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N° 328

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 23 octobre 2002.

RAPPORT D'INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l'article 145 du Règlement

PAR LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES

sur l'entretien des matériels des armées

et présenté

PAR M. Gilbert MEYER,

Député

--

Défense.

S O M M A I R E

_____

Pages

INTRODUCTION 5

I. - UN NIVEAU DE DISPONIBILITÉ DES MATÉRIELS INSATISFAISANT 7

A. UNE SITUATION CONTRASTÉE SELON LES ARMÉES ET LE TYPE D'ÉQUIPEMENTS 7

1. L'armée de terre 7

a) Le cas des blindés de l'armée de terre 7

b) Les difficultés rencontrées par l'aviation légère de l'armée de terre (ALAT) 9

2. L'armée de l'air 10

a) Un niveau de disponibilité globale qui cache des disparités parfois ponctuelles, parfois structurelles 10

b) L'influence de paramètres sur lesquels il n'est pas toujours possible d'avoir prise 12

3. La marine nationale 12

a) Un phénomène qui touche l'ensemble des catégories de matériels 13

b) Des capacités primordiales qui restent malgré tout préservées 15

B. DES CONSÉQUENCES OPÉRATIONNELLES ET HUMAINES FÂCHEUSES 15

1. Une situation qui contribue à la dévalorisation du cadre de travail de militaires professionnels 15

2. Sur le fil d'une rupture capacitaire 16

II. - LA CONCILIATION DE PLUS EN 40959"> 19

b) Les crédits alloués à chaque armée 20

2. L'impact des mesures de régulation budgétaire 21

a) Le problème des rechanges 22

b) L'allongement des délais de réparation 23

B. LES EFFETS INDIRECTS D'UN NIVEAU DE CRÉDITS D'INVESTISSEMENT INSUFFISANT 24

1. L'entretien, victime d'un titre V contraint ? 25

2. Les conséquences de l'étalement des programmes d'armements neufs sur la charge de maintenance 26

3. Le vieillissement des matériels, corollaire d'une absence de renouvellement et source de surcoûts d'entretien 27

III. - LA NÉCESSITÉ DE RÉTABLIR UN NIVEAU DE DISPONIBILITÉ DES MATÉRIELS QUI SOIT PLUS CONFORME AUX EXIGENCES OPÉRATIONNELLES 31

A. LES AMÉLIORATIONS BUDGÉTAIRES ENVISAGEABLES 31

1. Relever le niveau des crédits consacrés à l'EPM 31

a) Faut-il maintenir l'imputation de ces dépenses sur le titre V ? 32

b) Un effort indispensable, mais qui ne doit pas pénaliser les acquisitions de matériels neufs 33

2. Adopter une logique de coûts de possession et ne plus raisonner en coûts d'acquisition 35

3. Faut-il envisager des modes de financement nouveaux ? 36

B. LES RÉFORMES DU PROCESSUS INDUSTRIEL À POURSUIVRE OU À ENGAGER 38

1. Continuer à restructurer le mode de gestion de l'entretien des matériels 38

a) L'utilité avérée de la structure intégrée de maintien en condition opérationnelle des matériels aériens du ministère de la défense (SIMMAD) et du service de soutien de la flotte (SSF) 38

b) Vers la mise en place d'une structure équivalente pour l'armée de terre ? 40

2. Recourir davantage à l'externalisation des tâches de maintenance 41

a) Un recours qui se heurte à certaines limites 42

b) Des avantages réels 43

SYNTHÈSE 45

EXAMEN EN COMMISSION 49

ANNEXES 53

1). Le Premier ministre rappelait ainsi l'engagement du Président de la République sur cette question majeure.

Soucieuse d'être éclairée avant que le débat sur ce texte important et attendu ne commence, la commission de la défense nationale et des forces armées a décidé, le 23 juillet, que soit rapidement conduite une sorte d'audit préliminaire sur l'état de l'entretien des matériels. Certes, quelques rapports parlementaires avaient déjà attiré l'attention sur la situation de tel type d'armement (2) ou de telle armée (3), mais aucun jusqu'à présent n'avait mis en perspective la question de la maintenance sous un angle interarmées.

Le présent rapport d'information, qui est le résultat de nombreuses auditions de responsables des états-majors, des organismes chargés de superviser les opérations de maintenance et d'entreprises d'armement (4), dresse un état des lieux général qui se veut objectif. Le rapporteur a également tenu à associer à ses entretiens quelques officiers proches du terrain, anciens chefs de corps ou commandants d'unités qui ont concrètement eu à faire face aux problèmes d'entretien.

Au terme de trois mois de travaux, il apparaît que la disponibilité technique opérationnelle (DTO) des équipements de toutes les armées reste insatisfaisante, même si l'appréciation mérite d'être nuancée selon les matériels considérés. Jusqu'à présent, les forces ont pu remplir correctement leurs missions, et ce malgré un contexte international très exigeant, la participation des armées à l'intervention anti-terroriste en Asie centrale s'étant ajoutée à une mobilisation toujours forte dans les Balkans et en Afrique. Pour autant, il est permis de penser qu'une certaine limite est désormais atteinte et que, faute d'une prise du problème à bras le corps comme s'y est engagé le Gouvernement, les armées pourraient ne plus être en mesure d'assurer matériellement la totalité des missions qui leurs sont assignées.

En outre, les incidences d'un entretien insuffisant ne sont pas uniquement d'ordre capacitaire, dans la mesure où les équipements sont également un outil de travail pour des soldats devenus professionnels, voire, pour les marins, un lieu de vie. A l'heure où il est question de consolider la professionnalisation des armées, il convient donc de réfléchir à l'impact des conditions de maintenance sur la fidélisation des recrues. Des améliorations sensibles en ce domaine semblent de nature à participer à la revalorisation de la condition militaire, qui est au c_ur des aspirations des personnels.

Le problème a indéniablement une dimension budgétaire. Au cours de l'exécution de la loi de programmation militaire 1997-2002, l'imputation des crédits d'entretien programmé des matériels (EPM) a progressivement été transférée du titre III au titre V du budget du ministère de la défense ; ces dotations ont donc subi de plein f extérieures (OPEX), a accéléré le vieillissement des armements existants. Ce double effet a amplifié la détérioration du niveau de disponibilité des matériels.

Pour rétablir un niveau de DTO plus satisfaisant, la solution passe par une revalorisation significative du montant des crédits consacrés au MCO et, plus généralement, aux programmes d'équipement des armées. Néanmoins, quelques économies sont sans doute possibles du côté du processus industriel de la maintenance. Dans ce domaine comme dans d'autres, quelques suggestions méritent d'être envisagées.

En définitive, le présent rapport d'information poursuit trois ambitions : mettre en lumière la réalité de l'état de la maintenance des matériels, expliquer les raisons de cette situation et formuler des propositions susceptibles de nourrir le débat parlementaire qui aura très prochainement lieu au sujet du nouveau projet de loi de programmation militaire, adopté en conseil des ministres le 11 septembre 2002.

I. - UN NIVEAU DE DISPONIBILITÉ DES MATÉRIELS INSATISFAISANT

La disponibilité opérationnelle des matériels conditionne à plus d'un titre l'efficacité des forces. Or, les principaux intéressés en conviennent eux-mêmes, l'entretien des matériels n'est actuellement pas satisfaisant. Une telle situation est d'autant plus préoccupante qu'elle a de sérieuses répercussions sur la motivation des personnels et les capacités opérationnelles des armées.

A. UNE SITUATION CONTRASTÉE SELON LES ARMÉES ET LE TYPE D'ÉQUIPEMENTS

Lors de son audition par la commission de la défense, le 23 juillet 2002, le chef d'état-major des armées en exercice, le général Jean-Pierre Kelche, a souligné que les problèmes de disponibilité des matériels sont assez différents selon les armées. En fait, les difficultés techniques liées à la mise en _uvre et au soutien logistique d'équipements aussi variés que des chars, des avions de chasse ou des sous-marins, contribuent pour une large part à expliquer ces disparités. D'autres facteurs, d'ordre industriel ou conjoncturels, interviennent également. Sur le fond, les taux de disponibilité moyens sont dans tous les cas insuffisants au regard des objectifs fixés.

1. L'armée de terre

La DTO est le rapport, exprimé en pourcentage, entre le nombre de matériels qui ont la capacité d'assurer les fonctions opérationnelles pour lesquelles ils ont été conçus et le nombre de matériels en service. Les engins en entretien périodique ou en cours de remise à niveau sont donc considérés comme indisponibles.

Jusqu'au milieu des années 1990, le contexte géostratégique exigeait de disposer d'une DTO de 100 % pour tous les parcs de matériels majeurs. En 1996, l'évolution de ce contexte et la baisse corrélative des ressources budgétaires consacrées à l'entretien des matériels ont conduit l'armée de terre à limiter la DTO des parcs majeurs à 80 % pour les matériels terrestres et à 70 % pour les mat& marchés) ;

- des réorganisations lourdes intervenues en 1999 dans la plupart des unités et des bases de matériel ;

- du manque de personnels civils qualifiés, dont beaucoup sont employés dans les établissements du matériel et dont trop de postes restent vacants ;

- de l'utilisation intensive des matériels, notamment en opérations extérieures (Balkans) ;

- de l'âge important de certains équipements, pour lesquels des rénovations sont en cours ou prévues.

Aujourd'hui, la situation reste globalement satisfaisante sur les théâtres extérieurs et outre-mer, en raison de la priorité accordée au soutien des matériels qui y sont déployés. Cependant, la faible disponibilité des armements utilisés en métropole ne s'est pas améliorée par rapport à 1997, comme l'illustre le tableau suivant.

ÉVOLUTION DE LA DTO DES MATÉRIELS MAJEURS
DE L'ARMÉE DE TERRE DE 1997 À 2002

PARCS

1997

1998

1999

2000

2001

2002(1)

VAB tous types

82 %

84 %

83 %

72 %

76 %

72 %

ERC 90

83 %

77 %

60 %

61 %

68 %

75,5 %

AMX 10RC

84 %

74 %

68 %

57 %

46 %

62 %

AMX 30 B2

78 %

81 %

70 %

65 %

60 %

68 %

LECLERC (tranches 3 à 5)

-

-

-

-

35 %

59 %

LECLERC (tranches 6 et 7)

-

-

-

-

31 %

65 %

TRF1

84 %

73 %

52 %

66 %

77 %

83 %

AMX 30 AUF1

72 %

71 %

62 %

67 %

51 %

57 %

LRM

88 %

73 %

75 %

67 %

81 %

39 %

ROLAND

72 %

70 %

68 %

76 %

60 %

51,5 %

(1) Sur la base des chiffres du premier semestre seulement.

Source : ministère de la défense.

Ces dernières années, deux parcs de matériels blindés, le char lourd Leclerc et le blindé léger de reconnaissance AMX 10 RC, ont connu une situation particulière en matière de disponibilité.

Pour ce qui concerne les chars Leclerc, le faible niveau de disponibilité constaté jusqu'alors s'expliquait par diverses mises au point, tant de l'équipement que des personnels. La mise en conformité des premiers exemplaires construits au cours des années 1990 avec les derniers standards devrait se répercuter de manière très significative sur la disponibilité globale du parc, puisque le taux de disponibilité devrait atteindre 62 % cette année, contre 33 % l'an passé. Cette situation ne correspond qu'à la montée en puissance du parc et ne traduit en aucune façon une mauvaise fiabilité du matériel, comme le montre la disponibilité des Leclerc déployés au Kosovo, de l'ordre de 95 %.

Le parc des AMX 10 RC a été affecté par des difficultés d'approvisionnement sur certaines pièces de rechange critiques, ainsi que par le lancement d'une vaste opération de modernisation nécessitant une immobilisation des blindés.

Nonobstant ces deux cas particuliers, les taux de disponibilité des matériels sont, d'une manière générale, en diminution par rapport à 1997 : le véhicule de l'avant blindé (VAB) est passé d'une disponibilité de 82 % à 72 %, l'engin blindé roues-canon (ERC) 90 « Sagaie » de 83 % à 75,5 %. La disponibilité des chars de combat à chenilles AMX 30 B2 a également diminué de plus de dix points, à 68 %, à l'instar du canon d'artillerie classique AU F1 à 57 %. Dans tous les cas, les années 2000-2001 ont représenté le point bas du niveau de disponibilité de ces matériels.

b) Les difficultés rencontrées par l'aviation légère de l'armée de terre (ALAT)

Dans un rapport d'information publié le 10 juillet 2002, M. Serge Vinçon, sénateur, a exposé de manière claire et précise les difficultés de l'aviation légère de cette armée (ALAT). Il a mis en exergue que « la situation des hélicoptères est particulièrement critique »  (5). De fait, le tableau suivant illustre parfaitement ce constat.

ÉVOLUTION DE LA DTO DES HÉLICOPTÈRES
DE L'ARMÉE DE TERRE DE 1997 À 2002

PARCS

1997

1998

1999

2000

2001

2002(1)

GAZELLE

80 %

77 %

62 %

62 %

61 %

46 %

PUMA

67 %

66 %

59 %

53 %

62 %

67 %

COUGAR

62 %

48 %

47 %

54 %

62 %

60 %

(1) Sur la base des chiffres du premier semestre seulement.

Source : ministère de la défense.

Pour ce qui concerne les hélicoptères de combat Gazelle, la dégradation du niveau de disponibilité s'est stabilisée en 2000, avant d'atteindre, à l'été 2001, le taux de 74 %, qui constitue la norme depuis le changement de contexte géostratégique dans les années 1990. Cependant, le parc a été affecté d'une chute brutale de disponibilité à l'automne 2001, en raison d'un problème de corrosion constaté sur une pièce de la tête de rotor, le faisceau torsique. Deux accidents s'étant produits sur des appareils du même type à l'étranger, l'ensemble des Gazelle a fait l'objet d'une révision, ce qui a affecté le niveau de disponibilité de la totalité de ces matériels : celle-ci est descendue à 41 % au cours du premier semestre de l'année 2002. La situation devrait se redresser progressivement, grâce à l'arrivée des pièces nécessaires aux réparations. D'ici quelques mois, il y a tout lieu de penser que le taux de disponibilité des Gazelle retrouvera un niveau plus conforme aux objectifs fixés par l'état-major de l'armée de terre.

En revanche, il en va tout autrement des hélicoptères de man_uvre et de transport Puma et Cougar, dont le niveau de DTO n'a jamais atteint les objectifs de 70 % depuis 1997. Leurs taux de disponibilité respectifs sont de 67 %, ce qui peut paraître acceptable, et 60 %, ce qui reste insuffisant ; cependant, en se limitant aux hélicoptères réellement aptes pour les missions ou l'entraînement au-delà d'une certaine durée, le taux réel de disponibilité se situe plutôt en-dessous de 50 %. Malgré un gros effort engagé pour rétablir les pleines capacités opérationnelles de ces appareils, il sera difficile de retrouver rapidement un niveau de disponibilité satisfaisant, ne serait-ce qu'en raison de la sollicitation très importante des matériels qui sont en mesure de voler, afin de concilier les exigences opérationnelles et le besoin d'entraînement des équipages.

2. L'armée de l'air

La disponibilité des appareils de l'armée de l'air s'entend comme la possibilité pour ces matériels d'être mis en vol dans un délai inférieur à 6 heures si les pièces sont disponibles. Ces dernières années, l'indisponibilité moyenne des appareils a augmenté, même si la qualification opérationnelle des pilotes et des avions reste conforme aux exigences d'interopérabilité et d'intervention en coalition, comme l'a démontré la participation de Mirage 2000-D aux bombardements alliés contre des positions d'Al Qaïda au-dessus de Gardez, du 2 au 18 mars 2002.

La disponibilité des appareils de l'armée de l'air est analysée au travers de deux types d'indicateurs qui sont d'ailleurs en grande partie identiques pour l'armée de terre et la marine :

- l'indicateur de disponibilité des flottes, qui mesure la capacité instantanée des forces à mener leur activité d'entraînement. Il est é appareils de l'armée de l'air française reste convenable. Cependant, les chiffres reflètent une certaine dégradation des capacités d'emploi, puisque le taux moyen de disponibilité des appareils de l'armée de l'air est passé de 77 %, en 1996, à 66 %, en 1998. Depuis lors, la situation est stabilisée, car ce taux se situait à 67 % en 2001.

De fait, la disponibilité des flottes est contrastée : les flottes d'avions de combat (à l'exception des Mirage 2000, affectés par des problèmes techniques conjoncturels) et d'appareils de complément tendent à se rapprocher des objectifs définis par l'état-major (67 % en 2002 et 75 % pour 2003) ; en revanche, les flottes d'hélicoptères, d'avions de transport et d'aéronefs écoles rencontrent des difficultés à rétablir durablement leur niveau de disponibilité et à effectuer leur missions. La tendance est à la hausse, la cible de 67 % sera atteinte en 2002, sous réserve de résoudre les difficultés techniques aujourd'hui rencontrées sur certaines flottes. Il conviendra pour l'ensemble des acteurs de poursuivre les efforts, afin de garantir des effets durables.

ÉVOLUTION DE LA DISPONIBILITÉ DES MATÉRIELS MAJEURS
DE L'ARMÉE DE L'AIR, DE 1997 À 2002

PARCS

1997

1998

1999

2000

2001

2002 (1)

Mirage 2000 N

66 %

67 %

61 %

58 %

63 %

57 %

Mirage 2000 D

67 %

64 %

72 %

67 %

63 %

55 %

Mirage 2000 C

71 %

66 %

69 %

66 %

68 %

65 %

Mirage 2000-5 F

-

-

64 %

66 %

68 %

57 %

Mirage F1 CR

72 %

65 %

61 %

63 %

60 %

67 %

Mirage F1 CT

71 %

69 %

60 %

59 %

51 %

61 %

Jaguar A

71 %

70 %

69 %

71 %

69 %

77 %

C 160 Transall

69 %

66 %

58 %

53 %

56 %

55 %

C 130

61 %

67 %

68 %

64 %

65 %

65 %

KC 135

58 %

71 %

68 %

62 %

79 %

74 %

CN 235

75 %

74 %

66 %

68 %

61 %

62 %

Alpha-jet

72 %

68 %

65 %

60 %

50 %

57 %

Epsilon

72 %

59 %

72 %

53 %

40 %

56 %

(1) Sur la base des chiffres du premier semestre uniquement.

Source : ministère de la défense.

A partir de ce constat, une analyse détaillée fait apparaître certaines difficultés récurrentes : au titre des phénomènes désormais bien connus, figure le vieillissement d'une partie de la flotte aérienne de transport. Ainsi, la disponibilité des C 160 Transall continue de diminuer inexorablement, même lorsque les crédits consacrés à leur entretien augmentent. Le taux de disponibilité de ces appareils s'élevait à plus de 69 % en 1997, pour un coût d'entretien avoisinant 120 millions d'euros. Il plafonne désormais à 55 %, alors même que le montant des crédits consacrés à sa maintenance a augmenté de près de 60 millions d'euros.

Certains cas sont plus surprenants, à l'exemple des Mirage 2000. Leur taux global de disponibilité est en effet passé de 64,9 %, en décembre 2001, à 52,2 %, en juin 2002, alors que la cible pour fin 2002 s'établit à 67 %, comme pour l'ensemble des flottes. Pour parer à cette situation lors de ses engagements opérationnels (déploiements ou exercices internationaux, par exemple), l'armée de l'air est donc contrainte de prélever des pièces sur le parc stationné en métropole, à savoir dans les unités elles-mêmes et sur les aéronefs stockés en réserve.

Dans l'ensemble, les appareils de la famille des Mirage (à l'exception temporaire des Mirage 2000) présentent un niveau de disponibilité technique opérationnelle acceptable ; la flotte de Jaguar a elle aussi un niveau de disponibilité élevé, de l'ordre de 84 %. Il en va de même des avions de transport (C 130 et ravitailleurs KC 135). Pour les C 130, les difficultés sont liées au changement de prestataire de la maintenance et la période transitoire durera quelques mois. Pour la flotte de C 135 et KC 135, l'objectif de disponibilité est atteint, mais de meilleures performances sont espérées, car les délais de réparation et d'entretien restent peu conformes aux délais contractuellement fixés avec les industriels. Enfin, la flotte de Transall, dont le désarmement partiel interviendra à partir de 2005, constitue un réel souci. Pour preuve que la situation globale des matériels de l'armée de l'air n'est pas encore très grave, on observera que chaque pilote a pu effectuer l'année passée 180 heures de vol (200 heures pour les pilotes engagés en OPEX), ce qui constitue le standard de l'Organisation du traité de l'atlantique nord (OTAN).

b) L'influence de paramètres sur lesquels il n'est pas toujours possible d'avoir prise

Certaines des contraintes affectant la disponibilité des appareils de l'armée de l'air sont difficilement maîtrisables. C'est le cas notamment des aléas techniques, qui sont par nature imprévisibles et qui imposent des mesures de précaution très pénalisantes pour l'activité des personnels.

Ce dernier aspect explique une partie des problèmes rencontrés récemment sur les parcs de Mirage F1 (avarie moteur 9 K 50 et ce qui concerne les Mirage 2000, la détection d'un problème sur le moteur de ces appareils a incité l'état-major à ordonner le remplacement d'une pièce sur l'ensemble du parc, initiative qui s'est traduite par une baisse de disponibilité de ces matériels : en effet, à un certain moment, jusqu'à 80 Mirage 2000 ne disposaient plus de leur moteur pour cause de révision et par manque de rechanges en provenance de l'industriel. Un tel problème était difficile à prévoir. Ces difficultés sont en voie de résolution, mais il faudra plusieurs mois pour régénérer le potentiel et améliorer la disponibilité, malgré les mesures lancées pour optimiser l'emploi du personnel mécanicien qualifié.

Il s'agit d'aléas aux effets statistiques significatifs et sur lesquels il est difficile d'agir. En temps de paix, aucune dérogation technique pouvant réduire le niveau de sécurité n'est acceptable. Toutefois, en cas d'opérations réelles majeures, le commandement déciderait d'assurer en priorité le contrat opérationnel prescrit.

3. La marine nationale

Par définition, un bâtiment de la marine nationale est considéré comme indisponible s'il subit une opération d'entretien programmée, si l'état de certaines de ses installations ne lui permet pas d'effectuer sa mission principale, s'il a subi une avarie accidentelle, ou plus rarement si le quota de personnel de bord n'est pas atteint.

Comme les autres armées, la marine doit faire face à une diminution de la disponibilité globale de ses matériels. Sur l'année 2001 et le premier semestre 2002, celle-ci se situe aux environs de 56 %, ce qui constitue un seuil très bas au regard de l'objectif initialement fixé, lors de la professionnalisation, à 80 %. A titre de comparaison, le taux moyen de disponibilité opérationnelle de la flotte en 1990 avoisinait les 66 %, ce chiffre répondant alors à des critères beaucoup plus rigoureux puisqu'il reflétait des exigences plus strictes ; aujourd'hui, les bâtiments sont considérés comme disponibles même si certains équipements majeurs non indispensables pour la mission à effectuer ne sont pas opérationnels.

a) Un phénomène qui touche l'ensemble des catégories de matériels

Avec 66 unités de combat, auxquelles s'ajoutent notamment des bâtiments de soutien, tels les pétroliers ravitailleurs ou les bâtiments de soutien logistique, des patrouilleurs de service public ainsi que des remorqueurs, les navires de surface constituent la grande majorité, en nombre, des unités de la marine. La disponibilité de la plupart de ces bâtiments, quelle que soit leur fonction opérationnelle, ne cesse de se dégrader depuis plusieurs années. Le phénomène affecte autant les bâtiments de combat ayant vocation à intégrer un groupe aéronaval ou amphibie que des bateaux de moindre importance.

Si le cas du porte-avions n'est pas statistiquement le plus probant, étant donné que la France ne possède qu'un bâtiment de ce type, récemment mis en service, il n'en va pas de même pour les frégates anti-sous-marines, les avisos ou les chasseurs de mines, dont les niveaux de disponibilité son phénomène est un peu moins prononcé, il est vrai, au sein de l'escadrille des sous-marins nucléaires lanceurs d'engins (SNLE) (6), mais, pour ce qui concerne les sous-marins nucléaires d'attaque (SNA), les chiffres des six premiers mois de cette année font état d'un niveau de disponibilité inférieur aux objectifs. Cette tendance, nouvelle pour les sous-marins, semble devoir s'accentuer, compte tenu de la lourdeur des opérations de maintenance et de l'organisation de la chaîne d'entretien en flux tendus. A Brest, les installations de l'Ile Longue sont âgées de trente ans et justifieraient des investissements supplémentaires en vue de leur modernisation.

ÉVOLUTION DE LA DISPONIBILITÉ DES PRINCIPAUX BÂTIMENTS
DE LA MARINE, DE 1997 À 2002

PARCS

1997

1998

1999

2000

2001

2002(1)

Porte-avions

64,5 %

(2)

61,3 %

-

44,0 %

89,0 %

Porte-hélicoptères

58,0 %

18,0 %

75,0 %

55,0 %

75,0 %

65,0 %

Transports de chalands de débarquement

85,1 %

94,2 %

50,0 %

37,8 %

67,8 %

54,3 %

Frégates lance-missiles et antiaériennes

78,9 %

47,6%

34,1 %

53,0 %

35,1 %

40,4 %

Frégates anti-sous-marines

74,1 %

81,8 %

64,2 %

56,3 %

61,5 %

51,9 %

Frégates La Fayette

87,2 %

89,1 %

57,8 %

68,8%

76,9 %

71,1%

Avisos A 69

88,6 %

90,4 %

82,8 %

76,3 %

81,1 %

59,2 %

Chasseurs de mines

86,4 %

83 %

95 %

81,1 % (3)

43,3  %

52,2 %

Pétroliers-ravitailleurs

77,7 %

76,9 %

85,5 %

80,2 %

82,2 %

85,1 %

Sous-marins nucléaires d'attaque

69,9 %

68,9 %

49,0 %

42,7 %

34,9 %

38,8 %

(1) Sur la base des chiffres du premier semestre uniquement, sauf pour le porte-avions (calcul jusqu'au 2 septembre inclus).

(2) Retrait du service actif du Foch ; les années suivantes présentent les taux de disponibilité du porte-avions nucléaire Charles de Gaulle, admis au service actif, après plusieurs modifications en cale sèche, le 18 mai 2001.

(3) Chiffres portant sur 9 mois seulement.

Source : ministère de la défense.

La situation de l'aviation embarquée, grâce à l'entretien conjoint des appareils avec ceux de l'armée de l'air, apparaît moins délicate, dans la mesure où la disponibilité des appareils de combat semble se stabiliser. Les avions Super Etendard modernisés du groupe aéronaval présentent un taux de disponibilité plus que correct, compte tenu de leur âge avancé et de leur utilisation intensive ces dernières années, lors du conflit du Kosovo et en Afghanistan. Cependant, comme l'armée de terre, la marine rencontre de réelles difficultés dans le soutien de ses hélicoptères, notamment les Lynx.

ÉVOLUTION DE LA DISPONIBILITÉ DES MATÉRIELS AÉRIENS
DE LA MARINE, DE 1997 À 2002

PARCS

1997

1998

1999

2000

2001

2002(1)

Super Etendard modernisés

65,0 %

70,0 %

70,0 %

60,0 %

61,0 %

64,0 %

Atlantique 2

70,0 %

70,0 %

65,0 %

62,0 %

66,0  %

60,0 %

Lynx

74,0 %

69,0 %

57,0 %

48,0 %

52,0 %

53,0 %

Panther

69,0 %

74,0 %

71,0 %

66,0 %

56,0 %

61,0 %

(1) Sur la base des chiffres du premier semestre uniquement.

Source : ministère de la défense.

Actuellement, la disponibilité des matériels de la marine se situe à son niveau plancher ; elle devrait s'améliorer rapidement pour ce qui concerne les matériels aériens, alors que cette évolution pourrait être un peu plus lente pour les bâtiments de la flotte. Le processus de modernisation de la définition et du suivi des réparations au sein même de la marine est plus récent et la mutation de l'organisation industrielle chargée de ce soutien (l'ancienne direction des constructions navales - DCN) ne rend pas les choses aisées.

b) Des capacités primordiales qui restent malgré tout préservées

L'engagement de nombreux bâtiments de la marine (33 unités au total, entre décembre 2001 et juin 2002) dans les opérations antiterroristes en mer d'Arabie démontre que la réactivité de cette armée et sa capacité à mobiliser son potentiel de combat ne sont pas vraiment altérées par les difficultés rencontrées dans l'entretien des bâtiments.

Il est vrai que les problèmes de maintenance les plus mal ressentis par les équipages affectent peu les équipements indispensables pour permettre à la flotte de naviguer : au pire, le potentiel des bâtiments s'en trouve parfois amoindri, mais, dans l'ensemble, il n'est jamais fait impasse sur les conditions essentielles à la sécurité des personnels.

En outre, la force océanique stratégique (FOST), l'un des deux piliers de la dissuasion nucléaire avec la composante aéroportée, continue de remplir son contrat, qui consiste à assurer la permanence de cette dissuasion en déployant si nécessaire deux SNLE en patrouille en mer. Jusqu'à présent, l'accomplissement de cette mission fondamentale n'a jamais été empêché par des raisons de maintenance, ne serait-ce que parce que la marine y a affecté les crédits nécessaires, parfois au détriment de l'entretien des autres bâtiments.

En définitive, le déroulement de l'activité opérationnelle programmée de la flotte est de plus en plus souvent ajusté en fonction des impératifs d'entretien et, le cas échéant, des urgences ; il s'agit d'une évolution parfois mal acceptée par les équipages, habitués à un respect plus scrupuleux des cycles d'indisponibilité des bâtiments. Pourtant, tant les personnels que les autorités qui ont recours aux moyens de la marine doivent accepter une certaine hiérarchisation des priorités qui n'avait pas cours auparavant ; à l'exception de la flotte de SNLE, les avaries importantes ne peuvent plus désormais être systématiquement réparées de manière immédiate.

B. DES CONSÉQUENCES OPÉRATIONNELLES ET HUMAINES FÂCHEUSES

Si la disponibilité des matériels est variable selon les armées et le type d'équipement, la situation globale emporte des conséquences dommageables, d'un point de vue tant humain que matériel : la condition mil nécessaires suscitent un sentiment d'impuissance et de découragement dont les effets sont très négatifs.

Cette sensibilité des personnels à l'état général de leurs matériels est sans doute plus manifeste au sein de la marine, ne serait-ce que parce que les bâtiments constituent aussi un lieu de vie, le plus souvent exigü. En outre, cet état de fait est accentué par la participation directe des équipages à la maintenance quotidienne des bâtiments. Cette tâche absorbante est devenue plus fastidieuse du fait de la dégradation générale du cycle de l'entretien programmé. Les personnels à bord assument de façon croissante le rôle de cadres intermédiaires, surveillant et orientant le travail des équipes d'ouvriers chargées d'intervenir sur les bâtiments, alors qu'ils ne devraient pas effectuer cette tâche. Du fait de la réduction des effectifs, la charge de travail de maintenance de chacun a été considérablement accrue, ce qui suscite de forts mécontentements, nés du sentiment de supporter des charges indues.

En définitive, la dégradation de l'entretien des matériels contribue à susciter une certaine frustration parmi les soldats du rang : d'aucuns décident de s'engager dans l'une des trois armées en souhaitant manier des équipements performants, afin d'exploiter leurs compétences dans ces domaines. Or, une mauvaise disponibilité des matériels ne le leur permet pas et engendre des déceptions. Ce faisant, la fidélisation des engagés devient plus difficile, alors même qu'elle est cruciale pour consolider la professionnalisation des armées.

En d'autres termes, le niveau de la disponibilité opérationnelle des matériels a une forte incidence sur le moral des personnels et c'est pourquoi l'augmentation des crédits consacrés à l'entretien est in fine aussi importante que les dispositions du titre III pour revaloriser la condition des militaires.

2. Sur le fil d'une rupture capacitaire

Une disponibilité insuffisante des équipements affecte inéluctablement la capacité des armées à accomplir les missions qui leur sont confiées.

En ce qui concerne l'activité générale de l'armée de terre, cette dernière semble désormais à la limite de ses aptitudes opérationnelles pour remplir le contrat fixé lors de la professionnalisation. Si elle possède les moyens de répondre à une demande d'intervention du niveau des engagements actuels dans les Balkans, qui représentent une à deux brigades interarmes renforcées, un déploiement majeur de 50 000 hommes, décidé dans le cadre d'une action alliée, ne pourrait être accompli instantanément avec les matériels actuels sans une phase de montée en puissance permettant de remettre les équipements à niveau.

La disponibilité des personnels spécialisés dans l'entretien des équipements a elle aussi une incidence directe sur la capacité de mise sur pied d'une force projetée. La multiplication des opérations extérieures sous mandat de l'Organisation des Nations unies (ONU), avec des alliés de l'OTAN ou dans un cadre purement national, mobilise quelque 80 000 soldats chaque année (La marine a elle aussi fait montre de sa capacité à mobiliser une escadre importante en cas de crise majeure ; toutefois, si l'opération Héraclès a été un succès, la priorité donnée au maintien en condition opérationnelle des bâtiments engagés dans l'Océan indien (Task Force 473) l'a été au détriment du reste de la flotte. A titre d'illustration, l'entretien programmé des autres bâtiments accuse sur les douze derniers mois des retards cumulés de 850 jours à Brest et de 800 jours à Toulon.

Les armées se trouvent donc sur le fil d'une rupture capacitaire : si les équipements peuvent être mobilisés en cas de crise et être pleinement opérationnels, c'est d'une part au détriment de la disponibilité des autres matériels et d'autre part pour des opérations d'une durée relativement réduite et d'une ampleur limitée. Une telle situation n'est pas satisfaisante au regard du rôle de nation-cadre que la France entend assumer en matière de défense, notamment dans la perspective de crises de longue durée.

II. - LA CONCILIATION DE PLUS EN PLUS DIFFICILE ENTRE MISE EN _UVRE DES ÉQUIPEMENTS ET CONTINGENCES BUDGÉTAIRES

Les contraintes budgétaires sont souvent citées parmi les causes d'indisponibilité des matériels : les restrictions de crédits observées au cours des cinq dernières années ont eu des conséquences à la fois directes et indirectes sur l'entretien des équipements. La situation des rechanges s'est détériorée et les délais de réparation se sont allongés. L'étalement des programmes a conduit à un vieillissement forcé des matériels, engendrant une augmentation des coûts de la maintenance et une dégradation de celle-ci.

A. LES INCIDENCES DIRECTES D'UNE GESTION TROP RIGOUREUSE DES MOYENS CONSACRÉS À L'ENTRETIEN

Au cours des cinq dernières années, les crédits d'entretien programmé ont subi de plein fouet les mesures de régulation budgétaire dont ont été victimes les armées. Les moyens consacrés à l'EPM ont constitué une variable d'ajustement au sein du titre V et plus largement du budget de la défense. Ce choix a eu des conséquences très dommageables pour la disponibilité des équipements.

1. L'évolution des crédits d'entretien programmé des matériels (EPM) sur les cinq derniers exercices

a) Les dotations d'EPM au regard de la programmati L'ENTRETIEN DES MATÉRIELS AVEC LES DISPOSITIONS
DE LA LOI DE PROGRAMMATION MILITAIRE 1997-2002

en millions d'euros

1997

1998

1999

2000

2001

Autorisations de programme

LPM

2 641

2 555

2 468

2 379

2 031

LFI

2 721

2 454

2 774

2 494

2 323

écart

+ 80

- 101

+ 306

+ 116

+ 292

Crédits de paiement

LPM

2 248

2 322

2 325

2 371

2 356

LFI

2 489

2 373

2 503

2 362

2 269

écart

+ 240

+50

+178

- 8

- 87

Source : direction du budget du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

On pourrait conclure à tort que l'entretien des matériels a été considéré comme une priorité budgétaire ; cependant, en considérant les annulations de crédits d'EPM effectuées sur cette période, on constate que le montant des crédits réellement dépensés en faveur du maintien en condition opérationnelle est inférieur aux dotations prévues par la programmation. Le tableau suivant montre que le montant des annulations de crédits alloués au MCO en 1999 (202 millions d'euros) excède la majoration de l'enveloppe en loi de finances initiale (178 millions d'euros). De même, en 2000 et 2001, l'effet négatif des annulations de crédits s'est ajouté aux restrictions apportées en loi de finances initiale par rapport aux montants prévus par la programmation.

annulations et reports de crédits
d'entretien programmé des matériels depuis 1999 (1)

1999

2000

2001

Chapitre 34.20

annulations

0

annulations

0

annulations

0

reports n-1

0,8

reports n-1

7,2

reports n-1

21

Chapitre 55.21

annulations

- 202

annulations

- 25,3

annulations

- 27,8

reports n-1

173,8

reports n-1

137,8

reports n-1

86,3

(1) Crédits de paiement, en millions d'euros.

Source : direction du budget du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

Au total, il apparaît clairement que l'entretien des matériels des armées a été victime d'une mauvaise exécution budgétaire des dotations votées par le Parlement. En un mot, les moyens consacrés au maintien en condition opérationnelle ont été insuffisants. Ces divergences entre les montants des crédits inscrits et les enveloppes de crédits disponibles ont été à l'origine d'importantes difficultés de trésorerie qui ont parfois empêché les structures de maintenance de payer des livraisons de rechanges commandées.

b) Les crédits alloués à chaque armée

D'une manière générale, les crédits d'entretien programmé ont diminué pour l'ensemble des catégories de matériels, mais les situations sont contrastées selon les armées concernées. Au demeurant, si les crédits du titre III n'ont cessé de baisser, c'est en application d'une décision de transférer leur montant sur le titre V, afin de rendre le financement du maintien en condition opérationnelle plus lisible.

Une analyse du détail des évolutions budgétaires fait apparaître, notamment, que les dotations destinées à l'entretien des matériels de l'armée de terre ont régulièrement décrû depuis 1998. Néanmoins, elles se sont redressées en 2002.

Évolution des dotations d'entretien programmé
des matériels de l'armée de terre
 (1)

LFI 1998

LFI 1999

LFI 2000

LFI 2001

LFI 2002

Titre III

33,3

- 4,6 %

22,7

- 31,8 %

22,8

+ 0,04 %

22,7

- 0,04 %

6,9

- 69,6 %

Titre V

324,6

- 16,0 %

319,0

- 1,7 %

309,1

- 3,1 %

294,7

- 4,6 %

373,6

+ 26,7 %

TOTAL

357,9

- 15,1 %

341,7

- 4,5 %

331,9

- 2,9 %

317,4

- 4,4 %

380,5

+ 19,8 %

(1) Crédits de paiement en millions d'euros courants.

Les crédits d'EPM ont été réduits de près de 50 % entre 1996 et 2001, alors même que le parc des matériels majeurs n'a été diminué que de 10 % sur cette même période. A titre d'exemple, le nombre de véhicules légers et de camions tactiques a baissé de 12 %, alors que les crédits d'entretien diminuaient de 50 %. Devant la dégradation marquée de la disponibilité technique opérationnelle des matériels, la tendance a été inversée en 2002, avec une croissance de près de 20 % des crédits inscrits en loi de finances initiale. Il est nécessaire que cet effort se poursuive au cours des années suivantes, car il constitue une priorité budgétaire. Les attentes des structures de maintenance, au premier chef de la direction centrale des matériels de l'armée de terre (DCMAT), sont fortes.

Pour ce qui concerne l'armée de l'air, l'évolution des dotations d'EPM s'est avérée défavorable au cours des cinq dernières années, à l'exception de l'exercice budgétaire de 1999. La diminution constatée entre 1998 et 2002 s'élève à 11,3 %, ce qui est important. Cependant, les ressources financières (en autorisations de programme et en crédits de paiement) qui ont été inscrites en loi de finances depuis 1999 ont dû être réévaluées en cours d'exercice et les niveaux de dépenses et d'engagements réalisés ont été finalement un peu supérieurs aux ressources initiales.

Évolution des dotations d'entretien programmé
des matériels de l'armee de l'air
 (1)

LFI 1998

LFI 1999

LFI 2000

LFI 2001

LFI 2002

Titre III

135,6

- 6,3 %

95,8

- 29,3 %

84,4

- 11,9 %

56,2

- 33,4 %

31,7

- 43,6 %

Titre V

725,1

+ 6,8 %

788,9

+ 8,8 %

726,4

- 7,9 %

745,0

+ 2,5 %

731,5

- 1,8 %

TOTAL

860,7

+ 4,5 %

884,7

+ 2,8 %

810,8

- 8,3 %

801,2

- 1,2 %

763,2

- 4,7 %

(1) Crédits de paiement en millions d'euros courants.

Enfin, l'évolution des crédits d'entretien des matériels de la marine est tout aussi heurtée, même si le niveau de ces dotations n'a évolué, sur la période allant de 1998 et 2002, que de 5 %. En fait, tous les besoins sont loin d'avoir été couverts : le niveau des stocks de rechange de l'aéronavale a été ajusté et certaines périodes d'entretien programmé des bâtiments ont dû être reportées.

Évolution des dotations d'entretien programmé
des matériels de la Marine
 (1)

LFI 1998

LFI 1999

LFI 2000

LFI 2001

LFI 2002

Titre III

106,5

- 27,3 %

83,2

- 21,9 %

61,8

- 25,7 %

45,4

- 26,5 %

18,1

- 60,1 %

Titre V

724,0

- 10,1 %

771,4

+ 6,5 %

813,3

+ 5,4 %

766,2

- 5,8 %

854,7

+ 11,5 %

TOTAL

830,5

- 12,8 %

854,6

+ 2,9 %

875,1

+ 2,4 %

811,6

- 7,3 %

872,8

+ 7,5 %

(1) Crédits de paiement en millions d'euros courants.

2. L'impact des mesures de régulation budgétaire

Les mesures de régulation budgétaire ont eu une incidence directe sur la fourniture des rechanges, qui est essentielle en matière de maintenance, ainsi que sur les délais de réparation des matériels. Le niveau de disponibilité des équipements s'en est ressenti.

a) Le problème des rechanges

Les pièces de rechange sont au c_ur du processus d'entretien des matériels : elles conditionnent pour une large part la remise en état des équipements dans des délais relativement brefs. La défaillance de la gestion des rechanges est la cause de 35% des indisponibilités non programmées des bâtiments de la marine.

Cette situation tient le plus souvent à des difficultés d'ordre budgétaire. A titre d'exemple, c'est une absence de crédits disponibles qui a empêché l'armée de l'air, entre 1995 et 1997, de passer les contrats d'approvisionnement nécessaires au renouvellement de ses stocks. Or, les effets d'inertie de ce type de pénurie ont perduré jusqu'à ces derniers mois. C'est dire les conséquences concrètes d'une gestion trop rigoureuse des financements dévolus à l'entretien des matériels.

L'amélioration de l'organisation des rechanges est désormais un aspect essentiel des réformes de la maintenance des matériels. La structure intégrée de maintien en condition opérationnelle des matériels aériens du ministère de la défense (SIMMAD) est aujourd'hui en charge de la passation des commandes de ce type de pièces pour les aéronefs des armées. De même, cette responsabilité pour les matériels de la marine, qui appartenait auparavant à DCN, est actuellement transférée au service de soutien de la flotte (SSF), qui en assumera la gestion pleine et entière à partir du 1er janvier 2003. Enfin, des restructurations ont également été opérées dans l'armée de terre, avec la fusion du service central des approvisionnements et du service central de gestion en un seul service central du matériel, puis le transfert de la direction centrale des matériels de l'armée de terre (DCMAT) vers Satory de 1999 à 2000.

La réduction des crédits d'entretien programmé ayant provoqué une baisse des marchés de commande de rechanges dans les trois armées, les structures de maintenance ont dû revoir de fond en comble leurs stocks tout en se rapprochant - autant qu'il était possible - d'une gestion en flux tendus, pour s'adapter aux contraintes budgétaires et mieux utiliser les ressources allouées. A contrario, comme les pannes sont par définition difficilement prévisibles, une telle gestion peut aussi allonger considérablement les délais de réparation.

En définitive, la réorganisation des systèmes de gestion des rechanges au sein de chaque armée n'a pas permis de résoudre tous les problèmes, car certaines pièces de rechange sont très difficiles à obtenir et très coûteuses lorsque les équipements concernés so rechange, pour des raisons budgétaires ou d'ancienneté, est parfois résolu par le recours à la « cannibalisation » des matériels inutilisés, c'est-à-dire le prélèvement d'une partie de leurs pièces pour les installer sur d'autres équipements. Cependant, cette pratique de démontage et de remontage comporte des risques de sécurité et elle n'est guère motivante pour les personnels.

b) L'allongement des délais de réparation

Les baisses de dotations d'EPM ont pour autre conséquence directe de rendre plus difficile la bonne tenue des délais de réparation. S'ajoutent à cela deux autres facteurs aux effets cumulatifs : tout d'abord, les pièces de rechange manquent en raison de stocks insuffisants, mais aussi d'avaries techniques conjoncturelles ; en second lieu, les personnels qualifiés font défaut, car les mécaniciens sont souvent très spécialisés et les personnels civils qualifiés sont en sous-effectif, quand ils ne sont pas projetés en opérations extérieures.

Actuellement, le problème n'est donc pas tant la qualité des réparations que la durée de celles-ci. Comme l'a souligné une récente étude du contrôle général des armées, il s'avère difficile de conjuguer sur un laps de temps très court l'obtention des pièces, la mise à disposition des matériels et l'intervention des mécaniciens.

Cette situation est particulièrement manifeste en ce qui concerne l'entretien des bâtiments de la marine : le dépassement des délais est un phénomène récurrent et généralisé à l'ensemble des catégories de bâtiments. Ces dépassements concernent aussi bien les opérations d'entretien majeur, par définition plus longues, que celles qui ont trait à l'entretien intermédiaire. Les forces sous-marines elles-mêmes ne sont pas épargnées par ce phénomène.

Dans ce processus, les réductions des crédits d'entretien jouent un rôle non négligeable, car les annulations de crédits de paiement entraînent d'importantes difficultés de trésorerie. Certaines livraisons ne peuvent être payées ; il faut alors attendre pour obtenir les équipements, ce qui allonge d'autant les délais de réparation, et payer des intérêts moratoires, ce qui constitue un gaspillage. En outre, le non-paiement des livraisons affecte les rapports avec les fournisseurs, rendant plus difficiles les négociations pour les nouveaux marchés. La relation de confiance que peuvent entretenir les industriels et le ministère de la défense s'en trouve alors affectée. A cet égard, l'année 1995 constitue un exemple significatif, puisque les très fortes annulations de crédits ont causé la faillite de 800 petites et moyennes entreprises qui travaillaient pour la défense ; les entreprises les plus fragiles ont dû fermer, ne pouvant attendre quatre, voire six mois, pour être payées et aujourd'hui la réactivité du tissu industriel chargé de l'entretien des matériels s'en ressent, surtout dans les secteurs des réparations navales et de l'armement terrestre.

Le nouveau code des marchés publics est également mis en cause de manière récurrente en mati& notamment lorsque le fournisseur est en situation de quasi-monopole. Par ailleurs, si la procédure des marchés sans formalités préalables permet de réaliser des achats plus rapidement que par un appel d'offres, son utilisation a été rendue plus difficile dans le nouveau code, avec une nomenclature des fournitures et des services plus restrictive ; le recours aux  achats de dépannage, notamment, s'avère moins aisé.

Cependant, la mise en place de nouvelles procédures prend en général un certain temps. Une meilleure connaissance de ses mécanismes et une plus grande anticipation des besoins pourraient permettre de surmonter ces difficultés. Une meilleure organisation, par l'utilisation des marchés à commandes, serait possible. En outre, le plafond des marchés sans formalités préalables fixé par le nouveau code des marchés publics a été relevé, ce qui introduit une plus grande souplesse dans les procédures. Par conséquent, l'application des règles du code des marchés publics ne peut être tenue pour principale responsable des difficultés rencontrées dans la fourniture des rechanges et les délais de réparation. Une bonne maîtrise de ses dispositions doit permettre une meilleure gestion du maintien en condition opérationnelle en anticipant suffisamment les besoins à venir. Ainsi, lors de la crise du Kosovo et même à l'occasion du déploiement du groupe aéronaval dans l'Océan Indien, il a été possible de répondre à une situation d'urgence en appliquant les procédures prévues.

A ces problèmes internes des services des matériels, il faut ajouter une attitude parfois peu satisfaisante des industriels, qu'ils soient sous-traitants ou maîtres d'_uvre. Les contrats de vente de matériels neufs ou les demandes d'appui à l'exportation constituent pour une partie d'entre eux des priorités et certains sont peu réactifs sur les marchés intérieurs de rechanges et de réparations.

B. LES EFFETS INDIRECTS D'UN NIVEAU DE CRÉDITS D'INVESTISSEMENT INSUFFISANT

Au terme de l'exécution de la loi de programmation militaire 1997-2002, les crédits d'investissement en faveur des armées qui ont été votés par le Parlement aux titres V et VI n'ont pas été consommés dans leur totalité. La ministre de la défense a souligné devant la commission de la défense, lors de son audition le 9 juillet 2002, que les crédits d'équipement de son ministère ont diminué de 14 % entre 1997 et 2002.

Cette évolution a eu des répercussions plus ou moins directes sur la maintenance des matériels, puisque la régulation budgétaire qui a affecté le titre V a conduit notamment à des arbitrages internes à l'encontre des dépenses touchant plus particulièrement aux matériels en service, mais aussi au détriment des dépenses en faveur du renouvellement des équipements les plus anciens. Il en a résulté une certaine tension sur la maintenance des matériels les plus vieux, qui sont aussi ceux dont la disponibilité est la plus aléatoire. Par ailleurs, l'imputation des crédits d'EPM au titre V a rendu ces dotations plus exposées aux mesures d'annulations ou de reports de crédits, sans que pour autant la poursuite des programmes majeurs s'effectue dans la cohéren pour 2002, le rapporteur spécial de la commission des finances de l'Assemblée nationale a lui-même dénoncé cette pratique consistant « à faire financer sur l'enveloppe des crédits d'équipement de la défense des dépenses qui n'y étaient pas prévues ou même qui en étaient expressément exclues » (8). Au total, comme le montre le tableau suivant, c'est une somme d'un peu moins d'1,4 milliard d'euros qui a été transférée sans être compensée lors de l'exécution de la loi de programmation militaire 1997-2002.

MONTANTS DES TRANSFERTS DE CRÉDITS D'EPM
DU TITRE III VERS LE TITRE V (1)

Exercices

1997

1998

1999

2000

2001

2002

Transfert EPM 1997

170

170

170

170

170

170

Transfert EPM 1999

61

61

61

61

Transfert EPM 2000

18

18

18

Transfert EPM 2001

15

15

Transfert EPM 2002

40

TOTAL CUMULÉ (2)

170

340

571

220

1 084

1 388

(1) En millions d'euros courants.

(2) Sur la durée de la programmation 1997-2002.

(3) Le montant de ces transferts est calculé par référence aux dispositions de la loi de programmation militaire 1997-2002.

De fait, il apparaît plus clairement pourquoi les gouverneurs de crédits de MCO n'ont pas disposé de la totalité des dotations programmées en faveur de l'entretien. Face au choix de privilégier soit le bon déroulement des programmes en cours, soit la maintenance des matériels en service, ils ont essayé de concilier au mieux ces impératifs contradictoires en restreignant le financement du MCO (victime des annulations de crédits signalées plus haut) et en étalant un peu plus le déroulement des programmes de matériels neufs.

Cette logique de court terme a obéré les capacités des armées à constituer des stocks de rechanges, tout en hypothéquant petit à petit les marges de man_uvre budgétaires qui existaient sur les équipements à venir.

2. Les conséquences de l'étalement des programmes d'armements neufs sur la charge de maintenance

L'investissement dans des équipements modernes, qui par définition n'ont pas un besoin immédiat de maintenance lourde, est indispensable pour que la charge financière de l'entretien des matériels en service reste supportable. Or, la contrainte qui a pesé sur les crédits d'investissement des armées tout au long de la loi de programmation militaire 1997-2002 a empêché de respecter à la lettre le plan de renouvellement des armements : la revue des programmes de 1998 a conduit à annuler certains investissements prévus ; en outre, dans la grande majorité des cas, la réalisation des programmes confirmés a été décalée dans le temps. Tout étalement des programmes conduit nécessairement à ce que les exemplaires de fin de série ne possèdent pas tout à fait le même équipement que ceux du début de série.

Trois programmes importants, chacun mené pour l'une des trois armées, illustrent tout particulièrement ce constat.

Le char Leclerc, livré à l'armée de terre depuis 1991, est un exemple assez éclairant, dans la mesure où le parc se compose de matériels issus de deux séries différentes, dont chacune comprend elle-même des tranches de fabrication différentes. Alors même que la dernière dotation de 52 exemplaires n'est pas encore totalement livrée, il est devenu nécessaire de moderniser les matériels de la première série : l'armée de terre devra ainsi financer la rénovation de 38 chars.

Le programme d'avion polyvalent Rafale est également révélateur des conséquences des reports de commandes et de livraisons en raison de contingences budgétaires. Lancé au milieu des années 1980, le développement de cet avion capable de remplir des missions multiples (et donc susceptible d'engendrer des économies d'échelle sur l'entretien) a donné lieu à des vols de prototypes en 1991 ; les livraisons à la marine n'ont commenc&eac de la série, qui aura presque atteint la moitié de son existence. D'ores et déjà, il est prévu que certains systèmes électroniques du SNLE-NG n° 4 ne correspondront pas à ceux des autres bâtiments, mais plutôt à ceux des sous-marins nucléaires d'attaque (SNA) de nouvelle génération dits « Barracuda », dont les livraisons devraient commencer à partir de 2012.

Ces difficultés d'exécution de programmes, dont la cohérence et les gains d'entretien reposent pourtant sur le bon déroulement, se constatent également pour nombre d'équipements moins emblématiques, mais tout aussi essentiels aux missions des armées. Elles comportent deux conséquences fâcheuses pour les matériels qui restent en service, dans l'attente de la livraison des équipements nouveaux :

- une banalisation de la « cannibalisation » des pièces de systèmes installés sur les matériels immobilisés pour cause d'entretien ;

- une utilisation à l'économie de certains équipements sophistiqués, en totale contradiction avec le potentiel pour lequel ils ont été acquis.

A défaut de pouvoir éviter un certain étalement dans la fabrication des équipements des armées, il convient néanmoins de réfléchir à la notion de rechanges : celle-ci doit désormais s'apprécier dans la durée. Ce problème est important, notamment au regard de la tendance à la généralisation des matériels sophistiqués et de leur automatisation, au détriment de leur simplicité d'entretien.

3. Le vieillissement des matériels, corollaire d'une absence de renouvellement et source de surcoûts d'entretien

La plupart des armements modernes nécessitent un remplacement aux alentours de trente ans de service. Or, une grande partie des équipements des armées a dépassé la moitié de sa vie opérationnelle. Avec de vieux appareils, la maintenance obéit à la loi des rendements décroissants : l'entretien réclame davantage de crédits, car les réparations sont plus lourdes, sans pour autant que l'amélioration de la disponibilité soit plus sensible, car le risque de panne est plus élevé. Par conséquent, faute de renouvellement, les dépenses d'entretien croissent, jusqu'au moment, de plus en plus fréquent, où il devient plus rationnel d'un strict point de vue budgétaire de désarmer certains équipements anciens, afin de les employer comme réserves de rechanges qui ne sont plus produites. La situation de la marine et de l'armée de terre est sensiblement plus dégradée que celle de l'armée de l'air, même si ponctuellement cette dernière connaît de réelles difficultés.

· Pour ce qui concerne les bâtiments de la flotte de combat, à l'exception d'un nombre restreint d'unités (le porte-avions nucléaire Charles de Gaulle et les cinq frégates de classe La Fayette), la grande majorité des bâtiments devra être renouvelée dans les quinze ans qui viennent. Certaines unités de la flotte de surface (porte-hélicoptères Jeanne d'Arc, frégate lance-missiles Duquesne, transports de programmes en cours.

ÂGE DES PRINCIPAUX BÂTIMENTS DE SURFACE
DE LA MARINE, EN 2002

CATÉGORIE DE BÂTIMENTS

NOMBRE D'UNITÉS

ÂGE MOYEN (1)

Porte-avions

1

1 an

Porte-hélicoptères

1

38 ans

Transports de chalands de débarquement (2)

4

24 ans

Frégates lance-missiles

1

32 ans

Frégates antiaériennes

2

12 ans et demi

Frégates de type La Fayette

5

4 ans

Frégates de lutte anti-sous-marine F-67

2

26 ans et demi

Frégates de lutte anti-sous-marine F-70

7

17 ans

Avisos A-69

10

20 ans

Pétroliers-ravitailleurs

4

17 ans et demi

Bâtiment atelier polyvalent

1

26 ans

Bâtiments de soutien mobile

3

35 ans

Remorqueurs de haute mer

2

28 ans

(1) En années à compter de la date de mise en service.

(2) Cette catégorie n'est pas très significative statistiquement, car elle est composée de deux séries de bâtiments d'âges différents : 35 ans et demi en moyenne pour les deux premiers, et 8 ans en moyenne pour les autres.

Source : ministère de la défense.

· Le cas de l'armée de terre n'est pas différent. L'âge du parc de ses hélicoptères, notamment les hélicoptères de man_uvre Puma, conjugué à une utilisation très intensive des exemplaires opérationnels, qui contribue à accélérer le phénomène de vieillissement, est l'une des causes de leur insuffisante disponibilité. Dans le domaine des matériels roulants, la moyenne d'âge des parcs les plus anciens, c'est-à-dire notamment les véhicules légers blindés AMX 10 P, les blindés à roues AMX 10 RC, et même les moyens de transports de troupe (VAB) se situe entre 16 et 23 ans. Ce vieillissement des matériels a évidemment des effets importants puisque les pannes sont souvent imprévisibles et désorganisent une chaîne de maintenance prévue pour fonctionner en flux tendus.

Au demeurant, le maintien d'une chaîne de maintenance industrielle sur le long terme va parfois à l'encontre des intérêts et de la rentabilité des constructeurs. Au-delà d'un certain seuil de vieillissement, il existe donc un réel risque de disparition des capacités d'entretien, sauf à concéder à celui-ci un niveau de crédits sans rapport avec les possibilités de l'armée de terre.

ÂGE DES PRINCIPAUX MATÉRIELS
DE L'ARMÉE DE TERRE, EN 2002

CATÉGORIE D'APPAREILS

NOMBRE D'EXEMPLAIRES

ÂGE MOYEN(1)

Char Leclerc

281

5,1 ans

Char AMX 30 B2

433

14 ans

AMX 10 P

392

23 ans

AMX 10 RC

337

18 ans

VAB tous types

3 975

16,5 ans

ERC 90

192

16 ans

VBL et VB2L

1 101

8 ans

TRF1

97

10 ans

AMX 30 AUF1

273

14 ans

LRM

59

9 ans

ROLAND

96

15 ans

Gazelle

265

25 ans

Puma

101

21 ans

Cougar

21

10 ans

(1) En années à compter de la date de mise en service.

Source : ministère de la défense.

· Ce sont finalement les appareils de l'armée de l'air qui, globalement, apparaissent les moins anciens. La moyenne d'âge des avions de combat est de quatorze ans en 2002. Même si certains appareils plus anciens (Mirage F1, Jaguar) sont toujours en service, dans l'ensemble, les avions de chasse, d'attaque au sol et de défense aérienne sont assez récents. Néanmoins, le vieillissement moyen de l'ensemble de la flotte s'accroît, au rythme actuel, à raison d'une année tous les quatre ans. En revanche, la situation de la flotte de transport est plus contrastée : la moyenne d'âge de plus de la moitié des appareils (les C 160 Transall de la première série) a dépassé les trente années de service. Une grande partie des C 160 Transall, dont les 46 premiers exemplaires sont entrés en service entre 1967 et 1973, ne pourra même pas permettre d'attendre les livraisons d'A 400 M, qui devraient commencer à partir de 2009, soit au mieux quatre ans après le retrait des C 160 usés (ceux de la première génération).

ÂGE DES PRINCIPAUX APPAREILS
EMPLOYÉS PAR L'ARMÉE DE L'AIR, EN 2002

CATÉGORIE D'APPAREILS

NOMBRE D'UNITÉS

ÂGE MOYEN(1)

Mirage 2000 N

60

12 ans

Mirage 2000 D

60

6 ans

Mirage 2000 DA

80

14 ans

Mirage 2000-5 F

30

13 ans

Mirage F1 CT

40

21 ans

Mirage F1 CR

40

18 ans

Jaguar

20

23 ans

C 160 Transall (1ère série)

46

32 ans

C 160 Transall (2ème série)

20

21 ans

C 130 Hercule

14

16 ans

(1) En années à compter de la date de mise en service.

Source : ministère de la défense.

De fait, pour l'armée de l'air aussi, le vieillissement des équipements implique souvent l'augmentation des dépenses de maintenance. A titre de comparaison, la société Air France Industries, qui assure l'entretien des deux DC 8 et des trois A 310 de l'armée de l'air, facture ses prestations à respectivement 33 millions d'euros par an en faveur des premiers et 14,4 millions d'euros par an pour les autres, soit une enveloppe par appareil ancien quatre fois supérieure à celle de chaque appareil récent.

En définitive, il apparaît très clairement que le lissage de la charge de l'entretien va de pair avec la modernisation des armements.

III. - LA NÉCESSITÉ DE RÉTABLIR UN NIVEAU DE DISPONIBILITÉ DES MATÉRIELS QUI SOIT PLUS CONFORME AUX EXIGENCES OPÉRATIONNELLES

Jusqu'à présent, les armées ont réussi à répondre aux missions opérationnelles qui leur ont été assignées (engagements en OPEX et prépositionnement en Afrique, notamment). Cependant, dans l'éventualité où la disponibilité de leurs matériels continuerait de se dégrader, il pourrait ne plus en être ainsi. L'adoption très prochaine de la loi de programmation militaire pour les années 2003-2008 offre l'opportunité de redresser la situation, en confirmant d'une part la réévaluation des crédits de maintien en condition opérationnelle et en permettant d'autre part l'aboutissement des grands programmes de renouvellement des équipements. Toutefois, les solutions ne sont pas seulement d'ordre budgétaire ; il convient également d'améliorer le cycle de maintenance, en rationalisant les structures existantes et en exploitant au maximum les avantages qu'une externalisation partielle offrirait.

A. LES AMÉLIORATIONS BUDGÉTAIRES ENVISAGEABLES

Les difficultés rencontrées dans le cycle d'entretien des matériels étant pour partie d'origine budgétaire, la situation appelle nécessairement des réponses du même ordre. Pour autant, les marges de man_uvre en ce domaine ne sont pas extensibles à l'infini ; il convient donc d'analyser de manière objective le bien-fondé et les limites d'expériences de financements innovants, susceptibles d'apporter une certaine flexibilité financière sans constituer pour autant une panacée.

1. Relever le niveau des crédits consacrés à l'EPM

Le Président de la République et le Gouvernement ont pris la mesure du problème de la disponibilité opérationnelle des matériels des armées. La réponse la plus immédiate à cette situation a été apportée par la loi de finances rectificative pour 2002 (9), qui prévoyait une rallonge de 100 millions d'euros en faveur du MCO des matériels aériens des armées (80 millions pour ceux de l'armée de l'air, 10 millions pour les E2-C Hawk projet de loi de programmation militaire pour les années 2003-2008.

a) Faut-il maintenir l'imputation de ces dépenses sur le titre V ?

La question peut surprendre, mais il n'est pas inutile de la poser, compte tenu de la non compensation de l'imputation des crédits d'EPM sur le titre V, en lieu et place du titre III. Ne convient-il donc pas de répartir à nouveau les dépenses d'entretien des matériels entre titre III et titre V, de manière à « sanctuariser » une partie des financements prévus à cet effet ?

Pour tenter d'apporter une réponse, il n'est pas inutile de revenir sur la situation antérieure. Auparavant, les crédits dévolus à la maintenance des équipements recouvraient à la fois les dépenses de personnel nécessaires à la maintenance lourde des matériels (EPM imputé au titre III) et les dépenses consacrées à l'achat de rechanges, de pièces ou d'équipements de réparation (MCO imputé au titre V).

Fondamentalement, la majeure partie des opérations d'entretien s'apparente davantage à la réalisation d'équipements neufs, pour laquelle le coût de la main-d'_uvre n'est pas identifié sur le titre III, qu'à la pose de pièces de rechange, même si cette activité ne saurait être négligée. De surcroît, les crédits d'EPM inscrits au titre III présentaient la particularité de se subdiviser en autorisations de programme et crédits de paiement, distinction qui constituait une anomalie au regard de la nomenclature budgétaire, puisque le titre III ne comporte normalement pas d'autorisations de programme.

A la suite des observations de la Cour des comptes et afin d'assurer une plus grande lisibilité budgétaire, il a donc été décidé de faire progressivement basculer le coût de l'EPM sur le titre V. Cependant, la logique de ce transfert n'a pas été appliquée intégralement, puisque le titre V n'a pas été abondé à due concurrence, alors que le titre III est resté relativement préservé.

Sur le fond, rien ne permet de contester cette réallocation des lignes budgétaires destinées à la maintenance des matériels. En outre, il ne serait pas pertinent d'effectuer des transferts en sens inverse, qui ajouteraient la confusion à l'absence de transparence comptable. Par conséquent, il n'apparaît pas souhaitable de revenir à la situation antérieure, d'autant plus que l'enveloppe du titre III n'est pas exempte, elle non plus, de mesures de régulation interne privilégiant, notamment, les crédits de rémunérations et charges sociales. C'est donc en direction de l'enveloppe du titre V qu'il convient désormais de faire porter l'effort financier en priorité.

Cependant, pour garantir l'intégralité des enveloppes budgétaires du titre V qui concernent l'entretien, il apparaît nécessaire d'individualiser de manière plus précise les crédits de MCO, par exemple en leur consacrant un article spécifique en loi de finances. Si la fongibilité de ces dotations avec les autres crédits alloués au titre V ne saurait être remise en cause, ne serait-ce que pour garantir une certaine souplesse de g programmé
des matériels des armées dans le projet de loi de finances pour 2003 (1)

Armée de terre

Marine

Armée de l'air

AP (2)

CP (3)

AP (2)

CP (3)

AP (2)

CP (3)

Titre III

6,9

6,9

15,3

15,3

31,7

31,7

Titre V

589,7

418,4

1 155,5

859,2

989,9

900,4

TOTAL

596,6

425,3

1 170,8

874,5

1021,6

932,1

(1) En millions d'euros.

(2) Autorisations de programme.

(3) Crédits de paiement.

Cependant, le budget 2003 n'est qu'une étape, qu'il conviendra de poursuivre tout au long de l'exécution de la nouvelle loi de programmation militaire. Le texte, présenté en conseil des ministres le 11 septembre, prévoit une réévaluation sensible des crédits d'entretien tout au long de la période 2003-2008. L'annuité moyenne de l'EPM sera portée à environ 2 379 millions d'euros hors maintenance contractuellement prévue dans les programmes (10), soit une augmentation d'environ 8 % par rapport à 2001, année plancher de la loi de programmation qui arrive à échéance.

Il faut dire que le coût de l'entretien des équipements sophistiqués qui vont équiper les armées à l'horizon de la fin de cette décennie devra certainement excéder celui de la maintenance des matériels actuellement en service. Les armements ont considérablement évolué grâce à l'apport des technologies avancées, dans le domaine de la gestion informatisée des systèmes d'armes notamment : le char Leclerc, par exemple, incorpore bien plus d'informatique et d'électronique que les AMX 30 B2. L'évolution accélérée des technologies renchérit l'entretien de ces équipements, déjà coûteux à l'achat.

L'entrée en service du char Leclerc s'est accompagnée d'un accroissement de 44 % du coût global des rechanges en faveur des blindés. Il est d'ores et déjà acquis que la maintenance des hélicoptères de combat Tigre coûtera quatre fois plus cher à l'armée de terre que celle de leurs prédécesseurs Gazelle et, même en l'absence d'évaluations, il est légitime d'anticiper un renchérissement similaire pour le MCO des hélicoptères NH 90. La marine, quant à elle, fait face à un problème identique pour l'entretien des SNLE-NG.

Autant dire que la nouvelle loi de programmation doit anticiper cette tendance, ne serait-ce que partiellement, car il est également possible de rechercher des économies dans le cycle de la maintenance, à l'image de ce qu'a entrepris la marine pour la première indisponibilité périodique pour entretien et réparations
- IPER - du SNLE-NG Le Triomphant, qui a débuté cette année.

LES NÉGOCIATIONS ENTRE DCN ET LE SERVICE DE SOUTIEN DE LA FLOTTE (SSF) SUR L'IPER DU SNLE LE TRIOMPHANT :

Le devis d'une IPER nominale consistant à vérifier et à renouveler si nécessaire l'ensemble des composants du SNLE Le Triomphant avoisinait 274,4 millions d'euros, soit à peu près autant que ce que la Royal navy a décidé d'allouer à l'IPER du SNLE Vanguard. Les propositions initiales de DCN s'élevaient à 221 millions d'euros, alors que le SSF avait pour mandat de cantonner le coût de l'opération à 152,4 millions d'euros. DCN souhaitait prendre à sa charge certains aléas industriels, ce qui expliquait une partie de l'écart avec l'estimation du maître d'ouvrage.

La marine a veillé à ce que toutes les opérations nécessaires ayant trait à la sécurité soient effectuées. Les ajustements ont donc porté sur la tranche opérationnelle des travaux. A titre d'exemple, la décision a été prise de vérifier seulement l'une des deux usines de production d'oxygène fonctionnant sur le bâtiment, au motif que ces installations sont redondantes et qu'une seule permet d'assurer le renouvellement de l'oxygène en plongée. En définitive, le contrat a été établi sur la base de l'enveloppe prévue par la marine.

Il convient de prendre garde à ce que la revalorisation des dotations du titre V en faveur du maintien en condition opérationnelle n'obère pas les capacités d'investissement des armées dans des équipements neufs. Il est indispensable d'assurer un roulement en matériels nouveaux, de manière à économiser à moyen terme sur l'entretien. Le cas de l'armée de l'air est éclairant : le développement des programmes Rafale et A 400 M doit se traduire par une absorption de 50 % du titre V de son budget dans les prochaines années. Faute d'une augmentation sensible du montant des crédits d'investissement, il lui faudrait arbitrer entre l'entretien et les nouveaux matériels nécessaires à la cohérence de son format d'armée professionnelle, compte tenu du fait que les infrastructures, les installations nucléaires et la cohérence opérationnelle ne doivent pas non plus être victimes de restrictions budgétaires trop importantes.

En fait, les armées se heurtent à une logique comptable de base, puisque le lien entre investissement (les programmes d'armement) et amortissement (le MCO) est au c_ur du problème de l'entretien et de la disponibilité de leurs matériels. Assurer un certain équilibre entre ces deux contraintes passe nécessairement par la revalorisation du titre V qui a été décidée par le Gouvernement, même s'il ne s'agit pas d'une solution exclusive.

2. Adopter une logique de coûts de possession et ne plus raisonner en coûts d'acquisition

Le coût de possession est un concept bien plus pertinent que le coût d'acquisition pour apprécier et gérer sur la durée un investissement, car il englobe non seulement l'achat du matériel, mais également le financement de son entretien et de son emploi tout au long de son existence.

Le ministère de la défense s'est préparé à ce changement en adoptant, pour ses crédits d'équipement, une nomenclature articulée autour de huit systèmes de forces : dissuasion ; commandement, conduite, communication et renseignement ; projection et mobilité ; frappe dans la profondeur ; maîtrise du milieu aéroterrestre ; maîtrise du milieu aéromaritime ; maîtrise du milieu aérospatial ; préparation et maintien de la capacité opérationnelle. Ces systèmes peuvent constituer autant de « programmes » au sens de la loi organique du 1er août 2001. Chacun d'entre eux comporte un volet de maintenance important, puisque l'entretien des matériels concernés participe pleinement à l'objectif de leur emploi éventuel sur un théâtre d'opérations qui mettrait en jeu les intérêts de la France. L'entrée en vigueur intégrale de la loi organique impliquera donc, à l'horizon 2006, d'apprécier ensemble les effets des crédits d'acquisition et d'entretien de chaque système de forces.

De fait, pourquoi ne pas aller au terme de cette logique en inscrivant en loi de finances des provisions pour entretien dès le lancement des acquisitions de matériels ? De même que les projets de lois de programmation et de finances (dans les fascicules budgétaires bleus notamment) détaillent les échéanciers de coûts des différents programmes d'armement, il conviendrait d'inscrire sur une ligne budgétaire spécifique un montant individualisé de crédits d'entretien pour chaque programme d'équipement entrant en phase opérationnelle ; ce montant pourrait être provisionné en autorisations de programme sur la base du coût constaté de l'entretien d'équipements équivalents.

De toute évidence, l'échéance d'entrée en application de la loi organique laisse le temps de réfléchir aux mécanismes les mieux à même de garantir, dans ce nouveau cadre budgétaire, des abondements suffisants pour l'entretien des matériels.

Il reste que les armées sont assez réticentes devant ce type de raisonnement, craignant que l'affichage des coûts globaux, par définition supérieurs aux coûts d'achat, suscite des actions de régulation budgétaire ou des arbitrages en leur défaveur. Pourtant, elles ont beaucoup à y gagner. Etant donné l'accélération du phénomène d'obsolescence d'équipements de plus en plus perfectionnés et informatisés, il semble par exemple nécessaire de revoir la politique de rechanges en prévoyant notamment, dès l'entrée en service des matériels, une provision budgétaire pour renouvellement des composants dont on sait qu'ils ne seront plus fabriqués à une échéance de dix à quinze ans.

Sans mésestimer les difficultés que ce bouleversement de nomenclature budgétaire suppose, il est permis d'espérer qu'il mettra un terme à certaines incohérences, au premier rang desquelles figure la tendance accrue à la « cannibalisati crédit-bail ou emprunt) suscitent de multiples attentes, parce qu'ils sont supposés faciliter le lissage du cycle budgétaire et la « sanctuarisation » des crédits affectés aux matériels.

Le Royaume-Uni a fait _uvre de pionnier en mettant en place, à partir de 1992, une politique de financement privé d'investissements publics : la PFI. Aux termes de ce mode de financement, les investissements dans certains types de matériels et les risques qui y sont associés sont financés par un opérateur privé, le plus souvent le constructeur de l'équipement, en contrepartie d'une redevance fixe, versée sur une durée assez longue par l'Etat. Ces dépenses ne peuvent faire l'objet de mesures de régulation budgétaire. Intervenu dans un contexte budgétaire favorable, le recours à ce mécanisme s'inscrit dans une logique d'accroissement capacitaire.

Cette procédure, largement utilisée pour le soutien de certains équipements (bâtiments de la Royal navy, Tornado de la Royal air force) présente néanmoins des limites : la PFI n'est envisageable que s'il existe une offre commerciale susceptible de répondre aux besoins de la défense ; la sélection des offres est plus complexe que pour une acquisition classique, car les critères d'évaluation dépassent le prix pour intégrer le degré de risque que l'opérateur accepte de prendre et l'ampleur des innovations qu'il envisage ; enfin, il convient de bien mesurer les clauses du contrat de PFI, car celui-ci engage les parties pour une longue durée. Il semblerait en outre que le commandement britannique porte une appréciation nuancée sur l'application du concept de PFI aux tâches de soutien des matériels, notamment en raison du constat assez fréquent de malfaçons. L'expérience appelle donc à observer une certaine prudence en ce domaine.

La PFI n'est pas l'unique moyen de desserrer la contrainte budgétaire pour réaliser des investissements : il existe également des modes de financement échelonnés, reposant soit sur des emprunts bancaires ou des avances publiques, soit sur le crédit-bail. Ces deux méthodes reviennent à recourir à l'endettement pour lisser la dépense dans le temps et permettre de faire face à de nouvelles dépenses d'équipement à budget constant.

En Italie comme en Espagne, les emprunts ont pris la forme d'avances budgétaires consenties par les ministères de l'industrie ou de la technologie, en raison des implications économiques des programmes d'armement en cause. En France, on peut considérer que c'est l'inverse qui se produit, puisque le ministère de la défense finance une partie du budget civil de recherche et de développement (190 millions d'euros en 2002), rattaché au ministère de la recherche. De toute manière, la solution de l'emprunt n'est pas vraiment satisfaisante : les avances consenties par un autre ministère ne font que déplacer le problème des remboursements et, si la créance est annulée, le déficit budgétaire s'en trouve accru d'autant.

Le crédit-bail, c'est-à-dire la location de matériels avec parfois une option d'achat, est une autre possibilité, expérimentée avec plus ou moins de succès par l'Italie, comme l'illustre l'encadré ci-après, l'Espagne et le Portugal, où deux lois organiques de 1999 et 2001 encadrent cette pratique

L'EXPÉRIENCE ITALIENNE DU CRÉDIT-BAIL

En 1994, l'Italie a acquis 24 Tornado en leasing auprès du Royaume-Uni, pour une durée de dix ans. La solution ne fut pas concluante : elle s'avéra en effet des plus coûteuses pour le maintien en condition opérationnelle des matériels.

La solution du leasing de 24 F 16 américains fut cependant elle aussi préférée à l'acquisition classique de Mirage 2000, dans l'attente de la mise en service de l'Eurofighter. L'originalité de cette seconde opération fut de louer non plus des appareils, mais 8000 heures de vol par an pour une durée de cinq à six ans. Les seules charges que doit supporter l'armée de l'air italienne, hors annuités de crédit bail, sont les coûts de carburant et d'entretien courant. Les budgets annuels sont dégagés par le retrait anticipé d'appareils obsolètes.

Seule la solution d'une location d'un nombre d'heures d'utilisation opérationnelle de certains équipements (aéronefs de transport, voire de combat, véhicules de transport de troupes ou navires rouliers civils destinés à la projection d'unités, par exemple) peut se révéler intéressante, du point de vue de ses coûts. Il ne peut donc s'agir que de commodités visant à lisser les annuités de certains achats, lorsque le contexte budgétaire n'est pas favorable.

B. LES RÉFORMES DU PROCESSUS INDUSTRIEL À POURSUIVRE OU À ENGAGER

Les problèmes qui affectent la maintenance des matériels des armées sont aussi d'ordre industriel. De fait, les solutions ne sont pas seulement budgétaires ; elles passent également par une amélioration des procédures, de la gestion et du suivi des opérations d'entretien et de réparation.

1. Continuer à restructurer le mode de gestion de l'entretien des matériels

Les structures de maintenance ont été profondément réformées ces dernières années, après un travail de réflexion sur l'organisation de l'entretien. Deux organismes, la SIMMAD puis le SSF, ont été mis en place, respectivement en 1999 et en 2000, afin de rationaliser la gestion de l'entretien et des rechanges des matériels. Le premier bilan que l'on peut tirer de leur action est positif et, sous réserve de quelques ajustements, une réforme de la maintenance des équipements terrestres sur le modèle de la SIMMAD et du SSF serait souhaitable.

a) L'utilité avérée de la structure intégrée de maintien en condition opérationnelle des matériels aériens du ministère de la défense (SIMMAD) et du service de soutien de la flotte (SSF)

Dans le contexte de réforme des armées et de la DGA, en 1996, la crise de disponibilité des matériels que rencontra l'armée de l'air en 1995-1996 a révélé l'inconvénient de ne pas disposer d'une structure capable de centraliser les processus de maintenance et possédant une certaine expertise en matière d'expression des besoin marine. Avec un budget annuel de 1,4 milliard d'euros, elle gère 700 000 références aéronautiques, conclut 600 marchés et passe 20 000 postes de commande chaque année. Le 4 septembre 2002, ses effectifs budgétaires s'élevaient à 569 personnes (131 issues de la DGA, 286 de l'armée de l'air, 28 de l'armée de terre et 122 de la marine) et, en 2003, elle devrait recourir à 380 personnes supplémentaires.

La SIMMAD va développer son activité au cours des prochaines années : afin de lui donner tous les leviers permettant d'optimiser la disponibilité des flottes et donc d'assumer ses responsabilités, elle se verra aussi confier à partir du 1er septembre 2003 la maîtrise d'ouvrage déléguée de la maintenance aéronautique et disposera des moyens à cet effet.

Les efforts engagés commencent à porter leur fruits : en décembre 2000, le taux de disponibilité moyen des matériels aériens des armées s'élevait à 54,2 %, pour un objectif de 60 %. Ce taux est passé à 56,7 % en janvier 2002, 58,7 % en juin et il a dépassé 60 % en août, ce qui laisse présager que l'objectif de 67 %, assigné à la SIMMAD pour l'année 2002, est en passe d'être atteint. De plus, l'indisponibilité logistique a reculé de 7 points, en passant de 18,1 % en décembre 2000 à 11 % en juin 2002. Cependant, des difficultés persistent, notamment pour les indisponibilités dites techniques, qui demeurent toujours supérieures à l'objectif fixé de 25%. La création de la SIMMAD s'est donc traduite par l'amélioration de la disponibilité des aéronefs : l' « effet SIMMAD » existe et il est quantifiable. Par ailleurs, les industriels en charge de la maintenance se félicitent de disposer d'un interlocuteur unique et ils soulignent que la circulation de l'information entre les différents acteurs concernés, ainsi que l'organisation générale de l'entretien, sont meilleures.

De création récente, la SIMMAD a réussi son entrée en activité, mais il lui reste à consolider son travail. En juin 2002, un plan d'action a été élaboré. Il fixe comme priorités de rétablir la disponibilité moyenne et modulée des flottes d'appareils, de continuer à maîtriser les coûts, d'_uvrer à une gestion ouverte aux partenaires de la France des programmes européens (Tigre, NH 90) et de parachever la mise en place de l'organisation. La SIMMAD constitue donc un repère en matière de réforme des structures de maintenance des armées. Elle a pu être utilisée comme modèle lors de la création d'une structure similaire pour la flotte, en 2000, et pourrait l'être de nouveau à terme pour la maintenance des matériels de l'armée de terre.

La même approche a été adoptée pour la création du SSF, en juin 2000. Placé sous l'autorité du chef d'état-major de la marine et composé de personnels de la marine et de la DGA, ce service est chargé du soutien technique et logistique des bâtiments de surface et des sous-marins. Il a été créé pour pallier l'insuffisance de la disponibilité technique des bâtiments et pour remédier à l'éclatement des responsabilités de l'entretien moitié de membres de la DGA et pour moitié de personnels de la marine (400 chacun). Depuis lors, la marine a accru sa contribution. En outre, une centaine de personnes venant de DCN sera mise à disposition du SSF au 1er janvier 2003. Au sein du SSF, cohabitent donc personnels de la DGA et de la marine, civils et militaires, et l'effectif total s'élevait, au 4 septembre 2002, à quelque 1 011 personnes ; toutefois, il manque un nombre suffisant d'acheteurs spécialisés, ce qui pénalise la réactivité du service. Le SSF est constitué principalement d'une direction centrale à Paris et de directions locales à Brest et à Toulon. Des antennes relaient son action à Cherbourg et dans les ports outre-mer.

Tout comme la SIMMAD, le SSF poursuit actuellement son développement et prend en charge de nouvelles compétences, puisque la gestion des rechanges militaires lui incombera au 1er janvier 2003. A cette date, le SSF connaîtra un autre changement : il devra désormais conclure des marchés avec DCN en respectant les procédures du code des marchés publics, et non plus des contrats dits « internes », du fait de la transformation du statut de l'ancienne direction du ministère de la défense.

Le bilan de la réforme des structures de maintenance est globalement satisfaisant, même s'il apparaît plus à l'avantage de la SIMMAD que du SSF. Etant donné que les structures mises en place sont récentes et en plein développement, on est en droit d'espérer des évolutions positives, notamment du fait du retour d'expérience désormais acquis. La question se pose dès lors de l'extension de ces réformes à la maintenance des équipements terrestres.

b) Vers la mise en place d'une structure équivalente pour l'armée de terre ?

Outre les industriels, l'organisation de l'entretien des matériels de l'armée de terre repose aujourd'hui sur l'état-major de l'armée de terre, la direction centrale du matériel de l'armée de terre (DCMAT) et la SIMMAD. Le bureau des systèmes d'armes de l'état-major établit un plan d'évolution des parcs à 15 ans. La DCMAT, organisme garant de la DTO devant le chef d'état-major de l'armée de terre, dispose du service central de la maintenance de l'armée de terre (SCMAT), qui est chargé de la passation des marchés de maintenance.

Il semble que cette organisation ne permette pas d'avoir une vision claire et transparente de l'efficacité des marchés sur la DTO : il existe parfois un décalage entre les directives centrales du directeur de la DCMAT et les actions entreprises au sein des établissements locaux de celle-ci (problèmes de coordination des réparateurs, notamment). De plus, la disponibilité des équipements de l'armée de terre n'est guère satisfaisante, comme cela a été souligné plus haut. La réorganisation de la DCMAT et du SCMAT en une structure interarmées pour la maintenance du matériel de l'armée de terre (SIMMT), sur le modèle de la SIMMAD et du SSF, pourrait être envisagée dans un délai de 1 à 5 ans, afin de remédier à ces défauts d'organisation et à l'insuffisance de la disponibilité des matériels ; un tel délai se justifie par la diversité et le nombre des équipements à superviser.

Cependant, il reste très difficile d'évaluer le coût de fonctionnement des structures interarmées, ainsi que les économies qui découlent de leur création. Pour les estimer, il serait nécessaire de comparer le coût de leurs prestations à celui des prestataires équivalents du secteur privé, qui n'existent pas toujours, notamment pour certains types de matériels terrestres (blindés lourds, pièces d'artillerie, notamment). La création d'une SIMMT présente donc des incertitudes.

2. Recourir davantage à l'externalisation des tâches de maintenance

L'externalisation des fonctions d'entretien des matériels consiste à confier à des sociétés privées le maintien en condition opérationnelle des équipements des armées. Deux éléments interviennent à titre principal pour la décision du recours à l'externalisation : d'une part, le coût économique des opérations d'entretien ; d'autre part, les contraintes qui pèsent sur le personnel en matière de maintenance. Certes, il faut également tenir compte de certaines limites, d'ordre stratégique ou d'indépendance nationale notamment. Cependant, l'externalisation présente de réels avantages, notamment dans un cadre contractuel renouvelé reposant sur la conclusion de marchés de longue durée assortis d'objectifs de disponibilité garantis par les entreprises.

D'ailleurs, comme le relève le livre blanc du conseil des industries de défense française (CIDEF), rendu public le 16 juillet 2002 (11: « La création de structures intégrées de maintenance (SIMMAD, SIMMT et SSF) est un cadre favorable à une évolution vers un transfert plus large de responsabilité vers l'industrie en matière de maîtrise d'_uvre du MCO, voire d'externalisation ». Cette perspective est également prise en compte par le rapport annexé au projet de loi de programmation militaire 2003-2008, qui souligne que la politique d'externalisation du ministère de la défense sera « accentuée » (12). Fort de ses propres constatations, le rapporteur adhère à cette évolution.

a) Un recours qui se heurte à certaines limites

L'externalisation de certaines tâches de maintenance par les armées est aujourd'hui une réalité : elle permet une réduction des coûts liés à l'entretien et une meilleure gestion des personnels, en rendant possible un redéploiement des effectifs libérés vers des fonctions plus opérationnelles.

Il faut néa aux dépannages ;

- le niveau technique d'intervention n° 2 (NTI 2), qui concerne des opérations curatives (réparations, échanges d'ensemble, réglages) pour remettre en état des appareils endommagés, ainsi que des opérations préventives pour assurer la sécurité des utilisations de matériels ;

- le niveau technique d'intervention n° 3 (NTI 3), qui englobe les opérations de rénovation pour restaurer le potentiel (grandes visites) et les opérations importantes de remise en état sur des équipements ; ces réparations sont le plus souvent longues et elles demandent des moyens techniques importants.

De l'aveu de la grande majorité des personnes auditionnées par le rapporteur, il ne semble pas souhaitable que la maintenance de la catégorie du NTI 1 soit externalisée, à l'exception de celle qui concerne les aéronefs de la gamme civile utilisés par les armées (certaines flottes, telles les Airbus, les Falcon 20 et 900 n'ont jamais fait l'objet d'une prise de compétence par des personnels de l'armée de l'air) ; pourtant, le rapporteur considère que certains matériels de l'armée de terre (véhicules légers et de transport similaires à ceux qui existent dans le secteur civil, par exemple) pourraient eux aussi voir leur maintenance de NTI 1 externalisée. Pour ce qui concerne les réparations de NTI 3, qui demandent une certaine durée et de la stabilité, une partie d'entre elles est déjà confiée au secteur privé ; d'ailleurs, quand cela n'est pas le cas, pour la marine notamment, les entreprises étatiques en charge de ces réparations recourent à la sous-traitance, faute de savoir-faire, ce qui pose la question d'une sous-traitance plus directe par le SSF lui-même. Ce sont les opérations de NTI 2 pour lesquelles le potentiel d'externalisation est le plus ouvert. Ce choix repose sur la démonstration du maintien de la capacité opérationnelle des matériels concernés et sur l'intérêt économique d'un tel transfert d'activité vers le secteur privé. L'externalisation apparaît souhaitable pour l'entretien des composants électriques, des machines, des coques et même de petits bâtiments, tels que les vedettes de la marine.

Dans tous les cas, la décision d'externaliser ne peut être prise que sur la base d'une comparaison des coûts d'intervention respectifs des armées et des prestations de services. La balance doit être faite entre le coût de l'externalisation, globalisant l'ensemble des prestations nécessaires pour rendre le service demandé, et le coût réel dans les armées, qui comprend toutes les dépenses de fonctionnement relatives au personnel, aux infrastructures, au transport et à l'outillage.

La question de l'efficacité des partenaires industriels est primordiale : l'externalisation du MCO suppose le recours à des entreprises présentant des compétences très spécifiques. Ainsi, GIAT Industries ou DCN possèdent une position incontournable pour la maintenance de certains matériels. Le marché de l'entretien des équipements militaires est susceptible d'apporter à ces groupes des ressources non négligeables, notamment dans le contexte d'une réduction importante de leurs plans de charge. Toutefois, compte tenu des contraintes budgétaires, l'externalisation à ces entrepri a retenu la proposition d'Ogma ; une telle réduction des coûts est assurément intéressante pour l'armée de l'air, sous réserve qu'elle ne se révèle pas in fine plus chère en tenant compte de la qualité des prestations.

Si l'externalisation permet de réaliser des économies, elle autorise également une meilleure gestion du personnel et elle favorise aussi une plus grande réactivité du cycle de maintenance, tout particulièrement pour les rechanges. Dans cette optique, l'armée de l'air et la SIMMAD envisagent de sous-traiter la maîtrise des stocks de rechanges consommables (joints, pneus...), à des entreprises capables de leur garantir la livraison d'une pièce de rechange en un lieu donné sous 48 heures. C'est le projet « optimisation du réapprovisionnement des rechanges consommables des matériels aéronautiques des forces armées françaises » (ORRMA) qui, sans surcoût, permettrait de réaffecter 60 à 70 personnels de la SIMMAD à d'autres tâches où leur savoir-faire serait mieux employé. L'externalisation des petits colis de rechanges pourrait faire gagner aux appareils 4 à 5 points de disponibilité avec ORRMA. Il s'agit d'un exemple intéressant, qui mériterait d'être étudié par les autres armées.

Dans l'esprit de sa proposition d'intégrer le coût de possession des matériels dès les acquisitions, le rapporteur suggère également de revoir ce mode de contractualisation des relations entre les armées et les industriels. Il serait en effet pertinent de définir un devis pour la maintenance sur toute la durée de vie des matériels. Afin de prendre en compte le coût d'emploi des équipements, les industriels provisionneraient les risques encourus sur une longue durée et ils adopteraient une approche par anticipation, notamment en matière de fourniture de pièces de rechanges. Cette logique suppose de conclure des contrats de long terme dans lesquels les industriels garantiraient des niveaux de taux de disponibilité pour les matériels. En l'espèce, la responsabilité de la maintenance serait supportée par les entreprises et non par les armées.

Un contrat de maintenance sur une période minimale, assortie d'un engagement sur des objectifs de DTO, semble constituer une solution intéressante, d'autant plus qu'une telle pratique permettrait de rémunérer les performances réalisées au niveau de la maintenance. L'intéressement des acteurs à l'amélioration de la disponibilité des équipements est très positif. La dilution des responsabilités n'est en effet guère propice à l'amélioration de l'efficacité du processus de maintenance, alors que, dans un cadre contractuel, la performance des acteurs est immédiatement rémunérée ou sanctionnée.

L'externalisation doit être considérée de façon pragmatique, sans a priori : si certaines tâches doivent être exécutées au sein des armées, d'autres peuvent l'être à moindre coût par des entreprises dans un cadre contractuel adapté. Ces dernières sont en mesure de mettre en _uvre un savoir-faire spécifique et de bénéficier d'économies d'échelle, ce qui n'est pas toujours possible pour les armées.

SYNTHÈSE 160;: comment pouvait-il en être autrement alors que les engagés sont désormais professionnels et que l'état des matériels détermine leurs conditions de travail, quand il ne s'agit pas leurs conditions de vie, à l'image des marins qui vivent pendant plusieurs semaines voire des mois sur leurs bâtiments ? Il n'est donc plus possible de s'en tenir au statu quo, comme le Président de la République et le Gouvernement l'ont souligné ces dernières semaines.

Les causes du mal sont profondes et pernicieuses. Les défaillances qui ont affecté la maintenance des matériels résultent d'une insuffisance des crédits budgétaires consacrés au maintien en condition opérationnelle. En outre, le transfert de la charge de l'entretien programmé du titre III au titre V s'est fait sans revalorisation équivalente du montant des crédits d'équipement : du coup, ce sont des charges de fonctionnement supplémentaires d'un montant d'1,4 milliard d'euros qui ont été imputées aux budgets consacrés aux investissements. Certes, la dernière annuité de la loi de programmation militaire 1997-2002 a rétabli les crédits à des niveaux plus conformes aux besoins ; cependant, il faut du temps pour restaurer toute une chaîne logistique et industrielle désorganisée sous l'effet des coupes budgétaires antérieures. L'effet d'inertie des régulations budgétaires est dévastateur pour le cycle de la maintenance.

On doit se réjouir des mesures importantes qui ont été proposées par le Gouvernement dans le projet de loi de programmation militaire 2003-2008. Les crédits dévolus à l'entretien programmé des matériels, hors maintenance prévue dans les contrats, devraient s'établir en moyenne à près de 2,4 milliards d'euros chaque année. A titre de comparaison, la moyenne des crédits d'entretien consommés sur les exercices couvrant la période 1999-2001 était de 2,16 milliards d'euros par an, déduction faite des annulations et reports. Pourtant, il ne faut pas s'attendre à des effets spectaculaires de cette revalorisation à brève échéance.

En effet, le vieillissement des matériels, qui obère directement leur niveau de disponibilité opérationnelle, est également au nombre des conséquences de budgets insuffisants. Bien souvent, l'absence de crédits a obligé les armées à reporter certaines acquisitions, pourtant nécessaires. Au cours de l'exécution de la loi de programmation militaire 1997-2002, il a manqué aux armées l'équivalent d'une annuité de titre V. De ce fait, les matériels en service ont parfois dû être prolongés au-delà de leur durée de vie opérationnelle, ce qui s'est soldé par des surcoûts d'entretien excessifs.

Parmi les exemples les plus révélateurs, figure l'avion de transport C 160 Transall, dont les 46 premiers exemplaires sont entrés en service entre 1967 et 1973 : alors que le taux de disponibilité de ces appareils s'élevait à plus de 69 % en 1997, pour un coût d'entretien avoisinant 120 millions d'euros, il plafonne désormais à un seuil de 55 %, alors même que le montant des crédits consacrés à leur maintenance a augmenté de près de 60 millions d'euros.

Par cons&eac coûtera quatre fois plus cher à l'armée de terre que celle de leurs prédécesseurs Gazelle et l'armée de l'air s'attend à une évolution similaire pour le Rafale. C'est dire les défis qui attendent les armées en matière d'entretien des matériels ces prochaines années.

Devant de telles perspectives, la seule amélioration des montants budgétaires alloués au maintien en condition opérationnelle des équipements ne peut suffire. D'autres mesures s'imposent et, dans certains cas, les armées ont déjà commencé à les mettre en _uvre.

La création de structures intégrées de l'entretien des matériels aériens (SIMMAD) et de la flotte (SSF) depuis 1999 a permis de réorganiser le mode de traitement du maintien en condition opérationnelle. La gestion des rechanges est ainsi en cours de refonte, de même que la passation des commandes et le suivi des réparations. Bien évidemment, ces structures sont très récentes et leurs résultats ne peuvent être spectaculaires, quelques mois seulement après leur entrée en activité. Cependant, la SIMMAD, qui a été mise en place la première, a d'ores et déjà permis de stabiliser, voire de redresser, le niveau de disponibilité des appareils de l'armée de l'air et de l'aéronavale en améliorant très sensiblement le cycle des rechanges. Le SSF s'est attelé à la même tâche, mais plus tardivement, ce qui explique que les résultats ne soient pas encore vraiment probants. L'armée de terre devrait elle aussi créer une structure équivalente, la SIMMT, dans les années à venir, mais le processus pourrait prendre davantage de temps du fait de la diversité et du nombre des matériels en service.

Pour être complètement efficaces, ces organismes intégrés et interarmées doivent pouvoir planifier et anticiper les réparations des matériels. Il ne semble pas que cela soit tout à fait le cas actuellement, faute de personnels compétents en nombre suffisant et également par manque d'expérience. Contrairement aux raisons souvent évoquées, le code des marchés publics n'est pas forcément un obstacle à une meilleure réactivité ; cependant, son maniement suppose une bonne connaissance des règles, et donc des personnels formés à cet effet.

L'amélioration des conditions d'entretien des matériels des armées passe aussi par d'importants changements dans la réalisation industrielle des réparations. Il semblerait que le marché du maintien en condition opérationnelle des équipements ne soit pas toujours suffisamment attractif pour les entreprises du secteur de la défense. Elles se consacrent davantage aux grands programmes neufs, sans doute plus rémunérateurs. Une partie de la solution réside peut-être dans un changement de nomenclature budgétaire visant à privilégier le « coût de possession » d'un programme sur son coût d'acquisition. Ce faisant, en prévoyant dès l'origine le coût d'entretien des équipements acquis par les armées et en individualisant les crédits destinés à l'entretien pour chaque armée, on garantirait une certaine « sanctuarisation » des financements concernant le maintien en condition opérationnelle. Les industriels seraient plus motivés. Ils disposeraient d'une meilleur maîtrisée et intelligente de sous-traitance peut porter ses fruits.

Au titre des économies à attendre de ces pratiques, il convient de citer l'exemple du renouvellement du contrat de maintenance des C 130 (jusqu'à présent assurée par la société Sogerma), qui a eu lieu en juin 2002. En application du nouveau code des marchés publics, l'armée de l'air a lancé un appel d'offres européen. La société portugaise Ogma y avait répondu. L'offre portugaise retenue était nettement inférieure à celle de la filiale d'EADS. Reste à savoir maintenant si, au regard de cette expérience, le bon choix a été fait. En effet, le prestataire « moins disant » en matière de tarification n'est pas nécessairement le « mieux disant » pour la qualité de son offre dans le temps.

Certes, tout ne peut faire l'objet d'externalisation ; cependant, certaines tâches actuellement remplies par les armées pourraient utilement être déléguées à des entreprises, notamment en ce qui concerne la gestion des rechanges dits consommables. L'armée de l'air est là aussi pionnière. Elle a lancé le projet « optimisation du réapprovisionnement des rechanges consommables des matériels aéronautiques des forces armées françaises » (ORRMA). Par le biais d'une sous-traitance à des entreprises capables de garantir la livraison de pièces de rechanges en un lieu donné sous 48 heures, ce mode de gestion permettrait de réaffecter sans surcoût 60 à 70 personnels de la SIMMAD à d'autres tâches où leur savoir-faire serait mieux employé.

En définitive, les voies d'amélioration ne manquent pas. Il appartient au ministère de la défense de les identifier et de les expérimenter.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission de la défense nationale et des forces armées a examiné le rapport d'information de M. Gilbert Meyer sur l'entretien des matériels des armées, au cours de sa réunion du mercredi 23 octobre 2002.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur.

M. Jean-Louis Bernard a exprimé ses doutes sur l'exemplarité du contrat passé avec la société portugaise Ogma. Aux termes de l'appel d'offres lancé par l'armée de l'air, cette entreprise était effectivement la moins disante, mais il n'est pas évident qu'elle soit la mieux disante. Ses défaillances en matière de pièces de rechange ont eu un impact sur le taux d'immobilisation des appareils entretenus.

M. Gilbert Meyer, rapporteur, a indiqué que ce contrat avait été cité en exemple par l'état-major de l'armée de l'air et la SIMMAD. Du point de vue financier, il semble que l'offre méritait d'être retenue, même s'il conviendra de vérifier dans la durée la qualité des prestations fournies et, éventuellement, d'ajuster le contrat.

M. Jean-Louis Léonard a estimé que le contrat passé avec la société Ogma incitait à se méfier des chiffres mirobolants fournis par la délégation générale pour l'armement et l'armée de l'air. Si l'on prend en compt sociaux résultant du transfert d'une activité à l'étranger.

Le président Guy Teissier a souligné que la France avait toujours voulu être le bon élève de l'Europe en recourant aux appels d'offres européens et internationaux. Or, les autres Etats membres n'agissent pas forcément de même. La construction de navires à l'étranger représente un coût social et, s'il convient de s'insérer pleinement dans l'Europe de la défense, celle-ci doit respecter les équilibres sociaux.

M. Charles Cova a rappelé que la construction de la coque du bâtiment destiné à remplacer le Bougainville avait lieu aux Pays-Bas, même si le matériel électronique de reconnaissance devant l'équiper restait de la compétence de Thales en France. L'obtention de ce type de marchés est pourtant une condition de la survie de DCN, qui doit s'adapter à un contexte concurrentiel.

Le président Guy Teissier a souligné que certains Etats membres de l'Union européenne usaient de clauses de confidentialité militaire pour protéger leurs marchés.

M. François Lamy s'est étonné du lien établi par le rapporteur entre le manque d'une annuité dans l'exécution de la précédente loi de programmation militaire et la prolongation de la durée de vie de certains matériels, tels les Transall.

M. Gilbert Meyer, rapporteur, a indiqué que si le titre V avait été davantage doté, l'exécution de la loi de programmation militaire aurait pu mieux correspondre aux besoins de renouvellement des équipements. Le coût d'entretien des matériels les plus anciens est nettement plus élevé et le cas des Transall, dont l'entretien a conduit à un surcoût de 60 millions d'euros ces dernières années, n'est qu'un exemple parmi d'autres.

M. Antoine Carré a espéré que le Portugal saura se souvenir qu'un contrat a été conclu entre l'armée de l'air et la société Ogma pour l'entretien des C 130, lorsqu'il s'agira d'attribuer le marché de construction de ses trois sous-marins neufs, pour lesquels des entreprises françaises et allemandes sont en concurrence.

M. René Galy-Dejean s'est inquiété de la capacité des armées à utiliser effectivement les crédits prévus par le projet de loi de programmation militaire 2003-2008, faute d'un outil industriel adapté. Les grandes entreprises du secteur de la défense ont dû récemment réduire leurs effectifs et ce sont leurs branches en charge de l'entretien des matériels qui ont été les plus affectées. Il en est résulté une perte de capacité qui s'est répercutée sur la sous-traitance. Le tissu industriel est aujourd'hui fragile. Il convient donc de soutenir le programme de l'armée de l'air concernant l'optimisation du réapprovisionnement des rechanges consommables par le biais du recours à des entreprises sous-traitantes. Cela permettrait de réaffecter utilement une partie des personnels de la SIMMAD à des tâches techniques plus pointues.

M. Gilbert Meyer, rapporteur, a confirmé cette analyse. Si l'amélioration de l'entretien des matériels suppose au préalable une uniformisatio avions Charles-de-Gaulle, afin de fixer ceux des futurs équipements, NH 90, VBCI et futures frégates, de manière à ne pas commettre les mêmes erreurs.

M. Gilbert Meyer, rapporteur, a répondu que cette proposition figurait dans son rapport et qu'il était nécessaire de tenir compte des coûts d'entretien au moment de l'acquisition des matériels neufs. Il s'est également déclaré favorable à ce que tous les crédits d'entretien soient intégrés dans le titre V, avec une séparation claire entre les dotations budgétaires qui concernent les acquisitions de matériels nouveaux et celles qui concernent l'entretien des équipements. Il s'agirait d'un premier pas vers l'appréciation d'un coût de possession.

M. Francis Hillmeyer s'est étonné de la faible disponibilité du char Leclerc, matériel neuf que l'armée de terre continue encore à recevoir. Le coût des pièces détachées pour cet équipement ayant fortement augmenté, il est primordial de faire jouer la concurrence. Le VBCI risquant de connaître les mêmes problèmes, ne faudrait-il pas collaborer à l'échelle européenne pour alléger les coûts d'entretien ? Ayant noté que le prix de pièces détachées identiques était plus important en France qu'en Allemagne, il a émis des réserves sur l'attitude de certaines sociétés publiques.

M. Gilbert Meyer, rapporteur, a déclaré qu'il n'avait pas de crainte particulière pour la gestion des pièces de rechange grâce au bon fonctionnement des organismes intégrés nouvellement créés ou en projet pour l'entretien des matériels aériens, de la flotte ou des matériels terrestres (SIMMAD, SSF, SIMMT). Le remplacement du char Leclerc n'étant pas à l'ordre du jour, l'armée de terre doit continuer à l'entretenir pour le maintenir en condition opérationnelle.

Le président Guy Teissier a indiqué que, lorsqu'ils sont livrés, les chars Leclerc ne sont pas encore opérationnels, car ils nécessitent toute une préparation, ce qui peut expliquer pour partie leur faible taux de disponibilité.

M. Richard Mallié a souhaité savoir pourquoi l'Etat n'incluait pas les coûts de fonctionnement dans les crédits d'acquisition des matériels. Il a également demandé pourquoi l'entretien n'était pas inclus dans les marchés d'équipement.

M. Gilbert Meyer, rapporteur, a répondu que le matériel neuf faisait l'objet d'un contrat d'entretien sur quelques années, mais que rien n'était prévu au-delà. Contrairement aux collectivités locales, l'Etat ne pratique pas l'amortissement qui lui permettrait d'intégrer le coût de l'entretien dans le prix de ses acquisitions.

M. Yves Fromion a rappelé que, de manière traditionnelle, les matériels militaires étaient considérés comme du consommable de guerre et que leur utilisation était davantage dictée par des soucis d'ordre opérationnel que par des préoccupations de bon entretien. Contrairement aux matériels civils, les révisions n'ont pas forcément lieu lorsqu'elles sont programmées, mais lorsque les contraintes opérationnelles en laissent la a fait remarquer que les contrats d'acquisition passés aux Etats-Unis incluaient généralement le financement de l'entretien, afin de fidéliser les clients. Il s'est étonné du faible taux de disponibilité des Mirage 2000-5, matériels pourtant récents.

M. Gilbert Meyer, rapporteur, a répondu que ces avions avaient été maintenus au sol pour des raisons de sécurité, liées notamment à un problème technique affectant les moteurs de l'ensemble des Mirage 2000, qui ont pu être réparés grâce aux mesures financières du dernier collectif budgétaire.

La commission a décidé, en application de l'article 145 du Règlement, le dépôt du rapport d'information en vue de sa publication.

ANNEXES

ANNEXE N° 1 :
GLOSSAIRE

ALAT : aviation légère de l'armée de terre ;

AP : autorisations de programme ;

CP : crédits de paiement ;

DCMAT : direction centrale des matériels de l'armée de terre ;

DCN : (ancienne) direction des constructions navales ;

DGA : délégation générale pour l'armement ;

DTO: disponibilité technique opérationnelle ;

EADS : European aeronautic and defense society ;

EPM : entretien programmé des matériels ;

ERC : engin roues-canon ;

FOST : force océanique stratégique ;

IPER : indisponibilité périodique pour entretien et réparation ;

LFI : loi de finances initiale ;

LRM : lance roquettes multiples ;

MCO : maintien en condition opérationnelle ;

ONU : Organisation des Nations unies ;

OPEX : opérations extérieures ;

OTAN : Organisation du traité de l'Atlantique nord ;

PFI : private finance initiative (financement d'initiative privée) ;

PLF : projet de loi de finances ;

SCMAT : service central du matériel ;

SIMMAD : structure intégrée de maintien en condition opérationnelle des matériels aériens du ministère de la défense ;

SIMMT : structure intégrée de maintien en condition opérationnelle des matériels terrestres ;

SMA : service de maintenance aéronautique ;

SNA : sous-marins nucléaires d'attaque ;

SNLE : sous-marins nucléaires lanceurs d'engins ;

SNLE-NG : sous-marins nucléaires lanceurs d'engins de nouvelle génération ;

SSF : service de soutien de la flotte ;

TCD : transport de chalands de débarquement ;

VAB : véhicule de l'avant blindé ;

VBL : véhicule blindé léger.

ANNEXE N° 2:
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

· états-majors des armées :

- M. le général Jean-Pierre Job, chef d'état-major de l'armée de l'air, accompagné du général François Bourdilleau, major général de l'armée de l'air et du général Patrice Klein, sous chef d'état-major « opérations logistique » ;

- M. le vice-amiral Yves Lagane, sous-chef d'état-major « opérations logistique » de l'état-major de la marine, accompagné de M. le capitaine de vaisseau Christophe Suard, chef du bureau « soutien des bâtiments et des formations à terre » et de M. le capitaine de frégate Yann Marboeuf, chef du bureau « soutien des aéronefs » ;

- M. le colonel Jean-Albert Epitalon, chef du bureau des systèmes d'armes à la division « études-planification-finances » de l'état-major de l'armée de terre, accompagné du lieutenant-colonel Pierre Louis Brégal, chargé des relations extérieures au bureau planification finances, et du lieutenant-colonel Lefebvre, ancien chef de corps du 1er régiment d'hélicoptères de combat de Phalsbourg.

· ministère de l'économie, des finances et de l'industrie :

- Mme Christine Buhl, sous-directrice de la 5ème sous-direction de la direction du budget, en charge du ministère de la défense.

· délégation générale pour l'armement :

- M. Denis Plane, directeur des programmes, des méthodes d'acquisition et de la qualité (DPM), accompagné de M. Gérard Brétécher, sous-directeur du service du maintien en condition opérationnelle de la DPM et de M. Francis Chompret, chargé de mission auprès du délégué général pour l'armement.

· services chargés de l'entretien :

- M. le général Jean-Marc Renucci, directeur central de la DCMAT, accompagné de M. le colonel Renaudin, chef de la section « management » du bureau d'études, de coordination et de management et de M. Van Grevenynghe, sous-directeur en charge de l'administration ;

- M. le général Michel Ascencio, directeur de la SIMMAD et Mme le colonel Evelyne Bernard, sous directeur-adjoint « planification » ;

- M. l'ingénieur général de l'armement Jean-Paul Panié, directeur du service de soutien de la flotte, accompagné de M. Philippe Long, adjoint à la sous-direction des programmes et des méthodes et de M. Jean Desjeux, chargé de mission auprès du directeur.

· industriels :

- M. Charles Edelstenne, président-directeur général de Dassault Aviation, accompagné de M. le général Pierre Warmé, conseiller militaire ;

- M. Denis Verret, vice-président d'EADS chargé des af N° 0328 - Rapport d'information  sur l'entretien des matériels des armées (M. Gilbert Meyer)

1 () Journal officiel des débats parlementaires du 4 juillet 2002, n° 24 AN, p.1832.

2 () C'est le cas, par exemple, des hélicoptères de l'armée de terre, objets d'un récent rapport d'information de M. Serge Vinçon, au nom de la commission des affaires étrangères et de la défense du Sénat (n° 350, 2001-2001).

3 () Voir à ce sujet le rapport d'information n° 3302 : « l'entretien de la flotte : défis et perspectives » (XIème législature).

4 () La liste de ces auditions figure en annexe au présent rapport.

5 () Voir le rapport d'information Sénat n° 350 (2001-2002) précité, p.13.

6 () Voir à ce sujet le rapport d'information n° 3302 (XIème législature) précité.

7 () Soit 20 000 soldats relevés tous les quatre mois.

8 () Rapport spécial de M. Jean-Michel Boucheron (n° 3320) sur les crédits de la défense, projet de loi de finances pour 2002, p. 63.

9 () Loi n° 2002-1050 du 6 août 2002, JORF du 8 août 2002, p. 13576.

10 () Cela signifie que ne sont pas inclus dans cette enveloppe les équipements non consommables et les stocks de rechanges réparables, qui sont déjà prévus dans les contrats d'acquisition passés avec les industriels.

11 () Livre Blanc du CIDEF ; « L'industrie de défense : un atout pour la France » ; 16 juillet 2002, p. 9.

12 () Projet de loi de programmation militaire pour les années 2003-2008 n° 187, p.37.