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N° 1810

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 22 septembre 2004.

PROPOSITION DE LOI

relative à la reconnaissance de la pénibilité du travail
pour les salariés des
métiers de la construction
et au droit à la
retraite à taux plein à 55 ans,

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales,
à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus
par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

par MM. Alain BOCQUET, Mme Muguette JACQUAINT, MM. François ASENSI, Gilbert BIESSY, Patrick BRAOUEZEC, Jean-Pierre BRARD, Jacques BRUNHES, Mme Marie-George BUFFET, MM. André CHASSAIGNE, Jacques DESALLANGRE, Frédéric DUTOIT, Mme Jacqueline FRAYSSE, MM. André GERIN, Pierre GOLDBERG, Maxime GREMETZ, Georges HAGE, Mme Janine JAMBU, MM. Jean-Claude LEFORT, François LIBERTI, Daniel PAUL, Jean-Claude SANDRIER et Michel VAXÈS (1)

Députés.

(1) Constituant le groupe des député-e-s communistes et républicains.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La présente proposition de loi s'inscrit dans les démarches déjà initiées par le groupe des député-e-s communistes et républicains pour accorder des droits nouveaux aux salariés. Dans le cas présent, il s'agit de revenir sur la réforme ingrate des retraites du 21 août 2003 afin d'engager la reconnaissance de la pénibilité du travail et d'accorder le bénéfice du droit à la retraite à taux plein à 55 ans pour les métiers de la construction.

En effet, il paraît évident que le secteur de la construction est le plus exposé à des formes de pénibilité multiples et pourrait représenter une priorité dans les politiques de retraite anticipée, au même titre qu'il existe déjà, dans d'autres domaines, des systèmes de retraite anticipée.

Toutes les études sur les conditions de travail confirment que les salariés du bâtiment-travaux publics sont victimes de la forte pénibilité des métiers qu'ils exercent. En conséquence, ce secteur est un secteur (et peut-être « le secteur ») dans lequel l'articulation pénibilité/retraite est à poser de manière urgente.

Le bâtiment-travaux publics présente les données chiffrées les plus préoccupantes en termes de santé au travail, de risques au travail et de conditions de travail. Si des efforts de prévention des risques professionnels indéniables ont été accomplis au cours de la dernière décennie (ils ont donné des résultats positifs sur la dangerosité, notamment), les indicateurs concernant les conditions de travail au sens large, et la pénibilité plus particulièrement, semblent indiquer, quant à eux, une dégradation des situations de travail.

Dans le même temps, il n'existe dans le bâtiment-travaux publics aucun dispositif réellement efficace de prise en compte de la pénibilité pour l'accès à la retraite. Seule, une gestion sociale peu encadrée et socialement excluante pousse une partie des salariés âgés hors de l'activité par le chômage, la maladie ou l'invalidité.

Enfin, le bâtiment-travaux publics est durablement un des secteurs les moins attractifs en terme d'emploi, avec l'hôtellerie-restauration et l'agriculture, comme le révèlent les indicateurs de tensions sur le marché du travail. Outre la question des rémunérations, on doit constater qu'une bonne part de cette moindre attractivité vient de conditions de travail difficiles, de la précarité galopante des emplois et de la pénibilité des métiers de la construction.

De toutes ces études, il ressort que l'acte de construire expose encore trop souvent à des produits dangereux. La liste est longue. Si l'amiante est le plus connu, n'oublions pas pour autant les divers produits toxiques manipulés par les peintres, les substances dangereuses composant les produits routiers, les poussières et vapeurs qui sont le lot quotidien des salariés des travaux publics et du bâtiment. Dans les carrières et chez les négociants de matériaux, les problèmes sont, bien évidemment, les mêmes. Dans les nuisances qui les concernent particulièrement, il ne peut être fait abstraction des problèmes de santé liés au bruit produit par la plupart des outils de travail également.

Les marteaux-piqueurs, les compresseurs, les engins de compactage, plaques vibrantes, perforateurs, scies de toutes sortes et moteurs en tout genre sont autant de moyens de perdre tout ou partie de ses capacités auditives. De l'avis des médecins, ne plus entendre est aussi traumatisant que ne plus voir.

Il en résulte aussi que l'espérance de vie d'un travailleur ouvrier de la construction est de cinq ans inférieure à celle de son encadrement. Le différentiel d'espérance de vie moyenne pour un ouvrier de la construction par rapport aux autres industries est de trois ans. En acceptant de travailler très dur et longtemps pour des industriels uniquement préoccupés, trop souvent, par leurs marges bénéficiaires, ces salariés subissent les conséquences d'une société où l'homme passe après les profits. Ce qui n'est pas acceptable.

Ce sont autant d'éléments qui militent pour la réparation des préjudices subis.

Par conséquent, les parlementaires du groupe des député-e-s communistes et républicains vous invitent à adopter cette proposition de loi de justice sociale, attendue des salariés de la construction. Proposition qui vise à reconnaître la pénibilité des métiers de la construction et en conséquence d'accorder le droit à la retraite à taux plein à 55 ans pour ces salariés.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Dans un délai de 6 mois après la promulgation de la présente loi, une négociation professionnelle engagée entre les organisations professionnelles et syndicales représentatives au niveau national des professions de la construction devront s'accorder sur la définition et la prise en compte de la pénibilité des métiers de la construction. A cet effet seront retenues l'exposition des salariés aux intempéries, à la manutention de charges, aux contraintes posturales, aux contraintes articulaires ou encore aux expositions aux nuisances chimiques, au stress, maladies nerveuses et au bruit en particulier.

A défaut d'accord, dans les six mois, le gouvernement déterminera par décret, pris après avis des organisations syndicales représentatives des salariés concernés, les conditions de la définition de la pénibilité des professions de la construction.

Article 2

Après le 7e alinéa de l'article L. 351-8 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

6° Les assurés ayant effectué une activité professionnelle dans la construction aux conditions de travail dites pénibles. Pour ces assurés l'âge mentionné au premier alinéa de l'article L. 351-l du présent code est minoré de cinq ans dans des conditions déterminées par décret ».

Article 3

Les partenaires sociaux chargés de la gestion des régimes complémentaires de retraite engagent une négociation afin d'adapter le dispositif des retraites complémentaires de manière à servir une pension à taux plein aux assurés qui réunissent les conditions requises à l'article 2 de la présente loi dans les

régimes de base et demandent la liquidation de leur pension de retraite à l'âge de 55 ans.

Article 4

La présente loi entrera en vigueur avant le 1er janvier 2006.

Article 5

Les charges éventuelles qui résulteraient pour les régimes sociaux de l'application de la présente loi sont compensées à due concurrence par la création d'une contribution sociale à laquelle est assujetti l'ensemble des revenus financiers. Sont exonérés de cette contribution sociale les livrets d'épargne populaire, les livrets A, livrets bleus, livrets et comptes d'épargne logement. Les plans épargne populaire courants, avant promulgation de la présente loi, en sont également exonérés pendant cinq ans. Les revenus des biens immobiliers autres que ceux utilisés pour l'usage personnel du propriétaire et de sa famille directe sont assujettis à la même cotisation que les revenus financiers.

Composé et imprimé pour l'Assemblée nationale par JOUVE
11, bd de Sébastopol, 75001 PARIS

Prix de vente : 0,75 €
ISBN : 2-11-118524-8
ISSN : 1240 - 8468

En vente au Kiosque de l'Assemblée nationale
4, rue Aristide Briand - 75007 Paris - Tél : 01 40 63 61 21

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N° 1810 - Proposition de loi relative à la reconnaissance de la pénibilité du travail pour les salariés des métiers de la construction et au droit à la retraite à taux plein à 55 ans (M. Alain Bocquet)


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