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le 20 novembre 2003

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N° 1214

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 13 novembre 2003.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI (n° 1146), autorisant l'approbation de l'accord portant création de l'Organisation internationale de la vigne et du vin,

PAR M. JACQUES REMILLER,

Député

--

Traités et conventions

SOMMAIRE

___

INTRODUCTION 5

I - HISTORIQUE DE L'OFFICE INTERNATIONAL DU VIN 7

A - LA CRÉATION DE L'OIV 7

B - L'OIV AUJOURD'HUI 8

II - L'ACCORD DU 3 AVRIL 2001 CRÉANT L'ORGANISATION
       INTERNATIONALE DE LA VIGNE ET DU VIN
9

A -  LES ÉTAPES DE LA NÉGOCIATION 9

B - LES PRINCIPALES STIPULATIONS DE L'ACCORD 10

CONCLUSION 12

EXAMEN EN COMMISSION 14

ANNEXE 16

Mesdames, Messieurs,

L'Assemblée nationale est saisie en première lecture d'un projet de loi autorisant l'approbation de l'accord portant création de l'Organisation internationale de la vigne et du vin (n° 1146). Cette organisation doit succéder à l'actuel Office international de la vigne et du vin (OIV) en application de l'accord conclu entre les membres de l'Organisation le 3 avril 2001. Cette convention vise à moderniser les missions de l'organisation, à en améliorer les procédures de décision et à en adapter les structures. Le présent rapport, après avoir rappelé l'historique de l'organisation internationale vitivinicole, présentera les principaux enjeux de cet accord de portée technique, dont l'approbation ne soulève aucune difficulté particulière.

I - HISTORIQUE DE L'OFFICE INTERNATIONAL DU VIN

A - La création de l'OIV

Il faut remonter au dix-neuvième siècle pour que se manifeste pour la première fois le besoin d'une structure internationale en charge des questions vitivinicoles. C'est en effet en 1874, après le désastre causé par le phylloxera, que les vignerons de France, d'Italie, de Suisse, d'Autriche et d'Allemagne se sont rassemblé en congrès à Montpellier pour rechercher les moyens de lutter contre le redoutable insecte.

Trente-cinq ans plus tard, la crise du phylloxéra ayant été surmontée, un autre péril est venu menacer la viticulture : celui de l'essor anarchique de la production et du commerce qui a permis à la fraude de prendre de telles proportions que le marché mondial s'est trouvé inondé de toutes sortes de breuvages portant abusivement le nom de vin. Aussi, en 1908 et 1909, deux congrès internationaux se sont tenus à Genève et à Paris pour apporter des réponses à ce problème. De sérieux progrès ont été réalisés à cette occasion par une première définition du vin et par la confirmation des principes de la Convention de Madrid du 14 avril 1891 relative à la répression des fausses indications de provenance.

Cette évolution, entravée par la première Guerre mondiale, a repris en 1916, grâce à une Conférence internationale des pays producteurs, dont le programme comprenait la révision des tarifs douaniers, la réglementation des échanges entre Etats et l'institution d'un corps international, composé de délégués des pays exportateurs et importateurs, chargé d'arbitrer les conflits pouvant s'élever entre eux. Enfin, en 1922, la Société française d'encouragement à l'agriculture, toujours préoccupée par la situation mondiale de la viticulture, suggérait la création d'un Organisme international du vin.

L'idée fut reprise l'année suivante par la Conférence de Gênes au cours de laquelle il est décidé de tenir une réunion restreinte entre l'Italie, la France, l'Espagne, la Grèce et le Portugal pour examiner plus avant les conditions de création d'un tel organisme. Les délégués de ces pays décidèrent de se retrouver du 4 au 6 juin 1923 à Paris, où ils se mirent d'accord sur un projet de création d'un Office international permanent financé par les Etats représentés. Toutefois, aucune décision concrète n'y fut prise et il fallut encore deux conférences internationales, convoquées à Paris en 1924, pour examiner les possibilités et les modalités de la création d'un tel organisme. La longueur des débats témoigne de la difficulté de vaincre toutes les réticences. Ils aboutirent finalement, le 29 novembre 1924, à la signature par l'Espagne, la Tunisie, la France, le Portugal, la Hongrie, le Luxembourg, la Grèce et l'Italie d'un Arrangement portant création à Paris d'un « Office international du vin » (OIV).

Juridiquement, l'OIV est donc né en 1924. Mais, il n'a pas eu d'existence réelle avant le 3 décembre 1927, date à laquelle le nombre des ratifications requis a été réuni. La session constituante de « l'Office international du Vin » se tint à Paris le 5 décembre 1927.

B - L'OIV aujourd'hui

Devenu l'Office international de la vigne et du vin par modification de l'Arrangement de 1924 intervenue le 4 septembre 1958, l'OIV vise désormais à regrouper un plus grand nombre d'Etats en permettant aux pays producteurs de raisin de table et de raisin sec d'adhérer à l'organisation.

Cette stratégie s'est avérée payante, puisque de huit pays fondateurs en 1924, l'organisation est passée à 47 pays aujourd'hui1, auxquels il convient d'ajouter deux observateurs, l'Irlande et le Québec.

A l'heure actuelle, les principales missions de l'OIV sont les suivantes :

-  indiquer aux Etats membres les mesures permettant de tenir compte des préoccupations des producteurs, des consommateurs et des acteurs de la filière vitivinicole ;

-  assister, en tant qu'organisme compétent, les autres organisations intergouvernementales et internationales intervenant dans le domaine de la vigne et des produits qui en sont issus ;

-  contribuer à l'harmonisation internationale des pratiques et des normes existantes et à la production de normes internationales nouvelles, afin d'améliorer les conditions d'élaboration et de commercialisation des produits vitivinicoles et à la prise en compte des intérêts des consommateurs.

L'OIV joue par ailleurs un rôle de veille juridique en signalant aux Gouvernements les conventions internationales auxquelles ils auraient intérêt à adhérer. En outre, il soumet aux Gouvernements toutes propositions susceptibles d'assurer la protection des appellations d'origine des vins, la garantie de la pureté et de l'authenticité des produits jusqu'à leur vente au consommateur, la répression des fraudes et de la concurrence déloyale. Dans le cadre de ces missions, la Direction générale de l'OIV, dont le siège est à Paris, assure la mise en œuvre des dispositions adoptées par ses organes scientifiques et décisionnels.

Le présent accord vise à moderniser l'organisation internationale en rénovant les organes décisionnels et en améliorant les procédures de décision.

II - L'ACCORD DU 3 AVRIL 2001 CRÉANT L'ORGANISATION INTERNATIONALE DE LA VIGNE ET DU VIN

A -  Les étapes de la négociation

Le principe de la révision a été décidé par une résolution de l'Assemblée générale de l'OIV, le 5 décembre 1997, à Buenos Aires. La motivation de cette résolution était de moderniser les missions, les moyens humains et matériels de l'Office international de la vigne et du vin en vue de les adapter au contexte mondial du secteur vitivinicole. En effet, lors de sa création, l'OIV comptait huit pays producteurs. Il compte aujourd'hui quarante-sept pays, dont la vision et les intérêts concernant cet important secteur économique sont parfois différents. En outre, le commerce international des produits de la vigne s'est considérablement développé. Il convenait donc de trouver un nouveau mode de décision, permettant de concilier l'efficacité avec le respect des différents points de vue et des intérêts des différents Etats membres.

Un comité de révision a été installé en mars 1998, afin de formuler des propositions de modification de l'Arrangement de 1924. La Conférence internationale des pays membres qui s'est tenue à Paris du 14 au 22 juin 2000 a permis de discuter de ces propositions. Celles-ci sont devenues définitives après quatre ans de travaux préparatoires lors de la quatrième séance de la Conférence internationale des pays membres, qui s'est tenue le 3 avril 2001 et qui s'est conclue sur le nouvel accord.

Cet accord a connu un réel succès puisqu'il a été signé par les représentants dûment mandatés de 35 pays, rejoints ensuite par 11 pays supplémentaires.

B - Les principales stipulations de l'accord

Les missions de la nouvelle Organisation sont modernisées et adaptées. Il s'agit de lui permettre de mieux poursuivre ses objectifs et de mieux exercer ses attributions d'organisme intergouvernemental à caractère scientifique et technique dont la compétence est reconnue dans le domaine de la vigne, du vin, des boissons à base de vin, des raisins de table, des raisins secs et des autres produits issus de la vigne.

Les objectifs assignés à l'Organisation par l'accord sont inchangés. En revanche, elle est dotée d'attributions élargies précisément énumérées par l'accord :

-  la promotion et l'orientation des recherches et expérimentations scientifiques et techniques ;

-  l'élaboration et la formulation de recommandations dont le suivi est assuré en liaison avec les Etats membres, notamment dans les domaines suivants : les conditions de production viticole, les pratiques œnologiques, la définition et/ou la description des produits, l'étiquetage et les conditions de mise sur le marché, les méthodes d'analyse et d'appréciation des produits issus de la vigne ;

-  un pouvoir de proposition dans les domaines suivants : la garantie d'authenticité des produits issus de la vigne (mentions d'étiquetage, protection des indications géographiques, amélioration des critères scientifiques et techniques de reconnaissance et de protection des obtentions végétales vitivinicoles) ;

-  l'harmonisation et l'adaptation des réglementations par les membres, ainsi que le rapprochement des pratiques ;

-  la protection de la santé des consommateurs et de la sécurité sanitaire des aliments, par l'exercice d'une veille scientifique, permettant d'évaluer les caractéristiques propres des produits issus de la vigne et de diffuser les informations résultant de ces recherches aux professions médicales et de santé.

L'OIV demeure structurée autour de deux principaux organes : l'Assemblée générale et le Comité exécutif, composé d'un délégué par membre. Le consensus est le mode de décision normal de l'Assemblée générale pour l'adoption des propositions de résolution de portée générale, scientifiques, techniques, économiques, juridiques, ainsi que pour la création ou la suppression de commissions et sous-commissions. Il en est de même pour le Comité exécutif. Cependant, dans le cas où l'Assemblée générale ne parvient pas à un consensus, le Président peut faire procéder à un vote à la majorité qualifiée des deux tiers plus un des membres présents ou représentés. Si un membre considère que ses intérêts nationaux essentiels sont menacés, le vote est reporté d'un an. Si cette position est confirmée officiellement par écrit par les autorités compétentes du pays concerné, il n'est pas procédé au vote.

Dans l'Arrangement en vigueur, les Etats disposent d'un droit de vote proportionnel au montant de leur contribution. L'accord modifie ce point, afin d'assurer une répartition plus objective des voix pondérées : chaque Etat dispose désormais de deux voix de base auxquelles s'ajoute un nombre de voix additionnelles calculées a partir de critères objectifs déterminant la place relative de chacun dans le secteur vitivinicole mondial (production, superficie, consommation).

Le Bureau de l'Organisation demeure inchangé dans sa composition : il comporte le Président, les Vice-Présidents, les Présidents des commissions et des sous-commissions. Il assure la gestion administrative courante de l'Organisation.

Enfin, le siège de l'Organisation demeure à Paris et les langues officielles en sont le français, l'espagnol, l'anglais, auxquels ont été ajoutés, à la demande des pays concernés, l'italien et l'allemand, afin d'améliorer la communication entre les membres.

CONCLUSION

Le présent accord vise à conforter l'OIV dans ses missions en faveur du développement de la filière vitivinicole dont on connaît l'importance pour notre pays. Pour entrer en vigueur, il doit être ratifié par trente et un Etats. Vingt-neuf Etats2 ont d'ores et déjà déposé leur instrument d'acceptation. Il importe donc que notre pays puisse approuver rapidement le présent accord, pour qu'il puisse entrer en vigueur le 1er janvier 2004. Pour ces raisons, votre Rapporteur propose à la Commission d'adopter le présent projet de loi.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission a examiné le présent projet de loi au cours de sa réunion du jeudi 13 novembre 2003.

Après l'exposé du Rapporteur, le Président Edouard Balladur a demandé si les nouveaux pays producteurs, qui se sont imposés sur le marché après la crise du phylloxéra et qui occupent une part croissante de la production mondiale, étaient membres de l'OIV.

M. Henri Sicre a souhaité savoir si l'accord visait à donner aux recommandations de l'OIV un pouvoir contraignant en rappelant que les normes en vigueur en France étaient plus drastiques que dans les autres pays producteurs, ce qui était souhaitable pour la qualité de la production, mais entraînait des distorsions de concurrence.

En réponse aux différents intervenants, le Rapporteur a indiqué que si l'Afrique du Sud, l'Argentine, l'Australie, le Chili et la Nouvelle-Zélande étaient membres de l'Organisation, les Etats-Unis n'en faisaient pas partie, au motif qu'ils étaient opposés à la mise en place d'appellations d'origine contrôlée. Quant à l'accord soumis à la Commission des Affaires étrangères, il ne change pas le degré de contrainte des recommandations de l'OIV. En revanche, il étend ses attributions et il permet l'adoption des recommandations à la majorité qualifiée tout en laissant à chaque membre la possibilité de s'y opposer si ses intérêts nationaux essentiels sont en jeu.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (n° 1146).

*

* *

La Commission vous demande donc d'adopter, dans les conditions prévues à l'article 128 du Règlement, le présent projet de loi.

NB : Le texte de l'accord figure en annexe au projet de loi (n° 1146).

ANNEXE

Nom du pays

Type de procédure

Date de l'instrument correspondant

1

Suède

Ratification

04-jul-01

2

Norvège

Approbation

29-oct-01

3

Slovaquie

Ratification

17 0ctobre 2001

4

Finlande

Acceptation

23-déc-01

5

Malte

Adhésion

28-déc-01

6

Slovénie

Adhésion

07-jan-02

7

Croatie

Adhésion

18-jan-02

8

Serbie et Monténégro

Adhésion

30-jan-02

9

République de Moldavie

Ratification

21-mar-02

10

République algérienne Démocratique et Populaire

Ratification

07-avr-02

11

Roumanie

Ratification

05-jul-02

12

Danemark

Approbation

08-jul-02

13

Macédoine

Adhésion

08-mai-02

14

Espagne

Ratification

02-aoû-02

15

Russie

Adhésion

24-aoû-02

16

Bulgarie

Adhésion

25-nov-02

17

Allemagne

Ratification

17-fév-03

18

Australie

Ratification

12-déc-02

19

Italie

Ratification

15-jan-03

20

Chypre

Ratification

07-nov-02

21

Mexique

Ratification

24-fév-03

22

Hongrie

Ratification

oct-02

23

Suisse

Ratification

19-mar-03

24

Grèce

Ratification

14-avr-03

25

Pérou

Adhésion

02-avr-03

26

Irlande

Adhésion

06-jun-03

27

Maroc

Adhésion

12-jun-03

28

Autriche

Ratification

07-aoû-03

29

Luxembourg

Approbation

22-jul-03

 _______________

N° 1214 - Rapport sur le projet de loi autorisant l'accord sur l'organisation internationale de la vigne et du vin (M. Jacques Remiller)

1 Il s'agit des pays suivants : Afrique du Sud, Algérie, Allemagne, Argentine, Australie, Autriche, Belgique, Bolivie, Brésil, Bulgarie, Chili, Chypre, Croatie, Danemark, Espagne, Finlande, France, Géorgie, Grèce, Hongrie, Israël, Italie, Liban, Luxembourg, Malte, Maroc, Macédoine, Mexique, Moldavie, Norvège, Nouvelle-Zélande, Pays-Bas, Pérou, Portugal, République Tchèque, Roumanie, Royaume-Uni, Fédération de Russie, Slovaquie, Slovénie, Suède, Suisse, Tunisie, Turquie, Ukraine, Uruguay, République fédérale de Yougoslavie.

2 Voir en annexe : état des ratifications.


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