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No 665

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 5 mars 2003.

PROPOSITION DE LOI

accordant aux responsables d'exécutifs locaux la possibilité
de
saisine pour avis des chambres régionales des comptes.

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

par MM. Pierre MOREL-A-L'HUISSIER, Jean-Pierre ABELIN, Jean-Claude ABRIOUX, Manuel AESCHLIMANN, Mme Martine AURILLAC, MM. Patrick BEAUDOUIN, Marc BERNIER, JérÔme BIGNON, Claude BIRRAUX, Étienne BLANC, Roland BLUM, Jacques BOBE, Bruno BOURG-BROC, Mmes Christine BOUTIN, JoËlle CECCALDI-RAYNAUD, MM. Dominique CAILLAUD, François CALVET, Bernard CARAYON, Roland CHASSAIN, Dino CINIERI, Louis COSYNS, Jean-Yves COUSIN, Paul-Henri CUGNENC, Olivier DASSAULT, Hervé de CHARETTE, Jean-Pierre DECOOL, Yves DENIAUD, Bernard DEPIERRE, Mme Marie-HélÈne des ESGAULX, MM. Jean-Jacques DESCAMPS, Jacques DOMERGUE, Jean-Pierre DUPONT, Christian ESTROSI, Jean-Michel FERRAND, Daniel FIDELIN, Jean-Claude FLORY, Philippe FOLLIOT, Marc FRANCINA, Mme Arlette FRANCO, MM. Guy GEOFFROY, Alain GEST, Georges GINESTA, Claude GIRARD, Maurice GIRO, Jean-Pierre GRAND, François GROSDIDIER, Louis GUÉDON, Jean-Jacques GUILLET, Emmanuel HAMELIN, Michel HEINRICH, Pierre HELLIER, Laurent HÉNART, Michel HERBILLON, Jean-Yves HUGON, Édouard JACQUE, Christian JEANJEAN, Mme Maryse JOISSAINS-MASINI, MM. Mansour KAMARDINE, Patrick LABAUNE,
Yvan LACHAUD, Jacques LAFLEUR, Jean-Christophe LAGARDE, Robert LAMY, Pierre LASBORDES, Mme Brigitte LE BRETHON, MM. Michel LEJEUNE,
Jean-Claude LENOIR, Jean-Louis LÉONARD, Édouard LEVEAU, Lionnel LUCA, Daniel MACH, Richard MALLIÉ, Thierry MARIANI, Mme Muriel MARLAND-MILITELLO, MM. Alain MARLEIX, Alain MARTY, Étienne MOURRUT, Alain MOYNE-BRESSAND, Jean-Marc NESME, Nicolas PERRUCHOT, Bernard PERRUT, Mmes BérengÈre POLETTI, Josette PONS, MM. Daniel PREVOST, Christophe PRIOU, Didier QUENTIN, Michel RAISON,
Éric RAOULT, Jacques REMILLER, Mmes Juliana RIMANE, Marie-Josée ROIG, MM. Philippe ROUAULT, Jean-Marc ROUBAUD, Max ROUSTAN, Bernard SCHREINER,
Jean-Pierre SOISSON, Guy TEISSIER, Michel TERROT, André THIEN AH KOON, Dominique TIAN, Jean TIBERI, Alfred TRASSY-PAILLOGUES, Jean UEBERSCHLAG, Jean-Sébastien VIALATTE, Michel VOISIN et Gérard WEBER,

Députés.

Collectivités territoriales.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Dressant un bilan de l'activité des chambres régionales des comptes, après leur vingtième anniversaire et à un moment où le gouvernement entend développer l'organisation décentralisée de la France, il me semble que le temps est venu de donner aux collectivités locales le pouvoir, comme cela est donné à l'Etat, de demander un avis de droit au juge, sur des dispositions nouvelles.

En effet, les collectivités locales doivent disposer du droit d'interroger les chambres régionales des comptes, exactement comme le Conseil d'Etat est un donneur d'avis pour le gouvernement.

L'affirmation de la décentralisation, la disparition de la tutelle et du contrôle a priori et la complexité grandissante des problèmes posés ont fait naître, pour les collectivités locales, un risque contentieux qu'il est utile de prévenir, la transparence sur les questions de droit étant un gage de démocratie.

Mais, si des réflexions convergentes ont été formulées en faveur de l'accroissement du rôle consultatif des chambres régionales des comptes, ces réflexions n'ont jusqu'à présent trouvé aucune véritable traduction législative en ce qui concerne l'exercice de ce rôle vis-à-vis des élus. De fait, la seule disposition législative en ce sens, qui résulte de l'article 47-III de la loi n° 92-125 du 6 février 1992 codifiée sous l'article L. 234-1 du code des juridictions financières, réserve aux seuls préfets le droit de consulter les chambres régionales des comptes sur les conventions relatives aux marchés ou à des délégations de service public qui leur sont soumises pour contrôle de légalité.

Il paraît souhaitable d'étendre de manière significative le rôle consultatif des chambres régionales des comptes confiant à certains élus locaux - en particulier ceux exerçant des fonctions exécutives, maires, présidents d'EPCI, de conseils régionaux et généraux - le droit de leur demander leur avis sur toute question de droit nouvelle qui relève de leurs compétences. Ce droit s'inspire de celui dont dispose le gouvernement vis-à-vis du Conseil d'Etat, les préfets vis-à-vis des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et les tribunaux administratifs et cours administratives d'appel vis-à-vis du Conseil d'Etat luimême.

Les élus - notamment ceux qui viennent d'être cités - ont en effet des responsabilités dont le champ ne cesse de s'accroître depuis le vote des lois de décentralisation et l'exercice de ces responsabilités devient, en lui-même, de plus en plus difficile en raison de la complexité croissante de la législation. Cette saisine pour avis des chambres régionales des comptes répond aussi à un souci de respect de la légalité financière, pour une gestion exempte d'erreur grâce à un avis autorisé préalable.

Le rôle consultatif des chambres régionales des comptes ouvert aux exécutifs locaux permettrait également d'éviter les hiatus d'analyses entre le contrôle de légalité exercé par les services préfectoraux et le contrôle de gestion exercé par les chambres régionales des comptes le plus souvent trois ou quatre années après que la décision ait été prise par les collectivités locales.

Ce nouveau rôle confié aux chambres régionales des comptes ne saurait bien évidemment interférer sur leurs attributions juridictionnelles traditionnelles.

Conformément à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, notamment au vu de l'article 6, paragraphe 1, de la Convention européenne des droits de l'homme et à la jurisprudence du Conseil d'Etat, les magistrats chargés d'émettre des avis ne pourraient cumuler lesdites fonctions consultatives avec leurs fonctions juridictionnelles sur un même dossier ou sur une même question de droit.

Ces dispositions législatives nouvelles pourraient, en outre, être utilement complétées par des dispositions d'ordre réglementaire qui permettraient auxdits exécutifs de saisir les présidents du tribunal administratif :

- d'une part, pour avis sur toutes les questions de droit relevant du cadre spécifique de la décentralisation, grâce à une modification du code de la justice administrative ;

- d'autre part, aux fins d'éclaircissement sur les modalités d'exécution des décisions de justice, compte tenu des dispositions de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relatives à l'exécution des décisions juridictionnelles, et ce par une adaptation du code des juridictions administratives ou par une modification de l'article 58 du décret du 30 juillet 1963 portant élargissement de la voie ouverte aux ministres, en permettant auxdits exécutifs de solliciter la juridiction administrative locale sur les problèmes d'exécution de décisions intervenues dans le cadre spécifique de la décentralisation, comblant ainsi un vide juridique.

L'ensemble de ce dispositif permettra de compléter utilement, d'une part, l'exercice du contrôle de légalité par les préfets et, d'autre part, l'intervention des juridictions administratives et des chambres régionales des comptes, contrôle et intervention qui se font depuis 1982 a posteriori, ce qui peut entraîner des incertitudes juridiques et des difficultés majeures d'exécution et de régularisation administrative.

JE VOUS DEMANDE, EN CONSÉQUENCE, DE BIEN VOULOIR ADOPTER LA PROPOSITION DE LOI SUIVANTE.proposition de loi

Article 1er

Après le chapitre V du titre III de la première partie du livre II du code des juridictions financières, il est inséré un chapitre Vbis intitulé « Attributions consultatives » et comprenant un article L. 235-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 235-2. - Les présidents des chambres régionales des comptes peuvent être appelés à donner leur avis sur des questions de droit nouvelles qui leur sont soumises par les responsables d'exécutifs locaux.

« Lorsqu'ils sont amenés à rendre un avis sur une question de droit nouvelle, les magistrats des chambres régionales des comptes ne peuvent exercer ultérieurement des compétences relevant du titre II du livre II du code des juridictions financières sur cette même question de droit. »

Article 2

Un décret en Conseil d'Etat fixera les modalités d'application de la présente loi.

N° 0665 - Proposition de loi  accordant aux responsables d'exécutifs locaux la possibilité de saisine pour avis des chambres régionales des comptes (M. Pierre Morel-A-L'Huissier)


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