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le 11 décembre 2003

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N° 1250
(1ère partie)

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 26 novembre 2003.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L'ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LE PROJET DE LOI, ADOPTÉ PAR LE SÉNAT (N° 768), réformant le statut de certaines professions judiciaires ou juridiques, des experts judiciaires, des conseils en propriété industrielle et des experts en ventes aux enchères publiques.

PAR Mme Brigitte BARÈGES,

Députée.

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Voir les numéros :

Sénat : 176, 226 et T.A. 97 (2002-2003).

Assemblée nationale : 768.

Justice - Sécurité.

INTRODUCTION 9

I.- LES RÉGLEMENTATIONS APPLICABLES AUX PROFESSIONS JUDICIAIRES ET JURIDIQUES : UNE MODERNISATION ATTENDUE 10

A. L'ACCÈS À LA PROFESSION D'AVOCAT, SA DÉONTOLOGIE ET L'ORGANISATION DE SA DISCIPLINE 10

1. L'ouverture de la profession aux avocats communautaires 11

2. L'adaptation de la formation aux besoins de la profession 14

3. La rénovation de l'organisation disciplinaire 16

4. L'élargissement des compétences du Conseil national des barreaux 18

B. LE RENFORCEMENT DE LA DISCIPLINE DES GREFFIERS DES TRIBUNAUX DE COMMERCE 18

C. L'ADAPTATION DES RÈGLES DISCIPLINAIRES APPLICABLES AUX NOTAIRES 19

D. L'AMÉLIORATION DES MOYENS D'ACTION DES HUISSIERS DE JUSTICE 20

II. - LES EXPERTS ET LES CONSEILS EN PROPRIÉTÉ INDUSTRIELLE : UN PROFESSIONALISME RENFORCÉ 20

A. L'ENCADREMENT DE LA FONCTION D'EXPERT JUDICIAIRE 20

B. L'AMÉNAGEMENT DES DISPOSITIONS RELATIVES À L'ACTIVITÉ DES EXPERTS EN VENTES AUX ENCHÈRES PUBLIQUES 22

C. LES CONSEILS EN PROPRIÉTÉ INDUSTRIELLE : DES RÈGLES DÉONTOLOGIQUES RENFORCÉES POUR ASSURER LEUR COMPÉTITIVITÉ 22

III. - L'EXÉCUTION IMMÉDIATE DES JUGEMENTS DE PREMIÈRE INSTANCE  : UNE RÉFORME PRÉMATURÉE 23

DISCUSSION GÉNÉRALE 25

EXAMEN DES ARTICLES 27

titre premier - dispositions relatives à l'exercice permanent en france de la profession d'avocat par les ressortissants des états membres de la communauté européenne ayant acquis leur qualification dans un autre état membre 27

Chapitre premier -  L'exercice sous le titre professionnel d'origine 28

Article premier A (nouveau) (titre IV de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Création d'un titre dans la loi du 31 décembre 1971 rassemblant les dispositions relatives à la transposition de la directive 98/5/CE du 16 février 1998 28

Article premier B (nouveau) (chapitre Ier du titre IV de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Création d'un chapitre dans la loi du 31 décembre 1971 regroupant les dispositions relatives à l'exercice permanent de la profession d'avocat sous le titre d'origine 28

Article premier (art. 83 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Bénéficiaires du droit d'exercice permanent de la profession d'avocat en France sous un titre professionnel obtenu dans un autre État membre de la Communauté européenne - Soumission aux règles régissant la profession d'avocat 29

Article 2 (art. 84 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Inscription au barreau - Participation aux élections des membres du Conseil national des barreaux - Conséquences de la privation du droit d'exercer la profession dans l'État d'origine 31

Article 3 (art. 85 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Conditions d'usage du titre professionnel d'origine 33

Article 4 (art. 86 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Obligation d'assurance 33

Article 5 (art. 87 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Modalités d'exercice professionnel offertes aux avocats inscrits sous leur titre professionnel d'origine 34

Article 6 (art. 88 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Information de l'État d'origine en cas d'engagement de poursuites disciplinaires en France 38

Article 7 : Rattachement des avocats exerçant sous le titre d'origine à la Caisse nationale des barreaux français pour les risques vieillesse, invalidité, décès 39

Chapitre II - L'accès à la profession d'avocat 39

Article 8 A (nouveau) (chapitre II du titre IV de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Création d'un chapitre dans la loi du 31 décembre 1971 regroupant les dispositions relatives à l'accès des ressortissants communautaires à la profession d'avocat 39

Article 8 (art. 89 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Conditions d'intégration à la profession d'avocat en France de l'avocat ayant exercé sous le titre d'origine durant trois ans 40

Article 9 (art. 90 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Modalités d'inscription sous le titre français d'avocat des avocats communautaires ayant exercé trois ans sous leur titre d'origine 41

Chapitre III - Dispositions diverses 43

Article 10 A (nouveau) (chapitre III du titre IV de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Création d'un chapitre dans la loi du 31 décembre 1971 regroupant les dispositions diverses relatives à la transposition de la directive 98/5/CE du 16 février 1998 43

Article 10 (art. 91 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Interdiction de participer à une activité juridictionnelle 43

Article 11 (art. 92 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Collaboration entre les États membres de l'Union européenne et les barreaux français 44

titre ii - dispositions relatives à la formation professionnelle des avocats et aux attributions des conseils de l'ordre et du conseil national des barreaux 44

Article 12 (art. 7 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Tutorat des jeunes avocats en exercice 46

Article 13 (art. 12 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Refonte de la formation initiale 47

Article 14 (art. 12-1 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Soumission des docteurs en droit à l'obligation de formation au crfp 50

Article 15 (art. 12-2 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Droits et devoirs des élèves avocats au cours de la formation 51

Article 16 (art. 13 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Statut, fonctionnement et missions des centres régionaux de formation professionnelle 51

Article 17 (art. 13-1 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Localisation des centres régionaux de formation professionnelle 53

Article 18 (art. 14 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Appel des décisions des centres régionaux de formation professionnelle 55

Article 18 bis (nouveau) (art. 14-2 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Soumission des avocats à une obligation de formation continue 56

Article 19 (art. 15 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Coordination - Suppression des avocats stagiaires de la liste des électeurs appelés à désigner les membres du conseil de l'ordre 57

Article 20 (art. 17 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Coordinations - Attributions du conseil de l'ordre 57

Article 21 (art. 20 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Coordination - Appel des décisions du conseil de l'ordre 59

Article 22 (art. 21-1 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Compétences du Conseil national des barreaux 59

Article 23 (art. 22 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Coordination - Discipline 62

Article 24 (art. 53 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Coordination - Décrets d'application 62

Article 25 (art. 28 à 41 bis, 49, 51 et 77 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Abrogation de dispositifs transitoires devenus sans objet 63

titre iii - dispositions relatives à la discipline des avocats 64

Article 26 (art. 17 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Coordination 65

Article 27 (art. 22 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Instance disciplinaire compétente 65

Article 28 (art. 22-1 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Composition et fonctionnement du conseil de discipline 66

Article 29 (art. 22-2 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Compétence disciplinaire du conseil de l'ordre du barreau de Paris 68

Article 30 (art. 23 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Procédure devant l'instance disciplinaire 69

Article 31 (art. 24 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 ; art. 138 du code de procédure pénale) : Régime de la suspension provisoire d'un avocat faisant l'objet d'une poursuite pénale ou disciplinaire 70

Article 32 (art. 25 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Coordination - Saisine du conseil de l'ordre dans le cas d'un manquement à l'audience commis par l'avocat 72

titre iii bis - dispositions diverses relatives aux avocats [Division et intitulés nouveaux] 72

Article 32 bis (nouveau) (art. 66-5 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Confidentialité des correspondances entre avocats 72

Article additionnel après l'article 32 bis (nouveau) (art. 67 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Mention de l'appartenance à un réseau pluridisciplinaire 74

Après l'article 32 bis (nouveau) 75

titre iv - dispositions relatives à la discipline des greffiers des tribunaux de commerce 75

Article 33 (art. L. 822-2 du code de l'organisation judiciaire) : Peines disciplinaires applicables aux greffiers des tribunaux de commerce 76

Article 34 (art. L. 822-3, L. 822-3-1 et L. 822-3-2 du code de l'organisation judiciaire) : Attribution d'une compétence disciplinaire au Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce 77

Article L. 822-3 du code de l'organisation judiciaire : Autorités compétentes pour exercer l'action disciplinaire 77

Article L. 822-3-1 du code de l'organisation judiciaire : Composition et pouvoirs de la formation disciplinaire du Conseil national 77

Article L. 822-3-2 du code de l'organisation judiciaire : Engagement de l'action disciplinaire 78

Article 35 (art. L. 822-5 du code de l'organisation judiciaire) : Appel des décisions disciplinaires 79

Article 36 (art. L. 822-6 du code de l'organisation judiciaire) : Conséquences d'une suspension, d'une interdiction ou d'une destitution 79

Article 37 (art. L. 822-7 du code de l'organisation judiciaire) : Nomination d'administrateurs provisoires en cas de suspension, d'interdiction ou de destitution 80

Article 38 (art. L. 822-8 du code de l'organisation judiciaire) : Décret en Conseil d'État 80

titre iv bis - dispositions diverses relatives aux notaires [Division et intitulé nouveaux] 80

Article 38 bis (nouveau) (art. 4 de l'ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945) : Compétences des chambres des notaires 82

Article 38 ter (nouveau) (art. 5-1 de l'ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945) : Compétence disciplinaire des conseils régionaux des notaires 83

Article additionnel après l'article 38 ter (nouveau) (art. 6-1 de l'ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945) : Responsabilité civile professionnelle des notaires 84

Article additionnel après l'article 38 ter (nouveau) (art. 8 de l'ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945) : Compétence disciplinaire de la chambre interdépartementale de Paris 85

titre v - dispositions relatives aux experts judiciaires 86

Article 39 (art. 1er de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971) : Choix des experts par les juges 87

Article 40 (art. 2 de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971) : Établissement des listes d'experts 88

Article 40 bis (nouveau) (art. 3 de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971) : Dénomination des experts inscrits sur une liste 90

Article 41 (art. 5 de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971) : Retrait et radiation des experts 90

Article 42 (art. 6 de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971) : Serment des experts 91

Article 42 bis (nouveau) (art. 6-1 de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971) : Expertises aux fins d'analyse des empreintes génétiques 92

Article 43 (art. 6-2 et 6-3 de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971) : Procédure disciplinaire et responsabilité civile 93

Article 6-2 de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971 : Procédure disciplinaire 93

Article 6-3 de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971 : Responsabilité civile des experts 94

Article 43 bis (nouveau) (art. L. 813-1 et L. 813-2 du code de commerce) : Régime d'inscription sur les listes d'experts en diagnostic d'entreprise 94

Articles 43 bis, 43 ter, 43 quater et 43 quinquies (nouveaux) (art. 157, 160 et 162 du code de procédure pénale) : Expertise en matière pénale 96

titre v bis - dispositions diverses relatives aux experts en ventes aux enchères publiques [Division et intitulés nouveaux] 96

Article 43 sexies (nouveau) (art. L. 321-17 du code de commerce) : Responsabilité civile des experts en estimation de biens 97

Article 43 septies (nouveau) (art. L. 321-31, L. 321-35 et L. 321-35-1 du code de commerce) : Encadrement de l'activité des experts en ventes volontaires aux enchères non agréés 97

titre vi - dispositions relatives à la profession d'huissier de justice et aux procédures civiles d'exécution 99

Chapitre premier -  Dispositions relatives à l'accès direct des huissiers de justice au fichier des comptes bancaires 99

Section 1 - Dispositions modifiant la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution 99

Article 44 (art. 39 de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991) : Interrogation par les huissiers du fichier des comptes bancaires 99

Article 45 (art. 40 de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991) : Levée du secret professionnel lors de l'interrogation du ficoba par les huissiers 102

Article 46 (art. 51 de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991) : Saisie-vente dans un local servant à l'habitation du débiteur 102

Section 2 -  Dispositions modifiant le livre des procédures fiscales 103

Article 47 (art. L. 147 B du livre des procédures fiscales) : Suppression de la possibilité pour le procureur d'interroger le ficoba pour l'exécution d'un titre exécutoire 103

Article 48 (art. L. 151-1 du livre des procédures fiscales) : Levée du secret professionnel en cas d'interrogation du ficoba par un huissier de justice 103

Chapitre II -  Dispositions relatives aux indemnités de déplacement allouées aux huissiers de justice 104

Article additionnel avant l'article 49 (art. 2 de l'ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945) : Obligation de création d'un compte affecté à la réception des fonds destinés aux clients des huissiers 104

Article 49 (art. 8 de l'ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945) : Gestion des indemnités de déplacement allouées aux huissiers de justice 104

titre vii - dispositions relatives aux conditions d'exercice de la profession de conseil en propriété industrielle 106

Article 50 (art. L. 422-7 du code de la propriété intellectuelle) : Exercice en société d'exercice libéral de la profession de conseil en propriété industrielle 106

Article 51 (art. L. 422-11 à L. 422-13 du code de la propriété intellectuelle) : Secret professionnel et incompatibilités 107

Article L. 422-11 du code de la propriété intellectuelle : Secret professionnel 108

Articles L. 422-12 et L. 422-13 du code de la propriété intellectuelle : Incompatibilités 108

titre vii bis - dispositions diverses [division et intitulé nouveaux] 109

Article additionnel avant l'article 51 bis (nouveau) (art. 1er de l'ordonnance n° 58-1259 du 19 décembre 1958) : Garantie d'emprunts aux futurs officiers publics et ministériels 109

Article 51 bis (nouveau) (article 515 du nouveau code de procédure civile) : Exécution immédiate des jugements de première instance en matière civile 110

Article additionnel après l'article 51 bis (nouveau) (art. 30 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991) : Coordination 116

Article additionnel après l'article 51 bis (nouveau) (art. 31-1 de la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990) : Objet social des sociétés de participations financières de professions libérales et prises de participations dans les groupements étrangers 116

Article additionnel après l'article 51 bis (nouveau) (art. L. 811-13, L. 812-1, L. 812-2 et L. 814-1 du code de commerce) : Mission impartie aux mandataires de justice et procédure disciplinaire 116

Article additionnel après l'article 51 bis (nouveau) (art. 37 et 38 de la loi du 1er juin 1924) : Accès au livre foncier informatisé pour les géomètres-experts 116

Article additionnel après l'article 51 bis (nouveau) (art.  41 de la loi n° 2000-642 du 10 juillet 2000) : Limitation dans le temps de l'indemnisation des huissiers de justice et des notaires 117

titre viii - dispositions relatives à l'outre-mer 117

Article 52 : Habilitation du Gouvernement à procéder par ordonnance à l'application de la loi outre-mer 117

Article 53 (art. 81 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Application à Saint-Pierre-et-Miquelon 118

titre ix - dispositions transitoires 119

Article 54 (art. 50 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) : Dispositions transitoires relatives aux avocats 119

Article 55 : Entrée en vigueur des dispositions modifiant la discipline des avocats et des greffiers des tribunaux de commerce 121

Article 56 : Dispositions transitoires applicables à l'établissement des listes d'experts 122

Article 57 : Dispositions transitoires applicables aux incompatibilités des conseils en propriété industrielle 123

Accès à la 2ème partie du rapport

Tableau comparatif

Accès à la 3ème partie du rapport

Annexe au tableau comparatif

Amendements non adoptés par la Commission

personnes entendues par le rapporteur

MESDAMES, MESSIEURS,

Adopté en première lecture par le Sénat le 2 avril dernier, le projet de loi réformant le statut de certaines professions judiciaires ou juridiques, des experts judiciaires, des conseils en propriété industrielle et des experts en ventes aux enchères publiques est aujourd'hui soumis à l'examen de notre assemblée.

Déjà important dans le projet de loi initial, le cercle des professionnels concernés a été élargi par le Sénat (1). À ce stade de la discussion parlementaire, ce texte concerne cinq professions - les avocats, les greffiers des tribunaux de commerce, les notaires, les huissiers de justice et les conseils en propriété industrielle - ainsi que les experts judiciaires et les experts en ventes aux enchères publiques. Le projet de loi modifie ou complète ainsi de nombreux textes et codes : la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques ; le code de l'organisation judiciaire ; l'ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945 relative au statut du notariat ; la loi n° 71-498 du 29 juin 1971 relative aux experts judiciaires ; le code de commerce ; le code de procédure pénale ; l'ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers ; la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution ; le livre des procédures fiscales  et le code de la propriété intellectuelle.

Cette apparence disparate ne doit toutefois pas masquer les objectifs du texte. Comme le soulignait le garde des Sceaux devant le Sénat, « le projet s'articule autour de deux axes forts : d'une part, l'adaptation des modalités d'accès à ces professions et notamment de la formation, gage d'une compétence et d'un professionnalisme accrus ; d'autre part, le renforcement de la déontologie et de la discipline, gage d'une confiance renforcée. En complément de ce dispositif, le projet de loi prévoit de doter les professions de moyens d'action plus performants ».

Ce projet de loi est aujourd'hui très attendu par les professionnels. Fruit d'une étroite concertation avec ces derniers, il apporte une modernisation indispensable aux réglementations qui leur sont applicables, en améliorant les conditions d'exercice de leur métier et en renforçant les garanties déontologiques que leurs clients sont en droit d'attendre d'eux.

Essentiel pour les professionnels, ce texte l'est également pour les secteurs dans lesquels ils interviennent, et particulièrement pour le service public judiciaire au fonctionnement duquel concourt la majorité des professions considérées. Les modifications apportées à l'organisation des professions d'avocat, de greffier des tribunaux de commerce, de notaire ou d'huissier sont ainsi déterminantes pour la crédibilité de notre système judiciaire, de même que l'amélioration de l'encadrement des activités des experts, qui jouent un rôle central dans les procédures judiciaires. Quant aux modifications apportées aux conditions d'exercice des experts en ventes aux enchères publiques, elles sont essentielles pour asseoir la légitimité du marché de l'art français.

Après avoir présenté la modernisation des réglementations applicables aux professions judiciaires et juridiques, ainsi que les aménagements prévus pour les experts et les conseils en propriété industrielle, le rapporteur reviendra sur l'exécution immédiate des jugements de première instance, le Sénat ayant introduit une modification du nouveau code de procédure civile sur ce point.

*

* *

I. - LES RÉGLEMENTATIONS APPLICABLES AUX PROFESSIONS JUDICIAIRES ET JURIDIQUES : UNE MODERNISATION ATTENDUE

Si plus de la moitié du projet de loi concerne la profession d'avocat, il apporte également des modifications - plus ponctuelles mais non moins importantes - au statut des greffiers des tribunaux de commerce, des notaires et des huissiers de justice.

A. L'ACCÈS À LA PROFESSION D'AVOCAT, SA DÉONTOLOGIE ET L'ORGANISATION DE SA DISCIPLINE

Treize ans après avoir réalisé la fusion des professions d'avocat et de conseil juridique (2) et avoir permis, comme à d'autres professions libérales, l'exercice de leur activité dans le cadre d'une structure juridique commerciale sous réserve du respect de certaines règles déontologiques (3), le législateur est de nouveau amené à se pencher sur l'organisation de la profession d'avocat afin de l'adapter aux évolutions qui se sont fait jour dans ce domaine. En effet, il lui faut tenir compte de l'ouverture croissante de la profession sous l'effet de la construction communautaire, du développement des activités de conseil, de la technicité accrue des normes juridiques, mais aussi des exigences posées par la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés en matière de « procès équitable », exigences qui influencent l'organisation des procédures disciplinaires.

Tel est l'objet des quatre premiers titres du projet de loi, qui concernent respectivement : l'exercice permanent en France de la profession d'avocat par des ressortissants des États membres de la Communauté européenne ayant acquis leur qualification dans un autre État membre ; la formation professionnelle des avocats et les attributions des conseils de l'ordre et du Conseil national des barreaux (cnb) ; la discipline ; enfin, sur ajout du Sénat, la confidentialité des correspondances échangées entre avocats. L'ensemble de ces modifications est porté dans la loi du 31 décembre 1971 qui demeure ainsi le texte de référence pour l'organisation de la profession(4).

1. L'ouverture de la profession aux avocats communautaires

Se conformant aux objectifs de libre circulation des personnes et de libre prestation des services, inscrits dans le Traité instituant la Communauté européenne, les institutions communautaires se sont attachées à favoriser la libre circulation des avocats. Trois directives ont jalonné la réalisation de cet objectif :

-  la directive n° 77/549 du 22 mars 1977 tendant à faciliter l'exercice effectif de la libre prestation de services par les avocats, qui reconnaît aux avocats la faculté de fournir une prestation juridique dans tout État membre de la Communauté sans obligation de résidence ni d'inscription au barreau mais qui autorise les États à imposer certaines obligations lorsqu'il doit assurer la représentation et la défense d'un client en justice ;

-  la directive n° 89/48/CEE du Conseil du 21 décembre 1988, relative à un système général de reconnaissance des diplômes d'enseignement supérieur, qui ouvre aux professionnels communautaires la possibilité de s'établir dans un autre État membre, celui-ci pouvant toutefois adopter des mesures correctrices destinées à vérifier les compétences du migrant lorsqu'il constate des différences substantielles dans les systèmes de formation ; l'avocat est alors assimilé à ses homologues du pays d'accueil ;

-  la directive n° 98/5/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 février 1998 visant à faciliter l'exercice permanent de la profession d'avocat dans un État membre autre que celui où la qualification a été acquise.

C'est ce dernier texte, fruit de longues négociations, dont le projet de loi prévoit aujourd'hui la transposition. Allant au-delà du mécanisme de reconnaissance des diplômes, posé par la directive du 21 décembre 1988 précitée, la directive du 16 février 1998 offre à tout avocat d'un État membre la possibilité d'exercer, sans limitation de durée, dans un autre État membre et sous son titre d'origine (art. 2, 1er al.). Sa compétence s'étend alors au droit de l'État membre d'accueil et il peut se présenter devant une juridiction du pays d'accueil, ce dernier pouvant toutefois imposer qu'il soit assisté d'un « avocat de concert » (art. 5, § 3). Bénéficiant d'une représentation au sein des instances professionnelles du pays d'accueil (art. 6, § 2), ce professionnel est soumis aux règles du barreau auprès duquel il s'inscrit et doit respecter les règles de déontologie locales. La directive permet en outre à un avocat, après trois ans d'exercice effectif et régulier sous son titre d'origine dans l'État membre d'accueil et dans le droit de cet État, de solliciter son intégration auprès du barreau de celui-ci (art. 10) ; il a alors le droit de faire usage, à côté du titre professionnel correspondant à la profession d'avocat dans l'État membre d'accueil, de son titre professionnel d'origine. Enfin, la directive facilite l'exercice de la profession en « groupe », en permettant notamment à des avocats exerçant sous leur titre d'origine d'adopter les formes d'exercice en groupe en vigueur dans le pays d'accueil, ce groupe pouvant réunir des avocats issus de plusieurs États membres exerçant sous leurs titres d'origine ainsi que des avocats de l'État membre d'accueil.

Comme le souligne le Gouvernement dans l'exposé des motifs du projet de loi, cette directive « ouvre de nouvelles perspectives qui vont bien au delà de la situation qui prévaut aujourd'hui en matière d'exercice du droit d'établissement ».

En effet, force est de reconnaître qu'à ce jour, la présence des avocats étrangers est encore discrète au sein de nos barreaux. Au 1er janvier 2003, 1 096 avocats étrangers étaient inscrits au barreau français, constituant moins de 3 % des effectifs de la profession, y compris les avocats stagiaires. En outre, leur répartition est inégale : en 2002, ils étaient concentrés sur 49 barreaux dont 23 ne comptant qu'un seul avocat étranger, le barreau de Paris en rassemblant à lui seul 79,5 % et Nanterre occupant la deuxième position avec 41 avocats étrangers. Sur ce total, les avocats ressortissants de l'un des États membres de l'Union européenne sont moins nombreux (493) que les avocats ressortissants d'un Etat tiers (576), pourtant soumis, en application de l'article 100 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat, à un examen de vérification de connaissances. Quant au nombre d'avocats communautaires établis en France sous leur titre d'origine en application de la directive du 16 février 1998, il est faible : d'après le Conseil des barreaux de l'Union européenne, et sans prendre en compte les avocats étrangers ayant obtenu leur inscription au titre de la directive du 21 décembre 1988 précitée, la France n'accueillait au 1er août 2002 que 33 avocats dits « communautaires », sur un total de 905 avocats exerçant ailleurs que dans leur pays d'origine, alors que la Belgique en comptait 378, le Royaume-Uni et l'Allemagne respectivement 157 et 156, la Grèce 53 et l'Italie 47. Par comparaison, 859 avocats français, pour 96 % membres du barreau de Paris, étaient inscrits au 1er janvier 2003 à la fois dans un barreau étranger et français ; ils représentaient 2 % de la profession.

Le titre Ier du projet de loi transpose dans la loi du 31 décembre 1971 les différents volets de la directive du 16 février 1998, en distinguant l'exercice en France sous le titre professionnel d'origine de l'accès à la profession après trois ans d'activité régulière et effective sur le territoire.

Conformément à la lettre de la directive du 16 février 1998, le projet de loi ouvre de nouveaux droits aux ressortissants de la Communauté ayant acquis leur titre d'avocat dans un autre État membre : son inscription auprès du barreau de son choix est de droit dès lors qu'il fournit l'attestation établissant que l'autorité compétente de l'État membre d'origine lui reconnaît ce titre (art. 1er et 2) ; il participe à l'élection des membres du conseil de l'ordre et du Conseil national des barreaux (art. 2) ; il peut exercer la profession selon les mêmes modalités que celles prévues par la loi du 31 décembre 1971 pour les avocats français (5) ainsi qu'au sein ou au nom d'un groupement d'exercice régi par le droit de l'État membre où le titre a été acquis et, si ce groupement ne répond pas aux conditions posées par la loi, au moins faire mention de la dénomination de ce groupement (art. 5) ; après trois années d'activité effective et régulière en France en droit français, l'avocat communautaire peut accéder à la profession d'avocat française ; son inscription n'est subordonnée à aucun examen, le conseil de l'ordre du barreau choisi étant tenu d'inscrire l'avocat sauf cas limitativement énumérés mais retrouvant toutefois une marge d'appréciation si l'intéressé justifie d'une activité de moins de trois ans en droit français.

Simultanément, l'avocat migrant est soumis aux obligations de la profession (art. 2), certaines dispositions spécifiques étant toutefois prévues lorsqu'il exerce sous son titre d'origine. Ainsi, dans un souci légitime d'information de la clientèle, l'avocat exerçant sous son titre d'origine est inscrit sur une liste spéciale du tableau du barreau choisi (art. 2) et doit toujours mentionner son titre dans la langue du pays dans lequel il a été acquis et faire état de l'organisation professionnelle ou la juridiction dont relève l'intéressé dans son État d'origine (art. 3). En outre, afin de tenir compte de la spécificité de la profession, le projet de loi précise les critères que doit remplir le groupement de l'exercice de l'État d'origine pour que l'avocat migrant puisse exercer en France en son sein ou en son nom (art. 5) ; s'inspirant des critères posés par la loi du 31 décembre 1990 relative à l'exercice sous forme de sociétés de professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé, ils sont, pour reprendre les termes de l'exposé des motifs du projet de loi, « le gage de l'indépendance économique et professionnelle de la structure d'exercice ».

Les conseils de l'ordre jouent un rôle important dans l'accueil des ressortissants communautaires. En effet, il leur revient de les inscrire sur la liste spéciale du tableau du barreau lorsqu'ils exercent sous leur titre d'origine (art. 2) ; de vérifier la nature des assurances souscrites par l'intéressé (art. 4) ; d'être informés par ce dernier de son intention d'exercer en France au sein ou au nom d'un groupement d'exercice régi par le droit de l'État membre où le titre a été acquis et de vérifier si le groupement en question répond aux conditions posées par la loi pour qu'il puisse le faire (art. 5) ; d'inscrire au tableau les avocats migrants qui, après trois années d'activité effective et régulière sur le territoire national, souhaitent intégrer la profession (art. 8). Comme à l'égard du reste de la profession, il joue un rôle en matière disciplinaire, le bâtonnier étant tenu d'informer l'autorité compétente de l'État membre où l'intéressé est inscrit avant l'engagement des poursuites disciplinaires à l'encontre de l'avocat exerçant sous son titre professionnel d'origine (art. 6) et le conseil de l'ordre étant compétent pour prendre la décision tirant les conséquences d'une privation temporaire ou définitive du droit d'exercer dans l'État membre d'origine (art. 2). Enfin, il est précisé que les barreaux collaborent avec les autorités compétentes des États membres de la Communauté européenne et leur apportent l'assistance nécessaire pour faciliter la mise en œuvre de la directive du 16 février 1998 (art. 11).

Ouvrant véritablement une nouvelle voie d'accès à la profession d'avocat, le texte reprend les dispositions d'un projet de loi déposé au Sénat sous la précédente législature mais jamais inscrit à l'ordre du jour (6). Contrairement à ce dernier, il ne limite pas son objet à la seule transposition de la directive du 16 février 1998, mais s'efforce également d'adapter les règles de la profession aux besoins nouveaux de la profession en matière de formation, de déontologie et de discipline.

2. L'adaptation de la formation aux besoins de la profession

Le système de formation des avocats doit aujourd'hui relever deux défis  : s'adapter à l'augmentation rapide du nombre d'élèves, préparer les professionnels à des pratiques supposant l'acquisition de connaissances de plus en plus pointues et faisant une large part aux activités de conseil.

Tenant largement à la fusion des professions d'avocat et de conseil juridique opérée par la loi du 31 décembre 1990, l'augmentation du nombre d'avocats a conduit à un doublement des effectifs de la profession entre 1990 et 2003. Depuis 1997, le nombre d'avocats stagiaires et celui d'avocats inscrits au tableau ont progressé respectivement de 50 et 20 %. En 2003, les premiers étaient ainsi près de 6 400, les seconds près de 34 500. Quant au nombre d'élèves-avocats présents dans les centres régionaux de formation professionnelle, après être resté stable durant de nombreuses années, il a augmenté de 8,64 % entre 2002 et 2003, avec 2 753 élèves actuellement. Au total, la France compte donc 40 847 avocats en 2003, contre 32 997 en 1997.

En outre, la formation doit s'adapter aux nouveaux besoins, qui tiennent largement au développement du conseil aux entreprises. Son organisation doit tenir compte de la complexité croissante des normes juridiques et de leur instabilité.

Telle qu'elle est organisée aujourd'hui - examen d'accès à un centre régional de formation professionnelle (crfp), formation théorique et pratique d'un an dans un centre, sanctionnée par le certificat d'aptitude à la profession d'avocat (capa), stage de deux ans sanctionné par la délivrance d'un certificat de fin de stage - la formation des avocats ne semble aujourd'hui plus à même ni de gérer le nombre, ni de répondre aux besoins croissants de spécialisation qui se font jour dans le secteur. En effet, la progression des effectifs se heurte aux capacités d'absorption des barreaux, nombre d'élèves peinant à trouver une collaboration à l'issue de leur formation dans le crfp, comme le relevait la mission de la commission des Lois du Sénat sur l'évolution des métiers de la justice (7). Paradoxalement, l'importance numérique des effectifs de la profession ne semble pas permettre de satisfaire les besoins des cabinets d'avocats-conseils, qui ont régulièrement appelé l'attention des pouvoirs publics sur les difficultés rencontrées pour recruter, à l'issue de la formation de droit commun, des avocats spécialisés dans le secteur du conseil aux entreprises. Mettant l'accent sur la défense plus que le conseil, recrutant les élèves davantage sur des connaissances judiciaires que juridiques, dispensée dans des centres de tailles très inégales, la formation ne répond qu'imparfaitement aux besoins de spécialisation et de technicité qui sont apparus. Si l'on ajoute à ces défauts les difficultés de financement des centres et la condamnation par la très grande majorité des avocats, notamment les plus jeunes d'entre eux, de l'obligation faite aux stagiaires de suivre une formation dispensée par le crfp, la nécessité d'une réforme de la formation des avocats s'impose à l'évidence.

Tel est l'objet du titre II du projet de loi, qui prévoit une refonte de la formation professionnelle des avocats.

Tirant les conséquences des critiques récurrentes formulées à l'encontre du stage de deux ans, le projet de loi le supprime et, corrélativement, porte à dix-huit mois la durée de la formation dispensée dans les crfp (art. 13). Si l'organisation de la formation relève de la profession, le soin étant confié au cnb de définir les principes de l'organisation de la formation et d'harmoniser les programmes (art. 22), plusieurs dispositions du projet de loi attestent du souci de garantir le « professionnalisme » des personnes suivant cette formation. Ainsi, le projet de loi introduit la faculté d'une formation en alternance s'exerçant dans le cadre d'un contrat d'apprentissage (art. 13). De même est-il fait référence aux stages accomplis auprès de professionnels, de juridictions ou d'organismes divers dans les nouvelles dispositions relatives au secret professionnel auquel est astreinte la personne admise en formation (art. 15). Dans la même logique, il sera également imposé aux docteurs en droit, qui peuvent aujourd'hui, passer le capa directement, de suivre la formation dispensée par le crfp (art. 14). Enfin, il est proposé de soumettre les avocats qui poseraient leur plaque, c'est-à-dire qui exercent soit à titre individuel soit en qualité de collaborateur ou de salarié d'un ou plusieurs avocats exerçant chacun la profession depuis moins de dix-huit mois, à un « tutorat », l'appréciation de leur pratique professionnelle étant confiée durant cette période à un avocat inscrit au tableau ou un avocat honoraire, désigné par le conseil de l'ordre (art. 12). Cette disposition étant source de nombreuses interrogations sur ses conditions de mise en œuvre, la Commission, sur proposition du rapporteur, l'a supprimée.

Afin de répondre aux besoins d'une spécialisation croissante, exprimés notamment par les cabinets d'avocats-conseils, et d'homogénéiser la qualité des formations dispensées en favorisant l'émergence d'entités mieux dotées en moyens humains et matériels, le projet de loi introduit des dispositions relatives au regroupement des centres de formation régionaux effectué aujourd'hui uniquement par convention entre les établissements concernés sans intervention des pouvoirs publics (art. 17). Il confie au garde des Sceaux le soin de procéder à ces regroupements, sur proposition du Conseil national des barreaux, après consultation des centres de formation concernés.

C'est également pour tenir compte de la progression des activités de conseil que le Gouvernement, en concertation avec la profession, s'est attaché à orienter davantage la sélection sur les matières juridiques liées à l'activité de conseil et notamment sur le droit commercial et des affaires, ainsi que sur le droit public. À cette fin, il a pris, le 11 septembre dernier, deux arrêtés destinés à rééquilibrer le contenu des programmes de l'examen d'entrée au crfp et de l'examen du capA. L'examen d'accès au crfp est ainsi modifié : une épreuve écrite d'admissibilité est ajoutée, l'épreuve écrite obligatoire de droit civil, prévue par un arrêté du 29 janvier 1998, est remplacée par une épreuve de droit des obligations ; le nombre d'épreuves orales est réduit et le champ des dispenses possibles pour les titulaires d'un diplôme d'études approfondies (dea) ou diplôme d'études supérieures spécialisées (dess) redessiné.

En complément de ces dispositions, le Sénat, sur proposition du rapporteur de la commission des Lois, a institué une obligation de formation continue. Le caractère nécessairement évolutif des normes juridiques et leur complexité croissante justifient pleinement cette obligation, que le rapporteur a proposé à la Commission de préciser.

3. La rénovation de l'organisation disciplinaire

Essentielles à la crédibilité de la profession en assurant la clientèle du respect effectif des règles déontologiques imposées aux avocats, les conditions d'exercice du pouvoir disciplinaire doivent également garantir aux professionnels mis en cause qu'ils seront jugés dans le respect des règles relatives au procès équitable posées à l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Ces deux exigences complémentaires justifient aujourd'hui une réforme des conditions d'exercice de la discipline des avocats.

Aux termes de l'article 22 de la loi du 31 décembre 1971, c'est aujourd'hui le conseil de l'ordre de chaque barreau qui poursuit et réprime les infractions et les fautes commises par les avocats inscrits au tableau ou sur la liste du stage. Ses pouvoirs disciplinaires sont étendus :

- tous les avocats, stagiaires, de plein exercice et honoraires, sont concernés ;

- les normes pouvant faire l'objet de sanctions disciplinaires sont variées puisque, aux termes de l'article 183 du décret du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat, « toute contravention aux lois et règlements, toute infraction aux règles professionnelles, tout manquement à la probité, à l'honneur ou à la délicatesse, même se rapportant à des faits extraprofessionnels, expose l'avocat qui en est l'auteur aux sanctions disciplinaires énumérées à l'article 184 » (avertissement, blâme, interdiction temporaire qui ne peut excéder trois ans, radiation du tableau, de la liste du stage ou retrait de l'honorariat) ;

- la procédure disciplinaire, décrite aux articles 187 à 199 du décret du 27 novembre 1991, fait du conseil de l'ordre à la fois une autorité de poursuite et de jugement : en effet, de sa propre initiative, à la demande du procureur général ou sur plainte de toute personne intéressée, le bâtonnier ou un rapporteur qu'il désigne procède à une enquête sur le comportement de l'avocat mis en cause. À l'issue de cette enquête, le bâtonnier classe l'affaire ou prononce le renvoi devant le conseil de l'ordre, qui peut également se saisir d'office ou être saisi par le procureur général, et qui va ensuite procéder à l'instruction contradictoire de l'affaire (convocation de l'avocat avec indication précise des faits poursuivis et la référence des dispositions législatives ou réglementaires réprimant les manquements professionnels reprochés, audition contradictoire de toute personne susceptible d'éclairer l'instruction, publicité des débats à la demande de l'avocat). Soumise à une obligation de motivation, la décision du conseil de l'ordre peut, dans un délai d'un mois, faire l'objet d'un recours devant la cour d'appel ; celle-ci siège alors en audience solennelle tenue par deux chambres sous la présidence du Premier président (art. 16 du décret du 27 novembre 1991).

Ainsi organisée, la discipline de la profession ne satisfait qu'imparfaitement aux exigences énoncées plus haut. En effet, être jugé par ses pairs peut se révéler particulièrement gênant dans les barreaux petits et moyens, qui sont majoritaires en France (8): la proximité entre les membres du conseil de l'ordre et les confrères soumis à leur jugement peut faire craindre d'éventuelles connivences ou, à l'inverse, une excessive sévérité (9). En outre, l'exercice des fonctions de poursuite et de jugement par une même autorité s'accommode mal des exigences posées par la convention européenne des droits de l'Homme en matière de procès équitable, dont l'article 6 §1 a été jugé applicable aux procédures disciplinaires confiées à des ordres professionnels par la Cour européenne des droits de l'homme (cedh)(10), le Conseil d'État (11) et la Cour de cassation (12). Si la participation du rapporteur au délibéré du conseil de l'ordre statuant en matière disciplinaire a été remise en cause par la Cour de cassation dans un arrêt du 5 octobre 1999 (13) et si le principe de la publicité des débats à la demande de l'avocat est aujourd'hui admis, la confusion des autorités de poursuite et de jugement est aujourd'hui source d'interrogations, notamment sur le rôle joué par le bâtonnier dans la procédure, qui cumule plusieurs fonctions : il préside le conseil de l'ordre qui édicte le règlement intérieur ; il a l'initiative et la responsabilité de l'enquête déontologique préalable ; il décide de classer ou de renvoyer l'affaire devant le conseil de l'ordre ; il préside le conseil de l'ordre qui ouvre l'instruction disciplinaire et qui rend la décision ; il peut, en application de l'article 16 du décret du 27 novembre 1991, présenter des observations devant la cour d'appel statuant en matière disciplinaire (14).

Tout en maintenant le principe de l'exercice du pouvoir disciplinaire par la seule profession, le titre III du projet de loi réforme les dispositions relatives à la discipline qui figurent dans le chapitre III de la loi du 31 décembre 1971. Aux conseils de l'ordre est substitué un conseil de discipline composé de représentants des conseils de l'ordre du ressort de la cour d'appel (art. 27 et 28). Une exception est toutefois faite pour le barreau de Paris : son importance numérique - il rassemble à lui seul 16 104 avocats, soit 39,4  % du total des effectifs de la profession en 2003 -limitant les risques de proximité qui justifient la réforme, le conseil de l'ordre du barreau de Paris conserve ses compétences disciplinaires. Les conseils de l'ordre conservent toutefois un rôle privilégié dans l'exercice de la discipline, puisqu'ils désignent leurs représentants au sein de la nouvelle instance et qu'ils se voient confiés l'instruction de l'affaire lorsque l'avocat mis en cause est inscrit dans leur barreau (art. 23).

Conformément à l'objectif de séparation des autorités de poursuite et de jugement qui s'appliquera désormais quelle que soit l'instance disciplinaire compétente, le conseil de l'ordre ne pourra plus se saisir d'office et l'ancien bâtonnier qui, au titre de ses fonctions antérieures, aura engagé les poursuites ne pourra plus siéger au sein de la formation de jugement. De même en sera-t-il pour le membre de l'instance disciplinaire chargé d'instruire l'affaire (art. 23).

Enfin, le régime de la suspension provisoire est aménagé. Excessivement lourde de conséquences pour l'activité du professionnel qu'elle vise, cette mesure doit être entourée de toutes les garanties nécessaires pour éviter qu'elle ne soit abusivement prononcée et, dans le même temps, offrir à la clientèle les garanties déontologiques qu'elle est en droit d'attendre de la profession (art. 31). Dans la même logique de séparation des autorités de poursuite et de jugement, le Sénat a précisé que les membres du conseil de l'ordre ne peuvent siéger au sein du conseil de l'ordre lorsqu'il se prononce sur la suspension provisoire d'un avocat.

4. L'élargissement des compétences du Conseil national des barreaux

Lors de sa création par la loi du 31 décembre 1990, le Conseil national des barreaux est alors le fruit d'un compromis entre l'autonomie des barreaux à laquelle les avocats sont très attachés - et que rappelle notamment l'article 53 de la loi du 31 décembre 1971 - et l'organisation professionnelle des conseils juridiques, structurée autour de commissions régionales et d'une instance nationale. Le projet de loi conforte aujourd'hui le rôle fédérateur de cet établissement d'utilité publique dans l'organisation de la profession en renforçant son poids sur deux points essentiels pour la crédibilité de la profession : la formation et la déontologie.

Il est ainsi précisé que les conseils de l'ordre exercent les missions qui leur sont imparties « sans préjudice » des compétences reconnues au CNB (art. 20). En outre, le projet de loi met fin au débat sur le pouvoir normatif du CNB en lui confiant le soin d'unifier par voie de dispositions générales les règles et usages de la profession d'avocat (art. 22). Il lui reconnaît également un rôle en matière de formation, son contenu et son organisation, puisqu'il lui reviendra de proposer au garde des Sceaux le siège et le ressort de chaque centre de formation et éventuellement des regroupements ; et ce n'est qu'avec son aval que les centres régionaux pourront créer une section locale dans les villes pourvues d'unités de formation et de recherche juridiques (art. 17).

B. LE RENFORCEMENT DE LA DISCIPLINE DES GREFFIERS DES TRIBUNAUX DE COMMERCE

Le greffier des tribunaux de commerce, officier public et ministériel, assiste les membres du tribunal de commerce à l'audience et dans tous les cas prévus par la loi. Il aide ainsi le président du tribunal dans l'ensemble des tâches administratives qui lui sont propres et assure son secrétariat. Il l'assiste également dans l'établissement et l'application du règlement intérieur de la juridiction, dans l'organisation des rôles d'audiences et la répartition des juges, dans la préparation du budget et la gestion des crédits alloués à la juridiction. Il est dépositaire des minutes et archives. Il assure notamment la tenue des différents registres prévus par les textes en vigueur, tel le registre du commerce. Il dresse les actes de greffe.

À l'image de ce qui existe pour les juges consulaires, le code de l'organisation judiciaire institue une discipline stricte pour les greffiers des tribunaux de commerce. Tout manquement d'un greffier à l'honneur, à la probité, à la dignité et aux devoirs de sa charge constitue une faute disciplinaire. L'acceptation de sa démission ne fait pas obstacle au prononcé d'une peine disciplinaire si les faits qui lui ont été reprochés ont été commis pendant l'exercice de ses fonctions. L'action disciplinaire est exercée à l'initiative du procureur de la République devant le tribunal de grande instance dans le ressort duquel le tribunal de commerce a son siège. Elle se prescrit par dix ans. L'appel interjeté contre une décision du tribunal de grande instance statuant en matière disciplinaire est formé par simple déclaration au secrétariat-greffe du tribunal.

Les peines disciplinaires sont au nombre de trois : l'avertissement, le blâme et la destitution. Cette dernière entraîne la radiation pendant cinq ans de la liste électorale prévue par l'article L. 11 du code électoral. Le tribunal de grande instance, qui prononce la destitution ou parfois une suspension seulement provisoire, qui s'apparente non à une sanction mais à une mesure de sûreté, peut nommer un ou plusieurs administrateurs provisoires.

Par rapport au régime disciplinaire des autres officiers publics et ministériels, tels que les notaires ou les huissiers de justice, le régime applicable aux greffiers des tribunaux de commerce présente deux différences : la compétence disciplinaire échappe aux instances représentant la profession ; l'éventail des sanctions est réduit. Cette double originalité ne laisse de présenter des inconvénients. D'une part, elle suscite une moindre implication de la profession dans sa propre régulation. D'autre part, elle interdit au juge de prononcer une sanction proportionnée à une faute qui mérite plus qu'un avertissement ou un blâme sans pour autant justifier une radiation.

C'est pourquoi, pour pallier ces deux inconvénients, il est proposé, dans le titre IV du présent projet de loi, d'élargir l'éventail des sanctions et d'attribuer une compétence disciplinaire au Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce.

C. L'ADAPTATION DES RÈGLES DISCIPLINAIRES APPLICABLES AUX NOTAIRES

Dans son rapport précité sur les métiers de la justice, le Sénat avait relevé la nécessité d'étendre les compétences des notaires, qui pourraient être chargés de mener à bien certaines procédures (envoi en possession des successions, changements de régimes matrimoniaux, partages impliquant des mineurs). Le présent chapitre ne concerne que la discipline applicable à la profession.

Le dispositif disciplinaire de la profession de notaire s'avère d'ores et déjà substantiel. Néanmoins, pour se conformer aux exigences de plus en plus fortes de crédibilité et de transparence qui concernent l'ensemble des professions du droit et pour s'adapter aux évolutions démographiques spécifiques de la profession (15), le Sénat, sur proposition du Gouvernement, a adopté deux articles additionnels (titre IV bis) ayant pour objet de parfaire le régime disciplinaire des notaires : le premier définit le transfert de la compétence disciplinaire des instances départementales ou interdépartementales (les chambres des notaires) aux instances régionales (les conseils régionaux des notaires), plus éloignées des conflits locaux ; en conséquence, le second prévoit la création d'une formation disciplinaire au sein de ces instances régionales.

D. L'AMÉLIORATION DES MOYENS D'ACTION DES HUISSIERS DE JUSTICE

Officiers publics et ministériels régis par l'ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945, les huissiers de justice sont nommés dans leurs fonctions par arrêté du garde des Sceaux ; ils ont seuls qualité pour signifier les actes de procédures et exécuter les décisions de justice ainsi que les actes ou titres en forme exécutoire.

Contrairement aux autres professions juridiques ou judiciaires visées par le projet de loi, les dispositions relatives aux huissiers qui sont rassemblées dans le titre VI ne touchent pas la discipline de cette profession, mais visent à accroître l'efficacité de son action.

Elles tendent tout d'abord à faciliter le recouvrement des créances en leur ouvrant accès directement au fichier des comptes bancaires (ficoba) afin de connaître l'adresse des établissements dans lesquels le débiteur a un compte (art. 44 à 48). Afin de faciliter encore l'exécution des décisions de justice - essentielle à la crédibilité de notre service public judiciaire - le Sénat a supprimé l'exigence d'un relevé certifié sincère des recherches infructueuses entreprises par l'huissier pour pouvoir interroger le ficoba, qui recense plus de 300 millions de comptes.

Elles confortent par ailleurs le dispositif de péréquation des frais de transport qu'ils supportent dans l'exercice de leurs activités, nécessaire pour assurer le maillage territorial de la profession (art. 49).

II. - LES EXPERTS ET LES CONSEILS EN PROPRIÉTÉ INDUSTRIELLE : UN PROFESSIONALISME RENFORCÉ

À côté des dispositions relatives aux professions juridiques et judiciaires, le projet de loi initial modifie les réglementations applicables aux experts judiciaires (titre V) et aux conseils en propriété industrielle (titre VII). Lors de l'examen de ce texte en première lecture, le Sénat y a inclus, sur proposition du Gouvernement, des dispositions relatives aux experts en ventes aux enchères publiques (titre V bis).

A. L'ENCADREMENT DE LA FONCTION D'EXPERT JUDICIAIRE

Sous le double coup de la spécialisation croissante des contentieux et de la technicité grandissante des matières traitées dans les procès, le rôle de l'expert judiciaire, au pénal comme au civil, est de plus en plus important. Il est devenu un acteur à part entière de l'activité judiciaire et ses qualités rejaillissent sur la qualité de la justice rendue.

Certains, à l'instar de M. Guy Canivet, Premier président de la Cour de cassation, auditionné par le rapporteur, estiment avec raison que, pendant longtemps, les tribunaux n'ont pas fait systématiquement appel aux meilleurs professionnels et que certains contrôles n'ont pas été effectués avec toute la rigueur nécessaire. Les carences du système ont conduit, dans certains secteurs, à créer un marché de l'expertise sans véritable surveillance. Aujourd'hui, un expert est quasiment nommé à vie, son travail peu évalué et les sanctions en cas d'incompétence sont rarement prononcées. L'inspection générale des affaires sociales avait estimé qu'« il ne semble pas que le processus de nomination des experts garantisse une réelle sélection des candidats ». De manière plus appuyée encore, Mme Jehanne Collard, auteur de Victimes, les oubliés de la justice (16), estime que « l'expertise judiciaire suscite le plus souvent l'amertume et la colère des victimes : incompréhension de la méthode, stupéfaction à la lecture des résultats, interrogations récurrentes sur la compétence et l'indépendance des professionnels concernés ».

Le régime mis en place en 1971 mérite donc d'être actualisé et les garanties de recrutement renforcées, afin d'améliorer la légitimité des expertises et donc la crédibilité de notre système judiciaire.

C'est pourquoi, il est proposé dans le titre V du projet d'assurer non seulement une meilleure sélection des experts appelés à intervenir dans le cours d'un procès, mais également une discipline plus adaptée et une responsabilité mieux affirmée. L'expert sera soumis à une période probatoire de deux ans avant d'être inscrit définitivement sur les listes des cours d'appel. Une commission contrôlera l'activité et la compétence du spécialiste tous les cinq ans. Ce contrôle périodique des compétences devrait inciter les intéressés à actualiser leurs connaissances dans des domaines où l'évolution des techniques est très rapide. Une palette plus large de sanctions disciplinaires devrait permettre de répondre de manière idoine à toute faute professionnelle sans attendre une hypothétique radiation.

Ces modifications ne conduisent cependant pas à remettre en cause l'originalité du système français. Il existe deux voies pour répondre à l'objectif de sélection des meilleurs professionnels, ceux dont la compétence est la meilleure pour donner un avis technique dans un litige : soit on s'en remet au marché, et on laisse les parties choisir leur propre expert, comme cela se pratique dans les pays de Common Law ; soit on s'en remet à un mécanisme, comme il en existe un en Allemagne, de certification publique assimilant l'expert à un agent de l'État. En France, le système est mixte. Il permet, d'une part, grâce au truchement du juge, d'éloigner l'expert des intérêts de l'une ou l'autre des parties, et d'autre part, par le recours à une liste évolutive, de recruter des professionnels compétents en prise directe avec les évolutions de leur métier.

B. L'AMÉNAGEMENT DES DISPOSITIONS RELATIVES À L'ACTIVITÉ DES EXPERTS EN VENTES AUX ENCHÈRES PUBLIQUES

Mettant fin au monopole des commissaires-priseurs, la loi n° 2000-642 du 10 juillet 2000 portant réglementation des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques a institué la liberté d'établissement dans le domaine des ventes volontaires aux enchères publiques. Depuis lors, le nombre d'intervenants sur le marché, dénommés sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques, n'est plus limité. Ces intervenants peuvent adopter toutes les formes d'organisation offertes aux sociétés commerciales, depuis l'entreprise unipersonnelle jusqu'à la société faisant appel public à l'épargne.

Cette loi a également encadré l'activité des experts appelés à se prononcer sur la valeur des biens soumis aux ventes volontaires. Ces experts, exerçant à titre libéral, peuvent ou non être agréés par le conseil national des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques. L'agrément emporte un certain nombre d'obligations, notamment celle de s'assurer.

Dans son rapport d'activité 2001-2002, le conseil national a estimé que la dualité de régime, entre experts agréés et experts non agréés n'était pas satisfaisante. Sur proposition du Gouvernement, le Sénat a donc adopté un titre V bis relatif aux experts intervenant en matière de ventes volontaires aux enchères. Il est proposé de leur étendre, lorsqu'ils agissent sans avoir reçu l'agrément du conseil des ventes prévu par la loi du 10 juillet 2000, l'obligation d'assurance - qui constitue déjà une obligation pour les experts adhérant aux principaux syndicats - et l'interdiction d'acheter des biens qu'ils ont estimés ou, sauf exception, de vendre des meubles dont ils sont propriétaires. Il ne s'agit pas de revenir sur la volonté du législateur de 2000 d'assurer une certaine souplesse - un expert pourra continuer à ne pas être agréé -  mais de garantir aux clients une sécurité maximale et une concurrence loyale et de fournir à la place française un niveau d'encadrement semblable à celui qui existe sur les autres grands marchés de l'art et donc une crédibilité accrue.

C. LES CONSEILS EN PROPRIÉTÉ INDUSTRIELLE : DES RÈGLES DÉONTOLOGIQUES RENFORCÉES POUR ASSURER LEUR COMPÉTITIVITÉ

Régie par la loi du 26 novembre 1990 relative à la propriété industrielle et le décret n° 92-360 du 1er avril 1992 modifié par le décret n° 97-863 du 17 septembre 1997, la profession de conseil en propriété industrielle a remplacé la profession de conseil en brevets d'invention.

Ce professionnel intervient dans des domaines particulièrement sensibles. En effet, conformément à l'article L. 422-1 du code de la propriété intellectuelle, il a « pour profession d'offrir, à titre habituel et rémunéré, ses services au public pour conseiller, assister ou représenter les tiers en vue de l'obtention, du maintien, de l'exploitation ou de la défense des droits de propriété industrielle, droits annexes et droits portant sur toutes questions connexes ». Leur activité inclut les consultations juridiques et la rédaction d'actes sous seing privé sur ces différentes matières. Comme le rappelait l'exposé des motifs du projet de loi, « ces professionnels conseillent les entreprises pour la protection et la défense de leur patrimoine intellectuel en général et en particulier de leurs créations, marques, inventions et savoir-faire industriels et commerciaux »

Afin de garantir la compétitivité des conseils en propriété industrielle français, le projet de loi prévoit le renforcement de leurs règles déontologiques sur deux points cruciaux :

- d'une part, la consécration législative de la portée de l'obligation de secret professionnel, qui figure aujourd'hui dans la partie réglementaire du code de la propriété intellectuelle (art. 51, art. L. 422-11 du code de la propriété intellectuelle) ;

- d'autre part, l'institution d'incompatibilités afin de leur interdire des activités de nature commerciale, l'acceptation de mandats sociaux dans des sociétés autres que celles ayant pour objet l'exercice de leur profession et, plus généralement, les autres activités professionnelles (art. 51, art. L. 422-12 et L. 422-13 du code de la propriété intellectuelle).

Enfin, il est proposé d'inclure expressément dans le code de la propriété intellectuelle le fait qu'ils peuvent exercer leur activité dans le cadre d'une société d'exercice libéral, à l'instar de ce qui a été autorisé par la loi du 31 décembre 1990 pour les autres professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé (art. 50).

Ces dispositions permettent ainsi d'aligner la réglementation applicable à cette profession sur les autres professions réglementées, et particulièrement les avocats, afin, comme le rappelait le garde des Sceaux, de favoriser entre les conseils en propriété industrielle et les autres professions réglementées intervenant dans le domaine du conseil « des partenariats qui renforceront l'appui juridique aux entreprises et contribueront ainsi à améliorer la protection, l'exploitation et la défense des innovations en France ».

III. - L'EXÉCUTION IMMÉDIATE DES JUGEMENTS DE PREMIÈRE INSTANCE  : UNE RÉFORME PRÉMATURÉE

Sur proposition de M. Pierre Fauchon et contre l'avis du Gouvernement, le Sénat a adopté un amendement modifiant l'article 515 du nouveau code de procédure civile afin d'y prévoir l'exécution immédiate des jugements rendus en première instance (art. 51 bis).

Cet ajout permet ainsi au Parlement de se pencher sur une question essentielle pour les justiciables, largement débattue par la doctrine et les praticiens, mais qui n'avait jusqu'à présent pas été examinée par le législateur, les dispositions concernées relevant du domaine réglementaire.

L'idée n'est pas neuve. C'est dans le rapport sur la procédure civile confié par M. Jacques Toubon, alors garde des Sceaux, à M. Jean-Marie Coulon, alors président du tribunal de grande instance de Paris, que fut formulée cette proposition (proposition n° 35). Non reprise dans le décret n° 98-1231 du 28 décembre 1998 relatif à la modification du code de l'organisation judiciaire et du nouveau code de procédure civile, cette proposition figurait dans un projet de décret portant diverses dispositions de procédure civile et relatif à la procédure de répartition du prix de vente du fonds de commerce, rédigé dans le prolongement des « entretiens de Vendôme » engagés un an auparavant, et soumis en avril 2002 aux professionnels du monde judiciaire.

Au-delà des arguments juridiques avancés pour justifier ou contester cette proposition, au premier rang desquels les risques de voir cette disposition appliquée dans des domaines aussi sensibles que le droit du travail, le rapporteur tient à faire observer que l'exécution immédiate des jugements de première instance implique une réforme préalable de l'ensemble de notre organisation juridictionnelle. Elle supposerait en effet de renforcer les moyens humains alloués aux juridictions de première instance afin qu'elles puissent « rendre dans un délai raisonnable des décisions exécutables, dans des conditions satisfaisantes pour les justiciables » (17). Elle supposerait en outre une refonte de leur organisation et des pratiques judiciaires afin de limiter le nombre de décisions rendues à juge unique, de garantir qu'à l'issue de la première instance, les fondements juridiques de l'affaire auront été explicités. Mais elle supposerait également sans doute qu'une réflexion soit engagée sur la composition des juridictions spécialisées telles que les conseils de prud'hommes et les tribunaux de commerce, si l'exécution immédiate devait être appliquée aux jugements rendus par ces dernières.

Ces interrogations suffisent à montrer qu'une simple refonte de l'article 515 du nouveau code de procédure civile ne saurait seule permettre d'atteindre l'objectif recherché par l'auteur de l'amendement, à savoir renforcer l'efficacité de la justice.

Au demeurant, il est permis de s'interroger sur l'opportunité de bouleverser l'économie de notre procédure civile alors qu'elle laisse d'ores et déjà au juge la faculté d'assortir sa décision de l'exécution provisoire. Bien que la Chancellerie ne dispose pas de statistiques nationales sur ce point, il semblerait que les magistrats fassent une large utilisation de cette disposition : entre 80 et 90  % des jugements rendus par le tribunal de grande instance de Paris seraient ainsi assortis de l'exécution provisoire et M. Pierre Fauchon a indiqué au Sénat que M. Michel Bénichou, président du cnb, avait estimé que c'était le cas de 80 % des décisions dans sa juridiction. Faut-il dans ces conditions renoncer au principe de l'effet suspensif de l'appel ? Le rapporteur ne le pense pas. Elle pense en effet que l'importance d'une « bonne et prompte exécution des jugements » (18) ressort davantage de moyens accrus permettant aux justiciables de faire exécuter la décision obtenue (renforcement des voies d'exécution et des poursuites contre l'organisation de l'insolvabilité...) plutôt que de la généralisation de l'exécution immédiate aux décisions de première instance. C'est la raison pour laquelle elle a proposé à la Commission, qui l'a suivie, de supprimer la modification du nouveau code de procédure civile adoptée par le Sénat.

*

* *

Après l'exposé du rapporteur, plusieurs commissaires sont intervenus dans la discussion générale.

Mme Maryse Joissains-Masini s'est déclarée hostile à la suppression du stage de formation des jeunes avocats, jugeant en effet indispensable que ceux-ci acquièrent au cours de leurs études une formation pratique. S'agissant de l'amendement adopté par le Sénat à l'initiative de M. Pierre Fauchon sur l'exécution immédiate des jugements de première instance, elle a rejoint les propos du rapporteur sur les inconvénients qu'il comporte et a fait état des difficultés qui résultent d'ores et déjà des jugements assortis de l'exécution provisoire lorsqu'ils sont infirmés en appel.

M. Jean-Paul Garraud a exprimé sa satisfaction à l'égard d'un texte modernisant les conditions d'exercice de la profession d'avocat, compte tenu des difficultés rencontrées par un nombre croissant de jeunes avocats. Il a jugé indispensable d'accroître l'effort de formation en contrepartie de la suppression du stage. Il a souhaité que les centres régionaux de formation professionnelle (CRFP), en charge de cette formation, puissent bénéficier des moyens adéquats pour assurer leur mission dans de bonnes conditions. Insistant ensuite sur la nécessité de procéder à une harmonisation des formations dispensées aux avocats sur tout le territoire, il s'est déclaré satisfait du regroupement des CRFP avec une coordination nationale assurée par le Conseil national des barreaux.

En réponse aux intervenants, le rapporteur s'est dit convaincu de la nécessité de dispenser une formation pratique aux futurs avocats ; elle a indiqué que, si le projet de loi supprimait le stage de deux ans, il allongeait, en contrepartie, la durée de formation pour la porter à dix-huit mois et que celle-ci inclurait des stages ; elle a également précisé que le projet comportait des dispositions relatives au regroupement des centres de régionaux de formation professionnelle pour assurer une formation homogène et qu'il ouvrait la possibilité de délivrer cette formation dans le cadre d'un contrat d'apprentissage.

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EXAMEN DES ARTICLES

Composé initialement de neuf titres respectivement consacrés aux avocats, aux greffiers des tribunaux de commerce, aux experts judiciaires, aux huissiers de justice et aux procédures civiles d'exécution ainsi qu'aux conseils en propriété industrielle, le projet de loi a été enrichi, lors de sa première lecture au Sénat, de quatre nouveaux titres : le titre III bis, qui complète les dispositions relatives aux avocats ; les titres IV bis et V bis, qui rassemblent des dispositions relatives respectivement aux notaires et aux experts en ventes aux enchères publiques ; le titre VII bis, qui modifie le nouveau code de procédure civile, afin d'y prévoir l'exécution immédiate des jugements de première instance.

TITRE PREMIER

DISPOSITIONS RELATIVES À L'EXERCICE PERMANENT EN FRANCE
DE LA PROFESSION D'AVOCAT PAR LES RESSORTISSANTS DES ÉTATS MEMBRES
DE LA COMMUNAUTÉ EUROPÉENNE AYANT ACQUIS LEUR QUALIFICATION
DANS UN AUTRE ÉTAT MEMBRE

Contrairement à la plupart des États membres(19), la France n'a pas encore procédé à la transposition de la directive 98/5/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 février 1998 qui vise à faciliter l'exercice permanent de la profession d'avocat dans un État membre autre que celui où la qualification a été acquise. La date limite de transposition ayant été fixée au 14 mars 2000 par l'article 16 de la directive, la France a fait l'objet d'une mise en demeure le 8 août 2000, puis d'un avis motivé le 29 janvier 2001, avant d'être condamnée par la Cour de justice des Communautés européennes le 26 septembre 2002 (affaire C-351/01).

D'ores et déjà, la jurisprudence a fait une application directe de la directive, en en faisant valoir son contenu inconditionnel et suffisamment précis (20), tandis que des barreaux, notamment celui de Paris, « ont tenu compte de la directive comme d'un règlement et l'ont appliquée sans hésitation, sans qu'il soit nécessaire, pour les intéressés, de former un recours » (21).

Cependant, il est à l'évidence de meilleure méthode d'adapter notre dispositif législatif aux dispositions de la directive du 16 février 1998. Tel est donc l'objet du premier titre du projet de loi, qui comporte trois chapitres, respectivement consacrés à l'exercice sous le titre professionnel d'origine pour les ressortissants communautaires, aux conditions dans lesquelles ils peuvent accéder à la profession d'avocat et à des dispositions diverses.Sur proposition de son rapporteur, le Sénat a inscrit l'ensemble de ces dispositions dans la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, qui demeure ainsi le texte de référence pour l'organisation de la profession.

Ainsi que le dernier alinéa de l'article 5 de la directive du 16 février 1998 en laisse la possibilité aux États membres, ces dispositions de transposition ne concernent que la seule profession d'avocat, à l'exclusion des professions d'avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation et d'avoué près les cours d'appel.

Chapitre premier

L'exercice sous le titre professionnel d'origine

Ce chapitre rassemble les dispositions nécessaires à l'application des dispositions de la directive du 16 février 1998 relatives à l'exercice de la profession d'avocat sous son titre d'origine.

Article premier A (nouveau)

(titre IV de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Création d'un titre dans la loi du 31 décembre 1971
rassemblant les dispositions relatives à la transposition
de la directive 98/5/CE du 16 février 1998

Sur proposition de son rapporteur, le Sénat a introduit cet article qui tend à compléter la loi du 31 décembre 1971 par un nouveau titre, portant « dispositions relatives à l'exercice permanent de la profession d'avocat en France par les ressortissants des États membres de la Communauté européenne ayant acquis leur qualification dans un autre État membre ».

Il s'insère ainsi après trois titres respectivement consacrés à : la création et l'organisation de la nouvelle profession d'avocat ; la réglementation de la consultation en matière juridique et de la rédaction d'actes sous seing privé ; des dispositions diverses.

La Commission a adopté l'article 1er A sans modification.

Article premier B (nouveau)

(chapitre Ier du titre IV de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Création d'un chapitre dans la loi du 31 décembre 1971
regroupant les dispositions relatives à l'exercice permanent
de la profession d'avocat sous le titre d'origine

Introduit par le Sénat sur proposition de son rapporteur, cet article crée, dans le titre IV précédemment introduit dans la loi du 31 décembre 1971 (cf. art. 1er A), un chapitre Ier intitulé « dispositions relatives à l'exercice permanent sous le titre professionnel d'origine ». Il comportera les articles 83 à 88 (cf. art. 1er à 6) et sera suivi de deux autres chapitres, portant respectivement sur les conditions d'accès à la profession d'avocat et sur des dispositions diverses.

La Commission a adopté l'article 1er B sans modification.

Article premier

(art. 83 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Bénéficiaires du droit d'exercice permanent de la profession
d'avocat en France sous un titre professionnel obtenu dans un autre État membre de la Communauté européenne - Soumission aux règles régissant la profession d'avocat

_  Le décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat permet aujourd'hui à un avocat ressortissant d'un État membre de la Communauté européenne soit d'exercer ponctuellement en France, soit de s'y établir. Ces deux voies correspondent à deux principes fondateurs du marché intérieur communautaire : la libre prestation de services dans le premier cas, le droit d'établissement dans le second.

Transposant la directive n° 77/249 du Conseil du 22 mars 1977 tendant à faciliter l'exercice effectif de la libre prestation de services par les avocats, le titre V du décret du 27 novembre 1991 précise les conditions dans lesquelles les « avocats ressortissants de l'un des États membres des Communautés européennes établis à titre permanent dans l'un de ces États » peuvent venir « accomplir, en France, une activité professionnelle occasionnelle » (art. 200). Il prévoit que le titre national, exprimé dans la langue de l'État dans lequel l'avocat est établi, doit être suivi de l'organisme professionnel dont il relève et que le ressortissant communautaire est soumis, sous réserve de certains aménagements, aux dispositions applicables en matière disciplinaire. Il distingue selon que l'avocat assure la représentation ou la défense d'un client en justice ou qu'il exerce des activités de conseil et de rédaction d'actes :

-  dans le premier cas, l'article 202 du décret précise que l'avocat d'un État membre de la Communauté « exerce ses fonctions dans les mêmes conditions qu'un avocat inscrit à un barreau français » et, à ce titre, respecte les règles professionnelles françaises. S'il est autorisé à se constituer devant tout tribunal de grande instance, il doit toutefois préalablement élire domicile auprès d'un avocat établi près le tribunal saisi et auquel les actes de la procédure seront notifiés. L'élection de domicile vaut pour l'instance considérée et est formalisée dans une convention passée par les deux avocats, dont l'existence sera attestée par l'avocat français lors de l'introduction de l'instance ou à la constitution en défense. De même, lorsqu'il plaide devant une cour d'appel, l'avocat étranger est tenu d'agir « de concert » avec un avoué ;

-  lorsqu'il exerce des activités de conseil ou de rédaction d'actes, l'avocat ressortissant d'un État membre demeure soumis aux conditions d'exercice et aux règles professionnelles applicables à sa profession dans son État d'origine, mais il est également soumis « au respect de règles qui s'imposent, pour l'exercice de ces activités, aux avocats inscrits à un barreau français », étant toutefois précisé que ces règles ne leur sont applicables « que si elles peuvent être observées alors que [ces avocats] ne disposent pas d'un établissement en France et dans la mesure où leur observation se justifie objectivement pour assurer en France l'exercice correct des activités d'avocat, le dignité de la profession et le respect des incompatibilités » (art. 203).

Si l'avocat entend établir en France son siège professionnel, il doit alors se conformer aux dispositions de l'article 99 du décret du 27 novembre 1991, relatives aux conditions « d'inscription au barreau des ressortissants de la Communauté économique européenne ». Ces dispositions réglementaires ont été prises en en application de la directive du Conseil n° 89/48/CEE du Conseil du 21 décembre 1988, relative à un système général de reconnaissance des diplômes d'enseignement supérieur qui sanctionnent des formations professionnelles d'une durée minimale de trois ans. Les avocats communautaires sont alors assimilés à leurs homologues français, exercent sous le titre français, sont inscrits à un barreau et respectent les règles professionnelles.

Aux termes de ces dispositions, les avocats ressortissants d'un État membre de la Communauté européenne bénéficient d'un régime dérogatoire leur permettant d'être dispensé de diplôme, de l'obtention du certificat d'aptitude à la profession d'avocat (CAPA) et du stage, ordinairement requis pour accéder à la profession (22). Conformément à la lettre de la directive précitée, les personnes concernées doivent remplir deux conditions cumulatives :

-  d'une part, « avoir suivi avec succès un cycle d'études d'une durée minimale de trois ans [...] dans une université ou un établissement d'enseignement supérieur ou dans un autre établissement de même niveau de formation et, le cas échéant, la formation professionnelle requise en plus de ce cycle d'études ».

-  d'autre part, justifier d'un diplôme permettant l'exercice de la profession d'avocat dans un État membre ou « de l'exercice à plein temps de la profession pendant deux ans au moins au cours des dix années précédentes dans un État membre qui ne réglemente pas l'accès ou l'exercice de cette profession, à condition que cet exercice soit attesté par l'autorité compétente de cet État » ;

En outre, ainsi que l'article 4 de la directive du 21 décembre 1988 en laisse la possibilité aux États membres, la France a choisi de soumettre ces ressortissants communautaires à un examen d'aptitude lorsque leur formation ou leur expérience professionnelle se révèlent trop différentes de celles requises en France ; le programme et les modalités de cet examen sont fixés par arrêté du garde des sceaux, après avis du Conseil national des barreaux. C'est à ce dernier qu'il revient d'établir la liste des personnes admises à se présenter à cet examen d'aptitude, qu'il est interdit de passer plus de trois fois, et de préciser les matières sur lesquelles les candidats doivent être interrogés compte tenu de leur formation initiale.

_  Tel qu'il résulte des travaux du Sénat, l'article 1er du projet de loi introduit dans la loi du 31 décembre 1971 un article 83 ouvrant aux ressortissants communautaires la possibilité d'exercer de façon permanente en France sous leur titre professionnel d'origine et les soumettant, sous réserve de certains aménagements, aux règles régissant la profession d'avocat. Il transpose ainsi l'article 2 de la directive du 16 février 1998 qui ouvre à « tout avocat [...] le droit d'exercer à titre permanent, dans tout autre État membre, sous son titre professionnel d'origine, les activités d'avocat ».

Les bénéficiaires de ces dispositions sont les ressortissants de l'un des États membres de la Communauté européenne, y compris les ressortissants français qui auraient acquis leur titre d'avocat dans un autre État membre de la Communauté. D'après les informations fournies par la Chancellerie, ces dispositions devraient également être étendues aux ressortissants des États parties à un accord avec l'Union européenne, tel que, par exemple, l'accord sur l'Espace Économique européen.

Comme dans le régime de la prestation de services précédemment évoqué, il peut exercer sa profession en France sous son titre professionnel d'origine, mais cette fois-ci de façon permanente. Deux conditions sont posées :

-  conformément à l'article 4 de la directive du 16 février 1998, il est précisé que l'usage de son titre professionnel d'origine est exclusif de tout autre, afin d'éviter toute confusion pour les usagers, l'article 85 (cf. infra art. 3) précisant les conditions dans lesquelles il sera fait usage de ce titre professionnel d'origine ;

-  ce titre devra figurer sur une liste fixée par décret ; elle reprendra la liste des dénominations figurant dans l'article 1er de la directive, sa détermination par voie réglementaire devant en faciliter la révision afin de tenir compte des élargissements à venir de l'Union européenne. Enfin, l'avocat devra être pleinement qualifié, ces dispositions n'ayant donc pas vocation à s'appliquer à l'avocat stagiaire.

S'il bénéficie d'un titre professionnel d'origine, le ressortissant communautaire peut alors exercer « la profession d'avocat », au même titre qu'un avocat français. Aux termes de la directive précitée, il sera habilité à donner des consultations juridiques notamment dans le droit de l'État membre d'origine, en droit communautaire, en droit international et dans le droit de l'État membre d'accueil. Dans ce dernier cas, il ne sera plus tenu, contrairement au régime de la prestation de services, d'agir de concert avec un avocat local. Il est soumis, comme le précise le dernier alinéa du nouvel article 83, aux dispositions de la loi du 31 décembre 1971 qui réglemente la profession sous les seules réserves des aménagements nécessaires, figurant dans les articles 84 à 88, introduits dans ladite loi par les articles 2 à 6 du projet.

La Commission a adopté l'article 1er sans modification.

Article 2

(art. 84 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Inscription au barreau - Participation aux élections des
membres du Conseil national des barreaux - Conséquences
de la privation du droit d'exercer la profession dans l'État d'origine

Conformément à l'article 3 de la directive du 16 février 1998, cet article - dont les dispositions ont été insérées par le Sénat dans la loi du 31 décembre 1971 sous un article 84 nouveau - subordonne l'exercice permanent de la profession d'avocat par un ressortissant communautaire sous son titre professionnel d'origine à l'inscription au barreau de son choix. Comme le précise le considérant 8 de la directive, cette obligation se justifie par le souci de permettre à l'autorité compétente de l'État membre d'accueil de s'assurer que les avocats visés par ces nouvelles dispositions respecteront les règles professionnelles et déontologiques de l'État membre d'accueil.

Il est précisé qu'il sera inscrit sur une liste spéciale du tableau, comme c'est le cas aujourd'hui pour les avocats stagiaires ou les avocats honoraires. Cette solution les distingue en cela des ressortissants communautaires qui, assimilés à un avocat français, figurent sur le tableau qui rassemble les avocats en exercice.

Conformément à l'article 17 de la loi du 31 décembre 1971, l'inscription au tableau relève de la compétence du conseil de l'ordre du barreau auprès duquel le ressortissant communautaire a choisi de s'établir. Toutefois, alors que le conseil de l'ordre dispose d'une faculté d'appréciation sur les demandes d'inscription qui lui sont adressées (23), tel n'est pas le cas pour les ressortissants communautaires souhaitant exercer sous leur titre professionnel d'origine. En effet, il est précisé que cette inscription est de droit dès lors que l'intéressé fournit une attestation délivrée par l'autorité compétente de l'État membre de la Communauté auprès de laquelle il est inscrit, établissant que ladite autorité lui reconnaît le titre d'avocat. Comme le souligne l'exposé des motifs du projet de loi, « l'État d'accueil n'assure aucun contrôle des modalités d'acquisition du titre d'avocat [....] et ne peut donc plus se prévaloir des éventuelles différences dans les cursus de formation qui, aux termes de la directive 89/98/CEE précitée, pouvaient légitimer la mise en œuvre de mesures de compensation ».

Conformément à l'article 6 § 2 de la directive, qui prévoit pour ces avocats « une représentation appropriée dans les instances de l'État membre d'accueil » et leur octroie le droit de vote lors des élections des organes de celles-ci, le nouvel article 84 de la loi du 31 décembre 1971 précise qu'ils font partie du barreau auprès duquel ils sont inscrits « dans les conditions prévues à l'article 15 » de la loi du 31 décembre 1971, c'est-à-dire qu'ils participent aux élections du conseil de l'ordre et du bâtonnier. Outre une modification rédactionnelle, le Sénat, afin d'éviter une redondance, a supprimé, sur proposition de son rapporteur, les dispositions relatives à la participation des ressortissants communautaires à ces deux élections, pour seulement prévoir leur participation à celle du Conseil national des barreaux.

Enfin, sont précisées les conséquences de la privation temporaire ou définitive du droit d'exercer la profession dans l'État d'origine. Par symétrie avec la possibilité d'établissement d'un avocat communautaire en France dès lors qu'il dispose d'un titre équivalent dans son pays d'origine et conformément à la lettre du dernier paragraphe de l'article 7 de la directive communautaire, cette privation entraîne de plein droit le retrait temporaire ou définitif du droit d'exercer en France. Outre une modification rédactionnelle, le Sénat a précisé, sur proposition de son rapporteur, que c'est au conseil de l'ordre, autorité disciplinaire de la profession, qu'il revient de tirer les conséquences de la décision prononcée dans l'État d'origine.

La Commission a adopté l'article 2 sans modification.

Article 3

(art. 85 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Conditions d'usage du titre professionnel d'origine

Adopté sans modification par le Sénat sous réserve de son insertion dans la loi du 31 décembre 1971, cet article précise les conditions dans lesquelles l'avocat ressortissant d'un État membre de la Communauté européenne peut mentionner son titre d'origine.

Conformément à la lettre du premier paragraphe de l'article 4 de la directive du 16 février 1998 et comme pour les avocats venant en France exercer leur activité professionnelle de façon occasionnelle dans le cadre de la libre prestation de services, le titre professionnel d'origine ne peut être mentionné que dans la ou l'une des langues officielles de l'État membre où il a été acquis. Il s'agit ainsi de protéger l'usager du droit et d'éviter toute confusion avec le titre professionnel de l'État membre d'accueil.

En outre, comme la directive en laisse la possibilité aux États membres, ces professionnels auront l'obligation d'accoler à leur titre deux mentions supplémentaires :

-  d'une part, le nom de l'organisation professionnelle dont ils dépendent ou de la juridiction auprès de laquelle ils sont inscrits dans leur pays d'origine ; il s'agit ainsi d'éviter toute confusion lorsque le mot « avocat » est également utilisé dans un pays étranger, par exemple en Belgique ;

-  d'autre part, comme les avocats inscrits au tableau d'un barreau français(24), l'indication de l'ordre des avocats auprès duquel ils sont inscrits en France.

La Commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 3), puis l'article 3 ainsi modifié.

Article 4

(art. 86 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Obligation d'assurance

Approuvé par le Sénat sous réserve de modifications rédactionnelles destinées notamment à tenir compte de l'insertion de ces dispositions dans la loi du 31 décembre 1971, cet article précise les conditions d'assurance des avocats ressortissants d'un des États membres de la Communauté et souhaitant exercer en France à titre permanent sous son titre d'origine.

Ne comportant sur ce point aucune disposition à caractère obligatoire, la directive du 16 février 1998 laisse aux États membres la faculté d'imposer à ces professionnels soit de souscrire une assurance de responsabilité professionnelle, soit de s'affilier à un fonds de garantie professionnelle conformément aux règles applicables pour cette profession dans l'État d'accueil. La directive prévoit toutefois que le professionnel sera exonéré de cette obligation dès lors qu'il justifie bénéficier d'une assurance ou d'une garantie souscrite équivalente dans son pays. Si celle-ci n'est que partiellement équivalente, « l'autorité compétente de l'État membre d'accueil peut exiger la souscription d'une assurance ou d'une garantie complémentaire pour couvrir les éléments qui ne sont pas déjà couverts par l'assurance ou la garantie souscrite selon les règles de l'État membre d'origine ».

C'est cette solution qui est retenue dans l'article 84 nouveau de la loi du 31 décembre 1971.Il prévoit qu'un avocat ressortissant d'un autre État membre de l'Union européenne est tenu de s'assurer dans les mêmes conditions que son confrère français, mais prévoit une exonération de cette obligation dans les mêmes termes que la directive. Il confie au conseil de l'ordre le soin de constater l'équivalence des assurances et garanties offertes dans l'État membre d'origine et impose au professionnel, si tel n'est pas le cas, de souscrire une assurance ou une assurance obligatoire.

La Commission a adopté l'article 4 sans modification.

Article 5

(art. 87 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Modalités d'exercice professionnel offertes aux avocats inscrits
sous leur titre professionnel d'origine

_  La directive du 16 février 1998 précise les modalités d'exercice professionnel de l'avocat inscrit dans un État membre d'accueil sous son titre professionnel d'origine. Son article 8 lui permet ainsi d'exercer comme salarié, lorsque la réglementation de l'État membre d'accueil le permet. En outre, prenant acte du développement de l'exercice en groupe de la profession, mais également des disparités existant entre les législations nationales en matière d'exercice de la profession (25), la directive s'est efforcée de préciser les modalités d'exercice en groupe en conciliant deux impératifs (26) :

-  « éviter que le fait d'exercer en groupe dans l'État membre d'origine ne soit le prétexte à un obstacle ou à une gêne à l'établissement des avocats membres de ce groupe dans l'État membre d'accueil » ;

-  « permettre aux États membres de prendre des mesures appropriées pour atteindre l'objectif légitime d'assurer l'indépendance de la profession ».

Les articles 11 et 12 de la directive du 16 février 1998 précisent les modalités d'exercice en groupe, défini comme « toute entité, avec ou sans personnalité juridique, constituée en conformité avec la législation d'un État membre, au sein de laquelle des avocats exercent leurs activités professionnelles en commun et sous une dénomination commune ». Les règles sont les suivantes :

-  un ou plusieurs avocats exerçant sous leur titre d'origine dans un État d'accueil et qui sont membres d'un même groupe dans l'État membre d'origine peuvent pratiquer leur activité professionnelle dans le cadre d'une succursale ou d'une agence de leur groupe dans l'État d'accueil. Toutefois, si les règles qui régissent ce groupe dans l'État d'origine sont incompatibles avec des règles fondamentales de l'État d'accueil, ces dernières s'appliquent « dans la mesure où leur respect est justifié par l'intérêt général consistant en la protection du client et des tiers » ;

-  toutes les formes d'exercice en groupe en vigueur dans l'État d'accueil peuvent être adoptées par les avocats exerçant sous leur titre d'origine ; régi par la réglementation locale, le groupe ainsi constitué peut réunir des avocats provenant d'un même État membre ou d'un même groupe, mais également des avocats provenant de plusieurs États membres exerçant sous leurs titres d'origine et des avocats de l'État d'accueil ;

-  toutefois, l'État d'accueil peut empêcher l'exercice sur son territoire de groupes dans lesquels des personnes n'ayant pas la qualité d'avocat détiennent en tout ou partie le capital du groupe, y exercent le pouvoir de décision ou figurent dans la dénomination du groupe, à condition toutefois que cette interdiction soit également prévue à l'égard de ses professionnels nationaux.

La directive précise également que l'avocat voulant exercer sous son titre d'origine informe l'autorité de l'État membre d'accueil du fait qu'il est membre d'un groupe dans son État d'origine et donne toutes les informations utiles relatives à ce groupe. Quel que soit le mode d'exercice choisi dans le pays d'accueil, il peut toujours faire mention de la dénomination du groupe dont il est membre dans l'État d'origine, l'État d'accueil pouvant toutefois exiger que soit également indiqué « la forme juridique du groupe et/ou les noms des membres du groupe exerçant dans l'État d'accueil ».

_  L'article 5 du projet de loi - dont les dispositions ont été insérées par le Sénat dans la loi du 31 décembre 1971 sous un nouvel article 87 - détermine les modalités d'exercice professionnel offertes à l'avocat inscrit sous son titre professionnel d'origine.

Le premier alinéa offre à celui-ci les mêmes modalités d'exercice que celles ouvertes à ses confrères français, en prévoyant qu'il exerce selon les modalités prévues aux articles 7 et 8 de la loi du 31 décembre 1971. L'avocat migrant pourra ainsi exercer à titre individuel ; en qualité de collaborateur ou de salarié (27) d'un avocat, d'une association ou d'une société d'avocats ; au sein d'une association ; au sein d'une société civile professionnelle d'avocats, mode d'exercice en groupe le plus fréquent aujourd'hui(28); au sein d'une société d'exercice libéral (29) ; au sein d'une société en participation ; en tant que membre d'un groupement d'intérêt économique ou membre d'un groupement européen d'intérêt économique.

Dans ses alinéas 2 à 7, l'article 87 nouveau de la loi du 31 décembre 1971 précise les conditions dans lesquelles un avocat inscrit sous son titre professionnel d'origine peut exercer « au sein ou au nom » d'un « groupement d'exercice » régi par le droit de l'État membre où le titre a été acquis.

Le choix de cette terminologie se justifie par la nécessité de trouver un terme qui, comme le souhaite la directive, vise toutes les structures d'exercice et non les seuls « groupes », ce terme ayant une acception précise en droit français (30), de même que l'expression « au sein ou au nom » se justifie par la nécessité d'embrasser toutes les formes d'exercice en groupe susceptibles de se rencontrer au sein de l'Union européenne.

À l'obligation faite à l'avocat migrant d'informer le conseil de l'ordre qui a procédé à son inscription de son intention d'exercer au sein ou au nom d'un groupement d'exercice régi par le droit de l'État membre où il a acquis son titre d'origine, le projet de loi ajoute quatre conditions cumulatives tenant à l'organisation dudit groupement :

-  plus de la moitié du capital et des droits de vote doit être détenue par des personnes exerçant au sein ou au nom du groupement d'exercice sous le titre d'avocat ou l'un des titres qui ouvre droit à l'exercice à titre permanent de la profession d'avocat sous son titre d'origine ;

-  le complément du capital et des droits de vote est détenu par des personnes exerçant l'une des autres professions libérales juridiques ou judiciaires soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé ;

-  les titulaires des pouvoirs de direction, d'administration et de contrôle exercent leur profession au sein ou au nom du groupement ;

- l'usage de la dénomination du groupement est réservé aux seuls membres de la profession d'avocat.

Utilisant la latitude laissée sur ce point par la directive, le projet de loi reprend les exigences qui sont posées par la loi du 31 décembre 1990 relative à l'exercice sous forme de sociétés des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé. Garantissant une représentation majoritaire des professionnels titulaires de l'un des titres d'avocat ouvrant droit à l'exercice de la profession en France, ces conditions - qu'il reviendra aux conseils de l'ordre de vérifier - sont, pour reprendre les termes de l'exposé des motifs, « le gage de l'indépendance économique et professionnelle de la structure d'exercice ».

Le Sénat a adopté ces dispositions sous réserve de la rectification d'une erreur matérielle et d'une harmonisation terminologique consistant à reprendre dans l'ensemble de cet article l'expression d'exercice « au sein ou au nom » d'un groupement d'exercice.

À défaut de respecter ces conditions cumulatives, l'avocat migrant ne peut exercer que selon les modalités offertes par les articles 7 et 8 de la loi du 31 décembre 1971. Conformément à la lettre de l'article 12 de la directive, il conserve toutefois la possibilité de faire mention de la dénomination du groupement au sein ou au nom duquel il exerce dans l'État d'origine.

Enfin, le dernier alinéa de l'article 87 nouveau de la loi du 31 décembre 1971 précise que l'avocat inscrit sous son titre professionnel d'origine peut, dans des conditions précisées par décret en Conseil d'État, exercer en France au sein ou au nom d'une société régie par le droit de l'État membre où le titre a été acquis et ayant pour objet l'exercice en commun de plusieurs professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé. Conformément à la directive qui suppose d'offrir aux avocats migrants les mêmes conditions d'exercice en groupe que celles prévues pour ses avocats, cette disposition reprend les dispositions de la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 relative à l'exercice sous forme de sociétés des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé. En effet, l'avant-dernier alinéa de son article 1er pour les sociétés d'exercice libéral - comme le deuxième alinéa de son article 22 pour les sociétés en participation - prévoit que ces sociétés « peuvent également, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État, avoir pour objet l'exercice en commun de plusieurs des professions libérales ». Ces dispositions, dont la mise en œuvre est subordonnée à la publication de décrets qui n'ont jamais été pris, restent à ce jour lettre morte en raison de l'importante controverse sur l'inter-professionalité qui existe aujourd'hui (31).

La Commission a adopté deux amendements rédactionnels du rapporteur (amendement nos 4 et 5), puis l'article 5 ainsi modifié.

Article 6

(art. 88 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Information de l'État d'origine en cas d'engagement
de poursuites disciplinaires en France

Comme le précise le premier paragraphe de l'article 7 de la directive du 16 février 1998 (32) et comme le prévoit le présent projet de loi, qui soumet l'avocat migrant aux dispositions de la loi du 31 décembre 1971 (cf. art. 1er), le ressortissant communautaire exerçant à titre permanent la profession d'avocat en France sous son titre professionnel d'origine est soumis au régime disciplinaire des avocats français. Toutefois, un aménagement de la procédure est nécessaire afin de tenir compte du fait que l'avocat migrant reste inscrit auprès de l'autorité compétente dans son pays d'origine.

Transposant le paragraphe 2 de l'article 7 de la directive du 13 février 1998, cet article, modifié par le Sénat pour insérer ses dispositions dans la loi du 31 décembre 1971 sous un nouvel article 88, aménage le régime disciplinaire des avocats communautaires exerçant en France sous leur titre professionnel d'origine. Il met à la charge du bâtonnier - qui est compétent pour saisir l'organe de discipline (cf. art. 30) - l'obligation d'informer l'autorité compétente de l'État membre où l'intéressé est inscrit avant d'engager des poursuites disciplinaires à son encontre. Il confie, en outre, à un décret en Conseil d'État le soin de définir les conditions dans lesquelles cette autorité devra être mise en mesure de formuler ses observations écrites avant l'engagement des poursuites et lors du déroulement de la procédure disciplinaire. Cette disposition doit s'entendre comme incluant l'appel, le paragraphe 3 de l'article 7 de la directive prévoyant que l'autorité compétente de l'État membre d'origine pourra faire ses observations devant les instances de recours.

Afin de garantir l'effectivité de l'intervention de l'autorité compétente de l'État d'origine et de tenir compte de son éloignement géographique, le présent article précise que, lorsque l'avocat est poursuivi pour un manquement à l'audience, prévu à l'article 25 de la loi du 31 décembre 1971, le délai de quinze jours (33) laissé à l'instance disciplinaire pour statuer du cas dont l'a saisi le procureur général est augmenté d'un mois. Ce n'est donc qu'à l'issue d'un délai d'un mois et demi que, en l'absence de décision de l'instance disciplinaire, le procureur général pourra interjeter appel devant la cour d'appel, l'instance disciplinaire étant alors réputée avoir rejeté la demande.

La Commission a adopté l'article 6 sans modification.

Article 7

Rattachement des avocats exerçant sous le titre d'origine
à la Caisse nationale des barreaux français
pour les risques vieillesse, invalidité, décès

Cet article a pour objet de prévoir l'affiliation des avocats exerçant sous leur titre professionnel d'origine à la Caisse nationale des barreaux français qui gère les risques vieillesse, invalidité et décès des avocats. Il mentionne à cette fin que cette affiliation se fait en application du règlement n° 1408/71 du 14 juin 1971 relatif à l'application des régimes obligatoires de sécurité sociale aux travailleurs salariés et non salariés ainsi qu'aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté.

Ce règlement qui consacre le principe selon lequel la législation de l'État d'accueil s'applique au professionnel migrant, étant directement applicable, le Sénat, sur proposition de son rapporteur et avec l'avis favorable du Gouvernement, a supprimé cet article du projet de loi.

La Commission a maintenu la suppression de l'article 7.

Chapitre II

L'accès à la profession d'avocat

Ce chapitre rassemble les dispositions relatives à l'accès des ressortissants communautaires à la profession d'avocat après trois années d'exercice en France sous leur titre d'origine. Cette faculté d'accès constitue le deuxième apport de la directive du 16 février 1998 dont le quatorzième considérant indique que, si elle a pour objet de permettre aux avocats « d'exercer dans un autre État membre sous leur titre professionnel d'origine, c'est aussi dans le but de faciliter l'obtention du titre professionnel de cet État membre d'accueil ».

Article 8 A (nouveau)

(chapitre II du titre IV de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Création d'un chapitre dans la loi du 31 décembre 1971
regroupant les dispositions relatives à l'accès
des ressortissants communautaires à la profession d'avocat

Par coordination avec ses précédentes décisions, le Sénat, sur proposition de son rapporteur, a adopté cet article qui tend à créer un chapitre II dans le nouveau titre IV de la loi du 31 décembre 1971, afin d'y rassembler les dispositions relatives à l'accès des ressortissants communautaires à la profession d'avocat après trois années d'exercice en France sous leur titre d'origine.

La Commission a adopté l'article 8 A sans modification.

Article 8

(art. 89 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Conditions d'intégration à la profession d'avocat en France
de l'avocat ayant exercé sous le titre d'origine durant trois ans

Ouvrant une nouvelle voie d'accès à la profession d'avocat, cet article, dont les dispositions ont été insérées dans la loi du 31 décembre 1971 par le Sénat dans un nouvel article 89, précise les conditions dans lesquelles l'avocat ayant exercé en France sous son titre professionnel d'origine, peut accéder à la profession d'avocat française. Ce faisant, le projet de loi transpose l'article 10 de la directive du 16 février 1998 portant sur « l'assimilation à l'avocat de l'État membre d'accueil ».

Cet article dispensera donc les avocats ayant exercé sous leur titre professionnel d'origine de se soumettre au test d'aptitude aujourd'hui prévu par l'article 99 du décret du 27 novembre 1991, en application de la directive 89/48 du 21 décembre 1988 instituant un système général de reconnaissance des diplômes.

Pour accéder à la profession d'avocat, l'avocat migrant doit remplir deux conditions cumulatives :

-  il doit tout d'abord justifier d'une « activité effective et régulière sur le territoire national d'une durée au moins égale à trois ans ». Cette disposition reprend la lettre même du premier paragraphe de l'article 10 de la directive du 16 février 1998 qui définit une « activité effective et régulière » comme « l'exercice réel de l'activité sans interruption autre que celles résultant des événements de la vie courante ». L'article 8 du projet de loi précise qu'il revient à l'avocat intéressé de justifier auprès du conseil de l'ordre du barreau au sein duquel il entend exercer sous le titre d'avocat la réalité de cette activité ; il reprend en cela la lettre de la directive qui indique qu'à cet effet, l'avocat fournit toute information et tout document utiles, « notamment sur le nombre et la nature des dossiers traités par lui » et que le conseil de l'ordre peut inviter l'avocat à « fournir oralement ou par écrit des clarifications ou des précisions additionnelles » sur ces informations et documents ;

-  il doit en outre justifier du fait que son activité a porté sur du « droit français » : le projet de loi initial précisait qu'il s'agissait d'une activité « en droit français et en droit communautaire », se rapprochant en cela de la directive qui précise que l'avocat doit justifier d'une activité « dans le droit de l'État membre d'accueil, y compris en droit communautaire ». Sur proposition de son rapporteur et avec l'avis favorable du Gouvernement, le Sénat a supprimé la mention du droit communautaire ; son rapporteur a en effet fait valoir que le droit communautaire « constitue une déclinaison particulière du droit national, qui ne doit pas faire l'objet d'un traitement différencié de celui-ci » (34) et que la mention pouvait être une source de difficultés, en conduisant, par exemple, à exclure du bénéfice de l'intégration à la profession d'avocat un avocat communautaire qui, durant les trois années d'activité en France, n'aurait exercé que dans le seul droit de l'État d'accueil.

Si la première condition, liée à la durée et à la réalité de l'activité dans l'État membre d'accueil ne souffre pas de tempérament, tel n'est pas le cas de la condition liée à la nature du droit pratiqué. Là encore fidèle à la directive, le projet de loi précise que l'intégration à la profession d'avocat est possible même si l'avocat justifie d'une activité de moins de trois ans en droit français. Dans cette hypothèse, il revient au conseil de l'ordre - qui retrouve ici une marge d'appréciation - d'apprécier le caractère effectif et régulier de l'activité exercée ainsi que la capacité de l'intéressé à poursuivre celle-ci. S'agissant de la nature du contrôle effectué par le conseil de l'ordre dans cette hypothèse, le paragraphe 3 de la directive du 16 février 1998 précise que doivent être prises en considération l'activité effective et régulière durant les trois ans, mais également « toute expérience professionnelle en droit de l'État membre d'accueil et toute participation à des cours ou des séminaires portant sur ce droit, y compris le droit professionnel et la déontologie ». Afin d'éviter que ces avocats ne soient soumis à une nouveau test d'aptitude, ce même paragraphe précise que « l'appréciation de l'activité effective et régulière de l'avocat développée dans l'État membre d'accueil, comme l'appréciation de sa capacité à poursuivre l'activité qu'il a exercée, est faite dans le cadre d'un entretien avec l'autorité compétente de l'État membre d'accueil qui a pour objet de vérifier le caractère régulier et effectif de l'activité exercée ».

La Commission a adopté l'article 8 sans modification.

Article 9

(art. 90 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Modalités d'inscription sous le titre français d'avocat
des avocats communautaires ayant exercé trois ans sous leur titre d'origine

Cet article précise les modalités d'inscription sous le titre français d'avocat des ressortissants communautaires justifiant de trois ans d'exercice en France sous leur titre d'origine. Sur proposition de son rapporteur, le Sénat a inséré les dispositions de cet article dans la loi du 31 décembre 1971, sous un article 90 nouveau, et y a modifié certaines références pour tenir compte de l'insertion dans ce texte des dispositions transposant la directive.

Transposant le paragraphe 5 de l'article 10 de la directive, le premier alinéa du nouvel article 90 de la loi du 31 décembre 1971 précise que le conseil de l'ordre assure le secret des informations concernant l'avocat qui demande son inscription, lors de l'examen de sa demande.

Le deuxième alinéa énumère les cas dans lesquels le conseil de l'ordre peut refuser l'inscription au tableau d'un ressortissant communautaire qui remplirait pourtant les conditions prévues dans l'article 89 de la loi du 31 décembre 1971 (cf. art. 8). Il peut ainsi refuser d'y procéder :

-  si l'intéressé a fait l'objet de condamnations mettant en jeu sa moralité : soit qu'il ait été l'auteur de faits ayant donné lieu à une condamnation pénale pour agissements contraires à l'honneur, à la probité ou aux bonnes mœurs ; soit qu'il ait été l'auteur de faits de même nature ayant donné lieu à une sanction disciplinaire ou administrative de destitution, radiation, révocation, de retrait d'agrément ou d'autorisation, soit qu'il ait été frappé de nullité personnelle ou d'autre sanction en application du titre VI de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la liquidation des entreprises ou, dans le régime antérieur à cette loi, en application du titre II de la loi n° 67-563 du 13 juillet 1967. Ces motifs de refus d'inscription reprennent des règles applicables à l'ensemble des personnes qui veulent accéder à la profession d'avocat ;

-  en cas d'incompatibilités : prévues aux articles 111 et suivants du décret du 27 novembre 1991, elles concernent notamment toute activité commerciale, les fonctions d'associé, de gérant, de président de conseil d'administration dans certaines sociétés ;

-  pour un autre motif tiré d'une atteinte à l'ordre public.

S'inspirant des dispositions du paragraphe 4 de l'article 10 de la directive du 16 février 1998, cette énumération présente un caractère limitatif ; en dehors de ces hypothèses, le conseil de l'ordre sera donc tenu d'inscrire l'avocat qui remplira les conditions prévues à l'article 89 de la loi du 31 décembre 1971.

Les décisions prises à l'égard des avocats ayant exercé à titre permanent sous leur titre d'origine et demandant leur intégration à la profession française pourront être déférées à la cour d'appel par le procureur général ou par l'intéressé, conformément à l'article 20 de la loi du 31 décembre 1971 qui précise les voies de recours ouvertes à l'encontre des décisions du conseil de l'ordre relatives à l'inscription au tableau. La Chancellerie a indiqué que l'obligation de motivation, exigée par la directive communautaire lorsqu'il s'agit d'une décision de refus et non prévue par le projet de loi, relève du domaine réglementaire.

Le troisième alinéa précise que, comme ses confrères ayant suivi le cursus de droit commun (35), l'avocat est inscrit au tableau après avoir prêté le serment de la profession, prévu à l'article 3 de la loi du 31 décembre 1971.

Enfin, transposant le paragraphe 6 de la directive du 16 février 1998, le dernier alinéa de l'article 90 ouvre la possibilité à l'avocat inscrit au tableau de l'ordre en application des dispositions relatives à l'accès à la profession des ressortissants communautaires ayant exercé sous leur titre d'origine durant trois ans, de faire suivre son titre d'avocat de sont titre professionnel d'origine dans la ou l'une des langues officielles de l'État membre où il a été acquis. Sur proposition de son rapporteur et avec l'avis favorable du Gouvernement, le Sénat a supprimé la disposition prévoyant que l'avocat inscrit en application de ces dispositions exerce dans les conditions prévues par la loi du 31 décembre 1971, cette solution s'imposant dès lors qu'ils sont intégrés à la profession.

La Commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 6), puis l'article 9 ainsi modifié.

Chapitre III

Dispositions diverses

Article 10 A (nouveau)

(chapitre III du titre IV de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Création d'un chapitre dans la loi du 31 décembre 1971
regroupant les dispositions diverses relatives à la transposition
de la directive 98/5/CE du 16 février 1998

Par coordination avec les amendements adoptés avant les articles 1er et 8, le Sénat, sur proposition de son rapporteur, a inséré cet article qui tend à créer un chapitre III dans le nouveau titre IV de la loi du 31 décembre 1971, afin d'y rassembler les dispositions diverses nécessaires à la transposition de la directive du 16 février 1998.

La Commission a adopté l'article 10 A sans modification.

Article 10

(art. 91 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Interdiction de participer à une activité juridictionnelle

Dérogeant au principe d'assimilation avec la profession dont doivent bénéficier les avocats exerçant sous leur titre d'origine ou intégrés définitivement à la profession, cet article - dont les dispositions ont été insérées par le Sénat dans la loi du 31 décembre 1971 dans un nouvel article 91 - interdit à l'avocat ressortissant d'un État membre de la Communauté autre que la France toute participation, même à titre occasionnel, à l'activité juridictionnelle. Cette disposition est conforme à l'article 45 du Traité CE, qui exclut du champ d'application des dispositions relatives au droit d'établissement les activités « participant [...] même à titre occasionnel, à l'exercice de l'autorité publique ».

Ainsi, ces avocats, qu'ils exercent sous leur titre d'origine ou qu'ils soient totalement intégrés à la profession, ne pourront pas être appelés à suppléer les juges pour compléter un tribunal de grande instance, comme le prévoit l'article L. 311-9 du code de l'organisation judiciaire, ni un tribunal administratif, comme l'article L. 221-2 du code de justice administrative en laisse la possibilité. De même, ne pourront-ils exercer les fonctions de juge de proximité, l'article 41-17 imposant que les candidats à l'exercice de ces fonctions soient de nationalité française.

La Commission a adopté l'article 10 sans modification.

Article 11

(art. 92 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Collaboration entre les États membres de l'Union européenne
et les barreaux français

Cet article - dont les dispositions ont été insérées par le Sénat dans la loi du 31 décembre 1971 dans un nouvel article 92 - tend à transposer l'article 13 de la directive du 16 février 1998. Il impose aux barreaux de collaborer avec les autorités compétentes des États membres de la Communauté européenne et de leur apporter l'assistance nécessaire pour faciliter l'exercice permanent de la profession d'avocat dans un État membre autre que celui où la qualification a été acquise. L'autonomie des barreaux en la matière est garantie puisque ces obligations sont faites à chaque barreau « pour ce qui le concerne ».

Dans ses considérants, la directive du 16 février 1998 justifie notamment cette collaboration et cette assistance mutuelle entre les autorités compétentes des États membres d'accueil et d'origine par le fait que « l'avocat inscrit sous son titre professionnel d'origine dans l'État membre d'accueil doit rester inscrit auprès de l'autorité compétente de l'État membre d'origine pour pouvoir conserver sa qualité d'avocat et bénéficier de la présente directive » et que, dans ces conditions, une collaboration étroite entre les autorités compétentes de chaque État est indispensable, notamment dans l'hypothèse d'éventuelles procédures disciplinaires. En outre, cette collaboration facilitera un rapprochement des pratiques qui rendra plus aisée la mise en œuvre de la directive.

La Commission a adopté l'article 11 sans modification.

TITRE II

DISPOSITIONS RELATIVES À LA FORMATION PROFESSIONNELLE
DES AVOCATS ET AUX ATTRIBUTIONS DES CONSEILS DE L'ORDRE
ET DU CONSEIL NATIONAL DES BARREAUX

La formation professionnelle des avocats se déroule aujourd'hui en trois étapes principales, prévues dans l'article 12 de la loi du 31 décembre 1971.

-  Outre des conditions de nationalité et de moralité, la personne qui se destine à la profession d'avocat doit justifier d'une maîtrise en droit ou d'un diplôme équivalent figurant sur une liste fixée par arrêté du 25 novembre 1998 (2° de l'art. 11 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971) ; une exception est toutefois faite pour les ressortissants communautaires dont le diplôme peut être reconnu par équivalence, conformément à la directive du 21 décembre 1988, ainsi qu'aux personnes ayant exercé certaines fonctions ou activités en France.

-  Elle doit passer l'examen d'entrée au centre régional de formation professionnelle (crfp), institué auprès de chaque cour d'appel ; les articles 51 à 54 du décret du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat précisent les modalités d'organisation de cet examen que les candidats ne peuvent passer plus de trois fois et qui, en pratique, constitue le véritable moment de sélection des candidats à l'exercice de la profession d'avocat.

-  Une formation d'un an, présentant un caractère théorique et pratique est ensuite dispensée dans les crfp : l'article 57 du décret du 27 novembre 1991 précise qu'« une formation commune de base porte notamment sur le statut et la déontologie professionnels, la rédaction des actes juridiques, la plaidoirie, les procédures, la gestion des cabinets d'avocats ainsi que sur un enseignement de langue vivante étrangère ». S'agissant de la formation pratique, l'article 58 de ce même décret impose aux élèves d'effectuer des stages qui habituellement se font auprès d'un avocat - fréquemment désigné comme le « pré-stage » - mais qui peuvent également se dérouler chez « un autre professionnel du droit, auprès d'un expert-comptable, dans le service juridique ou fiscal d'une entreprise ou d'une organisation syndicale comportant au moins trois juristes, ou auprès d'une juridiction ou d'un organisme public, en France ou à l'étranger ». Cette formation est sanctionnée par la délivrance du certificat d'aptitude à la profession d'avocat  (capa), dont les modalités d'obtention sont détaillées dans les articles 68 à 71 du décret du 27 novembre 1991.

- Enfin, après obtention du capa, un stage de deux ans, sanctionné par un certificat de fin de stage, est obligatoire : si l'avocat peut, durant ce stage, exercer toutes les prérogatives de sa profession, il n'est toutefois pas inscrit au tableau du barreau qu'il a choisi mais sur la liste du stage de celui-ci ; il est, en outre, astreint à plusieurs obligations destinées à compléter sa formation et notamment à suivre l'enseignement des règles, usages et pratiques de la profession. Le stage est effectué sous le contrôle du crfp (art. 77 à 84 du décret du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat).

Mis en place par la loi du 31 décembre 1990 afin de tenir compte de la fusion des professions d'avocat et de conseil juridique, ce cursus fait aujourd'hui l'objet de nombreuses critiques, au premier rang desquelles son coût et son inadaptation à l'augmentation des effectifs.

Dès 1997, le Conseil national des barreaux, dans son rapport sur la formation initiale des avocats(36), en a fait apparaître les principaux défauts :

-  le trop grand saupoudrage de la formation, les écoles ayant souvent renoncé à mettre en place la formation professionnelle approfondie optionnelle pour ne s'en tenir qu'à la formation commune de base ;

-  le trop grand nombre d'écoles, ce qui ne permet pas nécessairement de garantir un enseignement suffisamment professionnel ;

-  l'insuffisance des pouvoirs du cnb en matière de formation ;

-  les défauts propres au stage qui suit la délivrance du capa : la formation théorique que sont tenus de suivre les stagiaires est vue « comme une obligation de formation théorique sans intérêt, et en tout cas inadaptée » (37). Et « bien peu, qu'il s'agisse des avocats stagiaires ou des avocats employant des collaborateurs stagiaires, considèrent que les deux années de stage constituent une période de formation », les premiers semblant avant tout soucieux de rentrer dans la vie active. Au demeurant, il semblerait que l'organisation du stage se heurte à la difficulté de trouver des maîtres des stage, compte tenu des contraintes qu'implique cette mission (38).

Prenant acte de ces défauts, le Conseil national des barreaux a proposé une réforme de la formation initiale, reposant sur la suppression du stage et l'allongement corrélatif de la période précédant la prestation de serment. Reprenant cette proposition, le titre II du présent projet de loi comporte une réforme de la formation professionnelle et du rôle qu'y jouent les conseils de l'ordre et le Conseil national des barreaux.

Article 12

(art. 7 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Tutorat des jeunes avocats en exercice

Dans le schéma de formation envisagé, le stage de deux ans étant supprimé, l'avocat titulaire du capa accédera directement au tableau d'un ordre, en qualité d'avocat de plein exercice. « Il n'aura [ainsi] pas à trouver un maître de stage dont la férule se traduit le plus souvent par un contrat de collaboration. Il pourra poser sa plaque, attendre les clients » (39). Toutefois, afin d'éviter que les jeunes avocats ne soient soumis à aucun « autre contrôle que le contrôle ordinal du respect des obligations déontologiques » (40), le projet de loi prévoit de soumettre la « pratique professionnelle » du jeune avocat à l'appréciation d'un confrère plus chevronné durant les dix-huit mois suivant la prestation de serment.

À cette fin, le présent article, auquel le Sénat a apporté des modifications rédactionnelles, insère dans l'article 7 de la loi du 31 décembre 1971, relatif aux modalités d'exercice de la profession d'avocat, un nouvel alinéa prévoyant ce « tutorat ».

Parmi les avocats venant de prêter serment, cette disposition ne concerne que ceux d'entre eux qui exercent à titre individuel ou en qualité de collaborateur ou de salarié d'un ou plusieurs avocats exerçant chacun la profession depuis moins de dix-huit mois. En effet, pour la majorité d'entre eux qui exerceront en qualité de collaborateur dans des cabinets, ce tutorat ne se justifie pas, la pratique professionnelle de ces jeunes avocats étant naturellement portées à la connaissance des associés.

Le « tuteur » sera un avocat inscrit au tableau du même barreau ou un avocat honoraire et sera désigné par le conseil de l'ordre. Dans son rapport sur la formation initiale des avocats adopté en 1997, le Conseil national des barreaux indique qu'il aura « pour mission, non seulement, de contrôler à intervalles réguliers les conditions dans lesquelles le jeune avocat exerce son activité, mais également de lui apporter conseils, aide et soutien ».

Le tutorat porte sur la « pratique professionnelle » du jeune avocat, et particulièrement le respect des règles déontologiques.

Satisfaisante dans son principe, cette innovation soulève à ce jour de nombreuses interrogations sur l'effectivité de ce tutorat ou, à l'inverse, sur la difficulté de concilier la liberté d'exercice d'un jeune avocat et le contrôle de sa pratique, ainsi que sur le risque de voir engagée la responsabilité du tuteur au titre des actes du jeune avocat.

La Commission a adopté un amendement de suppression de l'article 12, présenté par le rapporteur (amendement n° 7), qui a fait valoir les difficultés pratiques de mise en œuvre de cette disposition.

Article 13

(art. 12 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Refonte de la formation initiale

_  L'article 12 de la loi du 31 décembre 1971 précise les modalités de la formation initiale des avocats. Il prévoit un cursus normal, constitué de trois étapes :

-  un examen d'accès à un centre régional de formation professionnelle (crfp) ;

-  une formation théorique et pratique d'une année dans un centre, sanctionnée par le certificat d'aptitude à la profession d'avocat (capa) ;

-  un stage de deux ans, sanctionné par un certificat de stage.

Différentes dérogations sont toutefois prévues pour trois catégories de personnes :

-  les ressortissants communautaires qui bénéficient des dispositions de la directive n° 89-48 du 21 décembre 1988 relative à l'équivalence des diplômes (cf. titre I du projet de loi)  ;

-  les avocats ressortissants d'un État n'appartenant pas à la Communauté européenne ou à l'Espace économique européen, non titulaires du capa, ainsi que les ressortissants communautaires ou de l'EEE qui auraient acquis leur qualité d'avocat dans un État tiers : ils doivent subir un examen de contrôle des connaissances en droit français devant le jury du capa, qui peut dispenser le candidat de certaines épreuves, compte tenu de ses travaux universitaires ou scientifiques (art. 100 du décret du 27 novembre 1991) ;

-  les personnes « justifiant de certains titres ou ayant exercé certaines activités » qui sont de tout (41) ou partie (42) du cursus.

Enfin, les trois derniers alinéas de l'article 12 de la loi du 31 décembre 1971 précisent les droits et devoirs de l'élève avocat au cours de sa formation : assistance aux délibérés des juridictions où il fait un stage ; respect du secret professionnel pour tous les faits et actes dont il aurait à connaître au cours des stages qu'il effectue ; prestation de serment dès son admission au centre régional de formation professionnelle.

_  L'article 13 du présent projet de loi donne une nouvelle rédaction à ces dispositions de la loi du 31 décembre 1971.

Le cursus est réorganisé  et s'articule désormais autour d'un examen d'accès au centre régional de formation professionnelle, d'une formation théorique et pratique et de la délivrance du certificat d'aptitude à la profession d'avocat. La principale innovation réside donc dans la suppression du stage de deux ans qui suit aujourd'hui la délivrance du capa et dont les défauts ont déjà été soulignés.

La durée de la formation au sein des centres régionaux de formation professionnelle est portée d'un an à dix-huit mois : cette durée a été proposée par le Conseil national des barreaux dans son rapport sur la formation initiale en 1997, deux ans paraissant trop longs pour des jeunes qui ont déjà fait des études supérieures, un an semblant trop bref dès lors que le stage de deux ans est supprimé.

Comme c'est le cas aujourd'hui, la formation conservera son caractère mixte, théorique et pratique dont il est fait explicitement mention dans la loi. Dans son rapport adopté le 10 avril 1999 sur la réforme du processus de formation initiale des avocats, le cnb envisageait une formation en deux temps : une première période de six mois « de découverte et de compréhension de la profession, au sein des crfp », avec quatre cents heures minimum « consacrées à l'acquisition de savoirs fondamentaux » et à la connaissance des différents partenaires juridiques, judiciaires et sociaux ; une seconde période, d'un an, constituant une « phase d'intégration professionnelle ».

La formation demeure sanctionnée par la délivrance du capa, que le cnb proposait également de modifier afin d'adjoindre à un examen « classique sanctionnant la formation commune de base, [...] un contrôle continu de validation des stages, la soutenance d'un rapport de stage et la discussion avec le jury constituant le noyau central de l'examen terminal » (43).

Parallèlement à ce cursus, le projet de loi maintient les dérogations qui existent actuellement au profit des ressortissants d'un État membre de la Communauté européenne ou d'un État tiers, et des personnes justifiant de certains titres ou ayant exercé certaines activités.

En outre, aux termes de la nouvelle rédaction que lui donne le projet de loi, le dernier alinéa de l'article 12 de la loi du 31 décembre 1971 ouvre la possibilité de suivre cette formation initiale dans le cadre d'un contrat d'apprentissage. Le Sénat a modifié les références au code du travail, afin de ne pas viser seulement ses articles L. 115-1 et L. 115-2 qui rassemblent des dispositions générales sur l'apprentissage mais l'ensemble du titre Ier du livre Ier du code du travail, entièrement consacré au contrat d'apprentissage.

Celui-ci est « un contrat de travail de type particulier par lequel un employeur s'engage, outre le versement d'un salaire [...], à assurer à un jeune travailleur (44) une formation professionnelle méthodique et complète, dispensée pour partie en entreprise et pour partie au centre de formation d'apprenti. L'apprenti s'oblige, en retour, en vue de sa formation, à travailler pour cet employeur, pendant la durée du contrat, et à suivre la formation dispensée en centre de formation d'apprentis et en entreprise » (art. L. 117-1 du code du travail). La durée de ce contrat est au moins égale à celle du cycle de formation qui fait l'objet du contrat, en l'occurrence dix-huit mois.

Progressivement étendu à tous les niveaux de formation, notamment pratiqué dans les écoles de commerce (45), l'apprentissage présente plusieurs avantages : outre le fait qu'il permet aux élèves de percevoir une rémunération(46), il offre des avantages financiers à l'employeur qui peut notamment bénéficier d'une aide à la formation et d'exonérations de cotisations sociales. Ce dispositif permet en outre aux centres dispensant les enseignements de bénéficier de la taxe d'apprentissage.

Comme il est rappelé dans l'exposé des motifs, le recours à l'apprentissage pour la formation initiale des avocats suppose toutefois que :

-  le CAPA soit enregistré au répertoire national des certifications professionnelles, ainsi que le prévoit l'article L. 115-1 du code du travail  et dans les conditions prévues à l'article L. 335-6 du code de l'éducation ;

-  les CFRP soient reconnus comme des centres de formation des apprentis ou comme établissements sous contrats. On rappellera en effet que les enseignements dispensés pendant le temps de travail doivent l'être par un centre de formation d'apprentis (CFA) ou par un établissement d'enseignement public ou privé et que les CFA sont créés par convention avec les régions dès lors qu'il ne s'agit pas de centres à recrutement national. Comme l'indique l'exposé des motifs, « le présent projet de loi se borne à poser le principe de l'accès au diplôme professionnel par la voie de l'apprentissage », étant entendu qu'il incombera « aux barreaux et aux crfp de mettre en œuvre les procédures qui permettront à la profession de bénéficier de ces dispositifs de formation et des financements y afférents ».

Enfin, les dispositions relatives aux droits et devoirs des élèves avocats sont supprimées ; elles feront l'objet d'un article distinct, l'article 12-2 (cf. art. 15 du projet de loi).

La Commission a adopté l'article 13 sans modification.

Article 14

(art. 12-1 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Soumission des docteurs en droit à l'obligation
de formation au crfp

Adopté sans modification par le Sénat, cet article aménage le dispositif dérogatoire dont bénéficient les docteurs en droit pour accéder à la profession d'avocat.

Aux termes du dernier alinéa de l'article 12-1 de la loi du 31 décembre 1971, les docteurs en droit, c'est-à-dire les titulaires d'un troisième cycle ayant soutenu une thèse, qui souhaitent accéder à la profession d'avocat sont dispensés de l'examen d'accès au crfp et de la formation théorique et pratique qui y est donnée et peuvent accéder directement aux épreuves du certificat d'aptitude à la profession d'avocat. L'article 55 du décret du 27 novembre 1991 leur réserve toutefois la faculté d'être admis, en qualité d'auditeur libre, dans le centre régional de leur domicile. D'après les informations fournies par la Chancellerie, la grande majorité des barreaux connaissent moins de 10 % de docteurs en droit parmi les élèves avocats.

S'il maintient la dispense d'examen d'entrée au crfp pour les docteurs en droit, l'article 14 du projet de loi les astreint désormais à suivre la formation de dix-huit mois qui précède le passage du capa. Tenant compte du fait que la soutenance d'une thèse sur un sujet spécialisé n'est pas nécessairement adaptée à l'exercice de la profession d'avocat, cette modification se justifie d'autant plus que le stage de deux ans qui suit la délivrance du certificat est supprimé et que toute la formation sera faite avant la prestation de serment.

La Commission a adopté l'article 14 sans modification.

Article 15

(art. 12-2 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Droits et devoirs des élèves avocats au cours de la formation

Adopté sans modification par le Sénat, cet article rassemble, dans un article distinct de la loi du 31 décembre 1971, les dispositions relatives aux droits et devoirs des élèves avocats.

Sous réserve de certaines précisions, ce nouvel article 12-2 reprend les trois derniers alinéas de l'actuel article 12 relatif à la formation professionnelle des avocats : respect du secret professionnel pour tous les faits et actes que la personne admise à la formation connaît au cours de sa formation et de ses stages, prestation de serment à cette fin et possibilité d'assister aux délibérés des juridictions où elle pourrait être amenée à faire un stage.

La rédaction de ces dispositions est toutefois précisée sur deux points :

-  d'une part, il est précisé que la prestation de serment se fait devant la cour d'appel « dans le ressort de laquelle le centre a son siège » et « sur présentation du président du conseil d'administration du centre régional de formation professionnelle » ;

-  d'autre part, le secret professionnel auquel les élèves avocats sont tenus est étendu aux faits et actes qu'ils auraient à connaître au cours de leur formation et au cours des stages effectués non seulement auprès des professionnels ou dans des juridictions, mais également dans des organismes divers.

La Commission a adopté l'article 15 sans modification.

Article 16

(art. 13 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Statut, fonctionnement et missions
des centres régionaux de formation professionnelle

Cet article, ainsi que le suivant, aménagent l'organisation des centres régionaux de formation professionnelle, qui fait aujourd'hui l'objet de trois articles de la loi du 31 décembre 1971 :

-  l'article 13 confère à ces centres le soin de dispenser l'enseignement professionnel des avocats et prévoit que leur fonctionnement est assuré par la collaboration de la profession, des magistrats et de l'université ;

-  l'article 14 précise l'implantation géographique de ces centres, leur statut, leurs compétences, les compétences de leurs conseils d'administration, ainsi que la juridiction compétente pour connaître des recours formés contre les décisions prises en matière de formation professionnelle ;

-  l'article 14-1, non modifié par le présent projet de loi, précise les conditions de financement des centres régionaux de formation professionnelle.

Le présent article donne une nouvelle rédaction à l'article 13 de la loi du 31 décembre 1971 : les dispositions des actuels articles 13 et 14 y sont reprises, sous réserve de certaines modifications, les dispositions relatives à l'implantation géographique des centres de formation figurant désormais dans un nouvel article 13-1 (cf. art. 17 du projet de loi).

S'agissant tout d'abord de la compétence des centres régionaux de formation professionnelle, le premier alinéa du nouvel article 13 leur confie le soin d'assurer la formation des avocats, confortant ainsi l'organisation régionalisée qui prévaut aujourd'hui. Toutefois, le rôle du Conseil national des barreaux est renforcé puisqu'il sera dorénavant précisé que les crfp exercent leurs missions « dans le respect des missions et prérogatives » de cette instance nationale. Les missions imparties aux centres régionaux de formation reprennent largement celles qui leur sont confiées aujourd'hui :

1° organiser la préparation au capa, qui marque la fin de la formation des avocats ; par comparaison, on rappellera que l'examen d'accès à ces centres régionaux est organisée par les universités qui sont désignées à cet effet par le recteur de l'académie après avis du garde des sceaux (art. 51 du décret du 27 novembre 1991) ;

2° statuer sur les demandes de dispense d'une partie de la formation professionnelle en fonction des diplômes obtenus, sous réserve des dispositions de la directive du 21 décembre 1988 relative à l'équivalence des diplômes ; actuellement confiée au crfp, cette mission - qui avait été omise dans le projet de loi initial - a été rétablie par le Sénat, sur proposition de son rapporteur ;

3° assurer la formation générale de base des avocats et, le cas échéant, en liaison avec les universités, les organismes d'enseignement ou de formation professionnelle public ou privés ou les juridictions, leur formation complémentaire : la définition de cette mission est modifiée par rapport à la situation actuelle. En effet, d'une part, est fixée dans la loi la division d'une formation en deux parties - formation commune de base et formation complémentaire - ; d'autre part, contrairement à la lettre du texte aujourd'hui en vigueur, la collaboration avec les universités ou des organismes d'enseignement ou de formation professionnelle ne sera plus possible pour la formation de base qui relèvera donc de la compétence exclusive des centres régionaux de formation ; en outre, la collaboration sera élargie aux juridictions ;

4° passer les conventions avec les régions en vue de mettre en place la formation en apprentissage (cf. art. 13 du projet de loi) ; sur proposition de son rapporteur, le Sénat a précisé la référence au code du travail afin de ne plus mentionner l'ensemble du titre Ier du livre Ier du code du travail mais seulement son article L. 116-2 ;

5° contrôler les conditions de déroulement des stages effectuées par les personnes admises en formation : tirant les conséquences de la suppression du stage de deux ans dont les crfp étaient chargés de contrôler le déroulement (4° de l'actuel art. 14 de la loi du 31 décembre 1971), le projet de loi confie à ces centres le soin de contrôler les stages précédant la prestation de serment, aujourd'hui qualifiés de « pré-stages », dont l'hétérogénéité a été stigmatisée par le cnb dans son rapport rendu en 1997 sur la formation initiale des avocats ;

6° assurer la formation continue des avocats : déjà impartie aux crfp, cette mission sera amenée à se développer, le Sénat ayant rendu obligatoire la formation continue des avocats (cf. art. 18 bis du projet de loi) ;

7° organiser - comme c'est le cas aujourd'hui - le contrôle des connaissances nécessaire pour acquérir une spécialisation et délivrer les certificats de spécialisation, dans les conditions prévues à l'article 12-1 de la loi du 31 décembre 1971 (47).

Le statut de ces centres est inchangé : il s'agit d'établissements d'utilité publique dotés de la personnalité morale, c'est-à-dire « une personne morale de droit privé qui, tout en bénéficiant de privilèges attachés à la reconnaissance d'utilité publique, se distingue de l'établissement public, outre ses origines et la nature de ses activités par le fait qu'elle ne peut pas mettre en œuvre des prérogatives de puissance publique » (48). Son fonctionnement est assuré par la profession d'avocat, avec le concours pédagogique de magistrats et des universités, mais également dorénavant avec celui de « toute autre personne ou organismes qualifiés », tels que, par exemple, l'union nationale des caisses d'avocats ou l'association nationale d'aide fiscale aux avocats. En revanche, la disposition du dernier alinéa de l'actuel article 13 prévoyant que le fonctionnement des centres peut faire l'objet de conventions conformément à la loi n° 71-575 du 16 juillet 1971 relative à la formation professionnelle continue est supprimée, ses dispositions étant désormais inscrites dans le code du travail, sous les articles L. 920-1 et suivants.

La gestion et l'administration des centres demeure confié à un conseil d'administration, dont les règles de composition sont aujourd'hui fixées par les articles 42 à 45 du décret du 27 novembre 1991 et qui comptent aujourd'hui des avocats, des magistrats et des membres de l'université. Le projet de loi maintient les compétences actuellement dévolues au conseil d'administration - adoption du budget, du bilan et du compte des résultat des opérations de l'année précédente - mais n'est plus mentionné l'obligation d'adresser ce bilan au CNB avant le 1er février de chaque année, ces dispositions figurant dans le décret n°2002-324 du 6 mars 2002.

La Commission a adopté l'article 16 sans modification.

Article 17

(art. 13-1 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Localisation des centres régionaux de formation professionnelle

_  Aux termes de l'article 14 de la loi du 31 décembre 1971, tel qu'il résulte de la loi du 31 décembre 1991, un centre régional de formation professionnelle est institué auprès de chaque cour d'appel. Contrepoids à cette règle générale, ce même article autorise les regroupements de plusieurs centres par décision de leur conseil d'administration ainsi que la création de sections locales dans les villes pourvues d'unités de formation et de recherches juridiques.

On compte aujourd'hui vingt-deux centres de formation pour 181 barreaux établis auprès des tribunaux de grande instance. Reflétant « un particularisme vivace » (49), peu de regroupements ont été opérés à ce jour. En effet, ces regroupements et le choix du siège des écoles ainsi constituées relèvent de l'autonomie de décision des conseils d'administration des établissements concernés et s'opèrent par voie conventionnelle, sans intervention des pouvoirs publics. Trois écoles sont aujourd'hui issues de ces regroupements conventionnels : l'EIRA à Dijon (Dijon, Reims, Besançon), l'ICFB à Grenoble (Grenoble, Chambéry) et l'ecoa à Poitiers (Angers, Poitiers, Bourges, Orléans) ; en outre, les centres de Rouen et de l'EEA (Douai, Lille) envisageraient de se regrouper en décembre 2003 à Lille.

Dans son rapport élaboré en 1997 sur la formation professionnelle, le cnb souligne ainsi que « le nombre trop important d'écoles limite nécessairement leurs ambitions » et que « le professionnalisme [des formateurs] ne peut être mis en œuvre que dans le cadre de structures de taille suffisante ». Et de considérer que la mise en place d'une formation commune de base et d'une formation approfondie optionnelle aurait été mise en place plus aisément si « la loi du 31 décembre 1990 avait créé un nombre d'écoles limité par grandes régions ».

_  Rassemblant dans un article distinct - l'article 13-1 - les dispositions relatives à la localisation de ces centres régionaux de formation professionnelle, le présent article tend à remédier à ces difficultés. Tout en maintenant un caractère régional à cette formation, il confie le soin au garde des Sceaux, sur proposition du Conseil national des barreaux, d'arrêter le siège et le ressort de chaque centre de formation. Dans un souci de souplesse, le choix a donc été fait de ne plus inscrire dans la loi un critère d'implantation géographique.

Les facultés de regroupements ou, à l'inverse, de créations de sections locales, sont maintenues mais réorganisées, l'objectif étant d'accroître les compétences du Conseil national des barreaux en la matière. Ce choix se justifie notamment par le fait que le capa n'est pas un examen national mais ouvre à son titulaire la possibilité de s'inscrire dans le barreau français de son choix.

Les regroupements seront désormais arrêtés par le garde des Sceaux, sur proposition du cnb ; celui-ci sera toutefois tenu de consulter préalablement les centres concernés mais sans que leur avis le lie. Afin d'éviter que la réalisation de ces regroupements ne se heurte à des obstacles fiscaux, le Sénat, sur proposition de son rapporteur et avec l'avis favorable du Gouvernement, a précisé les conditions fiscales de ces regroupements afin d'assurer leur neutralité. Il a ainsi précisé que les biens mobiliers et immobiliers des centres régionaux de formation appelés à se regrouper sont transférés au centre issu du regroupement et rendu expressément applicable à ces restructurations l'article 1039 du code général des impôts, sous réserve de la publication d'un décret en Conseil d'État autorisant le transfert de ces biens. Dans le silence du texte, les transmissions de patrimoine liées à ces regroupements auraient donné lieu à l'application du droit d'enregistrement et, le cas échéant, à l'imposition des plus-values. Dès lors que les biens transmis sont affectés au même objet et que cette transmission intervient dans un intérêt général ou de bonne administration(50), l'application de l'article 1039 du code général des impôts permet d'assujettir ces opérations au seul droit fixe de 75 euros, prévu à l'article 680 de ce même code.

Parallèlement, la possibilité de créer des sections locales est maintenue ; la condition actuelle d'existence dans les villes de centres de formation et de recherche juridique étant complétée d'une nouvelle condition : l'avis conforme du Conseil national des barreaux.

Soulignant la nécessité du regroupement des écoles, cette instance nationale estimait dans son rapport de 1997 sur la formation initiale précité, que les écoles ne devraient être plus d'une dizaine, « ce qui permettrait un découpage cohérent du territoire en fonction des grandes régions naturelles », tandis que, à l'inverse, « pour l'Île-de-France, certains démembrements pourraient être envisagés afin de parvenir à des unités d'enseignement plus humaines ». En outre, dans son rapport du 7 octobre 2000 sur la réforme de la formation initiale, le cnb soulignait l'intérêt du regroupement des centres compte tenu de l'allongement de la durée de la scolarité qui impliquera que les centres aient « simultanément la charge administrative de plusieurs promotions » et qu'ils aient « pour cela [à] mettre en œuvre des moyens qui risquent de n'être pas à la portée des centres de trop petite dimension ».

La Commission a rejeté un amendement de M. Jérôme Bignon, précisant que la région peut décider de se doter d'un centre régional de formation professionnelle et d'assurer son financement, le rapporteur ayant indiqué que cet amendement était contraire aux dispositions de l'article 40 de la Constitution.

La Commission a adopté l'article 17 sans modification.

Article 18

(art. 14 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Appel des décisions des centres régionaux de formation professionnelle

Cet article, auquel le Sénat a donné une nouvelle rédaction pour des raisons formelles, supprime les treize premiers alinéas de l'article 14 de la loi du 31 décembre 1971. Portant sur les compétences, l'organisation et le statut des centres régionaux de formation professionnelle ainsi que sur les compétences de leur conseil d'administration, ces dispositions figureront désormais dans les articles 13 et 13-1 de la loi du 31 décembre 1971 (cf. art. 16 et 17 du projet de loi).

Aux termes de cet article, l'article 14 de la loi du 31 décembre 1971 ne conserve plus que son dernier alinéa, qui prévoit que les recours à l'encontre des décisions concernant la formation professionnelle sont soumis à la cour d'appel compétente, en l'occurrence celle dans le ressort de laquelle est institué le centre de formation.

La Commission a adopté l'article 18 sans modification.

Article 18 bis (nouveau)

(art. 14-2 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Soumission des avocats à une obligation de formation continue

Adopté par le Sénat sur proposition de son rapporteur, cet article additionnel met à la charge des avocats inscrits au tableau de l'ordre une obligation de formation continue.

Si elle figure aujourd'hui dans les textes relatifs à l'organisation de la profession, la formation permanente ne constitue pas actuellement une obligation. Aux termes de l'article 85 du décret du 27 novembre 1991, des sessions de formation permanente peuvent être organisées par les crfp, à destination des avocats inscrits au tableau des barreaux de leur ressort, ou par le cnb.

Présentant les arguments à l'appui de son amendement (51), M. Jean-René Lecerf a souligné la nécessité de cette formation afin de mettre la profession en mesure de faire face à la concurrence internationale croissante, de s'adapter à des normes par définition évolutives. Faisant observer qu'elle était encore plus nécessaire alors que la mise en cause de leur responsabilité devient de plus en plus fréquente, il a estimé que la formation continue constituait également un « support tout à fait adapté pour la promotion de la formation commune entre les magistrats et les avocats » et qu'elle devenait d'autant plus indispensable avec la suppression du stage de deux ans qui suit aujourd'hui la prestation de serment. Enfin, il a indiqué que certaines professions réglementées, par exemple les experts-comptables depuis 1990, sont soumises à une obligation de formation continue tandis que certains États membres de l'Union européenne ont posé le principe d'une formation continue obligatoire.

Souscrivant à cette proposition, le garde des Sceaux avait indiqué lors de l'examen du projet de loi au Sénat que la navette parlementaire devrait être l'occasion de « définir le contour de cette obligation » et « déterminer les attributions respectives du pouvoir réglementaire, d'une part, et du Conseil national des barreaux, d'autre part ».

La Commission a adopté un amendement du rapporteur précisant l'obligation de formation continue des avocats en renvoyant le contenu de la définition de la formation continue à un décret en Conseil d'État et en confiant la détermination des modalités selon lesquelles cette obligation est accomplie au Conseil national des barreaux (amendement n° 8).

Puis elle a adopté l'article 18 bis ainsi modifié.

Article 19

(art. 15 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Coordination - Suppression des avocats stagiaires de la liste
des électeurs appelés à désigner les membres du conseil de l'ordre

Le deuxième alinéa de l'article 15 de la loi du 31 décembre 1971 précise que le conseil de l'ordre de chaque barreau est élu par les avocats inscrits au barreau de ce tableau, par les avocats stagiaires de ce barreau ayant prêté serment avant le 1er janvier de l'année au cours de laquelle l'élection a lieu et par les avocats honoraires dudit barreau.

Par coordination avec la suppression du stage de deux ans qui suit aujourd'hui la délivrance du capa, cet article, adopté sans modification par le Sénat, supprime la mention des avocats stagiaires dans l'article 15 de la loi du 31 décembre 1971.

La Commission a adopté l'article 19 sans modification.

Article 20

(art. 17 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Coordinations - Attributions du conseil de l'ordre

Cet article apporte plusieurs modifications à l'article 17 de la loi du 31 décembre 1971, qui précise les compétences des conseils de l'ordre chargés d'administrer les barreaux.

Tout d'abord, il modifie son deuxième alinéa, afin de préciser que les missions du conseil de l'ordre s'exercent « sans préjudice des dispositions de l'article 21-1 », c'est-à-dire dans le respect des compétences dévolues au Conseil national des barreaux. Cette disposition, à laquelle le Sénat a apporté une modification rédactionnelle, permettra de lever toute ambiguïté sur les compétences imparties aux conseils de l'ordre en matière de règlement intérieur. Elle permet en outre de souligner le rôle fédérateur joué par cet organe.

Par ailleurs, il modifie la liste des compétences des conseils de l'ordre, qui comporte aujourd'hui dix points.

En premier lieu, par coordination avec la réorganisation du cursus de formation et la suppression du stage (cf. art. 13), l'article 20 du projet de loi supprime toute référence à l'admission au stage, à l'omission de la liste du stage des maîtres ou docteurs en droit, ainsi qu'à l'inscription au tableau des avocats stagiaires après l'accomplissement de leur stage. À cette fin, il donne une nouvelle rédaction aux deuxième et troisième alinéas de l'article 17 de la loi du 31 décembre 1971. Aux termes de ces alinéas, le conseil de l'ordre demeurera donc compétent pour arrêter et modifier le règlement intérieur, statuer sur l'inscription au tableau des avocats, sur l'omission de ce tableau décidée d'office ou à la demande du procureur général, sur l'inscription et sur le rang des avocats qui, ayant déjà été inscrits au tableau et ayant abandonné l'exercice de la profession, se présentent de nouveau pour la reprendre ainsi que sur l'autorisation ou le retrait de l'autorisation d'ouverture de bureaux secondaires, En outre, la possibilité, pour les barreaux de plus de cinq cents avocats (52), de statuer sur ces questions en formations restreintes est maintenue, de même que les dispositions relatives à la présidence et à la composition de ces formations, sans que le nombre de membres présents dans ces formations - actuellement fixé à neuf - ne soit plus mentionné.

La Commission a adopté un amendement du rapporteur alignant la composition des formations administratives des barreaux de plus de cinq cent avocats sur celle des formations de jugement de ces barreaux (amendement n° 9), le rapporteur ayant observé que cette modification - qui concernerait aujourd'hui onze barreaux - revêtait une grande importance pratique compte tenu du nombre de décisions que doivent prendre ces formations administratives.

Sur proposition de son rapporteur et avec l'avis favorable du Gouvernement, le Sénat a modifié la rédaction du cinquième alinéa de l'article 17 de la loi du 31 décembre 1971, afin de préciser que le conseil de l'ordre « concourt » à la discipline dans les conditions prévues par la présente loi et non plus qu'il l'exerce. Reprenant les dispositions de l'article 26 du projet de loi, le Sénat a ainsi rassemblé dans un seul article l'ensemble des modifications apportées à l'article 17 de la loi du 31 décembre 1971.

Enfin, l'article 20 du projet de loi dote les conseils de l'ordre d'une nouvelle compétence liée à la mise en place du « tutorat » des jeunes avocats (cf. art. 12): il leur confie le soin de mettre en œuvre l'intégration au barreau des avocats pendant les dix-huit premiers mois de leur exercice professionnel, en déléguant à cet effet un avocat ou un avocat honoraire chargé d'apprécier leur pratique professionnelle. Cet ajout a été approuvé par le Sénat sous réserve de l'adoption d'un amendement de précision rédactionnelle présenté par son rapporteur.

La Commission a adopté un amendement du rapporteur confiant au conseil de l'ordre le soin de veiller à ce que les avocats satisfassent à l'obligation de formation continue et supprimant, par coordination, les dispositions relatives aux compétences du conseil de l'ordre en matière de tutorat pour les jeunes avocats (amendement n° 10).

Les autres missions imparties au conseil de l'ordre demeurent inchangées. C'est ainsi qu'ils continueront à : maintenir les principes de probité, de désintéressement, de modération et de confraternité sur lesquels repose la profession et exercer la surveillance que l'honneur et l'intérêt de ses membres rendent nécessaire ; veiller à ce que les avocats soient exacts aux audiences et se comportent en loyaux auxiliaires de justice ; traiter toute question intéressant l'exercice de la profession, les droits et les devoirs des avocats ; gérer les biens de l'ordre, préparer le budget, fixer le montant des cotisations, assurer les secours, allocations ou avantages quelconques attribués aux membres, à leurs conjoints survivants ou à leurs enfants ; autoriser le bâtonnier à ester en justice, à accepter dons et legs faits à l'ordre, à transiger, à compromettre, à consentir toute aliénation ou hypothèque et à contracter tout emprunt ; organiser les services généraux de recherche et de documentation nécessaires à l'exercice de la profession ; vérifier la tenue des comptabilités et la constitution des garanties ; contrôler la conformité des contrats de collaboration et de travail entre avocats aux règles de la profession, et des statuts des sociétés d'avocats ; assurer dans son ressort l'exécution des décisions prises par le Conseil national des barreaux.

La Commission a adopté l'article 20 ainsi modifié.

Article 21

(art. 20 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Coordination - Appel des décisions du conseil de l'ordre

L'article 21 de la loi du 31 décembre 1971 précise les conditions dans lesquelles peuvent être déférées à la cour d'appel les décisions prises par le conseil de l'ordre en matière d'inscription, d'omission ou de refus d'omission du tableau ou de la liste du stage ainsi qu'en matière d'ouverture et de fermeture de bureaux secondaires.

Par coordination avec la suppression du stage de deux ans, cet article, adopté sans modification par le Sénat, supprime la mention des avocats stagiaires dans cet article.

La Commission a adopté l'article 21 sans modification.

Article 22

(art. 21-1 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Compétences du Conseil national des barreaux

_  Institué par la loi n° 90-1259 du 31 décembre 1990, le Conseil national des barreaux est composé de quatre-vingt avocats élus pour trois ans au suffrage universel direct par deux collèges : le collège ordinal, composé des bâtonniers et des membres des conseils de l'ordre, et le collège général, composé de l'ensemble des avocats disposant du droit de vote pour l'élection des conseils de l'ordre (53). Le cnb est un établissement d'utilité publique doté de la personnalité morale. Définies à l'article 21-1 de la loi du 31 décembre 1971, les compétences du cnb sont de quatre ordres :

-  il assure la représentation de la profession d'avocat auprès des pouvoirs publics (1er al.);

-  il veille à l'harmonisation des règles et usages de la profession (1er al.);

-  il harmonise les programmes de formation, coordonne les actions de formation des centres régionaux de formation professionnelle, détermine les conditions générales d'obtention des mentions de spécialisation et répartit le financement de la formation professionnelle (2e al.) ;

-  il arrête la liste des personnes susceptibles de bénéficier de la directive du 21 décembre 1988 relative à la reconnaissance des diplômes ainsi que celle des candidats admis à subir l'examen de contrôle des connaissances en droit français, obligatoire pour les avocats ressortissant d'États n'appartenant pas à l'Union européenne ou à l'Espace économique européen (3e al.).

_  Adopté sans modification par le Sénat, l'article 22 du projet de loi modifie les deux premiers alinéas de l'article 21-1 de la loi du 31 décembre 1971.

S'il conserve sa qualité d'établissement d'utilité publique doté de la personnalité morale, son rôle de représentant de la profession est élargi puisque, aux termes de la nouvelle rédaction proposée pour l'article 21-1, le cnb est chargé de la représenter « notamment » auprès des pouvoirs publics ; à ce titre, il pourra par exemple représenter la profession auprès d'autres instances nationales ou internationales.

En outre, il renforce son rôle fédérateur au sein de la profession tant en matière de déontologie que de formation professionnelle.

S'agissant de la déontologie, l'article 21-1 confie désormais au cnb, « dans le respect des dispositions législatives et réglementaires en vigueur », le soin d'« unifier par voie de dispositions générales les règles et usages de la profession d'avocat ». Se substituant à la disposition actuelle, selon laquelle le cnb « veille à l'harmonisation des règles et usages de la profession », cette nouvelle formulation met ainsi fin à l'important contentieux qui s'est développé ces dernières années sur l'étendue du pouvoir normatif du Conseil national des barreaux, alimenté par l'ambiguïté de la rédaction de l'article 21-1 sur ce point.

En effet, le cnb a pris, le 13 septembre 1997, trois décisions qui définissent les principes essentiels de la profession d'avocat (n° 97.001), les règles applicables au secret professionnel de l'avocat (n° 97.002) et les règles applicables à la confidentialité et aux correspondances entre avocats (n° 97.003). Notifiant ces décisions au bâtonnier du conseil de l'ordre de chaque barreau, le cnb leur a demandé de prendre les dispositions nécessaires pour qu'elles soient insérées dans le règlement intérieur de son barreau, cette demande étant fondée sur le 10° de l'article 17 de la loi du 31 décembre 1971, qui impose aux conseils de l'ordre d'exécuter les décisions du cnb. Contestant l'existence d'un pouvoir normatif du cnb en matière déontologique, certains barreaux, dont celui de Tours, ont saisi les juridictions judiciaires et administratives de cette décision. L'appréciation des juridictions a divergé sur ce point : si la Cour de cassation, dans un arrêt de sa première chambre civile du 13 mars 2001, a reconnu le pouvoir de décision du cnb et la légalité des décisions prises en application de sa mission d'harmonisation des règles et usages de la profession, tel n'a pas été le cas du Conseil d'État auquel le tribunal des conflits, sur renvoi du Conseil d'État, a reconnu compétence (54). Dans un arrêt du 27 juillet 2001, la juridiction administrative a considéré que la fixation de règles déontologiques revêtant un caractère impératif pour l'ensemble de la profession relève de la compétence du Gouvernement agissant par voie de décret en Conseil d'État dans le respect des principes posés par l'article 53 de la loi du 31 décembre 1971 et notamment de l'autonomie des conseils de l'ordre ; et de conclure que dans un cadre ainsi défini, il revient au cnb, agissant par voie de recommandations, de promouvoir l'harmonisation des règles et usages de la profession, sans pour autant disposer à cette fin d'un pouvoir réglementaire(55).

Tranchée en droit, la question de l'harmonisation des règles déontologiques par le cnb n'en restait pas moins posée en opportunité. Face à la nécessité de parvenir à une déontologie unique dans tous les barreaux de France, le projet de loi reconnaît donc au cnb la compétence pour unifier les règles et usages de la profession, dans le respect de la hiérarchie des normes.

S'agissant de la formation professionnelle, l'article 22 ajoute aux compétences actuelles du cnb - harmonisation des programmes de formation, détermination des conditions générales d'obtention des mentions de spécialisation, coordination des actions de formation des crfp - de nouvelles prérogatives.

Il lui confie ainsi le soin de définir les principes d'organisation de la formation, ce qui recouvre les compétences que lui reconnaît le projet de loi en matière de regroupement des centres de formation (cf. art. 17). L'attribution de cette compétence est cohérente avec les dispositions relatives aux crfp, auxquels le projet de loi confie le soin d'organiser la préparation au capa « dans le respect des missions et prérogatives du cnb » (cf. art. 13). Il lui confie également le soin de contrôler les actions de formation des crfp. Quant au financement de la formation, l'article 21-1, dans la nouvelle rédaction que lui donne le projet de loi, ne limite plus l'intervention du cnb à la répartition du financement entre les centres mais renvoie aux attributions qui lui sont dévolues en la matière par l'article 14-1 de la loi du 31 décembre 1971 à savoir : la détermination de la contribution de la profession d'avocat et de la participation de chaque ordre ; la délivrance d'un titre exécutoire en cas de non-paiement ; la perception des contributions et répartition entre les centres.

S'agissant des règles applicables en matière de recours contre les décisions du cnb, seront formés devant la cour d'appel de Paris : les recours à l'encontre des décisions individuelles en matière de formation (art. 41 du décret du 27 novembre 1991) ; les recours portés à l'encontre des décisions individuelles en matière de contrôle des connaissances des ressortissants communautaires (art. 99 du décret) ; les recours portant sur les décisions prises en application de l'article 14-1 de la loi du 31 décembre 1971 en matière de financement de la formation (art. 5 du décret du 6 mars 2002). En revanche, suite à l'arrêt précité du tribunal des conflits, seront portés devant le Conseil d'État les recours formés à l'encontre des décisions unifiant par voie de dispositions générales les règles et usages de la profession. Et à défaut de précision contraire, entreront également dans la compétence du Conseil d'État les recours formés à l'encontre des décisions prises par le cnb en application du deuxième alinéa de l'article 21-1 dans la mesure où il interviendra sur ces questions - définition des principes d'organisation de la formation, harmonisation des programmes, coordination et contrôle des actions de formation des crfp, détermination des conditions générales d'obtention des mentions de spécialisation - par voie de dispositions générales.

La Commission a adopté l'article 22 sans modification.

Article 23

(art. 22 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Coordination - Discipline

Par coordination avec la suppression du stage de deux ans, cet article supprimait la mention qui est faite à la liste du stage dans le premier alinéa de l'article 22 de la loi du 31 décembre 1971, relatif à la compétence du conseil de l'ordre en matière disciplinaire.

Le Sénat a supprimé cet article, son rapporteur ayant relevé son caractère surabondant, l'article 22 de la loi du 31 décembre 1971 faisant l'objet d'une nouvelle rédaction à l'article 27 du projet de loi.

La Commission a maintenu la suppression de l'article 23.

Article 24

(art. 53 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Coordination - Décrets d'application

L'article 53 de la loi du 31 décembre 1971 renvoie à des décrets en Conseil d'État le soin de préciser les conditions d'application des dispositions relatives à la profession d'avocat. Il indique certains des points sur lesquels porteront ces mesures réglementaires et notamment :

-  les conditions d'inscription au tableau et d'omission du tableau ou de la liste du stage (1° de l'art. 53) ;

-  l'organisation de la formation professionnelle et les conditions dans lesquelles la loi n° 71-575 du 16 juillet 1971 portant organisation de la formation professionnelle continue dans le cadre de l'éducation permanente, pourra être appliquée à la formation d'avocat (8° de l'art. 53).

Par coordination avec la suppression du stage postérieur à la prestation de serment, le présent article ôte des dispositions précitées les références à la liste du stage.

En outre, dans sa rédaction initiale, l'article 24 substituait aux dispositions relatives aux dispositions réglementaires en matière de formation professionnelle
- figurant au 8° de l'article 24 - une disposition renvoyant à un décret en Conseil d'État le soin de fixer les modalités d'application du titre Ier du livre Ier du code du travail, relatif au contrat d'apprentissage.

En effet, les dispositions actuelles ne se justifient plus : d'une part, l'article 22 confie désormais au cnb le soin d'organiser la formation professionnelle ; d'autre part, l'article 16 du projet, en donnant une nouvelle rédaction à l'article 13 de la loi du 31 décembre 1971, a ôté la référence à la loi du 16 juillet 1971 portant organisation de la formation professionnelle continue dans le cadre de l'éducation permanente et il devient donc inutile d'en prévoir l'application par décret.

Toutefois, le Sénat n'a pas retenu la rédaction alternative proposée, son rapporteur l'ayant à juste titre estimé inutile, les dispositions réglementaires relatives au contrat d'apprentissage figurant d'ores et déjà dans le code de travail. L'article 24 du projet de loi, tel qu'adopté par le Sénat, prévoit donc la suppression du dixième alinéa (8°) de l'article 53 de la loi du 31 décembre 1971.

Après avoir adopté un amendement de coordination du rapporteur (amendement n° 11), la Commission a adopté l'article 24 ainsi modifié.

Article 25

(art. 28 à 41 bis, 49, 51 et 77 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Abrogation de dispositifs transitoires devenus sans objet

Adopté sans modification par le Sénat, cet article abroge plusieurs dispositions de la loi du 31 décembre 1971. Liées aux réorganisations successives de la profession - rapprochements des professions d'avocat, d'agréé et d'avoué près les tribunaux de grande instance en 1971, fusion des professions d'avocat et de conseil juridique par la loi du 31 décembre 1991 - ces dispositions, présentant un caractère transitoire, sont devenues sans objet.

Les dispositions concernées sont les suivantes :

-  les articles 28 à 41 bis : constituant le chapitre V de la loi du 31 décembre 1971, consacré à l'indemnisation des différents professionnels concernés par la réforme engagée par cette loi, ces dispositions sont devenues sans objet, les demandes d'indemnisation fondées sur une des dispositions de la loi devant avoir été présentées avant le 31 décembre 1985 (art. 41 bis de la loi du 31 décembre 1971) ; on rappellera d'ailleurs que le fonds d'organisation de la nouvelle profession d'avocat, chargé du paiement de ces indemnités, a été supprimé par la loi n° 87-1060 du 30 décembre 1987, les droits et obligations du fonds ayant alors été transférés à l'État ;

-  l'article 49 : ouvrant aux membres de anciennes professions d'avocat et de conseil juridique la possibilité d'accéder à certaines professions du monde judiciaire, cette disposition, introduite dans la loi du 31 décembre 1971, à l'occasion de la fusion des professions d'avocat et de conseil juridique, n'a plus d'objet, le délai pour procéder à cette réorientation étant largement écoulé (56;

-  l'article 51 : ouvrant aux clercs et employés d'avoué, d'agréé ou avocat la possibilité d'être intégrés dans le corps des fonctionnaires des services judiciaires ou recrutés comme agents contractuels ou à titre d'auxiliaires relevant du ministère de la justice, cet article est également devenu sans objet depuis de nombreuses années, cette faculté étant ouverte à ces personnels s'ils étaient privés de leur emploi dans un délai maximum de trois ans à compter du 16 septembre 1972, date d'entrée en application de la loi du 31 décembre 1971 ;

-  l'article 77 : fixant au 1er janvier 1972 la constitution et le fonctionnement des commissions régionales chargées de fixer le montant des indemnités perçues par les avoués près les tribunaux de grande instance, les agréés dont les professions ont été supprimées ou les avocats âgés de plus de quarante ans, justifiant d'au moins dix années d'exercice et qui justifieront d'un préjudice découlant directement de l'institution de la nouvelle profession ou auront dû cesser leur activité, cette disposition n'a plus lieu d'être, les demandes d'indemnisation devant avoir été présentées avant le 31 décembre 1985 (art. 41 bis de la loi du 31 décembre 1971).

La Commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 12), puis l'article 25 ainsi modifié.

TITRE III

DISPOSITIONS RELATIVES À LA DISCIPLINE DES AVOCATS

Ce titre modifie le chapitre III de la loi du 31 décembre 1971, consacré à la discipline des avocats. Justifiées par la nécessité de respecter les principes dégagés par la Cour européenne des Droits de l'Homme en matière de procès équitable, ces dispositions tendent principalement à transférer à un organe siégeant dans le ressort de chaque cour d'appel les compétences disciplinaires qui étaient, jusqu'à présent, dévolues au conseil de l'ordre de chaque barreau.

Interrogée en 2000 sur le nombre de sanctions disciplinaires prononcées à l'encontre des avocats, la chancellerie a estimé, à partir des données recueillies dans certaines cours d'appel, le nombre total des poursuites disciplinaires sur dix ans à environ 1200 (57). Elle a toutefois assorti ce chiffre des observations suivantes : possibilité de non notification aux cours d'appel de certaines décisions rendues par les ordres, non prise en compte de certaines poursuites qui se sont soldées par une simple admonestation du bâtonnier ; sanction purement pénale de certains comportements...

Article 26

(art. 17 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Coordination

Par coordination avec le transfert à un organe distinct des compétences disciplinaires que détiennent actuellement les conseils de l'ordre, le présent article modifie l'article 17 de la loi du 31 décembre 1971, qui énumère les différentes attributions du conseil de l'ordre : il n'y sera désormais plus précisé dans son cinquième alinéa (2°) que le conseil de l'ordre a pour tâche d'« exercer la discipline » mais de « concourir à ». Cette nouvelle formulation tient compte des modifications apportées à la discipline des avocats par le titre III du présent projet de loi, qui transfère l'exercice du pouvoir disciplinaire à un conseil de discipline distinct des conseils de l'ordre, ceux-ci demeurant toutefois compétents pour instruire l'affaire lorsque l'avocat mis en cause est de leur barreau, et désigner les membres du conseil de discipline.

Sur proposition de son rapporteur, le Sénat a regroupé les différentes modifications apportées à l'article 17 de la loi du 31 décembre 1971 dans l'article 20 du projet de loi (cf. 2° bis de cet article) et, en conséquence, a supprimé cet article.

La Commission a maintenu la suppression de l'article 26.

Article 27

(art. 22 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Instance disciplinaire compétente

_  L'article 22 de la loi du 31 décembre 1971 a confié le soin au conseil de l'ordre de poursuivre et réprimer les infractions et les fautes commises par les avocats inscrits au tableau ou sur la liste du stage. Il en définit les modalités de saisine, la forme des décisions, la nature de l'instruction ainsi que les conditions dans lesquelles un barreau comprenant au moins cinq cents avocats peut siéger en formations restreintes en matière disciplinaire.

_  Afin d'améliorer les conditions d'exercice des procédures disciplinaires engagées à l'encontre des avocats, l'article 27 du projet de loi donne une nouvelle rédaction à l'article 22 de la loi du 31 décembre 1971.

Aux termes de cette nouvelle rédaction, cet article précise l'autorité compétente en matière disciplinaire, les dispositions relatives aux conditions de saisine de cette instance, à la forme des décisions et à la nature de l'instruction figurant désormais dans l'article 23, dans la nouvelle rédaction que lui donne l'article 30 du projet de loi.

La compétence disciplinaire détenue aujourd'hui par chaque conseil de l'ordre est transférée à un conseil de discipline institué dans le ressort de chaque cour d'appel. La définition de ses attributions est identique à celle du conseil de l'ordre, puisqu'il connaîtra des « infractions et fautes commises par les avocats relevant des barreaux qui s'y trouvent établis », c'est-à-dire les avocats de plein exercice et les avocats honoraires. En outre, la compétence des conseils de discipline à l'égard des anciens avocats est précisée, le dernier alinéa de l'article 22, tel qu'il résulte du présent projet de loi, prévoyant que le conseil de discipline est compétent à l'égard de ces derniers, dès lors qu'à l'époque des faits, il était inscrit au tableau ou sur la liste des avocats honoraires, le Sénat ayant, sur proposition de son rapporteur, précisé que le conseil de discipline compétent est celui dans le ressort duquel ledit avocat a été inscrit. Le choix d'une instance régionale se justifie notamment par la nécessité d'accroître le vivier de recrutement des membres de cette instance disciplinaire afin de distinguer les autorités de poursuite et de jugement. Le nombre d'instances disciplinaires passera donc de 181 à 33, l'objectif étant également d'éviter que les avocats mis en cause ne soient jugés par leurs confrères les plus proches.

Toutefois, il est tenu compte de la spécificité du barreau parisien qui, au 1er janvier 2003, regroupait plus de 16 104 avocats, soit 39,4 % de l'effectif total de la profession.

Pour ce barreau, le transfert à un conseil de discipline dont la compétence s'étendrait au ressort de la cour d'appel se révèle en effet peu utile, son importance limitant de fait les risques de proximité qui justifient la réforme. Bien plus, elle ne permettrait pas une représentation équilibrée des autres barreaux implantés dans le ressort de la cour d'appel de Paris (Auxerre, Bobigny, Créteil, Évry, Fontainebleau, Meaux, Melun, Sens) : en effet, si 17 380 avocats exercent actuellement dans le ressort de la cour d'appel de Paris, les huit barreaux concernés autres que celui de la capitale ont des effectifs variant de 27 à 382 professionnels, pour un total de 1 276 et un pourcentage global de 7,3 % seulement. Aussi le deuxième alinéa du nouvel article 22 préserve-t-il la compétence du conseil de l'ordre du barreau de Paris en matière disciplinaire.

La Commission a adopté l'article 27 sans modification.

Article 28

(art. 22-1 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Composition et fonctionnement du conseil de discipline

Cet article, auquel le Sénat a apporté deux modifications rédactionnelles, tend à insérer dans la loi du 31 décembre 1971 un nouvel article, l'article 22-1, précisant la composition et le fonctionnement du conseil de discipline institué à l'article précédent.

Le conseil de discipline demeure composé des seuls représentants de la profession, les avocats demeurant donc jugés par leurs pairs.

Bien que n'exerçant plus de pouvoir disciplinaire, les conseils de l'ordre demeurent impliqués puisque ce sont leurs représentants qui constitue le conseil de discipline. Afin d'assurer un vivier de recrutement suffisant, il est précisé que ceux-ci, ainsi que leurs suppléants, peuvent être désignés parmi :

-  les anciens bâtonniers ;

-  les membres actuels des conseils de l'ordre autres que le bâtonnier en exercice ;

-  les anciens membres des conseils de l'ordre ayant quitté leurs fonctions depuis moins de huit ans, cette dernière disposition reprenant une modalité de composition des formations restreintes qui peuvent actuellement être instituées dans les barreaux de plus de cinq cents avocats.

Afin de garantir le respect des règles édictées par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés en matière de procès équitable et notamment la séparation des autorités de poursuite et de jugement, le bâtonnier en exercice, qui conserve la possibilité de saisir le conseil de discipline (cf. art. 30 du projet de loi), ne peut plus être membre de l'instance disciplinaire. Sur ce point, on notera que l'aménagement du rôle du bâtonnier afin de distinguer autorités de poursuite et de jugement avait déjà été prévu dans certains règlements intérieurs, notamment celui du barreau de Paris qui, comme le citait le rapport du cnb sur la réforme de la procédure disciplinaire, prévoit que les formations disciplinaires sont présidées par d'anciens bâtonniers, évitant ainsi la présidence de l'instance disciplinaire par le bâtonnier en exercice.

S'il est confié à un décret en Conseil d'État le soin de préciser les modalités de composition de ces nouvelles instances, la loi tend à imposer un équilibre dans la représentation des barreaux par deux dispositions complémentaires : chaque conseil de l'ordre dispose d'au moins un représentant et aucun conseil de l'ordre ne peut désigner plus de la moitié des membres du nouveau conseil de discipline.

S'inspirant des règles applicables à la constitution des formations disciplinaires des barreaux de plus de cinq cents avocats, il est indiqué que la formation compte au minimum cinq membres, délibérant en nombre impair, et qu'une ou plusieurs formations peuvent être constituées en son sein, lorsque plus de cinq cents avocats sont présents dans le ressort de la cour d'appel. Dans l'hypothèse de constitution de formations restreintes, il est précisé, à l'instar du dernier alinéa de l'article 22 de la loi du 31 décembre 1971, que les formations restreintes peuvent toujours renvoyer à la formation plénière.

Enfin, cet article confie au conseil de discipline le soin d'élire son président et prévoit que les délibérations des conseils de l'ordre prises pour désigner les conseils de discipline ainsi que l'élection du président peuvent être déférées à la juridiction judiciaire, le Sénat, sur proposition de son rapporteur, ayant souhaité préciser la rédaction en indiquant qu'il s'agit de la cour d'appel. Ces recours se font dans les conditions prévues par l'article 19 de la loi du 31 décembre 1971 qui précise que « peuvent être déférées à la cour d'appel, à la requête de l'intéressé, les délibérations ou décisions du conseil de l'ordre de nature à léser les intérêts professionnels d'un avocat ».

La Commission a été saisie d'un amendement de M. Georges Fenech tendant à donner une nouvelle rédaction à l'article 22-1 de la loi du 31 décembre 1971 pour instituer un conseil de discipline et de déontologie composé de membres élus par tous les avocats inscrits et les avocats honoraires de chaque barreau du ressort de la cour d'appel, ces membres ne pouvant être également membres du conseil de l'ordre. Soulignant les difficultés inhérentes à l'exercice de la profession d'avocat et l'intérêt de cet amendement, M. Étienne Blanc a regretté que certains professionnels, notamment les plus jeunes d'entre eux, ne respectent pas des principes de déontologie les plus élémentaires, tels que la transmission de pièces aux confrères, sans que ces comportements ne soient sanctionnés, comme cela l'aurait sans doute été il y a une dizaine d'années. Le rapporteur a souligné que le projet de loi tendait précisément à renforcer les garanties déontologiques de la profession et améliorait les conditions d'exercice du pouvoir disciplinaire, en limitant les risques de proximité entre l'autorité disciplinaire et les avocats concernés. Après avoir fait observer la lourdeur du dispositif proposé par l'amendement, elle a considéré qu'il fallait d'abord donner ses chances à la réforme aujourd'hui proposée avant d'aller plus loin. La Commission a rejeté cet amendement.

Puis elle a adopté l'article 28 sans modification.

Article 29

(art. 22-2 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Compétence disciplinaire du conseil de l'ordre
du barreau de Paris

Le conseil de l'ordre du barreau de Paris conservant ses attributions en matière disciplinaire (cf. art. 27 du projet de loi), cet article, adopté sans modification par le Sénat, introduit un nouvel article - l'article 22-2 - dans la loi du 31 décembre 1971, afin de préciser la composition et l'organisation de l'instance disciplinaire propre à ce barreau.

Ce nouvel article reprend au profit du seul barreau parisien les dispositions aujourd'hui applicables aux barreaux de plus de cinq cents avocats, prévues dans le dernier alinéa de l'article 22 de la loi du 31 décembre 1971. Le nouvel article 22-2 précise ainsi que le conseil de l'ordre siégeant en conseil de discipline peut constituer plusieurs formations, d'au moins cinq membres. Il est maintenu la possibilité pour la formation restreinte de renvoyer l'examen de l'affaire à la formation plénière. Comme pour les formations disciplinaires pouvant désormais être constituées au sein des conseils de discipline lorsque la cour d'appel dans le ressort de laquelle il est établi compte plus de cinq cents avocats, il est précisé que ces formations délibèrent en nombre impair.

Les membres de ces formations disciplinaires demeurent choisis parmi les membres du conseil de l'ordre en exercice ou ayant quitté leurs fonctions depuis moins de huit ans. En revanche, afin d'assurer une séparation entre l'autorité de poursuite et de jugement, le bâtonnier du conseil de l'ordre de Paris ne peut plus être membre de ces formations disciplinaires. La présidence de ces formations revient donc aux anciens bâtonniers ou au membre le plus ancien dans l'ordre du tableau (58). Les présidents de ces formations ne sont pas choisis par ces dernières mais sont désignés par délibération du conseil de l'ordre ainsi que les membres des formations. Contrairement aux dispositions actuellement en vigueur, l'article 22-2 ne précise plus que ces formations sont désignées en début d'année ni que leurs membres sont choisis sur une liste arrêtée par le conseil de l'ordre.

La Commission a rejeté un amendement de M. Georges Fenech tendant à supprimer cet article, après que le rapporteur eut jugé peu réaliste de ne pas tenir compte, pour l'organisation disciplinaire de la profession, de la spécificité du barreau parisien qui rassemble aujourd'hui plus de 16 000 avocats, les barreaux périphériques étant nettement moins nombreux.

La Commission a adopté l'article 29 sans modification.

Article 30

(art. 23 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Procédure devant l'instance disciplinaire

Actuellement consacré à la suspension provisoire de l'avocat qui fait l'objet d'une poursuite pénale ou disciplinaire, l'article 23 de la loi du 31 décembre 1971 fait l'objet d'une nouvelle rédaction qui précise les règles procédurales applicables devant le conseil de discipline ou, dans le cas du barreau de Paris, le conseil de l'ordre. Les dispositions relatives à la suspension de l'avocat sont reprises dans l'article suivant (cf. art. 31 du projet de loi).

Précisée dans le premier alinéa de l'article 23 dans la nouvelle rédaction que lui donne le projet de loi, la saisine de l'instance disciplinaire demeure confiée au procureur général près la cour d'appel dans le ressort de laquelle elle est instituée et au bâtonnier du conseil de l'ordre dont relève l'avocat mis en cause. En revanche, la faculté d'auto-saisine de l'instance disciplinaire est supprimée afin d'aligner notre droit sur les principes dégagés par la cedh. Même si les conseils de l'ordre faisaient rarement usage de cette faculté, cette suppression mérite d'être approuvée.

L'instance disciplinaire pouvant comporter d'anciens bâtonniers, le deuxième alinéa prévoit, afin d'éviter toute confusion entre autorité de poursuite et de jugement, que l'ancien bâtonnier qui, au titre de ses fonctions antérieures, aurait engagé la poursuite disciplinaire, ne peut siéger au sein de la formation dont le Sénat, sur proposition de son rapporteur, a précisé qu'elle était « de jugement ».

Reprenant la lettre du troisième alinéa de l'article 22 de la loi du 31 décembre 1971, le troisième alinéa prévoit que l'instance disciplinaire statue après instruction contradictoire et par une décision motivée. Sur proposition de son rapporteur et avec l'avis favorable du Gouvernement, le Sénat a complété cet alinéa afin de préciser les conditions d'instruction des affaires soumises à l'instance disciplinaire.

Afin d'associer les conseils de l'ordre à l'exercice de la discipline dans la profession, il a prévu que le conseil de l'ordre dont relève l'avocat poursuivi désigne l'un de ses membres pour procéder à l'instruction contradictoire de l'affaire. La compétence dont disposent aujourd'hui les conseils de l'ordre pour l'instruction des affaires disciplinaires se trouve ainsi maintenue(59). En outre, afin de garantir l'impartialité du conseil de discipline, il est précisé que le rapporteur, s'il est membre titulaire ou suppléant de l'instance disciplinaire, ne peut siéger au sein de la formation de jugement réunie pour la même affaire. La question de la participation du rapporteur avait déjà été soulevée par le cnb dans son rapport précité sur la réforme de la procédure disciplinaire ; comparant la participation du rapporteur à l'audience disciplinaire et au vote à celle d'un juge d'instruction à une audience correctionnelle ou à une audience de cour d'assises, le cnb souhaitait alors que les fonctions de poursuite, d'instruction et de jugement soient clairement séparées. Cet ajout du Sénat s'inscrit dans le prolongement de la jurisprudence dégagée par la Cour de cassation qui, dans un arrêt du 5 octobre 1999, a estimé que le rapporteur désigné par le bâtonnier pour enquêter sur les faits objets de la poursuite ne peut participer à la délibération du conseil de l'ordre.

Enfin, alors que l'actuel article 24 de la loi du 31 décembre 1971 ouvre à l'avocat intéressé et au procureur général la possibilité de déférer les décisions du conseil de l'ordre devant la cour d'appel, le dernier alinéa ouvre également cette faculté au bâtonnier qui, avec le procureur général, constitue l'autorité de poursuite.

La Commission a rejeté un amendement de M. Georges Fenech, instituant un comité de surveillance élu par les avocats et chargé, avec le procureur général près la cour d'appel, de saisir l'instance disciplinaire et de déontologie.

La Commission a adopté l'article 30 sans modification.

Article 31

(art. 24 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 ; art. 138 du code de procédure pénale)


Régime de la suspension provisoire d'un avocat
faisant l'objet d'une poursuite pénale ou disciplinaire

Le régime de la suspension provisoire d'un avocat faisant l'objet d'une poursuite pénale ou disciplinaire figure aujourd'hui sous l'article 23 de la loi du 31 décembre 1971. Susceptible d'intervenir à tout moment de la procédure pénale ou disciplinaire, cette interdiction d'exercer est prononcée par le conseil de l'ordre soit d'office, soit sur les réquisitions du procureur général. C'est au conseil de l'ordre qu'il revient de décider de la fin de la suspension, de sa propre initiative, à la demande de l'intéressé ou du procureur général. Enfin, il est précisé que cette interdiction d'exercer cesse de plein droit dès que les actions disciplinaire ou pénale ayant motivé la suspension sont éteintes. Par ailleurs, l'article 198 du décret du 27 novembre 1991 précise que la décision suspendant l'avocat est exécutoire nonobstant l'appel.

Le I du présent article donne une nouvelle rédaction à l'article 24 de la loi du 31 décembre 1971 - qui traite aujourd'hui des conditions d'exercice des recours formés contre les décisions du conseil de l'ordre en matière disciplinaire - afin d'y faire figurer les dispositions relatives à la suspension provisoire de l'avocat.

La compétence pour prononcer et mettre fin à la suspension n'est pas transférée aux nouveaux conseils de discipline (cf. art. 27 du projet de loi) mais laissée au conseil de l'ordre, ce qui montre qu'il ne s'agit pas d'une mesure disciplinaire. En revanche, cette mesure portant atteinte à la liberté d'exercice professionnel, son régime est précisé sur plusieurs points :

-  les conditions requises pour que soit prononcée la suspension sont encadrées : il faut non seulement que l'avocat fasse l'objet d'une poursuite pénale ou disciplinaire mais également que l'urgence exige sa suspension ; La Commission a adopté un amendement du rapporteur ajoutant aux conditions dans lesquelles la suspension provisoire d'un avocat peut être décidée par le conseil de l'ordre celle liée à la protection du public (amendement n° 13)

-  les autorités compétentes pour demander la suspension sont le procureur général et le bâtonnier, et non plus le conseil de l'ordre ;

-  s'il reste prévu que la suspension cesse de plein droit lorsque les poursuites pénales ou disciplinaires à l'origine de la suspension sont éteintes, une durée maximale de quatre mois est imposée ; cette durée est renouvelable sans qu'une limitation soit prévue ;

-  sur proposition de son rapporteur, le Sénat a précisé, afin d'assurer l'impartialité des autorités prononçant cette mesure de sûreté d'avant dire droit ou les sanctions disciplinaires, une incompatibilité pour les membres titulaires ou suppléants de l'instance disciplinaire : ils ne peuvent alors siéger au sein du conseil de l'ordre lorsqu'il se prononce sur cette mesure de suspension provisoire ; la Commission a adopté un amendement du rapporteur ayant pour objet de rendre applicable au barreau de Paris cette disposition (amendement n° 14),

-  la fin de la suspension provisoire relève de la seule compétence du conseil de l'ordre, hors le cas où la mesure a été ordonnée par la cour d'appel qui demeure compétente, après qu'elle ait été saisie, par exemple, d'une décision du conseil de l'ordre refusant de prononcer ou renouveler la mesure de suspension provisoire ;

-  les dispositions relatives à l'appel qui figurent dans l'article 24 de la loi du 31 décembre 1971, applicables aux décisions disciplinaires comme à la suspension provisoire de l'avocat, figurent désormais dans le nouvel article 23 ; aussi le nouvel article 24 prévoit-il une faculté de recours à l'encontre des décisions prises en matière de suspension provisoire devant la cour d'appel, à l'initiative de l'avocat concerné, du procureur général mais également dorénavant, par le bâtonnier dont relève le professionnel en cause et ce, par symétrie avec les compétences qui lui sont reconnues en matière disciplinaire.

Par coordination, le II de l'article 31 modifie le 12° de l'article 138 du code de procédure pénale qui donne au seul conseil de l'ordre, saisi par le juge d'instruction, le droit de prononcer une mesure de suspension provisoire à l'encontre d'un avocat. Les dispositions relatives à cette mesure étant désormais rassemblées dans le seul article 24 de la loi du 31 décembre 1971, il n'est plus besoin de faire référence à son article 23, dont le contenu est désormais étranger à la mesure de suspension provisoire.

Après avoir rejeté, par coordination avec les votes intervenus précédemment, un amendement de M. Georges Fenech, la Commission a adopté un amendement du rapporteur précisant que la décision de suspension provisoire est immédiatement exécutoire (amendement n° 15).

La Commission a adopté l'article  31 ainsi modifié.

Article 32

(art. 25 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Coordination - Saisine du conseil de l'ordre
dans le cas d'un manquement à l'audience commis par l'avocat

L'article 25 de la loi du 31 décembre 1971 précise la procédure disciplinaire applicable lorsqu'une juridiction estime qu'un avocat a commis à l'audience un manquement aux obligations que lui impose son serment.

Adopté sans modification par le Sénat, l'article 32 du projet de loi transfère aux nouvelles instances disciplinaires - conseil de l'ordre à Paris, conseil de discipline partout ailleurs - les compétences jusqu'ici détenues par les conseils de l'ordre en matière de manquements à l'audience. A cette fin, il apporte quatre modifications à l'article 25 de la loi du 31 décembre 1971, en substituant aux mentions du conseil de l'ordre celle de l'instance disciplinaire.

La Commission a rejeté un amendement de M. Georges Fenech de coordination avec les amendements présentés précédemment.

Puis elle a adopté l'article 32 sans modification.

TITRE III BIS

DISPOSITIONS DIVERSES RELATIVES AUX AVOCATS

[Division et intitulé nouveaux]

Sur proposition de son rapporteur et avec l'avis favorable du Gouvernement, le Sénat a introduit une nouvelle division afin d'insérer dans le projet de loi une disposition relative à la confidentialité des correspondances entre avocats.

Article 32 bis (nouveau)

(art. 66-5 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Confidentialité des correspondances entre avocats

Tel qu'il résulte de la loi n° 97-308 du 7 avril 1997, l'article 66-5 de la loi du 31 décembre 1971 précise qu'« en toutes matières, que ce soit dans le domaine du conseil ou dans celui de la défense, les consultations adressées par un avocat à son client ou destinées à celui-ci, les correspondances échangées entre le client et son avocat, entre l'avocat et ses confrères, les notes d'entretien et, plus généralement, toutes les pièces du dossier sont couvertes par le secret professionnel ».

Cette disposition a été introduite dans la loi du 31 décembre 1971 afin de contraindre la chambre criminelle de la Cour de cassation à revenir sur sa jurisprudence qui opérait une distinction entre activité de défense et de conseil des avocats et qui considérait que le secret professionnel ne pouvait être opposé lorsque l'avocat avait seulement été saisi en qualité de conseil.

La rédaction très générale de l'article 66-5 a conduit la première chambre civile de la Cour de cassation, dans un arrêt du 4 février 2003 (60), à considérer que toutes les correspondances échangées entre avocats, sans exception, sont couvertes par le secret professionnel. Ne suivant pas les conclusions de l'avocat général, elle a donc cassé l'arrêt rendu le 9 novembre 1999 par la cour d'appel de Montpellier qui avait considéré que « les correspondances échangées entre le client et son avocat, entre l'avocat et ses confrères, les notes d'entretien et plus généralement toutes les pièces du dossier étaient couvertes par le secret professionnel » mais qu'« il restait admis, malgré [la rédaction de l'article 66-5], que le secret professionnel ne protégeait pas les correspondances entre avocats quand elles étaient officielles ou quand elles se substituaient à un acte de procédure ».

Conforme à la lettre de l'article 66-5 de la loi du 31 décembre 1971, cette solution n'en présente pas moins certains inconvénients. En effet, comme l'indiquait l'avocat général, M. Jerry Sainte-Rose, dans ses conclusions, elle conduit à empêcher la production en justice de toute correspondance entre avocats, « sous peine de poursuites non seulement disciplinaires mais pénales, contrairement à ce qu'admettait la pratique antérieure ». Elle risque ainsi de « créer des situations inextricables lorsque, comme en l'espèce, des lettres (ou autres mode de communication équivalent) servent de support à un acte juridique ». En outre, « il est manifeste que priver d'effet un acquiescement ou un consentement exprimé en pleine connaissance de cause, [...], c'est ouvrir la voie à tous les revirements et encourager les comportements déloyaux en permettant à la partie qui a acquiescé ou donné son accord de se servir du prétexte de la confidentialité pour se rétracter ».

On relèvera d'ailleurs que le code des barreaux européen pose la règle contraire de la non-confidentialité. Or, comme le note M. Raymond Martin, « ce code a été inclus dans le règlement harmonisé et il est passé par-là dans la plupart des règlements intérieurs des barreaux » (61).

C'est ainsi que l'article 3.2 du règlement intérieur harmonisé des barreaux de France du 26 mars 1999 précise que « ne sont pas couvertes par le secret professionnel et ne sont donc en conséquence pas confidentielles :

-  une correspondance ayant pour unique objet de se substituer à un acte de procédure (lettre de procédure) ;

-  une correspondance portant la mention « officielle » ;

-  une convention entre avocats portant la mention « officielle ».

Les correspondances et conventions prévues ci-dessus ne doivent faire aucune référence à des correspondances ou propos antérieurs confidentiels ».

Aussi le présent article, introduit par le Sénat sur proposition de son rapporteur et avec l'avis favorable du Gouvernement, tend-il à modifier la rédaction de l'article 66-5 de la loi du 31 décembre 1971, afin d'exonérer du secret professionnel les correspondances portant la mention « officielle ».

La Commission a adopté l'article 32 bis sans modification.

Article additionnel après l'article 32 bis (nouveau)

(art. 67 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Mention de l'appartenance à un réseau pluridisciplinaire

Le CNB, par la voie de son règlement intérieur harmonisé adopté en mars 1999, avait cherché à encadrer strictement l'exercice de la profession d'avocat au sein d'un réseau pluridisciplinaire, afin de garantir le respect de l'indépendance de la profession. Ainsi, son article 16-4 n'autorisait un avocat à participer à un réseau que s'il comprenait exclusivement des membres de professions réglementées ayant une déontologie déclinant une éthique commune à celle des avocats et dont le respect devait être contrôlé par une institution ordinale ou autre ; l'article 16-5 n'autorisait un avocat à participer à un réseau que si ce dernier appliquait une stricte interdiction de fournir à un même client ou à ses filiales des activités de conseil juridique, d'une part, et de contrôle légal des comptes, d'autre part ; enfin, l'article 16-3 obligeait l'avocat exerçant au sein d'un réseau à faire mention de son appartenance à celui-ci.

La Cour de cassation et le Conseil d'État ayant considéré que la loi du 31 décembre 1971 n'avait pas délégué de pouvoir réglementaire au cnb pour édicter les règles et usages de la profession (cf. art. 22 du projet de loi), il est donc aujourd'hui nécessaire de préciser les conditions d'exercice de la profession au sein des réseaux pluridisciplinaires, afin d'entourer le développement de ces derniers de garanties déontologiques permettant de prévenir les conflits d'intérêts, de veiller au respect du secret professionnel et, plus généralement, de préserver l'indépendance de l'avocat.

Une première mesure importante a été prise dans la loi n° 2003-706 du 1er août 2003 relative à la sécurité financière dont l'article 104, en réaction à l'affaire Enron, a prévu une incompatibilité entre les fonctions de commissaire aux comptes et de conseil (art. L. 822-11 du code de commerce).

Dans le prolongement de ces dispositions, le rapporteur a proposé à la Commission un amendement imposant aux avocats, quel que soit leur mode d'exercice, de mentionner leur appartenance à un réseau pluridisciplinaire. Cette disposition est de nature à accroître la transparence nécessaire en la matière, notamment à l'égard de la clientèle. En outre, plutôt que de mettre en place un dispositif d'encadrement a priori, cette nouvelle disposition permettra au conseil de l'ordre d'évaluer au cas par cas si l'appartenance à un réseau est susceptible de soulever des problèmes déontologiques. Elle se substitue aux dispositions du troisième alinéa de l'article 67 de la loi du 31 décembre 1971, devenues sans objet en raison de leur caractère transitoire, qui donnaient la faculté aux conseils juridiques affiliés à un réseau non exclusivement juridique de continuer pendant cinq ans à mentionner leur appartenance à ce réseau. La Commission a adopté cet amendement du rapporteur (amendement n° 16).

Après l'article 32 bis (nouveau)

La Commission a rejeté un amendement de M. Thierry Mariani encadrant le recours aux interprètes traducteurs dans le cadre d'une procédure judiciaire, le rapporteur ayant toutefois souhaité qu'une meilleure rédaction soit élaborée d'ici à la réunion que la Commission tiendra en application de l'article 88 du Règlement.

TITRE IV

DISPOSITIONS RELATIVES À LA DISCIPLINE
DES GREFFIERS DES TRIBUNAUX DE COMMERCE

Le code de l'organisation judiciaire, dans ses articles L. 821-1 à L. 822-7 fixe le régime disciplinaire des 247 greffiers des tribunaux de commerce répartis sur 191 greffes. Les articles R. 822-1 à R. 822-6 régissent la procédure et les peines disciplinaires, la comparution, les débats, le jugement. Dans ses articles R. 822-7 à R. 822-15, sont fixés le régime de l'administration provisoire prévue en cas de destitution du greffier ainsi que celui de la suspension provisoire.

Ainsi, comme pour les juges consulaires, le code précité institue une discipline très stricte pour les greffiers des tribunaux de commerce. Tout manquement d'un greffier à l'honneur, à la probité, à la dignité et aux devoirs de sa charge constitue une faute disciplinaire. L'acceptation de sa démission ne fait pas obstacle au prononcé d'une peine disciplinaire si les faits qui lui ont été reprochés ont été commis pendant l'exercice de ses fonctions L'action disciplinaire est exercée à l'initiative du procureur de la République devant le tribunal de grande instance dans le ressort duquel le tribunal de commerce a son siège. Elle se prescrit par dix ans. L'appel interjeté contre une décision du tribunal de grande instance statuant en matière disciplinaire est formé par simple déclaration au secrétariat-greffe du tribunal. Le délai d'appel est d'un mois, réduit à quinze jours en matière de suspension provisoire.

Le présent titre apporte deux modifications principales : il élargit l'éventail des sanctions disciplinaires à la disposition du juge disciplinaire pour leur donner plus d'effectivité ; il donne compétence au Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce pour prononcer les sanctions les moins lourdes.

Article 33

(art. L. 822-2 du code de l'organisation judiciaire)


Peines disciplinaires applicables aux greffiers des tribunaux de commerce

Pour un plus grand respect du principe de proportionnalité des peines et des sanctions disciplinaires, tel qu'il découle, en particulier, de l'article 7 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 49 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne (62), l'échelle des peines disciplinaire, applicables aux greffiers des tribunaux de commerce est élargie, comme elle l'est pour les experts judiciaires (voir titre V). Aujourd'hui, comme on l'a vu, l'échelle des peines est limitée à l'avertissement, au blâme et, en cas de manquements graves, à une destitution irrévocable, laquelle entraîne automatique la radiation pendant un délai de cinq ans de la liste électorale prévue par l'article L. 11 du code électoral.

Il est proposé d'ajouter trois nouvelles sanctions : le rappel à l'ordre, l'interdiction temporaire et le retrait d'honorariat, lorsque la peine touche un greffier qui n'est plus en exercice. Cette mesure s'inscrit dans un mouvement d'adaptation des sanctions plus vaste qui a déjà touché les administrateurs judiciaires et les mandataires judiciaires (63) et les commissaires aux comptes (64) et qui touchera également les experts judiciaires (article 41 du présent projet de loi). Cet élargissement de l'éventail des sanctions, qui reprend celui qui prévaut pour les avocats (65), permettra une plus grande effectivité de la justice disciplinaire. Il évitera le risque du « tout ou rien » qui peut entraîner l'impunité pour les fautes de gravité intermédiaire.

Inédite parmi les professions réglementées, la peine générale et automatique de cinq ans de radiation de la liste électorale en cas de destitution est supprimée car disproportionnée et obsolète.

En revanche, les quatre premières catégories de sanctions (rappel à l'ordre, avertissement, blâme, interdiction temporaire) pourront être assorties d'une peine d'inéligibilité temporaire au Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce (66). La durée maximale de cette inéligibilité est de cinq ans dans le cas des trois premières sanctions et de dix ans pour la quatrième.

Le Sénat a adopté cet article sans modification. La Commission elle aussi a adopté l'article 33 sans modification.

Article 34

(art. L. 822-3, L. 822-3-1 et L. 822-3-2 du code de l'organisation judiciaire)


Attribution d'une compétence disciplinaire
au Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce

Doté de la personnalité morale et chargé d'assurer la défense des intérêts collectifs, le Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce, sur le fondement de l'article L. 821-4 du code de commerce, représente la profession de greffier des tribunaux de commerce auprès des pouvoirs publics. La logique de responsabilisation des professions judiciaires conduit le Gouvernement à proposer d'élargir à la matière disciplinaire les compétences du Conseil national. Cette modification correspond à une demande de ce dernier exprimée de longue date.

Article L. 822-3 du code de l'organisation judiciaire

Autorités compétentes pour exercer l'action disciplinaire

La réforme proposée par le présent projet de loi se traduit par un partage de compétences, selon un schéma inspiré du droit disciplinaire applicable à d'autres officiers publics ou ministériels comme les huissiers de justice ou les notaires. Afin de responsabiliser la profession, les poursuites pourront être portées, non seulement devant le tribunal de grande instance comme c'est le cas aujourd'hui, mais aussi devant une formation disciplinaire du Conseil national de la profession dont la composition sera fixée par décret en Conseil d'État.

L'action disciplinaire continuera de se prescrire par dix ans.

Article L. 822-3-1 du code de l'organisation judiciaire

Composition et pouvoirs de la formation disciplinaire du Conseil national

Le Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce est composé de membres élus par les greffiers des tribunaux de commerce. Dans chaque cour d'appel, les greffiers des tribunaux de commerce élisent un membre du Conseil national lorsque le nombre de greffiers exerçant dans le ressort de cette cour excède cinq. Dans le cas contraire, le membre du Conseil national est élu par un collège composé des greffiers du ressort de la cour d'appel et de ceux exerçant dans un ressort de cour d'appel voisin qui sera désigné par arrêté du garde des Sceaux, ministre de la justice, après avis du Conseil national. Les membres du Conseil sont élus pour quatre ans et renouvelables une fois ; ils ne sont rééligibles que quatre ans après l'expiration de leur deuxième mandat. Le Conseil est renouvelé par moitié tous les deux ans.

La nouvelle formation disciplinaire du Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce sera composée de cinq membres désignés par lui en son sein et de cinq suppléants désignés dans les mêmes conditions.

Le principe d'impartialité du tribunal posé par le paragraphe 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales s'étend à l'ensemble des juridictions disciplinaires comme l'ont rappelé les jurisprudences européenne et nationale (67). En vertu de ce principe, qui impose la séparation de l'autorité de saisine et de l'autorité de jugement (68), le président du Conseil national, qui sera chargé d'exercer l'action disciplinaire, conjointement avec le procureur de la République, est logiquement exclu de la formation disciplinaire. Il ne peut en effet être juge et partie. Une telle architecture s'impose dans de nombreuses professions. Ainsi en est-il du président de la Compagnie nationale des commissaires aux comptes qui ne peut être membre d'aucune chambre disciplinaire de la Compagnie (69) ou encore des présidents des conseils régionaux et du Conseil national des architectes, qui ne peuvent être membres d'aucune chambre de discipline des architectes (70).

Le prononcé d'une interdiction temporaire et d'une destitution restera du ressort exclusif du tribunal de grande instance, compte tenu du degré de gravité de ces sanctions et de l'atteinte au principe de libre exercice professionnel qu'elles constituent. La formation disciplinaire du Conseil national ne pourra prononcer que des peines de discipline intérieure, à savoir le rappel à l'ordre, l'avertissement et le blâme.

Article L. 822-3-2 du code de l'organisation judiciaire

Engagement de l'action disciplinaire

Dans l'état du droit, l'engagement de l'action disciplinaire appartient exclusivement au procureur de la République. À l'avenir, elle pourra l'être également par le président du Conseil national, dont on rappelle qu'il est exclu de la formation disciplinaire.

C'est pourquoi est organisée une procédure d'information réciproque du Conseil national et du procureur de la République. Le premier devra notifier l'engagement d'une action disciplinaire au second, qui, s'il décide de citer le greffier devant le tribunal de grande instance, devra en informer le président de la formation disciplinaire du Conseil national. Cette dernière notification a pour conséquence de dessaisir immédiatement la formation disciplinaire. Il s'agit, par cette procédure, d'éviter que le tribunal soit amené à juger une affaire alors que la formation disciplinaire s'est déjà prononcée. Une telle procédure est d'ores et déjà prévue dans nombre de contentieux disciplinaires. Ainsi, en est-il pour la discipline des autres officiers publics et ministériels (71).

L'article 34 a été adopté par le Sénat sans modification. La Commission a adopté cet article sans modification.

Article 35

(art. L. 822-5 du code de l'organisation judiciaire)


Appel des décisions disciplinaires

Cet article introduit deux modifications dans la procédure d'appel des décisions disciplinaires dans la logique de l'introduction d'une nouvelle autorité compétente pour prononcer de telle sanction.

En premier lieu, il prévoit la possibilité pour le procureur de la République de déférer devant la cour d'appel de Paris, dans le ressort de laquelle le Conseil national a son siège, les décisions prises par la formation disciplinaire de ce dernier. Le président du Conseil national a également la possibilité de faire appel de ces décisions lorsqu'il est à l'origine des poursuites.

En second lieu, la possibilité de faire appel des décisions du tribunal de grande instance réuni en formation disciplinaire est ouverte non seulement au procureur de la République et au greffier comme c'est déjà le cas aujourd'hui, mais également au président du Conseil national, là aussi lorsqu'il est à l'origine des poursuites.

L'article 35 a été adopté par le Sénat sans modification. La Commission l'a adopté également sans modification.

Article 36

(art. L. 822-6 du code de l'organisation judiciaire)


Conséquences d'une suspension, d'une interdiction ou d'une destitution

L'article L. 822-6 du code de l'organisation judiciaire prévoit que le greffier suspendu ou destitué doit s'abstenir de tout acte professionnel. Les actes accomplis en contradiction avec cette interdiction peuvent être déclarés nuls par le tribunal de grande instance et le greffier en cause encourt une peine d'un an d'emprisonnement et une amende de 15 000 euros (article 433-17 du code pénal).

Le présent article prévoit que cette abstention s'applique non seulement au greffier qui est suspendu (72) ou destitué, mais également à celui qui est interdit ; il s'agit de tenir compte de la nouvelle sanction disciplinaire instituée par le projet (article 33).

L'article 36 a été adopté par le Sénat avec une simple modification formelle et la suppression d'une rectification erronée. En effet, le projet de loi procédait à une rectification de référence. Or, après vérification, il s'est avéré que la référence en vigueur (article 443-17 du code pénal) était la bonne et que seule une erreur d'impression avait motivé la volonté de rectification.

La Commission a adopté l'article 36 sans modification.

Article 37

(art. L. 822-7 du code de l'organisation judiciaire)


Nomination d'administrateurs provisoires en cas de suspension,
d'interdiction ou de destitution

L'article L. 822-7 du code de l'organisation judiciaire dispose que le tribunal de grande instance qui prononce la suspension ou la destitution d'un greffier nomme un ou plusieurs administrateurs provisoires, comme c'est le cas pour les autres officiers publics et ministériels (73). Selon la même logique que celle qui a prévalu à l'article 36, le présent article met à jour la rédaction de l'article L. 822-7 en incluant la peine d'interdiction temporaire dans les décisions entraînant la nomination d'un administrateur provisoire.

L'article 37 a été adopté sans modification par le Sénat. La Commission l'a adopté à son tour sans modification.

Article 38

(art. L. 822-8 du code de l'organisation judiciaire)


Décret en Conseil d'État

Le présent article complète le code de l'organisation judiciaire de manière à prévoir explicitement l'intervention d'un décret en Conseil d'État pour la mise en application des dispositions relatives à la discipline des greffiers. Le choix d'une telle procédure semble s'imposer dès lors que sont en jeu des questions statutaires. L'article 38 a été adopté par le Sénat sans modification.

La Commission l'a adopté également sans modification.

TITRE IV BIS

DISPOSITIONS DIVERSES RELATIVES AUX NOTAIRES

[Division et intitulé nouveaux]

Pour pallier les conséquences de l'évolution démographique des notaires, qui peut se traduire par une proximité très importante entre les instances disciplinaires et les notaires susceptibles de faire l'objet de poursuites, il est proposé de modifier l'organisation du contentieux disciplinaire des 7 950 notaires.

1. Un encadrement disciplinaire substantiel

Le respect des obligations professionnelles des notaires et du devoir général d'appliquer les lois et règlements est assuré par un droit disciplinaire spécifique dont la mise en œuvre est confiée aux organismes professionnels et au tribunal de grande instance. Les principes du droit disciplinaire sont définis dans l'ordonnance n° 45-2490 du 28 juin 1945 relative à la discipline des notaires et de certains officiers ministériels, mais ils ont été modifiés de façon importante par la loi n° 73-546 du 25 juin 1973 relative à la discipline et au statut des notaires et de certains officiers ministériels.

Le contrôle de la profession est assuré conjointement par la Chancellerie et les parquets d'une part, et par les chambres de discipline constituées au sein des quatre-vingt-quinze chambres des notaires (74), les trente-trois conseils régionaux et le Conseil supérieur du notariat d'autre part. L'examen attentif des rapports d'inspection de comptabilité, le traitement des plaintes des clients constituent une mission essentielle des chambres de discipline. Ces dernières sont aidées dans cette tâche par les conseils régionaux et les caisses de garantie qui sont concernées par les conséquences des défaillances des notaires et associés à la mise en œuvre de certaines mesures de sûreté et à l'application des sanctions disciplinaires emportant interdiction d'exercer.

Six peines disciplinaires peuvent être prononcées à l'encontre d'un notaire fautif : le rappel à l'ordre, la censure simple, la censure devant la chambre assemblée, la défense de récidiver, l'interdiction temporaire et la destitution. La chambre de discipline ne peut prononcer que les trois premières peines, généralement dénommées pour cette raison « peines de discipline intérieure ». Ces peines peuvent être accompagnées d'une inéligibilité temporaire aux fonctions de membres de chambre, organismes et conseils professionnels. La durée doit être précisée par la décision et ne peut excéder dix années. Le tribunal de grande instance statuant disciplinairement peut prononcer l'une des six peines. La juridiction qui prononce une peine d'interdiction ou de destitution commet un administrateur qui remplace dans ses fonctions l'officier public ou ministériel interdit ou destitué.

La sanction disciplinaire ayant pour double fondement la défense des intérêts du public et celle de la profession, l'action est partagée entre le ministère public et les représentants de cette dernière. Une innovation importante de la réforme de 1973 est l'extension de l'appel à toutes les sanctions disciplinaires.

En vertu de l'article 6 de l'ordonnance du 28 juin 1945 précitée, l'action disciplinaire devant la chambre de discipline est exercée, en principe, par le syndic qui joue le rôle de ministère public. Il agit soit d'office et le plus souvent à la demande du président de chambre, soit sur l'invitation du procureur de la République, soit encore sur demande d'un membre de la chambre ou des parties intéressées, c'est-à-dire des victimes des agissements du notaire poursuivi. La partie lésée ne peut saisir directement la chambre de discipline, puisque celle-ci ne peut statuer sur une demande en dommages-intérêts et que seule une telle demande peut justifier l'exercice de l'action disciplinaire par un particulier.

Le tribunal de grande instance statuant disciplinairement est saisi le plus souvent par le procureur de la République. Le procureur agit en raison des faits dont il a connaissance à la suite de plaintes qu'il a reçues ou des rapports d'inspection qui lui ont été communiqués. Il peut aussi saisir le tribunal au vu d'une délibération de la chambre de discipline constatant que le notaire poursuivi encourt une peine relevant du tribunal. Mais l'action disciplinaire peut être exercée devant le tribunal de grande instance par le président de la chambre de discipline agissant au nom de celle-ci sans qu'il soit nécessaire que, dans cette hypothèse, des poursuites disciplinaires aient été préalablement engagées devant la chambre des notaires. L'action disciplinaire devant le tribunal appartient également au président de chambre agissant au nom de celle-ci.

En 2000, les chambres avaient prononcée vingt sanctions et les tribunaux de grande instance deux interdictions temporaires à l'encontre des notaires. En 2001, dix-sept sanctions avaient été prononcées à l'encontre de notaires, dont huit rappels à l'ordre, six censures simples, une censure devant la chambre assemblée et deux interdictions temporaires.

2. Une crédibilité renforcée

Le renforcement de la transparence du régime disciplinaire des notaires permet de répondre aux exigences de crédibilité de plus en plus fortes dans les professions juridiques et judiciaires. Il passe par deux éléments : le transfert de la compétence disciplinaire des instances départementales aux instances régionales, plus éloignées des conflits locaux ; en conséquence, la création d'une formation disciplinaire au sein de ces instances régionales.

Article 38 bis (nouveau)

(art. 4 de l'ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945)


Compétences des chambres des notaires

Cet article modifiant l'article 4 de l'ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945 relative au statut du notariat transfert la compétence disciplinaire de la chambre des notaires au conseil régional. Sur le même fondement que les dispositions relatives à la discipline des avocats, cet article « éloigne » le notaire mis en cause dans une procédure disciplinaire par ses pairs.

Aujourd'hui, les chambres des notaires établissent, en ce qui concerne les usages de la profession et les rapports des notaires tant entre eux qu'avec la clientèle, un règlement qui sera soumis à l'approbation du garde des Sceaux, ministre de la justice. Elles prononcent ou proposent, suivant les cas, l'application aux notaires de mesures de discipline. Elles préviennent ou concilient tous différends d'ordre professionnel entre notaires du département, et tranchent, en cas de non-conciliation, ces litiges par des décisions qui seront exécutoires immédiatement. Elles sont chargées d'examiner toutes réclamations de la part des tiers contre les notaires à l'occasion de l'exercice de leur profession, et de réprimer par voie disciplinaire les infractions, sans préjudice de l'action devant les tribunaux s'il y a lieu, ainsi que de vérifier la tenue de la comptabilité dans les études de notaires. Elles donnent leur avis sur les actions en dommages-intérêts intentées contre les notaires en raison d'actes de leurs fonctions et sur les difficultés touchant le règlement des honoraires et vacations, ainsi que sur tous différends soumis à cet égard au tribunal de grande instance. Elles délivrent ou refusent par une décision motivée tous certificats de bonnes mœurs et capacité à elle demandés par les aspirants aux fonctions de notaire. Elles reçoivent en dépôt les états des minutes dépendant des études supprimées. Enfin, elles sont chargées du recrutement et de la formation professionnelle des clercs et employés, des conditions de travail dans les études et, sous réserve de dispositions législatives ou réglementaires particulières, des salaires et accessoires du salaire.

Compte tenu du faible nombre de notaires dans certains départements, il apparaît nécessaire d'« éloigner » les questions de discipline de l'échelon départemental. Cette logique est conforme aux garanties d'impartialité au sens de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ainsi, les chambres départementales ne pourront plus prononcer ou proposer l'application aux notaires de mesures de discipline, mais seulement dénoncer les infractions disciplinaires dont elles auront connaissance. Elles continueront cependant d'examiner toutes réclamations de la part des tiers contre les notaires à l'occasion de l'exercice de leur profession.

En revanche, le présent article prévoit d'étendre le pouvoir de contrôle exercé par les chambres départementales en leur confiant le soin non seulement de vérifier la tenue de la comptabilité des études, comme c'est déjà le cas aujourd'hui, mais aussi, plus largement, de vérifier l'organisation et le fonctionnement des offices. Du simple contrôle, les chambres départementales passent à un embryon d'audit.

La Commission a adopté l'article 38 bis sans modification.

Article 38 ter (nouveau)

(art. 5-1 de l'ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945)


Compétence disciplinaire des conseils régionaux des notaires

Cet article attribue aux conseils régionaux des notaires la compétence disciplinaire relevant auparavant des chambres départementales. Il est ainsi créé en leur sein une chambre de discipline qui prononcera ou proposera, selon le cas, des sanctions disciplinaires.

En l'état du droit, le conseil régional des notaires représente l'ensemble des notaires du ressort de la cour d'appel en ce qui touche à leurs droits et intérêts communs. Il prévient ou concilie tous différends d'ordre professionnel entre les chambres des notaires ou entre les notaires du ressort n'exerçant pas dans le même département et tranche, en cas de non-conciliation, ces litiges par des décisions qui sont immédiatement exécutoires. Il donne son avis sur les règlements établis par les chambres des notaires de son ressort de cour d'appel. Il désigne les notaires composant la commission chargée de faire subir l'examen professionnel de notaire à tous les aspirants du ressort. Il désigne également les membres composant le conseil d'administration de la caisse régionale de garantie et le délégué appelé à faire partie du Conseil supérieur. Le conseil régional remplit en outre les fonctions réservées à la commission de contrôle de la comptabilité des notaires. Siégeant en comité mixte, il règle toutes questions concernant le fonctionnement des écoles de notariat existant dans le ressort, les institutions et œuvres sociales intéressant le personnel des études.

Le présent projet de loi ne procède donc pas à la création d'un nouvel échelon, comme c'est le cas pour les avocats. De plus, l'échelon régional du notariat connaît déjà de questions de litiges entre chambres ou entre notaires. En outre, la caisse régionale de garantie peut désigner une sorte de surveillant ou de curateur auprès du notaire dont le comportement paraît dangereux. Cette mesure qui ne préjuge pas de la responsabilité disciplinaire du notaire a un but préventif. Elle entraîne pourtant une sérieuse limitation à l'indépendance de l'intéressé et s'apparente donc par ses effets, à une mesure disciplinaire.

La nouvelle chambre de discipline comprendra au moins cinq membres, qui seront désignés parmi les délégués au conseil régional. Les présidents du conseil régional et les présidents de chambres départementales seront désignés d'office. La chambre de discipline comportera de manière subsidiaire les vice-présidents des chambres départementales. Elle sera présidée par le président du conseil régional. Les conseils les plus importants pourront désigner plus de cinq membres, tandis que le nombre minimal de membres, dans les départements d'outre-mer, est abaissé à trois.

La capacité de conseil de cette chambre régionale restreinte sera plus importante que celle des actuelles chambres départementales. En effet, elle aura plus d'affaires à traiter et sera donc mieux informée. Elle pourra également unifier les pratiques. Compte tenu de cet éloignement et de cet effet de volume, l'appel à un avocat sera facilité et le respect des procédures s'en trouvera renforcé.

Un décret en Conseil d'État précisera, notamment, les modalités de désignation des membres des chambres de discipline.

La Commission a adopté l'article 38 ter sans modification.

Article additionnel après l'article 38 ter (nouveau)

(art. 6-1 de l'ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945)


Responsabilité civile professionnelle des notaires

L'article 13 du décret n° 55-604 du 20 mai 1955 relatif aux officiers publics et ministériels et certains auxiliaires de justice prévoit que chaque notaire est tenu d'assurer sa responsabilité professionnelle dans les conditions fixées par un arrêté conjoint du ministre de l'économie et des finances et du garde des Sceaux. Les caisses régionales de garantie peuvent également s'assurer contre les risques qu'elles assurent au titre de la garantie de représentation des fonds et de la responsabilité civile des notaires.

Ce mécanisme combiné d'assurance individuelle et d'assurance collective, qui intervient par exemple en cas de faute intentionnelle, diffère du mécanisme qui prévaut pour les huissiers de justice ou même, si l'on sort de la catégorie des officiers publics et ministériels, pour les experts-comptables. Ainsi, le dernier alinéa de l'article 2 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers, tel que modifié par l'article 4 de la loi n° 92-644 du 13 juillet 1992 (75) dispose que « la chambre nationale des huissiers de justice garantit leur responsabilité professionnelle, y compris celle encourue en raison de leurs activités accessoires prévues à l'article 20 du décret n° 56-222 du 29 février 1956 relatif au statut des huissiers de justice dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État ». L'article 17 de l'ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945 portant institution de l'ordre des experts-comptables et réglementant le titre et la profession d'expert-comptable prévoit que les experts-comptables, qu'ils soient personnes physiques ou personnes morales, sont tenus, pour garantir leur responsabilité civile professionnelle, de souscrire un contrat d'assurance. Les conséquences pécuniaires de la mise en jeu de leur responsabilité sont, par ailleurs, garanties par un contrat d'assurance souscrit par le conseil supérieur de l'ordre.

Si dans les faits un contrat de groupe est souscrit au niveau national par le Conseil supérieur du notariat, d'une part, il existe des exceptions - certains conseils régionaux ont leur propre contrat - et, d'autre part, un notaire pourrait décider de ne souscrire qu'à un contrat individuel sur le fondement du décret de 1955. Cette situation ne protège pas de manière optimale tous les clients des notaires contre des sinistres.

C'est pourquoi le rapporteur suggère d'imposer une obligation légale de souscription à un contrat national d'assurance couvrant la responsabilité civile professionnelle des notaires. Cela permettrait au Conseil supérieur du notariat de négocier dans les meilleures conditions un contrat pour l'ensemble de ses ressortissants. Ainsi, les clauses du contrat et les conditions de mise en œuvre de la garantie seraient harmonisées et la mutualisation du risque par la création d'un système de prime unique assurée.

Il vous est donc proposé d'inscrire dans l'ordonnance du 2 novembre 1945 la garantie de la responsabilité civile professionnelle des notaires par la souscription par le Conseil supérieur du notariat d'une assurance nationale obligatoire ; et, pour prendre en compte les spécificités régionales, elle propose également de permettre aux conseils régionaux de souscrire des garanties complémentaires.

Tel est l'objet de cet article additionnel, adopté par la Commission (amendement n° 17).

Article additionnel après l'article 38 ter (nouveau)

(art. 8 de l'ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945)


Compétence disciplinaire de la chambre interdépartementale de Paris

Il convient de prévoir expressément une disposition permettant de prendre en compte, en matière disciplinaire, les spécificités de la chambre inter-départementale de Paris, qui réunit les départements de Paris, des Hauts-de-Seine, du Val-de-Marne et du Val-d'Oise. En effet, conformément à l'article 8 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 précitée, dans le ressort de la cour d'appel de Paris, la chambre interdépartementale des notaires de Paris remplit, pour ces notaires, le rôle de conseil régional, indépendamment du conseil régional qui est constitué pour le reste du ressort.

La Commission a adopté à l'initiative du rapporteur un amendement, afin de prendre en compte la situation particulière de la chambre interdépartementale des notaires de Paris lorsqu'elle siège en tant que formation disciplinaire (amendement n° 18).

TITRE V

DISPOSITIONS RELATIVES AUX EXPERTS JUDICIAIRES

Sans constituer une profession à part entière, les experts judiciaires (76) participent aux missions de la justice. En effet, la justice peut avoir besoin d'un avis technique dans des affaires pénales, civiles ou commerciales. Elle fait alors appel à un technicien qui peut être un salarié, un retraité, un fonctionnaire ou un membre d'une profession libérale qui, lorsqu'il est nommé par un juge ou un tribunal, devient expert judiciaire ; sa compétence est limitée, techniquement et dans le temps, à l'affaire qui lui est confiée. Pour ce faire, il existe auprès de chaque cour d'appel une liste appelée « liste des experts auprès de la cour d'appel » recouvrant le plus largement possible toutes les spécialités, ainsi qu'une liste nationale établie par la Cour de cassation.

Le garde des Sceaux a annoncé, lors de l'examen du présent projet de loi devant le Sénat, le 2 avril 2003, que la formation des experts sera, comme celle des avocats, rénovée de manière importante. Le présent titre procède à un renforcement de leur encadrement, garantissant la crédibilité de leurs interventions. Cette question est d'autant plus importante que les experts sont de plus en plus amenés à entrer en concurrence avec les experts des autres États membres de l'Union européenne.

La procédure en vigueur n'offre pas une sélection suffisante et adaptée. D'abord, les techniques mises en œuvre dans le cadre des expertises ne cessent de se sophistiquer et, subséquemment, les missions confiées aux experts deviennent plus compliquées. Ensuite, la diffusion du principe du contradictoire dans tous les compartiments de notre droit atteint également l'expertise, qui doit en conséquence s'y adapter.

Article 39

(art. 1er de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971)


Choix des experts par les juges

Dans l'état du droit, l'article 1er de la loi du 29 juin 1971 ne concerne que la matière civile. Il dispose que les juges peuvent choisir comme expert toute personne sous les seules restrictions prévues par la loi ou les règlements.

En premier lieu, le présent article pose le principe général selon lequel un expert peut être choisi par le juge « sous les seules restrictions prévues par la loi ou les règlements », que cet expert soit appelé à intervenir en matière civile ou en matière pénale. Le rapporteur rejoint la commission des Lois du Sénat pour souhaiter que soient codifiées dans le code de l'organisation judiciaire les dispositions de la loi de 1971 dans le cadre de l'habitation accordée au Gouvernement par la loi n° 2003-591 du 2 juillet 2003 habilitant ce dernier à simplifier le droit. En effet, ces dispositions telles que modifiées par le présent projet de loi sont appelées à régir l'ensemble des experts judiciaires, quel que soit leur domaine d'intervention.

Les restrictions prévues par la loi ou les règlements peuvent tenir à l'obligation de choisir l'expert sur une liste : c'est le cas en matière pénale en vertu du code de procédure pénale et pour les experts en accidents médicaux dans le cadre de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé ou dans le domaine des expertises médicales sur le fondement des articles L. 1142-9 à L. 1142-13 du code de la santé publique. Se pose alors la question du choix d'un expert hors des listes dressées par les cours d'appel ou la Cour de cassation. L'inscription sur la liste offre un cadre précis de sélection des experts, même si elle peut ne pas offrir une garantie absolue de qualité. Les modifications proposées par le présent projet de loi renforceront cette garantie. Il apparaît néanmoins nécessaire de laisser aux juges une certaine marge de manœuvre, dès lors qu'ils se trouvent confrontés à des cas très particuliers et à des matières très spécialisées, pour lesquels il n'existe pas a priori d'expert inscrit.

Ces restrictions peuvent également tenir à l'obligation de recourir à un expert agréé : c'est le cas lorsque le juge fait procéder à des identifications par empreintes génétiques en application de l'article 16-12 du code civil. D'autres restrictions peuvent être encore mentionnées, telles que celles prévues par la loi n° 72-565 du 5 juillet 1982 pour les experts en matière agricole ou par les articles 83 à 90 de la loi n° 85-99 du 25 janvier 1985 pour les experts en diagnostic d'entreprise.

En second lieu, le présent article précise le champ d'activité des experts judiciaires : ils sont chargés de procéder à des constatations, de fournir une consultation au juge ou de réaliser une expertise. La loi de 1971 était muette sur la question. La modification proposée vient donc opportunément reprendre les termes du code de procédure civile pour les étendre à l'ensemble des expertises. En effet, ce code précise, respectivement dans ses articles 249, 256 et 263 que :

-  « Le juge peut charger la personne qu'il commet de procéder à des constatations. Le constatant ne doit porter aucun avis sur les conséquences de fait ou de droit qui peuvent en résulter » ;

-  « Lorsqu'une question purement technique ne requiert pas d'investigations complexes, le juge peut charger la personne qu'il commet de lui fournir une simple consultation » ;

-  « L'expertise n'a lieu d'être ordonnée que dans le cas où des constations ou une consultation ne pourraient suffire à éclairer le juge ».

L'article 39 a été adopté par le Sénat sans modification.

Le rapporteur, pour souligner le changement de philosophie proposé par le présent projet de loi, propose de modifier la rédaction de cet article de telle sorte que le choix d'un expert sur la liste soit présenté comme la règle et le choix d'un expert hors liste comme l'exception. En effet, il convient de tirer toutes les conséquences de la rénovation du système d'inscription et de sélection des experts.

La Commission a donc adopté un amendement de réécriture complète de l'article, présenté par le rapporteur, afin de préciser que le juge désigne comme expert judiciaire une personne inscrite sur les listes dressées par les cours d'appel, sans toutefois exclure la possibilité d'avoir recours à toute autre personne de son choix (amendement n° 19) puis la Commission a rejeté en conséquence un amendement de M. Georges Fenech obligeant le juge à motiver le recours à une personne non inscrite sur les listes et à attribuer aux experts la qualité de collaborateur occasionnel du service public de la justice.

Article 40

(art. 2 de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971)


Établissement des listes d'experts

L'établissement de listes d'experts est né d'une pratique des cours d'appel qui souhaitaient faciliter l'exercice de leur choix. Cette pratique a été consacrée, en matière pénale, par le code de procédure pénale (loi n° 57-1426 du 31 décembre 1957), puis, en matière civile, par la loi n° 71-498 du 29 juin 1971 relative aux experts judiciaires et son décret d'application n° 74-1184 du 31 décembre 1974.

Dans la législation actuelle, l'article 2 de la loi du 29 juin 1971 prévoit que, pour la seule matière civile, une liste nationale d'experts est dressée par le bureau de la Cour de cassation et qu'une liste locale est établie par chaque cour d'appel. L'article 5 de ladite loi précise que l'expert déjà inscrit sur une de ces deux listes n'a pas à renouveler chaque année sa demande d'inscription.

Or, pour répondre au double défi d'évolution permanente des techniques d'expertise et d'exigence croissante de respect du principe du contradictoire dans les procédures, il est proposé que l'inscription initiale sur la liste des experts, en matière civile comme en matière pénale, sera dorénavant probatoire et fera l'objet d'un réexamen au bout de deux années. L'inscription, valable pour une durée de cinq ans est renouvelable. Elle est soumise à l'évaluation de l'expérience de l'intéressé, de sa connaissance des principes directeurs du procès et des règles de procédures applicables aux mesures d'instruction confiées à un technicien. Le Sénat a soumis, de surcroît, cette inscription à l'avis motivé d'une commission associant des représentants des juridictions et des experts. Le rapporteur de sa commission des Lois, à l'occasion du débat, a en effet estimé que « les procédures actuelles, qui prévoient la consultation des assemblées générales des juridictions, se sont révélées inadaptées. La commission pourra, elle, procéder à un véritable examen des candidatures et vérifier la connaissance par les intéressés des règles du procès. Cette commission ne pourra bien sûr qu'émettre un avis consultatif. »

De plus, le renouvellement annuel automatique sur les listes est remplacé par une procédure de demande de réinscription par l'intéressé. Elle sera accompagnée d'une nouvelle instruction du dossier sur le fondement des expériences acquises. La réinscription sera valable pour une durée de cinq ans, renouvelable éventuellement. Le Sénat a souhaité préciser que cette réinscription est soumise à l'examen d'une nouvelle candidature.

Enfin, l'accès à la liste nationale ne sera ouvert qu'aux experts qui auront fait l'objet d'une inscription sur une liste locale pendant une durée minimale, dont la détermination était renvoyée par le texte initial du projet de loi à un décret en Conseil d'État. La durée de l'inscription initiale sur la liste nationale était, en revanche, fixée à dix ans renouvelable.

Le Sénat, à l'initiative de sa commission des Lois et contre l'avis du Gouvernement, a souhaité, d'une part, fixer la durée minimale d'inscription sur une liste locale ouvrant droit à inscription sur la liste nationale à trois ans et, d'autre part, limiter la durée d'inscription sur la liste nationale à sept ans. Pour justifier ce choix, le rapporteur de la commission des Lois du Sénat, lors de la séance du 2 avril 2003, a considéré qu'« il est souhaitable que les pratiques des experts fassent périodiquement l'objet d'un examen, même s'il est tout à fait normal que les experts de la liste nationale, qui ont une expérience plus vaste, soient inscrits pour une période plus longue que celle qui est prévue pour les experts de cour d'appel. La différence qui existe entre cinq et sept ans me semble suffisamment significative. En outre, une durée de dix ans paraît excessive à nombre d'entre nous. Il a, par ailleurs, soumis la réinscription sur cette liste, pour la même durée, à l'examen d'une nouvelle candidature de l'expert. »

Enfin, le présent article soumet toute décision de refus de réinscription à motivation.

Pour des besoins de coordination, il est nécessaire de modifier la rédaction l'article L. 111-4 du code de l'organisation judiciaire, qui précise qu'« ainsi qu'il est dit à l'article 2 de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971, " le bureau de la Cour de cassation dresse la liste nationale des experts " ». La Commission a adopté un amendement de coordination présenté par le rapporteur (amendement n° 40).

Elle a ensuite adopté l'article 40 ainsi modifié.

Article 40 bis (nouveau)

(art. 3 de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971)


Dénomination des experts inscrits sur une liste

Le Sénat, à l'initiative de sa commission des Lois et avec un avis favorable du Gouvernement, a supprimé toute référence au code de procédure pénale dans l'article 3 de la loi du 29 juin 1971, compte tenu de la suppression de la limitation à la matière civile opérée par le présent projet de loi aux articles 1er et 2 de cette même loi.

En effet, en matière pénale, les listes d'experts ont été prévues par l'article 157 du code de procédure pénale. C'est la loi de 1971 qui a ensuite posé le principe de listes d'experts en matière civile. Avec le présent projet de loi, les listes instituées par l'article 157 du code de procédure pénale et par la loi de 1971 seront les mêmes. Il est donc paru opportun de supprimer la référence aux listes instituées par l'article 157 du code de procédure pénale pour bien marquer le fait que les seules listes d'experts sont désormais celles figurant dans la loi de 1971.

La Commission a adopté l'article 40 bis sans modification.

Article 41

(art. 5 de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971)


Retrait et radiation des experts

L'actuel article 5 de la loi du 29 juin 1971 règle la question de la radiation des experts. Après avoir disposé que la réinscription d'un expert est automatique d'une année sur l'autre, il fixe la procédure et détermine les cas qui entraînent la radiation, seule à même de mettre fin à l'inscription d'un expert sur la liste. Ainsi, la radiation peut être prononcée, en cours d'année, après que l'intéressé a fait valoir ses observations. Il peut être assisté d'un avocat. Trois cas, que l'on retrouve dans nombre de professions, emportent radiation : l'incapacité légale de l'intéressé, une faute professionnelle, une condamnation pour des faits contraires à l'honneur, à la probité et aux bonnes mœurs.

D'une part, le présent article supprime le caractère automatique de la réinscription des experts, conformément aux dispositions contenues dans l'article 40 du présent projet de loi.

D'autre part, il élargit le champ et précise la portée des cas pouvant emporter radiation. Le cas de la radiation à la demande de l'expert lui-même est explicitement prévu. Le cas de l'incapacité légale est repris tel quel. Enfin, est ajouté le cas de la faute disciplinaire telle que définie par l'article 6-2 de la loi de 1971 proposé par l'article 43 du présent projet de loi et qui peut être rapprochée de l'actuelle faute professionnelle, ce qui vise tout manquement à la probité ou à l'honneur.

Par ailleurs, la radiation pour cause d'incapacité légale ou de faute disciplinaire entraînera automatiquement la radiation de la liste de la cour d'appel. Un décret en Conseil d'État fixera la procédure applicable à la radiation de la liste nationale d'un expert qui aura été radié d'une liste de cour d'appel. Ce même décret déterminera les conditions dans lesquelles la procédure engagée à l'encontre d'un expert et susceptible de déboucher sur sa radiation peut s'accompagner d'une suspension provisoire.

Le Sénat a opportunément adopté un amendement apportant deux modifications substantielles au texte initial du projet de loi.

En premier lieu, il a remplacé le cas de la radiation à la demande de l'expert par une procédure de retrait. Le retrait est décidé par le Premier président de la cour d'appel ou le Premier président de la Cour de cassation, à la demande de l'expert ou à l'initiative du Premier président lorsque le retrait découle de circonstances telles que l'éloignement prolongé, la maladie ou des infirmités graves et permanentes. Il s'agit d'une reprise de l'article 17 du décret du 31 décembre 1974 en vertu duquel « au cas où l'expert demande son retrait de la liste pour des causes exclusives de toute faute disciplinaire, ou si ce retrait est rendu nécessaire par des circonstances de faits telles que l'éloignement prolongé, la maladie ou des infirmités graves et permanentes, le Premier président de la cour d'appel ou de la Cour de cassation peut, à titre provisoire et en cours d'année, décider le retrait de la liste ». Ainsi, la loi de 1971 permettra de distinguer clairement ce qui relève proprement de l'impossibilité pour l'expert de poursuivre sa mission et ce qui découle d'une faute.

En second lieu, le Sénat a établi une symétrie entre la radiation de la liste nationale et celle de la liste de la cour d'appel. Ainsi, la première emportera la seconde de plein droit et inversement.

La Commission a adopté l'article 41 sans modification.

Article 42

(art. 6 de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971)


Serment des experts

L'article 6 prévoit que les experts prêtent serment devant la cour d'appel du ressort de leur domicile lors de leur inscription. Ce serment inclut l'engagement d'accomplir leur mission, de faire leur rapport et de donner leur avis en leur honneur et conscience. Il les dispense de prêter le serment prévu à l'article 308 du code de procédure civile tant qu'ils sont inscrits sur la liste locale ou nationale, article qui imposait à toute personne commise pour une expertise de prêter serment préalablement à l'exécution de la mission. Le présent article reprend ces dispositions en supprimant la référence à l'article 308 du code précité devenue obsolète. En effet, cet article de l'ancien code a été abrogé par le décret n° 73-1122 du 17 décembre 1973 instituant une quatrième série de dispositions destinées à s'intégrer dans le nouveau code de procédure civile.

Le Sénat, avec un avis favorable du Gouvernement, a complété le présent article afin de préciser que le serment doit être à nouveau prononcé lorsqu'une nouvelle inscription intervient après une radiation.

L'obligation de prêter serment pour les personnes désignées en dehors des listes d'experts relève aujourd'hui de l'article 157 du code de procédure pénale en matière pénale et de la rédaction en vigueur de l'article 6 de la loi du 29 juin 1971 relative aux experts judiciaires, en matière civile. Il résulte de l'abrogation de l'article 308 du code de procédure civile et de l'interprétation jurisprudentielle subséquente de l'article 6 de la loi du 29 juin 1971 précitée, une mise en œuvre très différente de cette obligation selon les cours d'appel.

La nouvelle rédaction de l'article 6 de la loi telle qu'adoptée par le Sénat supprime incidemment l'obligation de prestation de serment des experts désignés « hors liste » en matière civile. Dès lors, coexistent deux systèmes différents, en matière civile et pénale. Pourtant, la prestation de serment constitue une garantie importante du respect des obligations déontologiques incombant aux experts. Aussi, il est important de l'imposer à l'ensemble des techniciens amenés à collaborer avec la justice.

Pour assurer une plus grande sécurité juridique et affirmer le principe de la responsabilité des experts quels qu'ils soient, le rapporteur propose que le serment s'impose également aux experts choisis hors des listes chaque fois qu'ils sont commis par le juge. La Commission a donc adopté un amendement du rapporteur soumettant les experts désignés hors liste à l'obligation de prestation de serment (amendement n° 21), puis adopté l'article 42 ainsi modifié.

Article 42 bis (nouveau)

(art. 6-1 de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971)


Expertises aux fins d'analyse des empreintes génétiques

Cet article a été adopté par le Sénat, à l'initiative de sa commission des Lois avec un avis favorable du Gouvernement. Il tire les conséquences de la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure.

En effet, l'article 6-1 de la loi du 29 juin 1971 précitée prévoit que seuls les experts judiciaires inscrits sur les listes dressées par les cours d'appel ou par la Cour de cassation peuvent procéder à l'identification d'une personne par ses empreintes génétiques.

Or la loi pour la sécurité intérieure a prévu une exception en ce qui concerne les analyses opérées sur les condamnés ou sur des suspects au cours de la procédure pénale. Dans son article 30, elle conforte les opérations de prélèvement externe et de signalisation que les officiers de police judiciaire (opj) sont appelés à réaliser dans le cadre des enquêtes judiciaires. À cet effet, elle a inséré, dans le code de procédure pénale, trois articles : l'article 55-1 reconnaît à l'opj, ou à une personne placée sous son contrôle, le droit de procéder, sur toute personne concernée par la procédure, à des « prélèvements externes » au cours d'une enquête de flagrance ; l'article 76-2 autorise ces prélèvements, selon les mêmes modalités, au cours de l'enquête préliminaire, à la demande ou sur autorisation du procureur de la République ; l'article 154-1 prévoit également cette possibilité, sur commission rogatoire délivrée par le juge d'instruction, dans le cadre d'une information judiciaire.

Pour éviter toute confusion avec les prélèvements effectués dans le cadre de procédure pénale, il est utile de mentionner une telle réserve dans la loi de 1971.

La Commission a adopté l'article 42 bis sans modification.

Article 43

(art. 6-2 et 6-3 de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971)


Procédure disciplinaire et responsabilité civile

Cet article insère deux nouveaux articles dans la loi du 29 juin 1971 : le premier, l'article 6-2, détermine la procédure disciplinaire applicable aux experts ; le second, l'article 6-3, fixe la durée de prescription de leur responsabilité civile.

Article 6-2 de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971

Procédure disciplinaire

Aujourd'hui, la loi du 29 juin 1971 ne comporte aucune disposition relative à la procédure disciplinaire applicable aux experts. L'article 5 prévoit seulement la radiation de l'expert en cas de faute professionnelle grave et de condamnation pour des faits contraires à l'honneur, à la probité et aux bonnes mœurs. L'article 26 du décret du 31 décembre 1974 précité précise que commet une faute professionnelle grave l'expert qui n'accepte pas, sans motif légitime, de remplir sa mission ou qui ne l'exécute pas dans les délais prescrits après mise en demeure.

Le présent article définit le régime disciplinaire des experts judiciaires. L'échelle des sanctions est précisée. Elle comprend l'avertissement, la radiation temporaire, la radiation avec privation définitive du droit d'être inscrit sur une liste et le retrait de l'honorariat. Ces termes reprennent la rédaction de l'article 184 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat.

Est compétente pour prononcer ces sanctions l'autorité qui a procédé à l'inscription de l'expert, à savoir, selon le cas, la cour d'appel ou le bureau de la Cour de cassation, qui statue alors en commission de discipline. Ces décisions peuvent faire l'objet d'un recours devant une chambre de cour d'appel ou de la Cour de cassation, qui se réunissent dans ce cas en formation de jugement. Auparavant ce recours était ouvert par les articles 35 et 36 du décret de 1974. Enfin, il est précisé qu'un décret en Conseil d'État fixera les règles de procédure applicables à l'instance disciplinaire.

Le Sénat a adopté une série de modifications avec un avis favorable du Gouvernement.

En premier lieu, il a adopté un amendement de coordination avec l'introduction, à l'article 5 de la loi de 1971, de la procédure de retrait. Ainsi, dès lors qu'est établie une distinction entre retrait et radiation, il apparaît logique de préciser que le retrait d'un expert d'une liste ne fait pas obstacle à des poursuites disciplinaires s'il a commis des actes répréhensibles pendant qu'il figurait sur la liste. En effet, il ne faut pas que la procédure de retrait soit utilisée par des experts qui pourraient faire l'objet de poursuites disciplinaires.

En deuxième lieu, le Sénat a assoupli le régime applicable à la radiation temporaire. Dans le texte initial du projet de loi, la radiation temporaire peut être prononcée dans la limite de la durée d'inscription restant à courir. Or, si elle intervient en fin de période d'inscription, l'autorité disciplinaire n'aura plus guère le choix qu'entre une radiation pour une période très courte et une radiation définitive. Comme pour les avocats, il est préférable que la durée de la radiation temporaire soit fixée dans une limite de trois ans.

Enfin, le Sénat, a précisé les effets d'une radiation. Désormais, un expert radié de la liste, lorsqu'il souhaite être réinscrit, devra se soumettre de nouveau à une période probatoire. De plus, le délai minimum de trois ans d'inscription sur une liste de cour d'appel ouvrant droit à une inscription sur la liste nationale devra être explicitement calculé à partir de la réinscription qui a suivi la radiation.

Article 6-3 de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971

Responsabilité civile des experts

La loi de 1971 ne contient aucune disposition relative à la responsabilité civile des experts. Les articles 1382 et 1383 du code civil, qui définissent le droit commun de la responsabilité délictuelle et quasi délictuelle, trouvent donc à s'appliquer à l'action des experts (77). Sa responsabilité étant engagée sur un fondement délictuel ou quasi délictuel, l'expert judiciaire n'est pas en relation contractuelle avec les parties qui, pourtant, le rémunèrent. Sa responsabilité est donc soumise à l'article 2270-1 du code civil, résultant de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation, article qui prévoit que les « actions en responsabilité civile extra-contractuelle se prescrivent par dix ans à compter de la manifestation du dommage ou de son aggravation ».

Le présent article vient préciser le régime qui sera dorénavant applicable de manière spécifique aux experts nommés par un magistrat : la durée de prescription est fixée expressément à dix ans ; il est proposé d'en faire courir le délai à compter de la fin de la mission de l'expert. En revanche, lorsqu'un expert est désigné par l'une des parties, il se trouve avec elle dans une relation contractuelle à laquelle s'applique une règle de prescription trentenaire.

La Commission a adopté l'article 43 sans modification.

Article 43 bis (nouveau)

(art. L. 813-1 et L. 813-2 du code de commerce)


Régime d'inscription sur les listes d'experts en diagnostic d'entreprise

Dans un souci de coordination et d'harmonisation entre les différents textes relatifs aux experts, le présent article, adopté par le Sénat avec un avis favorable du Gouvernement, supprime les deux dernières phrases du dernier alinéa de l'article L. 813-1 et l'article L. 813-2 du code de commerce.

En effet, le code de commerce définit un régime spécifique d'inscription et de radiation des listes d'experts judiciaires pour les experts en diagnostic d'entreprise. Ces experts sont inscrits pour trois ans, après avis motivé d'une commission nationale. Le présent projet de loi redéfinit les conditions d'inscription sur les listes pour l'ensemble des experts, ce qui permettra un meilleur contrôle de leurs compétences et qualités. Il est apparu dès lors inutile de conserver un régime spécifique pour les experts en diagnostic d'entreprise. Le présent article supprime donc la périodicité spécifique d'inscription de trois ans, de manière à aligner le régime des experts en diagnostic d'entreprise sur celui de l'ensemble des experts, qui seront inscrits pour deux ans à titre probatoire, puis pour cinq ans.

Néanmoins, pour garantir la spécificité de la qualité d'expert en diagnostic d'entreprise et assurer un recrutement de qualité, est conservé l'avis motivé d'une commission spécifique. Cette dernière, la commission nationale d'inscription et de discipline des mandataires judiciaires au redressement et à la liquidation des entreprises serait donc amenée à donner son avis sur l'inscription des experts en diagnostic d'entreprise sur les listes dressées par les cours d'appel. Dans un souci d'efficacité et pour éviter que cette tâche ne vienne peser sur les autres fonctions de la commission nationale, en particulier sur celles relatives à la discipline des mandataires judiciaires, il conviendrait de ne maintenir son avis que pour l'inscription sur la liste nationale des experts dressée par la Cour de cassation.

Par ailleurs, le rapporteur propose de modifier pour coordination la rédaction des articles L. 812-2-2 et L. 950-1 du code de commerce, qui font référence à l'article 813-2 ici abrogé.

La Commission a adopté un amendement du rapporteur réservant l'avis de la commission nationale d'inscription et de discipline des mandataires judiciaires au redressement et à la liquidation judiciaire des entreprises aux seules inscriptions des experts en diagnostic d'entreprises sur la liste nationale, les inscriptions sur les listes dans le ressort des cours d'appel relevant de la procédure de droit commun (amendement n° 22). Elle a également adopté un amendement de coordination du rapporteur (amendement n° 23).

Puis la Commission a adopté l'article 43 bis ainsi modifié.

Articles 43 bis, 43 ter, 43 quater et 43 quinquies (nouveaux)

(art. 157, 160 et 162 du code de procédure pénale)


Expertise en matière pénale

En vue d'harmoniser le régime applicable aux experts intervenant en matière pénale avec celui applicable en matière civile, qui est modifié par le présent, titre, le Sénat a adopté, avec un l'avis favorable du Gouvernement, trois amendements modifiant respectivement les articles 157, 160 et 162 du code de procédure pénale.

L'article 43 bis modifie l'article 157 du code précité. En effet, à l'origine, les listes d'experts ont été prévues par ce code pour le seul domaine pénal. Dans la pratique et depuis la loi du 29 juin 1971, les listes sont établies de façon commune pour la matière civile et la matière pénale. En conséquence, il est utile d'actualiser cet article 157.

L'article 43 ter modifie l'article 160 du code précité. Aujourd'hui, il existe deux formules de serment, l'une pour la matière civile (article 6 de la loi de 1971) et l'autre pour la matière pénale (article 160 du code de procédure pénale). Pour surmonter ces différences, le pouvoir réglementaire est intervenu pour fixer une seule formule (article 20 du décret du 31 décembre 1974 précité). Dès lors que les modifications apportées par le présent titre à la loi de 1971 permettent d'unifier le régime légal auquel sont soumis tous les experts, qu'ils interviennent dans le champ civil ou dans le domaine pénal, il est de bonne politique d'harmoniser les dispositions législatives relatives aux serments et donc de modifier les dispositions de l'article 160 du code de procédure pénale.

L'article 162 du code précité fait référence au deuxième alinéa de l'article 160. Or, le premier alinéa est supprimé par l'article 43 quater du présent projet de loi. En conséquence l'article 43 quinquies substitue à cette référence une référence à l'article 160, réduit désormais à un seul alinéa.

La Commission a adopté les articles 43 ter, 43 quater et 43 quinquies sans modification.

TITRE V BIS

DISPOSITIONS DIVERSES RELATIVES AUX EXPERTS
EN VENTES AUX ENCHÈRES PUBLIQUES

[Division et intitulés nouveaux]

Le système français d'expertise sur le marché de l'art, qu'il s'agisse d'expertise privée ou d'expertise exercée dans le cadre d'une vente aux enchères publiques, est caractérisé par une multitude d'acteurs, qui n'ont pas de statut particulier, mais qui se désignent parfois eux-mêmes comme experts, sans pour autant que ce titre soit, dans ce cadre, protégé. Malgré les efforts accomplis ces dernières années par différents syndicats, ce fourmillement d'experts indépendants qui fait la richesse du marché français n'est pas sans présenter une certaine opacité pour le consommateur.

C'est pourquoi, dans le but de protéger ce dernier et d'améliorer encore la crédibilité de notre marché de l'art, il est proposé dans le présent titre, introduit par le Sénat sur proposition du Gouvernement, d'étendre aux experts intervenant en matière de ventes volontaires aux enchères, lorsqu'ils agissent sans avoir reçu l'agrément du conseil des ventes prévu par la loi n° 2000-642 du 10 juillet 2000 portant réglementation des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques, l'obligation d'assurance et l'interdiction d'acheter des biens qu'ils ont estimés ou, sauf exception, de vendre des meubles dont ils sont propriétaires.

Article 43 sexies (nouveau)

(art. L. 321-17 du code de commerce)


Responsabilité civile des experts en estimation de biens

L'article L. 321-17 du code de commerce prévoit la responsabilité des sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques et les officiers publics ou ministériels compétents pour procéder aux ventes judiciaires et volontaires à l'occasion des ventes qu'ils réalisent. Les clauses dérogatoires à cette responsabilité sont strictement interdites et l'engagement des actions en responsabilité civile pour ce type d'acte se prescrit par dix ans à compter de l'adjudication, délai qui, comme le souligne le Conseil national des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques dans son rapport d'activité 2001-2002, est l'un des plus longs du monde.

Le présent article étend ce régime de responsabilité civile à tous les experts qui procèdent à l'estimation des biens, qu'ils soient agréés ou non.

La Commission a adopté l'article 43 sexies sans modification.

Article 43 septies (nouveau)

(art. L. 321-31, L. 321-35 et L. 321-35-1 du code de commerce)


Encadrement de l'activité des experts
en ventes volontaires aux enchères non agréés

Dans l'état du droit et contrairement aux experts agréés, les experts qui interviennent en matière de ventes volontaires aux enchères et qui n'ont pas reçu l'agrément du Conseil national des ventes ne sont soumis à aucune obligation d'assurance et peuvent acheter des biens qu'ils ont estimés ou vendre des meubles dont ils sont propriétaires.

L'absence d'agrément de l'expert ne doit pas conduire les acheteurs à bénéficier de moins de garanties pour un même acte. Ainsi, le présent article prévoit de soumettre les experts non agréés à l'obligation d'assurance et leur interdit d'acheter les biens qu'ils ont estimés ou, dans une certaine mesure, de vendre des meubles dont ils sont propriétaires. L'égalité de concurrence entre les différentes catégories de professionnels serait améliorée, de même que la sécurité des transactions.

-  L'obligation d'assurance des experts non agréés

L'obligation d'assurance, corollaire du principe de responsabilité civile affirmé à l'article précédent, permet au vendeur et à l'acheteur de ne pas être lésé. Comme le relève le Conseil national des ventes dans son rapport 2001-2002, « dans un contexte de plus en plus marqué par la judiciarisation de la vie des affaires, l'obligation d'assurance apparaît très salutaire tant pour la sécurité du marché que pour les experts eux-mêmes ». En effet, l'analyse du contentieux lié à l'expertise d'objets d'art révèle que l'expert peut parfois être condamné à de très lourds dommages-intérêts. Cet article tend donc à accroître la protection du consommateur qui, grâce à ce mécanisme d'assurance, sera assuré de percevoir le montant d'éventuels dommages-intérêts. Il revient donc à la position que la Commission avait adoptée en première lecture de la loi du 10 juillet 2000.

-  L'interdiction faite à l'expert d'acheter des biens qu'il a expertisés

Toujours dans une logique de protection du consommateur, qui inspire nombre des dispositions relatives aux experts agréés, la loi du 10 juillet 2000 a interdit à ces derniers de procéder pour leur propre compte, directement ou indirectement, à l'estimation, à la vente ou à l'achat d'un bien au cours d'une vente aux enchères à laquelle ils apportent leur assistance. Cette disposition vise à éviter les conflits d'intérêts qui surgissent nécessairement si l'expert, dont l'avis est déterminant pour l'estimation d'un bien, est tenté de se prononcer dans son propre intérêt de vendeur ou d'acheteur.

Le décret du 21 novembre 1956 relatif au tarif des commissaires-priseurs prévoyait déjà qu'« aucun expert ne peut intervenir dans une vente où figurent des objets lui appartenant ». Cette interdiction revêt un intérêt particulier au regard de la situation des experts français qui se trouvent parfois exercer parallèlement la profession de marchands. Pour éviter toute interférence entre ces deux activités, l'interdiction qu'impose cet article aux experts de vendre ou d'acheter pour leur propre compte dans une vente pour laquelle ils agissent en cette qualité semble pleinement justifiée. Dans son rapport d'activité 2001-2002, le Conseil national des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques estimait ainsi que « la faculté laissée à certains professionnels apportant leur concours à une vente aux enchères publiques, comme les experts, d'y acheter ou d'y vendre des biens pur leur propre compte n'est pas saine. Une telle pratique, propre à la France, est potentiellement génératrice de conflits d'intérêts. Elle n'est d'ailleurs pas en accord avec les règles en vigueur dans toutes les autres grandes places internationales. »

- La possibilité offerte à l'expert de vendre des biens sous condition de publicité

Une certaine souplesse est, par ailleurs, maintenue en ce qui concerne la vente des biens dont les experts, qu'ils soient agréés ou non, sont propriétaires. En effet, il est prévu, dans un alinéa complétant l'article L 321.-35 du code de commerce, qu'à titre exceptionnel l'expert peut vendre, par le biais d'une société de ventes volontaires de meubles aux enchères ou par le biais d'un notaire ou d'un huissier de justice dûment mandaté, un bien lui appartenant à condition qu'il en soit fait mention dans la publicité qui annonce la vente aux enchères. En revanche, l'interdiction d'acheter des biens qu'il a estimés reste absolue.

- La responsabilité de l'organisateur de la vente qui fait appel à un expert non agréé

Enfin, le présent article prévoit, dans un nouvel article L. 321-35-1 du code précité, que l'organisateur de la vente est chargé de veiller au fait que l'expert non agréé auquel il a recours dispose d'une assurance, n'achète pas un bien qu'il a expertisé ou vende un bien dont il est propriétaire sans en faire la publicité. Cette disposition introduit une coresponsabilité entre l'organisateur de la vente et l'expert qui vient renforcer les garanties offertes au consommateur, qui pourra, s'il s'estime lésé, se retourner contre la société de ventes qui n'aura pas pris toutes les garanties à l'égard de l'expert non agréé avec lequel elle est en relation. Ce mécanisme se rapproche de la responsabilité solidaire introduite par la loi du 10 juillet 2000 entre les experts agréés et les sociétés de ventes.

La Commission a adopté l'article 43 septies sans modification.

TITRE VI

DISPOSITIONS RELATIVES À LA PROFESSION D'HUISSIER DE JUSTICE
ET AUX PROCÉDURES CIVILES D'EXÉCUTION

Contrairement aux dispositions du projet de loi relatives aux autres professions juridiques ou judiciaires, les modifications proposées dans ce titre ne concernent pas, à titre principal, le statut des huissiers mais visent à renforcer l'efficacité de leur action, en leur ouvrant un accès au fichier des comptes bancaires (ficoba) (chapitre Ier) et en pérennisant le système de répartition de l'indemnité forfaitaire pour frais de déplacement perçue sur chaque acte dressé par ces professionnels (chapitre II).

Chapitre premier

Dispositions relatives à l'accès direct des huissiers de justice
au fichier des comptes bancaires

Section 1

Dispositions modifiant la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991
portant réforme des procédures civiles d'exécution

Article 44

(art. 39 de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991)


Interrogation par les huissiers du fichier des comptes bancaires

La bonne exécution des décisions de justice est l'une des conditions évidentes de la crédibilité de notre système judiciaire. Les huissiers de justice y jouent un rôle prééminent. En effet, jouissant d'un monopole en cette matière en application de l'article 18 de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution, c'est à eux qu'il incombe de recourir aux mesures d'exécution forcée sur le patrimoine des débiteurs pour le recouvrement des condamnations pécuniaires exécutoires. Or les procédures applicables à cette fin sont aujourd'hui trop peu efficaces. En effet, en application des articles 39 et 40 de la loi du 9 juillet 1991 précitée et à l'exception du recouvrement des créances alimentaires, l'interrogation par l'huissier de justice des fichiers détenus par les administrations et les organismes soumis au secret professionnel n'est possible que par l'intermédiaire du procureur de la République.

Peu adapté à la rapidité avec laquelle circulent désormais les actifs, ce dispositif a aujourd'hui atteint ses limites. Dans une réponse écrite, le garde des Sceaux estimait ainsi que « le bilan des années d'application de ce dispositif a mis en lumière son caractère à la fois trop lent et trop peu efficace »(78), allant même jusqu'à assimiler cette situation à une forme de déni de justice(79). Ce mécanisme n'est aujourd'hui satisfaisant ni pour le créancier - qui pâtit légitimement de la non-exécution d'une décision judiciaire qui lui est favorable et qui peut être confronté à un débiteur qui dissimulerait ses actifs - ni pour le débiteur, qui peut se retrouver en butte aux menées d'officines de recouvrement parallèles, n'offrant aucune garantie déontologique et dont les pratiques peuvent parfois être tout simplement scandaleuses. Aussi le présent article tend-il à donner une nouvelle rédaction à l'article 39 de la loi du 9 juillet 1991.

Dans sa rédaction actuelle, cet article prévoit que l'huissier de justice chargé de l'exécution, porteur d'un titre exécutoire et fournissant un relevé certifié sincère des recherches infructueuses qu'il a tentées pour l'exécution, peut demander au procureur de la République d'entreprendre les diligences nécessaires pour connaître, à l'exclusion de tout autre renseignement :

-  l'adresse des organismes auprès desquels un compte est ouvert au nom du débiteur ;

-  l'adresse du débiteur ;

-  l'adresse de son employeur.

A l'issue d'un délai de trois mois, l'absence de réponse du procureur vaut réquisition infructueuse.

L'article 44 du projet de loi prévoit deux procédures distinctes selon la nature du renseignement demandé par l'huissier.

Pour les deux derniers types de renseignements, la procédure actuelle - présentation d'un relevé certifié sincère des recherches infructueuses tentées pour l'exécution, demande adressée au procureur - est inchangée et figure dans le deuxième alinéa de l'article 39 de la loi du 9 juillet 1991 tel qu'il résulte du projet de loi. Comme c'est déjà le cas aujourd'hui, il est précisé que les diligences entreprises pour connaître l'adresse du débiteur et de son employeur ne peuvent viser d'autres renseignements et que ces interrogations se font « sous réserve du respect de l'article 51 ». Applicable pour les créances inférieures à 535 euros, cet article précise qu'une sommation au débiteur de communiquer l'adresse de son employeur ou ses références bancaires doit être diligentée préalablement.

En revanche, la procédure d'obtention de l'adresse des organismes auprès desquels un compte est ouvert au nom du débiteur - qui figurera dans le premier alinéa de l'article 39 de la loi du 9 juillet 1991 - est simplifiée : l'huissier porteur d'un titre exécutoire pourra obtenir directement de l'administration fiscale l'adresse des organismes auprès desquels un compte est ouvert au nom du débiteur, ce qui signifie qu'il aura accès au ficoba dont l'administration fiscale est détentrice. Ce n'est que si cette dernière ne dispose pas de cette information que l'huissier, porteur d'un titre exécutoire et de la réponse de l'administration fiscale, pourra demander au procureur de la République d'entreprendre les diligences nécessaires pour connaître l'adresse de ces organismes. Dans un souci de simplicité et d'efficacité, le Sénat, sur proposition de son rapporteur et avec l'avis favorable du Gouvernement, a supprimé l'obligation pour l'huissier qui souhaiterait accéder au ficoba, de disposer d'un relevé certifié sincère des recherches déjà tentées. Le rapporteur du Sénat a, en effet, fait valoir que contrairement aux recherches qui peuvent être entreprises pour trouver l'adresse du débiteur ou de son employeur, le seul moyen de connaître l'adresse des organismes auprès desquels un compte est ouvert au nom du débiteur est d'interroger l'administration fiscale.

Enfin, le dernier alinéa de l'article 39 est inchangé : il prévoit qu'à l'issue d'un délai fixé par décret en Conseil d'État, l'absence de réponse du procureur de la République vaut réquisition infructueuse.

Très attendu par la profession, l'accès au ficoba permettra à l'huissier de justice mandataire du créancier d'identifier, puis saisir, le compte bancaire du débiteur. Cette faculté est d'autant plus utile que l'efficacité des procédures de saisie-attribution, créées par la loi du 9 juillet 1991, leur a conféré une place prépondérante parmi les voies d'exécution. En permettant de localiser simplement et rapidement le patrimoine du débiteur, cette disposition assurera une meilleure exécution des décisions de condamnation pécuniaire et accroîtra ainsi l'efficacité de notre système judiciaire, conformément aux objectifs fixés dans la loi du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice. Saisie pour avis par la direction des affaires civiles et du sceau, la cnil a donné un avis favorable à la modification de l'article 39 de la loi du 9 juillet 1991 mais a notamment estimé qu'elle ne pouvait être envisagée « que si elle est accompagnée de mesures assurant une protection équivalente ».

Faut-il élargir le champ des informations directement accessibles à ces officiers publics et ministériels ? Le rapporteur ne le pense pas. D'une part, le ficoba est à l'évidence le fichier le plus utile aux huissiers : tenu par l'administration fiscale, ce fichier répertorie l'ensemble des comptes ouverts dans les établissements de crédit, à la Poste et au Trésor public ; plus de trois cents millions de comptes y sont recensés. Organisé par l'arrêté du 14 juin 1982 modifié fixant les modalités d'un système automatisé de gestion du fichier des comptes bancaires, ce fichier est aujourd'hui accessible à de nombreux agents du ministère de l'économie et des finances, aux autorités judiciaires et aux officiers de police judiciaire dans le cadre de la procédure pénale, aux huissiers de justice lorsqu'ils sont chargés de former une demande de paiement direct d'une pension alimentaire, et jusqu'à l'adoption du présent texte, au procureur de la République à la demande d'un huissier. D'autre part, s'il est nécessaire d'assurer l'exécution des décisions de justice, il convient de veiller au respect de l'équilibre des droits du débiteur et du créancier et d'éviter une intrusion exagérée dans la vie privée des personnes concernées.

La Commission a adopté l'article 44 sans modification.

Article 45

(art. 40 de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991)


Levée du secret professionnel lors de l'interrogation du ficoba
par les huissiers

L'article 40 de la loi du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution précise que les administrations de l'État, des régions, des départements et des communes, les entreprises concédées ou contrôlées par l'État, les régions, les départements et les communes, les établissements de toute nature soumis au contrôle de l'autorité administrative doivent communiquer au ministère public les renseignements mentionné à l'article 39 - adresse du débiteur, de son employeur, de l'organisme auprès duquel un compte est ouvert au nom du débiteur - sans pouvoir opposer le secret professionnel, sous réserve toutefois de l'application de l'article 6 de la loi n° 51-711 du 7 juin 1951 sur l'obligation, la coordination et le secret en matière de statistiques (80).

Adopté sans modification par le Sénat, cet article complète l'article 40 de la loi du 9 juillet 1991 précitée afin de préciser que, sous cette même réserve, l'administration fiscale doit communiquer à l'huissier de justice le nom des organismes auprès desquels un compte est ouvert au nom du débiteur sans pouvoir opposer le secret professionnel.

La Commission a adopté l'article 45 sans modification.

Article 46

(art. 51 de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991)


Saisie-vente dans un local servant à l'habitation du débiteur

Consacré à la saisie-vente dans un local servant à l'habitation du débiteur, l'article 51 de la loi du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution prévoit que cette saisie, lorsqu'elle concerne une créance de moins de 535 euros, ne peut être pratiquée, sauf autorisation du juge de l'exécution, que si ce recouvrement n'est pas possible par voie de saisie d'un compte de dépôt ou des rémunérations du travail. Il prévoit donc que le commandement précédant la saisie-vente devra contenir une injonction au débiteur de communiquer les nom et adresse de son employeur et les références de ses comptes bancaires ou l'un de ces deux éléments seulement. Enfin, le dernier alinéa de cet article précise que, si le débiteur ne fournit pas ces renseignements, le procureur de la République peut être saisi dans les conditions prévues aux articles 39 et 40 de la loi du 9 juillet 1991.

Par coordination avec l'accès au ficoba désormais reconnu aux huissiers, l'article 46 du projet de loi donne une nouvelle rédaction au dernier alinéa de l'article 51 afin de préciser que, si le débiteur ne communique pas ces informations, l'huissier de justice peut agir dans les conditions prévues aux articles 39 et 40, c'est-à-dire interroger le ficoba pour les coordonnées bancaires et demander au procureur de rechercher l'adresse de l'employeur.

La Commission a adopté l'article 46 sans modification.

Section 2

Dispositions modifiant le livre des procédures fiscales

Par coordination avec l'autorisation faite aux huissiers d'accéder au ficoba, cette section apporte deux modifications aux dispositions du livre des procédures fiscales, dont le chapitre III du titre Ier fixe les règles du secret professionnel en matière fiscale.

Article 47

(art. L. 147 B du livre des procédures fiscales)


Suppression de la possibilité pour le procureur
d'interroger le ficoba pour l'exécution d'un titre exécutoire

L'article L. 147 B du livre des procédures fiscales précise la nature des renseignements que peut obtenir le procureur de la République aux fins d'assurer l'exécution d'un titre exécutoire (81). Il lui permet ainsi d'obtenir des renseignements relatifs à : l'adresse du débiteur, l'adresse de son employeur, l'adresse des organismes auprès desquels un comptes est ouvert au nom du débiteur.

C'est cette dernière faculté que supprime l'article 47 du projet de loi, adopté sans modification par le Sénat, l'objectif étant d'éviter un doublon avec l'accès au ficoba dont disposent désormais les huissiers de justice.

La Commission a adopté l'article 47 sans modification.

Article 48

(art. L. 151-1 du livre des procédures fiscales)


Levée du secret professionnel en cas d'interrogation
du ficoba par un huissier de justice

Par coordination avec les dispositions ouvrant aux huissiers de justice la possibilité d'accéder au ficoba, le présent article, adopté sans modification par le Sénat, insère dans le livre des procédures fiscales un nouvel article L. 151-1, prévoyant que l'huissier de justice peut obtenir l'adresse des organismes auprès desquels un compte est ouvert au nom du débiteur. Cet accès est encadré puisqu'il n'est possible « aux fins d'assurer l'exécution d'un titre exécutoire ». Cet article est inséré dans le V de la section II du chapitre III du titre II du livre des procédures fiscales, qui rassemble les différentes dérogations au secret professionnel prévues au profit des officiers ministériels.

La Commission a adopté l'article 48 sans modification.

Chapitre II

Dispositions relatives aux indemnités de déplacement
allouées aux huissiers de justice

Article additionnel avant l'article 49

(art. 2 de l'ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945)


Obligation de création d'un compte affecté à la réception des fonds destinés aux clients des huissiers

En l'absence d'obligation légale régissant la détention des fonds par les huissiers de justice pour le compte de tiers, la cour d'appel de Paris a, dans un arrêt du 13 février 2003, validé la saisie des comptes bancaires d'un huissier de justice sur lesquels étaient déposés à la fois des fonds propres de l'étude et des fonds détenus par le compte de clients. Cette saisie avait été opérée pour le recouvrement d'une dette du professionnel sur le fondement des articles 42 et suivants de la loi du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution. Conformément à ces dispositions, les sommes portées au crédit d'un compte bancaire ne peuvent être saisies que si elles sont la propriété du débiteur ; or, celle-ci est présumée et apporter la preuve contraire se révèle pratiquement impossible lorsque sont versées sur le compte des sommes appartenant au titulaire du compte et des sommes qui sont destinées à revenir à un tiers, comme c'est le cas pour les comptes ouverts par les huissiers.

Afin de garantir une meilleure protection des fonds destinés aux clients des huissiers et pour qu'ils puissent être considérés comme soustraits de l'actif patrimonial de l'huissier, la Commission a adopté un amendement du rapporteur tendant à faire obligation aux huissiers de justice d'ouvrir un compte affecté à la réception des fonds destinés à leurs clients (amendement n° 25). Puis elle a adopté un amendement de coordination du même auteur tendant à modifier l'intitulé du chapitre II du titre VI du projet de loi (amendement n° 24).

Article 49

(art. 8 de l'ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945)


Gestion des indemnités de déplacement allouées aux huissiers de justice

Composée de délégués élus par les membres des bureaux des chambres régionales et départementales, la chambre nationale des huissiers de justice a, aux termes de l'article 8 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative au statut de cette profession, pour mission de représenter l'ensemble de la profession auprès des services publics, de prévenir et concilier les différends professionnels entre chambres régionale et départementale, ou entre huissiers ne relevant pas de la même chambre régionale, de donner son avis sur le règlement intérieur des chambres départementales et régionales et d'organiser et régler le budget de toutes les œuvres sociales intéressant les huissiers. Chargée d'établir son propre budget, la chambre nationale peut également se réunir en comité mixte, c'est-à-dire en adjoignant à son bureau un nombre égal de clercs ou d'employés, et régler alors les questions relatives à ces professions. Enfin, elle est compétente pour donner son avis au ministre de la justice sur les questions professionnelles entrant dans le champ de ses attributions.

Le présent article tend à compléter le premier alinéa de l'article 8 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers de justice, afin de donner compétence à la chambre nationale pour « collecter, gérer et répartir » entre les huissiers, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État, les indemnités pour frais de déplacement qui leur sont dues.

En effet, l'article 18 du décret n° 96-1080 du 12 décembre 1996 portant fixation du tarif des huissiers de justice en matière civile et commerciale alloue à chaque huissier, pour chaque acte dressé par ses soins, une indemnité pour frais de déplacement fixée forfaitairement à trente-deux fois la taxe kilométrique ferroviaire en première classe. Cette somme perçue par l'huissier est ensuite transférée à la chambre nationale des huissiers dont le « service de compensation des transports » gère le produit des indemnités de déplacement perçues et qu'il répartit entre les offices en fonction des déplacements accomplis. Ce mécanisme qui permet de reverser des sommes aux huissiers qui perçoivent des indemnités pour un montant inférieur à leurs frais réels permet donc une mutualisation du coût du transport entre les professionnels. Créé en 1949, il a vocation, comme le souligne l'exposé des motifs, à garantir « une stricte égalité entre les usagers des services relevant du monopole des huissiers de justice, quelle que soit la situation géographique du destinataire de l'acte ».

Or le fondement juridique de ce mécanisme est aujourd'hui fragilisé, le Conseil d'État ayant annulé, dans un arrêt du 9 mai 2001, les dispositions de l'arrêté du 15 janvier 1997 qui fixaient les règles applicables à la gestion et à la répartition du produit des indemnités pour frais de déplacement. En effet, cet arrêté précisait également les règles de collecte de cette indemnité - en prévoyant son exigibilité dès la signification de l'acte - alors que le II de l'article 18 du décret du 12 décembre 1996 ne confiait à la chambre nationale que le soin de gérer et de répartir le produit des indemnités.

C'est pour cette raison que l'article 49 du projet de loi, adopté sans modification par le Sénat, tend à inscrire parmi les compétences de la chambre nationale la collecte, la gestion et la répartition entre les huissiers des indemnités pour frais de déplacement qui leur sont dues, le soin étant laissé à un décret en Conseil d'État d'en préciser les conditions d'application.

La Commission a adopté l'article 49 sans modification.

TITRE VII

DISPOSITIONS RELATIVES AUX CONDITIONS D'EXERCICE
DE LA PROFESSION DE CONSEIL EN PROPRIÉTÉ INDUSTRIELLE

Composé de deux articles, ce titre a pour principal objet de renforcer les garanties déontologiques de la profession de conseil en propriété industrielle. Il modifie à cette fin le code de la propriété intellectuelle qui définit les conditions d'exercice de la profession de conseil en propriété industrielle dans ses articles L. 421-1 à L. 423-2 et R. 422-1 à R. 422-66.

Article 50

(art. L. 422-7 du code de la propriété intellectuelle)


Exercice en société d'exercice libéral
de la profession de conseil en propriété industrielle

L'article L. 422-7 du code de la propriété intellectuelle précise la forme sous laquelle peut être exercée la profession de conseil en propriété industrielle en société et dispose que, dans ce cas, la société doit être inscrite dans une section spéciale de la liste des conseils en propriété industrielle, dressée chaque année par le directeur de l'Institut national de la propriété industrielle en application de l'article L. 421-1 du code de la propriété intellectuelle.

Son premier alinéa prévoit ainsi qu'elle peut être exercée par une société civile professionnelle ou par une société constituée sous une autre forme. Dans ce dernier cas, trois conditions doivent être satisfaites : les instances dirigeantes et la moitié des membres du conseil d'administration ou du conseil de surveillance doivent avoir la qualité de conseil en propriété industrielle ; plus de la moitié du capital et des droits de vote doit être détenue par des conseils en propriété industrielle ; tout nouveau membre doit avoir l'agrément préalable, selon le cas, du conseil d'administration, du conseil de surveillance ou des gérants.

Adopté sans modification par le Sénat, l'article 50 du projet de loi précise que la profession de conseil en propriété industrielle peut être également exercée par une société d'exercice libéral, dont le régime a été défini par la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 relative à l'exercice sous forme de sociétés des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé. Il consacre ainsi une possibilité aujourd'hui inscrite dans la partie réglementaire du code de la propriété intellectuelle sous les articles R. 422-41 à R. 422-49 et explicite la formulation générale du premier alinéa de l'article L. 422-7 du code de la propriété intellectuelle, qui prévoit l'exercice de la profession par une société constituée « sous une autre forme » que la société civile professionnelle.

La Commission a adopté l'article 50 sans modification.

Article 51

(art. L. 422-11 à L. 422-13 du code de la propriété intellectuelle)


Secret professionnel et incompatibilités

Conseillant « les entreprises pour la protection et la défense de leur patrimoine intellectuel en général et en particulier de leurs créations, marques, inventions et savoir-faire industriels et commerciaux » (82), les conseils en propriété industrielle interviennent sur des questions extrêmement sensibles pour les entreprises, aux enjeux économiques importants. En effet, leur expertise s'étend à toutes les branches de la propriété industrielle (brevets, marques, dessins et modèles, logiciels, négociation et rédaction de contrats, consultation juridique, coordination et assistance dans les litiges,...). Conseil de tout demandeur d'enregistrement de droits de propriété industrielle, il possède le statut de représentant dûment habilité devant l'Office européen des brevets et devant l'Office pour l'harmonisation du marché intérieur, chargé de l'enregistrement des marques communautaires et peut également représenter ses clients devant l'Office mondial de la propriété industrielle. Enfin, il joue un rôle essentiel dans la procédure française de saisie-contrefaçon, qui permet d'obtenir les preuves établissant une contrefaçon dans les locaux du contrefacteur présumé et coopère étroitement avec l'avocat tout au long de la procédure.

Les conseils se doivent donc d'offrir d'importantes garanties déontologiques à leur clientèle. Outre la définition des conditions requises pour accéder et exercer la profession de conseil en propriété industrielle, la partie législative du code de la propriété intellectuelle précise les règles disciplinaires applicables à la profession (art. L. 422-10). Les règles déontologiques figurent, pour leur part, dans la partie réglementaire du code : l'article R. 422-52 précise ainsi que le conseil en propriété industrielle « exerce sa profession avec dignité, conscience, indépendance et probité, et dans le respect des lois et règlements régissant la compagnie » nationale des conseils en propriété industrielle ; l'article R. 422-53 lui interdit tout démarchage et toute publicité non autorisés ; l'article R. 422-54 prévoit que le conseil « s'abstient dans une même affaire de conseiller, assister ou représenter des clients ayant des intérêts opposés », « observe le secret professionnel », « conduit jusqu'à son terme l'affaire dont il est chargé », « rend compte de l'exécution de son mandat, notamment en ce qui concerne le maniement des fonds » et « remet au client qui l'a dessaisi ou au nouveau mandataire de celui-ci, tous les documents ayant un caractère officiel dont il est dépositaire ainsi que toutes les pièces et informations nécessaires à l'exécution ou à l'achèvement de la mission qui lui était confiée ».

Adopté sans modification par le Sénat, l'article 51 du projet complète le chapitre II du titre II du livre IV du code de la propriété intellectuelle, relatif aux conditions d'exercice de la profession de conseil en propriété industrielle, par trois articles nouveaux destinés à renforcer les garanties déontologiques offertes par ces professionnels. Ces dispositions tendent, d'une part, à consacrer le secret professionnel dans la loi, et, d'autre part, à asseoir l'indépendance de la profession en instituant des incompatibilités auxquels les conseils en propriété industrielle devront se conformer dans un délai de cinq ans (cf. art. 57 du projet de loi).

Article L. 422-11 du code de la propriété intellectuelle

Secret professionnel

Aux termes de l'article R. 422-54 du code de la propriété intellectuelle, le conseil en propriété industrielle « observe le secret professionnel : ce secret s'étend notamment aux consultations qu'il donne à son client, aux correspondances professionnelles échangées ainsi qu'à tous documents préparés à cette occasion ».

Une juridiction américaine ayant, dans une décision de 1998(83), dénié le privilège de confidentialité à un conseil en propriété industrielle français et l'ayant contraint à divulguer sa correspondance avec l'un de ses clients, le renforcement des règles relatives au secret professionnel était donc indispensable pour préserver la crédibilité et la compétitivité de la profession, notamment vis-à-vis de ses homologues étrangers.

Le nouvel article L. 422-11 du code de la propriété intellectuelle consacre le secret professionnel des conseils en propriété industrielle, en en calquant les termes sur les dispositions relatives à la confidentialité des correspondances applicables aux avocats, prévues à l'article 66-5 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971.

Le secret professionnel est ici entendu dans son acception la plus large : le conseil est tenu de l'observer « en toute matière et pour tous les services mentionnés à l'article L. 422-1 » : conseil, assistance ou représentation des tiers en vue de l'obtention, du maintien, de l'exploitation ou de la défense des droits de propriété industrielle, droits annexes et droits portant sur toutes questions connexes ; consultations juridiques et rédactions d'actes sous seing privé. En outre, le secret s'étend aux consultations adressées ou destinées aux clients, aux correspondances professionnelles échangées avec son client, un confrère ou un avocat, aux notes d'entretien et, plus généralement, à toutes les pièces du dossier.

Comme le note l'exposé des motifs du projet de loi, les conseils ne seront ainsi plus exposés à l'obligation de divulguer une correspondance avec un client dans le cadre d'une procédure civile, le cas échéant, engagée devant une juridiction étrangère.

Articles L. 422-12 et L. 422-13 du code de la propriété intellectuelle

Incompatibilités

Prévoyant des incompatibilités auxquelles les conseils en propriété industrielle seront désormais soumis, ces deux articles renforcent ainsi les garanties d'indépendance que doivent présenter ces professionnels vis-à-vis de leurs clients.

Ces incompatibilités sont calquées sur celles prévues par les avocats :

-  à l'instar de l'article 111 du décret du 27 novembre 1991, l'article L. 422-12 nouveau du code de la propriété intellectuelle interdit aux conseils en propriété industrielle l'exercice de toute activité commerciale, qu'elle soit exercée directement ou par personne interposée.

Il prévoit, en outre, une incompatibilité entre la profession de conseil en propriété industrielle et les qualités suivantes, à moins que les sociétés visées n'aient pour objet l'exercice de la profession de conseil en propriété industrielle ou la gestion d'intérêts professionnels connexes ou familiaux : associé dans une société en nom collectif ; associé commandité dans une société en commandite simple ou par actions ; gérant d'une société à responsabilité limitée ; président du conseil d'administration, membre du directoire, directeur général ou directeur général délégué d'une société anonyme ; président ou dirigeant d'une société par actions simplifiées ; gérant d'une société civile.

Enfin, il interdit au conseil en propriété industrielle d'être membre du conseil de surveillance ou administrateur d'une société commerciale, lorsqu'il a moins de sept années d'exercice professionnel et n'a pas obtenu préalablement une dispense dans des conditions prévues par décret en Conseil d'État.

-  comme l'article 115 du décret du 27 novembre 1991 pour les avocats, le nouvel article L. 422-13 interdit l'exercice de toute autre profession, sous réserve de dispositions législatives ou réglementaires particulières et exception faite des fonctions d'enseignement, d'arbitre, de médiateur, de conciliateur ou d'expert judiciaire.

La Commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur sur l'article L. 422-12 du code de la propriété intellectuelle (amendement n° 26).

La Commission a adopté l'article 51 ainsi modifié.

TITRE VII BIS

DISPOSITIONS DIVERSES

[Division et intitulé nouveaux]

Introduite par le Sénat sur proposition de M. Pierre Fauchon, cette division comporte un seul article ; son objet est éloigné du projet de loi aujourd'hui soumis à notre examen, puisqu'il modifie l'article 515 du nouveau code de procédure civile, afin d'y prévoir l'exécution immédiate des jugements de première instance en matière civile.

Article additionnel avant l'article 51 bis (nouveau)

(art. 1er de l'ordonnance n° 58-1259 du 19 décembre 1958)


Garantie d'emprunts aux futurs officiers publics et ministériels

Dans un souci de démocratisation de l'accès aux offices publics et ministériels, l'article 1er de l'ordonnance n° 58-1259 du 19 décembre 1958 instituant un privilège en faveur de la caisse centrale de crédit hôtelier, industriel et commercial, permettait de favoriser les prêts consentis par cet organisme, devenu entre-temps le Crédit d'équipement des petites et moyennes entreprises (cepme), aux candidats à un office public et ministériel, à l'exception des avocats au Conseil d'État et à la Cour de cassation. En effet, en attribuant à l'établissement prêteur un privilège garantissant l'emprunt qu'il accorde, il lui assure, en cas de défaillance, d'être remboursé parmi les premiers. Il lui offre ainsi la possibilité de proposer à l'intéressé des taux plus favorables que ceux offerts par les établissements de crédit classiques.

Malgré cet avantage, l'ordonnance est tombée en désuétude. D'une part, sa portée est limitée à l'exercice individuel des offices et ne prend donc pas en compte les nouveaux modes d'exercice en société. D'autre part, elle n'a pas tenu compte du fait que la Banque du développement des pme a succédé au cepme.

Sur la suggestion du Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce, le rapporteur propose en conséquence d'actualiser le texte de l'ordonnance du 19 décembre 1958 pour étendre son application aux candidats à l'exercice d'un office public et ministériel sous forme de société civile professionnelle ou de société d'exercice libéral. Cette avancée permettra aux candidats à l'achat de parts d'un office d'obtenir un financement que le marché aujourd'hui ne leur offre pas, faute de garanties suffisantes. Elle constitue également l'occasion de préciser le texte même de l'ordonnance : substitution de la référence au cepme par une référence à la Banque de développement des pme, actualisation du titre des commissaires-priseurs dont le domaine de compétence est aujourd'hui limité aux ventes judiciaires et du titre des greffiers des tribunaux de commerce, le texte en vigueur ne faisant référence qu'aux greffiers, sans autre précision.

En conséquence, la Commission a adopté un amendement du rapporteur tendant à étendre aux acquisitions de sociétés civiles professionnelles et de sociétés d'exercice libéral la garantie d'emprunt accordée aux officiers ministériels exerçant à titre individuel pour l'achat d'offices (amendement n° 27).

Article 51 bis (nouveau)

(article 515 du nouveau code de procédure civile)


Exécution immédiate des jugements de première instance en matière civile

Introduit par le Sénat contre l'avis du Gouvernement, cet article comporte deux paragraphes : le premier donne une nouvelle rédaction à l'article 515 du nouveau code de procédure civile, le second renvoie à un décret en Conseil d'État le soin de déterminer les modalités d'application de cet article.

_  Tel qu'il résulte de l'article 51 bis du projet de loi, l'article 515 du nouveau code de procédure civile pose le principe de l'exécution immédiate de « tout jugement » et ce, dès sa notification, conformément à l'article 503 du nouveau code de procédure civile, qui précise que « les jugements ne peuvent être exécutés contre ceux auxquels ils sont opposés qu'après leur avoir été notifiés, à moins que l'exécution en soit volontaire ». Afin d'en atténuer la rigueur, deux tempéraments à ce principe sont prévus, l'un de droit, l'autre laissé à l'appréciation du juge :

-  d'une part, l'exécution immédiate est impossible lorsqu'elle est interdite par la loi ;

-  d'autre part, à la demande des parties ou d'office, le juge peut écarter cette exécution immédiate lorsqu'elle est susceptible d'entraîner des conséquences manifestement excessives ou la subordonner à la constitution d'une garantie réelle ou personnelle, pour répondre de toutes restitutions ou réparations.

Enfin, en cas d'appel, la rédaction proposée impose au Premier président d'arrêter l'exécution immédiate lorsqu'elle est interdite par la loi et lui laisse la possibilité de l'écarter si elle est susceptible d'entraîner des conséquences manifestement excessives ou si la décision déférée n'a pas respecté les principes directeurs du procès.

_  En posant le principe de l'exécution immédiate des jugements de première instance rendus en matière civile, l'article 51 bis procède à une inversion des dispositions de procédure civile actuellement applicables, qui font de l'effet suspensif des voies de recours ordinaires la règle et de l'exécution par provision des jugements rendus en première instance l'exception.

En effet, aux termes de l'article 501 du nouveau code de procédure civile, un jugement n'est normalement exécutoire qu'« à partir du moment où il passe en force de chose jugée ». Or, conformément à l'article 500 du nouveau code de procédure civile, tel est le cas lorsqu'il n'est plus susceptible d'aucun recours suspensif d'exécution. Parmi les voies de recours prévues par l'article 527, seuls l'appel et l'opposition qui constituent les voies ordinaires de recours, sont suspensives d'exécution (art. 539 du ncpc), contrairement aux voies de recours extraordinaires que sont la tierce opposition, le recours en révision et le pourvoi en cassation (art. 579 du ncpc). Ainsi, « lorsque la décision notifiée est susceptible d'être attaquée par une voie de recours ordinaire, il faut attendre en principe un mois [qui est le] délai d'exercice de droit commun des voies ordinaires (...) pour pouvoir l'exécuter et si, durant ce délai, cette voie de recours (appel notamment) est exercée, il faut alors attendre que la décision qui sera rendue plus tard par la juridiction saisie du recours (cour d'appel notamment) soit devenue elle-même exécutoire. À l'inverse, si la décision notifiée ne peut être attaquée que par une voie extraordinaire (pourvoi en cassation notamment), elle peut être exécutée immédiatement après sa notification »(84).

Organisée par les articles 514 à 526 du nouveau code de procédure civile, l'exécution provisoire constitue une exception à l'effet suspensif de l'appel - c'est de fait cette voie de recours qui retient l'attention, l'opposition étant rarement exercée (85) -, en permettant au créancier d'exécuter par provision la décision rendue. Elle lui permet ainsi d'éviter que le débiteur ne forme appel qu'à des fins dilatoires, pour retarder l'exécution de la décision ou organiser son insolvabilité, mais aussi, « même si les voies de recours sont exercées en toute loyauté, sans esprit de chicane ou d'abus, (...) d'éviter les inconvénients pouvant résulter pour lui de la lenteur de la justice, spécialement lorsqu'elles sont portées devant des juridictions dont le rôle est encombré » (86). Interdite dans certains cas, principalement en matière d'état des personnes(87), de droit dans d'autres, l'exécution provisoire peut également être ordonnée, « à la demande ou d'office, chaque fois que le juge l'estime nécessaire et compatible avec la nature de l'affaire », pour tout ou partie de la condamnation mais en aucun cas pour les dépens.

_  Exposant son amendement en séance publique, M. Pierre Fauchon l'a justifié par la nécessité de donner sa pleine efficacité à la justice, en limitant la formation d'appels à des fins dilatoires et en désencombrant ainsi le rôle des cours d'appel.

Ce faisant, il a repris un argument avancé par M. Jean-Marie Coulon dans son rapport portant réflexions et propositions sur la procédure civile (88) rendu en 1997 au garde des Sceaux, dans lequel il était fait une proposition similaire : mettant en avant l'importance d'une « bonne et prompte exécution des jugements » pour la crédibilité de la justice, la proposition de l'exécution immédiate y était formulée « dans un souci de bonne administration de la justice » afin de « donner plein effet au jugement rendu en première instance et de lutter contre les recours dilatoires ».  Il l'accompagnait d'un dispositif protecteur des intérêts du perdant, en prévoyant : son interdiction dans certains cas, la possibilité pour le juge de première instance d'écarter l'exécution immédiate et pour le Premier président de la suspendre non seulement si elle risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives mais aussi si le jugement a été rendu en violation des droits de la défense, ou s'il y a eu excès de pouvoir ou erreur de droit manifeste.

L'ampleur des débats suscités par la reprise de cette proposition dans un projet de décret élaboré en avril 2002 par la Chancellerie a permis d'éclairer les arguments présentés pour défendre ou critiquer une modification en ce sens de notre procédure civile.

Les défenseurs de la réforme ont fait valoir l'intérêt pour les justiciables, notamment pour les plus modestes d'entre eux, de fonder l'organisation de l'exécution sur les intérêts de la partie gagnante, plutôt que sur ceux du perdant (89). Il a été souligné qu'elle entraînerait une responsabilisation de tous les acteurs au procès - justiciables, juge et conseils - et une réorganisation de notre système judiciaire, en allouant aux juridictions de première instance le soin de vider le contentieux, aux cours d'appel celui de « se consacrer à l'examen des procédures qui justifient un double examen au fond » et à la Cour de cassation celui de connaître « des seuls griefs sérieusement formés contre les décisions des juridictions du fond » (90). Il a également été rappelé que la Cour européenne des droits de l'homme avait rattaché l'exécution du jugement au droit au procès équitable (91), et que le principe du double degré de juridiction ne fait pas partie, en matière civile, de ce droit (92). En outre, il a été fait état du faible taux de réformation des décisions judiciaires et de la faculté d'appréciation laissée au juge pour écarter l'exécution immédiate(93). Enfin, il a été souligné que la modification proposée ne ferait que généraliser une disposition dont les magistrats usent déjà largement à travers le mécanisme de l'exécution provisoire et qu'elle faciliterait l'obligation pour les juridictions de trancher les différends qui lui sont soumis dans un « délai raisonnable » et de satisfaire ainsi l'un des « standards de qualité » imposée à la justice(94).

A l'inverse, les opposants à cette réforme ont dénoncé une vision purement gestionnaire de la justice, l'importance du double degré de juridiction et du droit d'interjeter appel pour le justiciable ainsi que la limitation des pouvoirs du juge qu'elle entraînerait(95). Rappelant, en outre, que la proposition de l'exécution immédiate avait été faite alors que le contentieux porté devant les cours d'appel explosait, il a été observé que tel n'était plus le cas aujourd'hui et que, face à une augmentation du nombre de demandes de suspension de l'exécution immédiate, les premiers présidents risquaient de n'accueillir que les demandes manifestement fondées et d'obliger la partie qui a succombé en première instance à subir l'exécution d'un jugement qui sera peut-être réformé en appel (96). Enfin, à l'argument tiré de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, il a été opposé un arrêt rendu par cette même juridiction le 18 avril 2002 dans lequel il est précisé que le droit à l'exécution n'est attaché qu'aux décisions définitives et obligatoires(97).

_  Tout en partageant les préoccupations légitimement exprimées par l'auteur de l'amendement et, au-delà par le Sénat qui l'a adopté, le rapporteur ne peut souscrire au dispositif proposé.

Tout d'abord, l'exécution provisoire d'un jugement telle qu'elle existe dans notre droit, fonctionne efficacement, comme le rapporteur a pu en juger au cours de son expérience professionnelle.

En effet, dans de nombreux contentieux, l'exécution provisoire est automatique : c'est ainsi que le deuxième alinéa de l'article 514 du nouveau code de procédure civile précise que sont « notamment exécutoires de droit à titre provisoire, les ordonnances de référé ; les décisions qui prescrivent des mesures provisoires pour le cours de l'instance, celles qui ordonnent des mesures conservatoires ainsi que les ordonnances du juge de la mise en état qui accordent une provision au créancier ». En outre, plusieurs textes ont prévu une exécution provisoire de droit, justifiée par l'urgence de la mise en œuvre des décisions prononcées : c'est le cas d'une grande partie des décisions du juge aux affaires familiales, de toutes les décisions du juge de l'exécution, de nombreuses décisions des conseils des prud'hommes (art. R. 516-19 et R. 516-37 du code de travail) mais aussi, par exemple, des décisions relatives aux indemnités journalières dues au salarié victime d'un accident du travail (art. L. 433-1, art. R. 433-5 et R. 142-25 à R. 142-27 du code de la sécurité sociale).

En outre, l'article 515 du nouveau code de procédure civile laisse au juge le soin d'ordonner, d'office ou à la demande des parties, l'exécution provisoire dans toutes les matières où elle n'est pas interdite par la loi, sans avoir à motiver sa décision. Et à cette faculté ouverte au juge de première instance, s'ajoute la possibilité donnée au Premier président de la cour d'appel ou au conseiller de la mise en état de la prononcer.

Bien que la Chancellerie, interrogée sur ce point par le rapporteur, ne dispose pas de données statistiques sur l'exécution provisoire (98), il semble que les juridictions fassent aujourd'hui largement recours aux possibilités que leur ouvrent les textes : M. Jean-Claude Magendie, président du tribunal de grande instance de Paris, a estimé qu'entre 80 et 90 % des jugements rendus dans sa juridiction étaient assortis de l'exécution provisoire, tandis que M. Michel Bénichou, cité par M. Pierre Fauchon lors de l'examen de ce projet de loi au Sénat, faisait mention d'un taux de 80 % dans sa juridiction. C'est donc à juste titre qu'il a été relevé que « si le droit dogmatique consacre toujours le principe de l'effet suspensif, la sociologie juridique nous enseigne que son exception, l'exécution provisoire, l'a absorbé de longue date, la grande majorité des décisions rendues en première instances étant aujourd'hui assortie de ce bénéfice, soit de plein droit, soit sur décision du juge » (99). Faut-il, dans ces conditions, adopter l'article 51 bis introduit par le Sénat ? Le rapporteur ne le pense pas compte tenu des conséquences qu'aurait la systématisation de l'exécution provisoire des jugements de première instance.

D'une part, la mise en place de l'exécution immédiate de droit des jugements suppose une réforme importante, dont le rapporteur ne dit pas qu'elle n'est pas souhaitable, mais dont elle tient à souligner l'ampleur. En effet, l'institution d'une exécution immédiate de droit pour l'ensemble des jugements de première instance suppose tout d'abord la modification d'un grand nombre d'articles du nouveau code de procédure civile, notamment ses articles 500 à 504, 514 à 526 et 539. À cet égard, le renvoi, dans le II de l'article 51 bis, à un décret pour en préciser les conditions d'application est loin d'être inutile. En outre, il faudra modifier « les cas actuels d'interdiction de l'exécution provisoire [qui] ne joueront que si les textes correspondants sont repris et adaptés »(100). Au-delà de la seule réorganisation de la procédure civile, c'est, de l'aveu même des partisans de cette réforme, une réorganisation globale du système judiciaire qui est nécessaire, notamment pour renforcer les moyens alloués aux juridictions de première instance. Et si l'exécution immédiate de droit doit également être appliquée aux juridictions spécialisées, telles que les tribunaux de commerce et les conseils de prud'hommes, une réflexion sur leur organisation doit également sans doute être menée.

D'autre part, l'appel est la garantie d'une bonne justice. Et comme le soulignait M. Jean-Marie Coulon dans son rapport précité, « il ne faut pas négliger les dangers du renversement de l'effet suspensif des voies de recours ordinaires ». Demander à un juge d'appel de ne statuer que sur des décisions de première instance déjà exécutées reviendrait à priver les fonctions des juridictions d'appel d'une grande partie de leur efficacité. Le risque existe que les sommes perçues en exécution du jugement de première instance ne puissent être récupérées lors de l'infirmation du jugement en appel et il convient de ne pas écarter les conséquences irréversibles de certaines mesures comme l'expulsion ou la démolition. La lecture des statistiques disponibles sur l'appel, figurant dans les tableaux ci-après, montre que les cas d'infirmation, s'ils ne sont pas majoritaires, ne sont pas négligeables, de l'ordre de 22 % pour l'ensemble des cours d'appel. Et l'on peut légitimement s'interroger sur l'application de l'exécution immédiate de droit aux jugements rendus par des juridictions spécialisés, dont le taux d'appel avoisine 60 % pour les conseils de prud'hommes (101). Figurant dans le livre premier du nouveau code de procédure civile qui rassemble les « dispositions communes à toutes les juridictions », la nouvelle rédaction de l'article 515 du nouveau code de procédure civile a en effet vocation à s'appliquer, conformément à l'article 749 du nouveau code de procédure civile « devant toutes les juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière civile, commerciale, sociale, rurale ou prud'homales, sous réserve des règles spéciales à chaque matière et des dispositions particulières à chaque juridiction ». Elle s'applique également aux juridictions arbitrales, l'article 1479 du nouveau code de procédure civile précisant que « les règles sur l'exécution provisoire des jugements sont applicables aux sentences arbitrales ».

TAUX DE RÉFORMATION
(totale ou partielle)

1997

1998

1999

2000

2001

Nombre

%

Nombre

%

Nombre

%

Nombre

%

Nombre

%

Total des décisions statuant sur le fond de la demande

132 524

100

136 468

100

140 205

100

149 388

100

141 239

100

Confirmation totale

68 751

52

70 436

52

73 005

52

77 003

52

71 572

51

Confirmation partielle

31 369

24

34 232

25

34 640

25

38 116

25

38 205

27

Infirmation de la décision

32 404

24

31 800

23

32 560

23

34 269

23

31 462

22

Source : ministère de la justice

TAUX D'APPEL EN MATIÈRE CIVILE PAR JURIDICTION D'ORIGINE
(tous contentieux confondus)

En pourcentage

JURIDICTION D'ORIGINE

1997

1998

1999

2000

2001

Tribunal de grande instance

15,3

15,6

15,7

15,6

15,3

Tribunal d'instance

6,2

6,1

4,9

4,7

4,7

Conseil de prud'hommes

55,6

57,6

57,5

56,9

59,3

Tribunal de commerce

14,6

14,0

13,8

10,0

12

Source : ministère de la justice

Pour ces raisons, le rapporteur a proposé à la Commission un amendement tendant à supprimer l'article 51 bis du projet de loi que la Commission a adopté (amendement n° 28), ainsi que l'amendement n° 1 de M. Thierry Mariani ayant le même objet.

Article additionnel après l'article 51 bis (nouveau)

(art. 30 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991)


Coordination

La Commission a adopté un amendement de coordination du rapporteur (amendement n° 29).

Article additionnel après l'article 51 bis (nouveau)

(art. 31-1 de la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990)


Objet social des sociétés de participations financières
de professions libérales et prises de participations
dans les groupements étrangers

La Commission a adopté un amendement de M. Philippe Houillon tendant à supprimer le caractère exclusif de l'objet social de la société de participations financières de professions libérales et à permettre à ces sociétés de prendre des participations dans des groupements étrangers ayant pour objet l'exercice de la même profession (amendement n° 30).

Article additionnel après l'article 51 bis (nouveau)

(art. L. 811-13, L. 812-1, L. 812-2 et L. 814-1 du code de commerce)


Mission impartie aux mandataires de justice
et procédure disciplinaire

La Commission adopté un amendement de M. Philippe Houillon ayant pour objet, d'une part, de corriger des erreurs de formulation dans les dispositions du code de commerce relatives à la mission des mandataires judiciaires, d'autre part, de distinguer l'instance compétente pour prononcer la suspension provisoire d'un professionnel de celle appelée à prononcer une sanction disciplinaire (amendement n° 31).

Article additionnel après l'article 51 bis (nouveau)

(art. 37 et 38 de la loi du 1er juin 1924)


Accès au livre foncier informatisé pour les géomètres-experts

La Commission a adopté un amendement de M. Émile Blessig ouvrant aux géomètres-experts exerçant une activité de monopole l'accès à l'ensemble des données du livre foncier informatisé (amendement n° 32).

Article additionnel après l'article 51 bis (nouveau)

(art. 41 de la loi n° 2000-642 du 10 juillet 2000)


Limitation dans le temps de l'indemnisation
des huissiers de justice et des notaires

La Commission a adopté l'amendement n° 2 de M. Pierre Lellouche tendant à fixer au 30 juin 2005 la fin de la période de demande de l'indemnisation susceptible d'être présentée par les huissiers de justice et les notaires à la suite de la réforme des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques.

TITRE VIII

DISPOSITIONS RELATIVES À L'OUTRE-MER

Article 52

Habilitation du Gouvernement à procéder par ordonnance
à l'application de la loi outre-mer

Le I du présent article autorise, sur le fondement de l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement à prendre par ordonnances les mesures de nature législative permettant de rendre applicable la présente loi, le cas échéant avec les adaptations nécessaires, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis-et-Futuna et à Mayotte.

Sur proposition de son rapporteur, le Sénat a jugé inutile de préciser que les mesures législatives qui seront ainsi étendues « relèvent de la compétence de l'État », le rapporteur ayant précisé que, par définition, l'État ne peut légiférer outre-mer que dans les matières qui relèvent de sa compétence, conformément aux textes statutaires en vigueur.

Le II prévoit de soumettre les projets d'ordonnances aux « institutions compétentes »:

-  pour les dispositions relatives à la Nouvelle-Calédonie, il s'agit, conformément à l'article 90 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999, du congrès, qui dispose d'un mois pour se prononcer ;

-  pour les dispositions relatives à la Polynésie française, il s'agit, conformément à l'article 32 de la loi organique n° 96-312 du 12 avril 1996 du conseil des ministres de la collectivité, qui dispose d'un délai d'un mois pour émettre un avis. À cette consultation, l'article 52 du projet de loi ajoute également la consultation de l'assemblée du territoire qui dispose d'un mois pour se prononcer ;

-  pour les dispositions relatives à Mayotte, il s'agit du conseil général conformément à l'article L. 3551-12 du code général des collectivités territoriales, qui lui laisse un mois pour se prononcer ;

-  pour les dispositions relatives aux îles Wallis-et-Futuna, le projet de loi prévoit la consultation de leur assemblée territoriale, un délai d'un mois lui étant laissé pour se prononcer, l'avis étant réputé avoir été donné une fois ce délai expiré (102).

Le III précise les délais applicables à cette procédure : les ordonnances devront ainsi être prises au plus tard le dernier jour du douzième mois suivant la promulgation de la présente loi ; le projet de loi portant ratification de ces ordonnances devra, pour sa part, être déposé devant le Parlement au plus tard le dernier jour du dix-huitième mois suivant la promulgation de la présente loi. La fixation du point de départ de ce dernier délai à la promulgation de la loi résulte d'un amendement du rapporteur de la commission de Lois du Sénat qui a considéré que le point de départ de ce délai, fixé initialement à la publication des ordonnances, était inédit et risquait de trop retarder le dépôt du projet de loi de ratification.

La Commission a adopté l'article 52 sans modification.

Article 53

(art. 81 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Application à Saint-Pierre-et-Miquelon

L'article 81 de la loi du 31 décembre 1971 précise les conditions d'application de ce texte aux territoires d'outre-mer, à Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon.

Adopté sans modification par le Sénat, le présent article adapte la rédaction de l'article 81 pour tenir compte des modifications apportées par le projet à la loi du 31 décembre 1971 et pour adapter certaines dispositions à la collectivité de Saint-Pierre-et-Miquelon(103).

-  Le I modifie la liste des articles qui ne sont pas applicables à cette collectivité : par coordination avec l'article 25 du projet de loi, il supprime de cette liste les articles 28 à 41et 77 ; compte tenu de la nouvelle rédaction donnée à l'article 50 de la loi du 31 décembre 1971(cf. art. 54 du projet), il n'est plus fait mention dans cette liste des paragraphes II à VI, VIII, X, XI et XIII de l'article 50 mais de ses paragraphes I et III (104; il inclut dans cette liste l'article 22-1, relatif à la composition du conseil de discipline, inapplicable à cette collectivité dès lors que celle-ci ne comporte qu'un seul barreau.

-  Le dernier alinéa de l'article 81 limite aux seuls ressortissants français l'application à Mayotte, à Saint-Pierre-et-Miquelon et dans les TOM, du VII de l'article 50 et de la dernière phrase du dernier alinéa de l'article 11, qui prévoit un contrôle de connaissance pour le ressortissant d'un État membre de la Communauté européenne ou d'un État partie à l'accord sur l'EEE qui voudrait s'inscrire auprès d'un barreau, ne serait pas titulaire du capa et aurait acquis son titre d'avocat dans un pays n'appartenant ni à la Communauté ni à l'eee.

Le II de l'article 53 du projet modifie ces dispositions : par coordination avec l'article 54, la mention du VII de l'article 50 est supprimée. En outre, il met fin, pour la seule collectivité de Saint-Pierre-et-Miquelon, à la limitation aux seuls français de l'application de la dernière phrase du dernier alinéa de l'article 11.

-  Le III complète l'article 81 de la loi du 31 décembre 1971 de certaines dispositions propres à Saint-Pierre-et-Miquelon, destinées à maintenir dans leur rédaction actuelle le 2° de l'article 17 (attributions du conseil de l'ordre en matière disciplinaire), ainsi que les articles 22 (procédure disciplinaire), 23 (suspension provisoire) et 24 (recours contre les décisions rendues par le conseil de l'ordre en matière disciplinaire). Cette collectivité ne comportant qu'un seul barreau, il ne serait en effet guère possible de lui appliquer la nouvelle organisation disciplinaire.

La Commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 33), puis l'article 53 ainsi modifié.

TITRE IX

DISPOSITIONS TRANSITOIRES

Article 54

(art. 50 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971)


Dispositions transitoires relatives aux avocats

Cet article donne une nouvelle rédaction à l'article 50 de la loi du 31 décembre 1971, qui comporte plusieurs dispositions destinées à prendre en compte diverses situations acquises lors des précédentes réformes de la profession.

Aux termes de l'article 54 du projet de loi, l'article 50 de la loi du 31 décembre 1971 comportera quatre paragraphes, au lieu de treize actuellement.

Reprenant le premier alinéa de l'actuel paragraphe VI de l'article 50, le I dispense du capa et du stage les personnes qui, à la date de l'entrée en vigueur de la loi du 31 décembre 1990 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, avaient accompli l'intégralité de la durée du stage nécessaire pour l'inscription sur une liste de conseils juridiques. Le projet de loi modifie toutefois la rédaction de ces dispositions afin de tenir compte de la suppression du stage. Sur proposition du rapporteur de sa commission des Lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, le Sénat a supprimé le deuxième alinéa que comportait le paragraphe I dans le projet de loi initial. En effet, il reprenait le deuxième alinéa de l'actuel paragraphe VI, qui permet aux personnes qui étaient en cours de stage pour exercer la profession de conseil juridique avant la réforme de la profession de poursuivre leur stage selon les modalités en vigueur avant cette date. Cette disposition ayant épuisé ses effets, elle ne nécessitait effectivement pas d'être reprise.

Le II préserve les droits acquis des conseils juridiques qui ont été autorisés, avant le 1er janvier 1992, à faire usage d'une mention d'une ou plusieurs spécialisations ; il est prévu qu'ils conserveront ce bénéfice sans avoir à solliciter le certificat de spécialisation et qu'il leur sera délivré de plein droit les certificats de spécialisation équivalents à ceux qu'ils détenaient antérieurement. Ce paragraphe, dans lequel le Sénat a corrigé une erreur matérielle, reprend les dispositions du deuxième alinéa du paragraphe IX de l'actuel article 50.

Le III reprend sans modification les dispositions de l'actuel paragraphe XI de l'article 50 qui précise les conditions dans lesquelles les anciens conseils juridiques devenus avocats qui exerçaient avant la réforme de leur profession les activités de commissaire aux comptes peuvent poursuivre ces activités à titre dérogatoire.

Le IV précise les dispositions applicables aux personnes qui seront en cours de formation lors de l'entrée en vigueur du titre II de la présente loi, qui réorganise le cursus conduisant à l'exercice de la profession d'avocat.

Le principe est que ces personnes - en l'occurrence les élèves des crfp et les stagiaires - poursuivront leur formation selon les modalités en vigueur à cette date. Compte tenu de la suppression des stagiaires de la liste des professionnels autorisés à participer à l'élection du conseil de l'ordre (cf. art. 19 du projet de loi), le IV de l'article 50, dans la rédaction que lui donne le projet de loi, précise que les personnes inscrites sur la liste du stage conservent le droit de participer à l'élection du conseil de l'ordre et du bâtonnier.

Une dérogation est toutefois prévue à cette règle. Le deuxième alinéa précise ainsi qu'en cas d'échec à la dernière session de l'examen du capa organisée avant l'entrée en vigueur des nouvelles dispositions relatives à la formation initiale, les personnes qui souhaitent reprendre leur formation (105), ainsi que celles qui après un deuxième échec y sont autorisés par le conseil d'administration du crfp (106), sont soumises au nouveau régime de formation.

Sur proposition de son rapporteur et avec l'avis favorable du Gouvernement, le Sénat a prévu une dispense du stage pour les personnes qui, titulaires du capa, n'auraient pas entamé ou fini leur stage dans les deux ans qui suivront l'entrée en vigueur des nouvelles dispositions sur la formation, et prévu, à titre de compensation, qu'elles seront soumises au tutorat pour la durée de stage restante. En effet, tout en convenant de l'opportunité de prévoir une entrée en vigueur progressive de la formation initiale, M. Jean-René Lecerf a jugé « nécessaire d'éviter que des situations transitoires puissent perdurer indéfiniment » (107), dès lors que le bénéfice de la délivrance du capa n'est pas limité dans le temps.

Les autres paragraphes que comporte aujourd'hui l'article 50 de la loi du 31 décembre 1971 sont supprimés, leurs dispositions - pour l'essentiel transitoires - ayant épuisé leurs effets. C'est ainsi le cas des paragraphes suivants :

-  les paragraphes II à V, relatifs aux conditions d'accès de la profession d'avocat pour les clercs d'avoué de première instance, clercs et secrétaires d'agréé près le tribunal de commerce, ces dispositions étant liées à la fusion, veille de trente ans, des professions d'avocat, avoué et agréé ;

-  le paragraphe VII qui permettait, durant deux ans à compter de l'entrée en vigueur de la loi du 31 décembre 1990, l'accès à la profession d'avocat de personnes réunissant les conditions prévues aux 1°, 2°, 4°, 5° et 6° de l'article 11 et disposant d'une expérience de cinq ans de consultation ou de rédaction d'actes en matière juridique ;

-  le paragraphe VII qui ouvrait pour la même durée une passerelle identique aux ressortissants de la Communauté européenne qui n'étaient pas inscrits sur la liste des conseils juridiques ;

-  le premier alinéa du paragraphe IX, qui, pendant ce même délai de deux ans, permettait aux membres de la nouvelle profession de demander la délivrance d'un certificat de spécialisation s'ils justifiaient avoir acquis, dans l'exercice de leur profession, la compétence nécessaire à la reconnaissance de la spécialisation ;

-  le paragraphe X qui précisait les conditions dans lesquelles, durant un an à compter de l'entrée en vigueur de la loi du 31 décembre 1990, les anciens conseils juridiques spécialisés en matière fiscale pouvaient, s'ils ne souhaitaient pas intégrer la nouvelle profession, accéder aux professions d'expert-comptable et de comptable agréé ;

-  le paragraphe XII qui autorisait, pour une durée de cinq ans, les anciens conseils juridiques renonçant à entrer dans la nouvelle profession, à accéder à celle de notaire ;

-  le paragraphe XIII qui ouvrait, durant deux ans, aux groupements constitués sous l'empire d'une législation étrangère la possibilité d'être inscrits au barreau de leur choix si leur activité exclusive consistait en la consultation et la rédaction d'actes en matière juridique et si les membres ayant le pouvoir de représenter le groupement en France étaient inscrits à un barreau.

La Commission a adopté deux amendements du rapporteur, l'un modifiant les dispositions transitoires applicables aux élèves en cours de formation lors de l'entrée en vigueur de la loi pour tenir compte de la suppression du tutorat pour les titulaires du certificat d'aptitude à la profession d'avocat (amendement n° 34), l'autre instituant des dispositions transitoires destinées à éviter que d'anciens avocats, inscrits sur la liste du stage lors de la commission des faits, puissent ne pas faire l'objet de poursuites disciplinaires (amendement n° 35).

La Commission a adopté l'article 54 ainsi modifié.

Article 55

Entrée en vigueur des dispositions modifiant la discipline
des avocats et des greffiers des tribunaux de commerce

Adopté sans modification par le Sénat, cet article précise que les dispositions des titres III et IV du projet de loi, respectivement consacrées à la discipline des avocats et des greffiers des tribunaux de commerce, s'appliqueront aux procédures engagées postérieurement à leur entrée en vigueur (108). Pour les procédures disciplinaires déjà engagées, le régime disciplinaire actuel continuera de s'appliquer jusqu'à l'issue de la procédure, ce qui inclut les recours qui pourraient également être engagés.

La Commission a adopté, à l'initiative du rapporteur, une disposition de coordination tendant à préciser que les nouvelles dispositions relatives à la discipline des notaires seront également applicables aux procédures engagées postérieurement à leur entrée en vigueur (amendement n° 36).

La Commission a adopté l'article 55 ainsi modifié.

Article 56

Dispositions transitoires applicables à l'établissement des listes d'experts

Adopté sans modification par le Sénat, cet article prévoit un dispositif transitoire de mise en œuvre de l'article 40 du projet de loi relatif à l'établissement des listes d'experts judiciaires.

D'abord, les experts figurant, à la date de publication de la loi, sur une liste d'experts judiciaires continueront à y figurer jusqu'à ce qu'il soit statué sur leur inscription éventuelle sur les nouvelles listes élaborées selon les règles définies par le présent projet de loi.

Ensuite, la procédure d'établissement des nouvelles listes est enfermée dans un délai de cinq ans.

Enfin, un décret en Conseil d'État déterminera les conditions dans lesquelles la nouvelle inscription des experts actuels sera opérée. Il devra, en particulier, prévoir dans quel ordre la situation de chaque expert inscrit sera réexaminée.

La Commission a adopté l'article 56 sans modification.

Article 57

Dispositions transitoires applicables aux incompatibilités
des conseils en propriété industrielle

L'article 51 du projet de loi prévoyant des incompatibilités pour les conseils en propriété industrielle (art. L. 422-12 et L. 422-13 nouveaux du code la propriété intellectuelle), le présent article précise les dispositions transitoires applicables aux professionnels qui se trouveraient désormais dans l'un des cas d'incompatibilités prévus par la loi.

Il leur laisse un délai courant à compter de la publication de la présente loi pour mettre fin aux activités qui seraient désormais incompatibles avec leur profession. Fixé à deux ans dans le projet de loi, il a été porté à cinq ans par le Sénat, sur proposition du rapporteur de sa commission des Lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, afin de permettre aux professionnels concernés de mettre un terme à leurs activités dans de bonnes conditions.

En outre, la poursuite temporaire d'activités faisant désormais l'objet d'incompatibilités est subordonnée à une déclaration faite à ce sujet par le conseil en propriété industrielle concerné dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi. Cette déclaration est faite au directeur de l'inpi, qui est chargé de dresser chaque année la liste des personnes qualifiées en propriété industrielle (art. L. 421-1 du code de la propriété intellectuelle).

La Commission a adopté l'article 57 sans modification.

*

* *

La Commission a ensuite adopté l'ensemble du projet de loi ainsi modifié.

*

* *

En conséquence, la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République vous demande d'adopter le projet de loi (n° 768) adopté par le Sénat, réformant le statut de certaines professions judiciaires ou juridiques, des experts judiciaires, des conseils en propriété industrielle et des experts en ventes aux enchères publiques, modifié par les amendements figurant au tableau comparatif ci-après.

 Accès au tableau comparatif

N° 1250 - Rapport sur le projet de loi réformant le statut de certaines professions judiciaires ou juridiques, experts judiciaires, conseils en propriété industrielle, experts en ventes aux enchères publiques (Sénat 1ère lecture) (Mme Brigitte Barèges)

1 () Il a introduit les dispositions relatives aux notaires et aux experts en ventes aux enchères publiques.

2 () Loi n° 90-1259 du 31 décembre 1990 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques.

3 () Loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 relative à l'exercice sous forme de sociétés des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé.

4 () Ainsi, c'est sur proposition du rapporteur de la commission des Lois du Sénat que les dispositions transposant la directive du 16 février 1998 ont été insérées dans la loi du 31 décembre 1971 (art. 1er A , 1er B, 8 A, et 10 A).

5 () Ils peuvent ainsi exercer à titre individuel, en qualité de collaborateur ou de salarié ou au sein d'une association, d'une société civile professionnelle, d'une société d'exercice libéral ou d'une société en participation.

6 () Projet de loi visant à faciliter l'exercice permanent de la profession d'avocat par les ressortissants des États membres de la Communauté européenne ayant acquis leur qualification dans un autre État membre, Sénat, 2001-2002, n° 264, 6 mars 2002.

7 () M. Christian Cointat, Rapport d'information sur l'évolution des métiers de la justice, Sénat, 2001-2002, n° 345, 3 juillet 2002.

8 () En 2003, dans près de la moitié des barreaux, le nombre d'avocats était inférieur à cinquante et dans seulement onze barreaux, il était supérieur à cinq cents.

9 () Dans un article publié le 30 avril 2003 dans la Semaine juridique, édition générale (n° 18), M. Raymond Martin fait ainsi état d'un accroissement des demandes de renvoi pour suspicion légitime (p. 756). Le conseil de l'ordre étant une instance juridictionnelle, ses membres peuvent être récusés dans les mêmes conditions que les juges pour les motifs prévus à l'article 341 du nouveau code de procédure civile. L'affaire est alors directement jugée par la cour d'appel si le conseil de l'ordre est récusé dans son ensemble.

10 () Décision du 29 septembre 1999.

11 () Conseil d'État, 23 février 2000.

12 () 1ère chambre civile, 7 avril 1999.

13 () 1ère chambre civile, 5 octobre 1999.

14 () Ce point a notamment été évoqué par le cnb dans son rapport adopté en assemblée générale le 20 mai 2000 sur la réforme de la procédure disciplinaire.

15 () Parmi les quatre-vingt-quinze chambres départementales, un tiers ont moins de quarante membres et certaines en comptent moins de dix.

16 () Mme Jehanne Collard, Victimes, les oubliés de la justice, Paris, Stock, 1997, page 125.

17 () Jean-Claude Magendie, « l'exécution immédiate des décisions de justice : l'injuste critique d'une réforme nécessaire ». Dalloz, 2002, n° 31, p. 2411.

18 () cf. rapport de M. Jean-Marie Coulon précité.

19 () Dans son rapport d'information (n° 1009), « Premier rapport annuel sur la transposition des directives », fait au nom de la Délégation pour l'Union européenne, M. Christian Philip indique que « la directive a été partiellement ou totalement transposée par la plupart des États membres ».

20 () Cour d'appel de Toulouse, 1ère chambre, 5 juillet 2001.

21 () Propos de M. Serge Guinchard, professeur à l'université Paris II, sur la réforme des professions juridiques et judiciaires (Dalloz, 2003, n° 19).

22 () Cf. commentaires des articles du titre II du présent projet de loi pour une présentation des conditions d'accès à la profession d'avocat.

23 () Aux termes des articles 102 et 103 du décret du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat : « le conseil de l'ordre statue sur la demande d'inscription dans les deux mois à compter de la réception de la demande » ; « la décision portant refus d'inscription est notifiée [...] à l'intéressé et au procureur général, qui peuvent la déférer à la cour d'appel » ; « aucun refus d'inscription ou de réinscription ne peut être prononcé par le conseil de l'ordre sans que l'intéressé ait été entendu ou appelé dans un délai d'au moins huit jours par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ».

24 () L'article 154 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat précise que : « ont seules droit au titre d'avocat les personnes inscrites au tableau ou sur la liste du stage d'un barreau français. Les avocats doivent faire suivre leur titre d'avocat de la mention de ce barreau ainsi que, le cas échéant, de celui du barreau étranger auquel ils appartiennent ».

25 () Dans son rapport fait au nom de la Commission des lois du Sénat (p. 78 et s.), M. Jean-René Lecerf précise ainsi que la Grèce et l'Italie interdisent l'exercice en commun de la profession ; il fait également état de l'hétérogénéité des législations qui autorisent l'exercice en groupe, le Royaume-Uni ou la France n'acceptant pas l'exercice de la profession au sein de structures présentant un caractère pluridisciplinaire, contrairement à l'Allemagne qui, depuis 1994, permet à des avocats, des conseillers fiscaux ou des experts-comptables assermentés de s'associer au sein d'une même structure professionnelle.

26 () Dernier considérant de ladite directive.

27 () Les deux notions se distinguent en ce que le salarié perçoit un salaire tandis que le collaborateur est rémunéré par une rétrocessions d'honoraires, et que le premier, contrairement au second, ne peut développer de clientèle personnelle et qu'il entretient un rapport de subordination plus fort avec son employeur.

28 () Créée par la loi n° 66-879 du 29 novembre 1966, elle est seulement composée d'avocats en exercice, inscrits au tableau ou sur la liste du stage ; elle est inscrite au barreau où elle a son siège ainsi que ses associés, qui le sont chacun individuellement.

29 () La loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 et son décret d'application n° 93-492 du 25 mars 1993 ont ouvert aux avocats la possibilité de créer des sociétés d'exercice libéral à responsabilité limitée (selarl), incluant l'exercice en société unipersonnelle (eurl), des sociétés d'exercice libéral à forme anonyme (selafa), des sociétés d'exercice libéral en commandite par actions (selca) et des sociétés en participation. La loi du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques a également autorisé la création de sociétés d'exercice libéral par actions simplifiées (selas) tandis que l'article 32 de la loi du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier a créé les sociétés de participations financières ayant pour objet exclusif des prises de participation dans le capital des sel.

30 () «Ensemble de sociétés ayant chacune une existence juridique distincte souvent constitué par une société mère et une ou plusieurs filiales », vocabulaire juridique de M. Gérard Cornu, PUF.

31 () Comme le notait M. Henri Nallet dans son rapport rendu en 1999 au Premier Ministre sur les réseaux pluridisciplinaires et les professions du droit, « plus de trente-trois ans se sont écoulés depuis l'affirmation du principe de l'interprofessionnalité dans la loi sur les scp, près de dix ans depuis sa réitération dans la loi sur les sel, et rien n'a bougé ».

32 () « En cas de manquement de l'avocat exerçant sous son titre professionnel d'origine aux obligations en vigueur dans l'État membre d'accueil, les règles de procédure, les sanctions et les recours prévus dans l'État membre d'accueil sont applicables ».

33 () A l'origine, l'article 25 de la loi du 31 décembre 1971 laissait à la juridiction devant laquelle l'avocat plaidait le soin de sanctionner les manquements commis à l'audience. Cette procédure a été réformée par la loi du 15 juin 1982, qui a confié au conseil de l'ordre des avocats le soin de statuer sur ces manquements. Le délai laissé au conseil de l'ordre pour statuer a été fixé à quinze jours, au lieu du délai de deux mois de droit commun, à l'issue duquel, le conseil de l'ordre n'ayant pas statué, il est réputé avoir rejeté la demande et le procureur général peut saisir la cour d `appel (art. 197 du décret du 27 novembre 1991).

34 () Rapport n° 226 (session ordinaire 2002-2003) fait par M. Jean-René Lecerf, au nom de la commission des Lois du Sénat.

35 () L'article 75 du décret du 27 novembre 1991 précise que « les candidats doivent, avant d'être inscrits sur la liste du stage, et sur la présentation du bâtonnier de l'ordre, prêter serment devant la cour d'appel dans les termes prévus au deuxième alinéa de l'article 3 de la loi du 31 décembre 1971 ».

36 () Rapport sur la formation initiale des avocats, adopté par l'assemblée générale du Conseil national des barreaux le 15 novembre 1997.

37 () Rapport du CNB précité.

38 () C'est pour pallier cette difficulté, en permettant d'accroître le nombre de maîtres de stage disponibles, que le décret n° 95-1110 du 17 octobre 1995 a prévu que le stage puisse se dérouler à mi-temps.

39 () M. Raymond Martin :« l'incidence sur la profession d'avocat du projet de loi concernant les professions judiciaires et juridiques », la semaine juridique édition générale, n° 18, 30 avril 2003, p. 754.

40 () Rapport précité du CNB sur la formation initiale des avocats.

41 () L'article 97 du décret du 27 novembre 1991 dispense ainsi de formation au CRFP, de CAPA et de stage : les membres et anciens membres du Conseil d'État et membres et anciens membres du corps des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel ; les magistrats et anciens magistrats de la Cour des comptes, des chambres régionales des comptes de la Polynésie française et de la Nouvelle-Calédonie ; les magistrats et anciens magistrats de l'ordre judiciaire ; les professeurs d'université chargés d'un enseignement juridique ; les avocats au Conseil d'État et à la Cour de cassation ; les anciens avocats inscrits à un barreau français et les anciens conseils juridiques.

42 () L'article 98 du décret du 27 novembre 1991 dispense de la formation au CRFP, du CAPA et soumet à un stage d'un an : les notaires, huissiers de justice, greffiers des tribunaux de commerce, administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires à la liquidation des entreprises, anciens syndics et administrateurs judiciaires, conseils en propriété industrielle et anciens conseils en brevet d'invention ayant exercé leurs fonctions pendant cinq ans au moins ; les maîtres de conférences, maîtres assistants et chargés de cours, s'ils sont titulaires du diplôme de docteur en droit, en science économique ou en gestion, justifiant de cinq ans d'enseignement juridique en cette qualité dans les unités de formation et de recherche ; les juristes d'entreprise justifiant de huit ans au moins de pratique professionnelle au sein du service juridique d'une ou plusieurs entreprises ; les fonctionnaires et anciens fonctionnaires de catégorie A, ou personnes assimilées, ayant exercé des activités juridiques pendant huit ans ; les juristes attachés pendant huit ans à l'activité juridique d'une organisation syndicale.

43 () Rapport adopté par l'assemblée générale le 15 novembre 1997.

44 () Il doit avoir moins de vingt-cinq ans au début de l'apprentissage (art. L. 117-3 du code du travail).

45 () Il est précisé, dans l'exposé des motifs du projet de loi, que « 8 % des nouveaux apprentis préparent des diplômes de l'enseignement supérieur, pourcentage porté à 50 % dans le secteur des services aux entreprises ».

46 () Pour un jeune de plus de 21 ans, la rémunération minimum est de 53 % du SMIC ou du salaire minimum conventionnel correspondant à l'emploi occupé s'il est plus favorable durant la première année, de 61  durant la deuxième année et de 78 % durant la troisième.

47 () Il existe quinze mentions de spécialisation, dont la liste est fixée par un arrêté du 8 juin 1993. Près des deux tiers des mentions recouvrent des spécialités du droit pour lesquelles le conseil aux entreprises s'est développé, le droit fiscal, le droit social et le droit des sociétés étant les trois mentions de spécialisation les plus fréquentes.

48 () Définition donnée par M. Gérard Cornu, « vocabulaire juridique », PUF.

49 () Raymond Martin, « l'incidence sur la profession d'avocat du projet de loi concernant les professions judiciaires et juridiques », la semaine juridique édition générale, n° 18, 30 avril 2003.

50 () Double condition posée dans le dernier alinéa de l'article 1039 du code général des impôts, devant être constatée par le décret en Conseil d'État qui autorise le transfert des biens.

51 () Rapport n° 226 (session ordinaire de 2002-2003) fait au nom de la commission des Lois du Sénat, pages 130 à 132.

52 () Ces dispositions concernent actuellement onze barreaux : Paris, Lyon, Nanterre, Marseille, Toulouse, Bordeaux, Nice, Versailles, Montpellier, Strasbourg et Lille.

53 () Il s'agit des avocats inscrits au tableau du barreau, des avocats stagiaires du même barreau ayant prêté serment avant le 1er janvier de l'année au cours de laquelle a lieu l'élection et des avocats honoraires dudit barreau.

54 () Dans sa décision du 18 juin 2001 (Ordre des avocats au barreau de Tours), le tribunal des conflits a observé que cette question était non relative à l'exercice de la fonction juridictionnelle mais à l'organisation même d'une profession réglementée et qu'elle relevait à ce titre de la compétence de la juridiction administrative.

55 () La Cour de cassation a tiré les conséquences de cet arrêt. En effet, dans un arrêt du 21 janvier 2003, elle a annulé certaines dispositions de l'article 16 du règlement intérieur harmonisé, relatif à l'exercice en réseau multidisciplinaire de la profession, au motif qu'il n'appartient pas au Conseil national des barreaux d'édicter de telles règles. Dans la mesure où cette disposition du rih a été intégrée dans le règlement intérieur d'un barreau, la décision du conseil de l'ordre de ce barreau est en effet devenue justiciable d'un recours ordinaire devant la cour d'appel et c'est sur ce fondement que certaines grandes sociétés d'avocats ont attaqué l'article 16.

56 () Les membres de ces professions devaient présenter leur demande en ce sens dans un délai de cinq ans à compter de la date d'entrée en vigueur du titre Ier de la loi n° 90-1259 du 31 décembre 1990, fixée au 1er janvier 1992 par son article 67.

57 () Réponse aux questions écrites n° 15667,20289 et 23218, Journal officiel, questions, Sénat, 11 mai 2000.

58 () L'article 96 du décret du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat précise que « les avocats personnes physiques sont inscrits d'après leur rang d'ancienneté, celui-ci étant fonction de la première inscription au tableau même si celle-ci a été interrompue ».

59 () Actuellement, l'article 191 du décret du 27 novembre 1991 précise que le conseil de l'ordre désigne un de ses membres pour procéder à l'instruction du dossier ou procède lui-même à l'instruction contradictoire dans les dossiers ne nécessitant pas de mesure d'instruction particulière.

60 () Cass, 1ère civ., 4 février 2003 : SA Desmazières Drino c/ SA Arbo.

61 () Juris-classeur de procédure civile, vol. 2, fascicule 83-4.

62 () Voir notamment Cour européenne des droits de l'homme, 30 juin 1981 ; Cour de justice des communautés européennes, arrêt du 6 juillet 2000, Molkereigenossenschaft Wiedergeltingen eG contre Hauptzollamt Lindau ; 7 décembre 2000, Andrade.

63 () Articles 11 et 13 de la loi n° 2003-7 du 3 janvier 2003 modifiant le livre VIII du code de commerce.

64 () Article 103 de la loi n° 2003-76 du 1er août 2003 de sécurité financière.

65 () Article 63 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat.

66 () Depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 90-1259 du 31 décembre 1990, les greffiers des tribunaux de commerce sont représentés auprès des pouvoirs publics par un Conseil national des tribunaux de commerce. Cet organisme, qui est entré en fonctions le 1er janvier 1992, doté de la personnalité morale, est chargé de défendre les intérêts collectifs de la profession. Il est composé de membres élus par les greffiers des tribunaux de commerce pour une durée de quatre ans.

67 () Cour européenne des droits de l'homme, 8 juin 1976, Engel contre Pays-Bas ; 14 septembre 1999, Serre contre France ; Conseil d'État, 14 février 1996, Maubleu ; 29 janvier 2001, Léon-Suberbielle ; Cour de cassation, première chambre civile, 7 avril 1999.

68 () Cour européenne des droits de l'homme, 17 janvier 1970, Delcourt contre Belgique.

69 () Article 63 du décret n° 69-810 du 12 août 1969 portant règlement d'administration publique et relatif à l'organisation de la profession et au statut professionnel des commissaires aux comptes de sociétés.

70 () Articles 15 et 34 du décret n° 77-1481 du 28 décembre 1977 sur l'organisation de la profession d'architecte.

71 () Article 6-1 de l'ordonnance n° 45-1418 du 28 juin 1945 relative à la discipline des notaires et de certains officiers ministériels.

72 () La suspension provisoire est définie par l'article L. 822-4 du code de l'organisation judiciaire. Elle peut être prononcée par le tribunal de grande instance à l'encontre du greffier qui fait l'objet d'une poursuite pénale ou disciplinaire. Elle cesse de plein droit dès que les actions pénale ou disciplinaire sont éteintes.

73 () Article 20 de l'ordonnance n° 45-1418 du 28 juin 1945 relative à la discipline des notaires et de certains officiers ministériels.

74 () En raison de la création d'une chambre interdépartementale réunissant les notaires de la ville de Paris, des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne, les chambres départementales des notaires sont appelées « chambres des notaires » depuis le décret n° 67-1234 du 22 décembre 1967 dérogeant à l'article 2 de l'ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945 relative au statut du notariat en ce qui concerne le ressort de certaines chambres de notaires.

75 () Loi modifiant la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution et l'ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers et comportant diverses dispositions relatives aux procédures civiles d'exécution.

76 () Le nombre d'experts près les cours d'appel est estimé à 13 000 et celui des experts près la Cour de cassation à 900.

77 () Cour de cassation, deuxième chambre civile, 8 octobre 1986, Redaud.

78 () Réponse à la question écrite n° 6771, Journal officiel, Questions, Assemblée nationale, 6 janvier 2003.

79 () Discours de M. Dominique Perben, garde des Sceaux, lors du forum des huissiers de justice le 12 décembre 2002.

80 () Cet article soumet notamment au secret professionnel les agents des services publics et des organisations appelés à servir d'intermédiaire pour des enquêtes statistiques.

81 () Cette faculté est à distinguer des possibilités ouvertes au procureur de la République dans le cadre d'une poursuite pénale, conformément à l'article L. 141 A du livre des procédures fiscales.

82 () Exposé des motifs du projet de loi.

83 () United States district court, southern district of New-York, 31 mars 1998.

84 () Pierre Julien, Natalie Fricero, Droit judiciaire privé, lgdj, 2001.

85 () L'article 571 du nouveau code de procédure civile précise que l'opposition est une voie de recours ordinaire, ouverte au seul défaillant, qui tend à faire rétracter un jugement rendu par défaut, c'est-à-dire « si la décision est en dernier ressort et si la citation n'a pas été délivrée à personne » (art. 473 du ncpc).

86 () Pierre Julien, Natalie Fricero, ouvrage précité.

87 () C'est notamment le cas des décisions de divorce et de séparation de corps, en matière de prestation compensatoire, mais aussi, par exemple, en matière de dépens (art. 515, al. 2 du ncpc), lorsque le jugement est susceptible de contredit (art. 81 du NCPC) ou lorsqu'il s'agit d'un jugement d'adjudication sur saisie immobilière (art. 706 du ncpc).

88 () La documentation française, 1997.

89 () Loïc Cadiet, « feu l'exécution immédiate des jugements ? Regrets de la France du milieu », la semaine juridique édition générale, n°34, 4 septembre 2002, p. 1489.

90 () Jean-Marie Coulon, « quelques remarques sur un projet de décret de procédure civile », Gazette du Palais, 24 juin 2002, p. 4 et 5.

91 () CEDH, 19 mars 1997, Hornsby c/ Grèce, Dalloz 1998, p.74, observations de Natalie Fricero.

92 () Article de Loïc Cadiet précité, dans lequel il est souligné que « sinon, il n'y aurait plus de jugements prononcés en premier et dernier ressort ».

93 () Jean-Claude Magendie, « l'exécution immédiate des décisions de justice : l'injuste critique d'une réforme nécessaire », Dalloz 2002, n°°31, p. 2411.

94 () Jean-Claude Magendie, article précité.

95 () Serge Guinchard, « Un bon exemple de la France d'en haut contre la France d'en bas : le projet de suppression de l'effet suspensif de l'appel », Petites affiches, 5 juin 2002, p. 4.

96 () Thierry Le Bars, « vers une suppression de l'effet suspensif de l'appel ? », Dalloz 2002, n° 25, p. 1987.

97 () CEDH, 18 avril 2002, Ouzounis c/ Grèce, Dalloz 2002, p. 2572, observations de Natalie Fricero.

98 () Cette lacune devrait être comblée à partir de la collecte de janvier 2004.

99 () Philippe Hoonakker, « l'exécution immédiate ou la protection renforcée du perdant », Petites affiches, 11 décembre 2002, n° 247, p.13.

100 () Remarque présentée dans l'article de M. Philippe Hoonakker précité.

101 () Le taux d'infirmation des décisions rendues par les conseils de prud'hommes en 2001 a été de 26,5 % ; le taux de confirmation totale a été de 39,5 % et celui de confirmation partielle a été de 34 %.

102 () Aucune disposition ne définissant aujourd'hui les conditions de consultation de cette assemblée territoriale, c'est donc au projet de loi qu'il revient de préciser l'institution consultée et le délai qui lui est laissé pour donner son avis.

103 () S'agissant de Saint-Pierre-et-Miquelon, le principe est celui de l'assimilation législative, seuls la réglementation relative à l'urbanisme et le régime fiscal et douanier étant spécifiques à cette collectivité.

104 () En effet, ces deux paragraphes reprennent les dispositions qui figurent actuellement dans le paragraphe VI et dans le premier alinéa du paragraphe XI ; les autres paragraphes qui, aujourd'hui, ne sont pas applicables à la collectivité sont supprimés.

105 () L'article 71 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 précise qu'en cas de premier échec à l'examen du capa, l'élève peut accomplir à nouveau une année de formation.

106 () L'article 71 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 précise qu'après un deuxième échec, le candidat ne peut plus se présenter au capa sauf s'il est autorisé à suivre une troisième année de formation par délibération du conseil d'administration du centre régional de formation professionnelle.

107 () Rapport précité, p. 220.

108 () Fixée par un décret du 5 novembre 1870 relatif à la promulgation des lois et décrets, la date d'entrée en vigueur d'une loi qui ne comporte pas de date explicite d'entrée en vigueur, varie selon le lieu : un jour franc à partir de la date de la publication au Journal officiel pour Paris ; un jour franc à partir de l'arrivée du Journal officiel au chef-lieu d'arrondissement ou dans les collectivités territoriales, pour la France métropolitaine, les départements d'outre-mer, Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon. Le régime d'entrée en vigueur devrait être modifié prochainement, l'article 4 de la loi n° 2003-591 du 2 juillet 2003 habilitant le Gouvernement à simplifier le droit l'ayant autorisé à le modifier par ordonnance. L'avant-projet d'ordonnance relatif aux modalités et effets de la publication des lois et de certains actes administratifs pourrait fixer l'entrée en vigueur des lois ne comportant pas de date d'entrée en vigueur, au lendemain de leur publication au Journal officiel. Toutefois, lorsque l'exécution de tout ou partie de leurs dispositions nécessite des mesures d'application, il serait envisagé que ces dispositions n'entrent en vigueur qu'à la date d'entrée en vigueur de ces mesures (cf. Étienne Blanc, rapport sur le projet de loi portant habilitation du Gouvernement à prendre par ordonnance des mesures de simplification et de codification du droit, Assemblée nationale, XIIe législature, document n° 752, 26 mars 2003, pages 51 à 55 et pages 313 et 314).


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