mariani).


© Assemblée nationale