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le 4 avril 2005

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N° 2209

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 23 mars 2005.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN SUR LA
PROPOSITION DE
LOI (n° 2061), adoptée par le Sénat, tendant à créer un Conseil des prélèvements obligatoires.

PAR M. Philippe ROUAULT

Député

--

Voir les numéros : 

Sénat : 143, 168 et T.A.59 (2004-2005).

Assemblée nationale : 2061.

INTRODUCTION 5

I.- L'ÉVOLUTION DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES MILITE POUR UNE TRANSFORMATION DU CONSEIL DES IMPÔTS 7

A.- EN TRENTE ANS, LA RÉFLEXION SUR L'IMPÔT EST DEVENUE UNE RÉFLEXION SUR LES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES 7

1.- La part des prélèvements obligatoires dans le PIB s'est accrue et leur structure a profondément évolué 7

2.- La dynamique actuelle ne peut que renforcer la nécessité d'une analyse plus globale 11

B.- L'EXTENSION DES MISSIONS DU CONSEIL DES IMPÔTS, RÉCLAMÉE PAR LE CONSEIL LUI-MÊME, A ÉTÉ VOTÉE PAR LE PARLEMENT EN 2004 12

1.− Une revendication du Conseil des impôts étayée par une expérience plus que trentenaire 12

a) Le Conseil des impôts a accompli un riche travail... 12

b) ... et publiquement demandé le renforcement de ses moyens, soulignant le manque d'expertise fiscale indépendante en France 13

2.- Votée par le Parlement, la création d'un Conseil des prélèvements obligatoires a été censurée par le Conseil constitutionnel pour des motifs de pure procédure 17

II.- LE TEXTE ADOPTÉ PAR LE SÉNAT AURAIT MÉRITÉ DES MODIFICATIONS FORMELLES QUE LE SOUCI D'UNE PROMULGATION RAPIDE NE REND PAS INDISPENSABLES 21

A.- LA PROPOSITION DE LOI VOTÉE PAR LE SÉNAT A ÉTÉ LÉGÈREMENT AMENDÉE PAR RAPPORT AU TEXTE INITIAL 21

1.- Le texte transmis par le Sénat crée l'outil adéquat, élevé au niveau législatif 21

a) Une composition étoffée sans qu'une structure supplémentaire ne soit créée 21

b) Un « changement de dimension juridique » pour l'institution 24

2.- De très légères modifications ont été apportées par la Commission et le Gouvernement 25

B.- QUELQUES MODIFICATIONS SUPPLÉMENTAIRES AURAIENT PERMIS DE PARFAIRE LE TRAVAIL PARLEMENTAIRE MAIS NE S'IMPOSENT PAS EN OPPORTUNITÉ 26

1.- Un certain nombre de questions substantielles auraient pu être précisées 27

2.- Des modifications formelles étaient également possibles 29

EXAMEN EN COMMISSION 31

TABLEAU COMPARATIF 35

INTRODUCTION

Une proposition de loi créant un Conseil des prélèvements obligatoires n'est pas un acte anodin : que le Parlement propose de lui-même la réforme d'un organisme - le Conseil des impôts - qui lui est extérieur, et qui œuvre dans un domaine essentiel de la compétence de la représentation nationale, peut surprendre. En effet, qui, sinon le Parlement, est le mieux placé pour remplir une mission prescrite par les articles XIII et XIV de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ? Par ailleurs, et pour s'en tenir à la période récente, le Rapporteur général de votre Commission des finances ne présente-t-il pas régulièrement un rapport sur l'application de la loi fiscale ? Les commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat ne rédigent-elles pas chaque année des rapports sur les lois de finances et les lois de financement de la sécurité sociale ? Le Parlement n'est-il pas destinataire de nombreuses statistiques en matière de prélèvements obligatoires ? Dernière avancée en date dans ce domaine, l'information du Parlement sur l'évolution des prélèvements obligatoires a en outre été notoirement renforcée par l'introduction dans la loi organique relative aux lois de finances (1) d'un article 52, entré en vigueur le 1er janvier 2002 et aux termes duquel :

« En vue de l'examen et du vote du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale de l'année suivante par le Parlement, le Gouvernement présente à l'ouverture de la session ordinaire un rapport retraçant l'ensemble des prélèvements obligatoires ainsi que leur évolution.

« Ce rapport comporte l'évaluation financière, pour l'année en cours et les deux années suivantes, de chacune des dispositions, de nature législative ou réglementaire, envisagées par le Gouvernement.

« Ce rapport peut faire l'objet d'un débat à l'Assemblée nationale et au Sénat. »

Mais précisément, le législateur organique a été troublé par l'imprécision et l'irrationalité des frontières entre loi de finances et loi de financement, ainsi que par le caractère fluctuant des ressources fiscales de la sécurité sociale. Et force est de constater que le foisonnement des données statistiques, si précises et actualisées soient-elles, ne remplace pas, tant s'en faut, l'analyse de fond, l'étude critique de telle imposition ou de tel prélèvement.

Voilà pourquoi le Parlement, à qui il revient d'autoriser régulièrement l'essentiel des prélèvements obligatoires, à côté des compétences propres du pouvoir réglementaire en matière de cotisations sociales et des collectivités territoriales pour les impôts locaux, a tout à gagner à pouvoir s'appuyer sur une expertise indépendante, qui ne soit pas non plus soumise aux contraintes de temps qui pèsent trop souvent sur l'activité des assemblées.

Que l'initiative du renforcement et de l'approfondissement d'une telle expertise émane du Parlement lui-même est un gage du travail harmonieux que sont appelés à mener, chacun dans sa sphère de compétence, les assemblées et le futur Conseil des prélèvements obligatoires. C'est dans ce but qu'avait été votée en loi de finances pour 2005 la disposition aménageant en ce sens le code des juridictions financières. L'annulation par le Conseil constitutionnel de ladite disposition, sur la forme et selon une argumentation au demeurant discutable ne s'imposait pas. La reprise à l'identique de ce texte sous la forme d'une proposition de loi, votée par le Sénat le 8 février dernier, et qui n'encourt plus la censure, présente le double avantage d'emporter exactement les mêmes effets que l'article précédemment annulé - en raison d'une entrée en vigueur qui demeure fixée au 1er octobre prochain - et d'expliciter les raisons de la réforme proposée. Ce faisant, l'occasion se présente de réfuter les critiques dénuées de fondement adressées à l'initiative sénatoriale de l'automne dernier. Il y a donc tout lieu de rendre hommage au travail accompli par le Conseil des impôts et de saluer sans tarder davantage la naissance du Conseil des prélèvements obligatoires.

I.- L'ÉVOLUTION DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES MILITE POUR UNE TRANSFORMATION DU CONSEIL DES IMPÔTS

Depuis la création du Conseil des impôts en 1971, c'est peu dire que le champ des finances publiques a évolué. Si l'on accepte comme définition sommaire des finances publiques les finances des administrations publiques (État, organismes divers d'administration centrale, administrations sociales et administrations publiques locales) par des prélèvements obligatoires, le trait essentiel de cette évolution a consisté en un élargissement de ce champ, qui s'est doublé d'une modification de la structure des prélèvements et a eu pour corollaire une indéniable complexification du « paysage socio-fiscal ».

Trente-quatre ans plus tard, il est plus que nécessaire d'effectuer une « mise à jour » des missions du Conseil des impôts, qui prenne acte des changements ainsi intervenus.

A.- EN TRENTE ANS, LA RÉFLEXION SUR L'IMPÔT EST DEVENUE UNE RÉFLEXION SUR LES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES

Lors d'un colloque récent consacré à l'évolution des finances publiques au cours des vingt dernières années (2), le professeur Pierre Beltrame notait qu'un semblable colloque organisé précisément vingt ans plus tôt s'était penché sur la situation de l'impôt, alors qu'aujourd'hui c'est l'expression « prélèvements obligatoires » qui s'impose. « La référence à cette notion à connotation économique et internationale nous invite, écrit Pierre Beltrame, à appréhender l'évolution de la fiscalité de manière globale, sans nous restreindre au cadre de l'impôt et en la situant dans son environnement économique et comparé. » Il y a donc ici plus qu'un simple changement de dénomination.

1.- La part des prélèvements obligatoires dans le PIB s'est accrue et leur structure a profondément évolué

Par « prélèvements obligatoires », on entend classiquement l'ensemble des versements obligatoires effectués sans contrepartie directe par les agents économiques aux administrations publiques.

LA NOTION DE PRÉLÈVEMENT OBLIGATOIRE

C'est l'OCDE qui, la première, a proposé une définition des prélèvements obligatoires, à partir de trois grands critères :

- la nature des flux : les flux doivent correspondre à des versements effectifs ;

- les destinataires des versements : ce sont uniquement « les administrations publiques », au sens de la comptabilité nationale, et les institutions communautaires européennes ;

- le caractère « non volontaire » des versements : le caractère obligatoire des versements ne procède pas d'un critère juridique mais d'un double critère économique : absence de choix du montant et des conditions de versement, inexistence de contrepartie immédiate.

Au sein de l'Union européenne, même si la notion de prélèvements obligatoires à proprement parler ne figure pas dans le système européen de comptabilité nationale (SEC 95), les impôts et cotisations sociales y sont définis selon des critères précis et contraignants pour les États membres.

En France, ce sont les comptables nationaux de l'Insee - dans le respect des définitions internationales - qui décident du classement d'un prélèvement dans la catégorie des prélèvements obligatoires. S'agissant des prélèvements obligatoires définis par les comptables nationaux français, certaines conventions comptables méritent d'être rappelées. Le fait, par exemple, de ne considérer que les versements effectifs conduit à exclure des prélèvements obligatoires les cotisations sociales dites «imputées» qui constituent la contrepartie de prestations fournies directement, c'est-à-dire en dehors de tout circuit de cotisations, par les employeurs à leurs salariés ou anciens salariés et ayant droits. Ces régimes directs d'employeurs concernent surtout les salariés de la Fonction publique et de certaines grandes entreprises (SNCF, EDF, GDF, RATP...) : le changement de statut d'EDF en 2005, a contrario, a pour conséquence une augmentation des prélèvements obligatoires. Les cotisations imputées ont en France une importance non négligeable : elles représentent près de 15 % des cotisations sociales effectives.

Sont également exclus, par définition, tous les prélèvements qui ne sont pas effectués au profit du secteur des administrations publiques tel que le définit la comptabilité nationale. Cette convention conduit à éliminer des prélèvements obligatoires une grande partie des taxes ou cotisations versées à des organismes autres que les administrations publiques (ou les cotisations aux ordres professionnels), ainsi que les versements à des organismes qui se situent à la frontière des régimes de sécurité sociale et des régimes d'assurance, comme les sociétés mutualistes.

Enfin, certains prélèvements ne sont pas considérés comme obligatoires car ils correspondent à une décision considérée comme « volontaire » de la part de celui qui les paie, ou sont la contrepartie d'un service rendu (la redevance télévision, les amendes non fiscales, les droits de timbre sur les passeports, les cartes grises...).

Le champ couvert par la notion de prélèvements obligatoires ne recouvre donc pas l'ensemble des recettes fiscales et sociales votées dans les lois de finances de l'État et dans les lois de financement de la Sécurité sociale. En effet, trois types de facteurs sont susceptibles de nourrir des écarts entre ces agrégats. En premier lieu, certains retraitements sont nécessaires pour passer des recettes budgétaires telles qu'elles figurent dans les lois de finances aux prélèvements obligatoires au sens de la comptabilité nationale. La prise en compte de ces recettes en «droits constatés» dans la comptabilité nationale en constitue l'un des éléments.

D'autre part, une partie des prélèvements obligatoires résulte de décisions autonomes qui ne sont pas retracées dans les lois de finances. C'est le cas, notamment, des recettes de fiscalité directe locale dont les évolutions dépendent des décisions des collectivités locales et ne sont pas soumises au vote du Parlement. C'est également le cas des modifications des taux des cotisations sociales (Unedic, régimes de retraite...) qui sont décidées par les partenaires sociaux. De même, certaines taxes alimentant les ressources des organismes divers d'administration centrale (les ODAC) et ne transitant pas par le budget de l'État peuvent toutefois constituer des prélèvements obligatoires (taxe sur les entreprises cinématographiques, taxe sur les logements vacants par exemple).

Enfin, et à l'inverse, certaines recettes votées dans des lois de finances ne sont pas traitées comme des prélèvements obligatoires. C'est le cas pour certaines taxes ou cotisations professionnelles, par exemple, dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale, ou encore de certaines recettes non fiscales votées dans la loi de finances de l'État.

Le taux de prélèvements obligatoires, qui rapporte le produit de l'ensemble des prélèvements obligatoires sociaux et fiscaux au Produit Intérieur Brut, n'en constitue pas moins la synthèse la plus usuelle parmi les indicateurs macro-économiques relatifs aux prélèvements fiscaux et sociaux.

Source : rapport sur les prélèvements obligatoires et leur évolution, annexé au projet de loi de finances pour 2005.

Votre Rapporteur n'entend pas dresser ici un historique détaillé de l'évolution sur longue période des prélèvements obligatoires en France et dans les pays voisins. Deux traits de cette évolution peuvent être mis en exergue, qui suffiront à démontrer l'intérêt d'une étude approfondie et renouvelée de notre système de prélèvements : le niveau qu'ils ont atteint en France, comparé - autant que faire se peut - avec les pays de l'Union européenne et de l'Organisation de coopération et de développement économique, et les changements de structure interne des prélèvements français.

S'agissant du niveau de prélèvements obligatoires français, mesuré en pourcentage du PIB, un constat s'impose, peut-être méconnu : leur stabilité globale, depuis vingt ans, autour de 44 %, avec un « point bas » à 43 % environ entre 1990 et 1994, et un « point haut » à 45,5 % en 1999. Sur la même période, la moyenne européenne a progressé de deux points, passant de 38,5 à 40,5 % du PIB, et la moyenne de l'OCDE de plus de trois points, de 33,6 à 36,9 %. Le graphique suivant illustre la disparité existante en 2002 :

TAUX DE PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES DANS LES PRINCIPAUX PAYS DE L'OCDE EN 2002

(en % du PIB)

graphique

Suède Danemark Belgique France Pays-Bas Allemagne Roy.-Uni Italie Espagne Moy.UE Moy. OCDE

Source : statistiques des recettes publiques de l'OCDE, 2003.

Les comparaisons internationales sont toujours sujettes à caution, comme le Gouvernement ne manque pas lui-même de le rappeler :

PORTÉE ET LIMITES DES COMPARAISONS INTERNATIONALES

Le taux de prélèvements obligatoires, qui rapporte le montant des prélèvements au PIB, est un indicateur synthétique qui favorise des comparaisons rapides. À l'échelon international, des groupes de travail se réunissant sous l'égide de l'OCDE et de la Commission s'attachent à décrire les différentes mesures possibles du taux de PO et s'efforcent de converger vers une définition commune entre les États de la notion de prélèvement obligatoire. Ces travaux ont donné lieu à des publications. Compte tenu de l'existence de certaines nuances d'approche entre les États à l'heure actuelle sur la mesure des prélèvements obligatoires, les comparaisons internationales de taux de PO demeurent relativement délicates.

Il convient donc d'être prudent en matière de comparaison et ce, pour plusieurs raisons. Tout d'abord, les prélèvements obligatoires relèvent de conventions comptables. Si les systèmes comptables respectent des règles communes, même au niveau communautaire où la convergence est grande, le SEC 95 (système européen des comptes nationaux et régionaux dans la communauté européenne) ne définit pas pour autant les prélèvements obligatoires de manière explicite.

Par ailleurs, les prélèvements obligatoires ne comprennent pas toutes les recettes des administrations publiques. Ils dépendent des choix d'organisation et de modes de financement de l'action publique, variables selon les États. En Allemagne, par exemple, les 10 % des ménages les plus aisés peuvent s'affilier à des systèmes privés d'assurance maladie en lieu et place d'une affiliation au système général, ce qui conduit à une minoration des prélèvements obligatoires.

Les prélèvements obligatoires, enfin, ne constituent qu'une des caractéristiques, parmi d'autres, d'un système de finances publiques. L'analyse de leur niveau est alors indissociable de la prise en compte du niveau de dépense publique et de la place des services publics dans l'économie nationale.

Source : rapport sur les prélèvements obligatoires et leur évolution, annexé au projet de loi de finances pour 2005.

Il n'empêche que, depuis 1970, la tendance à la hausse est visible et qu'un plafond a sans doute été atteint, du moins en l'état actuel de l'organisation de nos administrations publiques. Le graphique suivant retrace cette évolution sur longue période et fait apparaître, en outre, des changements de structure :

ÉVOLUTION DU NIVEAU ET DE LA RÉPARTITION DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES

(en % du PIB)

graphique

Source : d'après le rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances pour 2005.

De telles évolutions militent pour un examen approfondi des mutations à l'œuvre dans notre système socio-fiscal, qui prenne en compte de la façon la plus large les administrations bénéficiaires comme les catégories de prélèvements.

2.- La dynamique actuelle ne peut que renforcer la nécessité d'une analyse plus globale

Le tableau suivant détaille la répartition des prélèvements obligatoires par type de prélèvement et par bénéficiaire :

RÉPARTITION DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES PAR TYPE DE PRÉLÈVEMENT EN 2003

(en milliards d'euros et en %)

Bénéficiaire

Montant

Impôts

Cotisations sociales

État et organismes divers d'administration centrale

256,4

97,5

2,5

Organismes de sécurité sociale

339,6

26

74

Collectivités territoriales

79,7

100

0

Union européenne

6,8

100

0

Total des prélèvements obligatoires

682,5

62,2

37,8

Source : Insee, cité dans le rapport sur les prélèvements obligatoires et leur évolution, annexé au projet de loi de finances pour 2005.

Outre le fait que les « impôts au sens strict » ne représentent, selon ces données, que 62,2 % du total des prélèvements obligatoires, la ventilation présentée incite à réfléchir aux modalités de financement de la protection sociale, qui accapare 47,5 % du total des prélèvements, contre 24,9 % en moyenne dans les pays non fédéraux de l'OCDE en 2001.

Le poids des cotisations dans le total est en recul - elles représentaient 43 % des prélèvements en 1985 -, mais un profond bouleversement a été opéré avec l'instauration en 1991 de la contribution sociale généralisée, devenue depuis le premier prélèvement direct sur les ménages, responsable de la fiscalisation croissante du financement de la protection sociale.

À cette tendance de fond, sur laquelle le Conseil des impôts a déjà eu l'occasion de se pencher (3) et qu'il serait utile, pour le futur Conseil des prélèvements obligatoires, d'actualiser, votre Rapporteur veut en ajouter trois autres qu'il emprunte au professeur Pierre Beltrame, se contentant de les citer à titre d'illustration supplémentaire du bien-fondé d'une approche globale des prélèvements.

La première de ces grandes évolutions est la poursuite de l'intégration européenne et de la mondialisation de l'économie, qui rendent sans doute nécessaire la stabilisation, voire la diminution du niveau des prélèvements obligatoires. Non pas abstraitement ou par idéologie, mais par la prise en compte de la « soutenabilité » de ce niveau de prélèvements : ce niveau est lié à celui de nos dépenses publiques et du déficit public.

La deuxième perspective majeure réside dans l'approfondissement de la décentralisation fiscale et l'avènement d'un certain « régionalisme fiscal », qui semble inéluctable, compte tenu des instruments choisis pour traduire le principe d'autonomie financière des collectivités territoriales.

Enfin, une troisième tendance, à visée plus « gestionnaire » et peut-être moins « politique », concerne la rationalisation de la gestion des prélèvements et le renforcement de la protection des contribuables, notamment en termes de sécurité juridique, qui apparaissent comme des impératifs d'efficacité et d'efficience pour l'administration, ainsi que comme des leviers de l'amélioration du consentement à l'impôt.

Autant de pistes de travail pour le futur Conseil, à la condition que lui soient garantis les moyens suffisants pour embrasser un tel champ d'étude.

B.- L'EXTENSION DES MISSIONS DU CONSEIL DES IMPÔTS, RÉCLAMÉE PAR LE CONSEIL LUI-MÊME, A ÉTÉ VOTÉE PAR LE PARLEMENT EN 2004

1.− Une revendication du Conseil des impôts étayée par une expérience plus que trentenaire

a) Le Conseil des impôts a accompli un riche travail...

« Organisme associé » à la Cour des comptes, à côté d'institutions aussi diverses que la Cour de discipline budgétaire et financière, le Comité d'enquête sur le coût et le rendement des services publics, la Commission de certification des comptes des organismes payeurs des dépenses financées par le Fonds européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA), section garantie, ou la Commission permanente de contrôle des sociétés de perception et de répartition des droits, le Conseil des impôts a été créé par le décret n° 71-142 du 22 février 1971, modifié en 1973 et en 1977.

Votre Rapporteur veut saisir cette occasion de rendre au Conseil des impôts l'hommage qui lui est dû. Structure légère et discrète, le Conseil est redevable de son renom à la compétence et au dévouement dont ses membres, ses rapporteurs et toutes les personnes appelées à lui prêter leur concours ont su faire preuve tout au long de ses trente-quatre années d'existence. Ses moyens limités ne lui auront sans doute pas permis de déployer autant d'expertises qu'il l'aurait voulu lui-même (4), mais les vingt-deux rapports qu'il a publiés n'ont jamais manqué de susciter l'intérêt des spécialistes, ainsi que d'un public averti, notamment au travers de la publicité que la presse a pu donner à ses travaux et, depuis quelques années, grâce à la mise en ligne de tout ou partie de ces rapports.

Le rapport au Président de la République, qu'il ait pour thème l'un des grands impôts de notre système fiscal ou un sujet transversal (5), est ainsi devenu au fil des ans un ouvrage de référence, caractérisé par l'exhaustivité et l'originalité de ses analyses, souvent reprises, rarement contestées. Alors que doit prochainement s'achever la rédaction du vingt-troisième de ses rapports, l'heure est venue de donner au Conseil des impôts tous les moyens de ses ambitions, moyens qu'il en est venu à réclamer lui-même publiquement.

b) ... et publiquement demandé le renforcement de ses moyens, soulignant le manque d'expertise fiscale indépendante en France

Dans son dix-huitième rapport, publié en 2000, le Conseil des impôts avait consacré des développements à la nécessité de renforcer ses moyens « pour lui permettre de réaliser un plus grand nombre d'études et de répondre aux demandes éventuelles des pouvoirs publics », replaçant ce souhait dans le contexte plus large, du manque d'expertise indépendante en matière fiscale dans notre pays. Votre Rapporteur croit utile de reproduire ce passage de rapport, dont l'argumentation ne prend que plus de force si l'on élargit le spectre d'études à l'ensemble des prélèvements obligatoires :

[...]

5.2. DÉVELOPPER UNE EXPERTISE INDÉPENDANTE EN MATIÈRE FISCALE

L'incompréhension des contribuables s'explique aussi en France par la pauvreté du débat fiscal. Entre le contribuable et l'administration fiscale, il n'existe en France aucune structure constituée, clairement identifiée, susceptible d'évaluer régulièrement et de façon indépendante le système fiscal français. Dans notre pays, les universités, les organismes de recherche ou les différents instituts de conjoncture ne s'aventurent que rarement dans la matière fiscale.

5.21. Renforcer les moyens du Conseil des impôts

Le Conseil des impôts est la seule structure qui remplit, pour partie, cette mission. Institué par un décret du 22 février 1971, il est placé auprès de la Cour des comptes et chargé « de constater la répartition de la charge fiscale et d'en mesurer l'évolution compte tenu notamment des caractéristiques économiques et sociales des catégories de redevables concernés. » Le Conseil des impôts dispose d'une large autonomie en raison de sa composition (6) et de la liberté qui lui est laissée de choisir les sujets de ses travaux (7) et d'en fixer le calendrier.

Les rapports qu'il publie permettent de rendre publiques non seulement ses analyses sur notre système fiscal mais également les données statistiques établies, à sa demande, par les administrations. Le Conseil des impôts joue ainsi un rôle important d'information du citoyen.

Néanmoins, les moyens du Conseil des impôts sont réduits et ne lui donnent pas la capacité de réagir en temps réel aux projets de réforme fiscale avancés par le Gouvernement, ni de mener des enquêtes approfondies sur les systèmes fiscaux étrangers. Il n'étudie qu'un sujet par an (8) avec le concours de rapporteurs à temps partiel. Il serait sans doute utile de renforcer les moyens du Conseil des impôts pour lui permettre de réaliser un plus grand nombre d'études et de répondre aux demandes éventuelles des pouvoirs publics.

5.2.2. Encourager le développement d'expertises fiscales indépendantes

Au-delà du renforcement des moyens du Conseil des impôts, il paraît nécessaire d'encourager le développement d'expertises indépendantes en matière fiscale. Dans une perspective pluraliste, le Parlement, les partenaires sociaux, les universités, les centres de recherche devraient pouvoir participer plus largement aux débats en cours, discuter de façon argumentée les propositions du Gouvernement et, partant, contribuer à la pédagogie nécessaire de l'imposition des revenus. La situation française ne paraît guère satisfaisante de ce point de vue. La situation des études fiscales contraste fortement dans notre pays avec le développement des études macroéconomiques ou sur la protection sociale.

A contrario, le Conseil des impôts constate, sous réserve d'une analyse comparative plus poussée, que l'expertise indépendante en matière fiscale paraît plus développée dans plusieurs pays. C'est le cas en particulier dans les pays anglo-saxons, il existe des organismes indépendants qui ont pour mission d'étudier et d'évaluer les problèmes fiscaux. On peut citer notamment la National Tax Association aux États-Unis créée en 1907, qui se présente comme le creuset de la « Tax community », ou bien l'Association canadienne d'études fiscales, organisme de recherche fondé en 1945.

L'Institute for Fiscal Studies

En Grande-Bretagne, l'Institute for Fiscal Studies (IFS) joue depuis trente ans un rôle d'analyse et d'information sur le système fiscal britannique. La volonté de créer un institut indépendant a pour origine le constat de la pauvreté des débats et l'absence d'expertise fiscale indépendante à propos de la loi de finances pour l'année 1965 qui introduisit notamment l'imposition des plus-values dans la législation fiscale britannique.

Principalement composé d'économistes, cet institut a pour première ambition de clarifier les enjeux redistributifs des réformes fiscales. Il a pourtant, peu à peu, étendu ses analyses à d'autres dimensions de la fiscalité, notamment ses aspects juridiques. On peut résumer la montée en puissance de l'IFS au moyen de la chronologie suivante :

- depuis 1982, l'IFS publie chaque année une analyse des enjeux du budget britannique, notamment en matière fiscale (IFS Green Budget) Ce document joue un rôle important dans les débats budgétaires britanniques. D'une façon générale, l'IFS semble avoir trouvé le ton juste pour s'adresser à l'opinion et aux médias pour expliquer le système fiscal britannique, tout en restant un organisme de recherche ;

− l'IFS publie le journal Fiscal Studies depuis 1979 ;

 − en avril 1991, I'IFS crée en son sein un centre de recherches dûment labellisé, le Centre for Micro-economic Analysis of Fiscal Policy. Le centre utilise les statistiques disponibles et développe ses propres modèles de simulation, notamment sur les prélèvements pesant sur les ménages britanniques. Il accueille beaucoup de jeunes chercheurs et sert de lien avec l'administration et les professionnels ;

− en 1994, l'IFS a créé le Tax Law Review Committee. Cette structure a contribué à engager le mouvement en cours en Grande-Bretagne de « réécriture » de la législation fiscale. Elle a également proposé une rationalisation du contentieux fiscal et étudié les moyens juridiques les plus appropriés pour lutter contre l'évasion fiscale. Elle travaille actuellement sur le traitement fiscal comparé des salariés et des non salariés ;

− depuis 1995, l'IFS dispose de son propre site Internet, récemment rénové, sur lequel de très nombreux documents sont disponibles (www.ifs.org.uk).

L'IFS emploie aujourd'hui 30 personnes à temps plein, dont 27 économistes, et anime un réseau de correspondants dans le reste du Royaume-Uni, aux États-Unis et en Europe.

Il existe des structures comparables, plus ou moins liées aux milieux professionnels, universitaires ou administratifs selon les pays, en Irlande, en Allemagne ou encore en Espagne (9). Au Royaume-Uni, l'IFS joue un rôle comparable (voir supra). La composition de ces instances est, en règle générale, très ouverte, puisqu'elles associent des fonctionnaires, des universitaires, des entreprises et des cabinets de conseil fiscaux, mais aussi des représentants des contribuables.

5.2.3. Diffuser plus largement les statistiques fiscales

Une diffusion plus large des statistiques fiscales constituerait un élément clé pour permettre le développement d'une expertise fiscale indépendante. Dans le déroulement de ses travaux le Conseil des impôts a en effet constaté à plusieurs reprises que l'information statistique en matière fiscale n'était pas assez largement diffusée en France.

Il s'agit d'ailleurs au moins autant d'une situation de fait que d'une question de droit. En effet, la communication de statistiques fiscales est régie par la loi du 17 juillet 1978 relative à la liberté d'accès aux documents administratifs, qui dispose que les documents non nominatifs sont communicables à toute personne, quels que soient sa nationalité, sa qualité et ses motifs.

La diffusion des données est toutefois fortement encadrée. Les données nominatives ne le sont qu'à la personne concernée. Quant aux informations non nominatives qu'elle recueille dans l'exercice de ses fonctions, l'administration fiscale est tenue de les communiquer à tout demandeur dans le respect du principe du secret statistique et fiscal (10). Ainsi, une donnée ne peut être communiquée en matière de fiscalité des personnes - IR, TH, ISF - que si elle agrège la situation de plus de onze contribuables. Par ailleurs, un seul élément ne peut représenter plus de 85 % du montant agrégé. Enfin, le document demandé doit déjà exister sous sa forme définitive et sa communication ne doit pas porter atteinte à la règle du secret professionnel. Si, par exemple, pour donner satisfaction au demandeur, il est nécessaire de rassembler des informations venant de diverses sources et par suite, de confectionner un document nouveau, cette démarche n'entre pas dans le champ d'application de la loi.

Depuis plusieurs années, la DGI diffuse plus largement qu'auparavant ses données. Initialement les statistiques dont elle dispose sont des sous-produits de son informatique de gestion, données brutes qui ne sont pas traitées pour une diffusion externe. Mais, afin de répondre au nombre croissant de demandes portant sur les statistiques communales, des produits de diffusion standard ont été constitués (11). En outre, afin de toucher un plus large public, des statistiques fiscales agrégées sont aussi diffusées par l'intermédiaire de l'INSEE. Il s'agit des données communales et, surtout, de l'annuaire statistique de la DGI présentant des données départementales, régionales et nationales.

Le Conseil des impôts estime que cette évolution doit être encouragée et développée (12). Une diffusion large d'échantillons de données fiscales individuelles rendues anonymes pourrait permettre à des organismes de recherche de développer des compétences fiscales. Leurs travaux contribueraient à éclairer et à enrichir les débats sur la fiscalité dans notre pays.

[...]

Source : Conseil des impôts, L'imposition des revenus, dix-huitième rapport au Président de la République, 2000.

En outre, ce rappel doit permettre, s'il en était besoin, de dissiper les derniers doutes quant à la motivation des parlementaires dans leur démarche de réforme du Conseil, entreprise après la publication en septembre 2004 de son vingt-deuxième rapport, intitulé La concurrence fiscale et l'entreprise. En effet, d'aucuns ont pu prétendre que la substitution d'une nouvelle instance au Conseil des impôts n'était que la suite logique des réactions mitigées aux analyses développées dans ce rapport, notamment parmi les membres des commissions des finances des deux assemblées. Les débats qui ont eu lieu au Sénat sur la présente proposition de loi ont déjà donné l'occasion aux auteurs de celle-ci de démontrer l'inanité de la désobligeante thèse des « représailles » ; le vœu formé par le Conseil des impôts lui-même emportera la conviction des plus soupçonneux, sauf à ce que l'attitude de ces derniers ne relève que du procès d'intentions.

Pour achever de les désarmer, on peut souligner que le Conseil des prélèvements obligatoires est explicitement conçu comme un « changement dans la continuité » par rapport à son prédécesseur. Maints éléments le démontrent tout au long du texte ; n'en citons à ce stade que deux exemples, l'un au début et l'autre à la fin : comme le Conseil des impôts, le Conseil des prélèvements obligatoires est « placé auprès de la Cour des comptes » (article L. 351-1). Il ne serait effectivement créé qu'au 1er octobre 2005, en vertu du paragraphe II de la présente proposition de loi, pour la simple raison qu'il convient de laisser l'actuel Conseil terminer son 23e rapport, consacré à la fiscalité environnementale, et de permettre à ses membres d'arriver au terme normal de leur mandat.

Cela étant, il n'est pas interdit de penser qu'une composition du Conseil élargie à des personnalités qui ne soient pas issues de la fonction publique, ainsi que la possibilité pour les membres qui le souhaitent de faire connaître, par une insertion dans un rapport du Conseil, leur « opinion dissidente » sur les conclusions présentées − ce qui est prévu à l'article L. 351-2 −, eussent infléchi certaines des analyses exprimées dans le vingt-deuxième rapport précité. Mais voir dans cette pure éventualité un lien évident de cause à effet serait faire aux auteurs de la présente proposition de loi, à la représentation nationale qui a déjà voté ce texte une première fois et au Gouvernement qui le soutient, un véritable procès d'intention.

2.- Votée par le Parlement, la création d'un Conseil des prélèvements obligatoires a été censurée par le Conseil constitutionnel pour des motifs de pure procédure

Inséré dans le projet de loi de finances pour 2005 au cours de sa première lecture au Sénat, sur l'initiative du Président et du Rapporteur général de sa Commission des finances, MM. Jean Arthuis et Philippe Marini, le contenu de la présente proposition de loi était devenu, dans le texte issu des travaux de la commission mixte paritaire, l'article 112 du texte voté définitivement par le Parlement.

Votre Rapporteur a déjà eu l'occasion de rappeler l'origine immédiate de la présente proposition : la censure par le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 2004-511 DC du 29 décembre 2004 sur la loi de finances pour 2005, de cet article 112 qui créait le Conseil des prélèvements obligatoires et dont les auteurs de la saisine estimaient qu'il s'agissait d'un « cavalier budgétaire ». Le Conseil les a suivis, décidant que cet article n'avait pas sa place en loi de finances :

« 43. Considérant que l'article 112 de la loi déférée, qui complète le code des juridictions financières, substitue, auprès de la Cour des comptes, un " Conseil des prélèvements obligatoires " au " Conseil des impôts " ; qu'il charge ce nouvel organisme d'apprécier l'évolution de l'ensemble des prélèvements obligatoires et de formuler des recommandations à leur sujet ; qu'il définit par ailleurs sa composition, ses règles de fonctionnement et ses prérogatives ;

« 44. Considérant que, selon les requérants, cet article serait étranger au domaine des lois de finances ;

« 45. Considérant qu'en application des dispositions encore en vigueur de l'ordonnance du 2 janvier 1959 [...] et des articles déjà en vigueur de la loi organique du 1er août 2001 [...], ne peuvent figurer dans les lois de finances que des dispositions qui concernent la détermination des ressources et des charges de l'État, qui ont trait à des opérations de trésorerie, qui sont destinées à organiser l'information et le contrôle du Parlement sur la gestion des finances publiques ou à imposer aux agents des services publics des responsabilités pécuniaires, qui entraînent des créations ou des transformations d'emplois ou qui sont d'ordre fiscal ;

« 46. Considérant que l'article 112 de la loi déférée ne peut être regardé, au sens de l'article 1er de l'ordonnance du 2 janvier 1959, comme une disposition " destinée à organiser l'information et le contrôle du Parlement sur la gestion des finances publiques " ; qu'en effet, s'il peut contribuer à l'information et au contrôle du Parlement, ses dispositions n'ont pas été prévues à cette fin ; qu'il ne relève d'aucune des autres catégories de dispositions trouvant leur place dans une loi de finances ; qu'il est donc étranger au domaine des lois de finances ; »

Il est intéressant de noter que, d'après le commentaire de cette décision paru dans le n° 18 des Cahiers du Conseil constitutionnel, quelques jours plus tard seulement, le cavalier n'eût plus été un cavalier. Évoquant la position des requérants sur l'article 112 de la loi déférée, le commentaire précise en effet : « Leur argumentation aurait eu moins de force après le 1er janvier 2005, puisque en vertu du e) du 7° du II de l'article 34 de la LOLF, peuvent figurer dans une loi de finances " toutes dispositions relatives à l'information et au contrôle du Parlement sur la gestion des finances publiques " ». Le commentaire poursuit l'explication en opposant la formulation précitée à celle, encore en vigueur en décembre 2004, employée dans l'ordonnance organique du 2 janvier 1959, qui vise les dispositions qui « sont destinées à organiser l'information et le contrôle du Parlement sur la gestion des finances publiques ». On ne sait si ces nuances de formules doivent être à ce point mises en exergue.

La censure de l'article instituant le Conseil des prélèvements obligatoires est motivée, dans la décision précitée, en ces termes : « s'il peut contribuer à l'information et au contrôle du Parlement, ses dispositions n'ont pas été prévues à cette fin ». Votre Rapporteur n'est pas persuadé que la distinction ainsi établie entre les expressions « relatives à l'information et au contrôle » et « destinées à [...] l'information et [au] contrôle » soit très significative. À la rigueur, on aurait pu recevoir une critique sémantique fondée sur la distinction entre l'information et le contrôle d'une part, et l'organisation de cette information et de ce contrôle d'autre part, car c'est bien ainsi que les commentateurs analysent le caractère extensif de la nouvelle rédaction, entrée en vigueur le 1er janvier dernier. Mais, même dans ce cas, une censure n'avait absolument rien d'évident.

Au demeurant, il est heureux que la LOLF ait fait sortir du domaine exclusif des lois de finances les dispositions relatives à l'information et au contrôle du Parlement en matière de finances publiques, sans quoi eût pu se présenter la situation ubuesque d'une censure du « cavalier » figurant dans la loi de finances pour 2005, sur le fondement de l'ordonnance organique de 1959, suivie du risque d'une censure des mêmes dispositions, contenues dans la loi ordinaire adoptée après le 1er janvier 2005, cette fois pour non-respect du domaine des lois de finances sur le fondement de la LOLF...

Il reste que, pour critiquable qu'elle soit, cette décision du Conseil constitutionnel a produit ses effets ; la présente proposition de loi se borne à en tirer les conséquences. Parmi les motivations conduisant votre Rapporteur à préconiser l'adoption conforme de ce texte, développées infra, figure aussi sans doute, pourquoi le nier, une forme de volonté du Parlement de réitérer son vote dans les mêmes termes qu'en décembre dernier. Comme si cette péripétie constitutionnelle ne faisait que retarder de quelques mois la promulgation de dispositions dont l'intérêt est manifeste.

II.- LE TEXTE ADOPTÉ PAR LE SÉNAT AURAIT MÉRITÉ DES MODIFICATIONS FORMELLES QUE LE SOUCI D'UNE PROMULGATION RAPIDE NE REND PAS INDISPENSABLES

A.- LA PROPOSITION DE LOI VOTÉE PAR LE SÉNAT A ÉTÉ LÉGÈREMENT AMENDÉE PAR RAPPORT AU TEXTE INITIAL

1.- Le texte transmis par le Sénat crée l'outil adéquat, élevé au niveau législatif

a) Une composition étoffée sans qu'une structure supplémentaire ne soit créée

La Commission des finances a eu l'occasion de souligner, en dernier lieu lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2005, combien elle était attentive à ce qu'aucune structure administrative supplémentaire ne soit créée sans que son utilité soit évidemment démontrée. Par conséquent, il n'est pas anodin de préciser que la Conseil des prélèvements obligatoires se substitue au Conseil des impôts. Cependant, une codification plus pertinente que celle prévue par la présente proposition de loi eût rendue superflue la mention explicite de cette substitution, à l'article L. 351-13. La rédaction proposée comporte en effet l'inconvénient de laisser subsister dans le livre III de la partie législative du code des juridictions financières un intitulé de titre III, « Le Conseil des impôts », sans aucun article correspondant.

L'article L. 351-5 élargit la composition du Conseil pour la faire passer de 11 à 17 membres ; le tableau suivant détaille cet élargissement :

Composition actuelle du Conseil des impôts

(art. D. 330-3 du code des juridictions financières)

Composition proposée pour le Conseil des prélèvements obligatoires

(art. L. 351-5 [nouveau] du code des juridictions financières)

Le Premier président de la Cour des comptes, président, éventuellement représenté par un président de chambre

Le Premier président de la Cour des comptes, président, éventuellement représenté par un président de chambre

Deux membres du Conseil d'État désignés par le vice-président du Conseil d'État

Un membre du Conseil d'État désigné par le vice-président du Conseil d'État

Deux magistrats de l'ordre judiciaire désignés par le Premier président de la Cour de cassation

Un magistrat de l'ordre judiciaire désigné par le Premier président de la Cour de cassation

Deux magistrats de la Cour des comptes désignés par le Premier président de la Cour des comptes

Un magistrat de la Cour des comptes désigné par le Premier président de la Cour des comptes

Deux inspecteurs généraux des finances désignés par le ministre chargé des finances

Un inspecteur général des finances désigné par le ministre chargé des finances

Un inspecteur général des affaires sociales désigné par le ministre chargé des affaires sociales

Un inspecteur général de l'INSEE désigné par le ministre chargé des finances

Un inspecteur général de l'INSEE désigné par le ministre chargé de l'économie et des finances

Un professeur agrégé des facultés de droit et de sciences économiques désigné par le ministre chargé des finances sur proposition du ministre chargé des universités

Deux professeurs agrégés des facultés de droit et de sciences économiques désignés respectivement par le ministre chargé de l'économie et des finances et par le ministre chargé des affaires sociales

Une personnalité qualifiée désignée par le ministre chargé de l'économie et des finances

Une personnalité qualifiée désignée par le ministre chargé des affaires sociales

Une personnalité qualifiée désignée par le ministre chargé de l'intérieur

Une personnalité qualifiée désignée par le président de l'Assemblée nationale après avis du président et le rapporteur général de la commission de l'Assemblée nationale chargée des finances

Une personnalité qualifiée désignée par le président de l'Assemblée nationale après avis du président de la commission de l'Assemblée nationale chargée des affaires sociales

Une personnalité qualifiée désignée par le président du Sénat après avis du président et du rapporteur général de la commission du Sénat chargée des finances

Une personnalité qualifiée désignée par le président du Sénat après avis du président de la commission du Sénat chargée des affaires sociales

Une personnalité qualifiée désignée par le président du Conseil économique et social

Soit un total de 11 membres

Soit un total de 17 membres

Il est précisé dans le dernier alinéa de l'article L. 351-5 que « Les personnalités désignées par le président de l'Assemblée nationale, le président du Sénat ou le président du Conseil économique et social ne peuvent appartenir à l'une de ces assemblées. ». Tout en souscrivant pleinement, sur le fond, à cette disposition, votre Rapporteur regrette que n'ait pas été retenue la formulation plus exacte figurant dans le commentaire du tome III du rapport général de notre collègue sénateur Philippe Marini sur l'article additionnel après l'article 70 quater que la commission des Finances proposait d'insérer dans la loi de finances, devenu l'article 112 du texte voté ; il mentionnait pertinemment le fait que ces personnalités qualifiées « ne pourraient pas être membres de l'Assemblée nationale, du Sénat ou du Conseil économique et social ». Sur le fond, l'absence de parlementaires au sein du Conseil est une bonne chose, dans la mesure où elle maintient un clair partage des rôles entre cette instance et le Parlement dans son rôle de législateur, d'instance de contrôle et de représentant des citoyens contribuables.

D'autre part, il convient de saluer l'ouverture du Conseil à des membres qui ne seront pas issus de la fonction publique. Non pas que les fonctionnaires participant aux travaux du conseil des impôts n'aient pas, jusqu'ici, fait la preuve de leur compétence. Mais il paraît sain de permettre, par exemple, à des praticiens issus du monde de l'entreprise ou du conseil juridique en matière fiscale, d'apporter leur éclairage sur les thèmes qui seront abordés par le Conseil.

Quant aux règles relatives à la durée du mandat des membres, prévues à l'article L. 351-6, elles reprennent celles actuellement en vigueur au Conseil des impôts : un mandat de deux ans renouvelable une fois. Le mimétisme va même jusqu'à prévoir, afin de garantir une certaine stabilité à l'institution, la désignation par tirage au sort, au moment de la constitution du Conseil, de huit des seize membres (hors le président bien entendu) pour quatre ans plus un éventuel mandat supplémentaire de deux ans. Enfin, au second alinéa, est introduite la précision selon laquelle le remplacement d'un membre intervenu moins d'un an avant l'expiration de son mandat permet au nouveau titulaire de briguer, en sus de ce « reliquat », deux mandats pleins.

Autre précision, qui entérine dans le texte le fonctionnement actuel du Conseil : l'article L. 351-7 consacré au secrétariat, dont il est dit qu'il est assuré par la Cour des comptes. Le secrétaire général du Conseil des impôts est aujourd'hui un conseiller maître, qu'assiste un attaché.

Par ailleurs, l'article L. 351-8 élargit la référence faite aux rapporteurs auprès du Conseil des prélèvements obligatoires. Alors que le décret n° 73-122 du 8 février 1973 venu modifier le décret de 1971 fixait, dans des dispositions codifiées à l'article D. 330-5 du code des juridictions financières, l'origine des rapporteurs de façon limitée, comme devant appartenir à la Cour des comptes, au Conseil d'État, à l'inspection générale des finances ou à l'Insee, il est proposé de ne plus fixer une quelconque barrière : « Le Conseil des prélèvements obligatoires peut faire appel à toute compétence extérieure de son choix. » Du reste, en évitant sagement l'excès de détails, le texte proposé permet aussi de couvrir la pratique actuelle, selon laquelle le Conseil des impôts s'adjoint ponctuellement les services de « chargés d'études » n'appartenant à aucun des corps de fonctionnaires précités − des fonctionnaires parlementaires par exemple −, à la limite des textes.

Enfin, l'article L. 351-9 dresse une liste de personnalités appelées, ès qualités et sans voix délibérative, à assister, en personne ou par le truchement d'un représentant, aux réunions du Conseil des prélèvements obligatoires, « afin d'assurer [son] information » :

− le directeur de la sécurité sociale ;

− le directeur du budget ;

− le directeur général du Trésor et de la politique économique ;

− le directeur de la législation fiscale ;

− le directeur général des collectivités locales.

Établie sans ordre logique apparent, cette liste n'a d'autre but que de refléter la diversité nouvelle des missions du Conseil des prélèvements obligatoires. On peut d'ailleurs discuter le caractère législatif de cet article. Il est pourtant le point du texte qui a fait l'objet de l'essentiel des modifications − mineures − apportées par rapport à la rédaction initiale.

b) Un « changement de dimension juridique » pour l'institution

La transformation d'une instance de niveau réglementaire en instance de niveau législatif n'est pas la moindre des avancées contenues dans la réforme proposée. Outre la question du « prestige » de l'institution, l'aspect juridique du sujet ne peut être négligé. De ce point de vue, plusieurs éléments permettent d'affirmer que le basculement du Conseil de la partie réglementaire vers la partie législative du code des juridictions financières repose bien sur des considérations de droit.

En premier lieu, le conseil pourra être saisi par les commissions des finances des deux assemblées, ce que prévoit l'article L. 351-3 et qui n'est pas possible dans la configuration actuelle. Ensuite, l'indépendance des membres du Conseil est notoirement renforcée, sur un plan matériel mais surtout sur le plan des principes, ce qui n'est pas superflu si l'on veut bien considérer les implications politiques, juridiques et administratives que comporte l'analyse critique de notre système de prélèvements obligatoires. L'article L. 351-11 dispose ainsi :

« Dans l'exercice des missions qu'[ils] accomplissent pour le Conseil des prélèvements obligatoires, les [membres du Conseil et de son secrétariat ainsi que ses rapporteurs] ne peuvent solliciter ou recevoir aucune instruction du Gouvernement ou de toute autre personne publique ou privée. »

La soumission au secret professionnel de ces mêmes personnes, prévue à la phrase suivante et pénalement sanctionnée (13), doit ici être soulignée, ainsi que, dans une moindre mesure, la possibilité pour les membres du Conseil de joindre à ses rapports des « contributions personnelles » (article L. 351-2). S'agissant de l'assujettissement au secret professionnel, l'exposé des motifs de la proposition de loi initiale note avec justesse qu'il « pourrait paraître contradictoire avec la présence [au sein du Conseil] de représentants du ministère de l'Économie, des finances et de l'industrie, ainsi que du ministère des Affaires sociales, qui ne peuvent, en pratique, être également soumis au secret professionnel. On retrouve toutefois cette situation dans le statut de l'Autorité des marchés financiers : le commissaire du gouvernement n'est pas soumis, contrairement aux membres, au secret professionnel. »

En outre, les règles de nomination des membres du Conseil (article L. 351-5), qui sont aussi un gage d'indépendance, sont mieux garanties par une loi, ne serait-ce que parce que quatre membres du conseil seront nommés par les autorités parlementaires. De même, les pouvoirs d'accès à l'information des membres et des rapporteurs, du fait de leur caractère sensiblement étendu, trouvent bien leur place dans un texte de niveau législatif. Tel est l'objet de l'article L. 351-10, dont la formulation va bien au-delà de celle de l'actuel article  D. 330-5, lequel n'évoque qu'un recueil d'informations, « notamment auprès des services dépendant du ministre de l'Économie et des finances », quand le texte proposé pose le principe d'un « libre accès aux services, établissements, institutions et organismes entrant dans [le] champ de compétences » des membres et des rapporteurs. Le second alinéa précise : « Ceux-ci sont tenus de leur prêter leur concours, de leur fournir toutes justifications et tous renseignements utiles à l'accomplissement de leurs missions. » Autant de dispositions non détachables du reste du texte, qui le marquent suffisamment, aux yeux de votre Rapporteur, pour lui conférer valeur législative.

Au demeurant, le Conseil constitutionnel lui-même, dans sa décision du 29 décembre dernier, a implicitement entériné le « changement de dimension juridique » de l'institution. On peut raisonnablement penser, en effet, ne serait-ce qu'à raison des prises de position publiques de son Président (14), que le Conseil constitutionnel ne se serait pas privé de dénoncer le non-respect du partage entre les domaines de la loi et du règlement, s'il avait pu trouver matière à soulever d'office ce moyen.

2.- De très légères modifications ont été apportées par la Commission et le Gouvernement

L'intention des auteurs de la présente proposition de loi a été amplement rappelée : reprendre, telles quelles, les dispositions votées en loi de finances pour 2005. Cependant, cinq modifications mineures ont été jugées à la fois assez modestes pour être incluses dans le texte sans bouleverser l'économie du dispositif de l'article 112 censuré, et assez pertinentes pour que cet article initial ne soit pas repris mot à mot. Il s'agit :

− de la nouvelle rédaction de la dernière phrase de l'article L. 351-2, censée rendre plus explicite la publication, en annexe des rapports du Conseil des prélèvements obligatoires, d'éventuelles « opinions dissidentes » de certains de ses membres ;

− de l'ajout d'un dix-septième membre à la liste de l'article L. 351-5, une personnalité qualifiée désignée par le ministre de l'Intérieur, pour inclure de la façon la plus explicite les prélèvements obligatoires perçus au profit des administrations publiques locales dans le champ de compétences du Conseil ;

− de la modification pour coordination, au premier alinéa de l'article L. 351-6, du nombre des membres ;

− d'une forme de coordination également, à l'article L. 351-9, avec la mention du directeur général des collectivités locales parmi les directeurs d'administration centrale conviés sans voix délibérative aux travaux du Conseil ;

− de la substitution, dans cette même liste, du directeur général du Trésor et de la politique économique au directeur de la Prévision et de l'analyse économique, pour tenir compte de la réorganisation récente de l'administration centrale du ministère de l'Économie, des finances et de l'industrie.

À la différence des quatre premières citées, issues des travaux de la commission, la dernière modification a été introduite par un amendement du Gouvernement.

D'autres modifications, sans être inutiles, n'eussent pas été tout à fait opportunes, et conduiront par conséquent votre Rapporteur à recommander une adoption conforme du texte transmis par le Sénat.

B.- QUELQUES MODIFICATIONS SUPPLÉMENTAIRES AURAIENT PERMIS DE PARFAIRE LE TRAVAIL PARLEMENTAIRE MAIS NE S'IMPOSENT PAS EN OPPORTUNITÉ

À l'évidence, le travail parlementaire est toujours perfectible. C'est la raison pour laquelle votre Rapporteur a tenu à recenser scrupuleusement toutes les améliorations qu'il paraissait possible d'apporter à un texte qui, initialement, avait pu pâtir des conditions rapides d'examen qui sont le lot des dispositions introduites en cours de navette dans le projet de loi de finances.

Les développements qui suivent ont autant pour but d'illustrer ce caractère perfectible que de justifier la position de votre Rapporteur quant à l'adoption conforme du texte : c'est en toute connaissance de cause et après une concertation approfondie avec les auteurs de la proposition qu'il est préconisé de ne pas retenir les modifications qui suivent.

1.- Un certain nombre de questions substantielles auraient pu être précisées

Parmi les quelques modifications de fond qui pouvaient être proposées figurent la question de la rémunération des personnalités qualifiées membres du Conseil des prélèvements obligatoires et de ses rapporteurs, la suppression de quelques dispositions réglementaires, la précision des modalités de désignation des personnalités qualifiées nommées par les Présidents des deux assemblées, l'éventuelle opposabilité de certains secrets aux demandes d'information des membres et rapporteurs du Conseil, ainsi que l'aménagement de la liste des directeurs susceptibles d'assister à ses réunions.

Les modalités actuelles de rémunération des membres du Conseil des impôts et des personnes qui lui prêtent leur concours sont fixées par un décret et un arrêté du 1er août 2000 (15). Sont ainsi prévues :

- une indemnité de 700 francs (106,71 euros) par séance en faveur des membres du conseil, dans la limite d'un plafond annuel de 9.100 francs (1.387,29 euros) ;

- une indemnité mensuelle plafonnée à 6.000 francs (914,69 euros) en faveur du rapporteur général du conseil, assortie du plafond annuel correspondant ;

- une indemnité mensuelle plafonnée à 4.000 francs (609,80 euros) en faveur des rapporteurs, assortie du plafond annuel correspondant ;

- une indemnité mensuelle plafonnée à 3.000 francs (457,35 euros) en faveur du secrétaire général du conseil, assortie du plafond annuel correspondant ;

- des vacations horaires accordées aux chargés d'études auprès du conseil, au taux unitaire de 180 francs (27,44 euros) dans la limite annuelle de cent fois ce montant, le président du Conseil des impôts étant chargé d'apprécier le nombre de vacations selon l'importance du travail effectué.

Enfin, l'arrêté précise que les crédits budgétaires afférents à la rémunération des rapporteurs et des chargés d'études sont calculés sur la base du plafond annuel autorisé pour un effectif de six rapporteurs et trois chargés d'études.

Dès lors, l'article L. 351-12 du texte proposé, qui traite de la question des rémunérations, soulève un certain nombre de questions. En premier lieu, cet article élève au niveau législatif des dispositions qui relèvent plutôt du pouvoir réglementaire, et une simple mention du régime indemnitaire à l'article L. 351-13, parmi les matières que le décret d'application doit contenir, eût sans doute suffi.

Ensuite, le flou de la rédaction aux termes de laquelle les personnes rémunérées doivent l'être « dans des conditions propres à assurer leur indépendance » peut susciter des problèmes d'interprétation. En effet, quelle rémunération est-elle propre à assurer l'indépendance d'un fonctionnaire en activité ? d'un avocat fiscaliste de renom ? d'un enseignant en retraite ? La question risque de se poser pour chaque personnalité qualifiée et chaque rapporteur.

Enfin, il n'est pas impossible que surgisse le problème de la « professionnalisation » des personnes appelées à apporter leur concours au Conseil des prélèvements obligatoires, comme membre ou comme rapporteur.

S'agissant des dispositions de la proposition qui semblent ressortir au domaine du règlement plutôt qu'à celui de la loi, votre Rapporteur en a recensé un certain nombre mais a vite dû convenir de leur caractère à la fois utile et peu susceptible de modifications ultérieures fréquentes, ôtant ainsi toute nécessité absolue à leur suppression.

En se penchant sur les modalités de désignation par les présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat de quatre personnalités qualifiées appelées à siéger au Conseil des prélèvements obligatoires, votre Rapporteur s'est interrogé sur la possibilité de prévoir, préalablement à cette désignation, au lieu d'un simple « avis » des Présidents et rapporteurs généraux des commissions chargées des finances − et des Présidents des commissions chargées des affaires sociales −, comme le dispose l'article L. 351-5, une procédure d'avis conforme, voire de proposition. « Sur proposition » : l'expression figure en effet dans le tome III du rapport général de notre collègue sénateur Philippe Marini dans son commentaire de l'article additionnel après l'article 70 quater que la commission des Finances proposait d'insérer dans la loi de finances, devenu l'article 112 du texte voté.

À la réflexion toutefois, il semble préférable de laisser à chaque assemblée le soin de déterminer son propre mode de désignation interne, la formulation souple permettant à la pratique de se fixer au mieux.

Alors que les pouvoirs « d'investigation » des membres et rapporteurs du Conseil des prélèvements obligatoires sont sensiblement élargis, on aurait pu envisager de fixer dans la loi les limites dans lesquelles ces pouvoirs seront exercés, et en particulier l'opposabilité de certains secrets, tel le secret médical, celui de l'instruction, ou encore le respect de la vie privée.

Il demeure que des demandes d'information qui tendraient à violer ces principes sont très hypothétiques et que, du reste, un juge ne manquerait pas de poser, en fonction du cas d'espèce qui pourrait lui être soumis, de telles limites, tant elles s'imposent d'elles-mêmes. Le texte ne peut être regardé comme dérogeant à de tels principes.

Enfin, on pouvait suggérer un aménagement de la liste des directeurs d'administration centrale appelés à assister, sans voix délibérative, à certaines réunions du Conseil, mais ces points de détail n'ont pas besoin d'être fixés dans la loi. On imagine mal d'ailleurs le Premier président de la Cour des comptes, président du Conseil des prélèvements obligatoires, s'interdire de convier tel directeur aux travaux du Conseil, au motif qu'il ne serait pas mentionné à l'article L. 351-9 du code des juridictions financières, ou le directeur en question exciper de cette lacune pour ne pas répondre à l'invitation.

Possibles, toutes ces modifications ne sont pas évidemment indispensables. À plus forte raison peut-on se passer des quelques aménagements de forme envisageables.

2.- Des modifications formelles étaient également possibles

La plus importante modification de forme que pouvait appeler ce texte en l'état, sinon la seule digne d'être mentionnée ici, concerne la codification proposée. L'inconvénient a d'ailleurs déjà été évoqué supra : un titre V étant introduit dans le livre III de la partie législative du code des juridictions financières, y subsistera un titre III intitulé « Le Conseil des impôts », dépourvu, demain comme aujourd'hui, de tout article, et plus inutile encore demain dans la mesure où les articles réglementaires correspondants auront eux aussi disparu.

Il était sans doute de meilleure technique législative de rédiger ce titre III et de ne pas créer de titre V. Mais fallait-il pour cette seule raison de forme entamer une navette supplémentaire sur ce texte ?

Les autres modifications que votre Rapporteur a recensées méritent à peine une mention. Acceptables comme amendements de moindre importance dans le cadre d'un travail de réécriture d'une ou plusieurs dispositions essentielles du texte, elles deviennent superfétatoires, dès lors qu'elles seraient à elles seules responsables d'une lecture supplémentaire de la présente proposition de loi, qui peut tout à fait être votée en l'état. Ne citons donc que pour mémoire le regroupement dans le paragraphe II de l'ensemble des dispositions transitoires ou les modifications rédactionnelles susceptibles d'alléger ou de préciser la formulation de tel article.

À la satisfaction donc de peaufiner un ouvrage déjà parfaitement applicable, votre Rapporteur préfère adopter une démarche pragmatique et responsable. L'encombrement du calendrier parlementaire faisant craindre une application différée de ce texte si une lecture supplémentaire devait être provoquée, la priorité aujourd'hui est d'éviter tout atermoiement. « Tout bien considéré » − l'expression est à entendre littéralement −, le bon travail législatif en l'occurrence conduit à adopter conforme un texte qui n'a déjà que trop attendu.

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EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa séance du mercredi 23 mars 2005, la commission des Finances, de l'économie générale et du plan a examiné la proposition de loi, adoptée par le Sénat, tendant à créer un Conseil des prélèvements obligatoires (n° 2061).

Votre Rapporteur a estimé que ce texte, d'apparence modeste, n'en aurait pas moins des effets importants en termes de qualité de l'information de la Commission des finances sur l'évolution des prélèvements obligatoires, et au-delà, sur la qualité de l'expertise française en matière de finances publiques.

L'examen de la proposition de loi n'est pas une « revanche » du Parlement sur le Conseil constitutionnel, même si chacun se rappelle sa décision du 29 décembre dernier, censurant l'article 112 de la loi de finances pour 2005, qui instituait un Conseil des prélèvements obligatoires en lieu et place de l'actuel Conseil des impôts. Cette censure suscite des interrogations, mais plutôt que de s'attarder sur ce contretemps, il est préférable de se focaliser sur le présent et de se féliciter de cette occasion de discuter spécifiquement de ce sujet, hors de l'urgence qui caractérise l'examen de la loi de finances. La proposition de loi a été adoptée le 8 février dernier par le Sénat. Déposée par MM. Jean Arthuis et Philippe Marini, elle reprenait intégralement le texte de l'article 112 de la loi de finances, issu des travaux de la commission mixte paritaire, et le Sénat n'y a adjoint qu'un amendement du gouvernement : parmi les directeurs d'administration centrale pouvant assister, sans voix délibérative, aux réunions du Conseil des prélèvements obligatoires, il convenait de substituer au directeur de la Prévision et de l'analyse économique le directeur général du Trésor et de la politique économique, pour tenir compte de la réorganisation récente de l'administration centrale de Bercy.

Le Conseil des impôts a été créé par un décret du 22 février 1971, et les dispositions qui le régissent sont aujourd'hui codifiées dans la partie réglementaire du code des juridictions financières. On pourrait ne voir dans le « basculement » de cette institution de la partie réglementaire vers la partie législative du code qu'une mesure d'affichage, ou bien un empiétement du législateur sur le domaine du règlement. Il n'en est rien : non seulement ce texte contient bien des mesures qui ressortissent au domaine de la loi, mais, mieux encore, il confère à l'institution concernée une dimension nouvelle qui justifie qu'on donne davantage de lustre au Conseil des impôts, tout en prenant largement appui sur l'existant, étant donné la qualité du travail accompli. Plusieurs dispositions, non détachables du reste du texte, justifient le caractère législatif du futur Conseil des prélèvements obligatoires : en premier lieu, ce Conseil pourra être saisi par chacune des commissions des Finances des deux assemblées, ce qui n'est pas possible dans la configuration actuelle.

L'indépendance des membres est notoirement renforcée, sur un plan matériel, mais surtout sur le plan des principes, dans une formulation solennelle qui n'est pas superflue si l'on veut bien considérer les implications politiques, juridiques et administratives que comporte l'analyse critique de notre système de prélèvements obligatoires. La soumission au secret professionnel des membres et des rapporteurs doit aussi être soulignée. Les règles de nomination des membres du Conseil, qui sont aussi un gage d'indépendance, seront mieux garanties par une loi, ne serait-ce que parce que quatre membres du Conseil seront nommés par les autorités parlementaires. De même, les pouvoirs d'accès à l'information des membres et des rapporteurs, du fait de leur caractère sensiblement étendu, trouvent bien leur place dans un texte de niveau législatif. Au demeurant, le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 29 décembre dernier, n'a pas condamné en lui-même le « changement de dimension juridique » de l'institution. On peut raisonnablement penser en effet, ne serait-ce qu'à raison des prises de position publiques de son Président et de traits récents de sa jurisprudence, que le Conseil constitutionnel ne se serait pas privé de dénoncer le non-respect du partage entre les domaines de la loi et du règlement, s'il avait trouvé matière à soulever ce moyen.

Au-delà de ces motifs formels, une raison de fond motive la démarche du législateur, aujourd'hui comme à l'automne dernier : plus que jamais, le besoin existe de mieux appréhender la richesse prélevée sur les contribuables. Non pas parce que ce prélèvement, mesuré en pourcentage de la richesse nationale produite annuellement, aurait augmenté dans des proportions considérables : il est resté, en France, à peu près le même qu'il y a vingt ans, autour de 44 % du PIB. Mais derrière cette stabilité de façade se sont produits de très importants changements dans la structure des prélèvements obligatoires. Ceux-ci sont aujourd'hui plus nombreux, plus morcelés, différemment répartis. Selon l'INSEE, en 2003, les « impôts au sens strict » représentaient 62,2 % des prélèvements obligatoires, et les cotisations sociales 37,8 %. S'ajoute à cela le fait que des impôts financent une part croissante de la protection sociale, qui accapare 47,5 % du total des prélèvements, contre 24,9 % en moyenne dans les pays non fédéraux de l'OCDE en 2001. Les impôts financent aussi la contribution française au budget de l'Union européenne et, toujours pour une part croissante, les collectivités territoriales. Un certain « régionalisme fiscal » est devant nous. En somme, l'horizon fiscal s'élargit, le champ des prélèvements obligatoires devient plus complexe : il est tout à fait opportun de mettre sur pied une instance à même d'analyser cette situation en toute objectivité, et si, comme on le pressent, elle y décèle des tendances dommageables ou des réformes nécessaires, elle pourra guider les décisions qu'il appartiendra au Parlement de prendre. La commission des Finances aura le loisir de choisir à l'avenir des thèmes d'études très précis à soumettre au Conseil des prélèvements obligatoires.

Concrètement, l'élargissement du champ d'action de l'actuel Conseil des impôts doit se traduire de façon visible par le passage de sa composition de 11 à 17 membres, sous l'effet de la présence, au sein du Conseil des prélèvements obligatoires, d'un inspecteur général des affaires sociales, d'un deuxième professeur des universités et de huit personnalités qualifiées désignées par les ministres de l'Économie et des finances, des Affaires sociales et de l'Intérieur, ainsi que par chacun des présidents des deux assemblées et par le président du Conseil économique et social. Cette composition doit être la garantie d'un travail encore plus riche et plus complet qu'aujourd'hui. Il n'est pas question de créer un comité supplémentaire, mais bien de substituer une structure nouvelle à une structure existante. Il faut par ailleurs préciser qu'en aucune manière, contrairement à ce qui a pu être prétendu, en particulier au cours des débats au Sénat, la réforme proposée ne constitue une démarche de « représailles » contre le dernier rapport du Conseil des impôts sur la concurrence fiscale et l'entreprise. On voit mal d'ailleurs quelle « sanction » on pourrait trouver dans cette proposition de loi, qui, au contraire, s'appuie largement sur l'institution actuelle en reprenant le principe d'une présidence assurée par le Premier président de la Cour des comptes et en s'inscrivant dans une forme de continuité en termes de méthodes de travail. La date d'entrée en vigueur du texte, soit le 1er octobre prochain, a été choisie afin de permettre au Conseil des impôts de publier son 23e rapport et à ses membres d'achever leur mandat de deux ans. En outre, le Conseil lui-même avait exprimé publiquement, dans son rapport de 2000, le souhait de disposer de moyens renforcés, pour que soient améliorées l'information du citoyen-contribuable et la qualité, comme le volume de l'expertise fiscale indépendante en France.

En conclusion, votre Rapporteur a fait valoir que, bien que n'ayant déposé aucun amendement, il reconnaissait le caractère perfectible du texte. Mais à la satisfaction, personnelle, de modifier à la marge tel ou tel point de cette proposition de loi, a été préféré, après mûre réflexion et après une concertation approfondie avec les auteurs de la proposition, le souci de favoriser son adoption rapide dans le respect du vote émis sur le projet de loi de finances pour 2005. Après une recension de toutes les améliorations possibles, s'est imposée la conclusion qu'une adoption conforme de ce texte était la meilleure solution, compte notamment tenu d'un calendrier parlementaire chargé et récemment raccourci par la perspective d'une suspension des travaux au mois de mai. En conséquence, votre Rapporteur a préconisé l'adoption, en l'état, de la proposition de loi.

M. Didier Migaud a souligné que le texte n'était ni intéressant, ni consensuel, ni urgent. Cette proposition de loi n'a sans doute pas pour objectif de prendre une revanche sur une décision du Conseil constitutionnel, mais elle constitue une réaction suite à un rapport du Conseil des impôts qui a déplu. L'élargissement de la composition du Conseil ne constitue pas une garantie d'indépendance. Au contraire, ces personnalités seront nommées par des personnes politiques, qui ont d'ailleurs toutes aujourd'hui la même couleur politique. Cette réforme présente, de ce fait, un réel risque de déstabilisation.

Votre Rapporteur a rappelé que le texte renforçait, au contraire, les compétences du Conseil en élargissant son champ d'action à l'ensemble des prélèvements obligatoires et des charges sociales. De plus, les règles concernant le secret professionnel et l'interdiction de recevoir des consignes politiques garantissent l'indépendance des membres.

Le Président Pierre Méhaignerie a indiqué qu'il enverrait un courrier aux Présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat afin que, parmi les personnalités nommées, figure un membre proche de l'opposition. Cette proposition de loi corrige une faiblesse du dispositif actuel qui était que les personnes qui ont une expérience de terrain ne prennent pas part à la réflexion du Conseil des impôts. Cette nouvelle proposition permettra de donner une plus grande place aux praticiens.

M. Didier Migaud a noté que l'éventuelle nomination d'une personnalité proche de l'opposition n'était pas suffisante et que la critique tenant à la composition du Conseil des impôts est infondée : la composition actuelle permet de laisser une place à des praticiens tels que des magistrats de la Cour de cassation, confrontés quotidiennement aux problématiques de la fiscalité. Par ailleurs, rien ne garantit que les personnes nommées auront une expérience de terrain.

Le Président Pierre Méhaignerie a souligné que cette réforme devrait permettre une plus grande représentativité du Conseil des prélèvements obligatoires et constituerait, par conséquent, un véritable enrichissement.

Puis la Commission a adopté, sans modification, l'article unique de cette proposition.

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TABLEAU COMPARATIF

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Texte adopté par le Sénat

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Propositions de la Commission

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Article unique

Article unique

I. - Le livre III du code des juridictions financières est complété par un titre V ainsi rédigé :

(Sans modification).

« TITRE V

« LE CONSEIL DES PRELEVEMENTS
OBLIGATOIRES

« CHAPITRE UNIQUE

« Art. L. 351-1. - Il est institué un Conseil des prélèvements obligatoires, placé auprès de la Cour des comptes et chargé d'apprécier l'évolution et l'impact économique, social et budgétaire de l'ensemble des prélèvements obligatoires, ainsi que de formuler des recommandations sur toute question relative aux prélèvements obligatoires.

« Art. L. 351-2. - Le Conseil des prélèvements obligatoires remet chaque année au Président de la République et au Parlement un rapport rendant compte de l'exécution de ses travaux. Le compte rendu des débats et les contributions personnelles de ses membres peuvent être joints au rapport.

« Art. L. 351-3. - Le Conseil des prélèvements obligatoires peut être chargé, à la demande du Premier ministre ou des commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat chargées des finances ou des commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat chargées des affaires sociales, de réaliser des études relatives à toute question relevant de sa compétence. Les résultats de ces études sont transmis au Premier ministre et aux commissions.

« Art. L. 351-4. - Le Conseil des prélèvements obligatoires est présidé par le Premier président de la Cour des comptes. Celui-ci peut se faire représenter par un président de chambre. En cas de partage égal des voix, il a voix prépondérante

« Art. L. 351-5. - Le Conseil des prélèvements obligatoires est constitué, outre son président, de huit magistrats ou fonctionnaires, choisis pour leurs compétences en matière de prélèvements obligatoires, ainsi que de huit personnalités qualifiées choisies à raison de leur expérience professionnelle :

« - un membre du Conseil d'Etat, désigné par le vice-président du Conseil d'Etat ;

« - un magistrat de l'ordre judiciaire désigné par le Premier président de la Cour de cassation ;

« - un magistrat de la Cour des comptes désigné par le Premier président de la Cour des comptes ;

« - un inspecteur général des finances désigné par le ministre chargé de l'économie et des finances ;

« - un inspecteur général des affaires sociales désigné par le ministre chargé des affaires sociales ;

« - un inspecteur général de l'Institut national de la statistique et des études économiques désigné par le ministre chargé de l'économie et des finances ;

« - deux professeurs agrégés des facultés de droit et de sciences économiques désignés respectivement par le ministre chargé de l'économie et des finances et par le ministre chargé des affaires sociales ;

« - une personnalité qualifiée désignée par le ministre chargé de l'économie et des finances ;

« - une personnalité qualifiée désignée par le ministre chargé des affaires sociales ;

« - une personnalité qualifiée désignée par le ministre chargé de l'intérieur ;

« - une personnalité qualifiée désignée par le président de l'Assemblée nationale après avis du président et du rapporteur général de la commission de l'Assemblée nationale chargée des finances ;

« - une personnalité qualifiée désignée par le président de l'Assemblée nationale après avis du président de la commission de l'Assemblée nationale chargée des affaires sociales ;

« - une personnalité qualifiée désignée par le président du Sénat après avis du président et du rapporteur général de la commission du Sénat chargée des finances ;

« - une personnalité qualifiée désignée par le président du Sénat après avis du président de la commission du Sénat chargée des affaires sociales ;

« - une personnalité qualifiée désignée par le président du Conseil économique et social.

« Les personnalités désignées par le président de l'Assemblée nationale, le président du Sénat ou le président du Conseil économique et social ne peuvent appartenir à l'une de ces assemblées.

« Art. L. 351-6. - Les membres du Conseil des prélèvements obligatoires autres que son président sont désignés pour deux ans et leur mandat peut être renouvelé une fois. Cependant, à titre exceptionnel, huit des seize membres désignés en 2005, tirés au sort dans les deux mois suivant la nomination de tous les membres, le sont pour une période de quatre ans et leur mandat peut être renouvelé une fois pour une période de deux ans.

« En cas de vacance, pour quelque cause que ce soit, d'un siège autre que celui du président, il est procédé à son remplacement pour la durée restant à courir du mandat. Un mandat exercé pendant moins d'un an n'est pas pris en compte pour l'application de la règle de renouvellement fixée à l'alinéa précédent.

« Art. L. 351-7. - Le secrétariat du Conseil des prélèvements obligatoires est assuré par la Cour des comptes. Les agents chargés du secrétariat peuvent assister aux réunions du conseil.

« Art. L. 351-8. - Le Conseil des prélèvements obligatoires peut faire appel à toute compétence extérieure de son choix. En particulier, le conseil peut désigner des rapporteurs chargés de recueillir les informations nécessaires à l'exercice de ses missions.

« Art. L. 351-9. - Afin d'assurer l'information du Conseil des prélèvements obligatoires, le directeur de la sécurité sociale, le directeur du budget, le directeur général du Trésor et de la politique économique, le directeur de la législation fiscale et le directeur général des collectivités locales assistent, à la demande de son président, à ses réunions, sans voix délibérative, ou s'y font représenter.

« Art. L. 351-10. - Pour l'exercice de leurs missions, les membres du Conseil des prélèvements obligatoires et les rapporteurs désignés en application de l'article L. 351-8 ont libre accès aux services, établissements, institutions et organismes entrant dans leur champ de compétences.

« Ceux-ci sont tenus de leur prêter leur concours, de leur fournir toutes justifications et tous renseignements utiles à l'accomplissement de leurs missions.

« Art. L. 351-11. - Dans l'exercice des missions qu'elles accomplissent pour le Conseil des prélèvements obligatoires, les personnes visées aux articles L. 351-5, L. 351-7 et L. 351-8 ne peuvent solliciter ou recevoir aucune instruction du Gouvernement ou de toute autre personne publique ou privée. Elles sont tenues au secret professionnel sous peine des sanctions prévues à l'article 226-13 du code pénal et sous réserve des dispositions de l'article 226-14 du code pénal.

« Art. L. 351-12. - Les personnalités qualifiées visées à l'article L. 351-5 et les rapporteurs visés à l'article L. 351-8 sont rémunérées dans des conditions propres à assurer leur indépendance.

« Art. L. 351-13. - Les conditions de fonctionnement du Conseil des prélèvements obligatoires et les modalités de suppression du Conseil des impôts, auquel le Conseil des prélèvements obligatoires se substitue, sont précisées par décret en Conseil d'Etat. »

II. - Les dispositions du I entreront en vigueur à compter du 1er octobre 2005.

N° 2209 - Rapport de la commission des finances, de l'économie générale et du plan sur la proposition de loi adoptée par le Sénat, tendant à créer un Conseil des prélèvements obligatoires (rapporteur : M. Philippe Rouault)

1 () loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001.

2 () « Vingt ans de finances publiques », actes du colloque publiés sous le titre « Finances publiques : scénarios pour demain » dans la Revue française de finances publiques n° 87, septembre 2004.

3 () La CSG, quatorzième rapport au Président de la République, 1995.

4 () Par exemple, n'est-il pas regrettable qu'en dépit des dispositions de l'article D. 330-2 du code des juridictions financières, le ministre de l'Économie et des finances n'ait presque jamais sollicité le Conseil pour des « études relatives à l'élaboration ou [...] la mise en œuvre de certains aspects de la politique fiscale » ? Il faut souhaiter que le nouveau droit de saisine du Conseil des prélèvements obligatoires confié notamment aux commissions des finances des deux assemblées par la présente proposition de loi soit beaucoup plus largement exercé, dans l'intérêt du Parlement mais aussi du Conseil lui-même, du Gouvernement, de l'administration et du contribuable.

5 () Citons à titre d'illustration les « niches fiscales » (2003), les relations entre l'administration fiscale et le contribuable (2002), ou encore la fiscalité de l'immobilier urbain (1992).

6 () Il est présidé de droit par le Premier Président de la Cour des comptes et six de ses membres sont désignés par leurs chefs de corps respectifs, le vice-président du Conseil d'État, les premiers présidents de la Cour de cassation et de la Cour des comptes. Seuls quatre de ses membres sont choisis par une autorité ministérielle.

7 () Le ministre de l'économie et des finances a cependant la faculté de demander au Conseil des impôts des études « relatives à l'élaboration ou à la mise en œuvre de certains aspects de la politique fiscale ». Le rapport correspondant lui est alors remis, c'est-à-dire qu'il n'est pas nécessairement publié. Depuis la création du Conseil, le ministre a rarement usé de cette possibilité.

8 () En vingt-huit années d'existence, le Conseil des impôts a publié dix-sept rapports.

9 () On peut citer par exemple l'lnstitute of Taxation in Ireland (www.taxireland.ie), l'Instituto de Estudios fiscales (www.ies.es) espagnol ou bien le Zentrum für Europäische Wïrtschaftsforschung (ZEW) de Manheim, qui réalise aussi des études fiscales (www.zew.de).

10 () Elles découlent de l'obligation de secret professionnel visée à l'article L. 103 du Livre des Procédures Fiscales.

11 () L'article L. 135B du Livre des procédures fiscales impose en effet à la DGI de transmettre aux collectivités locales les rôles généraux des impôts directs locaux comportant des impositions émises à leur profit. De même, l'article L. 135D permet à l'INSEE, depuis 1996, de recevoir des informations nominatives à des fins exclusives de statistiques. L'accès à ces données est, bien entendu, subordonné à une décision de la CNIL autorisant le traitement automatisé de données nominatives selon les dispositions de la loi «Informatique et libertés » du 6 janvier 1978.

12 () La France se rapprocherait ainsi des pratiques observées dans les pays anglo-saxons où des données comparables sont plus largement diffusées auprès des chercheurs. L'administration fiscale américaine diffuserait ainsi chaque année depuis 1960 auprès de tous les chercheurs intéressés des fichiers de déclarations de revenus anonymisés, comprenant un échantillon de 100.000 déclarations.

13 () Sont expressément visés l'article 226-13 du code pénal, aux termes duquel « La révélation d'une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d'une fonction ou d'une mission temporaire, est punie d'un an d'emprisonnement et de 15.000 euros d'amende » et l'article 226-14 qui autorise dans certains cas le non-respect du secret.

14 () Vœux du Président du Conseil constitutionnel, M. Pierre Mazeaud, au Président de la République, le 3 janvier 2005 : « [...] il faut désormais lutter plus activement contre les intrusions de la loi dans le domaine réglementaire. C'est une de mes convictions les plus profondes et j'agirai dans ce sens jusqu'à la fin de mon mandat, en mars 2007. Que la loi empiète occasionnellement sur le domaine réglementaire, voilà qui est compréhensible dans certaines hypothèses [...]. Toutefois, le mal est profond : l'article 37 de la Constitution, qui fonde le pouvoir réglementaire autonome du Gouvernement, se vide de son contenu depuis une trentaine d'années. Nous portons tous notre part de responsabilité dans ce phénomène qui, depuis les années 1970, a vu la loi se gonfler de détails réglementaires. Peut-être le Conseil constitutionnel doit-il faire son autocritique à cet égard. [...] Une chose est que la loi soit claire, précise et normative, ce sur quoi nous devons redoubler de vigilance et de sévérité. Une autre qu'elle soit surchargée de détails. Il faut donc revenir à l'esprit des institutions, à la lecture qu'en faisait leur fondateur en 1958. »

15 () Décret n° 2000-746 du 1er août 2000 relatif aux indemnités susceptibles d'être allouées aux membres du Conseil des impôts et aux personnes qui lui prêtent leur concours et arrêté du même jour, parus au Journal officiel du 5 août 2000, page 12159.


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