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N° 3753

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 21 février 2007.

RAPPORT D'INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l'article 145 du Règlement

PAR LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES

en conclusion des travaux d'une mission d'information
constituée le 12 avril 2006
 (1)

sur le contrôle de l'exécution des crédits de la défense pour l'exercice 2006

ET PRÉSENTÉ PAR

M. Guy TEISSIER,

Député.

--

(1) La composition de cette mission figure au verso de la présente page.

La mission d'information sur le contrôle de l'exécution des crédits de la défense pour l'exercice 2006 est composée de : M. Guy Teissier, président ; M. Jean-Louis Bernard ; M. Jean-Michel Boucheron ; M. Antoine Carré ; M. Charles Cova ; M. Philippe Folliot ; M. Yves Fromion ; M. René Galy-Dejean ; M. Joël Hart ; M. Marc Joulaud ; M. Jean Michel ; M. Jérôme Rivière ; M. Philippe Vitel.

S O M M A I R E

_____

Pages

INTRODUCTION 5

I. -  UNE EXÉCUTION DES CRÉDITS TRÈS SATISFAISANTE

EN CONFORMITÉ AVEC L'AUTORISATION PARLEMENTAIRE 7

A. LES DISPOSITIONS DE LA LOI DE FINANCES INITIALE

ONT ÉTÉ RESPECTÉES ET LARGEMENT COMPLÉTÉES EN COURS D'EXÉCUTION 7

1. Un budget initial ambitieux, respectant la loi de programmation militaire 7

2. Des crédits supplémentaires pour financer les OPEX

et les programmes d'équipement 8

B. UNE CONSOMMATION GLOBALE EN NETTE HAUSSE 10

1. Les transferts et fonds de concours 11

2. Une meilleure consommation des crédits de titre 2 12

3. Une consommation des crédits décalée générant encore

des intérêts moratoires 13

C. UN EFFORT SIGNIFICATIF DE RÉDUCTION DES REPORTS DE CRÉDITS 15

II. -  LES PRINCIPAUX SUJETS ABORDÉS

LORS DE L'ANALYSE QUALITATIVE DE L'EXÉCUTION DU BUDGET 19

A. LE PROGRAMME BARRACUDA ET LE DEUXIÈME PORTE-AVIONS 19

B. UNE AÉROMOBILITÉ ENCORE INSUFFISAMMENT ASSURÉE 19

C. LA QUESTION DES CARBURANTS 20

D. UNE AMÉLIORATION DE L'ACTIVITÉ DES FORCES ET DU RECRUTEMENT 21

CONCLUSION 25

EXAMEN EN COMMISSION 27

INTRODUCTION

La situation internationale a justifié en 2006 à la fois le déploiement de nouvelles troupes françaises sur des théâtres étrangers comme le Liban et le renforcement de missions en cours que ce soit en Afghanistan ou en Côte-d'Ivoire. À ce jour, plus de 12 000 hommes et femmes, militaires et civils, sont envoyés à travers le monde. Les forces françaises ont exercé divers commandements dans un cadre multinational, le plus marquant étant celui de la FINUL 2 au Liban.

Lors de son audition par la commission le 13 février dernier, la ministre de la défense a rappelé que la crédibilité diplomatique de la France « dépend de sa capacité à agir de façon souveraine et autonome ». Pour faire face à la diversification et à la complexité des menaces actuelles, qu'il s'agisse du terrorisme, de la prolifération nucléaire ou des crises régionales, les armées françaises doivent en effet disposer des moyens suffisants et adéquats. Dès lors, il est primordial de veiller à ce que l'exécution des crédits affectés à la défense soit conforme à l'autorisation parlementaire et respecte les orientations de la loi de programmation militaire.

Dès 2003, la commission de la défense a mis en place un dispositif innovant de contrôle parlementaire en créant une mission d'information chargée de veiller à la bonne exécution des crédits de la défense. Reconduite en 2004 et en 2005, cette mission a permis de souligner que la loi de programmation militaire pour 2003-2008 était parfaitement respectée et que les pratiques antérieures de régulation budgétaire ou d'exécution contrainte étaient révolues. Malgré la qualité de l'exécution, les missions s'étaient pourtant inquiétées de la hausse des reports de crédits et de charges d'une année sur l'autre.

Souhaitant poursuivre la démarche engagée, la commission de la défense a créé le 12 avril 2006, une nouvelle mission d'information sur l'exécution des crédits 2006 de la défense. La démarche des années précédentes a été conservée, la mission demandant aux ministères de la défense et de l'économie, des finances et de l'industrie, de lui présenter tous les trimestres des indicateurs reflétant la consommation effective des crédits. Elle a également souhaité obtenir des informations qualitatives relatives à l'activité des forces, aux opérations extérieures, ou à la réalisation des grands programmes d'armement. Comme les autres années, la mission n'a pu que se féliciter de la qualité de la coopération des ministères concernés.

La mission a pu constater que l'exécution 2006 était particulièrement satisfaisante, que les reports de crédits diminuaient et que l'activité des troupes augmentait. Les grands programmes d'armement sont exécutés en conformité avec la loi de programmation militaire même si certaines incertitudes demeurent pour l'aéromobilité.

I. -  UNE EXÉCUTION DES CRÉDITS TRÈS SATISFAISANTE EN CONFORMITÉ AVEC L'AUTORISATION PARLEMENTAIRE

A. LES DISPOSITIONS DE LA LOI DE FINANCES INITIALE ONT ÉTÉ RESPECTÉES ET LARGEMENT COMPLÉTÉES EN COURS D'EXÉCUTION

1. Un budget initial ambitieux, respectant la loi de programmation militaire

Pour la quatrième année consécutive, la loi de finances initiale (LFI) pour 2006 a respecté les dispositions de la loi de programmation militaire (LPM) pour 2003-2008, les crédits de paiement (CP) affectés au programme 146 (équipement des forces) s'élevant à 10,607 milliards d'euros en 2006 soit une hausse de près de 6 % par rapport à 2005. Les autorisations d'engagement (AE) de titre 5 progressent pour leur part de 230 millions d'euros par rapport à 2005, soit une hausse de 2,3 %.

Crédits LFI 2006 par programme

(en millions d'euros)

 

AE

CP

144 - Environnement et prospective de la politique de défense

1 792,8

1 641,1

178 - Préparation et emploi des forces

22 089,5

21 383,7

212 - Soutien de la politique de la défense

2 447,0

2 371,6

146 - Équipement des forces

10 621,1

10 703,4

152 - Gendarmerie nationale

7 428,7

7 276,2

Total mission défense et sécurité

(y compris les fonds de concours rattachés)

44 379,1

43 376,0

Source : budget voté en 2006

L'essentiel des crédits sont affectés au programme 178 « préparation et emploi des forces » qui concentre à lui seul plus de 49 % des crédits affectés à la défense. Les crédits du programme 146 « équipement des forces » représentent quant à eux près du quart du budget du ministère.

Crédits relevant du ministère de la défense et des anciens combattants

ouverts en LFI par titre

(en millions d'euros)

Crédits ouverts

LFI 2006

LFI 2005

AE

CP

AE

CP

Titre 2. Dépenses de personnel

23 882,0

23 882,0

23 797,0

23 797,0

rémunérations d'activité

13 498,8

13 498,8

12 923,9

12 923,9

cotisations et contributions sociales

10 146,8

10 146,8

10 550,3

10 550,3

prestations sociales et allocations diverses

236,3

236,3

322,9

322,9

Titre 3. Dépenses de fonctionnement

8 890,2

7 981,7

8 022,8

7 500,9

dépenses de fonctionnement autres que celles de personnel

8 525,4

7 626,9

7 682,4

7 163,5

subventions pour charge de service public

364,8

354,8

340,5

337,3

Titre 5. Dépenses d'investissement

11 057,6

10 953,4

10 398,0

10 794,6

Titre 6. Dépenses d'intervention

3 722,7

3 716,6

3 625,3

3 633,7

Totaux hors fonds de concours prévus

47 552,5

46 533,7

45 843,2

45 726,3

Fonds de concours prévus au titre 2

166,2

166,2

 

 

Fonds de concours prévus sur les autres titres

556,6

556,6

 

 

Totaux y compris fonds de concours prévus

48 275,4

47 256,6

45 843,2

45 726,3

Source : budgets votés en 2005 et 2006

Les dépenses de personnel (titre 2) restent le principal poste de dépense, atteignant pour l'ensemble de la mission défense et sécurité, 23,882 milliards d'euros dans la loi de finances initiale pour 2006, soit 50 % de l'ensemble des dépenses. Elles progressent de 85 millions d'euros par rapport à 2005. Les dépenses d'investissements (titre 5) atteignent, en 2006, près de 11 milliards d'euros, soit 24 % des CP totaux.

2. Des crédits supplémentaires pour financer les OPEX et les programmes d'équipement

- La loi de finances initiale pour 2006 a également mieux pris en compte les surcoûts liés aux OPEX puisque la dotation de 100 millions en 2005 est passée à plus de 175 millions d'euros. Cette dotation s'est cependant avérée très insuffisante pour faire face aux nombreux engagements des troupes françaises en 2006. Le surcoût lié aux OPEX varie, par homme et par an, entre 3400 euros pour le Kosovo et 5400 euros pour le Tchad. Ce surcoût ne tient pas compte des frais de transport particulièrement élevé pour l'Afghanistan (1) par exemple.

Les interventions françaises en Côte-d'Ivoire et au Liban n'ont pu être financées que grâce à des crédits supplémentaires ouverts notamment par le décret d'avance du 10 octobre 2006. Les 452,5 millions d'euros supplémentaires affectés aux forces armées (y compris la gendarmerie) ont été gagés par des annulations équivalentes qui pèsent en particulier sur les crédits d'équipement. Pour maintenir l'effort initial en matière d'équipement, la loi de finances rectificative (LFR) a partiellement rétabli ces crédits.

- Les crédits entrant dans le champ de la LPM 2003-2008 s'élevaient, dans la LFI pour 2006, à 15,7 milliards d'euros en AE et à 15,3 milliards d'euros en CP. Au 31 décembre 2006, 16,16 milliards d'euros pour les AE et 15,7 milliards d'euros pour les CP étaient consommés. Malgré les fonds de concours et avec les annulations portées par le décret d'avance, des crédits supplémentaires étaient indispensables pour faire face aux dépenses d'équipement. La loi de finances rectificative a donc rétabli des crédits annulés et elle a ouvert 241 millions d'euros de crédits d'équipement supplémentaires pour les frégates multi-missions (FREMM). L'ensemble des mouvements intervenus en gestion (LFR, décret d'avance et mouvements techniques) ont ainsi dégagé 250 millions d'euros d'AE et 302 millions d'euros de CP supplémentaires. Manquaient encore 650 millions d'euros d'AE et 100 millions de CP qu'il a fallu prélever sur les reports de crédits.

Mouvements budgétaires intervenus en gestion (Crédits de paiement)

(en millions d'euros)

Programme

Décret d'avance du 10/10/2006

LFR 2006

Autres mouvements

Total des mouvements budgétaires

P 178

préparation et emploi des forces

428,8

15,0

949,3

1 393,1

P 212

soutien

- 45,6

- 97,0

223,3

80,6

P 152

gendarmerie

23,8

0,0

94,8

118,6

P 146

équipement

- 375,6

284,6

261,9

170,9

P 144

environnement et prospective

- 31,3

23,0

- 22,7

- 31,0

Total

0,0

225,6

1 506,5

1 732,2

Source : direction du budget

Les différents mouvements intervenus en gestion ont permis au ministère de la défense de disposer de l'ensemble de ses crédits pour 2006. La loi organique relative aux lois de finances (LOLF) impose la constitution d'une réserve de précaution d'un montant de 5 % des crédits de la mission. Cette réserve permet de financer des dépenses imprévues survenant en cours d'année. Ces crédits sont généralement annulés en cours d'exécution, leur consommation n'apparaissant pas indispensable. Il convient de souligner qu'au contraire des missions des autres ministères, la mission défense et sécurité a pu consommer l'ensemble des crédits précédemment réservés et n'a souffert d'aucune sorte de régulation budgétaire.

Les efforts financiers en faveur des crédits d'équipement permettent de respecter assez largement la loi de programmation militaire. Toutefois, un décalage peut exister entre le respect des engagements financiers et la réalisation physique de la LPM. Lors de sa construction, la LPM a pu par exemple sous-estimer le coût de certains programmes. Elle ne pouvait pas non plus intégrer des modifications substantielles du cahier des charges qui pèsent nécessairement sur le coût final du matériel. Enfin, des matériels non prévus dans la LPM ont été acquis, gonflant ainsi les dépenses d'équipement, sans pour autant livrer effectivement les matériels initialement prévus. Ces adaptations ne représentent en aucun cas une violation des engagements de la LPM mais participent d'une constante réévaluation des besoins, indispensable pour maintenir l'opérabilité des forces ; la LPM restant en tout état de cause un repère incontournable pour l'équipement des forces.

B. UNE CONSOMMATION GLOBALE EN NETTE HAUSSE

Les crédits ouverts par la loi de finances initiale ont été consommés en moyenne à 100 % pour les CP et à 100,7 % pour les AE. Les mouvements intervenus en gestion et les reports de crédits des années antérieures ont en effet permis au ministère de consommer plus de crédits que ceux ouverts en LFI. la consommation moyenne des crédits disponibles est très satisfaisante, atteignant 88,4 % pour les AE et 96,1 % pour les CP.

Consommation par titre des crédits 2006

(en millions d'euros)

AE

LFI 2006

disponibles en 2006

consommés au 31/12/2007

% des crédits LFI

% des crédits disponibles

Titre 2. Dépenses de personnel

23 630,03

23 972,62

23 896,35

101,1 %

99,7 %

Titre 3. Dépenses de fonctionnement

8 738,79

10 666,15

9 401,80

107,6 %

88,1 %

Titre 5. Dépenses d'investissement

11 055,62

14 937,54

10 512,89

95,1 %

70,4 %

Titre 6. Dépenses d'intervention

232,39

186,70

169,15

72,8 %

90,6 %

Total mission défense et sécurité

43 656,83

49 763,02

43 980,19

100,7 %

88,4 %

CP

LFI 2006

disponibles en 2006

consommés au 31/12/2007

% des crédits LFI

% des crédits disponibles

Titre 2. Dépenses de personnel

23 630,0

23 972,62

23 896,35

101,1 %

99,7 %

Titre 3. Dépenses de fonctionnement

7 851,1

8 904,36

8 517,05

108,5 %

95,7 %

Titre 5. Dépenses d'investissement

10 948,1

11 329,52

10 061,94

91,9 %

88,8 %

Titre 6. Dépenses d'intervention

224,6

179,61

171,52

76,4 %

95,5 %

Total mission défense et sécurité

(hors fonds de concours rattachés)

42 653,8

44 386,11

42 646,87

100,0 %

96,1 %

Source : ministère de la défense

Les crédits du programme 146 semblent avoir été moins consommés que ceux des autres programmes. Cette sous-consommation faciale doit être fortement relativisée puisque les AE consommés atteignent 96 % des crédits de la LFI. Le programme a bénéficié de nombreuses ouvertures supplémentaires de crédits qui n'ont pas toutes été consommées avant le 31 décembre 2006. De nombreux engagements ont en effet été signés dans le courant des mois de décembre 2006 et janvier 2007. Au 21 janvier 2007, 500 millions d'euros supplémentaires ont ainsi été consommés, ramenant la consommation de ce programme au niveau moyen.

graphique

1. Les transferts et fonds de concours

Deux transferts sont effectués à partir du budget de la défense, l'un à destination du commissariat à l'énergie atomique (CEA), l'autre au profit de la recherche duale, c'est-à-dire réunissant recherche civile et recherche militaire.

Le transfert au CEA vise à financer une partie de la dissuasion, notamment pour financer la fabrication des têtes, les matières nucléaires, les recherches en matière de propulsion navale et le programme de simulation. Le protocole renouvelé le 8 mars 2004 est valable jusqu'en 2009. Le rythme des transferts est déterminé chaque année par concertation entre le ministère de la défense et le CEA. Les transferts effectifs réalisés au 31 décembre 2006 ont dépassé les prévisions de décembre 2005 de 48,3 millions d'euros pour les AE et de 31,8 millions d'euros pour les CP. Les prévisions ont toutefois été corrigées en avril 2006 et elles anticipaient alors parfaitement la réalité des transferts. La correction s'explique par l'intégration du programme des sous-marins nucléaires d'attaque Barracuda, reporté en 2005.

Les transferts au titre de la recherche duale concernaient en 2005 le centre national d'études spatiales (CNES) et le CEA pour un montant total de 200 millions d'euros. La LFI pour 2006 a repris exactement les dispositions de 2005 et l'exécution a été parfaitement conforme à l'autorisation budgétaire avec une consommation effective inférieure de seulement 1,9 million d'euros par rapport aux crédits initiaux.

Les fonds de concours rattachés au ministère de la défense concernent principalement le service de santé des armées (SSA). Les fonds de concours rattachés étaient estimés à 704,9 millions d'euros dans la LFI 2006 mais n'ont effectivement atteint que 622,4 millions d'euros alors qu'en 2005, 722,91 millions d'euros avaient été rattachés. Cependant, le SSA a perçu, en 2006, 416,2 millions d'euros alors qu'il n'avait perçu que 408 millions en 2005.

La LOLF a imposé une modernisation et une rationalisation des comptes spéciaux. Aussi le produit des cessions immobilières de biens de la défense n'est-il plus intégré aux fonds de concours mais versé sur un compte d'affectation spéciale (CAS). Cette modification ne remet nullement en cause la destination de ces fonds qui sont toujours destinés au ministère de la défense puisque les comptes d'affectation spéciale dérogent par définition à la règle organique de non-affectation.

Le compte d'affectation spéciale immobilier a reçu, en 2006, 73 millions d'euros provenant des cessions immobilières de la défense. Les recettes de l'année 2006 restent inférieures à 2005 (100 millions d'euros de recettes) mais supérieures à la moyenne des années 2000 (40 millions d'euros par an). Ce CAS financera les investissements immobiliers de la défense en 2007.

Produits des cessions immobilières

(en millions d'euros)

 

2004

2005

2006

2007 (anticipation)

Produits de cessions immobilières

33

118

73

50

Source : ministère de la défense

2. Une meilleure consommation des crédits de titre 2

En 2006, les crédits de personnel (titre 2) ont été consommés à hauteur de 99,68 % des crédits disponibles pour l'ensemble de la mission défense et sécurité, respectant ainsi scrupuleusement l'autorisation parlementaire. Les crédits ouverts en LFI ne permettaient toutefois pas de faire face à l'ensemble des dépenses de personnel, compte tenu de la forte mobilisation demandée aux forces armées, que ce soit dans le cadre d'opérations extérieures ou dans le cadre d'opérations de maintien de l'ordre sur le territoire. Les gendarmes des brigades mobiles ont par exemple été fortement mis à contribution à l'automne pour faire face à d'éventuels évènements dans les banlieues.

graphique
Les armées n'adoptent pas un profil de consommation des dépenses de titre 2 tout à fait similaire. Les principaux écarts interviennent au cours du premier trimestre. Les retards comptables liés en partie à la mise en place de la LOLF se font ici aussi nettement ressentir. Ils touchent plus particulièrement l'armée de terre et la gendarmerie. La faible consommation des crédits au premier trimestre, s'établissant à 19 % pour l'armée de terre et à 13,75 % pour la gendarmerie, est compensée par une surconsommation au deuxième trimestre pour ces mêmes armées. Entre le premier et le deuxième trimestre, la gendarmerie consomme 1,5 fois plus de crédits de titre 2. L'armée de l'air et la Marine nationale équilibrent mieux leurs flux de paiement tout au long de l'année.

3. Une consommation des crédits décalée générant encore des intérêts moratoires

La mise en place de la nouvelle nomenclature budgétaire et comptable voulue par la LOLF a demandé un temps d'adaptation relativement important en début d'année. Les systèmes d'information comptable ont notamment dû intégrer cette nouvelle partition, souvent avec des difficultés persistantes. Le retard ainsi constaté a pesé sur le montant des intérêts moratoires. Ainsi à la fin de l'année 2005, 2,5 milliards d'euros étaient-ils en instance de paiement. Ces factures ne seront honorées qu'au cours du premier semestre 2007.

graphique
Le rythme de consommation des crédits au cours de l'année 2006 révèle un certain décalage. Les crédits de titre 2 et 3 (personnel et fonctionnement) restent modestes au premier trimestre, avant d'augmenter significativement au deuxième trimestre puis de se stabiliser. Cette consommation croissante des crédits est encore plus marquée pour les crédits de titre 5. Au premier trimestre, moins de 10 % des crédits disponibles étaient consommés alors qu'au cours du dernier trimestre, plus de 37 % des crédits disponibles ont été consommés. Cette absence de lissage s'explique à la fois par les retards de mise en place des nouveaux référentiels comptables mais aussi par la nature des crédits. Les commandes d'équipement nécessitent d'importantes négociations avec les industriels, voire avec des partenaires étrangers et de telles discussions ne peuvent être entamées qu'une fois que les responsables de programme disposent d'une visibilité budgétaire de court terme, c'est-à-dire seulement une fois la LFI votée. La rédaction du cahier des charges et la définition des modalités financières doit ensuite être validée, en concertation avec les responsables financiers du ministère et avec la direction du budget. Les crédits sont donc mécaniquement dépensés pour l'essentiel en fin d'année et tout particulièrement dans le dernier trimestre.

Ces décalages temporels induisent nécessairement une hausse des intérêts moratoires versés par la défense à ses partenaires. Ils atteignent à la fin de l'année 2006 plus de 35 millions d'euros, soit 0,2 % des crédits d'équipement prévus pour l'année. La principale difficulté de ces intérêts tient moins à leur montant qu'à leur hausse constante tout au long de l'année 2006. Au cours du premier semestre, le paiement des intérêts des factures qui restaient de l'exercice antérieur justifie une augmentation des intérêts moratoires, mais au cours du second semestre, la situation doit être stabilisée et les intérêts doivent diminuer. Or, en 2006, la baisse ordinaire du second semestre n'a pas eu lieu. Cette évolution demande à être analysée avec beaucoup d'attention car elle est la preuve d'importantes difficultés de gestion comptable. Une attention particulière devra donc être portée quant à l'évolution de ces intérêts dans les prochaines années.

Évolution des intérêts moratoires

(en millions d'euros)

Janv.

Fév.

Mars

Avril

Mai

Juin

Juillet

Août

Sept.

Oct.

Nov.

Déc.

Intérêts moratoires 2003

0,00

3,09

4,42

8,55

11,18

12,08

13,44

13,98

15,33

17,13

18,71

20,12

Intérêts moratoires 2004

0,00

1,96

10,51

17,32

19,89

22,11

24,60

25,20

26,62

27,49

28,03

28,25

Intérêts moratoires 2005

0,00

2,80

13,58

18,85

20,85

23,73

25,24

28,22

31,56

32,05

32,59

33,51

Intérêts moratoires 2006

0,00

0,00

4,62

8,54

15,72

22,46

26,63

28,45

29,79

31,42

33,48

35,72

Source : ministère de la défense

Une modernisation des systèmes d'information comptable est actuellement en cours au sein du ministère de la défense. Elle s'appuie sur le système « Chorus » mis en place pour l'ensemble des services d'administration centrale et qui intègre les nouvelles règles comptables et budgétaires. Ce progiciel n'est pas encore tout à fait au point et, en tout état de cause, n'exonérera pas le ministère d'une refonte structurelle de ses propres systèmes d'information comptable.

C. UN EFFORT SIGNIFICATIF DE RÉDUCTION DES REPORTS DE CRÉDITS

Au cours de l'année 2006, les crédits consommés ont dépassé l'autorisation budgétaire initiale de la LFI 2006. Une fois les fonds de concours rattachés et les transferts techniques effectués, la mission sécurité et défense dispose de 43 milliards d'euros en AE et de 42 milliards d'euros en CP. À ces crédits s'ajoutent les sommes ouvertes par le décret d'avance d'octobre 2006 et la loi de finances rectificative ainsi que les sommes déplacées du fait de la fongibilité asymétrique (2).

consommation des crédits par programme en 2006

(en millions d'euros)

Programme

LFI corrigée (1)

consommation

% de consommation

AE

CP

AE

CP

AE

CP

144

titre 2

569,6

569,6

487,7

487,6

85,6 %

85,6 %

hors titre 2

1 223,1

1 074,2

1 196,7

1 067,0

97,8 %

99,3 %

total

1 792,7

1 643,9

1 684,4

1 554,6

94,0 %

94,6 %

178

titre 2

15 461,4

15 461,4

15 732,4

15 730,7

101,8 %

101,7 %

hors titre 2

6 467,7

5 798,7

6 429,9

6 208,3

99,4 %

107,1 %

total

21 929,1

21 260,1

22 162,3

21 939,0

101,1 %

103,2 %

212

titre 2

895,0

895,0

794,0

794,7

88,7 %

88,8 %

hors titre 2

1 480,8

1 417,6

1 811,2

1 527,2

122,3 %

107,7 %

total

2 375,8

2 312,6

2 605,1

2 321,9

109,7 %

100,4 %

146

titre 2

1 012,0

1 012,0

1 020,5

1 020,5

100,8 %

100,8 %

hors titre 2

8 516,1

8 568,8

9 076,8(2)

8 461,5

106,6 %

98,7 %

total

9 528,1

9 580,8

10 094,5

9 482,1

105,9 %

99,0 %

152

titre 2

5 850,4

5 850,4

5 863,6

5 862,8

100,2 %

100,2 %

hors titre 2

1 578,3

1 425,8

1 592,9

1 486,5

100,9 %

104,3 %

total

7 428,6

7 276,2

7 456,5

7 349,3

100,4 %

101,0 %

mission défense et sécurité

titre 2

23 788,4

23 788,4

23 898,2

23 896,4

100,5 %

100,5 %

hors titre 2

19 266,0

18 285,2

20 104,7

18 750,5

104,4 %

102,5 %

total

43 054,4

42 073,5

44 002,9

42 646,9

102,2 %

101,4 %

(1) La correction intègre à la LFI les transferts et les fonds de concours rattachés aux programmes.

(2) La signature d'une convention avec l'organisation conjointe en matière d'armement (OCCAr) a permis d'engager en 2006 les autorisations de programme initialement prévues en 2005 qui ont donc été transformés en autant d'AE en 2006. En 2005, l'absence de convention interdisait en effet en que ces 10,597 milliards d'euros d'AP soient engagés. L'exécution 2006 a corrigé ce retard, mais sans conséquence sur le budget pour 2006 puisqu'il ne s'agit que d'un simple décalage d'engagement. Cette somme a donc été retirée des AE engagées en 2006 puisqu'elle se rattache à l'exercice 2005.

Source : direction du budget et ministère de la défense

Les crédits consommés dépassent très largement les crédits disponibles, la défense a dépensé plus de 600 millions d'euros au-delà de l'autorisation parlementaire (3). Le dépassement est concentré sur les crédits hors titre 2 qui sont consommés à 102,5 % des crédits de LFI corrigée pour les CP. Les dépenses de personnel sont elles aussi excédentaires de 100 millions d'euros. Les AE de titre 5 (équipement) sont pour leur part supérieures de presque 840 millions d'euros aux crédits initialement prévus par la LFI pour 2006.

Cette surconsommation permet de résorber les crédits reportés des années antérieures qui atteignaient au début de l'année 2006 presque deux milliards d'euros. Les efforts de 2006 ont permis de diminuer de près d'un milliard ce report. En effet, aux 600 millions excédentaires, il convient de rajouter presque 500 millions consommés dans le courant du mois de janvier 2007. L'ensemble des crédits disponibles, intégrant à la fois les reports de crédits et tous les mouvements intervenus en gestion, y compris les décrets d'avance et la LFI, représentent pour la mission défense et sécurité 44,4 milliards d'euros. La consommation totale ayant atteint 42,6 milliards d'euros au 31 décembre, seuls 1,739 milliard d'euros restent à reporter au lieu des deux milliards initiaux. Les commandes de janvier permettent ensuite de ramener ce report à moins d'1,3 milliard d'euros.

Certaines incertitudes peuvent parfois apparaître quant à la réalisation de la LPM, mais l'exécution 2006 dépasse les dispositions de la LPM aussi bien en construction budgétaire (AE) qu'en exécution comptable (CP). Il n'en reste pas moins que les efforts de résorption des reports de crédits des années antérieures doivent être poursuivis. Lors de son audition devant la commission, la ministre de la défense s'est engagée à ce que l'apurement complet des reports soit effectué au cours de l'année 2007, la consommation totale de ces crédits apparaissant comme indispensable au respect de la loi de programmation militaire 2003-2008.

II. -  LES PRINCIPAUX SUJETS ABORDÉS LORS DE L'ANALYSE QUALITATIVE DE L'EXÉCUTION DU BUDGET

A. LE PROGRAMME BARRACUDA ET LE DEUXIÈME PORTE-AVIONS

La commande de sous-marins nucléaires d'attaque (SNA) « Barracuda » de décembre 2006 ouvre des perspectives très encourageantes pour l'avenir de la flotte française. Du point de vue des opérations militaires, ce programme permet d'amorcer le renouvellement de la flotte des sous-marins d'attaque et le recouvrement futur de la permanence à la mer du groupe aéronaval. Conjugué au programme du deuxième porte-avions, il assurera au cours de la prochaine décennie une capacité permanente de frappe depuis la mer. Les SNA de classe « Rubis », admis au service entre 1983 et 1993, seront âgés de 35 ans en moyenne en 2016, date à partir de laquelle les Barracuda pourront entrer en service.

Pour satisfaire cet engagement de la LPM, 1,1 milliard d'euros ont été engagés en AE, soit presque six fois plus que les AE ouvertes en LFI. Cet abondement des crédits pour le Barracuda a été réalisé en gestion à partir des crédits ouverts pour le deuxième porte-avions. Les AE de la sous-action 03-53 correspondant au programme Barracuda ont ainsi été créditées de 1,3 milliard d'euros supplémentaires par des mouvements de gestion, complétés par 68 millions d'euros de report de crédits. Les crédits disponibles atteignent ainsi en 2006 1,562 milliard d'euros. Les CP évoluent parallèlement dans le sens inverse, passant de 159 millions d'euros inscrits en LFI à 33 millions d'euros disponibles puisque le paiement effectif n'interviendra qu'au cours des exercices prochains.

Les crédits affectés au deuxième porte-avions ont dû être largement redéployés en 2006 compte tenu de l'évolution d'une part de la coopération franco-britannique et d'autre part du décalage à 2007 du contrat de réalisation. Le renforcement de la coopération franco-britannique a justifié une hausse des CP qui ont été augmentés de 72,6 millions en gestion pour atteindre plus de 125 millions d'euros. 129,5 millions d'euros ont été effectivement consommés, soit 103,4 % des crédits disponibles. Dans le cadre du renforcement de la coopération franco-britannique et au vu des conditions de réalisation du porte-avions, il a été décidé de reporter à 2007 le contrat de réalisation. Dès lors, les AE disponibles ont été fortement diminuées, passant de 925,72 millions en LFI à 220,76 millions d'euros disponibles, pour 188,6 millions d'euros effectivement consommés.

B. UNE AÉROMOBILITÉ ENCORE INSUFFISAMMENT ASSURÉE

La loi de finances initiale pour 2007 a réduit la commande des NH90 puisque seuls 12 appareils devraient être commandés au lieu des 34 initialement prévus. Cette diminution est d'autant plus préoccupante qu'au cours de l'exercice 2006, les crédits affectés à ce programme pourtant stratégique n'ont été consommés qu'à hauteur de 71,3 %. Les CP consommés n'ont en effet atteint au 31 décembre 2006 que 93,52 millions d'euros sur les 131,16 disponibles. Plus inquiétante encore est la sous-consommation des AE pour ce même programme. Seuls 42,6 millions d'euros d'AE ont été consommés alors que 48,32 étaient disponibles. La faible consommation des CP peut certes s'expliquer par des décalages comptables, mais le retard pris dans les commandes est inquiétant car il laisse à penser que les engagements de la LPM ne seront pas intégralement respectés.

L'aéromobilité de l'armée de terre est pourtant un élément majeur qui décide de la capacité opérationnelle de nos forces armées. En Côte d'Ivoire, il est indispensable que les troupes disposent d'hélicoptères fiables et non d'appareils en limite d'âge comme les Puma, entrés en service dans les années 1970. Malgré la qualité de l'entretien, ces appareils ont atteint leurs limites et doivent être remplacés le plus rapidement possible.

Les retards du programme NH90 sont d'autant plus regrettables que parallèlement, le nouvel hélicoptère de combat, le Tigre, connaît lui aussi des retards et des difficultés techniques. En 2006, en concertation avec l'industriel, la planification des livraisons a été revue à la baisse : en 2008, seuls 20 appareils sur les 33 initialement prévus devraient avoir été livrés.

Il convient néanmoins de souligner que les retards accumulés dans le domaine de l'aéromobilité ne devraient pas avoir d'impact sur les dates de livraison, étant entendu que seules les commandes sont décalées dans le temps. Les NH90 devraient tous être livrés en 2011. Il n'en reste pas moins qu'il est à ce jour impossible d'estimer si ce report de commandes aura un impact sur le coût final du programme. Des négociations sont actuellement en cours avec le constructeur à ce sujet. Il ne faudrait pas que ce décalage aggrave encore l'évolution des intérêts moratoires, déjà trop élevés.

C. LA QUESTION DES CARBURANTS

La hausse du prix du pétrole intervenue en 2006 a pesé sur le budget consacré au carburant pour les forces armées. L'implication des troupes françaises dans de nombreuses OPEX a dans le même temps augmenté la consommation en pétrole, que ce soit pour les navires ou les avions transportant troupes et matériels vers l'Afrique, le Liban ou l'Afghanistan. Les crédits consommés en 2006 dépassent les prévisions de la LFI. La surconsommation a été financée par quatre biais. Le décret d'avance du 10 octobre 2006 a ouvert des crédits supplémentaires de carburant pour les OPEX et la loi de finances rectificative a mis en place un système de remboursement de la TIPP payée par les forces armées. Des redéploiements ont été également effectués entre les différents titres de la mission et 30 millions d'euros ont été prélevés sur les crédits de titre 2 en application de la règle de fongibilité asymétrique.

Pour limiter l'impact des fluctuations de marché, le ministère de la défense a demandé à l'Agence France Trésor (AFT) de souscrire un ensemble de contrats financiers d'assurance (notamment des « cap »). Ces contrats garantissent un prix maximal d'achat de carburant défini à l'avance contre le versement d'une prime. Ce système permet au ministère de mieux anticiper ses approvisionnements et surtout de ne pas souffrir d'une brutale hausse des prix. Ce dispositif de couverture, aujourd'hui pleinement opérationnel, reste prudent et n'intervient pas autant qu'il le pourrait sur les marchés financiers, contrairement aux recommandations du ministère des finances. Ce mécanisme permet à la défense de s'approvisionner en carburant, pour le début de l'année 2007, à un cours d'environ 450 euros la tonne, les assurances actuelles fixant le cours maximal à 550 euros la tonne.

Parallèlement à cette garantie, les acheteurs du ministère utilisent au mieux les variations de marché et constituent les stocks de carburant selon les opportunités. La parité euro-dollar améliore également les conditions d'achat de carburant. La baisse des cours a ainsi permis de reconstituer début 2007 les stocks stratégiques de la Marine qui avaient été nettement mis à contribution en 2006.

La difficile anticipation des cours du pétrole, malgré le système de couverture, justifie que des négociations aient été engagées avec les fournisseurs pour que le carburant soit facturé à son cours de commande et non à son cours de livraison. En quelques mois, le prix peut en effet varier parfois du simple au double.

D. UNE AMÉLIORATION DE L'ACTIVITÉ DES FORCES ET DU RECRUTEMENT

- Une attention particulière a été portée en 2006 à l'activité des forces armées et au recrutement. Premier recruteur national, la défense doit constamment renouveler ses effectifs. En 2007, les armées devront recruter près de 25 000 personnes dont plus de 22 000 militaires. En 2005, des sous-effectifs persistaient notamment dans l'armée de air et pour les volontaires avec des taux respectifs de sous-effectif de 6,1 % et 9,9 %. Le plafond ministériel d'emplois autorisés (PMEA) par la loi de finances pour 2006 maintenait des objectifs ambitieux et ne semblait pertinent qu'à moyen terme. Or, les effectifs moyens réalisés en fin d'année montrent que les objectifs du PMEA 2006 sont atteints à 97,7 % en moyenne. Par rapport à 2005, l'armée de l'Air voit son personnel militaire augmenter de 0,6 % et la gendarmerie de 0,5 %. Les autres armées ont stabilisé leurs effectifs ou enregistré une baisse non significative (inférieure à 1 %).

La répartition des effectifs par catégorie a été revue avec la LOLF puisque désormais les élèves officiers et aspirants sont comptabilisés parmi les officiers et non plus parmi les sous-officiers. Certains élèves sous-officiers sont quant à eux intégrés à la catégorie des sous-officiers. La gestion des personnels en 2006 a été remarquable pour les sous-officiers qui atteignent un taux d'effectif de 99,9 %. Les volontaires sont engagés à hauteur de 93,8 % des effectifs autorisés, soit une amélioration 3,7 % par rapport à 2005.

Effectifs des armées en 2006

PMEA 2006

Effectifs moyens réalisés en fin d'année

Taux de sous-effectif en fin d'année

Officiers

43 894

42 852

2,4 %

Sous-officiers

194 693

194 463

0,1 %

Militaires du rang

96 870

93 047

3,9 %

Volontaires

20 390

19 116

6,2 %

Total militaires

355 847

349 478

1,8 %

Total civils

84 482

80 735

4,4 %

Total global

440 329

430 213

2,3 %

Source: ministère de la défense

- L'activité des forces armées a elle aussi été nettement améliorée à l'exception des heures de vol des pilotes de transport de l'armée de l'air. Cette faiblesse s'explique essentiellement par l'état de la flotte de transport de l'armée de l'air. Son activité est donc réduite mais n'obère nullement le transport des troupes assuré par d'autres armées au travers des accords OTAN. Par ailleurs, les objectifs fixés par la LPM apparaissent aujourd'hui trop ambitieux et doivent être corrigés. En tenant compte de ses possibilités et de ses besoins, l'armée de l'air a ainsi ramené son objectif annuel d'heures de vol à 235 000 heures en 2006 au lieu des 277 000 heures prévues dans le cadre de la LPM. Pour la première fois depuis sept ans, les objectifs annuels ont été dépassés de 800 heures par an. L'armée de l'air ayant choisi de privilégier en 2006 les heures de vol des équipages opérationnels, les pilotes de chasse ont volé 175 heures, soit 4,5 heures de plus qu'en 2005, les pilotes d'hélicoptères ont volé 190 heures et les pilotes de transport plus de 285 heures.

La Marine nationale a vu son activité augmenter avec la patrouille maritime assurée sur les théâtres africains notamment. Ses hélicoptères ont également été très sollicités notamment au Liban. Les pilotes de chasse n'ont pas volé autant que prévu du fait de la hausse du prix du pétrole et de l'indisponibilité pour remodernisation de certains Super-Étendard.

L'armée de terre a dépassé les prévisions 2006 pour les heures de vol des pilotes d'hélicoptères et a atteint les objectifs relatifs aux jours d'activité.

Le nombre de jours de formation des gendarmes mobiles reste cette année encore inférieur aux prévisions. L'objectif initial de la LPM apparaissait cependant dès 2003 extrêmement élevé. Paradoxalement, la faiblesse de cet indicateur traduit l'importance de l'activité des brigades de gendarmes mobiles puisque ces gendarmes ne peuvent suivre les formations que s'ils ne sont pas mobilisés en France ou à l'étranger. Les brigades ont en effet été très sollicitées par les autorités préfectorales notamment à l'automne au moment où l'on pouvait craindre la reprise d'incidents en banlieue. Il est à noter que lorsque les gendarmes ont pu suivre une formation, la direction générale a privilégié une formation collective au centre de Saint-Astier.

Activités des forces armées

Objectifs définis par la LPM

2006

2005

prévisions

réalisation

Prévisions

Réalisation

TERRE

Jours d'activités

100

96

96

100

96

Heures de vol hélicoptère

180

160

169

160

160

AIR

Heures de vol pilotes chasse

180

180

175

180

170

Heures de vol transport

400

400

250

320

279

Heures de vol hélicoptère

200

200

175

200

187

MARINE

Jours passés à la mer

100

91

92

95

92

(Bâtiments de haute mer)

110

107

109

Heures de vol pilotes chasse

180

180

167

180

183

(Pilotes qualifiés appontages de nuit)

220

220

196

Heures de vol hélicoptère

220

220

217

220

204

Heures de vol patrouille maritime

350

350

342

350

326

GENDARMERIE

Jours d'instruction collective pour la gendarmerie mobile

35

26

23

35

25

Source : ministère de la défense

Les indicateurs d'activité mis en place par la LPM constituent des repères utiles mais ne permettent pas d'appréhender avec suffisamment de précision la réalité de l'activité des forces armées. Sans les remettre en cause, il convient donc de les compléter pour mieux prendre en compte la notion aujourd'hui cardinale « d'opérationnalité ».

CONCLUSION

Depuis 2002, la commission de la défense a veillé à ce que les engagements pris en faveur de la défense soient remplis. Au terme de la législature, la mission constate avec plaisir que la loi de programmation militaire pour 2003-2008 est pleinement respectée. Contrairement à la législature précédente, les crédits du ministère n'ont pas servi de variable d'ajustement.

Les crédits affectés depuis 2003 ont permis de moderniser les équipements des armées françaises avec la livraison des premiers véhicules blindés légers, des chars Leclerc, des véhicules pour la gendarmerie ou des nouveaux équipements individuels. Malgré ces efforts, une attention constante doit être portée aux crédits de la défense : les moyens doivent être en permanence adaptés pour répondre à la diversification des missions et des besoins, dans un contexte international complexe ; la capacité des armées françaises à s'engager rapidement et efficacement étant un gage de stabilité et de paix.

La mission ne peut que se réjouir de l'excellence de l'exécution des crédits qui ont même dépassé en 2006 les prévisions de la LFI, ce qui a permis de réduire une partie des reports de crédits. Les commandes passées en 2006 et 2007 permettent d'envisager avec sérénité, mais sans confiance excessive, l'avenir des armées françaises. En tout état de cause, il ne sera pas possible de maintenir la place de la France dans le monde sans un budget à la hauteur de ses ambitions.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission de la défense nationale et des forces armées a examiné le présent rapport d'information au cours de sa réunion du mercredi 21 février 2007.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur.

M. Jean-Claude Viollet a salué le travail réalisé par la mission, aussi bien pour ce qui concerne l'équipement des forces que les rémunérations et charges sociales (RCS). Toutefois, il apparaît que le maintien en condition opérationnelle des matériels (MCO) est de plus en plus coûteux. Cette inflation s'explique par l'entretien d'équipements anciens, très onéreux à réaliser compte tenu de leur vétusté, comme par celui des matériels nouvellement entrés en service.

La réaffectation d'autorisations d'engagement du programme PA2 vers celui des SNA Barracuda laisse augurer de fortes tensions budgétaires dans les prochaines années qui concerneront aussi bien les grands programmes que les RCS, le MCO ou les moyens de fonctionnement courant des armées. On ne peut se satisfaire d'économies ponctuelles sur tel ou tel programme, une réflexion stratégique d'ensemble doit être menée afin de dégager les priorités ; l'inflation des coûts de maintien en condition opérationnelle risquant d'obérer les autres postes du budget.

Le rapporteur a estimé à son tour que le MCO constituait une préoccupation très importante pour la défense nationale. Sauf en ce qui concerne les forces engagées en OPEX, la situation n'est pas satisfaisante. Pourtant, les ateliers régimentaires et les arsenaux ne ménagent pas leurs efforts mais les personnels connaissent des difficultés à assurer le maintien en condition opérationnelle de matériels divers et anciens, particulièrement dans l'armée de terre où un meilleur effort d'organisation pourrait être développé à l'instar de ce que l'on observe pour la marine et l'armée de l'air.

Il a souligné que tous les crédits de MCO ouverts ont été engagés ces dernières années et mieux employés que précédemment. Le MCO est d'ailleurs aujourd'hui de mieux en mieux intégré aux prévisions budgétaires. La modification de nomenclature envisagée pour la prochaine loi de finances devrait permettre une meilleure lisibilité en regroupant dans le même programme les dépenses d'équipement et les dépenses d'entretien.

La réaffectation d'autorisations d'engagement du programme PA2 vers celui des SNA Barracuda est un signe de vitalité et non un indice de tension budgétaire. Il s'agit d'une gestion intelligente des moyens qui succède à une gestion figée, alors que le programme PA2 est encore en attente. C'est comptablement intelligent, économiquement habile et militairement efficace.

En réponse à M. Marc Francina, M. Guy Teissier a indiqué que les intérêts moratoires étaient payés sur le budget de la défense.

M. Philippe Vitel a estimé qu'une amélioration de la gestion du MCO passait par la restructuration des outils industriels. Ainsi, le changement de statut de DCN a-t-il eu pour conséquence de baisser les coûts de MCO et d'augmenter la disponibilité des navires de la marine nationale. C'est un exemple à suivre pour restructurer l'outil industriel de l'armée de terre. Des efforts considérables sont par ailleurs fournis pour maintenir le potentiel des hélicoptères pourtant âgés et il convient de saluer la réactivité très forte des ateliers industriels aéronautiques (AIA), notamment celui de Cuers. Cependant, aucun miracle n'est à attendre de l'entretien d'appareils trop vétustes : il faut de toute urgence les remplacer par le Tigre et le NH90, le retard de production de ces hélicoptères étant inacceptable.

M. Guy Teissier a salué les bons résultats enregistrés par la marine nationale pour le MCO de ses navires qui sont liés à la suppression du monopole des arsenaux, au changement de statut de DCN et à la mise en concurrence des contrats d'entretien. En tout état de cause, la délégation générale de l'armement (DGA) doit renforcer ses efforts pour un meilleur contrôle des coûts des contrats de MCO. Elle exerce déjà un rôle important de « commissaire économique » qui a pesé et pèse ainsi fortement sur les contrats FREMM et PA2 en exigeant que les prix proposés par les industriels soient aussi justes que possible.

M. Philippe Vitel s'est félicité des bons résultats engrangés par DCN, avec un plan de charges assuré à 70 % jusqu'en 2025. Il a toutefois souligné que tous les MCO ne pouvaient pas faire l'objet d'une mise en concurrence, certains concernant le domaine de la dissuasion nucléaire. Le futur contrat d'entreprise de DCN devra donc intégrer ce caractère stratégique et plus globalement apporter des précisions sur les conditions de réalisation et les objectifs des différents MCO.

En réponse à M. Gérard Charasse, le rapporteur a précisé que le coût des OPEX a représenté 611,5 millions d'euros en 2006.

Rappelant qu'il avait siégé au comité des prix de revient des fabrications d'armement pendant neuf ans, M. Michel Voisin a estimé que la spécificité des programmes de défense rend malaisé le contrôle de leur coût. Ils s'étalent ainsi parfois sur plusieurs décennies et les améliorations technologiques dont ils peuvent bénéficier augmentent inéluctablement le prix initial. Par ailleurs, le programme Rafale a montré qu'il est difficile de signer des contrats à l'exportation avant la mise en service d'un équipement au sein des forces françaises. Enfin, le coût unitaire d'un aéronef est d'autant plus élevé que le nombre d'appareils prévu a diminué. Cette logique a par exemple eu pour effet d'augmenter le coût marginal du Rafale.

M. Guy Teissier a souhaité préciser que le surcoût par homme des opérations extérieures hors transport était très inégal d'un théâtre d'opérations à l'autre. Il est de 3 400 euros pour un militaire engagé au Kosovo, de 4 751euros en Afghanistan et de 5 400 euros au Tchad.

La commission a décidé, en application de l'article 145 du Règlement, le dépôt du rapport d'information en vue de sa publication.

1 () Hors transport, le surcoût OPEX s'établit à 4751 euros par homme et par an pour l'Afghanistan.

2 () La LOLF autorise en effet les responsables de programme à utiliser des crédits de titre 2 au profit d'autres titres. Cette fongibilité est toutefois asymétrique puisque le mouvement inverse (c'est-à-dire au profit du titre 2) est interdit.

3 () La surconsommation déterminée par la direction du budget prend en compte l'ensemble des dépenses mandatées avant le 31 décembre 2006 et payées avant la fin de la période complémentaire, le 21 janvier 2007.