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le 14 avril 2004

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N° 1538

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 13 avril 2004.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI, ADOPTÉ PAR LE SÉNAT, autorisant la ratification de la décision du Conseil réuni au niveau des chefs d'Etat ou de Gouvernement du 21 mars 2003 relative à une modification de l'article 10.2 des statuts du Système européen de banques centrales et de la Banque centrale européenne,

PAR M. PHILIPPE COCHET,

Député

--

Voir les numéros :

Sénat : 240, 247 et T.A. 70 (2003-2004)

Assemblée nationale : 1514

SOMMAIRE

___

INTRODUCTION 5

I - LES TROIS PHASES DE L'UNION ÉCONOMIQUE ET MONÉTAIRE 7

A - LA PREMIÈRE PHASE 7

B - LA DEUXIÈME PHASE 7

C - LA TROISIÈME PHASE 8

II - LE SYSTÈME EUROPÉEN DE BANQUES CENTRALES 9

A - LE DIRECTOIRE 9

B - LE CONSEIL DES GOUVERNEURS 9

C - LE CONSEIL GÉNÉRAL 10

III - L'INSTAURATION D'UN SYSTÈME DE VOTE PAR ROTATION 11

A - LES CARACTÉRISTIQUES GÉNÉRALES DU SYSTÈME 11

B - LA CONSTITUTION DE GROUPES D'ETATS 12

1) De quinze à vingt-et-un gouverneurs : la création de deux groupes d'Etats 12

2) A partir de vingt-deux gouverneurs : la création de trois groupes d'Etats 13

CONCLUSION 15

EXAMEN EN COMMISSION 17

AUDITION DU MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES 21

SUITE DE L'EXAMEN EN COMMISSION 25

Mesdames, Messieurs,

En prévision de l'élargissement de l'Union européenne à dix nouveaux membres le 1er mai prochain et des élargissements à venir (jusqu'à vingt-sept membres), la Banque centrale européenne (BCE) a préparé une réforme de son fonctionnement interne. Sur la base de l'article 10.61 du Traité de Nice, entré en vigueur le 1er février 2003, la BCE a adopté, dès le 3 février 2003, une recommandation de décision portant réforme du fonctionnement de son instance décisionnelle, le Conseil des gouverneurs. Cet article 10.6 doit être lu en liaison avec la Déclaration relative à l'article 10.6 des statuts du Système européen de banques centrales et de la Banque centrale européenne qui a été annexée au Traité de Nice2. Cette recommandation a été transmise au Conseil de l'Union européenne réuni au niveau des chefs d'Etat ou de gouvernement qui l'a adoptée sans modification le 21 mars 2003.

Le présent projet de loi a pour objet d'autoriser la ratification de cette Décision du Conseil relative à une modification de l'article 10.2 des statuts du Système européen de banques centrales et de la Banque centrale européenne. Cette réforme entrera en vigueur après ratification par tous les Etats membres de l'Union européenne.

Après avoir brièvement rappelé l'historique de la construction européenne en matière économique et monétaire et précisé la composition du Système européen de banques centrales, votre Rapporteur se propose de présenter les dispositions de cette réforme contenues dans le présent projet de loi.

I - LES TROIS PHASES DE L'UNION ÉCONOMIQUE ET MONÉTAIRE

A - La première phase

En juin 1989, le Conseil européen a décidé que la première phase de l'Union économique et monétaire (UEM) commencerait le 1er juillet 1990, date de l'abolition en principe de toutes les restrictions aux mouvements de capitaux entre les Etats membres. L'objectif de cette première phase était de renforcer la coopération entre banques centrales. Une décision du Conseil du 12 mars 1990 a confié au Comité des gouverneurs des banques centrales des Etats membres de la Communauté économique européenne, dont la création remonte à mai 1964, de nouvelles missions, notamment l'organisation de consultations sur les politiques monétaires des Etats membres et la promotion de la coordination de celles-ci en vue de réaliser la stabilité des prix.

Pour réaliser les deuxième et troisième phases, le Traité de Rome a été modifié afin de mettre en place la structure institutionnelle requise. En 1991, la conférence intergouvernementale sur l'UEM a abouti à la conclusion du Traité sur l'Union européenne signé à Maastricht le 7 février 1992. Ce traité, désormais intitulé Traité instituant la Communauté européenne, et auquel étaient annexés à la fois le protocole sur les statuts du Système européen de banques centrales (SEBC) et de la Banque centrale européenne (BCE) et le protocole sur les statuts de l'Institut monétaire européen (IME), n'est toutefois entré en vigueur que le 1er novembre 1993, du fait de la lenteur du processus de ratification.

B - La deuxième phase

La deuxième phase de l'UEM a débuté le 1er janvier 1994 avec la mise en place de l'IME, en remplacement du Comité des gouverneurs, dissous. En décembre 1995, le Conseil européen a donné le nom d'euro à l'unité monétaire européenne et décidé que sa mise en circulation interviendrait le 1er janvier 2002.

Afin de compléter les dispositions du Traité relatives à l'UEM, le Conseil européen d'Amsterdam a adopté, en juin 1997, le Pacte de stabilité et de croissance qui vise à assurer la discipline budgétaire au cours de la troisième étape.

Le 2 mai 1998, le Conseil de l'Union européenne réuni au niveau des chefs d'Etat ou de gouvernement a considéré à l'unanimité que onze Etats membres3 remplissaient les conditions nécessaires pour l'adoption de la monnaie unique au 1er janvier 1999 et seraient ainsi appelés à participer à la troisième phase de l'UEM. En outre, les chefs d'Etat ou de gouvernement sont parvenus à un accord sur les noms des personnalités devant être nommées, sur recommandation du Conseil, membres du Directoire de la BCE. Le 25 mai 1998, les gouvernements des onze Etats membres participants ont nommé les membres de ce Directoire, nominations qui ont pris effet le 1er juin 1998, marquant ainsi la mise en place de la BCE. Avec l'instauration de la BCE le 1er juin 1998 a pris fin la mission de l'IME, conformément à l'article 1234 du Traité instituant la Communauté européenne (ex-article 109 L).

C - La troisième phase

La troisième et dernière phase de l'UEM s'est ouverte le 1er janvier 1999 avec la fixation irrévocable des taux de change des monnaies des onze Etats membres participant dès le début à l'union monétaire et la mise en œuvre d'une politique monétaire unique sous la responsabilité de la BCE. Le Système européen de banques centrales (SEBC) a été créé.

Le 19 juin 2000, le Conseil de l'UE réuni au niveau des chefs d'Etat ou de gouvernement a estimé que la Grèce remplissait également les critères de convergence. Le 1er janvier 2001, elle est donc entrée dans la troisième phase de l'UEM, portant à douze le nombre des Etats membres de l'eurogroupe.

II - LE SYSTÈME EUROPÉEN DE BANQUES CENTRALES

Le Système européen de banques centrales (SEBC) est composé de la Banque centrale européenne (BCE) et des Banques centrales nationales (BCN) des quinze Etats membres de l'Union européenne. Il formule et définit la politique monétaire unique durant la troisième phase de l'UEM.

La BCE et les BCN des douze Etats membres de la zone euro constituent ce que l'on appelle l'Eurosystème.

Le processus de prise de décisions au sein de l'Eurosystème est centralisé au niveau des organes de décision de la BCE qui sont le Directoire et le Conseil des gouverneurs. Tant que certains Etats membres n'ont pas adopté l'euro, il existe un troisième organe qui est le Conseil général.

A - Le Directoire

Le Directoire se compose du Président, du Vice-Président et de quatre autres membres5, tous choisis parmi des personnes dont l'autorité et l'expérience professionnelle dans le domaine monétaire ou bancaire sont reconnues. Ils sont nommés d'un commun accord par les gouvernements des Etats membres au niveau des chefs d'Etat ou de gouvernement, sur recommandation du Conseil de l'Union européenne et après consultation du Parlement européen et du Conseil des gouverneurs de la BCE. Le Directoire a pour principales responsabilités de mettre en œuvre la politique monétaire conformément aux orientations et aux décisions arrêtées par le Conseil des gouverneurs de la BCE et, dans ce cadre, de donner les instructions nécessaires aux BCN. Il est également chargé d'exercer les pouvoirs qui lui sont délégués par décision du Conseil des gouverneurs de la BCE.

B - Le Conseil des gouverneurs

Le Conseil des gouverneurs se compose des membres du Directoire et des gouverneurs des BCN des douze Etats membres ayant adopté l'euro6. Son rôle est principalement d'arrêter les orientations et de prendre les décisions nécessaires à l'accomplissement des missions confiées à l'Eurosystème. Il est également chargé de définir la politique monétaire de la zone euro, y compris, le cas échéant, les décisions concernant les objectifs monétaires intermédiaires, les taux directeurs et l'approvisionnement en réserves au sein de l'Eurosystème. Enfin, il arrête les orientations nécessaires à leur exécution.

C - Le Conseil général

Le Conseil général se compose du Président et du Vice-Président de la BCE ainsi que des gouverneurs des BCN des quinze Etats membres. Il contribue également aux fonctions consultatives de la BCE, à collecter les informations statistiques, à établir les rapports annuels de la BCE, à arrêter les règles nécessaires à la normalisation des procédures comptables et de déclaration relatives aux opérations des BCN, à prendre les mesures, autres que celles déjà prévues dans le Traité, relatives à la définition de la clé de répartition pour la souscription au capital de la BCE, à définir les conditions d'emploi du personnel de la BCE. Le Conseil général est enfin compétent pour procéder aux préparatifs nécessaires à la fixation irrévocable des taux de change des monnaies des Etats membres faisant l'objet d'une dérogation par rapport à l'euro. Il a vocation à disparaître dès que tous les pays de l'UE auront rejoint la zone euro.

III - L'INSTAURATION D'UN SYSTÈME DE VOTE PAR ROTATION

La mise en place de ce système fort complexe de vote par groupes d'Etats et par rotation a théoriquement pour objectif de définir par avance les règles de vote qui seront applicables dans la perspective de l'élargissement de la zone euro.

A - Les caractéristiques générales du système

Actuellement, tous les membres du Conseil des gouverneurs, c'est-à-dire les six membres du Directoire et les douze gouverneurs des Banques centrales, disposent en permanence chacun d'un droit de vote.

La nouvelle rédaction de l'article 10.2 prévoit que, dans le futur, le droit de vote au sein du Conseil des gouverneurs s'exercera dans le cadre d'un système de « rotation asymétrique » : tous les gouverneurs pourront participer aux débats du Conseil des gouverneurs, mais seuls quinze d'entre eux se verront reconnaître, pour une durée limitée, un droit de vote, sachant que le droit de vote individuel des six membres du Directoire est préservé.

Les Etats seront répartis en deux ou trois groupes en fonction de leur poids économique et de leur puissance financière. Chacun de ces groupes est caractérisé par une fréquence d'exercice du droit de vote distincte. Néanmoins, au sein de chaque groupe, les droits de vote sont attribués aux gouverneurs pour une durée identique. Le droit de vote est exercé en personne. Par dérogation à cette règle, le règlement intérieur visé à l'article 12.37 peut prévoir le vote par téléconférence des membres du Conseil des gouverneurs. Ce même règlement prévoit également qu'un membre du Conseil des gouverneurs qui est empêché d'assister aux réunions du Conseil des gouverneurs pendant une période prolongée peut désigner un suppléant pour le remplacer en tant que membre du Conseil des gouverneurs.

Les nouvelles dispositions sont sans préjudice du droit de vote de tous les membres du Conseil des gouverneurs, qu'ils disposent ou non du droit de vote, en vertu des articles 10.38, 10.69 et 41.210.

Sauf disposition contraire figurant dans les présents statuts, les décisions du Conseil des gouverneurs sont prises à la majorité simple des membres ayant le droit de vote. Le Président a voix prépondérante en cas de partage des voix.

Le quorum fixé pour que le Conseil des gouverneurs puisse voter est de deux tiers des membres ayant droit de vote. Si le quorum n'est pas atteint, le Président peut convoquer une réunion extraordinaire au cours de laquelle les décisions peuvent être prises sans ce quorum.

B - La constitution de groupes d'Etats

Les Etats seront répartis en deux groupes (lorsqu'il y aura de quinze à vingt-et-un gouverneurs) ou trois groupes (au-delà de vingt-et-un gouverneurs). L'appartenance à un groupe est fonction essentiellement (pour cinq sixièmes) du poids économique du pays par rapport au PIB total des Etats membres de la zone euro mais dépend aussi (pour un sixième) de la part de ce pays dans le bilan agrégé des institutions financières monétaires. La taille, le nombre et la composition des groupes ont vocation à être modifiés en fonction de l'évolution de la situation économique et financière des Etats membres et de l'augmentation du nombre des gouverneurs. L'appartenance à un groupe permet de déterminer le nombre des gouverneurs par groupe, le nombre d'entre eux qui seront détenteurs d'un droit de vote et enfin la fréquence de l'exercice de ce droit de vote.

1) De quinze à vingt-et-un gouverneurs : la création de deux groupes d'Etats

La répartition des Etats entre ces deux groupes se fait selon le classement fondé sur les critères précités. Le premier groupe composé des cinq gouverneurs des pays les plus importants obtient quatre droits de vote, le second groupe détenant onze droits de vote. Dans ces conditions, un des cinq grands pays ne disposera plus systématiquement du droit de vote.

Toutefois, le Conseil des gouverneurs, statuant à la majorité des deux tiers de l'ensemble de ses membres, qu'ils disposent ou non du droit de vote, peut décider de différer l'application du système de rotation jusqu'à la date à laquelle le nombre de gouverneurs est supérieur à dix-huit. L'objectif ainsi poursuivi est de respecter la disposition du premier tiret de l'article 10.2 de la présente décision qui prévoit que la fréquence des droits de vote des gouverneurs du premier groupe ne doit pas être inférieure à celle des droits de vote des gouverneurs du second groupe.

Le tableau ci-dessous présente une synthèse de la répartition des voix et des fréquences de vote au sein du Conseil des gouverneurs jusqu'à vingt-et-un gouverneurs.

Nombre de gouverneurs compris entre quinze et vingt-et-un

Nombre total de gouverneurs

Nombre de gouverneurs par groupe

Droits de vote

Fréquence de vote

Groupe 1

Groupe 2

Groupe 1

Groupe 2

Groupe 1

Groupe 2

16

5

11

4

11

80 %

100 %

17

5

12

4

11

80 %

91,6 %

18

5

13

4

11

80 %

84,6 %

19

5

14

4

11

80 %

78,5 %

20

5

15

4

11

80 %

73,3 %

21

5

16

4

11

80 %

68,7 %

Source : ministère des Affaires étrangères

2) A partir de vingt-deux gouverneurs : la création de trois groupes d'Etats

Dans cette répartition des Etats en trois groupes, le premier groupe reste inchangé : cinq gouverneurs avec quatre droits de vote ; le deuxième groupe est constitué de la moitié du nombre total de gouverneurs, arrondi au nombre entier supérieur en cas de décimale, avec huit droits de vote et le troisième groupe est constitué des gouverneurs restants avec trois droits de vote.

Le tableau ci-dessous présente une synthèse de la répartition des voix et des fréquences de vote au sein du Conseil des gouverneurs à partir de vingt-deux gouverneurs.

Nombre de gouverneurs supérieur à vingt-et-un

Nombre total

Nombre de gouverneurs par groupe

Droits de vote

Fréquence de vote

de gouverneurs

Groupe 1

Groupe 2

Groupe 3

Groupe 1

Groupe 2

Groupe 3

Groupe 1

Groupe 2

Groupe 3

22

5

11

6

4

8

3

80 %

72,7 %

50 %

23

5

12

6

4

8

3

80 %

66,6 %

50 %

24

5

12

7

4

8

3

80 %

66,6 %

42,8 %

25

5

13

7

4

8

3

80 %

61,5 %

42,8 %

26

5

13

8

4

8

3

80 %

61,5 %

37,5 %

27

5

14

8

4

8

3

80 %

57,1 %

37,5 %

Source : ministère des Affaires étrangères

CONCLUSION

Cette proposition de réforme du fonctionnement de la Banque centrale européenne est exemplaire à plus d'un titre.

Elle a tout d'abord le mérite de préserver la capacité du Conseil des gouverneurs à prendre des décisions de manière efficace et en temps opportun dans une zone euro élargie.

Pour parvenir à cet objectif, les Etats membres de la BCE ont accepté d'introduire une hiérarchie entre les Banques centrales. Des pays comme l'Allemagne, la France, l'Italie, l'Espagne ou encore les Pays-Bas pèseront le même poids dans le Conseil des gouverneurs alors que leurs PIB respectifs sont très différents. D'autres pays se voient conférer un statut secondaire. Il en ira ainsi du Luxembourg dont la banque centrale était jusqu'à présent l'égale des banques centrales des cinq grands précités.

Cette réforme a aussi pour principale qualité d'assurer à la fois une représentation politique des Etats et la représentation économique de l'ensemble de la zone euro, même si l'on peut regretter l'absence du critère démographique.

Au vu de ces considérations, votre Rapporteur vous recommande l'adoption du présent projet de loi.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du mercredi 7 avril 2004, la Commission a examiné, sur le rapport de M. Christian Philip, suppléant M. Philippe Cochet, empêché, le présent projet de loi.

M. Christian Philip a tout d'abord indiqué que la Banque centrale européenne (BCE) avait adopté, le 3 février 2003, une recommandation de décision portant réforme du fonctionnement de son instance décisionnelle, le Conseil des gouverneurs. Ce processus a été engagé en prévision de l'élargissement de l'Union européenne à dix nouveaux membres le 1er mai prochain et des élargissements à venir. Cette recommandation a été adoptée sans modification le 21 mars 2003 par le Conseil de l'Union européenne réuni au niveau des chefs d'Etat ou de Gouvernement. Il reste maintenant aux Etats membres de l'Union européenne à ratifier ce texte pour qu'il puisse entrer en vigueur.

Dans le Système européen de banques centrales (SEBC) mis en place, la BCE est composée de trois instances. Le Directoire se compose du Président qui est actuellement M. Jean-Claude Trichet, du Vice-Président et de quatre autres membres. Il est chargé d'administrer la banque. Le Conseil des gouverneurs se compose des membres du Directoire et des gouverneurs des Banques centrales nationales (BCN) des douze Etats membres ayant adopté l'euro. Son rôle est d'arrêter les orientations. Il existe également un Conseil général qui se compose du Président et du Vice-Président de la BCE ainsi que des gouverneurs des BCN des quinze Etats membres. Celui-ci a néanmoins vocation à disparaître dès que tous les pays de l'UE auront rejoint la zone euro.

La réforme proposée consiste à mettre fin au système « un membre un vote » qui s'appliquait jusqu'à présent au Conseil des gouverneurs et à répartir les gouverneurs en deux ou trois groupes, en fonction du poids économique et de la puissance financière des Etats dans la zone euro, avec des droits de vote distincts et une fréquence d'exercice du droit de vote distincte. Jusqu'à vingt-et-un gouverneurs, il y aura deux groupes, puis trois à partir de 22 gouverneurs. L'appartenance à un groupe en fonction du poids économique du pays jouera pour cinq sixièmes alors que la part de ce pays dans le bilan agrégé des institutions financières monétaires comptera pour un sixième. Le premier groupe sera composé des cinq gouverneurs des pays les plus importants économiquement qui se verront attribuer quatre droits de vote. Cela signifie qu'un des grands ne disposera plus systématiquement du droit de vote. Toutefois, le Conseil des gouverneurs, statuant à la majorité des deux tiers de l'ensemble de ses membres, qu'ils disposent ou non du droit de vote, peut décider de différer l'application du système de rotation jusqu'à la date à laquelle le nombre de gouverneurs est supérieur à dix-huit. L'objectif ainsi poursuivi est de respecter la disposition du premier tiret de l'article 10.2 de la présente décision qui prévoit que la fréquence des droits de vote des gouverneurs du premier groupe ne doit pas être inférieure à celle des droits de vote des gouverneurs du second groupe.

Les mérites du système sont évidents : il s'agit de préserver la capacité de décision du Conseil des gouverneurs en introduisant une certaine hiérarchie entre les différents pays. A la date d'aujourd'hui, le premier groupe serait constitué de l'Allemagne, de la France, de l'Italie, de l'Espagne et des Pays-Bas.

M. Jacques Myard, après avoir remercié le Rapporteur pour la précision de ses propos, a fait part de son profond désaccord sur le système de vote proposé au sein de la BCE. La France appartiendrait ainsi au groupe 1 des cinq pays économiquement les plus importants, groupe qui ne détiendrait que 4 droits de vote. Son gouverneur serait donc, à certaines périodes, privé du droit de vote, ce qui est proprement inadmissible, et pose le problème de la nature de la Banque centrale européenne qui devient de ce fait une institution totalement technocratique. Quelle serait, en effet, la légitimité démocratique de cette institution si un pays comme la France, dont le poids économique au sein de l'UE est prépondérant, était privé de son droit de vote à un moment où la politique monétaire et la Banque centrale jouent un rôle décisif pour stimuler la croissance. Il est inacceptable que la France ne puisse pas, même temporairement, exercer son droit de vote. Il est indispensable que les membres de la Commission des Affaires étrangères en prennent conscience et que soit demandé le report de cette décision.

Par ailleurs, d'une manière générale, les modifications de statut ne devraient pas pouvoir se faire sans que le Parlement français soit à nouveau consulté. Il y a déjà eu dans le passé le précédent du Fonds monétaire international. Le Parlement avait à l'époque vivement réagi contre le fait que l'on puisse adopter des mesures au FMI qui apparaissaient comme techniques et qui privaient totalement la France de pouvoir ensuite dire non, la mettant devant le fait accompli. Si l'on peut comprendre qu'avec un Conseil des gouverneurs composé de 31 membres, des difficultés peuvent se présenter, et qu'ainsi, pour une fois, une règle de majorité est la bienvenue, il n'en demeure pas moins que priver de droit de vote l'un des Etats les plus importants sur le plan économique dans l'Union européenne est complètement aberrant. Il y a là un engagement politique qui risque d'être, quel que soit le gouvernement, véritablement dramatique, notamment lorsque l'opinion publique aura conscience que la France se verra imposer des décisions sur lesquelles elle se sera, par avance, privée de pouvoir dire oui ou non. Dans ces conditions, M. Jacques Myard a indiqué qu'il ne pouvait pas adopter le présent projet de loi.

M. Christian Philip a indiqué qu'il ne pouvait y avoir de modifications ultérieures de ce texte sans l'accord des Parlements nationaux dans la mesure où il s'agit d'une modification des traités et a fait observer qu'en l'espèce le Parlement était saisi du projet de loi visant à autoriser la ratification du futur dispositif de vote au sein de la BCE.

M. Jacques Myard a fait référence au premier alinéa de l'exposé des motifs. Aux termes de celui-ci, le vote du présent projet de loi équivaut à voter une clause d'habilitation qui prévoit que le Conseil de l'Union européenne réuni au niveau des chefs d'Etat et de Gouvernement peut recommander l'adoption de modifications. Est-ce à dire que le Parlement n'aura pas son mot à dire ?

M. Christian Philip a répondu que la lecture faite par M. Jacques Myard de ladite clause d'habilitation était erronée. Cette recommandation du Conseil doit être soumise à ratification des Parlements nationaux pour entrer en vigueur. L'exposé des motifs est d'ailleurs clair à ce sujet.

Par ailleurs, sur le fond, si ce texte aboutit à ce que par périodes de durée limitée, un des grands pays n'exerce pas son droit de vote, il faut souligner que ce système ne va pas s'appliquer dans l'immédiat et que tous les pays, y compris l'Allemagne, l'ont accepté. En réalité, la BCE procède par consensus et il est de tradition qu'aucune décision ne soit prise dans cette instance contre tel ou tel Etat. Toute décision est de ce fait prise collectivement.

M. Jacques Myard a de nouveau insisté sur l'extrême importance de ce sujet et affirmé son désaccord avec le Rapporteur sur ce point. M. Jean-Claude Trichet lui-même, lorsqu'il était gouverneur de la Banque de France et qu'il siégeait au sein de cette institution, a reconnu que les décisions étaient prises à la majorité. S'il y a bien sûr parfois un consensus, il peut également y avoir des votes et ceux-ci bien évidemment ne donnent pas lieu à un procès-verbal parce qu'il y a une règle qui veut que l'on ne mette pas cela par écrit. Pour ces raisons, cette modification du système de vote à la BCE est extrêmement néfaste.

Par ailleurs, M. Jacques Myard a ajouté que la seule réforme qui devrait être faite dans l'état actuel des choses consistait à permettre au Conseil européen de faire effectivement des recommandations à la Banque centrale pour qu'elle prenne en compte la nécessité de croissance. A cet égard, il a indiqué qu'il se proposait d'en saisir le Gouvernement.

M. Guy Lengagne a estimé que le problème soulevé par M. Jacques Myard était préoccupant, sinon grave, et que les arguments avancés militaient pour un report de la décision à prendre sur ce texte.

M. Serge Janquin a souligné que la BCE ayant été conçue comme devant être indépendante, ce statut conduisait aujourd'hui à une réflexion proche de celle avancée par M. Jacques Myard, dans la mesure où il n'y a pas de politique économique et sociale européenne affichée qui permettrait d'équilibrer le pouvoir de la BCE. Etant donné que la décision proposée n'interdit pas désormais qu'une décision soit prise contre les intérêts d'un pays, l'on ne peut que partager la position de M. Jacques Myard.

M. Gilbert Gantier a souhaité obtenir des précisions sur le processus législatif concernant ce projet de loi, pour lequel la convocation de la présente réunion indiquait qu'il avait été déposé sur le bureau du Sénat.

M. Christian Philip a répondu qu'étant donné l'urgence de ce texte, il avait été adopté en séance publique au Sénat le mardi 6 avril pour être ensuite examiné en séance publique à l'Assemblée le jeudi 8 avril, soit deux jours après. Dans ces conditions, l'impression du présent projet de loi doté d'un numéro Assemblée n'a pu être réalisée avant la tenue de la présente réunion de commission.

A l'initiative de M. Jacques Myard et en application de l'article 128, alinéa 2, du Règlement, une demande d'ajournement ainsi motivée a été proposée :

« L'Assemblée nationale est saisie d'un projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de la décision du Conseil réuni au niveau des chefs d'Etat ou de Gouvernement du 21 mars 2003 relative à une modification de l'article 10.2 des statuts du Système européen de banques centrales et de la Banque centrale européenne.

Compte tenu de l'importance de ce texte, une audition du Ministre des Affaires étrangères par la Commission des Affaires étrangères s'impose afin d'éclairer l'Assemblée sur les enjeux de cette modification des Traités. Elle décide en conséquence d'ajourner le projet de loi (n° 1514)».

La demande d'ajournement ainsi motivée a été adoptée par la Commission des Affaires étrangères.

*

*       *

La Commission vous demande donc de conclure à l'ajournement du projet de loi (n° 1514), en application de l'article 128, alinéa 2, du Règlement.

AUDITION DE M. MICHEL BARNIER,
MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

Au cours de sa réunion du 13 avril 2004, la Commission a procédé à l'audition de M. Michel Barnier, Ministre des Affaires étrangères, sur le présent projet de loi.

Le Président Roland Blum a indiqué que l'audition du Ministre des Affaires étrangères faisait suite à l'adoption par la Commission des Affaires étrangères d'une motion d'ajournement sur le projet de loi relatif au Système européen de banques centrales, celle-ci ayant souhaité obtenir un complément d'information.

M. Michel Barnier a tout d'abord considéré qu'il devait en quelque sorte remercier les auteurs de la présente motion dans la mesure où ils lui fournissaient ainsi l'occasion d'un premier contact avec la Commission des Affaires étrangères, tout en indiquant qu'il restait disponible pour une audition consacrée à l'ensemble des sujets internationaux et européens.

Puis il a abordé la question de la modification des statuts de la Banque centrale européenne (BCE), question technique et importante, qu'il convient de défendre sans se tromper sur les intérêts de la France en la matière. Ce sujet est symbolique d'un problème plus général qui est celui du fonctionnement de l'Union européenne élargie. Comment travaille-t-on, comment se parle-t-on, comment décide-t-on à vingt-cinq ou vingt-sept Etats membres par rapport à quinze ou six ? Cette question qui se pose à la BCE intéresse en réalité toutes les institutions européennes. Pour y répondre, le Conseil des gouverneurs de la BCE a imaginé une solution qui a été approuvée par le Conseil des chefs d'Etat ou de gouvernement au travers de la décision du 21 mars 2003. Sans préjuger de ce qui se passera dans les autres institutions européennes, le Ministre des Affaires étrangères a déclaré que le traitement de la France, qui est un grand pays au sein du Conseil de la BCE, constituait un précédent positif.

Concernant l'objectif poursuivi par la présente réforme, il a précisé qu'il s'agissait de préserver l'efficacité de la BCE dans une zone euro qui va s'élargir. Aujourd'hui, chacun des représentants des Etats membres de la zone euro qui siègent au Conseil des gouverneurs y disposent d'une voix, soit douze représentants, auxquels viennent s'ajouter les six membres du Directoire de la BCE qui détiennent chacun également une voix. Le tout représente aujourd'hui dix-huit personnes. Il n'est pas raisonnable d'aller très au-delà si l'on veut préserver la crédibilité de la BCE vis-à-vis des marchés.

Les modalités de cette réforme consistent à plafonner à vingt-et-un le nombre de votants en répartissant les gouverneurs au sein de trois groupes et en introduisant un système de rotation de vote dans chaque groupe, avec dans les deux derniers groupes une fréquence de vote inférieure à celle du premier groupe comprenant les grands pays. Ce système de rotation s'appuie sur les cinq principes fondamentaux de la BCE. Le premier étant « une voix par membre », sachant qu'à un certain moment tous les gouverneurs ne voteront pas tous en même temps et que les grands pays voteront plus fréquemment que les petits. Le deuxième est celui de la participation à titre personnel : tous les membres participent à toutes les réunions même s'ils ne disposent pas du droit de vote. Le troisième est celui de la représentativité qui se traduit par une différenciation entre les membres du Conseil des gouverneurs au niveau de la fréquence de vote ; celle-ci est plus importante pour les grands pays. Le quatrième est celui de l'automaticité : l'adaptation au processus d'élargissement sera automatique jusqu'à vingt-sept membres. Enfin le cinquième et dernier principe est celui de la transparence : ce système de rotation satisfait aux exigences du droit communautaire.

Ce texte présente des avantages pour le France. Entre le statu quo et la présente réforme, la France a fait le choix de la solution la plus avantageuse. Elle accepte de perdre son droit de vote permanent mais cette concession lui permet de rester, avec l'Allemagne et le Royaume-Uni lorsqu'il le décidera, dans le premier groupe de pays dont la fréquence de vote sera de 80 %. Le droit de vote de la France, qui est dans le premier groupe, passera de 100 % du temps à 80 % du temps, celui du deuxième groupe de 100 % à 57 % du temps et celui du troisième groupe de 57 % à 37 %. Parmi les institutions européennes qui ne sont pas parvenues à une solution différenciant les grands pays des petits, le Ministre des Affaires étrangères a cité l'exemple du Tribunal de première instance de la Cour de justice.

En conclusion, il a souligné que beaucoup de raisons objectives militaient en faveur de cette réforme et insisté sur les délais et l'urgence à ratifier avant le 1er mai prochain, date de la réunification de l'Union, et ce pour deux raisons. D'une part, la France se doit de respecter ses engagements européens. Douze Etats membres ont déjà achevé leur procédure de ratification. D'autre part, une fois la procédure de ratification achevée par tous les Etats membres de l'Union, cette réforme des statuts fera partie de l'acquis communautaire que les dix nouveaux entrants doivent reprendre. A défaut, leur accord sera nécessaire pour changer le système. La France ne doit pas être responsable de l'échec d'une réforme qui a été conçue par un Français, M. Jean-Claude Trichet, et qui favorise les grands. Ce compromis est le meilleur qui soit dans l'intérêt national. Il a été trouvé à quinze et adopté à l'unanimité. Ne pas l'entériner reviendrait à remettre le sort de la France entre les mains de vingt-quatre autres Etats demain. La France doit choisir entre une fréquence de vote représentant un quinzième pendant 80 % du temps ou un vingt-septième pendant 100 % du temps.

M. Philippe Cochet, Rapporteur, a remercié le Ministre des Affaires étrangères pour les explications apportées à la Commission des Affaires étrangères et rappelé les deux points importants contenus dans cette réforme et soulignés par celui-ci. Il s'agit de préserver d'une part l'efficacité de la BCE, et les modalités proposées vont dans ce sens, d'autre part les intérêts de la France qui disposera d'un quinzième des droits de vote.

M. Guy Lengagne a remercié le Ministre des Affaires étrangères de ses explications. Il a convenu qu'il serait beaucoup plus difficile de trouver une solution aussi avantageuse pour la France dans une Europe à vingt-cinq, si ce texte n'était pas ratifié dans les délais, avant le 1er mai. Mais, ce risque lié au calendrier s'explique d'abord par l'attitude du Gouvernement qui a demandé à l'Assemblée nationale d'approuver ce texte dans l'urgence en quelques heures, au mépris des droits du Parlement. Pour cette raison, les députés socialistes ont voté en faveur de la motion d'ajournement, mais, compte tenu des précisions apportées par le Ministre des Affaires étrangères, ils voteront finalement le projet de loi.

M. Jacques Myard a considéré que le texte proposé ne respectait pas la philosophie du Traité de Maastricht qui, bien qu'il l'ait combattu, respectait au moins le principe de l'égalité entre tous les Etats.

Pour préserver l'efficacité de la Banque centrale européenne, on aurait très bien pu imaginer d'autres solutions, sans remettre en cause le principe du maintien d'un droit de vote permanent pour chacun des Etats. Au lieu de cela, on crée un dangereux précédent qui nous sera opposé à la première occasion. D'ailleurs, comme l'a rappelé le Ministre des Affaires étrangères, deux Etats ont émis des réserves mais aussi, d'après certaines informations, la Commission européenne elle-même.

M. Jacques Myard a par ailleurs estimé que ce texte ne serait pas opposable aux dix nouveaux pays adhérents à l'Union européenne, car il ne pourrait être intégré à l'acquis communautaire avant le 1er mai, compte tenu des délais d'entrée en vigueur fixé par l'article 2 de la décision. En outre, il a considéré que les stipulations de la présente décision étaient contraires à la Constitution, notamment à ses articles 88-1 et suivants.

Enfin, M. Jacques Myard a refusé de considérer que ce texte était d'ordre technique. Il pose au contraire des questions politiques fondamentales qui méritent donc un débat en séance publique.

M. Pierre Lequiller, après avoir rappelé que la Délégation pour l'Union européenne avait examiné et donné un avis favorable à cette décision, a estimé que la construction européenne consistait à aboutir à des compromis afin de trouver la meilleure manière de travailler ensemble. En l'occurrence, la solution retenue semble être la plus avantageuse parmi celles qui étaient envisageables.

M. François Loncle a confirmé que le vote, la semaine dernière, par les députés socialistes de la motion d'ajournement demandant l'audition du Ministre sur ce texte avait été motivé par des raisons de délai et de forme, et non par des problèmes de fond. Il a par ailleurs estimé, à la lecture du projet de loi, que lorsque les textes européens sont écrits par des conventionnels, et non par des techniciens, ils sont alors infiniment plus clairs et lisibles.

M. Christian Philip a estimé que l'important était de maintenir une capacité de décision, que l'unanimité ne permet pas. Ainsi, à moins d'être opposé par principe à la construction européenne, on ne peut pas défendre un système aboutissant à l'impossibilité de prendre des décisions. Il est donc important d'autoriser la ratification de la décision du Conseil qui répond de manière satisfaisante à ce problème.

M. Michel Delebarre a demandé des précisons sur le point abordé par M. Jacques Myard, selon lequel les délais pour permettre à la décision d'être intégrée à l'acquis communautaire auraient déjà été dépassés.

M. Gilbert Gantier a souhaité savoir ce que signifiait concrètement le fait pour le Gouverneur de la Banque de France de disposer d'un droit de vote pendant 80 % du temps.

M. Michel Barnier, Ministre des Affaires étrangères, a apporté les réponses suivantes :

-  les nouveaux statuts de la Banque centrale européenne permettront à la France de figurer aux côtés de quatre autres grands pays de l'Union dans le groupe 1 doté d'un total de quatre voix délibératives ; la périodicité de la rotation au sein du groupe n'ayant pas encore été définie, il n'est pas possible de savoir pour quelle durée chacun des pays n'aura plus voix délibérative au sein du Conseil des gouverneurs ;

-  le dépôt tardif du texte devant l'Assemblée est regrettable, même si la Délégation pour l'Union européenne de l'Assemblée en a été saisie en amont ;

-  le Conseil d'Etat a estimé que la décision du Conseil européen modifiant le statut de la Banque centrale européenne était conforme aux dispositions de la Constitution ; cette réforme s'inscrit en effet dans le prolongement du Traité de Maastricht, dont la ratification avait été approuvée par la voie du référendum après une révision de la Constitution ;

-  les études juridiques menées par les services du Conseil européen ont conclu au caractère opposable du texte aux dix nouveaux Etats membres de l'Union ; dès lors que la totalité des instruments de ratification sont déposés avant l'élargissement, le fait que le texte entre en vigueur après le 1er mai 2004 ne remet pas en cause son application aux nouveaux Etats membres ;

-  la solution retenue apparaît comme la moins mauvaise, puisqu'elle attribue à notre pays non pas un vingt-septième des voix à temps plein dans le système « un pays - une voix », mais un quinzième des droits de vote pour quatre-vingts pour cent du temps ; ce système ayant été agréé par la Grande-Bretagne et par l'Allemagne, il serait pour le moins paradoxal que ce soit la France qui le rejette ;

-  il faut faire un effort pour améliorer la lisibilité des textes communautaires et, sur ce point, la méthode retenue par la Convention européenne constitue un exemple à méditer.

M. Jacques Myard a estimé que le système retenu était mauvais et qu'il allait nuire à la crédibilité de la Banque centrale européenne. La présentation de la motion d'ajournement en séance publique sera l'occasion d'y revenir et de présenter un système alternatif permettant l'égalité de traitement des Etats.

M. Jacques Godfrain a précisé que M. Jacques Myard s'exprimait à titre personnel et non pas au nom du groupe UMP.

SUITE DE L'EXAMEN EN COMMISSION

La Commission a poursuivi l'examen du présent projet de loi au cours de sa réunion du mardi 13 avril 2004.

M. Philippe Cochet, Rapporteur, a constaté que la motion d'ajournement n° 1 demandant l'audition du Ministre des Affaires étrangères était satisfaite et a donc proposé quelle soit retirée.

Il a ensuite déclaré à la Commission qu'il n'était pas favorable à la motion d'ajournement n° 2 déposée à titre personnel par M. Jacques Myard.

Suivant l'avis du Rapporteur, la Commission a retiré la motion d'ajournement n° 1 et a rejeté la motion d'ajournement n° 2 présentée par M. Jacques Myard.

Puis, conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (no 1514).

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N° 1538 - Rapport sur le projet de loi de ratification de la décision sur les statuts du Système européen de banques centrales et de la Banque centrale européenne ((Sénat, 1ère lecture) (M. Philippe Cochet)

NB : Le texte de la décision figure en annexe au projet de loi (n° 1514).

1 « L'article 10.2 peut être modifié par le Conseil réuni au niveau des chefs d'Etat ou de gouvernement, statuant à l'unanimité, soit sur recommandation de la BCE et après consultation du Parlement européen et de la Commission, soit sur recommandation de la Commission et après consultation du Parlement européen et de la BCE. Le Conseil recommande l'adoption de ces modifications par les Etats membres. Ces modifications entrent en vigueur après avoir été ratifiées par tous les Etats membres conformément à leurs règles constitutionnelles respectives.

Une recommandation faite par la BCE en vertu du présent paragraphe requiert une décision unanime du conseil des gouverneurs. »

2 « La Conférence escompte qu'une recommandation au sens de l'article 10.6 des statuts du Système européen de banques centrales et de la Banque centrale européenne sera présentée dans les plus brefs délais ».

3 Allemagne, Autriche, Belgique, Espagne, Finlande, France, Irlande, Italie, Luxembourg, Pays-Bas, Portugal.

4 « 2. [...] L'IME est liquidé dès qu'est instituée la BCE ; les modalités de liquidation sont prévues dans les statuts de l'IME. [...] »

5 Jean-Claude Trichet, Président, Lucas D. Papademos, Vice-Président, Eugenio Domingo Solans, Membre du Directoire, Gertrude Tumpel-Gugerell, Membre du Directoire, Otmar Issing, Membre du Directoire, Tommaso Padoa-Schioppa, Membre du Directoire.

6 Jean-Claude Trichet, Président, Lucas D. Papademos, Vice-Président, Eugenio Domingo Solans, Membre du Directoire, Gertrude Tumpel-Gugerell, Membre du Directoire, Otmar Issing, Membre du Directoire, Tommaso Padoa-Schioppa, Membre du Directoire, Guy Quaden, Gouverneur de la Banque nationale de Belgique, Ernst Welteke, Président de la Deutsche Bundesbank, Nicholas C. Garganas, Gouverneur de la Bank of Greece Jaime Caruana, Gouverneur de la Banco de Espana, Christian Noyer, Gouverneur de la Banque de France, John Hurley, Gouverneur de la Central Bank and Financial Services Authority of Ireland, Antonio Fazio, Gouverneur de la Banca d'Italia, Yves Mersch, Gouverneur de la Banque centrale du Luxembourg, Nout Wellink, Président de la De Nederlansche Bank, Klaus Liebscher, Gouverneur de la Österreichische Nationalbank, Vitor Manuel Ribeiro Constâncio, Gouverneur de la Banco de Portugal, Matti Vanhala, Gouverneur de la Suomen Pankki - Finlands Bank.

7 « Le conseil des gouverneurs adopte un règlement intérieur déterminant l'organisation interne de la BCE et de ses organes de décision. »

8 « Pour toutes les décisions devant être prises en vertu des articles 28, 29, 30, 32, 33 et 51, les suffrages des membres du conseil des gouverneurs sont pondérés conformément à la répartition du capital souscrit de la BCE entre les banques centrales nationales. La pondération des suffrages des membres du directoire est égale à zéro. Une décision requérant la majorité qualifiée est adoptée si les suffrages exprimant un vote favorable représentent au moins deux tiers du capital souscrit de la BCE et au moins la moitié des actionnaires. Si un gouverneur ne peut être présent, il peut désigner un suppléant pour exercer son vote pondéré. »

9 Déjà cité en page 5.

10 « Une recommandation faite par la BCE en vertu du présent article requiert une décision unanime du conseil des gouverneurs. »


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