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No 435
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DOUZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 28 novembre 2002.
PROPOSITION DE LOI
tendant à la création de délégations parlementaires
aux droits des enfants.

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

par MM. Dominique PAILLÉ, Jean-Claude ABRIOUX, Manuel AESCHLIMANN, Jean AUCLAIR, Patrick BEAUDOIN, Jean-Louis BERNARD, Marc BERNIER, Étienne BLANC, Roland BLUM, LoÏc BOUVARD, Ghislain BRAY, François CALVET, Bernard CARAYON, Pierre CARDO, Mme JoËlle CECCALDI-RAYNAUD, MM. Roland CHASSAIN, Jean-François CHOSSY, Jean-Louis CHRIST, Mme GeneviÈve COLOT, MM. Louis COSYNS, Jean-Michel COUVE, Jean-Pierre DOOR, Philippe DUBOURG, Pierre-Louis FAGNIEZ, Yannick FAVENNEC, Alain FERRY, Daniel FIDELIN, Jean-Claude FLORY, Guy GEOFFROY, Maurice GIRO, Louis GUÉDON, Emmanuel HAMELIN, Laurent HÉNART, Michel HUNAULT, Édouard JACQUE, Christian JEANJEAN, Mme Maryse JOISSAINS-MASINI, MM. Yvan LACHAUD, Jean-Pierre LE RIDANT, Daniel MACH, Mmes Muriel MARLAND-MILITELLO, Henriette MARTINEZ, MM. Patrice MARTIN-LALANDE, Alain MARTY, Jean-Marie MORISSET, Étienne MOURRUT, Bernard PERRUT, Mme BérengÈre POLETTI, MM. Daniel PREVOST, Michel RAISON, Éric RAOULT, Jacques REMILLER, Mme Juliana RIMANE, MM. Jean ROATTA, François SCELLIER, Alfred TRASSY-PAILLOGUES, Léon VACHET et Michel VOISIN,
M. Jean Tiberi

Députés.

Parlement.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,
La reconnaissance des droits des enfants s'est traduite par des étapes législatives majeures, notamment à la suite de la ratification par la France de la Convention internationale sur les droits de l'enfant.
En effet, la législation française s'est dotée d'un certain nombre de mesures visant à traduire en droit interne, pour les rendre applicables, les dispositions de la Convention. En voici quelques exemples :
- La loi du 8 janvier 1993 modifiant le code civil relative à l'état civil, à la famille et aux droits de l'enfant instituant le juge aux affaires familiales constitue une étape importante pour le respect des droits de l'enfant.
- La loi du 17 juin 1998 relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles ainsi qu'à la protection des mineurs autorise ces derniers, lorsqu'ils sont victimes d'infractions sexuelles, à accepter qu'il soit procédé à un enregistrement audiovisuel de leur audition, au cours de l'enquête et de l'information.
- La loi du 6 mars 2000 visant à renforcer le rôle de l'école dans la prévention et la détection des faits de mauvais traitements à enfants stipule que les visites médicales scolaires ont notamment pour objet de prévenir et de détecter les cas d'enfants maltraités.
- La loi du 6 mars 2000 instituant un défenseur des enfants, autorité indépendante, chargé de défendre et de promouvoir les droits de l'enfant consacrés par la loi ou par un engagement international régulièrement ratifié ou approuvé...
Mais malgré tous les efforts, force est de constater que 45 % des adultes et 65 % des enfants ignorent que les enfants ont des droits.
A des degrés divers, le constat est identique dans les autres pays européens. Toutefois, l'Europe constitue un levier pour l'action en faveur des droits des enfants avec l'ambition qu'elle énonce d'intégrer cette dimension dans toutes les politiques. Ainsi, en est-il de la Charte des droits fondamentaux, proclamée par le Conseil européen de Nice ou de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950.
Cependant, ni l'Assemblée nationale ni le Sénat ne disposent jusqu'ici d'un organe restreint à caractère permanent qui aurait pour mission de suivre les problèmes relatifs au respect, à la promotion et à la protection des droits de l'enfant.
Il s'agit là d'une lacune sérieuse, car les structures internes actuelles des assemblées, les commissions permanentes notamment, ne semblent pas de nature à fournir un cadre totalement adapté au, développement de la réflexion collective des députés et des sénateurs dans ces domaines où celle-ci se révèle pourtant particulièrement nécessaire. Les questions des droits des enfants ont un caractère «transversal »et ne relèvent, de ce fait, des compétences d'aucune des six commissions actuelles permanentes de l'Assemblée nationale ou du Sénat.
La mise en place d'instances parlementaires spécialisées intervenant dans le même domaine irait donc dans le sens d'un renforcement du contrôle parlementaire et, au-delà, dans celui du rééquilibrage souhaitable des institutions.
La constitution, à l'Assemblée nationale et au Sénat, d'une instance restreinte à caractère permanent compétente en matière de droits des enfants passe par la création d'une délégation parlementaire.
Celle-ci relève du domaine de la loi : c'est la raison pour laquelle, suivant une formule déjà utilisée à plusieurs reprises, il est proposé, conformément au souhait et aux travaux de nombreux parlementaires des deux assemblées, de compléter l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires.
En outre, le dispositif de la présente proposition de loi s'inspire directement des règles applicables aux délégations parlementaires pour l'Union européenne à l'Assemblée nationale comme au Sénat.
Chaque assemblée disposerait d'une délégation qui lui serait propre, comptant trente-six membres désignés de manière à assurer une représentation proportionnelle des groupes et une représentation équilibrée des commissions permanentes, ainsi que des hommes et des femmes. La mission des deux délégations serait définie en termes généraux, ce qui permettrait d'éviter toute lecture restrictive de la loi; cette dernière leur garantirait, par ailleurs, les moyens d'accéder aux informations nécessaires à l'exercice de leur mission, notamment en se faisant communiquer par les administrations tous les documents dont elles jugeraient souhaitable de disposer. Les travaux des deux délégations prendraient notamment la forme d'auditions et se traduiraient par l'élaboration de rapports d'information rendus publics comportant des propositions d'amélioration de la législation touchant aux droits des enfants. Il faut noter qu'à l'instar des délégations pour l'Union européenne les deux nouvelles délégations auraient la capacité de déterminer elles-mêmes les objets de leurs travaux, sans devoir être saisies par quelque autre instance parlementaire que ce soit.
Enfin, cette proposition de loi tendant à la création des délégations parlementaires aux droits des enfants a d'ores et déjà reçu un avis favorable du Défenseur des enfants et du Comité consultatif qui y est associé lors de sa réunion du 26 septembre 2002.
PROPOSITION DE LOI
Article unique
Il est inséré, après l'article 6 septies de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, un article 6 octies ainsi rédigé :
«Art. 6 octies. - I.- Il est constitué, dans chacune des deux assemblées du Parlement, une délégation parlementaire aux droits de l'enfant.Chacune de ces délégations compte trente-six membres.
«II. -Les membres des délégations sont désignés en leur sein par chacune des deux assemblées de matière à assurer une représentation proportionnelle des groupes politiques et une représentation équilibrée des commissions permanentes, ainsi que des hommes et des femmes. La délégation de l'Assemblée nationale est désignée au début de la législature pour la durée de celle-ci.
«La délégation du Sénat est désignée après chaque renouvellement partiel de cette assemblée.
«Le mandat des délégués prend fin avec le mandat parlementaire.
«III. - Sans préjudice des compétences des commissions permanentes ou spéciales, ni de celles des délégations pour l'Union européenne, les délégations aux droits de l'enfant ont pour mission d'informer les Assemblées de la politique suivie par le Gouvernement au regard de ses conséquences sur les droits des enfants. En ce domaine, elles assurent un suivi de l'application des lois.
«A cet effet, les délégations parlementaires aux droits de l'enfant peuvent être saisies sur les projets ou propositions de loi par :
«- le bureau de l'une ou de l'autre Assemblée, soit à son initiative, soit à la demande d'un président de groupe;
«- une commission spéciale ou permanente, soit à son initiative, soit à la demande de la délégation;
«- les délégations pour l'Union européenne, sur les textes soumis aux Assemblées en application de l'article 88-4 de la Constitution.
«Elles peuvent demander à entendre les ministres ainsi que le Défenseur des enfants et reçoivent communication de tous renseignements de nature à faciliter leur mission. Elles sont habilitées à se faire communiquer tous documents de service de quelque nature que ce soit, réserve faite, d'une part, de ceux à caractère secret concernant la défense nationale, les affaires étrangères et la sécurité intérieure ou extérieure de l'Etat et, d'autre part, du principe de la séparation de l'autorité judiciaire et des autres pouvoirs.
«IV. - Les délégations établissent, sur les questions dont elles sont saisies, des rapports comportant des recommandations qui sont déposés sur le bureau de l'assemblée dont elles relèvent et transmis aux commissions parlementaires compétentes, ainsi qu'aux délégations pour l'Union européenne. Ces rapports sont rendus publics.
«Elles établissent en outre, chaque année, un rapport public dressant le bilan de leur activité et comportant, le cas échéant, des propositions d'amélioration de la législation dans leurs domaines de compétences.Ce bilan comporte également pour l'Assemblée nationale, un compte rendu de l'activité du Parlement des enfants et du suivi de ses propositions.
«V. - Chaque délégation organise la publicité de ses travaux dans les conditions définies par le règlement de chaque assemblée.
«La délégation de l'Assemblée nationale et celle du Sénat peuvent décider de tenir des réunions conjointes.
«VI. - Les délégations définissent leur règlement intérieur.»


N° 0435 - Proposition de loi  sur la création de délégations parlementaires aux droits des enfants (M. Dominique Paillé)


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