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N° 1705

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 24 juin 2004.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

tendant à la création d'une commission d'enquête
relative aux
propos discriminatoires
et
hostiles aux institutions, aux lois et à la France,
tenus par des prédicateurs qui combattent la République,
au nom d'une idéologie intégriste et islamique
qui nourrit le terrorisme,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration
générale de la République, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais
prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

par M. André GERIN

Député.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La République française repose sur des valeurs républicaines telles que la liberté, l'égalité, la fraternité et la laïcité. La laïcité est un principe d'avant-garde dont peut s'enorgueillir notre pays. La France ne fait pas référence à un héritage religieux dans sa Constitution. C'est le gage d'une véritable neutralité de l'Etat et d'une véritable garantie des libertés individuelles. Dans les deux premiers articles de la loi du 9 décembre 1905 relative à la séparation des Eglises et de l'Etat est stipulé : « La République assure la liberté de conscience et garantit le libre exercice des cultes » et qu'elle « ne reconnaît, ne salarie, ni ne subventionne aucun culte ».

La neutralité de l'Etat implique que le fait religieux relève de la seule sphère privée des citoyens.

Il existe des restrictions liées au respect de l'ordre public. Les individus ou les groupes d'individus doivent respecter les lois françaises.

Depuis de nombreuses années, des discours sous des couverts religieux sont tenus par des pseudo-religieux dans les quartiers difficiles des banlieues, prônant le châtiment des femmes qui ne veulent pas obéir à leur mari, exigeant le port du voile pour les femmes dès le plus jeune âge, incitant à la guerre sainte contre le monde occidental qui empêcherait la pratique de la religion de l'Islam. Ce phénomène s'est accentué ces toutes dernières années. Ces propos relèvent d'un prosélytisme religieux agressif, basé sur une lecture fondamentaliste du Coran, appelant parfois ouvertement à considérer les individus, les institutions et les lois qui ne sont pas réglées selon des principes religieux comme des ennemis à abattre. Cette attitude est hors la loi française et internationale : la France s'est dotée de textes contre les discriminations envers les femmes, raciales, religieuses et a signé des traités et conventions internationaux à ce sujet.

Cet obscurantisme est dangereux pour la société qu'il veut faire régresser. Il nourrit le terrorisme. Il ne faut pas séparer cela du contexte créé par l'attentat du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis, commis par le groupe terroriste islamique Al Qaïda. La religion musulmane est utilisée comme prétexte servant un Islam politique radical.

Cet extrémisme politique pourrit la vie des quartiers et des jeunes en profitant - comme le fait l'extrême droite - du malheur des gens. Il distille de manière insidieuse une idéologie contre la modernité et la rationalité. A l'image de l'inégale répartition des richesses sur notre planète, des pans entiers de la population française sont mis à l'écart de l'emploi. La population immigrée est particulièrement concernée. Le haut conseil à l'intégration dresse un bilan sévère sur les politiques passées. Cette population est confrontée plus que les autres à la précarité sociale, professionnelle et civique. L'intégration est en panne et l'ascenseur social est bloqué. Le chômage des jeunes, des repères culturels perturbés et un abandon social général malgré les cosmétiques de la politique de la ville rendent le terrain facile aux intégristes de tous poils, quelles que soient les religions ou dogmes, pour conditionner, voire embrigader des jeunes dans des zones en dehors de la loi. Dans les banlieues, des aides aux devoirs, des cours d'alphabétisation, des cours d'arabe par exemple sont parfois organisés par des réseaux locaux propagandistes de l'Islam radical. Cela peut aller très loin avec le recours à une mafia locale en organisant des trafics divers de marchandises et de drogues. De nombreux faits viennent éclairer la régression dans l'exercice des droits et devoirs et dans les attitudes, par exemple le recul des mariages mixtes, la pression très forte sur les adolescentes au sujet de leur tenue vestimentaire, de leur fréquentation amoureuse, et de la contraception. Et cela contribue à développer une haine contre la société en victimisant les musulmans en faisant des non-musulmans des impies.

Cette situation génère un ensemble de racismes. L'antisémitisme, le racisme anti-Arabe connaissent malheureusement un regain. Il faut noter le développement d'un racisme anti-Français et d'un esprit anti-services publics. L'hostilité, à travers l'usage et l'encouragement à la délinquance, envers les représentants de la République, les pompiers, la police, les élus, est tangible à la lecture des faits divers. La Marseillaise sifflée lors d'un match de football est caractéristique.

Le débat sur le projet de loi relatif à l'application du principe de laïcité dans les écoles, collèges et lycées publics, a montré les enjeux de la laïcité pour la société au travers de la discussion sur le voile à l'école. Ce dernier est utilisé comme un étendard religieux identitaire portant atteinte aux libertés individuelles et collectives, à l'égalité entre les hommes et les femmes. Pour vivre ensemble, il y a nécessité de respecter la loi commune. La laïcité en est le ferment. Elle est aussi un idéal positif. Le vote de la loi déjà citée peut ouvrir un immense chantier laissé en jachère depuis plusieurs décennies. Ce chantier a plusieurs volets. Cela concerne l'intégration culturelle, sociale, professionnelle et civique des personnes issues de l'immigration mais également de l'intégration de l'Islam dans le paysage cultuel français. La majorité des musulmans vivent leur religion dans le respect des lois françaises.

Citoyens et institutions nous devons leur tendre la main pour travailler à une reconquête républicaine, pour les appeler à s'engager, à s'exprimer, à se mobiliser pour un Islam tolérant et populaire, qui s'adapte aux valeurs de la République. Nous devons combattre ensemble ces prédicateurs, cet obscurantisme remettant en cause notre droit civil pour assujettir les femmes, porter atteinte aux libertés individuelles et les reléguer dans un statut d'infériorité. C'est un nouveau totalitarisme. La laïcité doit être explicitée pour suivre l'évolution de notre société et permettre l'intégration de l'Islam. Il faut expliquer également la loi, les droits et devoirs et éradiquer tout propos et attitude délictueuse. L'Etat, au travers de son gouvernement, se préoccupe de ces délits proférés par des pseudo-religieux. Il est important que la représentation nationale s'interroge sur le contexte et les différentes causes et circonstances qui favorisent discours, prêches de cet acabit. Il est temps de dire non à ces prédicateurs qui combattent nos valeurs et la France. Pour les étrangers, ils n'ont rien à faire dans notre pays. L'idéologie intégriste et islamiste s'est propagée dans les banlieues et certains quartiers au sein de la communauté musulmane. Cette idéologie qui nourrit le terrorisme, touche y-compris des Français de souche. Elle devra ensuite en tirer des enseignements et propositions pour permettre à la majorité des musulmans de vivre un Islam paisible, tolérant et populaire avec des lieux de culte dignes de ce nom au XXIe siècle, dans le respect de la République et de ses principes de laïcité.

La situation est sérieuse, des mesures d'expulsions et d'éloignement de ces prédicateurs sont nécessaires et salutaires pour renforcer l'autorité des institutions républicaines, pour renforcer le dialogue constructif avec le Conseil Français du Culte Musulman et la majorité des musulmans.

C'est pourquoi je vous demande, Mesdames, Messieurs, d'adopter la présente proposition de résolution.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

Article unique

Il est créé une commission d'enquête de trente membres afin de déterminer les conditions et les causes sociales, sociologiques, idéologiques et politiques ainsi que les circonstances ponctuelles et diverses qui favorisent la tenue de propos discriminatoires et hostiles aux institutions et lois françaises par des personnes ou des groupes de prédicateurs prétendant être des référents religieux. L'analyse doit permettre de dégager des pistes et de faire des propositions visant à supprimer ou à modifier des situations dans lesquelles sont impliqués certains dispositifs publics ou organisations existantes.

Composé et imprimé pour l'Assemblée nationale par JOUVE
11, bd de Sébastopol, 75001 PARIS

Prix de vente : 0,75 €
ISBN : 2-11-118437-3
ISSN : 1240 - 8468

En vente au Kiosque de l'Assemblée nationale
4, rue Aristide Briand - 75007 Paris - Tél : 01 40 63 61 21

N° 1705 - Proposition de résolution :commission d'enquête sur les propos discriminatoires, hostiles aux institutions, aux lois, à la France, des prédicateurs qui combattent la République, au nom d'une idéologie intégriste islamique (M. André GERIN)


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