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N° 2722

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 5 décembre 2005.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

tendant à la création d'une commission d'enquête
chargée de rechercher les
causes des dysfonctionnements
de la
justice dans l'affaire dite d'Outreau et de formuler
des
propositions pour éviter leur renouvellement.

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration
générale de la République, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais
prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

par MM. Jean-Louis DEBRÉ et Philippe HOUILLON

Députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

L'acte de juger constitue une fonction cardinale de notre société.

Parce qu'il touche à la vie, à la liberté, à l'honneur et à la réputation, à la famille comme au patrimoine des personnes et que la justice est rendue au nom du peuple français, il est de la responsabilité de la Représentation nationale d'en évaluer le fonctionnement et d'en suggérer les nécessaires adaptations.

Or les récents développements et la conclusion du dossier judiciaire d'Outreau ont révélé ce qui a été qualifié par le Garde des Sceaux lui-même « d'immense erreur judiciaire », de « dysfonctionnement majeur et catastrophique pour l'institution judiciaire » selon le procureur général de Paris ou encore de « véritable catastrophe » pour l'avocat général qui a, fait exceptionnel, requis l'acquittement en portant, selon ses propres termes, la « parole de la vérité ».

Lorsqu'au terme des deux procès d'assises, de Saint-Omer et de Paris, treize des dix-sept accusés ont été acquittés, l'un des mis en examen s'étant suicidé en prison, et que les audiences ont clairement fait apparaître les failles et les incohérences de la procédure, il convient de s'interroger sereinement sur les raisons d'une telle dérive et de procéder, selon les termes d'un avocat de la défense, à une « autopsie du dossier ».

C'est à l'évidence une réflexion sur le fonctionnement de l'institution judiciaire qui devra être engagée, quand on sait qu'au-delà du juge d'instruction, plus de cinquante magistrats ont eu à connaître, en tout ou partie, de la procédure, et qu'y ont été associés fonctionnaires de police, services sociaux et experts, tous soumis à une intense pression médiatique.

Si la justice elle-même doit faire son introspection et si une mission d'inspection est d'ores et déjà diligentée à la demande du Garde des Sceaux, l'Assemblée nationale ne doit pas être absente de l'examen qui s'impose pour mettre en lumière les circonstances ayant entraîné les dysfonctionnements constatés et formuler des propositions pour éviter que ne se reproduisent de pareils errements au sein du service public de la justice.

À cet égard, on ne saurait faire l'économie d'une réflexion sur la responsabilité des magistrats, question complexe à laquelle il faut se garder de répondre à la hâte sous le coup de l'émotion, mais qui ne peut cependant être plus longtemps occultée. Il convient certainement de rechercher les conditions d'un système équilibré garantissant l'indépendance des juges tout en assurant un examen plus transparent et plus ouvert des comportements professionnels par le Conseil supérieur de la magistrature. Le temps de l'évaluation de la machine judiciaire, si longtemps retardée, est aujourd'hui venu.

Si l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires interdit la constitution des commissions d'enquête sur faits ayant donné lieu à des poursuites judiciaires et aussi longtemps que des poursuites sont en cours, il en va différemment une fois la procédure achevée.

Dans le strict respect de l'indépendance de la magistrature et sans constituer en aucune manière un troisième degré de juridiction procédant à une remise en cause de telle ou telle décision juridictionnelle, il est donc dans le rôle et les attributions de l'Assemblée nationale de mettre en place une commission d'enquête sur les dysfonctionnements de l'affaire dite d'Outreau.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

Article unique

Conformément aux articles 140 et suivants du Règlement, il est créé une commission d'enquête de trente membres chargée de rechercher les causes des dysfonctionnements de la justice dans l'affaire dite d'Outreau et de formuler des propositions pour éviter leur renouvellement.

Composé et imprimé pour l'Assemblée nationale par JOUVE
11, bd de Sébastopol, 75001 PARIS

Prix de vente : 0,75 €
ISBN : 2-11-119606-1
ISSN : 1240 - 8468

En vente à la Boutique de l'Assemblée nationale
4, rue Aristide Briand - 75007 Paris - Tél : 01 40 63 61 21

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N° 2722 - Proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête chargée de rechercher les causes des dysfonctionnements de la justice dans l'affaire dite d'Outreau et de formuler des propositions pour éviter leur renouvellement (MM. Jean-Louis Debré et Philippe Houillon)


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