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N° 3263

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 6 juillet 2006.

PROPOSITION DE LOI

tendant à réduire les risques pour la santé publique
des installations et des appareils de
téléphonie mobile,

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales,
à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais
prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

par M. Christophe MASSE

Député.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Depuis leur avènement, les téléphones mobiles (ou téléphones cellulaires) sont très populaires, en France comme à l’étranger. On comptabilise ainsi plus de 40 millions d’usagers sur le seul territoire métropolitain contre environ 30 millions en 2000.

La téléphonie mobile utilise des ondes électromagnétiques radiofréquences pour la transmission de données entre un téléphone mobile et un relais relié au réseau, la station de base. Cette technologie s’est traduite par l’implantation d’une multitude d’antennes émettrices et réceptrices sur les toits des immeubles, dans les villages et les campagnes, au mépris de l’environnement. Par ailleurs, afin de densifier le réseau et de palier la mauvaise couverture de certaines zones parfois situées dans des espaces fermés à forte concentration d’utilisateurs (gares, grands centres commerciaux, ...) de nombreuses stations de type microcellulaires (de moins de 1 W à quelques Watts) sont installées sur le territoire. Aucune déclaration n’étant prévue pour les émetteurs de moins de 1 W, certaines de ces installations ne sont donc pas recensées et l’exposition de la population à ces émetteurs est de fait mal connue.

En matière de téléphonie mobile, l’absence de réglementation contraignante a entraîné une multiplication des conflits au gré des installations d’antennes, laissant apparaître l’inquiétude des riverains face à un dossier dont l’aspect sanitaire est encore peu connu. En effet, si ce domaine fait l’objet, depuis plusieurs décennies, d’un nombre conséquent de recherches scientifiques, les résultats sont souvent contradictoires quant à l’existence ou à l’absence de risque pour la santé.

En ce qui concerne l’utilisation du téléphone mobile lui-même, bien qu’aucune preuve scientifique ne permette de démontrer qu’elle présente un risque pour la santé, cette hypothèse ne peut être définitivement exclue et les autorités sanitaires recommandent que la gestion de cette question s’inscrive dans le cadre du principe de précaution. Cette approche de précaution vise notamment les populations qui pourraient être les plus sensibles, comme les enfants, au cas où des effets sanitaires seraient avérés.

L’objet de cette proposition de loi est de prendre en compte l’ensemble des dimensions de ce dossier complexe qui pose à la fois des questions liées à l’environnement, à l’urbanisme, à la santé publique, à la démocratie citoyenne et qui concerne aussi bien les riverains d’antennes relais que les utilisateurs de téléphones mobiles.

La redéfinition des règles d’urbanisme auxquelles sont soumises les implantations des stations de base de téléphonie mobile doit permettre de sortir du registre de l’interprétation et doit veiller à ce que la voie judiciaire demeure, pour les riverains d’antennes autant que pour les élus locaux, une voie exceptionnelle.

La procédure d’autorisation administrative actuelle est manifestement insuffisante. C’est pourquoi il est proposé le retour à la voie traditionnelle du permis de construire qui deviendrait obligatoire quelle que soit la hauteur et les caractéristiques des pylônes et antennes, qu’il s’agisse d’une nouvelle installation et de la modification d’un site existant.

La question de santé publique est sans doute l’aspect le plus sensible de ce dossier et celui qui nécessite les mesures les plus urgentes. De nombreux riverains d’antennes relais se plaignent de problèmes de santé apparus au moment de leur implantation à proximité de leur domicile ou de leur lieu de travail ; des parents s’inquiètent de voir des antennes relais implantées à proximité de l’école ou de la crèche de leurs enfants.

Les contestations des riverains deviennent de plus en plus nombreuses laissant souvent les maires en première ligne sans leur fournir les outils réglementaires pour intervenir utilement. Chaque élu local se trouve contraint d’agir en fonction de sa conscience, de l’état de ses connaissances, les choix émis se traduisant, de fait, par une inégalité de traitement pour les citoyens.

Il est de la responsabilité des élus de la nation de ne pas attendre les certitudes scientifiques pour prendre des mesures de protection des populations, comme nous y invite la charte sur l’environnement, inscrite dans notre Constitution, qui précise dans son article 1 : « Chacun a le droit de vivre dans un environnement équilibré et favorable à sa santé ».

Il ne s’agit pas de stigmatiser la téléphonie mobile mais d’éviter que son développement incontrôlé, ajouté à l’insuffisance de sa réglementation et de l’information de ses usagers, en fasse le prochain grand problème de santé publique.

Tel est l’objet de la proposition de loi que nous vous proposons d’adopter.

PROPOSITION DE LOI

TITRE Ier

DE LA LIMITATION
DES ÉMISSIONS ÉLECTROMAGNÉTIQUES

Article 1er

Le niveau maximal d’exposition du public aux champs électromagnétiques émis par les équipements utilisés dans les réseaux de télécommunication, ou par les installations radioélectriques, est fixé à 0,6 volt par mètre.

TITRE II

DES ANTENNES-RELAIS DE TÉLÉPHONIE MOBILE

Article 2

Il est interdit d’installer des équipements mentionnés à l’article 1er à moins de 300 mètres d’un bâtiment d’habitation ou d’un établissement sensible. Par dérogation et en zone urbaine, il est interdit de les installer à moins de 100 mètres d’un établissement sensible. Les bâtiments réputés sensibles sont les établissements d’enseignement et périscolaires, les structures accueillant des enfants n’ayant pas atteint l’âge de la scolarité obligatoire, les établissements hospitaliers et les structures d’accueil de personnes âgées.

Article 3

Toute nouvelle application technologique ayant pour conséquence l’émission de rayonnements non ionisants, doit faire l’objet d’une étude d’impact sur la santé humaine et sur l’environnement, préalablement à sa mise en œuvre.

Article 4

L’impact sur la santé humaine et sur l’environnement des équipements du réseau de télécommunication mobile dit de troisième génération (UMTS), fera l’objet d’un rapport remis au Parlement, après trois années d’exploitation.

Article 5

Les études mentionnées aux articles précédents sont effectuées par des équipes scientifiques indépendantes des entreprises intéressées à la mise en œuvre de ces nouvelles technologies, ce qui impose pour les membres de ces équipes, l’absence de réalisation d’études ou de missions, dans un délai inférieur à 10 ans, dans le cadre de contrats financés partiellement ou totalement par l’une au moins desdites entreprises, ainsi que l’absence de participation, dans le même délai, à des opérations de communication financées de la même manière.

Article 6

L’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement est saisie par le maire ou un professionnel de santé, après avis des commissions compétentes mentionnées à l’article 9, lorsque des nuisances ou des pathologies, susceptibles d’être liées au fonctionnement des équipements mentionnés à l’article 1er, sont constatées.

Article 7

L’Agence nationale des fréquences rend publique et fournit annuellement à chaque maire, une carte de sa commune comportant la mention des emplacements et des champs d’émission des équipements visés à l’article 1er. Cette carte est accompagnée d’une annexe précisant la date d’installation, les caractéristiques techniques et physiques des équipements, ainsi que la date du plus récent contrôle technique opéré.

Article 8

Les communes, ou le cas échéant leurs groupements, définissent le ou les périmètres dans lesquels l’installation des équipements mentionnés à l’article 1er est autorisée. Cette définition est précédée d’une consultation de la population, des associations de protection de l’environnement et des commissions mentionnées à l’article 9. Cette définition fait l’objet d’une révision, selon les mêmes modalités, au minimum tous les trois ans.

Article 9

Des commissions de suivi sont mises en place au niveau communal ou intercommunal et au niveau départemental. Elles comprennent obligatoirement des élus des collectivités concernées, des représentants des exploitants des réseaux, des représentants des administrations concernées, des représentants des associations de protection de l’environnement ou de la santé. Ces commissions ont pour mission de suivre et d’évaluer la mise en œuvre de la réglementation relative aux équipements mentionnés à l’article 1er, de prescrire et de dresser le bilan de campagnes annuelles de mesure de l’intensité des ondes électromagnétiques dans les locaux mentionnés à l’article 2. Leurs rapports et avis sont présentés aux assemblées délibérantes de la collectivité ou du groupement de communes dont elles relèvent.

Article 10

Préalablement à toute installation ou modification d’un équipement mentionné à l’article 1er sur un immeuble d’habitation à usage locatif, les locataires sont consultés par écrit sur le projet. Le défaut de consultation emporte la nullité du bail conclu entre le ou les propriétaires de l’immeuble et l’exploitant du réseau.

Article 11

Toute implantation d’un équipement mentionné à l’article 1er est assujettie à l’obtention d’un permis de construire.

Article 12

La durée du bail relatif à un équipement mentionné à l’article 1er ne peut excéder trois années renouvelables. Le bail doit préciser l’emplacement précis dudit équipement, ainsi que ses caractéristiques techniques et physiques.

Article 13

Dans les immeubles soumis au régime de la copropriété, la décision de conclure de renouveler ou de modifier un bail relatif à un équipement mentionné à l’article 1er est soumise à la règle de l’unanimité.

Article 14

La présence d’un équipement mentionné à l’article 1er sur un immeuble doit être mentionnée, à l’initiative du propriétaire, en cas de vente ou de location de tout ou partie de l’immeuble.

TITRE III

DES APPAREILS DE TÉLÉPHONIE MOBILE

Article 15

Le débit d’absorption spécifique (DAS) et une mention claire et visible incitant l’utilisateur à limiter la durée d’utilisation de l’appareil pour des motifs sanitaires, sont obligatoirement inscrits en langue française, sur tous les appareils de téléphonie mobile proposés à la vente.

Article 16

Les pblicités, notices d’utilisation et emballages des appareils de téléphonie mobile doivent comporter une information claire et visible concernant les risques liés à un usage intensif.

Article 17

Toute publicité mentionnant un usage déconseillé ou prohibé des appareils de téléphonie mobile est interdite.

Article 18

Les ministères chargés de l’éducation nationale et de la santé organisent annuellement des campagnes d’information sur les risques sanitaires liés à l’usage des appareils de téléphonie mobile, en particulier par les enfants.

Article 19

L’utilisation des appareils de téléphonie mobile est interdite aux élèves dans les établissements d’enseignement du premier et du second degré.

Article 20

Il est interdit de fabriquer, d’importer ou de proposer à la vente des appareils de téléphonie mobile spécifiquement conçus ou adaptés pour de jeunes enfants.

Composé et imprimé pour l’Assemblée nationale par JOUVE
11, bd de Sébastopol, 75001 PARIS

Prix de vente : 0,75 €
ISBN : 2-11-121396-9
ISSN : 1240 – 8468

En vente à la Boutique de l'Assemblée nationale
4, rue Aristide Briand - 75007 Paris - Tél : 01 40 63 61 21

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N° 3263 - Proposition de loi tendant à réduire les risques pour la santé publique des installations et des appareils de téléphonie mobile (M. Christophe Masse)


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